EXAMEN DES ARTICLES

Pour un certain nombre d'articles, l'Assemblée nationale a accepté le dispositif voté par le Sénat en première lecture n'adoptant que des amendements rédactionnels.

Votre commission, constatant que ces modifications techniques ne posent aucune difficulté et n'ayant pas, pour sa part, de nouveaux amendements à vous présenter sur ces dispositifs, vous propose d'adopter ces articles sans modification et sans qu'il soit nécessaire d'en détailler à nouveau l'examen.

Ainsi en est-il des articles 20, 23, 24, 30, 37, 44, 46, 50 et 51.

CHAPITRE PREMIER - DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article premier (art. L. 2211-1, L. 2211-3, L. 2215-2, L. 2512-15, L. 3214-1 du code général des collectivités territoriales et art. L. 2211-4, L. 2211-5, L. 2512-13-1, L. 5211-59 et L. 5211-60 nouveaux du même code) : Animation et coordination de la politique de prévention de la délinquance par le maire

Cet article affirme le rôle privilégié du maire en matière de prévention de la délinquance. Il s'agit avant toute chose d'une reconnaissance emblématique qui entérine la forte montée en puissance des municipalités dans le champ de la sécurité locale au cours des vingt dernières années. Cette reconnaissance par la loi doit finir d'ancrer la légitimité du maire dans ce domaine vis-à-vis des autres partenaires comme l'Etat et le département.

Le 1° bis de cet article a été inséré par le Sénat en première lecture à la suite d'un amendement de notre collègue Catherine Troendle 2 ( * ) . Son objet est d'améliorer l'information du maire en cas de survenance d'infractions d'une certaine gravité sur le territoire de sa commune. En effet, l'article L. 2211-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « les maires sont informés sans délai par les responsables locaux de la police ou de la gendarmerie des infractions causant un trouble grave à l'ordre public commises sur le territoire de leur commune, dans le respect des dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale » 3 ( * ) .

Toutefois, cette obligation d'information semblant inégalement respectée, le Sénat a souhaité la consolider en l'élargissant à l'ensemble des troubles à l'ordre public sans considération de leur gravité.

L'Assemblée nationale a approuvé cette modification. Elle a souhaité aller plus loin en renforçant parallèlement l'information des maires par les parquets.

Un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale a réécrit l'article L. 2211-3 du CGCT précité afin de prévoir que le procureur de la République informe les maires , à leur demande , des suites judiciaires données aux infractions causant un trouble à l'ordre public commises sur le territoire de leur commune. Le maire saurait ainsi si le procureur a décidé de classer sans suite, de demander un complément d'enquête, un renvoi au tribunal de police ou en correctionnelle ou encore l'ouverture d'une instruction.

Ces dispositions viendraient compléter l'article 40-2 du code de procédure pénale qui fait déjà obligation au procureur d'aviser toute autorité constituée 4 ( * ) , tout officier public ou tout fonctionnaire des suites judiciaires qui ont été données aux crimes et délits signalés par eux en application de l'article 40 de ce même code. Par « suites judiciaires », il faut entendre les classements sans suite, les poursuites et les mesures alternatives aux poursuites.

A cet égard, l'article 4 bis du présent projet de loi, introduit en première lecture par l'Assemblée nationale contre l'avis du gouvernement, tend à accroître encore l'information dont bénéficieraient ces autorités de la part du procureur de la République. Le procureur devrait les informer systématiquement de la teneur de la décision définitive rendue ainsi que de l'existence d'un appel, lorsque les faits dénoncés ont donné lieu à un jugement.

Cette nouvelle obligation risque d'alourdir excessivement la charge de travail des procureurs de la République. C'est la raison pour laquelle votre commission vous soumet à l'article 4 bis un amendement de suppression de cet article.

Toutefois, considérant que le maire peut avoir un intérêt à connaître la teneur d'un jugement définitif rendu sur des faits qu'il a signalé, votre commission vous propose un amendement de réécriture de l'article L. 2211-3 du CGCT afin :

- de préciser ce qu'il faut entendre par l'expression « suites judiciaires » ;

- de prévoir que le procureur de la République informe le maire, à sa demande, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés, lorsque ces décisions concernent des infractions signalées par lui à ce magistrat. Le dispositif de l'article 4 bis du présent projet de loi serait donc partiellement conservé en restreignant son application au seul maire sur sa demande.

