EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE DOUBLE CRISE DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS EN ILE-DE-FRANCE

A. LA CRISE DU LOGEMENT SE TRADUIT PAR L'ÉVICTION D'UNE POPULATION, TOUJOURS PLUS NOMBREUSE AUX FRANGES DE L'AGGLOMÉRATION

Le fait est suffisamment connu pour qu'on se contente ici de l'évoquer : la crise du logement en Ile-de-France, ancienne et sévère, oblige de plus en plus de ménages à habiter loin du centre de l'agglomération où se concentrent pourtant les emplois.

La construction est insuffisante depuis des décennies en Île-de-France, plus encore que dans les métropoles régionales 1 ( * ) . Les causes en sont multiples, de la cherté du foncier jusqu'aux réticences à densifier, lesquelles sont parfois liées aux appréhensions des besoins de services consécutifs. Les villes nouvelles ont pu servir ici de contre exemple, où l'on a construit beaucoup sans que les emplois ne suivent, rendant illusoire le « rééquilibrage » de l'Île-de-France.

Le report des ménages vers les franges de la métropole est un phénomène massif et très marqué des trois dernières décennies . A mesure que les prix ont flambé en coeur d'agglomération 2 ( * ) et que la rotation dans le parc HLM diminuait, les ménages les classes moyennes ont dû aller habiter plus loin du centre, en particulier les familles nombreuses, et le « coeur d'agglomération » leur est devenu définitivement inaccessible.

L'éviction du centre de l'agglomération s'accompagne d'une spécialisation toujours plus forte des territoires franciliens : l'Île-de-France est une région riche où les inégalités territoriales se creusent 3 ( * ) . Plus encore que par sa richesse moyenne, la région capitale se distingue par ses écarts de richesse entre « les riches » et « les pauvres » : pour les populations comme pour les territoires, les écarts de revenus se creusent et mettent à mal la cohésion de l'espace francilien. En Ile-de-France, la concentration des emplois est bien plus élevée que celle des actifs : en moyenne, la région compte 105 emplois pour 100 actifs occupés, mais les écarts sont élevés entre Paris, avec 164 emplois pour 100 actifs occupés, les Hauts-de-Seine 125 et, de l'autre côté, l'Essonne et la Seine-et-Marne avec respectivement 78 et 74 emplois pour 100 actifs occupés 4 ( * ) . Dans les départements de la grande couronne, 40 % des actifs travaillent en dehors de leur département et 24 % passent une heure ou plus en déplacement domicile-travail.

De ce fait, les transports collectifs occupent une place centrale dans la vie des Franciliens : ils utilisent autant les transports en commun que leur voiture pour se rendre au travail 5 ( * ) , alors qu'en province, la voiture est utilisée dans 80 % des cas.

Ici encore, cet aspect de la métropolisation a été rapide : la comparaison des cartes montre un changement profond des déplacements domicile-travail sur les trois dernières décennies, le centre de l'agglomération, - et surtout Paris et le pôle de la Défense -, fonctionnant comme une véritable « pompe aspirante » pour l'emploi à l'échelle de la région et au-delà 6 ( * ) .


* 1 Sur ces données et celles des paragraphes suivants, voir « La gouvernance du logement en Île-de-France - Étude relative à la création d'une autorité organisatrice du logement », Institut d'aménagement et d'urbanisme d'Île-de-France, juin 2012.

* 2 En moyenne francilienne, le prix de la résidence principale est passé de 3,5 années de travail en 1990 à 5,5 années en 2009 : cette moyenne couvre des disparités bien plus creusées entre le centre et la périphérie de l'agglomération.

* 3 Voir Mariette Sagot : « Niveau de vie des Franciliens en 2008 : les disparités territoriales se creusent », Note rapide n°551, IAU IdF, juin 2011.

* 4 Voir Sandrine Beaufils et Jérémy Courel : « Un actif sur deux travaille à proximité de chez lui », Note rapide n°600, IAU IdF, juillet 2012.

* 5 Voir Yann Caenen, Jérémy Courel, Christelle Paulo et Denise Schmitt : « Les Franciliens utilisent autant les transports en commun que leur voiture pour se rendre au travail », Note rapide n°542, IAU IdF, avril 2011.

* 6 Sur 5,5 millions d'emplois en Ile-de-France, 300 000 sont occupés par des non Franciliens.

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