2. L'impact de la réforme de la fiscalité directe locale sur les dégrèvements et compensations d'exonérations
a) Une diminution sensible du niveau de prise en charge des impôts locaux par l'Etat...

L'approche strictement budgétaire des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux doit être replacée dans le contexte plus global de l'évolution de la fiscalité directe locale et de son niveau de prise en charge par l'Etat. Le niveau de prise en charge de la fiscalité locale par l'Etat est évalué en additionnant aux dégrèvements d'impôts locaux stricto sensu les compensations d'exonérations , qui sont comptablement retracées en prélèvements sur recettes. Par les dégrèvements, l'Etat se substitue au contribuable local pour acquitter l'impôt ; par les compensations d'exonérations, il « indemnise » les collectivités des pertes de recettes fiscales qu'elles subissent sur décision du législateur ( cf . encadré).

Les dégrèvements et compensations d'exonérations

Les dégrèvements et les admissions en non-valeur sont des prises en charge par l'État de tout ou partie de la contribution due par les contribuables aux collectivités locales. Cette opération se déroule entre l'État et les contribuables au moment de l'établissement des avis d'imposition ou du recouvrement. Elle n'implique aucunement les collectivités : l'État prend intégralement à sa charge le coût des dégrèvements et le montant des impayés et verse le produit correspondant aux collectivités. Les sommes équivalentes aux dégrèvements et admissions en non-valeur sont incluses dans les produits de taxes votés par les collectivités dans le cadre de leur budget.

La diminution de l'imposition due par un contribuable s'effectue sous la forme d'un dégrèvement. Il peut avoir pour origine une décision législative liée à la situation d'un contribuable ou d'un immeuble ou constituer une mesure de correction technique de l'impôt, à savoir la rectification d'une erreur.

Ainsi, le dégrèvement intervient après calcul de l'impôt, aboutissant à réduire en tout ou partie le montant dû par le contribuable inscrit au rôle, l'État compensant entièrement aux collectivités cette perte de recettes à travers le dispositif du compte d'avances du produit de la fiscalité locale. En effet, l'État verse aux collectivités l'intégralité du produit émis en application des taux des impôts locaux qu'elles ont votés (cf. annexe 5). Il finance donc de fait l'écart entre le produit émis et le produit perçu, qui peut résulter des dégrèvements mais aussi des admissions en non-valeur (contribuables non solvables, contribuables disparus, etc.).

Les compensations d'exonérations sont des allocations annuelles versées par l'État aux collectivités locales pour compenser les pertes de recettes fiscales résultant des exonérations et allègements de bases décidés par voie législative. Les exonérations peuvent être décidées soit par l'État, soit par les collectivités locales (communes, EPCI, départements et régions). A la différence des dégrèvements, elles exonèrent son bénéficiaire de l'impôt concerné en n'inscrivant pas au rôle le montant équivalent à l'allègement consenti.

Lorsque les exonérations ou abattements sont soumis à délibération des collectivités, ils ne sont pas compensés par l'État mais sont à la charge des collectivités concernées. A l'inverse, lorsque les exonérations s'imposent aux collectivités, l'État les compense en fonction de règles de calcul propres à chaque compensation et définies par la loi.

Ainsi, le mécanisme de compensation dépend de décisions nationales : chaque collectivité ne dispose plus d'un pouvoir direct sur l'évolution de cette recette dans son budget. Cette recette a donc perdu toute nature fiscale pour la collectivité (en particulier, les variations de taux décidées par les collectivités ne sont plus prises en charge par l'État), mais son montant reste lié au montant des ressources fiscales que percevait la collectivité avant l'exonération. Au contraire des dégrèvements, les compensations d'exonération sont retracées de façon comptable en prélèvements sur recettes.

Source : annexe « Transferts financiers de l'Etat aux collectivités territoriales » au PLF 2012

Selon l'annexe « Transferts financiers de l'Etat aux collectivités territoriales » au PLF 2012, la part de la fiscalité locale prise en charge par l'Etat avait légèrement crû ces dernières années, notamment du fait de l'accroissement du nombre de dispositifs d'allègement . Cette légère progression cachait toutefois des évolutions divergentes entre les dégrèvements (dont le dynamisme des bases dégrevées ajouté à l'accroissement du nombre de dispositifs était plus important que celui des produits) et les compensations au dynamisme plus modéré.

Evolution de la part de fiscalité directe locale prise en charge par l'Etat

(en %)

Source : jaune « Transferts financiers de l'Etat aux collectivités territoriales »

Le graphique qui précède montre que le taux de prise en charge est ainsi passé de 22,9 % en 2004 à un maximum de 26,3 % en 2008. Le léger décrochage constaté en 2009 est lié aux minorations des compensations d'exonération qui permettent de respecter l' « enveloppe normée » . L'inflexion brutale observée en 2010 et qui se poursuit en 2011 traduit l'impact de la réforme de la taxe professionnelle , explicité supra .

Cette évolution n'est toutefois pas uniforme selon les catégories de collectivités. Le graphique qui suit montre ainsi que la part de ressources fiscales des régions prise en charge par l'Etat progresse avec la réforme de la fiscalité directe locale, du fait de la prépondérance de la CVAE dans leur nouveau panier de ressources . En effet, près du tiers de cet impôt est pris en charge par l'Etat par le biais du dégrèvement barémique .

Evolution de la part de fiscalité directe locale
prise en charge par l'Etat selon les catégories de collectivités

(en %)

Source : jaune « Transferts financiers de l'Etat aux collectivités territoriales »

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