EXAMEN DES ARTICLES

Article 37-1
Abrogation des dispositions de la loi de modernisation sociale
précédemment suspendues

Objet : Cet article abroge plusieurs articles de la loi de modernisation sociale relatifs à la procédure de licenciement économique.

I - Le dispositif proposé

La loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques a suspendu pour dix-huit mois l'application de onze articles de la loi de modernisation sociale, qui ont alourdi de manière excessive la procédure de licenciement économique :

- l'article 96, qui fait obligation aux chefs d'entreprise de conclure un accord relatif à la réduction du temps de travail ou d'engager des négociations à cette fin, avant de décider d'un plan social ;

- l'article 97, qui prévoit que toute cessation d'activité affectant plus de cent salariés doit être décidée par les organes de direction et de surveillance de l'entreprise sur la base d'une « étude d'impact social et territorial » présentée par le chef d'entreprise ;

- l'article 98, qui impose de la même manière l'élaboration d'une « étude d'impact social et territorial » avant qu'une décision stratégique ayant des conséquences sur l'emploi ne soit présentée aux organes de direction et de surveillance de l'entreprise ;

- l'article 99, qui oblige à dissocier la consultation du comité d'entreprise relative au projet de restructuration (livre IV du code du travail) de la consultation relative au plan de licenciement (livre III du code du travail) ;

- l'article 100, qui rend plus contraignantes les règles relatives à l'information du comité d'entreprise sur la stratégie économique de l'entreprise ;

- l'article 101, qui renforce les pouvoirs du comité d'entreprise dans le cadre de la procédure de consultation du livre IV, en instaurant notamment un « droit d'opposition » qui ouvre droit à la nomination d'un médiateur et à la suspension temporaire du projet de restructuration ;

- l'article 102 et l'article 104, qui sont des mesures de coordination avec l'article 101 ;

- l'article 106, qui précise les conditions de recours et les fonctions du médiateur lorsqu'il subsiste une divergence importante sur le projet de restructuration ;

- l'article 109, qui supprime les « qualités professionnelles » de la liste des critères pouvant être pris en compte pour déterminer l'ordre des licenciements ;

- l'article 116 enfin, qui renforce les pouvoirs de l'administration pendant le déroulement de la procédure de consultation prévue au livre III du code du travail.

Cette suspension devait permettre aux partenaires sociaux de négocier de nouvelles règles. Pour augmenter les chances de parvenir à un accord, la période de suspension a été prolongée de six mois par la loi n° 2004-627 du 30 juin 2004 modifiant les articles premier et 2 de la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques et relative au recouvrement, par les institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage, des prestations de solidarité versées entre le 1 er janvier et le 1 er juin 2004 aux travailleurs privés d'emploi dont les droits à l'allocation de retour à l'emploi ont été rétablis.

L'échec des négociations conduit le Gouvernement à proposer, dans le paragraphe I , l'abrogation de ces articles et à déposer le présent projet de loi pour définir de nouvelles règles.

Leur abrogation rétablit les articles du code du travail qui avaient été modifiés dans leur rédaction antérieure à la loi de modernisation sociale.

Le paragraphe II introduit une modification de cohérence.

II - La position de votre commission

Votre commission avait critiqué les dispositions susvisées de la loi de modernisation sociale. Elle approuve donc l'initiative du Gouvernement d'abroger ces articles.

En conséquence, elle vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 37-2
(art. L. 132-12-2, L. 132-27, L. 320-2, L. 320-3 du code du travail)
Négociations obligatoires et autorisation
de négocier des accords de méthode

Objet : Cet article rend obligatoire une négociation triennale sur les effets de la stratégie de l'entreprise sur l'emploi. Il autorise aussi la conclusion « d'accords de méthode » pour définir des règles particulières de consultation du comité d'entreprise en cas de plan de licenciements économiques ou les modalités de négociation du plan de sauvegarde de l'emploi.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I modifie l'intitulé du chapitre préliminaire du titre II du livre III du code du travail : « Déclaration de mouvements de main-d'oeuvre » est remplacé par « Gestion de l'emploi et des compétences. Prévention des conséquences des mutations économiques » . Puis il propose d'insérer dans le code du travail deux articles L. 320-2 et L. 320-3.

