D. LES DÉPENSES LIÉES AUX POLITIQUES INTERNES

1. Diversité et dispersion des politiques intérieures

Initialement orientée vers l'objectif de réalisation et d'amélioration du fonctionnement du marché intérieur, la rubrique du budget communautaire consacrée aux politiques internes a vu son champ d'intervention s'étendre au rythme de l'accroissement de l'Union, et semble souvent se situer à la lisière du principe de subsidiarité que la Commission a elle-même promu.

Cette rubrique présente ainsi la particularité de financer une grande diversité d'actions, donnant parfois l'impression d'un « mille-feuilles » communautaire, dont les moyens demeurent limités par rapport aux interventions publiques nationales. L'examen de la justification de ces actions est néanmoins guidé par des principes figurant dans l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 : adoption préalable d'un acte juridique communautaire pour l'exécution des crédits, plafonnement des crédits finançant des projets pilote (32 millions d'euros sur deux exercices), inscription sur uniquement trois exercices budgétaires successifs des crédits d'actions préparatoires à de futures propositions, et respect par le Conseil et le Parlement des montants de référence inscrits dans les programmes adoptés en codécision.

Alors que l'essentiel de la rubrique (71,4 % dans le projet de budget pour 2003) est consacré aux deux politiques prioritaires que constituent la recherche (4 055 millions d'euros de crédits d'engagement) et les réseaux transeuropéens (transports, communication et énergie pour 710 millions d'euros de crédits d'engagement), 28,6 % des crédits assurent le financement de mesures distinctes dans une vingtaine de domaines différents (éducation et formation, marché de l'emploi, marché intérieur, environnement, industrie, énergie, justice etc.), au sein desquels l'Europe de la connaissance constitue un axe transversal majeur.

Depuis 1999, les principaux programmes suivants ont été adoptés ou font l'objet d'une négociation :

- programme cadre pour les intérêts et la santé des consommateurs : 112,5 millions d'euros sur 1999-2003 ;

- « culture 2000 » : 167 millions d'euros sur 2000-2004 ;

- LIFE III (environnement) : 640 millions d'euros sur 2000-2004 ;

- Media plus (audiovisuel) : 350 millions d'euros sur 2001-2005 ;

- programme cadre énergie : 170 millions d'euros sur 1998-2002, en cours de renégociation pour 2003-2006 ;

- programme « pour l'entreprise et l'esprit d'entreprise », adopté en 2001 pour remplacer les programmes PME et « Initiative emploi », et doté de 450 millions d'euros pour 2001-2005.

Le sixième programme cadre de recherche et développement (PCRD)

Les crédits inscrits pour 2003 correspondent à la première année de mise en oeuvre du sixième PCRD , adopté le 3 juin 2002 pour la période 2003-2006, avec une dotation globale de 17,5 milliards d'euros.

Les priorités thématiques du nouveau programme sont les technologies de l'information et les nanosciences (3 625 millions d'euros), la génomique et les biotechnologies (2 255 millions d'euros), le développement durable et les changements climatiques (2 120 millions d'euros), le programme cadre Euratom (1 230 millions d'euros) et l'aéronautique et l'espace (1 075 millions d'euros). Un volant innovant d'appui aux infrastructures de recherche a également été renforcé (655 millions d'euros), et 1 230 millions d'euros sont prévus pour des activités spécifiques couvrant un champ de recherche plus vaste (recherche des PME, coopération internationale). Le programme nucléaire attache une importance particulière à la sûreté et comprend un volet « fusion », totalement intégré à l'échelle européenne, et un volet « fission » qui accorde la priorité à la gestion des déchets et à la radioprotection.

