Rapport général n° 156 (2013-2014) de M. François MARC , fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2013

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N° 156

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2013

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2014 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. François MARC,

Sénateur,

Rapporteur général .

TOME I

LE BUDGET DE 2014

ET SON CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc , rapporteur général ; Mme Michèle André , première vice-présidente ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Caffet, Yvon Collin, Jean-Claude Frécon, Mmes Fabienne Keller, Frédérique Espagnac, MM. Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean Germain, Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Jean Arthuis, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Marc Massion, Gérard Miquel, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Richard Yung .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 1395, 1428 à 1435 et T.A. 239

Sénat : 155 et 157 à 162 (2013-2014)

PREMIÈRE PARTIE
L'EXERCICE 2014 DANS LA TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE DES FINANCES PUBLIQUES

I. 2014, ANNÉE DE PARACHÈVEMENT DU NOUVEAU CADRE DES FINANCES PUBLIQUES

L'année 2014 marque le parachèvement du nouveau cadre des finances publiques mis en place à compter de 2010. La gouvernance économique et budgétaire européenne a été profondément transformée par l'institution du semestre européen, ainsi que par l'entrée en vigueur du « six-pack » et du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG).

Cependant, dans la mesure où les décisions en matière de finances publiques des États sont susceptibles de produire davantage d'effets d'entraînement dans une zone monétaire commune, il a été décidé d' instituer un encadrement plus solide des politiques budgétaires au sein de la zone euro . Aussi le « two-pack » - qui constitue un ensemble de deux règlements du Parlement européen et du Conseil 1 ( * ) - est-il entré en vigueur le 30 mai 2013 trouvera à s'appliquer, pour la première fois, au titre de l'exercice 2014.

C'est dans ce cadre renouvelé que la France sera amenée à poursuivre la trajectoire qu'elle a définie pour ses finances publiques , tournée vers un retour à l'équilibre budgétaire.

Par ailleurs, pour la première fois également, les prévisions économiques retenues par le Gouvernement lors de l'élaboration des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2014 ont été soumises à l'avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Cette novation majeure, introduite par la loi organique relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques 2 ( * ) - et qui répond dorénavant à une exigence du « two-pack » - apparaît incontestablement comme un progrès en faveur de la transparence et du réalisme des hypothèses économiques qui sous-tendent la conception des textes financiers. Dans ces conditions, la crédibilité de la trajectoire des finances publiques s'en trouve renforcée .

A. LE NOUVEAU CADRE BUDGÉTAIRE EUROPÉEN

La crise économique et financière et la crise de la dette souveraine qui l'a accompagnée ont révélé les insuffisances de la gouvernance économique et budgétaire au sein de l'Union européenne . Aussi, à compter de 2010, a été engagé un renforcement sans précédent des mécanismes européens de surveillance budgétaire et macroéconomique.

1. Le semestre européen, un calendrier commun

Ce mouvement a débuté avec la mise en place du semestre européen , dont la première édition s'est déroulée au printemps 2011, qui vise à établir un cycle de coordination des politiques économiques et budgétaires au sein de l'Union européenne. A cette fin, l'un des principaux apports du semestre européen consiste à faire coïncider la remise par les Etats membres des programmes de stabilité ou de convergence et des programmes nationaux de réforme, ainsi que leur examen par les instances européennes compétentes . Cette synchronisation de l'évaluation des politiques budgétaires et économiques a pour finalité de renforcer la coordination des pays européens, notamment dans la perspective de l' élaboration des budgets pour l'année suivante .

Le semestre européen débute avec la publication, par la Commission, de l' examen annuel de croissance (EAC) qui expose les actions prioritaires que devront mener les Etats membres en matière de politique économique. Il comporte ensuite les étapes suivantes :

- en janvier-février , le Conseil de l'Union européenne débat de l'examen annuel de croissance, formule des recommandations et adopte des conclusions ;

- en mars , sur la base de l'examen annuel de croissance, de l'analyse et des conclusions du Conseil de l'Union européenne, le Conseil européen formule les lignes directrices de l'Union européenne concernant les politiques nationales ;

- en avril , les États membres présentent leurs programmes de stabilité ou de convergence et leurs programmes nationaux de réforme ;

- en mai-juin , la Commission évalue ces programmes et élabore un projet de recommandations pour chaque pays ;

- en juin , le Conseil de l'Union européenne examine ce projet et arrête des recommandations par pays définitives, qui sont ensuite présentées au Conseil européen pour approbation ;

- en juillet , le Conseil de l'Union européenne adopte les recommandations par pays et les Etats membres sont invités à les mettre en oeuvre.

Graphique n° 1 : Le semestre européen

Source : Conseil de l'Union européenne (2013)

2. Le « six-pack » : une surveillance accrue des déséquilibres économiques et budgétaires

Sur la base de ce calendrier commun à l'ensemble des États membres que constitue le semestre européen, le « six-pack » a substantiellement renforcé la gouvernance économique et budgétaire de l'Union européenne .

a) La procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques

Tout d'abord, ce « paquet législatif », entré en vigueur en décembre 2011, a institué un mécanisme de prévention et de correction des déséquilibres économiques, appelé procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM) 3 ( * ) . Elle permet à la Commission et au Conseil de l'Union européenne d'adopter à titre préventif, soit avant que les déséquilibres ne s'aggravent, des recommandations. Dans les cas les plus graves, le volet correctif permet l'ouverture d'une procédure de déséquilibre excessif à l'encontre de l'Etat concerné, qui doit alors soumettre un plan d'action corrective comportant une feuille de route précise et les délais de mise en oeuvre des mesures prévues.

S'agissant des Etats membres de la zone euro, l'application du volet correctif est particulièrement rigoureuse dans la mesure où un État qui ne met pas en oeuvre les mesures recommandées peut se voir imposer un dépôt portant intérêt. En outre, si celui-ci persiste à ne pas se conformer à ces recommandations, le dépôt portant intérêt peut être converti en amende 4 ( * ) . Des sanctions peuvent également être appliquées à un Etat qui, après deux rappels, n'a pas remis un plan d'action corrective satisfaisant. Les sanctions sont adoptées par le Conseil de l'Union européenne à la majorité qualifiée inversée (MQI) 5 ( * ) , ce qui leur confère un caractère quasi automatique.

Afin de pleinement s'inscrire dans le cadre du semestre européen, la mise en oeuvre de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM) suit le calendrier suivant :

- en novembre-décembre , la Commission publie le rapport sur le mécanisme d'alerte , qui fait le point sur l'évolution de la situation macroéconomique dans les différents pays de l'Union européenne. Sur la base de ce rapport, elle peut décider de réaliser un bilan approfondi de la situation dans les pays où le risque de déséquilibres macroéconomiques est considéré comme élevé 6 ( * ) ;

- en mars-avril , la Commission publie les bilans approfondis relatifs aux déséquilibres macroéconomiques.

Les préconisations figurant dans les bilans approfondis inspirent, généralement, les recommandations par pays que la Commission transmet ensuite au Conseil de l'Union européenne (cf. graphique ci-avant).

b) Un pacte de stabilité et de croissance « renforcé »

Le « six-pack » a, par ailleurs, réformé les règles européennes applicables en matière de surveillance budgétaire et institué un pacte de stabilité et de croissance « renforcé » 7 ( * ) .

Dans le cadre de la procédure de déficit excessif (PDE) - qui concerne les Etats dont le déficit effectif excède 3 % du PIB -, le pacte de stabilité et de croissance prévoit que des sanctions financières peuvent être appliquées aux Etats membres de la zone euro qui ne se conformeraient pas aux recommandations spécifiques que le Conseil de l'Union européenne leur a adressées afin qu'ils corrigent leur déficit excessif. Aussi, dans le cas où un Etat manque à ses obligations, le Conseil peut lui imposer une sanction financière 8 ( * ) à la majorité qualifiée inversée (MQI) 9 ( * ) sur recommandation de la Commission. Cette sanction peut être imposée à tout moment , dès lors que les conditions sont réunies.

En outre, le pacte de stabilité et de croissance « renforcé » rend le critère de dette publique prévu par le traité de Maastricht pleinement opérationnel ; en effet, auparavant, le dépassement du seuil de 60 % du PIB par la dette publique d'un Etat ne pouvait pas être sanctionné. Aussi est-il désormais prévu que tout Etat membre dont le taux d'endettement dépasse 60 % du PIB peut faire l'objet d'une procédure de déficit excessif - et ce même si son déficit public est inférieur à 3 % du PIB - dès lors que cet Etat ne réduit pas d'un vingtième par an, sur une moyenne de trois ans, l'écart entre son taux d'endettement et la valeur de référence de 60 %.

Le volet « préventif » du pacte de stabilité et de croissance impose aux Etats membres de poursuivre un objectif de moyen terme (OMT) défini en termes de solde structurel . La référence au solde structurel est partagée avec le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) ; cette notion est donc définie plus avant infra . L'OMT doit être compris entre - 1 point de PIB et l'excédent 10 ( * ) . Les objectifs de moyen terme sont fixés par les Etats dans leur programme de stabilité ou de convergence.

Enfin, il est prévu que les Etats fassent converger leur solde structurel vers l'OMT d'au moins 0,5 point de PIB par an . Dès lors, le volet « préventif » du pacte de stabilité et de croissance fournit aux Etats membres qui ne font pas l'objet d'une procédure de déficit excessif (PDE) un cap en matière de programmation des finances publiques .

3. Le TSCG : le solde structurel comme nouvelle « norme » des politiques budgétaires

En dépit du maintien de la « règle des 3 % » concernant le déficit public effectif, les évolutions récentes du cadre budgétaire européen ont fait du solde structurel la norme principale des politiques budgétaires . Ainsi, même dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance « renforcé », un Etat faisant l'objet d'une procédure de déficit excessif (PDE) ne saurait être sanctionné dès lors qu'il a réalisé les ajustements du solde structurel recommandés par le Conseil de l'Union européenne. De même, le volet « préventif » s'appuie sur une trajectoire de solde structurel.

Il s'agit de mieux concilier consolidation budgétaire et croissance économique . En effet, la poursuite d'une trajectoire fondée sur le seul déficit public effectif peut contraindre les Etats à procéder à des ajustements massifs de leurs finances publiques afin, notamment, de corriger la dégradation du solde imputable à la conjoncture, ce qui a un effet pro-cyclique et peut réduire plus encore la croissance économique.

C'est pourquoi il a été jugé préférable d'instituer une règle d'équilibre définie en termes de solde structurel . Cette évolution a été consacrée avec l'adoption du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l'Union économique et monétaire européenne, entré en vigueur le 1 er janvier 2013 11 ( * ) .

Le solde structurel correspond au solde public effectif corrigé des effets du cycle économique , soit de la conjoncture, de même que des mesures exceptionnelles et temporaires 12 ( * ) . En quelque sorte, il s'agit du solde public tel qu'il serait constaté si le PIB était égal à son potentiel 13 ( * ) .

En application de ce traité, les Etats doivent se doter d'un objectif de moyen terme (OMT) de déficit structurel et, à cette fin, s' engager à suivre une trajectoire de solde structurel .

La trajectoire de solde structurel retenue par la France a été précisée par la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2012 à 2017 14 ( * ) .

L'objectif de moyen terme (OMT) retenu par la France est l'équilibre structurel (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 2 : Evolution du solde effectif et du solde structurel prévue par la LPFP 2012-2017

(en points de PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde effectif

-4,5

-3,0

-2,2

-1,3

-0,6

-0,3

Solde structurel

-3,6

-1,6

-1,1

-0,5

0,0

0,0

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017

Toutefois, la forte dégradation de la conjoncture au cours de l'année 2012 a rendu nécessaire une révision des hypothèses macroéconomiques pour les années 2013 à 2015 . En conséquence, les prévisions d'évolution du solde effectif et du solde structurel pour la période de programmation ont été revues à plusieurs reprises, y compris dans le cadre du présent projet de loi de finances ( cf . infra ).

B. LE « TWO-PACK » : L'ÉVALUATION DES PROJETS DE PLANS BUDGÉTAIRES

Les pays d'une même zone monétaire présentent une interdépendance accrue et leurs décisions en matière de finances publiques sont susceptibles de produire davantage d'effets d'entraînement. C'est pourquoi il a été décidé d' instituer un encadrement renforcé des politiques budgétaires au sein de la zone euro . Tel est l'objet du « two-pack », qui comprend deux règlements entrés en vigueur le 30 mai 2013 15 ( * ) .

1. Un calendrier budgétaire commun à la zone euro

Le « two-pack » institue tout d'abord un calendrier budgétaire commun à l'ensemble des Etats membres de la zone euro, qui s'inscrit pleinement dans « le contexte du semestre européen » 16 ( * ) de manière à mettre en place un « cycle annuel de surveillance » 17 ( * ) ; ainsi est-il prévu que :

- le 30 avril au plus tard, les Etats rendent public leur plan budgétaire national à moyen terme , en même temps que leur programme de stabilité - dont il reprend les éléments - et leur programme national de réforme ;

- le 15 octobre au plus tard, les Etats membres publient leur projet de budget pour l'année suivante et soumettent à la Commission européenne et à l'Eurogroupe un projet de plan budgétaire 18 ( * ) ;

- le 31 décembre au plus tard, les Etats membres adoptent le budget pour l'année à venir.

2. L'examen des projets de plans budgétaires par la Commission

La principale innovation introduite par le « two-pack » réside dans l'examen, par la Commission, de chaque projet de plan budgétaire ; aussi, sur cette base, cette dernière formule-t-elle un avis pour le 30 novembre au plus tard 19 ( * ) .

Si la Commission décèle un manquement particulièrement grave aux obligations découlant du pacte de stabilité et de croissance , elle adopte son avis dans les deux semaines suivant la transmission du projet de plan budgétaire et demande qu'un projet révisé lui soit soumis dès que possible .

Toutefois, il faut préciser qu'un projet de plan budgétaire révisé ne devrait être demandé par la Commission que dans les cas les plus extrêmes , soit lorsqu'il y a une violation manifeste des règles prévues par le pacte de stabilité et de croissance. En outre, cette procédure n'aurait pas pour conséquence, le cas échéant, de contraindre l'Etat concerné à revoir intégralement son projet , ce dernier n'étant tenu que de soumettre un projet « révisé ».

Cette étape a donc pour seule finalité d'alerter, si nécessaire, les Etats sur les conséquences possibles de l'adoption d'un projet de budget ne permettant pas de respecter les règles budgétaires européennes 20 ( * ) . Par ailleurs, le caractère public des avis permettra d'éclairer les travaux des parlements nationaux et sera de nature à renforcer leurs échanges avec les institutions européennes ; à cet égard, la commission des finances du Sénat avait entendu Olli Rehn, vice-président de la Commission chargé des affaires économiques et monétaires, en juin 2013 21 ( * ) .

L'Eurogroupe examine, ensuite, les avis sur les projets de plans budgétaires ainsi que la situation et les perspectives budgétaires pour la zone euro dans son ensemble, sur la base d'une évaluation réalisée par la Commission 22 ( * ) , afin de disposer d'une vision agrégée du contexte budgétaire de la zone euro .

3. L'articulation avec la procédure de déficit excessif
a) Les nouvelles étapes de la procédure de déficit excessif

Dans le cadre du volet « préventif » du pacte de stabilité et de croissance, l'avis de la Commission sur le projet de plan budgétaire permet d'évaluer si la trajectoire vers l'objectif de moyen terme (OMT) est en ligne avec les recommandations adressées par le Conseil de l'Union européenne au pays concerné, dans le cadre du semestre européen.

Pour ce qui est des Etats membres faisant l'objet d'une procédure de déficit excessif (PDE), l'avis de la Commission évalue si la correction du déficit est conforme aux recommandations du Conseil . Cette évaluation se fait également sur base d'un rapport sur l'action engagée en réponse à la recommandation issue de la procédure de déficit excessif , transmis par le pays concerné 23 ( * ) .

Ainsi, les Etats concernés par la procédure de déficit excessif seront amenés à communiquer régulièrement à la Commission des informations sur les mesures prises afin de corriger leur déficit excessif . Ceci aura pour conséquence de renforcer l'effectivité de cette procédure : en cas de manquement à ses obligations, un Etat pourra être sanctionné à tout moment par le Conseil de l'Union européenne, à la majorité qualifiée inversée (MQI), sur recommandation de la Commission ; par suite, ces nouvelles étapes sont autant d'occasions pour « rappeler à l'ordre » des Etats qui ne se conformeraient pas aux obligations découlant de la procédure de déficit excessif (PDE) .

b) La présentation d'un programme de partenariat économique

Enfin, le « two-pack » prévoit la présentation, à la Commission européenne, par les Etats membres de l'Union européenne faisant l'objet d'une procédure de déficit excessif (PDE), d'un programme de partenariat économique qui décrit les mesures et les réformes structurelles qui ont été ou seront engagées pour assurer une correction durable des déficits excessifs en matière de gouvernance budgétaire, de fiscalité, de systèmes de retraite et de santé, etc 24 ( * ) .

Il s'agit, en quelque sorte, d'une actualisation du programme de stabilité et du programme national de réforme au regard des recommandations formulées par le Conseil de l'Union européenne à la fin du semestre européen. Le programme de partenariat économique fait également l'objet d'un avis de la Commission.

4. La France dans le « two-pack »

La France a fait le choix de faire figurer dans un document unique tout à la fois le projet de plan budgétaire, le rapport sur l'action engagée en réponse à la recommandation issue de la procédure de déficit excessif et le programme de partenariat économique ; il s'agit du rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances 25 ( * ) .

Pour la première fois cette année, la Commission examinera le projet de plan budgétaire de la France et rendra un avis avant le 30 novembre ; cette étape lui permettra également à d' évaluer le respect des recommandations formulées par le Conseil de l'Union européenne dans le cadre de la procédure de déficit excessif au semestre dernier .

En effet, depuis 2009, la France fait l'objet, sur décision du Conseil de l'Union européenne, d'une procédure de déficit excessif (PDE) . Au titre de cette dernière, il était prévu qu'elle ramène son déficit public en deçà de 3 % du PIB en 2013. Toutefois, compte tenu de la « forte détérioration de la position budgétaire due à une position globale de l'économie moins favorable que celle sur laquelle se fonde la recommandation du Conseil de 2009 », la Commission a proposé le 29 mai dernier d'accorder à la France une prolongation jusqu'à 2015 du délai pour corriger son déficit excessif 26 ( * ) . Cette position a été validée par le Conseil de l'Union européenne le 21 juin 2013.

Ce report de deux années de la procédure de déficit excessif s'est accompagné de recommandations du Conseil portant sur la trajectoire de solde public de la France jusqu'à 2015 . Elles comprennent des cibles de déficit effectif ainsi que des objectifs d'ajustement du solde structurel.

Tableau n° 3 : Recommandations du Conseil concernant la trajectoire des finances publiques de la France dans le cadre de la procédure de déficit excessif

(en % du PIB)

2013

2014

2015

Cibles de déficit effectif

3,9

3,6

2,8

Objectifs d'ajustement structurel

1,3

0,8

0,8

Source : Conseil de l'Union européenne (2013)

Aussi, dans le cadre de son avis sur le projet de plan budgétaire de la France, la Commission examinera si les cibles de déficit effectif pour 2013 et 2014 reprises dans le tableau ci-avant sont respectées . Si tel est le cas, la procédure de déficit excessif sera mise en sommeil jusqu'à la prochaine évaluation.

Dans le cas contraire, la Commission évaluera le niveau des ajustements structurels opérés en 2013 et 2014. S'il est conforme aux objectifs fixés dans le cadre des recommandations du Conseil, la procédure sera également mise en sommeil 27 ( * ) . En effet, ce n'est que dans l'hypothèse où la France ne respecterait pas, cumulativement, les cibles de déficit effectif pour 2013 et 2014 et les objectifs d'ajustement structurel recommandés qu'elle ferait l'objet de sanctions .

Ceci se justifie par le fait que le non-respect d'une cible de déficit effectif ne saurait révéler, à lui seul, un « laxisme » en matière budgétaire ; en effet, la dégradation du solde effectif peut résulter d'une conjoncture défavorable et non de l'insuffisance de l'effort budgétaire consenti.

Dès lors, si le déficit effectif atteint bien 4,1 % du PIB en 2013 comme le prévoit le Gouvernement, la France ne saurait être sanctionnée au seul motif qu'elle ne respecte pas la cible de 3,9 % du PIB recommandée par le Conseil . La Commission s'attachera, en effet, à examiner si un ajustement structurel de 1,3 point de PIB a été réalisé et si l'ajustement prévu pour 2014 s'élève au moins à 0,8 point de PIB ; or le Gouvernement a effectué un ajustement structurel de 1,3 point de PIB en 2013, à l'aide d'un effort structurel de 1,7 point de PIB, et prévoit un ajustement structurel de 0,9 point de PIB en 2014 (cf. infra ).

C. DES PRÉVISIONS ÉCONOMIQUES SOUMISES À L'AVIS DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES

Le « two-pack » prévoit que les Etats membres de la zone euro mettent en place des organismes indépendants chargés de produire ou d'approuver les prévisions macroéconomiques qui fondent les projets de plans budgétaires et les projets de budgets. Ainsi que le soulignent les considérations introductives de l'un des règlements qui forment le « two-pack », des « prévisions macroéconomiques et budgétaires biaisées et irréalistes peuvent considérablement nuire à l'efficacité de la planification budgétaire et, en conséquence, rendre difficile le respect de la discipline budgétaire » 28 ( * ) .

Dans le souci d'établir un pilotage plus efficace et transparent des finances publiques, l'actuel gouvernement a fait le choix d'anticiper l'entrée en vigueur du « two-pack » et prévu, dans le cadre de la loi organique relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques 29 ( * ) , que le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) soit saisi « des prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent le projet de loi de finances de l'année et le projet de loi de financement de la sécurité sociale » 30 ( * ) .

En France, la même autorité indépendante est donc en charge de l'examen des prévisions macroéconomiques utilisées dans la conception des textes financiers et de la mise en oeuvre du mécanisme de correction voulu par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) 31 ( * ) .

En outre, afin de fiabiliser plus encore le respect de la trajectoire des finances publiques, les lois de finances de l'année comprennent dorénavant un article liminaire « présentant un tableau de synthèse retraçant, pour l'année sur laquelle elles portent, l'état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble des administrations publiques » et qui indique « les soldes structurels et effectifs de l'ensemble des administrations publiques résultant de l'exécution de la dernière année écoulée et des prévisions d'exécution de l'année en cours » 32 ( * ) .

Aussi le Haut Conseil des finances publiques est-il également chargé d'« apprécier la cohérence de l'article liminaire du projet de loi de finances de l'année au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques » 33 ( * ) . Selon Didier Migaud, président du HCFP, lors de son audition par la commission des finances, il s'agit pour le Haut Conseil d'« analyser les prévisions de solde des administrations publiques au vu des prévisions macroéconomiques du Gouvernement » de manière à « apprécier le degré de robustesse et les éventuels éléments de fragilité du scénario de finances publiques et en particulier du solde structurel, compte tenu des informations dont il dispose » 34 ( * ) .

L'article liminaire du projet de loi de finances pour 2014 fait l'objet d'un traitement approfondi infra dans le présent rapport.

Le scénario des finances publiques est intimement lié aux prévisions macroéconomiques sur lesquelles il repose, ce qui confirme l'opportunité d'avoir confié à la même entité, soit le Haut Conseil des finances publiques, l'examen aussi bien des hypothèses macroéconomiques que du respect de la trajectoire de solde public .

La mise en place, en application du « two-pack », d'organismes indépendants chargés de produire ou d'approuver les prévisions macroéconomiques constitue un progrès indéniable, dans la mesure où l'établissement des prévisions économiques a souvent constitué l'une des principales faiblesses de la programmation des finances publiques .

S'agissant de la France, la chronique des recommandations formulées par le Conseil de l'Union européenne relativement aux programmes de stabilité fait apparaître que, par le passé, l'optimisme des prévisions macroéconomiques figurait parmi les critiques les plus récurrentes . A titre d'exemple, celui-ci notait en 2011 que « le scénario macroéconomique sur lequel se fondent les projections budgétaires est trop optimiste, notamment parce que les taux de croissance prévus restent nettement supérieurs à la croissance potentielle dans les dernières années » 35 ( * ) ; la même année, Philippe Marini, alors rapporteur général de la commission des finances, écrivait d'ailleurs que l'une des « faiblesse[s] du projet de programme de stabilité est qu'il repose sur des hypothèses de croissance du PIB toujours délibérément optimistes » 36 ( * ) .

Désireux d'asseoir la trajectoire de redressement des finances publiques sur des bases solides, l'actuel gouvernement a donné la preuve de sa volonté d'établir les projets de lois financières sur le fondement de prévisions macroéconomiques réalistes , ce que confirment les hypothèses retenues dans le projet de loi de finances pour 2014.

II. LES HYPOTHÈSES ÉCONOMIQUES : UNE PRÉVISION « RÉALISTE ET CRÉDIBLE » EN 2014

Saisi pour la première fois cette année des prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale, le Haut Conseil des finances publiques a rendu un avis le 20 septembre 2013 37 ( * ) .

Ce dernier fait apparaître que, pour l'année 2014, le « Haut Conseil considère que les prévisions de croissance sont plausibles » en dépit de certaines fragilités. En tout état de cause, lors de l'audition précitée de Didier Migaud par la commission des finances, celui-ci a précisé que « plausible » signifiait dans l'avis du HCFP « réaliste et crédible » 38 ( * ) . Ceci illustre le souci de sérieux du Gouvernement dans l'établissement des hypothèses macroéconomiques retenues dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014.

A. UN REBOND DE L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE EN 2014

Après une légère progression (+ 0,1 %), l'activité économique rebondirait en 2014 pour croître de 0,9 %, selon le Gouvernement . Si cette hypothèse de croissance a été qualifiée de « réaliste et crédible » par le président du Haut Conseil, des aléas aussi bien positifs que négatifs existent concernant l'évolution de la conjoncture.

1. Une légère progression du PIB en 2013

Faisant suite à une période de stagnation de l'activité économique, l'année 2013 est longtemps restée entourée d'importantes incertitudes. Alors que le Gouvernement tablait sur une croissance de 0,1 % en 2013 dans le cadre du programme de stabilité 2013-2017 39 ( * ) , le Consensus Forecasts 40 ( * ) a retenu jusqu'au mois d'août 2013 une prévision d'évolution du PIB de - 0,3 % . En effet, les informations publiées en juin par l'Insee faisaient apparaître une contraction du PIB de 0,2 % au premier trimestre de l'année .

Pour autant, les données relatives au deuxième trimestre 2013 se sont révélées nettement plus favorables, l'Insee faisant état, à la fin du mois de septembre, d'une croissance trimestrielle de 0,5 % portée principalement par la consommation finale et les variations de stocks des entreprises. Aussi, en septembre dernier, le Consensus Forecasts a-t-il révisé sa prévision de croissance pour 2013 à 0,1 %. En outre, le président du Haut Conseil, lors de l'audition du 9 octobre 2013 précitée, avait jugé l'hypothèse de croissance de 0,1 % pour 2013 « prudente » 41 ( * ) , celle-ci ayant été maintenue dans le cadre des prévisions associées au projet de loi de finances pour 2014.

Tableau n° 4 : Evolution trimestrielle du PIB en 2013
(aux prix de l'année précédente)

(niveaux en milliards d'euros, variations en %)

2012-T1

2012-T2

2012-T3

2012-T4

2013-T1

2013-T2

PIB

453,03

451,50

452,21

451,51

450,86

453,20

en évolution

0,0

-0,3

0,2

-0,2

-0,1

0,5

Source : Insee (septembre 2013)

Les informations disponibles à ce jour laissent entrevoir un ralentissement de la croissance au cours des troisième et quatrième trimestres de l'année . Ainsi, selon la Banque de France, le PIB augmenterait de 0,1 % au troisième trimestre 2013 42 ( * ) .

Si cette dernière hypothèse de croissance de la Banque de France concernant le troisième trimestre se vérifiait et que le PIB croissait effectivement de 0,1 % en 2013, l'acquis de croissance serait quasi nul - voire très légèrement négatif - au début de l'année 2014 .

Néanmoins, l'économie française dispose d'un fort potentiel de rebond . En effet, depuis le déclenchement de la crise, le PIB de la France s'est fortement écarté du PIB potentiel 43 ( * ) . Selon le Gouvernement, l'écart entre ces deux agrégats - qui est appelé écart de production - serait proche de 3 points de PIB potentiel en 2013 et atteindrait 3,5 points de PIB potentiel en 2014. En présence d'un tel écart, il serait donc tout à fait envisageable d'assister à un phénomène de rattrapage dans le cadre duquel les pertes de croissance rencontrées par le passé seraient contrebalancées les années suivantes ; celui-ci serait favorisé par l'amélioration de situation économique et financière des pays de la zone euro.

La prévision de croissance pour 2014 s'inscrit dans un scénario de redémarrage progressif de l'économie .

2. Une croissance du PIB de 0,9 % en 2014

L'hypothèse de croissance retenue pour 2014, soit 0,9 %, demeure nettement en deçà de la croissance potentielle qui est évaluée par le Gouvernement à 1,5 % pour cette même année. La Commission européenne, dans ses prévisions d'automne publiées le 5 novembre 2013, retient une prévision similaire 44 ( * ) .

Tableau n° 5 : Prévisions de croissance pour la France

(en %)

2013

2014

PLF 2014

0,1

0,9

Groupe technique (octobre 2013)

0,1

0,8

FMI (octobre 2013)

0,2

1,0

OCDE (mai et septembre 2013)

0,3**

0,8

Commission européenne (novembre 2013)

0,2

0,9

* Groupe technique de la Commission économique de la Nation.

** L'OCDE a relevé son hypothèse de croissance pour 2013 à + 0,3 % en septembre dernier 45 ( * ) .

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents cités)

L'hypothèse de croissance du Gouvernement est également très proche de celle du Consensus Forecasts d'octobre 2013, du groupe technique de la Commission économique de la Nation 46 ( * ) et de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) 47 ( * ) , soit 0,8 %. Il faut, en outre, noter que le Fonds monétaire international (FMI) se montre plus optimiste que le Gouvernement et prévoit une croissance du PIB de 0,2 % en 2013 et de 1 % en 2013 48 ( * ) .

Ceci souligne bien le souhait de l'actuel gouvernement de rompre avec la pratique passée consistant à surévaluer les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de loi de finances. La prévision de croissance retenue pour 2014 est en ligne avec celle des instituts de conjoncture et des organisations internationales ; par ailleurs, elle demeure en deçà des hypothèses plus « optimistes » du FMI et de plusieurs membres du groupe technique de la Commission économique de la Nation.

a) L'amélioration du contexte économique mondial

Le rebond de l'activité économique en 2014 serait favorisé par l'amélioration de la situation économique mondiale, et notamment de celle de la zone euro .

Selon les prévisions du Gouvernement, la zone euro sortirait de la récession en 2013 - année au cours de laquelle le PIB devrait reculer de 0,5 % - pour renouer avec une croissance positive en 2014 (+ 0,8 %) . Ce scénario est partagé par l'ensemble des membres du groupe technique de la Commission économique de la Nation ; la Commission européenne, dans ses prévisions de printemps, retient même une hypothèse de croissance de 1,1 % en 2014 49 ( * ) .

Tout d'abord, l'économie de la zone euro devrait bénéficier, en 2014, du redressement progressif de la consommation des ménages (+ 0,8 %), qui tirerait profit notamment du faible rythme d'inflation (+ 1,6 %), en dépit d'un marché du travail toujours dégradé - selon la Commission européenne, le taux de chômage s'élèverait à 12,2 % en 2014 50 ( * ) - et de la persistance de problèmes de désendettement et de financement de l'économie, en particulier en Italie et en Espagne. Encouragé par la reprise des exportations, l'investissement productif croîtrait également ; aussi, la formation brute de capital fixe (FBCF) totale devrait progresser de 1,6 %. Il faut aussi souligner que les économies de la zone euro profiteraient de la retombée des tensions sur les marchés financiers .

En tout état de cause, le commerce extérieur resterait le principal moteur de la croissance de la zone euro en 2014 . Les exportations se redresseraient ainsi de 4,3 %, alors que les importations resteraient peu dynamiques.

S'agissant de l'Union européenne prise dans son ensemble , les prévisions de la Commission européenne tablent sur une croissance de 1,4 % en 2014 51 ( * ) .

Dans le reste du monde, l'activité resterait plus dynamique, le Gouvernement estimant à 3,7 % la croissance du PIB mondial en 2014 . Aux Etats-Unis, le PIB progresserait de 2,6 %, porté notamment par la hausse de la consommation privée qui peut être associée, en particulier, à l'avancement du processus de désendettement des ménages.

La principale incertitude pour ce qui est de l'économie américaine concerne la fin de la politique monétaire accommodante mise en oeuvre par la Réserve fédérale (Fed). Un « durcissement » de la politique monétaire de la Fed pourrait n'avoir qu'un effet limité, dès lors que la reprise de l'activité serait suffisamment robuste ; néanmoins, s'il intervient trop tôt, celui-ci pourrait provoquer une importante remontée des taux des prêts bancaires et, par conséquent, un ralentissement de la croissance. En outre, un relèvement précipité des taux d'intérêt américains serait susceptible d'entraîner des transferts de capitaux des pays émergents vers les Etats-Unis, dégradant les conditions de financement des premiers.

A cet égard, il apparaît que les économies émergentes devraient voir leur croissance demeurer à un niveau modeste relativement aux performances passées . A titre de rappel, le PIB des pays émergents avait cru de 8,7 % en 2007 52 ( * ) , soit avant le déclenchement de la crise économique et financière. Or, l'activité de ces derniers ne devrait progresser que de 5,3 % en 2014.

Dans ces conditions, le Gouvernement estime que la demande mondiale adressée à la France augmenterait de 4,8 % en 2014 , le commerce extérieur devant alors contribuer à hauteur de 0,1 point de PIB à la croissance. Les exportations françaises seraient, par ailleurs, stimulées par les gains de compétitivité des entreprises résultant du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et de l'ensemble des mesures du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi.

b) Une reprise de la consommation des ménages

Le principal moteur de la croissance française en 2014, dans le scénario retenu par le Gouvernement, serait la consommation des ménages qui progresserait de 0,8 % , soit au même rythme que l'accroissement du pouvoir d'achat.

En effet, le pouvoir d'achat des ménages devrait bénéficier d' une inflation encore modérée (1,3 % contre 0,9 % en 2013), ainsi que du rebond de l'emploi (+ 155 000) tiré par les politiques de soutien à l'emploi - en particulier par les contrats de génération et les contrats aidés - de même que par la montée en charge du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), qui devrait permettre la création de 90 000 emplois en 2014.

En outre, le pouvoir d'achat serait renforcé par la ré-indexation sur l'inflation du barème de l'impôt sur le revenu , la revalorisation de la décote et le relèvement du plafond à 4 % des seuils de revenu fiscal de référence (RFR) qui préserveraient le revenu disponible des ménages à hauteur de près de 1,5 milliard d'euros. S'agissant de la hausse du taux de TVA au 1 er janvier 2014, celle-ci devrait être en grande partie compensée par la baisse du coût du travail résultant du CICE ; le Gouvernement estime que l'impact global sur les prix de ces deux dispositifs pris ensemble serait légèrement négatif (- 0,1 point).

Il faut également noter un retour de la confiance des ménages depuis le début du second semestre de l'année 2013 : l'indicateur synthétique de confiance des ménages de l'Insee est passé de 79 en juin à 85 en septembre 2013 (cf. graphique ci-après) 53 ( * ) .

Graphique n° 6 : Evolution de l'indicateur de confiance des ménages en 2013

Source : commission des finances du Sénat (données de l'Insee)

Ce regain de confiance des ménages vient conforter les perspectives de rebond de la consommation , laissant notamment entrevoir une modération de l'épargne de précaution. Le Gouvernement prévoit, à ce titre, une légère baisse du taux d'épargne des ménages à 15,5 % en 2014 (contre 15,6 % en 2012).

Au total, la consommation des ménages devrait contribuer positivement à la croissance à hauteur de 0,3 point de PIB l'année prochaine , selon les prévisions retenues dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014.

c) La consolidation de la situation des entreprises

Après une dégradation quasi continue depuis 2007, le taux de marge des entreprises se redresserait en 2014 en incluant l'effet du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). En effet, en 2014, le taux de marge des sociétés non financières (SNF) atteindrait 28,7 % (contre 28,4 % en 2013), en tenant compte de 0,5 point correspondant au moindre coût du travail lié au CICE.

L'amélioration du taux de marge, ajoutée aux perspectives d'accroissement de la consommation des ménages et de la demande mondiale, devrait participer à l'amélioration du climat des affaires, qui a été très nette au cours des derniers mois .

Les enquêtes réalisés par l'Insee auprès des chefs d'entreprises des principaux secteurs de l'économie font apparaître une forte remontée de l'indicateur de climat des affaires , de 87,8 à 94,9 entre janvier et octobre 2013, même si celui-ci reste en deçà de sa moyenne de longue période (100) ( cf . graphique ci-après).

En outre, les entreprises continueraient de bénéficier de conditions de financement favorables .

Par conséquent, le Gouvernement estime que l'investissement des entreprises repartirait progressivement en 2014 (+ 1,5 %).

Graphique n° 7 : Evolution de l'indicateur de climat des affaires en 2013

Source : commission des finances du Sénat (données de l'Insee)

3. Les aléas associés à l'hypothèse de croissance pour 2014

Bien que de toute évidence réaliste, la prévision de croissance du Gouvernement pour 2014 n'en reste pas moins entourée d'un certain nombre d'aléas aussi bien négatifs que positifs.

Dans son avis précité du 20 septembre 2013 54 ( * ) , le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a identifié les aléas suivants :

- « Un environnement international moins porteur, en particulier en raison du ralentissement observé dans les pays émergents, pour peser sur les perspectives d'exportation » ;

- « La reprise en Europe reste conditionnée à l'assainissement progressif du secteur bancaire européen. Si les tensions se sont apaisées dans la zone euro, les risques de nouvelles turbulences sur les marchés financiers ne sont pas totalement dissipés » ;

- « Une hausse du prix du pétrole est possible en raison des incertitudes géopolitiques au Moyen-Orient » ;

- « Les incertitudes qui pèsent sur le calendrier de remontée des taux d'intérêt aux Etats-Unis pourraient se traduire par une forte volatilité des marchés financiers » ;

- « A l'inverse, des avancées plus rapides qu'attendu en matière de gouvernance économique et financière européenne pourraient renforcer la confiance » ;

- « De même, les conditions de financement des économies européennes pourraient bénéficier de l'orientation annoncée par la BCE sur sa politique monétaire à venir ».

Afin de mieux appréhender l'importance de ces différents aléas, il est proposé de mesurer l'incidence des fluctuations de quelques variables choisies sur le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement .

Pour ce faire, il est fait recours aux variantes « naïves » du modèle « Mésange » développé par la direction générale du Trésor 55 ( * ) . Ces variantes permettent d'analyser, de manière simplifiée, les effets de la variation d'une variable - comme par exemple, le prix du pétrole - sur les autres variables, telles que le PIB, l'investissement, etc.

Il faut donc garder à l'esprit les limites de cet exercice : il ne s'agit que de projections qui permettent de saisir la sensibilité des projections macroéconomiques aux évolutions de quelques variables associées aux aléas identifiés précédemment. Les résultats présentés ci-après n'ont donc aucunement vocation à se substituer aux prévisions formulées par le Gouvernement .

Les variables retenues sont la croissance de la demande mondiale adressée à la France, l'évolution du prix du pétrole et celle du taux de change . Pour chacune d'elles, des projections sont réalisées à partir des hypothèses maximales et minimales du groupe technique de la Commission économique de la Nation et, lorsque cela est pertinent, également à partir de l'hypothèse moyenne (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 8 : Prévisions macroéconomiques du groupe technique

Croissance de la demande mondiale

Prix du baril de pétrole (en dollars)

Taux de change euro/dollar

Scénario du Gouvernement

4,8 %

109,0

1,32

Maximum du groupe technique

5,5 %

120,0

1,39

Moyenne du groupe technique

3,2 %

108,0

1,27

Minimum du groupe technique

0,5 %

97,0

1,15

Source : groupe technique de la Commission économique de la Nation (octobre 2013)

a) Variantes de la croissance de la demande mondiale

S'agissant de la croissance de la demande mondiale adressée à la France , tout d'abord, le scénario du Gouvernement retient une prévision de 4,8 % en 2014.

Toutefois, les projections réalisées (cf. tableau ci-après) montrent que :

- si la croissance de la demande mondiale était de 5,5 % (maximum du groupe technique), la croissance serait supérieure de 0,1 point en 2014 au scénario du Gouvernement ;

- à l'inverse, si la croissance de la demande mondiale était de 3,2 % (moyenne du troupe technique), la croissance serait inférieure de 0,3 point ;

- la croissance serait même amputée de près de 0,7 point si la croissance de la demande mondiale était de 0,5 % en 2014 (minimum du groupe technique) ; le solde public primaire 56 ( * ) serait même dégradé de 0,1 point de PIB.

Comme le fait clairement apparaître le tableau ci-après, une augmentation de la demande mondiale adressée à la France plus importante (ou moins importante) que prévu a pour effet d'accroître (ou de réduire) les exportations françaises et a également une incidence sur les investissements , en particulier des entreprises. Par ailleurs, l'évolution de la demande mondiale a un effet significatif sur l'emploi et donc le taux de chômage .

Tableau n° 9 : Sensibilité des prévisions économiques à l'évolution de la demande mondiale de biens adressée à la France

(écart au niveau du scénario de référence en %)

2014

2015

2016

Hypothèse de croissance de la demande mondiale de 5,5 % en 2014

PIB en volume

0,1

0,2

0,2

Consommation des ménages

0,0

0,1

0,1

Investissement

0,1

0,2

0,2

Exportations

0,5

0,6

0,6

Importations

0,3

0,4

0,4

Emploi salarié (en milliers)

6,3

18,9

28,0

Taux de chômage (en points)

0,0

- 0,1

- 0,1

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,0

0,1

0,1

Hypothèse de croissance de la demande mondiale de 3,2 % en 2014

PIB en volume

- 0,3

- 0,4

- 0,4

Consommation des ménages

- 0,1

- 0,2

- 0,3

Investissement

- 0,2

- 0,4

- 0,4

Exportations

- 1,2

- 1,4

- 1,4

Importations

- 0,8

- 0,8

- 0,8

Emploi salarié (en milliers)

- 14,4

- 43,2

- 64,0

Taux de chômage (en points)

0,1

0,2

0,3

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,0

- 0,1

- 0,2

Hypothèse de croissance de la demande mondiale de 0,5 % en 2014

PIB en volume

- 0,7

- 0,9

- 1,1

Consommation des ménages

- 0,2

- 0,5

- 0,7

Investissement

- 0,6

- 0,9

- 1,0

Exportations

- 3,2

- 3,7

- 3,8

Importations

- 2,1

- 2,2

- 2,3

Emploi salarié (en milliers)

- 38,7

- 116,1

- 172,0

Taux de chômage (en points)

0,2

0,5

0,7

Capacité de financement publique (en points de PIB)

- 0,1

- 0,4

- 0,5

Note de lecture : Dans un scénario où l'augmentation de la demande mondiale adressée à la France de 5,5 % au lieu de 4,8 % - dans la prévision du Gouvernement - la croissance française serait supérieure de 0,1 point en 2014.

Source : calculs de la commission des finances du Sénat

b) Variantes de l'évolution du prix du pétrole


• Pour ce qui est de l'évolution du prix du pétrole , le Gouvernement retient une hypothèse d'un baril de Brent à 109 dollars en 2014.

Les projections réalisées ( cf . tableau ci-après) montrent que la réalisation de l'hypothèse maximale (120 dollars le baril) ou de l'hypothèse minimale (97 dollars le baril) n'aurait qu' un impact limité sur le scénario de croissance du Gouvernement . A titre d'illustration, si le prix du baril était de 120 dollars, la croissance serait inférieure de 0,02 point environ en 2014. Pour autant, l'évolution du prix du pétrole peut avoir une incidence non négligeable sur les prix à la consommation des ménages - en particulier en raison de la boucle « prix-salaire » qui renforce les effets de l'inflation importée.

Tableau n° 10 : Sensibilité des prévisions économiques
à l'évolution du prix du pétrole

(écart au niveau du scénario de référence en %)

2014

2015

2016

Hypothèse d'un baril de pétrole à 120 dollars en 2014

PIB en volume

0,0

- 0,1

- 0,1

Consommation des ménages

0,0

- 0,1

- 0,2

Investissement

0,0

- 0,1

- 0,2

Prix de la consommation des ménages

0,2

0,3

0,4

Prix de production marchande

0,0

0,1

0,2

Salaire réel net

- 0,1

- 0,1

- 0,2

Emploi salarié (en milliers)

- 1,5

- 12,5

- 26,5

Taux de chômage (en points)

0,0

0,1

0,1

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,0

- 0,1

- 0,1

Hypothèse d'un baril de pétrole à 97 dollars en 2014

PIB en volume

0,0

0,1

0,1

Consommation des ménages

0,0

0,1

0,2

Investissement

0,0

0,1

0,2

Prix de la consommation des ménages

- 0,2

- 0,3

- 0,4

Prix de production marchande

0,0

- 0,2

- 0,3

Salaire réel net

0,1

0,1

0,2

Emploi salarié (en milliers)

1,7

13,8

29,2

Taux de chômage (en points)

0,0

- 0,1

- 0,1

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,0

0,1

0,1

Note de lecture : Dans un scénario où le prix du baril de Brent serait de 120 dollar au lieu de 109 dollars - dans la prévision du Gouvernement - la croissance française serait très légèrement plus faible en 2014 et le prix de la consommation des ménages serait supérieur de 0,2 point.

Source : calculs de la commission des finances du Sénat

c) Variantes de l'évolution du taux de change

Concernant la variation du taux de change de l'euro , la variante « naïve » du modèle « Mésange » porte sur le taux de change de l'euro contre toutes monnaies ; toutefois, à des fins de simplification, il est proposé de l'assimiler au taux de change euro/dollar. Aussi, pour 2014, le Gouvernement retient une hypothèse de taux de change euro/dollar à 1,32 .

Les projections réalisées (cf. tableau ci-après) montrent qu'une dépréciation (ou une appréciation) de l'euro entraîne un renforcement (ou une dégradation) de la compétitivité-prix des produits français , ce qui affecte le niveau des exportations et donc la croissance du PIB :

- si le taux de change euro/dollar s'élevait à 1,39 (maximum du groupe technique), la croissance serait inférieure de 0,1 point au scénario du Gouvernement ;

- à l'inverse, si le taux de change euro/dollar était de 1,27 (moyenne du groupe technique), la croissance serait supérieure de 0,2 point ;

- la croissance serait même plus élevée de 0,6 point si le taux de change euro/dollar était de 1,15 en 2014. En outre, le solde public primaire serait amélioré de 0,1 point de PIB.

Tableau n° 11 : Sensibilité des prévisions économiques
à l'évolution du taux de change de l'euro

(écart au niveau du scénario de référence en %)

2014

2015

2016

Hypothèse de taux de change euro/dollar de 1,39 en 2014

PIB en volume

- 0,2

- 0,4

- 0,5

Consommation des ménages

0,0

- 0,1

- 0,2

Investissement

- 0,1

- 0,4

- 0,5

Exportations

- 0,8

- 1,0

- 1,0

Importations

- 0,2

- 0,3

- 0,3

Prix de la consommation des ménages

- 0,2

- 0,3

- 0,5

Prix de production marchande

0,0

- 0,1

- 0,3

Salaire réel net

0,1

- 0,1

- 0,1

Emploi salarié (en milliers)

- 13,0

- 36,0

- 62,0

Taux de chômage (en points)

0,1

0,1

0,3

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,0

- 0,1

- 0,2

Hypothèse de taux de change euro/dollar de 1,27 en 2014

PIB en volume

0,2

0,3

0,4

Consommation des ménages

0,0

0,1

0,2

Investissement

0,1

0,3

0,4

Exportations

0,6

0,8

0,8

Importations

0,2

0,2

0,2

Prix de la consommation des ménages

0,2

0,3

0,4

Prix de production marchande

0,0

0,1

0,3

Salaire réel net

- 0,1

0,0

0,1

Emploi salarié (en milliers)

9,9

27,4

47,1

Taux de chômage (en points)

0,0

- 0,1

- 0,2

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,0

0,1

0,1

Hypothèse de taux de change euro/dollar de 1,15 en 2014

PIB en volume

0,6

1,1

1,3

Consommation des ménages

0,0

0,3

0,6

Investissement

0,4

0,9

1,2

Exportations

2,1

2,7

2,7

Importations

0,6

0,7

0,8

Prix de la consommation des ménages

0,6

0,9

1,4

Prix de production marchande

0,1

0,4

0,9

Salaire réel net

- 0,2

0,1

0,4

Emploi salarié (en milliers)

33,8

93,6

161,2

Taux de chômage (en points)

- 0,1

- 0,4

- 0,7

Capacité de financement publique (en points de PIB)

0,1

0,3

0,5

Note de lecture : Dans un scénario où le taux de change euro/dollar serait de 1,39 au lieu de
1,32 - dans la prévision du Gouvernement - la croissance française serait inférieure de 0,2 point en 2014.

Source : calculs de la commission des finances du Sénat

B. 2015-2017 : LE RETOUR DE LA CROISSANCE

Enfin, dans le cadre du présent projet de loi de finances, le Gouvernement présente un scénario macroéconomique de moyen terme . Celui-ci repose sur une hypothèse de retour de la croissance sur la période 2015-2017.

Selon le scénario retenu par le Gouvernement, la croissance du PIB serait de 1,7 % en 2015 . La progression annuelle de l'activité serait ensuite de 2 % en 2016 et 2017 , soit un rythme supérieur à celui de la croissance potentielle, évaluée à 1,6 %. Ceci résulterait d'un phénomène de rattrapage au cours duquel le PIB effectif « rattrape » le PIB potentiel duquel il s'est fortement éloigné en raison de la crise, ce que met en évidence l'importance de l'écart de production (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 12 : Principaux indicateurs du scénario économique 2013-2017

(évolution en %)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

PIB (volume)

0,0

0,1

0,9

1,7

2,0

2,0

Déflateur du PIB

1,5

1,6

1,4

1,7

1,7

1,7

IPC (hors tabac)*

1,9

0,8

1,3

1,75

1,75

1,75

Masse salariale privée

1,7

1,3

2,2

3,5

4,0

4,0

PIB potentiel

1,3

1,4

1,5

1,5

1,6

1,6

Ecart de production (en % du PIB potentiel)

-1,6

-2,9

-3,5

-3,3

-2,9

-2,5

* Indice des prix à la consommation (IPC) hors tabac.

Source : RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014

Outre les prévisions relatives aux années 2013 et 2014, seule l'hypothèse de croissance pour 2015 a été modifiée par rapport au scénario de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) et du programme de stabilité 2013-2017 - qui prévoyaient une hausse du PIB de 2 % en 2015. Aussi les hypothèses de croissance pour 2016 et 2017 restent-elles inchangées par rapport à celles présentées dans ces deux textes (+ 2 %).

III. UN EFFORT CONCENTRÉ SUR LA DÉPENSE À PARTIR DE 2014

Pour la première fois de la période de programmation, l'effort de consolidation des finances publiques porterait, en 2014, principalement sur les dépenses . Sur un effort structurel total de 0,9 point de PIB, 0,75 point de PIB résulterait d'économies en dépenses - soit plus de 80 % de l'effort. L'effort en recettes ne s'élèverait donc qu'à 0,15 point de PIB, ce qui permettrait une quasi stabilisation du taux de prélèvements obligatoires 57 ( * ) .

A. UN AJUSTEMENT STRUCTUREL DE 0,9 POINT DE PIB, COMPATIBLE AVEC LA REPRISE DE L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE

L'effort structurel prévu permettrait un ajustement du solde structurel de 0,9 point de PIB en 2014 58 ( * ) ; s'il ne suffirait pas à faire revenir, dès l'année prochaine, le solde structurel dans la trajectoire arrêtée par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) - celui-ci ayant été fortement dégradé par la faiblesse de la conjoncture en 2012 et 2013 -, son niveau a toutefois été déterminé afin d'être compatible avec une pérennisation de la reprise de l'activité économique et l'atteinte de l'objectif de moyen terme (OMT) .

1. La cohérence de l'ajustement prévu en 2014 avec la LPFP

Comme cela a déjà été indiqué, en application de la loi organique relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques 59 ( * ) , le Haut Conseil des finance publiques (HCFP) est chargé d'« apprécier la cohérence de l'article liminaire du projet de loi de finances de l'année au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques ». Il s'agit, par ce biais, de s'assurer que les mesures prévues dans le cadre des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale permettent au solde structurel de suivre la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 13 : La trajectoire de solde structurel prévue par la LPFP 2012-2017

(en points de PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde structurel

- 3,6

- 1,6

- 1,1

- 0,5

0,0

0,0

Variation du solde structurel

1,2

2,0

0,6

0,6

0,5

0,1

Effort structurel

1,4

1,9

0,5

0,5

0,4

0,1

dont effort en recettes

1,1

1,6

- 0,1

- 0,2

0,0

- 0,3

dont effort en dépenses

0,3

0,3

0,6

0,7

0,4

0,4

Source : LPFP 2012-2017

L'article liminaire du projet de loi de finances pour 2014 fait apparaître que le solde structurel devrait s'élever à - 2,6 points de PIB en 2013 et à - 1,7 point de PIB en 2014 (cf. tableau ci-après). Aussi, lors de l'audition du 9 octobre 2013 précitée, le président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a-t-il constaté que « le déficit structurel prévu tant pour 2013 que pour 2014 est significativement supérieur à celui de la loi de programmation des finances publiques » 60 ( * ) ; en effet, l'écart s'élèverait à 1 point de PIB en 2013 et à 0,6 point de PIB en 2014.

Par ailleurs, le HCFP a d'ores et déjà indiqué que, lors de son avis relatif au projet de loi de règlement pour 2013, la « réalisation des prévisions du Gouvernement pour 2013 (1 point d'écart au solde structurel de la loi de programmation) conduira[it] le Haut Conseil à constater au printemps 2014 un «écart important» par rapport aux orientations pluriannuelles, déclenchant ainsi le mécanisme de correction » 61 ( * ) .

Tableau n° 14 : Tableau de synthèse de l'article liminaire

(en % du PIB)

Exécution 2012

Prévision d'exécution 2013

Prévision 2014

Solde structurel (1)

- 3,9

- 2,6

- 1,7

Solde conjoncturel (2)

- 0,8

- 1,4

- 1,8

Mesures exceptionnelles (3)

- 0,1

-

- 0,1

Solde effectif (1+2+3)

- 4,8

- 4,1

- 3,6

Source : article liminaire du projet de loi de finances pour 2014

Si l'écart de la course du solde structurel par rapport à la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) est désormais indéniable, celui-ci doit impérativement être examiné à l'aune de la dégradation de la conjoncture économique survenue au cours de la période récente .

2. Une trajectoire « ajustée » en raison de la dégradation de la conjoncture

A titre de rappel, l'écart de 0,3 point de PIB constaté lors de lors de l'exercice 2012 entre le solde structurel et l'objectif de la LPFP a principalement résulté (pour 0,2 point de PIB environ), d' une révision du déficit structurel pour 2011 . En effet, l'ajustement structurel réalisé avait atteint 1,1 point de PIB, soit un niveau très proche de la prévision de la loi de programmation (1,2 point de PIB) 62 ( * ) .

L'écart a continué à se creuser en 2013, mais principalement en raison du fort ralentissement de l'activité économique . Un examen attentif de l'exercice permet de mettre en évidence le fait que le Gouvernement a, pour l'essentiel, respecté les objectifs d'efforts sur lesquels il s'était engagé .

a) Ajustement structurel et effort structurel

Avant tout, il est nécessaire de préciser la notion d'ajustement structurel afin d'appréhender ses déterminants. L'ajustement structurel correspond à la variation du solde structurel et se décompose en une composante discrétionnaire , également appelée effort structurel , et une composante non discrétionnaire (cf. graphique ci-après).

Graphique n° 15 : L'ajustement structurel

Source : commission des finances du Sénat

L'effort structurel est défini comme la somme d'un effort en dépenses et d'un effort en recettes . Il y a effort en dépenses si les dépenses structurelles 63 ( * ) en volume - c'est-à-dire déflatées par le prix du PIB - augmentent moins vite que la croissance potentielle.

L'effort en recettes - ou mesures nouvelles en prélèvements obligatoires -, quant à lui, est égal à l'impact estimé des mesures fiscales et sociales décidées et mises en oeuvre par les pouvoirs publics. Ainsi, l'effort structurel correspond, en quelque sorte, à la part de la variation structurelle sur laquelle le Gouvernement exerce la plus grande maîtrise .

S'agissant de la composante non discrétionnaire de la variation du solde structurel, elle recouvre tout à la fois la contribution des recettes hors prélèvements obligatoires et les effets d'élasticités fiscales qui mesurent l'impact de l'écart entre les élasticités effectives et les élasticités conventionnelles des prélèvements obligatoires au taux de croissance 64 ( * ) .

b) Un ajustement structurel inférieur à l'effort consenti en 2013

L'effort structurel consenti en 2013 s'élèverait à 1,7 point de PIB
- soit un niveau très proche de la cible retenue en LPFP (1,9 point de PIB) ; pour autant, le solde structurel ne devrait être amélioré que de 1,3 point de PIB 65 ( * ) . Cet écart résulte principalement d'élasticités des prélèvements obligatoires plus faibles que prévus.

