EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er (art. L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles) - Elargissement de l'assiette de la contribution de solidarité pour l'autonomie

Objet : Cet article a pour objet d'élargir l'assiette de la contribution de solidarité pour l'autonomie aux travailleurs non salariés ainsi qu'aux retraités.

I - Le dispositif de la proposition de loi

Jusqu'en 2004, la participation de l'Etat au financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) était assurée via le fonds de financement de l'Apa (Ffapa). Deux recettes étaient affectées à ce fonds :

- une participation des régimes obligatoires de base d'assurance vieillesse égale à une fraction comprise entre 50 % et 75 % des dépenses d'aide ménagère à domicile consacrées en 2000 par ces régimes aux personnes âgées dépendantes ;

- une fraction de 0,1 point de CSG précédemment affectée au fonds de solidarité vieillesse (FSV).

L'article 11 de la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées 18 ( * ) est venu compléter ces ressources en créant la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA).

L'ensemble des produits affectés à la CNSA est aujourd'hui codifié à l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles.

Deux types de ressources composent la CSA :

- une contribution de 0,3 % assise sur les revenus des travailleurs salariés due par les employeurs privés et publics, correspondant à la « journée de solidarité » ; son assiette est identique à celle des cotisations patronales d'assurance maladie ;

- une contribution additionnelle de 0,3 % au prélèvement social de 2 % qui s'applique aux revenus du patrimoine et aux produits de placement.

La CSG et la CSA constituent aujourd'hui les deux ressources propres de la CNSA.

La circulaire n° 2004-113 du 8 juillet 2004 est venue préciser le champ d'application de la CSA. Y sont notamment assujetties :

- les sommes versées aux stagiaires en entreprise pour lesquels l'entreprise d'accueil est redevable de la cotisation patronale d'assurance maladie ;

- les rémunérations versées aux personnes affiliées au régime général en application de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale 19 ( * ) ;

- les rémunérations versées par les particuliers employeurs ;

- les rémunérations versées aux salariés exclus du champ d'application de la mensualisation tels que les salariés titulaires d'un contrat de travail temporaire, les travailleurs saisonniers, les travailleurs intermittents ou les travailleurs à domicile, l'employeur étant redevable de la cotisation patronale d'assurance maladie.

Sont concernées les rémunérations versées à des salariés affiliés à tout régime français d'assurance maladie : régime général ; régime salarié agricole ; un des régimes spéciaux relevant de l'article L. 711-1 du code de la sécurité sociale 20 ( * ) ; un des régimes de sécurité sociale des deux assemblées parlementaires. En revanche, les travailleurs expatriés relevant de la Caisse des Français de l'étranger ne sont pas soumis à la CSA.

Le rendement de la CSA s'est élevé en 2011 à 2,3 milliards d'euros.

Evolution du rendement de la CSA depuis 2006

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

CSA sur les revenus d'activité

1 777

1 844

1 887

1 887

1 918

1 973

2 020

2 063

CSA sur les revenus du patrimoine

161

202

215

151

138

145

152

156

CSA sur les revenus de placement

148

174

194

169

183

216

229

230

Total

2 085

2 220

2 296

2 206

2 239

2 334

2 401

2 448

Source : CNSA

Le présent article a pour objet d'élargir l'assiette de la CSA en instituant un prélèvement de 0,3 %, d'une part sur les travailleurs non salariés, d'autre part sur les pensions de retraite.

Par parallélisme avec les dispositions de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles relatives à la cotisation payée par les employeurs privés et publics, il est prévu de définir l'assiette et les modalités de recouvrement des deux prélèvements nouvellement créés sur la base des règles applicables aux cotisations d'assurance maladie.

Selon les informations fournies à votre rapporteur, l'élargissement de la CSA aux travailleurs indépendants non agricoles générerait une recette comprise entre 166 et 180 millions d'euros. 1,8 million de cotisants seraient concernés. Ce chiffrage n'inclut pas les auto-entrepreneurs, pour lesquels un dispositif spécifique devrait être envisagé compte tenu des règles de calcul de leurs cotisations sociales. Celles-ci ne sont en effet pas calculées à partir de leur revenu mais par l'application d'un taux unique à leur chiffre d'affaires.

