ARTICLE 30 (Art. L. 432-4 et 432-5 [nouveau] du code des assurances) : Amélioration du financement des exportations

Commentaire : Le présent article vise à étendre la garantie de l'Etat gérée par la compagnie française d'assurance du commerce extérieur (Coface) pour courir les risques de non paiement relatifs aux exportations d'aéronefs civils, les risques de change sur la valeur résiduelle d'aéronefs civils acquis à crédit et les risques de non-paiement au titre des contrats de refinancement des exportations françaises couvertes par une assurance-crédit.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIFS DE GARANTIE DE L'ETAT AUX EXPORTATIONS ET INVESTISSEMENTS FRANÇAIS À L'ÉTRANGER

Au sein de la mission « Engagements financiers de l'Etat », le programme 114 « Appels en garantie de l'Etat » regroupe l'ensemble des dispositifs pour lesquels l'Etat a octroyé sa garantie.

Selon le programme annuel de performances pour 2013 de la mission précitée, l'objectif principal des garanties de l'Etat liées au développement international de l'économie française est d'apporter un appui de nature financière aux entreprises françaises exportatrices. Cette politique d'intervention de l'Etat dans la conclusion des contrats à l'étranger est justifiée par le fait que la durée de ces contrats, leur montant et le risque d'insolvabilité des acheteurs étrangers excède ce que le marché privé peut ou ne veut pas prendre en charge seul. Par ailleurs, dans la concurrence internationale, la garantie de l'Etat est un des éléments décisifs de l'offre financière des entreprises exportatrices.

En période de crise financière, les politiques d'assurance-crédit ont un effet contracyclique permettant de soutenir l'export. L'encours de risque garanti par l'Etat est passé en assurance-crédit de 40 milliards d'euros début 2008 à plus de 64 milliards d'euros aujourd'hui. Cinq catégories de produits sont garanties par l'Etat :

- l' assurance-crédit consiste à couvrir les exportateurs, à court terme ou à long terme, contre le risque d'interruption de leur contrat, et les banques contre le risque de non remboursement des crédits à l'exportation octroyés à un acheteur étranger public ou privé. Son encours était de 64,2 milliards d'euros fin 2011 pour un montant de contrats conclus de 12,4 milliards d'euros cette dernière année. Cette garantie procure chaque année à l'Etat une recette 405 ( * ) ;

- l' assurance prospection, pour laquelle les montants garantis s'élèvent à 226 millions d'euros en faveur de 7 508 entreprises assurées fin 2011, permet de couvrir les entreprises contre le risque d'échec des prospections à l'étranger ;

- les garanties du risque exportateur 406 ( * ) , qui ont enregistré une forte augmentation du nombre de demandes (+26 % par rapport à 2010) pour la garantie des préfinancements tandis que leur niveau est resté stable pour les cautions. L'encours à la fin 2011 s'élevait à 1,9 milliard d'euros pour les cautions et à 104 millions d'euros pour les préfinancements ;

- la garantie de change assure l'exportateur contre la baisse éventuelle du cours des devises de facturation d'un contrat dont la signature et l'entrée en vigueur sont incertaines 407 ( * ) . En augmentation de 15 % en nombre de garanties accordées par rapport à 2010 du fait de la crise, elle représente un encours à la fin 2011 de 1,9 milliard d'euros contre 1,3 milliard fin 2010 ;

- enfin, la garantie de stabilisation de taux d'intérêt 408 ( * ) porte sur un flux de nouveaux crédits de 1,24 milliard d'euros en 2011 (contre près de 2 milliards en 2010) et a dégagé un résultat net positif de 120 millions d'euros en 2011.

Au total, 137,6 millions d'euros sont inscrits pour 2013 au titre de la mission « Engagements financiers de l'Etat » pour couvrir les éventuels appels émis au titre des procédures de garantie à l'export avec la garantie de l'Etat. En pratique, l'assurance-crédit, malgré des encours importants, est équilibrée par les primes d'assurances et ne mobilise donc pas de crédits budgétaires.

Depuis 1949, la gestion, pour le compte de l'Etat, de ces garanties publiques est confiée à gérées par la compagnie française d'assurance du commerce extérieur (Coface).

