3. Des faiblesses structurelles

a) Un pilotage insuffisant

Nombre d'observateurs s'inquiètent des insuffisances du pilotage stratégique de la recherche française. L'une des raisons de cette situation tient à la fragmentation des responsabilités, tant au plan national qu'à celui des laboratoires de recherche eux-mêmes.

En effet, la thématique de la recherche concerne un grand nombre de ministères. Certes, le nouveau cadre budgétaire mis en oeuvre dans le cadre de LOLF met davantage en accord la structure organisationnelle de la recherche avec la structure de son financement. Elle devrait placer le ministère de la recherche en position de coordonnateur et de chef de file et lui donner la légitimité pour se doter des outils de pilotage de cette politique qui lui font aujourd'hui en grande partie défaut.

Un pilotage stratégique pertinent suppose une vision prospective de long terme. Or on peut déplorer un déficit de réflexion prospective et de politique à long terme.

La situation n'est pas meilleure au niveau des laboratoires de recherche, en particulier lorsque ceux-ci sont constitués en unités mixtes de recherche (UMR). Tel est le cas de plus de la moitié des laboratoires, soumis à la double tutelle d'un établissement de recherche et d'une université, ce qui conduit à une fragmentation du pilotage et de la gestion administrative de ces structures.

Cette situation nuit à la définition des orientations stratégiques, tant au plan général que sectoriel.

b) Des cloisonnements regrettables

Le système français d'enseignement supérieur et de recherche souffre de cloisonnements multiples : entre enseignement supérieur et établissements publics de recherche, entre universités et grandes écoles, entre laboratoires publics et entreprises, entre recherche publique et recherche privée, entre recherche civile et recherche militaire, entre recherche fondamentale et recherche appliquée ...

Il en résulte un morcellement des structures et un saupoudrage relatif des moyens. En outre, on constate des redondances dans les thématiques de recherche développées de façon parallèle, sans nécessaire coordination, entre différents organismes publics de recherche, ceci ne garantissant pas un usage pertinent des deniers publics.

Ces cloisonnements incitent Philippe Aghion et Elie Cohen 28 ( * ) à porter un jugement sévère sur notre système d'enseignement supérieur et de recherche : « Depuis que leur mission initiale de rattrapage du retard français en matière de recherche a été remplie, les grands organismes scientifiques immobilisent des moyens, freinent les redéploiements, n'irriguent pas les universités et, au total, contribuent à la sous-productivité du système ».

Ces cloisonnements se traduisent aussi dans le manque de souplesse dans les carrières des chercheurs, les possibilités d'allers et retours entre le secteur public et le secteur privé étant encore trop limitées (en dépit des facultés ouvertes par la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche). La mobilité très réduite des chercheurs publics français vers les entreprises privées contraste fortement avec celle de leurs voisins, notamment en Europe du Nord : moins d'un chercheur français sur 200 passe tous les ans d'une structure publique à une entreprise privée. Le point fort de ces pays est de savoir convertir les travaux de recherche en innovation ou en « start-up ».

L'émiettement des établissements explique aussi partiellement leur manque de visibilité internationale.

* 28 « Education et croissance » dans Regards sur l'actualité n° 301 - Mai 2004 (la documentation française).

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