(1) Un effort en recettes diminué par la faiblesse des élasticités fiscales

L'effort structurel en recettes atteindrait 1,5 point de PIB en 2013 , contre un objectif de 1,6 point de PIB retenu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 66 ( * ) .

Toutefois, l'accroissement des recettes serait limité par une évolution spontanée des prélèvements obligatoires sensiblement plus faible que celle du PIB en valeur : l'élasticité des prélèvements obligatoire serait seulement de 0,5, contre une moyenne de long terme proche de l'unité (cf. infra ). Ce phénomène résulterait principalement du faible rendement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de l'impôt sur les sociétés, ainsi qu'au moindre dynamisme de la masse salariale, sur laquelle est assise la majeure partie des prélèvements sociaux. Comme cela avait déjà été indiqué dans le rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques (DOFP) pour 2014, le concept d'élasticité perd une grande partie de son intérêt lorsque les croissances sont négatives ou proches de zéro 67 ( * ) .

Dès lors, la faiblesse des élasticités fiscales aurait contribué négativement à l'évolution des recettes, à hauteur de 0,4 point de PIB .

Dans ces conditions, le taux de prélèvements obligatoires n'a progressé que d'un point de PIB en 2013 , en dépit d'un effort structurel en recettes de 1,5 point de PIB, passant de 45 % du PIB en 2012 à 46 % du PIB en 2013.

Par conséquent, l'effet de l'effort en recettes sur l'ajustement structurel a été diminué par une élasticité des prélèvements obligatoires plus faible que prévu, en raison d'une conjoncture économique dégradée.

(2) Un dépassement de la cible d'évolution des dépenses en volume principalement lié à des dépenses non maîtrisables

L'effort structurel projeté au titre de l'année 2013 repose également sur un effort en dépenses de 0,2 point de PIB - contre une cible de 0,3 point de PIB retenue dans le cadre de la loi de finances pour 2013.

L'effort initialement programmé était fondé sur un objectif de croissance de la dépense publique en volume de 0,9 % ; toutefois, cette dernière devrait atteindre 1,7 % .

La progression plus rapide qu'anticipé de la dépense publique en volume serait, néanmoins, essentiellement liée à des facteurs non maîtrisables .

Tout d'abord, les données les plus récentes ont fait apparaître que l'inflation ne devrait progresser que de 0,8 % en 2013 , alors que les dépenses indexées - à l'instar d'un certain nombre de prestations sociales - ont été revalorisées sur la base d'un taux de 1,3 % 68 ( * ) en avril dernier. Cela a conduit, mécaniquement, à accroître l'augmentation des dépenses concernées en volume . Ce surcroît de dépenses sera compensé en 2014 par un « rattrapage » qui consistera à corriger l'écart entre l'inflation constatée et la prévision d'inflation retenue en avril 2013 lors de la revalorisation des dépenses indexées.

Par ailleurs, plusieurs dépenses non prévues devraient survenir au cours de l'exercice, et notamment le vote du deuxième budget rectificatif de l'Union européenne , qui entraînerait une hausse des dépenses de 1,8 milliard d'euros (cf. encadré ci-après) 69 ( * ) .

Les dépenses des collectivités territoriales seraient, enfin, relativement soutenues en raison du cycle électoral même si, selon le Gouvernement, l'investissement aurait été moins dynamique sur ce cycle que sur les précédents.

Le deuxième budget rectificatif de l'Union européenne

La Commission européenne a déposé, le 27 mars 2013, un projet de budget rectificatif n° 2 70 ( * ) prévoyant une « augmentation des crédits de paiement de 11,2 milliards d'euros » ; celui-ci vise à « combler des besoins non encore ouverts d'ici à la fin de l'exercice, de manière à honorer les obligations découlant d'engagements passés et présents, à éviter des pénalités financières et à permettre aux bénéficiaires de recevoir les fonds prévus par les politiques de l'UE pour lesquelles le Parlement et le Conseil avaient autorisé les crédits d'engagement correspondants lors de budgets annuels antérieurs. Les crédits de paiement supplémentaires demandés permettront de réduire les engagements restant à liquider (RAL) ainsi que le risque de reporter sur l'exercice 2014 des niveaux anormalement élevés de factures impayées ».

L'augmentation du budget communautaire de 11,2 milliards d'euros au titre de l'exercice 2013 implique, pour la France, un relèvement du montant du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne de 1,8 milliard d'euros .

En tout état de cause, il apparaît que les dépenses maîtrisables seraient bien tenues , limitant par conséquent la croissance des dépenses publiques en volume. Ainsi, la norme « zéro valeur » qui s'applique aux dépenses de l'Etat hors dette et pensions serait respectée , le surgel supplémentaire de 2 milliards d'euros décidé en janvier 2013 devant permettre de faire face aux tensions sur certains postes de dépense ainsi que de financer les mesures décidées en cours d'année.

En outre, un effet de base favorable résultant de dépenses de soins de ville inférieures de 0,5 milliard d'euros à l'estimation retenue lors de la construction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) pour 2013 a permis de revoir ce dernier à la baisse d'un même montant.

La charge de la dette serait, quant à elle, inférieure à la prévision de la loi de finances initiale pour 2013 d'un montant de 1,9 milliard d'euros en raison de conditions de financement particulièrement favorables.

c) Un « creusement » de l'écart à la trajectoire de solde public

Dans ces conditions, le déficit structurel s'établirait à 2,6 % du PIB en 2013 , soit un niveau supérieur d'un point de PIB à l'objectif retenu par la loi de programmation des finances publiques. Aussi l'écart à la trajectoire pluriannuelle de solde structurel se creuserait-il substantiellement en 2013 - sachant que celui-ci était déjà de 0,3 point de PIB en 2012 (cf. supra ).

Il apparaît donc clairement le décalage entre le solde structurel et la programmation résulte, en majeure partie, d'une dégradation de la situation économique en 2013 .

Il en va de même du solde effectif, qui atteindrait 4,1% du PIB (contre une prévision de 3 % dans la loi de programmation). Ce dernier se réduirait de 0,7 point de PIB par rapport à 2012 (4,8 % du PIB), malgré une dégradation plus forte qu'anticipé du déficit conjoncturel - de 0,6 point par rapport à 2012. Pour mémoire, la loi de programmation des finances publiques retenait une hypothèse de croissance du PIB de 2 % pour 2013, alors que celle-ci ne devrait s'élever qu'à 0,1 %.

3. Un effort structurel en 2014 supérieur à la programmation, mais compatible avec la reprise de l'activité économique

L'effort structurel prévu pour 2014 par le présent projet de loi de finances s'élève à 0,9 point de PIB , supérieur de 0,4 point de PIB à la prévision de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017. Cela permettrait de réduire en partie l'écart du solde structurel par rapport à la programmation : il serait de 0,6 point de PIB, contre 1 point de PIB en 2013 (le solde structurel devant s'élever à - 1,7 % du PIB, contre une cible de - 1,1 % du PIB).

Par conséquent, l'écart avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel ne serait pas intégralement comblé en 2014 , afin de ne pas hypothéquer les conditions d'une reprise durable de l'activité économique . En effet, rattraper dès 2014 le retard pris par le solde structurel par rapport à la programmation impliquerait un effort structurel supplémentaire de 0,6 point de PIB ; à supposer que le multiplicateur budgétaire 71 ( * ) soit égal à l'unité - sachant que dans la situation actuelle, il pourrait être supérieur 72 ( * ) - conduirait à amputer la croissance du PIB en 2014 de 0,6 point.

C'est pourquoi le Gouvernement a, à raison, fait le choix de lisser l'effort structurel sur la fin de la période de programmation , d'autant que l'atteinte de l'objectif de moyen terme (OMT), soit l'équilibre structurel, n'est pas remise en question (cf. infra ).

Dans ces conditions, le solde structurel s'élèverait à - 1,7 % du PIB en 2014 (contre un objectif de - 1,1 % du PIB) ; le déficit effectif se réduirait de 0,5 point par rapport à 2013 pour atteindre 3,6 % du PIB .

B. UNE QUASI STABILISATION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Ainsi que cela était indiqué précédemment, l'effort structurel programmé en 2014 reposerait, pour 0,15 point de PIB, sur les recettes . Celui-ci prendrait la forme de mesures nouvelles en prélèvements obligatoires d' un montant de 2,7 milliards d'euros .

Au total, les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014 portent des mesures nouvelles dont l'impact est évalué à 8,2 milliards d'euros en 2014 .

Toutefois, celles-ci sont contrebalancées par les moindres recettes provoquées par les mesures adoptées antérieurement , dont le coût net du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

A l'inverse, des recettes supplémentaires sont à attendre des mesures adoptées dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de juillet 2012 et de la réforme des régimes de retraite, qui comprend l'accord AGIRC-ARRCO du 13 mars 2013 et le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites actuellement en cours d'examen par le Parlement 73 ( * ) (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 16 : L'effort en recettes en 2014

Total des mesures antérieures

- 5,5

dont LFI pour 2013*

- 6,4

dont réforme des régimes de retraite de base et complémentaires

+ 1,5

dont coût du CICE (net de la hausse de la TVA)

- 3,8

Autres**

+ 3,2

Mesures PLF/PLFSS pour 2014

+ 8,2

TOTAL

+ 2,7

* La loi de finances pour 2013 comportait de nombreuses mesures provisoires (mesures de trésorerie ou impositions ponctuelles) dont l'effet disparaît en 2014.

** Il s'agit notamment des mesures adoptées dans le cadre de la loi de finances rectificative de juillet 2012 et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Dans ces conditions, le taux de prélèvements obligatoires serait quasiment stabilisé en 2014 , passant de 46 % du PIB en 2013 à 46,1 % du PIB en 2014.

A cet égard, il faut également noter que la hausse de 2,7 milliards d'euros comprend des mesures de lutte contre la fraude et l'optimisation fiscales d'un montant estimé à 1,8 milliard d'euros (cf. tableau ci-après relatif à l'impact des dispositions en recettes pour l'année 2014).

En 2014, l'élasticité des prélèvements obligatoires est supposée égale à l'unité et devrait, par conséquent, rester sans effet sur le taux de prélèvements obligatoires.

Dans son avis du 20 septembre 2013 précité 74 ( * ) , le Haut Conseil des finances publiques a considéré que cette hypothèse était « optimiste », estimant que « la conjoncture morose en 2013 devrait jouer encore en partie sur les recettes à percevoir en 2014 par l'Etat du fait des décalages affectant certains impôts (impôt sur les sociétés et impôt sur le revenu) ».

Si un tel phénomène ne saurait être exclu, il paraît difficile, à ce jour, de retenir une hypothèse d'élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance du PIB différente de l'unité. Il s'agit, en effet, d'une variable difficilement prévisible ; c'est pourquoi la démarche la plus robuste consiste à raisonner à partir des élasticités historiques moyennes , dites élasticités conventionnelles. Ces dernières ont fait l'objet d'une estimation économétrique par l'OCDE 75 ( * ) qui fait apparaître qu'en moyenne, l'élasticité totale des prélèvements obligatoires est très proche de l'unité.

Tableau n° 17 : Impact des dispositions en recettes pour l'année 2014

(en milliards d'euros)

Mesures en recettes prévues pour 2014

2,7

Pérenniser notre modèle social

5,9

Réformer les retraites

3,4

Hausse des cotisations de retraite (salariés)

1,05

Hausse des cotisations de retraite (employeurs)

1,05

Suppression de l'exonération d'impôt sur le revenu des majorations de pensions

1,2

Mesures agricoles

0,1

Rénover la politique familiale et éducative

1,5

Quotient familial (abaissement du plafond)

1,0

Suppression de la réduction d'impôt pour frais de scolarité

0,4

Financer la généralisation des complémentaires santé

1,0

Suppression de l'exo. d'IR de la participation employeurs aux contrats collectifs complémentaires

1,0

Encourager la croissance, la compétitive et l'emploi

- 3,4

CICE/TVA - effet net

- 3,8

Baisse des cotisations famille

- 1,05

Contribution sur l'excédent brut d'exploitation (EBE)

2,5

Suppression de l'imposition forfaitaire annuelle (IFA)

- 0,6

Réforme de l'imposition des plus-values mobilières

- 0,4

Renforcement du dispositif « jeunes entreprises innovantes »

- 0,1

Amortissement accéléré des robots

0,0

Soutenir le pouvoir d'achat et l'accès au logement

- 1,5

Soutenir le pouvoir d'achat

- 0,9

Réindexation du barème

- 0,7

Revalorisation de la décote de 5 % au-delà de l'inflation

- 0,2

Baisse de la TVA sur les entrées de salles de cinéma

- 0,1

Faciliter l'accès au logement

- 0,6

Réforme de l'imposition des plus-values immobilières

- 0,2

Abaissement du taux de TVA dans le logement social

- 0,4

Soutien à l'investissement institutionnel dans le logement intermédiaire (coût à compter de 2015)

0,0

Réussir la transition écologique

0,5

Fiscalité énergétique : introduction composante carbone

0,3

Suppression progressive de la défiscalisation des biocarburants

0,1

Durcissement du malus automobile

0,1

Lutter contre la fraude et l'optimisation fiscale

1,8

Fraude fiscale des ménages

1,0

Optimisation fiscale des entreprises

0,8

Autres

- 0,6

Mesures PLFSS 2014

0,6

Taxe exceptionnelle de solidarité sur les hautes rémunérations versées par les entreprises

0,3

Faculté de hausse de DMTO par les départements (sur la base d'un recours moyen de 50 %)

0,5

Autres mesures (déjà votées)

- 2,0

dont taxe poids lourds

1,2

dont contrecoups mesures entreprises votées depuis

- 4,5

dont autres

1,3

Source : RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014

C. UN EFFORT REPOSANT ESSENTIELLEMENT SUR LA DÉPENSE

Pour la première fois de la période de programmation, l'effort structurel porterait principalement sur des économies en dépenses : l'effort en dépenses serait de 0,75 point de PIB, soit 80 % de l'effort structurel total.

A cet effet, la croissance de la dépense publique en volume passerait de 1,7 % en 2013 à 0,4 % en 2014 , soit une économie de 15 milliards d'euros répartie sur l'ensemble des administrations publiques.

Tableau n° 18 : Contribution par sous-secteur à la croissance
de la dépense publique

(en points de contribution, sauf mention contraire)

2013

2014

Croissance de la dépense publique (en %)

1,7

0,4

Etat

0,0

- 0,1

Organismes divers d'administration centrale (ODAC)

0,3

0,1

Administrations publiques locales (APUL)

0,4

0,0

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

1,0

0,4

Source : RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014

Selon les informations communiquées par le Gouvernement, les dépenses de l'Etat, hors charge de la dette et des pensions, devraient baisser de 1,5 milliard d'euros en 2014 ; cela explique la contribution de
- 0,1 point de l'évolution des dépenses de l'Etat à la croissance de la dépense publique en volume (cf. tableau ci-avant). Au total, l'Etat réaliserait une économie de 8,5 milliards d'euros par rapport à la progression tendancielle de ses dépenses , à laquelle viendrait s'ajouter une économie de 0,5 milliard d'euros sur la charge de la dette liée aux intérêts évités grâce à la réduction du déficit budgétaire depuis 2012.

Cette économie de 8,5 milliards d'euros intègre u ne diminution du concours financier de l'Etat aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d'euros 76 ( * ) ainsi qu' une réduction des moyens affectés aux opérateurs de l'Etat .

L'effort en dépenses consenti par l'Etat et ses opérateurs est analysé plus en détails dans la deuxième partie du présent rapport.

La contribution des administrations publiques locales à la croissance de la dépense publique serait nulle en 2014 . La réduction des concours financiers de l'Etat ( cf . supra ) inciterait les collectivités territoriales à engager un effort de maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, dont l'évolution serait inférieure à 3 %. La formation brute de capital fixe (FBCF) des APUL connaîtrait une baisse marquée (- 3,8 % entre 2013 et 2014), en large partie du fait de la réduction de l'investissement communal en raison des élections municipales qui auront lieu en mars prochain. Toutefois, cette tendance serait contrebalancée par la croissance des dépenses de personnel (+ 3,1 %), affectées par la poursuite de la hausse des cotisations employeurs versées à la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). Enfin, la hausse des dépenses sociales s'infléchirait dans un contexte d'amélioration de la conjoncture économique et de l'emploi.

Au total, les dépenses des administrations publiques locales augmenteraient de 1,2 % en 2014 (contre 2,8 % en 2013). Cependant, dans l'avis du 20 septembre 2013 précité 77 ( * ) , le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a estimé que des « interrogations subsistent sur les hypothèses d'évolution des dépenses des collectivités territoriales. En particulier, la réduction des concours de l'Etat ne se traduira pas nécessairement par une diminution à due concurrence de la dépense locale ».

S'agissant de l'effort en dépenses des administrations de sécurité sociale en 2014, celui-ci reposerait sur :

- les économies résultant de la réforme des régimes de retraite de base et complémentaire (1,8 milliard d'euros). Le décalage de six mois de la revalorisation des pensions - du 1 er avril au 1 er octobre - prévu par le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites 78 ( * ) , actuellement en cours d'examen par le Parlement, devrait produire une économie d'environ 800 millions d'euros en 2014 ; l'accord AGIRC-ARRCO du 13 mars 2013 permettrait, quant à lui, une diminution des dépenses de pensions de près d'un milliard d'euros en 2014 du fait de la sous-indexation des pensions pour une période de trois années ;

- un taux d'évolution de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) fixé à 2,4 % en 2014 , ce qui représente une économie de près de 2,4 milliards d'euros, l'évolution tendancielle des dépenses étant évalué à 3,8 %. A cet égard, il faut rappeler que l'ONDAM a été systématiquement respecté depuis 2010 et qu'il devrait être, de nouveau, sous-exécuté en 2013 (à hauteur de 0,5 milliard d'euros) ;

- une économie de 300 millions d'euros sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale , dans le cadre de la renégociation des conventions d'objectifs et de gestion (COG) ;

- une inflexion des dépenses d'assurance chômage de 300 millions d'euros par rapport à la tendance du fait d' une redéfinition des conditions d'indemnisation des demandeurs d'emploi dans le cadre de la négociation de la convention d'assurance chômage pour la période 2014-2015 ;

- une économie de 150 millions d'euros sur les prestations familiales, dans le cadre de la réforme de la politique familiale , qui sera mobilisée notamment pour financer des mesures en faveur des ménages les plus modestes dont le coût approcherait 100 millions d'euros en 2014.

IV. UNE TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE TOUJOURS DIRIGÉE VERS L'ÉQUILIBRE STRUCTUREL

L'écart qui devrait être constaté en 2013 et 2014 entre le solde structurel et la trajectoire arrêtée par la loi de programmation des finances publiques ne remet aucunement en cause l'atteinte de l'objectif de moyen terme (OMT), sur la base duquel la France s'est engagée auprès de ses partenaires européens, à savoir l'équilibre structurel.

En outre, conformément aux engagements qui avaient été pris, l'effort structurel porterait, à compter de 2015, exclusivement sur les dépenses , permettant ainsi de réduire le taux de prélèvements obligatoires à la fin de la période de programmation.

A. LE RESPECT DE L'OBJECTIF DE MOYEN TERME : L'ATTEINTE DE L'ÉQUILIBRE STRUCTUREL EN 2017

La trajectoire pluriannuelle des finances publiques présentée par le Gouvernement dans le cadre du présent projet de loi de finances reste dirigée vers l'objectif de moyen terme (OMT) de solde structurel qui est l'équilibre structurel. Ce dernier serait atteint en 2017 (cf. tableau ci-après). Ainsi, la France respecterait les engagements qu'elle a pris auprès de ses partenaires européens en application du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG).

L'équilibre structurel stricto sensu serait atteint avec un an de retard par rapport à ce que prévoyait la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 ; toutefois, ainsi que le rappelait le président du Haut Conseil des finances publiques lors de son audition du 9 octobre 2013 précitée : « le solde structurel s'établirait à - 0,2 point de PIB fin 2012, soit un chiffre entrant dans la fourchette de ce que la Commission européenne juge comme étant l'équilibre structurel » 79 ( * ) .

Tableau n° 19 : La trajectoire des finances publiques définies
dans le projet de loi de finances pour 2014

(en % du PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde public

- 4,8

- 4,1

- 3,6

- 2,8

- 1,7

- 1,2

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 1,7

- 0,9

- 0,2

0,0

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,9

0,9

0,6

0,3

Dette publique

90,2

93,4

95,1

94,7

93,1

91,0

Source : RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014

Certes, le solde structurel resterait inférieur de 0,4 point de PIB en 2015 et de 0,2 point de PIB en 2016 aux objectifs définis par la loi de programmation des finances publiques ; toutefois, l'écart serait entièrement comblé en 2017 (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 20 : Comparaison de la trajectoire du projet de loi de finances pour 2014 avec celle de la loi de programmation des finances publiques 2012-2017

(en % du PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Projet de loi de finances (PLF) pour 2014

Solde public

- 4,8

- 4,1

- 3,6

- 2,8

- 1,7

- 1,2

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 1,7

- 0,9

- 0,2

0,0

Loi de programmation des finances publiques (LPFP) 2012-2017

Solde public

- 4,5

- 3,0

- 2,2

- 1,3

- 0,6

- 0,3

Solde structurel

- 3,6

- 1,6

- 1,1

- 0,5

0,0

0,0

Ecart (PLF-LPFP)

Solde public

- 0,3

- 1,1

- 1,4

- 1,5

- 1,1

- 0,9

Solde structurel

- 0,3

- 1,0

- 0,6

- 0,4

- 0,2

0,0

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents mentionnés)

Comme cela était indiqué précédemment, le Gouvernement a fait le choix de ne pas corriger complètement l'écart entre le solde structurel et la programmation dès 2014, et ce afin de favoriser une reprise durable de l'activité économique. Par conséquent, l'effort structurel - et donc l'ajustement structurel - a été lissé sur la période 2014-2017 .

La nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques permet de concilier poursuite de la consolidation des finances publiques et croissance économique . Il serait, en effet, illogique de menacer la reprise de l'activité afin de corriger un creusement de l'écart entre le solde structurel et la programmation principalement lié à la dégradation de la conjoncture.

La conciliation de ces deux objectifs a constitué un souci constant du Gouvernement . Les ajustements successifs de la trajectoire de solde structurel au cours des derniers mois n'ont fait que tirer les conséquences des évolutions de la conjoncture tout au long de l'année 2013 et de leurs incidences, qui ont fait apparaître la nécessité de répartir la réduction du déficit structurel sur l'ensemble de la période 2014-2017 (cf. tableau ci-après).

Graphique n° 21 : Une trajectoire de solde structurel ajustée
à plusieurs reprises

(en % du PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents mentionnés)

La trajectoire pluriannuelle des finances publiques présentée par le Gouvernement dans le cadre du présent projet de loi de finances est rendue possible par la prolongation accordée par le Conseil de l'Union, en juin dernier, jusqu'à 2015 du délai dont dispose la France pour corriger son déficit excessif (cf. supra ). Cette décision, motivée par la détérioration de la situation économique, a donné une latitude supplémentaire pour mieux lisser l'effort de consolidation sur la période de programmation.

En tout état de cause, les efforts prévus par le Gouvernement dans le cadre de cette nouvelle trajectoire permettraient de mettre fin au déficit excessif en 2015 , le déficit effectif prévisionnel s'élevant à 2,8 % du PIB, conformément à la trajectoire recommandée par le Conseil de l'Union européenne ( cf . supra ).

B. VERS UNE DIMINUTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Conformément à l'engagement pris en loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, le taux de prélèvements obligatoires serait réduit à la fin de la période de programmation . En effet, l'ajustement budgétaire cesserait de porter sur les recettes au cours de la deuxième partie de la période et proviendrait exclusivement d'un effort en dépenses conséquent ( cf . infra ).

Aussi, la part des prélèvements obligatoires dans le PIB reviendrait à 45,8 % en 2017 après avoir atteint 46,1 % en 2014 ( cf . tableau ci-après). Cela représenterait une baisse des prélèvements de près de 7 milliards d'euros en 2017.

Il faut noter que le taux de prélèvements obligatoires est toujours resté légèrement inférieur aux prévisions retenues dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques , notamment du fait d'élasticités fiscales moins élevées que prévu en 2013 qui ont limité le rendement des prélèvements.

Tableau n° 22 : Evolution du taux de prélèvements obligatoires

(évolution, en %)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Projet de loi de finances pour 2014

45,0

46,0

46,1

46,1

46,1

45,8

Loi de programmation des finances publiques 2012-2017

44,9

46,3

46,3

46,2

46,2

45,9

Ecart (PLF-LPFP)

0,1

- 0,3

- 0,2

- 0,1

- 0,1

- 0,1

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents mentionnés)

C. UN EFFORT SANS PRÉCÉDENT EN DÉPENSES

Le double objectif de l'atteinte de l'équilibre structurel et de la réduction du taux de prélèvements obligatoires à l'horizon 2017 est servi par un effort sans précédent en dépenses prévu entre 2014 et 2017 . Alors que sur cette même période, la loi de programmation des finances publiques (LPFP) prévoyait une croissance moyenne en volume des dépenses publiques de 0,5 % par an, l'objectif est désormais une croissance moyenne de 0,25 % par an .

Ainsi, la dépense publique devrait évoluer en volume de + 0,2 % par an entre 2015 et 2017 (tableau ci-après). Selon le Gouvernement, cette maîtrise de la dépense serait permise par les efforts des opérateurs de l'Etat et des collectivités territoriales et les réformes structurelles inscrites dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP) ; par ailleurs, celle-ci serait favorisée par les normes de dépenses - qui concernent l'encadrement en valeur des dépenses de l'Etat hors charge de la dette et pensions de même que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) - qui ont pu faire la preuve de leur effet disciplinant au cours des dernières années.

Tableau n° 23 : Les objectifs de croissance en volume de la dépense publique

(évolution, en %)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Projet de loi de finances pour 2014

1,0

1,7

0,4

0,2

0,2

0,2

Loi de programmation des finances publiques 2012-2017

0,4

0,9

0,4

0,2

0,7

0,8

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents mentionnés)

Cela permettrait une forte réduction du ratio de dépenses publiques sur PIB , qui passerait de 56,6 % du PIB en 2012 à 54 % en 2017. La diminution de ce rapport débuterait dès 2014 (cf. graphique ci-après).

Graphique n° 24 : Evolution du ratio de dépenses publiques sur PIB

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Il est absolument essentiel que les objectifs de maîtrise de la dépense publique soient effectivement respectés, sauf à compromettre sérieusement la trajectoire de consolidation des finances publiques . Aussi est-il impératif que l'ensemble des administrations publiques - l'Etat, ses opérateurs, les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale - réduisent effectivement leurs dépenses tout au long de la période de programmation, en mettant en oeuvre des réformes structurelles.

A cet égard, au début du mois d'octobre 2013, le Président de la République a confié à Martin Malvy et Alain Lambert le soin d'établir des propositions « pour bâtir avec les collectivités [territoriales] un pacte de gouvernance financier durable » ; la lettre de mission invite en particulier ces derniers à explorer « les voies et moyens pour mieux maîtriser les dépenses locales, dans le respect de l'autonomie des collectivités ». Il s'agit donc d'engager une démarche commune avec les collectivités territoriales en faveur d'une meilleure maîtrise de la dépense publique , tout en s'attachant absolument à éviter « une logique d'économies aveugles » qui prévaudrait en l'absence d'une telle démarche.

Afin de mettre en évidence la sensibilité de la trajectoire des finances publiques au respect de l'effort en dépenses programmé, des projections ont été réalisées à partir de deux scénarii :

- un premier scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1,6 % au cours de la période 2014-2017 , ce qui correspond à la moyenne constatée entre 2007 et 2012 (cf. tableau ci-après) ;

- un second scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1 % entre 2014 et 2017 , soit une progression intermédiaire entre la moyenne 2007-2012 et la prévision du Gouvernement.

Par ailleurs, le niveau de l'effort en recettes et les prévisions relatives à la composante non discrétionnaire de l'ajustement structurel sont supposés être similaires à ceux retenus par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. En particulier, il est tenu compte de la baisse des prélèvements obligatoires prévue pour la fin de la période de programmation. De cette manière, les projections varient sous l'influence exclusive de l'évolution des dépenses .

Ces dernières hypothèses mettent en évidence le caractère théorique de l'exercice qui est proposé : une déviation de la trajectoire d'économies appellerait, en effet, une augmentation des prélèvements obligatoires pour atteindre l'objectif de moyen terme (OMT) de solde structurel, conformément aux engagements européens de la France .

Tableau n° 25 : Croissance de la dépense publique en volume (2000-2013)

(en %)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

1,9

2,2

3,8

2,0

2,3

2,7

1,8

2,7

1,0

3,8

0,8

0,0

1,0

1,7

Moyenne constatée entre 2000 et 2012

Moyenne constatée entre 2007 et 2012

2,0

1,6

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'Insee et du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Les projections réalisées font apparaître que le non-respect de l'objectif d'évolution annuelle de la dépense publique en volume, fixé par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, aurait pour conséquence de dégrader fortement la trajectoire des soldes structurels et effectifs et de la dette publique ( cf . tableau ci-après).

Tableau n° 26 : Sensibilité de la trajectoire des finances publiques à l'évolution des dépenses des administrations publiques

(en % du PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Hypothèses macroéconomiques

Croissance (en %)

0,0

0,1

0,9

1,7

2,0

2,0

Trajectoire présentée par le Gouvernement dans le cadre du PLF pour 2014

Évol. de la dépense en vol.

1,0

1,7

0,4

0,2

0,2

0,2

Solde effectif

- 4,8

- 4,1

- 3,6

- 2,8

- 1,7

- 1,2

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 1,7

- 0,9

- 0,2

0,0

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,9

0,9

0,6

0,3

Dette publique

90,2

93,4

95,1

94,7

93,1

91,0

Trajectoire en cas de croissance en volume de la dépense de 1,6 % entre 2014 et 2017

Évol. de la dépense en vol.

1,0

1,7

1,6

1,6

1,6

1,6

Solde effectif

- 4,9

- 4,1

- 4,4

- 4,3

- 4,1

- 4,2

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 2,4

- 2,3

- 2,4

- 2,8

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,2

0,1

- 0,1

- 0,4

Dette publique*

90,2

93,4

95,8

96,8

97,3

98,0

Trajectoire en cas de croissance en volume de la dépense de 1 % entre 2014 et 2017

Évol. de la dépense en vol.

1,0

1,7

1,0

1,0

1,0

1,0

Solde effectif

- 4,9

- 4,1

- 4,0

- 3,7

- 3,2

- 2,8

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 2,1

- 1,6

- 1,4

- 1,5

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,5

0,4

0,2

-0,1

Dette publique*

90,2

93,4

95,4

95,8

95,4

94,8

* Il est supposé que seule la variation de la dette imputable au déficit est sensible aux évolutions du PIB (les éléments exogènes, soit ceux non pris en compte dans le calcul du déficit mais comptabilisés dans la dette publique, conformément aux règles européennes - dettes contractées par le FESF, apports au capital du MES, etc. -, sont déterminés en retenant les hypothèses du projet de loi de finances pour 2014).

Source : commission des finances du Sénat (à partir des hypothèses du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Une progression de la dépense publique de 1,6 % par an en volume entre 2014 et 2017 conduirait à ce que le solde structurel s'élève à environ - 2,8 % du PIB en 2017 (soit un niveau plus dégradé que celui de 2014) , contre un objectif de moyen terme (OMT) fixé à l'équilibre structurel. Il faut noter que la dégradation conséquente du solde structurel qui intervient entre 2016 et 2017 s'explique notamment par la baisse des prélèvements obligatoires supposée survenir conformément à l'actuelle programmation. Le déficit effectif resterait, quant à lui, au-dessus de 4 % du PIB tout au long de la période , et ne reviendrait donc pas en deçà du seuil de 3 % du PIB en application du pacte de stabilité et de croissance. Enfin, la dette publique augmenterait continument pour atteindre 98 % du PIB en 2017 .

Si la progression de la dépense publique en volume était de 1 % par an au cours de la période 2014-2017, le solde structurel serait toujours sensiblement supérieur à l'objectif de moyen terme (OMT) en 2017, atteignant - 1,5 % du PIB . Pour ce qui est du déficit effectif, celui-ci ne reviendrait en-dessous du seuil de 3 % du PIB qu'à l'horizon 2017 . La décrue de la dette publique en points de PIB serait retardée d'un an par rapport à la prévision du Gouvernement et serait supérieur de près de 4 points de PIB à l'objectif en 2017.

Ces résultats montrent bien l'absolue nécessité de respecter les objectifs de dépenses arrêtés . Le niveau des économies qui doivent être réalisées à cette fin - soit 15 milliards d'euros en 2014 et environ 17,5 milliards d'euros en 2015 - impliquent que soient engagées des réformes ambitieuses , pouvant au besoin appeler des changements de paradigme, et qui ne peuvent se limiter à de simples mesures d'efficience ou d'économies ponctuelles compte tenu de la nécessité de répondre à un impératif d'économies croissant tout au long de la période de programmation. Aussi y a-t-il lieu de souhaiter que la modernisation de l'action publique (MAP) permettra effectivement d'identifier les leviers d'une transformation en profondeur des administrations publiques , conciliant tout à la fois le maintien d'un service public de qualité et la rationalisation des moyens publics. C'est à cette seule condition que la trajectoire pluriannuelle des finances publiques, dirigée vers l'objectif de moyen terme (OMT), pourra être respectée.

D. UNE INFLEXION DE LA DETTE PUBLIQUE À COMPTER DE 2015

Le niveau des efforts structurels prévus par le Gouvernement tout au long de la période de la programmation permettrait d'engager une réduction du taux d'endettement public en 2015, après que celui-ci a atteint 95,1 % du PIB en 2014 . Cette évolution résulterait également d'une élévation du rythme de la croissance du PIB.

Tableau n° 27 : La trajectoire de la dette publique définie
dans le projet de loi de finances pour 2014

(en % du PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Dette publique

90,2

93,4

95,1

94,7

93,1

91,0

Dette publique
(hors soutien financier à la zone euro)

87,8

90,4

91,8

91,6

90,0

88,0

Source : RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014

Comme le montre le tableau ci-avant, le soutien financier à la zone euro contribue substantiellement au niveau d'endettement de la France , puisqu'il représente près de 3 points de PIB en 2013. Il s'agit du poids de la contribution à l'assistance bilatérale accordée à la Grèce, ainsi qu'au Fonds européen de stabilité financière (FESF) et au Mécanisme européen de stabilité (MES).

Selon les données actuellement disponibles, la participation française aux programmes d'assistance financière européen devrait croître encore en 2014 pour se stabiliser ensuite à 68,8 milliards d'euros (cf. tableau ci-après).

Tableau n° 28 : L'impact des programmes d'assistance financière de la zone euro sur la dette publique de la France

(en %)

2010

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

2015 (p)

2016 (p)

2017 (p)

Grèce (prêts bilatéraux)

4,4

11,4

11,4

11,4

11,4

11,4

11,4

11,4

FESF

0,0

3,1

30,2

38,7

41,1

41,1

41,1

41,1

dont Grèce

23,6

29,7

31,6

31,6

31,6

31,6

dont Irlande

1,6

2,6

3,8

3,8

3,8

3,8

3,8

dont Portugal

1,5

4,0

5,1

5,6

5,6

5,6

5,6

MES*

6,5

13,0

16,3

16,3

16,3

16,3

Total

4,4

14,5

48,1

63,1

68,8

68,8

68,8

68,8

(p) Prévisions.

* Participation au capital du MES.

Source : ministère de l'économie et des finances (octobre 2013)

La stabilisation des montants venant abonder la dette publique au titre de la participation de la France résulte principalement des modalités d'enregistrement comptable de l'assistance financière ( cf . encadré ci-après). Alors que le FESF n'accorde plus de prêts depuis le 1 er juillet 2013, ceux octroyés par le MES ne participent pas à l'accroissement de la dette publique française. Par exemple, le versement de 4,5 milliards d'euros à Chypre en 2013 - dans le cadre d'un programme d'assistance conjoint avec le Fonds monétaire international (FMI) d'un montant total de 10 milliards d'euros - est resté sans effet sur le niveau de la dette publique française, seule la participation au capital du MES étant prise en compte.

L'enregistrement comptable de l'assistance financière

Selon le Système européen de comptes économiques intégrés (SEC 95), sont prises en compte pour le calcul de la dette publique les unités institutionnelles relevant du secteur des administrations publiques 80 ( * ) . Pour être qualifiée d'unité institutionnelle, une entité doit jouir d'une autonomie de décision dans l'exercice de sa fonction principale (posséder en toute autonomie ses biens et ses actifs, prendre des décisions économiques, avoir la capacité de souscrire des engagements, etc.).

Ainsi, déterminer si une structure doit être prise en compte dans le calcul de la dette publique implique de se poser deux questions : constitue-t-elle une unité institutionnelle ? Si tel est le cas, relève-t-elle du secteur des administrations publiques ?

Il faut préciser que si l'entité considérée ne constitue pas une unité institutionnelle, elle doit être intégrée dans l'unité institutionnelle qui la contrôle .

C'est en faisant application de ces principes qu'Eurostat a déterminé le traitement comptable devant être réservé à la dette contractée par le FESF et le MES :

1°) Concernant le FESF, Eurostat (avis du 27 janvier 2011) a estimé qu' il ne présentait pas les caractéristiques d'une unité institutionnelle , n'ayant ni capacité d'initiative, ni autonomie de décision. L'institut statistique en a donc conclu que la dette émise par le Fonds devait être enregistrée dans les comptes des Etats participants au prorata de leur quote-part dans les prêts octroyés ; elle accroissait donc la dette publique de ces derniers à due proportion de ces prêts ;

2°) Concernant le MES, Eurostat (avis du 7 avril 2011) a considéré qu'il constituait bien une unité institutionnelle eu égard à son autonomie réelle et à son statut juridique ; toutefois, dans la mesure où il s'agit d'une organisation internationale, elle ne saurait être rattachée au secteur des administrations publiques des Etats de la zone euro. Par conséquent, la dette émise par le MES lui est propre et n'a pas à être enregistrée dans les comptes des Etats .

Par conséquent, alors que l'ensemble de la dette émise par le FESF devait être enregistrée au titre de la dette publique de la France - au prorata de la participation française dans le Fonds -, seule la participation au capital appelé du MES doit y figurer .

E. COMPARAISONS AVEC LES PRINCIPAUX ÉTATS DE LA ZONE EURO

Comme la France, les autres Etats membres de la zone euro sont concernés par les règles du nouveau cadre budgétaire européen ; aussi est-il intéressant d'observer quelle est la trajectoire que ces derniers ont défini s'agissant de l'évolution de leurs finances publiques.

Pour ce qui est des données agrégées relatives à la zone euro, il apparaît que, selon les prévisions de la Commission européenne 81 ( * ) , le déficit effectif de l'ensemble de la zone s'élèverait à 3,1 % du PIB en 2013 et à 2,5 % du PIB en 2014 . Le déficit structurel serait de 1,5 % du PIB en 2013 et de 1,3 % du PIB en 2014 . Enfin, concernant l'évolution de la dette publique, celle-ci atteindrait 95,5 % du PIB en 2013 et 95,9 % du PIB en 2014 (cf. tableau ci-après).

La trajectoire de solde structurel de la France serait proche de la prévision de solde structurel de la zone euro prise dans son ensemble - le déficit structurel français devant s'élever à 1,7 % du PIB en 2014, alors que celui de la zone euro serait de 1,3 % du PIB. Quant à la dette publique, son niveau serait, pour la France, inférieur à celui de la zone euro sur toute la période 2012-2017.

Tableau n° 29 : La situation budgétaire d'ensemble de la zone euro

(en % du PIB)

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

2015 (p)

Déficit structurel

- 3,6

- 2,1

- 1,5

- 1,3

- 1,5

Déficit effectif

- 4,2

- 3,7

- 3,1

- 2,5

- 2,4

Dette publique

87,9

92,6

95,5

95,9

95,4

(p) Prévisions.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de la Commission européenne)

Afin d'aller plus avant dans la comparaison, les trajectoires définies par les principales économies de la zone euro - soit l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et les Pays-Bas - ont été recueillies sur la base des programmes de stabilité qui ont été transmis à la Commission et au Conseil de l'Union européenne en avril 2013. Les données relatives à l'évolution du solde structurel, du solde effectif et de la dette publique sont reprises dans le tableau ci-après.

Toutefois, il faut garder à l'esprit que les trajectoires des finances publiques exposées dans les programmes de stabilité relèvent avant tout d'un exercice de programmation et ne peuvent, par conséquent, être appréhendées comme des prévisions. En effet, il ne saurait être exclu que ces trajectoires soient amenées à évoluer dans le futur afin de tenir compte, notamment, des évolutions de la conjoncture économique.

En tout état de cause, les données collectées font clairement apparaître une convergence des trajectoires de soldes effectifs et structurels des principaux Etats membres de la zone euro ( cf . graphiques ci-après), ce qui tend à démontrer l'utilité des règles budgétaires européennes instituées au cours de la période récente et explique, compte tenu des effets du multiplicateur budgétaire, le profil de la croissance de la zone euro.

Tableau n° 30 : La trajectoire des finances publiques
dans les principaux Etats de la zone euro

(en % du PIB)

2012

2013 (p)

2014 (p)

2015 (p)

2016 (p)

2017 (p)

Solde structurel

Allemagne*

0,0

0,0

0,5

0,5

0,5

0,5

France

- 3,9

- 2,6

- 1,7

- 0,9

- 0,2

0,0

Italie

- 1,2

0,0

0,4

0,0

0,0

0,0

Espagne

- 4,3

- 2,3

- 1,7

- 0,9

- 0,2

0,5

Pays-Bas

- 2,4

- 1,5

- 1,4

- 0,9

- 1,1

- 1,2

Solde effectif

Allemagne*

0,2

- 0,5

0,0

0,0

0,5

0,5

France

- 4,8

- 4,1

- 3,6

- 2,8

- 1,7

- 1,2

Italie

- 3,0

- 2,9

- 1,8

- 1,5

- 0,9

- 0,4

Espagne

- 10,6

- 6,3

- 5,5

- 4,1

- 2,7

- 0,9

Pays-Bas

- 4,1

- 3,4

- 3,0

- 2,0

- 1,9

- 1,4

Dette publique

Allemagne*

81,9

80,5

77,5

75,0

71,5

69,0

France

90,2

93,4

95,1

94,7

93,1

91,0

Italie

127,0

130,4

129,0

125,5

121,4

117,3

Espagne

84,2

91,4

96,2

99,1

99,8

96,9

Pays-Bas

71,2

74,0

75,0

71,4

71,4

70,8

(p) Prévisions.

* Pour l'Allemagne, les données prévisionnelles sont arrondies au demi-point de pourcentage.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des programmes de stabilité de 2013 des pays concernés et du projet de loi de finances pour 2014 pour la France)

Graphique n° 31 : Trajectoires de solde structurel des principaux pays
de la zone euro

(en % du PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des programmes de stabilité de 2013 des pays concernés et du projet de loi de finances pour 2014 pour la France)

Graphique n° 32 : Trajectoires de solde effectif des principaux pays
de la zone euro

(en % du PIB)

Graphique n° 33 : Trajectoire de dette publique des principaux
pays de la zone euro

(en % du PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des programmes de stabilité de 2013 des pays concernés et du projet de loi de finances pour 2014 pour la France)

F. LA SENSIBILITÉ DE LA TRAJECTOIRE DE SOLDE EFFECTIF ET DE DETTE PUBLIQUE À LA CONJONCTURE ÉCONOMIQUE

Afin de mesurer la sensibilité de la trajectoire de solde effectif et de dette publique à la conjoncture économique, la commission des finances du Sénat retient deux scénarii conventionnels - qui ne constituent en aucun cas des prévisions alternatives - dans lesquels la croissance du PIB est supposée supérieure de ½ point à la prévision du Gouvernement dans un cas et inférieure de ½ point dans l'autre sur la période 2014-2017.

Les projections réalisées sur la base de ces scénarii conventionnels reposent sur l'hypothèse que seules les recettes sont sensibles aux variations conjoncturelles 82 ( * ) ; aussi est-il supposé que les objectifs pluriannuels de dépenses arrêtés par le Gouvernement arrêtés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 sont respectés ( cf . supra ). En outre, les mesures nouvelles en prélèvements obligatoires annoncées sont intégrées aux projections .

Tableau n° 34 : Sensibilité du solde effectif et de la dette à la conjoncture

(en % du PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Scénario du Gouvernement

Croissance (en %)

0,0

0,1

0,9

1,7

2,0

2,0

Solde effectif

- 4,8

- 4,1

- 3,6

-2,8

- 1,7

- 1,2

Dette publique

90,2

93,4

95,1

94,7

93,1

91,0

Scénario du Gouvernement + ½ point de croissance

Croissance (en %)

0,0

0,1

1,4

2,2

2,5

2,5

Solde effectif

- 4,8

- 4,1

- 3,4

- 2,4

- 1,2

- 0,2

Dette publique*

90,2

93,4

94,4

93,1

90,3

86,9

Scénario du Gouvernement - ½ point de croissance

Croissance (en %)

0,0

0,1

0,4

1,2

1,5

1,5

Solde effectif

- 4,8

- 4,1

- 4,0

- 3,4

- 2,7

- 2,3

Dette publique*

90,2

93,4

95,8

96,3

95,9

95,2

* Il est supposé que seule la variation de la dette imputable au déficit est sensible aux évolutions du PIB (les éléments exogènes, soit ceux non pris en compte dans le calcul du déficit mais comptabilisés dans la dette publique, conformément aux règles européennes - dettes contractées par le FESF, apports au capital du MES, etc. -, sont déterminés en retenant les hypothèses du projet de loi de finances pour 2014).

Source : commission des finances du Sénat (à partir des hypothèses du projet de loi de finances pour 2014 appliquées aux données 2012 établies par l'Insee le 15 mai 2013 83 ( * ) )

Si l'on considère l'ensemble de la période de programmation, il apparaît que la trajectoire de l'ajustement structurel retenue par le Gouvernement ne permettrait pas, en cas de croissance du PIB inférieure de ½ point aux prévisions, de faire revenir le déficit effectif en deçà de 3 % du PIB en 2015 conformément aux recommandations formulées par le Conseil de l'Union européenne de juin 2013 dans le cadre de procédure de déficit effectif (PDE). En effet, le déficit effectif ne passerait le seuil de 3 % de PIB qu'en 2016 pour atteindre 2,3 % du PIB en 2017, contre un objectif de 1,2 % du PIB à cette échéance. En outre, le taux d'endettement ne commencerait à se réduire qu'en 2016 , soit avec un an de retard par rapport à la programmation.

A l'inverse, une croissance supérieure de ½ point aux prévisions - qui correspondrait peu ou prou à un scénario de rattrapage plus rapide du PIB potentiel par le PIB réel - permettrait une consolidation accélérée des finances publiques . Ainsi, le solde effectif serait quasiment à l'équilibre en 2017 (- 0,2 point de PIB) et la dette publique serait inférieure de près de 3 points de PIB en fin de programmation par rapport à la prévision.

Graphique n° 35 : Evolution du solde effectif
selon les hypothèses de croissance

(en % du PIB)

Graphique n° 36 : Evolution de la dette publique
selon les hypothèses de croissance

(en % du PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des hypothèses du projet de loi de finances pour 2014 appliquées aux données 2012 établies par l'Insee le 15 mai 2013)

G. L'ÉVALUATION DU PIB POTENTIEL : QUELS ENJEUX ?

1. Le PIB potentiel et la trajectoire de solde structurel

Le PIB potentiel 84 ( * ) joue désormais un rôle essentiel dans la gouvernance des finances publiques . En effet, c'est sur le fondement de cette donnée que sont évaluées la part conjoncturelle et la part structurelle du solde public ( cf . encadré ci-après).

Solde structurel et PIB potentiel

Le solde public structurel correspond au solde public corrigé des effets du cycle économique , soit de la conjoncture, de même que des mesures exceptionnelles et temporaires. En quelque sorte, il s'agit du solde public tel qu'il serait constaté si le PIB était égal à son potentiel.

De manière simplifiée, le solde structurel (exprimé en point de PIB) peut se calculer en retranchant du solde public effectif la moitié de l'écart de production (ou « output gap »), qui représente la différence entre le PIB effectif et le PIB potentiel 85 ( * ) .

A titre d'exemple, selon les données du rapport économique, social et financier (RESF) annexé au présent projet de loi de finances, l'écart de production serait de 2,9 points de PIB potentiel en 2013. Le solde effectif devrait être de - 4,1 % du PIB ; dès lors, le solde structurel se calcul de la manière suivante :

Solde structurel = - 4,1 - (- 2,9 × 0,5) = - 2,6 % du PIB

Dans son avis du 20 septembre 2013 86 ( * ) , le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) s'est interrogé sur l'estimation du PIB potentiel , laissant entendre que celui-ci pourrait être surévalué par le Gouvernement. Il indique ainsi que dans « un contexte de crise financière majeure, la persistance d'un déficit d'activité s'accompagne d'une réduction de l'offre productive à travers, par exemple, des faillites d'entreprises ou des pertes en capital humain. En présence de telles pertes définitives, la chute de la demande entraîne celle de l'offre si bien que l'écart de production reste faible. Aussi, une grande prudence est requise dans l'évaluation de la composante conjoncturelle du déficit public afin de ne pas sous-estimer le déficit structurel. En cas de surestimation de la composante conjoncturelle, les efforts d'ajustement budgétaire nécessaires pour atteindre l'Objectif de Moyen Terme - soit l'équilibre structurel - s'en trouveraient accrus ».

Le raisonnement tenu par le Haut Conseil est simple : si le PIB potentiel de la France était plus faible que l'évaluation qui en est faite aujourd'hui, l'écart de production serait lui-même moins important et la part conjoncturelle du déficit public, moins élevée ; dans ces conditions, le déficit structurel serait supérieur à l'estimation actuelle, ce qui allongerait le chemin vers l'équilibre structurel . Dès lors, les efforts prévus pour atteindre l'objectif de moyen terme (OMT) devraient être relevés.

2. Un PIB potentiel difficile à évaluer en raison de la crise

L'évaluation du PIB potentiel a été compliquée par la crise économique et financière . En effet, dans un contexte de crise, trois scénarii d'évolution du PIB potentiel peuvent être envisagés :

- un scénario dit du « trou d'air », dans lequel le PIB potentiel et sa croissance ne sont pas durablement affectés par la crise et peuvent être rapidement restaurés. Dans ce cas, le PIB potentiel reste sur sa tendance antérieure dans la mesure où il est « rejoint » par le PIB réel : ce dernier est stimulé par un surcroît de demande qui résulte d'une baisse des prix imputable à une offre momentanément supérieure à la demande ;

- un scénario dans lequel le niveau du PIB potentiel est durablement affecté par la crise, sa croissance ne retrouvant que progressivement son niveau d'avant-crise ;

- un scénario dans lequel le PIB potentiel et sa croissance sont affectés à long terme.

Dans ces deux derniers scenarii, la baisse durable du PIB réel entraîne celle du PIB potentiel . En effet, la pérennisation d'une conjoncture atone se traduit par des faillites d'entreprises, un recul de l'investissement productif, voire une perte de l'employabilité des actifs en situation de chômage durable, qui tendent à réduire la production potentielle.

S'agissant de l'impact des crises sur la productivité globale des facteurs de production , celui-ci est plus ambigu. Les périodes de crise contraignent les entreprises à restructurer leurs activités, ainsi qu'à rechercher une meilleure efficacité - ce qui favorise la productivité. A l'inverse, elles conduisent à une chute des investissements, notamment dans la recherche et le développement (R&D), ce qui est susceptible de détériorer durablement la productivité.

Par conséquent, une réestimation du PIB potentiel impliquerait de connaître les effets de la crise sur ce dernier et, en particulier, sur la productivité globale des facteurs.

3. Quelles conséquences institutionnelles d'une surévaluation du PIB potentiel ?

En l'état actuel des choses, une surévaluation du PIB potentiel serait sans incidence institutionnelle . En effet, il faut rappeler qu'à l'initiative de notre collègue Jean-Pierre Caffet, la loi organique relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques 87 ( * ) précise que, dans le cadre du calcul de l'écart à la trajectoire pouvant déclencher le mécanisme de correction, la trajectoire de PIB potentiel utilisée par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) est celle figurant dans le rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques .

Par conséquent, le Haut Conseil ne saurait enclencher le mécanisme de correction au seul motif que le PIB potentiel serait, selon lui, surévalué.

Cependant, le HCFP sera amené à se prononcer sur l'estimation du PIB potentiel lorsqu'il sera saisi, à cet effet, dans le cadre de la prochaine loi de programmation des finances publiques , qui devrait être examinée par le Parlement à l'automne 2014.

DEUXIÈME PARTIE - LE BUDGET 2014 : UN REDRESSEMENT BUDGÉTAIRE FONDÉ SUR UNE MAÎTRISE ACCRUE DES DÉPENSES

Les principaux chiffres
du projet de loi de finances pour 2014
*

1. - LES RECETTES

Recettes fiscales nettes : 284,7 milliards d'euros (- 1,1 %)

Dépenses fiscales : 80,0 milliards d'euros (+ 11,1 %) hors CICE 70,3 milliards d'euros (- 2,5 %)

Recettes non fiscales : 13,8 milliards d'euros (- 0,7 %)

Taux de couverture des dépenses du budget général : 76,4 % (+ 0,4 point)

2. - LES DÉPENSES ET LES EMPLOIS

Dépense sous norme « zéro valeur » (hors PIA) : 278,4 milliards d'euros (- 0,5 %)

Dont dépenses de personnel (hors pensions) : 81,4 milliards d'euros (+ 0,7 %)

Dont PSR collectivités territoriales sous norme : 54,3 milliards d'euros (- 2,5 %)

Dont PSR Union européenne : 20,1 milliards d'euros

Dépense sous norme « zéro volume » (hors PIA) : 370,5 milliards d'euros (- 1,66 %)

Dont charge de la dette : 46,7 milliards d'euros (- 0,4 %)

Dont dépenses de pensions : 45,4 milliards d'euros (- 1,5 %)

Plafond des autorisations d'emplois rémunérés par l'Etat : 1 906 007 ETPT (- 0,5 %)

3. - LE SOLDE ET SON FINANCEMENT

Solde général (hors PIA) : - 70,2 milliards d'euros (+ 2,4 %)

Dont solde primaire (y compris PIA) : - 23,5 milliards d'euros (+ 6 %)

Besoin et ressources de financement de l'Etat : 177 milliards d'euros (- 4,7 %)

Amortissement de la dette à moyen et long termes : 104,8 milliards d'euros (+ 1 %)

Encours de la dette à fin 2014** : 1 531,2 milliards d'euros (+ 4,9 %)

* Les pourcentages d'évolution sont établis par rapport au révisé 2013 pour les recettes et le solde, et par rapport à la LFI 2013 pour les dépenses et les emplois.

** Projection, en valeur actualisée.

Nota bene : l'analyse de l'équilibre budgétaire prévu pour 2014 repose sur les données contenues dans le projet de loi adopté en Conseil des ministres. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale en première lecture sont analysées ci-après (IV de la deuxième partie).

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

I. UNE LÉGÈRE DIMINUTION DES RECETTES

A. DES RECETTES FISCALES NETTES EN RECUL PAR RAPPORT À 2013

Le montant des recettes fiscales nettes de l'Etat s'établirait à 286,3 milliards d'euros en 2014 à périmètre constant, en baisse de 1,6 milliard d'euros par rapport au révisé 2013 88 ( * ) (soit une diminution de 0,6 %).

A périmètre courant , la différence de champ étant analysée ci-après, ces recettes s'établissent à 284,7 milliards d'euros (soit une diminution de 3,2 milliards d'euros, correspondant à un recul de 1,1 %), et à 282,4 milliards d'euros sans les mesures nouvelles du PLF 2014.

1. Une diminution des recettes fiscales sous l'effet des mesures antérieures au PLF 2014

7,2 milliards d'euros de recettes supplémentaires sont attendues au titre de l'évolution spontanée des recettes fiscales, c'est-à-dire de la dynamique naturelle de l'assiette des différents impôts, et les mesures nouvelles du présent PLF ont un impact de + 2,3 milliards d'euros . En sens inverse, les mesures antérieures au PLF 2014 entraînent une diminution des recettes fiscales nettes ( - 11 milliards d'euros ), à laquelle s'ajoutent les mesures de transfert et de périmètre ( - 1,6 milliard d'euros ). Au total, il est ainsi prévu une diminution des recettes fiscales nettes de 1,6 milliard d'euros à périmètre constant ( 3,2 milliards d'euros à périmètre courant, y compris mesures de transfert et de périmètre ) par rapport à l'évaluation révisée pour 2013, comme le détaille le tableau ci-après.