Le produit de la contribution serait de 18 à 30 millions d'euros pour les travailleurs indépendants agricoles.

L'article 16 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 crée une contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) qui s'apparente exactement au dispositif envisagé par la proposition de loi pour les retraités. Il est donc possible de se fonder sur l'étude d'impact annexée au PLFSS pour chiffrer le rendement que générerait l'extension de la CSA aux retraités.

Le projet du Gouvernement prévoit une montée en charge progressive de la CSA : son taux serait de 0,15 % en 2013 puis de 0,30 % à partir de 2014, les recettes attendues étant respectivement estimées à 350 millions d'euros et 700 millions d'euros. Il est donc légitime de considérer que l'application dès 2013 d'un taux de 0,3 %, comme le prévoit la proposition de loi, procurerait 700 millions d'euros cette année-là.

Ces prévisions se fondent sur une assiette dont sont exclus les retraités touchant les pensions les plus modestes. Ne seront en effet pas incluses dans le champ de la CSA, aux termes de l'article 16 du PLFSS, les rentes perçues par les invalides de guerre et les anciens combattants, les personnes bénéficiant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ex « minimum vieillesse ») ainsi que celles dont le revenu fiscal de référence est inférieur au seuil d'assujettissement à la taxe d'habitation.

Au final, il est possible d'estimer que l'élargissement de l'assiette de la CSA aux travailleurs indépendants, agricoles et non agricoles, ainsi qu'aux retraités, rapporterait entre 884 et 910 millions d'euros en 2013.

II - La position de votre rapporteur

Pour le moment, la proposition de loi ne s'applique pas aux travailleurs indépendants agricoles. Votre rapporteur estime souhaitable de corriger cet oubli afin que le champ de la proposition de loi s'étende bien à l'ensemble des travailleurs indépendants.

Des améliorations rédactionnelles pourraient également être apportées à l'article 1 er .

En premier lieu, l'alinéa 2 relatif aux travailleurs indépendants non agricoles renvoie à l'article L. 612-4 du code de la sécurité sociale pour la définition de l'assiette et des modalités de recouvrement de la contribution. C'est en effet cet article qui définit les règles applicables aux cotisations d'assurance maladie des travailleurs indépendants. C'est cependant l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale qui, depuis la LFSS pour 2012, définit l'assiette de l'ensemble des cotisations obligatoires pour toutes les catégories de travailleurs indépendants non agricoles. Une même assiette s'applique ainsi pour l'ensemble des cotisations d'assurance maladie et maternité, d'allocations familiales et d'assurance vieillesse de cette catégorie de travailleurs. Renvoyer aux règles fixées par ce dernier article apparaît plus adapté à votre rapporteur.

Les cotisations d'assurance maladie sont recouvrées à la fois par le réseau des Urssaf et par le RSI, ce qui risque de complexifier le recouvrement de la CSA. Il conviendrait donc de faire référence aux modalités de recouvrement applicables pour les cotisations d'allocations familiales qui, elles, sont uniquement recouvrées par les Urssaf.

Concernant l'élargissement de l'assiette de la CSA aux pensions de retraite, la formulation adoptée et le renvoi à l'article L. 131-1 du code de la sécurité sociale apparaissent trop larges pour être suffisamment précis. Faire référence à l'assiette des cotisations d'assurance maladie pour les pensions de retraite sans autre précision pose en effet difficulté à partir du moment où les pensions versées par les régimes de base ne sont plus soumises à cotisations maladie depuis 1998 et leur basculement vers la CSG.

Outre le risque d'asseoir la cotisation sur une assiette n'existant plus, cette formulation trop générale ne permet pas d'exclure explicitement les pensions les plus modestes du paiement de la contribution. Votre rapporteur estime donc souhaitable de clarifier la rédaction de cet alinéa.

Toutefois, votre rapporteur a choisi de ne pas présenter d'amendements au stade de la commission et ce, afin de respecter l'accord politique relatif à l'examen des propositions de loi de groupes minoritaires ou d'opposition tendant à ce que la commission n'adopte pas de texte et que soit examinée en séance la proposition de loi dans sa rédaction initiale.