De nouveaux instruments font évoluer les possibilités de coopération entre laboratoires et entreprises de plusieurs pays en vue de créer un véritable « espace européen de recherche », décidé au conseil de Lisbonne de mars 2000, financé à hauteur de 2,6 milliards d'euros. Ils se traduisent par l'appel systématique à l'initiative des acteurs regroupés dans des structures de type réseaux d'excellence (destinés à fédérer les compétences multinationales sur le long terme) ou projets intégrés (conçus pour déboucher, à moyen terme, sur des applications et produits), afin d'exécuter des programmes communs de recherche et non plus de multiples projets individualisés. L'Union pourra également cofinancer des programmes lancés par certains de ses Etats membres.

Les réseaux transeuropéens (RTE)

Les réseaux transeuropéens s'appliquent à trois domaines : transports, énergie et télécoms , les premiers regroupant 91% de l'enveloppe globale de 4 600 millions d'euros allouée pour la période 2000-2006 (à comparer aux 2 345 millions d'euros alloués pour 1995-1999). Les réseaux de télécoms ont connu une avancée en 2002 avec l'accord sur le futur programme européen de radionavigation par satellite, baptisé Galiléo et destiné à concurrencer le système américain GPS. Le lancement de l'entreprise commune prend toutefois du retard, en raison des difficultés rencontrées au sein de l'Agence spatiale européenne pour finaliser les contributions respectives des pays participants. Avec 137 millions d'euros, la France financerait en effet le quart de l'enveloppe, soit un taux supérieur à son taux de contribution communautaire (17,5 %), mais plus conforme à ses capacités de recherche spatiale. Elle a toutefois proposé que le taux des quatre principaux contributeurs (France, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie) soit identique à 17,5%. L'ensemble du financement fait toujours l'objet de négociations, qui doivent notamment tenir compte des retombées industrielles.

Le programme, constitué de trois phases (développement de 2002 à 2005, déploiement des satellites en 2006-2007, puis exploitation opérationnelle), doit être géré à partir de 2006 par un consortium privé, après appel d'offres lancé par l'entreprise commune Galiléo. Le coût global du programme est estimé à 3,4 milliards d'euros.

La première phase (1,1 milliards d'euros) est financée à parité par le budget des politiques internes communautaires et par l'Agence spatiale européenne (qui est un établissement public intergouvernemental), et la seconde phase de déploiement devrait être financée majoritairement par le secteur privé, le budget communautaire ne devant contribuer que pour un tiers.

L'« Agenda 2000 » a prévu une augmentation substantielle, de 11,3 % en euros constants (soit une hausse annuelle moyenne de 1,8 %), des plafonds de dépenses sur la période 2000-2006, notamment pour tenir compte du renforcement de certaines politiques internes (justice) induit par l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam.

2. Principales orientations du budget 2003

Pour 2003, les politiques internes bénéficieraient de crédits de paiement pour un montant de 6 112 millions d'euros (soit une diminution de 0,7 %) tandis que les crédits d'engagement atteindraient 6 674 millions d'euros (soit une augmentation de 1,8 %) . Le Conseil a préservé une petite marge sous plafond de 122 millions d'euros, contre 81 millions d'euros dans l'APB de la Commission, qui devrait permettre le financement d'éventuels nouveaux programmes (notamment dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche) et de faire face aux augmentations que pourrait décider le Parlement, qui statue en dernier ressort sur ces dépenses et a déjà indiqué ses priorités (développement économique, santé, sécurité et e-learning). Les propositions du Parlement représentent une hausse de 1,9 % des crédits de paiement par rapport au projet du Conseil, avec un accent particulier mis sur les technologies de l'information, l'énergie, la justice et l'emploi.


