CHAPITRE III : DISPOSITIONS VISANT À ASSURER UN TRAITEMENT ÉGAL AUX ENTREPRISES

ARTICLE 9
Insertion d'une nouvelle section dans le code de commerce

Commentaire : le présent article a pour objet d'ajouter dans le code de commerce une nouvelle section relative aux offres publiques d'acquisition.

Le cadre juridique des offres publiques d'acquisition (OPA) est essentiellement défini par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers 60 ( * ) , et plus marginalement par certains articles du code monétaire et financier 61 ( * ) . Certaines dispositions du code de commerce interviennent néanmoins indirectement dans le régime des OPA, telles que celles relatives aux franchissements de seuil et aux déclarations d'intention, à l'interdiction des participations croisées, aux délégations consenties par l'assemblée générale ou aux augmentations et réductions de capital. Le code du travail est également concerné, via l'obligation de consultation et d'information du comité d'entreprise en cas de prise de participation externe ou dans le capital de la société (article L. 432-1).

Le code de commerce ne comporte toutefois aucune division spécifiquement dédiée aux offres publiques. Or les principales dispositions de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les OPA, en particulier celles relatives aux pouvoirs de l'assemblée générale et à l'inopposabilité de certaines clauses statutaires ou contractuelles, exercent un impact non négligeable sur notre droit des sociétés.

Le présent article tend donc à ajouter une nouvelle section, intitulée « Section V - Des offres publiques d'acquisition » , au chapitre III (relatif aux filiales, participations et sociétés contrôlées) du titre III (« Dispositions communes aux diverses sociétés commerciales ») du livre II (relatif aux sociétés commerciales et aux groupements d'intérêt économique) du code de commerce. Cette section comprend neuf articles , numérotés L. 233-32 à L. 233-40, qui font l'objet des articles 10 à 15 et 17 à 19 du présent projet de loi.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 10
Approbation préalable ou confirmation des mesures de défense par l'assemblée générale en période d'offre

Commentaire : le présent article a pour objet de transposer l'article 9 de la directive 2004/25/CE relative aux offres publiques d'acquisition, qui impose aux organes de direction ou d'administration de sociétés cotées faisant l'objet d'une offre publique d'obtenir, pendant la période d'offre, l'approbation ou la confirmation préalable de l'assemblée générale pour mettre en oeuvre des mesures susceptibles de faire échouer l'offre.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE NOUVEAU PRINCIPE COMMUNAUTAIRE D'UNE APPROBATION PRÉALABLE DES MESURES DE DÉFENSE PAR L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Ainsi qu'il a été précisé dans l'exposé général, l'une des principales avancées de la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (« directive OPA ») consiste dans la mise en place d'un régime de gouvernance d'entreprise en période d'offre publique , qui se traduit par la primauté de l'assemblée générale des actionnaires de la société qui fait l'objet de l'offre lors de la mise en place d'éventuelles mesures de défense. L'article 9 de la directive, intitulé « Obligations de l'organe d'administration ou de direction de la société visée », prévoit ainsi que toute action engagée par la direction de la société cible en période d'offre publique et qui est susceptible de faire échouer l'opération doit faire l'objet d'une autorisation préalable ou d'une confirmation par l'assemblée générale .

1. Les modalités de consultation de l'assemblée générale

a) L'autorisation des mesures de défense prises en cours d'offre

Le deuxième paragraphe de l'article 9 dispose que durant la période d'offre, « l'organe d'administration ou de direction (conseil d'administration ou conseil de surveillance) de la société visée obtient une autorisation préalable de l'assemblée générale des actionnaires à cet effet avant d'entreprendre toute action susceptible de faire échouer l'offre, à l'exception de la recherche d'autres offres , et en particulier avant d'entreprendre toute émission d'actions de nature à empêcher durablement l'offrant de prendre le contrôle de la société visée ».

Cette autorisation vise ainsi l'ensemble des mesures de défense que la cible est susceptible de prendre, telles qu'un rachat d'actions ou une augmentation de capital censée renchérir le coût de l'acquisition, à l'exception de la quête d'un « chevalier blanc », c'est-à-dire d'un autre offrant potentiel. La recherche d'autres offres, du fait des négociations et de la confidentialité qu'elle suppose, ressortit en effet pleinement aux organes de direction ou d'administration et n'a pas à faire l'objet en amont d'une publicité auprès des actionnaires, ni a fortiori du public.

Aux termes du second alinéa du deuxième paragraphe de l'article 9, cette autorisation de l'assemblée générale est requise au moins dès lors que l'organe d'administration ou de direction de la société cible reçoit les informations sur l'offre mentionnées à l'article 6 de la directive, et aussi longtemps que le résultat de l'offre n'a pas été rendu public ou qu'elle n'est pas devenue caduque. L'article 9 accorde également aux Etats membres la faculté d'exiger que cette autorisation soit obtenue à un stade antérieur, par exemple dès que l'organe d'administration ou de direction de la société a connaissance de l'imminence de l'offre.

Les Etats membres peuvent prévoir des règles permettant la convocation d'une assemblée générale à bref délai , à condition qu'elle ne se tienne pas durant les deux semaines qui suivent sa notification. Votre rapporteur général souhaiterait que la réglementation française prévoie cette faculté.

b) L'approbation ou la confirmation des mesures de défense antérieures

Des mesures de défense peuvent également avoir été décidées et partiellement mises en place, à titre préventif, avant l'occurrence d'une offre. Dans un souci de cohérence, le troisième paragraphe de l'article 9 prévoit alors que l'assemblée générale doit approuver ou confirmer toute décision antérieure à la période d'offre et qui n'est pas encore totalement mise en oeuvre, « qui ne s'inscrit pas dans le cours normal des activités de la société » et dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre.

c) L'avis motivé de la direction et l'information des salariés

Afin d'éclairer la décision des actionnaires, le cinquième paragraphe prévoit que l'organe d'administration ou de direction de la cible « établit et rend public un document contenant son avis motivé sur l'offre , notamment son avis quant aux répercussions de la mise en oeuvre de l'offre sur l'ensemble des intérêts de la société et spécialement l'emploi ainsi que quant aux plans stratégiques de l'offrant pour la société visée et leurs répercussions probables sur l'emploi et les sites d'activité de la société selon la description figurant dans le document d'offre ».

Outre les actionnaires, les représentants des salariés de la société visée sont également tenus informés des intentions de la direction . Son avis sur l'offre doit donc être dans le même temps communiqué aux représentants du personnel ou, lorsqu'il n'existe pas de tels représentants, au personnel lui-même. Si l'organe d'administration ou de direction de la société visée reçoit en temps utile un avis distinct des représentants du personnel quant aux répercussions de l'offre sur l'emploi, celui-ci est joint au document. Cette disposition est transposée à l'article 6 du présent projet de loi.

2. Les motivations

Les intérêts des dirigeants et des actionnaires peuvent être divergents , a fortiori lorsque la société considérée fait l'objet d'une offre publique, les premiers pouvant s'estimer remis en cause alors que les actionnaires pourraient être favorables à une opération qu'ils percevraient comme créatrice de valeur. La situation de conflit d'intérêt potentiel des dirigeants , susceptibles d'être évincés ou contestés dans leurs choix de gestion antérieurs en cas de réussite de l'offre, a donc incité les autorités législatives communautaires à prévoir que les mesures de défense ne relèvent pas de la seule compétence de l'organe de direction ou d'administration.

Une offre publique est prioritairement adressée aux propriétaires de la société cible que sont ses actionnaires, qui se voient proposer une contrepartie en numéraire ou un échange de titres. La simple menace de l'occurrence et de la réussite d'une offre peut, en outre, constituer un facteur incitatif pour une meilleure gestion de l'entreprise , de telle sorte que, ainsi que l'indique le rapport du groupe de travail de M. Jean-François Lepetit 62 ( * ) , « l'efficacité et la compétitivité économiques recommandent de tirer parti de ce mécanisme incitatif en empêchant les dirigeants d'en neutraliser les effets en disposant seuls du pouvoir de faire échec à une offre ».

Le principe défendu par la directive ne repose donc finalement pas tant sur la contestation des mesures de défense - qui demeurent possibles dès lors qu'elles ont été autorisées par l'assemblée générale - que sur la préservation des intérêts patrimoniaux des actionnaires, qui doivent pouvoir se prononcer sur l'issue de l'offre et décider, le cas échéant, de se protéger.

Cette priorité accordée à la libre décision des actionnaires figurait parmi les axes structurants du rapport (remis en janvier 2002) du groupe de haut niveau d'experts en droit des sociétés présidé par M. Jaap Winter, dont les recommandations précisaient :

« En cas d'offre publique d'acquisition, la décision finale doit appartenir aux actionnaires. Ceux-ci doivent toujours être libres de proposer ou non leurs actions à l'offrant, au prix qui leur convient. Il n'appartient pas au conseil d'administration d'une société de décider de l'issue d'une OPA sur les actions de cette société. Cela ne signifie pas pour autant que le conseil n'a aucune responsabilité en cas d'offre publique d'acquisition.

« D'aucuns allèguent que l'opposition du conseil d'administration à une OPA peut être justifiée, si elle favorise la prise en considération des intérêts des actionnaires et des autres parties intéressées, notamment les salariés. Le Groupe rejette cette objection. Les mécanismes défensifs sont souvent coûteux en soi.

« Surtout, les dirigeants d'une société font face à un sérieux conflit d'intérêts en cas d'OPA. Il convient donc que les actionnaires puissent décider par eux-mêmes et que les autres parties intéressées soient protégées par des règles spécifiques (relevant, par exemple, du droit du travail ou du droit de l'environnement) ».

3. Les options prévues par l'article 12

L'article 12 de la directive, intitulé « Arrangements facultatifs », prévoit un système de double option , permettant, d'une part, aux Etats membres de ne pas imposer l'application des articles 9 et/ou 11 aux sociétés résidentes faisant l'objet d'une offre, et d'autre part, à ces sociétés de disposer de la faculté d'appliquer ces mêmes dispositions sur une base volontaire . Une telle décision doit alors être prise par l'assemblée générale, et notifiée à l'autorité de contrôle du siège social de la société ainsi qu'aux autorités des Etats membres dans lesquels la société est cotée sur un marché réglementé ou a fait l'objet d'une demande de cotation.

Le troisième paragraphe de l'article 12 introduit, en outre, une clause de réciprocité par laquelle les sociétés qui appliquent l'article 9 et/ou l'article 11 peuvent être exemptées de leurs dispositions si elles font l'objet d'une offre lancée par une société qui ne les appliquent pas 63 ( * ) .

B. LE DROIT FRANÇAIS CONDUIT À UNE PRATIQUE PLUTÔT CONFORME AVEC LES PRESCRIPTIONS COMMUNAUTAIRES

1. Les limitations aux mesures de défense décidées avant l'offre

Outre le principe de l'autorisation ou de la confirmation préalable des mesures de défense par l'assemblée générale, l'article 9 de la « directive OPA » a pour conséquence d'introduire la suspension , en période d'offre, des délégations accordées par l'assemblée générale à l'organe d'administration ou de direction pour prendre de telles mesures. Or le droit français actuel prévoit déjà des dispositions assez proches.

L'assemblée générale peut déléguer au conseil d'administration ou au directoire la mise en oeuvre de certaines mesures de défense, en particulier l'augmentation immédiate ou différée du capital 64 ( * ) ou sa réduction 65 ( * ) . Le rachat d'actions de la société fait quant à lui l'objet d'une autorisation de l'assemblée générale, qui en définit également les modalités 66 ( * ) .

La délégation est néanmoins suspendue en période d'offre publique, dans certaines conditions . L'article L. 225-129-3 du code de commerce, inséré par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 relative aux valeurs mobilières, prévoit ainsi que « toute délégation de l'assemblée générale est suspendue en période d'offre publique d'achat ou d'échange sur les titres de la société, sauf si elle s'inscrit dans le cours normal de l'activité de la société et que sa mise en oeuvre n'est pas susceptible de faire échouer l'offre ».

De même, l'article 232-17 du règlement général de l'AMF 67 ( * ) réduit la portée d'une mesure de défense consistant en des rachats d'actions , en prévoyant que la mise en oeuvre d'un tel programme de rachat ne peut être poursuivie en période d'offre qu'à la double condition que l'offre soit intégralement réglée en numéraire et que l'assemblée générale ait expressément prévu son déroulement en période d'offre . Il en résulte que les dirigeants ne peuvent décider seuls la réalisation d'un tel programme en période d'offre.

2. L'encadrement par l'AMF de l'autonomie des dirigeants

Le règlement général de l'AMF encadre également les actions relevant de la compétence propre des dirigeants . Aux termes de son article 231-36 68 ( * ) , les dirigeants qui décident d'accomplir, en période d'offre, des actes autres que de gestion courante et à l'exception de ceux expressément autorisés par l'assemblée générale, doivent en aviser l'Autorité qui fait connaître, s'il y a lieu, son avis. Selon le rapport du groupe de travail de M. Jean-François Lepetit, l'AMF examine chaque situation au regard des principes généraux des OPA que comporte le Titre III du Livre II de son règlement général, en particulier celui de « libre jeu des offres et de leurs surenchères » (article 231-3), a en pratique une approche restrictive à l'égard des dirigeants.

La surveillance ainsi exercée par l'autorité de marché, jointe à la nécessité pour les dirigeants d'agir dans l'intérêt social de l'entreprise et de prévenir toute mise en cause de leur responsabilité, conduisent généralement ces derniers à faire preuve de prudence et à rechercher l'autorisation de leur assemblée générale , ou à engager préventivement un dialogue avec l'AMF sur l'organisation de la défense de la société, afin d'anticiper sa réaction. Il en résulte que la faculté pour les dirigeants de prendre, en cours d'offre, des mesures de défense relevant de leur compétence propre est en réalité plus théorique que réelle.

Le groupe de travail précité a ainsi conclu que les dispositions de l'article 9 de la directive ne contrevenaient pas réellement à la pratique actuelle des sociétés comme aux dispositions légales et réglementaires nationales, qui sont déjà assez largement inspirées par ce principe de gouvernement d'entreprise.

C. LA TRANSPOSITION RECOMMANDÉE PAR LE GROUPE DE TRAVAIL DE M. JEAN-FRANÇOIS LEPETIT

Se fondant notamment sur le constat juridique précédent, le groupe de travail précité a adhéré aux dispositions de l'article 9 de la directive et recommandé sa transposition, sous réserve de la mise en place d'une égalité des conditions de jeu que permet la clause de réciprocité ouverte par l'article 12.

Bien que la doctrine de l'AMF conduise à limiter la marge de manoeuvre des dirigeants pour prendre des mesures susceptibles de faire échouer une offre, l'étendue des pouvoirs de l'assemblée générale n'offre pas non plus toute la visibilité juridique nécessaire car elle n'est pas explicitement consacrée dans la loi et peut se heurter aux principes généraux des offres publiques édictés par l'AMF. Le groupe de travail a donc préconisé l'insertion législative d'un nouveau principe de compétence de l'assemblée générale, qui permettrait une clarification et viendrait s'ajouter aux principes généraux réglementaires existants.

Cette adoption du régime européen contribuerait également, selon le groupe de travail, à conforter l'image de la France auprès des investisseurs étrangers. Il s'agirait enfin d' « immuniser » les entreprises françaises contre tout risque de se voir opposer la réciprocité par des sociétés cibles étrangères, ce que ne permettrait sans doute pas un statu quo moins explicite sur le plan juridique, bien que d'effets quasiment équivalents à ceux de l'article 9.

Néanmoins, afin que ce risque ne soit pas inversement encouru par des sociétés françaises en situation de cible, le groupe de travail recommande que la transposition de l'article 9 soit assortie de la réserve de réciprocité prévue par l'article 12 de la directive , et qui est transposée à l'article 11 du présent projet de loi.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article tend à transposer l'article 9 de la « directive OPA » et à introduire un article L. 233-32 dans la nouvelle section V du livre II du titre III du chapitre III du code de commerce, comportant trois principales dispositions : le principe de l'approbation en période d'offre publique, par l'assemblée générale, de toute mesure susceptible de faire échouer l'offre ; l'approbation ou la confirmation de décisions analogues dont la mise en oeuvre est encore partielle ; et la suspension des délégations antérieures permettant à l'organe d'administration ou de direction de prendre de telles mesures.

A. L'APPROBATION PRÉALABLE DES MESURES DE DÉFENSE PAR L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Le texte proposé par le présent article pour le premier alinéa de l'article L. 233-32 du code de commerce prévoit que pendant la période d'offre publique (d'acquisition ou d'échange) visant une société dont des actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, les organes de direction ou d'administration de la société 69 ( * ) , à l'exception de leur pouvoir de nomination, ou le directeur général ou l'un des directeurs généraux délégués « doivent obtenir l'approbation préalable de l'assemblée générale pour prendre toute mesure dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre, hormis la recherche d'autres offres ».

Votre rapporteur général estime qu'il conviendra de se référer à une interprétation extensive de ces mesures « susceptibles de faire échouer l'offre » (cf. infra ).

Ces dispositions transposent donc le premier alinéa du deuxième paragraphe de l'article 9 de la directive 2004/25/CE. Le champ des sociétés cibles est celui des sociétés dont « des » actions - et non « les actions », qui constituent la formulation usuelle pour les sociétés cotées - sont admises aux négociations sur un marché réglementé. Cette rédaction apparaît inhabituelle mais se veut cohérente avec le champ d'application défini par l'article premier de la directive, qui concerne les OPA de titres d'une société relevant du droit d'un Etat membre, « lorsque tout ou partie de ces titres sont admis à la négociation sur un marché réglementé dans un ou plusieurs Etats membres ». De fait, les sociétés cotées ne disposent généralement pas d'un capital intégralement « flottant », c'est-à-dire entièrement négociable en bourse.

Deux exceptions sont prévues au principe de l'approbation préalable des mesures de défense : la recherche d'autres offres , conformément aux dispositions précitées de la directive, mais également le pouvoir de nomination (du président, des directeurs généraux délégués ou du directoire) dont sont investis le conseil d'administration et le conseil de surveillance.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, cette seconde limitation, qui n'était pas explicitement prévue dans les recommandations du groupe de travail, est justifiée par le fait que le pouvoir de nomination dont disposent ces organes 70 ( * ) ne semble pas relever en tant que tel d'une mesure de défense, à la différence du pouvoir de révocation , qui demeure pour sa part soumis à l'approbation préalable de l'assemblée. Il apparaîtrait également que la soumission du pouvoir de nomination à l'approbation des actionnaires pourrait conduire à paralyser la vie de l'entreprise , en particulier si l'une des personnes nommées par ce biais venait à décéder ou à être empêchée, car elles disposent de pouvoirs de convocation et de gestion courante de la société.

L'assemblée générale doit enfin être convoquée et réunie « en période d'offre publique » pour approuver les mesures défensives, soit dès le moment où l'offre a été rendue publique , conformément aux dispositions de l'article 6 de la directive.

Les délais de convocation de l'assemblée seront le cas échéant révisés par une modification des articles 120 et suivants du décret n° 67-236 du 23 mars 1967 sur les sociétés commerciales. Votre rapporteur général souhaiterait néanmoins rendre cette révision impérative (cf. infra ).

B. LA CONFIRMATION DES MESURES DE DÉFENSE PARTIELLEMENT MISES EN OEUVRE

Le texte proposé pour le troisième alinéa de l'article L. 233-32 du code de commerce prévoit, conformément au troisième paragraphe de l'article 9 de la « directive OPA », que « toute décision prise avant la période d'offre qui n'est pas totalement ou partiellement mise en oeuvre, qui ne s'inscrit pas dans le cours normal des activités de la société et dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre doit faire l'objet d'une approbation ou d'une confirmation par l'assemblée générale ».

Cette notion de « confirmation », explicitement prévue par la directive, représente une novation juridique , dans la mesure où la séparation des pouvoirs entre les organes de gestion et de direction tendrait en principe à l'exclure. Elle se justifie toutefois par les principes de bonne gouvernance que promeut le présent article.

Le triple critère cumulatif prévu par cet alinéa est inégalement précis, dans la mesure où la notion de « cours normal des activités de la société » est moins explicite que celle de mesures susceptibles de faire échouer une offre. Les décisions s'inscrivant dans le cours normal des activités peuvent néanmoins être éclairées par la jurisprudence et appréciées en fonction de leur récurrence, de leur lien avec la gestion de l'entreprise, ou de l'absence de motivation par un facteur exogène ou exceptionnel.

C. LA SUSPENSION EN PÉRIODE D'OFFRE DES DÉLÉGATIONS ACCORDÉES PAR L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Le texte proposé pour le deuxième alinéa prévoit que toute délégation d'une mesure susceptible de faire échouer l'OPA, accordée par l'assemblée générale avant la période d'offre, est suspendue durant cette période. Cette neutralisation des délégations antérieures se révèle proche des dispositions actuelles de l'article L. 225-129-3 du code de commerce, précité, mais sa portée est plus grande puisqu'elle ne prévoit plus la double exception portant sur des mesures s'inscrivant dans le cours normal de l'activité de la société et dont la mise en oeuvre n'est pas susceptible de faire échouer l'offre.

Le I de l'article 20 du présent projet de loi prévoit par conséquent l'abrogation de l'article L. 225-129-3 du code de commerce.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE TRANSPOSITION JUSTIFIÉE MAIS QUI N'INTRODUIT PAS DE RÉELS BOULEVERSEMENTS

Votre commission approuve le principe de la transposition de l'article 9 de la directive, qui est de nature à promouvoir un meilleur gouvernement d'entreprise et conforte le rôle des actionnaires dans la maîtrise du destin de la société dont ils sont propriétaires. Cette disposition est également susceptible d'exercer un impact positif sur l'image de la place française . L'introduction de la clause de réciprocité permet cependant aux sociétés françaises qui font l'objet d'une offre de ne pas se trouver démunies ni désavantagées par leur « vertu » lorsque l'offrant bénéficie d'un régime plus favorable à la souveraineté des organes de direction ou d'administration.

