EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 1er

Déclaration d'opérations suspectes à l'Autorité des marchés financiers

Commentaire : le présent article a pour objet de créer une obligation de déclaration, imposée aux intervenants professionnels sur les marchés financiers et établie auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF), des opérations suspectes portant sur des instruments financiers cotés. Il prévoit les conditions de la déclaration, son contenu, ses modes de transmission, ainsi que le régime de responsabilité des personnes procédant à la notification et destinataires de celle-ci.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE MÉCANISME DE DÉCLARATION DE SOUPÇON EXISTANT EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DES CAPITAUX

1. Un défi croissant qui implique des obligations étendues

Dans un contexte marqué par la multiplication, la complexification et l'internationalisation des flux financiers, la lutte contre le financement du terrorisme et contre le blanchiment 40 ( * ) des capitaux issus du trafic de drogue et du crime organisé constitue un défi important pour le monde économique et a suscité aux niveaux communautaire 41 ( * ) et national une législation étoffée au cours des quinze dernières années, ainsi que l'établissement de recommandations précises par l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

Se fondant sur le principe de la connaissance du client, ce cadre juridique présente l'originalité de requérir le concours des acteurs financiers, et plus particulièrement des établissements de crédit, pour la mise en oeuvre de cette police des capitaux et la détection des flux d'origine (s'agissant du trafic de stupéfiants) ou à vocation (s'agissant du terrorisme) illicites .

Les établissements financiers et certaines professions réglementées, telles que les notaires et les avocats, sont ainsi soumis à un certain nombre d'obligations de vigilance , régies par les articles L. 563-1 à L. 563-6 du code monétaire et financier. Elles consistent par exemple à identifier tout client avant de nouer une relation contractuelle avec lui, à identifier les clients « occasionnels » qui demandent à réaliser des opérations d'un montant supérieur à 8.000 euros ou à louer un coffre, et à surveiller particulièrement les opérations d'un montant supérieur à 150.000 euros, qui se présentent dans des conditions inhabituelles de complexité et ne paraissent pas avoir de justification économique ou d'objet licite.

2. La prévention par la déclaration d'opérations suspectes

Les dispositions du présent article tendent à s'inspirer du mécanisme de « déclaration de soupçon » prévu en matière de lutte contre le blanchiment , pour l'appliquer aux opérations susceptibles d'être constitutives d'abus de marché.

Un grand nombre de professionnels 42 ( * ) au contact d'investisseurs sont soumis à une obligation de déclaration de soupçon portant, aux termes de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier, sur les sommes et opérations qui pourraient provenir du trafic de stupéfiants 43 ( * ) , d'activités criminelles organisées, de la corruption et de la fraude aux intérêts des Communautés européennes, ou qui pourraient participer au financement du terrorisme 44 ( * ) .

Cette déclaration est adressée à la cellule TRACFIN , service administratif rattaché au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dont les attributions ont été fixées par la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants, et dont l'activité opérationnelle a véritablement démarré le 13 février 1991. Selon la Fédération bancaire française, 9.007 déclarations de soupçon ont ainsi été reçues par TRACFIN en 2003 (8.719 en 2002 et 4.639 en 2001), dont les trois quarts émanaient des établissements de crédit.

Cette obligation de déclaration a été étendue par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, d'une part, aux opérations dont l'identité du donneur d'ordre ou du bénéficiaire reste douteuse malgré les vérifications d'identité auxquels les organismes financiers doivent procéder, et d'autre part, aux opérations faisant apparaître un fonds fiduciaire dont l'identité des constituants ou des bénéficiaires n'est pas connue.

Ces dernières obligations peuvent en outre être étendues par décret à certains pays dont la législation est reconnue comme insuffisante, ou dont les pratiques sont considérées comme faisant obstacle à la lutte contre le blanchiment des capitaux par le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) de l'OCDE 45 ( * ) .

B. LES DISPOSITIONS PRÉVUES PAR LE NOUVEAU RÉGIME COMMUNAUTAIRE DE L'ABUS DE MARCHÉ

1. La déclaration de soupçon, élément déterminant de la prévention des abus de marché

La déclaration d'opérations suspectes auprès d'une autorité compétente participe de la prévention des délits d'initiés et des manipulations de marché, qui a fait l'objet d'un important dispositif législatif communautaire que le présent projet de loi propose de transposer.

Ainsi qu'il a été précisé, cette législation est structurée en deux « étages » comprenant une directive-cadre, la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (directive « abus de marché »), et quatre textes d'application venant préciser les incidences organisationnelles et techniques des principes exposés par cette directive-cadre.

Le vingt-septième considérant de la directive 2003/6/CE pose un principe d'implication des acteurs financiers dans la prévention et la détection des abus de marché , analogue à celui prévalant en matière de lutte contre le blanchiment, en précisant qu' « il convient que les opérateurs de marché contribuent à prévenir les abus de marché et adoptent des dispositions structurelles visant à empêcher et à déceler les pratiques de manipulations de marché. Au nombre de ces dispositions peuvent figurer des prescriptions concernant la transparence des opérations conclues (...) (et) l'introduction d'un système efficace de détection des ordres anormaux (...) ».

Le point 9 de l'article 6 de cette directive prévoit explicitement le principe de la déclaration de soupçon des professionnels des marchés , en disposant que « les Etats membres imposent à toute personne effectuant des opérations sur instruments financiers à titre professionnel d'avertir sans délai l'autorité compétente si cette personne à des raisons de suspecter qu'une opération pourrait constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché ».

2. Le haut degré de précision des dispositions de la directive 2004/72/CE

Les articles 7 à 11 de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés, la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, apportent les précisions nécessaires à la mise en oeuvre de la nouvelle obligation de déclaration de soupçon. Cette directive devait être transposée dans la législation des Etats membres avant le 12 octobre 2004 .

L'article 7 expose les conditions de la notification des opérations suspectes . Il dispose ainsi :

« Les États membres veillent à ce que les personnes visées à l'article 1 er , point 3 46 ( * ) , décident, sur la base d'un examen au cas par cas, si une opération peut raisonnablement être suspectée de constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché . Pour ce faire, elles tiennent compte des éléments constitutifs de l'opération d'initié ou de la manipulation de marché mentionnés aux articles 1 er à 5 de la directive 2003/6/CE, dans la directive de la Commission 2003/124/CE (...) , ainsi que par l'article 4 de la présente directive. Sans préjudice de l'article 10 de la directive 2003/6/CE, les personnes qui effectuent des opérations à titre professionnel sont soumises aux règles de notification de l'État membre dans lequel elles ont leur siège social ou leur administration centrale ou, dans le cas d'une succursale, de l'État membre où celle-ci est située. La notification est adressée à l'autorité compétente de cet État membre.

« Les États membres veillent à ce que les autorités compétentes auxquelles des opérations suspectes sont notifiées transmettent immédiatement cette information aux autorités compétentes des marchés réglementés concernés ».

L'article 8 prévoit que la notification de « tout fait ou information rendant l'opération concernée raisonnablement suspecte » soit effectuée sans délai par les professionnels des marchés.

L'article 9 expose dans les détails le contenu de la notification d'opérations suspectes. Elle doit ainsi comporter les informations suivantes :

« a) la description des opérations, en particulier du type d'ordre (ordre limité, ordre « au mieux » ou autres caractéristiques de l'ordre) et du mode de négociation utilisé (achat en bloc, par exemple) ;

« b) les raisons amenant à soupçonner que les opérations pourraient constituer un abus de marché ;

« c) les moyens d'identification des personnes pour le compte desquelles les opérations ont été réalisées et des autres personnes impliquées dans ces opérations ;

« d) la qualité en vertu de laquelle agit la personne soumise à l'obligation de notification (telle que pour compte propre ou pour compte de tiers) ;

« e) toute autre information pertinente concernant les opérations suspectes » .

En cas d'indisponibilité de ces informations au moment de la notification, celle-ci doit au moins mentionner les raisons pour lesquelles les personnes l'effectuant soupçonnent les opérations d'être constitutives d'une opération d'initié ou d'une manipulation de marché. Les informations complémentaires doivent être communiquées à l'autorité compétente dès qu'elles deviennent disponibles.

L'article 10 a trait aux modes de notification . Celle-ci peut être effectuée par lettre, courrier électronique, télécopie ou téléphone, sous réserve dans ce dernier cas qu'une confirmation soit formulée par écrit sur demande de l'autorité compétente.

L'article 11 expose enfin le régime de responsabilité et de respect du secret professionnel des personnes procédant à la notification comme du personnel de l'autorité compétente.

Le point 1 de l'article 11 prévoit une interdiction , pour les personnes procédant à la notification, d'en informer d'autres personnes que l'autorité compétente, et en particulier celles pour le compte desquelles les opérations suspectes ont été effectuées ou les parties qui leur sont liées, sauf en vertu de dispositions légales. Le respect de cette obligation n'expose la personne ayant effectué la notification à aucune responsabilité d'aucune sorte , pour autant que la personne qui notifie ait agi de bonne foi.

Le point 2 interdit à l'autorité compétente destinataire d'informer quiconque de l'identité des personnes qui ont notifié les opérations suspectes, dès lors qu'une telle information porterait préjudice à ces personnes ou risquerait de leur nuire.

Le point 3 dispose enfin que la notification de bonne foi à l'autorité compétente ne constitue pas une violation du secret professionnel requis en vertu de dispositions législatives, réglementaires, ou de stipulations contractuelles, et exonère dès lors de toute responsabilité la personne ayant effectué cette notification.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article propose d'insérer une nouvelle sous-section 5, composée de six articles numérotés L. 621-17-1 à L. 621-17-6, dans la section 4 du titre II du livre VI du code monétaire et financier, qui est consacrée aux pouvoirs de l'AMF.

Le I du présent article procède par conséquent à une renumérotation des sous-sections de cette section 4. La sous-section 5 intitulée « Autres compétences » devient la sous-section 6, tandis que le II du présent article crée une nouvelle sous-section 5 intitulée « Déclaration d'opérations suspectes ».

A. LE CHAMP RATIONAE PERSONAE ET RATIONAE MATERIAE DE LA DÉCLARATION D'OPÉRATIONS SUSPECTES

1. Les dispositions proposées pour l'article L. 621-17-1 du code monétaire et financier

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-1 du code monétaire et financier expose les principales caractéristiques de l'obligation de notification des opérations suspectes. Les personnes soumises à cette obligation sont les prestataires de services d'investissement (PSI) agréés (établissements de crédit et les entreprises d'investissement), et les personnes mentionnées à l'article L. 421-8 du même code, c'est-à-dire les membres des marchés réglementés 47 ( * ) . L'autorité destinataire de la notification est logiquement l'AMF.

L'objet de la notification porte sur toute opération sur des instruments financiers cotés, effectuée pour compte propre ou pour compte de tiers, dont les personnes soumises à l'obligation de notification « ont des raisons de suspecter qu'elle pourrait constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché, au sens des dispositions du règlement général de l'AMF ». Cette formulation est donc proche de celle prévue par la directive 2004/72/CE, précitée, et peut être jugée plus appropriée, dans la mesure où la transposition des termes de la directive « si une opération peut raisonnablement être suspectée de constituer une opération d'initié (...) » se traduit par les termes plus objectifs « dont ils ont des raisons de suspecter qu'elle pourrait constituer (...) ».

Le caractère « raisonnable » de la motivation de la déclaration de soupçon peut paraître de nature à créer une incertitude juridique au détriment du déclarant. Cette incertitude peut toutefois être relativisée par le régime d'exemption de responsabilité prévu par la législation communautaire et le présent article (cf. infra ), comme par les éclaircissements apportés par le neuvième considérant de la directive d'application 2004/72/CE, précitée, qui dispose :

« La notification aux autorités compétentes des opérations suspectes réalisées par des personnes effectuant des opérations sur instruments financiers à titre professionnel doit s'accompagner d'indications suffisamment probantes de l'existence d'un risque d'abus de marché, c'est-à-dire de motifs sérieux amenant à soupçonner ces opérations d'être liées à une opération d'initié ou une manipulation de marché. Certaines opérations peuvent paraître entièrement dénuées de caractère suspect en elles-mêmes, mais leur mise en rapport avec d'autres opérations, un certain comportement ou d'autres informations peut fournir de telles indications sur la possibilité d'un abus de marché ».

La législation communautaire entend donc trouver un compromis , certes difficile dans sa traduction concrète, entre la volonté d'éviter les déclarations abusives et totalement dénuées de fondement, et la nécessité de déclarer extensivement des opérations dont la nature délictueuse n'est pas certaine, mais qui peuvent contribuer à un faisceau d'indices sur un abus de marché complexe et comportant plusieurs opérations liées. Cet équilibre parfois subtil est lié aux contours nécessairement imprécis de la notion même de soupçon.

2. Les dispositions proposées pour l'article L. 621-17-2 du code monétaire et financier

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-2 du code monétaire et financier ne constitue pas une mesure de transposition de la directive précitée. Il traite le cas où l'AMF, conformément aux procédures d'information réciproque prévues par les articles L. 621-15-1 48 ( * ) et L. 621-20-1 49 ( * ) du code monétaire et financier, intervenant entre celle-ci et le procureur de la République dans le cadre de la double incrimination, pénale et administrative, d'une infraction, transmet certains faits ou informations au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris. Le procureur de la République a alors communication d'une éventuelle déclaration d'opérations suspectes, mais celle-ci ne figure pas au dossier de la procédure, conformément au mécanisme déjà existant en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux, afin de préserver son caractère confidentiel . Le dossier est en effet accessible aux parties, et notamment à la ou aux personnes susceptibles de figurer dans la déclaration.

B. LE CONTENU DE LA DÉCLARATION

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-3 du code monétaire et financier dispose, en son premier alinéa, que le règlement général de l'AMF précise les conditions dans lesquelles est faite la déclaration de soupçon.

Le deuxième alinéa prévoit que la déclaration peut être écrite ou verbale , conformément aux dispositions de l'article 10 de la directive 2004/72/CE, précitée. Cette dernière se révèle toutefois plus précise, puisqu'elle mentionne une liste des moyens techniques de transmission de la déclaration, soit la lettre, le courrier électronique, la télécopie ou le téléphone, ce dernier moyen de transmission impliquant effectivement la possibilité d'une transmission orale et non écrite. La formulation, quoique moins détaillée, du texte proposé par le présent article, peut néanmoins être retenue, considérant la nécessité de préserver la marge d'évolution des techniques utilisées - et ce faisant la pérennité de la loi -, comme de s'en tenir aux critères déterminants de la communication écrite ou verbale.

Il est également précisé, comme le dispose l'article 10 de la directive précitée, qu'en cas de déclaration orale, l'AMF peut en demander une confirmation par écrit. Il est toutefois permis de s'interroger sur le caractère facultatif de cette demande de confirmation écrite , qui peut donner lieu à des oublis ou négligences et à une exonération de responsabilité de l'Autorité en cas de litige. Le texte de la directive tend à conférer un caractère plus obligatoire à cette confirmation, puisqu'il prévoit que la notification peut être effectuée par téléphone, « sous réserve (...) qu'une confirmation soit donnée par écrit sur demande de l'autorité compétente ».

Les alinéas suivants exposent le contenu de la déclaration , qui reprend, dans des termes analogues, les éléments prévus par l'article 9 de la directive précitée :

- la description des opérations et du mode de négociation utilisée ;

- les raisons conduisant à soupçonner que les opérations constituent un délit d'initié ou une manipulation de cours ;

- les moyens d'identification des personnes pour le compte de qui les opérations ont été réalisées et de toute autre personne impliquée dans ces opérations ;

- l'indication que les opérations ont été effectuées pour compte propre ou pour compte de tiers ;

- toute autre information pertinente concernant les opérations déclarées.

Conformément au point 2 de l'article 9 de la directive précitée, le dernier alinéa du texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-3 du code monétaire et financier précise également la procédure que le déclarant doit suivre en cas d'indisponibilité des informations requises ci-dessus. La déclaration doit alors au moins mentionner les raisons conduisant à suspecter le caractère délictueux des opérations incriminées, et les autres informations sont communiquées à l'AMF dès qu'elles deviennent disponibles.

C. LES OBLIGATIONS DE SECRET DES INTERVENANTS

Le texte proposé par le présent article pour les articles L. 621-17-4 à L. 621-17-6 du code monétaire et financier transpose l'article 11 de la directive 2004/72/CE, relatif aux exemptions de responsabilité et au secret professionnel des déclarants et de l'autorité récipiendaire des informations.

L'article L. 621-17-4 sanctionne le fait, pour les préposés ou les dirigeants des personnes auteurs de la déclaration, d'informer les personnes ou les parties liées aux personnes pour le compte desquelles les opérations déclarées ont été effectuées , de l'existence de la déclaration ou des suites qui lui sont réservées. Le non respect de cette obligation est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal, relatif aux atteintes au secret professionnel 50 ( * ) , soit un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende.

Réciproquement, le texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 621-17-5 impose une interdiction similaire de révélation des informations recueillies lors de la notification de la déclaration d'opérations suspectes, à l'AMF et à un champ large de personnes physiques qui lui sont liées : chacun de ses membres, les experts nommés dans ses commissions consultatives 51 ( * ) , les membres de son personnel et ses préposés. Cette interdiction s'applique en outre aux personnes dont l'AMF pourrait solliciter le concours dans le cadre de ses missions de contrôle et d'enquête 52 ( * ) , ainsi qu'à leurs dirigeants et préposés.

Cette interdiction s'exerce toutefois sans préjudice des obligations incombant aux autorités publiques et aux fonctionnaires au titre de l'article 40 du code de procédure pénale 53 ( * ) , portant sur la communication à l'autorité judiciaire de toute information sur un crime ou délit dont ils auraient eu connaissance. Elle s'applique également sans préjudice de l'exercice par l'AMF de ses pouvoirs, ni de ses obligations d'information du procureur de la République au titre des articles L. 621-15-1, L. 621-17-2 (introduit par le texte proposé par le présent article) et L. 621-20-1 54 ( * ) du code monétaire et financier.

Conformément au point 2 de l'article 11 de la directive précitée, le texte proposé par le présent article pour le deuxième alinéa de l'article L. 621-17-5 du même code punit, en cas de révélation du contenu de la déclaration d'opérations suspectes ou de l'identité des personnes qu'elle concerne, les personnes physiques précédemment mentionnées des peines prévues à l'article L. 642-1 du code monétaire et financier 55 ( * ) . Il s'agit des mêmes peines de l'article 226-13 du code pénal que celles prévues par le premier alinéa en cas d'infraction à l'obligation de secret commise par les personnes effectuant la déclaration.

