EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. AMORTIR LA CRISE AVEC UN CRÉDIT FLUIDE ET MAÎTRISÉ

Dans une économie moderne, il serait préjudiciable pour l'activité que les ménages soient obligés de financer tous leurs achats à partir d'une épargne préexistante . Une telle situation ne prévaut guère que dans certains grands pays émergents dont les systèmes financiers sont peu développés, qui connaissent en conséquence un excédent structurel d'épargne (permettant de financer la consommation des pays riches) et dont le schéma de croissance repose essentiellement sur le dynamisme des exportations.

Ainsi que le rappelle Jean-Paul Redouin 2 ( * ) , « le crédit est sain quand il anticipe une évolution durable et permanente des revenus et contribue à lisser dans le temps des chocs temporaires » . En revanche, « il devient nocif quand il se fonde sur une extrapolation excessive de valeurs d'actifs qui atteignent des niveaux spéculatifs ». Dans la période précédant la crise actuelle, les ménages de nombreux pays ont été incités à gager un patrimoine immobilier dont la valeur augmentait fortement pour obtenir de nouveaux crédits à la consommation. Puis ces ménages ont été confrontés à de graves problèmes de solvabilité à la suite du retournement immobilier.

En France , l'endettement global des ménages, demeuré contenu, ne semble pas porteur d'un quelconque risque macroéconomique du fait d'un excès d'endettement, même si le crédit à la consommation est devenu un produit banal pour les ménages puisque fin 2008, plus de 30 % d'entre eux détenaient un crédit de ce type 3 ( * ) . Par ailleurs, l'impact sur la croissance du crédit à la consommation n'est potentiellement pas négligeable ; selon certaines estimations, les dépenses financées grâce à lui représenteraient environ 5 % du PIB 4 ( * ) .

Dans les années qui viennent, il semble que les ménages seront appelés à emprunter davantage pour contrecarrer les effets récessifs à court terme du rétablissement attendu des comptes publics, avec moins de dépenses et, probablement, des prélèvements accrus sur les ménages. Pourvu que des garde-fous permettent de contenir le nombre de cas de surendettement, qui ne paraît pas s'autoréguler à un niveau socialement satisfaisant, le recours accru à un crédit fluide apparaît non seulement souhaitable pour la croissance , mais encore largement soutenable à terme , la situation des ménages français figurant aujourd'hui parmi les plus saines .

L'objectif de la réforme est de « prêter mieux sans prêter moins ». Votre commission estime même qu' il faudra « prêter mieux et prêter plus ».

A. UNE DEMANDE DES MÉNAGES FRAGILISÉE À L'HORIZON 2010-2011...

L'effet restrictif de la rigueur budgétaire qui, vraisemblablement, succèdera aux plans de relance devra être amorti par une augmentation de la demande des ménages supérieure à celle de leurs revenus. Il conviendra donc de préserver et soutenir leur accès au crédit, d'autant plus que :

- leur appétence risque d'être limitée dans le contexte d'une reprise sinon hypothétique, du moins peu vigoureuse, avec un chômage en forte hausse ;

- certains secteurs de l'économie française apparaissent comme très vulnérables à une contraction du crédit.

1. Des ménages à soulager du poids d'un rétablissement ultérieur des comptes publics sur leur revenu disponible

a) Dans le contexte d'une réépargne publique à venir...

A partir des années 2010-2011, les pouvoirs publics devront retourner avec une détermination nouvelle à leur objectif de rétablissement des comptes en raison d'un fort accroissement de la dette, qui passerait de 67,3 % en 2008 à 77,5 % en 2010 d'après la dernière prévision gouvernementale 5 ( * ) .

Ces chiffres sont en outre sur le point d'être révisés à la hausse puisqu'ils reposent sur une prévision de croissance (- 1,5 % en 2009 et + 1 % en 2010) à laquelle de gouvernement a renoncé (- 3 % finalement annoncés pour 2009) et qui s'avérait de toute façon supérieure au consensus des conjoncturistes (- 1,8 % en 2009 et + 0,6 % en 2010).

Afin de rétablir les comptes conformément aux prescriptions des critères de Maastricht, qui prohibent normalement tout endettement supérieur à 60 % du PIB et tout déficit public annuel supérieur à 3  % du PIB, les pouvoirs publics seront simultanément incités - dans une proportion dont on ne peut préjuger - à rehausser les prélèvements obligatoires et à diminuer la dépense publique, notamment les prestations sociales et de chômage ainsi que, d'une façon générale, les dépenses auxquelles des ménages sont susceptibles de pourvoir directement (dépenses non régaliennes).

Dans cette perspective, le revenu disponible des ménages souffrira inexorablement de la réépargne publique. Il importera cependant que leur consommation puisse contribuer positivement à la demande globale et à la croissance, alors même que l'évolution de leurs revenus sera contrainte.

* 2 Sous-gouverneur de la Banque de France, lors du colloque intitulé « Rôle et importance économique du crédit à la consommation » organisé le 10 février 2009 à l'Assemblée nationale.

* 3 Auxquels peut-on ajouter les 10 % des ménages utilisant uniquement le découvert bancaire.

* 4 La production de crédit à la consommation aurait représenté 95 milliards d'euros en 2007, selon le rapport intitulé « Pour un développement responsable du crédit renouvelable en France » fait par Athling Management pour le Comité consultatif du secteur financier (décembre 2008).

* 5 Prévision associée au second projet de loi de finances rectificative pour 2009, examiné en Conseil des ministres le 4 mars 2009.

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