II. LES ÉLÉMENTS DE SOUPLESSE AUTORISÉS PAR LE PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE

Le caractère inédit, au moins sur la période récente, de la crise économique que traverse le monde conduit à utiliser la nécessaire souplesse prévue par le pacte de stabilité et de croissance.

A. DES PRÉVISIONS DE DÉFICIT PUBLIC POUR 2008 ET 2009 À AJUSTER

Selon le consensus des conjoncturistes de la mi-octobre 2008, le déficit public serait de 3 % du PIB en 2008 et 3,4 % du PIB en 2009. Le consensus est orienté à la baisse, et a évolué parallèlement à l'évolution des prévisions de croissance du PIB. Les prévisions actuelles du gouvernement ont vocation, elles aussi, à être ajustées, comme il s'y est engagé, dès que les dernières prévisions de l'INSEE seront publiées.

On rappelle que les prévisions du gouvernement ont été, pour le déficit public, les suivantes :

- PLF 2008 : 2,3 points de PIB en 2008 et 1,7 point de PIB en 2009 ;

- DOB 2009 : 2,5 points de PIB en 2008 et 2 points de PIB en 2010 ;

- PLF 2009 : 2,7 points de PIB en 2008 (soit comme en 2007) et en 2009.

1. Un déficit inférieur à 3 points de PIB en 2008 ?

a) Un déficit de 2,7 points de PIB en 2008, selon le gouvernement

Alors qu'en septembre 2007 le consensus prévoyait pour 2008 un déficit public de 2,6 points de PIB, début septembre 2008 cette prévision était de 3 points de PIB. Cette révision à la hausse est de l'ordre de grandeur que l'on pouvait attendre. En effet, les recettes publiques correspondant à peu près à la moitié du PIB, une croissance inférieure d'environ 1 point doit, logiquement, accroître le déficit public d'environ 0,5 point de PIB.

L'évolution des prévisions de solde public pour 2008

(en points de PIB)

Source : Consensus Forecasts

b) Une prévision qui semble supposer implicitement une augmentation des recettes non fiscales d'environ 5 milliards d'euros

Plusieurs éléments suggèrent que la prévision du gouvernement suppose implicitement une augmentation des recettes non fiscales d'environ 5 milliards d'euros en 2008.

Tout d'abord, la prévision initiale du gouvernement pour 2008, de 2,3 points de PIB, supposait un déficit de 2,4 points de PIB en 2007. Or, le déficit de 2007 a été de 2,7 points de PIB, ce qui mécaniquement conduit à réviser à la hausse la prévision de déficit pour 2008 de 0,2 point, si l'on considère que 0,1 point correspond à une augmentation non pérenne du déficit des collectivités territoriales, liée au cycle électoral. Si l'on ajoute à cela une croissance inférieure d'environ 1 point aux prévisions, le déficit s'en trouve accru de 0,5 point supplémentaire, ce qui porte bien le déficit à 3 points, comme le prévoit le consensus des conjoncturistes.

Surtout, comme cela a été souligné par l'OFCE 23 ( * ) , les chiffres avancés par le gouvernement ne paraissent pouvoir être mis en cohérence sans supposer une augmentation des recettes non fiscales de l'ordre de 0,25 point de PIB, soit 5 milliards d'euros en 2008, comme l'indique l'encadré ci-après.

Les prévisions de solde public du gouvernement pour 2008 supposent-elles implicitement une augmentation de 5 milliards d'euros des recettes non fiscales ?

Unité

Montant

Hypothèses du gouvernement servant de base au calcul

A

Croissance du PIB (valeur)

en %

3,5

Croissance du PIB de 1 % en volume + inflation des prix du PIB de 2,5 % (taux de 3,5 % confirmé dans le tome I du fascicule « Voies et moyens »)

B

Croissance des dépenses publiques (valeur)

3,8

Croissance des dépenses publiques déflatée de la hausse des prix à la consommation de 0,9 % + inflation des prix à la consommation de 2,9 %

C

Augmentation de la part des dépenses publiques dans le PIB

en points de PIB

0,15

~ (3,8-3,5)*0,5

D

Diminution du taux de PO

0,1

Passage d'un taux de PO de 43,3 % à 43,2 %

E

Augmentation du déficit public hors variation des recettes non fiscales

0,25

C+D

F

Déficit public de 2007

2,7

Source : Insee

G

Déficit public de 2008 recalculé, en supposant les recettes non fiscales inchangées

2,95

F+E

H

Déficit public prévu par le gouvernement

2,7

I

Ecart (augmentation des recettes non fiscales ?)

0,25*

G-H

* Soit environ 5 milliards d'euros.

Sources : Insee, documents annexés au projet de loi de finances pour 2009, calculs de votre commission des finances (d'après l'OFCE)

La nature de ces 5 milliards d'euros supplémentaires n'est cependant pas explicitée 24 ( * ) . Une telle prévision n'est évidemment pas vraisemblable.

