B. DES MISSIONS DIVERSIFIÉES

1. Une mission première à revaloriser

a) Des prestations en perte de vitesse

La compensation des charges de famille par le biais des prestations légales représente 72 % des dépenses de la CNAF.

Ces prestations, à travers les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution de 1946, ont une existence constitutionnelle.

« La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. »

« Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. »

Enumérées à l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale, ces prestations sont les suivantes :

• les allocations familiales,

• le complément familial,

• l'allocation pour jeune enfant,

• l'allocation de logement,

• l'allocation d'éducation spéciale,

• l'allocation de soutien familial,

• l'allocation de rentrée scolaire,

• l'allocation de parent isolé,

• l'allocation parentale d'éducation,

• l'allocation d'adoption,

auxquelles, par cohérence, votre rapporteur ajoute l' allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) et l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA).

La ventilation des prestations légales au 31 décembre 2001

Source : DSS (SDEPF/6A)


Bilan des contrôles d'attribution des prestations familiales

L'article L. 583-3 du code de la sécurité sociale oblige les organismes débiteurs de prestations familiales à effectuer des contrôles sur l'exactitude des déclarations des allocataires.

En effet, faciliter l'accès aux droits, simplifier les formalités administratives conformément aux orientations de la loi du 12 avril 2000 est un objectif prioritaire des CAF, dont la contrepartie doit être l'effectivité et l'efficacité des politiques de contrôle et une grande rigueur de gestion des organismes débiteurs.

Il s'agit de contrôles a posteriori des déclarations. Ces contrôles sont générés par un changement de situation de l'allocataire, une situation délicate, la vérification d'une condition de droit particulière ou le renouvellement des droits aux prestations.

Un contrôle annuel est également réalisé à l'égard des allocataires bénéficiant des prestations sous condition de ressources. Il est mis en oeuvre à travers l'opération « transfert des données fiscales », testée en 1995 et généralisée en 1996, qui conduit à confronter les données relatives aux ressources entre les CAF et les services fiscaux (4,5 millions d'échanges).

Est en outre réalisé un transfert de données sociales, entre les caisses et les ASSEDIC (5,7 millions d'échanges), le CNASEA (centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles et l'ANPE.

En 2001, 3,28 millions de contrôles ont été effectués, c'est à dire un taux de 32,1 %. Les régularisations ont concerné 26 % des comptes contrôlés, dont 44 % sont des rappels (185.380 euros) et 56 % des indus (281.000 euros).

Toutefois, les cas de fraudes sont mineurs : 300 dossiers punis par les tribunaux, pour 700 dépôts de plaintes.

La convention d'objectifs et de gestion (COG) 2001-2004 prévoit la mise en place d'un plan global de maîtrise des risques en améliorant les politiques de ciblage des contrôle et les transferts de données, ainsi que le pilotage de la fonction de contrôle entre la CNAF et les CAF. Une charte de contrôle a en outre pour objectif de mieux informer l'allocataire sur cette question, en particulier sur ses possibilités de contestation et de recours, et de fixer des règles de déontologie.

Masse financière des prestations et évolutions

(en millions d'euros)

2000

2001

%

2002

%

2003

%

Total prestations familiales

30.242

31.237

3,3

32.455

3,9

33.260

2,5

Prestations d'entretien

16.863

17.148

1,7

17.474

1,9

17.763

1,6

Allocations familiales

10.957

11.097

1,3

11.274

1,6

11.442

1,5

Complément familial

1.534

1.565

2,0

1.563

- 0,1

1.551

+ 0,7

Allocation jeune enfant

2.754

2.799

1,6

2.938

2,4

2.938

2,4

Allocation d'adoption

4

3

- 8,5

3

2,2

3

1,8

Allocation de soutien familial

892

924

3,6

966

4,6

1.007

4,2

Allocation de parent isolé

722

754

4,3

789

4,7

806

2,2

Allocation de présence parentale

0

6

-

10

80,8

15

50

Prestations de garde

4.630

4.904

5,9

5.281

7,7

5.528

4,7

Allocation parentale d'éducation

2.800

2.904

3,7

3.008

3,6

3.090

2,7

AFEAMA

1.695

1.871

10,4

2.143

14,5

2.305

7,5

Allocation de garde d'enfant à domicile

133

129

- 2,9

129

0,1

133

3

Prestation pour l'éducation (ARS)

