C. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES ACCÉLÉRÉE PAR L'ÉVOLUTION DES TRANSFERTS FINANCIERS

Les charges de la branche AT-MP du régime général se composent d'environ trois quarts de dépenses de prestations (légales, extralégales et autres, augmentées des dotations nettes aux provisions pour prestations et des pertes sur créances irrécouvrables sur prestations) et d'un peu moins d'un cinquième de charges de transfert vers d'autres régimes et fonds : régime des mines, régime des salariés agricoles, fonds commun des accidents du travail non agricoles (FCAT), branche maladie du régime général, FIVA, FCAATA, etc. Le reste est constitué de charges de gestion courante et de diverses charges techniques.

Globalement, les dépenses ont progressé à un rythme soutenu ces dernières années. Elles ont ainsi augmenté de 4,2 % en 2002, puis de 8,6 % en 2003, principalement sous l'effet de la hausse des dépenses de prestations. En 2004 et 2005, les dépenses de prestation devraient connaître une évolution plus modérée, dans un contexte général de meilleure maîtrise des dépenses de santé. Mais les transferts au profit du FCAATA et du FIVA devraient augmenter significativement l'année prochaine et conduire à un rythme de progression des dépenses encore soutenu (+ 4,7 %).

Dépenses de la CNAM accidents du travail - maladies professionnelles

(en droits constatés et en millions d'euros)

2001

2002

%

2003

%

2004

%

2005

%

7.971,1

8.300,7

4,2

9.012,9

8,6

9.295,6

3,1

9.735,7

4,7

Source : Direction de la sécurité sociale

1. Vers une modération des dépenses de prestations ?

En 2003, les dépenses de prestations ont progressé de 7,3 % en raison de l'accroissement des dépenses liées à l'indemnisation des victimes de l'amiante et aux rentes d'accidents du travail. Cette évolution a été accentuée par un niveau élevé de dotations nettes aux provisions (134,8 millions d'euros, contre - 84 millions d'euros en 2004) afin de compenser un sous-provisionnement en 2002.

En 2004, elles devraient progresser de 4,5 %, soit à un rythme un peu plus modéré que l'augmentation des prestations du champ de l'ONDAM (+ 5,2 %).

En 2005, cette décélération devrait se confirmer, puisque le projet de loi de financement est construit sur une hypothèse de progression des dépenses de prestations de 3,2 % seulement, au taux identique de l'ONDAM qui prend en compte les premiers effets de la réforme de l'assurance maladie.

Cette prévision pour 2005 doit, bien sûr, être considérée avec prudence, dans la mesure où l'on observe depuis plusieurs années des dépassements par rapport aux objectifs de dépenses (écart de 400 millions d'euros en 2003 et 2004).

2. Une nouvelle augmentation des dépenses de transfert

Les dépenses de transfert à la charge de la branche vont progresser de 12,1 % en 2005 par rapport à 2004. Si les transferts de la branche AT-MP vers les autres organismes de sécurité sociale devraient rester stables, à 942,4 millions d'euros, les transferts vers les divers fonds d'indemnisation devraient, pour leur part, fortement progresser, passant de 664,6 millions d'euros en 2004 à 858,8 millions d'euros l'an prochain, soit une augmentation de 29,2 %.

Le poids des transferts dans le total des dépenses de la branche a fortement progressé depuis 2000. Il représentait, à cette date, l'équivalent de 11,9 points de cotisations ; ce taux est passé à 18,8 % en 2004.

Charges de transferts de la branche AT-MP (CNAMTS)

(en droits constatés et en millions d'euros)

 

2001

2002

%

2003

%

2004

%

Transferts entre organismes de sécurité sociale

867,1

941,1

+ 8,5

942,4

+ 0,1

942,4

0,0

Compensations

726,5

795,0

+ 9,4

795,0

0,0

795,0

0,0

Compensations intégrales

0,0

0,1

++

0,1

0,0

0,1

0,0

Compensation avec le régime des Mines (CANSSM)

426,9

464,9

+ 8,9

464,9

0,0

464,9

0,0

Reversement à la CNAM/Maladie

299,6

330,0

+ 10,1

330,0

0,0

330,0

0,0

Transferts divers et autres

140,5

146,1

+ 4,0

147,4

+ 0,9

147,4

0,0

Compensation avec le régime des salariés agricoles

109,0

108,8

- 0,2

108,8

0,0

108,8

0,0

Dotation au FNGA ACOSS

29,3

36,0

+ 23,0

37,3

+ 3,5

37,3

0,0

Autres transferts

2,3

1,3

- 42,0

1,3

0,0

1,3

0,0

Autres transferts techniques

553,4

710,9

+ 28,5

664,6

- 6,5

858,8

+ 29,2

Contribution au FCAATA

300,0

450,0

+ 50,0

500,0

+ 11,1

600,0

+ 20,0

Contribution au FIVA

180,0

190,0

+ 5,6

100,0

- 47,4

200,0

+ 100,0

Contribution au FCAT

71,7

64,4

- 10,1

58,0

- 10,0

52,2

- 10,0

Contribution au FMES-FMCP

1,2

3,6

193,2

3,8

+ 4,4

3,8

0,0

Contributions aux autres fonds nationaux

0,0

2,5

++

2,5

0,0

2,5

0,0

Subventions

0,0

0,0

+ 63,1

0,0

0,0

0,0

0,0

Participations

0,5

0,3

- 42,4

0,3

0,0

0,3

0,0

Source : Direction de la sécurité sociale

a) Stabilité des transferts vers les organismes de sécurité sociale

La branche AT-MP du régime général effectue des transferts de compensation vers les régimes de sécurité sociale à effectifs décroissants, notamment les régimes des mines et des salariés agricoles, afin de les aider à faire face à leurs obligations financières. Ces dépenses sont stabilisées depuis quelques années. Si elles pèsent sur les comptes du régime général, elles ne se traduisent pas, en revanche, par une dégradation du solde net de la branche AT-MP de l'ensemble des régimes de base.

