B. L'ADAPTATION DE LA DURÉE DE CERTAINS MANDATS : UNE POSSIBILITÉ OUVERTE PAR LA CONSTITUTION

1. Les principes constitutionnels encadrant la modification de la durée des mandats électoraux

La durée du mandat confié aux élus par les électeurs ne peut être modifiée que si le législateur et certaines nécessités institutionnelles comme la situation de l'année électorale 2007 justifient un aménagement du calendrier électoral.

En effet, selon l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles « concernant le régime électoral des assemblées parlementaires et des assemblées locales ». Il revient donc au législateur de modifier la durée des mandats électoraux concernés en cas de nécessité et de préciser alors les conditions et les limites de cette modification, sous peine de rester en deçà de sa compétence 11 ( * ) .

Au surplus, les modalités de l'élection du Président de la République et la modification de la durée des pouvoirs de l'Assemblée nationale et du Sénat, ainsi que le nombre des membres de ces assemblées, relèvent d'une loi organique (articles 6 12 ( * ) et 25 13 ( * ) de la Constitution).

Le Conseil constitutionnel se refuse à un contrôle d'opportunité des choix du législateur qui sont à l'origine d'une modification de la durée des mandats électoraux : « La Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision identique à celui du Parlement (...) il ne lui appartient donc pas de rechercher si les objectifs que s'est assigné le législateur auraient pu être atteints par d'autres voies, dès lors que (...) les modalités retenues ne sont pas manifestement inappropriées à ces objectifs » 14 ( * ) .

A ce titre, il vérifie ainsi l'adéquation entre les objectifs et les moyens retenus par les textes limitant ou allongeant la durée des mandats. Il a ainsi validé plusieurs lois modifiant le calendrier des scrutins et la durée des mandats électoraux.

Il découle de sa jurisprudence que la modification de la durée du mandat des élus appartenant à une assemblée locale ou à l'une des assemblées du Parlement n'est pas contraire à la Constitution à condition :

- que cette modification soit justifiée par des considérations d'intérêt général et que les différences de traitement entre élus ou électeurs qui en résultent soient en rapport avec l'objectif de la loi (ainsi, en 1994, le Conseil a validé l'objectif du législateur tendant à « éviter des difficultés de mise en oeuvre » de l'élection présidentielle de 1995 15 ( * ) pour autoriser le report des élections municipales) ;

- que cette modification ait un caractère exceptionnel et transitoire . Elle doit être limitée dans le temps et strictement nécessaire à la réalisation de l'objectif de la loi, afin de permettre aux électeurs d'exercer leur droit de suffrage selon une périodicité raisonnable (le Conseil a par exemple validé la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 ayant prolongé d'un an la durée du mandat de certains conseillers généraux ; de même, il a validé la prorogation de onze semaines du mandat des députés instituée par la loi n° 2001-419 du 15 mai 2001 destinée à organiser les élections législatives après l'élection présidentielle en 2002).

2. Les prolongations de mandats électifs sous la Cinquième République

Le législateur a déjà modifié, à plusieurs reprises, la durée de certains mandats en vue de répondre à des objectifs d'intérêt général.

De nombreux précédents

- La loi n° 66-947 du 21 décembre 1966 a reporté de mars à octobre 1967 (soit 7 mois) le renouvellement d'une série de conseillers généraux afin d'éviter que celui-ci ne coïncide avec les élections législatives ;

- La loi n° 72-1070 du 4 décembre 1972 a reporté, de mars à octobre 1973, le renouvellement d'une série de conseillers généraux en vue d'écarter sa concomitance avec le déroulement des élections législatives ;

- La loi n° 88-26 du 8 janvier 1988 a porté de trois à six mois (de mars à septembre) le délai dans lequel une série de conseillers généraux devait être renouvelée, pour faciliter l'organisation de l'élection présidentielle ;

- La loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 a pour sa part prolongé d'un an le mandat d'une série de conseillers généraux et écourté de deux ans le mandat d'une autre série, afin de permettre l'organisation simultanée des élections régionales et des élections cantonales ;

- La loi n° 94-44 du 18 janvier 1994 a prolongé d'un an le mandat d'une série de conseillers généraux, en vue de rétablir le renouvellement des conseils généraux par moitié tous les trois ans ;

- La loi n° 94-590 du 15 juillet 1994 a reporté de mars à juin 1995 (3 mois) les élections municipales afin d'écarter toute difficulté dans l'organisation de l'élection présidentielle ;

- La loi n° 96-89 du 6 février 1996 a reporté de deux mois (de mars à mai 1996) le renouvellement des membres de l'assemblée territoriale de la Polynésie française afin d'éviter la concomitance de ce renouvellement avec l'examen au Parlement d'une réforme statutaire de cette collectivité ;

- La loi organique n° 2001-419 du 15 mai 2001 a reporté de onze semaines (d'avril à juin 2002) l'organisation des élections législatives en vue de les faire précéder par l'élection du Président de la République.

* 11 Décision n°87-233 DC du 5 janvier 1988-loi relative aux élections cantonales.

* 12 « Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Les modalités d'application du présent article sont fixées par une loi organique. »

* 13 « Une loi organique fixe la durée des pouvoirs de chaque assemblée... »

* 14 Décision n°93-331 DC du 13 janvier 1994-loi rétablissant le renouvellement triennal par moitié des conseillers généraux.

* 15 Décision n°94-341 DC du 6 juillet 1994-loi relative à la date de renouvellement des conseillers municipaux.

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