La notion de « mesure susceptible de faire échouer l'offre » doit être comprise de manière large et en fonction de sa vocation dissuasive ex ante . Si l'on s'en tenait à une appréciation strictement technique de la réussite d'une offre, en fonction du seuil final de détention des titres de la société cible, une mesure de défense ne pourrait en effet être considérée a priori comme faisant échec à l'offre tant que ce dernier ne serait pas advenu. En outre, une mesure de renchérissement à terme de l'offre doit être considérée comme ayant pour but de faire échouer l'offre, bien qu'elle n'entrave pas nécessairement son déroulement.

Il convient néanmoins de ne pas surestimer la portée de la perte d'autonomie des organes de direction , dans la mesure où la mise en oeuvre de moyens de défense par les dirigeants, en période d'offre, est en réalité assez peu usitée et difficile , que ce soient une augmentation (mesure spécifiquement visée par la directive) ou une réduction de capital, l'émission de bons de souscription d'actions susceptibles d'aboutir à une dilution future de la participation de l'offrant 71 ( * ) , des rachats de titres de la société 72 ( * ) , la cession d'actifs stratégiques destinée à rendre la cible moins attractive, ou inversement une acquisition contribuant à en relever la valeur.

La notion d'intérêt social , absente du droit anglo-saxon (mais qui est compensée par un niveau élevé de responsabilité des dirigeants), se révèle protectrice des actionnaires et constitue un facteur dissuasif pour des mesures de défense qui placeraient de manière trop apparente les dirigeants en situation de conflit d'intérêt, voire d'abus de bien social. En outre, il se révèle pour le moins difficile pour des dirigeants imprévoyants de négocier des mesures de défense à la hâte , et tout autant de promouvoir auprès des actionnaires le refus d'une offre et la promesse de « lendemains meilleurs », a fortiori lorsque lesdits actionnaires sont soumis à une rotation élevée, au profit de fonds spéculatifs par nature désireux de souscrire à l'offre pour en encaisser la prime.

De même, la recherche de meilleures offres, qui constitue la seule mesure de défense autonome autorisée en période d'offre par l'article 9 de la directive, ne peut donner lieu à une quelconque improvisation . La recherche d'un « chevalier blanc » crédible, c'est-à-dire d'un projet alternatif cohérent sur les plans industriel, commercial et stratégique, requiert davantage de temps et d'investissement que les délais courts impartis par la période d'offre.

Il reste que la souveraineté ainsi accordée à l'assemblée générale pour décider, en période d'offre, la mise en place de mesures de défense, doit s'exercer dans le respect des principes généraux des offres publiques dont l'AMF est garante, au premier rang desquels le libre jeu des offres et des surenchères.

Votre rapporteur général relève également que le présent projet de loi ne transpose pas le paragraphe 5 de l'article 9 de la directive 73 ( * ) , relatif à la publication de l'avis motivé de l'organe de direction ou d'administration sur l'offre. L'article 231-21 du règlement général de l'AMF, qui détaille le contenu de la note de la société visée en réponse en réponse à celle de l'initiateur de l'offre, prévoit néanmoins qu'elle doit contenir « l'avis motivé du conseil d'administration ou du conseil de surveillance (...) sur l'intérêt de l'offre ou sur les conséquences de celle-ci pour la société visée, ses actionnaires et ses salariés . Les conditions de vote dans lesquelles cet avis a été obtenu sont précisées, les membres minoritaires pouvant demander qu'il soit fait état de leur identité et de leur position ». Cette disposition réglementaire est donc proche, dans l'esprit et la lettre, des prescriptions de la directive, et pourrait s'avérer suffisante pour autant qu'elle soit quelque peu précisée sur les répercussions de l'offre sur l'emploi et sur les sites d'activité.

B. PRÉVOIR LA FACULTÉ DE RÉUNIR UNE ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DANS DES DÉLAIS BREFS

Le quatrième paragraphe de l'article 9 de la directive permet aux Etats membres de « prévoir des règles permettant la convocation d'une assemblée générale des actionnaires à bref délai, à condition que cette assemblée ne se tienne pas durant les deux semaines qui suivent sa notification ». Dans les faits, les délais de notification, de première ou de seconde convocation et d'envoi des demandes d'inscription de projets de résolution 74 ( * ) , actuellement prévus par le décret du 23 mars 1967 sur les sociétés commerciales, ne permettent généralement pas de réunir l'assemblée à temps , c'est-à-dire avant la fin de la période d'offre, pour autoriser d'éventuelles mesures de défense.

Votre rapporteur général vous propose donc un amendement complétant le premier alinéa du présent article et prévoyant qu'un décret en Conseil d'Etat précise les formes et délais spécifiques de convocation de l'assemblée générale en période d'offre, par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 225-104 du code de commerce, qui précise que « la convocation des assemblées d'actionnaires est faite dans les formes et délais fixés par décret en Conseil d'Etat ».

C. LES AUTRES AMENDEMENTS PROPOSÉS PAR VOTRE COMMISSION

Votre commission vous propose les amendements suivants, essentiellement rédactionnels ou de précision :

- un amendement de cohérence au texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 233-32 du code de commerce, tendant à définir la société cible cotée comme une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions » sont admis à la négociation sur un marché réglementé. Certes la référence à « des actions » reprend la formulation du rapport de M. Jean-François Lepetit et est conforme au champ défini par l'article premier de la « directive OPA » 75 ( * ) , mais le droit financier français comme l'article premier du présent projet de loi, qui définit le champ d'application du règlement général de l'AMF pour les règles régissant les offres publiques, font référence aux instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé français. Il convient en outre de faire référence au critère juridique habituel, en droit communautaire comme en droit national, de l'admission à la négociation sur un marché réglementé, indépendamment de la part du capital cotée (en général pas la totalité), plutôt qu'à la cotation d'une part indéterminée des actions de la société. Enfin l'article 2 de la directive définit la société visée comme celle dont les titres font l'objet d'une offre, sans se référer plus spécifiquement aux actions ;

- une modification, au sein du même alinéa, tendant à substituer un indicatif à valeur impérative, conformément à la syntaxe législative usuelle, à l'expression « doivent obtenir » ;

- une modification de la rédaction du texte proposé pour le deuxième alinéa, afin de préciser que la délégation accordée par l'assemblée générale ne porte pas sur la mesure de défense elle-même, mais est accordée en vue de prendre une telle mesure ;

- enfin, un amendement rédactionnel insérant le terme « est » dans le texte proposé pour le troisième alinéa.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 11
Clause de réciprocité

Commentaire : le présent article a pour objet de transposer la clause de réciprocité prévue par l'article 12 de la directive 2004/25/CE, destinée à assurer l'égalité des conditions de jeu entre l'initiateur et le destinataire d'une offre publique d'achat. Elle permet de dispenser une société cible d'appliquer le principe de l'approbation préalable par l'assemblée générale, en période d'offre, des mesures de défense, lorsqu'elle fait l'objet d'une offre initiée par une société qui ne l'applique pas.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA CLAUSE DE RÉCIPROCITÉ PRÉVUE PAR LA « DIRECTIVE OPA »

Ainsi qu'il a été précisé dans l'exposé des motifs et le commentaire de l'article 10 du présent projet de loi, la directive 2004/25/CE du 21 avril 2005 concernant les offres publiques d'acquisition (« directive OPA ») prévoit respectivement, en ses articles 9 et 11, d'une part, le principe de l'approbation ou de la confirmation préalable en période d'offre, par l'assemblée générale d'une société visée par une OPA, des mesures prises par l'organe d'administration ou de direction et susceptibles de faire échouer l'offre, et d'autre part, l'inopposabilité à l'offrant, en période d'offre, des clauses statutaires ou conventionnelles dont l'objet est de restreindre le transfert de titres ou de limiter l'exercice des droits de vote.

Ainsi que le souligne le groupe de travail de M. Jean-François Lepetit 76 ( * ) , la suppression de toute capacité autonome des organes d'administration ou de direction de prendre des mesures susceptibles de faire échouer une offre publique fait courir le risque de désavantager les sociétés des Etats membres qui auront adopté le régime communautaire, au profit de celles d'Etats communautaires ou tiers (en particulier les Etats-Unis) où ces organes disposeraient d'une plus grande marge de manoeuvre . Il pourrait dès lors en résulter une inégalité des « conditions de jeu ».

Ce risque a été appréhendé lors des négociations portant sur la directive et est pris en compte dans son vingt-et-unième considérant, qui explicite cette conception de l' « égalité des conditions de jeu » 77 ( * ) et dans son article 12, intitulé « arrangements facultatifs », qui ouvre notamment aux Etats membres la possibilité d'introduire dans leur droit national une « clause de réciprocité », ayant pour objet d'établir des conditions équivalentes entre l'offrant et la cible lorsqu'ils relèvent d'Etats appliquant différemment le régime communautaire ou des dispositions équivalentes.

Cette clause permet donc aux sociétés appliquant le principe de primauté de l'assemblée générale de s'en écarter lorsque l'offrant ou la société qui le contrôle n'est pas soumis au même régime. Cette exception de réciprocité peut également s'appliquer aux dispositions de l'article 11 de la directive (cf. commentaire de l'article 12 du présent projet de loi). L'application des dispositions des articles 9 et 11 fait, en outre, l'objet d'une double option , exercée par les Etats membres et les entreprises.

Le troisième paragraphe de l'article 12 introduit ainsi la clause de réciprocité, qui prévoit que « les Etats membres peuvent, dans les conditions fixées par le droit national, exempter les sociétés qui appliquent l'article 9, paragraphes 2 et 3, et/ou l'article 11 d'appliquer l'article 9, paragraphes 2 et 3, et/ou l'article 11 si elles deviennent l'objet d'une offre lancée par une société qui, quant à elle, n'applique pas ces mêmes articles ou par une société contrôlée directement ou indirectement par une telle société, conformément à l'article 1 er de la directive 83/349/CEE ».

Le quatrième paragraphe du même article prévoit que les dispositions applicables aux différentes sociétés doivent être divulguées sans délai. Le cinquième paragraphe dispose enfin que toute mesure de défense appliquée en vertu de la clause de réciprocité introduite au troisième paragraphe est soumise à l'autorisation de l'assemblée générale de la société visée, ladite autorisation devant avoir été reçue « au plus tôt » dix-huit mois avant que l'offre ait été rendue publique , conformément aux dispositions de l'article 6 relatives à l'information sur l'offre 78 ( * ) .

B. LA LEVÉE DE L'OPTION RECOMMANDÉE PAR LE GROUPE DE TRAVAIL DE M. JEAN-FRANÇOIS LEPETIT

Le groupe de travail précité a recommandé d'assortir la transposition de l'article 9 de la directive , prévue par l'article 10 du présent projet de loi, de celle de l'exception de réciprocité . Son rapport avance plusieurs arguments en faveur de cette option, et répond à certaines interrogations sur son fonctionnement et sa portée (cf. infra sur le dispositif proposé).

Le groupe de travail estime que les organes d'administration ou de direction disposent parfois, dans les pays tiers, d'une grande marge de manoeuvre pour prendre des mesures susceptibles de faire échouer une OPA (cf. en particulier la « panoplie » de moyens à la disposition des entreprises américaines, détaillée dans l'exposé général du présent rapport), alors que l'article 9 de la directive supprime leur capacité autonome d'action. Les concentrations transfrontalières pourraient dès lors excessivement favoriser les offrants relevant de pays où la réglementation est plus souple , et la concurrence inégale pourrait le cas échéant provenir d'Etats européens, faute d'harmonisation du droit des sociétés.

Le groupe de travail a dès lors estimé qu'il existait « un risque qu'un tel déséquilibre joue à terme globalement au désavantage du développement de sièges sociaux français au profit de sociétés de pays étrangers dont le droit prévoirait une autonomie plus forte des dirigeants en période d'offre ». Cette préoccupation avait de fait été identifiée dès 2002 par le groupe d'experts en droit des sociétés qui avait contribué à la préparation de la version finale de la directive 79 ( * ) , a fait l'objet de nombreux débats au sein du Conseil et du Parlement européen durant les négociations, et a donné lieu à l'introduction de l'article 12.

Le groupe de travail a dès lors estimé qu' « il n'est envisageable d'adopter le régime européen de gouvernance qu'à la condition qu'une égalité des conditions de jeu soit établie entre sociétés des différents pays » et s'est déclaré favorable à l'introduction en France de la clause de réciprocité.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LE NOUVEL ARTICLE L. 233-33 DU CODE DE COMMERCE

Le texte proposé par le présent article introduit un nouvel article L. 233-33 dans le code de commerce, qui transpose deux importantes dispositions de l'article 12 de la « directive OPA » que sont la réserve de réciprocité susceptible d'être exercée par la société visée et, corrélativement, l'autorisation préalable par l'assemblée générale dans un délai fixé.

1. L'exemption d'approbation des mesures de défense par l'assemblée générale en période d'offre

Le texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 233-33 du code de commerce introduit la clause communautaire de réciprocité et prévoit l'inapplicabilité des dispositions prévues à l'article L. 233-32 du même code, introduit par l'article 10 du présent projet de loi, « lorsque la société fait l'objet d'une ou plusieurs offres publiques engagées exclusivement par des entités qui n'appliquent pas ce même article ou des mesures équivalentes ». La réciprocité peut s'appliquer de manière extensive puisque trois cas de figure sont prévus s'agissant du ou des offrants, incluant en particulier les liens tenant au contrôle ou à une action de concert :

- le ou les offrants peuvent présenter des offres concurrentes. Le traitement des offres concurrentes (généralement deux) a constitué une des questions abordées par le groupe de travail de M. Jean-François Lepetit, au regard des disparités potentielles entre offrants, susceptibles individuellement d'appliquer ou non l'article 9 de la directive. Le texte proposé tend à lever l'incertitude juridique en précisant que la réciprocité est opposable « exclusivement » aux sociétés qui n'appliquent pas cet article.

Cette formulation requiert toutefois des explications. Selon les informations recueillies par votre rapporteur général, il semblait difficile de prévoir deux régimes distincts pour la même cible, c'est-à-dire que celle-ci applique la réciprocité à l'égard du ou des offrants non « vertueux », et ne l'applique pas pour les autres. Le même régime aurait donc vocation à s'appliquer pour tous les offrants , selon une appréciation globale de la réciprocité et un mode du « tout ou rien ». Le terme « exclusivement » vise à indiquer qu'une société cible ne peut faire jouer la réciprocité, et donc se protéger, que si elle fait l'objet d'offres initiées seulement par des sociétés qui n'appliquent pas le régime de gouvernance de l'article 9 ou des mesures équivalentes. A contrario , il suffit que l'un des initiateurs soit « vertueux » pour que la société cible ne puisse pas faire jouer la réciprocité à l'égard de tous les offrants.

Ce principe relève de ce que le rapport du groupe de travail précité désigne comme « la clause de l'initiateur le plus favorisé » : l'initiateur vertueux ne doit se voir opposer la clause de réciprocité au seul motif d'une offre concomitante d'une société non vertueuse, de telle sorte que cette dernière bénéficie en réalité de la vertu de l'autre offrant , à l'instar de la clause commerciale de la nation la plus favorisée. Dans le cas contraire, l'incitation à la « démocratie actionnariale » tendrait en effet à disparaître. Au surplus, le non emploi du terme « exclusivement » ferait courir le risque qu'une cible attaquée par une société vertueuse sollicite une offre plus ou moins crédible d'une société non vertueuse afin de ne pas faire jouer la clause de réciprocité.

Votre rapporteur général ne partage pas totalement cette appréciation et considère que le principe de réciprocité, qui s'inscrit dans le cadre de « l'égalité des conditions de jeu » promu par la directive, a vocation à éviter les comportements de « passager clandestin » 80 ( * ) ;

- le deuxième cas d'application de la réciprocité réside dans le fait que les offrants peuvent être contrôlés , au sens du II ou du III de l'article L. 233-16 du code de commerce, par des entités qui n'appliquent pas les dispositions de l'article L. 233-32. Le contrôle ainsi visé peut être exclusif 81 ( * ) ou conjoint 82 ( * ) ;

- l'applicabilité de la réciprocité est enfin prévue en cas d'action de concert au sens de l'article L. 233-10 83 ( * ) - qui définit cette action ainsi et en expose les présomptions 84 ( * ) - si l'une des entités impliquées n'applique pas l'article L. 233-32 ou des mesures équivalentes, ou est contrôlée par une entité qui n'applique pas cet article ou des mesures équivalentes. Il en résulte que la non application du régime de l'article 9 de la directive par l'un seulement des participants permet d'opposer la réciprocité à l'ensemble des entités agissant de concert , compte tenu des liens existants entre les « concertistes ». Il s'agit en quelque sorte de l'optique inverse de celle prévalant pour les offres concurrentes.

En visant pour chaque cas la notion d' « entité », l'article L. 233-33 permet également d'opposer la réciprocité à toutes sortes de structures initiatrices d'une offre, disposant ou non de la personnalité morale, que ce soit par exemple une société, un trust ou un fonds d'investissement.

2. Le rôle de l'AMF

L'application de l'article 9 par des sociétés de pays tiers peut être source de contentieux , dont la durée potentiellement longue serait incompatible avec le calendrier d'une OPA. Le groupe de travail précité a estimé que son appréciation pourrait faire l'objet d'une décision de l'AMF , qui serait susceptible de recours devant la Cour d'appel dans des délais courts.

Cette recommandation est prise en compte dans le texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 233-33, dont la dernière phrase précise que « toute contestation sur l'équivalence de ces mesures fait l'objet d'une décision de l'Autorité des marchés financiers ». Il apparaît en effet que le champ des mesures considérées comme « équivalentes » aux dispositions de l'article 9 pourrait constituer le principal motif de contentieux. L'AMF jouera donc un rôle déterminant dans l'appréciation de la portée de la réciprocité.

3. La nécessité d'une approbation antérieure par l'assemblée générale dans un délai de 18 mois

Le second alinéa de l'article L. 233-33 apporte un tempérament à l'exception de réciprocité, conformément au paragraphe 5 précité de l'article 12 de la directive, en prévoyant que son application nécessite que toute mesure de défense prise par l'organe de direction ou d'administration (conseil d'administration, conseil de surveillance ou directoire) ou les dirigeants (directeur général ou l'un des directeurs généraux délégués) de la société visée « doit avoir été expressément autorisée pour l'hypothèse d'une offre publique par l'assemblée générale dans les dix-huit mois précédant le jour de l'offre ».

Cette autorisation est donc soumise à une double condition d'objet et de délai. La formulation « dans les dix-huit mois » proposée apparaît plus claire que celle de l'article 12 de la directive , dont la rédaction « au plus tôt dix-huit mois avant que l'offre ait été rendue publique » pouvait éventuellement soulever une ambiguïté 85 ( * ) . Il en résulte qu'une mesure de défense pourra être approuvée par l'assemblée générale quelques semaines avant la publication de l'OPA , donc dès lors que la direction aura eu connaissance de l'imminence ou du caractère probable de l'offre, sans que ses modalités n'en soient encore finalisées ni officialisées.

B. LA PORTÉE DE LA RÉCIPROCITÉ

1. Le maintien des mesures de défense autorisées « à froid »

La clause de réciprocité a pour effet d'exonérer la société cible du principe posé par l'article 9 de la directive, transposé dans l'article 10 du présent projet de loi, et donc de permettre à une société de prendre des mesures de défense sans que soit requise une approbation ou une confirmation par l'assemblée générale en cours d'offre , dès lors que le ou les offrants ne seraient pas soumis à ces dispositions.

Une telle autorisation doit cependant avoir été obtenue au plus tôt dix-huit mois avant la période d'offre. De même, les délégations accordées par l'assemblée générale et permettant aux organes d'administration ou de direction de mettre en oeuvre des mesures défensives demeurent actives , sous la même condition de délai de dix-huit mois précédant la publication de l'offre. Si cette condition est satisfaite et que la société fait jouer la réciprocité, les dirigeants pourront dès lors décider, en période d'offre, une augmentation ou une réduction du capital, ou le rachat d'actions de la société, dans la limite du plafond de 10 % du capital prévue par l'article L. 225-209 du code de commerce.

De manière similaire, l'exception de réciprocité permet aux organes de direction ou d'administration de prendre des mesures relevant de la compétence propre des dirigeants , telles que la cession ou l'acquisition d'un actif stratégique, le lancement d'une contre offre ou la modification de contrats contenant des clauses liées à la perspective d'un changement de contrôle de la société, à condition que ces mesures aient été autorisées par l'assemblée générale dans les dix-huit mois précédant l'offre.

Ainsi que le relève le rapport du groupe de travail précité, l'application de l'article 9 implique donc que les mesures de défense soient approuvées « à chaud », c'est-à-dire en période d'offre, tandis que la réciprocité permet la mise en oeuvre de ces mesures dès lors qu'elles ont été autorisées « à froid », c'est-à-dire dans le délai de dix-huit mois . La souplesse supplémentaire que permet l'exception de réciprocité n'est pas pour autant réalisée au détriment des actionnaires , puisque ceux-ci sont quoiqu'il arrive amenés à se prononcer sur les mesures de défense, mais selon un calendrier distinct.

2. L'opposabilité aux pays tiers

Le groupe de travail s'est attaché à déterminer si la réciprocité était susceptible d'avoir une portée extracommunautaire , en particulier à l'égard d'Etats tels que la Chine et les Etats-Unis, et si elle était compatible avec les engagements internationaux de la France dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il ne fait guère de doute qu'au moins dans l'esprit, la clause de réciprocité a vocation à prévenir une concurrence déloyale non pas uniquement entre sociétés de l'Espace économique européen, mais également à l'égard d'offrants de pays tiers, et que le droit national pourrait, le cas échéant, souverainement être appliqué pour rendre la réciprocité opposable aux sociétés non européennes.

Le groupe de travail a également considéré que la réciprocité était compatible avec la clause de la nation la plus favorisée , prévue par l'article 2 de l'Accord général sur le commerce des services 86 ( * ) (AGCS), signé en 1994. L'exception de réciprocité est en effet appréciée au regard de la situation individuelle de la société initiatrice, et non de la réglementation applicable dans l'Etat dont cette société relève, de telle sorte que n'est instaurée aucune discrimination en fonction d'un critère de nationalité de la société.

