B. UN PARI SUR L'AVENIR QUI DEVRAIT BÉNÉFICIER AUX INVESTISSEURS

1. Une transposition exemplaire et un impact concret important

Ainsi que votre rapporteur général a eu l'occasion de le souligner à plusieurs reprises, et en particulier lors de l'examen en octobre 2007 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans les domaines économique et financier 13 ( * ) , la transposition de la directive MIF témoigne d'une nouvelle approche et est concomitante de la volonté de la Commission européenne comme de l'AMF de mettre en place une « meilleure régulation ». Celle-ci implique une concertation approfondie avec les professionnels des marchés et associations, et est susceptible de se traduire par un moindre formalisme et une plus grande place accordée à l'autorégulation et aux codes de conduite.

La mise en oeuvre de la directive MIF - dans sa lettre et dans son esprit - se traduit actuellement par d'importants investissements (formation, systèmes d'information, refonte des processus et organisations commerciales...) pour les banques et PSI et par un processus de concertation entre régulateurs européens, notamment sous l'égide du Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM). Compte tenu des marges d'interprétation et de discussion sur de nombreux points de la directive de nature moins prescriptive 14 ( * ) , les régulateurs doivent adopter des instructions, harmoniser leur doctrine et appliquer les recommandations du CERVM.

A cet égard, la directive MIF est aussi un levier de modernisation pour les régulateurs financiers qui, au même titre que les autorités de contrôle en matière de concurrence, doivent intensifier leurs échanges dans une logique de réseau et mieux harmoniser leurs pratiques. Votre rapporteur général juge que ce nouveau seuil de la régulation européenne n'est sans doute qu'une étape vers, à long terme, l'instauration d'un régulateur financier européen unique.

2. Un défi stratégique, économique et commercial

Votre rapporteur général considère que la directive MIF représente donc un pari à de nombreux titres :

- sur la capacité des opérateurs financiers à internaliser leur propre discipline et à se conformer à des codes de conduite et « meilleures pratiques » sans la contrainte législative et réglementaire ;

- au regard d'un meilleur fonctionnement des marchés : il s'agit de se prémunir contre le risque pressenti d'une fragmentation des bassins de liquidité, et de garantir la « meilleure exécution » d'un ordre portant sur un instrument financier qui est négocié concurremment sur plusieurs places, réglementées ou non ;

- sur la capacité des régulateurs à établir un jeu coopératif, non seulement aux stades de l'information et de l'interprétation, mais encore de la doctrine, de la recommandation et de la sanction. La directive MIF peut aussi servir la promotion d'un modèle européen de régulation financière , en particulier auprès des pays émergents (Chine, Inde, Russie), qui cherchent à mettre en place des normes cohérentes avec le développement accéléré de leurs places de marché ;

- l'allègement des contraintes réglementaires et de l'obligation de conseil sur certains services et types d'ordres (transactions par blocs, internalisation systématique, services d'« exécution simple »), confortée par l'accentuation logique de la différenciation entre clientèles profane et professionnelle, doit à la fois assurer la fluidité des transactions et garantir la protection de la « partie faible » qu'est le client non professionnel. L'information sur la politique d'exécution des ordres et les frais totaux de gestion, le principe de « meilleure exécution » et les tests d'évaluation du client sont ainsi les piliers de la nouvelle relation avec la clientèle ;

- la nouvelle réglementation est un test de pérennité économique et commerciale pour les marchés réglementés , soumis à une pression concurrentielle croissante compte tenu des perspectives de création de MTF 15 ( * ) , et dès lors tenus de mieux segmenter leur offre en fonction des besoins différenciés de la clientèle, et d'engager un important mouvement de réduction des coûts de transaction 16 ( * ) . Cette tendance est favorable aux investisseurs et confortée par la tendance au rapprochement entre grandes places de marché.

* 13 Cf. rapport n° 11 (2007-2008) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, déposé le 3 octobre 2007.

* 14 Notamment la transparence des avantages financiers reçus ou versés entre acteurs de marché (« inducements »), la déclaration aux régulateurs des transactions des succursales de groupes, la déclaration de conflits d'intérêts potentiels, ou les principes déontologiques applicables au personnel des PSI.

* 15 En particulier le projet de plate-forme dénommé « Turquoise », qui fédère sept des plus grandes banques mondiales (Citigroup, Crédit Suisse, Deutsche Bank, Goldman Sachs, Merril Lynch, Morgan Stanley et UBS) et pourrait être lancé d'ici l'été 2008.

* 16 Selon des estimations mentionnées par La Tribune du 13 septembre 2007, la concurrence devrait permettre de dégager une économie de 400 millions d'euros sur la négociation des actions. Elle conduirait les opérateurs de marché à réduire leurs commissions de 20 à 50 % selon les pays, et remettrait donc en cause leurs marges opérationnelles élevées de 35 % à 55 %.

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