N° 78

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2006

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2007 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 34

VILLE ET LOGEMENT

Rapporteurs spéciaux : MM. Philippe DALLIER et Roger KAROUTCHI

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM.  Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3341 , 3363 à 3368 et T.A. 619

Sénat : 77 (2006-2007)

Lois de finances.

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS
RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Le bilan de la politique du logement , initiée en 2002 et amplifiée au cours de la législature, aboutit à des constatations incontestablement positives , malgré une conjoncture très difficile : reprise de la construction privée et publique, augmentation de l'offre, nouvel essor de l'accession sociale à la propriété. Les résultats des douze derniers mois sont, à cet égard, significatifs : 432.000 mises en chantier, 80.000 logements sociaux financés, 28.000 logements conventionnés par l'ANAH, 200.000 prêts à taux zéro. La sortie de la crise du logement peut être, dans ces conditions, envisagée à moyen terme, si la tendance à la décélération des prix, et donc des loyers, se confirme en 2007.

Dans le cadre de cette évolution favorable, vos rapporteurs spéciaux souhaitent que trois actions fassent l'objet d'une attention particulière :

- le soutien des « parcours résidentiels » qui nécessite d'écarter toute segmentation artificielle du secteur du logement et qui doit permettre de retrouver la fluidité souhaitable entre secteur public et secteur privé ;

- l'institution d'un droit à l'hébergement, opposable aux pouvoirs publics, qui devrait interdire le maintien ou le renouvellement de situations inacceptables et qui a l'avantage de présenter un degré de faisabilité et de réalisme bien plus élevé qu'un hypothétique droit au logement opposable ;

- le développement indispensable de l'offre foncière , par l'institution d'un prêt à taux zéro foncier mais également par le renforcement de l'action des agences foncières, notamment en Ile-de-France, et par l'incitation ferme adressée aux grands détenteurs de réserves foncières (RFF, SNCF) à céder leurs terrains inutilisés à l'Etat et aux collectivités territoriales.

2. Le succès est incontestable aussi en ce qui concerne la politique de rénovation urbaine . Le programme national, lancé en 2003, rencontre une très forte adhésion, malgré les critiques dont il a été l'objet à ses débuts : plus de 25 milliards d'euros de travaux sont d'ores et déjà approuvés dans près de 380 quartiers qu'ils transformeront en profondeur d'ici 2013.

Le volet humain de la politique de la ville n'est pas en reste. La consolidation en 2007 des crédits réservés à l'action sociale et économique dans les quartiers, la création de nouvelles ZFU , qui doit donner un nouveau souffle à ce mode de soutien de l'économie locale, l'augmentation de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la mise en place de l'ANCSEC , sont autant de marques de l'attention particulière du gouvernement en ce domaine.

Vos rapporteurs spéciaux sont, toutefois, très soucieux que l'effort de l'Etat s'inscrive dans la durée et dans l'efficacité . A ce titre, ils rappellent que les espoirs placés dans les opérations de rénovation urbaine ne doivent pas être déçus, et considèrent qu'il est indispensable de sanctuariser les ressources de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine qui lui permettront de faire face à ses engagements.

Ils estiment également que l'action de l'Etat en faveur des quartiers doit être exemplaire en termes de transparence et de performance . Ils appellent, à cet égard, à plus de rigueur dans la gestion et le suivi des différents dispositifs qui sont mis en oeuvre par les Agences et la DIV, autorité de tutelle.

Ce souci d'efficacité doit s'exprimer, notamment, par la consolidation des informations relatives aux crédits d'intervention déconcentrés de la politique de la ville, dans la coordination des intervenants au niveau local (préfets à la cohésion sociale, délégués adjoints de l'ANRU, « délégués de l'Etat », DDE). Il doit inspirer aussi la mise en place des processus de collaboration entre la DIV, l'ANRU et l'ANCSEC.

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE LA MISSION

La mission ministérielle « Ville et logement » est une des trois missions dépendant du ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement avec la mission « Travail et emploi » et la mission « Solidarité et intégration ».

A. UNE MISSION TRÈS MARQUÉE PAR LA FISCALITÉ

Au sein de ces trois missions, la mission « Ville et logement » est au troisième rang en termes budgétaires mais au deuxième rang en ce qui concerne les dépenses fiscales (hors exonérations de charges sociales des bas salaires).