Le 2° de cet article , qui insère un nouvel article L. 2211-4 dans le CGCT, est la disposition la plus importante. Il dispose que « le maire anime, sur le territoire de la commune, la politique de prévention de la délinquance et en coordonne la mise en oeuvre ».

Par ailleurs, il rend obligatoire dans les communes de plus de 10.000 habitants les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) présidés par le maire.

Le Sénat avait adopté trois amendements tendant :

- à bien marquer que ce rôle de coordonnateur du maire n'empiète en aucun cas sur les compétences du département en matière d'action sociale ;

- à permettre au maire de déléguer à un de ses adjoints la présidence du CLSPD :

- à prévoir que la création d'un CLSPD est facultative dans les communes membres d'un établissement de coopération intercommunale compétent en matière de prévention de la délinquance et doté d'un conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance.

Outre deux amendements de précision et de coordination, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements.

Le premier, présenté par M. Pierre Cardo, étend l'obligation de créer un CLSPD aux communes de moins de 10.000 habitants comprenant une zone urbaine sensible (ZUS). L'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement du territoire définit les ZUS comme des zones « caractérisées par la présence de grands ensembles ou de quartiers d'habitat dégradé et par un déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi. Elles comprennent les zones de redynamisation urbaine et les zones franches urbaines. [...] La liste des zones urbaines sensibles est fixée par décret ».

Le second amendement est un amendement du rapporteur qui insère un nouvel article L. 2211-5 dans le CGCT. Il autorise la constitution au sein des CLSPD de groupes de travail et d'échange d'informations à vocation territoriale ou thématique, dont les membres seraient autorisés à échanger des informations à caractère confidentiel. Les informations ainsi échangées ne pourraient être communiqués à des tiers.

En première lecture au Sénat, votre commission et le gouvernement avaient donné un avis défavorable à un amendement autorisant les membres composant les CLSPD à échanger toute information nécessaire à l'efficacité de leurs interventions respectives. La principale raison était que les CLSPD réunissent un trop grand nombre d'acteurs.

La solution proposée par l'Assemblée nationale est un juste compromis. Par souci de cohérence, votre commission a adopté un amendement au 6° du présent article étendant cette faculté au conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance.

Dans la rédaction du projet de loi initial, le 4° du présent article précisait que les actions de prévention de la délinquance conduites par les collectivités territoriales, pour l'essentiel les communes, devaient être compatibles avec le plan de prévention de la délinquance arrêté par le préfet. Le Sénat, à l'initiative de votre commission, a souhaité assouplir cette règle en prévoyant uniquement que ces actions ne devraient pas être incompatibles avec le plan départemental de prévention de la délinquance. Excepté un amendement de précision, l'Assemblée nationale a laissé ce dispositif inchangé.

Les 3° et 4° bis du présent article sont relatifs au cas particulier de Paris. Le préfet de police et le maire de Paris y animeraient et coordonneraient conjointement la politique de prévention de la délinquance, de la même façon qu'ils coprésideraient le CLSPD. Le Sénat, à l'initiative de votre rapporteur, avait adopté un amendement de cohérence précisant que les actions de prévention de la délinquance conduites par la commune et le département de Paris ne devaient pas être incompatibles avec le plan de prévention de la délinquance arrêté conjointement par le préfet de Paris et le préfet de police.

L'Assemblée nationale a simplement adopté deux amendements de précision.

Le 5° du présent article aménage les relations entre le département et les communes en matière de prévention de la délinquance. Le projet de loi prévoit :

- d'une part, que « les actions qui concourent à la politique de prévention de la délinquance » sont une des composantes des actions sanitaires et sociales relevant de la compétence du conseil général ;

- d'autre part, que pour la mise en oeuvre de ces actions de prévention de la délinquance, le département doit conclure avec chaque commune ou EPCI intéressé une convention déterminant les territoires prioritaires, les moyens communaux et départementaux engagés et leur mode de coordination ainsi que l'organisation du suivi et de l'évaluation des actions de prévention de la délinquance mises en oeuvre. Cela signifie que si un département souhaite mener des actions de prévention de la délinquance sur le territoire d'une commune, il sera obligé de se coordonner avec celle-ci.

Toutefois, afin de ne pas alourdir inutilement la mise en oeuvre du dispositif, le Sénat, par la voie d'un amendement de notre collègue Louis de Broissia et du groupe UMP, n'a rendu obligatoire la signature d'une convention qu'avec les communes de plus de 10.000 habitants ou les EPCI à fiscalité propre exerçant la compétence relative à la prévention de la délinquance. Ces communes et EPCI avaient pour point commun d'être obligatoirement dotés d'un CLSPD ou d'un conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance.