L'article L. 320-2 crée une obligation, dans les entreprises employant plus de trois cents salariés, de négocier , tous les trois ans, sur la stratégie de l'entreprise et ses effets sur l'emploi. La négociation porte également sur le dispositif de gestion prévisionnelle des effectifs, qui peut comporter des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience et d'accompagnement de la mobilité géographique et professionnelle des salariés. Elle peut aussi traiter de la procédure de consultation du comité d'entreprise ou de groupe en cas de plan de licenciements économiques.

L'article L. 320-3 prévoit que des accords d'entreprise ou de groupe, souvent désignés sous le vocable « d'accords de méthode », peuvent être conclus pour définir les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise en cas de plan de licenciements économiques , par dérogation aux dispositions des livres III et IV du code du travail.

Ces accords précisent les informations qui sont transmises au comité d'entreprise, les conditions dans lesquelles il peut formuler des propositions alternatives et les conditions de négociation d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Ils peuvent aussi prévoir les conditions de négociation du plan de sauvegarde de l'emploi et anticiper sur le contenu de celui-ci.

Ils doivent être signés par des syndicats majoritaires ou approuvés par les salariés.

Une action en nullité contre ces accords peut être formée dans le délai de douze mois.

Le paragraphe II dénomme la sous-section 2 de la section 3 du chapitre II du titre III du livre I er du code du travail : « Négociation obligatoire » .

Puis, il modifie l'article L. 132-27 du code du travail pour élargir le champ de la négociation annuelle obligatoire, mentionnée à cet article, à deux nouveaux thèmes : le maintien dans l'emploi des salariés âgés et leur accès à la formation professionnelle.

Le paragraphe III insère un article L. 132-12-2 dans le code du travail pour préciser que les organisations syndicales et patronales signataires d'un accord de branche ou d'entreprise doivent se réunir tous les trois ans pour négocier sur les matières définies à l'article L. 320-2.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve l'encouragement ainsi donné à la négociation collective. Elle est toutefois surprise de voir figurer dans le texte une obligation de négocier avec les syndicats sur la stratégie de l'entreprise.

Il est vrai que ces dispositions obligent simplement les parties à ouvrir des négociations et à négocier loyalement, mais ne préjugent pas du résultat de la négociation, qui peut se conclure par un constat de désaccord.

Il s'agit toutefois d'une innovation de grande portée, que rien ne laissait prévoir.

Les documents préparatoires à ce texte montrent, en effet, qu'il a été toujours été seulement question de négocier sur les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise sur la stratégie de l'entreprise , ce qui correspond à une réalité bien différente. Les informations prises auprès du Gouvernement montrent que telle était bien l'intention des auteurs du texte.

De plus, le texte tel qu'il est rédigé présente une incohérence manifeste. Le paragraphe III prévoit que les organisations patronales et syndicales négocient au niveau des branches « sur les matières définies à l'article L. 320-2 ». Or, l'article L. 320-2 est précisément celui qui énonce l'obligation de négocier sur « la stratégie de l'entreprise ». Cela n'a bien sûr guère de sens de négocier, au niveau de la branche, sur la stratégie d'une entreprise.

Pour corriger ce qui s'apparente à une regrettable erreur d'écriture, votre commission vous propose de rétablir, par amendement , le texte de cet article dans la rédaction qui s'impose et de prévoir que la négociation triennale porte effectivement sur les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise sur la stratégie de l'entreprise.

Concernant les accords de méthode, elle note que l'autorisation de négocier des accords relatifs à la consultation du comité d'entreprise en cas de plan de licenciements économiques prolonge l'autorisation donnée, à titre expérimental, par la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques.

Une évaluation menée au bout de dix-huit mois a montré qu'environ 150 entreprises avaient négocié de tels accords.

Votre commission approuve la proposition de pérenniser les accords de méthode, qui introduisent de la souplesse dans les entreprises, et d'étendre leur champ.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 37-3
(art. L. 321-1, L. 321-1-2, L. 321-1-3 du code du travail)
Modification du contrat de travail
proposée pour un motif économique

Objet : Cet article remplace dans le code du travail la notion de « modification substantielle du contrat de travail » par celle de « modification d'un élément essentiel du contrat de travail » et apporte quelques aménagements de procédure.

