C. Mesures diverses

ARTICLE 21 - Reversement des disponibilités du Fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (FGAS) et reprise par l'Etat de la garantie accordée sur les prêts de l'accession sociale

Commentaire : le présent article a pour objet de transférer à l'Etat la gestion directe de la garantie qu'il accorde aux prêts à l'accession sociale et à certains prêts à taux zéro et de reverser à l'État la totalité des sommes composant le fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA MISSION DU FGAS, FAVORISER L'ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ

Le Fonds de garantie de l'accession sociale (FGAS), a été créé en application de la loi de finances pour 1993 154 ( * ) pour gérer, pour le compte de l'Etat, la garantie que celui-ci accorde aux prêts aidés à l'accession à la propriété (PAS et, depuis octobre 1995, certains prêts à taux zéro).

L'objet de cette garantie est d'indemniser les établissements de crédit des pertes qu'ils auraient à subir en cas de défaillance d'un emprunteur bénéficiaire d'une de ces catégories de prêts.

Ce dispositif favorise ainsi l'accès au crédit immobilier de ménages dont la capacité de remboursement est faible et pourrait justifier un taux d'intérêt plus élevé, voire un refus de prêt de la part du banquier. Les sommes provisionnées au FGAS autorisent une pondération favorable des prêts garantis au regard du ratio de solvabilité imposé aux établissements de crédit ; cette économie de fonds propres est un facteur déterminant de la modération relative du taux d'intérêt servi par les banques aux accédants à revenus modestes.

Le fonds n'ayant pas la personnalité morale, il est géré par la société de gestion du FGAS (SGFGAS), société anonyme dont les statuts ont été approuvés par décret du 18 mars 1993.Les établissements prêteurs signent une convention d'affiliation avec la société de gestion. Deux commissaires du gouvernement (un représentant du ministère des finances et un représentant du ministre chargé du logement) assistent au conseil d'administration avec droit de veto sur les décisions affectant l'engagement financier de l'Etat.

B. UN FINANCEMENT PARTAGÉ

Le FGAS est alimenté en recettes par :

- une cotisation de l'Etat (égale à 0,98% des prêts garantis depuis la génération de prêts 2003 contre 1,00 % des prêts garantis à partir de la génération 2001 et 1,25 % pour les générations précédentes) ; cette cotisation est prélevée sur le compte d'avances de l'Etat à la SGFGAS lors de la déclaration du prêt par l'établissement prêteur ;

- une cotisation initiale de l'établissement prêteur égale à la cotisation de l'Etat et prélevée simultanément ;

- une commission annuelle sur l'encours de prêts garantis (plafonnée à 0,13% de l'encours depuis la génération de prêts 2003 contre 0,15 % de l'encours à partir de la génération 2001 et 0,2 % pour les générations précédentes, sous réserve des bonus-malus) ;

- ainsi que la rémunération de ces fonds.

Cotisation de l'Etat au FGAS

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Dotation en LFI

64,79

56,41

38,11

28,00

25,00

25,00

En dépense, les versements aux établissements de crédit au titre de l'indemnisation des sinistres survenus pendant toute la durée des prêts garantis s'imputent sur les actifs constitués lorsque ces sinistres peuvent être constatés définitivement.

Les règles de gestion de la société de gestion du FGAS ont été précisées par une convention du conclue le 29 mars 1993 entre cette société et l'État.

C. UN BILAN CONTRASTÉ

Depuis sa création en 1993, le dispositif mis en place a permis de garantir 1.083.211 prêts en métropole pour un montant de 46,7 milliards d'euros. Les PAS représentent 63 % des prêts garantis en nombre et 86 % en montant. Le complément est constitué de prêts à 0 % garantis par le FGAS.

Le rôle central joué par le FGAS dans le succès de l'accession sociale à la propriété ne fait aucun doute comme l'influence positive de son système de gestion, en particulier le jeu des bonus-malus, qui a responsabilisé les établissements prêteurs dans leur politique d'attribution.

Mais cette réussite prudente est aussi à l'origine d'un surdimensionnement des fonds de la SFGAS, que les parties prenantes, Etat et banques, n'ont pas découvert aujourd'hui, et que votre commission avait souligné depuis longtemps, insistant sur la nécessité d'une réflexion approfondie à ce propos.