Tableau n° 37 : L'évolution des recettes fiscales nettes de l'Etat

(en millions d'euros)

Impôts

Révisé
2013

Evolution spontanée

Mesures antérieures
au PLF

Mesures
PLF

Prévision 2014 (constant)

Mesures de périmètre et de transfert

Prévision 2014 (courant)

Variation
2013-2014

M€

%

IR

69 291

3 626

186 1

2 201

75 304

0

75 304

6 013

8,7%

IS

49 702

1 700

-15 523 1

347

36 226

0

36 226

-13 476

-27,1%

TICPE

13 680

-3

62

62

13 801

-366

13 435

-245

-1,8%

TVA

135 624

1 829

5 205 2

-3 378

139 280

38

139 318

3 694

2,7%

Autres

19 554

4

-964

3 090

21 684

-1 283

20 401

847

4,3%

Total

287 851

7 156

-11 034

2 322

286 295

-1 611

284 684

-3 167

-1,1%

1 Dont CICE (LFR-3 2012) : - 9,8 milliards d'euros

2 Dont hausse de la TVA résultant de la LFR-3 2012 : 5,155 milliards d'euros

Source : commission des finances, d'après le tome I de l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2014

Les prévisions 2014 intègrent l'impact de plusieurs contentieux fiscaux , qui diminueraient les recettes fiscales de 2,8 milliards d'euros en 2014 ; par rapport à 2013, ils représentent une perte de recettes fiscales estimée à 3,9 milliards d'euros, correspondant :

- à 1 milliard d'euros de pertes de recettes supplémentaires par rapport à 2013 dans le cadre du contentieux relatif aux retenues à la source applicables aux revenus distribués aux OPCVM ;

- à 0,7 milliard d'euros de pertes de recettes supplémentaires par rapport à 2013 dans le cadre du contentieux relatif au précompte immobilier ;

- au caractère exceptionnel du versement en 2013 de 2,2 milliards d'euros par France Télécom, au titre de l'impôt sur les sociétés et dans le cadre d'un contentieux.

Le tableau ci-après détaille l'impact des contentieux fiscaux en 2013 et en 2014.

Il s'agit toutefois d'estimations, dont les coûts peuvent varier en fonction du nombre de dossiers à traiter et des délais de traitement .

Tableau n° 38 : Impact des contentieux fiscaux sur les recettes fiscales nettes

(en milliards d'euros)

Objet du contentieux

2013

2014

2015

OPCVM

- 1,0

- 2,0

- 1,0

Précompte

0,0

- 0,8

- 0,7

France Télécom

2,2

0,0

- 2,2

TOTAL

1,1

- 2,8

- 3,9

Source : annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2014

2. L'impact des mesures de périmètre et de transfert

Alors que les mesures de périmètre ont un impact quasi négligeable (- 33 millions d'euros), le présent projet de loi de finances procède à plusieurs transferts aux collectivités territoriales , dont les principes ont été posés par le pacte de confiance et de responsabilité entre l'Etat et les collectivités territoriales conclu le 16 juillet 2013 :

- au profit des départements, pour tenir compte des charges croissantes liées à plusieurs allocations de solidarité : l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la prestation de compensation du handicap (PCH), et le revenu de solidarité active (RSA) (ayant un impact de - 0,8 milliard d'euros sur les recettes fiscales de l'Etat), et sur la TICPE, s'agissant de régularisations (- 0,1 milliard d'euros) et au titre des droits à compensation relatifs au RSA (- 45 millions d'euros) ;

- au profit des régions, la dotation globale de décentralisation liée à la formation professionnelle étant remplacée par un panier de ressources fiscales (frais de gestion, TICPE) plus dynamique (- 0,9 milliard d'euros), ce qui permet de renforcer l'autonomie financière des régions ;

- enfin, un transfert spécifique à Mayotte (- 20 millions d'euros).

Au total, les mesures de périmètre et de transfert ont un impact de - 1,61 milliard d'euros dans le PLF 2014 .

3. Une évolution spontanée majorant les recettes fiscales nettes

Le taux de croissance spontanée des recettes fiscales dépend de la conjoncture économique et de leur sensibilité par rapport à la croissance du PIB en valeur, appelée élasticité.

En 2012 , l'évolution spontanée des recettes fiscales a été négative (- 0,5 milliard d'euros). Alors que le projet de loi de finances initiale pour 2012 avait prévu une élasticité de 1,5 (correspondant à la moyenne observée entre 2004 et 2011, exception faite de l'année 2009 marquée par une récession de - 3,1 %), l'élasticité constatée avait été de - 0,1. Il en était résulté un manque à gagner de 10 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale.

Le Gouvernement avait apporté les indications suivantes :

« Bien que la mesure appropriée de la sensibilité des recettes fiscales aux variations de l'activité économique soit le concept d'élasticité, cette méthode de calcul perd une grande partie de son intérêt lorsque les croissances sont négatives ou proches de zéro [...] Par ailleurs, l'élasticité au PIB des recettes fiscales nettes de l'Etat s'est toujours montrée volatile dans le passé, avec des valeurs parfois très supérieures à l'unité et parfois très proches de 0 ».

Pour l'année 2013 , la révision à la baisse de la prévision de déficit (de 3,7 % à 4,1 % du PIB) dans le PLF 2014, soit un moindre rendement des recettes publiques de 8 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale , est à nouveau la conséquence d'une croissance économique atone : pour les dernières années au cours desquelles la croissance économique a été inférieure à + 1 %, en 2002 (croissance économique de 0,9 %), 2003 (0,9 %), 2008 (- 0,1 %) et 2012 (0 %), l'élasticité a été proche de 0 : - 0,1 en 2002 ; 0,2 en 2003 ; 0,8 en 2008 et - 0,1 en 2012, comme le montre le tableau ci-après.

Pour 2013, l'estimation révisée d'élasticité des recettes fiscales au PIB s'élève à - 0,4 (contre 1,2 en LFI 2013), au regard notamment des encaissements constatés depuis le début de l'année. La révision à la baisse la plus forte de l'élasticité (de 2,3 en LFI 2013 à - 5,3 dans le révisé 2013) concerne l'impôt sur les sociétés, du fait d'une réévaluation à la baisse de la progression du bénéfice fiscal en 2012, à 8 % dans le révisé 2013 associé au PLF 2014 (contre 12 % dans la LFI 2013). D'autres facteurs expliquent la diminution de l'élasticité : une baisse de la consommation des ménages plus forte que le repli de l'activité, pesant sur la croissance spontanée de la TVA (réévaluée de 0,9 à 0,3) et, s'agissant également de la TVA, un effet de structure marqué par une part accrue dans la consommation des ménages des produits et services soumis aux taux de TVA intermédiaire et réduit.

Tableau n° 39 : Elasticité des recettes par rapport au PIB depuis 2002

Taux de croissance économique

Elasticité prévue
par la LFI

Elasticité constatée

Ecart élasticité constatée / élasticité prévue

2002

0,9 %

1

- 0,1

- 1,1

2003

0,9 %

0,9

0,2

0,7

2004

2,5 %

0,7

1,7

1

2005

1,8 %

1,5

1,3

- 0,2

2006

2,5 %

1,2

2

0,8

2007

2,3 %

1,3

1,5

0,1

2008

- 0,1 %

1,3

0,8

- 0,4

2009

- 3,1 %

1,2

3,9

2,7

2010

1,7 %

2,3

1,4

- 0,9

2011

2,0 %

1,5

1,6

- 0,1

2012

0,0 %

1,5

- 0,1

- 1,6

2013

0,1 %*

1,2

- 0,4*

- 1,6

* Révisé 2013

Source : ministère du budget

Deux autres facteurs expliquent la faiblesse de l'élasticité (révisée de 1,6 à 0,7 pour l'impôt sur le revenu et de - 0,2 à - 0,9 pour la TIPCE entre la LFI 2013 et le révisé 2013) : une révision à la baisse de l'inflation (l'élasticité se référant à la croissance nominale du PIB en valeur) et une réévaluation à la baisse de l'évolution de la masse salariale (de 2,2 % dans la LFI 2013 à 1,3 % dans le révisé 2013) plus marquée que pour l'activité économique.

S'agissant par ailleurs de l'élasticité des autres impôts, la révision des recettes spontanées de droits de mutation à titre onéreux dans un contexte de dégradation du marché immobilier explique également une révision à la baisse de leur élasticité.

Pour 2014, le PLF se fonde sur une prévision d'élasticité des prélèvements obligatoires (qui recouvre un champ plus large que les seules recettes fiscales) de 1,3 . Qualifiée d' « optimiste » par le Haut Conseil des finances publiques, cette prévision n'en est pas moins conforme à la moyenne observée depuis 2002, dans un contexte de rebond attendu de l'activité économique .

Les développements afférents aux principaux impôts ( cf . infra ) examinent plus en détail les prévisions d'élasticité en 2013 et 2014.

4. Une diminution des recettes liées aux mesures antérieures

L'impact des mesures antérieures au PLF 2014 retrace l'incidence de mesures exceptionnelles ou venant à expiration, des effets de l'extension en année pleine de mesures mises en oeuvre au cours de l'année 2013, ainsi que des conséquences de décisions législatives ou réglementaires ayant une première incidence budgétaire en 2014 (ou une incidence budgétaire différente de 2013).

Les mesures antérieures au PLF 2014 entraînent une réduction des recettes fiscales nettes de 11 milliards d'euros , se décomposant comme suit :

- un impact de - 6,4 milliards d'euros des mesures de la LFI 2013 ;

- une incidence de - 4,5 milliards d'euros des mesures de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 ;

- un impact global de - 0,2 milliard d'euros des autres mesures antérieures au PLF 2014.

Le compteur des mesures nouvelles introduit par la loi de programmation des finances publiques 2012-2017 avait évalué l'impact des mesures du PLF 2013 à + 14 milliards d'euros en 2013 et - 6,3 milliards d'euros en 2014, soit une estimation pour 2014 très proche de celle retenue dans le présent PLF.

L'impact négatif des mesures de la LFI 2013 (- 6,4 milliards d'euros) correspond principalement à l'incidence en 2014 de la suppression du prélèvement forfaitaire libératoire (- 0,7 milliard d'euros) et au contrecoup des mesures suivantes, dont le rendement était concentré en 2013 (à hauteur de 5 milliards d'euros) :

- l'imposition exceptionnelle des entreprises d'assurance (0,9 milliard d'euros) ;

- la réforme des calculs de quote-part pour frais et charges des plus-values de cessions à long terme (1,4 milliard d'euros) ;

- l'aménagement de la déductibilité des charges financières (1,3 milliard d'euros) ;

- la limitation de l'imputation des déficits au titre de l'impôt sur les sociétés (0,5 milliard d'euros) ;

- la réforme du cinquième acompte de l'impôt sur les sociétés (1 milliard d'euros).

L'effet (à hauteur de - 4,5 milliards d'euros) des mesures de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 retrace essentiellement la mise en place du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ou CICE (- 9,8 milliards d'euros, dont - 9,4 milliards d'euros au titre de l'impôt sur les sociétés et - 0,4 milliard d'euros au titre de l'impôt sur le revenu) et la réforme des taux de TVA qui interviendra le 1 er janvier 2014 (+ 5,2 milliards d'euros).

En dehors même du CICE, les entreprises bénéficieront d'une baisse des prélèvements obligatoires, les mesures prises l'an dernier et non reconduites cette année n'étant pas intégralement compensées, à hauteur d'environ 2 milliards d'euros .

5. Les mesures nouvelles du PLF 2014

L'impact des mesures fiscales nouvelles du PLF 2014 est estimé à 2,3 milliards d'euros , comme détaillé dans le tableau ci-après, en intégrant la réindexation du barème de l'impôt sur le revenu ( - 0,715 milliard d'euros , se répartissant entre - 0,64 milliard d'euros au titre de l'impôt net sur le revenu et - 75 millions d'euros au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux).

S'ajoutent les mesures qui seront mises en oeuvre par voie réglementaire (+ 0,2 milliard d'euros suite à la réforme des crédits de paiement sur les successions) et le renforcement de la lutte contre la fraude fiscale (+ 1,4 milliard d'euros 89 ( * ) ).

Les mesures fiscales nouvelles du PLF 2014 sont classées par le Gouvernement en fonction de plusieurs objectifs : une imposition plus juste, en opérant un rééquilibrage au profit des petites et moyennes entreprises et des ménages modestes ; un soutien à la croissance, à l'emploi et à l'innovation ; le renforcement de la fiscalité environnementale. Le classement des mesures en fonction des différentes thématiques est rappelé ci-après.

a) Rendre l'impôt plus juste : un rééquilibrage au profit des ménages les moins fortunés et des petites et des moyennes entreprises

Le PLF 2014 poursuit le rééquilibrage de la fiscalité engagé depuis 2012 au profit, d'une part, des ménages les moins fortunés et, d'autre part, des petites et moyennes entreprises (PME).

Concernant la fiscalité des particuliers , la réindexation du barème de l'impôt sur le revenu, qui avait été gelé pendant deux ans, améliore le pouvoir d'achat de l'ensemble des ménages. Son coût est évalué à 715 millions d'euros. En outre, les ménages les plus modestes bénéficieront d'une revalorisation de la décote applicable à l'impôt sur le revenu à hauteur de 5 % au-delà de l'inflation, pour un coût de 168 millions d'euros.

Par ailleurs, plusieurs mesures tendent à alléger le poids des dépenses de logement pour les ménages :

- la baisse de la TVA applicable aux travaux de construction et de rénovation de logements sociaux (- 355 millions d'euros) ;

- la réforme des régimes d'imposition des plus-values immobilières (- 270 millions d'euros) ;

- la mise en place d'un dispositif d'incitation fiscale à l'investissement institutionnel dans le logement intermédiaire (- 45 millions d'euros à compter de 2015).

A contrario , les mesures nouvelles du PLF 2014 tendant à une augmentation des impôts des particuliers sont concentrées sur les ménages les plus aisés. Le PLF 2014 propose l'instauration d'une taxe exceptionnelle sur les très hautes rémunérations versées par les entreprises (+ 260 millions d'euros, compte tenu d'un rendement brut de 310 millions d'euros et d'une perte d'impôt sur les sociétés à hauteur de 50 millions d'euros 90 ( * ) ) et plusieurs « niches fiscales » sont supprimées ou voient leur champ d'application réduit :

- la suppression de l'exonération d'impôt sur le revenu sur les majorations de retraite ou de pensions pour charge de famille (+ 1,2 milliard d'euros) ;

- l'abaissement du plafond de l'avantage procuré par le quotient familial (+ 1,03 milliard d'euros) ;

Tableau n° 40 : Impact des mesures fiscales nouvelles du PLF 2014

(en millions d'euros)

Impôt sur le revenu

2 201

Réindexation du barême de l'impôt sur le revenu (art. 2)

-640

Suppression de l'exonération d'impôt sur le revenu des majorations de retraite ou de pension pour charge de famille (art. 6)

1 200

Suppression de l'exonération fiscale de la prise en charge par l'employeur d'une partie des cotisations de prévoyance complémentaire (art. 5)

960

Suppression de la réduction d'impôt pour frais de scolarité (art. 4)

440

Abaissement du plafond de l'avantage procuré par le quotient familial (art. 3)

1 030

Réforme du régime d'imposition des plus-values immobilières (art. 18)

-270

Réforme du régime d'imposition des plus-values de cession de valeurs immobilières ou de droits sociaux des particuliers (art. 11)

-350

Revalorisation de la décote applicable de l'impôt sur le revenu au bénéfice des ménages modestes (5 % au-delà de l'inflation) (art. 2)

-168

Amortissements accélérés des robots acquis par des PME au sens communautaire (art. 12)

-1

Impôts sur les sociétés

347

Lutte contre l'optimisation fiscale au titre des produits hybrides et de l'endettement artificiel (art. 14)

400

Taxe exceptionnelle sur les hautes rémunérations versées par les entreprises (art. 9)

-50

Amortissements accélérés des robots acquis par des PME au sens communautaire (art. 12)

-3

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

62

Aménagements de la TICPE (art. 20)

62

Taxe sur la valeur ajoutée

-3 378

Autoliquidation TVA dans la sous-traitance du bâtiment (art. 16)

30

Application du taux réduit de TVA aux travaux de construction et de rénovation de logements sociaux (art. 19)

-355

Baisse du taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux entrées dans les salles de cinéma (art. 7)

-55

Aménagements de la TICPE (art. 20)

42

Transfert au profit des organismes de sécurité sociale (art. 39)

-3 040

Contribution sur l'excédent brut d'exploitation des entreprises

2 480

Instauration d'une contribution sur l'excédent brut d'exploitation pour les entreprises réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 50 M€ (art. 10)

2 480

Recettes diverses

360

Taxe exceptionnelle sur les hautes rémunérations versées par les entreprises (art. 9)

310

Fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés (art. 23)

50

Taxe intérieure sur les produits pétroliers

85

Suppression progressive de la défiscalisation des biocarburants et modification du régime de TGAP biocarburants (art. 22)

85

Autres taxes intérieures

236

Aménagements de la TICPE (art. 20)

236

Taxe générale sur les activités polluantes

4

TGAP air - introduction de nouvelles substances donnant lieu à assujettissement (art. 21)

4

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux

-75

Réindexation du barème de l'impôt sur le revenu (art. 2)

-75

Total recettes fiscales nettes

2 322


Source : commission des finances, d'après l'annexe « Voies et moyens » au PLF 2014

- la suppression de l'exonération fiscale de la prise en charge par l'employeur d'une partie des cotisations de prévoyance complémentaire (+ 960 millions d'euros) ;

- la suppression de la réduction d'impôt pour frais de scolarité (+ 440 millions d'euros) 91 ( * ) .

S'agissant de la fiscalité des entreprises , les PME bénéficieront de l'amortissement accéléré des robots acquis par les PME au sens communautaire (- 4 millions d'euros). Par ailleurs, la réforme du plan d'épargne en actions (PEA), prévue à l'article 53 du PLF, favorisera l'investissement dans le capital des PME.

Enfin, les PME seront exclues du champ d'application de la surtaxe exceptionnelle d'impôt sur les sociétés qui, lors de la discussion en séance publique à l'Assemblée nationale, a remplacé la contribution sur l'excédent brut d'exploitation en majorant de 2,5 milliards d'euros la fiscalité des entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse 250 millions d'euros, au taux de 10,7 % en 2014 (contre 5 % en 2013).

b) Soutenir la croissance, l'emploi et l'innovation

Les mesures nouvelles du PLF 2014 en faveur de la croissance et de l'emploi interviennent dans un contexte de montée en puissance, en 2014, du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), établi par la troisième loi de finances rectificative pour 2012. A partir du 1 er janvier 2014, les entreprises bénéficieront ainsi d'une diminution de 4 % du coût du travail (porté à 6 % en 2015) pour les salariés rémunérés jusqu'à 2,5 SMIC, soit un coût de 10 milliards d'euros, qui sera porté à 20 milliards d'euros à horizon 2017. Une créance fiscale sera imputée en 2014, à hauteur de 10 milliards d'euros, sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'année 2013, ce qui correspond à un allègement significatif de la fiscalité sur les entreprises.

Par ailleurs, le PLF 2014 proroge le régime des jeunes entreprises innovantes (JEI) et simplifie, pour un coût évalué à 350 millions d'euros, le régime des plus-values de cessions de valeurs mobilières pour favoriser la création et le financement des entreprises.

c) Renforcer la fiscalité environnementale

Plusieurs mesures fiscales nouvelles traduisent une volonté de renforcer la fiscalité environnementale et de favoriser une croissance durable :

- la suppression progressive de la défiscalisation des biocarburants et la modification du régime de la TGAP biocarburants (+ 85 millions d'euros provenant de moindres remboursements et dégrèvements) ;

- l'élargissement de l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) à sept nouveaux polluants de l'air (+ 4 millions d'euros) 92 ( * ) ;

- des aménagements de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), en introduisant dans l'assiette une « part carbone » qui montera en puissance progressivement (impact sur les recettes fiscales en 2014 : + 298 millions d'euros).

Par ailleurs, suite aux aménagements de la TICPE, le rendement de la TVA serait majoré de 42 millions d'euros, soit un rendement global de 340 millions d'euros. La montée en puissance progressive de ce dispositif, doit garantir un rendement de 4 milliards d'euros par an à l'horizon 2016, supérieur aux prévisions initiales de financement du TICPE par la mise en place d'une fiscalité écologique 93 ( * ) . Le Gouvernement s'inscrit dans une démarche progressive et ambitieuse, qui tient compte des réflexions menées dans le cadre du Comité pour la fiscalité écologique. La solution retenue permet par ailleurs de ne pas définir une nouvelle assiette d'imposition, puisqu'elle consiste à aménager des taxes existantes : il s'agit d'introduire une composante carbone dans le calcul de la TICPE, qui augmentera de façon progressive et proportionnée au contenu en dioxyde de carbone des différents produits énergétiques, alors qu'aujourd'hui la TICPE obéit à une pure logique de rendement, sans aucun lien avec la pollution engendrée par les différentes sources d'énergie.

En outre, la modification du régime du malus automobile entraîne une hausse de recettes fiscales en 2014 estimée à 103 millions d'euros 94 ( * ) , destinée à assurer l'équilibre financier du bonus-malus automobile.

6. L'évolution des différents impôts
a) Impôt sur le revenu : un scénario crédible de retour en 2014 à une croissance spontanée des recettes

Dans le révisé 2013 , le produit net de l'impôt sur le revenu devrait s'établir à 69,3 milliards d'euros en 2013, en hausse de 9,8 milliards d'euros (+ 16,5 %) par rapport à l'exécution 2012, sous l'effet presque exclusif des mesures nouvelles, dont l'impact est évalué à 9,1 milliards d'euros, alors que l'évolution spontanée de l'impôt est estimée à 1,3 %.

Par rapport aux prévisions de la LFI 2013, les recettes sont révisées à la baisse de 2,4 milliards d'euros, principalement du fait d'un déport sur 2014 (à hauteur de 1 milliard d'euros) des revenus des intérêts et dividendes soumis au prélèvement forfaitaire obligatoire, au regard de leur calendrier de versement, et d'une moindre croissance spontanée des recettes fiscales (pour un montant également estimé à 1 milliard d'euros).

L'évolution spontanée pour 2013, estimée à 1,3 %, traduit une révision à la baisse de l'élasticité des recettes d'impôt sur le revenu par rapport à l'évolution du PIB nominal (de 1,6 dans la LFI 2013 à 0,7 dans le révisé). Le contexte économique explique la faible élasticité : les revenus catégoriels 2012 d'une partie des travailleurs indépendants seraient revus à la baisse (- 0,6 milliard d'euros), tandis que les marchés mobiliers et immobiliers se sont dégradés, réduisant les plus-values (- 0,4 milliard d'euros).

L'examen des encaissements constatés dans les situations budgétaires mensuelles, retracé dans la courbe ci-après, montre que l'estimation révisée s'éloigne de la trajectoire des recettes d'impôt sur le revenu telle que constatée les années passées : fin septembre, les encaissements d'impôt sur le revenu atteignaient 74 % de l'objectif révisé annuel pour 2013, soit un niveau assez sensiblement plus faible que celui observé les années précédentes, en septembre 2012 (80 %) et en septembre 2011 (83,4 %). Cet écart doit toutefois être relativisé dès lors que, pour les contribuables mensualisés, les versements de fin d'année tiennent compte de l'augmentation de l'impôt dû, alors que les premières mensualités se basent sur l'impôt payé l'année précédente.

Le graphique ci-après montre, entre 2010 et 2013, une nette progression de l'impôt sur le revenu à hauteur de 21,9 milliards d'euros (+ 46,1 %) .

Graphique n° 41 : Les encaissements nets d'impôt sur le revenu

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les situations budgétaires mensuelles

Les recouvrements nets d'impôt sur le revenu sont estimés à 75,3 milliards d'euros pour 2014 , en hausse de 6 milliards d'euros (+ 8,7 %) par rapport au révisé 2013, sous l'effet d'une évolution spontanée de + 3,6 milliards d'euros et des mesures nouvelles à hauteur de + 2,4 milliards d'euros (dont + 2,2 milliards d'euros au titre des mesures nouvelles du PLF 2014, détaillées plus haut).

Tableau n° 42 : Évolution du produit de l'impôt sur le revenu

(en milliers d'euros)

Source : commission des finances, d'après l'annexe « Voies et moyens »

L'évolution spontanée des encaissements bruts (hors remboursements et dégrèvements) est estimée à 4,7 % (hors réindexation du barème sur l'inflation), en net regain par rapport à 2013 (1,3 %), et correspondant à des niveaux comparables à ceux observés en 2011 (5,4 %) et 2012 (4,5 %). Ces prévisions se fondent sur une conjoncture économique plus favorable (notamment pour les revenus catégoriels et de valeurs mobilières) et une élasticité à la croissance du PIB nominale estimée à 1,6, soit également un retour aux niveaux observés jusqu'en 2011.

b) Un rendement de l'impôt sur les sociétés en 2014 marqué par l `entrée en application du CICE

La prévision révisée pour 2013 d'impôt sur les sociétés s'élève à 49,7 milliards d'euros, inférieure de 3,8 milliards d'euros à la prévision de la LFI. La progression par rapport à l'exécution 2012 (+ 8,9 milliards d'euros, soit + 21,7 %) traduit l'impact des mesures nouvelles de la LFI 2013, alors que l'évolution spontanée de l'IS net s'établit à - 9,5 % sous l'effet de la conjoncture économique et d'une élasticité à l'évolution du PIB nominal réévaluée à - 5,3 dans le révisé 2013 (contre + 2,3 en LFI).

Comme l'illustre le graphique ci-après, les encaissements nets d'impôt sur les sociétés s'élevaient, fin septembre 2013, à 68,4 % de l'objectif révisé annuel (et à 63,5 % de l'objectif initial fixé par la LFI 2013), dans la fourchette haute par rapport aux niveaux enregistrés à la même période en 2012 (66,1 %), 2011 (69 %) et 2010 (66,7 %). En effet, ils tiennent compte d'un encaissement de 2 milliards d'euros au titre du contentieux d'impôt sur les sociétés avec France Télécom.

On observe une forte dynamique des recettes attendues d'impôt sur les sociétés entre 2010 et 2013 : + 16,8 milliards d'euros (+ 51 %) . En 2013, les encaissements (49,7 milliards d'euros) devraient toutefois rester inférieurs au niveau enregistré en 2007 (50,8 milliards d'euros).

Par ailleurs, la réforme votée en LFI 2013 devrait relever de façon pérenne les niveaux de cinquième acompte brut d'environ 1 milliard d'euros . Ainsi, en 2013, le cinquième acompte (net des comportements d'autolimitation des sociétés 95 ( * ) ) devrait s'élever à environ 1,8 milliard d'euros, dont 1 milliard d'euros sous l'effet de la réforme de la LFI 2013. En 2014, le cinquième acompte net de l'autolimitation serait plus élevé et atteindrait environ 3 milliards d'euros (dont 1 milliard d'euros lié à la réforme de la LFI 2013), en lien avec le redémarrage attendu de l'activité.

Graphique n° 43 : Les encaissements nets d'impôt sur les sociétés

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les situations budgétaires mensuelles

Pour 2014, les prévisions d'impôt sur les sociétés s'établissent à 36,2 milliards d'euros, en baisse de 13,5 milliards d'euros (- 27,1 %) par rapport au révisé 2013, sous l'effet des mesures antérieures au PLF 2014, dont l'impact de - 15,5 milliards d'euros correspond à :

- la mise en place du CICE (- 9,4 milliards d'euros) ;

- le contrecoup en 2014 de hausses de la LFI 2013 (- 4,2 milliards d'euros) 96 ( * ) ;

- le contrecoup des mesures du plan de relance, à savoir la restitution anticipée des créances de crédit impôt recherche et la restitution immédiate des créances de carry-back (- 2 milliards d'euros).

Les mesures nouvelles du PLF 2014 ont un impact de - 0,3 milliard d'euros (+ 0,4 milliard d'euros dans le cadre de la lutte contre l'optimisation fiscale au titre des produits hybrides et de l'endettement artificiel ; - 0,05 milliard d'euros résultant de la mise en place de la taxe exceptionnelle de solidarité sur les hautes rémunérations versées par les entreprises).

Le bénéfice fiscal 2013, qui servira de base au calcul de l'impôt dû en 2014, progresserait d'un peu plus de 1 % 97 ( * ) , après une évolution de + 8 % en 2012, + 3 % en 2011 et + 5 % en 2010. Pour 2014, il est envisagé une croissance de + 3 % du bénéfice fiscal.

Le Gouvernement retient l'hypothèse d'une élasticité de l'impôt sur les sociétés à la croissance de 3, soit un retour aux niveaux observés jusqu'en 2011. La croissance spontanée, à législation constante, entraînerait une hausse des recettes fiscales d'impôt sur les sociétés de 1,7 milliard d'euros (+ 3,4 %).

Tableau n° 44 : Evolution du produit de l'impôt sur les sociétés

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après l'annexe « Voies et moyens »

c) Des recettes de TVA sensibles à l'environnement macroéconomique

L'estimation révisée de TVA pour 2013 associée au présent PLF s'établit à 135,6 milliards d'euros, inférieure de 5,6 milliards d'euros à la cible de la LFI 2013 (141,2 milliards d'euros).

Au regard de la grande régularité des encaissements de TVA tout au long de l'année, l'estimation révisée correspond à la projection, sur l'ensemble de l'exercice, des encaissements constatés au cours des huit premiers mois de l'année 2013, comme l'illustre le graphique ci-après. Il fait apparaître une progression des encaissements de TVA de 8,1 milliards d'euros (+ 6,1 %) entre 2010 et 2013.

Graphique n° 45 : Les encaissements nets de TVA

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les situations budgétaires mensuelles

L'exercice 2012 avait enregistré une baisse de 1,2 % des recettes de TVA dans un contexte de progression du PIB en valeur. L'écart avec la prévision initiale (4,5 milliards d'euros en 2012) s'explique en partie par des changements dans les comportements de consommation des ménages et des entreprises : s'agissant des ménages, il est observé une hausse de la part des produits soumis à une imposition à taux normal ou réduit dans la consommation ; quant aux entreprises, elles auraient demandé plus systématiquement une restitution de la TVA qui leur est due.

Dans les réponses au questionnaire budgétaire, le Gouvernement a apporté les précisions suivantes sur l'exécution 2012 et les écarts avec les prévisions de la LFI :

« Près des deux tiers de la moins-value observée sur la TVA nette de l'Etat au sens de la comptabilité nationale proviennent de la révision de l'environnement macroéconomique, de nouvelles estimations de la structure de consommation et dans une moindre mesure de changements de comportement des entreprises :

« - la dégradation rapide de l'environnement macroéconomique en fin d'année 2012 a entraîné une révision de la croissance des emplois taxables (hors effets de structure) de 0,7 point à la baisse. Cette révision a eu un impact de - 0,9 milliard d'euros ;

« - la faible croissance de la consommation des ménages en biens manufacturés taxés à taux normal (19,6 %) relativement à la consommation des biens et services a eu un impact baissier sur les recettes de TVA. Cet effet de structure aurait eu un impact de - 0,6 milliard d'euros sur les recettes ;

« - des changements de comportement des entreprises : certaines entreprises qui reportaient usuellement leurs crédits pour les imputer ou les réclamer ultérieurement, en ont fait en effet la demande de restitution dès l'exercice 2012.

« L'écart résiduel est donc d'environ 1 milliard d'euros et représente moins de 1 % des recettes totales de TVA. L'écart observé en 2012 entre recettes de TVA (hors changement de comportement des entreprises) et évolution de l'environnement macroéconomique est dans la moyenne des écarts observés historiquement. Cette estimation sera affinée progressivement avec les comptes semi-définitif et définitif de l'Insee ».

Dans le fascicule « Voies et moyens » annexé au présent PLF, le Gouvernement détaille comme suit la répartition entre les effets d'assiette et de base pour justifier l'écart entre les prévisions de la LFI 2013 et le révisé 2013 :

- une croissance de l'assiette taxable limitée à 0,3 % (contre 2,2 % en LFI 2013), correspondant à un produit inférieur de 2,6 milliards d'euros : il s'agit des conséquences de la déformation de la structure de consommation des ménages au profit des biens taxés à taux réduits, et d'un ralentissement de la consommation, que retrace l'évolution spontanée des recettes de TVA par rapport à la croissance du PIB en valeur (élasticité de 0,9 dans la LFI 2013 réévaluée à 0,3 dans le révisé 2013) ; le faible niveau d'inflation, inférieur aux prévisions, accroît la faiblesse de l'évolution spontanée des recettes de TVA ;

- un effet base dû à la révision à la baisse des recettes nettes de TVA pour l'Etat en 2012 (- 3 milliards d'euros) ; en d'autres termes, le recul observé en 2012 se répercute sur les prévisions de recettes fiscales des années suivantes.

L'estimation pour 2014 (139,3 milliards d'euros, soit + 2,7 % par rapport au révisé 2013) s'avère prudente . L'élasticité prévisionnelle pour 2014 s'établit à 0,6, soit un niveau intermédiaire entre la prévision de la LFI 2013 (0,9) et le révisé 2013 (0,3). Cette prévision de croissance peu élevée est justifiée par le faible dynamisme des prix des produits importés (notamment pétroliers). Par ailleurs, la prévision pour 2014 ne retient pas la possibilité d'un rattrapage des effets de structure négatifs observés en 2012-2013. En d'autres termes, la reprise de la croissance économique ne contribuerait pas à accroître la part des produits soumis à une imposition au taux normal dans la consommation des ménages.

L'évolution de la prévision de recettes de TVA en 2014 par rapport au révisé 2013 se décompose comme suit :

- les mesures antérieures au PLF 2014 ont un impact de + 5,2 milliards d'euros, sous l'effet des modifications des taux de TVA votés dans la troisième loi de finances rectificative pour 2012,

- l'évolution spontanée est estimée à + 1,8 milliard d'euros,

- les mesures nouvelles du PLF 2014 (- 3,4 milliards d'euros) correspondent essentiellement à l'application du taux réduit de TVA dans le secteur du logement social et sur les droits d'entrée dans les salles de cinéma (- 0,4 milliard d'euros) et à un transfert de TVA supplémentaire aux organismes de sécurité sociale (- 3,04 milliards d'euros) , prévu par l'article 39 du présent PLF 98 ( * ) .

Comme le précise l'annexe « Voies et moyens » au PLF 2014, « même si le financement de ces transferts est assuré par des mesures concernant l'impôt sur le revenu, dès lors qu'il était inenvisageable de transférer à la sécurité sociale une fraction de ces recettes fiscales exclusives de l'Etat, la TVA est utilisée comme le vecteur unique de transferts entre Etat et sécurité sociale ».

Tableau n° 46 : Evolution du produit de la TVA

(en millions d'euros)

2012 exécuté

LFI 2013

2013 révisé

2014

Produit

133 403

141 245

135 624

139 318

Variation 2012-2013 (révisé)

2 221

1,7%

Variation 2013 (révisé)-2014

3 694

2,7%

Décomposition évolution 2013-2014

Evolution spontanée

3 889

Mesures antérieures

5 205

Mesures 2014

-3 378

Mesures de périmètre et de transfert

38

Source : commission des finances d'après l'annexe Voies et moyens

d) Une diminution attendue du produit de la TICPE sous l'effet des mesures de transfert

Les recouvrements de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ( TICPE ) sont estimés à 13,7 milliards d'euros dans le révisé 2013 , sans changement par rapport à la LFI.

Pour 2014 , le produit attendu s'établit à 13,4 milliards d'euros , la diminution par rapport au révisé 2013 correspondant essentiellement à des mesures de transfert :

- aux régions, en remplacement de dotations budgétaires, conformément aux conclusions du pacte de confiance et de responsabilité entre l'Etat et les collectivités locales conclu le 16 juillet 2013 (0,3 milliard d'euros), et au titre des ajustements de compensation des transferts de compétences en matière de formation sanitaire ;

- aux départements et à Mayotte, dans le cadre des mesures d'ajustement des droits à compensation au titre des transferts de compétence (0,1 milliard d'euros).

S'agissant des mesures antérieures au PLF 2014, la sortie progressive de la baisse du prix à la pompe, engagée en 2012, entraîne par contrecoup une hausse des recettes fiscales de 25 millions d'euros en 2014 par rapport à 2013.

Parmi les mesures nouvelles du PLF 2014, les aménagements au régime de la TICPE proposés à l'article 20 du présent PLF ont un impact de + 62 millions d'euros.

L'évolution spontanée de la TICPE devrait par ailleurs être nulle, sur la base des hypothèses de consommation suivantes :

- une hausse de la consommation de gazole de 1,0 % par rapport à 2013, « en lien avec la reprise économique » selon les précisions figurant dans l'annexe « Voies et moyens » au PLF ;

- une baisse de la consommation de super carburants de 4,0 % par rapport à 2013 ;

- une stabilité de la consommation de fioul domestique et de gazole non routier par rapport à 2013.

Tableau n° 47 : Evolution du produit de la TICPE pour l'Etat

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après l'annexe « Voies et moyens »

Compte tenu des transferts aux collectivités territoriales, la répartition du produit de la TICPE en 2013 et 2014, détaillée dans le tableau ci-après, montre que l'Etat ne devrait plus percevoir que 56 % de son produit en 2013 et 55 % en 2014.

Tableau n° 48 : Répartition du produit de la TICPE

(en millions d'euros)

Source : ministère du budget (réponse au questionnaire budgétaire)

e) Un rendement de la taxe sur les transactions financières toujours inférieur à la prévision

La première loi de finances rectificative du 14 mars 2012 a mis en place la taxe sur les transactions financières (TTF) à compter du 1 er août 2012, pour un rendement estimé à 460 millions d'euros en 2012 et à 1,1 milliard d'euros en année pleine.

La deuxième loi de finances rectificative du 16 août 2012 a doublé le taux de la TTF (de 0,1 % à 0,2 %), conduisant à une réévaluation des prévisions de recettes au titre de la TTF à 537 millions d'euros en 2012 et à 1,6 milliard d'euros en année pleine 99 ( * ) .

Cependant, les recouvrements n'ont finalement atteint que 199 millions d'euros en 2012, soulevant la question d'une sous-exécution durable par rapport aux prévisions initiales qui avait déjà été pointée par votre commission des finances lors de l'examen du projet de loi de règlement pour 2012 : le manque à gagner était estimé comme pouvant s'élever à près de 1 milliard d'euros par an.

La prévision actualisée s'élève à 0,7 milliard d'euros en 2013. La prévision figurant en loi de finances initiale pour 2013 était construite sur des hypothèses identiques au chiffrage ex ante du rendement attendu de la taxe et prévoyait une recette de 1,5 milliard d'euros. Selon les réponses apportées au Gouvernement au questionnaire de votre rapporteur général, « l'écart entre la prévision initiale et la recette effectivement collectée provient essentiellement de deux facteurs :

- l'essentiel de l'écart s'explique par la baisse généralisée des volumes de transactions sur les marchés mondiaux observée depuis 2011, année sur laquelle la prévision de recettes a été calibrée ;

- le chiffrage initial faisait une hypothèse sur les volumes échangés sur les marchés de gré à gré sur lesquels seules des informations lacunaires étaient disponibles. La mise en place de la taxe a permis de mieux connaître ces volumes ».

Pour 2014 , le produit attendu de la taxe (hors mesures de transfert) s'élèverait à 742 millions d'euros , certes en hausse de 7,5 % par rapport au révisé 2013, mais toujours inférieur très aux prévisions initiales. Par ailleurs, l'affectation d'une fraction de la taxe au fonds de solidarité pour le développement devrait diminuer le produit effectivement perçu par l'Etat de 40 millions d'euros : celui-ci s'établirait ainsi à 702 millions d'euros.

B. UN MONTANT DES DÉPENSES FISCALES EN DIMINUTION HORS IMPACT DU CICE

Depuis l'été 2011, et consécutivement à la remise du rapport « Guillaume » 100 ( * ) , le Gouvernement dispose d'une évaluation 101 ( * ) de l'efficacité de la plupart des dépenses fiscales et des niches sociales . Cette évaluation avait porté sur les 60 milliards d'euros de niches fiscales et les 40 milliards de niches sociales qui constituaient alors le périmètre de ce dispositif 102 ( * ) . La commission avait conclu qu'environ 40 milliards d'euros de dépenses fiscales et 15 milliards d'euros de niches sociales pouvaient être considérées comme peu ou pas efficaces, ce qui représentait les deux tiers des dépenses fiscales et près de la moitié des niches sociales .

1. Une augmentation des dépenses fiscales en 2014 imputable à la seule mise en place du CICE
a) Hors CICE, un objectif de stabilisation des dépenses fiscales atteint en 2013 et en 2014

Comme le montre le tableau ci-après détaillant la répartition et l'évolution de la dépense fiscale , celle-ci s'élèverait en 2014 à 80,02 milliards d'euros , en hausse de 8 milliards d'euros (+ 11,1 %) par rapport à 2013 (72,02 milliards d'euros au périmètre 2014).

Hors CICE et à périmètre constant 2013 , le montant des dépenses fiscales diminue en revanche de 1,8 milliard d'euros, pour s'établir à 68,9 milliards d'euros 103 ( * ) (contre 70,7 milliards d'euros en 2013) 104 ( * ) . Hors CICE, l'objectif de la programmation pluriannuelle des finances publiques pour la période 2012-2017 de maintenir le montant des dépenses fiscales en-dessous de 70,8 milliards d'euros (à périmètre 2013) est donc respecté en 2013 et en 2014.

Tableau n° 49 : Évolution de la dépense fiscale de 2012 à 2014

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2014. Les coûts 2012 et 2013 sont calculés en fonction du périmètre des dépenses fiscales 2014

Sous l'effet de la mise en place du CICE, la dépense fiscale devrait se concentrer à plus des deux tiers (69,2 %) sur l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés.

b) Une diminution significative des dépenses fiscales en 2014

Comme le détaille le tableau ci-après, le PLF 2014 propose de créer quatre nouvelles dépenses fiscales pour un montant total de 229 millions d'euros en 2014 (dont 150 millions d'euros au titre de l'abattement exceptionnel de 25 % sur les plus-values de cessions immobilières, et 75 millions d'euros résultant de l'abattement majoré sur les plus-values de titres acquis moins de dix ans après la création de PME). Il tend par ailleurs à majorer d'autres dépenses fiscales pour un montant cumulé de 370 millions d'euros, dont 355 millions d'euros au titre d'une extension de l'application du taux réduit de TVA. L'ensemble des créations et augmentations de dépenses fiscales résultant des dispositions du projet de loi de finances pour 2014 s'élève donc à 599 millions d'euros .

Tableau n° 50 : Les mesures affectant le coût des dépenses fiscales
depuis la LFI 2013

(en millions d'euros, hors mesures inférieures à 0,5 million d'euros)

2013

2014

2015

2016

Mesures intervenues depuis la LFI 2013

Suppressions et réductions

Taxation des plus-values sociétés de capital-risque

6

6

6

Abattement de 20 % en 2013 sur plus-values de cession de biens immobiliers autres que des terrains à bâtir

260

0

0


0

Réduction du taux d'imposition des plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières ou droits sociaux par contribuables domiciliés dans les départements outre-mer

2

2

2

Réduction de droits en raison du nombre d'enfants du déclarant

36

36

36

36

Réforme des taux de TVA

950

950

950

Créations et augmentations

Taxation sur option des plus-values au taux de 19 % s

-85

0

0

0

Crédit d'impôt en faveur de la compétitivité et de l'emploi

-9 760

-15 760

-17 300

Abattement en faveur des personnes âgées ou invalides de condition modeste

-23

-23

-23

-23

Réduction d'impôt au titre des cotisations versées aux organisations syndicales représentatives de salariés

-10

-10

-10

-10

Réduction d'impôt au titre des souscriptions en numéraire de petites sociétés créées depuis moins de 5 ans

-130

-130

-130

Réduction d'impôt au titre de la souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation

-25

-25

-25

Réduction d'impôt au titre de la souscription de parts de FIP

-25

-25

-25

Prorogation du crédit d'impôt remplacement pour congés de certains exploitants agricoles

-11

-11

-11

Réduction d'impôt au titre de la souscription de parts de FIP dans des entreprises corses

-11

-11

-11

Réduction d'impôt sur le revenu au titre des investissements locatifs réalisés dans le secteur de la location meublée non professionnelle du 1 er janvier 2009 au 31 décembre 2016

-30

-30

-30

Réduction d'impôt sur le revenu en faveur du Scellier outre-mer et Scellier intermédiaire outre-mer

-28

-28

-28

Crédit d'impôt en faveur des entreprises agricoles utilisant le mode de production biologique

-17

-17

0

Crédit d'impôt en faveur des maîtres-restaurateurs

0

-3

0

0

Déduction spéciale prévue en faveur des entreprises de presse

0

-7

0

0

Crédit d'impôt pour la production phonographique

-9

-9

-9

Réduction d'impôt pour souscription au capital des sociétés de presse

-1

0

0

Crédit d'impôt pour dépense de production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles engagées par des entreprises de production exécutives

-12

-12

-12

Remboursement partiel en faveur des agriculteurs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

-120

0

0

0

Dégrèvement CAP en faveur des personnes de condition modeste au titre des droits acquis

-46

-46

-46

Total mesures antérieures au PLF 2014

58

-9 154

-15 143

-16 666

Mesures du PLF 2014

Suppressions et réductions

Réduction d'impôt pour frais de scolarité dans l'enseignement secondaire

235

235

235

Réduction d'impôt pour frais de scolarité dans l'enseignement supérieur

205

205

205

Exonération du salaire différé de l'héritier d'un exploitant agricole

1

1

1

Exonération majorations de retraite des personnes ayant au moins 3 enfants

1 200

1 200

1 200

Exonération plus-values pour cessions de droits sociaux à l'intérieur d'un groupe familial

22

22

Exonération plus-values de cessions de titres jeunes entreprises innovantes ou jeunes entreprises universitaires

2

2

Exonération dans la limite de 1 550 euros des rémunérations perçues par l'ancien chef d'entreprise individuelle pour formation du repreneur

1

1

1

Imputation des déficits réalisés à l'étranger par une PME française

1

1

1

Exonération plafonnée de taxe intérieure de consommation

85

130

290

Exonération taxe intérieure de consommation sur gaz naturel des ménages et réseaux de chaleur

190

250

250

Exonération plus-values immobilières lors de la première cession de l'habitation

2

4

4

4

Exonération plus-values de cession par titulaires de pensions de vieillesse ou de carte d'invalidité dont les revenus n'excèdent pas une certaine limite

3

5

5

5

Exonération plus-values immobilières au titre de la première cession d'un logement sous condition

5

10

10

10

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur gazole sous condition d'emploi

60

85

85

Créations et augmentations

Abattement exceptionnel de 25 % sur plus-values de cession de biens immobiliers autres que terrains à bâtir intervenues entre 1 er septembre 2013 et 31 août 2014

-50

-150

0

0

Abattement majoré appliqué aux plus-values de cessions de titres acquis moins de 10 ans après la création d'une PME

-75

-80

-80

Amortissement accéléré des robots acquis par des PME

-4

-12

-22

Taux de TVA de 10 % dans le logement intermédiaire

-45

-45

Eco prêt à taux zéro

-16

-38

Taux de 7 % applicable aux terrains à bâtir achetés par des organismes HLM ou personnes bénéficiaires de prêts spécifiques pour la construction de logements sociaux à usage locatif

-30

-30

-47

Taux de 7 % pour certaines opérations de construction et de rénovation de logements

-310

-275

-408

Taux de 7 % (5 % à compter du 1 er janvier 2014) applicable aux logements en accession sociale à la propriété dans les quartiers en rénovation urbaine

-15

-10

-20

Exonération de taxe intérieure de consommation sur le charbon pour les entreprises de valorisation de la biomasse

-2

-7

-13

Exonération de taxe intérieure de consommation pour les produits énergétiques utilisés comme carburant ou combustible pour le transport de marchandises sur les voies navigables intérieures

-1

-2

Remboursement d'une fraction de taxe intérieure de consommation sur le gazole utilisé par certains véhicules routiers

-76

-230

Remboursement d'une fraction de taxe intérieure de consommation sur le gazole utilisé par les exploitants de transport public routier en commun de voyageurs

-8

-24

Remboursement partiel en faveur des agriculteurs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

-113

-180

Exonération TH en faveur des personnes âgées, handicapées ou de condition modeste

-10

-10

-10

Total des mesures du PLF 2014

-40

1 398

1 408

1 102

Solde global

18

-7 756

-13 735

-15 564

Solde global hors TICPE

18

2 004

2 025

1 736

Mode de lecture : les montants indiqués correspondent à la variation cumulée (accroissement ou diminution) des dépenses fiscales par rapport à la première année de référence . Un signe (-) représente un coût, et un signe (+) une économie.

Source : commission des finances, d'après l'annexe "Voies et moyens" au projet de loi de finances pour 2014

En sens inverse, il est proposé de supprimer ou diminuer des dépenses fiscales pour un montant global de 1 997 millions d'euros en 2014 . Trois suppressions de dépenses fiscales atteignent un montant cumulé de 1,64 milliard d'euros : la réduction d'impôt pour frais de scolarité dans l'enseignement secondaire (235 millions d'euros) et supérieur (205 millions d'euros) 105 ( * ) ; l'exonération des majorations de retraites ou de pension des personnes ayant eu ou élevé au moins trois enfants (1,2 milliard d'euros).

Compte tenu des créations et augmentations d'une part, des suppressions et diminutions proposées d'autre part, les mesures nouvelles du PLF 2014 tendent ainsi à diminuer le montant des dépenses fiscales de 1,398 milliard d'euros.

Hors CICE, les mesures nouvelles antérieures au PLF 2014 ont un impact global de - 606 millions d'euros, portant le solde des mesures nouvelles sur les dépenses fiscales à - 2,004 milliards d'euros.

Hors CICE, le montant des dépenses fiscales dans le PLF s'établit à 70,255 milliards d'euros, en diminution (- 1,761 milliard d'euros) par rapport à 2013. La différence avec le solde des mesures nouvelles correspond à l'évolution spontanée des dépenses fiscales (+ 243 millions d'euros).

2. Un processus d'évaluation systématique des dépenses fiscales

L'article 18 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 dispose que les dispositifs dérogatoires de prélèvements obligatoires doivent faire l'objet d'une évaluation régulière de leur efficience et de leur efficacité, chaque année par cinquième, ainsi que pour l'ensemble des dispositifs qui cesseront de s'appliquer dans un délai de douze mois.

En réponse au questionnaire de votre rapporteur général, le Gouvernement a apporté les précisions suivantes sur le processus d'évaluation qui a été conduit en application de ces dispositions :

« Cette procédure a pris la forme de conférences fiscales organisées en parallèle des conférences budgétaires et avec le même niveau de représentation. Ces conférences ont associé chacun des ministères responsables d'une politique publique et le ministère des finances au travers de la Direction de la législation fiscale et de la direction du budget.

« Les responsables de programme ont été invités à présenter dans ce cadre et dans le respect de l'objectif de stabilisation en valeur des dépenses fiscales, des propositions de réduction ou de suppression de dépenses fiscales relevant de leur périmètre. Ces propositions ont dû être justifiées sur la base des évaluations disponibles ou établies par le responsable de programme. Ces conférences ont ainsi été l'occasion de faire le point sur les actions menées par les responsables de programme à la suite de la publication en 2011 du rapport d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales piloté par l'Inspection générale des finances (IGF). Les responsables de programme se sont ainsi prononcés sur le maintien, la suppression ou l'aménagement des dépenses fiscales relevant de leur compétence au regard de leur efficience et de leur efficacité.

« Les éléments tirés des conférences fiscales ont vocation à documenter l'évaluation en continu de l'ensemble des dépenses fiscales, dans une logique de proportionnalité avec les enjeux soulevés par le rapport de l'IGF.

« Certaines dépenses fiscales importantes ont fait l'objet de travaux spécifiques dans le cadre du CIMAP 106 ( * ) notamment ou via le recours aux corps d'inspection. Ces travaux et ceux menés par la Cours des Comptes ont contribué à alimenter le processus d'évaluation des dépenses fiscales concernées et l'élaboration du projet de loi de finances pour 2014.

« On peut citer, comme exemple de ces travaux, la large concertation engagée par le Gouvernement sur la réforme des régimes de défiscalisation outre-mer. De la même manière le rapport Queyranne « pour des aides simples et efficaces au service de la compétitivité », piloté par l'IGF, a passé en revue l'ensemble des dépenses fiscales au bénéfice des entreprises ».

Lors de son audition par la commission des finances, le 1 er octobre 2013, pour présenter le PLF 2014, M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué au budget a indiqué que les travaux d'évaluation seraient transmis au Parlement d'ici la fin de l'année :

« Nous avons mis en place des conférences fiscales qui ont aidé à supprimer des niches fiscales inefficaces. Nous nous livrons à un travail d'évaluation permanent. Les évaluations seront transmises à la commission et leurs résultats seront connus au plus tard à la fin de l'année ».

Votre commission prend acte du fait que le processus d'évaluation est encore en cours. Il est souhaitable que le Parlement , qui sera amené à se prononcer sur les suppressions de certaines niches fiscales à l'impact plus significatif que celles figurant à l'article 17 du PLF, puisse effectivement disposer de l'ensemble des éléments d'appréciation, et donc des évaluations conduites dans le cadre des conférences fiscales ainsi mises en place .

C. UNE QUASI STABILISATION DES RECETTES NON FISCALES EN 2014

1. Une révision à la baisse des recettes non fiscales en 2013 qui doit être relativisée par le versement de dividendes sous forme de titres

Les recettes non fiscales pour 2013 sont révisées à la baisse de 325 millions d'euros par rapport à la LFI 2013, de 14,21 milliards à 13,88 milliards d'euros.

Cette évolution résulte principalement des modalités de versement en 2013 de dividendes d'entreprises sous forme de titres à hauteur de 0,2 milliard d'euros. Si cette opération tend à accroître à due concurrence les participations de l'Etat et est donc neutre en comptabilité nationale (correspondant au « solde maastrichtien »), elle se traduit par une perte de recettes non fiscales en comptabilité budgétaire, et donc, par un besoin de financement. Une telle opération peut se justifier dans une perspective patrimoniale à long terme : l'Etat peut en effet acquérir des titres dans des conditions avantageuses, au regard de la prime versée et des prévisions d'évolution du cours de bourse.

Par rapport à la LFI 2013, les recettes issues de la participation de l'Etat au capital de la CDC, dont le montant est déterminé par les résultats de la CDC, diminueraient de 694 millions d'euros ( cf . infra ) 107 ( * ) .

A contrario , les recettes diverses dépassent de 0,7 milliard d'euros les prévisions de la LFI 2013, sous l'effet d'une réévaluation à la hausse (de 0,4 à 0,8 milliard d'euros) des reversements de la Compagnie française du commerce extérieur (COFACE) et une hausse de 340 millions d'euros des « produits divers », ensemble très disparate et par nature peu prévisible regroupant notamment les recettes sans titre (recettes recouvrées après l'expiration des délais de prescription, restitutions anonymes au Trésor, sommes atteintes par la prescription quadriennale, frais de copie, etc.) et le produit du reversement des aides d'Etat considérées comme indues par les institutions européennes.

2. Un maintien du montant global des recettes non fiscales en 2014

Les prévisions de recettes non fiscales en 2014 s'établissent à 13,79 milliards d'euros , en légère diminution de 94 millions d'euros (- 0,7 %) par rapport au révisé 2013.

Cette quasi-stabilisation traduit les évolutions suivantes :

- une évolution à la baisse (- 1,3 milliard d'euros) des produits des participations de l'Etat, détaillée ci-après ;

- la baisse prévisionnelle du reversement de la COFACE (- 0,3 milliard d'euros) ;

- une diminution attendue des rémunérations des garanties de l'Etat (- 0,2 milliard d'euros) ;

- une hausse (+ 1,1 milliard d'euros) des prélèvements sur la Caisse des dépôts et consignations, analysée ci-après ;

- une augmentation (+ 0,4 milliard d'euros) des intérêts des prêts aux Etats étrangers, compte tenu des opérations de refinancement programmées pour 2014 ;

- une hausse de + 0,15 milliard d'euros des prélèvements sur fonds de roulement des opérateurs et agences (0,3 milliard d'euros en 2014, contre 0,15 milliard d'euros en 2013). Cette hausse se décompose en un prélèvement sur les agences de l'eau à hauteur de 210 millions d'euros et un prélèvement en baisse sur le CNC 108 ( * ) (90 millions d'euros, en baisse par rapport au prélèvement de 150 millions d'euros en 2013) 109 ( * ) .

3. Une diminution attendue des dividendes perçus par l'Etat en 2014

L'estimation révisée pour 2013 évalue à 6,4 milliards d'euros les recettes de l'Etat provenant de dividendes ou recettes assimilées, auxquels s'ajoutent 0,2 milliard d'euros de dividendes d'entreprise sous forme de titres et non de numéraires, soit au total 6,6 milliards d'euros . L'évaluation pour 2014 , à hauteur de 5,1 milliards d'euros , s'inscrit en diminution de 1,5 milliard d'euros.

Ce montant se répartit entre les produits des participations de l'Etat dans les entreprises financières, une contribution de la CDC représentative de l'impôt sur les sociétés et les produits des participations dans les entreprises non financières.

Le produit des participations de l'Etat dans des entreprises financières s'élève à 1,9 milliard d'euros (+ 0,4 milliard d'euros par rapport au révisé 2013). Il correspond à des prévisions de versement de la Banque de France (1,3 milliard d'euros), de la CDC (0,5 milliard d'euros), de l'Agence française de développement (0,1 milliard d'euros) et de la Caisse centrale de réassurance (0,1 milliard d'euros).

Le dividende de la CDC est calculé sur la base de 50 % du résultat net consolidé plafonné à 75 % du résultat social. Le résultat net étant estimé par la CDC à 2,8 milliard d'euros et le résultat social à 0,63 milliard d'euros, c'est le plafond fixé à 75 % du résultat social qui est retenu, soit 0,47 milliard d'euros.

