II. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU JUGEMENT DES MINEURS

Le projet de loi comporte par ailleurs une quinzaine de dispositions destinées à adapter à l'évolution de la délinquance juvénile l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, dans le but d'améliorer la lisibilité et la rapidité de la réponse apportée par l'autorité judiciaire aux infractions commises par les mineurs.

A. UN SOUCI CONSTANT D'ADAPTATION À L'ÉVOLUTION DE LA DÉLINQUANCE DES MINEURS

Les pouvoirs publics s'efforcent depuis plusieurs années d'adapter les outils juridiques dont dispose l'autorité judiciaire pour faire face à l'évolution de la délinquance des mineurs, dans le respect des principes - reconnus par le Conseil constitutionnel comme des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République 15 ( * ) - de primauté de l'éducatif sur le répressif, d'atténuation de la responsabilité pénale en fonction de l'âge et de spécificité de la procédure pénale applicable aux mineurs.

1. Une délinquance spécifique et en augmentation

Selon les informations transmises par le ministère de la Justice, entre 2002 et 2009, le nombre de mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie a crû de 19 %, passant de 180 382 en 2002 à 214 612 en 2009. Cette évolution est moins forte que celle constatée chez les majeurs (+ 32 % de mis en cause sur la même période) 16 ( * ) .

Le nombre de condamnations prononcées à l'encontre de mineurs a quant à lui pratiquement doublé sur la même période, passant de 29.452 condamnations en 2002 à 56.136 en 2009.

Évolution des condamnations de mineurs depuis 2002

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Crime

< 13

40

58

84

41

32

28

31

26

13-15

223

266

313

342

383

366

314

297

16-17

235

235

246

233

221

264

261

215

Délit

< 13

870

1195

2020

2026

1941

1878

1718

1823

13-15

11959

13871

20113

21271

22102

22206

22681

21942

16-17

15395

15952

20793

29579

30972

31590

31647

30629

Contravention de 5° classe

< 13

15

28

36

51

41

44

34

27

13-15

276

350

641

530

488

480

500

458

16-17

439

463

683

883

705

707

781

719

ensemble

ensemble

29 452

32 418

44 929

54 956

56 885

57 563

57 967

56 136

Source : casier judiciaire national (données provisoires pour l'année 2009)

En 2009, la délinquance des mineurs diffère de celle des majeurs par sa composition :

- plus de 40 % des mineurs mis en cause le sont pour vol, contre 20 % pour les majeurs ;

- les mineurs sont moins concernés que les majeurs par les stupéfiants (11 % de leurs mises en cause, contre 16 % pour les majeurs). Ils sont en revanche plus présents en matière de destructions et de dégradations de biens (13 % du total de leurs mises en cause, contre 5 % pour les majeurs) ;

- les faits de violence représentent une part croissante de la délinquance des mineurs, passant de 16 % à 22 % des mises en cause entre 2002 et 2009.

Part des mineurs dans les condamnations selon le type d'infractions

Catégorie

Infraction

2004

2009

Crime

Coups et violences volontaires

6,7 %

9,8 %

Homicides volontaires

5,3 %

4,2 %

Viols et attentats à la pudeur

28,4 %

28,8 %

Vols, recel, destruction

13,4 %

15,9 %

Autres crimes

15,6 %

12,2 %

Délit

Atteintes aux moeurs

16,0 %

16,3 %

Coups et violences volontaires

12,9 %

14,9 %

Destructions, dégradation

23,4 %

29,2 %

Vols, recels

20,4 %

23,1 %

Autres atteintes à la personne

6,9 %

8,7 %

Contravention de 5° classe

Atteintes aux biens

4,5 %

8,3 %

Coups et violences volontaires

4,6 %

6,7 %

Autres atteintes aux personnes

38,6 %

55,1 %

Source : casier judiciaire national (données provisoires pour l'année 2009)

Peu de ces mineurs réitèrent : d'après les évaluations réalisées par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, sept mineurs sur dix ne font pas l'objet de nouvelles poursuites ou d'une mesure alternative aux poursuites dans l'année suivant la fin de leur prise en charge.

En revanche, un petit « noyau » de 5 % des mineurs délinquants serait responsable de près de la moitié des infractions commises par les mineurs.

Plus de trois délinquants mineurs sur quatre sont âgés de 16 ans et plus. 20 % ont entre 13 et 16 ans. Les délinquants mineurs de moins de treize ans sont rares : 2 % environ. Enfin, près de neuf délinquants sur dix sont des garçons.