Le texte proposé pour le troisième et dernier alinéa de l'article L. 621-17-5 du code monétaire et financier prévoit une procédure d'information d'une autorité compétente étrangère , lorsque des opérations ayant fait l'objet d'une déclaration de soupçon notifiée à l'AMF relèvent de la compétence de l'autorité de régulation d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'Espace économique européen. L'AMF doit alors transmettre sans délai la déclaration à cette autorité étrangère , considérant le fait que toutes les déclarations de soupçon effectuées par les intermédiaires français doivent l'être auprès de l'AMF, y compris lorsqu'elles concernent des opérations réalisées sur des marchés relevant d'autres autorités de tutelle.

D. LE RÉGIME DES EXEMPTIONS DE RESPONSABILITÉ

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-6 du même code tend à assurer une protection juridique élevée , au regard de la responsabilité civile et pénale, des personnes physiques ayant effectué la déclaration d'opérations suspectes, conformément au point 3 de l'article 11 de la directive 2004/72/CE, précitée. La transposition ainsi proposée, qui envisage les exonérations portant sur les différents motifs potentiels de responsabilité, se veut toutefois plus précise que la formulation de la directive , qui prévoit de façon plus lapidaire que la notification de bonne foi n'entraîne « aucune responsabilité d'aucune sorte » des personnes l'ayant effectuée.

Le premier alinéa prévoit ainsi une exonération de responsabilité pénale au profit des dirigeants et préposés des personnes soumises à l'obligation de déclaration, lorsqu'elles ont effectué de bonne foi cette déclaration. Aucune poursuite pour violation de secret professionnel, sur le fondement de l'article 226-13 du code pénal, précité, ne peut dès lors être exercée contre ces personnes. Le deuxième alinéa prévoit en outre une exonération de responsabilité civile pour ces mêmes personnes.

Le troisième alinéa précise les conséquences de l'exemption de toute responsabilité du déclarant. Aucune poursuite pénale ne peut être engagée contre ses dirigeants ou préposés en faisant application des articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier, qui prévoient le régime de sanction applicable en cas de délit d'initié 56 ( * ) , de diffusion d'information fausse ou trompeuse et d'entrave au fonctionnement régulier d'un marché financier, et des articles 321-1 à 321-3 du code pénal, relatif au recel 57 ( * ) de crimes et délits. De même, ces personnes ne peuvent faire l'objet d'aucune procédure de sanction administrative de l'AMF pour des faits liés à une opération d'initié ou à une manipulation de cours. Le bénéfice de ces exemptions suppose toutefois, et de façon logique, que le déclarant ne se soit livré à aucune concertation frauduleuse avec l'auteur de l'opération ayant fait l'objet de la déclaration.

Le quatrième et dernier alinéa étend ces exonérations de responsabilité au cas où la déclaration de soupçon se révèlerait in fine « inutile » en ne divulguant aucun fait répréhensible. Il en résulte que la déclaration de bonne foi à l'AMF ne saurait entraîner de poursuites à l'encontre des déclarants , quand bien même les opérations déclarées se révèleraient a posteriori ne présenter aucun caractère fautif ou délictueux, auraient fait l'objet d'une décision de non-lieu ou de relaxe, ou ne conduiraient à aucune sanction prononcée par l'AMF.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances approuve le principe de cette déclaration d'opérations suspectes , qui se voit ainsi étendue des flux bancaires aux opérations boursières. Ses modalités, les dispositions du règlement général de l'AMF tendant à préciser la nature de l'utilisation délictueuse d'une information privilégiée et les indices de manipulation de marché, ainsi que le haut niveau de protection offert aux déclarants, sont de nature à renforcer la préservation de l'intégrité des marchés. L'efficacité de cette réforme suppose néanmoins que l'AMF dispose des moyens de se prononcer rapidement sur les opérations qui lui auront été notifiées , afin de garantir la visibilité d'action des investisseurs comme des émetteurs des titres concernés par les déclarations.

Le régime d'exemption de responsabilité civile et pénale, sauf cas de complicité avec l'auteur du délit, se révèle légitime et nécessaire pour préserver l'incitation des intermédiaires financiers à procéder aux déclarations et à faire preuve de prudence, sans encourir le risque d'être poursuivis par leurs clients, en particulier dans le cas où les opérations déclarées ne se révèleraient in fine pas délictueuses.

Il importe toutefois de préciser que la mise en oeuvre concrète des mécanismes d'alerte, de filtre et d'organisation de la procédure globale de déclaration de soupçon des abus de marché se traduira par une certaine complexité des systèmes d'information des intermédiaires financiers , source de nouveaux investissements et de délais de mise en place. Cette complexité paraît plus prononcée pour les opérations portant sur des titres obligataires , dont les critères d'analyse n'ont pas encore été finalisés par le CERVM. Il appartiendra donc aux prestataires de services d'investissement de faire preuve d'une certaine réactivité dans la mise en place de leurs procédures, comme à l'AMF de faire preuve d'objectivité et de mesure, le cas échéant, dans l'examen au cas par cas de la fiabilité des nouveaux systèmes.

Il reste que l'antériorité du dispositif communautaire relatif à l'abus de marché, la concertation menée en amont avec les professionnels et le retard pris par la France dans la transposition des différents textes européens ne justifient guère l'éventuel octroi, par voie législative, d'un délai de plusieurs mois de mise en place des systèmes d'information requis.

La pleine applicabilité du dispositif ne sera toutefois acquise que lors de la publication des dispositions du règlement général de l'AMF qui, aux termes du texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-3 du code monétaire et financier, viendront préciser les conditions dans lesquelles est réalisée la déclaration d'opérations suspectes. L'AMF pourra donc, le cas échéant, tenir compte des difficultés techniques auxquelles seraient confrontés les émetteurs pour publier ces dispositions dans un délai qui soit cohérent avec la mise en place concrète des systèmes de détection des opérations suspectes.

Il pourrait être objecté que ce nouveau dispositif ne fait que conforter l'entrée dans une « ère de la délation », déjà initiée par le renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux. Votre rapporteur général considère que le caractère occulte et souvent complexe des abus de marché, la multiplicité des intervenants sur les marchés boursiers et les conséquences économiques potentiellement graves que peuvent exercer ces abus sur les émetteurs dont les titres sont l'objet, conduisent à ne plus s'en remettre à la seule surveillance des régulateurs nationaux . La participation des PSI et des membres des marchés réglementés à la détection des infractions devient nécessaire, dans un double objectif de prévention des délits et de renforcement de la responsabilité des intermédiaires financiers dans la mise en oeuvre d'une transparence réelle.

Ainsi qu'il a été précisé supra , la déclaration peut être écrite ou verbale. Le texte proposé par le présent article prévoit que dans ce second cas, la demande de confirmation par écrit de l'AMF est facultative. Votre rapporteur général vous propose un amendement tendant à rendre cette confirmation obligatoire . Cette disposition serait à la fois plus proche de l'esprit du texte de la directive, renforcerait la responsabilité de l'AMF et préviendrait un recours abusif aux notifications sans fondement.

Votre rapporteur général vous propose également un amendement tendant à préciser les modalités de transmission, par l'AMF, d'informations à une autorité de tutelle d'un autre Etat membre, lorsque les opérations ayant fait l'objet de la déclaration relèvent de la compétence de cette autorité. Dans la mesure où le texte proposé par le présent article pour le troisième alinéa de l'article L. 621-17-5 du code monétaire et financier n'indique pas explicitement la procédure que doivent suivre les intermédiaires français en cas de demandes de complément d'informations émanant de ces autorités étrangères, il est proposé, dans un souci de parallélisme des formes, que ces compléments d'information soient d'abord communiqués à l'AMF, qui les transmet ensuite à l'autorité étrangère compétente .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Coordination

Commentaire : le présent article procède à une coordination au sein du code monétaire et financier, afin de tenir compte des dispositions de l'article premier, relatives à la notification d'opérations suspectes.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

L'article L. 532-18 du code monétaire et financier, introduit par la loi de sécurité financière n° 2003-706 du 1 er août 2003 et relatif à la libre prestation de services financiers en France, tend à assimiler à des prestataires de services d'investissement (PSI) les personnes morales ou physiques agréées dans un autre Etat et qui établissent des succursales en France pour fournir des services d'investissement et des services connexes. Il dispose ainsi :

« Dans la limite des services qu'elle est autorisée à fournir sur le territoire de son Etat d'origine, et en fonction de l'agrément qu'elle y a reçu, toute personne morale ou physique agréée pour fournir des services d'investissement peut, sans préjudice des dispositions des articles L. 511-21 à L. 511-28, sur le territoire de la France métropolitaine et des départements d'outre-mer, établir des succursales pour fournir des services d'investissement et des services connexes, et intervenir en libre prestation de services dans des conditions fixées par le conseil des marchés financiers, notamment en ce qui concerne la protection des fonds des clients.

« Pour l'application des articles L. 213-3, L. 322-1 à L. 322-4, L. 421-6, L. 421-7, L. 421-8 à L. 421-11, L. 432-20, L. 431-7, L. 531-10, L. 533-3, L. 533-4, L. 533-6 à L. 533-11, L. 533-13 et L. 621-18-1, les personnes mentionnées à l'alinéa précédent sont assimilées à des prestataires de services d'investissement ».

Par coordination, le texte proposé par le présent article tend à insérer dans le second alinéa de l'article L. 532-18 du code monétaire et financier, une référence aux articles L. 621-17-1 à L. 621-17-6 du même code, afin que les personnes physiques ou morales agréées à l'étranger et établies en France en libre prestation de services, puissent être également soumises à l'obligation de déclaration d'opérations suspectes prévue par l'article premier du présent projet de loi .

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances approuve ces dispositions formelles.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Adaptation du régime de déclaration d'opérations sur titres effectuées par les dirigeants d'un émetteur et les personnes qui leur sont liées

Commentaire : le présent article a pour objet d'actualiser les dispositions de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, issu de la loi de sécurité financière du 1 er août 2003 et relatif à l'obligation de déclaration des opérations effectuées par les dirigeants d'un émetteur, et les personnes qui leur sont liées, sur les titres dudit émetteur.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIONS DE LA LÉGISLATION COMMUNAUTAIRE SUR L'ABUS DE MARCHÉ

1. La directive-cadre 2003/6/CE

La directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché, dispose dans le point 4 de son article 6 que « les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur d'instruments financiers et, le cas échéant, les personnes ayant un lien étroit avec elles, communiquent au moins à l'autorité compétente l'existence des opérations effectuées pour leur compte propre et portant sur des actions dudit émetteur, ou sur des instruments financiers dérivés ou d'autres instruments financiers qui leur sont liés. Les États membres veillent à ce que le public ait aisément accès aux informations, au moins individuelles, concernant ces opérations dès que possible ».

La notion de « personne ayant un lien étroit » avec les dirigeants a été précisée ultérieurement, dans la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004 (cf. infra ).

2. La directive d'application 2004/72/CE

a) Le champ des personnes devant procéder à la notification de leurs opérations sur des titres de l'émetteur

Le septième considérant de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés, la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, permet de cerner les motivations des autorités communautaires et l'esprit du dispositif relatif aux déclarations d'opérations sur les titres d'un émetteur. Il dispose ainsi :

« la déclaration des opérations effectuées pour leur compte propre par des personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur, ou par des personnes ayant un lien étroit avec elles, constitue une information précieuse pour les participants au marché, mais aussi un moyen supplémentaire de surveillance des marchés par les autorités compétentes . L'obligation pour les responsables de haut niveau de notifier leurs opérations est sans préjudice de leur obligation de s'abstenir de toute opération d'initié sur la base de toute information privilégiée (...) ».

Le point 1 de l'article premier de cette directive précise ainsi le champ rationae personae des personnes « exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur » . Il s'agit d'une personne qui est :

« a) un membre des organes d'administration, de gestion ou de surveillance de l'émetteur ;

« b) un responsable de haut niveau qui, sans être membre des organes visés au point a), dispose d'un accès régulier à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement l'émetteur et du pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant l'évolution future et la stratégie d'entreprise de cet émetteur ».

Le point 2 de ce même article définit très précisément la notion de « personne étroitement liée à une personne exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un instrument financier ». Il s'agit des personnes suivantes :

« a) le conjoint de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes, ou tout autre partenaire de cette personne considéré comme l'équivalent du conjoint par la législation nationale ;

« b) selon le droit national, les enfants à charge de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes ;

« c) tout autre parent de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes qui partage le même domicile depuis au moins un an à la date de l'opération concernée ;

« d) toute personne morale , fiducie ou autre trust , ou partnership dont les responsabilités dirigeantes sont exercées par une personne visée au paragraphe 1 du présent article ou aux points a), b) et c) du présent paragraphe, ou qui est directement ou indirectement contrôlée par cette personne, ou qui a été constituée au bénéfice de cette personne, ou dont les intérêts économiques sont substantiellement équivalents à ceux de cette personne ».

b) Le délai et le contenu de la notification

L'article 6 de cette même directive apporte des précisions sur les règles de territorialité du droit applicable, le délai et le contenu de la notification :

« 1. Aux fins de l'application de l'article 6, paragraphe 4, de la directive 2003/6/CE, et sans préjudice du droit de chaque État membre d'imposer des obligations de notification autres que celles prévues par cet article, les États membres veillent à ce que toutes les opérations portant sur des actions admises à la négociation sur un marché réglementé, ou sur des instruments dérivés ou d'autres instruments financiers liés à celles-ci, effectuées pour compte propre par les personnes visées à l'article 1 er , points 1 et 2, soient notifiées aux autorités compétentes. Les règles de notification auxquelles ces personnes sont tenues de se conformer sont celles de l'État membre dans lequel l'émetteur a son siège social . La notification est effectuée dans les cinq jours ouvrables suivant l'opération auprès de l'autorité compétente de cet État membre. Lorsque l'émetteur n'a pas son siège social dans un État membre, cette notification est effectuée auprès de l'autorité compétente de l'État membre dans lequel il est tenu de déposer les informations annuelles relatives à ses actions en vertu de l'article 10 de la directive 2003/71/CE.

« 2. Les États membres peuvent décider que jusqu'à ce que le montant total des opérations atteigne cinq mille euros à la fin d'une année civile, la notification n'est pas requise ou peut être reportée au 31 janvier de l'année suivante (...).

« 3. La notification doit contenir les informations suivantes :

« a ) le nom de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes au sein de l'émetteur ou, le cas échéant, le nom de la personne ayant un lien étroit avec celle-ci ;

« b) le motif de l'obligation de notification ;

« c ) le nom de l'émetteur concerné ;

« d) la description de l'instrument financier ;

« e) la nature de l'opération (par exemple acquisition ou cession) ;

« f) la date et le lieu de l'opération ;

« g) le prix et le montant de l'opération.

B. LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 122 DE LA LOI DE SÉCURITÉ FINANCIÈRE

L'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, introduit par l'article 122 de la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière, a en partie transposé les dispositions de la directive 2003/6/CE, précitée, en prévoyant que les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de titres d'une personne faisant appel public à l'épargne, réalisées par certaines personnes physiques, soient communiquées à l'AMF . Il dispose ainsi :

« Toute personne faisant appel public à l'épargne communique à l'Autorité des marchés financiers et rend publics dans un délai déterminé par le règlement de l'Autorité des marchés financiers les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de leurs titres ainsi que les transactions opérées sur ces titres au moyen d'instruments financiers à terme, réalisés par :

« a) les membres du conseil d'administration, du directoire, du conseil de surveillance, le directeur général, le directeur général unique, le directeur général délégué ou le gérant de cette personne ;

« b) des personnes ayant, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, des liens personnels étroits avec l'un de ceux qui sont mentionnés ci-dessus.

« Les modalités et conditions de la communication et de la publication prévues ci-dessus sont fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée de ces opérations » .

Sur l'initiative de votre rapporteur général, la rédaction proposée dans le projet de loi avait été améliorée sur deux points :

- l'insertion, dans le champ des opérations soumises à l'obligation de communication de l'AMF, des transactions portant sur les produits dérivés ayant comme sous-jacent les titres des émetteurs concernés ;

- la mention de « liens personnels étroits » avec les dirigeants et mandataires sociaux plutôt que celle, manquant d'assise juridique, de « liens personnels », afin de mieux tenir compte de la formulation prévue par la directive 2003/6/CE du Conseil du 28 janvier 2003, précitée.

Le champ des personnes morales couvert par l'article 122 de la loi de sécurité financière et par l'article 222-14 du règlement général de l'AMF (cf. infra ) est donc plus large que celui prévu par le dispositif communautaire 58 ( * ) , puisque la déclaration porte sur les opérations financières réalisées par certaines personnes physiques sur les titres de « toute personne faisant appel public à l'épargne », alors que l'article 6 de la directive-cadre 2003/6/CE du 28 janvier 2003 vise les « émetteurs d'instruments financiers », c'est-à-dire les émetteurs dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé. Il convient à cet égard de rappeler que les titres d'une société faisant appel public à l'épargne ne sont pas nécessairement cotés sur un marché réglementé. Les dispositions nées de la loi de sécurité financière demeurent néanmoins compatibles avec la législation communautaire , dans la mesure où le directive d'application 2004/72/CE, précitée, n'est pas d'harmonisation maximale et laisse donc aux Etats membres la possibilité de prévoir des dispositions plus contraignantes.

C. LES MODALITÉS PRÉVUES PAR LE RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'AMF

Les dispositions d'application de l'article 6 de la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004, précitée, ont été essentiellement transposées dans le règlement général de l'AMF , conformément au processus de transposition précédemment décrit (cf. exposé général), et plus particulièrement dans ses articles 222-14 et 222-15 , qui figurent dans la section 4 intitulée « Opérations des dirigeants et des personnes qui leur sont étroitement liées sur les titres de la société » du chapitre II (« Information permanente ») du titre II (« Information périodique et permanente ») du livre II (« Emetteurs et information financière ») du règlement général. Ces deux articles précisent notamment le délai, le seuil et le contenu de la notification, qui reprennent les dispositions précitées. Cette obligation de notification est entrée en vigueur le 25 novembre 2004.

L'article 222-14 du règlement général de l'AMF prévoit ainsi que :

« tout émetteur faisant appel public à l'épargne communique à l'AMF et rend publics au moyen d'un communiqué, dans un délai de cinq jours de négociation , les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de ses instruments financiers ainsi que les transactions opérées sur ces instruments au moyen d'instruments financiers à terme, réalisés par les personnes mentionnées à l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier. Ce délai court à compter de la réception par l'émetteur de la déclaration de ces opérations.

« Lorsque le montant total des opérations réalisées, sur une année civile, par les personnes mentionnées à l'article L. 621-18-2 précité est inférieur ou égal à 5.000 euros , l'obligation de communication à l'AMF mentionnée au premier alinéa n'est pas requise.

« Ce montant total est calculé en additionnant les opérations effectuées par les personnes mentionnées au point a de l'article L. 621-18-2 précité ou pour le compte de ces personnes ainsi que les opérations effectuées pour le compte propre des personnes mentionnées au point b de l'article précité.

« En cas d'opération portant sur des instruments financiers à terme, ce même montant s'applique au sous-jacent .