L'Assemblée nationale n'a pas apporté de modifications sur ce dernier point. Toutefois, du fait de son amendement précité étendant aux communes de moins de 10.000 habitants comprenant une ZUS l'obligation de créer un CLSPD, elle a augmenté le nombre de communes potentiellement concernées par la conclusion d'une convention avec le département.

L'Assemblée nationale a en revanche adopté un amendement présenté par M. Noël Mamère précisant que « le conseil général concourt aux actions de prévention de la délinquance, dans le cadre de l'exercice de ses compétences d'action sociale ». Il semble toutefois que l'apport de cette précision soit très marginal, le présent article le prévoyant déjà peu ou prou.

Le 6° de cet article est relatif à l'intercommunalité. Le projet de loi initial ne modifiait pas l'équilibre législatif en matière de répartition des pouvoirs de police entre les communes membres et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Il prévoyait que lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre exerce la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention, son président anime et coordonne les actions qui concourent à l'exercice de cette compétence. Les intercommunalités ainsi visées sont les communautés urbaines et les communautés d'agglomération 5 ( * ) et, le cas échéant, les communautés de communes si elles ont décidé d'exercer cette compétence. Le président de l'intercommunalité présiderait un conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD), ce dernier étant obligatoire. Rappelons que le 2° du présent article rend facultative la création d'un CLSPD dans les communes de plus de 10.000 habitants membres d'un tel EPCI.

Le Sénat n'a pas modifié ce dispositif. En revanche, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Serge Grouard, contre l'avis de la commission, tendant à rendre facultative la création d'un CISPD au sein des EPCI à fiscalité propre compétents en matière de prévention de la délinquance. Le projet de loi initial la rendait obligatoire. Cette inversion du principe est justifiée selon l'auteur de l'amendement par les risques d'interférence et de juxtaposition entre le CISPD et les CLSPD éventuels des communes membres.

Votre commission estime au contraire que la compétence affirmée de ces EPCI entraîne en toute logique la création obligatoire d'un CISPD pour les mêmes raisons que celles justifiant que les communes de plus de 10.000 habitants soient désormais obligées de se doter d'un CLSPD. Elle vous présente donc un amendement en ce sens.

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier ainsi modifié .

Article premier bis (art. L. 121-1-1 nouveau du code de l'action sociale et des familles) : Présence de travailleurs sociaux dans les commissariats et les groupements de gendarmerie

Introduit par le Sénat, cet article est issu d'un amendement du groupe socialiste rectifié à la demande du Gouvernement. Bien que le caractère législatif de cet article ne soit pas évident, il consacre la présence de travailleurs sociaux dans les commissariats en renvoyant à une convention entre l'État, le département et, le cas échéant, la commune, les modalités d'intervention de ces travailleurs sociaux. Toutefois, il ne rend pas obligatoire la présence d'un travailleur social dans chaque commissariat, ce choix étant renvoyé au niveau local.

Les auteurs de l'amendement soulignaient que « le travailleur social peut constituer une interface entre la police et le monde social, alors que ces deux parties ne communiquent pas toujours facilement : elles obéissent parfois à des logiques, à des idéologies différentes. Le travailleur social permet, en quelque sorte, de les souder et d'obtenir des informations à la fois plus fiables et plus rapides et un meilleur ciblage des personnes vulnérables ou en situation de risque. Le conseil général est ainsi à même de mieux travailler à la prévention. Par ailleurs, et c'est ce qui justifie la participation de l'État au financement de ces postes, les travailleurs sociaux doivent contribuer à la reconnaissance du droit des victimes. Ils améliorent les conditions d'accueil des victimes ».

Ces dispositifs ne sont pas nouveaux. Au 1 er janvier 2006, 26 commissariats bénéficiaient d'un travailleur social. Dans le courant de l'année 2007, environ 46 postes devraient exister en collaboration avec les collectivités volontaires. Il faut ajouter l'arrivée d'une trentaine de psychologues dans les commissariats au 1 er janvier 2007. Ils devraient être particulièrement utiles pour mieux appréhender les violences intrafamiliales.

