2. Renforcer l'information et la protection du consommateur

En ce qui concerne la publicité , l' information préalable du consommateur et sa protection tant au moment de la souscription du contrat qu'à son issue, le texte du Gouvernement n'a pas fait l'objet d'un grand nombre de compléments ou rectifications, ni du reste de propositions de modifications. Les raisons en sont simples :

- d'une part, ainsi que cela a été relevé précédemment, les articles correspondants du projet de loi sont très fortement soumis à la contrainte communautaire et les marges de manoeuvres sont faibles ;

- d'autre part, s'agissant de ces dernières, le Gouvernement a spontanément cherché à les exploiter aussi largement que possible 170 ( * ) , donnant du reste ainsi satisfaction à un grand nombre des dispositions des propositions de loi déposées par nos collègues ces derniers mois.

Reste que, à l'initiative de certains de ses membres et de son rapporteur, votre commission spéciale a néanmoins apporté quelques compléments ou précisions qui lui semblaient nécessaires :

- en complétant la mention légale « Un crédit vous engage et doit être remboursé » devant figurer sur toute publicité par la phrase « Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager » et en étendant celle-ci aux publicités orales radiodiffusées (amendement de M. Michel Mercier , M. Claude Biwer , Mme Muguette Dini et les membres du groupe UC, sous-amendé par le Gouvernement ) ;

- en prévoyant de faire figurer ladite mention légale également dans la fiche d'information à fournir pour chaque offre de crédit (amendement des mêmes auteurs ) ;

- en garantissant que la fiche de dialogue établie « à quatre mains » par le prêteur et l'emprunteur ne pourra être utilisée par le premier à titre de preuve de la « mauvaise foi » du second , sauf à ce que les informations qu'elle comporte soient corroborées par des justificatifs ; votre rapporteur a en effet entendu les inquiétudes exprimées aux cours des auditions, notamment par les représentants des associations de consommateurs, sur la nature de cette fiche et sur les difficultés qu'il y aurait pour le client à la remplir sans aucunes erreurs ni omissions : c'est pourquoi il a soumis à la commission spéciale cet amendement qui, il convient de le souligner, constitue également une réelle incitation pour les prêteurs à solliciter des justificatifs probants , sans pour autant les imposer systématiquement ;

- en obligeant le prêteur à agréer l'emprunteur en toutes circonstances , la mise à disposition des fonds valant toutefois agrément , conformément à la jurisprudence de la Cour de Cassation (amendement de M. Michel Mercier , M. Claude Biwer , Mme Muguette Dini et les membres du groupe UC, sous-amendé par le Gouvernement ) ;

- en instituant un mécanisme destiné à éviter que certains opérateurs, tirant prétexte du prélèvement annuel d'une cotisation pour la détention d'un moyen de paiement ou d'une carte de fidélité associée à un crédit renouvelable, parviennent à échapper à la disposition de la loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur (dite « loi Chatel »), au terme de laquelle la non utilisation d'un crédit renouvelable durant trois ans , sans demande expresse du consommateur de le reconduire, emporte sa résiliation (amendement de votre rapporteur ) ;

- en prévoyant l'insertion d'un encadré récapitulatif des caractéristiques essentielles du crédit à la première page du contrat (amendement de M. Laurent Béteille et de Mme Brigitte Bout , sous-amendé par le Gouvernement ) ;

- enfin, en obligeant le prêteur, au moins une fois par an, à informer l'emprunteur sur le montant du capital restant dû pour chacun de ses crédits (amendement des mêmes auteurs , sous-amendé par le Gouvernement ).

En revanche, la commission spéciale a rejeté un amendement de Mme Nicole Bricq et ses collègues interdisant de proposer des lots promotionnels liés à l'acceptation d'une offre préalable d'opération de crédit . Même si, tout comme bien d'autres, votre rapporteur peut être parfois heurté par l'agressivité excessive de certaines publicités dans le domaine du crédit (en qualité comme en quantité), il lui a semblé, après réflexion, que cette suggestion conduisait à la stigmatisation du crédit.