I - Le dispositif proposé

Le droit du licenciement économique est un droit complexe qui a beaucoup évolué sous l'effet de la jurisprudence.

Le premier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail définit ainsi le licenciement pour motif économique :

« Constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. »

La lecture de cet alinéa conduit à distinguer deux ordres de causalité :

- une causalité originelle, d'ordre économique : des difficultés économiques ou des mutations technologiques, notamment, affectent l'entreprise ;

- une causalité matérielle, plus directe : ces difficultés économiques ou les mutations technologiques conduisent l'entreprise à supprimer ou à transformer des emplois ou à proposer au salarié une modification « substantielle » de son contrat de travail.

C'est seulement en cas de refus de la modification proposée que l'employeur peut licencier le salarié pour motif économique.

Il reste à définir ce qui constitue une modification « substantielle » du contrat de travail. Dans le silence des textes, la Cour de cassation a élaboré une doctrine prétorienne.

La terminologie employée sur ce point a beaucoup évolué. Dans un premier temps, la Cour s'est attachée, en s'appuyant sur la lettre du code du travail, à distinguer les modifications substantielles du contrat de travail des modifications accessoires. Puis elle a distingué la modification des éléments essentiels et non essentiels du contrat. Depuis 1996, et l'arrêt Le Berre ( Cass. soc ., 10 juillet 1996, Bull. civ. V ), la Haute juridiction distingue « modifications du contrat de travail » et « changements dans les conditions de travail » . Une modification du contrat nécessite l'accord du salarié, tandis qu'un changement des conditions de travail peut être décidé unilatéralement par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction.

Sur le fond, la Cour de cassation a développé une jurisprudence subtile, qui laisse une certaine marge d'appréciation aux juges du fond. Les stipulations relatives à la rémunération, au temps de travail, aux fonctions du salarié, au lieu de travail (sous réserve des distinctions à opérer en fonction du secteur géographique), sont de nature contractuelle. Elles ne peuvent être modifiées sans l'accord du salarié. Autour de ce « noyau dur », gravitent d'autres éléments qui peuvent relever du domaine contractuel ou des conditions de travail.

Le présent projet de loi propose d'introduire dans le code du travail la notion de « modification d'un élément essentiel du contrat de travail » . Cette expression remplacerait la référence à la « modification substantielle », qui figure aux articles L. 321-1, L. 321-1-2 et L. 321-1-3 de ce code, qui ont trait au licenciement économique.

Il apporte, de plus, une précision à l'article L. 321-1 en indiquant explicitement que le licenciement économique ne peut intervenir qu'après que le salarié aura refusé la modification proposée par l'employeur.

Enfin, il clarifie la rédaction de l'article L. 321-1-3 du code du travail pour bien préciser que lorsque dix salariés refusent la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail et que leur licenciement est envisagé, la procédure de licenciement collectif pour motif économique s'applique (élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi).

Ce faisant, il revient sur la jurisprudence Framatome et Majorette (Cass. soc., 3 décembre 1996, deux arrêts), selon laquelle un plan de sauvegarde de l'emploi doit être présenté au comité d'entreprise, puis mise en oeuvre, dès le stade de l'offre de modification de dix contrats de travail. Désormais, le plan ne devra être présenté qu' après que dix salariés au moins auront exprimé leur refus et si le chef d'entreprise envisage leur licenciement pour motif économique.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve les précisions apportées par cet article.

La jurisprudence Framatome et Majorette conduit à ce que des salariés qui ne seront finalement pas licenciés soient pris en compte pour le calcul du seuil de dix salariés qui déclenche la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi.

Votre commission souligne que la substitution de l'expression « modification d'un élément essentiel » à celle de « modification substantielle » du contrat de travail relève du simple changement terminologique et est donc sans incidence sur les pouvoirs de l'employeur ou les droits des salariés.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sous réserve de l'adoption d'un amendement rédactionnel.

Article 37-4
(art. L. 321-4-2 du code du travail)
Convention de reclassement personnalisé

Objet : Dans le cadre d'un licenciement pour motif économique, cet article vise à créer une convention de reclassement personnalisé au profit des salariés des entreprises de moins de mille salariés.