Le groupe de travail a enfin estimé que la clause de réciprocité était opposable aux initiateurs non cotés . Le champ d'application de la directive repose en effet sur une conception extensive de l'offrant et plus large que celle de la société visée (dont tout ou partie des titres doivent être cotés sur un marché réglementé) : aux termes de l'article 2, l'offrant peut être « toute personne physique ou morale, de droit public ou de droit privé, qui fait une offre ». Un initiateur non coté ne pouvant faire l'objet d'une OPA, il n'applique pas les limitations prévues par l'article 9 de la directive, et doit donc pouvoir se voir opposer l'exception de réciprocité par la cible.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission est favorable à la levée par la France de l'option de réciprocité pour l'article 9 de la directive, compte tenu des disparités existant entre les principaux Etats dont peuvent relever des offrants potentiels. Une telle disposition constitue certes un facteur de complexité supplémentaire, mais permet d'accorder une « prime » aux comportements « vertueux » en matière de gouvernement d'entreprise.

La réciprocité, dont le principe doit avoir été validé ex ante et les mesures de défense y afférentes approuvées « à froid » (dans le délai de dix-huit mois précédant le début de la période d'offre) par l'assemblée générale, constitue en quelque sorte la contrepartie nécessaire de la « vertu » demandée aux sociétés françaises , dans un contexte international où les différences de régimes juridiques peuvent être fortes.

Toutefois votre rapporteur général ne partage pas l'approche choisie pour l'exercice de la réciprocité en cas d'offres concurrentes , et considère que celle-ci a vocation à s'appliquer en fonction de la situation réelle de l'offrant. Cette clause ne devrait donc pas pouvoir être neutralisée à l'égard des offrants qui n'appliqueraient pas les dispositions de l'article 9, en tirant profit de cette application par un autre offrant. Le dispositif proposé par le présent article empêcherait, en effet, la mise en oeuvre de la clause de réciprocité en cas d'action concomitante non concertée d'offrants placés des situations différentes au regard de l'article 9. Plus précisément, il permettrait à des offrants potentiels ou « à l'affût », en particulier américains, dont le régime est plus favorable à l'autonomie des organes de direction, de tirer opportunément parti de cette application extensive de la réciprocité pour lancer une offre.

Votre commission vous propose donc un amendement tendant à supprimer le terme « exclusivement » dans le texte proposé pour la première phrase de l'article L. 233-33 du code de commerce, afin de faire prévaloir une conception de la réciprocité analogue à celle proposée pour les offrants agissant de concert.

Votre commission vous propose également un amendement rédactionnel au texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 233-33 du code de commerce, tendant à substituer les termes « action de concert » au terme « concert », et à préciser que l'application, par l'une des entités agissant de concert, de l'article L 233-32 du code de commerce concerne ses « dispositions ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 12
Inopposabilité obligatoire des restrictions statutaires au transfert de titres

Commentaire : le présent article introduit un nouvel article L. 233-34 dans le code de commerce, qui a pour objet d'inscrire un principe actuellement fixé par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, prévoyant l'inopposabilité obligatoire à l'initiateur d'une offre publique, en période d'offre, des restrictions statutaires au transfert de titres de la société visée.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE NOUVEAU RÉGIME COMMUNAUTAIRE DE NEUTRALISATION DES RESTRICTIONS AUX TRANSFERTS DE TITRES ET AUX DROITS DE VOTE

1. Le postulat communautaire de proportionnalité entre participation au contrôle et au capital en période d'offre

L'article 11 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (« directive OPA »), intitulé « Neutralisation des restrictions », a pour objet de rendre inopposables à l'offrant, en période d'offre et à l'issue d'une offre réussie, toutes les clauses statutaires ou conventionnelles (en particulier celles figurant dans des pactes d'actionnaires) dont l'objet est de restreindre le transfert des titres de la société visée ou l'exercice des droits de vote qui y sont attachés. Il tend également à suspendre les droits de vote multiples en période d'offre publique.

Ce principe de limitation des mesures de défense sous-tend l'ensemble de la directive et se traduit également dans son article 9 sur les obligations de l'organe de direction ou d'administration de la société visée 87 ( * ) . Le seizième considérant de la directive dispose ainsi qu' « afin d'éviter des opérations susceptibles de faire échouer l'offre, il convient de limiter les pouvoirs de l'organe d'administration ou de direction de la société visée de se lancer dans des opérations de nature exceptionnelle, sans pour autant empêcher indûment ladite société de mener ses activités habituelles ».

Le dix-neuvième considérant affirme surtout que « les Etats membres devraient prendre les mesures nécessaires pour donner à tout offrant la possibilité d'acquérir un intérêt majoritaire dans d'autres sociétés et d'en exercer pleinement le contrôle. A cette fin, les restrictions au transfert de titres et aux droits de vote, les droits spéciaux de nomination et les droits de vote multiple devraient être supprimés ou suspendus pendant la période d'acceptation de l'offre et lorsque l'assemblée générale des actionnaires arrête des mesures de défense, décide de modifier les statuts de la société ou décide de révoquer ou de nommer des membres de l'organe d'administration ou de direction lors de la première assemblée générale des actionnaires suivant la clôture de l'offre ».

Le groupe de haut niveau d'experts en droit des sociétés présidé par M. Jaap Winter, dont le rapport de janvier 2002 a inspiré la version finale de la directive, a défendu le principe d'une stricte proportionnalité entre la participation au contrôle , via l'exercice des droits de vote, et la détention de titres du capital des sociétés visées par une offre publique, lors de la tenue en cours d'offre des assemblées générales amenées à décider des mesures de défense.

Il s'agissait en effet de privilégier une décision de l'assemblée générale qui soit motivée par des considérations exclusivement économiques et le libre jeu des offres, et d'empêcher qu'un ou des actionnaires n'emportent la décision sans en supporter toutes les conséquences financières et patrimoniales. Dans le résumé de ses observations et recommandations, le groupe considérait ainsi :

« Par proportionnalité entre risque économique ultime et contrôle, le Groupe entend que seules les parts du capital social conférant au détenteur un droit illimité sur les bénéfices de la société ou sur sa valeur nette de liquidation doivent normalement lui conférer un droit de contrôle proportionnel au risque assumé . Les titulaires de ces droits illimités sur les bénéfices et sur l'actif net d'une société sont les mieux placés pour prendre les décisions affectant cette société, puisqu'ils supporteront les conséquences ultimes de leurs décisions.

« Le détenteur de la majorité du capital d'une société doit pouvoir contrôler celle-ci. Les structures du capital et du contrôle d'une société qui accordent des droits disproportionnés à un (certains) actionnaire(s) ne doivent pas permettre de bloquer une OPA , qui aurait sans cela réussi, portant sur le capital supportant le risque ultime cette société (...) . La règle de neutralisation doit avoir pour effet de rendre inopérantes les dispositions des statuts et autres documents constitutifs contraires aux principes de la prise de décision par l'actionnaire et de proportionnalité entre participation au capital supportant le risque ultime et contrôle ».

2. Les dispositions de l'article 11 de la « directive OPA »

Conformément aux recommandations du groupe d'experts de M. Jaap Winter, les dispositions de l'article 11 prévoient la levée des obstacles contractuels et statutaires aux offres publiques , par l'inopposabilité ou la suspension des effets, et concernent deux étapes de l'offre : la période d'acceptation de l'offre publique et la première assemblée générale qui suit une offre réussie.

a) Les neutralisations en période d'acceptation de l'offre

Le paragraphe 2 de l'article 11 de la directive dispose que « toutes les restrictions au transfert de titres prévues dans les statuts de la société visée sont inopposables à l'offrant pendant la période d'acceptation de l'offre », telle qu'elle est définie à l'article 7 de la directive 88 ( * ) . Il en est de même pour toutes les restrictions au transfert de titres prévues dans des accords contractuels entre la société visée et des détenteurs de titres de cette société ou dans des pactes d'actionnaires conclus après l'adoption de la directive.

De façon analogue, le troisième paragraphe prévoit que les restrictions statutaires et contractuelles au droit de vote ne produisent pas d'effets lors de l'assemblée générale qui arrête des mesures de défense, conformément à l'article 9 de la directive (cf. commentaire de l'article 10 du présent projet de loi). Il dispose également que les titres à droit de vote multiple ne donnent droit chacun qu'à une voix à l'assemblée générale des actionnaires qui arrête des mesures de défense.

b) Les neutralisations à l'issue de la réussite de l'offre

L'offre est considérée comme réussie lorsque l'offrant détient au moins 75 % du capital assorti des droits de vote . Le quatrième paragraphe de l'article 11 prévoit, dans ce cas, l'inapplicabilité des restrictions statutaires et contractuelles au transfert de titres de la société cible et aux droits de vote qui y sont attachés, ainsi que des droits statutaires extraordinaires des actionnaires concernant la nomination ou la révocation de membres de l'organe d'administration ou de direction.

Comme en période d'offre, les titres à droit de vote multiple ne donnent droit chacun qu'à une voix lors de la première assemblée générale qui suit la clôture de l'offre, convoquée par l'offrant aux fins de modifier les statuts ou de révoquer ou de nommer des membres de l'organe de direction ou d'administration. Cette assemblée générale peut être convoquée par l'offrant dans des délais brefs, à condition qu'elle ne se tienne pas dans les deux semaines qui suivent sa notification.

Il ressort cependant de l'analyse fournie par le groupe de travail de M. Jean-François Lepetit que les actions à droit de vote double fréquemment utilisées par les sociétés françaises n'entreraient pas dans le champ des titres à droit de vote multiple que vise la directive.

La préservation des droits de vote double du droit français

« Il est important de noter que la suppression des droits de vote « multiple » ne vise que certaines actions définies par la directive comme des « titres inclus dans une catégorie séparée et distincte et conférant chacun plus d'une voix ». Les actions à droit de vote double « à la française » ne constituent pas une telle « catégorie séparée et distincte » : en effet, le droit de vote double récompense, en France, la fidélité de l'actionnaire et toute action ordinaire est susceptible (si les statuts de la société émettrice de l'action le prévoient) de procurer à son détenteur un droit de vote double après au moins deux années de détention ininterrompue. En outre, l'action perd son droit de vote double lorsqu'elle est cédée : ce droit est ainsi une caractéristique attachée au détenteur et non au titre lui-même.

« Le groupe de travail constate que les actions à droit de vote double « à la française » n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 11 dont l'éventuelle transposition serait par conséquent sans incidence sur le mécanisme de fidélisation des actionnaires souhaité par le législateur français ».

Source : rapport du groupe de travail de M. Jean-François Lepetit sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, remis le 27 juin 2005

L'article 11 prévoit également une indemnisation équitable des détenteurs de droits qui auraient enregistré une perte lors de l'application des neutralisations prévues en période d'offre ou à l'issue de l'offre réussie.

3. Les options ouvertes par l'article 12

Ainsi qu'il a été précisé dans l'exposé général et dans le commentaire de l'article 10 du présent projet de loi, l'article 12 de la directive, intitulé « Arrangements facultatifs », prévoit un système de double option . Il permet en premier lieu aux Etats membres de ne pas imposer l'application de l'article 11 aux sociétés résidentes faisant l'objet d'une offre. Dans ce cas, l'Etat membre doit néanmoins, de façon obligatoire, permettre à ces sociétés d'appliquer ces mêmes dispositions sur une base volontaire en les insérant dans leurs statuts.

Une telle décision doit alors être prise par l'assemblée générale, et notifiée à l'autorité de contrôle du siège social de la société ainsi qu'aux autorités des Etats membres dans lesquels la société est cotée sur un marché réglementé ou a fait l'objet d'une demande de cotation.

Le troisième paragraphe de l'article 12 introduit, en outre, une clause de réciprocité par laquelle les sociétés qui appliquent l'article 11 peuvent être exemptées de leurs dispositions si elles font l'objet d'une offre lancée par une société qui ne les applique pas.

B. LES DISPOSITIONS DU DROIT FRANÇAIS

1. La suspension de certaines clauses statutaires

Les restrictions statutaires au transfert de titres consistent généralement en des clauses d'agrément ou de préemption . Les clauses d'inaliénabilité des titres sont quant à elles explicitement autorisées pour les sociétés par actions simplifiées 89 ( * ) et les sociétés européennes ne faisant pas appel public à l'épargne 90 ( * ) , pour une durée maximale de dix ans, mais elles ne sont a contrario pas autorisées pour les sociétés anonymes. Les clauses restreignant les droits de vote les plus fréquemment invoquées 91 ( * ) en cas d'OPA sont celles relatives au plafonnement des droits de vote , quel que soit le nombre d'actions détenues.

Rappelons que la clause d'agrément , expressément prévue par l'article L. 228-23 du code de commerce 92 ( * ) , doit être prévue par les statuts 93 ( * ) et implique que l'actionnaire qui souhaite céder ses actions doit demander, sous peine de nullité de la cession, l'agrément de la société émettrice. L'actionnaire doit alors notifier à la société, par lettre recommandée avec avis de réception, l'identité du cessionnaire, le nombre d'actions cédées et le prix offert. L'organe compétent et le champ de l'agrément varient selon la forme de la société (société à responsabilité limitée, société par actions simplifiée, société anonyme).

La stipulation d'une clause de préemption permet quant à elle aux associés d'acquérir, par préférence à toute autre personne, les actions ou les parts sociales dont un associé souhaiterait se défaire. La clause de préemption a ainsi pour objet de permettre au bénéficiaire d'accroître sa participation dans la société en se portant acquéreur d'actions en passe d'être cédées, tandis que la clause d'agrément permet de bloquer l'intrusion d'un tiers dans le cercle des associés, et est activée sur décision de l'organe d'administration ou de direction de la société.

L'article 231-6 94 ( * ) du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF) prévoit la suspension, en période d'offre, des clauses statutaires d'agrément , afin de préserver la négociabilité des titres de la société cible. Le règlement général de l'AMF ne fait en revanche pas référence à une inopposabilité des clauses de préemption.

Il importe de relever que cet article 231-6, qui autorise implicitement les clauses d'agrément dans les sociétés cotées, lesquelles constituent le champ de compétence de l'AMF, est en réalité contra legem depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 24 juin 2004 portant réforme des valeurs mobilières 95 ( * ) , dont l'article 32 a modifié l'article L. 228-23 du code de commerce, précité, pour prévoir la possibilité d'insérer des clauses d'agrément dans les statuts des seules sociétés dont les titres de capital ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé, et leur application aux seuls titres nominatifs. L'AMF devrait intégrer cette modification lors d'une prochaine révision de son règlement général.

S'agissant des clauses de préemption , le règlement de l'entreprise de marché Euronext stipule également que ces dernières ne peuvent figurer dans les statuts des sociétés qui demandent l'admission sur un marché réglementé d'Euronext. Il est en revanche possible de les introduire par voie conventionnelle, c'est-à-dire dans un pacte d'actionnaires.

2. La transparence des pactes d'actionnaires

Aucune suspension des clauses contractuelles afférentes à des pactes d'actionnaires n'est prévue mais la transparence prévaut, le principe étant que ces clauses conservent tous leurs effets en période d'offre dès lors qu'elles ont été rendues publiques . Outre les obligations afférentes aux franchissements de seuil prévues par l'article L. 233-7 du code de commerce, l'article L. 233-11 96 ( * ) du même code prévoit ainsi la transmission à tout moment (donc indépendamment de toute OPA) à l'émetteur et à l'AMF, qui en assure la publicité, des clauses des conventions comportant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions cotées, telles que les clauses de préférence et de préemption, et portant sur au moins 0,5 % du capital ou des droits de vote de l'émetteur. La suspension des effets de ces clauses n'est prévue qu'à titre de sanction du défaut de leur transmission à l'AMF.

Les pactes d'actionnaires font également l'objet d'une obligation d'information à l'occasion d'une OPA . L'article 231-5 97 ( * ) du règlement général de l'AMF prévoit ainsi l'insertion, dans la note d'information, des clauses prévoyant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions, ainsi que la publication de toute clause susceptible d'avoir une incidence sur l'appréciation de l'offre publique ou son issue.

Les clauses statutaires contenues dans les pactes d'actionnaires peuvent dans certains cas permettre de déduire une action de concert . Tel est le cas des clauses de préemption, d'inaliénabilité, de sortie conjointe 98 ( * ) ou de non dilution 99 ( * ) . L'action de concert peut également résulter d'accords qui, sans transférer des droits de vote, organisent une concertation préalable au vote ou une gestion commune des droits de vote par la mise en place d'une structure idoine, telle qu'une société en participation.

C. LA NON TRANSPOSITION PARTIELLE RECOMMANDÉE PAR LE RAPPORT DE M. JEAN-FRANÇOIS LEPETIT

Le groupe de travail sur la transposition de la « directive OPA » a recommandé de lever l'option ouverte par l'article 12 de la directive et de ne pas transposer les dispositions de l'article 11 applicables en période d'offre publique , aux motifs qu'elles témoignaient d'une approche trop rigide, comportaient des incertitudes juridiques et contrevenaient à la liberté contractuelle. La transposition de l'article 11 devrait donc être effectuée sur une base volontaire par les entreprises, conformément à la faculté ouverte par l'article 12 de la directive.

Le groupe de travail s'est en revanche déclaré favorable aux dispositions applicables à l'issue d'une offre publique réussie .

Il a souligné les difficultés que posait l'interprétation juridique de l'inopposabilité des clauses contractuelles à l'offrant, dans la mesure où le deuxième paragraphe de l'article 11 fait référence à cette inopposabilité, tandis que le dix-neuvième considérant évoque la « suspension » des accords prévoyant des restrictions au transfert des actions, conformément aux recommandations du groupe d'experts en droit des sociétés présidé par M. Jaap Winter.

Le groupe de travail rappelle que « dans la pratique, l'inopposabilité d'un pacte d'actionnaires à l'offrant laisse entendre que ses effets perdurent entre les parties au pacte durant une offre publique, tandis que la suspension des effets revient en revanche à libérer intégralement les parties de leurs obligations contractuelles en cours d'offre ». La transposition de ces dispositions devrait donc conduire le législateur français à choisir entre l'inopposabilité et la suspension des pactes d'actionnaires en période d'offre publique.

Le groupe de travail a également estimé que la limitation impérative des effets des clauses statutaires et conventionnelles en période d'offre constituait une forte entrave à la liberté contractuelle et à la flexibilité que garantit le droit français . Le caractère contestable de l'article 11 tiendrait cependant davantage à son approche qu'à ses principes. La souplesse contractuelle, qui permet aux actionnaires et aux sociétés d'aménager des structures de contrôle et de capital adaptées à leurs besoins, comprend une contrepartie de transparence à l'égard des acteurs du marché, via la publication des pactes, dont la sanction en cas de non respect garantit l'efficacité.

Le groupe de travail considère que ces structures spécifiques de contrôle, couramment utilisées par les petites et moyennes entreprises pour réunir les conditions favorables à leur entrée en bourse , profitent à la fois aux actionnaires fondateurs (qui peuvent préserver le contrôle de la société durant une période transitoire et n'envisageraient pas une cotation sans ces garanties), aux autres actionnaires (qui ont accès à de nouveaux actifs) et au développement de l'économie. Selon le groupe de travail, cette contractualisation du contrôle profiterait donc au marché dans son ensemble et faciliterait le financement des entreprises. Les investisseurs que le groupe a auditionnés ont également partagé cette analyse.

Le groupe cautionne le principe d'une levée des obstacles, tels que les clauses de plafonnement des droits de vote, qui s'opposent à une prise de contrôle effective à l'issue d'une offre publique réussie . En l'absence de ces dispositions, un actionnaire qui aurait acquis une large majorité (en l'espèce 75 %) du capital de la société cible pourrait en effet se trouver dans l'impossibilité de réunir une majorité suffisante pour, par exemple, modifier les statuts de la cible lors de la première assemblée générale. Le groupe relève que cette limitation est conforme à la doctrine de la Commission des opérations de bourse , devenue l'AMF, et qu'en pratique la plupart des émetteurs français ont en général statutairement prévu la caducité des clauses de plafonnement des droits de vote à l'issue d'une offre réussie.

Il a donc été préconisé de consacrer dans la loi les deux principes appliqués par l'AMF : la suspension des effets des clauses statutaires d'agrément et de préemption en période d'offre publique (qui figure à l'article 231-6 du règlement général de l'Autorité), d'une part, et la caducité des clauses de plafonnement des droits de vote à l'issue d'une offre réussie. La première disposition fait ainsi l'objet du présent article.

Le groupe de travail n'a en revanche pas formulé de recommandations sur l'application de la clause de réciprocité , prévue par l'article 12 de la directive, aux dispositions de son article 11. Cette clause de réciprocité a été retenue pour l'article 9, dont la transposition est proposée dans l'article 10 du présent projet de loi.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose d'inscrire dans la loi le principe de la suspension des restrictions statutaires au transfert de titres en période d'offre, qui relève actuellement du règlement général de l'AMF (cf. supra ). Cet article constitue également le premier d'un dispositif global, incluant les articles 12 à 18 du présent projet de loi, qui permet l'application sur une base volontaire, pour les entreprises qui le souhaitent, des restrictions posées par l'article 11 en période d'offre publique et à l'issue d'une offre ayant réussi.

A. L'APPROCHE GLOBALE ADOPTÉE POUR L'ARTICLE 11 DE LA DIRECTIVE

Le présent projet de loi suit les recommandations formulées par le groupe de travail précité et exerce donc en partie l'option de non transposition de l'article 11 de la « directive OPA », prévue par l'article 12.

Le présent article et l'article 16 transcrivent deux principes figurant dans la réglementation ou la doctrine de l'autorité de marché . Les articles 13 à 15 prévoient l'application volontaire, pour les entreprises qui le souhaitent, de la suspension des restrictions conventionnelles au transfert de titres (article 13) et à l'exercice des droits de vote (article 14) en période d'offre, ainsi que des restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote lors de l'assemblée générale qui arrête des mesures de défense (article 15).

Les articles 17 et 18, qui ont trait aux limitations à l'issue d'une offre ayant réussi , prévoient respectivement l'application volontaire de la suspension des restrictions statutaires et conventionnelles à l'exercice des droits de vote, et de la suspension des droits extraordinaires de nomination et de révocation de certains actionnaires.

Ces dispositions peuvent être résumées dans le tableau ci-après :

Dispositions de l'article 11 de la directive

En période d'offre

Postérieurement à une offre réussie

Restrictions statutaires

Restrictions conventionnelles

Si l'offrant obtient plus de 75 % du capital assorti des droits de vote, ne s appliquent pas :

- les restrictions statutaires ou contractuelles au transfert d'actions et au droit de vote ;

- les droits extraordinaires statutaires de nomination des dirigeants.