1.372

1.349

- 1,6

1.385

2,7

1.406

1,5

Prestation de logement (ALF)

2.819

3.043

7,9

3.252

6,9

3.318

2

Prestation pour handicapés

Allocation d'éducation spéciale

328

350

6,7

405

15,7

481

18,8

Autres prestations

202

206

2,0

210

2,0

214

1,9

Prestations extra légales (congé de paternité)

2.000

2.110

5,5

2.331

10,5

2.566

10,1

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale

Cette évolution modeste des prestations familiales (+ 2,5 % en 2003) s'explique par le moindre dynamisme des prestations d'entretien, qui diminuent même en volume (- 0,2 %).

Ainsi, d'après la Commission des comptes de la sécurité sociale, « les dépenses au titre des allocations familiales continuent à diminuer légèrement en volume (- 0,2 %). Si les entrées d'enfants dans le dispositif se maintiennent à un niveau élevé, l'effet conjugué des sorties (les générations nombreuses du début des années quatre-vingt) et de la déformation de la structure des familles bénéficiaires (poids décroissant des familles de trois enfants et plus) est plus fort. »

En réalité, au sein des prestations d'entretien, seules l'ASF et l'API conservent une progression en volume soutenue, conforme à ce qui a été observé les années précédentes. Le nombre de familles monoparentales continueraient en effet de croître.

Plus grave, la place des prestations légales en général au sein de la branche est en recul par rapport au dépenses d'action sociale et aux aides au logement, du fait de la faible revalorisation de la BMAF depuis plusieurs années.

Ainsi, alors que les dépenses de la branche ont crû de 12,6 % au cours de la période 1998-2002, les prestations légales n'ont connu qu'une augmentation de 9,7 %, contre respectivement 19 et 27 % pour les aides au logement et l'action sociale.

Toutefois, des points positifs méritent d'être soulignés, à l'instar de la création d'une allocation de rentrée scolaire différentielle, pour un coût de 8,4 millions d'euros, qui a bénéficié cette année à près de 33.000 familles, jusqu'alors victimes d'un brutal effet de seuil. Cette année, le nouveau gouvernement a fait en sorte que l'ARS soit versée dès la mi-août, permettant ainsi aux familles de faire face sans retard aux charges de la rentrée.

b) Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 : un retour à une politique familiale plus universelle

Les prestations familiales sous condition de ressources ont connu une première phase de croissance au début des années 90 sous le double effet de la revalorisation de certaines d'entre elles (majoration d'ARS depuis 1993) et de l'augmentation, à réglementation constante, du nombre de leurs bénéficiaires, en raison de l'évolution ralentie de l'activité et des revenus.

Par la suite, la loi Famille de 1994 a favorisé le développement de prestations attribuées indépendamment des ressources du ménage : AGED, AFEAMA, allocation parentale d'éducation (APE).

En 1996, est toutefois mise sous condition de ressources l'allocation pour jeune enfant (APJE) courte.

Depuis 1998, on observe une multiplication des prestations familiales mises sous condition de ressources : l'APJE, l'API (qui est un minimum social), le complément familial, l'allocation d'adoption, l'APE, l'ARS, ainsi que l'AGED et l'aide à la scolarité.

Ventilation des prestations familiales
avec et sans condition de ressources

2000

sans condition de ressources

avec condition de ressources

allocations familiales

+

complément familiale

+

allocation pour jeune enfant

+

allocation de logement familiale

+

primes de déménagement ALF

+

allocation de soutien familial

+

allocation de parent isolé

+

allocation de rentrée scolaire et majoration

+

allocation parentale d'éducation

+

allocation différentielle

+

aides à la scolarité

+

allocation de garde d'enfants à domicile

+

AFEAMA et majorations

+

allocation d'adoption

+

allocation d'éducation spéciale

+

allocation aux adultes handicapés

+

prestations transférées à l'étranger

+

+

Les prestations sous condition de ressources représentent ainsi 50 % des prestations en 2002 contre 36,3 % en 1997, avec un pic à 78 % en 1998 du fait de l'éphémère mise sous condition de ressources des allocations familiales par le précédent gouvernement.