I - Le dispositif proposé

Aujourd'hui, plusieurs systèmes coexistent en matière de reclassement des salariés :

- les conventions de cellule de reclassement et de congé de conversion du Fonds national de l'emploi (FNE), dont la conclusion est décidée lors de la négociation des mesures sociales du plan de sauvegarde pour l'emploi ;

- le congé de reclassement pour les salariés des entreprises d'au moins mille salariés ;

- le plan d'aide au retour à l'emploi (PARE) anticipé, dit pré-PARE, pour les salariés des entreprises non soumises à l'obligation de mise en oeuvre d'un congé de reclassement, c'est-à-dire celles de moins de mille salariés. Ce dispositif, qui a remplacé les conventions de reconversion, est issu de la convention d'assurance chômage du 1 er janvier 2001 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage. Il a été codifié à l'article L. 321-4-2 du code du travail : il permet aux salariés licenciés pour motif économique ayant au moins quatre mois d'ancienneté, de bénéficier des prestations d'aide au retour à l'emploi pendant la durée du préavis.

Le Gouvernement propose au profit des salariés des entreprises de moins de mille salariés un nouveau dispositif, plus intéressant que le pré-PARE, qu'il a vocation à remplacer : la convention de reclassement personnalisé.

Le paragraphe I indique que les entreprises de moins de mille salariés doivent proposer à chaque salarié licencié pour motif économique, une convention de reclassement personnalisé, en vue de favoriser son reclassement.

Cette convention contient des dispositions relatives aux actions d'orientation, d'évaluation des compétences professionnelles et de formation dont il bénéficiera après la rupture de son contrat de travail.

Le salarié peut utiliser les droits acquis au titre du droit individuel à la formation (DIF) pour la mise en oeuvre de la convention. La loi n° 2004-391 du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, dispose que le DIF est transférable pendant le préavis, donc avant la rupture du contrat de travail, dans des conditions définies à l'article L. 933-6 du code du travail. A titre dérogatoire, le présent article permet au salarié licencié d'utiliser le reliquat des droits qu'il a acquis au titre du DIF après la date de la rupture de son contrat et il propose de doubler les droits correspondant à ce reliquat.

Pendant l'exécution de cette convention de reclassement, le salarié est placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle.

Dès que le salarié accepte la convention de reclassement proposée par son employeur, le contrat de travail est rompu d'un commun accord entre les parties. Dans ce cas, la rupture n'ouvre droit ni à délai-congé ni à indemnité compensatrice de préavis. En revanche, elle ouvre doit à l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 122-9 du code du travail.

Les mesures dont bénéficie le salarié sont définies par voie d'accord collectif, conclu par les partenaires sociaux et agréé par le ministre chargé du travail, en application de l'article L. 351-8 du code du travail. Il s'agira pour les partenaires sociaux de renégocier, au niveau national, et, le cas échéant, par avenant, la convention d'assurance-chômage du 1 er janvier 2004 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage.

Ce nouvel accord devra définir le contenu des actions d'orientation, d'évaluation, d'accompagnement et de formation, les modalités de leur mise en oeuvre par le service public de l'emploi et les maisons de l'emploi ainsi que le montant de l'allocation versée au salarié.

Il déterminera également les conditions dans lesquelles ces organismes et l'employeur participent au financement des actions de formation. Quant au financement de l'allocation, le présent article précise que l'employeur y contribue par le versement aux ASSEDIC d'un montant équivalent au minimum à deux mois de salaire de la personne licenciée (ce qui correspond à la durée du préavis). L'accord peut déterminer la condition d'ancienneté exigée du salarié qui souhaite bénéficier de la convention de reclassement personnalisé.

A défaut d'accord ou d'agrément, le paragraphe III prévoit que c'est un décret en Conseil d'État qui fixera les mesures d'application et les modalités de financement de ces dispositions. L'absence d'accord signifie que la négociation entre les partenaires sociaux n'a pas abouti, le pouvoir réglementaire intervient alors pour éviter un vide juridique. Quant à l'agrément, le ministre chargé du travail aura la possibilité de le refuser s'il estime que l'accord conclu entre les partenaires sociaux n'est pas conforme aux règles de droit en vigueur.