B. L'ACTIVITÉ DE GESTION PAR LA COFACE DES GARANTIES PUBLIQUES À L'EXPORTATION POUR LE COMPTE DE L'ETAT

La Coface est une société anonyme, filiale à 100 % de Natixis, spécialisée dans les services d'assurance-crédit destinés à protéger les entreprises contre le risque de défaillance financière de leurs acheteurs. A ce titre, elle gère à titre privé, pour son propre compte, 430 milliards d'euros de créances garanties en assurance crédit 409 ( * ) sur 95 pays, dont 107 milliards d'euros pour la France.

La gestion des garanties publiques, dont le montant des encours a été présenté plus haut, ne représente donc qu'une partie de son activité. Sur 4 600 collaborateurs, 250 sont dédiés à la gestion des garanties pour le compte de l'Etat dans le cadre d'une convention d'objectifs et de moyen 2012-2015 et des dispositions des articles L. 432-1 à L. 432-4 du code des assurances.

A cet égard, il ne s'agit pas de garanties de l'Etat donnée à la Coface, l'Etat demeurant le garant des risques pris, mais d'une délégation de gestion mise en oeuvre en étroite collaboration avec l'administration, c'est-à-dire la direction générale du Trésor, selon des règles précises exposées dans l'encadré ci-dessous.

Présentation des principes de gestion par la Coface
pour le compte et avec la garantie de l'Etat dans le cadre des dispositions
des articles L. 432-1 à L. 432-4 du code des assurances.

Cette gestion obéit à des règles précises :

1 - Instruction

La Coface instruit les demandes de garantie qui lui sont directement adressées par les entreprises et/ou les banques, dans le cadre de la politique de crédit définie annuellement par le ministre de l'économie et des finances. Elle met ainsi son expertise en matière d'analyse de risque au service de ses clients : l'Etat, les entreprises françaises et les banques.

2 - Décision

Après avoir instruit les demandes, Coface fait une proposition de garantie à la Commission des garanties et du crédit au commerce extérieur qui décide de la suite qui peut leur être réservée. Toutefois, la Coface dispose de délégations de décisions pour certaines demandes en fonction du montant de l'opération, de la durée de crédit ou encore de la catégorie de prime.

3 - Signature et gestion du contrat d'assurance

La Coface délivre en son propre nom les contrats d'assurance, sur la base de la décision prise par l'administration ou par elle-même dans le cadre de ses délégations. Elle gère ensuite les contrats : suivi du risque, établissement d'avenants, etc. En cas de sinistre, elle instruit les demandes d'indemnisation et assure le recouvrement des créances impayées.

4 - Principes comptables

Les risques sont pris en charge par l'Etat. L'ensemble des flux financiers relatifs aux garanties publiques (primes, indemnités, reversements) font l'objet d'un enregistrement comptable distinct dans les comptes de la Coface. Les primes et les reversements perçus par la Coface sont directement versés sur le compte de l'Etat. Les indemnités sont payées par la Coface à partir de ce même compte.

Source : Coface

L'octroi de ces garanties publiques par la Coface, pour le compte de l'Etat, repose sur une série de dispositions législatives :

- les dispositions fondatrices de ce mécanisme de délégation reposent sur les articles 16 et 17 de la loi n° 49-874 du 5 juillet 1949 relative à certaines dispositions d'ordre économique et financier, codifiée à l'article L. 432-2 du code des assurances ( cf. encadré ci-dessous) ;

- l'article 83 de la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 de finances rectificative pour 2001 a permis de faire bénéficier les exportations d'Airbus de la garantie dite « pure et inconditionnelle » (GPI). Il s'agit d'une garantie à 100 % appelable à première demande qui couvre le montant financé ainsi que les risques juridiques 410 ( * ) ;

- enfin, l'article 121 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 a permis d'étendre le champ des garanties publiques au risque de défaut des exportateurs français.

Article L. 432-2 du code des assurances

La garantie de l'Etat peut être accordée en totalité ou en partie :

1° A la Compagnie française du commerce extérieur :

a) Pour ses opérations d'assurance des risques commerciaux, politiques, monétaires, catastrophiques et de certains risques dits extraordinaires, afférents à des opérations de nature à contribuer au développement du commerce extérieur de la France ou présentant un intérêt stratégique pour l'économie française à l'étranger ;

a bis) Pour ses opérations d'assurance couvrant le risque de non-paiement des sommes dues par des entreprises à des établissements de crédit ou des entreprises d'assurance dans le cadre d'opérations de commerce extérieur dans des conditions prévues par décret ;

b) Pour ses garanties spécifiques couvrant les risques de non- paiement, dans des conditions prévues par décret ;