Elle représente :

• 3.088 emplois autorisés en équivalent temps plein travaillé (ETPT) , dont :

- 2.716 participent à la mise en oeuvre des programmes « logement », 336 au titre de la direction générale de l'urbanisme de l'habitat et de la construction (DGHUC) et de la mission interministérielle d'inspection du logement social (MILOS) et 2.380 dans les directions régionales et départementales de l'équipement ;

- 372 participent à la mise en oeuvre des programmes « ville », dont 93 pour la délégation interministérielle à la ville (DIV) et 279 dans les services déconcentrés de l'équipement.

Il convient toutefois d'ajouter à ces emplois, les 528 emplois des quatre principaux opérateurs agissant dans le cadre de la mission : l'agence nationale de l'habitat (ANAH), l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ANCSEC).

Tableau des emplois 2007 des opérateurs de la mission « Ville et logement »

Opérateur

Emplois

ANAH

123

ANRU

65,5

CGLLS

29

ANCSEC

311 (1)

(1) Dont 12 emplois par transfert de la DIV.

Source : annexe au projet de loi de finances pour 2007 « Ville et logement »

• Plus de 11 milliards d'euros de dépenses fiscales, stables par rapport à 2006 1 ( * ) , ce qui représente 156 % des crédits budgétaires de la mission.

Le poids des dépenses fiscales rattachées est une caractéristique de la mission « Ville et logement » et leur répartition est très inégale entre les quatre programmes qui la composent.

Poids des dépenses fiscales rattachées par programme de la mission

(en millions d'euros)

Programme

Évaluation 2006

Évaluation 2007

Dépenses fiscales/crédits budgétaires (CP)

Rénovation urbaine

100

300

77,72 %

Equité sociale et territoriale et soutien

248

247

31,10 %

Aide à l'accès au logement

33

35

0,71 %

Développement et amélioration de l'offre de logement (1)

10.780

10.591

1.001 %

Total

11.542

11.173

156,09 %

(1) Hors DOM.

Source : annexe au projet de loi de finances pour 2007 « Ville et logement »

• En termes de crédits budgétaires :

- 7.306 millions d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et 7.190 millions d'euros de crédits de paiement (CP), correspondant, à hauteur de plus de 97 %, à des dépenses d'intervention du titre 6.

Ces crédits seront complétés par un montant très limité de fonds de concours , pour un total envisagé de 226.000 euros, provenant de contributions de tiers aux études locales sur le logement.

Les crédits de la mission « Ville et logement » sont respectivement en diminution de 1,03 % en autorisations d'engagement et stables en crédits de paiement par rapport à la loi de finances pour 2006. Pour plus de la moitié, cette diminution résulte de la poursuite des effets de la fiscalisation du financement du prêt à taux zéro , intervenue en 2005.

Evolution des crédits, détaillée par action de la mission

(en euros)

AE 2006

AE 2007

Variation

CP 2006

CP 2007

Variation

Programme "Rénovation urbaine"

Logements participant à la rénovation urbaine

213.500.000

400.000.000

31,13 %

133.000.000

356.000.000

167,67 %

Aménagement des quartiers participant à la rénovation urbaine

91.544.500

100.044.500

30.000.000

- 70,01 %

Programme "Equité sociale et territoriale et soutien"

Prévention et développement social

361.775.980

353.345.000

- 2,33 %

381.665.980

382.745.000

0,3 %

Revitalisation économique et emploi

372.050.000

359130.000

- 3,47 %

377.360.000

366.730.000

- 2,82 %

Stratégie, ressources et évaluation

34.160.000

43.508.000

27,37 %

34.160.000

44.508.000

30,29 %

Programme "Aide à l'accès au logement"

Aides personnelles

5.107.000.000

4.911.000.000

- 3,84 %

5.107.000.000

4.911.000.000

- 3,84 %

Accompagnement des publics en difficulté

7.676.000

7.990.000

4,09 %

7.676.000

7.990.000

4,09 %

Programme "Développement et amélioration de l'offre de logement"

Construction locative et amélioration du parc

996.700.000

1.032.660.000

3,61 %

944.700.000

855.360.000

- 9,46 %

Soutien à l'accession à la propriété

14.743.395

7.700.000

- 47,77 %

84.743.395

14.700.000

- 82,65 %

Lutte contre l'habitat indigne

20.000.000

26.000.000

30,00 %

18.000.000

23.000.000

27,78 %

Réglementation de l'habitat, politique technique et qualité de la construction

6.600.000

7.400.000

12,12 %

5.900.000

7.400.000

25,42 %

Soutien

156.904.200

157.672.000

0,49 %

156.489.200

157.672.000

0,76 %

Total

7.382.654.075

7.306.405.000

- 1,03 %

7.350.739.075

7.082.634.500

- 7,32 %

Source : annexe au projet de loi de finances pour 2007 « Ville et logement »