Enfin, un accord peut être signé entre l'État et les organismes gestionnaires de l'assurance chômage pour déterminer les modalités de participation de l'État au financement des actions contenues dans la convention de reclassement personnalisé.

Le paragraphe II définit le régime de sanction applicable à l'employeur qui n'aurait pas proposé de convention de reclassement personnalisé à un salarié qu'il envisage de licencier pour motif économique. Dans ce cas, il doit verser aux ASSEDIC une contribution égale à six mois de salaire brut moyen des douze derniers mois travaillés.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la volonté du Gouvernement de redynamiser le système de reclassement des salariés licenciés dans les petites entreprises. En effet, le dispositif de pré-PARE a, malgré son coût financier important, montré ses limites. Il convenait donc de revoir ce dispositif.

Proche dans son esprit des conventions de conversion, la convention de reclassement personnalisé apparaît à cet égard mieux calibrée. Ainsi, le salarié licencié, en étant placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle, pourra mobiliser les droits qui lui restent au titre du DIF. Il bénéficiera d'une affiliation obligatoire à un régime de sécurité sociale, celui dont il relevait avant son entrée en stage. Enfin, il se verra également appliquer les dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux accidents du travail et de trajet.

Votre commission souhaite toutefois remédier à certaines imprécisions du texte, par voie d' amendement :

d'abord, s'agissant de la transférabilité du DIF, elle souhaite lever toute ambiguïté sur le caractère effectif de ce transfert, en indiquant que les actions d'orientation, d'évaluation des compétences professionnelles et de formation financées à ce titre sont engagées dans le cadre de la convention de reclassement personnalisée. Cette mesure permettra aux salariés licenciés d'avoir l'assurance que leurs droits à formation seront effectivement mobilisables dans le cadre du reclassement proposé par l'employeur ;

en ce qui concerne les modalités de financement de la convention de reclassement, votre commission juge élevée la charge pesant sur les petites entreprises. C'est pourquoi elle propose de rendre obligatoire la participation de l'État au financement des dépenses relatives aux actions de formation ;

sans empiéter sur le champ de la négociation interprofessionnelle à venir, votre commission estime nécessaire d'apporter des précisions aux modalités de mise en oeuvre de la convention de reclassement. Elle souhaite, en particulier, préciser la durée de la convention de reclassement personnalisée, tout en conférant à cette durée suffisamment de souplesse pour permettre son adaptation à la diversité des situations observées sur le terrain. Elle proposera donc de fixer la durée de la convention entre quatre et neuf mois.

enfin, votre commission suggère de préciser que le futur accord interprofessionnel devra prévoir :

- la durée des conventions de reclassement, dans la fourchette de temps précédemment proposée ;

- les formalités et les délais par lesquels le salarié fait connaître à l'employeur sa réponse à la proposition de convention de reclassement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 37-5
(art. L. 321-7-1 nouveau du code du travail)
Délais de recours relatifs à la procédure de consultation
et de licenciement économique

Objet : Cet article vise à préciser les délais de recours en matière de contestations relatives au respect de la procédure de consultation du comité d'entreprise et de licenciement économique.

I - Le dispositif proposé

La mise en oeuvre du licenciement pour motif économique est enfermée dans des règles et dans des délais précis que l'employeur est tenu de respecter sous peine de nullité de la procédure.

Cette procédure se présente comme suit :

- pour le licenciement individuel : l'employeur qui envisage de licencier un salarié pour motif économique doit lui adresser une lettre de convocation à un entretien préalable, au cours duquel il est tenu de lui proposer une adhésion aux dispositifs de congé de reclassement ou de pré-PARE. Suivent la notification du licenciement et l'information de l'administration sur les licenciements en cours.

- pour le licenciement collectif portant sur deux à neuf salariés sur une période de trente jours : le chef d'entreprise est tenu de convoquer les membres du comité d'entreprise, de les réunir puis de les consulter sur le projet de licenciement. Parallèlement, il doit adresser au salarié la lettre de convocation préalable avant l'entretien au cours duquel il lui propose soit un dispositif pré-PARE (si l'entreprise compte moins de mille salariés) soit un congé de reclassement. Ensuite, suivent la notification du licenciement et l'information de l'administration des licenciements en cours ;

- pour le licenciement collectif de dix salariés et plus sur trente jours : le comité d'entreprise doit se réunir au cours de deux réunions séparées par quatorze jours si le plan de licenciements concerne moins de cent salariés, par vingt-et-un jours si les licenciements concernent entre cent et 249 salariés et en vingt-huit jours pour au moins 250 licenciements.

