II. L'ARTICLE 71 RATTACHÉ

A. LES PRINCIPES GÉNÉRAUX APPLICABLES À LA TAXE D'AÉROPORT

Jusqu'au 1 er juillet 1999, les dépenses aujourd'hui couvertes par la taxe d'aéroport étaient pour partie prises en charge par la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA), recette du budget annexe de l'aviation civile, et pour partie, réalisées directement par les services de l'Etat. Ce système a été invalidé en 1998 par un arrêt du Conseil d'Etat (Syndicat des compagnies aériennes autonomes, 20 mai 1998) annulant l'article de l'arrêté interministériel fixant le tarif de la RSTCA au motif que les coûts des « missions d'intérêt général qui incombent, par nature, à l'Etat » ne peuvent être mis à la charge des usagers au moyen de redevances. La loi de finances initiale pour 1999 a donc institué la taxe d'aéroport, perçue au-dessus d'un certain trafic, sur chaque passager et tonne de fret, au profit des exploitants d'aéroports, pour financer les dépenses de service de sauvetage et de lutte contre l'incendie des aéronefs (SSLIA), de sûreté, de lutte contre le péril aviaire, ainsi que les dépenses afférentes aux mesures effectuées dans le cadre des contrôles environnementaux.

1. Les tarifs de la taxe

A compter du 1 er janvier 2002, la taxe d'aéroport n'est plus perçue que sur les plates-formes traitant plus de 5.000 unités de trafic par an 8 ( * ) . En effet, l'article 94 de la loi de finances initiale pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001) a relevé le seuil de trafic à partir duquel un aéroport est éligible à la perception de la taxe.

a) La fixation des fourchettes de tarifs applicables par catégorie d'aéroports

Le Parlement vote la fourchette des taux applicables aux différentes catégories d'aéroports (les aéroports de la classe 1 regroupent ceux dont le nombre d'unités de trafic est supérieur à 10.000.001 ; les aéroports de la classe 2 regroupent ceux dont le nombre d'unités de trafic est compris entre 4.000.001 et 10.000.000 ; les aéroports de la classe 3 regroupent ceux dont le nombre d'unités de trafic est compris entre 5.001 et 4.000.000) :

Répartition des aéroports par classe

Classe

Nombre en 1999

Nombre en 2000

Nombre en 2001

Nombre en 2002

1 9 ( * )

1

1

1

1

2

4

4

4

4

3

96

94

89

73

Total

100

99

94

78

Source : direction générale de l'aviation civile (DGAC)

On notera que la diminution du nombre d'aéroports appartenant à la classe 3 en 2002 résulte pour l'essentiel du relèvement du seuil de trafic de 1.000 à 5.000 unités de trafic, ce qui a entraîné la suppression de facto de la perception de la taxe d'aéroport pour les plus petits d'entre eux.

L'encadrement par la loi des tarifs de la taxe d'aéroport en 2002 10 ( * ) :

Classe

1

2

3

Tarifs par passager

De 2,45 à 4,7 euros

De 1,2 à 4,7 euros

De 2,6 à 9,5 euros

Tarifs par tonne de fret ou de courrier

De 0,15 à 0,6 euros

De 0,15 à 0,6 euros

De 0,6 à 1,5 euros

b) Le calcul des taux applicables est spécifique à chaque aéroport

Les tarifs de la taxe d'aéroport applicables sur chaque plate-forme sont fixés par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'aviation civile et du budget, daté du 29 décembre 2001 pour l'exercice 2002. Ils sont fixés pour chaque aéroport en fonction du besoin de financement relatif aux missions indiquées plus haut.

Pour la détermination du niveau de la taxe d'aéroport, les besoins prévisionnels de financement des missions concernées sont appréciés sur la base des déclarations des exploitants d'aéroports, au regard des postes de dépense suivants :

- le personnel, le fonctionnement (maintenance, exploitation), les contrats de sous-traitance ;

- pour les investissements, l'annuité d'amortissement ;

- les frais financiers et les frais généraux.

Sont également prises en compte les subventions éventuelles des collectivités locales affectées au financement des missions concernées.

Ainsi, l'impact des mesures de sûreté pour les exploitants d'aérodromes se traduit par des dépenses inscrites dans l'assiette de la taxe d'aéroport. Les dépenses courantes (frais des personnels assurant le contrôle de sûreté et contrats de maintenance) sont directement imputées sur le produit de cette taxe ; les dépenses d'investissement (installation des appareils de détection fournis par l'Etat, aménagements réalisés pour faciliter les mesures de sûreté) le sont par l'intermédiaire des annuités d'emprunts ou des dotations annuelles aux amortissements.

Les déclarations des exploitants d'aéroports sont vérifiées par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) 11 ( * ) .

c) La difficulté de définir le périmètre des dépenses relevant d'un financement par la taxe d'aéroport

Par lettre de mission en date du 3 octobre 2001 signée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et par le ministre de l'équipement, des transports et du logement, l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale de l'aviation civile et de la météorologie (IGACEM) ont été chargées d'une expertise sur les conditions de détermination des dépenses effectuées par les gestionnaires d'aérodromes en matière de sécurité, de sûreté et de contrôles environnementaux, financées à titre principal depuis le 1 er juillet 1999 par la taxe d'aéroport. Les investigations ont été menées au cours de l'automne 2001 à Aéroports de Paris (ADP) et pour les aéroports de Marseille-Provence (classe 2) et Pau-Pyrénées (classe 3).