Le présent article permet de formaliser la nécessaire concertation entre l'État et les collectivités susceptibles de mettre à disposition un travailleur social : il s'agira généralement du département compte tenu de ses compétences d'action sociale, mais aussi parfois, comme le montrent les expériences de terrain, de la commune.

Toutefois, le dispositif voté par le Sénat ne s'appliquait qu'à la police nationale. Au cours de la séance publique, le président Jean-Jacques Hyest avait fait remarquer qu'il existait de très grosses brigades de gendarmerie, parfois situées dans les zones périurbaines, et qu'il serait donc utile de profiter de la navette pour étendre ce dispositif à la gendarmerie.

A l'Assemblée nationale, un amendement du rapporteur a concrétisé cette idée en prévoyant la présence de travailleurs sociaux au sein des groupements de la gendarmerie nationale. Le groupement sera en réalité le niveau de gestion de ces travailleurs sociaux, qui exerceront ensuite dans les brigades territoriales.

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier bis sans modification .

Article 2 (art. L. 121-2 et L. 121-6 du code de l'action sociale et des familles ; art. L.5214-16, L. 5215-20 et L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales) : Délégation de compétences du département aux communes en matière d'action sociale

Cet article tend, d'une part, à accroître les compétences du département en matière de prévention de la délinquance et, d'autre part, à assouplir les conditions dans lesquelles le département peut déléguer à une commune tout ou partie de ses compétences en matière d'action sociale.

L'article L. 121-6 du code de l'action sociale et des familles, issu de l'article 33 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983, offre déjà aux départements la possibilité de déléguer aux communes les compétences qui, dans le domaine de l'action sociale, leur sont attribuées en vertu de l'article L. 121-1 du code de l'action sociale et des familles. Cette faculté a néanmoins été très peu utilisée.

Les articles L. 5215-20 (III) et L. 5216-5 (V) du CGCT, issus de la loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, ouvrent la même possibilité de délégation des compétences des départements en matière d'aide sociale aux communautés urbaines et aux communautés d'agglomération.

Une des explications du peu de succès de ces délégations de compétences serait qu'en toute rigueur, la loi n'autoriserait qu'une délégation en bloc de l'action sociale et non des délégations partielles.

C'est la raison pour laquelle le 2° du présent article réécrit l'article L. 121-6 du code de l'action sociale et des familles afin d'autoriser des délégations partielles de compétence .

Par souci de cohérence, le Sénat sur l'initiative de votre commission a calqué la rédaction des articles L. 5215-20 (III) et L. 5216-5 (V) du CGCT sur celle proposée pour l'article L. 121-6 du code de l'action sociale et des familles. Ce qui peut être délégué aux communes doit pouvoir l'être dans les mêmes conditions aux communautés urbaines et aux communautés d'agglomération compétentes en matière d'action sociale.

L'Assemblée nationale a complété le dispositif en étendant aux communautés de communes la faculté d'exercer tout ou partie des compétences du département. Cette faculté ne serait toutefois ouverte qu'aux communautés de communes ayant choisi d'exercer la compétence d'action sociale d'intérêt communautaire comme le leur permet l'article L. 5214-16 du CGCT.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 sans modification .

Article 2 bis A (nouveau) (art. L. 2212-9-1 nouveau du code général des collectivités territoriales) : Recrutement d'agents de police municipale communs à plusieurs communes

Le présent article, introduit par les députés à l'initiative de M. Jean-Christophe Lagarde, doit permettre aux communes limitrophes de moins de 20.000 habitants et regroupant au total moins de 50.000 habitants d'avoir plusieurs agents de police municipale en commun, compétents sur le territoire de chacune de ces communes. Pendant l'exercice de leurs fonctions sur le territoire d'une commune, les agents resteraient sous l'autorité du maire de cette commune.

L'objectif est de permettre à des municipalités moyennes ou petites de mutualiser le coût d'une police municipale.

L'article L. 2212-5 du CGCT autorise déjà les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre 6 ( * ) à recruter un ou plusieurs agents de police municipale, en vue de les mettre à disposition de l'ensemble des communes de l'EPCI. Cette décision est prise après délibération de deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressés représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou de la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population.

Les policiers municipaux intercommunaux : une gestion complexe

La question de l'intercommunalité en matière de police municipale conduit à distinguer l'aspect fonctionnel, c'est-à-dire l'étendue des compétences et l'exercice des modalités de celles-ci, et l'aspect organique qui concerne les personnels et les matériels. Cette situation aboutit à une dualité d'autorité qui est source de complexité : l'EPCI devient l'autorité de gestion administrative des agents de police municipale intercommunaux tandis que la commune demeure l'autorité d'emploi fonctionnelle de ces mêmes agents.