L'article 222-15 dispose quant à lui :

« le communiqué mentionné à l'article 222-14 indique :

« 1° Pour les opérations réalisées par une personne mentionnée au point a de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, le nom de cette personne et sa qualité ;

« 2° Pour les opérations réalisées par une personne mentionnée au point b de ce même l'article, la mention : « une (des) personne(s) liée(s) à... » suivie du nom et de la qualité de la personne mentionnée au point a de l'article précité ;

« 3° La dénomination de l'émetteur concerné ;

« 4° La description de l'instrument financier ;

« 5° La nature de l'opération ;

« 6° La date et le lieu de l'opération ;

« 7° Le prix et le montant de l'opération.

« Le communiqué est mis en ligne sur le site de l'AMF et sur le site de l'émetteur lorsqu'il dispose d'un tel site. Il peut prendre la forme du modèle-type défini dans une instruction de l'AMF ».

Un communiqué de l'AMF du 27 décembre 2004 est en outre venu apporter des précisions sur les champs rationae personae et rationae materiae de la déclaration, dans l'attente de l'adoption de certaines mesures réglementaires.

Communiqué de l'AMF du 27 décembre 2004 sur les déclarations d'opérations sur titres effectuées par les dirigeants de sociétés et les personnes qui leur sont liées

En vertu de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, les émetteurs doivent communiquer à l'AMF et rendre publiques au moyen d'un communiqué, les opérations sur instruments financiers réalisées et déclarées par leurs dirigeants 59 ( * ) , sur une base individuelle et nominative, dans les cinq jours de négociation à compter de la réception de la déclaration de ces opérations, conformément aux articles 222-14 et 222-15 du règlement général de l'AMF. Cette obligation est entrée en vigueur le 25 novembre 2004.

S'agissant des « personnes ayant un lien étroit avec ces dirigeants » et dans l'attente de la publication du décret en Conseil d'Etat qui viendra préciser le périmètre de définition de cette notion, il est recommandé aux dirigeants de communiquer également aux émetteurs les opérations qui leur auront été déclarées par les personnes qui leur sont liées par référence à la liste de l'article 1 er , 2) de la directive 2004/72/CE 60 ( * ) , et en tout cas celles du conjoint non séparé de corps et des enfants à charge résidant chez eux.

Concernant les « responsables de haut niveau » qui disposent d'un accès régulier à des informations privilégiées 61 ( * ) , aucune information n'est en l'état requise dans l'attente de la transposition de cette notion dans la loi française .

S'agissant en second lieu des opérations concernées, il est précisé que ce dispositif s'applique aux souscriptions et aux achats par l'exercice d'options de souscription ou d'achat d'actions même non suivi d'une cession des actions obtenues. Il ne s'applique pas en revanche :

- aux donations, donations-partages et successions, (mais il s'applique aux acquisitions ou souscriptions des titres faisant l'objet de la donation) ;

- aux opérations réalisées par des intermédiaires en vertu d'un mandat exercé dans le cadre du service de gestion de portefeuille pour compte de tiers à la condition que le mandant n'intervienne pas dans la gestion du mandat, ou ;

- aux opérations réalisées par les personnes morales mandataires sociales au sein du groupe auquel elles appartiennent.

En outre, dans l'attente de la publication de l'instruction de l'AMF qui précisera les conditions de transmission de ces informations à l'AMF, les émetteurs peuvent s'inspirer du modèle de la déclaration annexée à la recommandation COB n° 2002-01.

Enfin, le seuil de déclaration de 5.000 euros mentionné au deuxième alinéa de l'article 222-14 du règlement général s'applique par dirigeant et par année civile , en agrégeant l'ensemble des opérations réalisées par un dirigeant et les opérations réalisées par les personnes qui lui sont étroitement liées.

Pour cette première année, la période de calcul court en conséquence du 25 novembre au 31 décembre 2004.

Source : site Internet de l'AMF

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article tend à modifier l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, précité, afin de le rendre plus compatible avec la législation communautaire sur l'abus de marché.

A. L'ÉLARGISSEMENT DU CHAMP RATIONAE MATERIAE

Le du présent article tend à substituer, dans le premier alinéa de l'article L. 621-18-2, précité, les termes « sur des instruments financiers qui leur sont liés » aux termes « sur ces titres au moyen d'instruments financiers à terme ». Cette disposition a pour effet d'élargir le champ des opérations visées par l'obligation de notification précédemment exposée, en ce qu'elle ne vise plus les seuls titres de l'émetteur, c'est-à-dire des titres de capital ou de créance, et les produits dérivés qui ont ces titres pour sous-jacent, mais de façon plus extensive les titres de l'émetteur et l'ensemble des instruments financiers qui sont liés à ces titres . Aux termes de l'article 211-1 du code monétaire et financier, qui définit les instruments financiers, ces derniers comprennent :

« 1. Les actions et autres titres donnant ou pouvant donner accès, directement ou indirectement, au capital ou aux droits de vote, transmissibles par inscription en compte ou tradition ;

« 2. Les titres de créance qui représentent chacun un droit de créance sur la personne morale ou le fonds commun de créances qui les émet, transmissibles par inscription en compte ou tradition, à l'exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ;

« 3. Les parts ou actions d'organismes de placements collectifs ;

« 4. Les instruments financiers à terme 62 ( * ) ;

« 5. Et tous instruments financiers équivalents à ceux mentionnés aux précédents alinéas, émis sur le fondement de droits étrangers ».

Cette disposition, que l'on peut qualifier de « précaution » mais qui est en ligne avec la directive 2004/72/CE, précitée, a essentiellement pour objet d'inclure dans le champ des opérations la grande variété d'instruments hybrides liés aux titres de l'émetteur, tels que les obligations convertibles ou remboursables, et non les seuls instruments dérivés.

B. LE CHAMP RATIONAE PERSONAE

Le du présent article tend à modifier le deuxième alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, précité, pour élargir le champ rationae personae des personnes assujetties à l'obligation de notification , conformément aux dispositions de la directive 2004/72/CE, précitée.

Outre les membres des organes sociaux, le directeur général (unique ou délégué) ou le gérant de l'émetteur, l'obligation de notification s'impose également à toute autre personne qui dispose d'une influence ou d'un pouvoir déterminant ou a accès à des informations importantes au sein de l'émetteur, c'est-à-dire « toute autre personne qui, dans les conditions définies par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, a, d'une part, au sein de l'émetteur, le pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant son évolution et sa stratégie, et a, d'autre part, un accès régulier à des information privilégiées concernant cet émetteur ».

Cet ajout est conforme à la définition précise que prévoit le point 1 de l'article premier de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, précitée, à ceci près qu'il ne vise pas directement les « responsables de haut niveau », qui constituent les termes de la directive, mais le champ plus large de « toute personne » exerçant un pouvoir de décision sur l'évolution et la stratégie de l'émetteur, ou disposant d'un accès régulier à des informations privilégiées. Cette distinction paraît toutefois mineure, en ce que la rédaction proposée par le présent article préserve bien le critère objectif des « responsabilités dirigeantes » que prévoit la directive-cadre du 28 janvier 2003.

En tout état de cause, le nouveau champ des personnes concernées par l'obligation de notification ne saurait inclure des prestataires ou partenaires extérieurs disposant éventuellement d'un accès à des informations privilégiées, tels que les analystes financiers et les commissaires aux comptes, dans la mesure où les personnes visées sont celles qui travaillent « au sein de l'émetteur ».

C. L'ASSOUPLISSEMENT DES CONTRAINTES PESANT SUR L'EMETTEUR

Le du présent article complète le dernier alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, précité, qui prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée de la notification, par des dispositions tendant à alléger la responsabilité de l'émetteur au regard de la collecte des informations portant sur les transactions qui font l'objet de la notification à l'AMF.

Le premier alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier prévoit en effet que la communication des transactions sur titres, réalisées par les personnes précédemment mentionnées, est effectuée par l'émetteur (ie. « toute personne faisant appel public à l'épargne »), et non par les personnes physiques ayant réalisé les opérations.

Si cette obligation de centralisation et de communication de l'information par l'émetteur peut sembler légitime s'agissant des opérations réalisées par les membres des organes sociaux et les dirigeants dudit émetteur, compte tenu de la proximité géographique et fonctionnelle entre ces personnes physiques et la société dont ils sont mandataires ou salariés, elle paraît plus difficile à mettre en oeuvre pour les transactions des personnes entretenant des liens étroits avec les dirigeants et mandataires sociaux. Ces liens étroits étant susceptibles de ressortir à la vie familiale et privée des dirigeants, le risque paraît réel que l'émetteur encoure des sanctions disproportionnées en cas de défaillance dans la collecte d'informations portant sur les transactions de personnes très diverses et sur lesquelles il ne peut exercer qu'un contrôle très variable.

Dès lors, le 3° du présent article prévoit que les personnes concernées par l'obligation de déclaration des transactions sont tenues de communiquer à l'émetteur les informations permettant à cette dernière de remplir ses obligations de communication à l'AMF. Ce faisant, l'émetteur demeure responsable de la centralisation et de la transmission à l'AMF des informations qui lui ont été transmises, mais non plus, le cas échéant, de la sollicitation « pro-active », à l'échelon inférieur, de ces informations auprès des personnes physiques concernées , et en particulier auprès des personnes entretenant des liens étroits avec les dirigeants et mandataires sociaux. La charge de la preuve de la divulgation des informations ne repose donc plus sur l'émetteur, mais sur les personnes physiques - dirigeants, mandataires sociaux et personnes qui leur sont étroitement liées - assujetties à l'obligation de déclaration de leurs transactions.

Cette atténuation des contraintes juridiques pesant sur l'émetteur contribue à relativiser les critiques qui ont parfois été formulées sur le délai de cinq jours de communication à l'AMF et de publication des opérations ainsi déclarées. Ce délai peut être jugé raisonnable, d'autant qu'il porte sur cinq jours de négociation (et non cinq jours calendaires), court à compter de la réception par l'émetteur de la déclaration des opérations, réalisée par les personnes physiques concernées, et se révèle plus strict dans certains Etats membres 63 ( * ) .

Le 3° du présent article prévoit également qu'un décret en Conseil d'Etat définit, outre les conditions dans lesquelles l'assemblée générale des actionnaires est informée des opérations notifiées, les modalités de communication des opérations. Ce décret devrait être pris dans les prochains mois.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général approuve l'élargissement du champ rationae materiae et rationae personae de l'obligation de déclaration des transactions réalisées par certaines personnes physiques, qui est cohérent avec les dispositions de la directive d'application 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004. Il considère néanmoins que l'allègement de la responsabilité de l'émetteur dans la collecte des informations portant sur ces transactions constitue un progrès insuffisant, en ce qu'il n'est pas conforme à la lettre des textes communautaires sur l'abus de marché et n'est pas facteur de simplification du dispositif .

Le point 4 de l'article 6 de la directive 2003/6/CE fait en effet peser sur les seules personnes physiques l'obligation de déclaration et de communication des opérations sur titres, puisqu'il dispose que « les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur d'instruments financiers et, le cas échéant, les personnes ayant un lien étroit avec elles, communiquent au moins à l'autorité compétente l'existence des opérations effectuées pour leur compte propre et portant sur des actions dudit émetteur, ou sur des instruments financiers dérivés ou d'autres instruments financiers qui leur sont liés ».

Le fait que l'émetteur doive centraliser les informations sur les transactions avant de les communiquer à l'AMF crée en outre une étape intermédiaire, qui tend à alourdir le dispositif et n'apparaît pas nécessaire, dès lors que la publicité des transactions est d'une façon ou d'une autre assurée . On ne peut invoquer une obligation de vigilance et de contrôle a posteriori de l'émetteur sur ces transactions, en ce qu'elle relève, le cas échéant, d'un dispositif préventif interne.

Votre rapporteur général vous propose donc un amendement de réécriture de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, comportant les trois dispositions suivantes :

- il fait peser sur les seules personnes physiques l'obligation de déclaration et de transmission à l'AMF des transactions qu'elles réalisent sur les titres d'une personne faisant appel public à l'épargne à laquelle elles sont liées. L'émetteur ne serait donc plus soumis à l'obligation de centralisation et de communication à l'AMF de ces transactions. L'amendement prévoit également que les déclarants adressent une copie de leur déclaration à l'émetteur, et que l'AMF assure la publicité des déclarations qui lui sont transmises ;

- il tend à réorganiser d'une manière plus lisible le deuxième alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, afin de bien distinguer les trois catégories de personnes physiques sur lesquelles pèse l'obligation de déclaration des transactions, c'est-à-dire les dirigeants sociaux, les responsables de haut niveau exerçant un pouvoir de décision sur la stratégie et l'évolution de l'émetteur disposant d'un accès régulier à des informations privilégiées sur cet émetteur, et des personnes entretenant des liens personnels étroits avec les précédentes ;

- il précise enfin que l'information privilégiée détenue par les personnes soumises à l'obligation de déclaration concerne « directement ou indirectement » l'émetteur, conformément à la lettre du dispositif communautaire sur l'abus de marché, et plus particulièrement à la rédaction du point 1 de l'article premier de la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4

Etablissement d'une liste d'initiés par les émetteurs et certains tiers

Commentaire : le présent article a pour objet de créer une obligation d'établissement d'une liste d'initiés, imposée aux émetteurs et aux tiers ayant accès à des informations privilégiées dans le cadre de leurs relations professionnelles avec ces derniers.

I. LE NOUVEAU DROIT COMMUNAUTAIRE APPLICABLE

Les textes communautaires relatifs à la prévention et à la répression de l'abus de marché ont prévu l'établissement d'une liste d'initiés par les sociétés cotées. Une telle liste a pour objectif de faciliter, lors de la mise en oeuvre d'une enquête par les autorités judiciaires ou administratives, l'identification des personnes susceptibles d'avoir commis un délit d'initié .

A. LA DIRECTIVE 2003/6/CE

Le point 3 de l'article 6 de la directive-cadre 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché, prévoit ainsi les conditions générales de cette obligation d'établissement d'une liste d'initiés, selon les termes suivants :

« Les Etats membres exigent des émetteurs, ou des personnes qui agissent au nom ou pour le compte de ceux-ci, qu'ils établissent une liste de personnes travaillant pour eux, que ce soit dans le cadre d'un contrat de travail ou non, et ayant accès à des informations privilégiées. Les émetteurs et les personnes qui agissent au nom ou pour le compte de ceux-ci actualisent régulièrement cette liste et la communiquent à l'autorité compétente lorsque celle-ci le demande ».

Le critère déterminant d'inscription sur cette liste est donc l'accès à une information privilégiée , qui de fait, est la condition préalable du délit d'initié, lequel est constitué lorsqu'il est fait un usage ou une communication illicite de cette information. Le champ rationae personae est double , puisqu'il porte tant sur les personnes établissant la liste que sur celles susceptibles d'y figurer, et potentiellement étendu puisqu'il inclut, pour le premier, les personnes agissant au nom ou pour le compte des émetteurs, et pour le second, les salariés et prestataires personnes physiques ou morales qui « travaillent pour » ces personnes, notion pour le moins souple.

B. LA DIRECTIVE 2004/72/CE

Le sixième considérant de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés , la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, permet d'appréhender les justifications et l'esprit du dispositif relatif à l'établissement de listes d'initiés. Il dispose ainsi :

« l'établissement, par les émetteurs ou les personnes agissant en leur nom ou pour leur compte, de listes de personnes travaillant pour leur compte dans le cadre d'un contrat de travail ou autre et ayant accès à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement l'émetteur est une mesure utile à la protection de l'intégrité des marchés. Ces listes pourraient être utilisées par ces émetteurs ou ces autres personnes pour mieux maîtriser le flux de ces informations privilégiées et, ce faisant, mieux gérer leurs obligations de confidentialité . De plus, elles fourniraient aux autorités compétentes un instrument précieux de contrôle de l'application de la législation relative aux abus de marché . Il est nécessaire que les émetteurs et les autorités compétentes identifient les informations privilégiées auxquelles un initié a accès et déterminent la date à laquelle il y a eu accès (...) ».

L'article 5 de cette directive précise le contenu de la liste, ses modalités d'actualisation et de conservation, ainsi que les obligations de sensibilisation des personnes y figurant au régime légal, pénal et administratif afférent à l'utilisation d'informations privilégiées . Il dispose ainsi :

« 1. Aux fins de l'application de l'article 6, paragraphe 3, troisième alinéa, de la directive 2003/6/CE, les États membres veillent à ce que les listes d'initiés incluent toutes les personnes visées par cet article qui ont accès à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement l'émetteur, de manière régulière ou occasionnelle .

« 2. Les listes d'initiés doivent au minimum mentionner :

« a) l'identité de toute personne ayant accès à des informations privilégiées ;

« b) le motif pour lequel elle est inscrite sur la liste ;

« c) les dates de création et d'actualisation de la liste d'initiés.

« 3. Une liste d'initiés doit être rapidement actualisée :

« a) en cas de changement du motif pour lequel une personne a été inscrite sur la liste ;

« b) lorsqu'une nouvelle personne doit être ajoutée à la liste ;

« c) en mentionnant si et quand une personne inscrite sur la liste cesse d'avoir accès à des informations privilégiées.

« 4. Les États membres veillent à ce que les listes d'initiés soient conservées pendant au moins cinq ans après leur établissement ou leur actualisation.

« 5. Les États membres veillent à ce que les personnes tenues d'établir des listes d'initiés prennent les mesures nécessaires pour que toute personne figurant sur ces listes ayant accès à des informations privilégiées soit dûment sensibilisée aux obligations légales et réglementaires qui lui incombent et informée des sanctions pénales, administratives ou disciplinaires prévues en cas d'utilisation illicite ou de circulation indue de ces informations » .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article tend à insérer un nouvel article L. 621-18-4 dans la section 4 du titre II du livre VI du code monétaire et financier, relative aux pouvoirs de l'AMF.

A. L'ÉTABLISSEMENT DE LA LISTE PAR L'ÉMETTEUR

Le texte proposé par le présent article pour le premier alinéa de l'article L. 621-18-4 du code monétaire et financier expose l'obligation d'établissement de la liste d'initiés imposée aux émetteurs .

Tout émetteur dont les titres sont cotés a ainsi l'obligation d'établir, de mettre à jour et tenir à la disposition de l'AMF, une liste des personnes ayant accès à des informations privilégiées le concernant . Ces personnes peuvent appartenir à deux catégories :

- celles « travaillant » au sein de l'émetteur . Cette disposition concerne donc uniquement les salariés et préposés de l'émetteur ayant accès à des informations privilégiées, tels que les cadres dirigeants ou les collaborateurs des services comptables et financiers ;

- les tiers ayant accès à des informations privilégiées « dans le cadre de leurs relations professionnelles » avec l'émetteur . Cette catégorie est également large et concerne en particulier, s'agissant de l'accès à des informations financières sur l'émetteur, les prestataires de conseil que sont les avocats, commissaires aux comptes ou les banques de financement et d'investissement, qui ont par exemple travaillé avec l'émetteur sur le montage d'une opération financière, ou qui entretiennent des relations professionnelles régulières leur donnant accès à de l'information privilégiée.