Si la procédure de consultation n'a pas été menée dans les conditions de régularité requises, il est possible de la contester en référé devant les tribunaux, sans qu'aucun délai ne soit précisé. Le Gouvernement propose de fixer un délai à ce recours : toute action en référé devra être introduite dans les quinze jours suivant chacune des réunions du comité d'entreprise, sous peine d'irrecevabilité

Quant aux contestations relatives à la procédure de licenciement , elles sont aujourd'hui soumises au délai de droit commun des actions en justice, c'est-à-dire à la règle de la prescription quinquennale. Le Gouvernement, propose d'abaisser ce délai à douze mois , sous peine de prescription, à compter de la dernière réunion du comité d'entreprise ou à compter de la notification du licenciement du salarié. Ce délai n'est toutefois opposable au salarié que s'il en a été fait mention dans la lettre de licenciement.

II - La position de votre commission

Votre commission estime que la fixation de délais de recours contre l'irrégularité de la procédure de consultation ou de licenciement est utile pour éviter le prolongement indéfini des actions contentieuses, ce qui peut être source d'insécurité juridique à la fois pour le salarié et l'employeur.

Dans ces conditions, elle vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 37-6
(art. L. 321-16 nouveau du code du travail)
Équilibre des bassins d'emploi

Objet : Cet article vise à inciter les entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs à contribuer à la revitalisation des bassins d'emploi affectés par les licenciements ainsi provoqués.

I - Le dispositif proposé

L'article 118 de la loi de modernisation sociale a mis à la charge des entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs une obligation de participation à sa revitalisation.

Cet article, introduit dans la loi de modernisation sociale par l'Assemblée nationale, malgré les réserves de votre commission, prévoit que :

les entreprises ayant entre cinquante et mille salariés procédant à des licenciements pour motif économique qui, par leur ampleur, sont susceptibles d'affecter l'équilibre économique du bassin d'emploi, doivent participer à sa revitalisation. Dans ce cas, le préfet peut réunir les différents acteurs concernés -  partenaires sociaux, représentants des organismes consulaires, élus concernés - pour déterminer comment cette entreprise pourrait contribuer à la création d'activités et au développement des emplois dans le bassin d'emploi ;

pour celles d'au moins mille salariés fermant partiellement ou totalement des sites, leur contribution à la réactivation du bassin d'emploi prend la forme d'actions propres de l'entreprise ou, à défaut, d'un versement financier au Trésor public.

L'application de ces mesures a donné lieu à l'établissement d'un bilan.


Mise en oeuvre de l'article 118 de la LMS
Résultats partiels d'une étude engagée auprès des services déconcentrés

On estime que l'État a signé entre quarante et cinquante conventions au titre de l'article 118 depuis l'entrée en vigueur de la LMS.

Des conventions article 118 ont été signées dans quatorze des cinquante-trois départements sur lesquels l'administration dispose à ce stade d'informations. Le taux de chômage moyen dans les bassins d'emplois concernés est de 10,08 %, soit un peu plus que la moyenne nationale, sans que pour autant ce niveau lui soit nettement supérieur.

La durée moyenne des conventions est de deux ans.

Elles concernent quinze cas de fermeture totale de sites et huit cas de fermeture partielle, pour des suppressions d'emplois comprises entre treize et 1.035 postes. Le budget consacré par la convention aux actions de revitalisation est variable. Il est compris entre deux fois et dix fois le SMIC mensuel.

Sur les vingt-trois conventions analysées, seize contiennent un engagement de l'employeur de création d'emplois qui, dans la plupart des cas, est égal ou supérieur au nombre de postes supprimés dans le cadre de la restructuration. Si actuellement la mise en oeuvre d'aucune convention n'est encore achevée, les premiers résultats enregistrés sont encourageants en termes de créations d'emploi.

