CONCLUSION

L'amélioration des législations nationales et le renforcement de l'encadrement international des activités nucléaires paraissent aujourd'hui indispensables, tant en matière de sécurité et de sûreté que de réparation des dommages.

Il s'agit bien entendu de mieux prévenir et, le cas échéant ; de mieux réparer les dommages causés par un accident nucléaire, à un moment où l'on constate, de par le monde, un regain d'intérêt pour cette forme d'énergie. Le renchérissement du coût des énergies fossiles, la lutte contre le réchauffement climatique, les craintes sur la sécurité des approvisionnements du fait de tensions politiques, sont autant d'éléments de nature à conforter les pays qui, comme la France, font du nucléaire un axe majeur de leur politique énergétique.

C'est pourquoi la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous demande d'adopter le projet de loi autorisant l'approbation des deux protocoles du 12 février 2004 modifiant la convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire et la convention complémentaire de Bruxelles du 31 janvier 1963.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du 3 mai 2006.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Serge Vinçon, président, a constaté que la question de l'énergie revêtait aujourd'hui un caractère essentiel et qu'il était tout aussi important d'accorder à la sûreté et à la sécurité des installations, notamment nucléaires, toute l'attention qu'elles méritent. Il a évoqué l'émotion ressentie à l'occasion du vingtième anniversaire de l'accident de Tchernobyl et a estimé que les deux protocoles adoptés en février 2004 constituaient un pas positif pour améliorer le régime de responsabilité civile en cas d'accident.

M. André Trillard s'est félicité des progrès du cadre juridique encadrant les activités nucléaires, en particulier en ce qui concerne la responsabilité de l'exploitant, mais il a considéré qu'en dépit du relèvement des tranches d'indemnisation prévues par les protocoles, les montants restaient largement en-deçà du niveau des dommages susceptibles d'être provoqués par un accident nucléaire.

Mme Dominique Voynet a observé qu'à l'instar de celle sur les transports maritimes, la réglementation internationale relative à la prévention et à la réparation des accidents nucléaires n'avait pu évoluer que sous la pression d'une grave catastrophe, et après des années de négociations. Elle s'est néanmoins réjouie de l'aboutissement du travail de renforcement du régime international de responsabilité civile, même si les nouveaux montants d'indemnisation demeurent très insuffisants au regard des coûts effectivement engendrés par un accident comme celui de Tchernobyl. Elle a noté que les conséquences de la dislocation de l'URSS sur la gestion et le suivi de cette catastrophe étaient souvent évoquées, mais que la France n'avait pour sa part jamais mené de travail sérieux sur l'évaluation de la contamination du territoire national et sur le suivi épidémiologique des populations concernées. Se référant aux orientations actuelles de la politique nucléaire française, elle a contesté la réalité des avancées supposées résulter des projets de loi sur la sécurité et la transparence en matière nucléaire et sur la gestion des déchets radioactifs, estimant que ces textes n'atténuent en rien le poids déterminant des acteurs qui, depuis des décennies, fixent, sans réel contrôle démocratique, les choix dans le domaine nucléaire. Elle a également relativisé l'idée d'une relance du nucléaire au niveau mondial, observant qu'aucune décision n'était intervenue en ce sens depuis 6 ans aux Etats-Unis et que les projets chinois et indiens ne conduiraient qu'à réserver une place infime à l'énergie nucléaire dans l'approvisionnement des deux pays. Elle s'est prononcée en faveur de la définition, après un large débat public, d'une véritable politique européenne de l'énergie.

M. Roger Romani, rapporteur, a cité les déclarations de responsables politiques allemands, britanniques ou italiens montrant que chez nos voisins, le rôle de l'énergie nucléaire est considéré plus favorablement que par le passé.

M. Robert Bret s'est félicité des avancées permises par les deux protocoles du 12 février 2004, même si les montants de réparation peuvent toujours paraître trop limités. Il a souligné la nécessité d'un large débat sur les perspectives mondiales en matière d'énergie, au vu notamment de l'épuisement prévisible des sources d'énergie fossile. Il a souligné la contradiction de certains pays adoptant une position de principe hostile au nucléaire, mais prêts à se fournir en électricité d'origine nucléaire auprès de pays comme la France.

M. Roger Romani, rapporteur, a convenu que les montants de réparation prévus par le nouveau régime international demeuraient limités et, en tout état de cause, sans commune mesure avec les dommages se chiffrant probablement en centaines de milliards d'euros provoqués par une catastrophe de grande ampleur comme celle de Tchernobyl. Il a néanmoins souligné que la mise en jeu de la responsabilité civile pouvait intervenir dans des accidents de portée plus limités et que, dans de tels cas, les protocoles apportent une réelle amélioration.

M. André Trillard a évoqué la récente chute des cours des permis d'émission de gaz carbonique, estimant qu'elle traduisait une moindre consommation d'énergie fossile du fait, notamment, du recours à l'énergie nucléaire.

M. André Vantomme a estimé que les deux protocoles ne pouvaient recueillir qu'un large consensus et a appelé à une pleine cohérence entre cette démarche de progrès au plan international et l'approche des questions nucléaires au plan national. Il a ainsi observé que l'amélioration du régime international de réparation doit aller de pair avec une plus grande transparence des pouvoirs publics en cas d'accident, à l'inverse de l'attitude prise par les pouvoirs publics français lors de la catastrophe de Tchernobyl.

Mme Catherine Tasca, faisant allusion à la mise en oeuvre de procédures simplifiées pour l'examen en séance publique des conventions internationales, a noté que ces textes, et singulièrement ceux portant sur les accidents nucléaires, pouvaient appeler des débats plus larges que leur objet premier. Elle y a vu la nécessité d'obtenir davantage de temps pour débattre des questions internationales en séance publique.

Mme Dominique Voynet a contesté que la chute des cours des permis d'émission de gaz carbonique puisse être inscrite à l'actif de l'énergie nucléaire. Elle a rappelé qu'aucune centrale nucléaire nouvelle n'avait été mise en service en Europe depuis des années, la réduction des émissions de gaz carbonique étant à ses yeux liée au ralentissement de la croissance et aux efforts des industries en matière d'économies d'énergie.

M. Jean-Louis Carrère s'est déclaré sceptique sur les perspectives de réduction durable des émissions polluantes, citant notamment le manque de volontarisme pour développer les modes de transport les moins polluants. Il a reconnu les aspects positifs des protocoles soumis à l'examen du Sénat, tout en observant qu'ils s'inscrivaient dans une logique globale de développement de l'énergie nucléaire qui mériterait pour sa part un débat préalable plus global.

M. Roger Romani, rapporteur, a souligné l'ampleur des efforts accomplis en France pour renforcer la sûreté et la sécurité des installations nucléaires. Il a rendu un hommage particulier à EDF, qui a développé des procédures de contrôle interne extrêmement approfondies.

A la suite de ce débat, la commission a adopté le projet de loi autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire.

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