Les analystes et journalistes financiers ne sont en revanche a priori pas concernés , dans la mesure où ils ne sont pas réputés disposer d'informations privilégiées sur l'émetteur, de même que les collaborateurs des agences de notation.

Les conditions d'établissement de cette liste seront précisées par le règlement général de l'AMF , qui indiquera notamment son contenu et ses modalités d'actualisation et de conservation, ainsi que le prévoit la directive 2004/72/CE, précitée. La version actuelle du règlement général, tel qu'elle a été publiée le 24 novembre 2004, n'a en effet pas anticipé sur cette création législative ex nihilo .

B. UN SYSTÈME DÉCENTRALISÉ DE RESPONSABILITÉ, PRÉFÉRÉ À CELUI DES « POUPÉES GIGOGNES »

Les tiers ayant accès à des informations privilégiées dans le cadre de leurs relations professionnelles avec l'émetteur sont doublement concernés par le dispositif proposé par le présent article, puisqu'ils sont susceptibles de figurer sur une liste d'initiés, ainsi qu'il a été précisé supra , comme de procéder à l'établissement d'une telle liste.

Le texte proposé par le présent article pour le second alinéa de l'article L. 621-18-4 du code monétaire et financier soumet ainsi ces tiers à une obligation d'établissement d'une liste d'initiés, selon les mêmes modalités que celles prévues par le premier alinéa.

Les tiers doivent donc, à leur tour, établir la liste des deux catégories de personnes qui ont accès aux informations privilégiées concernant l'émetteur, soit les personnes travaillant en leur sein et les tiers ayant accès à ces informations dans le cadre de leurs relations professionnelles avec ces tiers.

L'émetteur n'est donc pas soumis à une obligation de centralisation puis de communication à l'AMF de toutes les listes qui auront été établies, aux échelons « inférieurs », par la chaîne des tiers qui entretiennent directement ou indirectement des relations professionnelles avec lui , ce dont il n'aurait pas nécessairement les moyens humains et matériels, en particulier s'agissant des petites et moyennes sociétés cotées. Un tel système aurait ainsi pu être qualifié de « poupées gigognes ». Afin de ne pas faire peser sur l'émetteur une responsabilité trop étendue quant à l'établissement des listes exhaustives d'initiés, il a été privilégié un processus par lequel chaque niveau intermédiaire établit et communique lui-même la liste des initiés travaillant en son sein et des prestataires du niveau suivant.

De fait, cette possibilité est ouverte par la directive d'application 2004/72/CE, précitée, dont le sixième considérant fait référence à l'établissement des listes d'initiés « par les émetteurs ou les personnes agissant en leur nom ou pour leur compte ».

Ce dispositif a également une vertu pédagogique , dans la mesure où la décentralisation de la responsabilité de l'établissement des listes permet de sensibiliser chaque échelon aux obligations résultant de la détention d'une information privilégiée, conformément aux dispositions du point 5 de l'article 5 de 5 de la directive d'application 2004/72/CE du 29 avril 2004, précitée.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général approuve les dispositions du présent article, et en particulier l'approche pragmatique qui a prévalu dans la diffusion auprès des tiers de l'obligation d'établissement de la liste d'initiés. Il considère que ces listes devraient contribuer à une plus grande efficacité de la prévention des délits d'initiés. Si le fait de figurer sur la liste n'est naturellement pas constitutif d'une présomption de délit d'initié, dans la mesure où la simple détention d'une information privilégiée n'emporte pas utilisation délictueuse de celle-ci, il constitue un indice concordant qui atténue la possibilité pour l'auteur présumé d'un délit d'apporter la preuve contraire .

Votre rapporteur général vous propose un amendement tendant à préciser que les informations privilégiées auxquelles ont accès les personnes inscrites sur la liste d'initiés concernent « directement ou indirectement » l'émetteur, conformément à la rédaction du point 1 de l'article 5 de la directive 2004/72/CE.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5

Transposition par ordonnance de la directive 2004/39/CE relative aux marchés d'instruments financiers

Commentaire : le présent article a pour objet d'habiliter le gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2004/39/CE concernant les marchés d'instruments financiers, qui remplace la directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement. Cette directive tend en particulier à consolider l'harmonisation du cadre juridique des services et entreprises d'investissement, et consacre l'existence de modes de négociation des ordres autres que ceux transitant par les marchés réglementés.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA DIRECTIVE 2004/12/CE DU 21 AVRIL 2004

1. L'ambition d'une réglementation transversale, applicable quels que soient les canaux de négociation des instruments financiers

La directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil, dite « directive MIF », dont le processus d'adoption et les grandes orientations ont été précédemment exposées, abroge et remplace la directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement (« DSI »). Elle prévoit un corpus de règles fondamentales applicables à la négociation d'instruments financiers, quel que soit le marché ou l'infrastructure de négociation en cause .

Bien que la DSI ait été modifiée et augmentée à quatre reprises, la directive MIF est beaucoup plus détaillée et comporte 44 pages et 73 articles. Elle comporte cinq titres, dont un titre nouveau sur les marchés réglementés, et deux annexes, dont le plan est exposé ci-après. Les nouvelles dispositions incorporent un certain nombre de travaux du Comité des régulateurs européens (FESCO puis le CEVM) sur les marchés réglementés, les systèmes alternatifs de négociation (ATS) ou les règles de conduite applicables aux entreprises d'investissement.

Par ailleurs, conformément à la procédure Lamfalussy , exposée précédemment, la directive MIF prévoit une cinquantaine de renvois à des dispositions de niveau 2 (règlements ou directives de la Commission européenne), sur lesquelles le CEVM a rendu un premier avis à la fin du mois de janvier 2005 et doit rendre un second avis à la fin du mois d'avril 2005.

Plan de la directive MIF

Titre premier : définitions et champ d'application (articles 1 à 4)

Titre II : conditions d'agrément et d'exercice applicables aux entreprises d'investissement (articles 5 à 35)

Chapitre premier - Conditions et procédures d'agrément (articles 5 à 15)

Chapitre II - Conditions d'exercice applicables aux entreprises d'investissement (articles 16 à 30)

Section 1 - Dispositions générales

Section 2 - Dispositions visant à garantir la protection des investisseurs

Section 3 - Transparence et intégrité du marché

Chapitre III - Droits des entreprises d'investissement (articles 31 à 35)

Titre III - Marchés réglementés (articles 36 à 47)

Titre IV - Autorités compétentes (articles 48 à 63)

Chapitre premier - Désignation, pouvoirs et procédures de recours (articles 48 à 55)

Chapitre II - Coopération entre les autorités compétentes de plusieurs Etats membres (articles 56 à 62)

Chapitre III - Coopération avec les pays tiers (article 63)

Titre V - Dispositions finales (articles 64 à 73)

Annexe I - Liste des services, des activités et des instruments financiers

Annexe II - « Clients professionnels » aux fins de la directive

La principale innovation introduite par la directive MIF n'apparaît pas explicitement dans le texte, du fait de sa vocation à régir de façon transversale les entreprises d'investissement, parmi lesquelles certaines peuvent régir des infrastructures de négociation concurrençant les marchés réglementés. Il s'agit de la suppression de la possibilité ouverte aux Etats membres, par les points 3 et 4 de l'article 14 de la DSI, de prévoir un principe de centralisation des ordres sur les marchés réglementés , à condition de l'assortir d'exceptions. Ainsi qu'il a été précisé dans l'exposé général, l'article L. 421-12 du code monétaire et financier a introduit ce principe de centralisation et prévu des dérogations.

A l'issue du processus de transposition de la directive MIF, les titres cotés pourront donc être traités sur n'importe quelle autre plate-forme de négociation, en particulier les plates-formes multilatérales ( multilatéral trading facilities , MTF) et les systèmes bilatéraux internalisés au sein d'entreprises d'investissement (cf. infra ), ou négociés de gré à gré. La structuration juridique des marchés boursiers en marchés réglementés et de gré à gré, sous-jacente dans la DSI, s'est en effet révélée inadaptée aux nouvelles techniques boursières et n'a pas permis d'y assimiler les plates-formes multilatérales, les marchés privés organisés (tels que le marché libre en France) ni les systèmes internalisés.

Rappelons que le délai de transposition de cette directive, initialement fixé au 1 er mai 2006, devrait être reportée de six mois, soit au 31 octobre 2006 , pour une application dans les Etats membres au 30 avril 2007.

2. Les nouvelles règles relatives à l'architecture des marchés

a) Trois modes équivalents d'exécution des ordres

Alors que la DSI ne traitait - de façon assez peu développée - que des marchés réglementés, la directive MIF reconnaît trois grands modes d'exécution des transactions qu'elle place sur un même plan , et qui conduisent nécessairement à la suppression du principe de concentration des ordres que posait la DSI : l'exécution sur un marché réglementé, sur un système multilatéral de négociation, et directement par un prestataire de services d'investissement.

La notion d' « admission à la négociation sur un marché réglementé », qui irrigue tout le droit boursier, demeure toutefois un pivot de la nouvelle législation, quel que soit le mode d'exécution des ordres, et contribue à conférer aux marchés réglementés un rôle de référence juridique, notamment dans le cadre de la prévention et de la répression de l'abus de marché.

Aux côtés des marchés réglementés 64 ( * ) , qui sont gérés par les seuls opérateurs de marché 65 ( * ) (lesquels sont l'équivalent des entreprises de marché au sens du code monétaire et financier), est ainsi reconnue en premier lieu une nouvelle catégorie de marchés organisés que sont les MTF 66 ( * ) ; mis en oeuvre par des entreprises d'investissement ou des opérateurs de marché . Les marchés réglementés et les MTF appartiennent donc à la même « famille » et remplissent les mêmes fonctions de négociation ; leur régime juridique présente à ce titre de nombreuses similitudes.

Deux grandes différences existent néanmoins : les MTF ne sont pas intrinsèquement dotés d'une fonction d'admission à la négociation au sens juridique du terme (le statut d'instrument financier admis à la négociation entraîne un certain nombre d'obligations d'informations pour l'émetteur concerné), et ils n'ont pas l'obligation formelle d'être agréés ni de fonctionner régulièrement. Il reste qu'une entreprise de marché telle qu'Euronext, qui gère le marché réglementé Euronext Paris, peut tout à fait créer une plate-forme multilatérale de négociation, comme cela sera le cas avec Alternext .

On est dès lors amené à distinguer deux principaux types de MTF :

- les pures plates-formes d'exécution d'ordres qui n'exercent aucune fonction juridique d'admission à la négociation, et sur lesquelles sont négociés des titres cotés ou non sur des marchés réglementés ;

- les MTF qui exercent une fonction d'admission à la négociation et qui, dans la pratique, fonctionnent comme des marchés réglementés sans en détenir le statut. Tel sera par exemple le cas d'Alternext, marché dédié aux petites et moyennes valeurs créé par Euronext Paris, qui devrait voir le jour le 17 mai 2005. Les conditions d'accès à ce marché et d'information par les émetteurs seront largement simplifiées, mais traduiront des exigences supérieures à celles de l'ancien marché libre. De façon générale, ce type de MTF tend à mettre en évidence un « label » de qualité destiné à renforcer la crédibilité de l'infrastructure de marché et la confiance des investisseurs, qui se traduira en France par la possibilité pour l'AMF d'assurer une certaine supervision, à la demande du gestionnaire de la plate-forme .

Le troisième mode d'exécution est assuré directement par une entreprise d'investissement, qui réalise la transaction en interne en s'interposant face au client et agit alors en tant qu' « internalisateur systématique » 67 ( * ) . Par opposition aux MTF, ces systèmes sont qualifiés de « bilatéraux » dans la mesure où l'entreprise qui gère le système se porte contrepartie de tous les ordres de ses clients, à l'achat comme à la vente et sans recourir à un intermédiaire, sous réserve qu'il détienne leurs comptes espèces et comptes titres.

La question a néanmoins été posée 68 ( * ) de savoir si les internalisateurs pouvaient être réellement qualifiés de « marché » , bien que cette notion apparaisse quelque peu insaisissable lorsqu'elle est envisagée sous l'angle juridique plutôt qu'économique. L'opération conclue dans le cadre de l'internalisation n'est en effet pas réellement le résultat d'une rencontre de l'offre et de la demande, dans la mesure où il s'agit d'une prestation de service adossée à une contrepartie et indissociable d'un fort degré d' intuitu personae .

b) Les règles spécifiques afférentes aux marchés réglementés et aux MTF

La directive MIF précise les règles applicables aux différents types de plates-formes de négociation :

Le titre III, qui est presque entièrement nouveau, développe les règles applicables aux marchés réglementés et à leurs opérateurs . S'agissant des marchés réglementés, elle précise notamment les exigences organisationnelles (article 39), les conditions d'admission et de retrait des instruments financiers aux négociations (articles 40 et 41), les règles d'accès direct ou à distance des prestataires de services d'investissement (PSI), qui aux termes de l'article 42 doivent être « transparentes, non discriminatoires, fondées sur des critères objectifs », et les principes de contrôle des négociations 69 ( * ) et de signalement des manquements aux autorités compétentes (article 43). Aux termes de l'article 47, chaque Etat membre publie également une liste des marchés réglementés dont il est l'Etat d'origine, et communique cette liste ainsi que ses modifications ultérieures aux autres Etats membres ainsi qu'à la Commission européenne. Les opérateurs de marché sont quant à eux des entités ad hoc soumises à des règles largement inspirées de celles applicables aux entreprises d'investissement.

S'agissant des MTF , l'annexe I de la directive prévoit que leur exploitation constitue désormais une activité d'investissement (cf. infra ), exercée par un PSI ou un opérateur de marché, que la directive MIF soumet par ailleurs à différentes obligations, notamment organisationnelles. Les dispositions applicables aux MTF, qui relèvent du titre II, sont dès lors pour la plupart analogues à celles qui régissent les marchés réglementés.

L'article 14 de la directive prévoit les règles afférentes au processus de négociation et au dénouement des transactions sur les MTF. Les personnes exploitant un MTF sont ainsi tenues d'établir et de maintenir des « règles transparentes, sur la base de critères objectifs, régissant l'accès à leur système », qui sont fixées par renvoi aux dispositions de l'article 43 applicables aux marchés réglementés , d'instaurer des procédures de fonctionnement « transparentes et non discrétionnaires afin de garantir un processus de négociation équitable et ordonné », d'informer les utilisateurs de leurs responsabilités respectives quant au règlement des transactions exécutées sur leur système, et de fournir « des informations suffisantes au public » ou de s'assurer « qu'il existe un accès à de telles informations pour permettre aux utilisateurs de se forger un jugement en matière d'investissement ».

Le point 6 de l'article 14 prévoit également, comme pour les marchés réglementés, que les MTF puissent traiter des valeurs mobilières sans le consentement de l'émetteur , celui-ci ne pouvant alors être assujetti à « aucune obligation d'information financière initiale, périodique ou spécifique par rapport à ce MTF ». De même, à l'instar des marchés réglementés, l'article 26 impose aux MTF un contrôle du respect de leurs règles de fonctionnement et d'autres obligations légales.

c) Les importantes dispositions relatives à la transparence de marché

La directive MIF comporte plusieurs dispositions relatives aux conditions de transparence post-négociation (transparence « post-trade »), qui ont trait aux obligations de déclaration des transactions réalisées, et de transparence pré-négociation (transparence « pre-trade »), qui concerne la déclaration des intentions d'achat et de vente présentes dans le marché. Le bon fonctionnement des marchés financiers apparaît en effet largement tributaire de l'information ainsi publiée. La directive prévoit des articles distincts selon les modes d'exécution des ordres, mais les règles portant sur les marchés réglementés et les MTF sont similaires.

Cet aspect de la nouvelle architecture des marchés, et en particulier les règles de transparence pré-négociation applicables aux systèmes internes 70 ( * ) , fixées par l'article 27 de la directive, est en tout état de cause celui qui a suscité les débats les plus vifs lors des négociations au Conseil comme au Parlement européen. L'ensemble de ces règles doit être précisé par des dispositions de niveau 2 , qui seront essentielles pour garantir à la fois l'égalité de concurrence entre les différentes plates-formes et la protection des investisseurs.

1 - La transparence pré-négociation

L'article 44 fixe les exigences de transparence avant négociation applicables aux marchés réglementés. Ceux-ci doivent rendre publics, à des « conditions commerciales raisonnables et en continu » et pendant les heures de négociation normales, les prix acheteurs et vendeurs ainsi que l'importance des positions de négociation exprimées à ces prix. Les marchés réglementés peuvent toutefois être dispensés par l'autorité de leur Etat d'origine de rendre publiques ces informations , « en fonction du modèle de marché ou du type et de la taille des ordres », l'autorité ayant en particulier le pouvoir de lever cette obligations pour les « transactions dont la taille est inhabituellement élevée par rapport à la taille normale de marché pour les actions ou catégories d'actions négociées », afin de préserver la confidentialité de certaines transactions par blocs.

Cette notion est centrale puisqu'elle détermine l'ampleur des aménagements à la transparence pré-négociation . Le fait qu'elle soit précisée, ainsi que d'autres mesures d'exécution, par des mesures du niveau 2 de la comitologie, contribue à renforcer l'importance des débats techniques postérieurs à la directive MIF.

Aux termes de l'article 29 de la directive, les MTF, qui partagent avec les marchés réglementés la caractéristique d'être des systèmes multilatéraux, sont soumis à des règles de transparence similaires , ce qui inclut la dérogation relative aux transactions de taille inhabituellement élevée.

Des exigences spécifiques sont en revanche prévues pour l'internalisation , compte tenu des caractéristiques particulières des PSI qui assurent ce type de service 71 ( * ) , et qui furent au coeur des discussions qui ont précédé l'adoption de la directive 72 ( * ) . Le compromis final a consisté à délimiter des exigences de transparence applicables aux prestataires répondant, aux termes de l'article 27, à une triple condition : qu'ils soient des internalisateurs systématiques (selon la définition, précitée, posée par l'article 4 de la directive), que les titres qu'ils traitent en cette qualité soient admis à la négociation sur un marché réglementé, et qu'ils effectuent des transactions « ne dépassant pas la taille normale de marché » 73 ( * ) .

Ici encore, la notion de « taille normale de marché » est décisive pour l'appréciation du niveau de transparence des transactions . Elle est définie par l'article 27 comme « une taille représentative de la moyenne arithmétique de la valeur des ordres exécutés sur le marché pour les actions appartenant à chaque catégorie d'actions » et repose sur la détermination du marché le plus pertinent, en termes de liquidité, pour chaque action négociée 74 ( * ) .