La délinquance des jeunes filles :
une délinquance minoritaire mais en augmentation

Une étude récente de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) a attiré l'attention sur l'augmentation importante de la délinquance des jeunes filles au cours des années récentes, qui demeure malgré cela minoritaire au sein de la délinquance des mineurs.

Ainsi, en 2009, un peu moins de 1.175.000 personnes ont été mises en cause pour crimes et délits non routiers, dont 214.612 mineurs au sein desquels on compte 33.316 jeunes filles : ces dernières représentent 2,8 % de l'ensemble des personnes mises en cause en 2009, et 15,5 % des mineurs délinquants.

Or, en 1996, seules 14.251 filles sur un total de 143.824 mineurs délinquants avaient été mises en cause par les services de police et de gendarmerie, soit une proportion inférieure à 10 %. Sur cette période, la hausse du nombre de mineures mises en cause a été régulière, avec une augmentation moyenne annuelle de 6,8 %.

Dans un peu plus de la moitié des cas, ces mineures sont mises en cause pour des atteintes aux biens. Dans un quart des cas, elles le sont pour atteintes volontaires à l'intégrité physique. Enfin, en 2009, plus de 22 % des mineurs mis en cause pour vols sans violence étaient des filles.

Si les violences volontaires continuent à représenter une part minoritaire de la délinquance des jeunes filles, l'ONDRP observe toutefois les tendances suivantes :

- le nombre de filles mises en cause pour violences et menaces (hors vol) a augmenté de plus de 80 % sur cinq ans ;

- en particulier, le nombre de filles mises en cause pour violences non crapuleuses a doublé entre 2004 et 2009. La hausse a essentiellement porté sur les violences, mauvais traitements et abandons d'enfants (+136 % en cinq ans) et sur les coups et blessures volontaires non mortels sur personnes de plus de 15 ans (+97 % sur la même période).

2. Une évolution de la réponse pénale

Sur la période 2002-2009, la réponse judiciaire à la délinquance des mineurs a fortement progressé en nombre et a évolué dans ses modalités.


• Une évolution de la réponse judiciaire

L'évolution de l'activité des parquets dans le traitement de la délinquance des mineurs met en évidence deux éléments majeurs :

- d'une part, une forte diminution (-64 %) , sur la période 2002-2009, de l'abandon des poursuites pour inopportunité estimée par le parquet (« classements secs »), aboutissant à un taux de réponse pénale de 92,9 % en 2009 ;

- d'autre part, un fort accroissement (+62 %) , sur cette même période, des procédures alternatives aux poursuites , qui offrent une réponse rapide et aisément compréhensible par le mineur dans les affaires les moins graves. Dans deux tiers des cas, le parquet recourt à un rappel à la loi. Les mesures de réparation ne représentent qu'une part encore modeste de ces alternatives (environ 12 %), mais elles sont en forte augmentation (+78 %) par rapport à 2002. En 2009, 53,7 % des affaires poursuivables mettant en cause des mineurs ont été classées après réussite d'une procédure alternative aux poursuites.

77.731 mineurs délinquants ont été poursuivis devant la juridiction pour enfants en 2009. Sur la période 2002-2009, le nombre de décisions rendues par les juridictions pour mineurs a diminué de 8 %. Le nombre de mesures éducatives demeure stable, tandis que le nombre de peines prononcées diminue de 19 %. Près de 2.000 sanctions éducatives sont désormais prononcées chaque année.


• Une évolution des modes de prise en charge

La prise en charge des mineurs délinquants faisant l'objet d'une mesure éducative ou d'une condamnation à une sanction éducative ou à une peine relève de la compétence de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), qui exécute la mesure ordonnée soit directement, soit en ayant recours au secteur associatif habilité.

Depuis 2008, celle-ci a abandonné la prise en charge des mineurs en danger (qui relève désormais exclusivement des services d'aide sociale à l'enfance des conseils généraux) et s'est concentrée sur la prise en charge des mineurs délinquants, en portant notamment un effort particulier sur la prise en charge de mineurs multiréitérants ou multirécidivistes au sein de structures nouvelles.