Dans son rapport spécial sur le budget du logement pour 2002 155 ( * ) , notre collègue Jacques Pelletier rappelait qu'il s'était inquiété de l'augmentation de la dotation de l'Etat au FGAS en 2000, car déjà, cette « augmentation « mécanique » prenant en compte l'augmentation attendue des prêts à l'accession sociale, ne reflétait en rien les risques couverts ». Il se félicitait de la baisse du taux de la cotisation de l'Etat et des établissements prêteurs qui était intervenue depuis et souhaitait que soit « poursuivie la réflexion sur le bon niveau de cotisations au FGAS, afin que ne se constituent pas des excédents sans justification ».

Cette mise en garde était reprise l'année suivante par notre collègue Paul Girod qui soulignait que « la diminution de 25 % des taux de cotisations en 2000 n'avait eu toutefois d'effet que sur les flux futurs et pas sur la trésorerie accumulée du fonds ». Il estimait, en conséquence, « que dès 2003, il était envisageable que l'Etat récupère, sur la première génération de prêts, ses excédents de versements ».

Les reversements anticipés et les baisses de cotisations au FGAS, intervenus depuis 2000, s'ils ont permis de limiter l'accumulation de réserves nouvelles, n'ont pas conduit à résorber le stock de réserve constitué du fait du déséquilibre entre le taux de sinistralité et les ressources du fonds.

Le taux de sinistralité est resté exceptionnellement faible au regard des montants des prêts consentis. A moins de 0,1%, il est très inférieur aux hypothèses retenues entre 1993 et 2000 (0,60 %).

Nombre de sinistres constatés par génération de prêts

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

27

71

62

151

133

70

51

22

8

3

3

-

Nombre de sinistres pris en charge par génération de prêts

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

20

62

51

117

120

63

37

16

7

3

0

6

De ce fait, les disponibilités du FGAS dépassent aujourd'hui 1,5 milliard d'euros, pour un encours de prêts garantis de 31,6 milliards d'euros au 21 avril 2005. Ce montant est d'un niveau très supérieur aux besoins réels liés à la garantie des prêts, le montant des sinistres indemnisés par le fonds depuis 1993 s'élevant à 8 millions d'euros seulement.

La trésorerie actuelle du FGAS lui permettrait ainsi d'assumer un taux de sinistralité de l'ordre de 5 à 10 %,

Soldes des comptes de suivi du FGAS au 30 septembre 2005

(en millions d'euros)

Cotisations périodiques (banques uniquement)

205

Cotisations fixes

1.307

- dont, pour l'Etat

650

- dont, pour les banques

650

Total

1.512

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le paragraphe I de cet article transfère à l'Etat la gestion directe de la garantie qu'il accorde aux prêts aidés à l'accession à la propriété (PAS et prêts à taux zéro) et modifie ence sens l'article L. 312-1 du code de la construction et de l'habitation en supprimant le FGAS et la société de gestion qui lui est attachée.

Dans sa version initiale, il prévoyait également que « l'octroi de la garantie de l'Etat peut être subordonné à une participation financière des établissements de crédit, qui pour distribuer des prêts garantis doivent signer à cet effet une convention avec l'Etat . »

Le paragraphe II prévoit que l'Etat prend à sa charge à compter du 1er janvier 2006, la totalité des engagements souscrits antérieurement par la société de gestion du FGAS (SGFGAS). Il prévoit, en contrepartie, que la totalité des disponibilités du FGAS est reversée au budget de l'Etat.

III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a successivement repoussé trois amendements de suppression de cet article, ainsi qu'un amendement présenté par notre collègue député Philippe Auberger et la commission des finances 156 ( * ) , qui prévoyait la reprise par l'Etat d'une somme de 975 millions d'euros prélevés sur la trésorerie du FGAS, les sommes complémentaires restant affectées à la société de gestion pour faire face à la sinistralité des dernières générations de prêts réalisés.

Elle a, en définitive, adopté cet article modifié par un amendement rédactionnel présenté par sa commission des finances et un amendement du gouvernement.