La contribution de la CDC représentative de l'impôt sur les sociétés , et s'ajoutant au dividende versé par la CDC, n'atteindrait que 24 millions d'euros en 2014 , compte tenu d'un trop versé d'acompte en 2013 estimé à 174 millions d'euros. Le produit attendu pour 2013 au titre de cette contribution, s'élève à 510 millions d'euros et intègre une régularisation au titre de 2012 à hauteur de + 138 millions d'euros 110 ( * ) .

Les produits des participations de l'Etat dans des entreprises non financières et les bénéfices des établissements publics non financiers correspondent principalement aux participations dans le capital d'EDF, GDF-Suez, Orange, la SNCF, la Poste, Safran et Aéroports de Paris. Le produit prévisionnel pour 2014 s'établit à 3,1 milliards d'euros, en baisse de 1,2 milliard d'euros par rapport au révisé 2013 . Selon l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances, cette évolution « tient compte principalement d'anticipations de risques nécessitant un accroissement prévisionnel du besoin de provisions ».

Par ailleurs, le PLF 2014 prévoit, en recettes diverses :

- des reversements de Natixis et de la COFACE s'établissant à 100 millions d'euros et 500 millions d'euros, en baisse globalement par rapport au révisé 2013 (prévisions, respectivement, de 0 et 800 millions d'euros) ;

- des prélèvements sur les fonds d'épargne gérés par la CDC , qui devraient atteindre 1,1 milliard d'euros en 2014 , alors qu'aucune recette n'est prévue pour 2013 au regard du résultat en déficit du fonds d'épargne. La hausse attendue du résultat du fonds d'épargne, résulte d'une baisse attendue du taux de rémunération des établissements de crédit distribuant le livret A et le Livret de développement durable (LDD), entraînant une diminution du coût des dépôts centralisés au fonds d'épargne.

Ce prélèvement correspond à la rémunération de la garantie que l'Etat apporte à l'épargne réglementée. En 2012, aucun prélèvement n'a été opéré sur le fonds d'épargne, et cette situation devrait se reproduire en 2013 selon les données du révisé 2013 associé au présent PLF. Dans son enquête sur les engagements hors bilan conduite, à la demande de votre commission des finances, en application de l'article 58-2° de la LOLF, la Cour des comptes avait exprimé la crainte que le budget de l'Etat ne soit ainsi privé, pour l'avenir, d'une recette d'un montant significatif :

« Les enjeux que soulève la garantie de protection des épargnants présentent essentiellement un caractère budgétaire. L'absence de prélèvement pouvant être opéré, du fait des contraintes prudentielles, sur le résultat du fonds d'épargne, en contrepartie de la garantie accordée, privera en effet l'Etat, dans les années à venir, d'une recette significative, de l'ordre de 804,5 millions d'euros par an en moyenne sur la période 2006-2011 ».

Le montant du prélèvement envisagé en 2014 (1,1 milliard d'euros), qui correspond au résultat du fonds d'épargne, est proche de la moyenne observée sur la période 2006-2011 (0,8 milliard d'euros).

II. UNE ÉCONOMIE DE 9 MILLIARDS D'EUROS PAR RAPPORT À L'ÉVOLUTION TENDANCIELLE

294,5 milliards d'euros sont inscrits en charges nettes du budget général de l'Etat en 2014, hors PIA ( 305,5 milliards d'euros PIA compris ), soit une diminution en valeur et à champ courant de 1,3 % et une progression de 2,3 % si l'on inclut le PIA.

A. DES NORMES DE DÉPENSES RESPECTÉES

1. Le champ d'application de la double norme de dépense
a) La double norme « zéro volume » et « zéro valeur »

L'évolution des dépenses de l'Etat obéit à une norme de progression qui englobe les dépenses nettes du budget général, les prélèvements sur recettes au bénéfice des collectivités territoriales et de l'Union européenne, ainsi que les éventuelles taxes affectées venant en substitution de crédits budgétaires.

La loi de finances initiale pour 2003 avait introduit une norme pour les dépenses de l'Etat , hors remboursements et dégrèvements et hors recettes en atténuation de la charge de la dette. Ces dépenses totales ne devaient pas progresser, à périmètre constant 111 ( * ) , plus vite que l'inflation (norme dite « zéro volume »).

La loi de finances initiale pour 2008 a étendu le périmètre de cette norme de dépenses aux prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l'Union européenne et aux affectations de taxes à des opérateurs, lorsque celles-ci venaient en substitution de crédits budgétaires.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014 a consacré la double norme de dépenses qui est aujourd'hui appliquée :

- d'une part, les dépenses du budget général de l'Etat et les prélèvements sur recettes, hors charge de la dette et hors contributions aux pensions des fonctionnaires de l'Etat , doivent être stabilisés en valeur à périmètre constant : c'est la norme « zéro valeur » ;

- d'autre part, la progression annuelle des crédits du budget général de l'Etat et des prélèvements sur recettes, y compris charge de la dette et dépenses de pension , doit être, à périmètre constant, au plus égale à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation : c'est la norme « zéro volume » ;

L'introduction par la loi de programmation pour 2011-2014 de cette double norme a permis notamment d'éviter le « recyclage » en dépenses nouvelles d'éventuelles économies constatées sur la charge de la dette ou les pensions.

La loi de programmation des finances publiques pour 2012-2017 a maintenu la double norme de dépenses, en y incluant :

- la compensation de la réforme de la taxe professionnelle, à hauteur de 3,8 milliards d'euros ; ces dépenses n'avaient auparavant pas été intégrées dans la norme en raison de leur volatilité 112 ( * ) ;

- le plafond des impositions et ressources affectées aux opérateurs et organismes divers chargés d'une mission de service public ( cf . infra ), afin d'assurer un traitement identique des dépenses au regard de la norme quel que soit le mode de financement, par une taxe affectée ou par subvention budgétaire.

b) L'élargissement du mécanisme de plafonnement des taxes affectées
(1) Le plafonnement et le reversement au budget général : des leviers de maîtrise des dépenses des opérateurs, renforcés dans le PLF 2014

Le plafonnement des impositions et ressources affectées aux opérateurs s'inscrit dans un mouvement plus large de maîtrise des dépenses des opérateurs ( cf . infra ). En cas de dépassement du plafond, l'excédent de recettes par rapport au plafond est reversé au budget général.

La commission des finances a exprimé une position constante en faveur du plafonnement des taxes affectées aux opérateurs, notamment lors de l'instauration de ce dispositif par l'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012, l'affectation constituant une exception au principe d'universalité budgétaire :

« Les taxes affectées, pour peu qu'elles soient dynamiques, peuvent inciter les affectataires à indexer le rythme de leurs dépenses sur celui de leurs recettes, et ce avec d'autant plus de facilité que les entités tierces à l'Etat sont soustraites à la régulation budgétaire, et notamment au gel des crédits. Ce phénomène inflationniste a caractérisé la situation du CNC ces dernières années, nonobstant les missions supplémentaires qui lui étaient dévolues par ses tutelles.

« Par ailleurs, l'aisance financière de certains opérateurs conduit leur ministère de tutelle à leur transférer certaines dépenses budgétaires . Cette externalisation donne au ministère (soumis à une discipline budgétaire plus stricte) des marges de manoeuvre supplémentaires, et constitue un point de fuite puisque les opérateurs sont situés hors du champ de la norme de dépense » 113 ( * ) .

La loi de finances initiale pour 2012 a appliqué le mécanisme du plafonnement à 46 taxes affectées et 31 bénéficiaires, pour un périmètre de 3 milliards d'euros. La loi de finances initiale pour 2013 a étendu le champ du plafonnement à 12 nouvelles taxes affectées à 12 nouveaux bénéficiaires ou groupes de bénéficiaires, soit un périmètre de 5,1 milliards d'euros, élargi à 5,2 milliards d'euros lors de l'examen du projet de troisième loi de finances rectificative pour 2012.

Le PLF 2014 propose d'intégrer trois nouvelles taxes dans le champ du plafonnement en 2014 , pour un montant estimé à 283 millions d'euros , comme détaillé dans le tableau ci-après. Cette intégration est traitée en mesure de périmètre pour le montant correspondant à l'évaluation des recettes de l'année du plafonnement.

Tableau n° 51 : Taxes entrant dans le champ du plafonnement en 2014

(en millions d'euros)

Ressource affectée

Affectataire

Evaluation prévisionnelle de recettes pour 2014

Majoration de taxe d'aviation civile

Fonds de solidarité pour le développement

210

Prélèvement exceptionnel transitoire sur les jeux de loterie

Centre national de développement du sport

24

Taxe sur les nuisances aériennes

Exploitants publics ou privés d'aéronefs

49

TOTAL

283

Source : tome 1 de l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances pour 2014

Par ailleurs, deux taxes affectées sont réintégrées au budget général de l'Etat, la taxe sur les jeux en ligne, affectée jusqu'à présent au Centre des monuments nationaux, à hauteur de 5 millions d'euros, et la part de la taxe affectée aux chambres d'agriculture afférente aux bois et forêts, pour un montant de 4 millions d'euros, soit au total 9 millions d'euros. L'extension du champ des taxes affectées dans le PLF 2014 s'établit ainsi à 274 millions d'euros.

Le PLF 2014 tend à porter le périmètre du plafonnement à 57 taxes affectées à 40 bénéficiaires ou groupes de bénéficiaires , pour un montant de 5,3 milliards d'euros , comme détaillé dans le tableau ci-après. Le nouveau plafond tient compte de l'extension du champ de 283 millions d'euros, d'un transfert vers le budget général à hauteur de 9 millions d'euros et d'une baisse nette des plafonds pour un montant de 208 millions d'euros.

Tableau n° 52 : Evolution 2013-2014 du périmètre du plafond des taxes affectées

(en millions d'euros)

LFI 2013
(A)

PLF 2014

Extension
du champ
(B)

Transferts vers des missions du budget général
(C)

Baisses (-) ou hausses (+) de plafonds par rapport à 2013
(D)

Nouveau plafond proposé
(E) = (A) + (B) + (C) + (D)

5 206

283

- 9

- 208

5 272

Source : annexe « Voies et moyens » au PLF 2014

L'article 31 du PLF 2014 détaille l'évolution du plafond des différents opérateurs de l'Etat et organismes concernés, en 2013 et 2014, ainsi que les montants prévisionnels des reversements. Le produit prévisionnel des reversements au budget général s'élève à 268 millions d'euros en 2014, en hausse de 62 millions d'euros par rapport à la prévision 2013 révisée (206 millions d'euros).

(2) Des objectifs supérieurs à la programmation pluriannuelle

Par rapport à 2013, Le PLF 2014 propose ainsi un abaissement supplémentaire des plafonds de 208 millions d'euros ( à périmètre constant ; 212 millions d'euros à périmètre courant), au-delà de l'objectif fixé par la LPFP pour l'année 2014 (74 millions d'euros) , comme le montre le tableau ci-après.

Tableau n° 53 : Les abaissements de plafonds
des taxes affectées prévus par la LPFP

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

Baisse des plafonds par rapport à 2012

191

265

465

Baisse supplémentaire des plafonds par rapport à l'année précédente

74

200

Source : annexe « Voies et moyens » au PLF 2014

Le rapport préalable au débat d'orientation des finances publiques (DOFP) pour 2014 avait prévu un recul de 12 % des ressources affectées aux opérateurs, par un abaissement du plafond des taxes affectées (de 5,1 milliards d'euros en 2013 à 4,5 milliards d'euros en 2014, y compris les prélèvements sur les fonds de roulement des opérateurs), soit une économie de 0,6 milliard d'euros .

En pratique, compte tenu de l'extension du périmètre des taxes affectées de 274 millions d'euros à périmètre constant ( cf . supra ), des reversements et des prélèvements sur les fonds de roulements de plusieurs opérateurs à hauteur de 470 millions d'euros, l'économie sur la norme de dépense dans le PLF 2014 s'élève à 528 millions d'euros (de 5,33 milliards d'euros dans la LFI 2013 au format 2014 à 4,80 milliards d'euros dans le PLF 2014), comme le détaille le tableau ci-après. Les objectifs fixés par le débat d'orientation des finances publiques sont donc globalement respectés.

Les prélèvements sur fonds de roulement présentent toutefois un caractère exceptionnel en facilitant le respect de la norme de dépenses pour une année donnée. Ils apparaissent comme une alternative à un reversement accru des taxes affectées aux opérateurs ou une diminution de leurs subventions, en produisant des effets budgétaires équivalents. Toutefois, les reversements ou les baisses du montant des subventions permettent de limiter le flux de ressources qui tendent à favoriser un accroissement des dépenses, alors que les prélèvements sur les fonds de roulement portent sur le stock de ressources sans nécessairement favoriser un meilleur contrôle des dépenses. L'on notera que les prélèvements portent également sur des opérateurs (comme le Centre national du cinéma et de l'image animée et les agences de l'eau) bénéficiant de taxes affectées qui ne sont pas plafonnées.

Tableau n° 54 : Les économies sur la norme de dépenses engendrées par le plafonnement des taxes affectées et les prélèvements sur les fonds de roulement

(en millions d'euros)

L LFI 2013

PLF 2014

E Extension
du champ

Tra Transferts vers des missions du budget général

Baiss Baisses (-) ou hausses(+) de plafonds par rapport à 2013

Pla Plafond ou prélève-ment sur fonds de roulement

Plafond des taxes affectées

5 206 (A)

283 (B)

- 9 (C)

- 208 (D)

5 272 114 ( * )

Prélèvements sur fonds de roulement

- 150

- 470 115 ( * )

Dont Centre national du cinéma et de l'image animée

- 150

- 90

Dont chambres de commerce et d'industrie

- 170

Dont agences de l'eau

- 210

TOTAL

5 056 (a)

283 (b)

- 9 (c)

- 208

4 802 (i)

LFI 2013 au format 2014

5 330 (ii) 116 ( * )

Economie sur la norme de dépenses

- 528 117 ( * )

Source : annexe « Voies et moyens » au PLF 2014

(3) Une mise en oeuvre partielle des préconisations du Conseil des prélèvements obligatoires

L'élargissement du plafonnement des taxes affectées répond aux préconisations du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), dans un rapport remis au Parlement en juillet 2013, en application des dispositions de l'article 21 de la LPFP pour les années 2012 à 2017.

Le rapport du CPO a porté sur les constats, les enjeux et les réformes de la fiscalité affectée.

Le CPO souligne d'abord l'essor rapide du produit des taxes affectées, concentrées sur quelques secteurs d'activité où elles représentent une charge pour les redevables.

Le montant des taxes affectées à des bénéficiaires autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale a été estimé par le CPO à 27,9 milliards d'euros en 2013 , en progression de 68,3 % sur la période 2007-2013 (soit une croissance annuelle de 9,1 %).

S'agissant des opérateurs bénéficiaires des taxes affectées (hors secteur social et local), le tome I de l'annexe « Evaluation des voies et moyens » au PLF 2014 évalue le produit de leurs impositions à 15 milliards d'euros en 2014 . Le plafonnement (à hauteur de 5,3 milliards d'euros dans le PLF 2014) ne porte donc que sur un peu plus du tiers des taxes affectées aux opérateurs.

Au plan budgétaire, « la multiplication des taxes affectées se révèle très coûteuse pour les finances publiques ». En effet, des recettes peu dynamiques entraînent le versement par l'Etat de subventions d'équilibre, et a contrario , des recettes dynamiques favorisent l'essor des activités et l'accroissement des dépenses 118 ( * ) en offrant des marges de manoeuvres supplémentaires en gestion, ce « qui peut nuire à l'exercice de la tutelle » 119 ( * ) .

Le CPO a ainsi mené des analyses plus ciblées sur les conditions d'exercice de la tutelle et la corrélation entre les ressources et les dépenses, dont il ressort « certaines difficultés récurrentes » 120 ( * ) . Par ailleurs, le CPO a relevé le recours à la fiscalité affectée pour « contourner les contraintes budgétaires » 121 ( * ) . Enfin, il a mis en exergue le manque de contrôle du Parlement, en citant des exemples comme celui de l'Agence de financement des infrastructures de transport (AFITF) 122 ( * ) .

En ce qui concerne les ressources issues du plafonnement et du reversement. Le CPO observe que le mécanisme de reversement « représente une diminution des ressources globales des entités concernées entre 1,4 % et 5,1 % » 123 ( * ) , jugeant « cet encadrement trop étroit pour contrôler les évolutions de la fiscalité affectée et limiter les pratiques de débudgétisation » 124 ( * ) .

Le CPO a aussi préconisé de limiter le principe d'affectation aux ressources répondant à une logique de redevance ou permettant une mutualisation au sein d'un secteur économique . Selon le CPO, les autres taxes ont vocation à être rebudgétisées, de manière échelonnée, le cas échéant via la création de comptes spéciaux, en vue notamment d'une transparence accrue des politiques publiques. Pour ce faire, le CPO préconise une autorisation d'affectation pour l'ensemble des taxes en loi de finances initiale, ce qui favoriserait effectivement un réexamen systématique. Cette innovation requerrait une modification de la LOLF.

Comme l'a précisé le Premier ministre dans son rapport de transmission au Parlement, le rapport du CPO constitue une première étape dans un travail d'évaluation à mener, devant conduire à la rebudgétisation de certaines taxes et à la généralisation du principe du plafonnement des taxes qui resteraient affectées aux opérateurs .

A la suite de la publication du rapport, le PLF 2014 propose le plafonnement de trois nouvelles taxes : la taxe sur les nuisances sonores aériennes, le prélèvement exceptionnel et temporaire sur les jeux de loterie hors paris sportifs et la majoration de la taxe d'aviation civile (cf. supra ).

Par ailleurs, il procède à la budgétisation de la taxe affectée au Centre des monuments nationaux, ainsi que des taxes affectées - non plafonnées - qui bénéficient à la Haute autorité de santé (HAS), afin de ne plus faire reposer les activités de la HAS sur un financement par les laboratoires et les entreprises. Il ne s'agit que de premiers pas pour mettre en oeuvre les préconisations du CPO.

En tout état de cause, les données relatives aux taxes affectées sont moins détaillées que pour les impôts d'Etat, et il serait souhaitable que les annexes budgétaires comportent des précisions, pour chaque taxe affectée, sur le nombre de contribuables et les caractéristiques de la taxe (mode et coût de prélèvement). Ces informations permettraient d'envisager la suppression de certaines « micro taxes » à faible rendement ou à la collecte coûteuse, ou la perception de certaines taxes affectées par les administrations de l'Etat .

Le CPO a aussi élargi son champ d'étude aux fonds de roulement des organismes bénéficiaires de taxes affectées et des agences en général, en rappelant qu'il est d'usage de considérer qu'un fonds de roulement doit permettre de financer entre deux et trois mois d'activité d'un établissement. Or les agences disposent souvent de fonds de roulement plus importants.

S'agissant du Centre national de la cinématographie et de l'image animée (CNC), le fonds de roulement a atteint 820 millions d'euros fin 2011, et selon le CPO « l'évolution de la trésorerie et du fonds de roulement de l'établissement depuis 2007 montre que la progression des ressources tirées des taxes affectées s'est directement traduite par une accumulation de réserves budgétaires » 125 ( * ) . Le prélèvement voté en 2013 et celui proposé en 2014 sur le fonds de roulement du CNC se sont élevés respectivement à 150 millions d'euros et 90 millions d'euros, soit moins du tiers du montant total du fonds de roulement fin 2011.

c) Le nouveau programme d'investissements d'avenir (PIA)
(1) Un nouveau programme destiné à élever la croissance potentielle de l'économie française

Le nouveau programme d'investissements d'avenir dont les crédits sont ouverts dans le PLF 2014 s'inscrit dans la continuité des annonces faites par le Premier ministre le 9 juillet 2013, autour des objectifs de renforcement de la compétitivité de l'économie, de soutien à l'emploi et de développement durable. Il fait suite au redéploiement de 2,2 milliards d'euros mis en oeuvre à compter de janvier 2013 sur le PIA adopté en 2010.

Les investissements du nouveau PIA, à hauteur de 12 milliards d'euros, doivent couvrir la période 2014-2024 ; ils concernent huit secteurs prioritaires détaillés dans le tableau ci-après.

Les dépenses envisagées prennent différentes formes : subventions (3,9 milliards d'euros) ; prêts (1 milliard d'euros) ; prises de participations (1,7 milliard d'euros), avances remboursables (2,1 milliards d'euros), dotations non consommables engendrant des intérêts pour les bénéficiaires (3,3 milliards d'euros).

Au regard de leur caractère exceptionnel, les dépenses du nouveau PIA ne sont pas inscrites dans la norme de dépenses . Les dépenses concernées sont identifiées dans des programmes spécifiques, distincts des autres dépenses ordinaires, répondant ainsi à un objectif de transparence et à la volonté d'éviter une « fongibilité » entre les dépenses ordinaires et les dépenses du PIA qui aurait constitué un « point de fuite » dans le respect de la norme de dépenses. Par ailleurs, les crédits des PIA sont rattachés aux politiques publiques auxquelles ils concourent.

Si la comptabilisation hors norme s'explique par le caractère exceptionnel des dépenses, il est toutefois possible de s'interroger sur la notion d'investissement « exceptionnel » . Ainsi, le PIA de la mission « Défense » vise à la modernisation de la force de dissuasion nucléaire, laquelle constitue une priorité constante de la politique de défense.

L'engagement d'un nouveau PIA se justifie par la volonté d'accroître la croissance potentielle et l'effet d'entraînement du premier PIA sur l'investissement public et privé, notamment en matière de recherche et développement . Au 30 juin 2013, le bilan du premier PIA faisant apparaître des engagements à hauteur de 28,5 milliards d'euros et des co-financements s'élevant à 22,5 milliards d'euros, dont 16,8 milliards d'euros d'investisseurs privés ; 3,8 milliards d'euros des collectivités territoriales ; 1,7 milliard d'euros d'autres personnes publiques (opérateurs de l'Etat, organisations internationales).

Tableau n° 55 : La répartition sectorielle du nouveau PIA

(en milliards d'euros)

Secteur

Projet

Montant

Transition économique et énergétique

Développement de démonstrateurs de la transition écologique et énergétique

0,8

Soutien aux transports du futur, pour le financement d'une mobilité durable

0,3

Diffusion des technologies éco-efficientes, via la mise en place de prêts verts

0,41

Accompagnement de projets industriels de filière en faveur de la transition énergétique et écologique

0,4

Projets de renouvellement urbain innovants

0,335

Soutien à la transition énergétique des territoires

0,075

Sous-total

2,32

Filière industrielle

Soutien à l'émergence de projets industriels de filière

0,33

Développement de la robotisation

0,36

Soutien des projets d'industrialisation des entreprises

0,3

Création d'un fonds national d'innovation

0,24

Participations de l'Etat dans des projets d'innovation

0,15

Emergence de projets structurants des pôles de compétitivité

0,3

Sous-total

1,68

Economie numérique

Emergence de quartiers numériques

0,215

Recherche et développement dans le domaine des usages et des technologies du numérique

0,4

Sous-total

0,615

Recherche et universités

Constitution de nouvelles initiatives d'excellence

3,1

Renforcement des capacités d'acquisition des équipements d'excellence

0,365

Soutien aux initiatives recherche-développement dans le domaine des technologies clés génériques

0,15

Développement de supercalculateurs

0,05

Sous-total

3,665

Santé

Soutien à la recherche hospitalo-universitaire

0,4

Sous-total

0,4

Aéronautique et espace

Aéronautique

1,22

Espace

0,05

Sous-total

1,27

Jeunesse, formation, modernisation de l'Etat

Partenariats territoriaux pour la formation et l'emploi

0,15

Développement des internats de la réussite

0,15

Actions territoriales intégrées en direction de la jeunesse

0,1

Transition numérique de l'Etat et modernisation technologique

0,15

Sous-total

0,55

Excellence technologique des industries de la défense

Maîtrise des technologies spatiales et nucléaires

1,5

Sous-total

1,5

TOTAL

12

Source : exposé général des motifs du PLF 2014

(2) L'impact des décaissements des PIA sur la variation de la dette publique

Conformément au calendrier pluriannuel de décaissement du premier programme d'investissements d'avenir, qui présente un profil « en bosse », un pic de décaissement vers les bénéficiaires finaux est attendu entre 2013 et 2015, avec des décaissements annuels moyens supérieurs à 3,5 milliards d'euros, avant une décrue en 2016 (3,3 milliards d'euros) et 2017 (2,6 milliards d'euros).

L'impact du deuxième programme d'investissements d'avenir sur la variation de la dette publique serait d'environ 1,7 milliard d'euros en 2014, et en moyenne de 1,4 milliard d'euros par an entre 2015 et 2017 (en tenant compte des opérations financières).

Si ces prévisions demeurent soumises à de nombreux aléas, liés notamment aux délais de contractualisation entre les opérateurs et les bénéficiaires finaux, elles permettent d'estimer l'impact des investissements d'avenir sur les finances publiques. Par ailleurs, ces évaluations prudentes ne tiennent pas compte, à ce stade, d'éventuelles recettes générées par les investissements effectués (intérêts, dividendes, vente de licences, etc.). Compte tenu des caractéristiques des projets financés et des modalités d'intéressement de l'Etat aux résultats, les retours ne devraient toutefois être significatifs qu'à compter de 2016 et 2017.

Le graphique ci-après détaille le montant des décaissements des deux PIA qui ont un impact sur la dette publique en comptabilité nationale . Cet impact est estimé à 5,2 milliards d'euros en 2014, dont 3,5 milliards d'euros au titre du premier PIA et 1,7 milliard d'euros pour le deuxième PIA.

Graphique n° 56 :

Note de lecture : en comptabilité nationale, les dépenses des investissements d'avenir ont un impact sur la dette (et, le cas échéant, sur le déficit pour les opérations non financières comme les subventions et les avances remboursables) au moment du décaissement de ces sommes par les opérateurs.

Source : ministère du budget, réponse au questionnaire budgétaire

d) L'application des normes au PLF 2014 : des objectifs de la programmation pluriannuelle plus que respectés

Comme le montre le tableau ci-après, par rapport à la loi de finances initiale 2013 au format 2014, le PLF 2014 propose une diminution des dépenses du budget général de l'Etat (278,4 milliards d'euros) de 1,4 milliard d'euros (- 0,5 %) au périmètre « zéro valeur » et, pour le périmètre élargi (370,5 milliards d'euros), une diminution de 1,66 % en volume , compte tenu d'une prévision d'inflation de 1,3 % 126 ( * ) .

La maîtrise des dépenses tient compte de l'augmentation du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne (à hauteur de 0,5 milliard d'euros par rapport à LFI 2013 127 ( * ) , de 19,6 milliards d'euros à 20,1 milliards d'euros).

Tableau n° 57 : Norme de dépenses du PLF 2014
et évolution par rapport à la LFI 2013

(crédits de paiement, en milliards d'euros)

LFI 2013

Mesures de périmètre

LFI 2013 format PLF 2014

PLF 2014

Dépenses du budget général (hors dette et pensions, y compris taxes affectées)

204,1

0,4

204,5

203,9

Prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne (hors BR UE 2012)

19,6

0

19,6

20,1

Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales

55,7

0

55,7

54,3

Dépenses de l'Etat hors charges de la dette et de pensions

279,4

0,4

279,8

278,4

Charge de la dette

46,9

0,0

46,9

46,7

Contribution au CAS Pensions

45,2

0,0

45,2

45,4

Dépenses totales de l'Etat

371,5

0,4

371,9

370,5

Source : exposé général des motifs du PLF 2014

Par rapport à la loi de programmation pour les finances publiques (LPFP) pour les années 2012 à 2017 (LPFP), l'économie réalisée sur la norme « zéro valeur » s'élève à 1,5 milliard d'euros 128 ( * ) , comme le montre le tableau ci-après.

Cette économie résulte d' un effort partagé avec les opérateurs (pour lesquels le plafond des taxes affectées est réduit de 0,4 milliard d'euros par rapport à la LPFP 129 ( * ) ) et les collectivités territoriales (pour lesquelles les transferts sont réduits de 750 millions d'euros supplémentaires par rapport à la LPFP 130 ( * ) ).

Sur le périmètre de la norme « zéro volume » , les dépenses de l'Etat atteindraient 370,5 milliards d'euros, soit 3,7 milliards d'euros de moins que dans la LPFP. Si l'on tient compte d'un changement de périmètre en 2014 (+ 0,4 milliard d'euros), les dépenses sont inférieures de 4,1 milliards d'euros à l'objectif de la LPFP à périmètre constant , du fait des économies sous la norme « zéro valeur » (- 1,5 milliard d'euros), d'une charge de dette inférieure aux prévisions (- 1,7 milliard d'euros) et de moindres contributions de l'Etat et des opérateurs aux dépenses de pensions (- 1 milliard d'euros) 131 ( * ) . Les économies supplémentaires sur la charge de la dette et les pensions par rapport aux prévisions permettent également de se situer en-deçà des prévisions effectuées dans le rapport sur les orientations des finances publiques, comme détaillé dans le tableau ci-après.

Tableau n° 58 : Comparaison des prévisions d'atteinte
des normes « zéro valeur » et « zéro volume » avec la LPFP et le DOFP

(en milliard d'euros)

LFI 2013

LPFP
Annuité 2014

DOFP
2014

Ecart DOFP/LPFP

PLF 2014

Ecart PLF/LPFP

Dépenses sous la norme « zéro valeur »
périmètre LFI 2013

279,4

279,5

278,0

- 1,5

278,0

- 1,5

Charge de la dette

46,9

48,4

47,8

- 0,6

46,7

- 1,7

CAS « Pensions »

45,2

46,4

45,6

- 0,8

45,4

- 1,0

Changement de périmètre PLF 2014

-

-

-

-

0,4

0,4

Total format
PLF 2014

371,5

374,2

371,4

- 2,8

370,5

- 3,7*

* - 4,1 à périmètre constant
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Votre rapporteur général relève que certaines dispositions du PLF 2014, relatives à l'affectation de ressources fiscales aux régions et aux départements, peuvent interroger au regard de leur traitement par rapport à la norme de dépenses.

2. Un effort d'économies conséquent par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses
a) Une économie mesurée par rapport à l'évolution spontanée de la dépense

L'atteinte de l'objectif de stabilisation des dépenses en valeur doit être apprécié au regard de l' évolution spontanée de la dépense, estimée à 7 milliards d'euros (cf. encadré ci-après) , et correspondant :

- à l'impact de l'inflation sur les prestations sociales, les exonérations de cotisations sociales et les contrats aidés ;

- aux besoins en crédits de paiement des programmes d'investissement pluriannuels ;

- à l'évolution de la masse salariale, notamment l'impact du glissement vieillesse technicité et des mesures catégorielles ;

- à la progression des recettes versées au profit de l'Union européenne.

La notion de tendanciel correspond à la manière dont se construit le budget , la définition des dotations reflétant la « dérive naturelle des dépenses » à laquelle s'ajoutent les dépenses résultant de décisions nouvelles ou de projets nouveaux, dont sont retranchées les mesures d'économies.

La notion d'évolution spontanée des dépenses et des recettes

Les économies du projet de loi de finances pour 2014 sont fondées par rapport à l'évolution tendancielle (ou spontanée) des dépenses qui serait celle observée toutes choses égales par ailleurs, si le rythme historique d'évolution de la dépense était maintenu et si tous « les coups partis » étaient financés.

La mesure de l'évolution tendancielle des dépenses de l'Etat pour les prochaines années (jusqu'en 2016) retient les hypothèses suivantes :

- une progression des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales de 0,5 milliard d'euros par an, en tenant compte de la dynamique spontanée de certaines dotations ;

- une hausse annuelle des prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne de 0,8 milliard d'euros ;

- la poursuite de la progression historique de l'évolution des dépenses de fonctionnement constatée sur la période 2007-2011 (+ 1,1 % par an), les loyers budgétaires étant pour leur part indexés sur l'inflation ;

- la prise en compte des « coups partis » s'agissant des investissements civils ;

- une évolution des dépenses de personnel basée la stabilité du nombre de fonctionnaires, un glissement vieillesse-technicité correspondant à la moyenne des cinq dernières années et l'indexation du point d'indice fonction publique selon l'historique des revalorisations intervenues dans la période récente ;

- le financement des « coups partis » du ministère de la défense, notamment s'agissant de la loi de programmation militaire ;

- la prise en compte de la dynamique propre des interventions de l'Etat.

Source : commission des finances, d'après ministère de l'économie

Compte tenu de l'évolution spontanée des dépenses (hors charge de la dette et pensions) de 7 milliards d'euros par an, la réduction des dépenses de l'Etat sous la norme « zéro valeur » par rapport à la LFI 2013 (à hauteur de 1,4 milliard d'euros) porte à 8,4 milliards d'euros le montant des économies par rapport à l'évolution spontanée de la dépense 132 ( * ) , se répartissant de la manière suivante :

- des économies sur les crédits de fonctionnement des ministères (- 2,6 milliards d'euros) 133 ( * ) , réparties entre les dépenses de personnel (- 1,7 milliard d'euros, compte tenu de la maîtrise des effectifs et de la masse salariale, cf. infra ) et les économies de fonctionnement stricto sensu (- 0,9 milliard d'euros) ;

- une baisse des crédits d'intervention et d'investissement (- 2,6 milliards d'euros) 134 ( * ) ;

- la participation des autres administrations publiques à la maîtrise des dépenses (- 3,2 milliards d'euros), par une limitation des dotations de l'Etat aux opérateurs (- 1,2 milliard d'euros, cf . infra ), aux collectivités territoriales (- 1,5 milliard d'euros 135 ( * ) ) et à l'Union européenne (- 0,5 milliard d'euros).

Si l'on ajoute les économies réalisées sur la charge de la dette au titre de la réduction des déficits opérée entre 2012 et 2013 (soit 0,5 milliard d'euros) , l'effort d'économies par rapport à l'évolution tendancielle s'élève à près de 9 milliards d'euros .

Ces économies sont réalisées notamment dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP) , qui procède aux évaluations de quarante-neuf politiques publiques portant sur près de 200 milliards d'euros de dépenses publiques.

Les services de la Commission européenne, comme le Fonds monétaire international (FMI), dans le cadre de sa mission effectuée en France début 2013 au titre de l'article IV, ont salué les mérites de cette approche qui se fonde sur un examen de l'ensemble des politiques publiques et non sur les seules dépenses de l'Etat, envisagées pour l'essentiel sous l'angle de l'optimisation de l'organisation et des procédures dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

Le rapport de l'Inspection générale des finances (IGF) sur les aides aux entreprises, réalisé dans le cadre de la MAP et remis en juillet 2013 136 ( * ) , a permis d'ores et déjà de documenter des économies, en particulier s'agissant des taxes affectées aux opérateurs ( cf . supra ).

A ce stade, les conclusions n'ont pas été rendues pour de nombreuses missions. Elles devront servir à amplifier les économies pour les prochaines années.

b) Le financement des priorités du Gouvernement

Les augmentations proposées sur plusieurs postes de dépenses traduisent les priorités du Gouvernement , engagées sur l'ensemble de la durée de quinquennat : la jeunesse, l'emploi, le pouvoir d'achat et l'aide aux familles les plus modestes, ainsi que la justice et la sécurité.

Dans le domaine de la jeunesse , le PLF 2014 prévoit :

- la création, d'ici fin 2014, de 150 000 emplois d'avenir et 100 000 contrats de génération (dont le coût s'élève à 1,7 milliard d'euros) ;

- 31 000 entrées dans le dispositif de service civique (150 millions d'euros) ;

- la création de 8 984 postes dans l'éducation nationale (0,6 milliard d'euros) et de 1 000 emplois dans l'enseignement supérieur, tandis que 30 000 contrats aidés supplémentaires doivent permettre un meilleur accompagnement des élèves, notamment des enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire ;

- la réforme de l'aide sociale aux étudiants, qui s'est traduite par une augmentation des aides pour près de 100 000 boursiers dès la rentrée 2013 (0,2 milliard d'euros).

L 'emploi représente, compte tenu du niveau du chômage, la première priorité budgétaire. Outre les mesures en faveur de l'emploi des jeunes ( cf . supra ), le PLF 2014 propose :

- de financer 340 000 contrats non marchands de longue durée (soit un effort de 1,8 milliard d'euros, en hausse de 330 millions d'euros par rapport à 2013) ;

- de créer 2 000 emplois nouveaux à Pôle emploi en 2014, portant le nombre de créations à 4 000 depuis 2012 (0,2 milliard d'euros) ;

- d'augmenter les crédits consacrés à l'accompagnement de l'activité partielle pour favoriser le maintien dans l'emploi (+ 90 millions d'euros).

Le soutien du pouvoir d'achat et l' aide aux familles les plus modestes recouvre un ensemble de mesures :

- l'exercice 2014 intègre les effets en année pleine (+ 170 millions d'euros) du relèvement, le 1 er juillet 2013, des plafonds de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) (fixé à 8 592,96 euros par an pour une personne seule, soit une augmentation de 8,3 % ) et de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS), étendue à 750 000 personnes supplémentaires (400 000 nouveaux bénéficiaires de la CMU-C et 350 000 de l'ACS) ;

- l'année 2014 marque le début de la mise en oeuvre de la revalorisation sur 5 ans du complément familial à hauteur de 50 % et de l'allocation de soutien familial à hauteur de 25 % (0,5 milliard d'euros) ;

- la revalorisation du montant forfaitaire du RSA-socle sur plusieurs années au-delà de l'inflation, annoncée en septembre 2013, qui doit lui permettre d'atteindre à nouveau le niveau de 50 % du SMIC (soit un coût pour le budget de l'Etat au titre de la compensation aux départements de 0,6 milliard d'euros) ;

- le nombre de bénéficiaires des tarifs sociaux de l'électricité et du gaz sera triplé, de 1 million à 3 millions de foyers (0,4 milliard d'euros) ;

- dans le domaine du logement, le barème de ressources pour bénéficier des aides sera maintenu en 2014 au niveau de 2013, ce qui augmentera le nombre de bénéficiaires ;

- le PLF 2014 propose de supprimer le droit de timbre créé en 2011 (d'un montant de 35 euros) pour bénéficier de l'aide juridictionnelle ;

- un effort financier à hauteur de 111 millions d'euros permet d'augmenter le nombre de places d'hébergement d'urgence (près de 5 000) et en intermédiation locative (à hauteur de 7 000 places).

Dans le domaine de la justice et de la sécurité , le PLF 2014 propose que ces deux secteurs bénéficient au total de la création de 995 emplois, dont 590 pour la justice (parmi lesquels 300 conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation pour lutter contre la récidive) et 405 pour la sécurité, tandis que se poursuivra la rénovation des palais de justice. Le renforcement des effectifs de la police et de la gendarmerie portera en priorité sur les zones de sécurité prioritaires, la ville de Marseille et la Corse.

Toutes ces créations de postes sont gagées par des suppressions de postes d'un nombre équivalent (cf. infra ).

c) La participation des opérateurs à la maîtrise de la dépense publique

Afin que l'effort de maîtrise budgétaire concerne effectivement l'ensemble des politiques publiques, quel que soit leur mode de financement et leur conduite par l'Etat ou un opérateur, les règles de maîtrise des dépenses publiques sont, depuis 2013, étendues aux quelques 550 opérateurs de l'Etat .

Les dépenses des opérateurs ont été particulièrement dynamiques. Selon un rapport de l'Inspection générale des finances (IGF), publié en mars 2012 137 ( * ) , les opérateurs ont représenté une part croissante des dépenses et des emplois publics puisque, entre 2007 et 2012, leurs effectifs ont progressé de 6,1 % (durant la même période, ceux de l'Etat ont diminué de 6 %) et leurs moyens budgétaires ont progressé de 15 %, soit une croissance quatre fois plus rapide que celle des dépenses du budget général de l'Etat au cours de la même période.

Dans le PLF 2014, les opérateurs de l'Etat bénéficient de 42 milliards d'euros de subventions pour charges de service public, de dotations en fonds propres et de transferts directement inscrits au budget de l'Etat hors PIA, environ 15 % du budget de l'Etat hors dette et pensions.

Le PLF 2014 élargit le dispositif de plafonnement des ressources et impositions affectées aux opérateurs de l'Etat , introduit dans la LFI 2012, comme il a été détaillé ci-dessus, en portant le montant des ressources sous plafond à 5,3 milliards d'euros dans le PLF 2014.

En outre, les chambres consulaires, les agences de l'eau et le CNC participent à l'effort de maîtrise des dépenses publiques par des prélèvements sur leurs fonds de roulement à hauteur de 470 millions d'euros 138 ( * ) . Il s'agit d' opérations exceptionnelles qui s'inscrivent dans le cadre de la contribution des opérateurs à l'effort de rétablissement des comptes publics. De manière constante, votre commission des finances a toujours considéré que les « trésoreries dormantes » avaient vocation à revenir au budget de l'Etat et à contribuer à son désendettement.

Enfin, à l'exception des opérateurs de l'Etat correspondant à des besoins prioritaires (création de 1 000 emplois dans les universités et de 2 000 postes à Pôle emploi), les effectifs des autres opérateurs de l'Etat diminuent de 1 229 emplois à temps plein (ETP) à périmètre constant.

Au total, le plafond d'emplois des opérateurs augmente donc de 1 771 ETP à périmètre constant dans le PLF 2014 . Les changements de périmètre, et notamment les transferts de personnels de l'Etat aux universités dans le cadre du passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE), se traduisent par une évolution de + 4 398 ETP du plafond d'emplois des opérateurs , que le PLF propose ainsi de majorer de 6 169 ETP . Le plafond d'emplois des opérateurs s'élève à 391 770 ETP dans le PLF 2014.

Les économies sur les dépenses des opérateurs par rapport à leur évolution tendancielle sont évaluées à 1,2 milliard d'euros par le Gouvernement, dont 0,5 milliard d'euros par rapport à la norme de dépenses, au titre du plafonnement des taxes affectées et des prélèvements sur fonds de roulement (cf. supra ), et 0,7 milliard d'euros d'économies sur les dépenses de fonctionnement, y compris de personnel 139 ( * ) .

d) Des questions récurrentes sur l'insuffisance de certaines dotations par rapport aux besoins constatés

Le tableau ci-après détaille les évolutions des crédits des missions entre la LFI 2013 et le PLF 2014, ainsi qu'avec les plafonds prévisionnels de crédits communiqués à l'occasion du débat d'orientation des finances publiques (DOFP).

Tableau n° 59 :

Evolution des crédits par mission (hors dette et pensions) entre la LFI 2013 et le PLF 2014

(crédits de paiement, en millions d'euros)

Missions

LFI 2013

Mesures de périmètre 2014

Mesures de transferts 2014

LFI 2013 format 2014

PLF 2014

Evolution 2014/2013

DOFP - Format LFI 2013

DOFP - Format PLF 2014

Ecart PLF 2014/DOFP

Engagements financiers de l'Etat

1 113

0

0

1 113

948

-14,8%

948

948

0

Politique des territoires

319

0

0

319

294

-8,0%

294

294

0

Ecologie, développement et mobilité durables

7 634

15

47

7 696

7 162

-6,9%

7 100

7 162

0

Relations avec les collectivités territoriales

2 738

0

5

2 742

2 594

-5,4%

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3 099

0

4

3 102

2 942

-5,2%

2 931

2 935

7

Economie

1 806

0

-5

1 801

1 733

-3,8%

1 688

1 683

50

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

3 038

0

18

3 056

2 954

-3,3%

2 939

2 957

-3

Aide publique au développement (y. c. ressources du FSD)

3 336

0

0

3 336

3 225

-3,3%

3 232

3 232

-7

Culture

2 438

0

5

2 443

2 382

-2,5%

2 369

2 374

8

Sport, jeunesse et vie associative

470

0

1

471

460

-2,2%

459

460

0

Direction de l'action du Gouvernement

1 145

0

2

1 147

1 123

-2,1%

1 120

1 123

0

Défense

30 109

1

8

30 118

29 621

-1,7%

29 609

29 618

3

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

8 851

0

1

8 852

8 721

-1,5%

8 720

8 721

0

Médias, livre et industries culturelles (y.c. CCF avances à l'audiovisuel public)

4 415

3

0

4 418

4 367

-1,2%

4 364

4 367

0

Immigration, asile et intégration

671

0

0

671

665

-0,9%

665

665

0

Action extérieure de l'Etat

2 829

0

0

2 829

2 804

-0,9%

2 797

2 797

7

Pouvoirs publics

991

0

0

992

990

-0,2%

989

989

1

Régimes sociaux et de retraite

6 543

0

0

6 543

6 534

-0,1%

6 630

6 630

-96

Santé

1 288

10

1

1 299

1 298

-0,1%

1 288

1 298

0

Justice

6 195

85

0

6 280

6 288

0,1%

6 203

6 288

0

Conseil et contrôle de l'Etat

493

0

0

493

494

0,2%

494

494

0

Recherche et enseignement supérieur

25 621

0

31

25 652

25 771

0,5%

25 624

25 655

117

Outre-mer

1 990

-9

10

1 992

2 011

1,0%

2 010

2 011

0

Sécurités

12 074

0

-4

12 070

12 194

1,0%

12 198

12 194

0

Egalité des territoires, logement et ville

7 770

0

-20

7 750

7 844

1,2%

7 864

7 844

0

Enseignement scolaire

45 689

0

0

45 689

46 269

1,3%

46 276

46 276

-7

Solidarité, insertion et égalité des chances

13 178

0

0

13 178

13 607

3,2%

13 606

13 607

0

Travail et emploi

10 125

0

-3

10 122

10 802

6,7%

10 805

10 802

0

Administration générale et territoriale de l'Etat

1 973

1

3

1 977

2 121

7,3%

2 116

2 121

0

Total HCAS

207 941

106

104

208 151

208 217

0,0%

205 339

205 544

79

Evolutions d'autres lignes de la norme de dépense

-79

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Pour l'ensemble des missions , la progression est de 66 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (soit + 0,03 % ).

La plus forte progression relative (+ 7,3 % à périmètre constant) est enregistrée pour la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » (+ 144 millions d'euros) afin de tenir compte de l'organisation en 2014 des élections municipales, européennes et sénatoriales.

Les autres augmentations les plus importantes traduisent les priorités du Gouvernement et la dynamique tendancielle de certaines dépenses sociales dites de guichet :

- pour la mission « Travail et emploi » (+ 680 millions d'euros, soit + 6,7 %), sous l'effet de l'augmentation du nombre de contrats aidés, une partie des dépenses nouvelles étant par ailleurs financée par des économies au sein de la mission (suppression de l'indemnité compensatrice forfaitaire en matière d'apprentissage, remplacée par une aide ciblée sur les entreprises de moins de 10 salariés, instauration d'une dégressivité sur les exonérations de cotisations sociales en faveur des organismes d'intérêt général en zone de revitalisation rurale, etc.) ;

- pour la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » (+ 429 millions d'euro, en hausse de 3,2 %), l'augmentation résulte de la dynamique tendancielle des dispositifs financés sur les crédits de la mission, notamment l'allocation aux adultes handicapés (AAH), ainsi que du soutien aux politiques de cohésion sociale et d'égalité entre les femmes et les hommes, dans un contexte de maîtrise des dépenses de fonctionnement et d'intervention : poursuite de l'harmonisation des modalités d'attribution de l'AAH, convergence tarifaire entre les services tutélaires, réduction des dépenses du Fonds national des solidarité active - FNSA - au titre de l'aide personnalisée de retour à l'emploi - APRE - et de poursuite de la réduction des effectifs en administration centrale et dans les agences régionales de santé (- 2 %) ;

- pour la mission « Enseignement scolaire » (+ 580 millions d'euros, soit + 1,3 %), le renforcement des effectifs s'accompagne d'une économie de 3 % sur les dépenses de fonctionnement courant du ministère (rationalisation des achats et réduction des surfaces immobilières) et des opérateurs.

Les dépenses nouvelles des missions prioritaires sont financées par une diminution des crédits des autres missions , avec un ciblage accru des projets d'investissement relevant de la mission « Ecologie, développement et mobilité durables » (- 534 millions d'euros et - 6,9 %) et l'abandon de projets d'investissement non financés de la mission « Culture » (- 61 millions d'euros, soit - 2,5 %), comme la Maison de l'histoire de France.

La diminution des crédits de la mission « Economie » (- 68 millions d'euros, soit - 5,2 %) intègre une économie de 100 millions d'euros sur l'aide au transport postal, ainsi qu'une réduction de 7 % des dépenses de fonctionnement, d'intervention et d'investissement.

Les baisses des crédits de paiement, à la suite notamment des réductions d'effectifs, concernent tout particulièrement la mission « Défense » (- 497 millions d'euros et - 1,7 %) et la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » (- 131 millions d'euros, soit - 1,5 %). Pour la mission « Défense », le retrait des forces d'Afghanistan et l'évolution de la situation au Mali, ainsi que la reconfiguration du dispositif des forces prépositionnées, contribuent en outre à une diminution de 180 millions d'euros de la budgétisation des opérations extérieures par rapport à 2013 (450 millions d'euros dans le PLF 2014 contre 630 millions d'euros en LFI 2013).

La réduction des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (- 160 millions d'euros et - 5,2 %) traduit l'évolution favorable des taux de cofinancement européens dans le prochain cadre financier de l'Union européenne pour 2014-2020.

Par ailleurs, il a été opéré un ajustement de plusieurs dotations dont les montants en LFI s'avéraient inférieurs à ceux exécutés : la majoration en gestion 2013 des crédits de l' hébergement d'urgence a été intégrée lors de la construction du PLF 2014 ; le montant des frais de justice reprend le socle 2013, tout en intégrant des mesures d'économie ; par ailleurs, un rebasage des bourses étudiantes a été opéré dès 2013. Ces évolutions sont conformes aux observations de votre commission.

Pour l' aide médicale d'Etat , il a été fait état d'évolutions très heurtées d'une année sur l'autre (+ 1 % entre 2007 et 2008, puis + 13 % entre 2008 et 2009). L'hypothèse d'une évolution spontanée de 3 % peut toutefois sembler en deçà de la réalité. Si la dotation pour 2014 intègre une économie de 25 millions d'euros liée à la baisse du coefficient de majoration applicable à la tarification des prestations hospitalières des bénéficiaires de l'AME, celle-ci ne saurait suffire à expliquer la hausse relativement faible des crédits qui est proposée. Par ailleurs, la question de la dette de l'Etat envers la Sécurité sociale au titre de l'aide médicale d'Etat (soit 32,5 millions d'euros fin 2012) reste en suspens.

S'agissant de l' allocation temporaire d'attente (ATA), il a été indiqué à votre rapporteur général, dans la réponse à son questionnaire budgétaire, que « la maîtrise de l'évolution de ces dépenses est un enjeu essentiel et s'est traduite par la mise en oeuvre par le secrétariat général à l'immigration et à l'intégration de plusieurs mesures suite aux préconisations faites par une mission d'inspection interministérielle en avril 2013, qui permettent de documenter le montant prévu pour l'ATA dans le PLF 2014 (135 millions d'euros), par exemple le rapprochement des différents fichiers des bénéficiaires de l'ATA pour réduire le montant des indus ou la réduction des coûts de gestion facturés par Pôle emploi ». Si ces économies doivent être saluées, tous les doutes ne sont pas levés quant à la soutenabilité de la budgétisation, le PLF 2014 prévoyant une diminution de 5 millions d'euros de la dotation par rapport à la LFI 2013. En effet, la dépense reste dynamique en raison d'une augmentation continue du nombre de demandeurs d'asile, à nouveau constatée sur le premier semestre 2013, d'autant plus que des restes à payer de l'année 2012 ont été reportés sur l'exercice 2013 à hauteur de près de 15 millions d'euros.

e) Les écarts avec les prévisions du débat d'orientation des finances publiques

Le tableau ci-avant détaille également les écarts entre les prévisions lors du DOFP et le PLF 2014 . Le DOFP ne fixait pas de prévisions pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Des reventilations internes à certains ministères (agriculture, défense et anciens combattants et affaires étrangères) ont conduit à des écarts limités sur plusieurs missions. Opérées dans le cadre des conférences de répartition des lettres plafonds, elles sont neutres pour l'ensemble du budget général.

Plusieurs missions ont vu leurs crédits réévalués à la hausse en conséquence de décisions du Gouvernement postérieures au DOFP , pour un montant total de 175 millions d'euros :

- la mission « Recherche et enseignement supérieur » (+ 117 millions d'euros) , pour financer la réévaluation des bourses sur critères sociaux des étudiants ;

- la mission « Economie » (+ 50 millions d'euros) , pour financer le fonds de soutien créé dans le cadre du Pacte de confiance et de responsabilité afin d'aider les collectivités territoriales à sortir des contrats d'emprunt structurés les plus risqués ; ces crédits correspondent au rendement de la taxe de risque systémique prévue à l'article 23 du PLF 2014 (soit 50 millions d'euros) ; par ailleurs 50 millions d'euros seront issus de reports de crédits de 2013, portant le total des ressources du fonds en 2014 à 100 millions d'euros (en hausse de 50 millions d'euros par rapport à 2013) ;

- la mission « Culture » (+ 8 millions d'euros) , dans le cadre de la mise en oeuvre du plan d'éducation artistique et culturel annoncé en septembre 2013.

Ces ouvertures de crédits ont été intégralement gagées :

- par une diminution de 96 millions d'euros des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite », liée à la révision à la baisse des hypothèses d'inflation 2013 par rapport à juillet (54 millions d'euros) et à la mesure de report au 1 er octobre des revalorisations de pension pour les régimes spéciaux, dans le cadre de la réforme des retraites (42 millions d'euros) ;

- par une révision à la baisse du montant prévisionnel du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne, à hauteur de 79 millions d'euros.

S'il faut se féliciter que les annonces intervenues après le DOFP soient intégralement financées, on relèvera que les économies sur lesquelles elles sont gagées ne résultent pas toutes de décisions du Gouvernement .

f) Les écarts par rapport à la loi de programmation des finances publiques : des interventions rendues nécessaires par l'impact de la crise sur l'emploi

Le tableau ci-après détaille les écarts entre les crédits des missions figurant dans le PLF 2014 et l'annuité 2014 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour la période 2012-2017, à périmètre constant.

Tableau n° 60 : Comparaison des crédits du PLF 2014 avec l'annuité 2014 de la LPFP

(crédits de paiement, en millions d'euros)

L'équilibre des mesures de transfert 2014 est assuré au sein de la norme via les taxes affectées et les prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités territoriales.

Source : ministère du budget, réponse au questionnaire budgétaire

Comme détaillé ci-avant, le PLF 2014 prévoit une économie de 1,5 milliard d'euros sur le périmètre de la norme « zéro valeur » (hors charges de la dette et pensions) par rapport à l'annuité 2014 de la LPFP.

Par ailleurs, les missions prioritaires bénéficient de moyens supplémentaires par rapport à la LPFP pour financer les outils mis en place par le Gouvernement, comme il a été détaillé ci-dessus : + 1,1 milliard d'euros pour la mission « Travail et emploi », correspondant à la mise en place des nouveaux contrats aidés dans le cadre de la priorité accordée à l'emploi, + 0,2 milliard d'euros pour la mission « Enseignement scolaire », + 0,1 milliard d'euros pour les missions « Solidarité, insertion et égalité des chances » et « Egalité des territoires, logement et ville» ; par ailleurs, les moyens de la mission « Sécurités » sont stabilisés.

L'ensemble des autres missions contribuent au financement de ces priorités et à l'économie supplémentaire de 1,5 milliard d'euros par rapport à la norme « zéro valeur », notamment les missions « Défense » (- 537 millions d'euros) et « Ecologie, développement et mobilité durables » (- 189 millions d'euros).

Par rapport aux écarts déjà commentés lors du DOFP, d'autres adaptations ont été opérées dans le PLF 2014 :

- mission « Régimes sociaux et de retraite » (- 0,2 milliard d'euros) : il s'agit de l'impact de la réforme des retraites (par un décalage de l'indexation) et des hypothèses d'inflation associées au PLF 2014 ;

- mission « Ecologie, développement et mobilité durables » (- 0,2 milliard d'euros) : des économies supplémentaires sont générées par la réforme du bonus malus écologique, le recentrage des missions des opérateurs et une sélection plus étroite des projets d'investissement en matière d'infrastructures ;

- mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » (- 0,1 milliard d'euros) : cet écart s'explique par une baisse du coût prévisionnel des élections prévues en 2014, du fait de la modification du calendrier des élections et de la dématérialisation de la propagande électorales aux élections européennes ;

- mission « Aide publique au développement », y compris les ressources du Fonds de solidarité pour le développement (- 0,1 milliard d'euros) : ce nouveau montant intègre une révision à la baisse du montant de la participation de la France au Fonds mondial Sida, dans le contexte de la montée en puissance de l'affectation (plafonnée) de la taxe sur les transactions financières et de la hausse de la taxe de solidarité sur les billets d'avion ;

- mission « Outre-mer » (- 0,06 milliard d'euros) : la réévaluation traduit le recentrage des exonérations spécifiques outre-mer proposée à l'article 70 du PLF 2014.

g) Une mise en réserve supérieure à la programmation

Afin d'assurer le respect en gestion du plafond global des dépenses voté par le Parlement, le Gouvernement procède, comme les années antérieures, à la constitution d'une réserve de précaution , dans les conditions prévues au 4° bis de l'article 51 de la LOLF, qui prévoit une information du Parlement sur l'utilisation des crédits mis en réserve, et selon les modalités définies par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

La réserve de précaution permet de faire face aux aléas en gestion et de gager, le cas échéant par des annulations de crédits, les besoins financiers inéluctables ou correspondant à des augmentations de dépenses obligatoires qui pourraient apparaître en cours d'exercice.