Une diversité des modes de prise en charge

La PJJ organise ou supervise trois modes de prise en charge différents :

- d'une part, les mesures d'investigation ont pour but de permettre aux magistrats, avec un degré d'approfondissement graduel, de mieux cerner la personnalité, le parcours et l'environnement des mineurs qui leur sont présentés et ainsi de prendre leurs décisions dans les meilleures conditions d'information possibles ;

- d'autre part, les mesures de milieu ouvert ordonnées par les parquets ou les juridictions pour enfants permettent de prendre en charge le mineur tout en le maintenant dans son milieu de vie habituel (mesures d'activité de jour, réparation pénale, travaux d'intérêt général, etc.) ;

- enfin, le mineur peut faire l'objet d'une mesure de placement dans un établissement plus ou moins spécialisé dans l'accueil d'un public délinquant. Le placement permet d'éloigner le mineur de son lieu de vie habituel et d'assurer une prise en charge plus intensive. La PJJ intervient également en établissement pénitentiaire pour mineurs ainsi que dans les quartiers mineurs des établissements pénitentiaires, placés sous la responsabilité de l'administration pénitentiaire.

En 2009, près de 96.000 mineurs délinquants ont été suivis par les services publics et associatifs habilités de la PJJ, ce qui correspond à une augmentation du nombre de prises en charge de 40 % depuis 2002 . Les mesures de placement ont presque doublé (+96 %), tandis que les mesures de milieu ouvert ont progressé de 50 % et les mesures d'investigation de 33 %.

De façon générale, la PJJ s'est engagée dans une démarche de renforcement du contenu éducatif de l'ensemble des prises en charge, à travers notamment la mise en place du dispositif « accueil-accompagnement ».

Par ailleurs, depuis l'entrée en vigueur de la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 (dite « loi Perben I »), la PJJ consacre d'importants moyens budgétaires et humains à la prise en charge de mineurs présentant des parcours très déstructurés et ayant commis des passages à l'acte délinquant graves et/ou répétés. Cette prise en charge renforcée est notamment assurée dans des centres éducatifs fermés (CEF) et dans les établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM).

Destinés à accueillir des mineurs multiréitérants ou ayant commis des faits d'une particulière gravité, les CEF permettent de mettre en oeuvre une action éducative très encadrée et contrôlée, axée sur un réapprentissage des savoirs fondamentaux grâce à un partenariat avec l'Éducation nationale et la mise à disposition d'enseignants spécialisés.

D'après les informations contenues dans l'étude d'impact, un placement en CEF semble avoir un effet sensible sur la réinsertion des mineurs au-delà de quatre mois : ainsi, un mineur qui reste moins de quatre mois en CEF aurait plus de 60 % de risque de réitérer que celui qui reste entre quatre et sept mois ; un mineur restant plus de sept mois aurait moins de 40 % de risque de réitérer que celui qui est resté entre quatre et sept mois.

Depuis l'ouverture du premier centre en 2003, 3.800 mineurs ont été placés en CEF.

A l'heure actuelle, 45 CEF permettent d'accueillir un total de 500 mineurs. En 2009, le coût d'une journée de placement en CEF était de l'ordre de 600 euros par mineur.

Par ailleurs, depuis juin 2007 - date d'ouverture du premier établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) 17 ( * ) -, la PJJ mobilise d'importants moyens budgétaires en faveur de l'encadrement éducatif des mineurs détenus, nettement supérieurs à celui offert dans les quartiers pour mineurs des établissements pénitentiaires traditionnels dans lesquels interviennent également des éducateurs.

Au 1 er juillet 2010, 758 mineurs étaient détenus (soit 1,2 % de la population carcérale française).

L'administration pénitentiaire évalue le coût d'une journée de détention en EPM à 325 euros sur la base d'un taux d'occupation de 100 % 18 ( * ) , mais ce chiffre est probablement sous-évalué, certaines estimations récentes ayant fait état d'un coût supérieur à 1000 euros par jour.

Aucune évaluation n'a à ce jour permis d'évaluer l'incidence d'une détention en EPM sur la réinsertion du mineur.

3. Une réflexion engagée sur une réforme globale du droit pénal des mineurs

Depuis une dizaine d'années, la délinquance des mineurs est au coeur des préoccupations des pouvoirs publics qui tentent de définir les outils adaptés afin de l'endiguer.

Il y a neuf ans, la commission d'enquête du Sénat sur la délinquance des mineurs constatait : « la justice des mineurs en France n'est pas particulièrement laxiste. Elle est erratique . Son fonctionnement est tel qu'un mineur peut s'enfoncer dans la délinquance malgré de multiples « réponses » de la justice, parce que ces réponses ne sont pas claires, pas progressives, pas mises en oeuvre... Lorsqu'une peine d'emprisonnement ferme est prononcée, elle suscite incrédulité et révolte chez beaucoup, qui ne croyaient plus cette sanction possible. Il est peu de dire que la justice des mineurs doit profondément évoluer » 19 ( * ) .

Aujourd'hui, en dépit de neuf modifications apportées depuis 2002 à l'ordonnance du 2 février 1945 20 ( * ) , ce constat paraît encore largement partagé.

