II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS »

A. L'ÉVOLUTION DU POIDS DES PENSIONS DANS LE BUDGET DE L'ÉTAT

1. La programmation pluriannuelle 2011-2014
a) L'augmentation des charges de pensions

Depuis 1990, les dépenses de pensions ont progressé de 177 %, soit à un rythme plus de trois fois plus élevé que la progression des dépenses du budget général.

La part des dépenses de pension dans le budget général a ainsi pratiquement doublé entre 1990 et 2012, passant de 9  % à 17 % des dépenses du budget général au cours de cette période.

Le constat récurrent selon lequel les pensions de la fonction publique sont le principal facteur de progression des dépenses de l'Etat demeure d'actualité et est confirmé par les projections faites par le Gouvernement sur la période 2011-2014, ainsi que l'illustre le tableau ci-dessous.

Evolution des crédits, à champ constant, sur le périmètre de la norme

Source : ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, rapport sur la programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014

Les économies indispensables pour compenser la dynamique spontanée de la dépense de pensions doivent donc être dégagées sur les autres dépenses, dont la valeur est stabilisée, pour financer les politiques jugées prioritaires. En effet, les normes « zéro volume » et « zéro valeur » ne peuvent s'appliquer stricto sensu aux charges de la dette et des pensions. A cet égard, il faut retenir que l'article 5 de la loi de programmation pluriannuelle retient comme principe de maîtrise des dépenses la norme dite « zéro valeur hors dette et pensions ».

b) L'évolution des crédits sur la période 2011-2014

L'évolution des crédits budgétaires affectés à la couverture des régimes spéciaux et de la fonction publique est très dynamique, suivant une progression comparable, de l'ordre de 8 % sur la période 2011-2013, pour la contribution de l'Etat au CAS pension et pour les dotations de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». La cause commune et essentielle repose sur les déséquilibres structurels et démographiques propres à ces régimes.

Programmation pluriannuelle à périmètre constant 2010

(en milliards d'euros)

Missions

2011

2012

2013

Progression 2011-2013

Contributions de l'Etat au CAS Pension

36,66

37,86

39,58

7,96 %

Régimes sociaux et de retraite

6,03

6,24

6,53

8,29 %

Source : commission des finances d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2013

Dans le présent projet de loi de finances, la contribution du budget général au compte d'affectation spéciale « Pensions » s'établit à 37,8 milliards d'euros, soit un dépassement de 600 millions d'euros par rapport à la loi de programmation des finances publiques, à périmètre constant 2011.

A périmètre courant , cette contribution s'élève à 37,6 milliards d'euros. Selon les réponses fournies au rapporteur spécial de votre commission des finances dans son questionnaire budgétaire, la différence de périmètre correspond à « un transfert supplémentaire d'assiette de cotisations visant à achever l'accession des universités au régime des responsabilités et compétences élargies en matière de gestion de leurs ressources humaines ».

Le dépassement de 600 millions d'euros du projet de loi de finances pour 2012 par rapport à la prévision de la loi de programmation pour les finances publiques s'explique par :

- les révisions des prévisions d'inflation : la révision à la hausse de l'inflation 2010 (fixée à 1,5 % au lieu de 1,2 %) et de la prévision d'inflation pour 2011 (2,1 % au lieu de 1,5 %) entraîne, compte tenu de l'indexation des pensions sur l'inflation, une croissance mécanique des dépenses estimée à 400 millions d'euros ;

- l'extinction des possibilités de départ anticipé en retraite de parents de trois enfants, prévue par la réforme des retraites : cette mesure n'est que progressivement mise en oeuvre par le recul des limites d'âge ; le pic de départs de parents de trois enfants durant l'année 2011 contribue, en 2012, pour 200 millions d'euros à l'augmentation de la contribution de l'Etat aux charges de pensions.

2. L'actualisation des données relatives au besoin de financement et aux engagements de l'Etat au titre des retraites
a) Le besoin de financement à long terme

Le « besoin de financement actualisé » mesure les réserves qui seraient en théorie nécessaires aujourd'hui, en étant placées au taux d'intérêt du marché, pour faire face à l'ensemble des décaissements nécessaires pour combler les déficits anticipés. Les hypothèses de calcul se fondent sur la masse des prestations et des cotisations anticipées à législation constante, sur la base de taux de cotisations inchangés. Néanmoins, l'exercice de projection impose de choisir un ensemble d'hypothèses démographiques (évolution de la population active, tables de mortalité, taux de fécondité, etc.) et macroéconomiques (croissance, évolution des salaires, etc.) nécessairement sujettes à incertitude.