Lors de la première assemblée générale, les actions à droits de vote multiples comptent pour une voix.

Au transfert d'actions

(article 11.2 alinéa 1)

A l'exercice des droits de vote

(article 11.3 alinéa 1)

Au transfert d'actions

(article 11.2 alinéa 2)

A l'exercice des droits de vote

(article 11.3 alinéa 2)

Dispositions du projet de loi (articles 12 à 18)

Inopposabilité obligatoire à l'offrant, par reprise du règlement général de l'AMF (article 12)

Suspension volontaire des effets des restrictions statutaires

(article 15)

Inopposabilité volontaire selon les statuts de la société (article 13)

Suspension volontaire des effets selon les statuts de la société

(article 14)

- reprise de la « doctrine COB » et suspension obligatoire des plafonnements statutaires des droits de vote lors de la première assemblée générale si l'offrant détient plus d'une certaine quotité (66,66 %) du capital ou des droits de vote (article 16) ;

- suspension volontaire des restrictions contractuelles ou statutaires au droit de vote si l'offrant obtient plus d'une certaine quotité ( a priori 50,01 %) du capital ou des droits de vote (article 17) ;

- suspension volontaire des droits extraordinaires de nomination des dirigeants si l'offrant obtient plus d'une certaine quotité ( a priori 50,01 %) du capital ou des droits de vote (article 18)

B. LA CONSÉCRATION LÉGISLATIVE D'UN PRINCIPE PRÉVU PAR LE RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'AMF

Conformément aux recommandations du groupe de travail de M. Jean-François Lepetit, le présent article introduit un nouvel article L. 233-34 dans le code de commerce, qui reprend le principe de l'inopposabilité des restrictions statutaires au transfert de titres (telles que les clauses d'agrément et de préemption), posé par l'article précité 231-5 du règlement général de l'AMF, et en adapte la rédaction.

Il dispose donc que les clauses des statuts d'une société cotée sur un marché réglementé, prévoyant des restrictions statutaires au transfert d'actions de la société, sont inopposables à l'offrant pour les titres qui lui seraient apportés dans le cadre de son offre. Cette inopposabilité ne joue pas lorsque les restrictions résultent d'une obligation législative.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission approuve le choix du gouvernement de ne pas transposer les limitations prévues à l'article 11 de la directive et de conforter les options de notre droit actuel , d'une part en légalisant les principes posés par l'autorité de marché , tendant à la suspension des restrictions statutaires au transfert de titres en période d'offre et à l'exercice des droits de vote à l'issue d'une offre ayant réussi, et d'autre part, en laissant aux entreprises le libre choix de l'inopposabilité ou de la suspension des clauses restrictives figurant dans leurs statuts ou dans des pactes d'actionnaires.

Il convient néanmoins de se demander pourquoi le gouvernement a fait le choix de ne pas transposer la clause de réciprocité pour les dispositions de l'article 11. Votre rapporteur général a eu connaissance des arguments suivants :

- en premier lieu, l'introduction de la clause de réciprocité n'apparaîtrait pertinente que lorsque l'application d'un article est rendue obligatoire , ce qui est le cas avec l'article 9 de la directive, dont l'article 10 du présent projet de loi prévoit l'application. Elle constitue en quelque sorte la contrepartie du désengagement de l'organe de direction ou d'administration, qui ne doit pas pour autant constituer un désavantage comparatif lorsque la société fait face à un offrant qui n'applique pas le même régime ;

- en outre, la clause de réciprocité s'appliquerait de manière « unitaire » ou « en bloc », et ne pourrait faire l'objet d'un traitement différencié pour les restrictions en période d'offre et à l'issue d'une offre réussie. La mise en oeuvre de cette clause pour l'ensemble des dispositions de l'article 11 appliquées sur une base volontaire aurait donc permis à une entreprise de revenir sur les deux dispositions, issues de la doctrine ou du règlement général de l'AMF, qui sont actuellement d'application obligatoire en droit français et sont légalisées par le présent article et l'article 16 du présent projet de loi. L'exercice de cette clause pourrait dès lors induire un « retour en arrière » par rapport au droit actuel des offres ;

- il apparaîtrait enfin que sans clause de réciprocité, un dirigeant aurait sans doute relativement peu de chances de convaincre les actionnaires de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 11 sur une base volontaire. L'introduction d'une clause de réciprocité, qui semble protéger les sociétés cibles, conduirait vraisemblablement davantage d'entreprises à appliquer volontairement l'article 11, mais en faisant courir le risque d'un « désarmement » progressif et généralisé des entreprises . Des entreprises démunies de toute clause défensive seraient certes pourvues d'une clause de réciprocité, mais ne pourraient l'opposer si elles faisaient l'objet d'une offre par une société désarmée.

Votre rapporteur général considère cependant que le principe d'égalité des conditions de jeu, qui est une des « pierres angulaires » de la directive, implique que la réciprocité puisse également être exercée au profit des sociétés qui auraient opté en faveur des dispositions de l'article 11 . Un amendement vous est à cet égard proposé à l'article 19 du présent projet de loi.

Votre commission vous propose un amendement de coordination et de cohérence avec certains articles précédents et suivants du présent projet de loi (cf. commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions » sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 13
Inopposabilité facultative des restrictions contractuelles au transfert de titres

Commentaire : le présent article introduit un nouvel article L. 233-35 dans le code de commerce, prévoyant l'inopposabilité volontaire en période d'offre, selon les statuts de la société visée par une offre publique, des restrictions contractuelles au transfert d'actions de ladite société.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIONS DE LA « DIRECTIVE OPA » DU 21 AVRIL 2004

Ainsi qu'il a été précisé dans le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi, l'article 11 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (« directive OPA »), intitulé « Neutralisation des restrictions », a pour objet de rendre inopposables à l'offrant, en période d'offre et à l'issue d'une offre ayant réussi, toutes les clauses statutaires ou conventionnelles (en particulier celles figurant dans des pactes d'actionnaires) dont l'objet est de restreindre le transfert des titres de la société visée ou l'exercice des droits de vote qui y sont attachés. Il tend également à suspendre les droits de vote multiples en période d'offre publique.

Le paragraphe 2 de l'article 11 prévoit en particulier que « toutes les restrictions au transfert de titres prévues dans des accords contractuels entre la société visée et des détenteurs de titres de cette société ou dans des accords contractuels conclus après l'adoption de la présente directive entre des détenteurs de titres de la société visée sont inopposables à l'offrant pendant la période d'acceptation de l'offre ». Cette période est définie à l'article 7 de la directive 100 ( * ) .

L'article 12 de la directive, intitulé « Arrangements facultatifs », prévoit néanmoins un système de double option qui permet aux Etats membres de ne pas imposer l'application de l'article 11 aux sociétés résidentes faisant l'objet d'une offre. Dans ce cas, l'Etat membre doit permettre à ces sociétés d'appliquer ces mêmes dispositions sur une base volontaire en les insérant dans leurs statuts.

B. LES RECOMMANDATIONS DU GROUPE DE TRAVAIL DE M. JEAN-FRANÇOIS LEPETIT

Dans son rapport sur la transposition de la « directive OPA », remis le 27 juin 2005, le groupe de travail présidé par M. Jean-François Lepetit a recommandé de ne pas transposer les dispositions de l'article 11 applicables en période d'offre publique , aux motifs qu'elles témoignaient d'une approche trop rigide, comportaient des incertitudes juridiques (s'agissant en particulier de l'inopposabilité 101 ( * ) ou de la suspension 102 ( * ) des conventions comportant des restrictions au transfert de titres) et contrevenaient à la liberté contractuelle (cf. commentaire de l'article 12 du présent projet de loi).

Le droit français actuel conditionne l'effectivité en période d'offre des clauses de pactes d'actionnaires à un principe de transparence , par leur transmission préalable à l'Autorité des marchés financiers (AMF) 103 ( * ) . Le non-respect de cette transmission, aux termes de l'article L. 233-11 du code de commerce, provoque la suspension des effets des clauses et le déliement des parties en période d'offre publique.

Le groupe de travail a défendu cette flexibilité et cette transparence , qui constituent pour les petites et moyennes entreprises des incitations à la cotation en bourse, et préconisé de lever l'option d'exemption prévue par l'article 12 de la directive. L'application des dispositions de l'article 11, et en l'espèce l'inopposabilité des restrictions contractuelles au transfert de titres, devrait donc être effectuée sur une base volontaire par les entreprises.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article introduit un article L. 233-35 dans le code de commerce, qui prévoit l'application volontaire de l'inopposabilité (conformément au paragraphe 2 de l'article 11 de la directive) des restrictions conventionnelles au transfert de titres en période d'offre , que peuvent prévoir les pactes d'actionnaires. Il dispose ainsi que les statuts d'une société cotée sur un marché réglementée peuvent prévoir l'inopposabilité à l'auteur de l'offre publique, en période d'offre, de toute clause conventionnelle comportant des restrictions au transfert d'actions de la société. Cette disposition est nécessairement d'ordre législatif, dans la mesure où elle prévoit que les statuts peuvent déroger aux contrats conclus par la société et/ou ses associés.

Cette faculté peut être exercée par les sociétés pour les conventions conclues après le 21 avril 2004 , date d'adoption de la directive, conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l'article 11 de la « directive OPA » (cf. supra ) qui tendent à prévenir les effets d'aubaine.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission est favorable à ces dispositions optionnelles , qui sont cohérentes avec le choix de la non transposition des restrictions de l'article 11 de la directive, respectent la lettre de son article 12 et préservent la souplesse de notre droit comme la liberté des entreprises de maintenir ou suspendre statutairement certaines clauses de ses contrats.

Elle vous propose un amendement de coordination et de cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. supra le commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions » sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 14
Suspension facultative des restrictions contractuelles à l'exercice des droits de vote

Commentaire : le présent article introduit un nouvel article L. 233-36 dans le code de commerce, prévoyant la suspension volontaire en période d'offre, selon les statuts de la société visée par une offre publique, des restrictions contractuelles à l'exercice des droits de vote attachés aux actions de la société.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIONS DE LA « DIRECTIVE OPA » DU 21 AVRIL 2004

Ainsi qu'il a été précisé dans le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi, l'article 11 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (« directive OPA »), intitulé « Neutralisation des restrictions », a pour objet de rendre inopposables à l'offrant, en période d'offre et à l'issue d'une offre ayant réussi, toutes les clauses statutaires ou conventionnelles (en particulier celles figurant dans des pactes d'actionnaires) dont l'objet est de restreindre le transfert des titres de la société visée ou l'exercice des droits de vote qui y sont attachés.

Le deuxième alinéa du paragraphe 3 de l'article 11 prévoit en particulier que « les restrictions au droit de vote prévues dans des accords contractuels entre la société visée et des détenteurs de titres de cette société ou dans des accords contractuels conclus après l'adoption de la présente directive entre des détenteurs de titres de la société visée ne produisent pas d'effets lors de l'assemblée générale des actionnaires qui arrête des mesures de défense, quelles qu'elles soient, conformément à l'article 9 ».

L'article 12 de la directive, intitulé « Arrangements facultatifs », prévoit néanmoins un système de double option qui permet aux Etats membres de ne pas imposer l'application de l'article 11 aux sociétés résidentes faisant l'objet d'une offre. Dans ce cas, l'Etat membre doit permettre à ces sociétés d'appliquer ces mêmes dispositions sur une base volontaire en les insérant dans leurs statuts.

B. LES RECOMMANDATIONS DU GROUPE DE TRAVAIL DE M. JEAN-FRANÇOIS LEPETIT

Ainsi qu'il a été précisé dans les commentaires des articles 12 et 13 du présent projet de loi, le rapport du groupe de travail présidé par M. Jean-François Lepetit sur la transposition de la « directive OPA », remis le 27 juin 2005, a recommandé de ne pas transposer les dispositions de l'article 11 applicables en période d'offre publique , aux motifs qu'elles témoignaient d'une approche trop rigide, comportaient des incertitudes juridiques et contrevenaient à la liberté contractuelle et à la souplesse que privilégie le droit français, garanties par la transparence en amont des pactes d'actionnaires.

L'application des dispositions de l'article 11, et en l'espèce la suspension des restrictions contractuelles au droit de vote, devrait donc être effectuée sur une base volontaire par les entreprises, conformément aux dispositions de l'article 12 de la directive.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article introduit un article L. 233-36 dans le code de commerce, qui prévoit l'application volontaire, en période d'offre, de la suspension des restrictions conventionnelles à l'exercice des droits de vote . Il dispose ainsi que les statuts d'une société cotée sur un marché réglementé peuvent prévoir que les effets de toute clause conventionnelle comportant des restrictions à l'exercice des droits de vote attachés à des actions de la société sont suspendus en période d'offre publique visant ladite société, lors des assemblées réunies aux fins d'adopter toute mesure susceptible de faire échouer une offre.

Une société peut donc prévoir la neutralisation des clauses contractuelles restreignant l'exercice des droits de vote attachés à ses titres, telles que les clauses de plafonnement des droits de vote, qui ne pourront dès lors figurer parmi les mesures de défense que l'assemblée générale, en application de l'article 9 de la directive (transposé dans l'article 10 du présent projet de loi), peut approuver en période d'offre.

Cette faculté peut être exercée par les sociétés pour les conventions conclues après le 21 avril 2004 , date d'adoption de la directive, conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l'article 11 de la « directive OPA » (cf. supra ) qui tendent à prévenir les effets d'aubaine.

La suspension erga omnes des effets des clauses a une portée plus large que l'inopposabilité à l'offrant des clauses restreignant les transferts de titres, prévue aux articles 12 (pour les limitations statutaires) et 13 (pour les restrictions contractuelles) du présent projet de loi. L'inopposabilité n'empêche pas les effets des clauses de perdurer entre les parties au pacte, tandis que leur suspension libère intégralement les parties de leurs obligations contractuelles.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission est favorable à ces dispositions optionnelles, qui sont cohérentes avec le choix de la non transposition des restrictions de l'article 11 de la directive, respectent la lettre de son article 12 et préservent la souplesse de notre droit comme la liberté des entreprises de maintenir ou suspendre statutairement certaines clauses de ses contrats.

Elle vous propose un amendement de coordination et de cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. supra le commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions » sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 15
Suspension facultative des restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote

Commentaire : le présent article introduit un nouvel article L. 233-37 dans le code de commerce, prévoyant la suspension volontaire en période d'offre des restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote attachés aux actions de la société visée.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIONS DE LA « DIRECTIVE OPA » DU 21 AVRIL 2004

Ainsi qu'il a été précisé dans les commentaires des articles 12 à 14 du présent projet de loi, l'article 11 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (« directive OPA »), intitulé « Neutralisation des restrictions », a pour objet de rendre inopposables à l'offrant, en période d'offre et à l'issue d'une offre ayant réussi, toutes les clauses statutaires ou conventionnelles (en particulier celles figurant dans des pactes d'actionnaires) dont l'objet est de restreindre le transfert des titres de la société visée ou l'exercice des droits de vote qui y sont attachés.

Le premier alinéa du paragraphe 3 de l'article 11 prévoit en particulier que « les restrictions au droit de vote prévues dans les statuts de la société ne produisent pas d'effets lors de l'assemblée générale des actionnaires qui arrête des mesures de défense, quelles qu'elles soient, conformément à l'article 9 ».

L'article 12 de la directive, intitulé « Arrangements facultatifs », prévoit néanmoins un système de double option qui permet aux Etats membres de ne pas imposer l'application de l'article 11 aux sociétés résidentes faisant l'objet d'une offre. Dans ce cas, l'Etat membre doit permettre à ces sociétés d'appliquer ces mêmes dispositions sur une base volontaire en les insérant dans leurs statuts.

B. LES RECOMMANDATIONS DU GROUPE DE TRAVAIL DE M. JEAN-FRANÇOIS LEPETIT

Ainsi qu'il a été précisé dans le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi, le rapport du groupe de travail présidé par M. Jean-François Lepetit sur la transposition de la « directive OPA », remis le 27 juin 2005, a recommandé de ne pas transposer les dispositions de l'article 11 applicables en période d'offre publique , aux motifs qu'elles témoignaient d'une approche trop rigide, comportaient des incertitudes juridiques et contrevenaient à la liberté contractuelle et à la souplesse que privilégie le droit français, garanties par la transparence des pactes d'actionnaires.

L'application des dispositions de l'article 11, et en l'espèce la suspension des restrictions statutaires au droit de vote, devrait donc être effectuée sur une base volontaire par les entreprises.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article introduit un article L. 233-37 dans le code de commerce, qui prévoit l'application volontaire, en période d'offre, de la suspension des restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote . Il dispose ainsi que les statuts d'une société cotée sur un marché réglementée peuvent prévoir que les restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote attachés à des actions de la société sont suspendues en période d'offre publique visant ladite société, lors des assemblées réunies aux fins d'adopter toute mesure susceptible de faire échouer une offre.

Les mesures de défense que l'assemblée générale, en application de l'article 9 de la directive (transposé dans l'article 10 du présent projet de loi), peut approuver en période d'offre, ne pourraient dès lors comporter des clauses statutaires affectant l'exercice des droits de vote.

Cette faculté peut être exercée par les sociétés pour les conventions conclues après le 21 avril 2004 , date d'adoption de la directive, conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l'article 11 de la « directive OPA » (cf. supra ) qui tendent à prévenir les effets d'aubaine.

La suspension erga omnes des effets des clauses a une portée plus large que l'inopposabilité à l'offrant des clauses restreignant les transferts de titres, prévue aux articles 12 (pour les limitations statutaires) et 13 (pour les restrictions contractuelles) du présent projet de loi. L'inopposabilité n'empêche pas les effets des clauses de perdurer entre les parties au pacte, tandis que leur suspension libère intégralement les parties de leurs obligations contractuelles. Compte tenu des imprécisions de la directive, il est proposé de reprendre les principes du droit français actuel.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission approuve les dispositions optionnelles du présent article, qui sont cohérentes avec le choix de la non transposition des restrictions de l'article 11 de la directive, respectent la lettre de son article 12 et préservent la souplesse de notre droit comme la liberté des entreprises de maintenir ou suspendre certaines clauses de leurs statuts. Il est toutefois vraisemblable que la plupart des sociétés cotées n'exerceront pas cette faculté de suspension des clauses restreignant l'exercice des droits de vote.

Elle vous propose deux amendements :

- l'un de coordination et de cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. supra le commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions » sont admis à la négociation sur un marché réglementé ;

- le second précise que la suspension concerne les effets des restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote, et non les restrictions elles-mêmes.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 16
Suspension des restrictions statutaires en cas de réussite de l'offre

Commentaire : le présent article vise à inscrire dans la loi une règle issue de la doctrine de l'Autorité des marchés financiers. Dans la société cible, lors de la première assemblée générale qui suit une offre réussie, si l'auteur de cette offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote, les éventuelles restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote sont automatiquement suspendues.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE PRINCIPE DE LA PROPORTIONNALITÉ DES DROITS DE VOTE À LA PART DE CAPITAL DÉTENUE

En principe, les droits de vote attachés aux actions sont régis par une règle de proportionnalité. En effet, suivant le paragraphe I de l'article L. 225-122 du code de commerce, le nombre de voix dont dispose un actionnaire est fonction de la part de capital que représentent les actions qu'il détient , et chaque action donne droit à une voix au moins.

La même disposition précise que cette règle s'applique aux actions de capital comme aux actions de jouissance 104 ( * ) , et que toute clause contraire est réputée non écrite.

B. LES EXCEPTIONS AU PRINCIPE DE LA PROPORTIONNALITÉ DES DROITS DE VOTE À LA PART DE CAPITAL DÉTENUE

Le principe de la proportionnalité des droits de vote à la part de capital détenue supporte trois séries d'exceptions . Celles-ci se trouvent d'ailleurs en partie réservées par l'article L. 225-122 précité (par renvoi exprès aux articles L. 225-10, L. 225-123, L. 225-124, L. 225-125 et L. 225-126 du code de commerce).

1. Les cas de suppression du droit de vote

Une première dérogation à cette règle de proportionnalité recouvre les cas de suppression du droit de vote attaché aux actions 105 ( * ) .

La principale hypothèse, à cet égard, a trait aux actions privilégiées sans droit de vote (notamment les actions à dividende prioritaire sans droit de vote ou, désormais, des actions de préférence créées sur le fondement de l'article L. 228-11 du code de commerce 106 ( * ) ). Ces actions, par définition, n'ouvrent droit à aucune voix pour leur détenteur : elles lui confèrent les avantages prévus par les statuts, mais elles ne lui permettent pas de participer activement aux assemblées générales.

Un autre cas de suppression du droit de vote concerne, lors des délibérations d'assemblée générale sur l'approbation d'un apport en nature ou l'octroi d'un avantage particulier, les actionnaires apporteurs ou bénéficiaires . Suivant l'article L. 225-10 du code de commerce, les actions de ces derniers compte tenu de leur intérêt personnel à voir la résolution adoptée ne sont pas prises en compte pour le calcul de la majorité. La même disposition précise que l'apporteur ou le bénéficiaire n'a voix délibérative ni pour lui-même, ni comme mandataire.

2. Les droits de vote double

A l'inverse des cas de suppression, une deuxième série d'exceptions au principe de proportionnalité des droits de vote à la quotité de capital détenue consiste dans les droits de vote double.

Aux termes du premier alinéa de l'article L. 225-123 du code de commerce, les statuts ou une assemblée générale extraordinaire ultérieure peuvent en effet décider le doublement des droits de vote attachés aux actions nominatives.

Deux conditions , cependant, sont posées : d'une part, les actions en cause doivent être entièrement libérées 107 ( * ) ; d'autre part, en principe, ces actions doivent être inscrites au nom d'un même titulaire depuis deux ans au moins. Le deuxième alinéa de l'article L. 225-123 précité, toutefois, en cas d'augmentation du capital par incorporation de réserves, de bénéfices ou de primes d'émission, permet qu'un droit de vote double soit conféré dès leur émission aux actions nominatives attribuées gratuitement, à un actionnaire, à raison d'actions anciennes pour lesquelles il bénéficie de ce droit 108 ( * ) .