c) Pour les opérations de gestion des droits et obligations afférents aux opérations et garanties mentionnées aux a et b ;

d) Dans des conditions fixées par décret, pour des investissements à réaliser ou déjà réalisés par des entreprises françaises dans des pays étrangers lorsque ces investissements présentent un intérêt pour le développement de l'économie française et ont été agréés par le pays concerné. Le même décret détermine les conditions et les modalités de cette garantie. Dans le cas de pays étrangers qui ne sont pas liés au Trésor français par un compte d'opérations, cette garantie peut être subordonnée à la conclusion préalable d'un accord sur la protection des investissements. En cas de mise en jeu de la garantie, l'Etat peut prélever le montant correspondant à ladite garantie sur les crédits d'aide à verser au pays concerné.

2° Aux exportateurs pour les opérations prévues à l'article 53 de la loi n° 48-1516 du 26 septembre 1948, fixant l'évaluation des voies et moyens du budget général pour l'exercice 1948 et relative à diverses dispositions d'ordre financier.

La garantie de l'Etat peut être également accordée aux exportateurs pour les couvrir, dans les conditions fixées par des contrats conclus avec eux par le ministre de l'économie et des finances, d'une partie des pertes pouvant résulter des dépenses qu'ils engagent pour prospecter certains marchés étrangers, faire de la publicité et constituer des stocks en vue de développer les exportations à destination de ces marchés.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le I du présent article propose d' étendre le champ d'application de la garantie de l'Etat gérée par la Coface à trois nouvelles catégories de risques :

- les risques de non paiement relatifs aux exportations d'aéronefs civils. Il s'agit d'une extension de la GPI accordée jusqu'alors à Airbus ;

- les risques de change sur la valeur résiduelle d'aéronefs civils acquis à crédit ;

- et les risques de non-paiement au titre des contrats de refinancement des exportations françaises couvertes par une assurance-crédit.

A titre de mesure d'application, le II du présent article prévoit l'insertion de la mention de ces garanties aux articles L. 432-4 et L. 432-5 (nouveau) du code des assurances .

La nécessité de légiférer sur ces dispositions résulte de l'article 34 de la LOLF qui prévoit que l'octroi de garanties de l'Etat relève de la loi de finances.

A. L'EXTENSION DE LA GARANTIE PURE ET INCONDITIONNELLE À TOUT TYPE D'AÉRONEFS CIVILS

Le 1° du I du présent article octroie une garantie couvrant les risques de non-paiement relatifs au financement d'exportations d'avions civils de plus de dix tonnes au décollage et d' hélicoptères civils de plus d'une tonne au décollage.

Ce dispositif, qui n'existe actuellement que pour les ventes d'Airbus, au titre de la garantie pure et inconditionnelle, consiste à octroyer aux autres constructeurs français une garantie à 100 % appelable à première demande, au lieu d'une assurance Coface à 95 %. Selon le schéma présenté ci-dessous, cette garantie, qui couvre le principal, les intérêts et les accessoires du financement, a pour objet de sécuriser les prêts souscrits en vue de la vente d'un aéronef.

Dans ce but, la garantie peut être accordée par la Coface aux fournisseurs de l'aéronef ou à leurs filiales, aux établissements de crédit et établissements financiers de droit français ou étranger ou aux entreprises d'assurance et de réassurance, aux mutuelles et aux institutions de prévoyance de droit français ou étranger.

Schéma de la garantie du financement des aéronefs civils

Source : ministère du commerce extérieur

Concrètement, cette mesure permettrait d'étendre la couverture du risque aux constructeurs d'avions (ATR et Superjet) et d'hélicoptères (Eurocopter) civils. L'encours des créances garanties serait appelé à augmenter en conséquence. Ainsi, Airbus bénéficie aujourd'hui de cette garantie dans des proportions variables (de 3 à 4 milliards de dollars annuels depuis le début de la crise financière de 2008). Les prises en garantie pour des ATR sont de l'ordre de 150 à 200 millions de dollars chaque année et pourraient augmenter à 300 millions annuels au vu de la cadence prévue. Les Superjet pourraient représenter, en part française, 50 millions de dollars par an, et les Eurocopter 200 millions de dollars. L'exposition supplémentaire par rapport aux garanties déjà octroyées par Airbus serait donc susceptible de représenter 500 à 600 millions de dollars annuels au plus, qui engendrerait eux-mêmes quelque 50 à 100 millions de dollars de primes d'assurance reversées à l'Etat. Il faut toutefois retenir que ces chiffrages, donnés sous toute réserve, n'ont pas de valeur pour l'avenir et dépendent donc de la dynamique future des marchés.