Les internalisateurs systématiques réunissant ces conditions sont alors soumis au régime de transparence suivant :

- ils doivent publier un prix ferme sur les titres qu'ils traitent et pour lesquels il existe un marché liquide 75 ( * ) , et peuvent décider de la taille ou des tailles de transaction pour lesquelles ils établissent un prix, chaque cotation devant comporter « un ou des prix fermes acheteurs et/ou vendeurs, pour une taille ou des tailles qui pourraient aller jusqu'à la taille normale de marché pour la catégorie d'actions à laquelle l'action appartient » ;

- les internalisateurs systématiques doivent publier leurs prix « de façon régulière et continue pendant les heures normales de négociation », à des conditions commerciales raisonnables. Ils peuvent actualiser leurs prix à tout moment, et sont également autorisés, en cas de conditions de marché exceptionnelles (dont les critères seront déterminés par la comitologie), à les retirer ;

- des améliorations de prix sont possibles pour les clients professionnels . Le principe est que les internalisateurs systématiques doivent exécuter les ordres de leurs clients aux prix affichés au moment de la réception de l'ordre, mais il n'est pleinement applicable qu'aux clients de détail. Ils ont alors la possibilité d'exécuter les ordres de leurs clients professionnels « à un meilleur prix lorsque cela est justifié, sous réserve que ce prix s'inscrive dans une fourchette rendue publique et proche des conditions du marché et que les ordres soient d'une taille supérieure à celle normalement demandée par un investisseur de détail ».

Bien qu'elle soit censée préserver les intérêts des investisseurs particuliers, cette faculté de « price improvement » a été controversée . En outre, face à ces mêmes clients professionnels, les internalisateurs systématiques ne sont plus tenus par les prix publiés et peuvent exécuter les ordres à des prix différents, dès lors qu'il s'agit de « transactions dont l'exécution relative à plusieurs valeurs mobilières ne représente qu'une seule transaction » ou d'ordres « soumis à des conditions autres que le prix du marché en vigueur » ;

- les internalisateurs systématiques peuvent sélectionner des catégories de clientèle , « en fonction de leur politique commerciale et d'une manière objective et non discriminatoire ». Aux termes du considérant 50 76 ( * ) de la directive, cette sélection serait en réalité binaire et distinguerait les clients professionnels et de détail . Ces prestataires peuvent également refuser d'établir une relation commerciale avec des investisseurs ou la cesser, sur le fondement de considérations commerciales telles que la solvabilité de l'investisseur, le risque de contrepartie et le règlement définitif de la transaction ;

- lorsqu'un internalisateur reçoit un ordre d'une taille supérieure à la taille pour laquelle il a établi un prix mais inférieure à la taille normale de marché, il peut décider d'exécuter la partie de l'ordre qui dépasse cette taille, dans la mesure où il l'exécute au prix fixé, sous réserve des règles particulières s'appliquant aux clients professionnels. S'il a établi un prix pour différentes quantités mais qu'il reçoit et décide d'exécuter un ordre se situant entre ces tailles, il doit le faire à l'un des prix établis.

2 - La transparence post-négociation

Par parallélisme avec les obligations de transparence pré-négociation, l'article 45 dispose que les marchés réglementés doivent publier, « à des conditions commerciales raisonnables et, dans la mesure du possible, en temps réel » le prix, le volume et l'heure des transactions exécutées. L'autorité d'origine peut toutefois permettre à ces marchés de différer la publication de ces informations en fonction du type et de la taille des transactions, notamment pour les transactions « dont la taille est élevée par rapport à la taille normale de marché pour les actions ou catégories d'actions négociées ». L'autorité de régulation doit alors préalablement approuver les dispositions proposées pour organiser cette publicité différée, et veiller à ce qu'elles soient clairement communiquées aux participants de ces marchés et aux investisseurs. Les MTF , aux termes de l'article 30, sont soumis à des dispositions semblables. L'ensemble du dispositif sera précisé par des mesures d'exécution.

L'article 28, relatif à la « transparence assurée par les entreprises d'investissement après la négociation », fixe des obligations proches pour les entreprises d'investissement concluant des transactions portant sur des actions admises à la négociation sur un marché réglementé, soit pour compte propre, soit au nom de clients en dehors d'un marché réglementé ou d'un MTF, donc le cas échéant par la voie de l'internalisation. Ces prestataires sont tenus, dans la mesure du possible en temps réel, de publier le volume, le prix et l'heure de ces transactions, sous une forme aisément accessible aux autres participants du marché. De même, la possibilité d'une publication différée de ces informations pour certaines catégories de transactions s'applique « mutatis mutandis aux mêmes transactions lorsqu'elles sont conclus en dehors d'un marché réglementé ou d'un MTF ».

3. L'offre de services d'investissements

La réforme de la DSI a été mise à profit pour étendre le champ de la réglementation communautaire , tant en termes de services que d'instruments financiers couverts. Le titre premier de la directive MIF introduit de nombreuses définitions nouvelles et précise le champ de la directive en ouvrant aux Etats membres un certain nombre d'options de transposition, exposées plus loin (cf. les mesures prévues de transposition).

a) La redéfinition des services d'investissement et des instruments financiers

L'annexe I modifie la liste des services ou activités d'investissement et des services auxiliaires . La première catégorie, outre la liste prévue par la DSI 77 ( * ) et transposée dans le code monétaire et financier, intègre désormais le conseil en investissement (auparavant placé dans les services auxiliaires) et l'exploitation d'un MTF. Des modalités particulières d'offre du service de réception et transmission d'ordres ou d'exécution d'ordres sans conseil ont été introduites au cours des négociations sur le texte proposé par la Commission européenne. Les entreprises d'investissement pourront ainsi fournir un service d'exécution simple execution only service ») sur des produits dits simples, sans avoir à obtenir du client ou prospect d'informations préalables sur ses connaissances ou son expérience en matière de services d'investissement, et donc sans avoir à évaluer ex ante si le service ou le produit proposé est adapté à ses exigences.

La catégorie des services auxiliaires s'enrichit 78 ( * ) de l'activité de « recherche en investissements et l'analyse financière ou toute autre forme de recommandation générale concernant les transactions sur instruments financiers ». Cette importante innovation permet de prévoir des règles harmonisées de prévention et de gestion des conflits d'intérêts pour la recherche et l'analyse financières, activité au coeur de l'information des investisseurs, et donc du fonctionnement des marchés, mais qui, par contagion, a pâti au cours des trois dernières années des controverses et actions judiciaires nées des scandales révélés outre-Atlantique.

Cette annexe complète également la liste des instruments financiers, et se montre en particulier plus précise et exhaustive que la DSI sur les instruments financiers à terme . La législation communautaire couvre désormais les contrats dérivés sur matières premières, réglés en espèces ou par livraison physique 79 ( * ) , les instruments dérivés servant au transfert du risque de crédit (communément appelés « dérivés de crédit »), les « contrats financiers par différence » (traduction directe de l'expression anglaise) et ceux relatifs à des variables climatiques 80 ( * ) , des tarifs de fret, des autorisations d'émission, des taux d'inflation ou d'autres statistiques officielles.

b) Des règles de conduite des entreprises d'investissement largement affinées

La directive MIF permet de mieux proportionner les obligations des entreprises d'investissement selon la nature professionnelle ou non du client, point qui avait été mal pris en compte par la DSI, et se révélait dès lors source de divergences d'interprétation entre autorités de régulation nationales, et de lourdeurs supplémentaires pour les intermédiaires souhaitant faire usage du passeport. L'article 19, relatif aux « règles de conduite pour la fourniture de services d'investissement à des clients », prévoit que l'application uniforme des dispositions relatives au traitement différencié de la clientèle se traduise par des mesures de niveau 2 , dans le cadre d'un mandat confié au CERVM.

Les règles afférentes au recours, par les entreprises d'investissement, à des agents liés 81 ( * ) pour fournir leurs services, sont également clarifiées (cf. infra , mesures de transposition).

La différenciation de la clientèle implique une meilleure définition de celle-ci, et l'annexe II de la directive reprend à cet égard la classification des clients professionnels et de détail élaborée par le CERVM. Sont ainsi réputés clients professionnels les entités tenues d'être agréées ou réglementées pour opérer sur les marchés financiers (telles que les établissements de crédit, les entreprises d'investissement, les organismes de placement collectif et leurs sociétés de gestion, les entreprises d'assurance...), les entreprises réunissant deux de trois critères quantitatifs 82 ( * ) , les gouvernements et collectivités territoriales, les banques centrales et organisations internationales, et d'autres investisseurs institutionnels dont l'activité principale consiste à investir dans des instruments financiers, tels que les entités dédiées à la titrisation d'actifs.

Des clients, en particulier des personnes physiques, peuvent également être traités comme des professionnels à leur propre demande , donc selon un système d' « opt in », moyennant le respect de critères de compétence et d'activité sur les marchés 83 ( * ) , et d'une procédure écrite liant le client à l'entreprise d'investissement. Il est a contrario prévu un système d' « opt out » pour les entités qui sont réputées être des clients professionnels et souhaitent ne plus être considérées comme tels. Le point 4 du I de l'annexe II précise ainsi que ces entités « doivent néanmoins pouvoir demander le traitement réservé aux non-professionnels, et les entreprises d'investissement peuvent accepter de leur accorder un niveau de protection plus élevé ». La responsabilité de l'octroi d'une telle protection repose sur le client réputé professionnel , dans la mesure où il lui incombe « de demander cette plus grande protection s'il estime ne pas être en mesure d'évaluer ou de gérer correctement les risques auxquels il est amené à s'exposer ».

La protection des investisseurs se traduit une législation plus étoffée sur les règles de bonne conduite auxquelles sont soumises les entreprises d'investissement, qui aux termes de l'article 19 de la directive, doivent agir « d'une manière honnête, équitable et professionnelle ». Il convient ainsi de relever :

- les obligations d'évaluation et d'information préalable des clients : ces obligations sont modulées, voire levées, selon les services d'investissement et les catégories de clients. Dans cette perspective, outre la classification des clients professionnels et de détail, la directive introduit la notion de « contrepartie éligible » 84 ( * ) , à l'égard desquelles les entreprises d'investissement sont dispensées de l'application des règles de conduite prévues pour les professionnels et les particuliers, sauf à ce que ces entités demandent à être traitées comme des clients bénéficiant de ces règles ;

- la règle fondamentale de « meilleure exécution » , prévue par l'article 21 de la directive et qui sera complétée par des mesures de niveau 2 , impose aux entreprises d'investissement d'exécuter les ordres aux conditions les plus favorables pour leurs clients, c'est-à-dire « le meilleur résultat possible compte tenu du prix, du coût, de la rapidité, de la probabilité de l'exécution et du règlement, de la taille, de nature de l'ordre et de toute autre considération relative à l'exécution de l'ordre », sans préjudice des éventuelles instructions spécifiques données par le client. La difficulté a consisté, lors de la négociation de la directive, à trouver un équilibre entre le souhait des intermédiaires financiers de ne pas se voir imposer une règle absolue et présentant un fort risque juridique, et celui des autorités de régulation d'offrir de véritables garanties de meilleure exécution et de permettre un véritable contrôle, tant par elles-mêmes que par les clients.

Aux termes du point 2 de l'article 21, les entreprises d'investissement doivent se doter d'une « politique d'exécution des ordres », dont le client est informé et à laquelle il donne son consentement préalable, tendant à assurer la meilleure exécution possible. Les entreprises devront mettre en place des procédures à cette fin, en vérifier l'efficacité et actualiser, si besoin est, les lieux d'exécution choisis. Le contrôle du respect de l'obligation de meilleure exécution par les autorités compétentes ne porte pas sur un contrôle au cas par cas, mais sur la vérification de l'existence des procédures. La charge de la preuve de la meilleure exécution repose en outre sur l'entreprise d'investissement puisque celle-ci devra être en mesure de démontrer, à la demande de ses clients, qu'elle a obtenu le meilleur résultat possible aux termes de sa politique d'exécution ;

- la règle de traitement et de circulation des ordres à cours limité des clients , prévue par l'article 22 de la directive, qui participe des liens entre les systèmes internalisés et le marché au sens large et protège les intérêts des donneurs d'ordre. Un internalisateur ne pouvant exécuter immédiatement un tel ordre devra ainsi en faciliter l'exécution la plus rapide en le rendant public selon des modalités facilement accessibles aux autres participants, puis en transmettant l'ordre à un marché réglementé ou à une MTF 85 ( * ) . Il est toutefois prévu une dérogation dans le cas « d'ordres à cours limité portant sur une taille inhabituellement élevée » (cf. supra sur la transparence pré-négociation) ;

- la nécessité d'obtenir l'accord préalable du client pour l'exécution d'ordres hors marchés réglementés ou MTF , donc par la voie de l'internalisation. Il s'agit de veiller à ce que les clients soient avertis et consentent à ce que leurs ordres puissent être traités directement par l'entreprise d'investissement, qui se porte contrepartie en l'exécutant face à son compte propre. Cette précaution est nécessaire, compte tenu des risques accrus de conflits d'intérêt auxquels est susceptible d'être confrontée l'entreprise d'investissement qui internalise les ordres et réalise, le plus souvent, d'autres services d'investissement ;

- alors que la DSI ne prévoyait l'encadrement des conflits d'intérêt qu'en des termes généraux et peu contraignants 86 ( * ) , l'article 18 est dédié aux conflits d'intérêt et impose à ce titre aux entreprises d'investissement des obligations en matière d'identification, de prévention et de gestion des conflits d'intérêt qui peuvent naître dans le cadre de l'offre de services et d'activités d'investissement. Ces obligations seront complétées et précisées par des mesures de comitologie, notamment aux fins de définition des critères de détermination des différents types de situations susceptibles de porter préjudice aux intérêts des clients.

4. La surveillance et la coopération des autorités nationales

Le titre IV relatif aux autorités compétentes reprend et complète les dispositions de la DSI, afin de permettre aux autorités de marché d'assurer une surveillance intégrée d'un nouvel environnement de marché plus complexe, notamment au regard de la prévention des manipulations de cours et du respect de la règle de meilleure exécution. La directive MIF se distingue de la DSI par les dispositions suivantes :

- le régime des déclarations portant sur les transactions financières est complété et sera précisé par voie de comitologie. Pour les entreprises d'investissement, ces déclarations parviennent à l'autorité de l'Etat d'origine. Pour les succursales d'entreprises d'investissement, elles sont adressées à l'autorité de l'Etat dans lequel est implanté la succursale, puis transmises à l'autorité de l'Etat membre d'origine. Elles sont en outre envoyées par ces autorités à l'autorité en charge de la surveillance du marché pertinent en termes de liquidité pour les instruments financiers concernés ;

- en application de l'article 57 de la directive, le régime de coopération entre autorités dans le cadre de leurs fonctions de surveillance et d'enquête prévoit désormais la possibilité, pour l'autorité compétente d'un marché réglementé, de s'adresser directement aux entreprises membres à distance de ce marché et situées dans un autre Etat membre. L'autorité de régulation de cet Etat membre est alors informée de cette consultation ;

- la coordination des autorités est adaptée au caractère de plus en plus transfrontalier des marchés réglementés et aux situations où les activités d'un tel marché « ont acquis une importance considérable pour le fonctionnement des marchés des valeurs mobilières et la protection des investisseurs » dans un Etat membre d'accueil, selon les termes du point 2 de l'article 56 de la directive. Les autorités de l'Etat d'origine et de l'Etat d'accueil du marché réglementé devront alors mettre en place des « dispositifs de coopération proportionnés ». Les critères d'appréciation de l'impact transfrontalier d'un marché réglementé seront précisés par les mesures d'application de niveau 2 ;

- les obligations d'assistance mutuelle et de coopération entre autorités nationales sont renforcées, en particulier en cas de violation de ses obligations par un marché réglementé ou MTF opérant de façon transfrontalière ;

- enfin le point 1 de l'article 56 de la directive impose aux Etats membres qui, à l'instar de la France, ont plusieurs autorités compétentes, de désigner une autorité unique servant de point de contact pour les échanges d'information avec les autorités des autres Etats membres.

B. LES DISPOSITIONS DU RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'AMF RELATIVES AUX NOUVELLES INFRASTRUCTURES MULTILATÉRALES

Le règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF), tel qu'il a été homologué par un arrêté du 12 novembre 2004, comporte un livre V relatif aux infrastructures de marché . Ce livre précise, en son titre premier, les règles afférentes aux marchés réglementés, telles que le contenu du dossier que les entreprises de marché souhaitant obtenir la reconnaissance d'un marché réglementé doivent soumettre à l'Autorité, les modalités d'approbation de ce dossier par l'AMF, les règles de déontologie applicables à l'entreprise de marché et à ses collaborateurs, les conditions d'exercice des fonctions de certains collaborateurs d'une telle entreprise, les règles afférentes aux membres des marchés réglementés et aux transactions opérées sur ces derniers, les règles de centralisation des ordres sur ces marchés et les dérogations octroyées 87 ( * ) , les dispositions particulières à certains marchés réglementés (notamment le service de règlement et de livraison différé et les dispositions régissant les marchés réglementés d'instruments financiers à terme).

Le titre II tend à tenir compte des innovations de la directive 2004/39/CE, précitée, en ce qu'il concerne plus particulièrement les systèmes multilatéraux de négociation ou MTF , définis par la doctrine 88 ( * ) comme « une entité qui, sans être un marché réglementé, utilise un système automatisé qui met en contact des intérêts à l'achat et à la vente, dans le système et selon les règles établies par celui qui le gère, d'une manière qui forme ou dont il résulte un contrat irrévocable ». Ces dispositions sont originellement issues d'une décision n° 2003-02 du Conseil des marchés financiers , qui pour la première fois manifestait la prise en compte par les autorités de marché françaises de la montée en puissance des MTF, bien qu'ils soient encore peu utilisés en France.

Aux termes de l'article 312-2 du règlement général, ces systèmes sont considérés comme exerçant une activité d'exécution d'ordres pour le compte de tiers 89 ( * ) . Le titre II inclut les dispositions suivantes :

- le chapitre premier prévoit les documents et informations qui doivent être préalablement communiqués à l'AMF ;

- le chapitre II détaille les règles de fonctionnement des MTF : conditions d'adhésion et communication des informations de marché aux participants, traitement des transactions, publication d'informations sur les transactions réalisées, règles afférentes à la compensation et au règlement-livraison et règles de bonne conduite. L'article 522-2 prévoit d'importantes garanties quant au fonctionnement équitable de ces systèmes et à la préservation de l'intégrité du marché , et dispose ainsi :

« Les moyens humains et matériels mis en oeuvre par les prestataires de services d'investissement gérant un système multilatéral de négociation, ainsi que les règles du système et le cas échéant leurs dispositions d'application, doivent garantir une formation équitable des prix et un fonctionnement ordonné des négociations .

« Les prestataires de services d'investissement doivent garantir aux participants du système le meilleur prix disponible dans le système compte tenu de l'heure de production et de la taille de leurs ordres. Ils ne doivent pas porter atteinte à l'intégrité du marché des instruments financiers concernés ».