Les actions assorties d'un tel droit de vote double permettent aux sociétés de « fidéliser » leurs actionnaires , moins tentés de revendre leurs titres compte tenu du pouvoir renforcé qu'ils détiennent au sein des assemblées.

3. Les restrictions à l'exercice des droits de vote

La troisième hypothèse de non proportionnalité des droits de vote à la fraction de capital détenue, enfin, touche aux restrictions imposées à l'exercice de ces droits, qui peuvent être de nature statutaire ou conventionnelle. On n'examinera ci-après que le cas des restrictions statutaires 109 ( * ) .

En vue d'assurer la protection des petits actionnaires par une diminution de l'influence des gros porteurs au sein des assemblées générales, l'article L. 225-125 du code de commerce, en effet, autorise les statuts à « limiter le nombre de voix dont dispose chaque actionnaire dans les assemblées ». Il s'agit, en d'autres termes, de prévoir des clauses de plafonnement des droits de vote.

En pratique, ni la loi ni les dispositions réglementaires ne fixant aucun seuil, les statuts sont libres d'arrêter le plafond de voix maximal dont pourront jouir les actionnaires, comme les modalités de détermination de ce plafond (limitation à un nombre fixe de voix ou à un pourcentage du nombre total de droits de vote, introduction d'une règle de proportion des droits de vote décroissante avec le nombre d'actions détenues, etc .). De même, l'article L. 225-125, précité, mentionnant simplement « les assemblées », sans qualification particulière, la restriction statutaire peut viser toutes les assemblées d'actionnaires , indifféremment, ou les seules assemblées générales ordinaires, ou au contraire les seules assemblées générales extraordinaires 110 ( * ) , ou encore telle ou telle assemblée ayant à statuer sur un objet particulier.

La restriction des droits de vote se trouve cependant subordonnée à une condition d'égalité entre actionnaires : cette clause n'est valable que si elle est imposée, suivant les termes de l'article L. 225-125, « à toutes les actions sans distinction de catégorie » (réserve faite d'actions privilégiées sans droit de vote qui, par définition, ne sont pas concernées 111 ( * ) ).

En outre, dès 1993, la Commission des opérations de bourse , depuis devenue l'Autorité des marchés financiers (AMF) 112 ( * ) , a relevé que les limitations apportées par les statuts à l'exercice des droits de vote risquaient de contredire la situation normale d'un actionnaire majoritaire et, par conséquent, de vouer à l'échec toute offre publique d'acquisition. Aussi, elle a proposé que les clauses statutaires de restriction des droits de vote soient assorties d'un mécanisme de caducité automatique, dès lors que le contrôle majoritaire de la société en cause se trouverait acquis à la suite d'une offre réussie 113 ( * ) .

Comme le note le rapport du groupe de travail animé par M. Jean-François Lepetit 114 ( * ) , dans la pratique, la grande majorité des émetteurs français ont en conséquence prévu, dans leurs statuts, la caducité des clauses (statutaires) de plafonnement des droits de vote à l'issue d'une offre réussie . D'après les indications fournies à votre rapporteur général par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, les entreprises, dans la plupart des cas, pour l'application de cette règle de caducité, ont retenu le seuil de 66,66 % de capital détenus par l'auteur de l'offre. Ce chiffre correspond en effet au nombre de voix nécessaires pour passer outre la minorité dite « de blocage » au sein, notamment, des assemblées générales extraordinaires où la majorité requise pour l'adoption d'une résolution, en vertu du troisième alinéa de l'article L. 225-96 du code de commerce, est, sous réserve des exigences de quorum, des deux tiers des voix 115 ( * ) . Il correspond, par conséquent, en particulier, au seuil permettant la modification des statuts sociaux .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE SUSPENSION AUTOMATIQUE, EN CAS D'OFFRE RÉUSSIE, DES RESTRICTIONS STATUTAIRES AUX DROITS DE VOTE

Le présent article propose d'ajouter un second alinéa à l'article L. 225-125, précité, du code de commerce.

Ce nouveau texte, en synthèse, prévoit que les effets d'une éventuelle limitation statutaire du nombre de voix de chaque actionnaire, dans la société cible, se trouvent suspendus, obligatoirement, lors de la première assemblée générale qui suit la clôture d'une offre publique d'acquisition réussie, lorsque l'auteur de l'offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote .

De la sorte, le présent article tend à conférer une valeur législative à la règle qui , comme on l'a indiqué, existe actuellement au niveau de la doctrine de l'AMF . Ce faisant, il vise également à assurer, en ce qui concerne la loi, la transposition de l'un des objectifs fixés par le paragraphe 4 de l'article 11 de la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition (bien que la mise en oeuvre de cet objectif, pour les Etats membres de l'Union européenne, soit rendue optionnelle par le paragraphe 1 de l'article 12 de la même directive 116 ( * ) ).

B. CONDITIONS DE LA SUSPENSION DES RESTRICTIONS STATUTAIRES AUX DROITS DE VOTE

La situation déclenchant la suspension des limitations statutaires aux droits de vote est définie, par le nouveau texte, comme la circonstance où « l'initiateur de l'offre, agissant seul ou de concert, vient à détenir à l'issue de celle-ci une fraction du capital ou des droits de vote supérieure à une quotité fixée par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ».

Cette définition s'appuie sur trois séries d'éléments 117 ( * ) .

1. Quant aux modalités d'action de l'auteur de l'offre

Il est d'abord précisé que l'auteur de l'offre a pu agir seul ou de concert . Cette mention de l'action de concert est usuelle en droit financier, afin d'éviter que les obligations légales ou réglementaires puissent être facilement contournées ; elle renvoie à la définition donnée par le paragraphe I de l'article L. 233-10 du code de commerce, aux termes duquel « sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue d'exercer les droits de vote, pour mettre en oeuvre une politique vis-à-vis de la société 118 ( * ) ». Il convient au reste de noter que cette définition se trouve complétée par l'article 4 du présent projet de loi.

Par conséquent, pour appliquer le futur second alinéa de l'article L. 225-125, dans l'appréciation de la réussite de l'offre, il n'importera pas que celle-ci ait été le résultat de l'intervention d'un seul actionnaire ou d'une stratégie concertée entre plusieurs.

2. Quant à la mesure qualitative de la part de la société acquise à la suite de l'offre

Le présent article prend soin de mentionner que l'auteur de l'offre peut être parvenu à détenir la fraction requise de la société visée en capital ou en droits de vote .

Ces deux derniers aspects, en effet, peuvent ne pas se recouper, compte tenu des possibles dérogations au principe de proportionnalité des droits de vote à la part de capital détenu 119 ( * ) notamment en raison, d'une part, des cas de vote double prévus par l'article L. 225-123 du code de commerce et, d'autre part, des limitations statutaires autorisées par l'article L. 225-125 du même code dans sa rédaction en vigueur (destinée à devenir le texte du premier alinéa de cet article du fait de la présente disposition). La distinction entre part de capital et pourcentage de droits de vote apparaît d'ailleurs usuellement dans les textes de droit boursier.

Ainsi, en vue de déterminer si les conditions d'application de la nouvelle règle de suspension sont remplies, c'est tant en capital qu'en droits de vote qu'il conviendra de mesurer les résultats de l'offre.

3. Quant à la mesure quantitative de la part de la société acquise à la suite de l'offre

La fraction du capital ou des droits de vote détenue par l'auteur de l'offre doit être supérieure à une quotité que fixera le règlement général de l'Autorité des marchés financiers .

Dans son principe, cette attribution réglementaire donnée par le présent article à l'AMF est conforme au paragraphe II de l'article L. 621-7 du code monétaire et financier, qui assigne à ladite Autorité la mission de déterminer, dans son règlement général, les règles relatives aux offres publiques d'acquisition.

Suivant la procédure fixée par l'article L. 621-6 du même code, la publication au Journal officiel de la quotité ainsi retenue par l'AMF devra être précédée d'une homologation par arrêté du ministre chargé de l'économie . Cette disposition permet au ministre, au besoin, d'engager un dialogue constructif avec l'AMF, juridiquement indépendante 120 ( * ) .

Sur le fond, en vue de se conformer aux prescriptions (que le gouvernement a fait le choix de mettre en oeuvre) du paragraphe 4, précité, de l'article 11 de la directive 2004/25/CE, la quotité de capital ou de droits de vote, au-delà de laquelle la règle de suspension jouera, devrait être de 75 %. Cependant, compte tenu de la pratique d'ores et déjà couramment observée 121 ( * ) , et dans la mesure où le chiffre de 75 % ne correspond à aucun seuil pertinent en droit français, cette quotité , d'après les informations communiquées à votre rapporteur général, pourrait être fixée par l'AMF à 66,66 %, voire à 50,01 % .

Le premier de ces deux seuils 66,66 % , comme on l'a signalé déjà, correspond à la majorité des deux tiers requise, notamment, pour l'adoption des résolutions d'assemblée générale extraordinaire. L'un comme l'autre, et singulièrement le seuil de 50,01 %, sont plus contraignants , du point de vue des sociétés cibles d'une offre publique, que l'objectif communautaire. Rien ne l'interdit : ils n'en satisferaient que mieux cet objectif.

C. LIMITES DU CHAMP D'APPLICATION

1. La limitation aux sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé

Le champ d'application de la présente disposition est expressément limité aux sociétés dont les actions se trouvent admises à la négociation sur un marché réglementé. Cette précision est d'ordre logique, dans la mesure où les offres publiques d'acquisition, au sens du droit en vigueur, concernent les détenteurs de titres négociés sur un marché réglementé. Au reste, le présent article reprend ainsi la règle posée par le paragraphe 1 de l'article 1 er de la directive 2004/25/CE précitée 122 ( * ) .

Il convient de rappeler qu'au plan du droit français, la notion de marché « réglementé » est définie par les articles L. 421-1 et suivants du code monétaire et financier, et désigne des marchés qui garantissent le fonctionnement régulier des négociations par des règles touchant, notamment, aux conditions d'accès au marché, à l'admission de la cotation, à l'organisation des transactions, et à la publicité de celles-ci ; cette qualité est leur est reconnue par arrêté du ministre chargé de l'économie, sur la proposition de l'AMF. En pratique, la notion se confond désormais avec l'Eurolist d'Euronext Paris 123 ( * ) .

2. L'exclusion des restrictions conventionnelles à l'exercice des droits de vote

La règle de suspension automatique des restrictions de vote posée par le présent article, il convient de le souligner, ne concerne que les restrictions statutaires, à l'exclusion d'éventuelles limitations similaires stipulées par convention entre actionnaires 124 ( * ) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article, en proposant d'inscrire dans la loi l'actuelle doctrine de l'Autorité des marchés financiers quant à la suspension, à l'issue d'une offre publique d'acquisition réussie, d'éventuelles restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote au sein de la société cible, se conforme à une recommandation formulée par le groupe de travail animé par M. Jean-François Lepetit 125 ( * ) .

Comme l'a expressément relevé le rapport de ce groupe, la disposition « relève de la logique : une fois l'offre réussie, un initiateur doit pouvoir disposer du contrôle effectif de la société cible ». Faute de suspension des clauses de plafonnement des droits de vote, en effet, un actionnaire qui aurait acquis une fraction très importante du capital d'une société à l'issue d'une offre publique pourrait se trouver, paradoxalement, dans l'impossibilité de réunir une majorité suffisante, en particulier en vue de modifier les statuts.

Certes, ainsi qu'on l'a relevé plus haut, les entreprises françaises concernées, suivant la doctrine de la Commission des opérations de bourses puis de l'AMF, ont en pratique d'ores et déjà inscrit, dans leurs statuts en retenant, en général, un seuil des deux tiers de capital ou de droits de vote , la caducité des clauses (statutaires) de plafonnement des droits de vote, à l'issue d'une offre réussie dont elles seraient la cible. De fait, le présent article, si l'AMF retenait le seuil de 66,66 %, ne devrait pas conduire à de nombreux changements. Il permettrait toutefois au moins de renforcer, en droit, une disposition dont la nécessité pratique est unanimement reconnue parmi les acteurs financiers .

En tout état de cause, votre rapporteur général souhaite que l'AMF confirme rapidement le choix du seuil réglementaire soit des deux tiers, soit de 50,01 % en ce qui concerne le capital ou les droits de vote .

Par ailleurs, votre commission vous propose un amendement de coordination et de cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions », sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 17
Suspension sur une base volontaire des restrictions statutaires et conventionnelles en cas de réussite de l'offre

Commentaire : le présent article vise à permettre sur une base volontaire, pour les entreprises qui le souhaitent, que, dans la société cible, lors de la première assemblée générale suivant une offre réussie, si l'auteur de cette offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote, les éventuelles restrictions statutaires ou conventionnelles à l'exercice des droits de vote se trouvent automatiquement suspendues.

I. LE DROIT EXISTANT

En principe , suivant le paragraphe I de l'article L. 225-122 du code de commerce, le nombre de voix dont dispose un actionnaire est proportionnel à la fraction de capital que représentent les actions qu'il détient 126 ( * ) . Néanmoins, en vue d'assurer la protection des petits actionnaires par une diminution de l'influence des gros porteurs au sein des assemblées générales, des restrictions à l'exercice des droits de vote peuvent être fixées, soit par les statuts de la société, soit par voie de convention entre les actionnaires .

A. LES RESTRICTIONS STATUTAIRES À L'EXERCICE DES DROITS DE VOTE

Le premier cas, ainsi qu'on l'a déjà présenté dans le cadre du commentaire de l'article 16 du présent projet de loi, est prévu par l'article L. 225-125 du code de commerce. Ce texte autorise les statuts à « limiter le nombre de voix dont dispose chaque actionnaire dans les assemblées ». Il s'agit, en d'autres termes, de prévoir des clauses de plafonnement des droits de vote.

En pratique, ni la loi ni les dispositions réglementaires ne fixant aucun seuil, les statuts sont libres d'arrêter le plafond de voix maximal dont pourront jouir les actionnaires, comme les modalités de détermination de ce plafond (limitation à un nombre fixe de voix ou à un pourcentage du nombre total de droits de vote, introduction d'une règle de proportion des droits de vote décroissante avec le nombre d'actions détenues, etc .).

De même, l'article L. 225-125, précité, mentionnant simplement « les assemblées », sans qualification particulière, la restriction statutaire peut viser toutes les assemblées d'actionnaires , indifféremment, ou les seules assemblées générales ordinaires, ou au contraire les seules assemblées générales extraordinaires 127 ( * ) , ou encore telle ou telle assemblées ayant à statuer sur un objet particulier.

La restriction des droits de vote se trouve cependant subordonnée à une condition d'égalité entre actionnaires : cette clause n'est valable que si elle est imposée, suivant les termes de l'article L. 225-125, « à toutes les actions sans distinction de catégorie » (réserve faite d'actions privilégiées sans droit de vote qui, par définition, ne sont pas concernées 128 ( * ) ).

En outre, dès 1993, la Commission des opérations de bourse , depuis devenue l'Autorité des marchés financiers (AMF), afin d'éviter que d'éventuelles limitations apportées par les statuts à l'exercice des droits de vote ne vouent à l'échec toute offre publique d'acquisition, a proposé que ces clauses soient assorties d'un mécanisme de caducité automatique, dès lors que le contrôle majoritaire de la société en cause se trouverait acquis à la suite d'une offre réussie 129 ( * ) .

Comme le note le rapport du groupe de travail animé par M. Jean François Lepetit 130 ( * ) , dans la pratique, la grande majorité des émetteurs français ont en conséquence prévu, dans leurs statuts, la caducité des clauses de plafonnement des droits de vote à l'issue d'une offre réussie . D'après les indications fournies à votre rapporteur général par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, les entreprises, dans la plupart des cas, pour l'application de cette règle de caducité, ont retenu le seuil de 66,66 % de capital détenus par l'auteur de l'offre. Ce chiffre correspond en effet au nombre de voix nécessaires pour passer outre la minorité dite « de blocage » au sein, notamment, des assemblées générales extraordinaires où la majorité requise pour l'adoption d'une résolution, en vertu du troisième alinéa de l'article L. 225-96 du code de commerce, est, sous réserve des exigences de quorum, des deux tiers des voix 131 ( * ) . Il correspond, par conséquent, en particulier, au seuil permettant la modification des statuts sociaux .

B. LES RESTRICTIONS CONVENTIONNELLES À L'EXERCICE DES DROITS DE VOTE

Au contraire des restrictions statutaires, les limitations à l'exercice des droits de vote stipulées par des conventions entre actionnaires ne sont pas prévues en tant que telles par la législation . Celle-ci, en effet, tient seulement compte, d'une manière générale, d'ailleurs indirectement, de l'existence ou de certains effets des conventions de vote qui peuvent être passées entre actionnaires, indépendamment de leur objet précis 132 ( * ) . Rien, néanmoins, n'interdit de telles limitations, dont l'élaboration conventionnelle, en pratique usuelle, participe de la liberté contractuelle.

Les actionnaires ou certains d'entre eux peuvent ainsi s'engager réciproquement, soit à voter dans un sens déterminé, soit à ne pas prendre part au vote. Ces conventions de vote se trouvent d'ordinaire incluses parmi les clauses de « pactes » d'actionnaires , lesquels, de portée plus générale, sont conclus afin de régler, en dehors des statuts et pour une période souvent longue, le contrôle de la conduite des affaires et la composition du capital de la société.

La validité de principe des restrictions conventionnelles de vote est cependant encadrée . D'une part, le 3° de l'article L. 242-9 du code de commerce puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 9.000 euros le délit de trafic de voix, défini comme « le fait de se faire accorder, garantir ou promettre des avantages pour voter dans un certain sens ou pour ne pas participer au vote, ainsi que le fait d'accorder, garantir ou promettre ces avantages ». D'autre part, conformément au droit commun des contrats et suivant une jurisprudence constante, les conventions de vote ne peuvent être conclues pour une durée illimitée , ou équivalente (par exemple, pour tout le temps où les parties détiendront leurs actions). Enfin, de telles conventions, à peine d'illicéité, ne doivent pas conduire à un vote abusif qu'il s'agisse d'un abus de majorité ou de minorité , c'est-à-dire à un vote contraire à l'intérêt social ; ce qu'il reviendrait, le cas échéant, aux tribunaux d'apprécier.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE POSSIBILITÉ DE PRÉVOIR LA SUSPENSION AUTOMATIQUE, EN CAS D'OFFRE RÉUSSIE, DES RESTRICTIONS STATUTAIRES ET CONVENTIONNELLES AUX DROITS DE VOTE

Le présent article propose d'introduire dans le code de commerce un article L. 233-38 133 ( * ) .

1. Un double choix offert aux sociétés

Le nouveau texte proposé, en synthèse, donne la possibilité aux sociétés qui le souhaitent de prévoir, dans leurs statuts, qu'à l'occasion de la première assemblée générale suivant une offre publique d'acquisition dont elles ont été la cible et qui a réussi, si l'auteur de l'offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote, se trouvent automatiquement suspendues , le cas échéant :

- d'une part, les restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote ;

- d'autre part, les effets de toute restriction de ce type issue d'une convention entre actionnaires (conclue après le 21 avril 2004 134 ( * ) ).

Il relèvera également du choix des sociétés de prévoir la suspension précitée :

- soit de manière alternative, pour les seules restrictions statutaires ou pour les seules restrictions conventionnelles ;

- soit, au contraire, pour les deux types de restrictions à la fois.

2. Une transposition des prescriptions communautaires

Le présent article vise à assurer, en ce qui concerne la loi, la transposition de l'un des objectifs fixés par le paragraphe 4 de l'article 11 de la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition, tout en tenant compte du caractère optionnel de la mise en oeuvre de cet objectif 135 ( * ) .

Aux termes du paragraphe 1 de l'article 12 de la même directive, en effet, les Etats membres sont libres de ne pas imposer aux sociétés dont le siège social se trouve sur leur territoire l'application, notamment, de l'article 11 précité et, en particulier, l'application de la règle de suspension automatique des restrictions statutaires et conventionnelles de vote, en cas d'offre réussie. Le paragraphe 2 de l'article 12, néanmoins, oblige les Etats qui optent ainsi pour la non mise en oeuvre de l'article 11 à donner aux sociétés le choix (réversible) de se conformer aux dispositions de ce dernier article notamment la règle de suspension des restrictions de vote. Cette décision, le cas échéant, doit être prise par l'assemblée générale des actionnaires, conformément au droit national.

Tel est précisément le dessein du présent article : le gouvernement ayant fait le choix de ne pas imposer aux sociétés françaises la règle communautaire de suspension, il s'agit de prévoir cependant la possibilité, pour les entreprises qui le souhaitent, d'inscrire cette règle dans leurs statuts 136 ( * ) .

B. LIMITES DU CHAMP D'APPLICATION

1. L'exclusion des restrictions à l'exercice des droits de vote issues de conventions conclues avant le 21 avril 2004

La limitation du champ d'application du présent article, s'agissant des restrictions conventionnelles, aux conventions conclues après le 21 avril 2004, découle directement de la directive 2004/25/CE précitée. L'article 11 de cette dernière, en effet, afin de prévenir les effets d'aubaine, ne prend expressément en considération que les accords contractuels conclus après la date de son adoption.

Cette date est impérative . Les entreprises, en conséquence, ne pourront ni fixer une date plus tardive, ni, surtout, prévoir la suspension de restrictions nées de conventions signées antérieurement.

Toutefois, dans l'hypothèse où les actionnaires concernés souhaiteraient rationaliser , complètement, l'organisation de l'exercice des droits de vote en cas d'offre publique d'acquisition réussie, il leur serait loisible, le cas échéant, de renouveler les conventions conclues avant le 21 avril 2004 . Les nouvelles conventions qui en résulteraient se trouveraient, par définition, soumises aux dispositions statutaires de la société, adoptées en application du présent article, quant à la suspension automatique des restrictions conventionnelles au droit de vote 137 ( * ) .

2. La limitation aux sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé

Le champ d'application de la présente disposition est expressément limité aux sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé. La précision est à la fois d'ordre logique, du point de vue du droit national, et commandée par le texte de la directive 2004/25/CE précitée 138 ( * ) .

