B. LA POLITIQUE FAMILIALE : UN CHANTIER LAISSÉ EN PLAN

1. Le renouveau démographique à accompagner

a) Un renouveau qui ne se dément pas

« Epiphénomène ou tendance de fonds ? », s'interrogeait le quotidien « Le Monde », en prélude à un article par ailleurs titré : « La France connaît depuis 1995 un mini baby-boom » 31 ( * ) .

Lors de la présentation d'un rapport d'information consacré au fonds d'investissement en faveur des crèches 32 ( * ) , votre rapporteur a déjà retracé l'ampleur de ce phénomène constaté par tous les instituts statistiques :

« Au début des années 1990, la courbe démographique de la France marquait une inflexion structurelle. Le nombre des naissances annuelles, toujours supérieur à 760.000 dans les années 1985-1990, était tombé à moins de 745.000 en 1992 et à environ 710.000 en 1993. (...)

« Or depuis cette date, la démographie française a connu un vif regain puisque le nombre annuel des naissances a été constamment supérieur aux 710.000 prévues, avoisinant les 730.000 pour les années 1995, 1996 et 1997, puis 740.000 en 1998.

« Cette évolution favorable s'accélère même puisque le nombre des naissances a atteint 780.000 en 2000. Ainsi que le souligne la courbe ci-dessous, le nombre annuel des naissances a ainsi crû de 10 % en cinq ans.

Nombre de naissances en France (1995-2000)
(en milliers)

Source : INSEE

« Votre rapporteur ne peut bien évidemment que se réjouir du regain de la natalité que connaît la France. Un tel regain améliore la situation démographique en termes de renouvellement des générations. Il témoigne également que le souhait d'un enfant a pu être réalisé par davantage de familles, ce qui est un signe éminemment positif. »

Rendu public le 9 octobre dernier, le rapport de l'Institut national des études démographique (INED) confirme qu'en 2001, le nombre des naissances serait aussi élevé qu'en 2000, année pourtant considérée comme exceptionnelle, en termes de natalité.

Si cette tendance devait donc se confirmer, l'indicateur conjoncturel de fécondité français, situé à 1,89 enfant par femme, serait le plus élevé de l'Union européenne.

Evolution de l'indicateur conjoncturel de fécondité
(Nombre d'enfants moyen par femme)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

France

1,7

1,72

1,71

1,75

1,79

1,89

Italie

1,18

1,18

1,19

1,19

1,23

1,25

Irlande

1,87

1,9

1,92

1,93

1,89

1,89

Allemagne

1,25

1,31

1,37

1,33

1,37

1,34

Espagne

1,18

1,17

1,16

1,15

1,2

1,22

Portugal

1,4

1,44

1,46

1,46

1,49

1,54

Suède

1,73

1,6

1,52

1,5

1,5

1,54

Royaume-Uni

1,71

1,73

1,72

1,72

1,68

1,64

Source : Observatoire démographique européen

b) Un coût naturel pour la branche

La forte augmentation des naissances génère mécaniquement des dépenses supplémentaires naturellement prises en charge par la branche famille.

Un certain nombre de ces naissances sont des enfants dits de « rang 2 ou supérieur » 33 ( * ) , ouvrant droit ou majorant le montant des allocations familiales perçues par les familles.

Répartition des femmes nées depuis 1945
selon le nombre final d'enfants nés vivants

Source : L. Toulemon et M. Mazuy, 2001 (d'après l'enquête Etude de l'histoire familiale, 1999), et statistique de l'état civil.

Représentant 20 % du total des prestations familiales, les prestations 34 ( * ) concernant la garde des enfants entre 0 et 3 ans devraient être fortement sollicitées.

Au sein d'un constat plus général, la Cour des comptes précise 35 ( * ) que « la taille de la famille intervient aussi pour le calcul des aides au logement, ce qui conduit à des montants d'aide et des taux de prise en charge fortement croissants avec le nombre d'enfants ».

Interrogée sur le coût moyen de chaque naissance supplémentaire, Mme Nicole Prud'homme, présidente de la CNAF, a déclaré 36 ( * ) ne pas disposer d'éléments précis mais a promis de faire parvenir prochainement à votre rapporteur une réponse écrite.

Au terme de ce constat, celui-ci s'interroge sur le succès apparemment paradoxal d'une politique familiale disposant de toujours moins de moyens. Le renouveau démographique tient en réalité à la période de forte croissance qu'a connue notre pays au cours des trois dernières années et de son effet fortement positif sur le moral des Français.

A ce titre, votre rapporteur exprime dès à présent ses craintes d'une nouvelle « déprime » démographique si la croissance venait à faiblir, comme cela semble se préciser.

* 31 Le Monde, mercredi 10 octobre 2001, p. 20.

* 32 Jean-Louis Lorrain : Le fonds d'investissement pour les crèches : les limites et les risques d'une opération ponctuelle, rapport d'information sur les fonds sociaux n° 382, p. 229-230.

* 33 C'est-à-dire un second, troisième enfant ou plus.

* 34 AFEMA, AGED, APE.

* 35 Rapport précisé, p. 348.

* 36 Audition de Mme Nicole Prud'homme par la commission des Affaires sociales, 17 octobre 2001.

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