La valeur du « besoin de financement actualisé » du régime des fonctionnaires de l'Etat est très sensible au taux d'actualisation retenu, comme le montre le tableau ci-après.

Evaluation du besoin de financement actualisé
du régime de la fonction publique d'Etat

(en milliards d'euros 2008)

Taux d'actualisation

1,25 %

1,53 %

2,00 %

Besoin de financement actualisé à horizon 2110

Besoin de financement actualisé à horizon 2050

Besoin de financement actualisé à horizon 2110

Besoin de financement actualisé à horizon 2050

Besoin de financement actualisé à horizon 2110

Besoin de financement actualisé à horizon 2050

Fonctionnaires de l'État

552

275

490

259

405

235

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2012

Sur la base d'un taux d'actualisation médian de 1,53 %, le besoin de financement, actualisé à 100 ans 5 ( * ) , s'élève à 490 milliards d'euros au 31 décembre 2010, en baisse de 66 milliards d'euros par rapport au besoin de financement actualisé au 31 décembre 2009, lequel s'élevait à 556 milliards d'euros. La révision à la baisse du besoin de financement s'explique par une diminution du taux d'actualisation retenu (1,53 % au lieu de 1,63 %) et par la hausse des cotisations employeur entre 2009 et 2010.

Le graphique ci-après illustre l'évolution annuelle de la masse des prestations du régime et décompose son financement entre les cotisations salariales et contributions des employeurs à droit constant ainsi que le besoin supplémentaire de financement annuel. Il indique également le besoin de financement actualisé cumulé sur la période de projection 2011-2110.

Financement des retraites du régime des fonctionnaires de l'Etat et des militaires

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2012

b) Les engagements de l'Etat au titre des retraites

Le calcul des engagements de l'Etat consiste à évaluer, à législation constante, la valeur actualisée des pensions qui seront versées aux retraités et aux actifs présents à la date d'évaluation. Les pensions futures des actifs, évaluées sur la base de leur évolution de carrière probable à l'aide des paramètres actuels du régime, sont prises en compte au prorata des années de services effectuées à la date d'évaluation sur le nombre d'années de services au moment du départ à la retraite.

Les engagements de retraites des fonctionnaires civils de l'Etat et des militaires se situaient, au 31 décembre 2010, dans une fourchette de 1 100 à 1 267 milliards d'euros, selon le taux d'actualisation retenu. Avec le taux d'actualisation moyen de 1,53 % réel, net d'inflation, le montant total des engagements directs de l'Etat en matière de retraite, qui s'élevait à 1 143 milliards d'euros au 31 décembre 2009, est estimé à 1 200 milliards d'euros au 31 décembre 2010, soit une hausse de 57 milliards d'euros par rapport à fin 2009, en raison notamment de la baisse du taux d'actualisation mentionnée plus haut (1,53 % au lieu de 1,63 %).

A taux d'actualisation inchangé, le montant des engagements de retraites des fonctionnaires civils de l'Etat et des militaires progresse, entre fin 2009 et fin 2010, de 35 milliards d'euros, sous l'effet de la révision des tables de mortalité pour la période 2007-2060 effectuées par l'lNSEE et de l'impact des modifications réglementaires issues de la réforme des retraites du 9 novembre 2010.

Cette évaluation n'intègre pas les engagements de retraite des fonctionnaires de La Poste. Dans l'attente de l'adossement au régime général de l'établissement public national de financement des retraites de La Poste (EPNFRLP), un calcul d'engagements au titre des fonctionnaires de la Poste a été effectué par le Gouvernement de manière isolée : l'utilisation de la méthode des unités de crédit projetées conduit à un niveau des engagements d'environ 105 milliards d'euros, toujours au taux d'actualisation de 1,53 %.

Montant des engagements en fonction du taux d'actualisation retenu

(en milliards d'euros)

Engagements

Taux d'actualisation

1,25 %

1,53 %

2,00 %

Dont retraités

779

746

697

Dont actifs

488

454

403

Total

1 267

1 200

1 100

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2012

Il convient de souligner que ces montants doivent être considérés, avant tout, comme des ordres de grandeur.


* 5 Par hypothèse, l'horizon de l'évaluation découle de la date maximale présumée au décès du plus jeune ayant cause participant au système actuel (100 ans).

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