Ce dualisme a diverses incidences sur le régime des polices municipales. Tout d'abord, aux termes de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, il revient à l'autorité de nomination, c'est-à-dire au président de l'EPCI, de demander l'agrément auprès du représentant de l'Etat et du procureur de la République 7 ( * ) . Ce même texte prévoit qu'il est consulté en cas de suspension ou de retrait de l'agrément. Il lui revient également de proposer à l'agent concerné un reclassement dans un autre cadre d'emplois.

Pour ce qui concerne les conventions de coordination 8 ( * ) , c'est-à-dire les conventions qui assurent la coordination des interventions de la police municipale avec celles de la police et de la gendarmerie, selon les termes de l'article L. 2212-6 du code général des collectivités territoriales les maires et les préfets en sont les seuls signataires. Toutefois, en pratique, le représentant de l'Etat n'accepte de conclure ces conventions qu'à la suite d'une concertation au niveau intercommunal, afin de garantir la logique et la cohérence des conventions qui devront s'appliquer dans un cadre intercommunal.

S'agissant de l'armement des agents de police municipale, l'article L. 412-51 du code des communes dispose que ceux-ci peuvent être autorisés par le préfet à porter une arme « sur demande motivée du maire ». La décision de déposer une telle demande relève donc toujours du pouvoir d'appréciation du maire ; le président de l'EPCI n'est pas compétent en ce domaine.

Toutefois, lorsque des demandes d'armement émanent de maires employant des agents de police municipale intercommunaux, les préfets sont invités par le ministère à les examiner sur un plan intercommunal, c'est-à-dire à donner une réponse identique à chacun d'entre eux en fonction des risques évalués à l'échelle intercommunale, de façon à avoir un minimum de cohérence.

L'article L. 2213-17 du CGCT prévoit des dispositions analogues, mais plus souples, pour les gardes champêtres. Il dispose que plusieurs communes peuvent avoir un ou plusieurs gardes champêtres en commun. Aucune condition de seuil de population n'est posée.

Cet article prévoit également qu'un EPCI peut recruter un ou plusieurs gardes champêtres compétents dans chacune des communes concernées 9 ( * ) . Leur nomination est prononcée conjointement par le maire de chacune des communes membres et le président de l'EPCI 10 ( * ) . Pendant l'exercice de leurs missions sur le territoire d'une commune, ils sont placés sous l'autorité du maire de cette commune.

Le texte du projet de loi viendrait ajouter un nouveau dispositif.

Les communes limitrophes de moins de 20.000 habitants et regroupant au total moins de 50.000 habitants pourraient utiliser en commun plusieurs agents de police municipale, compétents sur le territoire de chacune de ces communes. Pendant l'exercice de leurs missions sur le territoire d'une commune, les agents resteraient sous l'autorité du maire de cette commune. Votre commission vous soumet un amendement afin de permettre l'emploi si nécessaire d'un seul agent de police municipale.

Toutefois, légalement, les agents ne seraient employés que par une seule des communes. Il ne s'agirait pas à proprement parler d'agents de police municipale intercommunaux. Une convention entre l'ensemble des communes intéressées préciserait les modalités d'organisation et de financement.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit que ces communes seraient obligées de se doter d'une convention de coordination avec les services de l'Etat. Le droit commun ne la rend obligatoire qu'à partir d'un seuil de cinq agents de police municipale.

Concernant le port d'arme , le texte proposé tire les conséquences de l'expérience acquise en matière d'agents de police municipale intercommunaux. D'ores et déjà, le port d'arme demandé pour des agents de police municipale intercommunaux doit être demandé par chaque maire, mais le représentant de l'Etat examine la demande sur un plan intercommunal afin de délivrer des autorisations identiques 11 ( * ) . Par ailleurs, en ce qui concerne l'autorisation d'acquisition et de détention des armes, le représentant de l'Etat recommande 12 ( * ) qu'à la différence des autorisations de port d'arme, la demande soit présentée par une seule commune. Cette commune doit conserver les armes dans un coffre-fort ou une armoire forte situés dans une pièce sécurisée de son poste de police municipale et doit tenir un registre d'inventaire.