Sur chaque programme doté de crédits limitatifs, la mise en réserve porte sur 0,5 % des crédits de paiement et autorisations d'engagement ouverts sur les dépenses de personnel de titre 2, et 7 % sur les autres titres .

Toutefois, s'agissant des crédits relatifs aux subventions pour charges de service public, il sera pris en compte la part de ces crédits prenant en charge des dépenses de personnel pour réduire à due proportion la réserve de précaution au taux de 0,5 % applicable aux crédits de titre 2. Cette modulation, déjà mise en oeuvre au cours des années précédentes afin de ne pas créer de distorsion au détriment des missions essentiellement mises en oeuvre par des opérateurs (comme la mission « Recherche et enseignement supérieur »), a conduit à réduire la réserve en 2013 de 1,4 milliard d'euros par rapport à son niveau théorique.

Au regard des perspectives d'exécution budgétaire de 2013, le Gouvernement avait décidé, en février 2013 , de compléter la mise en réserve initiale par une mise en réserve complémentaire de 2 milliards d'euros , portant le montant de la réserve de précaution à 8,5 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) et 8,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE).

Le taux proposé pour 2014 (7 % hors dépenses de personnel) est le plus élevé depuis la mise en place, avec la LOLF, de la réserve de précaution . Il permet de porter les montants de la réserve (7,6 milliards d'euros en CP et 8,1 milliards d'euros en AE) à des niveaux proches de ceux résultant, en 2013, d'une mise en réserve complémentaire à hauteur de 2 milliards d'euros en cours d'exercice .

B. UNE MAÎTRISE STRICTE DE L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES

1. Des dépenses de personnel presque stabilisées par une maîtrise des effectifs, de la valeur du point et des mesures catégorielles
a) Une diminution des effectifs à périmètre constant dans le cadre d'un redéploiement vers les missions prioritaires

Le plafond des autorisations d'emplois de l'Etat (y compris les budgets annexes) s'établit, dans le projet de loi de finances pour 2014, à 1 906 007 équivalents temps plein travaillés (ETPT), contre 1 914 921 ETPT en loi de finances initiale pour 2013, soit une baisse de 8 914 ETPT .

Hors mesures de périmètre (- 121 ETPT), de transfert (- 4 801 ETPT) 140 ( * ) et des corrections techniques (- 2 582 ETPT), le solde net des créations et des suppressions d'emplois s'établit à - 1 410 ETPT à périmètre constant.

Les créations d'emplois dans les ministères prioritaires (+ 8 940 ETPT dans l'éducation nationale, + 1 049 ETPT au ministère de l'intérieur, + 584 ETPT au ministère de la justice) sont en effet plus que gagées par des suppressions d'emplois dans les autres ministères (notamment au ministère de la défense, avec - 7 557 ETPT, et à celui de l'économie et des finances, avec - 2 771 ETPT).

Il s'agit de la mise en oeuvre d'une nouvelle politique de l'emploi public, après la suppression de 147 000 ETPT en exécution de 2008 à 2012 (hors impact de la deuxième loi de finances rectificative du 16 août 2012), dont 65 600 ETPT dans l'éducation nationale, comme détaillé dans le tableau ci-après.

Le Gouvernement a abandonné la règle , suivie par l'ancienne majorité pour limiter la progression de la masse salariale, du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite. Appliquée de façon mécanique, cette règle ne permettait pas une approche satisfaisante de la diversité des besoins en personnel du service public.

Tableau n° 61 : Evolution des emplois par ministère (2013-2014)

(en ETPT)

Source : ministère du budget, réponses au questionnaire budgétaire

Tableau n° 62 : Evolution des emplois par ministère (2008-2012,
hors LFR du 16 août 2012)

(en ETPT)

Source : ministère du budget, réponses au questionnaire budgétaire

L'objectif du Gouvernement est de procéder à une stabilisation des effectifs sur l'ensemble de la durée du quinquennat .

Tableau n° 63 : Les créations et les suppressions d'emplois
depuis l'adoption de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012

(emplois en ETP)

2012

LFI 2013

2014

Cumul 2014

Etat

4 278

- 2 317

- 3 174

- 1 213

Enseignement

4 278

8 981

8 954

22 213

Justice/Sécurité

1 000

995

1 995

Autres

- 12 298

-13 123

- 25 421

Opérateurs

0

1 697

1 771

3 468

Pôle emploi

2 000

2 000

4 000

Enseignement supérieur

1 000

1 000

2 000

Autres

- 1 303

- 1 229

- 2 532

Etat + opérateurs

4 278

- 620

- 1 403

2 255


Hors budgets annexes


Note
: ces données n'intègrent pas les 2 560 postes d'assistants d'éducation créés dans les établissements publics locaux d'enseignement et les auxiliaires de vie scolaire individuels créés dans les établissements d'enseignement technique agricole, rémunérés hors titre 2, et donc non comptabilisés dans le plafond d'emploi de l'Etat ou des opérateurs de l'Etat (ces établissements n'étant pas des opérateurs). En tenant compte de ces postes, les créations de postes totales dans l'enseignement, hors universités, seraient de 24 773 ETP fin 2014.

Source : ministère du budget

Le tableau ci-avant montre, après la création de 4 278 ETP dès la rentrée 2012 dans l'éducation nationale, des soldes légèrement négatifs de créations et de suppressions d'emplois pour les années 2013 (- 620 ETP) et 2014 (- 1 403 ETP) .

Des créations nettes d'emplois sont prévues pour les opérateurs (pour Pôle emploi et les universités, à hauteur, respectivement, de 1 000 ETP et 2 000 ETP), supérieures aux suppressions pour les autres opérateurs, à hauteur de - 1 229 ETP, soit un solde net de + 1 771 ETP pour l'ensemble des opérateurs . A contrario, des suppressions nettes d'emplois sont prévues pour l'Etat en 2014 (- 3 174 ETP) 141 ( * ) .

En tenant compte des créations d'emplois en faveur de l'enseignement prévues par la deuxième loi de finances rectificative du 16 août 2012, le solde cumulé 2012-2014 (hors suppressions d'emplois prévues par la loi de finances initiale pour 2012) s'établit à + 2 255 ETP, nécessitant ainsi de prévoir de nouvelles suppressions nettes d'emplois d'ici à 2017 afin de respecter l'objectif de stabilisation des emplois de l'Etat et de ses opérateurs sur la période 2012-2017 .

S'agissant de l'Etat , hors budgets annexes, les créations d'emplois concernent en priorité :

1) l'enseignement, à hauteur de 9 984 postes :

- l'enseignement scolaire primaire et secondaire bénéficie de la création de 8 984 postes , dont 8 804 au sein du ministère de l'éducation nationale, 150 au ministère de l'agriculture au titre de l'enseignement technique agricole et 30 emplois directement rémunérés par les établissements locaux d'enseignement ; le PLF 2014 continue ainsi de traduire l'engagement du Président de la République de recréer 60 000 postes supprimés dans l'éducation par l'ancienne majorité, les créations d'emplois prévues dans le PLF 2014 s'ajoutant à celles décidées dans la loi de finances rectificative du 16 août 2012 pour la rentrée 2012 et aux créations de 10 011 postes dans la LFI 2013 ;

- l'enseignement supérieur , avec la création de 1 000 emplois au sein des universités (en dehors du plafond d'emplois de l'Etat), l'objectif étant de créer 5 000 emplois sur l'ensemble du quinquennat, portant l'objectif de créations d'emplois dans l'enseignement des trois degrés à 65 000 sur cinq ans ;

2) la sécurité et la justice , avec la création de 555 emplois au ministère de la justice (les priorités étant l'administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse, qui bénéficient respectivement de 432 et 78 créations de postes), à laquelle s'ajoutent 35 postes dans les juridictions administratives ; enfin, la création de 405 emplois dans la gendarmerie et la police nationales permettra de renforcer les moyens humains du service public dans les zones de sécurité prioritaires.

Tableau n° 64 : Répartition par ministère et par mission des entrées et des sorties d'emplois

(en ETP)

Ministère

Mission

Entrées prévues

Sorties prévues

dont départs en retraite

Schéma d'emplois

Affaires étrangères et européennes

3 230

3 426

229

-196

Action extérieure de l'État

2 480

2 630

214

-150

Aide publique au développement

750

796

15

-46

Affaires sociales et santé

708

931

361

-223

Solidarité, insertion et égalité des chances

708

931

361

-223

Agriculture, agroalimentaire et forêt

1 436

1 517

780

-81

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

674

905

439

-231

Enseignement scolaire

635

485

274

150

Recherche et enseignement supérieur

127

127

67

0

Culture et communication

727

810

330

-83

Culture

727

810

330

-83

Défense et anciens combattants

24 868

32 749

7 255

-7 881

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

145

218

63

-73

Défense

24 723

32 531

7 192

-7 808

Écologie, développement durable et énergie

1 360

1 982

1 078

-622

Contrôle et exploitation aériens

171

271

271

-100

Écologie, développement et aménagement durables

1 189

1 711

807

-522

Économie, finances et industrie

5 674

8 238

4 540

-2 564

Économie

905

1 045

456

-140

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

4 769

7 193

4 084

-2 424

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

49 671

40 867

21 093

8 804

Enseignement scolaire

49 671

40 867

21 093

8 804

Égalité des territoires et logement

482

1 179

668

-697

Égalité des territoires, logement et ville

482

1 179

668

-697

Enseignement supérieur et recherche

706

706

329

0

Recherche et enseignement supérieur

706

706

329

0

Intérieur

22 765

23 054

5 915

-289

Administration générale et territoriale de l'État

5 444

6 079

1 089

-635

Sécurité

17 321

16 975

4 826

346

Justice

4 223

3 668

1 683

555

Justice

4 223

3 668

1 683

555

Outre-mer

4 476

4 255

2

0

Outre-mer

4 476

4 255

2

0

Redressement productif

120

122

19

-2

Recherche et enseignement supérieur

120

122

19

-2

Services du Premier ministre

1 306

1 170

181

136

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

0

0

0

0

Conseil et contrôle de l'État

518

448

126

70

Direction de l'action du Gouvernement

740

667

29

73

Politique des territoires

24

25

1

-1

Publications officielles et information administrative

24

30

25

-6

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

388

525

325

-137

Travail et emploi

388

525

325

-137

Total

122 140

125 199

44 788

-3 280

Source : ministère du budget

Les 13 123 suppressions d'emplois se répartissent entre le ministère de la défense (- 7 881 postes, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi de programmation militaire) et les autres ministères (- 5 242 postes), dont près de la moitié au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (- 2 564 postes). Les tableaux ci-après détaillent la répartition par mission de la réduction annuelle du plafond d'emplois ou taux d'effort. Pour les missions non prioritaires, le taux d'effort s'élève à 2,2 % en moyenne.

Tableau n° 65 : Schémas d'emploi 2014 et taux d'effort des missions du budget général de l'Etat

(en ETP)

Schémas d'emplois par ministères
(budget général)

Schémas d'emplois

2014

Taux d'effort

2014

Affaires étrangères

- 196

- 1,4 %

Affaires sociales et santé

- 223

- 2,0 %

Agriculture, agroalimentaire et forêt

- 81

- 0,3 %

Enseignement agricole

150

0,9 %

Hors enseignement agricole

- 231

- 1,7 %

Culture et communication

- 83

- 0,8 %

Défense

- 7 881

- 2,9 %

Ecologie, développement durable, énergie

- 522

- 1,4 %

Economie et finances

- 2 564

- 1,7 %

Education nationale

8 804

0,9 %

Egalité des territoires et logement

- 697

- 5,2 %

Enseignement supérieur et recherche

0

0,0 %

Intérieur

- 289

- 0,1 %

Police et gendarmerie nationales

405

0,2 %

Hors police et gendarmerie nationales

- 694

- 1,9 %

Justice

555

0,7 %

Outre-mer

0

0,0 %

Redressement productif

- 2

- 0,2 %

Services du Premier ministre

142

1,5 %

Juridictions administratives

35

0,9 %

Autres services du Premier ministre

71

1,2 %

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

- 137

- 1,4 %

Total

- 3 174

- 0,2 %

dont priorités

9 949

0,8 %

autres

- 13 123

- 2,2 %

Source : commission des finances, d'après réponses au questionnaire budgétaire

b) Une progression limitée de la masse salariale

Hors pensions, la masse salariale de l'Etat (y compris les budgets annexes) s'élève à 81,373 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2014, en hausse de 546 millions d'euros (soit 0,67 %) par rapport au retraité 2013, à périmètre constant.

Les schémas d'emplois 2013 et 2014 ont un impact global de - 78,2 millions d'euros : ce solde combine notamment l'effet de l'extension en année pleine des créations d'emplois dans l'éducation nationale, à la rentrée 2013 (impact du schéma d'emplois 2013 sur l'évolution de la masse salariale en 2014 : + 42,2 millions d'euros) et le solde net de suppressions d'emplois en 2014 (impact du schéma d'emplois 2014 : - 120,4 millions d'euros).

La faible progression des dépenses salariales traduit un effort important sur les mesures catégorielles, qui devraient avoir un impact de seulement + 274,3 millions d'euros en 2014 ( cf . tableau ) , en diminution par rapport à 2013 (+ 312,7 millions d'euros) et en baisse de plus de 50 % par rapport à 2011, du fait de l'extinction programmée du « retour catégoriel » 142 ( * ) aux agents des économies induites par les suppressions d'emplois. Il s'agit du plus faible montant d'enveloppes catégorielles depuis 1995, comme le montre le graphique ci-dessous.

Graphique n° 66 : Montant des enveloppes catégorielles depuis 1995

(en millions d'euros)

Source : Bernard Pêcheur, rapport au Premier ministre sur la fonction publique, octobre 2013, p. 193, d'après les documents budgétaires des PLF et des PLFR et le ministère du budget

La moitié de l'impact en 2014 des mesures catégorielles provient de mesures décidées en 2013 (à hauteur de 126 millions d'euros sur un total de 268 millions d'euros 143 ( * ) de mesures catégorielles pour les missions du budget général de l'Etat), notamment la mise en oeuvre du nouvel espace statutaire des personnels de catégorie B et la revalorisation rémunérations des enseignants en début de carrière.

Les mesures catégorielles proposées dans le PLF 2014 poursuivent l' objectif d'atténuation des inégalités salariales, notamment à travers la revalorisation des personnels de catégorie C , qui donneront lieu à des discussions avec les partenaires sociaux, mais d'ores et déjà provisionnées dans le PLF 2014.

Outre les mesures catégorielles, bénéficiant notamment aux agents de catégorie B et de catégorie C, les mesures de revalorisation des bas salaires constituent un autre facteur de hausse de la masse salariale, à hauteur de 80,3 millions d'euros dans le PLF 2014 .

Tableau n° 67 : La répartition par ministère des mesures catégorielles proposées dans le PLF 2014

(en millions d'euros)

Ministère

2014 (1)

Affaires étrangères

3,5

Affaires sociales et santé

3,0

Agriculture, agroalimentaire et forêt

5,0

Culture et communication

2,2

Défense

41,4

Ecologie, développement durable et énergie

11,1

Economie et finances

30,5

Education nationale

90,0

Egalité des territoires et logement

3,9

Intérieur

60,1

Justice

9,8

Outre-mer

0,5

Redressement productif

0,1

Services du Premier ministre

2,4

Travail emploi, formation professionnelle et dialogue social

2,1

Total budget général

267,8

Contrôle et exploitations aériens

6,4

Publications officielles et information administrative

0,1

Total budgets annexes

6,5

TOTAL

274,3

(1) Données PAP 2014

Source : ministère du budget

Les autres facteurs de hausse de la masse salariale sont :

1) un glissement vieillesse-technicité (GVT) « solde » 144 ( * ) positif (+ 160,2 millions d'euros), en baisse par rapport au PLF 2013 (+ 219,7 millions d'euros) ;

2) les mesures de revalorisation des bas salaires (+ 80,3 millions d'euros) ;

3) 149,9 millions d'euros de surcoût lié au mécanisme de garantie individuelle du pouvoir d'achat ( GIPA 145 ( * ) ). Le montant de la GIPA progresse de 117 % par rapport aux prévisions du PLF 2013, dans un contexte de non-revalorisation du point d'indice de la fonction publique.

La rubrique hétérogène des « autres mesures » représente enfin une économie budgétaire de 40,6 millions d'euros en 2014 , associée à des mécanismes divers : des économies attendues au titre des compléments de rémunération versées aux soldats intervenant sur les théâtres d'opérations extérieures, ou encore l'impact des retenues pour faits de grèves dans l'éducation nationale.

Tableau n° 68 : Les facteurs d'évolution de la masse salariale de l'Etat

(en millions d'euros)

Source : commission des finances (d'après le ministère du budget)

Cette quasi-stabilité de la masse salariale répond à l'objectif figurant dans la loi de programmation pour les finances publiques sur la période 2012-2017, dont le rapport annexé précise que « [la] stabilisation des effectifs contribuera à maîtriser la masse salariale, dont l'évolution sera sur la période de + 1 % en valeur entre 2012 et 2015 » 146 ( * ) .

Le retraité 2013 exclut des éléments récurrents (comme la GIPA) qui figurent, en revanche, dans les prévisions de dépenses de personnel du PLF 2014. A périmètre constant, l'évolution entre 2013 et 2014 est de l'ordre de 0,4 %. L'évolution 2012-2013 est estimée à - 0,2 %, compte tenu de la réévaluation des départs en retraite en 2013 qui devrait entraîner une diminution de la masse salariale en 2013 par rapport aux prévisions de la LFI.

Par rapport à 2012, à périmètre constant, il est prévu une progression de la masse salariale progressé de 0,2 % entre 2012 et 2014, ce qui devrait donc permettre d'atteindre largement l'objectif de la LPFP d'une augmentation de 1 % sur la période 2012-2015.

Compte tenu du contexte budgétaire, le projet de loi de finances pour 2014 ne prévoit pas de revalorisation du point d'indice de la fonction publique ; pour mémoire, une revalorisation de 1 % aurait un impact de 852 millions d'euros en année pleine pour le budget général de l'Etat, et de 1,9 milliard d'euros pour les trois fonctions publiques.

c) L'impact de la réforme des retraites sur les pensions versées aux agents de l'Etat
(1) Des dépenses dynamiques impliquant un besoin de financement élevé à long terme

Le détail de l'évolution des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions » figure dans le rapport spécial de notre collègue Francis Delattre.

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », institué par l'article 21 de la LOLF, permet de retracer les opérations relatives aux pensions civiles et militaires de retraite des agents de l'Etat et avantages accessoires dans un compte unique. Les crédits du CAS « Pensions » augmentent en 2013 de 0,5 milliard d'euros pour s'établir à 57,3 milliards d'euros, soit une hausse de 0,9 %.

Le « besoin de financement actualisé » mesure les réserves qui seraient en théorie nécessaires aujourd'hui, en étant placées au taux d'intérêt du marché, pour faire face à l'ensemble des décaissements nécessaires pour combler les déficits anticipés. Les hypothèses de calcul se fondent sur la masse des prestations et des cotisations anticipées à législation constante, sur la base de taux de cotisations inchangés. Néanmoins, l'exercice de projection impose de choisir un ensemble d'hypothèses démographiques (évolution de la population active, tables de mortalité, taux de fécondité, etc.) et macroéconomiques (croissance, évolution des salaires, etc.).

Sur la base d'un taux d'actualisation médian de 0,35 %, le besoin de financement, actualisé à 100 ans 147 ( * ) , s'élève à 431 milliards d'euros au 31 décembre 2012, contre 505 milliards d'euros fin 2011. L'évolution de ce montant s'explique notamment par l'augmentation des taux de contribution des employeurs de fonctionnaires de l'Etat (figés sur toute la période de projection aux taux en vigueur à la date d'évaluation) et par la poursuite de la fiabilisation des effectifs de cotisants fournis par l'Insee suite au changement de système d'information concernant les agents de la fonction publique d'Etat.

Le graphique ci-après illustre l'évolution annuelle de la masse des prestations du régime et décompose son financement entre les cotisations salariales et contributions des employeurs à droit constant ainsi que le besoin supplémentaire de financement annuel. Il indique également le besoin de financement actualisé cumulé sur la période de projection 2013-2112.

Graphique n° 69 : Financement des retraites du régime des fonctionnaires de l'Etat et des militaires

(en milliards d'euros)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

(2) L'impact des réformes sur les dépenses de pensions

En application de la réforme des retraites du 9 novembre 2010, le régime de retraite des agents de l'Etat a été modifié sur deux points principaux :

- la mise en oeuvre des mesures transversales d'augmentation progressive de l'âge légal de départ de 60 à 62 ans, ainsi que la hausse de l'âge d'annulation de la décote de 65 à 67 ans ;

- des mesures spécifiques de convergence vers les paramètres des régimes de droit commun, en particulier l'évolution des modalités de calcul du minimum garanti, la mise en extinction progressive du départ anticipé des fonctionnaires parents de 3 enfants après 15 ans de carrière et la hausse progressive du taux de cotisation salariale des fonctionnaires, suivant un relèvement de ce taux de 0,27 point chaque année pour atteindre en 2020 le taux en vigueur pour les régimes de droit commun (10,55 %), alors que le taux initial s'élevait à 7,85 %.

En 2014, les économies résultant de la réforme des retraites pour les fonctionnaires de l'Etat sont évaluées par le Gouvernement à 1,32 milliard d'euros , correspondant à 0,67 milliard d'euros de moindres dépenses (au titre des mesures d'âge et des mesures de convergence entre les régimes public et privé) et à 0,65 milliard d'euros de recettes supplémentaires , du fait de l'alignement du taux de cotisation.

Le décret du 2 juillet 2012 148 ( * ) a prévu l'assouplissement du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue par rapport à la réglementation antérieure : la condition de début d'activité a été élargie aux assurés ayant commencé à travailler avant 20 ans et les conditions de validation de la durée d'assurance ont été assouplies.

L'élargissement de ce dispositif est financé par une hausse des cotisations vieillesse de 0,5 point :

- 0,2 point dès le 1 er novembre 2012, réparti à parts égales entre les salariés (0,1 point) et les employeurs (0,1 point) ;

- 0,1 point les trois années suivantes à partir du 1 er janvier 2014, réparti à parts égales entre les salariés (0,05 point) et les employeurs (0,05 point).

En 2012, cette mesure a permis à 1 300 fonctionnaires de la fonction publique d'Etat d'anticiper leur départ en retraite. Les prévisions de flux de départs supplémentaires s'élèvent à 1 500 fonctionnaires en 2013-2014, avant d'atteindre un pic de 2 000 fonctionnaires en 2015 puis de diminuer progressivement pour atteindre 0 en 2018. L'impact sur les dépenses a été limité en 2012 à 5 millions d'euros, du fait d'une application sur seulement deux mois. Il est estimé à 60 millions d'euros en 2013, 85 millions d'euros en 2014 et 200 millions d'euros en 2015, avant de décroître après cette date.

Enfin, le décalage de six mois de la revalorisation des pensions représente une économie budgétaire évaluée à 200 millions d'euros en 2014 pour la fonction publique d'Etat .

2. Les économies sur les dépenses de fonctionnement

Sur les 8,5 milliards d'euros d'économies prévues dans le PLF 2014 par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses de l'Etat, les dépenses de fonctionnement et de personnel représentent une économie de 2,6 milliards d'euros. Ces économies se répartissent entre 1,7 milliard d'euros au titre des dépenses de personnel (81 milliards d'euros dans le PLF 2014, hors pensions) et 0,9 milliard d'euros pour les dépenses de fonctionnement retenues dans ce champ de dépenses ( 18 milliards d'euros dans le PLF 2014 149 ( * ) ), soit une économie de 5 % de ces dépenses de fonctionnement par rapport à leur évolution tendancielle.

Le tableau ci-après apporte des exemples de ces économies, mieux documentées que dans les documents budgétaires associés au PLF 2013 .

Selon les ministères, ces économies recouvrent des champs variés d'activité courante : dépenses immobilières, déplacements, communication, fournitures, etc.

S'il s'agit de sommes relativement réduites, les réductions de crédits n'en sont pas moins significatives en proportion.

Par ailleurs, s'agissant des économies de fonctionnement sur les dépenses des opérateurs, le manque d'exemples les concernant traduit certaines lacunes dans le suivi des mesures prises, compte tenu des lacunes dans l'information comptable actuelle : en particulier, les subventions pour charges de service public ne sont pas ventilées par nature de dépenses (personnel, fonctionnement, interventions, investissement).

Tableau n° 70 : Exemples d'économies sur les dépenses de fonctionnement des ministères proposées dans le PLF 2014

(en millions d'euros)

Mission

Poste

Montant des économies

Action extérieure de l'Etat

Rationalisation et valorisation du parc immobilier à l'étranger

22

Administration générale et territoriale de l'Etat

Baisse des dépenses de fonctionnement des services centraux et préfectoraux

7

Défense

Baisse des dépenses de fonctionnement (rationalisation des structures, optimisation de l'organisation, frais de déplacement et de communication)

100

Gestion des finances publiques et des ressources humaines de l'Etat

Dépenses d'entretien immobilier

35

Impression des documents budgétaires

1

Justice

Optimisation des frais de justice

45

Source : documents budgétaires

3. Les économies sur les dépenses d'intervention et d'investissement

Près d'un tiers (2,6 milliards d'euros) de l'ensemble des économies sur les dépenses de l'Etat (8,5 milliards d'euros) par rapport à leur évolution tendancielle portent sur les dépenses d'investissement et les interventions de l'Etat , au sein d'un ensemble de dépenses qui s'élève à 78 milliards d'euros dans le PLF 2014, soit une économie de plus de 3 % par rapport à l'évolution tendancielle .

Dans cet ensemble, les dépenses d'intervention s'élèvent à 65,8 milliards d'euros, réparties entre les interventions de guichet 150 ( * ) (38,9 milliards d'euros) et les autres dépenses d'interventions discrétionnaires (26,9 milliards d'euros) 151 ( * ) .

Les dépenses de guichet représentent une dépense dynamique et rigide, du fait, d'une part, de l'automaticité des versements aux bénéficiaires dès lors que les conditions fixées par la loi et la réglementation sont remplies et, d'autre part, de l'indexation automatique de la plupart de ces dispositifs.

Entre la LFI 2013 et le PLF 2014, la progression de ces dépenses, à périmètre constant, s'élève à 1,15 milliard d'euros (soit + 3 %).

La progression de ces dépenses est toutefois limitée par plusieurs mesures d'économies figurant dans le PLF 2014 :

- le recentrage des exonérations outre-mer sur les bas salaires, pour lesquelles elles sont les plus efficaces (soit une économie prévisionnelle de 90 millions d'euros) ;

- la désindexation des aides au logement en 2014 (soit une économie de 177 millions d'euros) ;

- une diminution de 20 % du taux de majoration spécifique des rentes mutualistes (30 millions d'euros).

Les dépenses d'intervention hors guichet diminuent de 0,9 milliard d'euros entre la LFI 2013 et le PLF 2014 (soit - 3 %).

Le PLF 2014 propose un recentrage des dispositifs en fonction de leur efficacité, notamment sur les postes suivants :

- les aides au transport postal (soit une économie de 100 millions d'euros) ;

- la stabilisation des engagements du fonds unique interministériel (représentant une économie de 50 millions d'euros) ;

- la suppression de la prime d'apprentissage et la création d'une nouvelle prime pour les entreprises de moins de 10 salariés (550 millions d'euros) ;

- la baisse des contributions de la France aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix (43 millions d'euros), par une baisse des taux de contribution et des efforts d'économies sur les dépenses.

Les dépenses d'investissement civil de l'Etat diminuent de 0,3 milliard d'euros, de 3,3 milliards d'euros en LFI 2013 (au périmètre du PLF 2014) à 3 milliards d'euros en PLF 2014, en raison notamment des opérations suivantes :

- l'arrêt des grands chantiers culturels annoncés par le précédent Gouvernement (à hauteur de 55 millions d'euros), comme la Maison de l'histoire de France ;

- la révision de la programmation immobilière pénitentiaire (12 millions d'euros), dans le cadre d'un changement de cap de la politique publique de la justice et de la sécurité visant à privilégier les peines alternatives à l'incarcération ;

- la révision de la programmation immobilière du ministère de la recherche (30 millions d'euros) ;

- la renégociation du contrat de concession du Stade de France (16 millions d'euros).

Par ailleurs, l'article 17 de la LPFP a rendu obligatoire l'évaluation socio-économique des projets d'investissement et, pour les plus importants d'entre eux, une contre-expertise indépendante. Elle prévoit une communication de ces éléments au Parlement et renvoie à un décret d'application pour déterminer les seuils d'application de cette nouvelle procédure.

En réponse à la question de votre rapporteur général sur l'avancement de ces travaux, le Gouvernement a apporté les précisions suivantes :

« Il y a près d'un an, le Premier ministre a, parallèlement à l'élaboration de la LPFP, demandé au commissaire général à l'investissement (CGI) de proposer une approche transversale et homogène pour mieux contrôler la décision d'investir. C'est sur la base de ces travaux que le Premier ministre a engagé un travail de concertation avant l'été avec l'ensemble des ministères pour s'accorder sur le schéma retenu.

« Le décret d'application est en cours de rédaction et devrait être publié prochainement » 152 ( * ) .

Votre rapporteur général sera vigilant sur l'avancement de ces travaux, en vue de disposer d'éléments d'appréciation objectifs sur les projets d'investissement .

4. Des économies supplémentaires sur la charge de la dette par rapport aux prévisions de la loi de programmation

Dans le PLF 2014, la charge des intérêts de la dette atteint 46,7 milliards d'euros , soit une diminution de 0,2 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013 et de 1,7 milliard d'euros par rapport à la prévision 2014 de la LPFP (48,4 milliards d'euros ). Toutefois, ce montant traduit une augmentation de 1,7 milliard d'euros par rapport au montant de la charge de la dette (45 milliards d'euros) révisé pour 2013 dans les documents annexés au PLF 2014 153 ( * ) .

Graphique n° 71 : Evolution de la charge de la dette de l'Etat

(en milliards d'euros)

PLF 2014 (46,7)

Source : commission des finances

Dans un contexte de remontée attendue des taux d'intérêt, la charge de la dette négociable devrait à nouveau augmenter en 2015. Le taux à 10 ans, qui s'établit à 3,3 % dans les prévisions du PLF 2014, remonterait progressivement et régulièrement pour atteindre 3,65 % en moyenne sur l'année 2015 selon les prévisions de la LPFP. Ces prévisions apparaissent prudentes, le taux à 10 ans s'établissant à 2,25 % en novembre 2013, en deçà des hypothèses de la LPFP (2,9 % en moyenne sur l'année 2013). Il est donc probable que la charge de la dette augmente en 2015, mais dans des proportions inférieures aux prévisions de la LPFP (50,9 milliards d'euros).

Cette situation témoigne d'une confiance des investisseurs dans la politique économique et budgétaire de la France.

III. LE DÉFICIT BUDGÉTAIRE ET SON FINANCEMENT : LA POURSUITE DU REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS

Compte tenu des ressources et des charges dont l'analyse vient d'être développée, le déficit prévisionnel du budget général pour 2014 (hors PIA) s'établit à - 70,47 milliards d'euros. Le solde général lui est supérieur de 0,235 milliard d'euros, et atteint - 70,23 milliards d'euros , en raison de l'excédent des comptes spéciaux et des budgets annexes.

Ce solde général est en amélioration de 2,3 % par rapport à la prévision actualisée de déficit pour 2013 (- 71,88 milliards d'euros).

A. UN LÉGER REDRESSEMENT DU SOLDE BUDGÉTAIRE PAR RAPPORT AU RÉVISÉ 2013

1. L'impact déterminant des économies par rapport à l'évolution tendancielles des dépenses

Le tableau qui suit décompose les facteurs d'amélioration et de dégradation du solde général de l'Etat entre le révisé 2013 et le solde prévisionnel 2014.

Tableau n° 72 : Clé de passage du solde 2013 révisé au solde prévisionnel 2014

(en milliards d'euros)

SOLDE GENERAL REVISE 2013

-71,9

Amélioration

Dégradation

Budget général

Recettes

Recettes fiscales : évolution tendancielle

7,2

Recettes fiscales : mesures antérieures au PLF 2014

-11,0

Recettes fiscales : mesures de périmètre

-1,6

Recettes fiscales : mesures nouvelles PLF 2014

2,3

Recettes non fiscales

-0,1

Dépenses

Evolution tendancielle des dépenses (hors dette et pensions)

-7,0

Economies par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses

8,5

Pensions

-1,4

Charges de la dette

-1,7

Mécanisme européen de stabilité (MES)

3,3

Banque européenne d'investissement

1,6

Budget rectificatif Union européenne 2013

1,8

Autres

-0,6

Budgets annexes

0,0

Comptes spéciaux

0,5

SOLDE GENERAL 2014

-70,2

Source : commission des finances, d'après l'exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2014 Le solde des mesures est légèrement différent de l'amélioration du solde pour des raisons d'arrondi

a) Les facteurs d'amélioration

Par rapport au révisé 2013, le solde général s'améliore de 1,6 milliard d'euros .

Les six composantes de cette amélioration sont les économies réalisées par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses hors dette et pensions (8,5 milliards d'euros) la croissance spontanée des recettes fiscales (7,2 milliards d'euros), les mesures fiscales du PLF 2014 (2,3 milliards d'euros), une moindre dotation au Mécanisme européen de stabilité (MES) par rapport à 2013 (3,3 milliards d'euros), l'absence d'augmentation en 2014 du capital de la Banque européenne d'investissement (1,6 milliard d'euros) et la diminution du prélèvement sur recette au profit de l'Union européenne résultant du contrecoup en 2014 du budget rectificatif 2013 de l'Union européenne (1,8 milliard d'euros).

Par ailleurs, le solde des comptes spéciaux, dont l'évolution est détaillée ci-après, s'améliore de 0,5 milliard d'euros par rapport au révisé 2013.

b) Les facteurs de dégradation

Par rapport au révisé 2013, les principaux facteurs de dégradation du solde résident dans la progression spontanée des dépenses du budget général hors dette et pensions (à hauteur de 7 milliards d'euros) et dans l'impact sur les recettes fiscales des mesures antérieures au PLF 2014 (- 11 milliards d'euros), principalement sous l'effet de la mise en place du CICE (- 9,3 milliards d'euros).

Les dépenses de pension et la charge de la dette entraînent des dégradations du solde à hauteur, respectivement, de 1,4 milliard d'euros et 1,7 milliard d'euros.

Deux mesures de périmètre - correspondant à des transferts aux collectivités territoriales (cf. supra ) - diminuent les recettes fiscales de 1,6 milliard d'euros. Les recettes non fiscales sont en baisse de 0,1 milliard d'euros.

2. L'impact des budgets annexes et des comptes spéciaux
a) Un solde légèrement positif pour les budgets annexes

Le solde des budgets annexes (contrôle et exploitation aériens, publications officielles et information administrative) est attendu à + 9 millions d'euros en 2014 . Leurs ressources sont anticipées à 2,370 milliards d'euros et leurs charges à 2,361 milliards d'euros.

Par rapport au révisé 2013, le solde des budgets annexes s'améliore légèrement (de 7 millions d'euros dans le révisé 2013 à 9 millions d'euros dans le PLF 2014).

b) Un solde des comptes spéciaux quasi-stable

Par rapport au révisé 2013, le solde des comptes spéciaux en 2014 s'améliore légèrement (+ 0,5 milliard d'euros) pour s'établir à + 0,2 milliard d'euros dans le PLF 2014 ( hors PIA ).

Par rapport à la LFI 2013, le solde est toutefois pratiquement stable (- 0,1 milliard d'euros), compte tenu des évolutions suivantes :

- une dégradation du solde du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » (- 0,4 milliard d'euros), en raison de la disparition progressive des recettes de taxe professionnelle ;

- une diminution du solde du compte de concours financiers « Prêts aux Etats étrangers » au regard du programme prévisionnel d'opérations de refinancement (- 0,4 milliard d'euros) ;

- une baisse du solde du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » (- 0,5 milliard d'euros), conformément à la mise en oeuvre pour la période 2013-2020 des engagements résiduels pris par la France ;

- une amélioration du solde du compte d'affectation spéciale « Pensions » (+ 0,1 milliard d'euros) ;

- un retour à l'équilibre du solde du compte d'affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien », qui avait été ponctuellement déséquilibré en 2013 (+ 1,1 milliard d'euros).

Si l'on intègre les PIA, le solde des comptes spéciaux se dégrade de 1,1 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013 , en raison du décaissement à hauteur de 1 milliard d'euros en 2014 au titre des PIA sur le compte de concours financiers « Prêts et avances aux particuliers ou à des organismes privés ». Le solde de ce compte diminue ainsi de 1 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013.

3. Le déficit en comptabilité nationale

Au sens de la comptabilité nationale (correspondant à la part de l'Etat dans le « solde maastrichtien »), le déficit du PLF 2014 s'établit à 67,2 milliards d'euros , en hausse de 0,8 milliard d'euros par rapport au révisé 2013 (qui prévoit un déficit de 66,4 milliards d'euros).

La comptabilité nationale ne prend notamment pas en compte les dotations au Mécanisme européen de stabilité (MES, 6,5 milliards d'euros en 2013) et à la Banque européenne d'investissement (1,6 milliard d'euros en 2013) car elles ne constituent pas des dépenses au sens de la comptabilité nationale, mais des opérations financières n'entraînant pas d'appauvrissement financier de l'Etat.

Le déficit en comptabilité nationale (67,2 milliards d'euros) est inférieur de 15 milliards d'euros au déficit budgétaire (82,2 milliards d'euros ; 70,2 milliards d'euros hors PIA).

Cette différence s'explique par les opérations suivantes :

+ 7,5 milliards d'euros au titre du financement du deuxième volet du PIA (dotations hors ODAC 154 ( * ) , qui ne constituent pas des dépenses en comptabilité nationale) ;

+ 3,2 milliards d'euros correspondant à la dernière dotation au MES ;

+ 2,5 milliards d'euros au titre de l'enregistrement en droits constatés des primes et décotes à l'émission de titres 155 ( * ) et - 0,1 milliard d'euros au titre de la correction en droits constatés relative aux intérêts courus non échus sur les prêts et dettes ;

+ 0,8 milliard d'euros au titre des prêts (nets des remboursements) accordés aux Etats étrangers et des remises de dette en faveur des Etats étrangers ;

+ 0,6 milliard d'euros correspondant à la participation de la France dans les organismes internationaux ;

+ 0,5 milliard d'euros résultant du décalage, en droits constatés, de l'enregistrement de la TVA, en lien avec la réforme des taux de TVA qui n'a un effet en année pleine qu'en comptabilité nationale et non en comptabilité budgétaire ;

+ 0,5 milliard d'euros au titre des dépenses de matériels militaires, enregistrées en comptabilité nationale au moment de leur livraison et non du paiement des avances ;

le rattachement direct à l'Etat en comptabilité nationale des dépenses des fonds de la Caisse des dépôts et consignations au titre du premier PIA (- 0,5 milliard d'euros) ;

- 0,2 milliard d'euros au titre des investissements réalisés sous la forme de partenariats public-privé.

4. Une amélioration du solde par rapport au révisé 2013
a) Un solde budgétaire en légère amélioration

En 2013, la loi de finances initiale prévoyait un déficit de - 61,5 milliards d'euros 156 ( * ) , soit une réduction de 25,6 milliards d'euros par rapport à l'exécution 2012. Ce déficit prévisionnel avait été révisé à 68,3 milliards d'euros lors de la présentation du programme de stabilité, compte tenu de l'impact de la moindre croissance économique sur les recettes fiscales.

Le révisé 2013 prévoit un déficit budgétaire de - 71,9 milliards d'euros, soit une dégradation de - 3,5 milliards d'euros par rapport au programme de stabilité et de - 10,4 milliards d'euros par rapport à la LFI 2013, correspondant au solde des opérations suivantes :

- une hausse du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne (1,8 milliard d'euros) à la suite du deuxième budget rectificatif pour 2013 ;

- une révision à la baisse des charges de la dette de l'Etat (de 1,9 milliard d'euros), suite notamment à la diminution des taux courts ;

- une révision à la baisse des recettes fiscales nettes (- 10,8 milliards d'euros) et des recettes non fiscales (- 0,3 milliard d'euros) ;

- une amélioration du solde du compte d'affectation spéciale « Pensions » (+ 0,8 milliard d'euros) compte tenu du maintien des taux de cotisations au CAS et une révision du solde du compte de concours financiers (CCF) « Avances aux collectivités territoriales » (- 0,2 milliard d'euros) en raison d'une moindre dynamique des recettes des impôts économiques locaux.

Par rapport au révisé 2013, le projet de loi de finances pour 2014 prévoit une amélioration du solde budgétaire de près de 1,7 milliard d'euros 157 ( * ) (hors PIA) .

Graphique n° 73 : L'évolution du déficit budgétaire depuis 2000 (hors PIA)

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances

b) Un déficit primaire en diminution

En 2014, le solde primaire (c'est-à-dire le solde budgétaire hors charge des intérêts de la dette) devrait atteindre - 23,5 milliards d'euros , soit une amélioration de 3,4 milliards d'euros par rapport au révisé 2013 (- 26,9 milliards d'euros).

Graphique n° 74 : L'évolution du solde primaire depuis 2008

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances

c) Un taux de couverture des dépenses par les recettes qui ne retrouve pas encore son niveau d'avant la crise

En 2014 , le taux de couverture des dépenses du budget par ses recettes, qui rapporte les dépenses nettes aux recettes nettes des prélèvements, fonds de concours inclus, atteindrait 76,4 % (hors PIA).

Après avoir chuté à 55,3 % en 2009, le taux de couverture des dépenses par les recettes progresse légèrement par rapport au révisé 2013 (76 %), sans retrouver les niveaux antérieurs à la crise économique (autour de 85 %).

Graphique n° 75 : Taux de couverture des dépenses du budget général par les recettes

Source : commission des finances

B. LE FINANCEMENT DE L'ÉTAT EN 2014

1. L'impact du déficit budgétaire sur l'endettement
a) Du déficit à la variation de l'encours

Le besoin annuel de financement de l'Etat résulte de l'addition de son déficit budgétaire et des amortissements de dette à moyen et long termes ou reprise par l'Etat.

Suite aux observations de la Cour des comptes, le tableau de financement est présenté différemment dans le projet annuel de performances annexé au PLF 2014, s'agissant des charges d'indexation et des comptes de dépôt relatifs aux investissements d'avenir, comme l'explique le PAP. Cette nouvelle présentation consiste ainsi à faire figurer en besoin de financement des éléments auparavant inscrits en ressources, en créant en conséquence deux nouvelles lignes en besoin de financement : « Dotations budgétaires au titre des investissements d'avenir » et « Autres besoins de trésorerie ». Ces modifications doivent être saluées, dans la mesure où la charge d'indexation est sans lien avec l'impact en trésorerie de la gestion budgétaire et qu'il n'était guère lisible de retracer les investissements d'avenir à la fois en besoin et en ressources de financement.

Le besoin de financement de l'Etat atteindra 177 milliards d'euros en 2014, soit une diminution de 8,8 milliards d'euros (- 4,7 %) par rapport au révisé 2013 . Il résultera du déficit budgétaire (70,2 milliards d'euros), des amortissements à moyen et long termes (104,8 milliards d'euros), des autres besoins de trésorerie (1,8 milliard d'euros) et, de manière résiduelle, des amortissements de dettes reprises par l'Etat (0,2 milliard d'euros).

Tableau n° 76 : Tableau de financement de l'Etat

(en milliards d'euros)

PS : le besoin et les ressources de financement atteignaient 172,3 milliards d'euros dans le texte de le LFI 2013 mais s'élèvent à 171,3 milliards d'euros (comme figurant dans le tableau ci-dessus) après ajustement pour prise en compte des rachats effectués en fin d'année 2012.

* Charges budgétaires d'indexation et décaissements au titre des investissements d'avenir

Source : PAP de la mission « Engagements financiers de l'Etat »

Le déficit budgétaire prévisionnel comptera ainsi pour 40 % du besoin de financement total, alors que les amortissements de dette à moyen et long termes en représenteront 59 %. En 2009 et 2010, le déficit budgétaire de l'exercice avait suscité un besoin de financement supérieur à celui que génère annuellement l'amortissement des titres (à hauteur de 55 % du besoin de financement total en 2009 et de 63 % en 2010). Autrement dit, en 2014, l'Etat empruntera à hauteur des deux cinquièmes afin de financer son nouveau déficit et pour trois cinquièmes afin de refinancer les déficits passés.

Estimée à 1 438,8 milliards d'euros en valeur nominale à fin 2013, l'encours total de la dette de l'Etat devrait atteindre 1 508 milliards d'euros à fin 2014, soit une augmentation de 69,2 milliards d'euros (+ 4,8 %) .

En valeur actualisée , c'est-à-dire en prenant en compte le supplément d'indexation à la date considérée pour les titres indexés, l'encours passerait de 1 459 milliards d'euros à 1 531,2 milliards d'euros entre fin 2013 et fin 2014 (+ 4,9 %) . Rappelons que l'encours total en valeur actualisée était de 921 milliards d'euros fin 2007 et avait atteint 1 386,2 milliards d'euros fin 2012 . Il avait ainsi enregistré une augmentation de 51 % au cours de la période 2007-2012 correspondant à la précédente législature. Depuis 2012, sa progression devrait nettement se ralentir (+ 10 % sur deux ans entre fin 2012 et fin 2014).

Graphique n° 77 : Evolution de l'encours de la dette et de sa structure

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

b) Une diminution continue de l'endettement à court terme

Compte tenu des prévisions d'émissions à moyen et long termes et de variation des BTF figurant dans les tableaux de financement pour 2013 et pour 2014, l'encours de la dette négociable devrait évoluer comme indiqué dans le tableau qui suit.

Tableau n° 78 : Evolution de l'encours de la dette négociable

(en milliards d'euros)

Encours

fin
2011

fin
2012

fin
2013
(estimation)

fin
2014
(prévision)

Ensemble de la dette - valeur nominale

1 293,9

1 365,5

1 438,8

1 508,0

OAT et BTAN

1 116,1

1 198,9

1 264,1

1 333,3

BTF

177,8

166,6

174,7

174,7

Supplément d'indexation à la date considérée

19,1

20,7

20,2

23,2

Ensemble de la dette - valeur actualisée *

1 313,0

1 386,2

1 459,0

1 531,2

* nominal pour les titres à taux fixe ; nominal × coefficient d'indexation à la date considérée pour les titres indexés

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Ces données confirment que la part de l'endettement à court terme continue à refluer. Après avoir atteint un pic fin 2009 (18,6 % de l'encours total), les bons du Trésor à taux fixe devraient représenter 11,4 % du stock de dette à fin 2014 (174,7 milliards d'euros).

2. Des conditions favorables pour le financement de l'Etat
a) Une augmentation de l'encours des BTF pour compenser un besoin de financement en 2013 supérieur aux prévisions de la LFI

Dans le révisé 2013, les amortissements de dette à moyen et long terme sont réduits de 1,2 milliard d'euros par rapport à la LFI suite aux rachats effectués en fin d'année 2012 (à hauteur de 1 milliard d'euros) et à la diminution des suppléments d'indexation versés à l'échéance sur les titres indexés (2,9 milliards d'euros dans le révisé en 2013, en baisse de 0,2 milliard d'euros par rapport aux prévisions de la LFI 2013).

L'amortissement des autres dettes est révisé à la hausse (de 1,6 milliard d'euros 158 ( * ) à 6,1 milliards d'euros) suite à la décision de reprise de la dette de l'établissement public de financement et de restructuration (EPFR) , d'un montant de 4,48 milliards d'euros qui arrive à échéance le 31 décembre 2014. Un article du prochain projet de loi de finances rectificative pour 2013 devrait comporter soumettre cette reprise de dette à l'approbation du Parlement.

La révision à la hausse du déficit budgétaire (de 61,5 milliards d'euros en LFI à 71,9 milliards d'euros dans le révisé) contribue également à l'augmentation du besoin de financement.

Les autres besoins de trésorerie correspondent, d'une part, à l'évolution des charges budgétaires d'indexation, en augmentation par rapport à la LFI 2013 (de - 3,1 milliards d'euros à - 1,8 milliard d'euros) et, d'autre part, aux décaissements effectués au titre du premier PIA (en diminution de 3,6 milliards d'euros à 2,9 milliards d'euros en 2013 selon les prévisions du Commissariat général à l'investissement).

Au total, le besoin de financement s'élève à 185,8 milliards d'euros en 2013, en hausse de 14,5 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la LFI (171,3 milliards d'euros).

Cette hausse du besoin de financement de l'Etat est compensée par l'augmentation de l'encours des BTF (+ 8,1 milliards d'euros d'euros par rapport au 31 décembre 2012, alors que la LFI prévoyait une diminution de l'encours à hauteur de - 0,3 milliard d'euros), la variation positive du compte du Trésor sous l'effet des rachats de titres arrivant à échéance en janvier 2014 et une augmentation des autres ressources de trésorerie, principalement les primes et décotes à l'émission générées par la baisse des taux (+ 4,6 milliards d'euros dans le révisé par rapport à fin 2012).

La variation des dépôts des correspondants est révisée à la hausse (de + 0,3 milliard à + 2,2 milliards d'euros), en raison notamment de nouvelles hypothèses d'augmentation des encours des collectivités territoriales, alors que la loi de finances initiale anticipait leur stabilisation.

Les prévisions d'émissions de dette à moyen et long terme nettes des rachats en 2013 s'établissent à 169 milliards d'euros, en légère diminution (- 1 milliard d'euros) par rapport au programme d'émissions de la LFI.

Les ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement sont révisées à la baisse (- 4 milliards d'euros par rapport à la LFI), traduisant l'absence de recettes de cessions de participation affectées au désendettement de l'Etat en 2013.

Comme analysé ci-dessus dans la présentation des crédits relatifs à la charge de la dette, le financement de la dette de l'Etat continue de bénéficier de conditions de financement favorables, malgré un début de remontée des taux.

La sensibilité à une augmentation des taux reste toutefois limitée, y compris en 2014, comme l'explique le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'Etat » :

« Après avoir progressé de trois quarts de point entre le début mai et la fin août, le taux à 10 ans français progresserait d'un demi-point d'ici la fin de l'année 2013 et d'encore un demi-point en 2014, atteignant alors 3,5 % en toute fin d'année. Ce scénario est nettement plus prudent que celui du Consensus forecast qui, en septembre, anticipe un niveau de 2,5 % pour le 10 ans français à la fin de 2013 et de 2,6 % à la fin septembre 2014, soit à peine plus que le niveau observé fin août. Il convient de noter que, du fait de l'impact différé et limité d'une variation des taux de marché sur la charge budgétaire des titres à moyen et long terme, un écart, même important, par rapport au scénario retenu n'aurait que peu d'impact sur la charge budgétaire de 2014 » 159 ( * ) .

Compte tenu du faible niveau des taux d'intérêt, l'évolution de la charge de la dette a été nettement moins dynamique que celle de l'encours de la dette négociable , comme le montre le graphique ci-après.

Graphique n° 79 : Evolution comparée 2008-2014 de la charge de la dette et de l'encours de la dette (valeur actualisée)

(en milliards d'euros)

Echelle de gauche : encours de la dette. Echelle de droite : charge de la dette

Source : commission des finances

b) La couverture du besoin de financement en 2014

Les ressources de financement en 2014 proviennent pour l'essentiel des émissions nouvelles de dette à moyen et long terme nettes de rachats qui s'élèvent à 174 milliards d'euros. Elles comprennent également les ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement, fixées à 1,5 milliard d'euros, ainsi que d'autres ressources de trésorerie (0,5 milliard d'euros) qui représentent le montant des suppléments d'indexation perçus à l'émission des titres indexés.

L'encours des BTF est stabilisé, de même que les dépôts des correspondants.

Le solde du compte de Trésor diminuerait de 1 milliard d'euros entre le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2014, correspondant à une augmentation des ressources de financement, en raison de moindres amortissements de la dette de moyen et long terme arrivant à échéance en janvier 2015 par rapport à janvier 2014.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. BERNARD CAZENEUVE, MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DU BUDGET, SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014 (1ER OCTOBRE 2013)

Réunie le mardi 1 er octobre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a procédé à l'audition de M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du Budget, sur le projet de loi de finances pour 2014.

M. Philippe Marini , président . - Nous reprenons nos travaux, après l'examen en deuxième lecture du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale, l'examen d'une proposition de loi relative à la dotation globale de fonctionnement et l'audition de M. Louis Gallois, que nous avons particulièrement questionné sur le deuxième programme d'investissements d'avenir (PIA). Point d'orgue de cette journée, M. Cazeneuve nous présente le projet de loi de finances pour 2014.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué . - Je vous présente les excuses de Pierre Moscovici, empêché. Pour laisser place au débat, je vous dispenserai des quelque 87 pages du discours qui m'avait été préparé et j'irai à l'essentiel.

Le projet de loi de finances pour 2014 répond à trois objectifs, étroitement liés : inverser la courbe du chômage, faire revenir durablement la croissance, redresser nos comptes. La croissance ne reviendra pas si nous ne maintenons pas la trajectoire de redressement de nos comptes publics, et nous n'avons aucune chance de renverser la courbe du chômage sans croissance.

Le contexte a changé depuis l'an dernier. L'objectif du projet de loi de finances pour 2013, qui vous avait été présenté par Pierre Moscovici et mon prédécesseur, était de retrouver notre souveraineté en relevant un triple défi : redresser nos comptes pour gagner en crédibilité, rétablir notre compétitivité qui était dégradée, relancer l'investissement et la demande pour créer de la croissance.

Le redressement des comptes, engagé dès le projet de loi de finances rectificative pour 2012, s'est poursuivi dans le projet de loi de finances pour 2013, afin d'atteindre les objectifs d'ajustement structurel que nous avions pris devant l'Union européenne et les objectifs nominaux que nous nous étions fixés. En 2012, grâce aux gels décidés et aux mesures fiscales, le déficit s'est établi à 4,8 % au lieu de 5,3 %. Notre contribution budget de l'Union européenne nous a notamment empêchés d'atteindre les 4,5 % prévus.

Nous avons mis en oeuvre le pacte de compétitivité, avec le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) ; nous avons réformé le marché du travail grâce à l'accord national interprofessionnel sur la compétitivité et la sécurisation de l'emploi ; nous avons encore réformé en profondeur le financement de notre économie en créant la Banque publique d'investissement (BPI). Le pacte de croissance négocié par le président de la République nous a conduits à mobiliser des fonds structurels européens, à augmenter le capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) et à bénéficier ainsi d'une partie des 60 milliards d'euros de prêts proposés aux pays européens. Nous avons pris des mesures de soutien au pouvoir d'achat : coup de pouce au SMIC, revalorisation de l'allocation de rentrée scolaire.

Après un premier trimestre 2013 décevant, le deuxième a enregistré une croissance de 0,5 %. Nos prévisions de croissance sont de 0,1 % pour 2013 et de 0,9 % pour 2014. Le programme de stabilité prévoyait 1,2 % en 2014, et le consensus des économistes s'établissait en juin à 0,6 %. Notre prévision de 0,9 % se situe à mi-chemin. Le Haut Conseil des finances publiques considère cette hypothèse comme plausible. Nous l'estimons prudente, et avons construit notre budget sur cette base.

Celui-ci reflète notre volonté résolue de réduire les déficits. Le déficit nominal a été de 5,3 % en 2011 et de 4,8 % en 2012. Nous escomptons 4,1 % en 2013 et 3,6 % en 2014, et 1,2 % en 2017. Nous procédons, depuis le début du quinquennat, à un effort structurel important et continu : 1,3 % en 2012, 1,7 % en 2013, puis de 1 % pour 2014. Nous faisons en 2014 un effort exceptionnel d'économie en dépenses (9 milliards d'euros pour l'Etat, 6 milliards pour la sphère sociale). Ce dernier chiffre résulte d'abord d'un effort important de maîtrise des dépenses d'assurance-maladie. En 2012 nous avons été à un milliard d'euros en dessous de l'objectif national de dépenses d'assurance-maladie (Ondam) fixé par nos prédécesseurs. En 2013, ce devrait être 500 millions d'euros. L'Ondam croîtra de 2,4 % en 2014, et les économies sur l'assurance-maladie atteindront 3 milliards d'euros. Les mesures que nous avons prises sur le régime général des retraites dégageront 2 milliards d'euros d'économie. Ajoutez à cela un milliard en raison des négociations sur les régimes complémentaires AGIRC-ARCO, ainsi que de la renégociation des contrats d'objectifs et de gestion de certains organismes de sécurité sociale, rendue possible par l'usage des technologiques numériques, ou encore de la négociation entre les partenaires sociaux sur l'Unedic, et nous arrivons à 6 milliards d'euros !