Par nature, ce nouvel outil accroît le risque financier de 5 % par rapport à l'assurance actuellement octroyée par la Coface sur 95 % du montant financé. Néanmoins, selon l'évaluation préalable du présent article, « le risque est modéré pour les finances publiques » dans la mesure où « la garantie inconditionnelle à première demande n'est étendue qu'à des actifs récupérables et liquides, c'est-à-dire des actifs qui peuvent être revendus en cas de sinistre ». Par ailleurs, il faut remarquer que, depuis la création de la GPI en faveur d'Airbus, la sinistralité des opérations a considérablement diminué, annulant de facto le risque depuis 2003 et permettant à l'Etat de recevoir un produit net en contrepartie de la garantie.

B. LA CRÉATION D'UNE GARANTIE DE CHANGE SUR LA VALEUR RÉSIDUELLE DES AÉRONEFS CIVILS

Le 2° du I du présent article octroie une garantie couvrant les risques de change sur la valeur résiduelle d'aéronefs civils acquis à crédit dans le cadre d'une opération d'exportation , à l'exclusion de toute autre garantie de la Coface.

Cette garantie a pour objet de couvrir le risque de change sur la revente du matériel par la banque en cas de sinistre de son emprunteur.

Schéma de la garantie de change sur la valeur résiduelle d'un aéronef civil

Source : ministère du commerce extérieur

En pratique, le risque induit et garanti par l'Etat se limite à la variation de change (euro-dollar pour ce qui concerne les ventes d'aéronefs) sur l'encours restant dû en cas de revente sur le marché de l'occasion, lequel fonctionne en dollar. Il serait donc circonscrit au maximum à la valeur de change sur la revente qui par nature décroît dans le temps avec la cote de l'appareil. Par ailleurs, ce risque euro-dollar est lui-même couvert par les risques inverses dollar-euro qui représentent actuellement l'essentiel de la couverture de change des contrats de vente d'aéronefs puisque ceux-ci sont en majorité souscrits en dollar.

C. LA MISE EN PLACE D'UNE GARANTIE DE REFINANCEMENT DES CRÉANCES COUVERTES PAR UNE ASSURANCE-CRÉDIT

Le 3° du I du présent article octroie une garantie couvrant les risques de non-paiement au titre de contrats conclus en vue du refinancement d'opérations couvertes par le dispositif d'assurance-crédit géré par la Coface.

Partant du constat que, du fait de la crise, les banques des pays de l'OCDE réduisent la taille de leur bilan, ce qui conduit à une diminution des volumes de prêts et à un renchérissement des financements de long terme des projets les plus importants, cette mesure a pour objet améliorer l'offre de liquidité par les banques en mettant en place une garantie de refinancement . Cette garantie qui existe déjà en Allemagne, et est en cours d'adoption aux Pays-Bas, permet de faciliter le refinancement de crédits-exports par des investisseurs ne souhaitant pas prendre de risque.

Elle consiste à octroyer directement une garantie à 100 % de paiement inconditionnelle à première demande à l'organisme refinançant un crédit export assuré par la COFACE. Ainsi que l'illustre le schéma ci-dessous, le risque supplémentaire engendré par l'octroi de cette garantie à 100 % est limité à 5 % d'un prêt déjà couvert à 95% par l'actuelle assurance-crédit offerte par la Coface sous garantie de l'Etat. Au surplus, il ne se réaliserait qu'en cas de double défaut de la banque et de l'emprunteur étranger.

Schéma de la garantie de refinancement des exportations

Source : ministère du commerce extérieur

Sur le plan quantitatif, les services du ministère du commerce extérieur évaluent à environ 800 millions d'euros d'encours supplémentaire à terme correspondant à la fraction non garantie (5 %) de 40 % du portefeuille d'assurance-crédit actuel, hors aéronautique. Si l'instrument est contingenté pour la première année à 30 % des crédits accordés annuellement, cela correspondrait à 200 millions d'euros d'encours supplémentaire pour 2013, soit un montant relativement faible rapporté aux quelque 12,4 milliards d'euros d'encours garantis pour la seule année 2011 et le cumul de 64 milliards d'euros des encours de l'assurance-crédit. La encore, le chiffrage de l'encours supplémentaire garantie par l'Etat relève de l'ordre de grandeur et ne préjuge pas du flux d'affaires qui sera engendré en 2013.