Le principal grief fait à la justice pénale des mineurs est celui de sa lenteur : lenteur de la réponse judiciaire puis lenteur de la prise en charge décrédibilisent l'institution judiciaire et font perdre son sens à la sanction, à rebours de l'objectif éducatif que celle-ci doit, en principe, revêtir.

En effet, 16,6 mois séparent en moyenne la commission des faits de la date de condamnation définitive par le juge ou le tribunal pour enfants. En matière criminelle, cinq ans séparent en moyenne les faits d'une condamnation par une cour d'assises des mineurs.

Le rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur l'exécution des décisions de justice pénale concernant les mineurs constatait par ailleurs il y a trois ans que :

- « malgré de réels progrès, notamment grâce à l'action des parquets, le fonctionnement de la chaîne pénale applicable aux mineurs n'est pas satisfaisant : les goulots d'étranglement sont réels, à tous les niveaux, et nuisent à la rapidité et à la pédagogie de la peine ;

- des outils statistiques fiables permettant d'avoir une analyse fine de cette réalité de terrain empirique font aujourd'hui défaut [...] ;

- au-delà des problèmes de moyens humains, parfois indiscutables, la bonne exécution des décisions de justice pénale concernant les mineurs se heurte aussi à l'absence de concertation entre les différents acteurs ;

- enfin, il paraît nécessaire de s'interroger sur la pertinence et l'efficacité des différentes réponses pénales apportées par la protection judiciaire de la jeunesse » 21 ( * ) .

Au-delà de ces difficultés se dégage le constat d'un manque cruel de lisibilité et de cohérence de la justice pénale des mineurs. L'ordonnance du 2 février 1945 a en effet fait l'objet, depuis son entrée en vigueur, de 34 modifications, dont certaines d'ampleur importante sans que, pour autant, l'architecture et la cohérence globale de la justice pénale des mineurs ne fasse l'objet d'une réflexion d'ensemble.

A la demande du Gouvernement, une commission présidée par le recteur André Varinard a formulé en décembre 2008 70 propositions tendant à adapter dans son ensemble la justice pénale des mineurs 22 ( * ) .

Les principales conclusions de la commission présidée par M. André Varinard

La commission présidée par M. André Varinard, chargée de formuler des propositions pour réformer « en profondeur » l'ordonnance du 2 février 1945 et procéder à une véritable refondation de la justice pénale des mineurs, a remis son rapport le 3 décembre 2008.

Ce dernier formule 70 propositions qui peuvent être, pour l'essentiel, regroupées en trois rubriques : élaboration d'un code de la justice pénale des mineurs, modification des règles de fond, réforme de la procédure.

a) L'élaboration d'un code de la justice pénale des mineurs

La commission a préconisé de rassembler l'ensemble des textes relatifs au droit pénal des mineurs au sein d'un code dédié à la justice pénale des mineurs. Un tel code, qui regrouperait en un seul instrument juridique l'ensemble des règles de droit pénal de fond, de procédure pénale et d'application des peines, permettrait d'affirmer la spécificité et l'autonomie du droit pénal des mineurs. Les principes fondamentaux de ce dernier (primauté de l'éducatif, atténuation de la responsabilité en fonction de l'âge, caractère exceptionnel de l'emprisonnement, etc.) figureraient dans les articles liminaires de ce code.

b) Une modification du droit pénal applicable aux mineurs

Deux questions complémentaires ont été examinées : celle des seuils de responsabilité, et celle des mesures encourues.

S'agissant des seuils de responsabilité, la commission a proposé de fixer à douze ans l'âge de la responsabilité pénale 23 ( * ) . A partir de cet âge, les mineurs pourraient encourir indifféremment des sanctions éducatives et des peines. Néanmoins, la commission a proposé de ne fixer qu'à quatorze ans l'âge à partir duquel une peine d'emprisonnement serait encourue, sauf en matière criminelle.