- le chapitre III a trait à la surveillance des participants et à la déclaration comme à la conservation des données relatives aux transactions ;

- le chapitre IV précise les conditions que doivent remplir les systèmes informatiques de négociation.

II. L'HABILITATION PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

A. LES PRINCIPES ET L'ÉCHÉANCIER DE LA TRANSPOSITION

Le présent article propose d'autoriser le gouvernement à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, les mesures nécessaires à la transposition de la directive 2004/39/CE concernant les marchés d'instruments financiers, précitée. Dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, le gouvernement justifie ce recours à l'habilitation législative par la longueur et le haut degré de technicité de la directive.

Cet article tend à préciser le champ de l'habilitation . Il est ainsi prévu que les mesures de transposition comportent celles « tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés d'instruments financiers ».

Compte tenu de l'impact étendu de la directive, le délai d'habilitation serait de dix-huit mois à compter de la publication de la loi. Un projet de loi de ratification serait ensuite déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

B. LE CONTENU PROJETÉ DE LA TRANSPOSITION

D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, les mesures de transposition prévues seront d'ordre législatif ou réglementaire, lèveront certaines des options ouvertes par la directive, et nécessiteront d'importantes modifications de notre droit.

1. Délimitation entre les dispositions législatives et réglementaires

Il est envisagé de transposer par ordonnance les mesures législatives suivantes :

- les dispositions modifiant des articles existants de la partie législative du code monétaire et financier : le champ d'application et exemptions prévus au titre premier de la directive, ce qui inclut un certain nombre de définitions ; la nomenclature des instruments financiers, des services d'investissement et des services connexes (annexe I) ; et une partie des dispositions du titre II relatives aux entreprises d'investissement ;

- un certain nombre de principes nouveaux posés par la directive , et notamment ceux concernant les marchés réglementés (titre III) et les systèmes multilatéraux de négociation (titre II), bien que la réglementation relative à ces derniers ressortisse actuellement au règlement général de l'AMF. Il pourrait en effet paraître incohérent que les règles applicables aux marchés réglementés et aux MTF continuent d'être fixées par la voie réglementaire, alors que celles applicables aux entreprises d'investissement, qui sont largement comparables, figurent dans la loi. Ceci apparaît d'autant plus nécessaire que les entreprises de marché, comme les entreprises d'investissement, pourront gérer des MTF ;

- les dispositions relatives à la responsabilité des entreprises d'investissement et d'autres acteurs ;

- les dispositions relatives au secret professionnel , dans la mesure où son inobservation est sanctionnée pénalement ;

- enfin les dispositions du titre IV fixant les obligations pesant sur les Etats membres ou sur les autorités compétentes . Ces dernières peuvent toutefois en grande partie être renvoyées à des décrets, en particulier lorsqu'ils existent déjà.

La transposition par voie réglementaire concernerait les mesures suivantes :

- une partie importante des règles relatives à l'agrément et au passeport des entreprises d'investissement , aujourd'hui prévues par le décret n° 96-880 du 8 octobre 1996 relatif à l'accès à l'activité de prestataire de services d'investissement ;

- une partie des dispositions relatives aux échanges d'informations entre autorités compétentes , qui figurent actuellement dans le décret n° 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers ;

- l'essentiel des dispositions du titre II de la directive relatives à la publicité des ordres et transactions . La loi renvoie d'ores et déjà sur ce point au règlement général de l'AMF ;

- l'essentiel, voire la totalité, des dispositions de l'annexe II, relative à la définition des clients professionnels .

2. Options ouvertes aux Etats membres par la directive qu'il est prévu d'exercer lors de la transposition

a) Exemptions d'agrément

La transposition en droit français se traduirait par des exemptions d'agrément pour les professionnels suivants :

- entreprises spécialisées dans la réception-transmission d'ordres et le conseil en investissement (article 3 de la directive, intitulé « Exemptions optionnelles ») : cette option figurait partiellement dans l'article 2 de la DSI de 1993, mais n'avait pas été retenue lors de la transposition par la loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières. L'article 3 de la directive MIF l'élargit au conseil en investissement. La levée de cette option conduira à aménager le régime des conseillers en investissement financier , introduit par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière ;

- agents liés (article 23) : les agents liés sont des personnes physiques ou morales liées de manière exclusive à une entreprise d'investissement ; ils agissent pour le compte de celle-ci et sous sa responsabilité entière et inconditionnelle. Ils peuvent exercer la réception-transmission d'ordres, le conseil, le placement, ainsi que le démarchage. Ils sont soumis à une procédure d'enregistrement dans l'Etat membre où ils sont établis et peuvent bénéficier du passeport de leur mandant. Si l'Etat membre dans lequel ils sont établis n'a pas exercé l'option en faveur des agents liés, ils sont enregistrés dans l'Etat membre d'origine de l'entreprise d'investissement pour le compte de laquelle ils agissent. Sur option des Etats membres, ils peuvent recevoir des fonds ou des titres de la clientèle. Dans son esprit, ce régime est proche de celui des mandataires exclusifs prévu par le règlement général de l'AMF. Il est prévu de retenir cette option, mais sans permettre aux agents liés de recevoir des fonds ou des titres de la clientèle.

b) Entreprises d'investissement à statut allégé

La directive prévoit que certaines catégories d'entreprises d'investissement peuvent faire l'objet d'un agrément selon des modalités spécifiques :

- entreprises d'investissement spécialisées dans la réception-transmission d'ordres et le conseil en investissement (point 5 de l'article 5) : ces entités spécialisées doivent être agréées en qualité d'entreprises d'investissement, mais bénéficient de règles prudentielles allégées combinant un capital minimum et une assurance de responsabilité civile, prévue à l'article 67 de la directive. Ces règles sont au demeurant transitoires, la directive sur l'adéquation des fonds propres devant être revue sur ce point, dans la continuité des nouvelles orientations du Comité de Bâle

Une fois agréées, ces entreprises d'investissement bénéficieront du passeport européen. La Commission européenne a précisé que les Etats membres qui retiendraient l'option d'exemption prévue à l'article 3 de la directive (cf. supra ) pourraient néanmoins permettre aux entités concernées d'opter pour le régime d'entreprise d'investissement afin de bénéficier du passeport . Il est prévu de retenir cette solution lors de la transposition ;

- entreprises d'investissement personnes physiques (point 1 de l'article 4) : cette possibilité d'agrément était déjà prévue dans la DSI de 1993, mais n'avait pas été retenue dans la transposition française. La directive MIF prévoit que les entreprises concernées peuvent être soumises à des règles d'organisation et de contrôle adaptées, sous réserve que le niveau de protection des intérêts des tiers et la surveillance prudentielle soient équivalents à ceux prévus pour les personnes morales. Les autorités nationales de contrôle sont hostiles à cette option pour des raisons prudentielles. Il convient néanmoins de rappeler que les services de conseil en investissement et de réception-transmission d'ordres pourront être fournis dans le cadre d'un régime national, et notamment par des personnes physiques. Votre rapporteur général estime qu'il conviendra de rejeter cette option ;

- entreprises d'investissement à dirigeant unique (point 4 de l'article 9) : la directive prévoit que l'agrément des entreprises d'investissement personnes physiques ou morales peut déroger à la règle, inspirée des dispositions communautaires afférentes au secteur bancaire, prévoyant que la gestion soit assurée par au moins deux dirigeants. Par cohérence avec leur position sur l'agrément des entreprises d'investissement personnes physiques, les autorités françaises de contrôle sont défavorables à cette option , et ce point devra donc également être tranché à l'issue des consultations. On peut toutefois rappeler que le droit national des sociétés unipersonnelles (sociétés par action simplifiées ou entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée) offre d'ores et déjà un cadre souple d'exercice.

3. Mesures d'adaptation du droit interne

a) Abrogation de la règle de centralisation des ordres sur les marchés réglementés

Ainsi qu'il a été précédemment exposé, la directive MIF ne permet plus aux Etats membres d'adopter des règles de centralisation des ordres sur les marchés réglementés. Cette disposition majeure conduit à abroger les articles L. 421-12 (principe général de centralisation des ordres) et L. 421-13 (règle renforcée applicable en période d'offre publique) du code monétaire et financier .

Il conviendra vraisemblablement de prévoir des mesures législatives d'accompagnement pour les périodes d'offres publiques , telles qu'un renforcement des sanctions pour non-déclaration d'acquisitions de titres faisant l'objet d'une offre. Ces mesures sont actuellement à l'étude.

b) Supervision des entreprises de marché (article 39 f de la directive)

La directive MIF introduit des règles spécifiques aux opérateurs de marché réglementé, calquées en grande partie sur celles applicables aux entreprises d'investissement , mais distinctes de celles-ci. Le 21 e considérant prévoit en outre que la prochaine directive sur l'adéquation des fonds propres sera révisée afin d'instituer des règles de fonds propres minimums harmonisées pour ces opérateurs.

En droit français, les entreprises de marché ne sont actuellement pas soumises à des règles prudentielles explicites 90 ( * ) . De fait, la seule entreprise de marché existante, Euronext Paris, en tant qu'héritière de la Bourse de Paris, a un statut d'établissement de crédit , en tant qu'institution financière spécialisée. Elle est donc soumise à ce titre à la réglementation et au contrôle de la Commission bancaire. Ce régime n'est pas conforme à la nouvelle réglementation communautaire , dans la mesure où la Commission européenne a indiqué qu'un opérateur de marché réglementé au sens de la directive MIF ne pourrait pas effectuer d'opérations de banque, ni avoir le statut d'établissement de crédit.

Des discussions sont donc en cours entre le Trésor et les autorités concernées (AMF, Comité des entreprises d'investissement et des établissements de crédit, Commission bancaire) pour préciser les règles applicables aux entreprises de marché, ainsi que la répartition des compétences de réglementation et de contrôle en la matière.

c) Actionnariat des entreprises de marché (article 38)

L'article 38 de la directive MIF, intitulé « Exigences applicables aux personnes qui exercent une influence significative sur la gestion d'un marché réglementé », prévoit, d'une part, des obligations déclaratives à la charge des opérateurs de marché (point 2) portant sur l'identité et les intérêts des propriétaires du marché réglementé et/ou de l'opérateur de marché, et d'autre part, une obligation pour les autorités compétentes de s'opposer à un changement de contrôle lorsque celui-ci risquerait de compromettre la gestion saine et prudente du marché (point 3).

Les dispositions actuelles du règlement général de l'AMF font peser sur les entreprises de marché des obligations déclaratives conformes aux principes posés par la nouvelle directive. Ces obligations ne sont toutefois ni aussi précises, ni aussi contraignantes que celles prévues par la directive , et devront donc être complétées.

L'article L. 441-1 du code monétaire et financier 91 ( * ) , tel que modifié en 2001, impose des obligations déclaratives aux actionnaires directs et indirects de ces entreprises, qui se révèlent mieux adaptées au cas particulier d'Euronext Paris, intégralement détenu par une holding néerlandaise cotée. Le décret d'application de cet article pas été pris à ce jour. Ce dispositif doit en tout état de cause être revu dans le cadre plus général des règles applicables aux entreprises de marché.

d) Services et activités d'investissement (points 1 et 2 de l'article 4 et annexe 1)

La typologie et les définitions des services ou activités d'investissement devront être mises en conformité avec celles de la directive. A cette occasion, il est prévu d'intégrer les définitions de ces services dans la loi , comme c'est déjà le cas pour celles des opérations de banque. Cette « réévaluation normative » permettra de réprimer plus efficacement l'exercice illégal de ces activités.

e) Point de contact unique dans le cadre de la coopération entre autorités nationales (point 1 de l'article 56)

Ainsi qu'il a été exposé précédemment, le point 1 de l'article 56 de la directive, intitulé « Obligation de coopérer », prévoit que, pour faciliter la coopération et l'échange d'informations entre autorités européennes, les Etats membres qui ont plusieurs autorités devront désigner une autorité unique servant de point de contact pour l'application de la directive. La Commission européenne a précisé :

- que tous les échanges d'informations officiels devraient transiter par ce point de contact, mais que ceci n'empêchait pas que des copies des informations concernées soient échangées directement entre autorités autres que le point de contact ;

- et que les Etats membres pouvaient étendre cette procédure aux établissements de crédit prestataires de services d'investissement. Ce dernier point reste à préciser.

Il est prévu de désigner l'AMF comme point de contact . Par ailleurs, en liaison avec cette désignation, il est envisagé de transmettre à l'AMF un certain nombre de compétences jusqu'ici dévolues au ministre chargé de l'économie , en particulier le pouvoir d'accorder et de retirer la reconnaissance du statut de marché réglementé (article L. 421-1 du code monétaire et financier) et celui de demander au juge de suspendre les droits de vote d'actionnaires indésirables dans une entreprise de marché (article L. 441-1 du même code).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE OBLIGATION DE VIGILANCE SUR LES EFFETS POTENTIELS DE LA DIRECTIVE MIF

Ainsi que votre rapporteur général a déjà eu l'occasion de le rappeler 92 ( * ) , la directive MIF franchit un seuil qualitatif majeur dans la conception communautaire du droit boursier , avec l'abandon du principe originel de concentration des ordres sur les marchés réglementés, qui avait déjà fait l'objet d'une interprétation relativement souple dans la DSI de 1993, mais qui préservait l'unicité et la transparence des prix.

Le nouveau cadre communautaire répond à un objectif légitime d'extension de la concurrence, destiné à permettre une diminution des coûts de transaction et une meilleure adaptation des modes d'exécution des ordres aux caractéristiques des transactions et de la clientèle. Il s'agissait également de tenir compte de l'existant, et en premier lieu du développement de structures de négociation organisées, pour éviter que des zones d'opacité et d'incertitude juridiques ne se créent sur les marchés non réglementés. Les négociateurs français se sont cependant attachés à promouvoir une concurrence équitable et qui n'accorde pas un avantage indu aux pays où prévaut le rôle des teneurs de marché (« market makers »), dans le cadre de la conception d'un marché régi par les prix.

On peut néanmoins anticiper que l'institutionnalisation de la concurrence est susceptible d'aboutir à une spécialisation des infrastructures par type de clientèle . Les MTF et a fortiori les internalisateurs seront dédiés aux investisseurs professionnels, tandis que les marchés réglementés continueront de traiter les ordres des particuliers. Pour que l'abandon du principe de concentration des ordres n'aboutisse pas à une marginalisation de ces derniers et, ce faisant, à un effet d'éviction de l'investissement direct des particuliers (qui ne se verraient alors offrir d'autre choix que de s'en remettre à la gestion collective ou sous mandat 93 ( * ) ), une consolidation des places en Europe apparaît nécessaire et inévitable . Euronext a bien vocation à incarner ce grand marché réglementé européen, susceptible d'offrir des conditions tarifaires attractives et un volume de transaction suffisant pour atténuer la domination de la place américaine. La logique qui détermine cette consolidation se voit également renforcée par la dématérialisation des titres et l'importance désormais accordée aux systèmes informatiques, qui tendent à relativiser la territorialité des marchés réglementés.

La directive n'a toutefois pu aboutir à un compromis acceptable par les parties qu'au prix du renvoi en comitologie de mesures certes techniques mais dont les conséquences concrètes peuvent être déterminantes . Le processus législatif afférent au nouvel environnement boursier est donc loin d'être achevé. Parmi ces mesures, les critères de définition de la « taille normale de marché » et des « conditions de marché exceptionnelles », ou les précisions relatives à l'amélioration des prix pour les clients professionnels et à la règle de meilleure exécution, appellent une vigilance particulière des négociateurs, afin que ne soient pas dénaturées les règles prévues par la directive MIF.

Les principes qui ont inspiré la directive de 1993, en particulier la lisibilité et la transparence de l'accès aux marchés et de leur utilisation, demeurent cependant d'actualité et doivent donc être préservés. Dans le nouvel environnement qui se dessine, et dans lequel les règles relatives aux internalisateurs systématiques constituent le point le plus sensible, certaines exigences doivent être respectées dans l'ensemble du dispositif communautaire comme dans les mesures de transposition en droit français :

- préserver la circulation des ordres , en particulier ceux à cours limité, entre les différents canaux d'exécution, dans un contexte de fractionnement de la liquidité ;

- garantir la protection de l'investisseur le plus fragile et le moins familier des marchés , c'est-à-dire du particulier, par une information claire et exhaustive sur les conditions de fonctionnement de chaque plate-forme de négociation et une application réelle de la règle de meilleure exécution, en vue d'assurer la bonne fin des transactions et un traitement équitable des investisseurs, quel que soit leur niveau de compétence ;

- l'équité des investisseurs est également indissociable d'un principe de proportionnalité des dérogations octroyées à la transparence des transactions au regard de leur montant. Plus précisément, le traitement dérogatoire des transactions par blocs et de montant élevé doit être soumis à un seuil suffisamment haut pour que la transparence pré-négociation trouve à s'appliquer sur un champ large d'ordres, en particulier au sein des internalisateurs ;

- assurer la meilleure transparence possible de l'exécution des ordres . Si les dispositions relatives à la transparence post-négociation n'apparaissent guère problématiques, le régime de la transparence pré-négociation peut susciter davantage d'inquiétudes, compte tenu des enjeux techniques que revêt la notion générique de « taille normale de marché ». La promotion de cette transparence est en outre cohérente avec le renforcement de la prévention et de la répression de l'abus de marché, qui a fait l'objet de nombreuses règles communautaires. Il importe, en particulier, que les aménagements prévus au profit des internalisateurs ne se révèlent pas, in fine , en contradiction avec l'objectif communautaire maintes fois affirmé de plus grande efficacité de la lutte contre les délits d'initiés et les manipulations de cours , compte tenu des risques inhérents au mode d'exécution des ordres par ces entreprises d'investissement ;

- enfin la prévention des conflits d'intérêt au sein des entreprises d'investissement participe tout autant des exigences de transparence et de préservation de l'intégrité des marchés.

B. L'AMENDEMENT PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général vous propose un amendement de réécriture du présent article, afin d'y intégrer deux dispositions :

- l'insertion d'un I tendant à proposer l'abrogation des articles L. 421-12 et L. 421-13 du code monétaire et financier, relatifs à la centralisation des ordres sur les marchés réglementés . Votre rapporteur général juge, en effet, nécessaire que cette conséquence majeure de la directive MIF sur l'organisation de nos marchés financiers puisse figurer explicitement dans le présent projet de loi, plutôt que dans l'ordonnance de transposition, et suscite ainsi un débat parlementaire cohérent avec les enjeux de la transposition. Par coordination, il est également proposé que cette abrogation prenne effet au même moment que les autres mesures législatives et réglementaires de transposition, soit à compter de la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance ;

- le champ de l'habilitation proposée par le présent article pour la transposition de la directive MIF prévoit que les mesures de transposition consisteront notamment en « celles tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés financiers ». Votre rapporteur général considère que cet encadrement de l'habilitation pourrait être opportunément précisé, afin de renforcer les garanties de prévention de certains risques inhérents au nouveau cadre des marchés.