C'est donc au stade de la séance que votre rapporteur présentera les amendements à l'article 1 er .

Article 2 (art. L. 3133-7 du code du travail) - Coordination avec le code du travail

Objet : Cet article vise à effectuer une coordination dans le code du travail concernant la journée de solidarité.

I - Le dispositif de la proposition de loi

L'article L. 3133-7 du code du travail effectue le lien entre « journée de solidarité » et CSA. Il dispose en effet que la journée de solidarité créée par la loi du 30 juin 2004 précitée prend la forme, pour les salariés, d'une journée de travail non rémunérée, et pour les employeurs, de « la contribution prévue au 1° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles » , c'est-à-dire de la CSA.

Le présent article a pour but d'effectuer une coordination avec l'élargissement de l'assiette de la CSA prévu à l'article 1 er de la présente proposition de loi en renvoyant à la cotisation pesant sur les travailleurs indépendants et les pensions de retraite.

II - La position de votre rapporteur

L'article L. 3133-7 du code du travail est avant tout la traduction du lien initialement prévu entre la journée de solidarité et la CSA. La contribution envisagée par la présente proposition de loi pour les travailleurs et les retraités ne s'inscrit pas dans la même logique puisqu'elle peut difficilement être envisagée comme la contrepartie d'une journée de travail non rémunérée.

En conséquence, votre rapporteur estime nécessaire de supprimer cet article.

Par cohérence avec la position exprimée à l'article 1 er , il n'a cependant pas présenté d'amendement de suppression en commission et le fera au moment de l'examen du texte en séance.

Article 3 (art. L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles) - Affectation de la recette nouvellement créée au sein du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

Objet : Cet article a pour objet de modifier les clés de répartition des différentes recettes au sein du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie afin d'affecter entièrement la recette nouvellement créée au financement de l'allocation personnalisée d'autonomie.

I - Le dispositif de la proposition de loi

- L'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles fixe les règles relatives à la structure du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Celui-ci est divisé en six sections.

L'origine des ressources de la CNSA et la destination de ses charges peuvent être schématisées de la façon suivante :

Produits

Section

Charges

I. Etablissements et services :

Etablissements ou services sociaux et médico-sociaux
Maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades d'Alzheimer (Maia)

10 % à 14 % de la CSA
Ondam médico-social

1. Personnes handicapées

40 % de la CSA
Ondam médico-social

2. Personnes âgées

20 % de la CSA
88 % à 95 % de la CSG affectée à la CNSA
Contribution des régimes de base d'assurance vieillesse

II. Allocation personnalisée d'autonomie (Apa)

Concours aux départements pour le financement de l'Apa

26 % à 30 % de la CSA

III. Prestation de compensation du handicap (PCH)

Concours aux départements pour le financement de la PCH

5 % à 12 % de la CSG affectée à la CNSA
12 % au maximum de la CSA affectée à la section I. 2.

IV. Actions innovantes, formation, professionnalisation

Modernisation et professionnalisation des métiers d'assistance aux personnes âgées et handicapées

Formation des aidants et accueillants familiaux

2 % de la CSA affectée à la section I

V. Autres dépenses

Notamment plan d'aide à l'investissement depuis 2011

Contributions autres sections

VI. Frais de gestion

- L'objectif de la proposition de loi étant d'affecter entièrement à la section II, c'est-à-dire au financement de l'Apa, la recette nouvellement créée, le présent article a pour objet de modifier les clés de répartition des différentes ressources affectées au budget de la CNSA.

Les modifications introduites conduiraient donc à la répartition suivante au sein du budget de la CNSA :

Produits

Section

Charges

I. Etablissements et services :

Etablissements ou services sociaux et médico-sociaux
Maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades d'Alzheimer (Maia)

7 % à 10 % de la CSA *
Ondam médico-social

1. Personnes handicapées

30 % de la CSA *
Ondam médico-social

2. Personnes âgées

40 % de la CSA *
88 % à 95 % de la CSG affectée à la CNSA
Contribution des régimes de base d'assurance vieillesse

II. Allocation personnalisée d'autonomie (APA)

Concours aux départements pour le financement de l'Apa

20 % à 23 % CSA *

III. Prestation de compensation du handicap (PCH)

Concours aux départements pour le financement de la PCH

5 % à 12 % de la CSG affectée à la CNSA
12 % au maximum de la CSA affectée à la section I. 2.