Le projet de loi reprend ces mécanismes et prévoit que la demande de port d'arme est établie conjointement par l'ensemble des maires de ces communes. Ces communes désigneraient parmi elles celle qui serait autorisée par le préfet à acquérir et détenir les armes.

Enfin, afin d'éviter des superpositions de régimes différents d'agents de police municipale, le projet de loi prévoit que les communes appartenant à un EPCI à fiscalité propre ne peuvent mettre en commun des agents dans les conditions du présent article lorsque l'EPCI recrute déjà des agents de police municipale intercommunaux dans les conditions précitées de l'article L. 2212-5 du CGCT. Votre commission vous soumet un amendement évitant également la cohabitation de régimes différents dans le cas où l'EPCI se doterait d'agents intercommunaux après la conclusion d'une convention dans les conditions du présent article.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 bis A ainsi modifié.

Article 2 bis : Création d'un Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance

Le présent article, inséré par le Sénat en première lecture à l'initiative de votre commission des lois, crée un Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance.

Trois objectifs justifient la création de ce fonds :

- premièrement, assurer une meilleure lisibilité des financements des actions de prévention de la délinquance, actuellement réparties entre une douzaine de programmes ;

- deuxièmement, renforcer l'efficacité des actions menées localement en développant leur évaluation obligatoire, dont les résultats pourraient conditionner la reconduction éventuelle ;

- troisièmement, cibler les actions de prévention de la délinquance menées sur les territoires définis comme prioritaires en la matière.

Votre rapporteur avait estimé le montant moyen des crédits existants susceptibles d'être rassemblés au sein de ce fonds à environ 30 millions d'euros. Le débat en séance publique fut l'occasion pour votre rapporteur de souligner que cet amendement avait pour principal vertu de mettre en place un véhicule financier, à charge de profiter de la navette parlementaire et du projet de loi de finances pour préciser les modalités de fonctionnement du fonds et de prévoir des financements supplémentaires. A cet égard, même sans financements supplémentaires, la création de ce fonds devrait permettre une meilleure utilisation de crédits existants aujourd'hui éparpillés. A moyens constants, la plus-value devrait être réelle.

Sur de nombreux bancs, la création d'un financement supplémentaire par rapport aux crédits existants fut toutefois réclamée. Le gouvernement n'avait pas fermé la porte à une telle évolution demandant au Sénat de mettre à profit la navette parlementaire pour améliorer le texte.

Tenant compte de ce débat et des remarques de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le gouvernement a donc présenté un amendement de réécriture de l'ensemble de l'article 2 bis .

Cet amendement modifie sensiblement le dispositif tout en respectant son esprit.

En premier lieu, le fonds serait adossé à l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSE) 13 ( * ) créée par la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances. L'agence serait l'autorité de gestion .

Cette solution doit permettre de mieux faire le lien entre politique de la ville et prévention de la délinquance. En effet, l'ACSE, dont les préfets sont les délégués territoriaux, financera la prochaine génération des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), dont la prévention de la délinquance sera l'un des axes prioritaires. Une partie des moyens de l'ACSE devrait donc être allouée au fonds.

En deuxième lieu, les moyens de ce fonds devraient servir à financer des actions dans le cadre des plans départementaux de prévention de la délinquance 14 ( * ) et des CUCS . Si les CUCS s'adressent aux quartiers prioritaires de la politique de la ville, les plans de prévention de la délinquance ne sont pas aussi ciblés. Le fonds pourra donc financer des actions réalisées par des communes non concernées par les CUCS.

Le texte adopté par le Sénat en première lecture n'était pas aussi précis. Toutefois, le dispositif proposé est cohérent et fixe un cadre pour l'emploi de ces moyens.

En troisième lieu, le présent article précise les ressources dont disposera le fonds. Outre la part des crédits délégués par l'Etat à l'ACSE 15 ( * ) pour financer des actions de prévention de la délinquance (des crédits existants), le fonds recevrait une part du produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation.

Il reviendrait à la loi de finances de préciser le montant ainsi que l'origine de ces crédits supplémentaires. En effet, les amendes forfaitaires de la police de la circulation sont affectées soit aux collectivités territoriales, soit au budget de l'Etat.