Une étude récente de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), rendue publique en mai 2002, montre clairement que la politique familiale menées sous la dernière législature a entendu favoriser largement les familles nombreuses, monoparentales et les plus démunies, au détriment d'une aide en faveur de toutes les familles.

Répartition des familles selon la tranche de revenu primaire
après impôt en 2001

(en pourcentage)

Tranche de revenus primaires annuels après impôt et prime pour l'emploi

couples 1 enfant

couples 2 enfants

couples 3 enfants ou plus

isolés 1 enfant

isolés 2 enfants ou plus

sans ressource

0,6

0,6

1,3

8,0

12,8

moins de 5.000 €

0,9

1,1

2,5

9,2

14,1

de 5.000 à 10.000 €

2,3

2,2

5,4

14,4

13,6

de 10.000 à 15.000 €

5,7

6,8

12,3

20,3

16,9

de 15.000 à 20.000 €

10,5

9,8

14,2

18,9

15,8

de 20.000 à 25.000 €

13,2

10,5

13,6

12,8

10,7

de 25.000 à 30.000 €

15,0

14,2

11,6

8,2

6,6

de 30.000 à 40.000 €

25,5

24,4

14,3

4,9

6,0

de 40.000 à 50.000 €

13,1

13,9

9,9

1,7

2,0

de 50.000 à 60.000 €

6,3

7,7

6,3

0,7

0,5

de 60.000 à 70.000 €

3,5

4,1

2,8

0,7

0,4

de 70.000 à 80.000 €

1,8

2,3

2,1

0,2

0,3

de 80.000 à 90.000 €

0,7

0,9

1,4

0,0

0,4

de 90.000 à 100.000 €

0,6

0,8

0,7

0,0

0,0

plus de 100.000 €

0,4

0,9

1,6

0,0

0,0

Ensemble

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

Effectif en milliers

2.278

2.487

1.308

696

551

En grisé, les cases pour lesquelles l'effectif non pondéré est inférieur à 50 (gris clair inférieur à 100).

Lecture : en 2001, 0,6 % des couples avec un enfant ont un revenu primaire annuel après impôt sur le revenu nul tandis que, pour 0,4 % d'entre eux, ce revenu dépasse 100.000 €. Ces ménages sont au nombre de 2.278.000.

Champ : ménages dont la personne de référence est âgée de moins de 60 ans et n'est pas étudiante. Sont également exclus les ménages dont le revenu primaire annuel est négatif ou dont le revenu disponible est négatif ou nul.

Source : INSEE-DGI, enquête revenus fiscaux 1997, modèle INES, calculs DREES.

Cette étude fait ainsi apparaître les limites de la compensation des charges de famille.

« A configuration familiale identique, le niveau de vie des familles modestes augmente davantage sous l'effet des prestations familiales que celui des familles aisées.

« Cette réduction de l'écart entre niveau de vie est particulièrement importante pour les couples avec trois enfants et plus ou pour les familles monoparentales.

« Après prestations familiales, quel que soit le nombre d'enfants, le niveau de vie médian des couples est 1,9 fois plus élevé que celui en dessous duquel se situent les 10 % des couples les plus modestes alors qu'il est de 2 à 2,6 fois plus élevé avant transferts.

« Dans la moitié supérieure des niveaux de vie, les prestations familiales n'opèrent de redistribution verticale que pour les couples ayant trois enfants ou plus et les familles monoparentales ayant au moins deux enfants. »

Sans nier l'utilité d'une certaine redistribution en faveur des familles les plus modestes, votre rapporteur déplore que, pour le moins, que celles qui disposent de revenus moyens (entre 1.067 et 2.134 euros par mois) pâtissent des effets de seuil.

Pour remédier à ces nouvelles inégalités, il est indispensable de revenir à une politique qui favorise, au sein des différentes prestations offertes par la branche, les allocations familiales qui, avec près de 11,5 milliards d'euros prévus en 2003, représentent le tiers des prestations légales et sont versées à toutes les familles sans condition de ressources.

Si elles ne devraient augmenter que de 1,7 % cette année, votre rapporteur se réjouit néanmoins de l'effort du Gouvernement en faveur d'une extension de leur champ de distribution.