Budgets 2002 et 2003 des politiques internes

 

Exécution 2001

Budget 2002

Projet Conseil 2003

Projet Parlement (1ère lecture)

Ecart Parlement 03/budget 02

Part de chaque poste (CE Parlement)

(millions d'euros)

CE

CP

CE

CP

CE

CP

CE

CP

CP

Actions agricoles

50

79

55

61

42

64

42

64

4,9%

0,6%

Actions régionales

15

15

15

15

15

15

15

15

0,0%

0,2%

Transport

23

15

29

26

47

36

54

37

42,3%

0,7%

Pêche et mer

52

44

65

60

70

64

70

64

6,7%

1,0%

Education et formation

582

568

523

523

551

511

563

516

-1,3%

8,1%

Culture et audiovisuel

131

97

117

126

116

102

118

103

-18,3%

1,7%

Information

104

94

114

102

90

86

117

108

5,9%

1,3%

Social

149

122

165

148

178

160

188

162

9,5%

2,6%

Energie

63

35

33

35

40

36

48

48

37,1%

0,6%

Contrôle nucléaire

18

18

18

18

19

19

19

19

5,6%

0,3%

Environnement

213

156

196

141

230

203

237

207

46,8%

3,4%

Consommateurs

21

19

23

20

23

20

23

20

0,0%

0,3%

Reconstruction

3

3

0,9

0,9

0,6

0,6

0,6

0,6

-33,3%

0,0%

Marché intérieur

142

127

185

167

196

174

208

183

9,6%

2,9%

Industrie

0

0

0

62

0

0

0

0

-100%

0,0%

Emploi et innovation

133

111

105

129

103

129

115

142

10,1%

1,5%

Statistiques

35

33

34

32

35

32

35

32

0,0%

0,5%

Réseaux

655

482

677

601

710

662

725

679

13,0%

10,5%

Justice

125

86

143

136

146

144

154

153

12,5%

2,1%

Lutte contre la fraude

4

6

6

5

7

7

7

7

40,0%

0,1%

Recherche

4 184

3 196

4 055

3 752

4 055

3 650

4 055

3 674

-2,1%

59,7%

Total

6 702

5 306

6 558

6 160

6 674

6 115

6 794

6 234

1,2%

Marge sous plafond

0

122

3

Source : "jaune" annexé au PLF 2003

 
 
 
 
 
 
 
 

Il convient de relever dans le projet du Conseil une hausse de plus de 10 % des crédits de paiement des réseaux transeuropéens de transport, l'accent étant mis sur les infrastructures transfrontalières dans les régions voisines des pays candidats , et une hausse de 44 % des crédits relatifs à l'environnement. Les programmes Socrates (éducation), Jeunesse et Leonardo (formation professionnelle) bénéficient également de hausses substantielles, leur enveloppe budgétaire globale étant passée de 1 713 millions d'euros pour la période 1995-1999 à 3 520 millions d'euros pour la programmation 2000-2006.

Le Conseil a en outre proposé le 18 septembre 2002, après les dramatiques inondations qui ont affecté le centre de l'Europe, la création d'un Fonds de solidarité en faveur des régions européennes sinistrées à la suite d'une catastrophe naturelle, technologique ou environnementale majeure 31( * ) , en vue d'aider l'Etat bénéficiaire à réaliser des actions de première nécessité (et non de reconstruction à long terme). Intégrés en budget rectificatif et supplémentaire au budget 2002, les crédits du Fonds sont répartis entre les rubriques 3 (politiques internes) et 7 (pré-adhésion, pour les versements à la République tchèque), pour un total de 728 millions d'euros 32( * ) . Le Fonds n'est pas abondé dans le projet de budget pour 2003, dans la mesure où il a vocation à faire face à des dépenses urgentes et imprévisibles, budgétées en cours d'exercice.

Comme pour d'autres rubriques budgétaires, les propositions budgétaires ne tiennent pas suffisamment compte du niveau d'exécution des programmes . La sous-consommation des crédits de paiement a été un peu plus marquée en 2001 (82 %) qu'en 2000 (84 %) - en particulier sur les lignes recherche et réseaux transeuropéens - pour un montant global de 1,2 milliard d'euros, et le taux d'engagement a été de 93 % en 2001 (92 % en 2000). Les résultats disponibles à la fin du premier semestre 2002 laissent cependant espérer un progrès.

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