L'encadrement de cette nouvelle garantie de refinancement serait assuré dans les mêmes conditions que l'ensemble des assurances et garanties accordées par la Coface dans le cadre des dispositions précitées du code des assurances.

Enfin, cette mesure est instituée à titre expérimental uniquement auprès d'acheteurs dont l'échelon de qualité de crédit est supérieur ou égal à 3 à la date d'octroi de la garantie (soit une notation supérieure ou égale à BB-) avant, le cas échéant, d'être élargie ultérieurement si la procédure fait ses preuves.

*

A l'initiative de notre collègue Christian Eckert, rapporteur général, six amendements de précision rédactionnelle et de coordination ont été adoptés par l'Assemblée nationale.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'amélioration du financement des exportations proposé par le présent article contribue à la traduction législative de la décision 15 du cinquième levier « Renforcer les conquêtes de nos entreprises à l'étranger et l'attractivité de notre pays » du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi présenté le 6 novembre dernier par le Premier ministre.

A. SUR LE PLAN ÉCONOMIQUE : UN DISPOSITIF PLEINEMENT JUSTIFIÉ

Nul n'est besoin de rappeler ici l'enjeu considérable que représente le redressement de la balance commerciale de la France et, par conséquent, l'urgente nécessité de donner tous les moyens au développement des exportations. Partant d'une situation dégradée 411 ( * ) , l'objectif est ambitieux : il s'agit d'augmenter de 25 à 26 milliards d'euros le niveau actuel des exportations des entreprises françaises qui représentait 430 milliards d'euros de biens et marchandises en 2011. Pour cela, il faut que la croissance de nos exportations soit chaque année de 2 % supérieure à celle de nos importations.

Pour y parvenir, le présent dispositif constitue un des éléments des politiques de développement de l'export qui seront mises en oeuvre par le Gouvernement. Celui-ci fait par ailleurs directement écho à la sixième proposition du rapport « Gallois » d' aligner les conditions de crédit et des garanties export, en volume, quotité et taux sur le meilleur niveau constaté dans les pays avancés et créer un « prêteur direct » public. Ce mécanisme de financement public direct existe déjà dans de nombreux pays exportateurs tels que l'Allemagne, l'Italie, les Etats-Unis, la Suède ou la Finlande. Il s'agit de refinancer directement les banques commerciales en apportant une liquidité publique permettant d'offrir un financement compétitif.

Or les crédits exports qui sont des créances de long terme peu rémunératrices, du fait de la crise, n'attirent plus les banques françaises qui se sont désengagées de cette activité compte tenu de leurs contraintes de liquidité (division par 4 depuis 2009 de leurs activités de financements des équipements français à l'export).

La réforme proposée des garanties à l'export aura une triple portée :

- enrayer le repli des banques françaises des activités de financement export et accroitre l'offre de liquidité permettant de financer des ventes à crédit ;

- compléter la palette des financements à l'export afin de disposer de manière exceptionnelle d'un refinancement direct lorsque les entreprises françaises sont en concurrence avec des offres étrangères bénéficiant de mesures similaires ;

- démocratiser l'accès au financement au bénéfice des PME et ETI.

B. SUR LE PLAN BUDGÉTAIRE : UN ENGAGEMENT FINANCIER DE L'ETAT QUI S'INSCRIT DANS LES RÈGLES EXISTANTES DE GESTION DES GARANTIES PUBLIQUES PAR LA COFACE

L'extension du champ de la garantie de l'Etat gérée par la Coface pourrait s'accroître de quelque 700 millions d'euros, au vu des évaluations communiquées par le ministère du commerce extérieur à l'appui de deux des nouveaux dispositifs, à l'exception de la garantie de change dont le risque, considéré comme faible, ne semble pas justifier un chiffrage particulier.

Néanmoins, la question qui se pose traditionnellement lorsque la garantie de l'Etat est engagée est celle de son plafond et de sa durée. A cet égard, il faut souligner que, depuis l'origine, la délégation de gestion de la garantie de l'Etat à la Coface ne fait pas entrer en jeu ces deux critères.