Nous avons engagé avec les ministres la négociation sur le budget 2014 avec pour objectif, non de jouer du rabot pour atteindre arithmétiquement un objectif d'économies fixé, mais d'engager une réflexion très approfondie sur chaque budget et de susciter des réformes d'organisation et de structure, afin d'inscrire ce dialogue dans une perspective de long terme. La modernisation de l'action publique (MAP) nous a considérablement aidés. Par exemple, 50 % des préconisations relatives aux aides aux entreprises ont été intégrées au budget 2014. La réflexion engagée sur les opérateurs de l'État a abouti au plafonnement des taxes affectées aux organismes consulaires et nous a donné une évaluation plus précise de leur niveau de trésorerie, ce qui a dégagé plus de 300 millions d'économies. De même, un meilleur ciblage des exonérations dont bénéficiaient les entreprises situées outre-mer a dégagé 90 millions d'euros d'économies. Le prélèvement de 90 millions d'euros sur le Centre national du cinéma et de l'image animée résulte aussi de la MAP.

Les administrations centrales de l'État voient leurs dépenses de fonctionnement diminuer de 2 % en moyenne. Les mesures catégorielles dont bénéficient les fonctionnaires sont divisées par deux, et le point de la fonction publique reste gelé depuis plusieurs années - reconnaissons que les fonctionnaires fournissent un effort important. Les effectifs sont maîtrisés, même si nous avons procédé à 29 000 recrutements dans les secteurs prioritaires tels que l'éducation nationale, la justice et la police, qui ne sont pas pour autant exemptés de l'effort global d'économie. Nous avons en effet supprimé davantage de postes dans d'autres administrations. Ainsi, en 2014, nous créons 10 979 emplois, tout en en supprimant plus de 13 000 dans d'autres administrations, dont 7 000 au ministère de la défense, et plus de 2 500 au ministère de l'économie et des finances.

A titre d'exemple, trois administrations centrales ont accompli des efforts emblématiques. Le ministère de la justice a économisé 45 millions d'euros en réformant les frais de justice, notamment en modifiant les marchés relatifs aux recherches de traces et en mettant en place une plateforme d'entraide judiciaire. La direction générale des finances publiques dégage à elle seule 50 millions d'euros d'économies grâce à la dématérialisation - y compris dans la procédure budgétaire, où le volume de papier utilisé a été divisé par deux. Aux affaires étrangères, enfin, le regroupement de services culturels et consulaires dans des locaux redimensionnés, a dégagé des économies de fonctionnement d'environ 20 millions d'euros. Ces économies ne se font certes pas sans effort ni sans drame, mais elles ont un sens, une cohérence et s'inscrivent dans la durée.

Les ressources des opérateurs de l'État ont augmenté de 15 % ces dernières années et les dépenses de personnel, de 6 %. Le budget 2014 prévoit une diminution de 4 % de leurs ressources, notamment grâce à des regroupements : nous créons par exemple un opérateur unique de la jeunesse, et les opérateurs de la biodiversité seront regroupés au sein d'une même entité en 2015, afin d'en faire autant à moindre coût. Nous diminuons les budgets de certains opérateurs, qui avaient bénéficié de taxes affectées dont le dynamisme avait alimenté des fonds de roulement devenus fort dodus. Ainsi, le produit des taxes affectées à l'ADEME avait augmenté de près de 70 % en quelques années, et son fonds de roulement était passé de 60 à 300 millions d'euros entre 2003 et 2013. Sans porter atteinte à son action, nous avons pu effectuer un prélèvement. De même, les agences de l'eau subissent un prélèvement qui ne remet pas en cause leur fonctionnement compte tenu du niveau de leur fonds de roulement. Nous avons revu également nos politiques d'intervention et d'investissement, afin d'économiser 3 milliards d'euros.

Nous faisons beaucoup d'efforts pour alléger la fiscalité des entreprises. La mise en place du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) allège les charges nettes qui pèsent sur celles-ci de 10 milliards d'euros en 2014. Au titre du budget 2013, 4,5 milliards d'euros avaient été prélevés sur les entreprises qui ne le seront pas en 2014. Nous ne reconduisons pas la totalité des mesures prises l'an dernier. Outre la mesure de rendement de 2,5 milliards d'euros sur laquelle je reviendrai dans un moment, nous cherchons à trouver un milliard en luttant contre la fraude, notamment grâce à la mise en oeuvre des préconisations du rapport de l'Inspection générale des finances sur les prix de transfert. Le milliard d'euros de cotisations des entreprises destiné à financer la réforme des retraites sera intégralement compensé dans le budget 2014. Par rapport à l'année dernière, l'effort fiscal demandé aux entreprises sera moindre, et bien moindre si l'on tient compte des 10 milliards d'euros d'allègements de charges résultant du CICE. Nous faisons bien tout pour que nos entreprises retrouvent leur compétitivité.

Notre réforme de la fiscalité des entreprises s'inspire de la philosophie suivante : nous avons raisonné sur quatre impôts : l'impôt forfaitaire annuel (IFA) et la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), qui pèsent sur la production, et l'impôt sur les sociétés (IS) ainsi que l'impôt sur les dividendes ; nous avons écarté une augmentation de la taxe sur les dividendes de 3 % créée l'an dernier, car cela enverrait un signal négatif à ceux qui contribuent au financement de l'économie française en investissant dans les entreprises ; nous avons supprimé l'IFA, parce que les impôts pesant sur la production taxent des entreprises dont le chiffre d'affaires peut être important mais le résultat, faible. Mieux vaut un impôt sur l'excédent brut d'exploitation, même si cette assiette prend en compte les amortissements, ce qui pourrait pénaliser l'investissement. La concertation engagée avec les entreprises se poursuivra à la faveur des assises de l'entrepreneuriat annoncées par le président de la République. Nous sommes ouverts à tous ajustements techniques pour faire en sorte que cet impôt nouveau ne pénalise pas l'investissement.

Nous mettrons en place un nouveau régime pour les plus-values mobilières ainsi qu'un nouveau dispositif concernant les jeunes entreprises innovantes. Le taux réduit de TVA pour la construction de logements sociaux et les petites réparations, le taux réduit de TVA sur la rénovation thermique, que nous introduirons par amendement, le taux réduit de TVA pour le logement intermédiaire réalisé par les institutionnels et le nouveau régime fiscal des plus-values immobilières sont autant de dispositifs servant nos objectifs. Enfin, la contribution énergie-climat financera le CICE.

Nous ne prenons pas de mesures à caractère général envers les ménages, à l'exception de la ré-indexation du barème de l'impôt sur le revenu et de la mise en place d'une décote. Il s'agit de corriger une injustice qui a contribué, avec la remise en cause de la demi-part des veuves, à l'entrée dans le barème de Français qui n'avaient pas vocation à y entrer. Toutefois, le nombre de Français entrant dans ce barème s'est élevé en 2011 à 2,6 millions, en 2012 à 2,9 millions, et à 2,6 millions en 2013. Ces chiffres proviennent de la direction générale des finances publiques, et je vous invite à venir les vérifier sur pièces et sur place. Nous vous communiquerons la totalité des tableaux.

Nous modifions le quotient familial pour combler le déficit de 2,5 milliards d'euros de la branche famille et financer certaines mesures du plan contre la pauvreté, la création de 270 000 places et solutions d'accueil pour les jeunes enfants, l'augmentation de l'allocation de soutien familial et du complément familial. Pour financer la réforme des retraites, nous augmentons la cotisation des salariés et nous fiscalisons la majoration de pension de 10 % pour les familles ayant élevé trois enfants. La mesure sur la fiscalité des complémentaires santé dans le cadre d'un contrat collectif d'entreprise est destinée à la généralisation des complémentaires-santé. Chacune de ces dispositions a pour objectif de sauver le modèle social français.

J'ai réservé les collectivités territoriales pour la fin, puisque nous sommes au Sénat. Nous diminuons les dotations qui leur sont allouées d'1,5 milliard d'euros, ce qui est considérable. Le pouvoir de taux des collectivités locales varie significativement aux termes des différentes lois de décentralisation : celui des communes ou des intercommunalités est fort, celui des régions, plus faible ; les départements, qui en ont encore un peu, font face à de très lourdes dépenses contraintes qui obèrent leur capacité d'action. Nous avons donc fait porter 56 % de l'effort à la strate communale et intercommunale, 32 % aux départements et 12 % aux régions.

Dans le même temps, nous avons décidé de signer un pacte de confiance et de responsabilité avec les collectivités territoriales, afin d'apurer la situation passée. La négociation a bénéficié d'un consensus relatif : avec les départements, nous avons trouvé un accord satisfaisant l'ensemble des participants à la négociation. Ceux-ci devaient faire face à des dépenses contraintes très dynamiques au titre de la prestation de compensation du handicap (PCH), de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et du RSA, alors que la crise avait fait baisser leurs recettes. Il a été décidé de leur transférer des frais de gestion dynamiques adossés à des impôts locaux, ainsi qu'un pouvoir de taux sur les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), faisant passer le plafond de 3,8 % à 4,5 %. Comme l'assiette de ceux-ci sera dynamisée du fait de la réforme des plus-values immobilières, les départements pourront mieux faire face à leurs dépenses.

Pour les régions, nous avons décidé de remplacer la dotation générale de décentralisation « formation professionnelle » par des frais de gestion dynamiques ainsi qu'une part de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE). Nous avons ainsi souhaité que les collectivités locales ne perdent ni leur autonomie ni leur capacité d'investissement, puisqu'elles représentent 65 % de l'investissement national .

M. François Marc , rapporteur général . - Il y a quelques semaines, M. Olli Rehn, commissaire européen en charge des affaires économiques et monétaires, a attiré notre attention sur les exigences qui seraient formulées à l'égard de tous les pays européens. Il y a trois jours, il a déclaré : « Je suis conscient des efforts importants consentis par la France pour restaurer ses finances publiques. Ce projet de loi de finances est marqué par la responsabilité et la prudence ». Le Gouvernement a en effet veillé à rester dans la trajectoire sur laquelle nous nous étions prononcés, en retenant des hypothèses macroéconomiques prudentes, que le Haut Conseil des finances publiques a jugées plausibles. Réduire un déficit très important quand nos concitoyens attendent des actions en faveur de la croissance et de l'emploi, et qu'il faut mettre en musique le dispositif sur la compétitivité et l'emploi, demande bien un sens de la responsabilité. Ce budget révèle une préoccupation de redressement des comptes publics en même temps qu'un souci de l'avenir, puisque le Gouvernement donne la priorité à la jeunesse, sans oublier la justice et la sécurité. Il y a aussi des mesures en faveur du pouvoir d'achat. Ce projet de budget reflète ainsi les vertus du Gouvernement.

Faisant partie des croyants, je m'en tiendrai à une question sur les ajustements de trajectoire annoncés récemment. Serez-vous capable d'atteindre l'objectif d'équilibre du solde structurel en 2017 et l'objectif d'un déficit de 3 % en 2015 ?

M. Philippe Marini , président . - La procédure du « Two-Pack » s'appliquant pour la première fois, la Commission européenne doit formuler un avis sur le projet de budget qui lui a été transmis. Comment cette procédure fonctionne-t-elle ? L'article 18 de la loi de programmation des finances publiques 2012-2017 prévoit que les niches fiscales font l'objet d'une évaluation par cinquième chaque année. Quand disposerons-nous de ces évaluations ?

Autre innovation, l'avis du Haut Conseil des finances publiques. Celui-ci constate que l'écart du solde structurel à la programmation sera supérieur à 0,5 % du PIB. Le mécanisme de correction automatique devra être déclenché. Selon quelles modalités ? En outre, comment définissez-vous la pause fiscale : s'agit-il d'une stabilisation des prélèvements obligatoires, ou de l'absence de mesures nouvelles en prélèvements obligatoires ?

Le Haut Conseil, dont l'avis est très équilibré, estime que les prévisions concernant les chiffres de masse salariale sont optimistes, avec comme conséquences possibles une surestimation des recettes et une sous-estimation des dépenses de l'assurance-chômage. Qu'en pensez-vous ? De même, comment le coefficient d'élasticité des prélèvements obligatoires au PIB est-il calculé ? Enfin, le Haut Conseil estime que le CICE n'a pas des effets comparables à une baisse des charges, et que le chiffre escompté de créations de 90 000 emplois est par conséquent discutable. Quelle est votre analyse sur ce point ?

M. Bernard Cazeneuve . - Nous sommes en discussion constante avec la Commission européenne dans le cadre du semestre européen. Nous lui transmettons tous les documents nécessaires afin qu'elle puisse apprécier l'adéquation du budget à la trajectoire prévisionnelle.

Nos objectifs n'ont pas changé par rapport au programme de stabilité : nous visons toujours l'équilibre structurel en fin de période. Nous souhaitons atteindre cet objectif grâce à des efforts de maîtrise des dépenses publiques : cet effort s'élève à 15 milliards d'euros en 2014 et sera poursuivi en 2015. Il ne portera, à compter de 2015, que sur les économies en dépense. Quant au poids de la dépense publique, il baissera de trois points d'ici à 2017, l'inflexion étant sensible dès 2014. Enfin le déficit nominal s'établira à 1,2 parce que nous n'avons pas rattrapé le niveau de production d'avant la crise.

Pierre Moscovici s'est rendu à Bruxelles pour présenter le projet de budget. Le rapport économique, social et financier a été rendu public aujourd'hui et la Commission européenne dispose d'un délai de quinze jours pour y réagir. Si des problèmes majeurs se présentaient, nous pourrions prendre des mesures de correction.

En outre, nous avons mis en place des conférences fiscales qui ont aidé à supprimer des niches fiscales inefficaces. Nous nous livrons à un travail d'évaluation permanent. Les évaluations seront transmises à la commission et leurs résultats seront connus au plus tard à la fin de l'année. L'objectif de dépense fiscale est plus que respecté : 68,9 milliards en 2014, contre un objectif fixé à 70,8 milliards par l'article 14 de la loi de programmation des finances publiques 2012-2017.

M. Philippe Marini , président . - Et la pause fiscale ?

M. Bernard Cazeneuve . - Je ne voudrais surtout pas donner l'impression d'échapper à cette question délicieuse... L'effort fiscal s'apprécie par l'augmentation de la pression fiscale ou des prélèvements obligatoires. Nous avions prévu dans le programme de stabilité une hausse des prélèvements obligatoires de 0,3 %. Or la hausse ne sera que de 0,15 % en 2014, et même 0,05 % hors lutte contre la fraude fiscale. Alors que le montant des prélèvements obligatoires supplémentaires prélevés en 2011 s'est établi à 20 milliards d'euros, à 22 milliards en 2012, une vingtaine en 2013, il ne sera que d'un milliard en 2014, avant de devenir nul les années suivantes. Cela s'appelle la pause fiscale et elle sera effective dès 2014.

M. Philippe Marini , président . - Qu'en est-il de la procédure de correction automatique ?

M. Bernard Cazeneuve . - Si une telle procédure se révélait nécessaire, elle n'interviendrait que l'an prochain. Le Haut Conseil apprécie le décalage entre la loi de finances et la loi de programmation pluriannuelle de finances publiques. Toutefois, depuis, une négociation a été conduite avec l'Union européenne et le calendrier de nos engagements a été redéfini, ce qui nous a donné davantage de temps pour atteindre nos objectifs. Nous avons transmis ces éléments au Haut Conseil, qui se prononcera de nouveau en mai. Nous aurons dans le courant de l'année 2014 à regarder la manière dont, en liaison avec le Haut Conseil des finances publiques, nous mettons en adéquation la trajectoire avec notre budget.

M. Yannick Botrel . - Comme François Marc, j'appartiens au camp des croyants et je salue la clarté de votre présentation. Sur le gel du barème de l'impôt sur le revenu, vous avez donné quelques chiffres : hausse du nombre de contribuables de 2,9 millions en 2012 et de 2,6 millions en 2013. Quel sera l'effet de la ré-indexation du barème en 2014 ?

L'effort extrêmement important demandé aux administrations de l'Etat aux opérateurs ainsi qu'aux fonctionnaires est-il reproductible, voire amplifiable ? La dette publique devrait s'établir à 95,1 % du PIB en 2014, contre 93,4 % en 2013. Les taux d'intérêt sont actuellement faibles et la charge de la dette est par conséquent stabilisée. Je me demande toutefois quand le niveau de la dette sera stabilisé.

M. Vincent Delahaye . - Je vous remercie pour votre présentation très claire, même si je reste plutôt critique. Le déficit structurel baisse, mais le déficit conjoncturel augmente encore en 2014. Quand devrait-il commencer à se réduire ? Sur quelles hypothèses de taux fondez-vous l'économie de 500 millions d'euros prévue sur la charge de la dette ? J'aimerais être sûr qu'elles ne sont pas trop optimistes...

Les dépenses de fonctionnement des opérateurs diminueront de 4 %, soit 3 milliards d'euros. Pourtant les dépenses du budget général sont stabilisées, ce qui signifie que certains postes augmentent ! Lesquels ? De plus, comment la politique salariale des opérateurs est-elle surveillée ?

M. Francis Delattre . - Sur ce budget, je fais pour ma part partie des mécréants. Le ministre est-il rassuré que son budget soit jugé plausible ? S'agit-il de la reconnaissance d'une limite ou d'un encouragement ? Il annonce une inversion de la courbe du chômage. Nous demandons à voir ! La baisse récente correspond uniquement à des manipulations statistiques et les procédures en cours devant les tribunaux de commerce menacent 165 000 emplois dans le secteur marchand.

Je partage l'avis du ministre : la croissance, voilà la priorité. Nous verrons... Le redressement des comptes est présenté comme le deuxième axe de la politique du Gouvernement. Or l'endettement s'est accru et la dette a franchi le cap des 90 % du PIB. La prévision de déficit a été revue pour s'établir non à 3 % mais à 4,1 % du PIB. La sémantique s'emparant du débat budgétaire, les documents de l'administration emploient le conditionnel : l'effort de redressement « s'établirait » à 1,7 point de PIB en 2013. L'indicatif serait plus rassurant !

Le désenfumage autour du CICE est amorcé. Louis Gallois évoquait un choc de compétitivité de 30 milliards d'euros ; les ministres ont avancé un chiffre de 20 milliards d'euros, puis celui-ci apparaît maintenant à 10 milliards d'euros. De plus, ne convient-il pas de mieux cibler un dispositif qui concerne surtout les banques et la grande distribution ?

Vous souhaitez rétablir la compétitivité, mais la taxe sur l'excédent brut d'exploitation touchera les entreprises qui investissent le plus : les entreprises industrielles. Enfin le fameux engagement du président de la République lors de la campagne électorale de fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG a-t-il été abandonné ?

Mme Fabienne Keller . - Nous sommes bien loin de la pause fiscale : au titre de l'impôt sur le revenu, nous atteindrons 71,9 milliards d'euros de recettes cette année contre 59,5 milliards l'an passé, soit 12 milliards de plus, c'est considérable, surtout quand vous prévoyez une nouvelle augmentation du produit de 3,4 milliards d'euros en 2014. La pause fiscale semble remise à plus tard. Il s'agit d'un mauvais signal adressé aux ménages, qui augmentent leur épargne. Je suis inquiète.

Le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche apparaît en forte hausse. Comment les investissements d'avenir sont-ils comptabilisés ? Ils augmentent le montant des missions sans jouer sur le déficit annuel.

Vous avez annoncé 3 milliards d'euros de recettes supplémentaires dus à la fiscalité écologique, sans doute sur l'énergie. Or ces montants viennent en totalité compenser le CICE alors que le président de la République avait annoncé lors de la conférence environnementale que les recettes provenant de la fiscalité environnementale seraient, comme c'est leur raison d'être, fléchées vers des aides à l'isolation thermique, l'utilisation de véhicules propres, de l'aide aux entreprises vertueuses, etc. ? Là aussi, les promesses sont-elles remises à plus tard ?

Mme Marie-France Beaufils . - J'ai bien entendu l'exigence du TSCG : ce budget s'efforce de répondre à nos engagements européens. Regardons les pays qui pour s'y conformer ont fortement réduit leurs dépenses : le redressement n'y est pas à l'ordre du jour.

La chute des recettes de l'impôt sur les sociétés m'inquiète. Or son taux est très disparate : 8 % pour les grandes entreprises du CAC 40, mais 33 % pour les PME. Un rééquilibrage serait d'autant plus opportun que la part de la valeur ajoutée consacrée à la rémunération du capital a fortement augmenté.

Je voudrais vous interroger sur les mesures pour lutter contre l'évasion et la fraude fiscales et vous dire mon inquiétude concernant la diminution des moyens des services de l'État. Le recul de l'État implique une sollicitation accrue des collectivités territoriales... dont les dotations sont en baisse. Elles ne pourront répondre aux attentes de service public des populations fragilisées par la baisse de leur pouvoir d'achat, ce qui aggravera les inégalités économiques et territoriales. C'est contre-productif.

La non-indexation du barème de l'impôt sur le revenu les deux dernières années a accru le nombre des personnes contribuables. Même si le projet de loi instaure une décote, ces personnes seront toujours considérées comme contribuables, avec des conséquences diverses : pour l'octroi de l'allocation personnalisée d'autonomie, de l'aide au logement, de chèques-restaurant, les dégrèvements de taxe d'habitation, etc. Le projet procède à nouveau à l'indexation du barème de l'impôt, mais aucun rattrapage n'est prévu pour les personnes devenues contribuables ces deux dernières années.

M. Éric Doligé . - Comme je suis très influençable, monsieur le Ministre, votre présentation m'a presque convaincu. Le projet de budget ouvre aux départements la faculté temporaire de relever le taux des DMTO. L'Assemblée des départements de France (ADF) estime pourtant que le passage de 3,8 à 4,5 % pose des difficultés techniques. La solution pourrait consister à fixer en loi de finances un plafond par défaut à 4,5 %, les collectivités territoriales étant libres de délibérer ensuite pour ne pas relever leur taux. Cette mesure pourrait représenter pour les départements jusqu'à 1,17 milliard d'euros de recettes supplémentaires. Celles-ci seront-elles soumises à la péréquation ? On m'a dit que mon département pourrait dégager 10 millions d'euros de recettes supplémentaires et que s'il y renonçait, il se verrait retirer 5 millions d'euros au titre de la péréquation. Certes, les DMTO sont prélevés dans le secret des études de notaires. Montera-t-on à 6 % l'an prochain de manière à compenser par cette taxe invisible les 4 milliards d'euros des allocations individuelles de solidarité (AIS) conformément à l'engagement du président de la République ?

M. Philippe Marini . - Votre question est bien celle d'un sceptique !

M. Jean-Paul Emorine . - Le projet de budget s'appuie sur une hypothèse de croissance proche de 1 %. Hélas, la réalité n'a jamais été conforme aux prévisions.

La hausse des prélèvements obligatoires serait modérée... N'oublions pas que la France arrive juste derrière le Danemark parmi les pays de l'OCDE en ce qui concerne le taux de prélèvements obligatoires - 46-47 % contre 35 % en Allemagne, soit presque 200 milliards d'euros d'écart ! Le taux de dépenses publiques proche de 57 % du PIB est inquiétant. Bien que vous annonciez vouloir le diminuer, le niveau d'emploi de la fonction publique ne baisse pas. Comment retrouver de la compétitivité et de la croissance sans baisser les charges publiques de l'État, des collectivités territoriales, des entreprises publiques, de la fonction publique hospitalière ? Un pays sans croissance s'appauvrit. Vous comptez stabiliser les effectifs, mais nous sommes un des seuls pays où la proportion des actifs travaillant dans la fonction publique atteint 22 % !

M. Yvon Collin . - Le projet de loi réforme le plan d'épargne en actions en faveur des petites et moyennes entreprises. Vous indiquez que ce dispositif n'est pas chiffrable. Combien coûte le dispositif actuel ?

M. Aymeri de Montesquiou . - A défaut de réconcilier les Armagnacs et les Bourguignons, je voudrais ajouter un codicille aux propos du Bourguignon. Si nous connaissons toute la difficulté de votre tâche, les chiffres ne laissent pas d'inquiéter. Pour diminuer le chômage, il faut améliorer la compétitivité, or nous sommes au 23e rang. Comment les entreprises peuvent-elles investir avec le plus faible taux de marge en Europe ? Vous avez hérité d'une situation difficile, mais celle-ci s'est fortement dégradée. Nous sommes au 134e rang mondial pour la fiscalité et nous devons accomplir un effort gigantesque. Il est impératif de réaliser une forme d'union nationale pour trouver des solutions partagées. Celle que vous nous proposez est désespérément optimiste.

M. Bernard Cazeneuve . - Oui, la croissance et la compétitivité sont liées. C'est pourquoi nous avons créé le CICE afin de donner à notre appareil productif des chances d'affronter la concurrence internationale. La situation, certes difficile, n'est pas apparue en deux ans. Le problème est structurel. Sous le quinquennat précédent, le taux de croissance s'est établi autour de 0 % en moyenne. Le déficit commercial, révélateur de la compétitivité, a atteint 75 milliards d'euros en 2012, très loin des 150 milliards d'euros de l'excédent allemand.

Pour y faire face, nous prenons des mesures multiples. Le CICE, tout d'abord, sera pleinement opérationnel l'an prochain. Le préfinancement est en place dès cette année. Ce dispositif serait trop complexe, différent de la baisse des cotisations sociales envisagée, qu'aurait compensée une hausse de la TVA ? Mais les chiffres du préfinancement montrent une montée en puissance : nous atteignons nos objectifs ; les entreprises s'approprient le mécanisme. Leurs charges baisseront de 20 milliards d'euros, non financés en totalité par le consommateur, mais pour moitié par des économies de dépenses, et pour le reste par une hausse de 6 milliards d'euros de la TVA ainsi que par la montée en puissance de la fiscalité écologique. Pour parvenir au même niveau d'allègement de charges avec la TVA sociale, il aurait fallu augmenter les recettes de TVA de 33 milliards d'euros afin de compenser le fait que vous récupérez par l'impôt sur les sociétés une part des allègements de charges ! Je présenterai peut-être un graphique en séance...

M. Philippe Marini , président . - Depuis longtemps la commission des finances milite pour que l'hémicycle soit équipé d'un dispositif de vidéo-projection.

M. Bernard Cazeneuve . - Je transmettrai à la commission des finances un tableau précis sur l'évolution du nombre de contribuables. Chaque année celui-ci fluctue en raison de l'évolution des situations personnelles. Les chiffres de 2013 ne montrent aucune rupture : ainsi le nombre des nouveaux contribuables s'établit à 2,6 millions en 2013, contre 2,9 millions en 2012, 2,6 millions en 2011, 3,1 millions en 2010, ou 2,7 millions en 2009. Aucune explosion liée à une quelconque frénésie fiscale ! De plus, 92 % des nouveaux contribuables deviennent redevables à cause de la hausse de leurs revenus. La majoration exceptionnelle de la décote décidée l'an passé a profité à 7,2 millions de contribuables et 366 000 foyers fiscaux n'ont pas été imposés grâce à cette mesure.

Le gel du point des fonctionnaires ne pourra pas durer indéfiniment, même si l'effort de maîtrise de la masse salariale a vocation à se poursuivre. L'effort demandé obéit d'ailleurs à des considérations de justice : les fonctionnaires de catégorie C bénéficieront de mesures particulières. Le maintien du pouvoir d'achat des populations modestes est bien au coeur de nos préoccupations.

La dette atteint 93,4 % du PIB en 2013, et sera de 95,1 % en 2014 ; la courbe s'infléchira en 2015 avec un taux de 94,7 %. M. Delahaye, le déficit conjoncturel baissera quand la croissance sera supérieure à son potentiel, soit en 2016 ; le déficit, structurel et nominal, se réduit constamment depuis 2012. La charge de la dette, quant à elle, s'établira à 46,7 milliards d'euros en 2014 contre 45 milliards d'euros en 2013. Nos hypothèses sont prudentes : nous estimons que le taux d'intérêt à 10 ans sera à 3,5 % en moyenne en 2014, quand le consensus prévoit 3 %. L'économie de 0,5 milliard d'euros prévue sur la charge de la dette n'est pas liée à des hypothèses de taux imprudentes mais à une réduction du déficit de 17 milliards d'euros depuis 2012.

Le CICE montera en puissance progressivement : 10 milliards d'euros en 2014, 15 milliards d'euros en 2015 et 20 milliards d'euros en 2016. Sur le compte des entreprises, il s'agit 4 % de masse salariale en 2013 et 6 % à compter de 2014.

En outre, notre scénario d'emploi n'est pas biaisé : il repose, c'est bien le moins, sur l'hypothèse que les dispositifs que nous avons mis en place produiront leur effet : le CICE, qui créera 90 000 emplois, les emplois d'avenir, les contrats de génération, la réforme de la formation professionnelle ou encore le renforcement de l'efficacité de Pôle emploi.

Le rendement de la fiscalité écologique sera de 340 millions en 2014, 2,5 milliards en 2015, 4 milliards en 2016. Nous rétrocéderons un milliard aux ménages, les 3 milliards restant financeront le CICE. Dès 2014, nous financerons la TVA sur les travaux de rénovation thermique, différentes mesures d'aide à la rénovation thermique, et les tarifs sociaux de l'électricité : les rétrocessions aux ménages seront importantes dès 2014. Ni dissimulation ni tour de magie sur le PIA. Il n'a pas été pris en compte en 2010 dans le calcul du déficit en comptabilité nationale : nous faisons exactement la même chose. Les décaissements interviennent au fur et à mesure de l'avancement des projets. En 2014 et hors Défense, nous payons le PIA décidé sous le quinquennat précédent à hauteur de 3,5 milliards d'euros.

Marie-France Beaufils m'interroge sur l'impôt sur les sociétés. Outre le CICE, qui l'impacte mécaniquement de 9,4 milliards d'euros, les mesures votées en loi de finances initiale pour 2013 ont un contrecoup de 4,1 milliards d'euros. Nous examinerons lors du débat les autres éléments qui expliquent son évolution.

Eric Doligé s'inquiète des conditions d'augmentation des DMTO. Non, il n'y a pas d'obstacle technique : nous nous rapprocherons de l'ADF pour comprendre ses craintes. Cette augmentation est possible jusqu'en mars 2016. Je l'ai dit au Comité des finances locales, les modifications de la fiscalité immobilière enclencheront une dynamique qui vous conduira peut-être à ne pas augmenter les taux, compte tenu du choc d'offre. Comme il n'y a pas de péréquation sur les DMTO, je crois pouvoir vous assurer que le risque que vous évoquez est plus qu'hypothétique. Mes collaborateurs se rapprocheront de l'ADF.

M. Éric Doligé . - Les tableaux sont parlants !

M. Bernard Cazeneuve . - Nous verrons s'ils nous parlent et vous adresserons une réponse écrite.

M. Philippe Marini , président . - Je vous remercie, monsieur le Ministre délégué. Croyants ou non croyants, nous avons tous apprécié votre disponibilité et votre sens du dialogue.

II. AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES (9 OCTOBRE 2013)

Réunie le mercredi 9 octobre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, la commission a procédé à l'audition de M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, sur l'avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques sur le projet de loi de finances pour 2014.

M. Philippe Marini, président . - Nous entendons Didier Migaud sur l'avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques sur le projet de loi de finances pour 2014 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Vous allez nous décrypter cet avis, dans lequel j'ai en particulier lu des considérations sur la trajectoire de solde structurel et sur la correction de trajectoire. Il m'a semblé que la prévision qui peut être faite sur l'année 2013 conduirait à constater, dans le courant de 2014, qu'un écart de trajectoire de solde structurel de l'ordre d'un point de PIB devrait se traduire par des corrections. Lesquelles ? Selon quelles modalités ? Avec quels instruments ? Autant de questions que je vous livre avant de vous céder la parole.

M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques . - Si vous le permettez, je présenterai brièvement dans un premier temps les principales conclusions de l'avis adopté par le Haut Conseil. Je me tiens ensuite à votre entière disposition pour répondre à toutes vos questions, eu égard notamment aux nouvelles informations qui ont été rendues publiques depuis la présentation de l'avis le 25 septembre.

Comme vous le savez, la France s'est engagée vis-à-vis de ses partenaires européens à atteindre en 2016 l'équilibre structurel des comptes publics. Cet engagement a été traduit dans la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017. Si les ministres des finances de l'Union européenne se sont accordés, en juin, pour desserrer le calendrier en matière de déficit nominal, ils ont maintenu l'échéance de 2016 pour le retour à l'équilibre structurel des comptes publics.

Il revient au Haut Conseil d'émettre un avis en toute indépendance sur les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Sa mission en réalité est double.

Premièrement, le Haut Conseil doit se prononcer sur les prévisions macroéconomiques associées aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Le Haut Conseil ne produit pas ses propres prévisions mais il s'appuie sur les statistiques disponibles ainsi que sur les prévisions et les analyses d'un ensemble d'organismes tels que l'INSEE, la Banque de France, la Banque centrale européenne, le FMI et l'OCDE. Nous le faisons en toute transparence, ainsi que l'a souhaité votre Assemblée, en mentionnant les prévisions et analyses utilisées dans l'avis.

Deuxièmement, le Haut Conseil doit examiner la « cohérence » de l'article liminaire du projet de loi de finances de l'année « au regard » des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation. Pour la première fois en effet, le projet de loi de finances contient un article liminaire qui présente les prévisions de solde effectif et de solde structurel des administrations publiques, pour l'année en cours (2013) et l'année à venir (2014).

À ce stade, permettez-moi d'apporter trois précisions sur cette notion de « cohérence ». Il s'agit d'abord d'une notion difficile à appréhender. Selon le dictionnaire d'Émile Littré, est cohérent « ce qui tient réciproquement ensemble ».

La mission du Haut Conseil ne peut se limiter à une simple vérification de la concordance des chiffres entre le tableau présenté à l'article liminaire et celui arrêté dans la loi de programmation.

Il ne peut s'agir non plus d'un examen « ligne à ligne », en recettes et en dépenses, du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Le Haut Conseil doit analyser les prévisions de solde des administrations publiques au vu des prévisions macroéconomiques du Gouvernement et des éléments qui lui ont été communiqués sur les principales dispositions du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et les comparer aux objectifs fixés dans la loi de programmation.

Au-delà du respect formel de la trajectoire, il revient donc au Haut Conseil d'apprécier le degré de robustesse et les éventuels éléments de fragilité du scénario de finances publiques et en particulier de la trajectoire du solde structurel, compte tenu des informations dont il dispose.

Ensuite, la trajectoire de référence utilisée pour examiner la cohérence de l'article liminaire doit être remise en perspective. Les dispositions de la loi organique nous invitent à identifier les écarts avec les orientations pluriannuelles de solde structurel arrêtées dans la dernière loi de programmation, promulguée le 31 décembre 2012. Depuis l'adoption de cette dernière, le contexte a pu toutefois évoluer. Nous devons en tenir compte et donc ne pas nous livrer à une analyse statique des données fournies.

Enfin, cette analyse de cohérence nécessite des informations nombreuses et donc des délais d'examen raisonnables.

Je souhaite saluer la qualité des informations qui ont été communiquées au Haut Conseil dès le mois de juillet, par le ministère de l'économie et des finances, sur le scénario macroéconomique et de finances publiques. Des réponses détaillées ont ensuite été adressées aux demandes des membres. Cela a permis d'avoir de premiers échanges fructueux entre le Haut Conseil et les administrations compétentes et constitue un progrès notable par rapport aux deux précédents exercices auxquels s'était livré le Haut Conseil.

Ces efforts doivent être poursuivis afin d'améliorer le cadre des échanges qui se poursuivent au mois de septembre. En particulier, la saisine du Premier ministre - intervenue le 13 septembre - ne contenait pas formellement tous les éléments permettant au Haut Conseil d'apprécier la cohérence de l'article liminaire avec les orientations pluriannuelles. Les éléments concernant notamment les finances publiques étaient peu développés. Ils ont dû être précisés par la suite, laissant peu de temps au Haut Conseil pour les analyser.

Il est indispensable que le Haut Conseil dispose d'un délai d'au moins une semaine pour examiner de façon satisfaisante le contenu du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il serait donc souhaitable qu'à l'avenir la saisine du Premier ministre contienne tous les éléments nécessaires à la préparation de l'avis, en supposant - bien sûr - que tous les arbitrages soient rendus à cette date...

J'en viens à présent aux trois principales conclusions de cet avis.

S'agissant des prévisions macroéconomiques, tout d'abord. Le Haut Conseil considère que les prévisions de croissance sont plausibles. Le scénario du Gouvernement, qui repose sur une reprise modérée de l'activité - avec une croissance de 0,1 % en 2013 et de 0,9 % en 2014, semble raisonnable.

Pour 2013, la prévision est confortée par l'amélioration, au cours de l'été, des perspectives économiques à court terme. Pour 2014, la prévision de croissance se situe dans le consensus des économistes dont la moyenne s'établit à 0,8 %.

Le Haut Conseil a toutefois identifié des éléments de fragilité ainsi que des aléas, globalement orientés à la baisse pour 2014, entourant le scénario macroéconomique du Gouvernement.

Parmi les éléments de fragilité de ce scénario, le Haut Conseil juge les prévisions d'emploi optimistes. Je souhaiterais à cet égard attirer l'attention de votre commission sur l'importance des prévisions d'emploi, au même titre que celles de croissance qui focalisent le débat public.

Comme vous le savez, l'évolution de l'emploi exerce des effets importants à la fois sur le dynamisme de l'activité économique et l'équilibre des comptes publics. Des hypothèses trop favorables peuvent conduire, d'une part, à une surestimation de la masse salariale et, partant, des recettes de cotisations sociales et de contribution sociale généralisée (CSG) et, d'autre part, à une sous-estimation des dépenses d'assurance chômage.

Or, le Gouvernement anticipe des créations d'emplois particulièrement vigoureuses dans les secteurs marchand et non marchand.

Ce scénario de forte reprise de l'emploi suscite trois interrogations. S'agissant du secteur non marchand, la forte croissance de l'emploi en moyenne annuelle repose sur une hypothèse volontariste de montée en charge des dispositifs d'emplois aidés, notamment les contrats d'avenir, à la fin de 2013 et tout au long de 2014.

S'agissant du secteur marchand, le contenu de la croissance en emplois paraît élevé, même avant la prise en compte des effets du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Le Haut Conseil considère en effet que, compte tenu du faible niveau de productivité consécutif à la crise majeure que nous venons de connaître, la reprise de la croissance pourrait se traduire dans l'immédiat davantage par un rattrapage de productivité que par une augmentation des embauches.

En outre, les effets attendus par le Gouvernement du crédit d'impôt compétitivité emploi semblent surestimés. Le Haut Conseil considère, d'une part, que le CICE ne peut pas, comme le Gouvernement le fait, être purement assimilé au plan économique à une baisse de charges sur les salaires. D'autre part, dans le contexte de faible niveau de marges que connaissent les entreprises, une baisse des charges d'exploitation risque d'avoir, à court terme, moins d'impact sur l'emploi que ne l'escompte le Gouvernement.

Le Haut Conseil a également identifié un certain nombre d'aléas qui entourent la prévision de croissance du Gouvernement. Ils portent essentiellement sur l'environnement extérieur de la France et sont globalement orientés à la baisse. En particulier, un environnement international moins porteur ou l'assainissement différé du secteur bancaire européen pourraient peser sur les perspectives de croissance pour 2014.

À l'inverse, des avancées plus rapides qu'attendu en matière de gouvernance économique et financière européenne pourraient conduire à un rebond plus franc de l'activité en 2014.

En définitive, le Haut Conseil estime que la prévision de croissance qui vous est présentée est plausible mais que le scénario macroéconomique présente des éléments de fragilité, notamment sur les prévisions d'emploi.

J'en viens maintenant à présenter les conclusions de l'avis sur la cohérence de l'article liminaire avec les orientations pluriannuelles de solde structurel.

Un premier constat s'impose : le déficit structurel prévu tant pour 2013 que pour 2014 est significativement supérieur à celui de la loi de programmation des finances publiques.

Selon l'article liminaire présenté par le Gouvernement, le solde structurel s'établirait à - 2,6 % du PIB en 2013 et - 1,7 % en 2014, contre, respectivement, - 1,6 % et - 1,1 % dans la loi de programmation, avec, par conséquent, des écarts d'1 point en 2013 et 0,6 point en 2014.

S'agissant de 2013, il convient de distinguer, comme nous l'avons déjà évoqué ensemble lors d'un précédent échange, ce qui est hérité du passé et ce qui résulte d'un ajustement structurel, c'est-à-dire une amélioration du solde structurel qui est inférieur à ce qui était initialement prévu.

Une partie de l'écart, équivalent à 0,3 point, est héritée de celui déjà constaté en 2012 par le Haut Conseil, largement imputable à des révisions des comptes nationaux de 2011 par l'INSEE, sur le PIB comme sur le déficit public.

Le reste de l'écart, qui correspond à un « petit » 0,7 point, est imputable à un ajustement structurel moins rapide que prévu en raison d'une surestimation, dans le projet de loi de finances pour 2013 et dans la loi de programmation pour l'année concernée, du dynamisme des recettes par rapport à la croissance du PIB. L'élasticité globale des recettes serait en effet de 0,5 point, contre 1 point initialement prévu, cette différence se traduisant par un moindre ajustement structurel de 0,4 point de PIB sur l'écart total de 0,7 point propre à 2013.

Pour le solde, l'ajustement structurel moins rapide que prévu résulte d'un rendement moindre qu'attendu de certaines mesures nouvelles votées en loi de finances pour 2013, de l'ordre de 0,1 point, et d'une évolution plus rapide des dépenses en volume, équivalant à environ 0,1 point, en raison de la révision de la prévision d'inflation, d'une dynamique un peu plus forte de la dépense locale ainsi que d'un versement supplémentaire de 1,8 milliard d'euros au budget de l'Union européenne.

Pour 2014, l'effort supplémentaire prévu par le Gouvernement, équivalant à 0,4 point, ne permettrait de rattraper qu'une partie du retard accumulé en 2013, qui atteint 1 point, conduisant ainsi à un écart prévu de 0,6 point.

De surcroît, le Haut Conseil des finances publiques estime que cette prévision de déficit structurel pour 2014 est optimiste car, sans les chiffrer, quatre facteurs conduisent à penser que ce déficit structurel pourrait être sous-estimé.

S'agissant des recettes, tout d'abord, les hypothèses d'élasticité du Gouvernement - qui mesurent la réactivité des recettes fiscales et sociales à la croissance du PIB - paraissent optimistes. Le Gouvernement anticipe une augmentation à législation constante proche de celle du PIB, avec une élasticité comprise entre 0,9 et 1. Le Haut Conseil estime, de son côté, que les rentrées fiscales de 2014 pourraient encore subir les effets négatifs de la mauvaise conjoncture de 2013, notamment en raison des décalages temporels entre le calcul de l'assiette et la perception de certains impôts.

Le rendement des mesures nouvelles, annoncé par le Gouvernement à hauteur de 9,5 milliards d'euros, n'a également pu être expertisé par le Haut Conseil, en particulier la cotisation sur l'excédent brut d'exploitation pour 2,5 milliards d'euros, même si je comprends que le Gouvernement y a renoncé au profit d'une majoration du taux d'impôt sur les sociétés. En outre, le Haut Conseil n'a pas été destinataire du détail des mesures nouvelles concernant la fiscalité écologique (400 millions d'euros) et la sécurité sociale (600 millions d'euros). Enfin, le rendement attendu d'un renforcement de la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscales (1,8 milliard d'euros) est incertain et une partie pourrait ne pas être pérenne, s'agissant possiblement d'une mesure ponctuelle et temporaire au sens des textes européens.

Concernant les dépenses, des facteurs d'incertitude ont été identifiés, tant pour l'État, ses dépenses étant conditionné à une stricte maîtrise de la masse salariale et au ralentissement effectif des dépenses d'intervention, que pour les collectivités territoriales, la réduction des concours de l'État à hauteur de 1,5 milliard d'euros ne se traduisant pas nécessairement par une économie à due concurrence de leurs dépenses.

Par ailleurs, les prévisions de solde structurel reposent sur les hypothèses de croissance potentielle retenues dans la loi de programmation des finances publiques. Comme vous le savez, le Haut Conseil n'a pas été amené à se prononcer sur ces hypothèses dans la mesure où sa création est postérieure à l'adoption de la dernière loi de programmation.

Le Haut Conseil s'interroge néanmoins sur l'ampleur de l'écart de production estimé à 3,5 points en 2014. En effet, dans le contexte de crise financière majeure que nous venons de connaître, la persistance d'un déficit d'activité devrait s'accompagner de pertes définitives de capacités productives, pesant in fine sur la croissance potentielle.

Or un écart surévalué entre le PIB effectif et le PIB potentiel, conduit à surestimer la composante conjoncturelle et, par voie de conséquence, à sous-estimer le déficit structurel qui est la référence principale retenue pour le pilotage de nos finances publiques dans le cadre européen. Si cette hypothèse se vérifiait, les efforts d'ajustement budgétaire nécessaires pour atteindre l'équilibre structurel s'en trouveraient accrus.

Le Haut Conseil ne pourra se prononcer sur cette question qu'à l'occasion du prochain projet de loi de programmation des finances publiques qui lui sera présenté mails il lui a semblé utile de relever ce point qui participe d'une appréhension d'ensemble de la situation de nos finances publiques.

Après un premier écart de 0,3 point en 2012 constaté par le Haut Conseil, le solde structurel s'écarterait dès 2013 significativement de la trajectoire programmée, nécessitant vraisemblablement le déclenchement du mécanisme de correction au mois de mai 2014.

Aux termes de l'article 23 de la loi organique, le mécanisme de correction est déclenché si le Haut Conseil identifie un « écart important » entre les résultats de l'année écoulée et les orientations pluriannuelles de solde structurel définies par la loi de programmation. Deux critères alternatifs permettent de déterminer si l'écart est important, à savoir s'il correspond à au moins 0,5 point de PIB sur une année donnée ou à au moins 0,25 point de PIB en moyenne sur deux années consécutives.

Dans son avis du 23 mai 2013, le Haut Conseil avait déjà constaté un écart de 0,3 point en 2012 et j'avais souligné devant la commission des finances du Sénat que cet écart présentait un risque s'agissant du respect futur de la trajectoire.

Ce risque se confirme avec le projet de loi de finances pour 2014, le mécanisme de correction devant être déclenché en mai 2014 si les prévisions du Gouvernement se réalisent, sauf à modifier la loi de programmation et le calendrier de redressement des finances publiques.

La capacité de la France à atteindre l'équilibre structurel des finances publiques en 2016, objectif sur lequel elle s'est engagée, dépend ainsi, d'une part, de l'atteinte de l'objectif de solde structurel fixé en 2014, ce qui n'est pas évident à ce stade compte tenu des hypothèses optimistes qui ont été retenues, d'autre part, quand bien même cet objectif serait respecté, de la mise en oeuvre en 2015 et 2016 d'efforts plus importants que ceux prévus par la loi de programmation qui prévoyait un ajustement de 1,1 point de PIB sur les deux années.

C'est désormais un ajustement de 1,7 point, soit 0,85 point par an, qui serait nécessaire pour atteindre l'équilibre structurel, sauf à modifier la loi de programmation et le calendrier de retour à l'équilibre structurel.

Dans le rapport économique, social et financier rendu public le 1er octobre 2013 et communiqué à la Commission européenne, le Gouvernement a annoncé un ajustement de 1,5 point en 2015 et 2016, soit 0,75 par an en moyenne et non les 0,85 précédemment annoncés, qui serait intégralement porté en dépenses. Dans ces conditions, le solde structurel s'établirait à - 0,2 point de PIB fin 2016, soit un chiffre entrant dans la fourchette de ce que la Commission européenne juge comme étant l'équilibre structurel.

Le Haut Conseil sera amené à se prononcer sur ces hypothèses dans ses prochains avis, le rapport économique, social et financier ayant été rendu public après que nous ayons exprimé notre avis sur le projet de loi de finances pour 2014.

Dans son rapport relatif au projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, François Marc, rapporteur général de votre commission, formait le voeu que le Haut Conseil des finances publiques devienne l'organisme de référence dont la crédibilité des avis améliorerait la gouvernance des finances publiques. Six mois après son installation, je crois que le Haut Conseil s'efforce de répondre à vos attentes, en développant une expertise indépendante sur les textes financiers, préalablement à leur présentation au Parlement. Il a ainsi pour mission d'éclairer vos débats sur les moyens mis en oeuvre par la France pour respecter ses engagements en matière de finances publiques, étant entendu que c'est le Parlement qui fixe les objectifs et les moyens pour y parvenir.

J'espère que le présent avis contribuera à éclairer vos débats et vous remercie de votre attention, en me tenant à votre entière disposition pour répondre à vos questions.

M. François Marc, rapporteur général . - À travers l'avis écrit et la communication que vient de nous rendre le président du Haut Conseil, le maillon qui manquait dans l'évaluation des hypothèses économiques a été comblé et permet de rendre plus crédibles et plus claires, les perspectives économiques dans lesquelles notre pays s'engage.

Nous avons examiné avec soin cet avis dont la rigueur d'analyse laisse à penser que les conclusions retenues sont prudentes. Car j'ai noté que dans chacun de ses avis, le Haut Conseil insiste sur les aléas négatifs qui affectent les prévisions macroéconomiques du Gouvernement. Donc, nous pourrions considérer qu'il s'agit d'un biais inhérent à la méthode de travail utilisée et que nous sommes fondés à relativiser la survenance de tels aléas. Le Haut Conseil n'aurait-il pas tendance à voir la bouteille à moitié vide ? Cette prudence naturelle peut amener les décideurs politiques à vouloir être plus ambitieux ou optimistes pour l'avenir.

Ma deuxième question porte sur les prévisions économiques. Vous avez considéré que celles-ci étaient « plausibles ». Ne pourrait-on pas dire qu'elles étaient particulièrement prudentes ? Pour étayer mon propos, je prends appui sur les analyses du Fonds monétaire international (FMI) en date du 8 octobre 2013 : il considère que la France sera à 0,2 % au lieu de 0,1 % de croissance à la fin de l'année et l'année prochaine à 1 % plutôt qu'à 0,9 %. En prenant en compte ces prévisions, on peut donc considérer que le Gouvernement est prudent. Donc, le terme « plausible » retenu par le Haut Conseil ne cacherait-il pas une inquiétude dans l'évolution des indicateurs économiques ? Si je prends pour exemple l'investissement, la progression attendue de 1,5 % est très modérée car en période de reprise l'augmentation de l'investissement est plus importante que cela.

Ma troisième question concerne l'emploi, volet sur lequel le Haut Conseil a souligné les fragilités affectant les prévisions. Vous considérez que le rattrapage de la productivité et la reconstitution des marges des entreprises devraient ralentir les créations d'emplois. Mais cette analyse ne sous-estime-t-elle pas les effets des politiques de l'emploi menées par le Gouvernement, notamment la mise en place des emplois d'avenir et des contrats de génération ?

Concernant le solde structurel, le Haut Conseil a indiqué qu'il attendait une définition explicite par le Gouvernement des mesures ponctuelles et temporaires susceptibles d'être exclues du solde structurel. La question se pose de savoir comment étaient déterminées jusqu'à présent ces mesures. Quelle devrait-être, selon vous, cette définition ? Ce point n'est pas anodin car il influe sur la détermination de trajectoires retenues pour parvenir à l'équilibre structurel des finances publiques.

S'agissant des aléas significatifs associés à l'environnement extérieur de la France, quelle analyse faites-vous de la politique monétaire américaine ? Estimez-vous que l'action de la banque fédérale (FED) puisse être à l'origine d'une reprise biaisée de l'économie à travers une augmentation des liquidités, comme cela a pu être le cas dans le passé ? La nouvelle présidente de la FED a de ce point de vue des positions déjà connues.

Enfin, sur les hypothèses de croissance tendancielle des dépenses publiques que vous considérez quelque peu inappropriées ou biaisées, quelles sont vos analyses ? Si le solde structurel ne s'est pas autant amélioré qu'on le souhaitait, c'est parce que l'élasticité des recettes publiques au PIB a été particulièrement faible. Comment l'élasticité des recettes publiques devrait-elle évoluer en 2014 ?

M. Philippe Marini, président . - J'ajouterais pour ma part une question. Lors de l'audition du 1 er octobre 2013 de M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué au budget, il a été déclaré : « le Haut Conseil apprécie le décalage entre la loi de finances et la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques. Toutefois, depuis, une négociation a été conduite avec l'Union européenne et le calendrier de nos engagements a été redéfini, ce qui nous a donné davantage de temps pour atteindre nos objectifs. Nous avons transmis ces éléments au Haut Conseil qui se prononcera de nouveau en mai. Nous aurons dans le courant de l'année 2014 à regarder la manière dont, en liaison avec le Haut Conseil, nous mettrons en adéquation la trajectoire avec notre budget ».

J'aurais souhaité savoir ce qu'il convient de penser de cette déclaration et vous demander si celle-ci est en ligne avec le principe selon lequel la trajectoire des finances publiques s'impose aux lois financières au lieu que la trajectoire soit ajustée aux variations des lois financières. Il serait utile que notre commission soit aidée à interpréter les déclarations faites par le ministre du budget.

M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques . - Prudent, plausible, aléa baissier, aléa haussier : dans chacun de nos avis, nous examinons les aléas à la hausse comme à la baisse. S'agissant de 2014, il nous apparait que les aléas à la baisse sont supérieurs aux aléas possibles à la hausse sans pour autant les exclure. Nous n'avons pas exclu la possibilité que la croissance soit supérieure à 0,9 % ainsi que le propose le Gouvernement. C'est pour cela que nous avons retenu le terme « plausible ». Si nous avions distingué entre 2013 et 2014, nous aurions dit que la prévision pour 2013 est « prudente » et sur 2014 « plausible », c'est-à-dire réaliste et crédible.

Nous avons insisté sur certains risques et aléas car il faut conserver à l'esprit que la crise est exceptionnelle et que nous ne sommes pas encore dans une phase de reprise classique. Des risques importants continuent de peser sur la croissance mondiale et européenne.

Des freins à la croissance subsistent sur le plan intérieur : des résultats dégradés pour les entreprises et un taux d'utilisation des capacités de production très bas, ce qui pèse sur l'investissement, une progression modeste du pouvoir d'achat et un effort structurel de réduction des déficits publics moindre qu'en 2013 mais encore substantiel.

Nous avons aussi exprimé des interrogations sur le scénario macro-économique car si l'hypothèse de croissance paraît plausible, son contenu en termes d'emplois peut être plus décevant que ne le pense le Gouvernement.

Nous avons un retard en productivité et des marges faibles. La reprise risque donc de se produire d'abord par un rattrapage de la productivité et la reconstitution des marges, avant même la création d'emplois. Dans les dernières prévisions de l'Unedic, on retrouve le même raisonnement.

L'emploi non-marchand dépendra quant à lui du programme volontariste du Gouvernement et des moyens consacrés pour atteindre les objectifs. Par ailleurs, l'évolution de l'emploi marchand peut aussi être déterminante.

Voilà pourquoi, compte tenu d'un contexte international qui n'est pas sorti de la crise, nous avons signalé l'ensemble des aléas pesant sur la trajectoire du solde structurel.

S'agissant de votre question sur les mesures ponctuelles et temporaires, nous avons estimé nécessaire que leur périmètre soit établi de façon claire et précise. Dans notre avis publié en mai dernier, nous avions considéré que la vente des licences de fréquences hertziennes, dont le produit s'est élevé à 2,6 milliards d'euros - une somme non négligeable -aurait dû être traitée comme une mesure ponctuelle et temporaire, à l'instar par exemple de ce qui a été fait en dépenses s'agissant de la recapitalisation de Dexia. Le Gouvernement lui a donné un statut différent, ce qui peut avoir des conséquences dans l'appréciation du solde structurel.

Nous avons saisi la direction générale du Trésor ainsi que la direction du Budget. Pour le moment, personne n'a eu le temps, semble-t-il, de travailler sur ces sujets - ce qui peut être expliqué par la préparation du projet de loi de finances. C'est un chantier que nous devons reprendre avec le Gouvernement et en liaison avec la Commission européenne. Nous devons tous avoir les mêmes définitions. Manifestement, des voies d'amélioration sont possibles pour dégager une doctrine sur ce sujet. La France pourrait se doter d'un corpus de règles en la matière. Je pense qu'il serait aussi utile que nous puissions harmoniser le vocabulaire au niveau européen.

Vous m'avez également interrogé sur la situation économique des États-Unis. Le mandat du Haut Conseil est de donner un avis sur les prévisions macro-économiques de la France. Et c'est bien évidemment dans cette perspective que nous suivons la conjoncture aux États-Unis. Le fait d'ailleurs que nous identifions un certain nombre d'aléas à la baisse compte tenu d'un contexte international montre qu'il faut que nous suivions les analyses sur la situation d'un certain nombre de pays.

On peut constater que l'activité a accéléré aux États-Unis au second semestre 2013. Elle devrait rebondir en 2014 après le ralentissement de 2013 qui a été induit par un effort budgétaire conséquent. Le Gouvernement français prévoit une croissance américaine de 1,4 % pour 2013 et 2,6 % pour 2014, soit une prévision plus prudente que celle du scénario central de la Fed, publié le 18 septembre dernier.

On peut dès lors penser que la demande intérieure peut soutenir la croissance en 2014. L'inflation pourrait se redresser graduellement tout en restant modérée. Malgré ces fondamentaux, qui s'améliorent, nous appelons l'attention sur le fait que les risques qui entourent les perspectives de croissance américaine ne doivent pas non plus être sous-estimés.

Il y a d'abord la question monétaire. Peut-être que la nomination de la nouvelle présidente de la Fed peut conduire à une appréciation optimiste sur la politique monétaire qui sera conduite par la banque centrale américaine. Mais ces choses-là sont fines : la détermination du bon moment pour resserrer les conditions de la politique monétaire n'est pas une tâche facile. Une sortie trop rapide pourrait être néfaste à la reprise. Une sortie trop lente peut faire craindre des prises de risques excessives sur les marchés financiers.