C. CONDITIONS DE LA SUSPENSION DES RESTRICTIONS AUX DROITS DE VOTE

Étant entendu que l'assemblée générale extraordinaire doit préalablement avoir décidé de modifier les statuts de la société en ce sens, la situation qui déclenchera la suspension des limitations statutaires et/ou conventionnelles aux droits de vote est définie, par le texte proposé, comme la circonstance où « l'auteur de l'offre, agissant seul ou de concert, détient à l'issue de celle-ci une fraction du capital ou des droits de vote supérieure à une quotité fixée par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ».

Cette définition s'appuie sur trois séries d'éléments 139 ( * ) :

- l'auteur de l'offre a pu agir seul ou de concert ;

- il peut être parvenu à détenir la fraction requise de la société cible en capital ou en droits de vote ;

- la fraction du capital ou des droits de vote ainsi détenue doit être supérieure à une quotité que fixera le règlement général de l'AMF .

En ce qui concerne ce dernier point, la quotité que retiendra l'AMF , d'après les informations communiquées à votre rapporteur général, devrait être comprise entre 50,01 % et 66,66 % c'est-à-dire entre la majorité simple et la majorité des deux tiers, cette dernière correspondant, comme on l'a déjà indiqué, à la majorité requise, notamment, pour l'adoption des résolutions d'assemblée générale extraordinaire.

Sur le plan de la procédure décisionnelle, il convient de noter que la publication au Journal officiel de la quotité retenue par l'AMF devra être précédée d'une homologation par arrêté du ministre chargé de l'économie , conformément à l'article L. 621-6 du code monétaire et financier. Le ministre, au besoin, pourra par conséquent engager un dialogue constructif avec l'Autorité, juridiquement indépendante 140 ( * ) .

Sur le fond, on observera d'abord que le choix d'un seuil inférieur à 66,66 % serait cohérent au regard de la pratique puisque, comme on l'a signalé plus haut, la plupart des entreprises concernées ont déjà mis en place, dans leurs statuts, des clauses de suspension au seuil des deux tiers 141 ( * ) . En tout état de cause, la quotité choisie, pour être véritablement pertinente, devrait être inférieure à celle que l'AMF retiendra dans le cadre de l'article 16 du présent projet de loi ; les développements qui suivent explicitent cet aspect.

D. ARTICULATION DU PRÉSENT ARTICLE AVEC L'ARTICLE 16 DU PRÉSENT PROJET DE LOI

Par souci de clarté, il y a lieu ici de préciser les trois séries de différences du présent article avec l'article 16 du présent projet de loi, et par là même l'articulation de ces dispositions entre elles.

Rappelons à titre liminaire que l'article 16 du présent projet de loi propose d'ajouter, à l'article L. 225-125 du code de commerce, un alinéa prévoyant que, dans la société cible, les effets d'une éventuelle limitation statutaire du nombre de voix de chaque actionnaire se trouvent suspendus, automatiquement, lors de la première assemblée générale qui suit la clôture d'une offre réussie, lorsque l'auteur de cette offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote.

1. Quant à la portée normative de chaque disposition

Le premier point de distinction qu'il convient d'observer entre l'article 16 du projet de loi et le présent article concerne la portée normative de l'un et l'autre. L'article 16 introduit dans le code de commerce une règle impérative de suspension des restrictions apportées à l'exercice des droits de vote, à laquelle les assemblées générales ne pourront pas se soustraire dès lors que les conditions d'application prévues seront remplies. Le présent article se borne à offrir aux actionnaires la possibilité de prévoir, dans les statuts de la société, une suspension semblable .

2. Quant au type de restriction à l'exercice des droits de vote concerné par chaque disposition

La deuxième différence entre les deux dispositions tient au type de restriction à l'exercice des droits de vote concerné dans chaque cas. En effet, le champ d'application de l'article 16 du projet de loi n'inclut que les restrictions aux droits de vote fixées dans les statuts de la société . Le présent article, outre ces restrictions statutaires, intéresse également de façon alternative ou cumulative selon le choix que feront les entreprises les effets des conventions entre actionnaires conclues après le 21 avril 2004.

Au demeurant, il y a lieu de signaler que, pour ce qui concerne les restrictions statutaires, le présent article, en offrant une option aux sociétés, ne fait que leur rappeler non sans quelque superfluité ce qu'elles se trouvent de toute manière déjà en situation légale de pouvoir faire, librement. En revanche , pour ce qui touche aux restrictions conventionnelles, l'habilitation législative était nécessaire . A défaut de celle-ci, en effet, les statuts qui auraient prévu la suspension des conventions de vote en cause auraient méconnu la règle énoncée par l'alinéa 1 er de l'article 1134 du code civil, aux termes duquel « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

3. Quant à la quotité de capital ou de droits de vote détenue à laquelle se réfère chaque disposition

La troisième et dernière différence qu'il convient de relever entre l'article 16 du présent projet de loi et le présent article a trait à la quotité de capital ou de droits de vote, détenue par l'auteur d'une offre réussie sur la société concernée, prise en compte en vue de mettre en oeuvre la règle de suspension des restrictions de vote.

C'est à l'Autorité des marchés financiers, comme on l'a vu, qu'il reviendra de fixer cette quotité. Or la quotité retenue par l'AMF dans le cadre du présent article, logiquement, devrait être inférieure à celle qu'elle fixera dans le cadre de l'article 16 du présent projet de loi . A défaut, en effet, cette quotité n'aurait guère de sens juridique pour ce qui concerne les restrictions statutaires aux droits de vote , objet commun des dispositions du présent article et de l'article 16 (mais le présent article n'autorise pas l'AMF à fixer un seuil différent s'agissant des restrictions statutaires d'une part, des restrictions conventionnelles d'autres part).

En premier lieu, fixer un seuil supérieur, dans le cadre du présent article, au seuil retenu pour l'article 16, reviendrait, d'une manière absurde, à rendre obligatoire une règle plus contraignante (celle de l'article 16) que les dispositions dont on entend précisément que les sociétés puissent les suivre seulement si elles le souhaitent (celles du présent article). En second lieu, si une quotité identique était retenue dans le cadre de l'article 16 et dans celui du présent article, ce dernier donnerait la possibilité à une société d'inscrire dans ses statuts le principe d'une suspension, en cas d'offre réussie, que l'article 16, de toute façon, rendrait alors obligatoire.

Rien, cependant, n'empêche que cette dernière option soit finalement retenue par l'AMF. Le présent article, dès lors, deviendrait simplement redondant avec l'article 16 , en incitant les entreprises à rappeler dans leur statut une règle en tout état de cause impérative.

Pour conclure sur ce point, l'articulation du présent article avec l'article 16 du présent projet de loi, en résumé, est la suivante :

- d'une part, dans le cas où, à l'issue d'une offre, l'auteur de celle-ci parvient à détenir X % du capital ou des droits de vote, toute société, conformément à l'article 16, est tenue de suspendre, lors de la première assemblée générale suivant la clôture de l'offre, ses restrictions statutaires de vote (et non les éventuelles restrictions conventionnelles) ;

- d'autre part, sauf l'hypothèse où l'AMF retiendrait un seuil identique, dans le cas où, à l'issue d'une offre, l'auteur de celle-ci n'est pas parvenu à détenir X %, mais une fraction moindre, Y %, du capital ou des droits de vote, selon le présent article, seules les sociétés qui en ont décidé ainsi dans leurs statuts sont tenues de suspendre, lors de la première assemblée générale suivant la clôture de l'offre, les restrictions de vote statutaires ;

- enfin, dans le cas où, à l'issue d'une offre, l'auteur de celle-ci est parvenu à détenir la quotité fixée en capital ou en droits de vote, selon le présent article, seules les sociétés qui en ont décidé ainsi dans leurs statuts suspendent, lors de la première assemblée générale suivant la clôture de l'offre, les restrictions de vote conventionnelles (issues des conventions conclues après le 21 avril 2004) 142 ( * ) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article s'inspire des observations formulées par le groupe de travail animé par M. Jean-François Lepetit 143 ( * ) sur la nécessité de rendre effective la prise de contrôle des entreprises par les auteurs d'offres publiques d'acquisition réussies . De fait, en donnant aux entreprises qui le souhaitent la possibilité de suspendre les restrictions, statutaires comme conventionnelles, à l'exercice des droits de vote, dès qu'est atteint, par l'initiateur d'une offre, un seuil de détention du capital ou des droits de vote moins élevé que celui que prévoit l'article 16 du présent projet de loi, le présent article introduit un important élément de souplesse, de nature à éviter que les limitations de droits de vote ne contredisent la situation normale d'un actionnaire majoritaire .

Bien sûr, dans la mesure où, comme on l'a relevé ci-dessus, les entreprises françaises concernées ont en pratique d'ores et déjà inscrit, dans leurs statuts, une caducité des clauses de plafonnement des droits de vote lorsque l'initiateur d'une offre publique parvient à détenir 66,66 % du capital ou des droits de vote, l'impact de la mesure proposée sera d'autant plus grand que le seuil qu'il reviendra à l'Autorité des marchés financiers de retenir sera faible et, en tout cas, qu'il sera inférieur au chiffre de 66,66. Votre rapporteur général considère qu' un seuil approchant, peu ou prou, des 50,01 %, s'agissant d'une disposition optionnelle, serait opportun en vue de contribuer à assurer la meilleure compétitivité des entreprises françaises.

Par ailleurs, votre rapporteur général vous propose un amendement rédactionnel au présent article, en vue de clarifier le sens du futur article L. 233-38 du code de commerce. Il s'agit principalement de lever toute ambiguïté éventuelle sur la nature des « restrictions à l'exercice des droits de vote attachés à des actions de la société », que l'article mentionne concomitamment aux restrictions issues de conventions de vote conclues après le 21 avril 2004. La première catégorie de restriction ainsi visée doit être bien comprise comme fixée par les statuts de la société. La précision proposée est d'ailleurs conforme à la rédaction des autres articles du présent projet de loi 144 ( * ) .

Le même amendement, par cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. commentaire de l'article 15), précise que ces sont les « effets » des clauses statutaires, non ces clauses elles-mêmes, qui, le cas échéant, se trouvent suspendus.

Votre commission vous propose un autre amendement de coordination et de cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions », sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 18
Suspension sur une base volontaire des droits extraordinaires concernant les dirigeants sociaux en cas de réussite de l'offre

Commentaire : le présent article vise à permettre sur une base volontaire, pour les entreprises qui le souhaitent, que, dans la société cible, lors de la première assemblée générale suivant une offre réussie, si l'auteur de cette offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote, les droits extraordinaires concernant les dirigeants sociaux se trouvent automatiquement suspendus.

I. LE DROIT EXISTANT

Le paragraphe 4 de l'article 11 de la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition, introduit la notion de « droits extraordinaires des actionnaires concernant la nomination ou la révocation de membres de l'organe d'administration ou de direction ». La même disposition précise que les droits ainsi visés sont « prévus dans les statuts de la société ».

Du point de vue de la législation française, cette notion ne correspond pas à une catégorie juridique spécifique. Elle tend à recouvrir, en pratique, toute hypothèse de droit qui octroie, à l'actionnaire en cause, un pouvoir plus important, quant au choix et/ou à la révocation des dirigeants sociaux, que celui que lui confère par principe, au sein des assemblées de la société, sa participation au capital . Il peut s'agir, par exemple, d'un droit de consultation préalable reconnu à certains actionnaires avant toute nomination ou révocation de telle catégorie de dirigeant.

Au demeurant, il n'est pas avéré, d'après les indications fournies à votre rapporteur général par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, que de tels cas, en pratique, se rencontrent de manière très fréquente. Il convient en effet de remarquer que ces droits « extraordinaires » sont fortement encadrés, dans la mesure où ils doivent respecter les grands principes qui régissent l'organisation des entreprises , notamment le droit de tout associé de participer aux décisions collectives, la hiérarchie des organes sociaux, ou la détermination légale des pouvoirs de ces derniers. A ce titre, par exemple, la reconnaissance au profit de certains actionnaires d'un droit de veto sur les décisions de nomination ou de révocation des dirigeants n'est pas envisageable, car elle contreviendrait à la répartition des pouvoirs entre organes sociaux opérée par le législateur 145 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE POSSIBILITÉ DE PRÉVOIR LA SUSPENSION AUTOMATIQUE, EN CAS D'OFFRE RÉUSSIE, DES DROITS EXTRAORDINAIRES CONCERNANT LES DIRIGEANTS SOCIAUX

1. Principe et champ d'application

Le présent article propose d'introduire dans le code de commerce un article L. 233-39 146 ( * ) .

Ce nouveau texte, en synthèse, donne la possibilité aux sociétés qui le souhaitent de prévoir, dans leurs statuts, qu'à l'occasion de la première assemblée générale suivant une offre publique d'acquisition dont elles ont été la cible et qui a réussi, si l'auteur de l'offre vient à détenir plus d'une certaine fraction du capital ou des droits de vote, se trouvent automatiquement suspendus, le cas échéant, les droits extraordinaires, attachés à certains actionnaires, concernant les dirigeants sociaux .

Ces derniers font, dans la rédaction du présent article, l'objet d'une liste conforme à l'acception usuelle de la notion de « dirigeant social ». Ainsi, sont visées les cinq catégories suivantes :

- les administrateurs ;

- les membres du conseil de surveillance ;

- les membres du directoire ;

- les directeurs généraux ;

- les directeurs généraux délégués 147 ( * ) .

Par ailleurs, le champ d'application de la présente disposition est expressément limité aux sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé. La précision est d'ordre logique, du point de vue du droit national, et commandée par le texte de la directive 2004/25/CE précitée 148 ( * ) .

2. Une transposition des prescriptions communautaires

Le présent article vise à assurer, en ce qui concerne la loi, la transposition de l'un des objectifs fixés par le paragraphe 4 de l'article 11 de la directive 2004/25/CE précitée, tout en tenant compte du caractère optionnel de la mise en oeuvre de cet objectif 149 ( * ) .

Aux termes du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive, en effet, les Etats membres sont libres de ne pas imposer aux sociétés dont le siège social se trouve sur leur territoire l'application, notamment, de l'article 11 précité et, en particulier, l'application de la règle de suspension automatique des droits extraordinaires des actionnaires concernant la nomination ou la révocation des dirigeants sociaux, en cas d'offre réussie. Le paragraphe 2 de l'article 12, néanmoins, oblige les Etats qui optent ainsi pour la non mise en oeuvre de l'article 11 à donner aux sociétés le choix (réversible) de se conformer aux dispositions de ce dernier article notamment la règle de suspension des droits extraordinaires concernant les dirigeants sociaux. Cette décision, le cas échéant, doit être prise par l'assemblée générale des actionnaires, conformément au droit national.

Tel est précisément le dessein du présent article : le gouvernement ayant fait le choix de ne pas imposer aux sociétés françaises la règle communautaire de suspension, il s'agit de prévoir cependant la possibilité, pour les entreprises qui le souhaitent, d'inscrire cette règle dans leurs statuts 150 ( * ) . Ce faisant, toutefois, le présent article, en offrant une option aux sociétés, ne fait que leur rappeler non sans quelque superfluité ce qu'elles se trouvent de toute manière déjà en situation légale de pouvoir faire, librement.

B. CONDITIONS DE LA SUSPENSION DES DROITS EXTRAORDINAIRES CONCERNANT LES DIRIGEANTS SOCIAUX

Étant entendu que l'assemblée générale extraordinaire doit préalablement avoir décidé de modifier les statuts de la société en ce sens, la situation qui déclenchera la suspension des droits extraordinaires concernant ces dirigeants sociaux est définie par le texte proposé comme la circonstance où « l'auteur de l'offre, agissant seul ou de concert, détient à l'issue de celle-ci une fraction du capital ou des droits de vote supérieure à une quotité fixée par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ».

Cette définition s'appuie sur trois séries d'éléments 151 ( * ) :

- l'auteur de l'offre a pu agir seul ou de concert ;

- il peut être parvenu à détenir la fraction requise de la société cible en capital ou en droits de vote ;

- la fraction du capital ou des droits de vote ainsi détenue doit être supérieure à une quotité que fixera le règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF).

En ce qui concerne ce dernier point, la quotité que retiendra l'AMF , d'après les informations communiquées à votre rapporteur général, pourrait être comprise entre 50,01 % et 66,66 % c'est-à-dire entre la majorité simple et la majorité des deux tiers. Cette dernière correspond à la majorité requise, notamment, et sous réserve des exigences de quorum, pour l'adoption des résolutions d'assemblée générale extraordinaire, conformément au troisième alinéa de l'article L. 225-96 du code de commerce 152 ( * ) .

Sur le plan de la procédure décisionnelle, il convient de noter que la publication au Journal officiel de la quotité retenue par l'AMF devra être précédée d'une homologation par arrêté du ministre chargé de l'économie , conformément à l'article L. 621-6 du code monétaire et financier. Le ministre, au besoin, pourra par conséquent engager un dialogue constructif avec l'Autorité, juridiquement indépendante 153 ( * ) .

Il y a lieu de remarquer, d'autre part, que la quotité que l'AMF devra ainsi fixer dans le cadre du présent article ne revêt pas, à l'égard des seuils qu'elle devra fixer en ce qui concerne les articles 16 et 17 du présent projet de loi, le même caractère interdépendant que ces deux derniers seuils entre eux 154 ( * ) . En effet, si l'ensemble de ces trois articles, en organisant le régime des restrictions de vote et des droits extraordinaires concernant les dirigeants en cas d'offre publique réussie, participent d'une économie générale, la présente disposition, en traitant exclusivement des droits extraordinaires, couvre un champ d'application spécifique.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les dispositions du présent article s'inspirent des observations formulées par le groupe de travail animé par M. Jean-François Lepetit sur la nécessité de rendre effective la prise de contrôle des entreprises par les auteurs d'offres publiques d'acquisition réussies 155 ( * ) . De fait, en donnant aux entreprises qui le souhaitent la possibilité de suspendre les droits extraordinaires, fixés par les statuts, concernant la nomination et la révocation des dirigeants sociaux, dès qu'est atteint, par l'initiateur d'une offre, un certain seuil de détention du capital ou des droits de vote ou, plus exactement, en rappelant aux sociétés leur faculté à cet égard 156 ( * ) , le présent article introduit un instrument utile , complémentaire de l'article 17 du présent projet de loi. Il sera de nature à éviter que ces droits extraordinaires ne contredisent la situation normale d'un actionnaire majoritaire en l'empêchant de renouveler la direction de la société .

En ce qui concerne le seuil que devra fixer l'Autorité des marchés financiers , d'ailleurs, comme dans le cadre de l'article 17 du présent projet de loi, votre rapporteur général considère qu' une fraction de capital ou de droits de vote proche de 50,01 %, s'agissant d'une disposition optionnelle, serait opportune en vue de contribuer à assurer la meilleure compétitivité des entreprises françaises.

Votre commission vous propose un amendement de coordination et de cohérence avec certains articles précédents du présent projet de loi (cf. commentaire de l'article 10), tendant à préciser qu'une société cible cotée est une société dont « les instruments financiers », plutôt que « des actions », sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 19
Publicité par l'Autorité des marchés financiers des cas de suspension volontaire

Commentaire : le présent article prévoit que, dans le cas où une société a décidé, sur une base volontaire, la mise en place de mécanismes de suspension automatique en période d'offre ou à l'issue d'une offre réussie, elle en informe l'Autorité des marchés financiers, qui rend cette décision publique.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'ORGANISATION D'UN RÉGIME DE PUBLICITÉ OFFICIELLE DES SUSPENSIONS VOLONTAIRES

Le présent article propose d'introduire dans le code de commerce un article L. 233-40 157 ( * ) .

Ce nouveau texte, en synthèse, prévoit que, dans le cas où une société a décidé de mettre en oeuvre l'un des dispositifs ouverts par les articles 13 à 15 et 17 et 18 du présent projet de loi, elle informe de sa décision l'Autorité des marchés financiers (AMF). Il revient alors à cette Autorité de pourvoir à la publicité de la décision qui lui a été ainsi notifiée.

1. Champ d'application

Le champ d'application du présent article est déterminé par la référence de celui-ci aux articles L. 233-35 à L. 233-39 du code de commerce, que proposent les articles 13 à 15 et 17 et 18 du présent projet de loi. Le régime de publicité ainsi institué, dans le détail, concerne les trois séries d'hypothèses suivantes :

- la mise en place, dans les statuts de la société en cause, d'un principe d' inopposabilité, en période d'offre publique et à l'égard de l'auteur de cette offre, des restrictions conventionnelles au transfert d'actions de cette société 158 ( * ) ;

- la mise en place, dans les statuts de la société en cause, d'une suspension automatique, en période d'offre publique et en ce qui concerne les assemblées réunies aux fins d'adopter toute mesure susceptible de faire échouer cette offre, des restrictions conventionnelles ou statutaires à l'exercice des droits de vote attachés aux actions de cette société 159 ( * ) ;

- la mise en place, dans les statuts de la société en cause, d'une suspension automatique, à l'issue d'une offre publique dont elles ont été la cible et qui a réussi, des restrictions statutaires ou conventionnelles à l'exercice des droits de vote attachés aux actions de cette société 160 ( * ) , ou des droits extraordinaires , attachés à certains actionnaires, concernant la nomination ou la révocation des dirigeants sociaux 161 ( * ) .

Toutes les entreprises qui, l'ayant souhaité, auront procédé à l'inscription, dans leurs statuts, de clauses suspensives de ce type, seront tenues de porter ces clauses à la connaissance de l'AMF.

2. Procédure

La procédure de notification à l'Autorité des marchés financiers, en l'état de la rédaction du présent article, n'est pas précisée. Le texte, en effet, appréhendé littéralement, se borne énoncer que la société concernée « informe » l'AMF .

En revanche, s'agissant des conditions et des modalités selon lesquelles l'AMF pourvoit à la publicité de la décision qui lui a été notifiée par la société, le présent article renvoie expressément au règlement général de l'Autorité elle-même.

Dans son principe, ce renvoi est conforme au paragraphe II de l'article L. 621-7 du code monétaire et financier, qui assigne à l'AMF la mission de déterminer, dans son règlement général, les règles relatives aux offres publiques d'acquisition. Suivant la procédure fixée par l'article L. 621-6 du même code, la publication au Journal officiel des règles ainsi retenues par l'Autorité devra être précédée d'une homologation par arrêté du ministre chargé de l'économie .