Il vous propose ainsi de compléter cet encadrement par une formulation disposant que « dans ce cadre, (le gouvernement) veille plus particulièrement à définir les principes et modalités garantissant la meilleure exécution possible des ordres et la fluidité de leur circulation entre les infrastructures de marché, la prévention des conflits d'intérêt au sein des prestataires de services d'investissement, et une définition équitable des dérogations accordées à la transparence des négociations ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 6

Application en outre-mer

Commentaire : le présent article a pour objet de rendre applicables les dispositions du présent projet de loi, à l'exception de l'article 2, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Les collectivités territoriales à statut particulier que sont la Nouvelle-Calédonie, la collectivité départementale de Mayotte, la Polynésie française et les îles Wallis-et-Futuna sont des parties du territoire national soumises au principe de spécialité législative , qui constitue un des critères déterminants de distinction de celles-ci des départements d'outre-mer. Ces derniers sont en effet régis par le principe de l'assimilation législative en application des dispositions de l'article 73 de la Constitution, dont le premier alinéa prévoit que « dans les départements et régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit 94 ( * ) ». L'application des normes législatives dans les quatre collectivités territoriales précitées est donc subordonnée à l'adoption d'une disposition expresse d'extension.

Le présent article prévoit donc une mention expresse d'applicabilité des dispositions du présent projet de loi dans ces quatre collectivités d'outre-mer, à l'exception des dispositions de coordination de l'article 2 . Le texte proposé par cet article prévoit en effet une mesure de coordination portant sur l'article L. 532-18 du code monétaire et financier, relatif à la libre prestation de services financiers en France 95 ( * ) . Or le principe communautaire de libre prestation de services ne s'applique pas dans les quatre collectivités d'outre-mer susvisées.

La future ordonnance de transposition de la directive 200439/CE du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, prévue par l'habilitation proposée à l'article 5 du présent projet de loi, devra également comporter une mention expresse rendant ses dispositions applicables de plein droit dans ces quatre collectivités.

En vertu des différentes lois statutaires, la consultation de l'assemblée de chaque collectivité est obligatoire dès lors que les dispositions d'extension sont assorties de mesures substantielles d'adaptation aux spécificités locales 96 ( * ) . En l'absence de telles mesures dans le présent article, l'avis des assemblées délibérantes des quatre collectivités territoriales 97 ( * ) n'est pas requis .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 6

Ratification de deux ordonnances

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de proposer la ratification de deux ordonnances portant, respectivement, sur la transposition de la directive 2002/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier (ordonnance n° 2004-1201), et sur la simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers (ordonnance n° 2005-303).

I. L'ORDONNANCE N° 2004-1201 DU 12 NOVEMBRE 2004 RELATIVE À LA SURVEILLANCE COMPLÉMENTAIRE DES ÉTABLISSEMENTS DE CRÉDIT, DES ENTREPRISES D'ASSURANCE ET DES ENTREPRISES D'INVESTISSEMENT APPARTENANT À UN CONGLOMÉRAT FINANCIER

A. UNE COORDINATION ACCRUE ENTRE LES AUTORITÉS DE CONTRÔLE SUR LES CONGLOMÉRATS FINANCIERS

En application des dispositions du c du 1° du II de l'article premier de la loi n° 2004-237 du 18 mars 2004 portant habilitation du gouvernement à transposer, par ordonnance, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire, le gouvernement a été autorisé à prendre, par ordonnance, les dispositions législatives nécessaires à la transposition de la directive 2002/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier et modifiant les directives 73/239/CEE, 79/267/CEE, 92/49/CEE, 92/96/CEE, 93/6/CEE et 93/22/CEE du Conseil et les directives 98/78/CE et 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil. Cette directive devait être transposée dans notre droit avant le 11 août 2004.

Sur cette base a été adoptée l'ordonnance n° 2004-1201 du 12 novembre 2004 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier. Le projet de loi n° 148 (2004-2005) ratifiant l'ordonnance du 12 novembre 2004 précitée, annexé au procès-verbal de la séance du 19 janvier 2005, a été renvoyé à votre commission des finances qui, lors de sa séance du 2 février 2005, a désigné comme rapporteur votre rapporteur général.

Dans son rapport pour avis au nom de la commission des finances 98 ( * ) , notre collègue Denis Badré avait rappelé les enjeux de cette directive pour compléter le dispositif de contrôle prudentiel sur les entités nouvellement définies que constituent les conglomérats financiers :

« Les groupes ou conglomérats financiers se définissent comme fournissant des produits ou des services relevant de différents secteurs des marchés financiers (le secteur bancaire, le secteur des assurances et celui des entreprises d'investissement).

« La notion de conglomérat financier, ainsi définie, n'existe pas en droit français : le contrôle prudentiel de ces groupes s'exerce actuellement exclusivement au niveau sectoriel, sans vision consolidée des risques et des transferts possibles de ceux-ci d'un secteur à l'autre.

« La directive introduit ainsi un troisième degré de surveillance prudentielle qui s'ajoute à la surveillance des entités réglementées et des groupes sectoriels auxquels elles appartiennent . La surveillance complémentaire s'exerce au niveau du conglomérat financier. La directive introduit par conséquent en droit français la notion de conglomérat financier, en complétant les dispositions relatives aux établissements de crédit, aux entreprises d'assurance et aux entreprises d'investissement » 99 ( * ) .

Notre collègue Denis Badré s'était félicité du franchissement d'une étape supplémentaire dans la lutte contre les risques systémiques :

« Votre rapporteur pour avis approuve pleinement la mise en place d'une coordination entre les autorités de contrôle compétentes pour les différentes catégories d'établissements financiers, dans un contexte de concentration du secteur financier donnant naissance à des conglomérats financiers. Cette évolution apparaît de nature à accroître les risques propres aux différents secteurs d'activité et les risques systémiques.

« De fait, les principaux groupes bancaires français ont créé des filiales d'assurance et les instruments manquent pour mesurer les risques au niveau des groupes financiers.

« Des recommandations sur la surveillance des conglomérats financiers ont d'ailleurs également été adoptées au niveau international, dans le cadre du Groupe des 10, sous l'égide de la Banque des règlements internationaux.

« La coordination entre autorités proposée par la directive marque une première étape pour accroître l'efficacité du contrôle prudentiel. A terme, ce processus pourrait se traduire par une coordination renforcée, voire une concentration des autorités de contrôle prudentiel et de contrôle des marchés, aux niveaux national et européen » 100 ( * ) .

B. LES DISPOSITIONS DE L'ORDONNANCE

Les dispositions de l'ordonnance transposent en droit français les règles communautaires de nature législative relatives à la surveillance des conglomérats financiers.

Le chapitre I (articles 1 à 4) modifie le code des assurances .

L'article 1 er introduit une nouvelle section dans le code des assurances relative à la surveillance complémentaire des groupes d'assurance et des conglomérats financiers et définit cette notion, ainsi que celles qui lui sont associées pour permettre la surveillance de ces groupes. La procédure de surveillance complémentaire est ensuite définie dans une nouvelle section du code des assurances.

L'article 2 est relatif à l'obligation de publier des comptes consolidés.

L'article 3 précise la procédure d'agrément pour les sociétés appartenant à un conglomérat financier dans le cadre de l'espace économique européen.

L'article 4 établit notamment la procédure de coordination entre les autorités de contrôle prudentiel au sein de l'espace économique européen.

Le chapitre II (articles 5 à 12) modifie le code monétaire et financier .

Les articles 5 et 6 introduisent dans le code monétaire et financier les définitions relatives aux conglomérats financiers et à leurs modalités de contrôle.

Les articles 7, 9, 10 et 11 opèrent des coordinations rédactionnelles.

L'article 8 définit les modalités de surveillance complémentaire des prestataires de services d'établissement par la commission bancaire.

L'article 12 décrit la procédure d'échange d'informations et de surveillance complémentaire des conglomérats financiers entre la commission bancaire, la commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP) et l'autorité des marchés financiers (AMF), le cas échéant en coordination avec les autorités réglementées des Etats membres ou des autres Etats parties à l'accord sur l'espace économique européen. Cet article prévoit la désignation d'un coordonnateur et envisage des mesures d'exécution.

Le chapitre III (articles 13 à 15) modifie le code de la mutualité .

Il opère des modifications analogues à celles opérées pour le code des assurances, s'agissant de la définition des notions de conglomérat financier et de surveillance complémentaire (article 13), de l'octroi d'agrément (article 14) et de coordination au sein de l'espace économique européen (article 15).

Le chapitre IV (articles 16 à 19) modifie le code de la sécurité sociale .

L'article 16 introduit dans le code de la sécurité sociale les définitions nécessaires à la description de la nouvelle procédure de surveillance complémentaire qu'il décrit également.

L'article 17 concerne la procédure d'agrément.

Les articles 18 et 19 opèrent des coordinations rédactionnelles. L'article 19 précise également la procédure de coordination avec les autres autorités nationales et européennes au sein de l'espace économique européen.

Le chapitre V (articles 20 et 21) comporte les dispositions finales. En application de l'article 20, les dispositions de la présente ordonnance sont applicables, pour la première fois, à la surveillance des comptes commençant le 1 er janvier 2005 ou durant cette même année.

Votre rapporteur général considère que les dispositions de cette ordonnance sont conformes à l'habilitation accordée par le Parlement dans la loi d'habilitation du 18 mars 2004 précitée, et vous propose donc sa ratification.

II. L'ORDONNANCE N° 2005-303 DU 31 MARS 2005 RELATIVE À LA SIMPLIFICATION DES RÈGLES DE TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ DES INSTRUMENTS FINANCIERS

A. UNE RÉFORME ATTENDUE ET NÉCESSAIRE

A l'initiative de votre rapporteur général, l'article 34 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit a autorisé le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour modifier les dispositions du code monétaire et financier relatives au régime de transfert de propriété des instruments financiers, « afin d'harmoniser les règles de transfert de propriété des instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison ». L'ordonnance prévue n° 2005-303 a ainsi été publiée le 31 mars 2005 , et porte « simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison ».

Se fondant sur des travaux de place déjà très avancés, votre rapporteur général avait souligné la nécessité de procéder à une réforme du régime juridique de la propriété des instruments financiers, afin de contribuer à moderniser et à accroître l'attractivité de notre droit , comme à faciliter le développement du futur compartiment Alternext, marché non réglementé d'Euronext qui devrait être mis en place dans les prochaines semaines.

Les systèmes de règlement-livraison étant aujourd'hui similaires, que les instruments financiers soient négociés sur des marchés réglementés ou organisés, cette réforme nécessaire et très attendue des acteurs de la place a ainsi pour objet d'unifier les deux régimes juridiques actuels de transfert de propriété des instruments financiers, en modifiant la date de réalisation effective du transfert par un alignement sur les règles en vigueur sur les marchés non réglementés. Cette harmonisation des règles françaises avec les normes des autres places de marché européennes conforte, en outre, l'émergence d'un droit international des titres, qui constitue l'un des objectifs de la Commission européenne dans la continuité du Plan d'action pour les services financiers.

Ainsi que votre rapporteur général l'a précisé dans son rapport pour avis 101 ( * ) sur la loi de simplification du droit précitée, le principe de la réforme est le suivant : alors qu'aujourd'hui le transfert de propriété d'un titre est réalisé au jour de la négociation , qui est celui de l'écriture comptable valant inscription en compte, il sera à l'avenir considéré que cette écriture comptable passée en J n'est qu'une écriture d'enregistrement matérialisant la négociation. Elle n'acquerra le statut juridique d'inscription en compte valant transfert de propriété qu'à la date de dénouement réel et irrévocable de l'opération - soit en pratique en J + 3 -, dans les livres du dépositaire central ou des teneurs de compte-conservateurs intermédiaires. Pour tous les instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement-livraison, le transfert de propriété résultera donc de l'inscription au compte de l'acheteur, qui n'aura plus lieu au jour de la négociation mais au moment du dénouement de la transaction .

Ainsi seront dissociés l'enregistrement comptable consécutif à la négociation et le transfert juridique de propriété, comme c'est aujourd'hui le cas pour les marchés organisés. Cet aménagement ne requiert pas une modification des systèmes d'information actuels et ne remet pas en cause les pratiques de marché, conditions de succès d'une telle réforme.

Dans l'intervalle temporel séparant la négociation du dénouement, l'acheteur détiendra un droit de créance à l'encontre de son intermédiaire (droit de se faire livrer une chose et droit d'en recevoir la propriété) et une dette , correspondant au prix de la transaction et exigible au dénouement. Parallèlement, le vendeur aura une obligation de livraison et un droit de créance sur le prix à recevoir, ces deux obligations étant exigibles au dénouement. La nature de ces obligations permettra notamment de traiter plusieurs situations susceptibles de survenir entre J et J + 3 : une faillite du teneur de compte (de l'acheteur ou du vendeur), ou de l'acheteur ou du vendeur lui-même, la saisie réalisée par un tiers à l'encontre du vendeur ou de l'acheteur, le défaut de livraison ou l'absence de dénouement.

B. LES DISPOSITIONS DE L'ORDONNANCE

L'essentiel de la réforme proposée se traduira par un aménagement du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF), qui en prévoira les modalités d'application. Une modification de deux articles du code monétaire et financier est néanmoins apparue nécessaire, dans la mesure où son article L. 431-2 distingue nettement deux régimes de transfert de propriété. Les dispositions de l'ordonnance n° 2005-303 du 31 mars 2005 sont ainsi les suivantes :

- l'article premier propose de modifier l'article L. 431-2 du code monétaire et financier, qui prévoit les deux régimes de transfert de propriété suivants : sur les marchés réglementés, ce transfert résulte de l'inscription en compte à une date définie par les règles de place ; pour les opérations conclues hors des marchés réglementés mais dénouées dans des systèmes de règlement et de livraison, il est réalisé au moment du dénouement des opérations. La modification proposée consiste donc à unifier ces deux régimes , en précisant que pour tous les instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison - ce qui constitue désormais le critère d'application, indépendamment des marchés sur lesquels les ordres ont été exécutés -, le transfert de propriété a lieu lors de l'inscription en compte, à une date et dans des conditions définies dans le règlement général de l'AMF, qui prévoira que cette inscription a lieu au moment du dénouement de la transaction (en pratique trois jours après celle-ci).

Les règles de transfert de propriété des autres titres non cotés seront définies par un décret, pris en application de l'article L. 228-1 du code de commerce 102 ( * ) . En outre, les quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 431-2 du code monétaire et financier, qui ont trait aux transactions réalisées hors des marchés réglementées, mais dénouées via un système de règlement et de livraison 103 ( * ) , sont remplacés par un unique alinéa tendant à restreindre le champ de la dérogation aux précédents alinéas aux seuls systèmes de règlement et de livraison assurant un dénouement irrévocable des opérations « en continu » , et non en fin de journée. Dans ce cas, le transfert de propriété de ces titres négociés de gré à gré ne résulte pas de l'inscription des titres au compte de l'acheteur, qui constituerait le nouveau droit commun, mais seulement dès lors que l'acheteur a réglé le prix de la transaction. Tant que l'acheteur n'a pas réglé son intermédiaire, celui-ci est propriétaire des titres , ce qui lui permet de les placer en pension auprès de la Banque de France afin de faciliter tout au long de la journée le financement des transactions ;

- par cohérence, l'article 2 modifie l'article L. 431-3 du même code pour remplacer la référence aux « règles de la place » par une référence au règlement général de l'AMF ;

- l'article 3 prévoit l'application de cette ordonnance aux quatre collectivités territoriales d'outre mer que sont Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis-et-Futuna ;

- enfin l'article 4 précise que l'entrée en vigueur de ces modifications aura lieu à compter de la publication au Journal officiel des dispositions du règlement général de l'AMF auxquels renvoient les deux premiers articles.

Votre rapporteur général considère que les dispositions de cette ordonnance sont conformes à l'habilitation accordée par le Parlement dans la loi de simplification du droit du 9 décembre 2004, précitée, et vous propose donc sa ratification.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

* 40 L'article 324-1 du code pénal définit le blanchiment comme « le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des fonds ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect. Constitue également un blanchiment le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion de produit indirect ou indirect d'un crime ou d'un délit ». Aux termes du même article, le blanchiment est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375.000 euros d'amende.

* 41 Directive 2001/97/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive 91/308/CEE du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux. Une proposition de nouvelle directive relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux, y compris le financement du terrorisme, a été présentée par la Commission européenne le 30 juin 2004.

* 42 Aux termes de l'article L. 562-1 du code monétaire et financier, il s'agit de la Banque de France, des établissements de crédit, des entreprises d'assurance, des entreprises d'investissement de certains professionnels de l'immobilier, des responsables de casinos et de groupements organisant des jeux de hasard, des changeurs manuels, des commerçants d'objets précieux et d'antiquités, des experts comptables et commissaires aux comptes, et de professions réglementées telles que les huissiers, notaires, administrateurs et mandataires judiciaires, commissaires-priseurs et avocats.

* 43 Depuis la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants.

L'article L. 561-1 du code monétaire et financier dispose en outre :

« Les personnes autres que celles mentionnées à l'article L. 562-1 qui, dans l'exercice de leur profession, réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations entraînant des mouvements de capitaux , sont tenues de déclarer au procureur de la République les opérations dont elles ont connaissance et qui portent sur des sommes qu'elles savent provenir de l'une des infractions mentionnées à l'article L. 562-2.

« Lorsqu'elles ont fait de bonne foi une telle déclaration, ces personnes bénéficient des dispositions de l'article L. 562-8 (...) . Le procureur de la République informe le service mentionné à l'article L. 562-4 (la TRACFIN) qui lui fournit tous renseignements utiles ».

* 44 Depuis la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

* 45 Le décret du 7 février 2002 a ainsi imposé aux organismes financiers l'obligation de déclarer à TRACFIN les opérations qu'ils effectuent pour compte propre ou pour compte de tiers, d'un montant supérieur à 8.000 euros, avec des personnes domiciliées, enregistrées ou établies à Nauru . Le décret du 15 décembre 2003 impose les mêmes obligations pour les opérations avec le Myanmar .

* 46 Il s'agit des « personnes effectuant des opérations à titre professionnel ».

* 47 Aux termes de l'article L. 421-8 du code monétaire et financier, les personnes, outre les PSI, autorisées à être membres d'un marché réglementé d'instruments financiers sont :

« 1. Les personnes physiques ou morales habilitées par le conseil des marchés financiers à fournir des services mentionnés aux 2 et 3 de l'article L. 321-1 ;

« 2. Les personnes morales dont les membres ou associés sont indéfiniment et solidairement responsables des dettes et engagements de celles-ci, à condition que ces membres ou associés soient habilités à fournir les services mentionnés au 2 et au 3 de l'article L. 321-1 ;

« 3. Les personnes physiques ou morales déjà habilitées au 4 juillet 1996 à fournir les services mentionnés du 2 et 3 de l'article L. 321-1 sur des bourses de valeur, en fonctionnement régulier, placées sous le contrôle du conseil des bourses de valeur ainsi que sur les marchés à terme placés sous le contrôle du conseil du marché à terme.

