Article 70 (art. L. 611-10 et L. 611-11 nouveau du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; art. 10-2 nouveau de l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte)
Contrôle des véhicules aux fins de recherches d'infractions à l'entrée et au séjour des étrangers en Guyane, en Guadeloupe et à Mayotte

Cet article étendrait à de nouvelles zones de la Guyane les possibilités , actuellement reconnues dans certaines collectivités ultramarines, de procéder à des visites sommaires de véhicules circulant sur la voie publique aux fins de rechercher et constater les infractions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers. Il instituerait par ailleurs de tels contrôles, à titre temporaire, en Guadeloupe ainsi qu'à Mayotte .

1. L'extension du périmètre dans lequel il peut être procédé à des visites sommaires de véhicules en Guyane

Les articles L. 611-8 et L. 611-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorisent, dans une bande de 20 kilomètres débutant à partir des frontières de la France avec les Etats parties à la convention de Schengen, les officiers de police judiciaire, assistés d'agents de police judiciaire, à procéder à la visite sommaire des véhicules circulant sur la voie publique, à l'exclusion des voitures particulières, en vue de rechercher et constater les infractions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers en France 201 ( * ) .

Cette visite peut intervenir avec l'accord du conducteur du véhicule ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République. Dans l'attente de ces instructions, le véhicule est immobilisé pour une durée ne pouvant dépasser quatre heures. La visite, limitée au temps strictement nécessaire, se déroule en présence du conducteur et donne lieu à l'établissement d'un procès-verbal dont un exemplaire est remis au conducteur et un autre est transmis au procureur.

Par deux fois, le Conseil constitutionnel a estimé un tel dispositif conforme à la Constitution, soulignant qu'il permettait d'exercer une recherche effective des auteurs d'infractions -nécessaire à la sauvegarde des principes et droits à valeur constitutionnelle- tout en préservant le principe de la liberté individuelle et de l'inviolabilité du domicile, sous le contrôle permanent du procureur de la République 202 ( * ) .

En vertu de l'article L. 611-10, ce dispositif est appliqué de manière pérenne en Guyane dans une zone strictement délimitée, comprise entre les frontières terrestres du département -c'est-à-dire avec le Brésil à l'Est et au Sud, et le Surinam à l'Ouest- et une ligne tracée à 20 kilomètres de celles-ci. Cette mesure s'est avérée nécessaire compte tenu de l'utilisation de plus en plus importante des voies routières par les étrangers rentrant irrégulièrement sur le territoire guyanais.

Toutefois, la situation actuelle de l'immigration dans ce département justifie un accroissement du périmètre initial. La réalisation de réseaux routiers importants, liés notamment à la construction prochaine du pont sur l'Oyapock, à la hauteur de la commune de Saint-Georges, a redoublé l'utilisation par les clandestins de ces voies. L'achèvement de cet ouvrage d'art issu d'un traité conclu entre la France et le Brésil ne fera, dans un avenir proche, qu'accroître encore ce phénomène.

Si un renforcement des forces de police au poste de Saint-Georges est en cours, il est apparu nécessaire d'étendre les possibilités de visites sommaires des véhicules au-delà de la bande des 20 kilomètres. Le premier paragraphe (I) de cet article prévoirait ainsi l'application de ce dispositif à la route nationale 2 -qui relie Saint-Georges à Cayenne- sur les seuls territoires des communes de Saint-Georges et de Régina. Cette extension limitée permettra un contrôle sur 60 km de routes supplémentaires.

Compte tenu des contraintes particulières qui s'exercent en matière d'immigration clandestine en Guyane, le présent dispositif apparaît conforme aux possibilités d'adaptation du droit métropolitain admises par l'article 73 de la Constitution.

2. L'extension temporaire à la Guadeloupe et à Mayotte du dispositif permettant les visites sommaires de véhicules

Les deuxième et troisième paragraphes de cet article étendraient, pour une période de cinq ans à compter de la publication de la présente loi , le dispositif de visites sommaires des véhicules sur la voie publique en Guadeloupe et à Mayotte . A l'issue de ce délai, le dispositif deviendra donc caduc, sauf à ce que le législateur décide de le reconduire pour une durée limitée ou de le pérenniser, afin de tenir compte de l'évolution de la situation de l'immigration clandestine vers 2011.