B. UNE TRANSPOSITION DES PRESCRIPTIONS COMMUNAUTAIRES

Le présent article, en instituant une procédure de notification à l'AMF en vue de rendre publique les décisions des sociétés d'instaurer des clauses de suspension, vise à assurer la transposition de l'un des objectifs fixés, à titre subsidiaire, par le paragraphe 2 de l'article 12 de la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition.

Aux termes du paragraphe 1 de l'article 12 de cette directive, en effet, les Etats membres sont libres de ne pas imposer aux sociétés dont le siège social se trouve sur leur territoire l'application, notamment, de l'article 11 de la même directive, lequel fixe un objectif de neutralisation des restrictions , pendant une offre publique et/ou après la réussite de celle-ci, en ce qui concerne le transfert d'actions, l'exercice des droits de vote et les droits extraordinaires visant les dirigeants. Le paragraphe 2 de l'article 12, néanmoins, oblige les Etats qui optent ainsi pour la non mise en oeuvre de l'article 11 à donner aux sociétés le choix (réversible) de se conformer aux dispositions de ce dernier article, la décision devant en être prise par l'assemblée générale des actionnaires et conformément au droit national. C'est là précisément l'option retenue par le gouvernement (sauf en ce qui concerne l'inopposabilité des restrictions statutaires aux transferts de titres), et transposée par les articles 13 à 15 et 17 et 18 du présent projet de loi, chacun pour son champ d'application propre 162 ( * ) .

Or, dans un tel cas, le paragraphe 2, précité, de l'article 12 de la directive prévoit que la décision est « notifiée à l'autorité de contrôle [en matière d'offres publiques] de l'Etat membre sur le territoire duquel se trouve le siège social de la société ». Dans le cas de la France, cette autorité de contrôle est en pratique, aujourd'hui, l'AMF. Le présent article met donc fidèlement en oeuvre les prescriptions communautaires.

Celles-ci, notamment, tendent à permettre aux sociétés ayant procédé à la notification prévue, dans le cas où elles seraient à l'origine d'une offre publique d'acquisition, d'échapper à la règle de réciprocité fixée par le paragraphe 3 de l'article 12, précité, de la directive, que pourrait leur opposer les sociétés cibles 163 ( * ) . En effet, dès lors qu'une publicité officielle a été donnée aux clauses de suspension mises en place dans les statuts de l'auteur de l'offre, la cible ne peut plus valablement invoquer la réciprocité en vue de lever ses propres règles statutaires équivalentes .

Il convient enfin de noter que le paragraphe 2, précité, de l'article 12 de la directive , outre la procédure dont la transposition est l'objet du présent article, prévoit également une notification des décisions volontaires de suspension « à toutes les autorités de contrôle des États membres dans lesquels ses titres sont admis à la négociation sur des marchés réglementés ou dans lesquels une demande à cet effet a été introduite ». Suivant les informations communiquées à votre rapporteur général, c'est au niveau réglementaire que cet aspect sera transposé en droit interne et, plus précisément, par le règlement général de l'AMF. En pratique, en vue d'épargner aux entreprises un surcroît de charge de gestion administrative, l'AMF devrait assurer elle-même cette notification auprès de ses homologues européens .

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Dans son principe, le régime de publicité officielle des clauses suspensives volontairement introduites dans leurs statuts par les sociétés, que propose le présent article satisfaisant aux prescriptions communautaires, est intrinsèquement de nature à assurer l'information nécessaire au bon fonctionnement des opérations financières .

Sur le plan des modalités, bien que l'on institue, de fait, une formalité nouvelle la notification à l'Autorité des marchés financiers , cette formalité, compte tenu de son caractère de simple déclaration a posteriori , n'entraînera pas, pour les entreprises concernées, d'alourdissement significatif de leurs contraintes d'ordre administratif . Votre rapporteur général se félicite d'ailleurs, à cet égard, des orientations, signalées ci-dessus, concernant la transposition de l'objectif de notification aux autres autorités de contrôle européennes. Au demeurant, il reviendra à l'AMF, sous le regard de l'autorité d'homologation de son règlement général 164 ( * ) , de veiller à instaurer les règles procédurales les plus simples possibles.

Votre rapporteur général vous propose cependant un amendement rédactionnel au présent article, en vue de clarifier le sens du futur article L. 233-40 du code de commerce. Il s'agit d' attribuer clairement à l'AMF la compétence d'organiser, outre la procédure suivant laquelle elle rend publiques les décisions de sociétés de mettre en place des mécanismes de suspension, la procédure suivant laquelle ces décisions lui sont préalablement notifiées par les sociétés en cause . En l'état de la rédaction du texte, en effet, et malgré les intentions gouvernementales à cet égard, telles qu'elles ont été confirmées à votre rapporteur général, seule la détermination des conditions et modalités de la première de ces procédures est sans ambiguïté confiée à l'AMF. Il n'y a cependant pas de raison de mettre à part, en termes de compétence réglementaire d'application, la procédure de notification.

Votre rapporteur général vous propose également un amendement tendant à permettre que les sociétés qui ont fait le choix d'appliquer les dispositions de l'article 11 de la directive puissent se prévaloir de la réciprocité si le ou les offrant(s) n'ont pas prévu de telles suspensions ou inopposabilités des clauses statutaires et conventionnelles. Il considère en effet que le principe de réciprocité revêt un caractère fondamental, en ce qu'il permet d'établir une égalité des conditions, et constitue la contrepartie et une incitation nécessaires à la « vertu » des entreprises, que ce soit au titre des dispositions de l'article 9 de la directive ou de celles de l'article 11.

Cette réciprocité ne devrait toutefois s'exercer que pour les options exercées volontairement par les sociétés, sans préjudice des suspensions d'ordre public issues de la doctrine de l'Autorité des marchés financiers, et dont la consécration législative est prévue par les articles 13 et 16 du présent projet de loi.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 20
Dispositions de coordination

Commentaire : le présent article procède à diverses dispositions de coordination.

Les dispositions de coordination, rendues nécessaires par le présent projet de loi, sont organisées en trois paragraphes par le présent article.

Le paragraphe I vise à l' abrogation de l'article L. 225-129-3 du code de commerce . En effet, les dispositions de cet article se trouvent reprises et modifiées par le texte proposé par l'article 10 du présent projet de loi pour l'article L. 233-32 du même code 165 ( * ) .

Le paragraphe II , disposition "balai", prévoit logiquement que, dans tous les textes législatifs et réglementaires, la référence à l'article L. 225-129-3 du code de commerce article abrogé est remplacée par la référence à l'article L. 233-32 du même code.

Le paragraphe III , enfin, procède à une nouvelle rédaction de l'article L. 433-2 du code monétaire et financier .

Cet article, dans sa rédaction en vigueur, dispose en effet que « la suspension, en période d'offre publique, des délégations consenties par l'assemblée générale au conseil d'administration pour réaliser des augmentations de capital est régie par l'article L. 225-129-3 du code de commerce », et il reproduit ce dernier.

Le paragraphe III du présent article tient compte, d'une part, de l'abrogation précitée de l'article L. 225-129-3 du code de commerce et, d'autre part, des articles L. 233-32 à L. 233-40 introduits dans ce code par les articles 10 à 15 et 17 à 19 du présent projet de loi 166 ( * ) . Il propose ainsi, pour l'article L. 433-2 du code monétaire et financier, cette nouvelle rédaction : « En période d'offre publique, les mesures dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre et les restrictions au transfert d'actions et au droit de vote sont régies par les articles L. 233-32 à L. 233-40 du code de commerce. »

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 21
Entrée en vigueur de la loi et dispositions transitoires

Commentaire : le présent article fixe au 20 mai 2006 l'entrée en vigueur de la loi et prévoit que, jusqu'à cette date, par exception au droit en vigueur, les éventuelles délégations d'assemblée générale en vue d'une augmentation de capital ne sont pas suspendues en cours d'offre publique d'acquisition.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DÉLÉGATIONS DE POUVOIR DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE EXTRAORDINAIRE EN VUE DE L'ÉMISSION DE TITRES

Le premier alinéa de l'article L. 225-129-1 du code de commerce donne une compétence exclusive à l'assemblée générale extraordinaire pour décider, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, une augmentation du capital de la société. La même disposition ouvre cependant à l'assemblée générale extraordinaire, lorsqu'elle décide l'augmentation de capital, la possibilité de déléguer au conseil d'administration ou au directoire le pouvoir de fixer les modalités de l'émission des titres correspondants.

L'article L. 225-129-2 du même code (auquel renvoie expressément le premier alinéa, précité, de l'article L. 225-129-1) encadre cette procédure.

Ainsi, en vertu du premier alinéa de ce texte, l'assemblée générale extraordinaire doit fixer :

- d'une part, la durée pendant la laquelle la délégation peut être utilisée par le conseil d'administration ou le directoire, dans la limite de vingt-six mois au maximum ;

- d'autre part, le plafond global de l'augmentation de capital décidée 167 ( * ) .

Le deuxième alinéa de l'article L. 225-129-2 précise que la délégation de l'assemblée générale extraordinaire au conseil d'administration ou au directoire, en vue de fixer les modalités de l'émission de titres, « prive d'effet toute délégation antérieure ayant le même objet ». Le quatrième alinéa du même article énonce que, « dans la limite de la délégation donnée par l'assemblée générale, le conseil d'administration ou le directoire dispose des pouvoirs nécessaires pour fixer les conditions d'émission, constater la réalisation des augmentations de capital qui en résultent et procéder à la modification corrélative des statuts ».

En outre, l'article L. 225-129-4 du code de commerce, en ce qui concerne les sociétés anonymes dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, ouvre la possibilité de subdélégations . Le texte distingue, à cet effet, selon que la délégation a été accordée au conseil d'administration ou au directoire. Dans le premier cas, l'article énonce en son deuxième alinéa (a) que « le conseil d'administration peut, dans les limites qu'il aura préalablement fixées, déléguer au directeur général ou, en accord avec ce dernier, à un ou plusieurs directeurs généraux délégués le pouvoir de décider la réalisation de l'émission, ainsi que celui d'y surseoir ». Dans le second cas, le troisième alinéa du même article (b) prévoit que « le directoire peut déléguer à son président ou, en accord avec celui-ci, à l'un de ses membres le pouvoir de décider la réalisation de l'émission, ainsi que celui d'y surseoir ». En tout état de cause, le quatrième et dernier alinéa de cet article impose que « les personnes désignées rendent compte au conseil d'administration ou au directoire de l'utilisation faite de ce pouvoir dans les conditions prévues par ces derniers ».

B. LA SUSPENSION OBLIGATOIRE EN PÉRIODE D'OFFRE PUBLIQUE D'ACQUISITION DES DÉLÉGATIONS EN VUE DE L'ÉMISSION DE TITRES

L'article L. 225-129-3 du code de commerce dispose qu'en principe « toute délégation de l'assemblée générale est suspendue en période d'offre publique d'achat ou d'échange sur les titres de la société ». L'article réserve cependant le cas où la délégation « s'inscrit dans le cours normal de l'activité de la société et [où] sa mise en oeuvre n'est pas susceptible de faire échouer l'offre ».

Introduite par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales, cette règle correspond à l'objectif fixé par le paragraphe 2 de l'article 9 de la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition 168 ( * ) .

Il convient de remarquer que, dans le cas où une subdélégation aurait été décidée, sur le fondement de l'article L. 225-129-4, précité, du code de commerce, par le conseil d'administration ou par le directoire d'une société anonyme dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, la suspension de la délégation d'assemblée générale, base nécessaire de la subdélégation, implique ipso facto la suspension de cette dernière .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA FIXATION DE LA DATE D'ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA LOI AU 20 MAI 2006

La première phrase du présent article prévoit que la loi relative aux offres publiques d'acquisition entrera en vigueur le 20 mai 2006 . Cette date correspond au délai limite de transposition de la directive précitée 2004/25/CE, que fixe le paragraphe 1 de son article 21.

Par conséquent, notamment, à cette date, en application du paragraphe I de l'article 20 du présent projet de loi, l'article L. 225-129-3 , précité, du code de commerce sera abrogé. La substance de cette règle de suspension des délégations d'assemblée générale en période d'offre publique sera alors reprise , conformément à l'article 10 du présent projet de loi, dans le nouvel article L. 233-32 du même code : ce texte impose aux organes de direction ou d'administration des sociétés faisant l'objet d'une offre publique d'obtenir, pendant la période de l'offre, l'approbation ou la confirmation préalable de l'assemblée générale extraordinaire en vue de mettre en oeuvre des mesures susceptibles de faire échouer cette offre 169 ( * ) .

B. L'INSTAURATION D'UNE PÉRIODE TRANSITOIRE DE NEUTRALISATION DE LA RÈGLE DE SUSPENSION EN PÉRIODE D'OFFRE PUBLIQUE D'ACQUISITION DES DÉLÉGATIONS EN VUE DE L'ÉMISSION DE TITRES

La seconde phrase du présent article propose que, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi par exception au principe posé par l'article L. 225-129-3 , précité, encore en vigueur les éventuelles délégations d'assemblée générale en vue d'une augmentation de capital ne soient pas suspendues en cours d'offre publique d'acquisition . En d'autres termes, il s'agit d'organiser une mesure temporaire de « suspension des suspensions » des délégations d'assemblée générale.

De la sorte, le présent article instaure, jusqu'au 20 mai 2006, une période transitoire qui, en pratique , conformément aux règles régissant l'entrée en vigueur des lois 170 ( * ) , commencera le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel .

Il s'agit de tenir compte que le droit en vigueur l'article L. 225-129-3 du code de commerce ne permet pas aux entreprises de bénéficier de la clause de réciprocité introduite , conformément à l'objectif de l'article 12 de la directive 2004/25/CE précitée, par l'article 11 du présent projet de loi (avec le futur article L. 233-33 du code de commerce). On rappelle que la clause de réciprocité, en effet, dispense une société cible d'appliquer le principe de l'approbation préalable, en période d'offre publique, des mesures de défense par l'assemblée générale extraordinaire, lorsque cette société fait l'objet d'une offre initiée par une société qui n'applique pas ledit principe 171 ( * ) . Dans l'attente de l'entrée en vigueur de ces dispositions en même temps que les dispositions équivalentes à l'actuel article L. 225-129-3 172 ( * ) , les entreprises françaises ne seront pas tenues au respect de ce dernier, c'est-à-dire de suspendre, en période d'offre, les délégations d'assemblée générale aux fins d'augmenter le capital.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général approuve, dans son principe , l'organisation, par le présent article, d'un régime transitoire de neutralisation de la règle de suspension, en période d'offre publique d'acquisition, des délégations d'assemblée générale en vue de l'émission de titres. Il s'agit d' une mesure raisonnable, qui tend à dispenser les entreprises françaises, pour une brève période transitoire, de devoir appliquer un régime moins protecteur, pour elles, que celui que met en place le présent projet de loi en suivant fidèlement les prescriptions communautaires.

Cependant, votre rapporteur général vous propose un amendement visant à avancer la date d'entrée en vigueur de la loi, au 15 mars 2006 . Cette date paraît en effet préférable à celle du 20 mai 2006 proposée par le présent article, en vue de permettre à l'ensemble des entreprises, dont les assemblées générales extraordinaires , annuelles, se tiennent en pratique entre les mois d'avril et de juin, de proposer dès 2006 les résolutions qui résulteront de l'application de la loi . Il convient au reste de noter que la date du 20 mai 2006 qui, comme on l'a signalé, correspond au délai limite fixé par la directive 2004/25/CE pour sa transposition ne revêt aucun caractère impératif ex ante .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

* 60 Titre III, relatif aux offres publiques d'acquisition (articles 231-1 à 238-10), du Livre II relatif aux émetteurs et à l'information financière.

* 61 Articles L. 433-1 et L. 433-2 relatifs aux offres publiques d'achat ou d'échange, article L. 433-3 relatif à l'obligation de déposer un projet d'offre publique, article L. 433-4 relatif aux offres publiques de retrait et au retrait obligatoire.

* 62 Rapport du groupe de travail sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie le 27 juin 2005.

* 63 Cf. infra le commentaire de l'article 11 du présent projet de loi.

* 64 Articles L. 225-129 ( « L'assemblée générale extraordinaire est seule compétente pour décider, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, une augmentation de capital immédiate ou à terme. Elle peut déléguer cette compétence au conseil d'administration ou au directoire (...) » ), L. 225-129-1 et L. 225-129-2 du code de commerce.

* 65 Article L. 225-204 du code de commerce : « la réduction du capital est autorisée ou décidée par l'assemblée générale extraordinaire, qui peut déléguer au conseil d'administration ou au directoire, selon le cas, tous pouvoirs pour la réaliser (...) » .

* 66 Article L. 225-209 du code de commerce : « l'assemblée générale d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, à acheter un nombre d'actions représentant jusqu'à 10 % du capital de la société . L'assemblée générale définit les finalités et les modalités de l'opération, ainsi que son plafond » .

* 67 « La société visée et les personnes agissant de concert avec elle ne peuvent intervenir directement ou indirectement sur le marché des titres de capital ou donnant accès au capital de la société .

« Lorsque l'offre est réglée intégralement en numéraire, la société visée peut poursuivre l'exécution d'un programme de rachat d'actions dès lors que la résolution de l'assemblée générale qui a autorisé le programme l'a expressément prévu » .

* 68 « S'ils décident d'accomplir des actes autres que de gestion courante, à l'exception de ceux expressément autorisés par l'assemblée générale des actionnaires réunie pendant l'offre, les dirigeants de la société visée en avisent l'AMF afin de lui permettre de veiller à l'information du public et de faire connaître, s'il y a lieu, son appréciation » .

* 69 C'est-à-dire le conseil d'administration, dans le cas des sociétés « monistes », ou le conseil de surveillance ou le directoire.

* 70 En vertu des articles L. 225-47, L. 225-51-1, L. 225-53 ou L. 225-59 du code de commerce.

* 71 Cf. le cas des « bons Plavix » que les dirigeants d'Aventis avaient proposé à titre de mesure de défense, dans le cadre de l'offre de Sanofi en avril 2004.

* 72 Qui ne peuvent être envisagés si l'offre est en titres et non en numéraire, et sont plafonnés à 10 % du capital social de la société.

* 73 Il dispose que l'organe d'administration ou de direction de la cible « établit et rend public un document contenant son avis motivé sur l'offre, notamment son avis quant aux répercussions de la mise en oeuvre de l'offre sur l'ensemble des intérêts de la société et spécialement l'emploi ainsi que quant aux plans stratégiques de l'offrant pour la société visée et leurs répercussions probables sur l'emploi et les sites d'activité de la société selon la description figurant dans le document d'offre ».

* 74 L'article 129 du décret du 23 mars 1967 prévoit ainsi que « les demandes d'inscription de projets de résolution à l'ordre du jour doivent être envoyés vingt-cinq jours au moins avant la date de l'assemblée réunie sur première convocation » .

* 75 Qui, rappelons-le, concerne les OPA de titres d'une société relevant du droit d'un Etat membre, « lorsque tout ou partie de ces titres sont admis à la négociation sur un marché réglementé dans un ou plusieurs Etats membres » .

* 76 Rapport du groupe de travail sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie le 27 juin 2005.

* 77 Il dispose ainsi que « compte tenu des disparités qui existent entre les mécanismes et les structures du droit des sociétés dans les différents Etats membres, ceux-ci devraient être autorisés à ne pas exiger des sociétés établies sur leur territoire qu'elles appliquent les dispositions de la présente directive qui limitent les pouvoirs de l'organe d'administration ou de direction de la société visée au cours de la période d'acceptation de l'offre ainsi que celles qui rendent inopérantes les restrictions prévues dans les statuts de la société ou dans des accords particuliers. En pareil cas, les États membres devraient, au moins, donner aux sociétés établies sur leur territoire le choix d'appliquer ces dispositions, ce choix devant être réversible. Sans préjudice des accords internationaux auxquels la Communauté européenne est partie, les Etats membres devraient être autorisés à ne pas exiger des sociétés qui appliquent ces dispositions conformément aux arrangements facultatifs qu'elles les appliquent lorsqu'elles font l'objet d'offres lancées par des sociétés qui n'appliquent pas lesdites dispositions du fait de l'utilisation de ces arrangements facultatifs » .

* 78 Dont le premier paragraphe dispose : « Les Etats membres veillent à ce que la décision de faire une offre soit rendue publique sans délai et à ce que l'autorité de contrôle soit informée de cette offre. Ils peuvent exiger que l'autorité de contrôle soit informée avant que cette décision soit rendue publique » .

* 79 Cf. « Rapport du groupe de haut niveau d'experts en droit des sociétés sur des questions liées aux offres publiques d'acquisition », remis le 10 janvier 2002.

* 80 Cf. infra , position de votre commission des finances.

* 81 Aux termes du II de l'article L. 233-16, le contrôle exclusif par une société résulte :

« 1° Soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une autre entreprise ;

« 2° Soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise. La société consolidante est présumée avoir effectué cette désignation lorsqu'elle a disposé au cours de cette période, directement ou indirectement, d'une fraction supérieure à 40 % des droits de vote, et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détenait, directement ou indirectement, une fraction supérieure à la sienne ;

« 3° Soit du droit d'exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d'un contrat ou de clauses statutaires, lorsque le droit applicable le permet ».

* 82 Le III de l'article L. 233-16 du code de commerce précise que le contrôle conjoint « est le partage du contrôle d'une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d'associés ou d'actionnaires, de sorte que les décisions résultent de leur accord ».

* 83 Article L. 233-10 du code de commerce :

« I. - Sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue d'exercer les droits de vote, pour mettre en oeuvre une politique vis-à-vis de la société.

« II. - Un tel accord est présumé exister :

« 1° Entre une société, le président de son conseil d'administration et ses directeurs généraux ou les membres de son directoire ou ses gérants ;

« 2° Entre une société et les sociétés qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-3 ;

« 3° Entre des sociétés contrôlées par la même ou les mêmes personnes ;

« 4° Entre les associés d'une société par actions simplifiée à l'égard des sociétés que celle-ci contrôle.

« III. - Les personnes agissant de concert sont tenues solidairement aux obligations qui leur sont faites par les lois et règlements ».

* 84 Cf. supra le commentaire de l'article 4 du présent projet de loi.

