II. UN ENJEU PARTAGÉ, DEUX OBJECTIFS CONSENSUELS

A. UN ENJEU PARTAGÉ

Dans la période récente, il est apparu nécessaire d'en finir avec une conception archaïque de la pratique budgétaire. Cette conception tient en deux affirmations :

Aux yeux des gestionnaires et des parlementaires, le « bon budget » ministériel, la bonne enveloppe de crédits pour un ministre, sont ceux qui augmentent davantage que l'ensemble du budget de l'Etat. Peu importe que cette augmentation soit réellement nécessaire au vue des finalités d'intérêt général servies par ces crédits.

De la même manière, le budget bien exécuté est celui qui a épuisé ses crédits. Peu importe qu'ils aient été employés à bon escient, ou gaspillés : la culture du « taux de consommation » fait de ce critère l'un des plus essentiels dans le jugement porté sur une gestion. Le mauvais gestionnaire serait donc celui qui n'a pas tout dépensé sur l'exercice !

Or, dans une situation de déficit et de dette publics encore élevés, l'enjeu d'utiliser de façon optimale toute ressource prélevée sur le contribuable apparaît fondamental aux yeux de tous. C'est cet enjeu partagé qui est à l'origine de la réforme. Il n'est pas nécessaire de dépenser moins dans l'absolu, mais d'optimiser l'utilisation de tout crédit public pour atteindre le meilleur rapport coût/efficacité.

Votre commission considère que pour y parvenir, il faut réformer l'Etat et que pour ce faire, il faut enclencher un cercle vertueux qui passe par la réforme des procédures budgétaires.

Cette rénovation a pour objet de mettre le meilleur instrument possible entre les mains des majorités politiques. Le budget est sans doute l'outil le plus important. Sa rénovation ne présume cependant en rien de l'utilisation qui peut en être faite. Il peut servir une politique de droite comme de gauche.

Pour gagner cet enjeu partagé, la réforme doit atteindre deux objectifs :

Moderniser la gestion publique pour réformer l'Etat ;

Rénover le rôle du Parlement dans la procédure budgétaire.

B. DEUX OBJECTIFS CONSENSUELS DANS LE RESPECT DES INSTITUTIONS DE LA CINQUIÈME RÉPUBLIQUE

Votre rapporteur est particulièrement attaché à l'esprit des institutions de la cinquième République. A ses yeux, les objectifs de la réforme ne se conçoivent que dans cette perspective.

La réforme est ainsi souvent présentée comme une sorte d'échange de bons procédés entre le Gouvernement et le Parlement : le Gouvernement bénéficierait de libertés supplémentaires dans l'exécution du budget ; en contrepartie, le Parlement verrait son influence s'accroître sur l'élaboration du budget et son information serait de meilleure qualité.

1. Deux objectifs consensuels

Pour votre commission, la réforme se présente moins comme un échange entre le Parlement et le Gouvernement que comme un tout cohérent :

C'est bien parce que les comptes de l'Etat ne sont pas convenablement présentés en prévision, comme en exécution, que l'autorisation parlementaire a peu de portée et que le Parlement est mal informé. Ainsi, on raisonne encore en comparant le budget de l'année n + 1 au budget de l'année n. Or, le budget de l'année n ne s'est jamais exécuté comme il était prévu, et celui de l'année n + 1 ne le sera pas davantage.

Votre rapporteur cite souvent l'exemple des crédits de construction de logements sociaux : nos collègues sont amenés à juger ces crédits en observant par exemple que le budget de l'année n est meilleur que celui de l'année n - 1 parce que pour n , on inscrit les crédits de 85.000 logements alors qu'en n - 1 on en avait prévu 80.000. Or, en exécution -c'est-à-dire dans la réalité- on ne dépasse pas 50.000 depuis plusieurs années, mais au moment du débat budgétaire, cette information, qui remonte à l'année n - 2 , n'est pas suffisamment prise en considération.

C'est aussi parce que le regard du Parlement a perdu de son acuité que les administrations n'ont pas été encouragées à se réformer. Ce n'est pas la première fois que la France tente d'introduire de la modernité dans la gestion budgétaire. Mais, la première fois, dans les années 60 et 70, elle l'a tenté sans impulsion ni regard parlementaire. Or, dans les pays démocratiques, la décision politique est irremplaçable par nature, et il ne peut en être autrement. En outre, la gestion publique doit être jugée et évaluée pour progresser : qui peut le faire de façon pertinente si ce n'est la représentation des Français, c'est-à-dire le Parlement ?

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