Cet amendement vise à répondre aux interrogations de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général, qui considérait que le dispositif subordonnant l'octroi de la garantie de l'Etat à une participation financière des établissements de crédit, aboutissait, de manière très contradictoire, à maintenir la société de gestion du FGAS, ainsi que le fonds lui-même qu'il croyait doté d'un reliquat dans l'attente de la définition du nouveau dispositif conventionnel de la garantie de l'État à l'accession sociale.

Le texte adopté sur initiative du gouvernement apporte donc des indications plus précises sur le nouveau dispositif envisagé. Ainsi, les établissements de crédit devraient, pour bénéficier de la garantie de l'Etat, cotiser à « un fonds de garantie de nature privée dont ils assurent la gestion ».En outre, l'Etat serait « garant, en dernier ressort, des prêts entrant dans le champ d'intervention de ce fonds. » Enfin, les établissements de crédit devraient adhérer par convention à une société de gestion.

Selon le ministre délégué, un tel dispositif présenterait trois avantages par rapport au système actuel : «  Il évite l'accumulation inutile de liquidités. Il est plus sécurisant pour les banques, puisque leurs cotisations sont isolées dans un fonds qui leur appartient. Il maintient le principe d'un cofinancement de la garantie par les banques. C'est essentiel pour assurer leur responsabilisation . »

Votre rapporteur général constate que le dispositif prévu par le gouvernement pour succéder au FGAS et à sa société de gestion est une copie quasiment conforme du dispositif actuel, à la seule mais importante différence que l'Etat ne cotiserait plus au fonds. Comme l'a précisé, lors des débats, le ministre délégué, « l'Etat s'engagerait à verser des indemnités aux banques en fonction des sinistres constatés, qu'il prendrait en charge jusqu'à un certain taux - 50 %, voire plus, cela dépendra de la discussion avec les banques . Le principe d'une garantie de l'État en dernier ressort serait maintenu à partir d'un certain taux de sinistralité, comme dans le système actuel. »

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La disposition du projet de loi de finances prévoyant la suppression du Fonds de garantie à l'accession sociale a suscité des réactions pour le moins vives.

Ainsi, après avoir demandé, le 28 septembre dernier, au gouvernement une clarification de ses intentions et souligné les risques que cette mesure présentait pour le financement de l'accession sociale à la propriété, les établissements de crédit distributeurs ont annoncé le 8 novembre qu'aucune concertation n'ayant été engagée et compte tenu des délais d'instruction des dossiers et de réponses aux offres, la suppression du FGAS à compter du 1er janvier 2006 les obligeait à interrompre 157 ( * ) dès le 21 novembre l'instruction des dossiers de prêts à taux zéro (PTZ) garantis et des prêts à l'accession sociale (PAS).

Il est vrai que le gouvernement semble avoir agi, dans cette affaire, avec une brusquerie certaine puisqu'il aurait opposé, le même 28 septembre, son veto à un mécanisme qui devait être signé lors du Conseil d'Administration de la société de gestion le 29 septembre. Ce mécanisme aboutissait au remboursement de la somme globale de 848 millions d'euros correspondant aux montants des apports initiaux des banques au système de garantie. Ainsi, l'Etat se voyait remboursé de 424 millions d'euros, ce qu'il a sans doute jugé, mais un peu tardivement, insuffisant.

Votre rapporteur général estime parfaitement justifiée la volonté du gouvernement de récupérer pour le budget de l'Etat des disponibilités excédentaires qui constituent une trésorerie dormante.

Toutefois, les arguments présentés en séance à l'Assemblée nationale concernant la qualification de deniers publics des cotisations n'ont pas totalement convaincu votre rapporteur général qui a souhaité disposer d'éléments juridiques incontestables qui puissent faire l'objet d'une analyse impartiale. Il a donc demandé, notamment, que lui soit transmise la convention conclue en 1993 par l'Etat et la société de gestion du FGAS ce qui n'a pas été fait avant la réunion de la commission.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

* 154 Loi n° 92-1376 du 30 décembre 1992 codifiée à L'article L. 312-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 155 Rapport général n° 87 tome III annexe 21 sur le projet de loi de finances pour 2002.

* 156 Adopté par celle-ci contre l'avis de son rapporteur général.

* 157 Ce que, bien sûr,  « ils regrettent vivement, cette procédure ayant permis d'accorder 70.000 prêts par an à des ménages modestes ».

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