Le principe posé par l'article L. 2334-24 du CGCT est que le produit des amendes de police relatives à la circulation est réparti par le comité des finances locales entre les communes et les établissements publics intéressés pour améliorer les transports en commun. Toutefois, par dérogation à ce principe, le produit des amendes perçu par le système de contrôle-radars automatisé est affecté au budget de l'Etat. Les articles 49 et 62 de la loi de finances pour 2006 disposent que :

- une fraction, égale à 60 %, du produit des amendes infligées en raison d'infractions au code de la route et perçues par la voie de systèmes automatisés, dans la limite de 140 millions d'euros, est affectée au compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ;

- une fraction, égale à 40 %, de ces mêmes amendes, dans la limite de 100 millions d'euros, est affectée à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ;

- le solde éventuel, c'est-à-dire lorsque le produit total dépasse 240 millions d'euros, est affecté aux collectivités territoriales dans les conditions mentionnées à l'article L. 2334-24 du CGCT. Pour 2006, les prévisions évaluent ce solde à 100 millions d'euros.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, le gouvernement avait indiqué que ces ressources supplémentaires, d'un montant d'environ 50 millions d'euros, seraient prélevées sur le produit des contrôle-radars automatisés. Depuis, la loi de finances rectificative pour 2006 a été adoptée et prévoit, à l'initiative d'un amendement du gouvernement, l'affectation pour la seule année 2006 de 50 millions d'euros à l'ACSE afin de financer des actions de prévention de la délinquance. Ces 50 millions proviennent du solde excédentaire du produit des contrôle-radars automatisés normalement destiné aux collectivités territoriales.

En dernier lieu, le texte proposé par le gouvernement précise les modalités de fonctionnement du fonds et d'attribution des crédits .

Il reviendrait au comité interministériel de prévention de la délinquance (CIPD) de fixer les orientations et de coordonner l'utilisation des crédits du fonds. En application de ces orientations, le conseil d'administration de l'ACSE approuverait dans une seconde phase les programmes d'intervention correspondants et répartirait les crédits entre les départements ; à charge ensuite pour les préfets de décider de l'utilisation de ces fonds en fonction des plans départementaux de prévention de la délinquance et des CUCS et en concertation avec les instances territoriales 16 ( * ) de prévention de la délinquance. Le principe d'une évaluation annuelle de ces crédits au niveau des instances territoriales de prévention, proposé par le Sénat, est maintenu et complété par la présentation d'une synthèse au CIPD chaque année.

Ces dispositions consacrent dans la loi le comité interministériel de prévention de la délinquance créé par le décret n° 2006-52 du 17 janvier 2006. Par ailleurs, elles érigent le CIPD, présidé par le Premier ministre, en autorité de pilotage du fonds, l'ACSE étant chargé de la mise en oeuvre.

Cette dichotomie peut se justifier par l'objet même du fonds interministériel de prévention de la délinquance. Des connexions fortes existent avec la politique de la ville, mais la prévention de la délinquance n'en est pas un sous-ensemble.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 bis sans modification .

Article 3 (art. 13-3 nouveau et 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ; art. 1er de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959) : Participation des autorités organisatrices de transports collectifs de voyageurs à la prévention de la délinquance

Cet article vise à créer, à la charge des autorités organisatrices de transports collectifs de voyageurs, une obligation de concourir aux actions de prévention de la délinquance et de sécurisation des usagers. Les articles 46 et 47 du projet de loi tendent par ailleurs à modifier la législation relative à la police des transports.

En première lecture, le Sénat n'avait adopté qu'un seul amendement de précision.

L'Assemblée nationale a apporté trois modifications.

A l'initiative de M. Jean-Christophe Lagarde, les députés ont précisé que le concours des autorités organisatrices de transports à la prévention de la délinquance devrait se dérouler dans le cadre d'une convention avec l'État .

L'objet de cet amendement est de rappeler que l'Etat reste un acteur indispensable de cette politique et qu'il ne peut l'abandonner aux autorités organisatrices de transports collectifs de voyageurs.

L'obligation de concourir à la prévention de la délinquance ne pèsera par conséquent sur elles qu'à compter de la conclusion de la convention.

A l'initiative du rapporteur M. Philippe Houillon, l'obligation de concourir à la sécurisation des usagers a été étendue à la sécurisation des personnels.

A l'initiative du groupe socialiste, l'Assemblée nationale a précisé que le concours des autorités organisatrices de transports à la prévention de la délinquance pourrait notamment être formalisé dans le cadre des contrats locaux de sécurité à thématique « transports ».

En effet, de très nombreux contrats locaux de sécurité comprennent un volet « transports » et il existe même des contrats locaux de sécurité à thématique « transports ».

