2. La position de la commission de l'économie

Votre commission approuve largement les objectifs visés par cette proposition de résolution, estimant que la perspective du G20 agricole, qui constitue une première mondiale sur le sujet de la volatilité des prix agricoles. Il s'agit d'une étape déterminante dans la capacité de déclencher une réponse coordonnée et efficace au niveau international pour lutter contre le fléau de l'instabilité excessive des marchés.

Elle salue l'initiative conjointe des présidents des deux commissions des affaires européennes et de l'économie, qui a une fois encore montré l'efficacité d'une collaboration concertée sur des sujets aux enjeux aussi importants.

Elle a néanmoins souhaité apporter quelques modifications.

Tout d'abord, votre commission a inséré un nouveau considérant dans le texte de la proposition de résolution, à l'initiative de notre collègue Daniel Raoul et des membres du Groupe socialiste : il s'agit de rappeler que l'agriculture mondiale est confrontée aujourd'hui aux défis de l'alimentation en quantité et qualité suffisantes à l'échelle mondiale : en effet, le retour des famines et des émeutes de la faim de 2007-2008 a fait prendre conscience au monde entier de l'importance de l'enjeu de la sécurité alimentaire, notamment pour les populations des zones de consommation les plus pauvres. L'importance de cet enjeu est en outre accentuée par l'impact du changement climatique qui influence directement les marchés agricoles en raison de l'incertitude sur les volumes de production qu'elle provoque. Ce dernier point avait d'ailleurs également été soulevé par notre collègue Gérard Bailly, lors de la réunion commune de la commission des affaires européennes et de la commission de l'économie du 8 juin 2011.

« A NOUVEAU, LE MONDE A FAIM »

L'histoire des hommes peut se lire de maintes manières, mais l'une des constantes est bien leur quête de nourriture pour satisfaire d'abord leurs propres besoins puis, en dégageant quelques surplus pour entrer dans l'échange, nourrir les villes ou les contrées lointaines. Les périodes de disette, voire de famine, jalonnent notre histoire, de l'Antiquité à la fin du 20 ème siècle.

On sait ainsi le souci qui fut celui du Sénat de Rome puis des empereurs de garantir à la plèbe de la ville « du pain et des jeux » et toute la logique de conquêtes qui en découla vers ces greniers à grains qu'étaient la Sicile, l'Afrique du Nord et surtout l'Egypte. La première réforme agraire de l'histoire ne fut-elle pas celle des Gracques ? (...)

L'histoire des hommes est ainsi marquée d'alternance et de pénurie. Cependant, chaque fois que ce « trop-plein » d'hommes semblait donner raison aux craintes malthusiennes, chaque fois qu'on passait de pénuries conjoncturelles en famines endémiques, chaque fois aussi que le signal des marchés passait au rouge, il y eut des réactions à la fois humaines et technologiques. (...) Et nous voici en 2008, au seuil du 21 ème siècle, devant un autre de ces défis. Mais le contexte a changé : il n'y a plus de terres à découvrir, nombre de ressources, comme l'eau, ne sont plus abondantes et les innovations technologiques suscitent maintes réserves. À nouveau, le monde a faim, mais cette fois-ci, saurons-nous vaincre cette faim ?

Source : Philippe Chalmin, Le monde a faim (Bourin Editeur, 2009).

Votre commission a ensuite, à l'initiative de votre rapporteur, précisé le sens de deux des recommandations proposées par le texte de la proposition de résolution :

- concernant la transparence de la production et des stocks de production agricole, il a été précisé que la fiabilité des informations en matière de prévisions de récoltes devait être améliorée ; en effet, ces règles diffèrent aujourd'hui en fonction des pays ou des régions, ce qui crée une véritable incertitude sur les marchés mondiaux ;

- la seconde précision concerne la préconisation relative à la transparence sur les marchés dérivés : cette dernière pourrait par exemple être assurée par une obligation pour les vendeurs de s'engager à décrire précisément le contenu de ces contrats.

Enfin, à l'initiative de votre rapporteur, la commission de l'économie a complété la proposition de résolution par deux nouvelles recommandations :

- la première préconise un changement des règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui ne prennent pas assez en compte les spécificités des marchés agricoles.

En effet, les produits agricoles sont soumis, depuis les accords de Marrakech de 1994, aux règles de l'OMC. Or, comme le rappelle d'ailleurs le récent avis du Conseil économique, social et environnemental sur la future PAC 2013, ces règles ne sont pas adaptées aux produits agricoles car ils instaurent une compétition inégale entre des systèmes de production qui n'ont rien à voir les uns avec les autres et qui sont soumis à de forts facteurs d'incertitudes.

Votre rapporteur considère d'ailleurs que l'OMC devra également réfléchir, à terme, à une organisation de l'agriculture mondiale par grandes régions, pour limiter le bilan carbone des échanges agricoles.

- la seconde tend à promouvoir une réglementation plus contraignante des opérateurs intervenants sur les marchés dérivés de produits agricoles, notamment via une obligation pour les banques d'expliciter clairement le fonctionnement des contrats futures utilisés pour la formation des contrats vendus aux agriculteurs et de mentionner ces transactions dans les bilans d'entreprise.

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Au cours de sa réunion du mercredi 15 juin 2010, présidée par M. Jean-Paul Emorine, président, la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné le rapport de M. Marcel Deneux, sur la proposition de résolution européenne n° 598, sur la volatilité des prix agricoles.

Elle a adopté à l'unanimité une nouvelle rédaction assortie de cinq amendements.

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