En effet, deux éléments expliquent l'absence de plafond spécifique et de durée du dispositif :

- les conditions d'encadrement de la gestion de la Coface fait directement intervenir l'Etat, l'octroi des garanties résultant d'une décision prise par le ministre chargé de l'économie après avis de la Commission interministérielle des garanties et des crédits au commerce extérieur. Cette décision est prise dans le cadre juridique des crédits ouverts au sein de la mission « Engagements financiers de l'Etat », dont on a vu que pour 2013, 137,6 millions d'euros sont budgétés pour couvrir les éventuels appels émis au titre des procédures de garantie à l'export avec la garantie de l'Etat. Il existe donc un plafond budgétaire fixé chaque année ex ante . Mais comme on l'a vu précédemment, ces risques sont de facto couverts par la rémunération du service sur lequel l'Etat perçoit des primes d'assurances ;

-  il peut être considéré, comme cela est indiqué dans l'évaluation préalable, que « la fixation d'un plafond pour les garanties COFACE serait contre-productive, car l'assurance-crédit est un dispositif de soutien contra-cyclique, comme cela a été observé depuis 2008. Le plafond risquerait d'être atteint en creux de cycle, au moment où les exportateurs auraient le plus besoin de soutien financier public pour pallier les défaillances de marché ».

Au total, toute extension de garantie publique emporte nécessairement un risque financier supplémentaire, lequel est pris en compte, d'une part, par les crédits budgétaires dédiés et, d'autre part, par la tarification du service aux bénéficiaires qui rapporte chaque année à l'Etat. Celle-ci est évaluée à 107 millions d'euros dans le cadre du présent collectif budgétaire.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 405 Sur la période 2008?2011, cette garantie a dégagé un excédent opérationnel total de près d'1 milliard d'euros (hors récupérations). Le résultat technique (hors coût de gestion) de cette garantie s'est élevé à 518 millions d'euros contre 884 millions en 2010. Il se décompose en 323 millions d'euros de primes, 470 millions de récupérations et 274 millions d'indemnités (en forte augmentation en lien principalement avec le sinistre lié à un contrat de la société STX pour 192 millions d'euros et des sinistres en Iran et au Mexique).

* 406 Cette garantie regroupe deux produits : « garantie des cautions » et « garantie des préfinancements ». La garantie des cautions permet à un exportateur d'honorer un contrat à l'international en fournissant à ses banques une garantie sur les cautions à émettre dans le cadre de ce contrat (cautions de soumission, de bonne fin et de restitution d'acomptes) et exigées par l'acheteur. Il s'agit d'assurer la banque émettrice de la caution contre le risque de défaillance de l'entreprise exportatrice. La quotité garantie maximale est, à ce jour, de 50 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires excède 150 millions d'euros et de 80 % pour les autres. La garantie des préfinancements couvre un prêt consenti par une banque pour financer le lancement d'un contrat export. Ce prêt peut servir à acheter des équipements, des matières premières ou financer toute autre dépense nécessaire à la réalisation du contrat. La quotité garantie applicable suit le même schéma que pour les cautions.

* 407 Elle garantit à l'entreprise la valeur en euros de l'offre qu'elle remet en devises. Afin que l'Etat ne soit pas exposé à un risque budgétaire du fait de cette garantie, cette dernière est équilibrée dans son principe, la symétrie entre l'indemnisation des pertes de change et le reversement des bénéfices et la perception de primes adaptées permettant, sur des variations de long terme du cours des devises, d'obtenir des effets qui se compensent. La mutualisation des dossiers permet également aux flux liés aux appels d'offres gagnés et perdus de s'équilibrer.

* 408 La procédure de soutien public au financement de crédits consentis en euros ou en devises, d'une durée supérieure ou égale à deux ans, permet de proposer à un emprunteur étranger, dès le stade de l'offre du contrat commercial, un taux fixe défini par les autorités françaises selon les règles de l'Arrangement OCDE sur les crédits à l'exportation.

* 409 Source : Coface au 31 décembre 2011.

* 410 Selon les informations communiquées à votre rapporteur général, depuis le passage de l'assurance Coface à 95 % vers la GPI, la sinistralité des dossiers Airbus pris en garantie a diminué (aucun appareil en sinistre depuis 2003 sur 845 appareils pris en garantie, contre 45 appareils sinistrés sur les 627 couverts en assurance-crédit à 95 % de 1990 à 2004).

* 411 La part de marché des exportations françaises dans le commerce international a reculé de 36 % depuis 2000, de 5,1 % à 3,3 %, contre un recul de moins de 10% pour l'Allemagne ou l'Espagne. Le déficit des échanges de marchandises hors énergie, qui n'a cessé de croître depuis 2007, atteint plus de 25 milliards d'euros en 2011 (source : Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi)

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