Nous constatons aussi des incertitudes en ce qui concerne la politique budgétaire. Nous voyons bien la situation actuelle des États-Unis. Plus l'accord qui doit être trouvé au niveau Congrès américain tarde, plus les conséquences récessives peuvent être importantes pour les États-Unis et, partant, pour la croissance mondiale et européenne.

La dernière question portait sur les hypothèses de croissance tendancielle des dépenses publiques. Là aussi, le Haut Conseil ne produit pas ses propres prévisions. Ce n'est pas sa mission et ce n'est, en tout cas, pas le texte que vous avez voté. Nous ne sommes pas l'INSEE et nous n'en n'avons d'ailleurs pas les moyens. Nous sommes là pour apprécier une cohérence des prévisions. Les hypothèses macro-économiques sont-elles ou non crédibles ? Cette cohérence se mesure par rapport à tout un ensemble d'éléments et en particulier la loi de programmation. Telle est notre mission. Nous n'avons pas capacité à examiner les écarts avec d'autres textes que la loi de programmation. La loi organique est très claire sur ce point.

Sur les hypothèses d'élasticité, pour 2013, l'élasticité finale n'a pas été celle prévue et le décalage est relativement important puisqu'il est de l'ordre de 0,5 point. Pour 2014, l'élasticité prévue se situe entre 0,9 et 1 point, proche du PIB. Là encore, nous considérons que cette hypothèse peut être optimiste, à partir du moment où elle peut sous-estimer la mauvaise conjoncture de 2013. Il peut donc y avoir un risque que, en 2014, l'élasticité soit encore inférieure au PIB.

À la question du président Marini, je vous répondrais qu'il ne m'appartient pas de commenter la déclaration d'un membre du Gouvernement. Ce n'est pas ma qualité et je ne souhaite pas m'élever au-dessus de ma condition...

Ce que dit le Haut Conseil relève du constat. Nous faisons d'autant plus facilement ce constat - et nous l'aurions fait de toute manière - que le Gouvernement fait état de ce décalage par rapport à la loi de programmation.

Nous ne pouvons pas dire autre chose sur ce décalage compte tenu de la référence qui est la nôtre - la loi de programmation. Bien évidemment, celle-ci peut changer. Mais il ne nous appartient pas de suggérer sa modification. Nous apprécions une situation par rapport à un texte donné. S'il est actualité, nous devons en tenir compte.

Ce que je constate, c'est que le rapport économique, social et financier avance déjà des éléments complémentaires par rapport à ceux qui nous ont été transmis. Il confirme que la France ne remet pas en cause l'objectif d'équilibre structurel de nos comptes en 2016. Mais il existe une marge de souplesse - ou d'erreur - que reconnaît d'ailleurs la Commission européenne, à savoir 0,25 point.

Dans le rapport économique, social et financier, ce n'est plus 0 qui est prévu, comme dans la loi de programmation, mais 0,2, d'où un effort structurel qui n'est pas aussi important que celui que nous avions identifié par référence à la loi de programmation. Mais il reste plus important que celui prévu dans la loi de programmation elle-même. Autrement dit, en 2015 et en 2016, il faudra faire un effort structurel plus important que celui prévu par l'actuelle loi de programmation.

M. Jean Arthuis . - Je remercie le Président du Haut Conseil des finances publiques qui nous aide à nous familiariser avec le concept très important d'équilibre structurel.

La hausse des barèmes, qui doit être considéré comme un effort structurel, ne semble pas, en réalité, apporter un supplément de ressources à la hauteur de ce qui était attendu. Avez-vous tenu compte de ce décalage ? Est-ce-que le niveau des prélèvements obligatoires n'aboutit pas finalement, à un certain point, à une stabilisation du produit de ces prélèvements, le concept d'élasticité perdant alors toute signification ?

Le solde d'équilibre réel est-il de nature à affecter les prévisions de déficit pour 2013 et 2014 ?

Enfin, les efforts supplémentaires prévus dans votre avis pour atteindre l'équilibre structurel en 2016 devront-ils, selon vous, aboutir à une hausse des prélèvements obligatoires ou à une baisse des dépenses publiques ?

M. Vincent Delahaye . - Tout en partageant les interrogations de Jean Arthuis, je souhaitais savoir si le Gouvernement vous avait interrogé sur le projet de loi de finances pour 2014 en tant que premier président de la Cour des comptes et si, finalement, vous ne rendriez pas le même avis en cette qualité, ce qui me conduit à m'interroger sur l'opportunité de la création de ce Haut Conseil des finances publiques.

Considérant pour ma part que le principe de prudence doit toujours guider la gestion des comptes, publics comme privés, l'optimisme m'inquiétant particulièrement lorsque l'argent public est en jeu, ne craignez-vous pas, comme moi, que le dérapage du déficit structurel enregistré en 2013 puisse être plus important encore que celui annoncé ?

S'agissant des dépenses autres que celles concernant les collectivités territoriales et les dépenses d'intervention, je m'interroge sur les hypothèses qui fondent les économies attendues, ne trouvant pas trace notamment du concept pourtant avancé de « croissance au fil de l'eau ».

Enfin, la mise en oeuvre du mécanisme de correction automatique correspondra-t-elle à une modification de la loi de programmation des finances publiques ou à un accroissement des efforts demandés dans le cadre du budget annuel pour tenir nos engagements ?

M. Joël Bourdin . - Je me réjouis de l'existence du Haut Conseil des finances publiques qui, en tant qu'organe indépendant et en s'appuyant sur des calculs savants, a pour principale mission d'établir un taux probable de croissance à venir alors que, jusqu'à présent, tous les gouvernements ont surestimé le niveau de croissance attendu dans leurs prévisions budgétaires.

Je suis toutefois quelque peu gêné s'agissant de vos développements consacrés à l'évolution comparative de la productivité et du PIB. En effet, il est fait référence aux statistiques de la période 1990-2000, ce qui me paraît lointain, alors que l'INSEE doit disposer des outils nécessaires pour vous fournir des chiffres plus récents, même s'il peut être très difficile d'estimer l'évolution de la productivité.

Cette question est loin d'être théorique car, ayant le sentiment que la productivité a augmenté cette année, il me semble difficile d'attendre des créations d'emplois avec le niveau actuel de croissance en France.

Ensuite, je ne crois pas qu'il soit pertinent de se référer au concept d'élasticité, qui est trop fluctuant, pour l'établissement de prévisions budgétaires.

S'agissant, enfin, de la politique monétaire américaine, ne pensez-vous pas qu'existe un risque de formation de « bulle monétaire », comme l'indiquent actuellement certaines analyses développées aux États-Unis ? Il me semble que l'évolution de la politique monétaire pourrait d'ailleurs constituer un sujet de réflexion intéressant pour le Sénat.

M. Philippe Marini, président . - Je partage votre suggestion, cette réflexion pouvant d'ailleurs être menée par la commission des finances en lien avec la délégation sénatoriale à la Prospective que vous présidez.

M. Philippe Dallier . - Concernant les taux d'intérêt, le Haut Conseil présente comme facteurs extérieurs susceptibles d'impacter la croissance, à la fois d'un point de vue positif, la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine et, du côté négatif, les décisions qui pourraient être prises par la Banque centrale européenne. Dans la mesure où nous vivons toujours sous l'empire de l'« insoutenable légèreté de la dette », quel est le risque de connaître une hausse du coût de son refinancement maintenant que la confiance en l'euro semble revenue ? Pensez-vous qu'il a totalement disparu d'ici 2014 ?

M. Francis Delattre . - Tout d'abord, s'agissant de l'optimisme affiché par le Gouvernement concernant les effets du CICE, vous a-t-on communiqué des prévisions en matière d'allégements fiscaux, étant entendu que nous voulons bien croire qu'ils s'élèveront à 10 milliards d'euros mais il nous est difficile d'en trouver le financement dans le projet de budget.

Après que les entreprises ont échappé à la taxation sur leur excédent brut d'exploitation, n'est-il pas temps de revenir également sur la mesure, introduite l'an dernier, relative à la non déductibilité des intérêts d'emprunts en matière d'investissements, compte tenu des chiffres avancés en termes de marges des entreprises ? Pour rappel, la Banque publique d'investissement offre des possibilités d'emprunts aux entreprises, l'essentiel reste toutefois assuré par les banques privées françaises.

Ensuite, le Haut Conseil tient-il compte, dans son analyse, des données fournies par d'autres acteurs ou observateurs de l'économie, telles que les chambres de commerce qui ont publié une liste des emplois marchands actuellement menacés en France ?

Enfin, j'aimerais mieux comprendre les hypothèses d'élasticité retenues, notamment au regard de la modélisation économique ayant démontré que « trop d'impôt tue l'impôt » et sachant qu'en tout état de cause, aucun modèle économique ne permet de prévoir une augmentation du PIB équivalente à celle de la part des prélèvements obligatoires dans celui-ci.

M. Roland du Luart . - Votre avis met en évidence le fait que le taux de marge des sociétés non financières est passé de 32 % à 28 %. Comment peut-on, dès lors, espérer des créations d'emplois, alors même que le Gouvernement a, par ailleurs, prévu d'augmenter le taux de la surtaxe sur l'impôt sur les sociétés ?

M. Didier Migaud . - En qualité de président du Haut Conseil, je ne me substituerai pas au ministre délégué au budget et donc certaines questions resteront sans réponse car vous avez souhaité que le Haut Conseil soit un organisme totalement indépendant.

Avons-nous pris en compte telle ou telle mesure ? Non, car nous n'avons pas eu connaissance de la totalité du budget lorsque nous avons rendu notre avis. Nous avons la double mission de formuler un avis sur les hypothèses macroéconomiques et sur la cohérence par rapport au contenu de la loi de finances.

Pour être plus précis, le moindre rendement des prélèvements obligatoires en 2013 s'explique à la fois par une révision à la baisse des mesures nouvelles et une prévision d'élasticité haute - 1 point - qui ne s'est pas vérifiée.

Les conséquences pour 2014 ont été prises en compte par le Gouvernement par la révision du solde de 2013 à hauteur de 4,1 %, intégré en base dans le déficit de 2014 sous la condition de certaines hypothèses d'élasticité. Le Gouvernement propose 0,9 ou 1, ce que nous jugeons optimiste compte tenu de ce qui s'est passé en 2013.

Par rapport à la loi de programmation, il existe un décalage de la trajectoire et donc, un effort supplémentaire à réaliser si on veut respecter l'équilibre structurel en 2016. Le Gouvernement propose de réaliser une partie de cet effort supplémentaire par rapport à la programmation et prévoit que l'effort structurel devra porter exclusivement sur la dépense à partir de 2015. C'est l'engagement pris par le Gouvernement dans la loi de programmation et dans le programme de stabilité.

Sur la question de savoir si la Cour des comptes aurait pu faire le même constat que le Haut Conseil, la Commission européenne avait elle-même observé que la Cour des comptes remplissait en grande partie les missions et les fonctions d'un comité budgétaire indépendant. Sauf sur un point particulier : l'avis sur les hypothèses macroéconomiques. La Cour n'est pas organisée pour exercer cette mission, d'où la création du Haut Conseil. Le compromis adopté a consisté à créer un organisme indépendant rattaché à la Cour des comptes et composé pour partie de magistrats mais avec l'adjonction de personnalités nommées par les autorités politiques. Ces économistes représentent un véritable apport pour la richesse et la qualité des délibérations du Haut Conseil, nécessaire à l'expression de son avis. Notre dernière réunion a débuté à 18h30 et s'est terminée à 3h30 du matin : nous aussi avons des séances de nuit !

M. Philippe Marini, président . - Vous retrouvez le fonctionnement parlementaire !

M. Didier Migaud . - Compte tenu de notre création récente, nous n'avons pas encore eu le temps de nous réunir sur des sujets spécifiques comme les mesures ponctuelles, le déficit structurel, la croissance potentielle et les écarts de production. Ces travaux permettraient de nous faire notre propre point de vue et d'éclairer vos débats. Nous souhaitons prendre des initiatives pour faire travailler des économistes sur ces sujets.

Sur le mécanisme de correction, nous nous livrons à un constat et raisonnons à partir d'une réalité que nous confrontons à la loi de programmation. A partir du moment où nous constatons un écart, la loi de finances qui suit l'avis du Haut Conseil doit prévoir des mesures de correction par rapport à la loi de programmation et à la trajectoire, sauf si entre temps la loi de programmation a été modifiée. Mais cela ne relève pas de notre responsabilité. Nous sommes des notaires et constatons des situations par référence aux textes législatifs.

Sur la politique monétaire américaine, la nouvelle responsable de la Fed appréciera le risque de formation d'une bulle. Vraisemblablement viendra un resserrement de la politique monétaire. Toute la question est de savoir quel est le bon moment : trop tôt on risque d'étouffer la croissance, trop tard, on prend le risque d'éclatement de bulles. Il faut aussi être attentif à la politique conduite par la Banque centrale européenne.

Sur le CICE, il n'est pas dans la mission du Haut Conseil d'évaluer les conséquences d'un tel dispositif ; il appartiendra à la Cour des comptes de vous apporter un éclairage, notamment à l'occasion de la publication du rapport public annuel en février prochain, à partir des éléments de l'année 2013.

Sur les taux d'intérêt, l'hypothèse retenue par le Gouvernement repose sur une augmentation d'un point en 2014 des taux longs : 3,3 % au lieu de 2,3 % pour 2013. Nous n'avons pas identifié de risque particulier pour 2014, mais bien évidemment tout peut se passer, le pire n'étant pas non plus certain.

Sur le taux de marge, il ne m'appartient pas m'exprimer sur les effets de la mesure présentée par le Gouvernement. Ce n'est qu'à partir de l'exécution du budget 2014 que la Cour des comptes pourra vous répondre.

M. Philippe Marini, président . - Merci beaucoup, Monsieur le président. Soyez assuré de notre gratitude pour le caractère très direct et détaillé de vos réponses. Veuillez aussi transmettre les mêmes remerciements à tous les membres du Haut Conseil car c'est bien une instance collégiale qui est en train d'acquérir sa propre culture et je ne doute pas que le président du Haut Conseil aura à coeur de transmettre au premier président de la Cour des comptes un certain nombre de nos questions pour nourrir les travaux de la haute juridiction financière.

III. AUDITION DE M. PIERRE MOSCOVICI, MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES, SUR LE PACTE NATIONAL POUR LA CROISSANCE, LA COMPÉTITIVITÉ ET L'EMPLOI (5 NOVEMBRE 2013)

Réunie le mardi 5 novembre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a procédé à l'audition de M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances, sur le bilan du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi.

M. Philippe Marini, président . - Il y a un an, une série de mesures dites « Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi » nous étaient présentées, avec huit leviers d'action et trente-cinq mesures, dont la plus significative était le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), annoncé par Louis Gallois, repris par le Gouvernement et adopté à l'occasion du collectif budgétaire fin 2012.

La Banque publique d'investissement, dite Bpifrance, a ensuite été créée, puis un nouveau programme d'investissements d'avenir (PIA) a été annoncé cet été. Soit dit en passant, il serait sans doute utile que vous nous parliez de son financement. En effet, 12 milliards d'euros d'investissements supplémentaires, c'est bien - et certains y verront un satisfecit à l'égard de la méthode qui avait été utilisée par le Gouvernement de François Fillon - mais même s'il ne s'agit pas d'une dépense susceptible d'affecter significativement le solde public dit maastrichien, c'est l'emprunt qui assure le financement des engagements qui sont ou seront pris. Le Premier ministre a évoqué des recettes de privatisation : pourriez-vous nous en dire un peu plus ?

Je reviens aux suites données au CICE, sans doute ce que le Premier ministre a appelé hier une « nouvelle donne pour l'innovation », annonce dont vous aurez à coeur de faire ressortir la cohérence devant notre commission des finances.

Pour terminer cette présentation, je rappellerais que nous vivons une conjoncture économique dans laquelle les tensions les plus vives sur l'euro semblent être apaisées. Il n'en reste pas moins que, par rapport à des pays situés hors zone euro et à l'exception de l'Allemagne, nous devons constater que la plupart des pays de la zone euro connaisse une situation économique et d'emploi décevante.

Au regard de cette conjoncture, que peut-on dire des mesures annoncées l'an dernier - et de celles annoncées depuis lors - pour nous permettre d'engager cette session budgétaire dans des conditions un peu plus confiantes en ce qui concerne la compétitivité de nos entreprises ?

Comme vous le voyez, monsieur le ministre, la commission des finances est au complet, ce qui témoigne de ses incertitudes et de son besoin d'information.

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances . - Merci pour votre accueil. Cette audition tombe le jour même du premier anniversaire de la remise du rapport Gallois au Premier ministre, rapport suivi dès le lendemain par l'annonce par le Gouvernement du Pacte pour la croissance, la compétitivité et l'emploi qui reprenait la quasi totalité des propositions de Louis Gallois. Avec Arnaud Montebourg, Fleur Pellerin et Geneviève Fioraso, j'accompagnais hier le Premier ministre à Saint-Étienne pour fêter cet anniversaire.

Vous avez évoqué, monsieur le Président, la situation économique en Europe. D'après la Commission européenne, huit pays de la zone euro seront en récession cette année et seulement deux l'année prochaine. Les prévisions de croissance de la France sont validées : 0,2 %, au lieu des 0,1 % que nous avions annoncés. Avant l'été, la même Commission européenne prévoyait - 0,1 % pour notre pays et les économistes - 0,3 %. Certes, notre croissance a été heurtée : après un bon deuxième trimestre, le troisième l'a moins été tandis que l'activité repart au dernier trimestre, notamment le marché de l'automobile, avec Renault, mais aussi PSA qui tirent leur épingle du jeu. Le Commission européenne prévoit, comme le Gouvernement, 0,9 % de croissance pour 2014 et 1,7 % en 2015, ce qui permettra d'inverser durablement la courbe du chômage. Ces chiffres valident une stratégie européenne et nationale. Il y a encore un an, certains se demandaient si l'euro allait survivre, si la Grèce et Chypre allaient sortir de la zone euro. Les décisions prises par plusieurs États européens ont permis d'apaiser les tensions et la Banque centrale européenne a garanti la pérennité de l'euro, notamment lorsque son président, Mario Draghi, a dit qu'elle sauverait l'euro quoi qu'il arrive.

En 2013, la France a fait mieux que la zone euro ; elle devrait retrouver en 2014, mais surtout en 2015, une croissance plus soutenue. Vous avez évoqué des pays hors zone euro : la Grande-Bretagne connait effectivement des taux de croissance spectaculaires, mais elle part d'un point beaucoup plus bas que la France.

Nous réduisons notre déficit de manière constante : en 2011, il était de 5,3 % et il eut été à nouveau du même montant en 2012 si nous n'avions pas pris les mesures d'ajustement nécessaires, ce qui nous a permis de le ramener à 4,8 %. En 2013, le déficit sera de 4,1 % et l'année prochaine, dans une fourchette comprise entre 3,6 % et 3,8 %. En 2015, nous serons en-dessous de 3 %. Si la Commission européenne estime à cette date notre déficit à 3,7 %, c'est qu'elle ne tient pas compte des mesures d'ajustement supplémentaires prévues pour 2015.

J'en arrive au Pacte de compétitivité, qui est l'acte économique fondateur de notre politique économique. Le Pacte part du constat de la perte de compétitivité de la France, qu'évoquait déjà François Hollande lorsqu'il était candidat. En juin 2012, lors du débat d'orientation sur les finances publiques, j'avais dit nos inquiétudes à ce sujet. Partant du rapport Gallois, nous avons défini des voies d'action pour redresser la compétitivité française. Je suis persuadé qu'il est possible de renforcer notre tissu productif grâce à une insertion harmonieuse dans les échanges mondiaux grâce à une compétitivité positive et pérenne basée non pas sur l'écrasement des salaires et le moins disant social mais sur l'investissement, l'innovation et la productivité.

Je participais hier soir à un débat à la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, en présence de Louis Gallois. Il nous disait qu'il faut miser sur l'innovation et la montée en gamme et non sur l'austérité. Je fais mienne cette formule.

Depuis un an, le cadre fiscal est favorable à l'investissement et à l'innovation des entreprises, le marché du travail a été réformé, la règlementation a été améliorée et le financement de l'économie répond aux besoins des entreprises en matière d'endettement et de fonds propres. Hier, le Premier ministre a rappelé que le Gouvernement ne faisait pas de cadeaux aux patrons mais qu'il faisait en sorte que les entreprises puissent investir pour embaucher, le but étant d'accroître la productivité globale de l'économie qui a ralenti durant la dernière décennie. Cette politique de l'offre n'est pas exclusive d'une action sur la demande et le pouvoir d'achat, qui s'est d'ailleurs renforcé du fait d'une très faible inflation dans la zone euro. Cette politique permet de réduire les coûts du travail, grâce au CICE, et les coûts de recherche et développement (R&D), grâce à la consolidation et à l'extension du crédit d'impôt recherche.

Pour financer l'économie, l'épargne des entreprises a été réorientée, Bpifrance a été créée et le PEA-PME vous sera proposé à l'occasion du budget pour 2014. Ces politiques s'inscrivent dans la durée afin que les entreprises puissent en tenir compte. La rénovation des structures économiques de notre pays est de grande ampleur et conforte notre modèle social. Louis Gallois avait demandé la sanctuarisation de certains dispositifs fiscaux, dont le crédit d'impôt recherche (CIR).

Le Pacte de compétitivité est donc un choix politique, qu'aucun précédent Gouvernement n'avait osé. La compétitivité des entreprises, c'est l'intérêt de la France, l'intérêt de sa jeunesse.

La très grande majorité des 35 mesures du Pacte a été mise en oeuvre. Le CICE est la mesure phare et son utilisation est totalement transparente. Un comité de suivi partenarial permet d'informer la représentation nationale. Son rapport préliminaire montre que la montée en puissance du dispositif a été rapide : le taux de recours devrait être de 97 % l'an prochain et les entreprises s'approprient le dispositif, n'en déplaise à ceux qui estimaient le CICE trop complexe. Les premiers travaux d'évaluation confirment qu'une part importante du CICE bénéficie à l'industrie : un débat sur le positionnement du curseur avait eu lieu et nous avions choisi une voie moyenne, en le fixant à 2,5 SMIC. Le dispositif bénéficie à hauteur de 20 % à l'industrie. En outre, l'effet de second tour est loin d'être négligeable : le CICE bénéficie à l'ensemble de l'économie grâce à la baisse du prix des consommations intermédiaires. Aujourd'hui, services et industrie sont étroitement liés. Il serait absurde de les opposer.

Le montant des préfinancements de Bpifrance progresse avec constance. Fin septembre, plus de 10 000 dossiers de préfinancement ont été traités pour un montant de 920 millions d'euros, et la majorité des dossiers provenait de petites entreprises. Ne confondons pas CICE et préfinancements : ces derniers s'adressent aux entreprises qui ont besoin de trésorerie pour bénéficier du CICE. Selon l'Insee, le CICE a permis de créer ou de prévenir la destruction d'environ 30 000 emplois.

Enfin, le rapport du comité de suivi souligne qu'à la suite des consignes qui ont été données, les abus des entreprises donneuses d'ordre sont en passe de disparaître.

Le Pacte porte aussi sur le financement des entreprises : j'ai oeuvré à une mobilisation massive de financements et je garde un bon souvenir des débats que nous avons eus au Sénat tant sur la création de Bpifrance que sur la réforme bancaire.

Bpifrance a accompagné près de 60 000 entreprises durant les neuf premiers mois de l'année ; 1,5 milliard d'euros de trésorerie a été injecté dans l'économie, grâce au préfinancement du CICE, du CIR et du dispositif de trésorerie offert par Bpifrance. Ce fut une bouffée d'oxygène pour nos entreprises, surtout pour les PME. L'encours de crédit aux sociétés françaises non financières est aujourd'hui quasiment stable alors qu'il se contracte dans la zone euro, ce qui témoigne de la relative bonne santé de notre économie. Enfin, nos entreprises se financent à des niveaux historiquement bas, inférieurs à la zone euro. La France n'a pas décroché, n'en déplaise aux Cassandre.

Grâce au Gouvernement, les entreprises ont accès à des sources de financement autres que bancaires. Cette évolution est inéluctable : le système va devenir plus désintermédié. Les entreprises vont devoir sortir de leur relation unilatérale avec les banques. C'est pourquoi nous avons réformé le code des assurances et nous vous proposerons la réforme de l'assurance vie lors du collectif budgétaire.

Concernant l'innovation, nous approfondissons les mesures du Pacte de compétitivité : le projet de loi de finances sera l'occasion de lancer un nouveau plan d'investissements d'avenir (PIA), doté de 12 milliards d'euros. Ce plan sera financé par un versement du budget de l'État vers le compte des opérateurs du Trésor en 2014, ce qui ne modifiera pas le besoin de financement car les décaissements seront étalés dans le temps par la montée en puissance des appels à projet du PIA-II fin 2014. Ce plan sera également financé par une gestion active et responsable du patrimoine de l'État, notamment grâce à des cessions de participation. Le solde sera intégré aux besoins de financement de l'État. L'impact sur les finances publiques sera donc limité grâce à des modes de financement vertueux. Des avances remboursables donneront lieu à des retours financiers qui diminueront le déficit maastrichien. Enfin, des dotations non consommables ont un faible impact. Au total, les subventions seront limitées à 32 % du programme total, soit 4,7 milliards d'euros sur la dette et de 3,8 milliards d'euros sur le déficit.

Avec Daniel Raoul, j'ai lancé à Angers le statut de jeune entreprise innovante (JEI) : les exonérations sont dégressives, maintenues pendant huit ans et le dispositif est étendu aux dépenses d'innovation, ce qui permet de s'approcher du marché, élément essentiel pour les JEI.

Le plan innovation, élaboré par Geneviève Fioraso et Fleur Pellerin, a été présenté hier par le Premier ministre et il comprend quatre objectifs : promouvoir l'innovation pour tous, encourager l'innovation ouverte, mobiliser l'innovation pour la croissance, évaluer les politiques d'innovation publique. L'État continuera à financer l'innovation : le fonds national de l'innovation sera doté de 240 millions d'euros et il financera l'innovation sous toutes ses formes. De plus, 1,1 milliard d'euros sera mobilisé par des fonds de capital-risque spécifiquement dédiés aux entreprises innovantes et de croissance.

Ce Pacte de compétitivité est complet et il commence à porter ses fruits. Rétablir la compétitivité est une entreprise de longue haleine qui va mobiliser le Gouvernement et la représentation nationale dans la durée. Ce Pacte est notre meilleure chance pour l'économie, l'emploi et l'investissement.

M. François Marc, rapporteur général . - Je vous remercie pour cet exposé exhaustif.

Il y a un an, nous avons auditionné Louis Gallois qui nous a présenté son rapport fort intéressant. Le préfinancement du CICE est un succès : l'objectif de Bpifrance était d'atteindre 800 millions d'euros et elle dépasse un milliard d'euros avec 11 200 dossiers traités fin octobre.

Le rapport du comité de suivi porte en partie sur la sectorisation du CICE : faut-il aider davantage l'industrie et les entreprises exportatrices ? Au-delà des chiffres bruts, il faut tenir compte des effets de second tour. Or, l'industrie bénéficie de prestations émanant de sociétés de service en amont. À supposer que l'on veuille recentrer le CICE, le droit européen le permettrait-il ?

Sur huit des dix dernières années, la France se situe devant l'Allemagne en matière d'investissements étrangers, en stock comme en flux. Les investisseurs internationaux estiment donc que la France reste attractive. Les flux d'investissements s'élèvent à 20 milliards d'euros en 2012, en baisse de 8 milliards d'euros par rapport à 2011, mais à 5 milliards d'euros en Allemagne, en baisse de 30 milliards d'euros.

L'Allemagne pourrait instaurer un salaire minimum d'un montant de 8,5 euros par heure, ce qui pourrait avoir des conséquences sur le différentiel de compétitivité entre nos deux pays. Quelle est votre appréciation sur ce point ? Quelles seraient, à première vue, les conséquences de cette mesure sur la compétitivité ? Plus largement, commet pourrait-elle rétroagir sur le débat sur le SMIC européen ?

La décision n° 32 accompagne le développement des PME innovantes, en mobilisant l'achat public. De nouvelles mesures ont été annoncées hier. En quoi ces dispositifs et ces financements spécifiques de corporate venture répondront-ils aux attentes des PME ?

La BPI dispose de 500 millions d'euros pour garantir les crédits de trésorerie des entreprises : ce produit a été plébiscité par les entreprises. Faut-il en déduire que les banques commerciales deviennent plus frileuses ou que la santé des entreprises françaises se dégrade ? La fédération bancaire française nous a dit mardi dernier que la capacité d'intermédiation bancaire était en recul et qu'il fallait s'attendre à des effets pervers à cause de la règlementation européenne.

Les assises de la fiscalité des entreprises se tiendront en 2014. Pourriez-vous préciser de quelle façon le Parlement sera associé à cet important travail ?

M. Philippe Marini, président . - Dans son dernier avis public, le Haut Conseil des finances publiques a estimé que le CICE ne permettrait pas de créer 90 000 emplois, rappelant que les effets d'un crédit d'impôt ne sont pas équivalents à ceux d'un allègement de charges. Que pensez-vous de cette analyse ? Le Gouvernement va-t-il modifier le CICE, pour le transformer en un allègement de charges ?

M. Pierre Moscovici . - Le comité de suivi a démontré que l'industrie et le commerce bénéficiaient tous deux du CICE dont l'objectif est de soutenir à la fois la compétitivité des entreprises et l'emploi. À l'époque, nous nous sommes demandés s'il fallait aller jusqu'à 3,5 SMIC, ce qui aurait eu un effet sur l'industrie, ou descendre à 1,5 SMIC, ce qui aurait avantagé l'emploi. Nous avons voulu viser à la fois l'industrie et les services en fixant le curseur à 2,5 SMIC. Si nous avons besoin d'une industrie forte, n'opposons pas industrie aux services, car nous avons besoin de ces derniers. Aujourd'hui, les industries bénéficient de 20 % du CICE, alors qu'elles ne représentent que 13 % de la valeur ajoutée totale de l'économie. Les entreprises exportatrices perçoivent les deux-tiers du CICE, et si les grandes entreprises exportatrices n'en perçoivent que 10 %, c'est parce que ce chiffre correspond à leur part dans l'emploi marchand total. N'oublions pas non plus les effets de second tour : les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale bénéficient indirectement des baisses des prix dans les secteurs les moins exposés. Enfin, le CICE donne un coup de pouce aux entreprises non exportatrices, ce qui leur permet d'accéder à l'international.

Si le CICE ne doit pas être capté par la grande distribution, je n'envisage pas pour autant de taxer spécifiquement ce secteur. En revanche, nous nous employons à ce que les relations commerciales de la grande distribution avec ses fournisseurs fonctionnent correctement. Je sais que la guerre des prix se poursuit et que des PME agroalimentaires souffrent. Les négociations vont donc se poursuivre pour aboutir à un meilleur équilibre. L'un des objectifs de la loi Hamon est d'ailleurs de fixer des règles du jeu plus claires et de sanctionner plus durement les dérives.

Le pacte de coalition en Allemagne sera signé sans doute d'ici un mois : le SPD voulant instaurer un salaire minimum, les inégalités seront réduites et la demande intérieure sera soutenue. Grace à cette avancée, l'Allemagne pourrait contribuer à réduire les déséquilibres dans la zone euro. Il faut une croissance plus coopérative en Europe entre les pays en situation d'excédents et les autres.

Le préfinancement du CICE a mieux fonctionné qu'attendu. Si Bpifrance a tenu ses objectifs, la mobilisation des banques privées a été plus tardive. Elles devront monter en puissance l'an prochain.

Beaucoup a été fait en faveur des PME innovantes, notamment en matière d'achats publics. Concernant le plan innovation annoncé hier par le Premier ministre, l'objectif est de renforcer le financement des PME de croissance en mobilisant 1,1 milliard d'euros de fonds publics, grâce à deux fonds spécifiques, l'un sur les écotechnologies et l'autre sur le capital développement. Le but est d'amener ces PME à devenir des entreprises de taille intermédiaire (ETI) exportatrices et innovantes. Nous souffrons d'un déficit en ce domaine.

De nouvelles mesures seront proposées lors du collectif budgétaire pour inciter les grandes entreprises à investir dans les PME qui réalisent 15 % de R&D. Nous souhaitons que le financement des start up augmente de plus de 30 %.

Les assises de la fiscalité devront moderniser la fiscalité des entreprises. Ces assises s'inspireront de celles de l'entreprenariat : il y aura des groupes thématiques présidés par des personnalités qualifiées proches du milieu de l'entreprise. Il faudra impliquer les parlementaires - en premier lieu les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat - dans les groupes de travail et au sein d'un comité de pilotage et de coordination. Ces assises débuteront à la fin de l'année et se dérouleront jusqu'au printemps prochain, afin d'anticiper sur le projet de loi de finances pour 2015.

Je respecte les travaux du Haut Conseil des finances publiques, mais sa tâche principale est de se prononcer sur la trajectoire des finances publiques. Le comité de suivi a dit que ce dispositif avait permis de créer ou d'éviter la destruction de 30 000 emplois. Nous atteindrons donc les 90 000 emplois initialement fixés.

Enfin, le CICE ne sera pas modifié, car il est essentiel que les entreprises sachent à quoi s'en tenir pour les prochaines années. Elles veulent de la lisibilité et de la stabilité, afin de pouvoir investir, de stimuler la croissance et de muscler l'embauche.

M. Éric Doligé . - Avant d'entrer dans cette salle, j'étais pessimiste. Grâce à vous, je ne le suis plus ! Pourtant, un quotidien du soir titre aujourd'hui même : « La France frappée par plus de mille plans sociaux en un an ». Dans mon territoire, les fermetures d'entreprises se multiplient. Lorsque je m'en inquiète, on tente de me rassurer en me disant qu'un délégué au redressement productif veille, et une personne chargée des investissements de plus de trois millions d'euros vient également d'être nommée. Est-il normal que les collectivités soient laissées à l'écart et que tout se traite à Bercy ? Il arrive même que les préfets ne soient pas au courant !

Les entreprises réclament de la stabilité fiscale. Comment s'inscrire dans la durée à cet égard, tant au niveau national que local ?

Vous évoquez la mobilisation des achats publics ; encore faudrait-il que les collectivités territoriales aient les moyens de passer des marchés... Pour l'instant, elles réduisent plutôt leurs investissements.

Les investissements étrangers en France représentent, selon François Marc, 20 milliards d'euros : concernent-ils uniquement l'industrie ou tiennent-ils compte aussi des achats d'immeuble ou du PSG ?

Il y a un écart entre votre discours très volontariste et la réalité. Dans ma région, je n'ai mémoire d'aucun redressement d'entreprise depuis longtemps et aucun responsable de l'État n'est venu assister à l'implantation d'une nouvelle entreprise depuis vingt ans. Je suis surpris de cette nouvelle méthode qui laisse de côté les collectivités territoriales. Si l'on veut avancer, il faut le faire ensemble. J'espère que vos réponses nous remonteront le moral.

M. Edmond Hervé . - Je soutiens totalement votre position. Dans l'agroalimentaire, nous connaissons les voies à suivre pour sortir de la crise : il faut augmenter la valeur ajoutée, ce que beaucoup d'entreprises n'ont pas su faire ; il faut reconstruire des filières, sinon la porte est ouverte à une concurrence effrénée ; il faut enfin tenir compte de tous les acteurs et non seulement des grandes centrales commerciales : l'Allemagne est le pays où le commerce de proximité est le plus développé. Il convient aussi d'identifier en amont les entreprises susceptibles de se développer ou celles pour lesquelles il conviendra de veiller à la succession de l'équipe de direction en cas de transition. Les établissements consulaires ont un rôle à jouer à cet égard. En outre, il est important que les entreprises utilisent les résultats des centres de recherche et d'innovation. Plus les assimilations sont rapides plus le processus est efficace.

L'Allemagne ou les pays nordiques ont basculé une partie de leur fiscalité des entreprises vers les ménages. Où en est-on du rapprochement de la CSG et de l'impôt sur le revenu, qui figurait parmi les engagements du Président de la République ?

Enfin, n'oublions pas les collectivités territoriales, qui représentent 12 à 15 % du PIB. Elles constituent un relais de croissance exceptionnel.

M. Yannick Botrel . - Le déséquilibre dans les relations commerciales entre la grande distribution et l'industrie n'est pas sans lien avec la difficulté des industries agroalimentaires. Il s'agit d'un sujet récurrent. Nous avons été nombreux à le dénoncer lors de la loi de modernisation de l'agriculture, mais en dépit des intentions, on ne constate aucun rééquilibrage probant, malgré la mise en place d'un Observatoire des prix et des marges. En fait, la véritable cause, c'est que la France ne compte que cinq ou six centrales d'achat, contre une centaine en Allemagne. Les fournisseurs ne peuvent résister face à la menace d'un déréférencement. Il semblerait même que les centrales aient trouvé la parade à la suppression des marges arrière. Comment remédier à ce déséquilibre ?

M. Jean Arthuis . - J'ai déposé un amendement lors de l'examen du texte sur la fraude fiscale. Le ministre du budget m'avait assuré qu'il lui donnerait un avis favorable dans le cadre du projet de loi de finances ou du projet de loi de finances rectificative : il s'agit de lutter contre les opérations qui permettent à la grande distribution de percevoir des marges arrière grâce à des officines situées en Suisse ou en Belgique.

Ne serait-il pas souhaitable de fusionner le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale afin de disposer d'une meilleure vision de l'ensemble des finances publiques et des prélèvements obligatoires ? Le niveau de ces derniers crée un risque de délocalisation de l'élevage et de certaines industries agroalimentaires dans l'ouest de la France. En Bretagne, sous couvert de prestations de service internationales, des ouvriers d'Europe de l'Est travaillent dans le bâtiment ou sur des chantiers de travaux publics, mais aussi dans l'agroalimentaire : dans un abattoir de porc à Evron, en Mayenne, le coût horaire d'un ouvrier est supérieur de dix euros à celui d'un ouvrier allemand. Ne faut-il pas cesser de taxer la production, notamment sous forme de charges sociales ? Taxer la production, en effet, c'est encourager la délocalisation ! Pourquoi ne pas substituer à un impôt qui pèse sur la production un impôt sur les produits qui serait neutre quant au lieu de fabrication ?

M. Philippe Marini, président . - La fédération bancaire française craint que l'entrée en vigueur des nouvelles normes européennes et internationales, en matière de solvabilité et de liquidité des banques, n'entraîne une évolution progressive, mais irréversible, du mode de financement de l'économie française, avec une baisse de l'intermédiation bancaire au bénéfice du financement direct des entreprises par le marché. Cette analyse semble implacable. Quelle est la cohérence de la politique fiscale avec cette évolution de fond ? L'imposition des dividendes augmente, le régime fiscal de l'assurance-vie est en cours de réexamen, tandis que la taxe sur les transactions financières s'applique sur les transactions portant sur des actions et non sur d'autres produits financiers. Ne risque-ton pas de créer un biais de compétitivité en défaveur de notre industrie ? Enfin, si nous sommes appelés à participer aux assises portant sur la fiscalité des entreprises, nous ne nous déroberons pas.

M. Pierre Moscovici . - Vous y serez associés ! Aussi bien le groupe de travail que le groupe de pilotage compteront des parlementaires, à commencer par les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances. Le calendrier est en cours de discussion avec les acteurs concernés car on ne peut réformer la fiscalité des entreprises malgré elles.

Je ne suis pas un béni-oui-oui ni un adepte de la méthode Coué. La dérision n'est pas de mise. Il s'agit de sujets sérieux et graves. Tous les élus se battent comme je l'ai fait lorsque j'étais président d'une agglomération frappée par la crise de l'automobile. Je ne cherche pas à insuffler un optimisme béat. Nous avons déployé un éventail de mesures sans précédent qui portent leur fruit. Mais je n'ai pas de baguette magique et les difficultés n'ont pas disparues pour autant. Avec Arnaud Montebourg nous nous efforçons d'apporter des réponses aux plans sociaux, dus à la crise ou à des mutations économiques. J'ai déposé un projet de loi d'habilitation pour simplifier, par voie d'ordonnances, la vie des entreprises : je souhaite réformer le droit des faillites pour augmenter les procédures amiables et limiter les redressements judiciaires, d'une part, et améliorer la situation des créanciers pour inciter les banques à consentir des financements nouveaux en accompagnement des restructurations, d'autre part. Le Gouvernement débloque des crédits. Les commissaires au redressement productif, sous l'autorité de leur ministre, ont vocation à travailler en coordination avec les collectivités territoriales.

En même temps, le Pacte pour la croissance, la compétitivité et l'emploi a une vocation offensive. Les économistes saluent le rattrapage en matière d'innovation. L'allègement des charges ou le crédit d'impôt ont des effets anticipés. J'assume la paternité du CICE. Cette mesure était nécessaire. Elle doit s'inscrire dans la durée. Si évolution il y a, elle devra l'améliorer non le remettre en cause.

La fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu aurait pour objet d'accroître la progressivité de l'imposition. La progressivité de l'impôt sur le revenu a déjà été renforcée à travers la réforme de l'ISF ou en soumettant les dividendes au barème de l'impôt sur le revenu. Sans doute conviendra-t-il, dans un second temps, de réfléchir à une meilleure harmonisation de la fiscalité des revenus du capital et du travail. Nous reprendrons les réformes dès que la croissance sera revenue. Mais il est aussi nécessaire faire une pause. Les citoyens sont inquiets. Dans l'immédiat, ils veulent de la stabilité.

Je partage votre diagnostic sur l'agroalimentaire : nous devons renforcer les filières, en évitant qu'elles ne soient victimes de la guerre des prix provoquée par la grande distribution. La France compte sept centrales d'achat mais 12 000 fournisseurs. Ce déséquilibre étant systémique, il appartient à l'État d'intervenir. Ainsi, récemment, nous avons gagné trois procès, en appel et en cassation, et les enseignes ont été condamnées pour déséquilibre significatif du fait de conditions imposées à leurs fournisseurs. Il faut aller plus loin. Comme les anglo-saxons qui ont recours au name and shame , nous devons pointer du doigt ces pratiques pour mieux les dénoncer. La loi Hamon renforce les sanctions, avec la création de sanctions administratives en cas de pratiques abusives, et rééquilibre les négociations qui s'engageront sur la base du tarif des fournisseurs.

Monsieur Arthuis, le Gouvernement s'est engagé à réfléchir, avec vous, à une réécriture de votre amendement qui vise à lutter contre l'optimisation fiscale liée aux marges arrière afin de mieux l'articuler avec le droit européen. Il trouvera sa place dans une loi de finances d'ici la fin de l'année. Le ministère du budget y travaillera avec vous.

Lors de leur élaboration, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale font déjà l'objet d'une coordination accrue. De même, leur présentation souligne leur articulation : l'article liminaire de la loi de finances, nouveauté prévue par la loi organique, présente des données relatives à l'ensemble des administrations publiques ; le rapport économique, social et financier comprend une synthèse des éléments relatifs aux prélèvements obligatoires et de nos engagements européens. Je salue d'ailleurs le travail colossal accompli par les services de Bercy.

Comme vous, nous souhaitons moins taxer les facteurs de production...

M. Jean Arthuis . - Très bien !

M. Pierre Moscovici . - Tel était le but de la taxe sur l'excédent brut d'exploitation. Mais le projet n'était pas mûr. Les assises de la fiscalité sur les entreprises poursuivront le même objectif.

Il n'y a aucune contradiction entre le financement des entreprises et notre politique fiscale. Ainsi la réforme de l'assurance vie vise à réorienter l'épargne vers le financement des fonds propres des entreprises, tout comme le PEA-PME. Nous avons besoin d'un système bancaire solide et mieux régulé. Tel était l'objet de la loi bancaire. Mais nous devons aussi disposer d'un système bancaire compétitif : c'est pourquoi nous avons décentralisé, avec la Caisse des dépôts, 30 milliards d'euros vers le système bancaire pour résoudre les problèmes de liquidité et l'aider à financer les petites et moyennes entreprises. Nous devons adapter les produits d'épargne au financement des entreprises, en assurant à la fois un gain aux assurés et un rendement suffisant aux assureurs. Notre réforme de l'assurance vie est consensuelle ; elle s'appuie sur un rapport parlementaire et sur la concertation avec tous les acteurs. L'évolution vers la désintermédiation n'est pas simplement due à des raisons prudentielles. Les entreprises elles-mêmes souhaitent diversifier leurs modes de financement. Nous devons accompagner le mouvement, même si la part du financement de marché ne sera jamais prépondérante en France.

Donner de l'air à l'économie ne se résume pas à la politique fiscale. J'ai réformé, par exemple, le code des assurances pour permettre aux assureurs d'acheter davantage de dette des entreprises françaises plutôt que de la dette souveraine : cette mesure dégagera 5 à 10 milliards d'euros nouveaux pour les entreprises. Ainsi elles créeront des emplois et nous diminuerons le chômage. Tel est le sens de notre politique de renforcement de la compétitivité et de l'offre productive française.

M. Philippe Marini , président . - Je vous remercie.

IV. EXAMEN DU RAPPORT (6 NOVEMBRE 2013)

Réunie le mercredi 6 novembre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission procède à l'examen des principaux éléments de l'équilibre sur le projet de loi de finances pour 2014 - Tome I du rapport général de M. François Marc, rapporteur général .

M. Philippe Marini, président . - À l'occasion de la présentation ce matin du projet de loi de finances (PLF) et du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), nous disposerons d'une vision de l'équilibre général de l'ensemble des finances publiques. La fusion du PLF et du PLFSS serait souhaitable. Voter deux lois financières chaque année constitue, en effet, une particularité française. Naturellement, certains d'entre nous se persuaderont que les perspectives financières sont clémentes, et d'autres que la situation est exécrable. Je souhaite que nous puissions nous écouter les uns et les autres dans une logique de respect réciproque.

M. François Marc, rapporteur général . - Nous entamons en effet un marathon budgétaire, qui pourrait toutefois être écourté si certains d'entre nous faisaient le choix d'un retour sur leurs terres, ce que je ne souhaite pas. Pour vous mettre en appétit, il est intéressant de s'arrêter sur l'exercice 2014 dans la trajectoire des finances publiques.

Pour la première fois, les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale ont été soumises au Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Dans son avis du 20 septembre 2013, le HCFP considère que, pour 2014, « les prévisions de croissance sont plausibles ». Par ailleurs, lors de son audition par notre commission le 9 octobre dernier, Didier Migaud a qualifié la prévision pour 2013 de « prudente » et celle pour 2014 de « crédible et réaliste ».

Le Gouvernement retient une hypothèse de croissance de 0,1 % en 2013 et de 0,9 % en 2014. Une légère progression du PIB en 2013 semble désormais acquise ; la prévision de croissance de 0,1 % est partagée par l'ensemble des organismes de prévision. L'OCDE, le FMI et la Commission européenne anticipent même une croissance supérieure. L'hypothèse de croissance retenue pour 2014, soit 0,9 %, est également retenue par la Commission européenne dans ses prévisions d'automne, publiées hier. Elle est, en outre, très proche de celle du Consensus Forecasts d'octobre 2013. Le FMI, quant à lui, se montre plus optimiste en prévoyant une croissance de 1 %. Cette présentation révèle un changement avec les pratiques antérieures consistant à surévaluer les hypothèses macroéconomiques, ce qui permettait de minorer les efforts à réaliser et figurait parmi les critiques les plus récurrentes du Conseil de l'Union européenne.

Pour la première fois, la Commission européenne va examiner les projets de plans budgétaires des Etats membres de la zone euro. Il s'agit d'une nouvelle procédure instituée par le « two-pack », qui est entré en vigueur le 30 mai 2013 et établit un encadrement renforcé des politiques budgétaires au sein de la zone euro. Si la Commission européenne décèle un manquement particulièrement grave aux obligations découlant du pacte de stabilité et de croissance, elle demande qu'un projet de plan budgétaire révisé lui soit soumis dès que possible. Toutefois, cela ne contraindrait pas l'Etat concerné à revoir intégralement son projet de budget : il s'agit seulement d'alerter les Etats dont le projet de budget ne permettrait pas de respecter les règles budgétaires européennes et d'éclairer les travaux des parlements nationaux. La Commission doit rendre ses avis sur les projets de plans budgétaires le 15 novembre prochain.

On notera que le commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, a d'ores et déjà salué « la responsabilité et la prudence » du projet de loi de finances pour 2014 de la France et on peut imaginer que l'avis qui sera rendu d'ici le 15 novembre ne devrait pas être fondamentalement différent.

M. Philippe Marini, président . - Nous sommes entre gens convenables...

M. François Marc, rapporteur général. - J'en viens maintenant à l'analyse de l'article liminaire du projet de loi de finances pour 2014. La loi organique relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques prévoit, en effet, que la loi de finances comporte désormais un tel article, qui permet de disposer d'une vision synthétique de l'évolution du solde structurel. Il s'agit ainsi de s'assurer que les mesures prévues dans le cadre des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale permettent au solde structurel de suivre la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

Il apparaît que le solde structurel devrait s'élever à - 2,6 points de PIB en 2013 et à - 1,7 point de PIB en 2014. Lors de l'audition du 9 octobre 2013, le président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a constaté que « le déficit structurel prévu tant pour 2013 que pour 2014 est significativement supérieur à celui de la loi de programmation des finances publiques » ; en effet, l'écart s'élèverait à 1 point de PIB en 2013 et à 0,6 point de PIB en 2014.

M. Vincent Delahaye . - Quelles sont les mesures exceptionnelles qui impactent le solde ?

M. François Marc, rapporteur général . - Il s'agit en particulier du coût des contentieux fiscaux.

Si l'écart de la course du solde structurel par rapport à la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) est indéniable, il doit être examiné à l'aune d'une conjoncture économique beaucoup plus dégradée que prévu. A titre de rappel, l'écart constaté entre le solde structurel et l'objectif de la LPFP en 2012 a principalement résulté d'une révision du déficit structurel pour 2011. Nous héritons là d'un dérapage depuis 2011 qui conduit à une accumulation d'écarts substantiels représentant, au total, un point de différentiel. L'écart a continué à se creuser en 2013, mais principalement en raison du fort ralentissement de l'activité économique. Un examen attentif de l'exercice permet de mettre en évidence le fait que le Gouvernement a, pour l'essentiel, respecté les objectifs d'effort sur lesquels il s'était engagé.

L'effort structurel consenti en 2013 s'élèverait à 1,7 point de PIB, soit un niveau proche de la cible retenue en LPFP (1,9 point de PIB) ; pour autant, le solde structurel ne devrait être réduit que de 1,3 point de PIB, compte tenu d'élasticités des prélèvements obligatoires plus faibles que prévu. On touche là du doigt une réalité qui a un impact tout à fait négatif sur l'exercice 2013. L'effort structurel en recettes atteindrait 1,5 point de PIB, contre un objectif de 1,6 point dans la loi de finances pour 2013.

Toutefois, l'accroissement des recettes serait limité par une faible évolution spontanée des prélèvements obligatoires : leur élasticité serait seulement de 0,5, contre une moyenne de long terme proche de l'unité. Je rappelle ce qu'est l'élasticité des recettes fiscales à l'évolution du PIB : une élasticité de 2 signifie qu'une progression de 1 % du PIB en valeur entraîne une augmentation de 2 % des recettes fiscales. La faiblesse de l'élasticité résulterait principalement du rendement peu élevé de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de l'impôt sur les sociétés, ainsi que du moindre dynamisme de la masse salariale, sur laquelle est assise la majeure partie des prélèvements sociaux. Cette faible élasticité aurait contribué négativement à l'évolution des recettes, à hauteur de 0,4 point de PIB.

L'effort structurel projeté au titre de l'année 2013 repose également sur un effort en dépenses de 0,2 point de PIB - contre une cible de 0,3 point dans la loi de finances pour 2013. L'effort initialement programmé était fondé sur un objectif de croissance de la dépense publique en volume de 0,9 % ; toutefois, cette dernière devrait finalement atteindre 1,7 %. Cette progression plus rapide que prévu de la dépense publique serait essentiellement liée à des facteurs non maîtrisables. Tout d'abord, l'inflation ne devrait progresser que de 0,8 % en 2013, alors que les dépenses indexées - à l'instar d'un certain nombre de prestations sociales - ont été revalorisées sur la base d'un taux de 1,3 % en avril dernier. Cela a conduit, mécaniquement, à accroître l'augmentation des dépenses concernées en volume. Par ailleurs, plusieurs dépenses non prévues devraient survenir au cours de l'exercice, notamment le vote du deuxième budget rectificatif de l'Union européenne, qui entraînerait une hausse des dépenses de 1,8 milliard d'euros. En tout état de cause, les dépenses maîtrisables seraient bien tenues : la norme « zéro valeur » qui s'applique aux dépenses de l'État hors dette et pensions serait respectée, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) serait sous exécuté et la charge de la dette serait inférieure à la prévision de la loi de finances initiale pour 2013 d'un montant de 1,9 milliard d'euros en raison de conditions de financement particulièrement favorables.

L'effort structurel prévu pour 2014 est supérieur à la programmation, mais ne comble pas intégralement l'écart avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel. En effet, le Gouvernement a fait le choix de lisser l'effort - et donc l'ajustement structurel - sur la période 2014-2017, afin de concilier poursuite de la consolidation des finances publiques et croissance économique. La conciliation de ces deux objectifs a constitué un souci constant du Gouvernement. Les ajustements successifs de la trajectoire de solde structurel au cours des derniers mois n'ont fait que tirer les conséquences des évolutions de la conjoncture tout au long de l'année 2013, qui ont conduit à répartir la réduction du déficit structurel sur l'ensemble de la période 2014-2017. Cette nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques est rendue possible par la prolongation accordée en juin dernier par le Conseil de l'Union européenne, jusqu'à 2015, du délai dont dispose la France pour corriger son déficit excessif, compte tenu de la détérioration de la situation économique.

En tout état de cause, les efforts prévus par le Gouvernement dans le cadre de cette nouvelle trajectoire permettraient, d'une part, d'atteindre l'équilibre structurel en 2016, respectant ainsi l'objectif de moyen terme (OMT) sur lequel la France s'est engagée auprès de ses partenaires européens en application du TSCG et, d'autre part, de mettre fin au déficit excessif en 2015, conformément à la trajectoire recommandée par le Conseil de l'Union européenne.

La Commission européenne a publié, hier, ses traditionnelles prévisions d'automne. Ainsi que je l'ai d'ores et déjà indiqué, celles-ci viennent conforter les hypothèses macroéconomiques retenues par le Gouvernement dans le présent projet de loi de finances. Comme la presse s'en est largement fait écho, la Commission prévoit que le déficit effectif de la France serait de 3,7 % du PIB en 2015 (et pas de 3 % du PIB comme nous l'anticipions), ce qui pourrait laisser croire que notre pays ne respecterait pas les recommandations du Conseil de l'Union européenne formulées dans le cadre de la procédure de déficit excessif.

Toutefois, il est impératif de revenir sur la méthode selon laquelle est construite cette projection. En effet, ainsi que l'indique très clairement le document de la Commission, les projections relatives à l'année 2015 sont réalisées à partir d'une hypothèse de politique inchangée. En bref, faute de mesures en économies et en recettes déjà votées pour cette année, elle fait comme si la France ne réalisait aucun effort supplémentaire en 2015 ; cela ne signifie pas qu'elle estime que la France n'adoptera pas de telles mesures. D'ailleurs, on observe la même divergence, pour l'année 2015, pour plusieurs pays qui n'ont pas déjà adopté des réformes structurelles entraînant des économies certaines à cet horizon, comme l'Espagne et l'Italie notamment. S'agissant des années 2013 et 2014, le commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, a indiqué qu'il se concentrerait sur l'ajustement structurel et non le déficit effectif pour juger des efforts budgétaires réalisés par la France. A cet égard, les économistes de la Commission européenne précisent que leurs prévisions sont cohérentes avec une amélioration cumulée du déficit structurel de 1,75 % sur 2013 et 2014.

L'effort structurel prévu pour 2014 par le présent projet de loi de finances s'élève à 0,9 point de PIB, supérieur de 0,4 point de PIB à la prévision de la loi de programmation des finances publiques. Cela permettrait de réduire en partie l'écart du solde structurel par rapport à la programmation : il s'élèverait à - 1,7 % du PIB, contre une cible initiale de - 1,1 % du PIB (soit un écart de 0,6 point de PIB, contre 1 point en 2013). Le déficit effectif, quant à lui, se réduirait de 0,5 point par rapport à 2013 pour atteindre 3,6 % du PIB. L'effort structurel consenti en 2014 comprend un effort structurel en recettes s'élevant à 0,15 point de PIB et un effort structurel en dépenses à hauteur de 0,75 point de PIB, soit 80 % du total.

S'agissant des recettes, l'effort structurel prendrait la forme de mesures nouvelles d'un montant de 2,7 milliards d'euros, dont 1,8 milliard d'euros au titre de la lutte contre la fraude. Au total, les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014 portent des mesures nouvelles dont l'impact est évalué à 8,2 milliards d'euros en 2014. Toutefois, celles-ci sont contrebalancées par les moindres recettes provoquées par les mesures adoptées antérieurement, dont le coût net du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). A l'inverse, des recettes supplémentaires sont à attendre des mesures adoptées dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de juillet 2012 et de la réforme des régimes de retraite. Dans ces conditions, le taux de prélèvements obligatoires serait quasiment stabilisé en 2014, passant de 46 % du PIB en 2013 à 46,1 % du PIB en 2014.