IV. Actions innovantes, formation, professionnalisation

Modernisation et professionnalisation des métiers d'assistance aux personnes âgées et handicapées

Formation des aidants et accueillants familiaux

2 % de la CSA affectée à la section I

V. Autres dépenses

Notamment plan d'aide à l'investissement depuis 2011

Contributions autres sections

VI. Frais de gestion

* Les pourcentages soulignés correspondent aux modifications que propose d'introduire l'article.

Cette modification des clés de répartition a été effectuée sur la base d'une estimation de recettes comprise entre 884 et 910 millions d'euros, de telle sorte qu'aucune section ne soit perdante à la réaffectation des produits au sein du budget de la CNSA.

II - La position de votre rapporteur

- L'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles dispose que la part de CSA destinée aux personnes handicapées doit représenter 40 % de l'ensemble du produit de la contribution. La proposition de loi élargit l'assiette de la CSA en affectant entièrement la recette nouvellement créée aux personnes âgées. Il conviendrait donc de ramener cette part à 30 %.

En outre, l'article 3 nécessite plusieurs améliorations rédactionnelles. En particulier, il conviendrait de modifier les références qui sont effectuées dans l'article L. 14-10-5 à la CSA de façon à ce que soit pris en compte l'élargissement de l'assiette de la contribution.

- Par cohérence avec la position exprimée à l'article 1 er , votre rapporteur n'a pas présenté d'amendement au stade de la commission et le fera au moment de l'examen du texte en séance.

Article 4 - Gage

Objet : Cet article a pour objet de gager les charges pouvant résulter de la proposition de loi.

I - Le dispositif de la proposition de loi

Cet article a pour objet de compenser à due concurrence les conséquences financières qui pourraient résulter de la proposition de loi pour les collectivités territoriales.

Il s'agit d'un gage « en cascade ». La majoration de la dotation globale de fonctionnement (DGF) destinée aux collectivités territoriales est elle-même compensée pour l'Etat par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II - La position de votre rapporteur

La présente proposition de loi crée une recette nouvelle qu'elle affecte entièrement aux départements. Si seule la section II du budget de la CNSA bénéficie de ce surcroît de recettes, les modifications introduites à l'article 3 concernant la répartition du produit de la CSA au sein des différentes sections ont justement été prévues afin qu'aucune de ces sections n'ait à souffrir d'une baisse de ses recettes.

Votre rapporteur s'interroge donc sur l'opportunité d'avoir introduit un tel gage dans la proposition de loi.


* 18 Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

* 19 Cet article dresse une liste de professions pour lesquelles l'affiliation au régime général est obligatoire, quelles que soient les conditions de travail des personnes concernées ou la forme que prend leur rémunération (versement de pourboires ou non). Y figurent notamment les employés d'hôtels ou les vendeurs à domicile.

* 20 Le champ de cet article est précisé à l'article R. 711-1 du code de la sécurité sociale ; il s'agit : des administrations, services, offices, établissements publics de l'Etat, établissements industriels de l'Etat, de l'Imprimerie nationale, pour les fonctionnaires, les magistrats et les ouvriers de l'Etat ; des régions, départements et communes ; des établissements publics départementaux et communaux n'ayant pas le caractère industriel et commercial ; des activités qui entraînent l'affiliation au régime d'assurance des marins français ; des entreprises minières et assimilées, à l'exclusion des activités se rapportant à la recherche ou à l'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux ; de la Société nationale des chemins de fer français ; des chemins de fer d'intérêt général secondaire et d'intérêt local et des tramways, des exploitations de production, de transport et de distribution d'énergie électrique et de gaz ; de la Banque de France ; du Théâtre national de l'Opéra de Paris et de la Comédie française.

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