F. LA POURSUITE DE L'AMÉLIORATION DE LA PERFORMANCE

La particularité du programme « Conseil d'Etat et autres juridictions administratives » réside, d'une part, dans l'impératif de maîtrise des délais de jugement et, d'autre part, dans la difficulté à évaluer la fonction consultative du Conseil d'Etat, des CAA et des TA.

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) fixait aux juridictions l'objectif de ramener leur délai de jugement à un an . Ce délai peut être désormais considéré comme globalement atteint. Le délai prévisible moyen de jugement des affaires (indicateur 1.1) est en effet de :

- 9 mois devant le Conseil d'Etat en 2012, avec une prévision identique pour 2013 ;

- 11 mois dans les CAA en 2012, avec une prévision de 10 mois et 15 jours pour 2013 ;

- 10 mois dans les TA en 2011, avec une prévision identique pour 2013.

Pour autant, le délai moyen pour les affaires ordinaires (indicateur 1.2) apporte un éclairage utile et complémentaire sur cette performance d'ensemble. En effet, l'indicateur 1.1 « Délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock » sous-estime largement le délai de jugement des affaires « ordinaires » et peut masquer des délais en réalité très élevés dans certaines matières, telles que les affaires au fond en matière de contentieux fiscal ou de contentieux des marchés publics. Il mêle des affaires réglées par simple ordonnance ou des affaires dont le jugement est enserré dans des délais particuliers 12 ( * ) avec les autres affaires.

Le délai moyen pour les affaires ordinaires prévu en 2013 est d'un an et onze mois dans les TA , d'un an et deux mois dans les CAA et d'un an et quatre mois au Conseil d'Etat.

Si les résultats des juridictions administratives confirment ainsi la progression enregistrée au cours des précédentes années, votre rapporteur spécial estime néanmoins qu'ils ne peuvent être considérés comme pleinement satisfaisants du point de vue du justiciable .

S'agissant du Conseil d'Etat, il convient de souligner que la maîtrise du délai de jugement des affaires se vérifie malgré la charge de travail supplémentaire importante induite par le traitement des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) introduite par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 13 ( * ) .

Les progrès accomplis en termes de délais de jugement ne se sont pas effectués au détriment de la qualité des décisions rendues . Ainsi, les taux d'annulation des décisions juridictionnelles sont restés, au cours des dernières années, relativement stables : moins de 15 % des jugements rendus par les TA sont annulés par les CAA par exemple (prévision actualisée pour 2012).

En revanche, la réduction des délais de jugement tient pour une part non négligeable à l'amélioration de la productivité des magistrats de l'ordre administratif au cours des dernières années , même si l'exercice 2012 marque un léger fléchissement de la tendance. Ainsi, le nombre d'affaires réglées par magistrat dans les TA était de 262 en 2007, tandis que la prévision actualisée pour 2012 est de 255, ce niveau correspondant également à la prévision pour 2013. L'effort de productivité apparaît plus nettement cette année concernant les magistrats des CAA (109 affaires réglées en 2008, 115 en 2012 et une prévision de 116 pour 2013), tandis que le Conseil d'Etat stabilise sa performance (80 affaires réglées en 2012 et une prévision identique pour 2013).

Les efforts réalisés dans la diffusion des nouvelles technologies au sein des juridictions administratives contribuent également à la performance de ces dernières.

La dématérialisation de la procédure contentieuse

Les mesures de simplification administrative mises en oeuvre dans le cadre de la réforme de l'Etat concernent notamment l'administration électronique via l'accès aux informations relatives à l'état de l'instruction des dossiers contentieux par le biais d'Internet (projet SAGACE). Prochainement, la possibilité sera offerte aux requérants, ou à leurs mandataires, de déposer leurs recours en ligne et d'échanger leurs mémoires par la voie électronique (projet Aramis).

Le service SAGACE évite notamment aux parties d'avoir à se déplacer dans les locaux des juridictions pour obtenir des informations sur l'état d'avancement de leur dossier. Ce service reçoit quotidiennement plusieurs milliers de visites .

Les téléprocédures ont été expérimentées devant le Conseil d'Etat à partir de 2005 après modification du code de justice administrative, notamment en vue de conférer aux envois électroniques un statut équivalent à celui des envois papier (décret n° 2005-222 du 10 mars 2005).

Le bilan positif de l'expérimentation a conduit le Conseil d'Etat à lancer le projet de généralisation des téléprocédures. L'application Télérecours commencera d'être déployée dans l'ensemble des juridictions à compter du 31 mars 2013 . Elle sera accessible dans un premier temps aux avocats et aux administrations.

Source : Conseil d'Etat

Concernant la fonction consultative du Conseil d'Etat , la proportion en 2012 des textes examinés en moins de deux mois s'établit à 95 % pour les lois et les ordonnances et à 73 % pour les décrets.

Dans ce tableau d'ensemble, la performance de la CNDA constitue un réel motif de satisfaction qu'il faut souligner . Alors qu'en 2009 le délai prévisible moyen de jugement devant cette Cour s'élevait à un an trois mois et neuf jours, il se situe selon la prévision actualisée pour 2012 à huit mois. La prévision pour 2013 s'inscrit également dans la voie du rétablissement de cet indicateur puisqu'elle fixe un délai de sept mois, avec une cible de six mois en 2015.

Votre rapporteur spécial se félicite du redressement notable de la performance de la CNDA. Il estime qu'il faut y voir la récompense des choix stratégiques opérés depuis le rattachement de cette cour au présent programme ( cf. supra ).


* 12 Parmi ces affaires, on retrouve notamment les référés, les contentieux des reconduites à la frontière ou les contentieux des refus de titres de séjour accompagnés d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

* 13 Le système de la QPC est organisé selon une logique de spécialisation et de coopération entre les juges. Lorsqu'une telle question est soulevée, le Conseil constitutionnel n'est pas directement saisi. Le juge devant lequel le procès se déroule doit procéder à un premier « filtrage » en vérifiant que la disposition législative critiquée est bien applicable au litige, que le Conseil constitutionnel ne l'a pas déjà jugée conforme à la Constitution et qu'elle n'est pas dénuée de tout caractère sérieux. Si ces conditions sont remplies, il transmet la question au juge suprême de l'ordre juridictionnel dont il relève (Conseil d'Etat pour les juridictions administratives, Cour de cassation pour les juridictions judiciaires). Celui-ci examine, en outre, si la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux. Il s'agit donc d'un second « filtrage », plus strict que le premier. Si tel est le cas, la question doit être renvoyée au Conseil constitutionnel, qui juge si la loi est conforme ou non aux droits et libertés garantis par la Constitution. A charge ensuite, pour le juge à l'origine de la QPC, de tirer les conséquences de cette décision sur le litige dont il est saisi. Cette procédure est rapide : en ce qui concerne le Conseil d'Etat, le juge dispose de trois mois seulement pour se prononcer sur la QPC.

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