En effet, l'article 40 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 dispose que :

« Une allocation forfaitaire par enfant d'un montant fixé par décret est versée pendant un an à la personne ou au ménage qui assume la charge d'un nombre minimum d'enfants également fixé par décret lorsque l'un ou plusieurs des enfants qui ouvraient droit aux allocations familiales atteignent l'âge limite mentionné au 2° de l'article L. 512-3. Cette allocation est versée à la condition que le ou les enfants répondant aux conditions autres que celle de l'âge pour l'ouverture du droit aux allocations familiales. »

Cette mesure, qui touchera une population d'environ 143.700 familles en 2003, a pour objet de verser un montant d'allocation forfaitaire de 70 euros aux familles nombreuses (trois enfants ou plus à charge), qui perdent le bénéfice des allocations familiales au vingtième anniversaire d'un ou de plusieurs enfants. L'avantage pour ses familles peut être évalué pour 2003 à 840 euros supplémentaires par an.

Le coût de cette mesure est estimé à environ 130 millions d'euros en année pleine et à 32,5 millions en 2003 du fait que son entrée en vigueur n'interviendra qu'à compter du 1 er juillet 2003.

Cette disposition permettra à toutes les familles qui reçoivent les allocations familiales de bénéficier d'une aide significative, au moment même où la charge due à la présence d'enfants plus âgés dans le foyer s'alourdit.

Elle complète ainsi le dispositif en vigueur depuis le 1 er janvier 2000, qui a reporté de 20 à 21 ans l'âge au-delà duquel l'enfant cesse d'être considéré comme à charge pour le versement du complément familial et des aides personnelles au logement.

Votre rapporteur ne peut que saluer une telle mesure, qui va dans le sens d'une politique familiale moins sociale mais plus universelle, à l'image de sa vocation première.

2. L'importance croissante de l'action sociale

a) Des moyens d'action renforcés

Si elle ne représente que 8 % des dépenses de la CNAF, l'action sociale n'en est pas moins importante pour la branche puisque c'est là que réside son « espace de liberté », en particulier au niveau local.

En effet, selon la CNAF, l'action sociale est déterminée par « son caractère décentralisé qui permet à chaque conseil d'administration, dans le cadre des orientations nationales, des interventions au plus près des besoins sociaux ».

Depuis 1998, les crédits qui lui sont consacrés, au sein du fonds national d'action sociale (FNAS) augmentent fortement ; cette hausse atteint 10,5 % entre 2002 et 2003 et 63,4 % depuis 1998.

Cette forte augmentation des dépenses d'action sociale s'explique en particulier par la mise en place de la COG 2001-2004, qui prévoit une augmentation du FNAS de 910 millions d'euros sur quatre ans, orientés vers trois objectifs principaux : l'accueil des jeunes enfants, les loisirs et les vacances des enfants et des familles, et l'accompagnement des familles par le biais de la médiation familiale.

Montant du Fonds national d'action sociale (1998-2003)
hors coûts de gestion de l'action sociale

(en milliers d'euros)

1998

1999

2000

2001

Prévision 2002

Prévision 2003

Dotations action sociale

705.377

713.841

720.266

738.124

771.993

788.466

(avec coûts de gestion de l'action sociale)

(912.026)

(922.530)

(931.357)

