B. L'AN I D'UNE MAÎTRISE DES DÉPENSES ?

Le volet dépenses du projet de loi de finances pour 2003 témoigne des freins encore présents à une réelle maîtrise des dépenses publiques. Si le projet de loi de finances pour 2003 pose les premiers jalons d'une réduction des effectifs de la fonction publique, la programmation pluriannuelle des finances publiques annoncée sur la période 2004-2006, ambitieuse dans ses objectifs, exigera, elle, une volonté résolue de réduction des coûts.

1. Une norme de progression des dépenses pour 2003 modérée mais fragile

Après le dérapage de l'année 2002 révélée par l'audit de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, dont le collectif du 6 août 2002 est la constatation, le gouvernement a fixé une norme de progression des dépenses modérée pour 2003 qui vise à réduire la part des dépenses publiques dans le PIB dès 2003 16 ( * ) .

Evolution des dépenses publiques entre 1998 et 2003

(en points de PIB)

Source : rapports économiques, sociaux et financiers

Le taux de progression des dépenses de l'Etat par rapport à la loi de finances initiale pour 2002 « rebasée » (c'est-à-dire intégrant les dépenses du collectif diminué des dépenses non récurrentes) s'établirait à 0,2 % en volume (1,7 % en valeur) 17 ( * ) . De loi de finances initiale à loi de finances initiale, la progression en volume s'établirait à 1,3 %. Cette norme de progression de dépenses est dans la « fourchette basse » de celles enregistrées au cours des années précédentes.

La progression des dépenses nettes en % depuis 1998

(en volume, à structure constante)

Source : rapports économiques, sociaux et financiers

Elle est définie à « structure constante », après retraitement de 220 millions d'euros de dépenses. Ce retraitement est beaucoup plus modéré que celui opéré dans le projet de loi de finances initiale pour 2001 (3 milliards d'euros) qui avait été particulièrement critiqué par la Cour des Comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances. Il apparaît donc plus sincère.


Un point important à considérer pour 2003 :
la recapitalisation de France Telecom

Ne figurent pas dans la loi de finances initiale, que l'on examine le budget général ou le compte d'affectation spéciale 902-24 « produits de privatisation et dotations en capital des entreprises publiques » les dépenses liées à une probable recapitalisation de France Telecom dont le coût est évalué jusqu'à 15 milliards d'euros. La structure qui pourrait être choisie, un établissement public s'endettant en lieu et place de l'Etat et recapitalisant l'entreprise publique, explique que les dépenses ne soient pas inscrites en lois de finances. Le choix de l'établissement public ne sera vraisemblablement pas neutre sur le plan des critères de Maastricht. Il permet de ne pas peser sur le déficit maastrichtien. Il a par contre un lourd impact sur la dette maastrichtienne. L'établissement public qui serait créé risque fort en effet d'être classé en ODAC. La dette maastrichtienne, déjà proche des 60 % du PIB (58,8 % prévus pour 2003), pourrait alors atteindre cette limite.

La norme de progression des dépenses retenue par le gouvernement, certes modérée, ne permettra pas pour autant de réduire le poids de la dette dans le PIB. Faute de dégager un solde primaire positif en 2003, les administrations publiques verront le poids de leur dette s'alourdir, passant de 58,4 points de PIB en 2002 à 58,8 points de PIB en 2003 18 ( * ) .

De plus, la norme de progression des dépenses dépendra, comme chaque année, de l'inflation constatée. Le taux d'inflation prévu (1,5 %) est assez réaliste même s'il repose sur les hypothèses conventionnelles évoquées précédemment quant à l'évolution du cours du pétrole et de la parité de l'euro 19 ( * ) .

Elle dépendra également du taux de croissance. Les dépenses sont, comme les recettes, mais à un moindre degré, élastiques à la croissance . En période de ralentissement conjoncturel, cela est particulièrement net pour les dépenses de l'assurance chômage. Cela concerne aussi le budget général : pour 2003, 7,7 milliards d'euros de dépenses de lutte contre l'exclusion (RMI, CMU, CHRS...) sont budgétés. Si la croissance s'avérait moindre que prévu, ces dépenses pourraient à nouveau augmenter 20 ( * ) : il existe en effet un « droit de tirage automatique » sur celles-ci.

C'est d'ailleurs ce que constate l'audit précité de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse de juin 2002 : « en premier lieu, la croissance plus lente que prévu en LFI génère des difficultés sociales, notamment en matière d'emploi ce qui entraîne un surcroît de dépenses apparaissant au premier chef dans les organismes spécifiquement en charge, mais qui finissent aussi par affecter l'Etat. Par ailleurs, les dépenses d'aide à l'emploi, à l'emploi des jeunes notamment, à la charge de l'Etat sont plus élevées que prévu. (...) L'ensemble de ces circonstances provoque une pesée diffuse sur les dépenses de l'Etat ».

* 16 Tout dépendra cependant principalement de l'évolution du dénominateur, c'est-à-dire du PIB.

* 17 La progression des dépenses des administrations publiques serait de 1,5 % en volume.

* 18 A contrario, on peut rappeler que le précédent gouvernement avait « bénéficié » en 2001 du regain d'inflation (+ 0,4 point par rapport à la prévision) qui avait permis de « tenir » l'objectif de 0,3 % en volume.

* 19 Toute inflexion à la baisse de l'inflation aura pour effet d'aggraver, toutes choses étant égales par ailleurs, la progression en volume des dépenses publiques.

* 20 Le phénomène se traduit déjà en 2002, d'autant plus que les dotations initiales étaient souvent volontairement sous-calibrées : c'est pour cela que les ajustements des crédits opérés dans le collectif du 6 août 2002 portaient pour l'essentiel sur les « programmes-phares » de l'ancien gouvernement.

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