PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement du Conseil confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit (E 7684),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne) en ce qui concerne son interaction avec le règlement du Conseil confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit (E 7685),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil intitulée feuille de route pour une union bancaire,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement et la résolution des défaillances d'établissements de crédit et d'entreprises d'investissement (E 7417),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux systèmes de garantie des dépôts (E 5512),

Juge préoccupants le repli progressif des acteurs financiers sur leurs marchés nationaux, la fragmentation du marché financier européen et leurs conséquences sur le financement de l'économie ;

Rappelle les termes de sa résolution n° 113 (2011-2012) concernant les propositions de règlementations prudentielles dites « CRD IV », en souhaitant que leur mise en oeuvre en Europe s'opère en même temps qu'aux États-Unis et en insistant sur la nécessité de veiller à ne pas compromettre le financement des entreprises et des collectivités territoriales par les établissements bancaires ;

Relève que les craintes sur la solidité du système bancaire de la zone euro pèsent sur la capacité de celle-ci à sortir de la crise ;

Estime, en conséquence, qu'il est primordial de mettre un terme au cercle vicieux entre dettes souveraines et dettes bancaires ;

Souligne que les pratiques de supervision bancaire nationales ne sont pas suffisamment harmonisées, comme l'a par exemple montré la mise en oeuvre des tests de résistance ;

Soutient et juge essentielle la création d'une union bancaire européenne, reposant sur un mécanisme de surveillance unique (MSU), un cadre de résolution des défaillances bancaires et un système de garantie des dépôts ;

1. Principe et calendrier

Précise que, à la suite du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012, la Commission européenne a déposé une proposition afin de mettre en oeuvre le MSU ;

Considère que la mise en place rapide d'une supervision des banques par la Banque centrale européenne, élément majeur à la construction d'une union bancaire, est une réponse appropriée aux contraintes financières et économiques de la zone euro ;

Souhaite que le MSU puisse être opérationnel dès la première moitié de l'année 2013 ;

2. Champ de la supervision européenne

Considère qu'il est indispensable que toutes les banques de la zone euro, indépendamment de leur taille, soient soumises à la supervision européenne ;

Estime, à cet égard, qu'une approche différenciée ou graduelle dans la mise en place du superviseur européen ne doit pas remettre en cause l'objectif d'une intégration de l'ensemble du système bancaire dans le champ de son contrôle, seule à même d'assurer la stabilisation de la zone euro ;

3. Règles internes de la BCE

Souhaite, tout en conservant un calendrier serré d'adoption, que soient proposés :

- les moyens d'assurer l'indépendance institutionnelle et fonctionnelle entre supervision bancaire et politique monétaire ;

- des règles précises concernant l'autorité de la Banque centrale européenne sur les superviseurs nationaux afin de garantir la pleine responsabilité de la Banque centrale européenne dans la supervision ;

- une révision de la gouvernance proposée pour la future supervision européenne, afin de prévoir, au sein du comité de surveillance, la participation de personnalités extérieures qualifiées ainsi que la constitution d'un comité exécutif restreint ;

4. Répartition des compétences avec les superviseurs nationaux

Insiste sur la responsabilité unique de la Banque centrale européenne, dont les décisions de supervision seront préparées et mises en oeuvre par les superviseurs nationaux ;

5. Recapitalisation par le Mécanisme européen de stabilité

Considère la mise en place effective du MSU comme un préalable à la possibilité d'une recapitalisation directe des banques par le mécanisme européen de stabilité (MES), conformément aux conclusions du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012 ;

Souligne cependant la nécessité de clarifier le calendrier et les conditions dans lesquels le MES pourra être amené à procéder à une telle recapitalisation, ainsi que les établissements bancaires qui pourront en bénéficier ;

6. Participation des États membres hors de la zone euro

Juge important que les États membres dont la monnaie n'est pas l'euro aient la possibilité de rejoindre le MSU, selon des modalités d'association de leurs superviseurs nationaux à la Banque centrale européenne adaptées au cadre juridique de cette dernière et aux spécificités de leurs secteurs bancaires domestiques respectifs ;

7. Articulation avec l'Autorité bancaire européenne

Soutient fermement l'objectif d'adoption, dans le cadre de la mise en place de l'union bancaire, d'une réglementation unique assurant la solidité et le bon fonctionnement du secteur bancaire ;

Réaffirme le rôle central de l'Autorité bancaire européenne en tant qu'autorité de régulation des 27 États membres de l'Union européenne ;

Soutient le projet de la Commission européenne de confier à l'Autorité bancaire européenne la mission d'établir un manuel uniforme des pratiques de supervision conformes à l'intérêt européen et restaurant la confiance des investisseurs. Doivent y figurer notamment :

- les moyens de la fiabilisation des tests de résistance et du contrôle des modèles internes de valorisation des risques utilisés par les banques ;

- le contrôle des éléments clés de la gouvernance des établissements financiers et des politiques de rémunération ;

8. Extension du MSU à l'ensemble des établissements financiers

Rappelle l'importance de la supervision des chambres de compensation au regard du risque systémique qu'elles présentent et prend acte de l'entrée en application en 2013 du règlement « EMIR » ;

Considère, dans ce cadre, qu'il est souhaitable que la supervision par la Banque centrale européenne soit à terme progressivement étendue de façon homogène à l'ensemble des chambres de compensation ;

Souhaite que la supervision unique européenne couvre, à terme, les entreprises d'assurance ;

9. Contrôle démocratique

Souligne la nécessité d'une réponse institutionnelle aux attentes légitimes de contrôle démocratique de l'union bancaire au regard des conséquences financières et politiques des décisions de supervision ;

Demande en conséquence que le contrôle de la supervision bancaire européenne soit une des missions explicites de la formation chargée de la zone euro au sein de la Conférence interparlementaire prévue à l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance ou, à défaut, fasse l'objet d'une commission ad hoc de la Conférence des Organes Spécialisés dans les Affaires Communautaires (COSAC) conformément à l'article 10 du protocole n° 1 annexé au Traité de Lisbonne ;

Souhaite que les États membres de la zone euro prennent l'initiative de créer un comité parlementaire de supervision de la gouvernance de la zone euro, et en particulier de l'union bancaire, constitué de représentants des commissions compétentes des Parlements nationaux et du Parlement européen ;

Demande que, lorsqu'une situation d'une particulière gravité est identifiée par la Banque centrale européenne concernant un ou plusieurs établissements bancaires d'un État membre, le président du comité de surveillance de la BCE soit entendu par le Parlement national de cet État membre si celui-ci en fait la demande ;

10. Adoption d'un cadre commun de redressement et de résolution des défaillances bancaires

Appelle, dans le cadre de la constitution de l'union bancaire, à une adoption rapide de la proposition visant à l'harmonisation européenne des régimes de redressement et de résolution des défaillances d'établissements de crédit et d'entreprises d'investissement ;

Soutient le projet de la Commission de mise en place consécutive d'une autorité commune de résolution au sein de la zone euro, qui devra tenir compte des spécificités des secteurs bancaires et des économies nationales et s'appuyer, pour ce faire, sur les autorités nationales de résolution ;

Demande au Gouvernement de défendre et de faire valoir ces orientations auprès des institutions européennes.

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