B. LE RÉAMÉNAGEMENT DES RESSOURCES DE LA CNAF

1. Le principe de la compensation des pertes de recettes pour la CNAF

Le IV de l'article 1 er du présent projet de loi explicite les deux ressources qui permettront de compenser à la branche famille les pertes de recettes induites par le nouveau calcul des cotisations patronales « Famille » :

- d'une part, la ressource mentionnée au 9° de l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale (soit une part de TVA ) ;

- d'autre part, la part correspondant à la hausse de la CSG sur les revenus du capital , introduite par le présent PLFR.

Votre rapporteure générale reviendra sur la portée de ce mécanisme de compensation dans la suite du présent rapport.

2. Une hausse de 1,6 point du taux normal de TVA
a) Un taux normal actuel de TVA à 19,6 %

L'article 97 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) autorise les Etats membres à appliquer un taux normal de TVA qui ne peut pas être inférieur à 15 %.

En application de l'article 278 du code général des impôts (CGI), ce taux normal est en France métropolitaine de 19,6 % depuis le 1 er avril 2000.

L'article 297 du CGI prévoit plusieurs taux de TVA dérogatoires au taux normal dans les départements de Corse , en fonction des produits et services concernés. En particulier, un taux de TVA à 8 % s'applique pour les travaux immobiliers, les ventes de matériels agricoles livrés en Corse 124 ( * ) , des fournitures de logement en meublé, les ventes à consommer sur place (en dehors du cas des cantines d'entreprise) et les ventes d'électricité effectuées en basse tension. De même, un taux de 13 % est appliqué aux ventes de produits pétroliers livrés en Corse.

Hormis ces cas particuliers visés par des dispositions spécifiques à l'article 297 du CGI, le taux normal de 19,6 % prévu à l'article 278 du CGI s'applique dans les départements de Corse.

En application de l'article 296 du CGI, le taux normal de TVA est en revanche fixé à 8,5 % dans les départements de Guadeloupe , de la Martinique et de La Réunion .

En application de l'article 294 du CGI, la TVA n'est provisoirement pas applicable dans le département de la Guyane . Elle n'est pas non plus applicable à Mayotte .

Il convient par ailleurs de souligner qu'au regard de la TVA les exploitants agricoles relèvent d'un régime particulier. En effet, en application de l'article 298 bis du CGI, les exploitants agricoles sont placés, pour leurs opérations agricoles, sous le régime du remboursement forfaitaire 125 ( * ) . Ils sont ainsi dispensés du paiement de la TVA et des obligations qui incombent aux assujettis. Dans ce cadre, le taux du remboursement forfaitaire est fixé pour les ventes faites à compter du 1 er janvier 2012 :

- à 4,63 % pour le lait, les animaux de basse-cour, les oeufs, les animaux de boucherie et de charcuterie définis par décret, ainsi que les céréales, les graines oléagineuses et les protéagineux mentionnés à l'annexe I du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 ;

- à 3,68 % pour les autres produits.

b) Une augmentation de 1,6 point du taux normal de TVA, accompagnée d'aménagements sectoriels (figurant notamment à l'article 1er A)


• Le IV
de l'article 1 er du présent projet de loi vise à augmenter le taux normal de TVA tout en accompagnant cette hausse de dispositions spécifiques .

Le 1° du A de ce paragraphe prévoit la hausse du taux normal de TVA de 19,6 % à 21,2 % en modifiant l'article 278 du CGI.


• Le 2° du A
du même paragraphe modifie l'article 297 du CGI relatif aux taux dérogatoires dans les départements de Corse :

- le taux de TVA à 8 % s'appliquant actuellement aux travaux immobiliers, aux ventes de matériels agricoles, aux fournitures de logement en meublé, aux ventes à consommer sur place et aux ventes d'électricité effectuées en basse tension ( Cf. supra ) passe à 8,7 % ;

- le taux de 13 % appliqué aux ventes de produits pétroliers ( cf. supra ) enregistre une hausse pour se fixer à 14,1 %.


• Le 3° du A
concerne le régime des exploitants agricoles . A compter du 1 er octobre 2012, leurs taux de remboursement forfaitaire ( cf. supra ) passeront, respectivement, de 4,63 % à 4,73 % et de 3,68 % à 3,78 %. Ces taux seront ensuite relevés, à compter du 1 er janvier 2013, à 5,01 % et à 4,06 % ( B du IV ).


• Le 4° du A
procède, pour sa part, à un ajustement à la baisse du taux normal du droit de consommation sur les cigarettes et les tabacs . Cet ajustement est décrit dans le tableau ci-dessous.