Prestations de service

906.294

1.025.839

1.161.997

1.230.236

1.495.586

1.757.006

PS enfants - 6 ans

643.396

716.455

792.108

840.955

1.045.094

1.246.141

PS ordinaires accueil jeune enfant

393.090

417.929

458.859

490.027

629.787

703.373

dont réforme financement crèches

0

0

15.245

30.490

45.735

60.980

contrats enfance crèches

250.306

298.526

333.249

350.927

415.307

542.768

PS enfants de 6 à 16 ans

145.538

180.921

230.426

256.984

301.807

358.225

PS ordinaires

139.699

152.915

173.629

167.583

195.110

208.751

contrats temps libres

5.839

28.006

56.797

89.401

106.697

149.475

Autres PS ordinaires

117.360

128.463

139.462

132.297

148.684

152.639

FAS

8.720

9.575

7.470

5.615

7.897

7.932

FIPE + AEI

26.567

106.714

91.469

- RECETTES

- 38.874

- 13.568

- 8.095

- 4.507

- 3.192

- 2.774

+ TRANSFERTS

111.638

109.611

115.937

114.283

125.972

125.153

Total loi de financement de la sécurité sociale

1.693.155

1.845.297

1.997.575

2.110.318

2.504.970

2.767.252

Source : CNAF

Selon la Cour des comptes 2 ( * ) , « en 2000, au niveau national, le total de dépenses par secteur d'intervention et rapporté au total de dépenses d'action sociale était ainsi réparti : petite enfance (38,1 %), temps libre (16,9 %), accompagnement social (17,7 %), logement (7,5 %), vie sociale (8,9 %), prestations supplémentaires (1,1 %), divers (0,8 %, pilotage d'action sociale (8,9 %). »

Il faut en outre noter que le transfert des frais de gestion administrative de l'action sociale au fonds national de gestion administrative (FNGA) à partir de 2001 a dégagé de nouveaux moyens pour ce poste.

Pour autant, cette évolution n'apparaît pas problématique puisque le FNAS ne représente toujours que 10 % des prestations légales et moins de 30 % des aides au logement. Cette évolution ne saurait s'apparenter à une substitution des prestations légales au profit de l'action sociale, comme d'aucuns le craignent.

La CNAF elle-même, dans la COG 2001-2004, précise, à propos de l'action sociale menée par la branche, « sa complémentarité avec les prestations légales et les autres politiques sociales ».

Toutefois, votre rapporteur souhaite souligner à nouveau une incohérence : la montée en puissance des prestations de service est notamment le fait du financement du fonctionnement des crèches, qui est une obligation quasi légale et un besoin uniforme sur l'ensemble du territoire, alors même que le FNAS doit avoir une vocation décentralisée et proches des demandes locales.

b) Des prestations variées

Outre les dotations d'action sociale, l'essentiel de cette action est menée par le biais des prestations de service qui assurent la prise en charge du coût de fonctionnement des équipements et services sociaux limitativement énumérés et répondant à un certain nombre de critères. Elles sont de plusieurs sortes :

- les prestations de service « à l'acte » : elles se définissent par un pourcentage du prix de revient des actes dispensés par les services sociaux, dans la limite d'un prix plafond fixé par la CNAF, et s'appliquent à l'accueil des jeunes enfants, les centres de loisirs sans hébergement et les services de travailleuses familiales.

- les prestations de service « à la fonction » concernent les centres sociaux, les foyers de jeunes travailleurs, les relais assistantes maternelles.

- les prestations de service « sur projet » pour le lieux d'accueil parents-enfants, les maisons ouvertes, les petites structures de proximité dans le cadre de l'animation de la vie sociale, les projets d'animation collective famille dans les centres sociaux et les actions d'accompagnement à la scolarité.

- les prestations de service « bonifiées » ont été instituées dans le cadre des contrats crèches, enfance et temps libre ; elles constituent un financement complémentaires aux prestations de service de base dans le cadre d'objectifs contractuels de développement quantitatif et qualitatif spécifiques avec les collectivités locales.

Au 1 er janvier 2003 vont être appliquées diverses mesures nouvelles : intégration des contrats crèches dans les contrats enfance, création d'une prestation de service d'accompagnement des centres de vacances à vocation sociale et de loisirs familiaux.

Par ailleurs, par le biais du FAS, la branche finance également, à hauteur de 3,4 millions d'euros, certains projets d'action sociale présentée par des associations nationales.

La CNAF a d'ailleurs mis en place en 2001 une réforme rigoureuse du financement des associations nationales. Le partenariat avec les associations est désormais fondé sur des conventions d'objectifs et de financement pluriannuelles afin de renforcer les relations de coopération et de réciprocité entre la CNAF, les CAF et le réseau associatif.

Toutefois, l'indépendance relative des CAF en matière d'action sociale, à travers leur dotation d'action sociale, aboutit à une grande hétérogénéité des subventions aux associations sur le terrain, mise en lumière par la Cour des comptes 3 ( * ) .


La politique des concours financiers accordés par les CAF aux associations

Dans son rapport paru en septembre 2002, la Cour des comptes dresse un bilan des contrôles effectués par les COREC dans 31 CAF.