La situation de la Guadeloupe, confrontée à une montée considérable en quelques années de l'immigration irrégulière, impose des mesures d'adaptation rentrant dans les prévisions de l'article 73 de la Constitution. Le statut de collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution permet de prendre pour Mayotte a fortiori ces mesures dérogatoires nécessaires à la lutte contre le fléau de l'immigration clandestine qu'elle subit de plein fouet.

Dans ces deux collectivités, les immigrés clandestins arrivent par le biais d'embarcations : il est donc nécessaire de permettre aux officiers de police judiciaire de visiter les véhicules circulant sur les voies publiques proches des côtes.

Le deuxième paragraphe (II) , créant un article L. 611-11 nouveau au sein du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rendrait applicable le dispositif en Guadeloupe :

- d'une part, dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà . L'immigration clandestine dans ce département se fait exclusivement par voie maritime. Compte tenu de cette particularité, un contrôle efficace doit pouvoir s'exercer sur le réseau routier tout le long du littoral. Cette mesure s'appliquerait dans l'ensemble de l'archipel de la Guadeloupe, en particulier dans la commune de Saint-Martin ;

- d'autre part, sur l'intégralité des routes nationales 1 et 4 . Cette mesure est nécessaire car, pour rejoindre les principales agglomérations de la Guadeloupe, les étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire par les côtes passent essentiellement par la zone des communes de Trois-Rivières et de Capesterre-Belle-Eau pour rejoindre l'agglomération de la Basse-Terre par la route nationale 1 et par la zone des communes de Sainte-Anne et de Saint-François pour rejoindre l'agglomération de Pointe-à-Pitre par la route nationale 4. Or, le tracé de ces routes passe fréquemment au-delà de la ligne de 1 km en deçà du littoral. L'exercice d'un contrôle des véhicules sur ces routes devrait ainsi permettre d'accentuer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière dans ce département.

Le troisième paragraphe (III) de cet article, insèrerait un article 10-2 nouveau dans l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte. Cette collectivité n'est en effet pas régie par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais par un texte spécifique non codifié qui, depuis 2000, met en place un régime dérogatoire au droit commun, justifié par la situation particulière de Mayotte au regard des phénomènes migratoires et permis par son statut de collectivité sui generis, aujourd'hui devenue une collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution.

Le dispositif proposé permettrait la visite sommaire des véhicules circulant sur la voie publique dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà. Cette mesure permettrait aux officiers de police d'intervenir sur près de 85 % du réseau routier mahorais.

MAYOTTE

Pour le surplus, il reprendrait, en réalité, sans modification de fond, celui aujourd'hui prévu par les articles L. 611-8 et L. 611-9.

Ainsi, seuls les officiers de police judiciaire, assistés des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés respectivement à l'article 20 et au 1° de l'article 21 du code de procédure pénale, pourraient procéder, avec l'accord du conducteur ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République, à la visite sommaire de tout véhicule circulant sur la voie publique, à l'exclusion des voitures particulières, en vue de rechercher et constater les infractions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers à Mayotte. La visite du véhicule, dont la durée devrait être limitée au temps strictement nécessaire à la recherche et au constat des infractions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers à Mayotte, se déroule en présence du conducteur et donne lieu à l'établissement d'un procès-verbal mentionnant les dates et heures du début et de la fin des opérations. Un exemplaire de ce procès-verbal serait remis au conducteur et un autre transmis sans délai au procureur de la République.

A l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, une différence avec l'article L. 611-9 a néanmoins été instituée. Dans l'attente des instructions du procureur de la République, le véhicule pourrait en effet être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder huit heures , au lieu de quatre. Cette mesure constitue une coordination avec l'article 79 du présent projet de loi qui prévoirait de porter à huit heures la durée maximale de rétention des étrangers soumis à un contrôle d'identité à Mayotte.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 70 sans modification.

* 201 Ce périmètre est étendu aux aires de stationnement jusqu'au premier péage ainsi qu'à ce péage lui-même lorsqu'une section autoroutière commence dans la zone des 20 kilomètres mais que le premier péage se situe au-delà.

* 202 Conseil constitutionnel, décisions n° 93-323 DC du 5 août 1993 et n° 97-389 DC du 22 avril 1997.

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