Le lien particulier entre la TVA et le prix des tabacs

Le lien entre les prix des tabacs manufacturés (homologués par arrêté) et la fiscalité est à double sens. En effet, tous les éléments du prix sont définis en pourcentage du prix de détail et sont donc interdépendants. S'agissant de la TVA en particulier, on parle ainsi d'un « taux en dedans » du prix de vente au détail : le taux normal de 19,6 % correspond à un taux de 16,3856 % « en dedans ».

Dans ces conditions, une modification du prix du fabricant entraîne une hausse du prix de détail et donc du montant des prélèvements et de la rémunération des buralistes. Inversement, une hausse du droit de consommation modifie l'assiette de la TVA et le montant de taxe collecté. Une modification du taux de TVA se répercute sur le prix de vente au détail et donc sur le droit de consommation pour maintenir le taux global de prélèvement. Enfin, une hausse de la remise des buralistes entraîne soit une hausse du prix de détail et des taxes, soit, sans modification du prix de détail, une baisse de la marge des fabricants.

A prix constant, une hausse de TVA entraîne soit une diminution de la remise brute allouée au débitant, alors que sa hausse progressive est prévue dans le cadre du troisième « Contrat d'avenir » passé avec la profession des buralistes, soit une diminution du prix du fabricant, soit enfin une diminution du droit de consommation.

Concrètement, la hausse de 1,6 point du taux normal de TVA appliqué au prix hors taxe  correspond à une hausse de 1,1038 point de la TVA  appliqué au prix TTC, qui est l'agrégat pertinent en matière de fiscalité des produits du tabac.

Pour maintenir  en niveau  le prix hors taxe et remise (PHTR)  d'un paquet de cigarettes, les fabricants devraient augmenter de 11,3 % le prix de vente au public (PVP) pour compenser la hausse  globale  de prélèvement de 1,1038 point. Mais compte tenu de la baisse en volume du marché consécutive à une telle augmentation des prix  (on retient en général une élasticité de l'ordre de - 0,5  ce qui signifie que les volumes consommés diminueraient de 5,7 %), l'augmentation de prix nécessaire au maintien du PHTR global des fabricants pourrait atteindre jusqu'à 15 %.

Le choix retenu par le Gouvernement dans le cade de l'article 1 er du présent projet de loi consiste donc à compenser la hausse de la TVA par une baisse du droit de consommation. Ce choix permet de maintenir une charge fiscale constante sur les produits de tabac.

La baisse du taux normal du droit de consommation sur les cigarettes et les tabacs

Groupe de produit

Taux normal actuel

Taux normal proposé

Cigarettes

64,25 %

63,28 %

Cigares

27,57 %

27,29 %

Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes

58,57 %

58,02 %

Autres tabacs à fumer

52,42 %

51,32 %

Tabacs à priser

45,57 %

44,47 %

Tabacs à mâcher

32,17 %

31,07 %

Cette même logique a conduit à l'adoption par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, de l'article 1 er A du présent projet de loi de finances rectificative, qui prévoit la remise avant le 15 janvier 2013 d'un rapport sur les conséquences éventuelles pour les consommateurs de l'augmentation du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée sur les prix des carburants . Ce rapport doit se prononcer sur les conditions dans lesquelles les tarifs de la taxe intérieure de consommation devraient, le cas échéant, être ajustés afin de compenser les effets de la hausse du taux de taxe sur la valeur ajoutée.


• Selon les données de l'étude d'impact, la hausse de 1,6 point du taux normal de TVA engendrerait des recettes supplémentaires de 10,6 milliards d'euros .

Quant à la baisse des droits de consommation sur les tabacs, elle entraînerait une perte de recettes pour la sécurité sociale de 160 millions d'euros en année pleine .

c) Son affectation à la CNAF

Afin de compenser une partie des pertes de recettes de la CNAF au titre du nouveau mode de calcul des cotisations familiales, une part du produit de la TVA - dont le montant correspond à la hausse de 1,6 point de cette taxe - lui est affectée.

Le 4° du A du II de l'article 1 er du présent projet de loi complète ainsi les ressources de la CNAF en y ajoutant une fraction égale à 6,70 % du produit de la TVA nette correspondant aux montants de cette taxe enregistrée au titre de l'année par les comptables publics, déduction faite des remboursements et restitutions effectuées pour la même période par les comptables assignataires.


* 124 Leur liste est fixée par arrêté du ministre de l'économie et des finances.

* 125 Ils peuvent cependant aussi opter pour une imposition d'après un régime simplifié.

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