La DGAC indique qu'il ressort notamment de ces rapports que « le système actuel de la taxe d'aéroport n'est pas encore stabilisé. Bien au contraire, la montée en puissance des dépenses a fait apparaître une multiplicité de cas particuliers dans lesquels le débat entre dépenses relevant de la redevance et dépenses relevant de la taxe est difficile, et ce, malgré la définition, établie par les administrations concernées, du périmètre des dépenses éligibles au financement par la taxe d'aéroport ; l'arrêt du Conseil d'Etat du 6 avril 2001 (Electricité de France et Gaz de France) reflète cette difficulté : il valide le principe et les taux des redevances perçues par ADP au titre de la délivrance des titres d'accès et de circulation dans les zones réservées des aéroports parisiens, alors que cette mission était considérée, initialement, comme relevant de l'intérêt général et d'un financement par la taxe ».

Le rapport de l'IGF et de l'IGACEM indique que la définition des dépenses financées par la taxe d'aéroport « ne pose pas de difficultés particulières pour les luttes contre les incendies d'aéronefs, de lutte contre le péril aviaire et de mesures de contrôles environnementaux, qui sont généralement assurés au sein d'unités fonctionnelles clairement identifiées et dont l'exercice est réglementé par le code de l'aviation civile et des réglementations spécifiques.

Il n'en va pas de même pour la sûreté, activité également réglementée recouvrant l'inspection filtrage des passagers et de leurs bagages à main (IF), le contrôle des bagages de soute des passagers (CBS) et le contrôle d'accès (CA) des personnels de l'aéroport ayant accès à la zone réservée sûreté :

- d'une part, ces activités sont encore exercées dans la majorité des aéroports de province par des personnels d'Etat (gendarmerie des transports aériens - GTA, police, voire douanes pour le contrôle des bagages de soute) ; même à Aéroports de Paris, où le transfert de ces activités s'est réalisé en premier, les postes d'accès routiers continuent à être servis par la GTA jusqu'au 1 er janvier 2002. En tout état de cause, même une fois le transfert effectué, ces activités demeurent exercées sous l'autorité de l'Etat, qui en fixe les conditions d'applications et peut, par exemple, décider un renforcement temporaire des mesures, ce qui a été le cas après les attentats du 11 septembre 2001 ;

- d'autre part, ces activités, généralement sous-traitées lorsqu'elles sont transférées aux gestionnaires d'aéroports, sont étroitement imbriquées aux autres activités d'exploitation de l'aéroport : à titre d'exemple, le contrôle des bagages de soute n'est qu'un des éléments de la chaîne de traitement des bagages depuis la banque d'enregistrement en aérogare jusqu'à la soute de l'avion. La plupart des gestionnaires d'aéroports, et spécialement ADP, ont donc choisi de ne pas créer une structure opérationnelle spécialisée en matière de sûreté, mais d'englober ces activités et le contrôle des sous-traitants dans l'ensemble des activités d'exploitation, ce qui rend plus difficile leur traitement comptable.

(...)

Avec la montée en charge des dépenses de sûreté au cours de l'année 2001, les difficultés d'interprétation de la jurisprudence du Conseil d'Etat sur l'imputation des dépenses sur la taxe d'aéroport ou la redevance se sont multipliées, exposant le système de financement des aéroports français à deux écueils :

- le premier écueil est celui de la facilité : comme tous les gestionnaires rencontrés l'ont reconnu facilement, l'imputation d'une dépense sur la taxe d'aéroport présente pour eux l'avantage de la faire échapper au contrôle des compagnies aériennes, consultées sur l'évolution des taux de redevances réglementées par l'intermédiaire des commissions consultatives économiques ; de plus, les garanties de recouvrement d'une taxe sont supérieures à celles d'une redevance ;

- le second écueil est celui est celui du contentieux : une imputation erronée d'une dépense sur la redevance peut être sanctionnée par le juge administratif.

Au delà des solutions ponctuelles proposées par la mission sur les difficultés évoquées par les gestionnaires et qui sont elles-mêmes susceptibles d'être contestées, il conviendrait d'assurer la sécurité juridique du système par une solution législative ou réglementaire opposable au tiers

(...)

Créé à partir d'une évolution jurisprudentielle dont il s'inspire largement, le système de la taxe d'aéroport n'est pas encore stabilisé au plan juridique. Malgré la volonté d'homogénéisation de la DGAC, les pratiques peuvent encore varier selon les aérodromes. La situation semble toutefois nettement plus maîtrisée dans les aéroports de province, où les questionnaires DGAC sont remplis avec le soutien des DAC, qu'à ADP, qui ne bénéficie pas d'un soutien technique particulier et dont, paradoxalement, les spécificités de la comptabilité analytique rendent plus difficile l'exercice d'identification des charges imputables sur la taxe ».

* 8 Une unité de trafic (UDT) correspond à un passager ou à cent kilogrammes de fret ou de courrier.

* 9 L'appartenance à une classe d'aérodromes étant déterminée pour un aéroport ou un système aéroportuaire, le taux de la taxe d'aéroport est identique pour les quatre plates-formes gérées par ADP (Orly, Roissy, Le Bourget, Pontoise).

* 10 IV de l'article 1609 quatervicies du code général des impôts.

* 11 Pour chaque aéroport, les taux de la taxe d'aéroport ou les montants de la subvention du FIATA sont établis sur la base de coûts prévisionnels, au vu d'une déclaration détaillée demandée au gestionnaire et vérifiée par les services locaux de l'aviation civile, en particulier quant à la consistance des moyens mis en oeuvre et au respect de la définition des coûts éligibles à la taxe d'aéroport et aux subventions du FIATA établie par la DGAC et validée par le comité de gestion de la section aéroportuaire du FIATA. Seuls les coûts effectivement à la charge du gestionnaire, nets de subventions ou apports en nature, sont pris en compte.

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