CHAPITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES
AUX INDEMNITÉS DE DÉPLACEMENT
ALLOUÉES AUX HUISSIERS DE JUSTICE

Article 49
(art. 8 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945
relative au statut des huissiers de justice)
Gestion des indemnités de déplacement
allouées aux huissiers de justice

Le statut des huissiers de justice est défini par l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945. Ce texte définit en particulier la mission des huissiers en précisant que « les huissiers de justice sont les officiers ministériels qui ont seuls qualité pour signifier les actes et les exploits, faire les notifications prescrites par les lois et règlements lorsque le mode de notification n'a pas été précisé et ramener à exécution les décisions de justice, ainsi que les actes ou titres en forme exécutoire ».

Dans son article 8, l'ordonnance n°45-2592 du 2 novembre 1945 définit le rôle et les missions de la chambre nationale des huissiers de justice. Il prévoit qu'elle représente l'ensemble de la profession auprès des services publics, qu'elle prévient ou concilie tous différends d'ordre professionnel entre les chambres régionales, entre les chambres départementales, ou huissiers ne relevant pas de la même chambre régionale, qu'enfin, elle tranche, en cas de non-conciliation, ces litiges par des décisions qui sont immédiatement exécutoires.

La chambre nationale organise et règle le budget de toutes les oeuvres sociales intéressant les huissiers. Elle donne son avis sur le règlement intérieur des chambres départementales et régionales.

L'article 8 de l'ordonnance de 1945 prévoit en outre que la chambre nationale établit son budget et en répartit les charges entre les chambres régionales.

Cet article dispose que la chambre nationale, siégeant en comité mixte, règle les questions d'ordre général concernant le recrutement et la formation des clercs et employés, l'admission au stage des aspirants aux fonctions d'huissier, l'organisation des cours professionnels, la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études, les conditions de travail dans les études et, sous réserve des dispositions légales ou réglementaires particulières, le salaire et les accessoires du salaire.

Enfin, le texte précise que la chambre nationale, siégeant dans l'une ou l'autre de ses formations, donne son avis, chaque fois qu'elle en est requise par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les questions professionnelles rentrant dans ses attributions.

Le présent article tend à compléter le premier alinéa de l'article 8 de l'ordonnance de 1945 pour préciser que la chambre nationale, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, collecte, gère et répartit entre les huissiers de justice les indemnités pour frais de déplacement qui leur sont dues.

En pratique, tel est déjà le cas. Une disposition législative est cependant devenue nécessaire à la suite d'un processus qu'il convient de rappeler.

Depuis 1949, un système de mutualisation des coûts de transport supportés par les huissiers a été institué en vue d'assurer une stricte égalité entre les usagers des services relevant du monopole des huissiers de justice, quelle que soit la situation géographique du destinataire de l'acte.

Le décret tarifaire applicable à la profession (décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale) prévoit qu'il est alloué à chaque huissier de justice, pour chaque acte dressé par ses soins, une indemnité pour frais de déplacement fixée forfaitairement à trente-deux fois la base kilométrique ferroviaire en première classe.

Le même décret dispose que le produit des indemnités est géré par la chambre nationale des huissiers de justice et réparti entre eux. Au sein de la chambre nationale des huissiers, un service de compensation des transports gère le produit des indemnités pour frais de déplacement et leurs modalités de répartition en fonction des déplacements accomplis. Le fonds de péréquation est alimenté par les huissiers qui perçoivent des indemnités de transport supérieures au montant de leurs frais réels de transport. Les sommes recueillies sont reversées aux huissiers qui perçoivent des indemnités pour un montant inférieur à leurs frais réels.

Un arrêté du 15 janvier 1997, pris par le garde des sceaux en application du décret de 1996, a prévu que l'indemnité forfaitaire pour frais de déplacements devait être versée à la chambre nationale dès la signification de l'acte qui en justifie la perception . Cette règle, qui est appliquée depuis longtemps, ne figurait jusqu'alors dans aucun texte.

L'arrêté du garde des Sceaux a fait l'objet d'un recours devant le Conseil d'Etat, les requérants critiquant l'exigibilité de l'indemnité dès la signification de l'acte.

Dans ses conclusions, le commissaire du Gouvernement a notamment formulé les observations suivantes :

« Il nous semble (...) difficilement concevable que, sur une base aussi mince que les dispositions précitées du décret du 18 novembre 1996, l'arrêté du 15 janvier 1997 puisse légalement édicter des dispositions qui relèvent en principe du domaine législatif telles que la création de pénalités ou la possibilité de recourir au procédé de l'état exécutoire. Aussi serions-nous prêts à suivre les requérants lorsqu'ils affirment que le renvoi à l'arrêté ministériel pour la détermination des conditions de « gestion » du fonds de coopération n'habilitait pas le garde des sceaux à fixer les conditions d'exigibilité des cotisations ».

Par un arrêt du 9 mai 2001, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté du 15 janvier 1997 en tant qu'il disposait que le produit des indemnités forfaitaires pour frais de déplacement était exigible dès la signification de l'acte. Le Conseil d'Etat a estimé que le garde des Sceaux avait excédé les limites de l'habilitation qui lui était donnée par le décret du 12 décembre 1996.

Le présent article a pour objet de donner une base juridique solide et incontestable au système de répartition de l'indemnité forfaitaire pour frais de déplacement. Il tend donc à insérer, dans l'article 8 de l'ordonnance de 1945 relative au statut des huissiers, une phrase prévoyant que, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, la chambre nationale des huissiers collecte, gère et répartit entre les huissiers de justice les indemnités pour frais de déplacement qui lui sont dues.

Ainsi, le système mis en place en 1949 pourra être pérennisé. Le Gouvernement pourra prévoir dans le décret que l'indemnité est exigible dès la signification de l'acte, dès lors que la loi précisera que la chambre nationale collecte « les indemnités » et non « le produit des indemnités ».

La légitimité de cette exigibilité de l'indemnité dès la signification de l'acte peut être discutée. Dans certains cas, les huissiers sont payés avec beaucoup de retard. Ils doivent donc faire l'avance à la chambre d'indemnités qu'ils n'ont pas perçues. Parfois même, le débiteur est défaillant. Est-il normal que les huissiers versent à la chambre nationale des indemnités qu'ils ne perçoivent pas ?

En réalité, la règle de l'exigibilité de l'indemnité dès la signification de l'acte est indispensable pour permettre un contrôle sur le respect par les offices d'huissiers de leurs obligations. La signification des actes est beaucoup plus aisée à contrôler que les encaissements effectifs réalisés par les huissiers. L'article 867 du code général des impôts fait en effet obligation aux huissiers de tenir des « répertoires à colonnes » sur lesquels ils inscrivent, jour par jour, tous les actes de leur ministère.

Il reste qu'il n'apparaît pas équitable que des huissiers versent au fonds de péréquation des indemnités qu'ils ne perçoivent pas. Il serait souhaitable qu'une étude soit entreprise sur l'importance quantitative de ce phénomène afin que des solutions puissent être envisagées par la voie réglementaire pour éviter que certains huissiers soient injustement pénalisés par un système de péréquation par ailleurs absolument nécessaire.

Votre commission vous propose d' adopter l'article 49 sans modification .

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