Les actions prévues par les conventions sont très variées. Cela va de l'aide directe à l'embauche (en général d'anciens salariés de l'entreprise signataire de la convention) au financement de structure de développement local, en passant par des ventes à prix préférentiel de locaux ou des prêts participatifs à la création ou à la reprise d'entreprise...

Des comités de suivi ont été mis en place pour chacune des conventions. Ils se réunissent dans la plupart des cas tous les six mois.

La dynamique engendrée par l'article 118 peut se mesurer surtout au nombre de conventions actuellement en cours de négociation : environ soixante sur les cinquante-trois départements pour lesquels nous disposons à ce stade de données, dont des projets dans quinze départements dans lesquels aucune convention n'a encore été signée aujourd'hui.

Source : ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale

Mais ce bilan comporte également des limites importantes. Parmi celles-ci, on relève :

- le malentendu créé par l'absence de décret d'application de l'article 118, certaines entreprises et directions départementales de l'emploi et de la formation professionnelle, ayant estimé qu'en l'absence de décret, cet article n'est pas applicable ;

- une implication très variable des acteurs locaux ;

- un dialogue difficile avec les entreprises dont le siège n'est pas situé dans le département où la fermeture totale ou partielle est envisagée ;

- des problèmes d'articulation entre les mesures du plan de sauvegarde et celles que doit engager l'entreprise dans le cadre de l'article 118 de la loi de modernisation sociale ;

- la rigidité de la notion de bassin d'emploi, pour laquelle il n'existe aucune définition normative.

Le Gouvernement propose donc de réformer ce dispositif. Le paragraphe I insère un nouvel article L. 321-16 dans le code du travail, relatif à l'équilibre des bassins d'emploi.

Les entreprises de plus de mille salariés (mentionnées à l'article L. 321-4-3 du code du travail) devront désormais contribuer financièrement à la création d'activités, au développement des emplois et à l'atténuation des effets du licenciement envisagé sur les autres entreprises dans le ou les bassins d'emploi.

Cette obligation concerne les entreprises qui ont procédé à un licenciement collectif affectant, par son ampleur, l'équilibre du ou des bassins d'emploi dans lesquels elles sont implantées. Le montant de leur contribution doit être au moins égal à deux fois la valeur mensuelle du SMIC par emploi supprimé.

Pour sa mise en oeuvre, une convention doit être conclue entre l'entreprise et l'État dans un délai de six mois à compter de la notification du projet de licenciements économiques à l'administration. Elle détermine la nature, les modalités de financement et de mise en oeuvre des actions à mener pour l'équilibre du bassin d'emploi. En l'absence de convention signée, les entreprises versent au Trésor public une contribution égale au double du montant prévu plus haut, c'est-à-dire quatre fois la valeur mensuelle du SMIC par emploi supprimé.

L'obligation de participer à la revitalisation du bassin d'emploi ne s'impose toutefois pas aux entreprises qui font l'objet d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

Pour les entreprises de moins de mille salariés, il appartient à l'État de décider de l'opportunité d'une telle action.

Il est prévu, à titre préventif, que, lorsqu'un licenciement collectif est susceptible d'affecter, par son ampleur, l'équilibre des bassins dans lesquels elles sont implantées, l'État puisse intervenir pour favoriser la mise en oeuvre, en concertation avec le service public de l'emploi et, le cas échéant, avec les maisons de l'emploi, des actions de nature à permettre le développement d'activités nouvelles et à atténuer les effets de la restructuration envisagée sur les autres entreprises dans le bassin d'emploi.

Une convention est également prévue entre l'État et l'entreprise en question, pour définir la contribution de celle-ci, étant entendue que cette contribution doit tenir compte de la situation financière de l'entreprise et du nombre d'emplois supprimés.

Enfin, il est prévu que les collectivités territoriales intéressées, les organismes consulaires et les partenaires sociaux réunis au sein de la commission paritaire interprofessionnelle régionale seront consultés avant que les actions prévues en faveur de la revitalisation économique ne soient déterminées.

Le paragraphe II abroge l'article 118 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale.

II - La position de votre commission

L'article 118 de la loi de modernisation sociale avait été introduit, au cours des débats, par l'Assemblée nationale.