* 85 La formulation communautaire pourrait en effet induire qu'une mesure de défense ne pourrait être autorisée par l'assemblée générale qu'antérieurement à la période de dix-huit mois précédant la publication de l'offre, soit une interprétation inverse de celle figurant dans le présent projet de loi. La version anglaise de la directive, qui dispose « no earlier than 18 months before the bid was made public » vient cependant confirmer cette appréciation d'une période maximale de dix-huit mois.

Le principe de l'approbation dans les dix-huit mois précédant la publication de l'offre permet également de mettre en place un délai « maîtrisé » plutôt qu'un délai dont seul le point d'arrivée serait connu, et qui rendrait valides des autorisations remontant à plusieurs années, alors même que la situation de la société aurait changé.

* 86 « En ce qui concerne toutes les mesures couvertes par le présent accord, chaque Membre accordera immédiatement et sans condition aux services et fournisseurs de services de tout autre Membre un traitement non moins favorable que celui qu'il accorde aux services similaires et fournisseurs de services similaires de tout autre pays.

« Un Membre pourra maintenir une mesure incompatible avec le paragraphe 1 pour autant que celle-ci figure à l'Annexe sur les exemptions des obligations énoncé es à l'article II et satisfasse aux conditions qui sont indiquées dans ladite annexe.

« Les dispositions du présent accord ne seront pas interprétées comme empêchant un Membre de conférer ou d'accorder des avantages à des pays limitrophes pour faciliter les échanges, limités aux zones frontières contiguës, de services qui sont produits et consommés localement » .

* 87 Cf. supra le commentaire de l'article 10 du présent projet de loi.

* 88 Le premier paragraphe de l'article 7 dispose que « Les Etats membres prévoient que la période d'acceptation de l'offre n e peut être ni inférieure à deux semaines ni supérieure à dix semaines à compter de la date de publication du document d'offre . Sous réserve du respect du principe général prévu à l'article 3, paragraphe 1, point f), les États membres peuvent prévoir que la période de dix semaines pourra être prolongée, à condition que l'offrant notifie au moins deux semaines à l'avance son intention de clôturer l'offre » .

* 89 Article L. 227-13 du code de commerce : « les statuts de la société peuvent prévoir l'inaliénabilité des actions pour une durée n'excédant pas dix ans » .

* 90 Premier alinéa de l'article L. 229-11 du code de commerce :

« Les statuts d'une société européenne ne faisant pas appel public à l'épargne peuvent soumettre tout transfert d'actions à des restrictions à la libre négociabilité sans que ces restrictions ne puissent avoir pour effet de rendre ces actions inaliénables pour une durée excédant dix ans » .

* 91 Utilisées notamment par des sociétés telles que Danone, Alcatel ou Total.

* 92 « Dans une société dont les titres de capital ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé, la cession de titres de capital ou de valeurs mobilières donnant accès au capital, à quelque titre que ce soit, peut être soumise à l'agrément de la société par une clause des statuts . Cette clause est écartée en cas de succession, de liquidation du régime matrimonial ou de cession, soit à un conjoint, soit à un ascendant ou à un descendant.

« Une clause d'agrément ne peut être stipulée que si les titres sont nominatifs en vertu de la loi ou des statuts.

« Lorsque les statuts d'une société ne faisant pas publiquement appel à l'épargne réservent des actions aux salariés de la société, il peut être stipulé une clause d'agrément interdite par les dispositions du premier alinéa ci-dessus, dès lors que cette clause a pour objet d'éviter que lesdites actions ne soient dévolues ou cédées à des personnes n'ayant pas la qualité de salarié de la société.

« Toute cession effectuée en violation d'une clause d'agrément figurant dans les statuts est nulle » .

* 93 En effet l'existence d'une clause d'agrément tend à dénaturer le caractère de la société anonyme, qui devient une société fermée empreinte d' intuitu personae .

* 94 Article 231-6 : « Sauf quand elle résulte d'une obligation législative, aucune clause d'agrément statutaire d'une société visée ne peut être opposée à l'initiateur d'une offre publique pour les titres qui lui seraient apportés dans le cadre de son offre » .

* 95 Ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales et extension à l'outre-mer de dispositions ayant modifié la législation commerciale.

* 96 « Toute clause d'une convention prévoyant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions admises aux négociations sur un marché réglementé et portant sur au moins 0,5 % du capital ou des droits de vote de la société qui a émis ces actions doit être transmise dans un délai de cinq jours de bourse à compter de la signature de la convention ou de l'avenant introduisant la clause concernée, à la société et à l'Autorité des marchés financiers. A défaut de transmission, les effets de cette clause sont suspendus , et les parties déliées de leurs engagements, en période d'offre publique.

« La société et l'Autorité des marchés financiers doivent également être informées de la date à laquelle la clause prend fin ».

* 97 « Toute clause d'une convention prévoyant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions admises aux négociations sur un marché réglementé et qui a été transmise à l'AMF, est présentée dans les notes d'information .

« Dès le dépôt du projet d'offre publique, toute autre clause d'accord conclu par les personnes concernées, ou leurs actionnaires, susceptible d'avoir une incidence sur l'appréciation de l'offre publique ou son issue , sous réserve de l'appréciation de sa validité par les tribunaux, doit être portée à la connaissance des personnes concernées , de l'AMF et du public. Si, à raison notamment de la date de la conclusion de l'accord, la clause n'a pu être mentionnée dans la ou les notes d'information, les signataires s'assurent dès sa conclusion de la publicité effective de la teneur de ladite clause par voie de communiqué » .

* 98 La clause de sortie conjointe permet aux actionnaires minoritaires de se retirer de la société lorsque l'actionnaire majoritaire cède ses propres actions, les titres des minoritaires pouvant être acquis par l'acquéreur des titres cédés par le majoritaire.

* 99 Un actionnaire s'engage, par cette clause, à faire en sorte qu'un autre actionnaire puisse souscrire, au prorata de sa participation, aux futures augmentations de capital.

* 100 Le premier paragraphe de l'article 7 dispose que « Les États membres prévoient que la période d'acceptation de l'offre n e peut être ni inférieure à deux semaines ni supérieure à dix semaines à compter de la date de publication du document d'offre . Sous réserve du respect du principe général prévu à l'article 3, paragraphe 1, point f), les États membres peuvent prévoir que la période de dix semaines pourra être prolongée, à condition que l'offrant notifie au moins deux semaines à l'avance son intention de clôturer l'offre ».

* 101 Prévue par le paragraphe 2 de l'article 11.

* 102 Prévue par le dix-neuvième considérant de la directive.

* 103 Cf. articles L. 233-11 du code de commerce et 231-5 du règlement général de l'AMF.

* 104 Par actions « de jouissance » sont désignées, selon le deuxième alinéa de l'article L. 225-198 du code de commerce, les actions intégralement amorties (la société ayant remboursé aux actionnaires la totalité du montant nominal des actions en cause, à titre d'avance sur le produit de l'éventuelle liquidation future de la société ; cette opération, en pratique, est très rare).

* 105 Fondamentalement, davantage qu'au principe de proportionnalité énoncé par l'article L. 225-122 du code de commerce, la suppression du droit de vote déroge au principe, posé par l'article 1844 du code civil (et applicable à toute forme de société en vertu de l'article 1834 du même code), selon lequel « tout associé a le droit de participer aux décisions collectives » .

* 106 Les actions « de préférence » ont été instituées par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales, en réponse à une attente de la pratique et, en particulier, des investisseurs en capital-risque. Aux termes de l'article L. 228-11 précité, ces actions peuvent être créées lors de la constitution de la société ou au cours de son existence, avec ou sans droit de vote, assorties de droits particuliers de toute nature, à titre temporaire ou permanent.

Ce nouveau type d'actions remplace les différents régimes de titres privilégiés que les sociétés par actions pouvaient jusque là offrir à leurs actionnaires, notamment le régime des actions à dividende prioritaire sans droit de vote, créé par la loi n° 78-741 du 13 juillet 1978. Les anciens titres privilégiés sont de fait appelés à disparaître ; dans cette attente, ils se trouvent actuellement régis par les articles L. 228-29-8 et suivants du code de commerce, issus de l'ordonnance n° 2004-604 précitée. En ce qui concerne plus particulièrement les actions à dividende prioritaire sans droit de vote, depuis le 27 juin 2004, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2004-604, et conformément à l'article L. 228-29-8 du code de commerce, il ne peut plus être émis de telles actions, sauf émission en application de décisions d'assemblées générales antérieures.

* 107 Les actions « libérées » sont les actions dont la valeur nominale a été intégralement versée à la société émettrice.

* 108 Le troisième alinéa de cet article L. 225-123 précise en outre que le droit de vote double peut être réservé aux actionnaires de nationalité française ou ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen. Le premier alinéa de l'article L. 225-124 du code de commerce, par ailleurs, dispose que toute action convertie au porteur ou transférée en propriété perd le droit de vote double qui a pu lui être attribué en application de l'article L. 225-123 ; il réserve néanmoins les cas de transferts par suite de succession, de liquidation de communauté de biens entre époux, et de donation entre vifs au profit d'un conjoint ou d'un parent au degré successible, qui ne font pas perdre le droit acquis, ni n'interrompent le délai de deux ans d'inscription en principe nécessaire pour le doublement des voix.

* 109 En ce qui concerne les restrictions conventionnelles, cf. infra le commentaire de l'article 17 du présent projet de loi.

* 110 On rappelle qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 225-96 du code de commerce, l'assemblée générale extraordinaire est seule habilitée à modifier les statuts.

* 111 Cf. ci-dessus. L'article L. 225-125 vise expressément, en fait, les actions à dividende prioritaire sans droit de vote, dont on a déjà signalé que la réforme introduite par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 les avait vouées à l'extinction et que, depuis le 27 juin 2004, conformément à l'article L. 228-29-8 du code de commerce, il ne peut plus en être émis, sauf émission en application de décisions d'assemblées générales antérieures.

* 112 Pour mémoire, l'Autorité des marchés financiers, créée par la loi n° 2003-706 de sécurité financière du 1 er août 20 03, est issue de la fusion de la Commission des opérations de bourse, du Conseil des marchés financiers et du Conseil de discipline de la gestion financière.

* 113 Cf. rapport annuel de la Commission des opérations de bourse pour l'année 1993, p. 50-51.

* 114 Rapport au Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du groupe de travail sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, 27 juin 2005, p. 11.

* 115 La même règle de majorité qualifiée aux deux tiers des voix s'applique aux assemblées spéciales, par renvoi du dernier alinéa de l'article L. 225-99 du code de commerce au troisième alinéa, précité, de l'article L. 225-96 du même code (les assemblées « spéciales », suivant la définition qu'en donne le premier alinéa de l'article L. 225-99 précité, réunissent les titulaires d'actions d'une catégorie déterminée). Pour mémoire, les règles de quorum sont fixées, en ce qui concerne les assemblées générales extraordinaires, par le deuxième alinéa de l'article L. 225-96 et, pour les assemblées spéciales, par le deuxième alinéa de l'article L. 225-99.

* 116 Sur ces aspects de la directive 2004/25/CE, cf. ci-dessus le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi.

* 117 Il convient de noter qu'on retrouve cette définition du fait déclencheur dans les textes proposés par les articles 17 et 18 du présent projet de loi pour, respectivement, les articles L. 233-38 et L. 233-39 du code de commerce.

* 118 Le paragraphe III de cet article L. 233-10 décrit l'effet essentiel d'une action de concert en énonçant que « les personnes agissant de concert sont tenues solidairement aux obligations qui leur sont faites par les lois et règlements ».

* 119 Cf. ci-dessus (I).

* 120 On rappelle que l'Autorité des marchés financiers est qualifiée d' « autorité publique indépendante » , et dotée de la personnalité morale, par l'article L. 621-1 du code monétaire et financier.

* 121 Cf. ci-dessus (I, in fine ).

* 122 Cette directive entend expressément la notion de marché « réglementé » au sens de la directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 du conseil, relative aux services d'investissement dans le domaine des valeurs mobilières.

* 123 Depuis février 2005, l'Eurolist d'Euronext Paris regroupe toutes les valeurs, françaises et étrangères, jusque là cotées sur le premier marché (qui accueillait les sociétés les plus importantes par leur taille et par la diffusion de leurs titres dans le public), le second marché (qui, créé en 1983, était destiné aux entreprises de dimension plus modeste et leur donnait accès au marché financier) et le nouveau marché (lequel, créé en 1996, concernait de jeunes sociétés à fort potentiel de croissance, qui souhaitaient financer un développement dynamique).

Au sein du marché réglementé unique que constitue de la sorte Eurolist, les sociétés cotées sont classées par ordre alphabétique, mais elles font également l'objet d'une répartition en trois compartiments, distingués suivant un critère de capitalisation : le compartiment A regroupe les grandes valeurs (supérieures à 1 milliard d'euros) ; le compartiment B regroupe les valeurs moyennes (entre 150 millions et 1 milliard d'euros) ; le compartiment C regroupe les petites valeurs ( capitalisation boursière inférieure à 150 millions d'euros).

On notera que le lancement par Euronext, le 17 mai dernier, du marché Alternext, qui vise les petites et moyennes entreprises, a donné lieu à la création d'une nouvelle catégorie de marchés, le « système multilatéral de négociation organisé », qui n'est pas un marché réglementé au sens juridique, mais un marché « régulé » : ses caractéristiques (approbation des règles du système par l'AMF, mécanisme de garantie des cours, applicabilité de la législation relative aux abus de marché) le placent à mi-chemin du marché réglementé et du marché libre.

* 124 Sur ces limitations conventionnelles à l'exercice des droits de vote, cf. ci-dessous le commentaire de l'article 17 du présent projet de loi.

* 125 Cf. rapport précité, p. 11-12.

* 126 Pour une présentation d'ensemble du principe et de ses exceptions, cf. ci-dessus le commentaire de l'article 16 du présent projet de loi.

* 127 On rappelle qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 225-96 du code de commerce, l'assemblée générale extraordinaire est seule habilitée à modifier les statuts.

* 128 L'article L. 225-125 vise expressément, en fait, les actions à dividende prioritaire sans droit de vote. Ce type d'action, créé par la loi n° 78-741 du 13 juillet 1978, a été voué à l'extinction par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales. Cette ordonnance, en effet, répondant à une attente de la pratique et, en particulier, des investisseurs en capital-risque, a remplacé par les actions « de préférence » (régies par les articles l'article L. 228-11 et suivants du code de commerce) l'ensemble des titres privilégiés que les sociétés par actions pouvaient jusque là offrir à leurs actionnaires. Aussi, depuis le 27 juin 2004, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance, et conformément à l'article L. 228-29-8 du code de commerce, il ne peut plus être émis d'actions à dividende prioritaire sans droit de vote, sauf émission en application de décisions d'assemblées générales antérieures.

* 129 Cf. rapport annuel de la Commission des opérations de bourse pour l'année 1993, p. 50-51.

* 130 Rapport au Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du groupe de travail sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, 27 juin 2005, p. 11.

* 131 La même règle de majorité qualifiée aux deux tiers des voix s'applique aux assemblées spéciales, par renvoi du dernier alinéa de l'article L. 225-99 du code de commerce au troisième alinéa, précité, de l'article L. 225-96 du même code (les assemblées « spéciales », suivant la définition qu'en donne le premier alinéa de l'article L. 225-99 précité, réunissent les titulaires d'actions d'une catégorie déterminée). Pour mémoire, les règles de quorum sont fixées, en ce qui concerne les assemblées générales extraordinaires, par le deuxième alinéa de l'article L. 225-96 et, pour les assemblées spéciales, par le deuxième alinéa de l'article L. 225-99.

* 132 Ainsi, l'article L. 233-3 du code de commerce considère qu'une société en contrôle une autre lorsque, notamment, elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires, et non contraire à l'intérêt de ladite société ; de même, l'article L. 233-10 définit l'action de concert comme l'action de personnes ayant conclu un accord en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue d'exercer les droits de vote, pour mettre en oeuvre une politique vis-à-vis de la société.

* 133 Cet article L. 233-38 prend place au sein de la nouvelle section V, « Des offres publiques d'acquisition », ajoutée au chapitre III du titre III du livre II du code de commerce par l'article 9 du présent projet de loi.

* 134 Cf. infra (B, 1).

* 135 Pour une analyse détaillée de ces aspects de la directive 2004/25/CE, cf. ci-dessus le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi.

* 136 Il convient de noter que, mutatis mutandis , ce schéma est exactement le même que celui que tend à mettre en oeuvre l'article 18 du présent projet de loi.

* 137 Remarquons que cette analyse vaut également, en ce qui les concerne, pour les articles 13 et 14 du présent projet de loi.

* 138 Cf. les observations portées à cet égard à l'occasion du commentaire de l'article 16 du présent projet de loi, dont la rédaction est sur ce point identique (comme elle l'est avec l'article 18).

* 139 Cette définition du fait déclencheur est identique à celle que proposent les articles 16 et 18 du présent projet de loi pour, respectivement, le second alinéa de l'article L. 224-125 du code de commerce et l'article L. 233-39 du même code. Pour une analyse détaillée, voir ci-dessus le commentaire de l'article 16.

* 140 On rappelle que l'Autorité des marchés financiers est qualifiée d' « autorité publique indépendante » , et dotée de la personnalité morale, par l'article L. 621-1 du code monétaire et financier.

* 141 Cf. ci-dessus (I,A).

* 142 Le présent article tend ainsi à permettre, en cas de réussite de l'offre, la mise en place du même type de dispositif que celui prévu, en période d'offre, par les articles 14 et 15 du présent projet de loi.

* 143 Cf. rapport précité, p. 11-12.

* 144 Cf. les articles 12 et 15.

* 145 Pour mémoire :

- hors le cas des administrateurs élus par les salariés (si les statuts le prévoient, suivant l'article L. 225-27 du code de commerce), les administrateurs, comme les membres du conseil de surveillance, sont nommés et révocables par l'assemblée générale constitutive puis, au cours de la vie de la société, par l'assemblée générale ordinaire (en vertu de l'article L. 225-18 du code de commerce en ce qui concerne les administrateurs et de l'article L. 225-75 du même code s'agissant des membres du conseil de surveillance) ;

- les membres du directoire sont nommés par le conseil de surveillance (suivant l'article L. 225-59 du code de commerce) et révocables par l'assemblée générale ainsi que, si les statuts le prévoient, par le conseil de surveillance (conformément à l'article L. 225-61 du même code) ;

- enfin, le directeur général, de même que les directeurs généraux délégués sur proposition de ce dernier, sont nommés et révocables par le conseil d'administration (selon l'article L. 225-51-1 du code de commerce en ce qui concerne la nomination du directeur général, l'article L. 225-53 du même code pour la nomination des directeurs généraux délégués, et l'article L. 225-55 s'agissant de la révocation de ces dirigeants).

* 146 Cet article L. 233-39 prend place au sein de la nouvelle section V, « Des offres publiques d'acquisition », ajoutée au chapitre III du titre III du livre II du code de commerce par l'article 9 du présent projet de loi.

* 147 On rappelle que le « directeur général délégué », auxiliaire du directeur général, est une création de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.

* 148 Cf. les observations portées à cet égard à l'occasion du commentaire de l'article 16 du présent projet de loi, dont la rédaction est sur ce point identique (comme elle l'est avec l'article 17).

* 149 Pour une analyse détaillée de ces aspects de la directive 2004/25/CE, cf. ci-dessus le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi.

* 150 Il convient de noter que, mutatis mutandis , ce schéma est exactement le même que celui que tend à mettre en oeuvre l'article 17 du présent projet de loi.

* 151 Cette définition du fait déclencheur est identique à celle que proposent les articles 16 et 17 du présent projet de loi pour, respectivement, le second alinéa de l'article L. 224-125 du code de commerce et l'article L. 233-38 du même code. Pour une analyse détaillée, voir ci-dessus le commentaire de l'article 16.

* 152 Cf. sur ce point les précisions données à l'occasion des commentaires des articles 16 et 17 du présent projet de loi.

* 153 On rappelle que l'Autorité des marchés financiers est qualifiée d'« autorité publique indépendante », et dotée de la personnalité morale, par l'article L. 621-1 du code monétaire et financier.

* 154 Cf. les explications données dans le commentaire de l'article 17 du présent projet de loi (II, D).

* 155 Cf. le rapport au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du groupe de travail sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, 27 juin 2005, p. 11-12.

* 156 Cf. ci-dessus (II, A, 2, in fine ).

* 157 Cet article L. 233-40 prend place au sein de la nouvelle section V, « Des offres publiques d'acquisition » , ajoutée au chapitre III du titre III du livre II du code de commerce par l'article 9 du présent projet de loi.

* 158 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 13 du présent projet de loi (article L. 233-35 du code de commerce).

* 159 Cf. ci-dessus les commentaires respectifs des articles 14 (article L. 233-36 du code de commerce, concernant les restrictions conventionnelles) et 15 (article L. 233-37 du code de commerce, concernant les restrictions statutaires) du présent projet de loi.

* 160 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 17 du présent projet de loi (article L. 233-38 du code de commerce).

* 161 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 18 du présent projet de loi (article L. 233-39 du code de commerce).

* 162 Pour une analyse détaillée de l'ensemble de ces aspects, cf. ci-dessus le commentaire de l'article 12 du présent projet de loi.

* 163 Sur cette règle de réciprocité, cf. ci-dessus le commentaire de l'article 11 du présent projet de loi.

* 164 Cf. ci-dessus (I, A, 2).

* 165 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 10 du présent projet de loi.

* 166 Cf. ci-dessus les commentaires respectifs de ces articles.

* 167 De plus, suivant le troisième alinéa du même article L. 225-129-2, doivent faire l'objet de résolutions particulières les émissions mentionnées aux articles L. 225-135 à L. 225-138-1, L. 225-177 à L. 225-186 et L. 225-197-1 à L. 225-197-3 du code de commerce, ainsi que les émissions d'actions de préférence mentionnées aux articles L. 228-11 à L. 228-20. du même code.

* 168 Cf. ci-dessus les observations formulées à cet égard à l'occasion du commentaire de l'article 10 du présent projet de loi.

* 169 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 10.

* 170 Cf. l'article 1 er du code civil (premier alinéa, première phrase) : « Les lois [...] entrent en vigueur à la date qu'[elles] fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication ».

* 171 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 11.

* 172 Cf. ci-dessus le commentaire de l'article 10.

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