PREMIÈRE PARTIE : MISSION « AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT »
CHAPITRE I

LA MISSION DANS SON CONTEXTE

La mission « Aide publique au développement » constitue la principale des missions budgétaires contribuant à la politique menée en faveur des pays en développement. Elle est dotée par le présent projet de loi de finances (PLF) de 2,722 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 3,309 milliards en crédits de paiement (CP) , soit seulement un tiers , en CP , des dépenses totales de l'APD française prévues pour 2012 (10 milliards d'euros) 2 ( * ) .

Par rapport à la LFI pour 2011, cette dotation pour 2012 correspond à une baisse des AE de 49 % , les CP étant quasi-constants .

L'objectif final de la politique d'aide publique au développement (APD) consiste à réduire la pauvreté dans le monde , en favorisant le développement économique et humain des pays inscrits par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) comme récipiendaires de cette aide et, en particulier, en concourant à l'atteinte des «Objectifs du Millénaire pour le développement » des Nations-Unies, ainsi qu'à la protection des biens publics mondiaux, tout en visant à améliorer l'efficacité de l'aide ainsi apportée. Il s'agit aussi de contribuer, par ce canal, au rayonnement international de la France .

Les orientations, en la matière, sont fixées par le Comité interministériel pour la coopération internationale et le développement (CICID), dont le secrétariat se trouve conjointement assuré par la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats (DGM) du ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE), la direction générale du Trésor (DGT) du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (MINEFII) enfin le service des affaires internationales et du développement solidaire (SAIDS) du ministère chargé de l'immigration, aujourd'hui le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

La mission « Aide publique au développement », outil interministériel, traduit cette triple tutelle. Elle est en effet organisée en trois programmes, dont chacun correspond à l'un des ministères précités :

- le programme 110, « Aide économique et financière au développement », relève du ministère chargé de l'économie ;

- le programme 209, « Solidarité à l'égard des pays en développement », est piloté par le ministère chargé des affaires étrangères ;

- le programme 301, « Développement solidaire et migrations », se trouve placé sous la responsabilité du ministère chargé de l'immigration.

Cependant, l'APD française, qui depuis 2006 fait l'objet d'un « document de politique transversale » (DPT) annexé au PLF de chaque année, excède très largement le périmètre de cette mission . Celle-ci ne rend compte que d'une partie minoritaire un tiers, selon les prévisions pour 2012 des moyens mis en oeuvre en ce domaine. En outre, par nature, les actions retracées par la mission doivent être appréciées dans leur contexte international.

Cette année encore , et malgré les protestations en 2010 des députés et des sénateurs rapporteurs de la mission « Aide publique au développement », le DPT retraçant l'aide publique au développement n'a pas été communiqué lors de la présentation du présent rapport à votre commission des finances . Cette situation nuit non seulement à la qualité des travaux parlementaires , mais aussi à la transparence de l'action gouvernementale .

I. LES GRANDES TENDANCES DE L'APD INTERNATIONALE ET FRANÇAISE

A. L'ÉVOLUTION INTERNATIONALE

1. Une aide globalement orientée à la hausse
a) Une croissance qui se poursuit malgré la crise (128,7 milliards de dollars d'APD en 2010, soit + 6,5 % en un an)

D'après les données publiées par l'OCDE en avril dernier, les apports nets (c'est-à-dire déduction faite des remboursements de prêts) d'aide publique au développement (APD), consentis par les Etats membres du comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, ont augmenté en 2010, par rapport à 2009, de 6,5 % en termes réels, et atteint 128,7 milliards de dollars .

La crise économique et financière n'a donc pas entravé la poursuite de la progression d'APD enregistrée, au niveau international, ces dernières années. En termes réels, après une baisse de 8,4 % en 20073 ( * ), les volumes d'APD des pays du CAD ont augmenté de 10,2 % en 2008 et 0,7 % en 2009. En valeur, le montant d'APD a atteint un maximum historique en 2010, dépassant le précédent record de 2005 ; en pourcentage du revenu national brut (RNB) cumulé des Etats membres du CAD, elle est passée entre 2004 et 2009 de 0,26 % à 0,32 %, très proche des maximums (0,33 %) enregistrés en 1992 et en 2005.