A l'époque, votre commission, avait vainement proposé la suppression de cet article dont la pertinence lui semblait douteuse, dans la mesure où elle créait « une nouvelle contribution dont n'étaient précisés ni la nature -s'agit-il d'un impôt, d'une taxe ou d'autre chose ?- ni l'assiette, ni le taux ».

Votre commission approuve donc le souci du Gouvernement de remanier ce dispositif, dans le sens des propositions qu'elle avait elle-même formulées lors des débats relatifs au projet de loi de modernisation sociale.

Toutefois, elle estime que le Gouvernement devrait aller au bout de cette logique, notamment par une meilleure prise en compte des insuffisances qu'il a constatées dans l'application de cette disposition.

Votre commission propose donc plusieurs amendements :

d'une part, pour remédier aux difficultés d'application de cette mesure par les entreprises et les directions départementales de l'emploi et de la formation professionnelle, elle suggère de renvoyer à un décret la détermination des conditions dans lesquelles le dialogue s'instaure avec les entreprises dont le siège n'est pas situé dans le bassin d'emploi où la fermeture totale ou partielle est envisagée ;

d'autre part, elle souhaite renforcer la participation de l'État à la revitalisation des bassins d'emploi affectés par des licenciements collectifs effectués par les entreprises de moins de mille salariés ;

par ailleurs, afin que la mobilisation de l'État, du service public de l'emploi et des maisons de l'emploi soit durable, elle demande l'instauration d'un système de suivi de la mise en oeuvre des mesures de revitalisation des bassins d'emploi ;

enfin, elle propose plusieurs amendements d'ordre rédactionnel, tendant à clarifier la rédaction du présent article.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 37-7
(art. L. 431-5, L. 432-1 ter nouveau et L. 434-3 du code du travail)
Fonctionnement du comité d'entreprise

Objet : Cet article aménage les règles de fonctionnement du comité d'entreprise.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I modifie le deuxième alinéa de l'article L. 434-3 du code du travail pour préciser que les consultations rendues obligatoires par des dispositions légales, réglementaires ou par un accord collectif de travail sont inscrites de plein droit à l'ordre du jour de la réunion du comité d'entreprise.

Le paragraphe II crée un article 432-1 ter dans le code du travail pour indiquer que l'employeur peut n'informer le comité d'entreprise du lancement d'une offre publique d'achat (OPA) ou d'une offre publique d'échange (OPE) que deux jours après la publication de l'offre. Le chef d'entreprise donne alors au comité d'entreprise des informations écrites et précises sur le contenu de l'offre et sur ses conséquences prévisibles en matière d'emploi.

Le paragraphe III modifie le premier alinéa de l'article L. 431-5 du code du travail, qui prévoit que « la décision du chef d'entreprise doit être précédée de la consultation du comité d'entreprise » , pour mentionner l'exception de l'article 432-1 ter .

II - La position de votre commission

La loi de modernisation sociale obligeait le chef d'entreprise à informer le comité d'entreprise avant le lancement d'une OPA ou d'une OPE. Votre commission avait critiqué cette mesure singulière, qui risquait de menacer la nécessaire confidentialité de telles opérations avant leur lancement.

Elle se félicite donc de la précision apportée sur ce point par le présent projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sous réserve de deux amendements rédactionnels.

Article 37-8
Application dans le temps des nouvelles dispositions
introduites par ce projet de loi

Objet : Cet article définit les conditions d'application rationae temporis des dispositions nouvelles introduites par ce projet de loi.

I - Le dispositif proposé

Les modifications proposées par le texte en matière de licenciements économiques ne s'appliqueront qu'aux procédures engagées à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Cet article indique que les procédures de licenciement déjà en cours au moment où la loi sera promulguée continueront d'être régies par l'actuelle réglementation, tandis que celles engagées après cette date seront concernées par les nouvelles règles.

On peut considérer qu'une procédure de licenciement est « engagée » lorsque les premiers actes juridiques formalisés ont été accomplis (envoi d'une lettre au salarié en cas de licenciement individuel, première consultation des représentants du personnel pour un licenciement collectif).

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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Votre commission vous propose d'adopter la lettre rectificative au projet de loi de programmation pour la cohésion sociale ainsi amendée.

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