Elle met en lumière une grande stabilité des secteurs d'intervention (désenclavement des zones rurales, soutien à la fonction parentale et aide au vacances, ce dernier secteur devant pourtant disparaître depuis la COG) et des associations aidées. Mais seules cinq caisses ont défini et quantifié des objectifs pluriannuels par domaine.

Si la plupart recourent à des conventions pour les subventions les plus importantes, la pratique contractuelle n'en est pas moins apparue défaillante dans près de la moitié des caisses (pas de contreparties exigées pour les allocataires des CAF, ni de clause de garantie en cas de cessation d'activité de l'association).

En investissement, les caisses participent , en principe, à hauteur de 20 % des dépenses subventionnables et accordent des aides ponctuelles de faible montant pour le fonctionnement. Mais le défaut de définition a priori , par les caisses, des taux d'intervention ne garantit pas une équité de traitement entre toutes les demandes.

Le suivi budgétaire des subventions fait également apparaître des défaillances, en particulier au niveau des délais de versement, qui peuvent excéder un an dans un tiers des CAF contrôlées. En outre, et ce malgré les instructions de la CNAF, les caisses sont rarement vigilantes sur le respect des délais limites pour l'utilisation des crédits (deux ans en matière d'investissement, un an pour le fonctionnement).

Enfin, concernant le contrôle des subventions, si onze CAF exercent des plans de contrôle des organismes subventionnés, ce n'est pas le cas de quatorze d'entre elles. Les contrôles, sur pièces et sur place, doivent normalement porter à la fois sur la sincérité des comptes et sur l'existence du service rendu et de sa conformité. Il s'opère également par la représentation des caisses au sein des conseils d'administration des structures financées.

3. Le poids considérable des aides au logement

Les aides au logement méritent ici d'être abordées comme troisième mission importante de la branche puisqu'à côté des aides versées pour le compte du fonds national de l'habitat (FNH) et du fonds national d'aide au logement (FNAL), la CNAF finance intégralement l'allocation de logement familial, au bénéfice des familles les plus modestes.

a) Des aides différentes, qui ont évolué comme le PIB

Représentant 20 % des dépenses de la branche, les allocations logement constituent un poste significatif pour cette dernière.

Les aides personnelles au logement sont de trois sortes :

l'allocation de logement familial (ALF), financée par la CNAF dans son intégralité ;

l'allocation de logement social (ALS), financée par le fonds national d'aide au logement (FNAL), alimenté par une contribution de l'Etat et le produit de deux cotisations à la charge des employeurs. La CNAF verse à ce fonds une subvention pour une micro-prestation, l'ALT au profit des associations logeant à titre temporaire des personnes défavorisées ;

l'allocation personnalisée au logement (APL), financée par le fonds national de l'habitat (FNH), alimenté par des contributions provenant des régimes de prestations familiales et du FNAL. Il est équilibré par une subvention de l'Etat.

L'effort de la CNAF en faveur de l'aide au logement est essentiellement retranscrit dans les lignes ALF et dotations FNH-FNAL. Il s'établit en 2003 à environ 6,5 milliards d'euros, partagés de manière quasiment équivalente entre les deux lignes, soit une augmentation de 1,5 % par rapport à 2002 et de 20,4 % par rapport à 1998.

Ainsi, les aides au logement augmentent parallèlement au PIB, c'est à dire de manière plus importante que les prestations légales, alors même qu'elles ne sont pas au coeur des missions de la branche famille.

Votre rapporteur observe par ailleurs que l'effort de 1,5 milliard d'euros annoncé par le précédent gouvernement en faveur des aides au logement ne s'est pas retranscrit dans les comptes de la CNAF, puisque l'évolution des aides au logement est identique à celle du PIB au long de la période.

La réforme des aides au logement, dont la dernière étape a été mise en place au 1 er janvier 2002, n'a en outre représenté que 144,8 millions d'euros supplémentaires, trop peu pour infléchir la tendance et parler d'un effort marqué en faveur de ce poste.

Les aides au logement sont perçues par environ six millions de ménages, aux caractéristiques sociologiques différentes : l'ALS est ainsi versée en majorité aux âges « extrêmes » (moins de 25 ans et plus de 65 ans), c'est à dire à des inactifs, alors que les deux autres aides bénéficient à un public plus varié.