L' aide bilatérale nette affectée à des programmes et à des projets de développement, hors allègements de dettes et aide humanitaire , a augmenté de 5,9 % en termes réels. La plus grande part de cette hausse s'est réalisée sous la forme de nouveaux prêts (en augmentation de 13,2 % par rapport à 2008), mais les dons ont aussi crû (+ 6,8 % hors abandons de dettes). Les projets et programmes bilatéraux de développement suivent une tendance ascendante, ayant déjà progressé de 12,5 % en 2008 et 8,5 % en 2009, comme l'illustre le graphique ci-après.

Ces apports bilatéraux se sont élevés, l'année dernière, à 29,3 milliards de dollars en faveur du continent africain , soit une progression de 9 % , en termes réels, par rapport à l'exercice précédent. Sur ce total, 26,5 milliards de dollars (soit 50 % du total) ont bénéficié à la seule Afrique subsaharienne, en augmentation de 10 % par rapport à 2009.

APD nette émanant des Etats membres du CAD

(en milliards de dollars constants 2009)


Source : OCDE

Parmi les principaux donneurs, en volume , les Etats-Unis conservent leur premier rang , avec un apport net d'APD s'élevant à 30,15 milliards de dollars courants en 2010, soit une progression annuelle, en termes réels (hors variation des prix et des taux de change), de 3,5 %. Entre 2009 et 2010, le ratio APD/RNB américain est resté stable à 0,21 %. Avec une APD de 12,9 milliards de dollars, la France occupe la troisième place 4 ( * ) , ayant été dépassée par le Royaume-Uni (troisième en 2009) , mais restant devant l'Allemagne et le Japon .

On observe que, en 2010, l'APD nette cumulée des quinze Etats membres du CAD appartenant à l'Union européenne a augmenté (+ 6,7 %), représentant 70,15 milliards de dollars, soit 0,46 % de leur RNB cumulé, et 54,5 % de l'APD totale émanant des membres du CAD pour l'exercice. A ces aides des Etats membres s'ajoute celle des institutions de l'Union européenne (13 milliards de dollars), en légère hausse de 0,8 %.

Contribution à l'APD, en 2010, des Etats membres du CAD

I. Contribution en volume (apports nets, en milliards de dollars)

Source : OCDE

II. Contribution en valeurs relatives à la richesse nationale (apports nets, en % de RNB)

Source : OCDE

En valeurs relatives , c'est-à-dire au regard du ratio APD/RNB, les cinq principaux donneurs , en 2010, ont été, dans l'ordre, la Norvège, le Luxembourg, la Suède, le Danemark et les Pays-Bas . Ces pays sont les seuls qui, pour cet exercice, ont atteint et dépassé l'objectif, fixé par les Nations-Unies à l'échéance de 2015, d'une APD atteignant au moins 0,7 % du RNB ; les deux premiers (Norvège et Luxembourg) présentent même un rapport APD/RNB supérieur à 1 %. Avec un ratio de 0,50 %, la France se classe dixième , très proche de la moyenne des Etats du CAD (0,49 %). Les Etats-Unis sont à la dix-neuvième place, dépassant de peu la Grèce.


* 2 Ce chiffre inclut des dépenses qui, selon les normes internationales, ne doivent pas être comprises dans les données d'aide publique au développement (comme l'aide versée aux territoires d'outre-mer), ce qui explique le décalage avec les données internationales présentées ci-après.

* 3 Cette baisse de 2007 était essentiellement due à la fin de certaines opérations exceptionnelles d'allègements de dettes, en particulier au profit de l'Irak et du Nigeria.

* 4 L'effort national d'APD en 2010 fait l'objet de développements infra (B).

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