Il n'en va pas de même pour le transfert de la branche AT-MP du régime général vers la branche maladie du même régime. Ce transfert vise à compenser les charges supportées de manière indue par l'assurance maladie, en raison du phénomène de sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Le transfert de 330 millions d'euros inscrit au budget de la branche en 2003 et 2004 est reconduit en 2005. Il s'agit vraisemblablement d'un transfert a minima , puisque la commission « Lévy-Rozenwald » indiquait, dans son rapport de septembre 2002 1 ( * ) , que la dépense imputée à tort, à l'assurance maladie se situait plutôt entre 368 et 550 millions d'euros par an.

b) Des transferts vers les « fonds de l'amiante » en forte progression

L'indemnisation des victimes de l'amiante repose sur deux dispositifs principaux : le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA), institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 et le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Le FCAATA verse aux salariés victimes de l'amiante une allocation de cessation anticipée d'activité et s'assimile donc à un régime de pré-retraite. Le FIVA, quant à lui, complète l'indemnisation offerte par les régimes de sécurité sociale afin que les victimes de l'amiante obtiennent une réparation complète de leur préjudice.

Ces deux fonds connaissent une montée en charge rapide. Le montant des prestations du FCAATA pour l'exercice 2003 s'élève à 516 millions d'euros (pour environ 25.000 bénéficiaires), soit une progression de 50 % par rapport à l'exercice 2002. Le FIVA a reçu depuis sa création environ 15.000 dossiers de demande d'indemnisation, dont 10.000 depuis juin 2003.

Situation financière du FCAATA

Les prestations sur l'exercice 2004 devraient atteindre 660 millions d'euros ; l'estimation pour 2005 est de 752 millions.

Le financement du fonds est assuré, pour l'essentiel, par la branche AT-MP du régime général. Le versement d'une partie des droits de consommation sur le tabac permet au fonds de bénéficier d'environ 30 millions d'euros supplémentaires de recettes. La contribution de la branche AT-MP du régime des salariés agricoles est plus marginale.

Ressources du FCAATA

(en millions d'euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

Contributions de la branche AT-MP du régime général

205,8

300

450

500

600

Contributions de la branche AT-MP des salariés agricoles

 
 

0,1

0,5*

0,7*

Contribution des entreprises (mesure nouvelle LFSS pour 2005)

 
 
 
 

120*

Droits sur les tabacs

31,5

34,3

32,4

29*

29*

Total

237,3

334,3

482,4

529,5

749,7

* estimation

Source : Direction de la sécurité sociale

L'augmentation des dépenses du fonds, même si elle tend à ralentir, demeure encore très rapide (+ 28 % en 2004 par rapport à 2003; + 14 % prévu en 2005).

Évolution du budget du fonds de 1999 à 2005

(en millions d'euros)

FCAATA

1999

2000

%

2001

%

2002

%

2003

%

2004

%

2005

%

CHARGES

8,6

54,4

533

166,4

206

324,6

95

515,7

59

660,3

28

752,8

14

Source : Direction de la sécurité sociale

Le FCAATA a accusé un déficit de 33 millions d'euros en 2003, qui devrait s'aggraver et atteindre 130 millions cette année. Pour ramener le fonds vers l'équilibre, la loi de financement pour 2005 prévoit deux mesures :

- une augmentation de 100 millions d'euros de la contribution de la branche AT-MP ;

- la création d'une nouvelle contribution mise à la charge des entreprises qui ont exposé leurs salariés à l'amiante, pour un rendement attendu de 120 millions d'euros.

Situation financière du FIVA

La situation financière du FIVA est moins difficile dans la mesure où les dotations qu'il a obtenu ont excédé ses dépenses jusqu'en 2003, ce qui lui a permis d'accumuler d'importantes réserves.

(en millions d'euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

contributions de la branche accidents du travail /
maladies professionnelles

438,3

180

190

100

200

contributions de l'État

 

38

40

0

nd

Total dotations

438,3

218

230

100

nd

Dotations cumulées

438,3

656,3

886,3

986,3

nd

Dépenses

0

14,1

176,7

470*

600

Réserves

438,3

642,2

695,5

325,5*

nd

* prévisions

Source : Direction de la sécurité sociale

En 2004, la contribution de la branche AT-MP au FIVA a été limitée à 100 millions d'euros et l'État n'a effectué aucun versement. Le Fonds a donc largement puisé dans ses réserves pour financer ses dépenses. La poursuite d'une telle politique n'étant pas envisageable, la loi de financement pour 2005 propose de porter à 200 millions d'euros la contribution de la branche. La contribution de l'État n'est pas encore connue mais elle pourrait osciller entre 50 et 130 millions d'euros.

La dégradation de la situation financière de la branche AT-MP rend sa réforme d'autant plus impérieuse ; celle-ci doit porter sur les paramètres financiers, mais également veiller à améliorer le dispositif de prévention afin d'éviter que des catastrophes sanitaires de l'ampleur de celle de l'amiante ne se reproduisent à l'avenir.

* 1 L'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale prévoit qu'une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes remet tous les trois ans au Parlement et au Gouvernement un rapport évaluant le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Mme Lévy-Rozenwald préside actuellement cette commission.

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