B. QUATRE PROGRAMMES INÉGAUX ET DEUX LOIS DE PROGRAMMATION

La mission « Ville et logement » compte quatre programmes très inégalement dotés , dont deux portent sur la politique de la ville et deux portent sur la politique du logement :

- le programme « Rénovation urbaine » (programme 202) représente 5,40 % des crédits de paiement de la mission ;

- le programme « Equité sociale et territoriale et soutien » (programme 147) représente 11,10 % des crédits de paiement ;

- le programme « Aide à l'accès au logement » (programme 109) représente 68,72 % des crédits de paiement ;

- et le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » (programme 135) 14,78 % des crédits de paiement de la mission. Il rassemble les crédits liés aux actions de soutien pour l'ensemble de la mission et centralise, à ce titre, les crédits de personnel du titre 2.

En outre, la mission « Ville et logement » est encadrée par deux lois de programmation qui ont défini à la fois des objectifs physiques ambitieux de réalisation et de réhabilitation de logements sociaux et des engagements budgétaires.

Le programme national de rénovation urbaine est issu de la loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Réévalué à deux reprises, il se prolonge désormais jusqu'en 2013, le montant global minimum de l'effort de l'Etat étant fixé à 5 milliards d'euros sur l'ensemble de la période.

Ses objectifs en termes de réalisation physique de logements comprennent la mise à disposition de 250.000 logements locatifs sociaux, la réhabilitation de 400.000 logements locatifs sociaux et la démolition de 250.000 logements locatifs sociaux.

Le plan de cohésion social e établi par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale prévoit la réalisation de 500.000 logements locatifs dans le secteur social sur cinq ans, le conventionnement de 200.000 logements à loyers maîtrisés et la remise sur le marché de 100.000 logements vacants.

Les crédits programmés à ce titre sont les suivants pour les années 2005 à 2009.

Programmation budgétaire du plan de cohésion sociale

(en millions d'euros valeur 2004)

2005

2006

2007

2008

2009

Total

Autorisations de programme ou

d'engagement

442

482

482

482

482

2.730

Crédits de paiement

465

594

610

610

482

2.761

Source : loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005

C. UN DOCUMENT DE POLITIQUE TRANSVERSALE ATTENDU

Vos rapporteurs spéciaux avaient regretté, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, l'absence de publication du document de politique transversale « Ville », qui, depuis, a été institué par l'article 128 de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.

Ils se félicitent de la publication, cette année, de ce document qui constitue un élément de réponse à la question de l'évaluation de l'effort budgétaire global réalisé pour la ville, au-delà des crédits spécifiques gérés dans le cadre de la seule mission « Ville et logement ».

Ce document a vocation, en effet, à exprimer la nature interministérielle de la politique de la ville. Il rassemble les contributions de 26 programmes répartis dans 11 missions : Travail et emploi, Développement et régulation économiques, Ville et logement, Justice, Sécurité, Enseignement scolaire, Solidarité et intégration, Santé, Culture, Sport, jeunesse et vie associative et Administration générale et territoriale de l'Etat.

Si ce document est encore largement perfectible, notamment dans l'évaluation de la performance, le choix des objectifs et celui des indicateurs, il permet de prendre la mesure des différents dispositifs mis en oeuvre (crédits budgétaires, zones franches urbaines, dotation de solidarité urbaine, contributions de la Caisse des dépôts et consignations ou de l'Union européenne).

Il apparaît ainsi que l'effort budgétaire des 26 programmes concernés atteindra 3,735 milliards d'euros en crédits de paiement pour 2007.

On note également la très forte progression de la dotation de solidarité et de cohésion sociale, qui en application de l'article 135 de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, bénéficie, entre 2005 à 2009, d'une augmentation prioritaire, à hauteur de 120 millions d'euros par an.

L'enveloppe de la DSU doit ainsi doubler à l'issue de cette période, par rapport à son montant de 2004.

Synthèse des montants versés au titre de la DSU depuis 1997

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Montant

330,1

346,8

502,7

574,8

575,2

592,7

614,9

635

759,6

879,6

Evolution en %

+ 5,1

+ 44,9

+ 14,3

+ 0,1

+ 3

+ 3,7

+ 3,3

+ 19,6

+ 15,8

Source : DGCL

*
* *

* 1 L'alourdissement de la dépense fiscale liée au prêt à taux zéro (PTZ) a été compensée par l'économie réalisée sur l'épargne logement.

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