« L'habilitation mentionnée aux 1 et 2 ci-dessus est délivrée au vu de conditions de compétence, d'honorabilité, de solvabilité et, en tant que de besoin, de capitaux propres et de garanties, définies par le règlement général du conseil des marchés financiers ».

* 48 L'article L. 621-15-1 du code monétaire et financier, introduit par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière, dispose :

« Si l'un des griefs notifiés conformément au deuxième alinéa du I de l'article L. 621-15 est susceptible de constituer un des délits mentionnés aux articles L. 465-1 et L. 465-2, le collège transmet immédiatement le rapport d'enquête ou de contrôle au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

« Lorsque le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris décide de mettre en mouvement l'action publique sur les faits, objets de la transmission, il en informe sans délai l'Autorité des marchés financiers.

« Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris peut transmettre à l'Autorité des marchés financiers, d'office ou à la demande de cette dernière, la copie de toute pièce d'une procédure relative aux faits objets de la transmission ».

* 49 L'article L. 621-20-1 du code monétaire et financier, introduit par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière, dispose :

« Si, dans le cadre de ses attributions, l'Autorité des marchés financiers acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, elle est tenue d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

« Sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 621-21, le procureur de la République peut obtenir de l'Autorité des marchés financiers la communication de tous les renseignements détenus par celle-ci dans le cadre de l'exercice de ses missions, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret ».

* 50 C'est-à-dire, aux termes de l'article 226-13 du code pénal, « la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire ».

* 51 Il s'agit, aux termes du III de l'article L. 621-2 du code monétaire et financier, des commissions consultatives que le collège de l'AMF a la faculté de constituer, et dans lesquelles il nomme, le cas échéant, des experts pour préparer ses décisions.

* 52 Ces personnes sont visées à l'article L. 621-9-2 du code monétaire et financier, qui dispose :

« Dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat, l'Autorité des marchés financiers peut :

« 1° Déléguer aux entreprises de marché et, le cas échéant, aux chambres de compensation le contrôle de l'activité et des opérations effectuées par les membres d'un marché réglementé ainsi que par les prestataires de services d'investissement ayant transmis des ordres sur ce marché. Cette délégation fait l'objet d'un protocole d'accord. Elle peut être retirée à tout moment ;

« 2° Recourir, pour ses contrôles et enquêtes, à des corps de contrôle extérieurs, à des commissaires aux comptes, à des experts inscrits sur une liste d'experts judiciaires ou à des personnes ou autorités compétentes. Ces personnes peuvent recevoir une rémunération de l'Autorité des marchés financiers à ce titre.

« Le collège ou le secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers peuvent demander aux commissaires aux comptes des sociétés faisant appel public à l'épargne ou à un expert inscrit sur une liste d'experts judiciaires de procéder auprès des personnes ou entités faisant appel public à l'épargne et des personnes mentionnées au II de l'article L. 621-9 à toute analyse complémentaire ou vérification qui leur paraît nécessaire. Les frais et honoraires sont à la charge de l'Autorité des marchés financiers ».

* 53 L'article 40 du code de procédure pénale dispose que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ».

* 54 Cet article dispose :

« Si, dans le cadre de ses attributions, l'Autorité des marchés financiers acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, elle est tenue d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

« Sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 621-21, le procureur de la République peut obtenir de l'Autorité des marchés financiers la communication de tous les renseignements détenus par celle-ci dans le cadre de l'exercice de ses missions, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret ».

* 55 Cet article dispose :

« Est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal le fait, pour tout membre, tout membre du personnel ou préposé de l'Autorité des marchés financiers, ainsi que pour tout expert nommé dans une commission consultative mentionnée au III de l'article L. 621-2, de violer le secret professionnel institué par l'article L. 621-4, sous réserve des dispositions de l'article 226-14 du code pénal ».

* 56 Défini par l'article L. 465-1 comme « le fait, pour les dirigeants d'une société mentionnée à l'article L. 225-109 du code de commerce, et pour les personnes disposant, à l'occasion de l'exercice de leur profession ou de leurs fonctions, d'informations privilégiées sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de réaliser ou de permettre de réaliser, soit directement, soit par personne interposée, une ou plusieurs opérations avant que le public ait connaissance de ces informations ».

La peine encourue est de deux ans d'emprisonnement et une amende de 1,5 million d'euros, dont le montant peut être porté jusqu'au décuple du profit éventuellement réalisé, sans qu'elle puisse être inférieure à ce profit.

* 57 Défini par l'article 321-1 du code pénal comme « le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit ». Constitue également un recel « le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit ». Le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375.000 euros d'amende, ces peines étant doublées en cas de recel aggravé.

* 58 Ainsi que par l'ancienne recommandation 2002-01 de la Commission des opérations de bourse.

* 59 Définis par le a) de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier.

* 60 Cf. supra .

* 61 Définis supra par le point 1 de l'article premier de la directive 2004/72/CE.

* 62 Aux termes du II de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, les instruments financiers à terme sont :

« 1. Les contrats financiers à terme sur tous effets, valeurs mobilières, indices ou devises, y compris les instruments équivalents donnant lieu à un règlement en espèces ;

« 2. Les contrats à terme sur taux d'intérêt ;

« 3. Les contrats d'échange ;

« 4. Les instruments financiers à terme sur toutes marchandises ou quotas d'émission de gaz à effet de serre, soit lorsqu'ils font l'objet, en suite de négociation, d'un enregistrement par une chambre de compensation d'instruments financiers ou d'appels de couvertures périodiques, soit lorsqu'ils offrent la possibilité que les marchandises sous-jacentes ne soient pas livrées moyennant un règlement monétaire par le vendeur ;

« 5. Les contrats d'options d'achat ou de vente d'instruments financiers ;

« 6. Tous autres instruments de marché à terme.

* 63 Le Royaume-Uni a ainsi prévu un délai de deux jours pour la déclaration, qui demeure en outre à la charge de l'émetteur.

* 64 Le point 14 de l'article 4 de la directive définit le marché réglementé comme « un système multilatéral, exploité et/ou géré par un opérateur de marché, qui assure ou facilite la rencontre - en son sein même et selon des règles non discrétionnaires - de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers, d'une manière qui aboutisse à la conclusion de contrats portant sur des instruments financiers admis à la négociation dans le cadre de ses règles et/ou de ses systèmes, et qui est agréé et fonctionne régulièrement conformément aux dispositions du titre III ».

* 65 Aux termes du point 13 de l'article 4 de la directive, un opérateur de marché est « une ou plusieurs personnes gérant et/ou exploitant l'activité d'un marché réglementé. L'opérateur de marché peut être le marché réglementé lui-même ».

* 66 Définis par le point 15 de l'article 4 comme « un système multilatéral, exploité par une entreprise d'investissement ou un opérateur de marché, qui assure la rencontre - en son sein même et selon des règles non discrétionnaires - de multiples intérêts acheteurs ou vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers, d'une manière qui aboutisse à la conclusion de contrats (...) ».

* 67 Le point 7 de l'article 4 de la directive définit l'internalisateur systématique comme « une entreprise d'investissement qui, de façon organisée, fréquente et systématique, négocie pour compte propre en exécutant les ordres des clients en dehors d'un marché réglementé ou d'un MTF ».

* 68 Cf. en particulier « Réforme de la directive sur les services d'investissement : réflexions sur la notion communautaire de marché », M. Jean-Baptiste Lenhof, Les Petites Affiches du 7 février 2005.

* 69 Aux termes de l'article 43 de la directive, il s'agit en particulier de « détecter tout manquement auxdites règles, toute condition de négociation de nature à perturber le bon ordre du marché ou tout comportement potentiellement révélateur d'un abus de marché ».

* 70 Les règles de transparence post-négociation sont en revanche apparues beaucoup moins problématiques, et sont de fait proches pour les trois infrastructures de marché.

* 71 Le concept de transparence pré-transaction est en effet difficilement transposable à des prestataires qui, à la différence de marchés dirigés par les ordres que sont les marchés réglementés et MTF, ne disposent pas d'un carnet d'ordres dont il est possible d'assurer la publication complète ou partielle.

* 72 Les défenseurs d'exigences de transparence peu élevées, en particulier les anglo-saxons attachés au marché régi par les prix, soutenaient ainsi que l'application d'exigences de transparence pré-négociation à des PSI n'agissant pas dans le cadre d'un marché stricto sensu conduirait à révéler au marché leurs positions prises face à leurs clients, et dès lors, à leur interdire de facto une telle prise de risque . Les tenants de cette transparence, aux rangs desquels figurait la France, estimaient en revanche que le fait de n'assujettir ces prestataires à aucune obligation reviendrait à leur conférer un avantage injustifié en termes d'information disponible de marché, et ce faisant, à affaiblir le processus de formation des prix .

* 73 Le premier point de l'article 27 précise ainsi que les internalisateurs systématiques qui n'effectuent que des transactions supérieures à la taille normale de marché ne sont pas soumis aux exigences de transparence pré-négociation.

* 74 Le point 4 de l'article 27 précise ainsi que « pour chaque action, l'autorité compétente du marché le plus pertinent en termes de liquidité (...) détermine, au moins annuellement sur la base de la moyenne arithmétique de la valeur des ordres exécutés sur le marché concernant cette action, la catégorie d'actions à laquelle elle appartient. Cette information est mise à la disposition de tous les participants du marché ».

* 75 A défaut de marché liquide, le point 1 de l'article 27 précise que les internalisateurs systématiques sont seulement tenus de divulguer les prix à leurs clients « sur demande ».

* 76 Il dispose ainsi que « les internalisateurs systématiques pourraient décider de donner accès à leurs prix uniquement à leurs clients de détail, ou bien uniquement à leurs clients professionnels ou aux deux. Ils ne devraient pas être autorisés à exercer une discrimination à l'intérieur de ces catégories de clients ».

* 77 Réception et transmission d'ordres portant sur un plusieurs instruments financiers, exécution d'ordres au nom du client, négociation pour compte propre, gestion de portefeuille, prise ferme d'instruments financiers et/ou placement d'instruments financiers avec engagement ferme.

* 78 Les autres activités auxiliaires, inchangées par rapport à la DSI, sont la conservation et l'administration d'instruments financiers pour le compte de clients, l'octroi d'un crédit ou d'un prêt à un investisseur

* 79 A condition, dans ce second cas, que les contrats correspondants soient négociés sur un marché réglementé et/ou un MTF.

Les contrats dérivés sur matières première qui sont réglés par livraison physique et ne sont pas destinés à des fins commerciales, doivent « présenter les caractéristiques d'autres instruments financiers dérivés en tenant compte de ce que, notamment, ils sont compensés et réglés par l'intermédiaire d'organismes de compensation reconnus et ont l'objet d'appels de marge réguliers ».

L'objectif est ainsi de réaliser le marché unique pour ce type de produits dérivés, compte tenu notamment des avancées de la législation communautaire pour libéraliser les marchés sous-jacents de ces produits, tels que celui de l'énergie.

* 80 En dépit de leur caractère apparemment anecdotique, les « dérivés climatiques » ont connu un développement soutenu au cours des dernières années.

* 81 Définis par l'article 4 de la directive comme « toute personne physique ou morale qui, sous la responsabilité entière et inconditionnelle d'une seule et unique entreprise d'investissement pour le compte de laquelle elle agit, fait la promotion auprès de clients ou de clients potentiels de services d'investissement et/ou de services auxiliaires, reçoit et transmet les instructions ou les ordres de clients concernant des instruments financiers ou des services d'investissement, place des instruments financiers et/ou fournit à des clients ou à des clients potentiels des conseils sur ces instruments ou services ».

* 82 Un total de bilan supérieur ou égal à 20 millions d'euros, un chiffre d'affaires net supérieur ou égal à 40 millions d'euros, et des capitaux propres d'au moins 2 millions d'euros.

* 83 Dans le cadre de l'évaluation des aptitudes du client demandant à être considéré comme un professionnel, au moins deux des trois critères suivants doivent être réunis :

« - le client a effectué en moyenne dix transactions d'une taille significative par trimestre au cours des quatre trimestres précédents sur le marché concerné ;

« - la valeur du portefeuille d'instruments financiers du client, défini comme comprenant les dépôts bancaires et les instruments financiers, dépasse 500.000 euros ;

« - le client occupe depuis au moins un an ou a occupé pendant au moins un an, dans le secteur financier, une position professionnelle requérant une connaissance des transactions ou des services envisagés ».

* 84 Dont les critères d'éligibilité sont prévus par l'article 24 de la directive.

* 85 Le point 2 de l'article 22 dispose ainsi :

« Les États membres exigent que, dans le cas d'un ordre à cours limité qui est passé par un client concernant des actions admises à la négociation sur un marché réglementé et qui n'est pas exécuté immédiatement dans les conditions prévalant sur le marché, les entreprises d'investissement prennent, sauf si le client donne expressément l'instruction contraire, des mesures visant à faciliter l'exécution la plus rapide possible de cet ordre , en le rendant immédiatement public sous une forme aisément accessible aux autres participants du marché. Les États membres peuvent décider que les entreprises d'investissement se conforment à cette obligation en transmettant l'ordre à cours limité passé par un client à un marché réglementé ou à un MTF. Les États membres prévoient que les autorités compétentes peuvent ne pas faire appliquer cette obligation dans le cas d'ordres à cours limité portant sur une taille inhabituellement élevée ».

* 86 L'article 11 de la directive 93/22/CEE requérait des entreprises d'investissement qu'elles « s'efforcent d'écarter les conflits d'intérêt et, lorsque ces derniers ne peuvent être évités, veillent à ce que (leurs) clients soient traités équitablement ».

* 87 Les articles 516-2 à 516-4 du règlement général précisent ainsi les conditions d'admission de l'exécution d'un ordre hors d'un marché réglementé , qui portent sur la nature de l'instrument financier concerné, le montant de la transaction et le formalisme de la demande adressée par l'investisseur au prestataire, ainsi que les modalités de publication des caractéristiques des transactions.

* 88 M. Jean-Jacques Daigre, « Les ATS (alternative trading system) » - Mélanges AEDBF III, Banque éditeur, 2001.

* 89 Le dernier alinéa de l'article 312-2 dispose :

« Exerce également une activité d'exécution d'ordres pour compte de tiers le prestataire de services d'investissement gérant un système multilatéral de négociation qui, sans avoir le statut de marché réglementé, apparie des intentions multiples d'achat et de vente portant sur des instruments financiers, conformément à des règles publiées, de telle sorte qu'il en résulte une transaction ».

* 90 L'article 4-1-1 du règlement général du Conseil des marchés financiers se limite ainsi à mentionner « les moyens financiers dont dispose l'entreprise de marché » parmi les informations à fournir dans le cadre de la procédure de reconnaissance d'un marché réglementé. Cette procédure n'a toutefois pas eu à s'appliquer en raison des clauses de droits acquis dont bénéficiaient par ailleurs les marchés existants.

* 91 L'article L. 441-1 dispose :

« Les entreprises de marché sont des sociétés commerciales qui ont pour activité principale d'assurer le fonctionnement d'un marché réglementé d'instruments financiers.

« Toute personne qui vient à posséder, directement ou indirectement, une fraction du capital ou des droits de vote d'une entreprise de marché représentant plus du dixième, du cinquième, du tiers, de la moitié ou des deux tiers est tenue d'en informer l'Autorité des marchés financiers, dans des conditions et selon des modalités prévues par décret. En cas de manquement à cette obligation déclarative et sans préjudice des dispositions de l'article L. 233-14 du code de commerce, l'Autorité des marchés financiers ou tout actionnaire peut demander au juge de suspendre, jusqu'à régularisation de la situation, l'exercice des droits de vote attachés aux actions de l'entreprise de marché qui n'ont pas été régulièrement déclarées.

« A la suite d'une prise ou d'une extension de participation, le ministre chargé de l'économie peut, dans l'intérêt du bon fonctionnement d'un marché réglementé et sans préjudice des dispositions de l'article L. 233-14 du code de commerce, demander au juge de suspendre, jusqu'à régularisation de la situation, l'exercice des droits de vote attachés aux actions de l'entreprise de marché détenues directement ou indirectement. Sur proposition de l'Autorité des marchés financiers et après avis de la Banque de France, le ministre peut également procéder à une révision de la reconnaissance du marché réglementé ou à son retrait, dans les conditions prévues à l'article L. 421-1 ».

* 92 Cf. en particulier « L'ouverture de la concurrence », Banque stratégie, février 2003.

* 93 Outre qu'elle figure parmi les principaux atouts de l'industrie financière française, ce qui justifie que l'on s'attache à renforcer sa compétitivité, la gestion collective présente l'avantage de faciliter l'appréhension de marchés financiers complexes par l'investisseur individuel, en lui permettant de mieux mutualiser les risques et d'investir dans des secteurs, des catégories de capitalisation boursière ou des zones géographiques, plutôt que sur des titres isolés. La préservation de la faculté d'investir en direct sur ces titres est néanmoins essentielle , car elle participe pleinement de la sensibilisation des particuliers au rôle de l'actionnaire et au financement de l'économie par les marchés.

* 94 L'article 73 prévoit néanmoins que les lois et règlements « peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités ».

* 95 Cet article tend à assimiler à des prestataires de services d'investissement les personnes morales ou physiques agréées dans un autre Etat et qui établissent des succursales en France pour fournir des services d'investissement et des services connexes.

* 96 Telles que des appellations, taux ou barèmes.

* 97 En l'espèce, du conseil général de Mayotte (article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales), du congrès de Nouvelle-Calédonie (article 90 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie), de l'assemblée de Polynésie (loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, dont l'article 9 dispose que l'assemblée de la Polynésie française est consultée « sur les projets de loi et propositions de loi et les projets d'ordonnance qui introduisent, modifient ou suppriment des dispositions particulières à la Polynésie française ») et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna (en vertu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel).

* 98 Sénat, rapport pour avis n° 202 (2003-2004).

* 99 Op. cit., p. 69.

* 100 Op. cit., p. 75.

* 101 Avis n° 10 (2004-2005) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, déposé le 12 octobre 2004.

* 102 Dont le dernier alinéa dispose :

« En cas de cession de valeurs mobilières admises aux négociations sur un marché réglementé ou de valeurs mobilières non admises aux négociations sur un marché réglementé mais inscrites en compte chez un intermédiaire habilité participant à un système de règlement et de livraison mentionné à l'article L. 330-1 du code monétaire et financier, le transfert de propriété s'effectue dans les conditions prévues à l'article L. 431-2 de ce code. Dans les autres cas, le transfert de propriété résulte de l'inscription des valeurs mobilières au compte de l'acheteur, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ».

* 103 Il s'agit en pratique des transactions portant sur les instruments de taux d'intérêt.

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