S'agissant des mesures encourues, la commission a proposé de réorganiser et de clarifier les solutions actuellement en vigueur. Les mesures éducatives et les sanctions éducatives seraient unifiées au sein d'une seule catégorie dénommée sanctions éducatives. Une mesure unique de suivi éducatif en milieu ouvert serait créée. Enfin, le rapport préconise l'instauration d'une peine principale de placement sous surveillance électronique, la création d'une peine de confiscation d'un objet sans lien avec l'infraction et appartenant au mineur ainsi qu'une peine d'emprisonnement de fin de semaine. Les peines et les sanctions éducatives pourraient par ailleurs être combinées.

c) Une réforme des règles de procédure

Au-delà de la consécration des principes directeurs du procès pénal applicables aux mineurs (nécessaire connaissance de la personnalité du mineur, publicité restreinte, assistance obligatoire d'un avocat et du défenseur unique pour le mineur, etc.), la commission a formulé un certain nombre de préconisations concernant la procédure pénale applicable. En particulier, elle s'est prononcée en faveur du maintien de la double compétence (au civil et au pénal) du juge des enfants, qui deviendrait le juge des mineurs. Elle s'est déclarée favorable à une déjudiciarisation de la première infraction et a préconisé de soumettre, sur renvoi du juge des mineurs ou du juge d'instruction, à un tribunal correctionnel spécialement composé les mineurs devenus majeurs au moment du jugement, les mineurs poursuivis avec des majeurs et les mineurs âgés de 16 à 18 ans en état de nouvelle récidive.

A la suite de la remise de ce rapport, un avant-projet de loi reprenant une partie de ces préconisations a été élaboré par les services du ministère de la Justice.

Celui-ci s'organise sous la forme d'un code de la justice pénale des mineurs regroupant l'ensemble des dispositions applicables en la matière. La spécificité et les principes fondamentaux de la justice pénale des mineurs y sont réaffirmés et la terminologie est modernisée. L'avant-projet de loi maintient par ailleurs le principe de la primauté de l'éducation sur la répression et favorise le recours aux alternatives à l'incarcération et aux aménagements de peine. Un dossier unique de personnalité pourrait être créé. En matière de procédure, de nouveaux délais de traitement des procédures et l'instauration de saisines directes des juridictions seraient instaurés.

En revanche, le Gouvernement n'a pas souhaité retenir l'ensemble des propositions formulées par la commission présidée par M. Varinard. En particulier, la proposition tendant à fixer à douze ans l'âge de la responsabilité pénale ne figure pas dans l'avant-projet de loi. Dans un premier temps, le Gouvernement n'a pas non plus retenu l'idée de créer un tribunal correctionnel pour mineurs 24 ( * ) .

Certaines préconisations du rapport Varinard ont par ailleurs fait l'objet d'expérimentations dans certaines directions interrégionales de la PJJ. Tel est notamment le cas du dossier unique de personnalité pour les mineurs ou du mandat de placement confié aux directeurs départementaux de la PJJ afin de garantir l'exécution immédiate et effective d'une décision de placement prise par un juge des enfants statuant en matière pénale.

En tout état de cause, le Gouvernement a fait valoir que ce texte devrait être examiné en lien avec la réforme de l'ensemble de la procédure pénale, dont l'examen par le Parlement a pour l'instant été repoussé.


* 15 Décision n°2002-461 DC du 29 août 2002.

* 16 Il convient toutefois d'attirer l'attention sur le fait que ces données peuvent traduire à la fois une augmentation réelle de la délinquance et/ou une plus grande efficacité des services de police et de gendarmerie : il est donc nécessaire de les interpréter avec précaution.

* 17 A l'heure actuelle, 6 EPM accueillent environ un tiers des mineurs détenus.

* 18 Il n'était cependant que de 77 % à la date du 1 er juillet 2010.

* 19 Rapport n°340 (2001-2002) de la commission d'enquête sur la délinquance des mineurs, présidée par M. Jean-Pierre Schosteck et dont le rapporteur était Jean-Claude Carle, page 111.

* 20 Depuis son adoption en 1945, l'ordonnance du 2 février 1945 a été modifiée 34 fois. Voir le récapitulatif de ces modifications en annexe de l'étude d'impact annexée au présent projet de loi.

* 21 Rapport d'information n°911 (juin 2008) présenté par Mme Michèle Tabarot en conclusion des travaux d'une mission d'information présidée par M. Jean-Luc Warsmann, pages 12-13.

* 22 « Adapter la justice pénale des mineurs. Entre modifications raisonnables et innovations fondamentales : 70 propositions », rapport de la commission présidée par le recteur André Varinard, La Documentation française.

* 23 A l'heure actuelle, la condition fondamentale de la responsabilité pénale des mineurs est le discernement, que l'on situe généralement aux environs de l'âge de sept ans mais qui relève de l'appréciation, au cas par cas, du juge des enfants. A partir de dix ans, les mineurs peuvent encourir des sanctions éducatives. Ils peuvent faire l'objet d'une peine à partir de l'âge de treize ans.

* 24 Voir les questions écrites n°50305 et 42202 et les réponses du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, publiées au JOAN du 4 août 2009.

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