Bénéficiaires des aides au logement selon l'âge des bénéficiaires
au 31 décembre 2001 (CAF métropole)

ALF

APL

ALS

Moins de 25 ans

69.443

319.966

721.999

25 à 29 ans

163.935

249.494

244.821

30 à 34 ans

253.755

340.095

120.368

35 à 39 ans

250.486

372.027

88.723

40 à 44 ans

179.112

339.039

81.397

45 à 49 ans

101.773

263.428

89.765

50 à 54 ans

48.918

199.259

100.638

55 à 59 ans

17.837

131.782

82.488

60 à 64 ans

7.195

104.681

67.304

65 ans et plus

6.648

422.576

419.147

âge non connu

244

300

405

Total

1.099.346

2.642.917

2.017.055

Source : CNAF

Ces aides sont revalorisées tous les ans au 1 er juillet. En 2002, le calendrier a obligé le gouvernement a une revalorisation rétroactive au mois de septembre.

Cette revalorisation est intégrée dans le poste « logement » en loi de finances pour 2003, pour un montant total de 144 millions d'euros, soit une hausse des aides au logement de 2,8 %.

Dans son projet de budget, le Gouvernement prévoit également une augmentation de la participation minimale des ménages bénéficiaires des APL à leur loyer. Fixée actuellement à 8,5 % du montant du loyer, charges comprises, cette part devrait être augmentée, dans une proportion encore inconnue à ce jour.

Lors de la réunion de son conseil d'administration le 22 octobre dernier, la CNAF a exprimé un avis défavorable sur la revalorisation des aides au logement annoncée par le gouvernement, la jugeant insuffisante. La CNAF a également regretté la parution tardive des barèmes qui entraîne une désolvabilisation de fait des allocataires pendant plusieurs mois, un coût en gestion qui a été chiffré à 4,5 millions d'euros, ainsi que des remontées automatiques d'indus pesant sur les budgets de l'Etat et de la CNAF.

Votre rapporteur regrette donc ce retard pris dans la revalorisation des aides à la personne, mais se félicite de l'orientation générale prise par la politique de l'aide aide au logement depuis la réforme, qui s'est traduite par une amélioration de la situation financière des familles les plus modestes.

En effet, si les prestations légales se doivent d'être suffisamment universelles pour compenser la charge de l'enfant, il n'en est pas de même des aides au logement, dont l'esprit est plus proche de celui des aides sociales.

b) Une réforme bienvenue pour les familles les plus modestes

La clé de la réflexion menée courant 1999 par le ministère du logement, la CNAF et M. Pierre-Louis REMY, délégué interministériel à la famille, se situe dans l'analyse de la situation comparée des bénéficiaires de l'ALF (la cible famille), et celle des bénéficiaires de l'APL (moitié familles, moitié non-familles).

Ventilation des bénéficiaires des aides au logement selon la taille de la famille
et par prestation au 31 décembre 2001 (CAF métropole)

(en pourcentage)

METROPOLE

ALF

ALS

APL

Ensemble

Isolés

37,0

90,8

58,5

65,7

sans personne à charge

0,4

-

38,9

-

avec une personne à charge

20,6

-

9,6

-

avec 2 personnes à charge

11,0

-

6,2

-

avec 3 personnes à charge ou +

5,0

-

3,8

-

Couples

63,0

9,2

41,5

34,3

sans personne à charge

2,4

-

6,8

-

avec une personne à charge

16,1

-

7,1

-

avec 2 personnes à charge

23,5

-

12,3

-

avec 3 personnes à charge ou +

21,0

-

15,3

-

Total

100,0

100,0

100,0

100,0

Source : CNAF

Ainsi, paradoxalement et contrairement à la situation constatée en 1977 (date de création de l'APL), les 1,1 million de bénéficiaires de l'ALF avaient un loyer moyen retenu pour le calcul de l'aide à la personne de 415 euros en moyenne, tandis que les 2,6 millions de bénéficiaires de l'APL avaient un loyer moyen de 242 euros.

Ceux qui avaient la charge de logement la plus forte étaient ceux qui bénéficiaient d'un barème moins solvabilisateur. En termes de taux d'effort, les familles étaient donc largement perdantes.