Or, l' objectif du projet de loi , auquel il souscrit pleinement, est de rendre le crédit plus responsable, non de le brider , bien au contraire. Toutes les mesures du texte ayant pour objet de clarifier les situations , de rendre plus loyale la communication du prêteur et/ou du vendeur à l'attention du consommateur, vont dans ce sens. De ce point de vue, les deux plus emblématiques sont bien :

- celle qui interdit à toute publicité « de laisser entendre que le prêt améliore la situation financière de l'emprunteur, entraîne une augmentation de ressources, constitue un substitut d'épargne ou accorde une réserve automatique d'argent immédiatement disponible sans contrepartie financière identifiable » , disposition que réclamait notamment la proposition de loi de M. Philippe Marini ;

- et surtout celle qui interdit que des avantages promotionnels soient subordonnés à l'utilisation du crédit lié à une carte de fidélité : cette réforme majeure devrait mettre un coup d'arrêt aux pratiques détestables auxquelles étaient effectivement soumis les consommateurs les plus fragiles.

En revanche, dès lors que sont prohibées les pratiques déloyales consistant à lier artificiellement une activité (un achat de bien ou de services) à une autre (l'usage ou non d'un crédit) par l'offre de promotions ou d'avantages totalement indépendants de l'acte de crédit, en quoi serait-il légitime d'interdire aux acteurs du secteur du crédit, lorsqu'ils exercent leur profession dans les règles de transparence et de loyauté qui s'imposent, de pouvoir faire usage d'outils promotionnels et commerciaux auxquels tous les commerçants ont toujours eu recours, en tous lieux et en tous temps ? La loi instituerait là une discrimination avec les autres activités non seulement incompréhensible au plan économique 171 ( * ) mais également choquante au niveau des principes puisqu'elle signifierait qu'en tant que tel, le crédit est dangereux, voire néfaste.

La commission spéciale n'a pas donné davantage suite à divers amendements proposés par Mme Brigitte Bout , Mme Nicole Bricq et ses collègues, ou encore M. Claude Biwer qui, sous des formes parfois identiques, parfois différentes, visaient à imposer la production de justificatifs au moment de la conclusion du contrat de crédit . Il lui a semblé que la conjugaison des dispositions initiales du projet de loi rendant obligatoires la consultation préalable du FICP et l'établissement de la fiche de dialogue, et de l'amendement proposé par votre rapporteur pour inciter le prêteur à recueillir des informations probantes, était suffisante pour vérifier la solvabilité de l'emprunteur .

Enfin, elle a également repoussé deux amendements identiques présentés, respectivement, par Mme Brigitte Bout et par Mme Nicole Bricq et ses collègues, tendant à inverser l'acte de reconduction du contrat de crédit renouvelable . Alors qu'en application du droit actuel, que le projet de loi propose de laisser inchangé, l'emprunteur est invité à refuser le renouvellement du contrat par un bordereau-réponse spécialement prévu à cet effet, les auteurs de ces amendements suggéraient que ce document serve au contraire à accepter expressément l'offre de reconduction . Il a semblé à votre rapporteur que cette inversion entraînerait bien plus d'inconvénients que d'avantages , tant pour les consommateurs , que le moindre oubli risquerait de placer dans des conditions délicates et qui seraient astreints chaque année, pour la majorité d'entre eux, à des lourdeurs de procédure excessives, que pour les prêteurs , eux aussi affectés par les charges induites ainsi générées. Cette suggestion lui a paru d'autant moins opportune que, par ailleurs, il a favorisé précédemment l'adoption par la commission spéciale de l'amendement de Mme Nicole Bricq et ses collègues visant à réduire de trois à deux ans le délai prévu par la loi Chatel du 28 janvier 2005 pour la résiliation automatique d'un compte de crédit renouvelable inactif.

* 170 Il en est ainsi notamment de la mention légale obligatoirement apposée sur toute publicité relative au crédit à la consommation, conformément au texte de l'article L. 311-5 du code de la consommation proposé par l'article 2 du projet de loi.

* 171 Cette législation ne serait pas seulement préjudiciable aux prêteurs, mais également aux consommateurs : pourquoi un client qui a décidé de contracter un crédit et qui est clairement informé des conditions des offres ne pourrait-il pas bénéficier, au moment de son choix, de taux promotionnels, d'un cadeau ou d'autres avantages commerciaux ?

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