2. Un déficit qui devrait être supérieur à 3 points de PIB en 2009

Le déficit public semble en revanche devoir être nettement supérieur à 3 points de PIB en 2009.

a) En octobre 2008, le consensus prévoyait pour 2009 un déficit de 3,4 points de PIB

Alors qu'en janvier 2008 le consensus prévoyait pour 2009 un déficit public de 2,6 points de PIB, en octobre 2008 cette prévision était de 3,4 points de PIB ( contre 2,7 points de PIB selon le gouvernement).

L'évolution des prévisions de solde public pour 2009

(en points de PIB)

Source : Consensus Forecasts

b) Une prévision vraisemblable

Les différents scénarios examinés, à titre indicatif, par votre rapporteur général, et présentés plus en détails ci-après, suggèrent que, même si le gouvernement respectait à peu près la norme de dépense des administrations publiques, le déficit public pourrait en 2009 approcher les 4 points de PIB.

Quel déficit public en 2009 si les dépenses publiques sont maîtrisées (1) ?

(en points de PIB)

2009, selon différents scénarios

2005

2006

2007

2008 (Gouvernement)*

Gouvernement

1

2

3

4

Etat

-3,0

-2,6

-2,1

-2,4

-2,4

-2,7

-3,0

-3,1

-3,0

ODAC

0,4

0,6

-0,1

0,0

0,2

0,2

0,2

0,2

0,2

APUC

-2,6

-2,0

-2,2

-2,4

-2,2

-2,5

-2,8

-2,9

-2,8

Régimes obligatoires de base

-0,8

-0,5

-0,3

-0,4

-0,5

-0,7

-0,9

-1,0

-0,9

Assurance chômage

-0,2

0,0

0,2

ND

ND

0,2

0,0

0,0

0,0

ASSOC

-0,2

-0,2

-0,1

0,0

-0,1

-0,3

-0,6

-0,8

-0,6

APUL

-0,2

-0,2

-0,4

-0,3

-0,3

-0,5

-0,6

-0,6

-0,6

APU

-3,0

-2,4

-2,7

-2,7

-2,7

-3,2

-4,0

-4,3

-4,0

* Comme cela a été indiqué ci-avant, ces prévisions semblent supposer une augmentation des recettes non fiscales de l'ordre de 0,25 point de PIB (soit 5 milliards d'euros), non explicitée.

(1) On suppose que l'objectif de dépenses du gouvernement est respecté, sauf dans le cas des dépenses des collectivités territoriales, qui augmenteraient de 2 % en volume (au lieu de 1,25 %) et, dans les scénarios impliquant une augmentation du chômage, de celles de l'assurance chômage. Il en résulte un taux de croissance en volume des dépenses des administrations publiques proche de 1,5 % en 2009.

Les différents scénarios de croissance :

1. Scénario économique du gouvernement : croissance de 1 % en 2008 et en 2009, de 2,5 % ensuite.

2. Crise brève sans récession en 2009 : croissance trimestrielle nulle en 2009, d'un peu moins de 0,6 % ensuite (soit une croissance de 0 % en 2009, 1,5 % en 2010 et 2,2 % en 2011 et 2012).

3. Crise brève avec récession en 2009 : croissance trimestrielle de -0,4 % au premier trimestre 2009, de 0 % aux trois trimestres suivants, et d'un peu moins de 0,6 % ensuite (soit une croissance de - 0,5 % en 2009, 1,5 % en 2010 et 2,2 % en 2011 et 2012).

4. Crise longue sans récession en 2009 : croissance trimestrielle nulle jusqu'à la mi-2010, puis retour progressif, jusqu'au début de 2012, à une croissance tendancielle d'un peu moins de 0,6 % par trimestre (soit une croissance de 0 % en 2009 et en 2010, de 1,5 % en 2011 et de 2,1 % en 2012).

Remarque : les scénarios 2 et 4 sont identiques en ce qui concerne l'année 2009.

Sources : présent projet de loi de programmation, projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, calculs de votre commission des finances

* 23 Eric Heyer, Christophe Blot, Marion Cochard, Hervé Péléraux, Mathieu Plane, « France : entrée dans le tunnel ? Scénarios 2008-2009 pour l'économie française », OFCE, octobre 2008.

* 24 Le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2009 prévoit (page 51) que la stabilité du solde public se décomposerait entre une amélioration de 0,5 point de PIB du « solde structurel hors soultes » - ce qui correspond à la diminution de la part des dépenses publiques dans le PIB structurel - et une détérioration de 0,5 point de PIB du solde conjoncturel, ce qui ne semble pas laisser de place à des recettes non fiscales exceptionnelles.

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