II. LES PROJETS D'AUTOROUTES DE LA MER ENTRE LA FRANCE ET L'ESPAGNE

La politique des transports constitue un chapitre essentiel pour les relations bilatérales franco-espagnoles. Sa situation péninsulaire rend l'Espagne très dépendante des voies de communication avec le reste de l'Europe, et en premier lieu avec la France. La France est pour sa part un territoire de transit vers l'Espagne et le Portugal et constate un accroissement continu du trafic routier de marchandises et des nuisances associées sur des axes en voie de saturation.

Le projet d'autoroute de la mer s'inscrit dans la volonté des deux Etats de développer les modes de transports alternatifs à la route dans leurs échanges.

A. LES AUTOROUTES DE LA MER DANS LA COOPÉRATION FRANCO-ESPAGNOLE EN MATIÈRE DE TRANSPORTS

L'étude d'impact jointe au projet de loi rappelle que la circulation de poids-lourds enregistrée entre la France et l'Espagne connaît une progression annuelle très importante sur les principaux axes, et de façon continue depuis 2000 (exception faite d'un retournement conjoncturel depuis le second semestre 2008). L'essentiel du trafic routier s'effectue par deux passages, dont les trafics évoluent de façon parallèle, par Biriatou (2,8 millions de poids-lourds par an, soit 41 millions de tonnes) et le Perthus (3,2 millions de poids-lourds par an, soit 48,2 millions tonnes).

Le transport maritime représente 42% des échanges de marchandises entre la péninsule ibérique et l'Europe, mais seulement 16% des échanges avec la France, le restant étant quasi-exclusivement représenté par le trafic routier. La part du trafic ferroviaire est faible du fait du retard de développement du réseau ferré espagnol et de la différence d'écartement des voies.

Les autoroutes de la mer comme les projets ferroviaires franco-espagnols (LGV Montpellier-Barcelone et Bordeaux-Espagne) visent ainsi à stopper l'accroissement continu de la part du trafic routier entre les deux pays. Par ailleurs, dans le cadre du Grenelle de l'environnement, l'objectif a été fixé de faire évoluer la part du fret non routier de 14% à 25% d'ici 2020.

En février 2004, lors du sommet bilatéral de Saragosse, les deux ministres espagnol et français en charge des transports ont souligné l'importance des autoroutes de la mer et une déclaration d'intentions sur les autoroutes de la mer a été signée lors de la rencontre franco-espagnole tenue à Barcelone le 17 octobre 2005.

Un accord international sous forme d'échange de lettres relatif à la création d'une commission intergouvernementale franco-espagnole chargée de proposer une sélection de projets d'autoroutes de la mer entre l'Espagne et la France a été signé à Paris le 9 juin 2006 et à Madrid le 3 juillet 2006. Il est entré en vigueur le 18 janvier 2007.

Dans son article 1 er , cet accord précise que « le terme autoroutes de la mer désigne une offre de transport intermodal de porte à porte permettant un transfert modal significatif par la concentration de flux de marchandises sur des itinéraires maritimes, sans distorsion de concurrence contraire à l'intérêt commun. Ce service de transport maritimo-terrestre international est principalement dédié au transport de fret intercommunautaire. Il consiste en l'amélioration de liaisons maritimes existantes ou en la création de nouvelles qui présentent un rapport qualité/coût élevé et qui sont viables à terme, régulières et fréquentes ».

L'accord confie à la commission intergouvernementale l'élaboration d'un cahier des charges et le lancement d'une consultation en vue de proposer une sélection de projets aux deux gouvernements. Il prévoit que l'appel à projet ne désigne pas a priori les ports qui peuvent être impliqués mais que la liaison considérée doit comporter des escales dans au moins un port français et un port espagnol d'importance internationale (volume annuel de trafic égal ou supérieur à 1,5 million de tonnes de fret ou à 200 000 passagers ; connections avec le réseau trans-européen de transport). La fréquence du service maritime constitue un critère clé pour répondre à l'objectif de transfert modal significatif et les projets sont évalués au regard du transfert modal et de la performance des opérations et des services portuaires.

La commission intergouvernementale lancé un appel à projets international en avril 2007. Les offres ont été remises en novembre 2007 puis analysées au cours de l'année 2008. Deux offres ont été sélectionnées et transmises en janvier 2009 aux deux ministres en charge des transports qui les ont officiellement retenues dans une déclaration commune du 27 février 2009.

Deux autoroutes de la mer vont donc être mises en place entre la France et l'Espagne :

- l'une entre Nantes-Saint-Nazaire et Gijon , dans les Asturies ; elle sera exploitée par le groupe Louis-Dreyfus et la société italienne Grimaldi ;

- l'autre entre Nantes-Saint-Nazaire et Vigo, en Galice , avec dans un second temps un projet de prolongement vers Le Havre d'une part et Algesiras, en Andalousie, d'autre part; elle sera exploitée par une société dénommée « Autopista del Mar Atlantica » constituée par la compagnie maritime Trasmediterranea et les ports concernés.

Les fréquences envisagées sont de 4 départs par semaine depuis la France dans un premier temps, puis 7 ultérieurement, avec une capacité de 140 à 260 remorques ou semi-remorques. Un objectif de transfert équivalent à 100 000 poids lourds par an est visé d'ici 4 ans. S'il était atteint, cet objectif représenterait environ 1,3 % du nombre de poids lourds transitant chaque année entre la France et l'Espagne ou encore 3 % du trafic constaté au passage frontière de Biriatou sur l'A63. Ce projet n'est donc pas en mesure à lui seul d'infléchir la croissance continue du trafic sur cet axe, mais il contribuera à cet objectif au même titre que les projets ferroviaires en cours à l'Est comme à l'Ouest de la frontière.

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