L'harmonisation des barèmes s'était, il est vrai, esquissée :

- en 1992 par une poussée du paramètre nombre d'enfants à charge ;

- en 1994 par un rapprochement des forfaits charges pris en compte dans les formules de calcul ;

- en 1998 par une revalorisation des loyers plafonds plus forte en ALF qu'en APL ;

- en 1999, à la suite de la conférence de la famille, par une poursuite de l'effet de rapprochement de 1998.


La réforme des aides au logement

L'idée de la réforme, annoncée lors de la conférence de la famille du 15 juin 2000, est de remonter le barème ALF vers le barème APL et de créer un « plateau » dans la zone des petits revenus pour éviter les « trappes à inactivité ».

Ce barème unique, dont la mise en place est prévue en deux étapes (1 er janvier 2001 et 1 er janvier 2002), s'applique à l'ensemble du secteur locatif éligible aux deux aides, soit aux trois quarts des bénéficiaires des aides au logement.

L'unification du barème locatif, qui repose sur la notion de participation personnelle des locataires à leur dépense de logement, est pleinement effectué dès le 1 er janvier 2001.

En revanche, l'objectif d'égalité de traitement selon l'origine des revenus jusqu'au niveau du RMI n'a été atteint qu'au 1 er janvier 2002.

D'après la Cour des comptes 4 ( * ) « le coût de cette réforme est évalué à 0,99 milliards d'euros se décomposant comme suit :

- 442 millions d'euros en 2004 et 548 millions d'euros en 2002 ;

- 442 millions d'euros pour la CNAF et 548 millions d'euros pour l'Etat (au titre des allocataires n'ayant pas d'enfant à charge) ».

Toujours selon la Cour, « le nouveau barème a notamment eu deux effets :

- une augmentation de l'aide pour les allocataires de faibles revenus (ceux situés au voisinage du RMI) ;

- une augmentation sensible de l'ALS pour les 75 % d'allocataires dont le loyer était supérieur aux plafonds (les plafonds de loyers en ALF qui étaient inférieurs à ceux de l'APL ont été alignés sur ces derniers). »

Le gain mensuel moyen est d'environ 16,5 euros, soit 10 % de l'aide versée et supérieur à 30,5 euros pour 1,2 million d'allocataires, en particulier de l'ALF. Une compensation, limitée à 30 euros, à été par ailleurs mise n place jusqu'au 30 juin 2002, pour ceux qui ont vu leur aide diminuer.

On aurait pu -et d'aucuns le préconisaient- simplement relever le niveau des loyers plafonds en ALF, pour cesser de pénaliser les familles à revenus très modestes et à taux d'effort tendus. Mais, selon votre rapporteur, la réforme a été plus utile, car elle a construit un socle de barème en location porteur de progrès ultérieur, peut-être dans le sens d'une aide unique.

Toutefois, comme votre rapporteur le soulignait déjà l'année dernière, c'est bien la CNAF, et non l'Etat, qui a financé le gros de la réforme. En effet, l'ALF, dont le coût à cru de 34,6 % depuis 1998 du fait de la réforme (contre une augmentation de 7,5 % pour les deux autres aides sur la période), est financée à 100 % par la branche famille.

En outre, les crédits déployés par l'Etat au titre de l'ALS et de l'APL sont en réalité financés par des économies sur ce même poste.

En effet, les aides au logement étant d'une part sous condition de ressources et fortement redistributives et, d'autre part, la croissance économique ayant amélioré leur revenu moyen, de nombreuses familles ont vu leur aide diminuer, voire disparaître. Du fait de la croissance, beaucoup d'allocataires sont donc sortis du système. Il est vrai qu'un ralentissement de la croissance produira l'effet inverse.

Ces éléments conjugués démontrent que le coût de la réforme, en particulier pour le budget de l'Etat, qui ne dégagera en outre plus d'économies sur ce poste, mais aussi pour celui de la CNAF, ne s'est pas encore véritablement sentir.

* 2 Rapport de la sécurité sociale (septembre 2001).

* 3 Cour des comptes - Rapport sur la sécurité sociale (septembre 2002).

* 4 Rapport sur la sécurité sociale (septembre 2002).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page