C. 1.3. LES RÉFORMES DES SYSTÈMES DE SANTÉ

Les réformes engagées au cours des vingt dernières années combinent deux éléments principaux : le recours à la concurrenceet la décentralisation.

1. a. Le recours à la concurrence

En 1990, au Royaume-Uni, le « New Public management » a introduit des mécanismes de l'économie de marché (méthodes de gestion issues du privé ou mise en concurrence des producteurs de soins) dans le système public de santé. L'objectif était d'obtenir une meilleure organisation qui conduirait à une optimisation des processus de soins et donc à une économie de coût en évitant les soins inutiles. Un second objectif de cette réforme était de remédier au problème des listes d'attente en rendant le système plus performant.

La mise en concurrence concerne l'offre de soins. Elle peut exister y compris dans le cadre d'un système de financement public. Un opérateur intermédiaire (« un entrepreneur de soins » pour reprendre le terme de Bocognano et alii (1998)) est acheteur de soins (il organise un réseau de soins) pour le compte d'un assuré qui est « abonné » chez lui et pour lequel il perçoit une rémunération forfaitaire issue d'un financement public. En pratique, au Royaume-Uni, la méthode a consisté à séparer les acheteurs et les fournisseurs de soins de santé au sein du système national de santé. Les établissements hospitaliers ont été mis en concurrence par appels d'offre. De fait, les hôpitaux ont pu se réorganiser et disposer d'une plus grande autonomie de gestion, et les cabinets de généralistes ont pu disposer d'enveloppes budgétaires pour « acheter » des soins hospitaliers ou de spécialistes.

Cette réforme a suscité beaucoup d'intérêt dans les pays nordiques. La Suède s'en est inspirée. Les comtés ont mis en concurrence les hôpitaux par appels d'offre ou en passant des contrats. Des enveloppes financières ont été attribuées aux autorités sanitaires par district et aux cabinets de généralistes considérés comme « acheteurs » de soins spécialisés et d'interventions hospitalières.

Dans les pays du Sud de l'Europe, comme l'Espagne ou l'Italie, la mise en concurrence peut se produire entre des structures (hôpital, centre de santé,..) publiques et privées car il existe des espaces privés plus larges. Depuis 1992-1993, les autorités locales italiennes ont acquis plus d'autonomie en adoptant des règles de gestion privée. Le principe de séparation entre « acheteurs » et « fournisseurs » de soins a été introduit. Les hôpitaux vendent leurs services aux entreprises de santé locales. La réforme du service national de santé italien s'est poursuivie en 1999 avec un accroissement de l'autonomie financière des régions. En Espagne, les autorités régionales peuvent passer des contrats avec des structures de santé privées.

Un premier bilan de ces expériences permet de conclure que l'instauration d'une fonction d'entrepreneur de soins peut réduire les coûts et améliorer la qualité des soins, en responsabilisant la prise en charge globale d'un patient. Elle nécessite cependant un réseau structuré d'une taille suffisante pour éviter la sélection des risques, mais néanmoins pas trop importante pour éviter la dilution des responsabilités.

Des expériences un peu différentes ont été menées en Allemagne et aux Pays-Bas. Elles consistent à mettre en concurrence les caisses ou assureurs dans le but d'améliorer la gestion du risque.

La réforme Dekker-Simons amorcée dans les années 1980 aux Pays-Bas, qui prévoyait un système de "concurrence d'acheteurs", est restée très partielle. Il existe ainsi aux Pays-Bas une distinction entre "gros risques", pris en charge par un système d'assurance universel et obligatoire, et "petits risques", pris en charge par des caisses publiques en dessous d'un seuil de revenu, et par des assurances privées, facultatives, au-delà. L'assuré a effectivement la liberté de choisir sa caisse et celle-ci perçoit un forfait fonction du risque. Cependant, la rareté de l'offre n'a pas permis l'instauration d'un véritable comportement d'acheteurs de la part des caisses. De plus, pour contrer les tentatives de sélection du risque par les caisses, les autorités ont mis en place un système complexe de réglementation (Bocognano et alii (1998)). En Allemagne, la concurrence entre les caisses existe depuis 1995 avec la Réforme Seehofer. Cette réforme a  pour objectifs la concentration des caisses d'assurance maladie et leur mise en concurrence en donnant aux assurés la liberté de choix.

Cependant, la concurrence ne conduit pas forcément à la maîtrise des dépenses de santé, comme le montre l'exemple des Etats-Unis.

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