Toutefois, cette disposition pose différents problèmes. Outre qu'elle n'est pas contraignante du fait de l'usage du « notamment », elle a pour effet de consacrer dans la loi les contrats locaux de sécurité à thématique « transports » alors même que les contrats locaux de sécurité (CLS) classiques relèvent uniquement du niveau de la circulaire.

Cette précision semble également redondante avec l'amendement de M. Jean-Christophe Lagarde exigeant la conclusion d'une convention avec l'Etat. Les contrats locaux de sécurité associent en effet toujours l'Etat aux partenaires locaux. Votre commission vous soumet par conséquent un amendement supprimant cette précision.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié .

Article 4 bis (nouveau) (art. 40-2 du code de procédure pénale) : Information des autorités sur la teneur de la décision de justice rendue à l'occasion des faits signalés

Le présent article inséré dans le projet de loi par les députés à l'initiative de M. Philippe Houillon, contre l'avis du Gouvernement, fait obligation au procureur de la République d'informer les autorités mentionnées par l'article 40 du code de procédure pénale de la teneur de la décision de justice -ou, le cas échéant, de l'existence d'un appel- lorsque les faits dénoncés ou signalés par ces autorités ont donné lieu à un jugement.

Cette disposition se veut en quelque sorte le pendant de l'obligation, fixée par l'article 40 du code de procédure pénale, pour « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit », d'en informer sans délai le procureur de la République.

D'ores et déjà, en vertu de l'article 40-2 du code de procédure pénale, le procureur de la République avise ces autorités des poursuites ou des mesures alternatives aux poursuites décidées à la suite des faits qu'elles lui ont signalés.

De nombreux maires ont regretté, lors des auditions organisées à l'initiative de votre rapporteur pour préparer l'examen en première lecture du projet de loi, de n'être qu'exceptionnellement informés de la sanction prononcée après les infractions qu'ils avaient signalées. Aussi, conformément à l'esprit général du présent texte et au rôle reconnu au maire en matière de prévention de la délinquance, semble-t-il opportun de franchir un degré supplémentaire dans cette information en y intégrant la teneur même de la décision de justice.

Cependant, tout en approuvant pleinement cette disposition, votre commission vous propose de l'insérer à l'article premier qui prévoit l'information des maires sur les infractions concernant un trouble grave à l'ordre public. Elle suggère également de limiter l'obligation du procureur à l'information des seuls maires (et non de toutes les autorités visées par l'article 40) et à la condition que ces derniers en aient fait la demande.

Votre commission vous propose de supprimer l'article 4 bis .

* 2 Votre commission s'en était remise à la sagesse du Sénat.

* 3 Inséré par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

* 4 Dont le maire.

* 5 Les articles L. 5215-20 et L. 5216-5 du CGCT disposent respectivement que les communautés urbaines et les communautés d'agglomération exercent de plein droit la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance.

* 6 Les communautés de communes, les communautés d'agglomération, les communautés urbaines et les syndicats d'agglomération nouvelle. Il existe 2.572 EPCI à fiscalité propre.

* 7 Art. L. 412-49 du code des communes.

* 8 Ces conventions sont obligatoires dès lors qu'un service de police municipale comporte au moins cinq agents. Elles sont également obligatoires lorsque la police municipale est armée.

* 9 Les règles de majorité ne sont pas précisées.

* 10 Pour les agents de police municipale recrutés par un EPCI, la nomination est prononcée par le seul président de l'EPCI.

* 11 En théorie, seules certaines communes pourraient demander le port d'armes. Les policiers municipaux seraient alors contraints d'abandonner leurs armes lors de leur entrée sur le territoire d'une commune qui n'aurait pas sollicité pareille autorisation.

* 12 Aucun texte normatif ne détaille la procédure à suivre.

* 13 Cet établissement public administratif est sous la tutelle du ministre chargé de la cohésion sociale et du ministre chargé de la promotion de l'égalité des chances.

* 14 L'article premier du présent projet de loi crée le plan de prévention de la délinquance arrêté par le préfet dans chaque département et avec lequel les actions de prévention de la délinquance conduites par les collectivités territoriales ne doivent pas être incompatibles. L'utilisation du fonds par les préfets sera un moyen pour inciter les communes à mettre en oeuvre des actions compatibles avec le plan.

* 15 Pour 2007, le budget de l'ACSE s'élève à environ 500 millions d'euros.

* 16 Notamment les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

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