Pour la première fois de la période de programmation, l'effort structurel porterait principalement sur les dépenses : l'effort en dépenses serait de 0,75 point de PIB, soit 80 % de l'effort total. La croissance de la dépense publique en volume passerait ainsi de 1,7 % en 2013 à 0,4 % en 2014, soit une économie de 15 milliards d'euros répartie sur l'ensemble des administrations publiques. L'Etat réaliserait une économie de 8,5 milliards d'euros par rapport à la progression tendancielle de ses dépenses, à laquelle viendrait s'ajouter une économie de 0,5 milliard d'euros sur la charge de la dette liée aux intérêts évités grâce à la réduction du déficit budgétaire depuis 2012. Les dépenses des administrations publiques locales, quant à elles, augmenteraient de 1,2 % en valeur. S'agissant des dépenses des administrations de sécurité sociale en 2014, je laisse le soin à Jean-Pierre Caffet de nous en exposer le détail tout à l'heure, dans la présentation de son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques arrêtée dans le cadre du présent projet de loi de finances repose sur la réalisation d'un effort en dépenses sans précédent sur la période 2014-2017. Alors que sur cette même période, la loi de programmation des finances publiques (LPFP) prévoyait une croissance moyenne en volume des dépenses publiques de 0,5 % par an, l'objectif est désormais une croissance annuelle moyenne de 0,25 %. En d'autres termes, le taux moyen d'évolution initialement inscrit dans la LPFP a été divisé par deux. Ainsi, la dépense publique devrait augmenter de seulement 0,2 % par an entre 2015 et 2017. Cela permettrait une forte réduction du ratio de dépenses publiques sur PIB, qui passerait de 56,6 % du PIB en 2012 à 54 % en 2017.

Il est absolument essentiel que les objectifs de maîtrise de la dépense publique soient respectés, sauf à compromettre la trajectoire de consolidation budgétaire et l'atteinte de notre objectif d'équilibre structurel. Afin de mettre en évidence la sensibilité de la trajectoire des finances publiques au respect de l'effort en dépenses programmé, des projections ont été réalisées à partir de deux scénarii : un scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1,6 % au cours de la période 2014 2017, ce qui correspond à la moyenne constatée entre 2007 et 2012 et un scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1 % entre 2014 et 2017 soit une progression intermédiaire entre la moyenne 2007 2012 et la prévision du Gouvernement. Par ailleurs, la trajectoire de l'effort en recettes est supposée rester celle retenue par le Gouvernement.

Les projections font apparaître que le non-respect des objectifs d'évolution de la dépense publique en volume fixés par le Gouvernement dégraderait fortement la trajectoire des soldes structurels et effectifs et de la dette publique. Une progression de la dépense publique de 1,6 % par an en volume entre 2014 et 2017 conduirait en effet à un solde structurel de - 2,8 % du PIB en 2017 (soit un niveau plus dégradé que celui de 2014) et à une dette publique de 98 % du PIB. Le déficit effectif resterait, quant à lui, au-dessus de 4 % du PIB tout au long de la période. Si la progression était de 1 % par an en volume au cours de la même période, le solde structurel serait toujours sensiblement supérieur à l'objectif de moyen terme (OMT) en 2017 atteignant - 1,5 % du PIB. Quant au déficit effectif, il ne reviendrait en-dessous du seuil de 3 % du PIB qu'à l'horizon 2017. Il s'agit de deux scénarii inacceptables pour nos partenaires européens.

Ces projections nous renvoient à celles réalisées par la Commission européenne pour 2015 puisqu'elles montrent, elles aussi, l'impact une réduction, voire d'une absence d'effort sur les dépenses. Elles soulignent l'absolue nécessité de respecter les objectifs de dépenses arrêtés. Le niveau des économies qui doivent être réalisées à cette fin - environ 17,5 milliards d'euros en 2015 par rapport au tendanciel après les 15 milliards d'euros prévus en 2014 - implique que soient engagées des réformes ambitieuses. Il faudra donc que la modernisation de l'action publique (MAP) identifie les leviers d'une transformation en profondeur des administrations publiques. C'est à cette seule condition que la trajectoire pluriannuelle des finances publiques sera respectée.

Par ailleurs, nous avons mesuré la sensibilité de la trajectoire de solde effectif et de dette publique à la conjoncture économique, en retenant deux scénarii conventionnels - dans lesquels la croissance du PIB est supposée supérieure d'un demi-point à la prévision du Gouvernement dans un cas et inférieure d'un demi-point dans l'autre sur la période 2014-2017. Je précise que les projections réalisées ne sont pas des prévisions alternatives et qu'elles reposent sur l'hypothèse que seules les recettes sont sensibles aux variations conjoncturelles.

Il apparaît que la trajectoire de l'ajustement structurel retenue par le Gouvernement ne permettrait pas, en cas de croissance du PIB inférieure d'un demi point aux prévisions, de faire revenir le déficit effectif en deçà de 3 % du PIB en 2015 conformément aux recommandations formulées par le Conseil de l'Union européenne. En effet, le déficit effectif ne passerait sous le seuil de 3 % du PIB qu'en 2016. En outre, le taux d'endettement ne commencerait à se réduire qu'en 2016, avec un an de retard par rapport à la programmation. A l'inverse, une croissance supérieure d'un demi-point aux prévisions - qui correspondrait peu ou prou à un scénario de rattrapage plus rapide du PIB potentiel par le PIB réel - permettrait d'atteindre pratiquement l'équilibre effectif en 2017 (- 0,2 point de PIB). Par ailleurs, la dette publique serait inférieure à la prévision de près de 4 points de PIB en fin de programmation. Nous pouvons donc avoir également un regard un peu plus optimiste.

Selon les prévisions de la Commission européenne, le déficit effectif de l'ensemble de la zone euro s'élèverait à 2,9 % du PIB en 2013 et à 2,8 % du PIB en 2014. Le déficit structurel serait de 1,4 % du PIB en 2013 et de 1,5 % du PIB en 2014. Enfin, concernant l'évolution de la dette publique, celle-ci atteindrait 95,5 % du PIB en 2013 et 96 % du PIB en 2014. La trajectoire de solde structurel de la France apparaît en ligne avec celle de la zone euro. Il faut bien sûr garder à l'esprit que ces trajectoires relèvent avant tout d'un exercice de programmation et peuvent évoluer afin de tenir compte, notamment, des évolutions de la conjoncture économique.

En tout état de cause, les données collectées font clairement apparaître une convergence des trajectoires de soldes effectifs et structurels des principaux Etats membres de la zone euro. Cela tend à démontrer l'effectivité des règles budgétaires européennes instituées au cours de la période récente ; cela explique aussi, compte tenu des effets du multiplicateur budgétaire, le profil de la croissance de la zone euro.

La comparaison des trajectoires de solde structurel avec les principaux pays de la zone euro fait apparaître que nous partons, avec l'Espagne, d'un point de départ assez dégradé en 2012 par rapport aux autres pays, ce qui nous oblige à accomplir, comme elle, un ajustement plus conséquent.

S'agissant du solde effectif et non plus structurel, on constate une très nette convergence des soldes effectifs vers un équilibre en 2017 pour les cinq principales économies de la zone euro (Allemagne, France, Italie, Espagne et Pays-Bas). Un effort considérable doit être accompli par l'Espagne, alors que la situation de la France est proche de celle des Pays-Bas.

Les efforts accomplis permettraient une diminution, au moins en fin de période, de la part des dettes publiques dans le PIB pour les cinq principales économies de la zone euro.

Les principales caractéristiques de la consolidation des finances publiques en France montrent que la trajectoire pluriannuelle des finances publiques retenue par le Gouvernement laisse entrevoir, à l'horizon 2017, une réduction de la dette publique et de la dépense publique ainsi qu'une diminution des prélèvements obligatoires, exprimées en part de PIB.

J'en viens à présent à la deuxième partie de mon exposé : le budget de l'Etat en 2014 et ses principales caractéristiques.

A périmètre courant, les recettes fiscales nettes de l'Etat (soit 284,7 milliards d'euros dans le PLF 2014) diminuent de 3,2 milliards d'euros par rapport à l'évaluation actuelle de ces recettes en 2013. Cette évolution s'explique principalement par l'effet des mesures antérieures au projet de loi de finances, qui réduisent de 11 milliards d'euros les recettes attendues, dont 9,8 milliards d'euros pour le seul CICE. Les mesures nouvelles sont relativement limitées, puisqu'elles ne représentent que 2,3 milliards d'euros. Les recettes d'impôt sur les sociétés croîtraient spontanément de 6,9 % en 2014 et seraient notamment portées par le rétablissement des marges des sociétés. Quant aux recettes de l'impôt sur le revenu, elles augmenteraient spontanément de + 3,7 % ; cette évolution serait portée notamment par la consolidation des marchés financiers et la stabilisation du marché de l'immobilier.

L'évolution des dépenses de l'Etat doit s'analyser au regard des deux normes de dépenses. La norme « zéro volume », la plus large, prévoit que les dépenses ne doivent pas progresser plus rapidement que l'inflation ; en 2014, il est même prévu une baisse de ces dépenses de 1,4 milliard d'euros. La norme « zéro valeur » exclut les dépenses de pensions et la charge de la dette, sur lesquelles le Gouvernement n'a qu'une marge de manoeuvre limitée ; elle diminue également de 1,4 milliard d'euros. Nous allons donc au-delà des deux normes puisque les crédits diminuent sur les deux périmètres, hors investissements d'avenir. Les crédits du deuxième programme d'investissements (12 milliards d'euros) ne sont en effet pas comptabilisés, dès lors qu'il s'agit de dépenses exceptionnelles et par nature, non pérennes. Si ces crédits étaient comptabilisés dans la norme, ils rendraient en pratique impossible son respect en 2014, puis desserreraient totalement la contrainte l'année suivante ; telle n'est pas la philosophie de la norme de dépense.

La répartition des 9 milliards d'économies par rapport à leur évolution tendancielle fait apparaître une participation des opérateurs, des collectivités territoriales et de la contribution française au budget de l'Union européenne.

S'agissant de la contribution des collectivités territoriales, elle s'inscrit dans une concertation avec les acteurs locaux qui a débouché sur un « pacte de confiance et de responsabilité » adopté lors de la conférence des finances publiques locales, le 16 juillet 2013. La situation financière particulièrement dégradée des départements a par ailleurs été prise en compte, et des recettes nouvelles contribueront au financement des allocations de solidarité : des frais de gestion à hauteur de 830 millions d'euros leur sont transférés, qui seront répartis de manière péréquée ; d'autre part, les départements auront la possibilité d'augmenter le taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Pour leur part, les régions bénéficient d'une substitution de ressources fiscales relativement dynamiques à des dotations, pour un montant total d'environ 900 millions d'euros. C'est donc sur le bloc communal que reposera l'essentiel de l'ajustement.

Par ailleurs, la péréquation horizontale comme verticale continue de monter en puissance. S'agissant de la péréquation horizontale, les ressources du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) passent de 360 millions d'euros en 2013 à 570 millions d'euros en 2014, et celles du Fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF) augmentent de 230 millions d'euros en 2013 à 250 millions d'euros en 2014. Pour ce qui est de la péréquation verticale, toutes les dotations à vocation péréquatrice sont augmentées, à un rythme toutefois moins élevé qu'en 2013.

J'en viens à présent à la question des emplois et de la masse salariale.

Les créations d'emplois dans l'éducation nationale, la justice et la sécurité sont plus que gagées par des suppressions d'emplois dans les autres ministères. On observe en effet un schéma d'emplois légèrement négatif, c'est-à-dire 3 280 suppressions de postes de plus que les créations ; si l'on tient compte de 1 771 créations de postes pour les opérateurs, le solde reste négatif à hauteur de 1 509 ETP. En effet, l'objectif de stabilisation des emplois porte sur l'ensemble du quinquennat, et doit prendre en compte les créations d'emplois décidées dans le « collectif » de juillet 2012. Des suppressions nettes d'emplois doivent donc être encore effectuées pour « absorber » ces créations initiales.

Hors pensions, la masse salariale de l'Etat s'élève à 81,4 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2014. Sa progression d'une année sur l'autre est de l'ordre de 0,4 %. On rappellera que le Gouvernement a pris l'engagement, dans la loi de programmation des finances publiques, de ne pas faire progresser les dépenses de rémunération de plus de 1 % sur la période 2012-2015. Cet engagement semble être en voie d'être tenu. Au-delà du gel de la valeur du point, cette maîtrise de la masse salariale repose principalement sur une nette décélération des mesures catégorielles. Celles-ci s'établiront en effet à 274 millions d'euros en 2014, soit le plus faible montant depuis 1995 et moins de la moitié de l'enveloppe versée en 2011.

Le projet de loi de finances prévoit que la charge des intérêts de la dette atteindra 46,7 milliards d'euros, soit une diminution de 0,2 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013, mais une hausse de 1,7 milliard d'euros par rapport au révisé 2013. Cela traduit l'existence d'un niveau de taux d'intérêt systématiquement inférieur aux prévisions au cours des dernières années, ce qui desserre quelque peu la contrainte sur les finances publiques.

La charge de la dette a progressé ces dernières années de manière moins dynamique que son encours. Nous pouvons nous demander si cette situation va perdurer. En valeur actualisée, l'encours de dette nominale passerait de 1 459 milliards d'euros fin 2013 à 1 531,4 milliards d'euros fin 2014. Un relèvement significatif des taux d'intérêt constitue donc une « épée de Damoclès » pour nos finances publiques. A titre d'illustration, on rappellera qu'une augmentation uniforme de 100 points de base des taux d'intérêt entraîne, à terme, une hausse de la charge d'intérêt de plus de 15 milliards d'euros.

Le besoin de financement de l'Etat s'élèverait à 177 milliards d'euros, dont 174 milliards d'euros d'émissions. La France resterait le deuxième émetteur de la zone euro après l'Italie, dont le seul refinancement de la dette conduit à émettre 194 milliards d'euros de dette. Pour ce qui est des émissions de nouvelle dette au sein de la zone euro, c'est-à-dire l'argent nécessaire pour couvrir le déficit budgétaire, la France en représenterait environ le tiers - 70 milliards sur un total évalué à 215 milliards pour l'ensemble de la zone euro.

M. Philippe Marini, président . - Permettez-moi de lancer la discussion par quelques questions.

Lorsque vous évoquez un taux de croissance de + 0,1 %, n'existe-t-il pas une marge d'erreur statistique susceptible d'être appréciée de différentes façons ? Pour le dire autrement, entre - 0,1 % et + 0,1 %, sommes-nous vraiment capables, du point de vue de la méthodologie statistique, de faire la différence ? Mais, sur le plan psychologique, il est bien préférable d'annoncer + 0,1 %...

Vous indiquez que le déficit structurel est significativement supérieur à la prévision pluriannuelle. Pouvez-vous nous rappeler le jeu des dispositions issues des règles européennes au cas où le Haut Conseil des finances publiques serait amené à constater un décalage significatif par rapport à la trajectoire ? Que peut-il se passer ? Quelle serait la procédure ?

Je constate un écart entre les prévisions du Gouvernement et celle de la Commission européenne. À la fin 2014, le déficit effectif s'établit à 3,6 % selon le Gouvernement et à 3,8 % selon la Commission européenne et, pour 2015, les pourcentages sont respectivement de 2,8 % et 3,7 %.

Vous nous dites, très justement, que la Commission européenne porte son appréciation « toutes choses égales par ailleurs », donc en considérant qu'il n'y aurait pas de mesures correctrices ou, du moins, que les mesures correctrices appropriées ne sont pas annoncées. La Commission européenne a-t-elle, selon vous, raison sur le plan méthodologique ? Le Gouvernement n'a-t-il pas tout dit ? Se serait-il abstenu d'annoncer les mesures qu'il sait devoir prendre pour procéder à des économies plus importantes ou plus efficaces afin de parvenir aux soldes effectifs de 2014 et 2015 ? Quelles peuvent être ces mesures supplémentaires ?

J'aimerais également soulever un point méthodologique - et cela n'a pas de caractère critique - sur la notion de solde stabilisant, c'est-à-dire celui qu'il faut atteindre pour que le ratio dette sur PIB commence à décroître. Il est fonction de la croissance. Nous étions habitués à le fixer autour de 3 %. Je crois comprendre qu'il serait aujourd'hui sensiblement plus bas. Or, il apparaît que la dette publique diminuerait en pourcentage du PIB à partir de soldes sensiblement supérieurs. Il faudrait y voir plus clair.

Enfin, vous évoquez la norme de dépense. Deux dépenses réelles ne semblent pas comprises dans les dépenses totales de l'État. La première, pour un montant de 830 millions d'euros en 2014, représente une compensation attribuée par l'État aux départements, c'est à dire un transfert de l'équivalent des frais d'assiette et de recouvrement des impôts locaux. La seconde est une opération similaire au bénéfice des régions : il s'agit d'une transformation de la dotation globale de décentralisation qui, elle, figurait bien en 2013 dans la norme de dépense. En revanche, sa transformation en un panier de recettes fiscales, pour un même montant de 900 millions d'euros, transféré aux régions, ne serait pas dans la norme de dépense.

Je constate que les habitudes des administrations financières qui s'efforcent, chaque année, de faire un peu « d'habillage » ne sont pas complétement abandonnées. Ce qui peut nous rassurer puisque nous avons toujours connu ce type de pratiques...

En conclusion, les données sur le financement de l'État et de la dette me semblent pouvoir être appelées « celles du meilleur ami » puisque, finalement, le meilleur soutien de la politique budgétaire de ce Gouvernement, ce sont bien les marchés financiers. Ce monde odieux de la finance nous permet d'émettre plus de dettes pour un montant de charges financières maîtrisées, voire en légère décroissance !

M. François Marc, rapporteur général . - Je n'adhère pas à l'idée selon laquelle + 0,1 % ne serait pas significatif, compte tenu de la marge d'erreur. Je constate en effet que certaines prévisions estiment que la croissance française serait de 0,2 % en 2013. L'annonce de 0,1 % ne reflète donc pas un optimisme béat ou une volonté « d'habillage ». C'est une réalité : la France serait sortie de la récession. Telle est l'appréciation des conjoncturistes.

S'agissant des mécanismes de correction, vous posez une question tout à fait légitime. Pour le mécanisme automatique de correction, il est vraisemblable qu'il puisse être déclenché au printemps prochain lors de l'examen du projet de loi de règlement, mais nous devons prendre en compte plusieurs éléments.

Tout d'abord, le mécanisme de correction contraint le Gouvernement à présenter des mesures de correction mais cela ne veut pas dire qu'il faut corriger intégralement et de façon instantanée l'écart constaté.

M. Philippe Marini, présiden t. - Il suffit de faire un discours...

M. François Marc, rapporteur général . - Il suffit de placer la France dans une trajectoire de correction de l'écart. Il ne suffit pas, comme à l'école maternelle, de répondre instantanément à la demande de la maîtresse d'écrire différemment le budget.

Mme Michèle André . - Très bien !

M. François Marc, rapporteur général . - La nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques permettra de combler l'écart par rapport à la programmation dans un délai de deux ans. D'ores et déjà, par la correction de trajectoire que nous avons inscrite en arrière-plan de ce projet de loi de finances pour 2014, nous avons, par anticipation, apporté des éléments de réponse. Au printemps prochain, nous pourrons annoncer de quelle façon les efforts qui sont envisagés vont pouvoir se réaliser. Et je pense que l'Union européenne ne pourra que donner acte à la France de sa volonté de se sortir de la difficulté dès lors que cet écart serait effectivement pointé.

Au surplus, une nouvelle loi de programmation des finances publiques sera adoptée à la fin de l'année 2014, ce qui permettra, de façon plus officielle encore, de mieux affirmer notre trajectoire en ayant corrigé et chiffré les étapes aboutissant à une situation assainie en 2017.

En ce qui concerne les appréciations portées hier par la Commission européenne, vous vous demandez si la France n'est pas mise en défaut pour n'avoir pas annoncé ce qu'il faudrait faire. En réalité, la Commission européenne pointe uniquement les mesures qui ont été votées. Par exemple, le projet de loi de réforme des retraites, en cours d'examen par le Parlement, n'a pas encore été voté, il n'est donc pas pris en compte. Il en va de même pour toutes les dispositions de nature structurelle ou les mesures non encore votées, comme, par exemple, celles consistant à réaliser 17 milliards d'euros d'économies en 2015.

S'agissant du solde stabilisant, il faut savoir qu'il se dégrade mécaniquement avec l'accroissement de la dette. Il serait donc supérieur à 3 % du PIB en 2015, lorsque la part de la dette publique dans le PIB commencera à diminuer.

Enfin, je conçois que l'on puisse s'interroger sur le traitement de certaines dispositions du PLF au regard de la norme de dépense. Bien sûr, le Gouvernement doit respecter les règles qu'il s'est lui-même fixé. En tout état de cause, les mesures que vous citez ne sont pas de nature à remettre en cause l'économie générale du projet du Gouvernement.

M. Albéric de Montgolfier . - J'ai deux questions à poser au rapporteur général que je remercie de sa présentation. Premièrement, nous n'avons pas la même conception du mot « économies ». C'est un problème sémantique car, quand on nous dit qu'il y a 8,5 milliards d'euros d'économies dans le budget de l'État, cela devrait se traduire par une baisse des crédits du budget de l'État. Or, on nous parle de moindre progression de l'augmentation naturelle des dépenses. En réalité, les dépenses de l'État, comparées entre le PLF 2013 et le PLF 2014, ne présentent qu'un milliard d'euros d'économies. J'en conclus que les seules économies faites par l'État correspondent au 1,5 milliard d'euros retiré aux collectivités locales, par la baisse de la DGF et que par ailleurs les dépenses progressent.

Comment expliquer la progression du nombre d'emplois des opérateurs de l'État et comment ne peut-on pas mieux contrôler cette évolution inquiétante des effectifs ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Je ne poserai pas de question ; quand je vois la manière dont on répond à nos questions, je n'y trouve pas mon compte, c'est pourquoi je m'en tiendrai à des observations.

Je signale que le rapport de la Commission européenne fait apparaître des contrastes importants entre États membres, avec une reprise française qui serait tirée par la consommation intérieure du fait de la baisse du taux d'épargne des ménages. L'investissement des entreprises resterait peu dynamique, la priorité allant à la restauration de leurs marges. En revanche, la croissance sera dynamique en Allemagne en 2014, ainsi qu'en Italie et en Espagne grâce aux bons chiffres du commerce extérieur. Dans le noyau dur de l'Europe, la France est à la traîne. Tout se passe comme s'il y avait une impuissance de la puissance publique. Je ne pense pas qu'on puisse parler de réalisme quant à la politique du Gouvernement, mais d'incapacité à redresser la situation.

M. Vincent Delahaye . - J'ai l'impression que l'on nous abreuve de chiffres et de notions techniques, d'écart structurel ou conjoncturel qui conduisent au final à présenter au citoyen un budget virtuel. Il faut en revenir aux hypothèses de croissance potentielle retenues pour définir le déficit structurel dont on voit que la courbe a tendance à baisser alors que celle du déficit conjoncturel augmente. Sur les économies en dépenses, j'ai l'impression que c'est la période 2007-2012 qui est prise comme référence des économies réalisées en considérant que la croissance a été spontanée durant ces années. Pourquoi ne faisons-nous pas la même chose pour les collectivités locales car, si cette croissance spontanée avait été de 1,6 % comme pour l'État, on aurait pu considérer que, avec 0,4 %, les collectivités ont fait des économies.

Je ne comprends pas non plus le niveau prévu d'économies, en milliards d'euros, alors qu'il avait été annoncé 1,5 milliard d'euros en net.

Le solde de 2013 sera-t-il bien de 4,1 % ? Le chiffre de 4,3 % circule et une différence de 0,2 point de PIB n'est pas anodine. Car une partie de l'effort prévu pour 2014 est repoussée à 2015. L'écart avec la loi de programmation atteint 50 %. Dans une entreprise, un directeur financier affichant de tels résultats serait directement remercié !

Il faudra avoir le courage d'engager des réformes structurelles pour réduire la dépense publique car, pour l'instant, notre planche de salut repose sur les marchés qui nous font encore confiance. Mais combien de temps cela durera-t-il ?

M. Jean-Paul Émorine . - Je demande que la commission des finances prenne en considération les comparaisons faites par l'OCDE dans lesquelles nous voyons que la France est en deuxième position sur le taux de prélèvements obligatoires avec 46 % du PIB jusqu'en 2015 et 2016. Le Gouvernement ne joue pas son rôle sur le ratio de la dépense publique qui représente 56 % à 57 % du PIB. Par rapport à l'Allemagne, dont le taux de prélèvements obligatoires est de 35 % à 36 % et le taux de dépense publique de 46 %, la différence se matérialise par plus de 200 milliards de dépenses publiques de plus pour la France. Ce n'est pas en créant des postes de fonctionnaires que nous allons réduire notre handicap de compétitivité engendré par notre niveau de prélèvements sur les entreprises.

Par ailleurs, les recettes de TVA prévues initialement à 141 milliards d'euros pour 2013 seront inférieures de 11 milliards. Or cette perte de recettes est également attendue pour 2014 et cela doit nous alerter sur le fait que la marge de manoeuvre doit donc porter sur le ratio de dépenses publiques du PIB, dans toutes les administrations publiques, et non sur l'augmentation des recettes.

M. Philippe Marini, président . - Ce propos rejoint la préoccupation de Vincent Delahaye sur l'analyse de l'écart entre le ratio dépenses publiques sur PIB et prélèvements obligatoires sur PIB et nécessite une explication méthodologique.

M. Éric Bocquet . - Mon interrogation, non malveillante, porte sur le réalisme des hypothèses macroéconomiques. L'avis du Haut Conseil des finances publiques du 20 septembre dernier précise que, sauf à modifier la loi de programmation, le mécanisme de correction sera déclenché mi 2014, appelant des efforts supplémentaires pour atteindre l'équilibre structurel en 2016. Ensuite, le ministre de l'économie et des finances indiquait que les règles européennes avaient été intégrées dans le budget et qu'il n'est donc pas nécessaire de le changer. Ces deux discours sont contradictoires. Qui faut-il écouter ?

M. Philippe Marini, président . - Je partage personnellement ces interrogations.

M. Serge Dassault . - On dit que le pire n'est jamais sûr, or ce budget démontre le contraire car il ne présente aucune certitude sur les recettes. Il aurait fallu déposer un projet de loi de finances rectificative ! Quand on fait des prévisions, il faut envisager le pire. Or qu'observe-t-on ? Des faillites d'entreprises, des licenciements, des départs continus à l'étranger de créateurs d'entreprises et de jeunes diplômés. Vous faites état de diminutions de dépenses de personnels, mais vous embauchez plus de 8 000 fonctionnaires pour l'éducation nationale. On ne réduira jamais la dette sans faire d'économies. Cela signifie que nous devons arriver à un stade où les dépenses sont inférieures aux recettes. Nous devrions plafonner, comme le font les Etats-Unis, le niveau de la dette.

Enfin, je répète depuis 10 ans que vous disposez d'un potentiel de 20 milliards d'euros de recettes si vous supprimez les 35 heures. En passant à 39 heures, nous améliorerions la compétitivité des entreprises et disposerions de recettes supplémentaires.

M. Jean Germain . - Je remercie le rapporteur général de son exposé, précis et le plus objectif possible, répondant aux questions que nous nous posons sur la dette, tant en volume qu'en charge de la dette, avec des prévisions de diminution des dépenses publiques.

Comparaison n'est pas raison. Je me souviens que le 16 novembre 2011, François Baroin et Valérie Pécresse déclaraient que, pour la première fois depuis 1945, hors charge de la dette et hors pensions, les dépenses budgétaires diminuaient de 200 millions d'euros. Or, le Gouvernement actuel les diminue de plus d'un milliard d'euros. Comment ce qui était qualifié d'extraordinaire, pour 200 millions d'euros, en 2011, devient, du point de vue de l'opposition, négligeable pour plus d'un milliard d'euros ? Ce sont ces raccourcis de la politique qui font beaucoup de mal au pays.

Par ailleurs, le grand choc pour les collectivités territoriales a été l'annonce inopinée de la suppression de la taxe professionnelle par le Président de la République de l'époque. Cela a déséquilibré l'ensemble des collectivités : régions, départements, établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et communes. Qui l'a fait ? Comment cela a été discuté et combien cela a-t-il coûté ? Il faut que chacun assume sa part de responsabilité.

M. Éric Doligé . - Je souhaite aborder trois sujets. Tout d'abord, je relève que selon le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, Frédéric Cuvillier, la suspension de l'écotaxe engendre un manque à gagner de 750 millions d'euros pour l'Etat et de 500 millions d'euros pour les collectivités territoriales. Une réflexion est conduite avec le ministre du budget pour savoir comment compenser cette perte de recettes. Comment va se répartir sa prise en charge entre l'Etat, les collectivités territoriales et l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ? Ensuite, la ministre déléguée à la décentralisation, Anne-Marie Escoffier, a affirmé que la poursuite de la baisse des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales au-delà de 2015 est probable. Qu'en est-il d'après les informations recueillies par le rapporteur général ? Enfin, comment sera assurée la transition du taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ? Le passage de 3,8 % à 4,5 % sera-t-il optionnel ? Le Gouvernement envisage-t-il d'amender cette réforme ? Et sera-t-il possible à terme d'en revenir au plafond actuel de 3,8 % ? À cette série de trois questions, j'ajoute une information. En effet, je tiens à porter à la connaissance de mes collègues la réponse qui m'a été fournie hier en aparté par le ministre de l'économie et des finances, Pierre Moscovici, à la suite de ma question sur la répartition sectorielle des investissements directs à l'étranger (IDE) sur notre territoire. Contrairement à ce qu'il serait légitime d'espérer, il ne s'agit pas de l'industrie mais essentiellement du secteur immobilier.

M. Jean Arthuis . - Je félicite le rapporteur général pour son éclairage. Cependant, les majorités changent mais les mêmes égarements sont constatés : le Gouvernement témoigne ainsi d'une certaine sérénité et invite à avoir confiance dans l'avenir. Il est vrai que l'utilisation du solde structurel facilite une telle approche. Sa perspective contraste avec celle des Français qui ont les nerfs à vif, ainsi qu'avec nos mille plans sociaux. Pour ma part, je ne vois pas où se trouve le potentiel permettant d'inverser la courbe du chômage. Par ailleurs, je me demande quel serait l'état de notre dette et de notre déficit en l'absence de nos engagements européens. Sans l'Europe, à quelle situation ferions-nous face ? En effet, les marchés financiers se caractérisent par la même intempérance que les gouvernements. Ils ont donc, eux aussi, laissé filer les déficits publics par bêtise et par aveuglement. La confiance mutuelle qui unit les gouvernements aux marchés financiers ne nous rend pas service. Dans la période récente, les taux d'intérêt ont continué à baisser en dépit de nos déficits et de nos endettements publics. Aujourd'hui et à cet égard, les investissements d'avenir sont encore l'occasion de ne pas inscrire des dépenses publiques au budget de l'Etat. Je m'interroge également sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au regard du principe de sincérité des comptes publics. La créance de 10 milliards d'euros des entreprises sur l'Etat en 2013 n'apparaît pas dans nos comptes. À la fin 2014, il s'agira de 20 milliards d'euros, soit un point de PIB. Nous avons besoin d'engager les réformes structurelles qui s'imposent alors que, pour l'instant, nous ne faisons que gagner du temps.

M. Francis Delattre . - Je souhaite prolonger les propos de Jean Arthuis en prenant pour exemple la Réserve fédérale américaine. La politique monétaire des Etats-Unis consiste ainsi à faire marcher la planche à billets, ce qui est facteur d'une financiarisation de l'économie. Au moment où les Français voient que la maison brûle, la majorité nous présente un numéro de « tout va très bien madame la marquise ». Ainsi, en matière de compétitivité, le ministre de l'économie et des finances, Pierre Moscovici, nous assure que les recommandations du rapport Gallois sont quasiment toutes mises en oeuvre. Or, à ma connaissance, seuls 880 millions d'euros ont été engagés au titre du CICE alors que 10 milliards d'euros étaient prévus sur 2013. D'après le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), ce dispositif est sous-estimé. Pour moi, ce dernier est également trop compliqué. Par ailleurs, il faut agir en faveur des marges des entreprises, qui se sont détériorées depuis dix-huit mois. Au moins, l'ancienne majorité avait réduit les charges sociales et les taux de TVA, certes trop tardivement pour ces derniers. En outre, le budget des retraites civiles, soit 42 milliards d'euros, reposait jusqu'à maintenant sur un financement à parts égales entre les cotisations et la dotation de l'Etat. Le fait que cette dernière soit appelée à en représenter 75 % doit nous interpeler.

M. Philippe Dallier . - Tout a été dit du côté du réquisitoire contre la majorité actuelle, je n'en rajouterai donc pas, afin de ne pas accabler le rapporteur général. Ma question porte sur les intentions de notre commission à l'égard des finances locales. Nous voyons que les dotations baissent de 1,5 milliard d'euros en 2014 et vont être réparties différemment. Ainsi, les communes subiront une contraction de leurs dotations proportionnelle à l'évolution de leurs recettes réelles de fonctionnement. Ce mécanisme ne prend pas en compte l'effort fiscal des collectivités : une commune caractérisée par une fiscalité lourde sera pénalisée. En outre, notre commission compte-t-elle aborder à nouveau les problématiques de péréquation ? Déposerons-nous des amendements au sujet des dotations versées aux collectivités territoriales, notamment en matière de péréquation ?

M. Philippe Marini, président . - De tels amendements n'impactent pas l'équilibre de la loi de finances et peuvent donc être préparés pour la deuxième partie du projet de loi de finances.

M. Philippe Dominati . - Francis Delattre a relevé les problèmes rencontrés par les entreprises : cet aspect est insuffisamment traité dans le budget proposé par le Gouvernement. J'en arrive à ma question : les hypothèses sur lesquelles repose le projet de loi de finances utilisent de plus en plus une inconnue, à savoir les recettes tirées de la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscale. On parle d'un montant compris entre 1,4 milliard d'euros et 2 milliards d'euros. Comment évaluer avec précision le montant de ces recettes ?

M. Edmond Hervé . - Je remercie le rapporteur général pour sa présentation. Pour ma part, j'ai toujours tenu à ne jamais différencier mon discours selon que je suis dans l'opposition ou dans la majorité. J'attire l'attention sur les limites des comparaisons internationales en matière de taux de prélèvements obligatoires (PO). Affirmer que les PO sont trop élevés en France implique de dire quelles conséquences on en tire, y compris pour l'éducation, la santé ou la justice, dont je rapporte les crédits, ce qui me conduit à exiger d'être précis. Entre 2006 et 2012, le nombre de postes dans l'administration centrale des ministères aurait diminué mais ces économies auraient eu pour contrepartie une augmentation des effectifs dans les collectivités territoriales et chez les opérateurs. Il est facile de critiquer notre taux de PO mais il est moins facile de dire où chercher des économies. Dans une vision libérale, l'opposition cherche à transférer aux associations et aux entreprises des missions publiques, à l'instar des politiques de sécurité. J'estime que cette façon de contourner la difficulté est hypocrite. De même, les partenariats public-privé (PPP) vont à l'encontre du principe d'annualité budgétaire et de nos prérogatives de contrôle parlementaire. L'écotaxe en constitue un exemple, je m'interroge d'ailleurs sur le montage du dispositif. Selon moi, la dépense publique forme un tout solidaire et on ne peut plus distinguer entre les dépenses de l'Etat et celles des collectivités territoriales. Dans le pacte de solidarité et de responsabilité entre ces derniers, le principal enjeu est la question fiscale. Par ailleurs, j'estime que la fusion entre l'impôt sur le revenu (IR) et la contribution sociale généralisée (CSG) est devenue une absolue nécessité. Enfin, l'état actuel des valeurs locatives démontre l'injustice fiscale qui frappe les collectivités territoriales. Leur révision est urgente.

M. Philippe Marini, président . - S'agissant des partenariats public-privé (PPP), je rappelle que la commission des finances s'était montrée très critique et en retrait au cours de l'examen des textes instituant ces dispositifs juridiques. Nous avions considéré que les PPP se soutiennent en cas de recettes d'exploitation permettant d'assumer le service des emprunts ; car un PPP est un emprunt qui ne dit pas son nom et qui met à mal le principe d'annualité budgétaire. C'est une facilité que l'on se donne, qui peut se concevoir quand un ouvrage est concédé et engendre ses propres recettes ; en revanche, lorsqu'il porte sur des bâtiments administratifs, c'est une fiction et une facilité. Telle est la ligne que nous avions défendue à l'époque avec le président Arthuis.

M. Jean-Vincent Placé . - Sur la taxe poids lourds, puisque mes collègues de l'opposition ont évoqué le sujet, je me permettrais de dire que le niveau de la redevance allouée à Ecomouv', à hauteur de 21,7 % du produit de la taxe, me paraît invraisemblable et sans précédent. Par exemple, dans le cadre des dispositifs de taxes poids lourds allemand et autrichien, ce niveau est respectivement de 15 % et 10 %, ce qui est déjà élevé. Comment le Gouvernement de l'époque a-t-il pu signer un tel contrat ? La commission d'enquête demandée par nos collègues du groupe socialiste sera utile pour faire la lumière sur ces questions. Pour ma part, j'estime que cette taxe a vocation être nationalisée, et qu'il faut renégocier le contrat avec Ecomouv'.

J'en viens maintenant à la présentation du rapporteur général : y-a-t-il une prise en compte, dans votre analyse de la sensibilité du solde effectif et de la dette publique à la conjoncture, de l'aspect dépenses ? En effet, quand on a peu de croissance, on a un peu plus de dépenses sociales, ce sont les stabilisateurs automatiques. J'ai l'impression que votre analyse ne prend en compte que l'aspect recettes.

M. Yann Gaillard . - Je remercie le rapporteur général, qui a su présenter ce budget déplorable avec une grande loyauté et une grande élégance.

M. François Marc, rapporteur général . - En réponse aux questions d'un certain nombre de mes collègues sur le fait de savoir si l'on peut considérer qu'il y a une réelle baisse des dépenses alors que l'on raisonne par rapport à leur évolution tendancielle, je rappelle que le précédent gouvernement raisonnait de la même façon, notamment pour présenter les économies associées à la révision générale des politiques publiques (RGPP). La Commission européenne se réfère aussi à cette notion quand elle mesure les efforts consentis par les Etats membres.

À Vincent Delahaye, je rappellerai que la RGPP était présentée comme une mesure très efficace, ce qui n'a pas empêché les dépenses publiques d'augmenter de 1,6 % par an en moyenne entre 2007 et 2012, en raison notamment d'un certain nombre d'évolutions automatiques des dépenses calées sur des indicateurs. Dans ce contexte, les 9 milliards d'économies prévues en 2014 relèvent d'un effort conséquent.

Sur le mécanisme de correction automatique, je rappelle que le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) en Europe impose aux Etats membres d'instituer un mécanisme de correction qui se déclenche automatiquement si des écarts importants sont constatés par rapport à l'objectif affiché à moyen terme sur la trajectoire d'ajustement. Le Gouvernement a intégré dans le projet de loi de finances pour 2014 et dans la trajectoire qui y est associée jusqu'en 2017 les corrections nécessaires. Dès lors, si la Commission européenne adresse au printemps une notification à la France, le Gouvernement n'aura pas besoin de recourir immédiatement à une loi de finances rectificative ; il pourra présenter l'effet de plusieurs mesures s'inscrivant dans la nouvelle trajectoire qui sera arrêtée cet automne.

S'agissant des emplois des opérateurs, le chiffre évoqué par Albéric de Montgolfier correspond aux priorités du Gouvernement : la création de 2 000 postes pour Pôle Emploi et de 1 000 postes pour les universités. Hormis ces priorités, le solde d'emplois des opérateurs est négatif. Par ailleurs, l'équilibre global entre créations et suppressions de postes s'apprécie sur le périmètre de l'État et des opérateurs. Le solde de ce périmètre est négatif : 1 509 postes sont supprimés dans le budget 2014.

En ce qui concerne le nombre de fonctionnaires et la masse salariale, j'entends bien les propos de Jean-Paul Emorine qui nous dit qu'il faut adopter un raisonnement global et prendre en compte les emplois des collectivités territoriales dans l'évolution de l'emploi public ; cela dit, comment procéder pour réduire les fonctionnaires territoriaux tout en répondant aux besoins croissants de la population, lorsque l'on est en charge d'un exécutif local ? Une chose est de dire qu'il faut une intégration de l'ensemble des emplois publics dans le raisonnement, une autre est de mettre en oeuvre ces mesures sur le terrain.

En ce qui concerne la dégradation du déficit par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, la révision de la prévision de 3,7 % à 4,1 % du PIB à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2014 a pour origine un manque à gagner de l'ordre de 8 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2013, qui pèse lourdement dans la construction du budget 2014 sur les reconductions que l'on peut faire l'année suivante.

Sur la notion d'évolution tendancielle, il faut rappeler que celle-ci correspond notamment à l'impact de l'inflation sur les prestations sociales, les exonérations de cotisations sociales, les contrats aidés, les crédits de paiement des programmes d'investissement pluriannuels, l'évolution de la masse salariale, ainsi que sur la progression des recettes versées au profit de l'Union européenne.

Sur le taux de prélèvements obligatoires, si l'on veut le réduire, il faut de la croissance. Les dépenses publiques baisseront dès 2015. J'attire votre attention sur le fait que le taux de dépenses publiques rapporté au PIB était de 52,6 % en 2007 et de 55,9 % en 2011. C'est cette dérive que le Gouvernement actuel s'emploie à corriger, mais elle est difficile à endiguer.

Le montant des recettes de TVA intègre une baisse de 3 milliards d'euros en raison d'un transfert à la sécurité sociale. Mais il est vrai que cet impôt est relativement peu dynamique en période de croissance atone.

Serge Dassault a regretté l'absence d'un collectif budgétaire en cours d'année, mais je porte à son attention sur le fait que la mise en réserve des crédits a permis d'éviter jusqu'à présent le dépôt d'une loi de finances rectificative, en dehors du traditionnel collectif de fin d'année qui sera déposé prochainement.

En ce qui concerne la taxe poids lourds, l'AFITF perdra 700 à 800 millions d'euros et les départements 160 millions d'euros. La question des compensations n'est pas encore tranchée, à supposer que la recette ne vienne pas, ce qui n'est pas certain puisque la taxe est suspendue. Le Gouvernement considère que ce sont des économies supplémentaires qui viendront financer le manque à gagner, en attendant que la situation soit définitivement tranchée. Je ne reviens pas sur Ecomouv' et les autres aspects du sujet. Je voudrais cependant rappeler que la taxe poids lourds a été adoptée fin 2008, dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2009. J'avais voté contre, comme mes collègues socialistes bretons, avec lesquels nous avions à l'époque attiré l'attention du Gouvernement sur les distorsions de concurrence que le dispositif était susceptible d'induire. Nous avions en conséquence présenté trois amendements visant à moduler la taxe en fonction des territoires et des secteurs, mais ils n'avaient pas été pris en compte. Cette taxe n'a pas été votée à l'unanimité au Sénat, comme je l'entends parfois.

S'agissant des collectivités territoriales, le Gouvernement s'est engagé à réformer la dotation globale de fonctionnement (DGF) en 2014. Nous engagerons donc début 2014 une réflexion au sein de la commission des finances sur la réforme de la DGF, dans le cadre d'un groupe de travail. Sur les valeurs locatives et la péréquation, les travaux se poursuivent.

En ce qui concerne le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), Jean Arthuis estime que ce dispositif constitue une anomalie d'un point de vue comptable ; je souligne cependant qu'une moindre recette d'impôt sur les sociétés à ce titre sera bien constatée dans les comptes de l'Etat en 2014. Je rappelle par ailleurs à Francis Delattre que 2013 constitue une année de préfinancement du CICE.

Enfin, s'agissant de la fraude et de l'optimisation fiscales, de nombreux dispositifs ont été adoptés depuis 2011, et les recettes ont sensiblement augmenté dès 2012. L'article 14 du projet de loi de finances pour 2014 porte sur la lutte contre l'optimisation fiscale au titre des produits hybrides et de l'endettement artificiel. Certains de nos collègues ont également fait part de leurs propositions pour lutter contre certaines pratiques : Jean Arthuis sur les marges arrière de la grande distribution, Éric Bocquet sur la notion d'abus de droit. Il y a des recettes importantes à la clef, mais le chantier demeure important.

La commission a donné acte au rapporteur général de sa communication.


* 1 Règlements (UE) du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 n° 472/2013 relatif au renforcement de la surveillance économique et budgétaire des Etats membres de la zone euro connaissant ou risquant de connaître de sérieuses difficultés du point de vue de leur stabilité financière et n° 473/2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l'évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les Etats membres de la zone euro.

* 2 Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques.

* 3 La procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM) a été instituée par deux règlements du « six-pack », les règlements (UE) du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 n° 1174/2011 établissant des mesures d'exécution en vue de remédier aux déséquilibres macroéconomiques excessifs dans la zone euro et n° 1176/2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques .

* 4 Le montant de cette amendement peut représenter jusqu'à 0,1 % du PIB de l'Etat membre.

* 5 En application de la procédure de la majorité qualifiée inversée (MQI), une recommandation de la Commission européenne est réputée adoptée sauf si le Conseil de l'Union européenne, statuant à la majorité qualifiée, décide de la rejeter dans un délai donné. Cette procédure de décision vise à rendre plus difficile la constitution d'une majorité de blocage au sein du Conseil de l'Union européenne.

* 6 En 2013, les bilans approfondis réalisés par la Commission européenne ont concerné treize Etats membres qui, selon les conclusions du rapport sur le mécanisme d'alerte publié en novembre 2012, présentaient des signes de déséquilibres macroéconomiques. Dans le cadre des bilans approfondis publiés en avril dernier, la Commission a considéré que onze de ces Etats connaissaient des déséquilibres non excessifs ; il s'agissait de la Belgique, de la Bulgarie, du Danemark, de la France, de l'Italie, de la Hongrie, de Malte, des Pays-Bas, de la Finlande, de la Suède et du Royaume-Uni. Toutefois, s'agissant de l'Espagne et de la Slovénie, des déséquilibres excessifs ont été identifiés. Pour Chypre, qui avait également été retenu pour un bilan approfondi dans le rapport sur le mécanisme d'alerte, aucun bilan approfondi n'a été publié dans la mesure où le pays fait l'objet d'un programme d'assistance financière - qui s'accompagne nécessairement d'une surveillance économique renforcée.

* 7 La réforme du pacte de stabilité et de croissance a été réalisée, dans le cadre du « six-pack », par trois règlements (UE) du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 n° 1173/2011 sur la mise en oeuvre efficace de la surveillance budgétaire dans la zone euro, n° 1175/2011 modifiant le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques et n° 1177/2011 modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs ainsi que par la directive 2011/85/UE du Conseil du 8 novembre 2011 sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des Etats membres.

* 8 Cette sanction financière peut représenter jusqu'à 0,2 % du PIB de l'Etat membre.

* 9 Cf. supra , la définition de la majorité qualifiée inversée (MQI).

* 10 Dans les faits, cette règle ne s'applique pas aux Etats parties au TSCG dans la mesure où celui-ci prévoit une règle plus contraignante, selon laquelle l'objectif de moyen terme (OMT) ne peut être inférieur à - 0,5 point de PIB.

* 11 Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) a été signé par l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne, à l'exception du Royaume-Uni, de la République tchèque et de la Croatie.

* 12 La méthode de calcul du solde structurel est précisée infra , dans le cadre de l'analyse du solde structurel pour l'année 2014.

* 13 Le PIB potentiel correspond au niveau de production qui résulterait du plein emploi des ressources productives, soit le capital et le travail, compatible avec la stabilité des prix à long terme.

* 14 Loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

* 15 Les deux règlements constituant le « two-pack » ont pour fondement juridique l'article 136 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) qui permet aux Etats membres de la zone euro de renforcer la coordination et la surveillance des politiques budgétaires afin de garantir la discipline budgétaire dans l'Union économique et monétaire (UEM).

* 16 Cf. article 4 du règlement (UE) n° 473/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l'évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les Etats membres de la zone euro.

* 17 Ibid.

* 18 Le projet de plan budgétaire constitue un document synthétique qui présente notamment l'objectif de solde budgétaire pour l'année suivante, les mesures envisagées pour parvenir à cet objectif ainsi que les hypothèses macroéconomiques qui sous-tendent cette trajectoire.

* 19 Les avis de la Commission européenne sur les projets de plans budgétaires devraient être rendus publics le 15 novembre prochain.

* 20 En tout état de cause, la Commission européenne ne dispose pas de la base juridique pour imposer à un Etat membre la soumission d'un projet de budget révisé ni même pour les réviser elle-même.

* 21 Cf. réunion de travail avec Olli Rehn, vice-président de la Commission européenne, en charge des affaires économiques et monétaires, le 18 juin 2013 par la commission des finances du Sénat.

* 22 La réunion de l'Eurogroupe à cet effet devrait intervenir le 22 novembre 2013.

* 23 S'agissant de la France, ce document est inclus dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances (cf. infra ).

* 24 Pour la France, ce document est également inclus dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances (cf. infra ).

* 25 Le rapport économique, social et financier (RESF) correspond au rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation mentionné à l'article 50 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

* 26 Recommandation de la Commission du 29 mai 2013 de recommandation du Conseil pour qu'il soit mis fin à la situation de déficit public excessif en France, COM(2013) 384.

* 27 Toutefois, la Commission peut mettre en oeuvre une surveillance renforcée qui implique la remise de rapports sur les actions engagées pour corriger le déficit excessif trois mois après la recommandation, puis tous les six mois.

* 28 Cf. considérant 10 du règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 n° 473/2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l'évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les Etats membres de la zone euro.

* 29 Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

* 30 Cf. article 14 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 précitée.

* 31 Cf., sur le mécanisme de correction, rapport n° 711 (2012-2013) sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2012 fait par François Marc au nom de la commission des finances du Sénat.

* 32 Cf. article 7 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 précitée.

* 33 Cf. article 14 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 précitée.

* 34 Cf. audition de Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, le 9 octobre 2013 par la commission des finances du Sénat.

* 35 Recommandation du Conseil de l'Union européenne du 20 juin 2011 concernant le programme national de réforme de la France pour 2011 et portant avis sur le programme de stabilité actualisé de la France pour la période 2011-2014.

* 36 Rapport n° 456 (2010-2011) sur le projet de programme de stabilité fait par Philippe Marini au nom de la commission des finances du Sénat.

* 37 Cf. avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2013-03 du 20 septembre 2013 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014.

* 38 Cf. audition de Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, le 9 octobre 2013 par la commission des finances du Sénat.

* 39 Cf. rapport n° 532 (2012-2013) sur le projet de programme de stabilité fait par François Marc au nom de la commission des finances du Sénat.

* 40 Le Consensus Forecasts est un organisme privé collectant mensuellement les prévisions d'un panel des principaux instituts de conjoncture privés.

* 41 Cf. audition de Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, le 9 octobre 2013 par la commission des finances du Sénat.

* 42 Banque de France, « Indicateurs conjoncturels », 18 octobre 2013.

* 43 A titre de rappel, le PIB potentiel correspond au niveau de production qui résulterait du plein emploi des ressources productives, soit le capital et le travail, compatible avec la stabilité des prix à long terme.

* 44 Commission européenne, « European Economic Forecast. Automn 2013 », European Economy , 7/2013, novembre 2013.

* 45 OCDE, « Evaluation économique intérimaire », 3 septembre 2013.

* 46 Le groupe technique de la Commission économique de la Nation se réunit pour comparer les prévisions économiques du Gouvernement à celles des principaux instituts de conjoncture privés et publics.

* 47 OCDE, OECD Economic Outlook , mai 2013.

* 48 FMI, World Economic Outlook. Transitions and Tensions , octobre 2013.

* 49 Commission européenne, novembre 2013, op. cit.

* 50 Ibid.

* 51 Ibid.

* 52 FMI, octobre 2013, op. cit.

* 53 L'indicateur synthétique de confiance des ménages repose sur une enquête menée par l'Insee chaque mois auprès des ménages. Cette dernière permet l'étude de l'opinion qu'ont les ménages sur leur environnement économique et sur certains aspects de leur situation économique personnelle (niveau de vie passé et futur, situation financière personnelle passée et future, perspective de chômage, opportunité de faire des achats importants, capacité à épargner actuelle et dans les mois à venir).

* 54 Cf. avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2013-03, op. cit.

* 55 Cf. Caroline Klein et Olivier Simon, « Le modèle MESANGE nouvelle version réestimée en base 2000 », Documents de travail de la DGTPE , mars 2010.

* 56 Le solde primaire correspond à la capacité de financement des administrations publiques avant paiement des intérêts sur la dette publique.

* 57 Comme cela est indiqué infra , sur un effort en recettes de 2,7 milliards d'euros, 1,8 milliards d'euros proviendraient de la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscales.

* 58 Les notions d'effort structurel et d'ajustement structurel sont précisées infra .

* 59 Cf. loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 précitée.

* 60 Cf. audition de Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, le 9 octobre 2013 par la commission des finances du Sénat.

* 61 Cf. avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2013-03, op. cit.

* 62 Cf. rapport n° 711 (2012-2013) sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2012 fait par François Marc au nom de la commission des finances du Sénat.

* 63 Seules les dépenses de chômage sont supposées cycliques. Les autres dépenses sont supposées structurelles.

* 64 L'élasticité des prélèvements obligatoires correspond au rapport entre la croissance des prélèvements à législation de l'année n-1 et la croissance du PIB de l'année n. Par conséquent, une élasticité égale à l'unité signifie qu'une hausse de 2,5 % du PIB en valeur s'accompagnera d'une augmentation spontanée - soit hors mesures nouvelles - des recettes fiscales de 2,5 %. Aussi, si l'élasticité est inférieure à l'unité, les recettes progressent spontanément moins vite que le PIB en valeur.

* 65 En comparaison avec un objectif de diminution du solde structurel de 2 points de PIB arrêté dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

* 66 Cf. le tome I du rapport n° 148 (2012-2013) sur le projet de loi de finances pour 2013 fait par François Marc au nom de la commission des finances du Sénat.

* 67 Cf. rapport d'information n° 712 (2012-2013) préparatoire au débat d'orientation des finances publiques (DOFP) pour 2014 fait par François Marc au nom de la commission des finances.

* 68 Ce taux de 1,3 % correspond à la prévision d'inflation en avril 2013, soit 1,2 %, plus 0,1 point du fait du rattrapage au titre de l'année passée de l'écart entre l'inflation constatée et la prévision d'inflation pour 2012.

* 69 Par conséquent, le montant prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne est revu de 20,4 milliards d'euros en loi de finances initiale à 22,2 milliards d'euros.

* 70 Projet de budget rectificatif n° 2 de la Commission européenne, enregistré le 27 mars 2013, COM(2013) 183.

* 71 Les multiplicateurs budgétaires correspondent à l'impact sur le PIB d'une variation des dépenses ou des recettes publiques d'un point de PIB.

* 72 Le Fonds monétaire international (FMI) a estimé, en octobre 2012, que les multiplicateurs budgétaires avaient atteint, au cours de la crise économique, un niveau compris entre 0,9 et 1,7.

* 73 Cf. avis n° 76 (2013-2014) sur le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites fait par Jean-Pierre Caffet au nom de la commission des finances du Sénat.

* 74 Cf. avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2013-03, op. cit.

* 75 OCDE, « Measuring cyclically-adjusted budget balances for OECD countries », OECD Economics Department Working Papers , n° 434, juillet 2005.

* 76 Cette baisse du concours de l'Etat aux collectivités territoriales est imputée exclusivement sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) et est répartie entre les collectivités au prorata de leurs recettes totales.

* 77 Cf. avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2013-03, op. cit.

* 78 Cf. avis n° 76 (2013-2014) sur le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, op. cit.

* 79 Cf. audition de Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, le 9 octobre 2013 par la commission des finances du Sénat.

* 80 Le « Manuel SEC95 pour le déficit public et la dette publique » publié par la Commission européenne indique que le secteur des administrations publiques « comprend toutes les unités institutionnelles qui sont des autres producteurs non marchands dont la production est destinée à la consommation individuelle et collective et dont la majeure partie des ressources provient de contribution obligatoires versées par des unités appartenant aux autres secteurs, et/ou toutes les unités institutionnelles dont l'activité principale consiste à effectuer des opérations de redistribution du revenu et de la richesse nationale ».

* 81 Cf. Commission européenne, novembre 2013, op. cit.

* 82 D'autant que, mises à part les dépenses d'assurance chômage, les dépenses des administrations publiques sont considérées comme peu sensibles aux évolutions de la conjoncture.

* 83 Insee, « Les comptes des administrations publiques en 2012 », Insee Première , n° 1446, mai 2013.

* 84 A titre de rappel, le PIB potentiel correspond au niveau de production qui résulterait du plein emploi des ressources productives, soit le capital et le travail, compatible avec la stabilité des prix à long terme.

* 85 Le PIB potentiel désigne le niveau maximal de production soutenable à long terme, eu égard aux facteurs de production disponibles, sans entraîner une accélération de l'inflation, soit sans créer de tensions excessives sur les marchés des biens et du travail.

* 86 Cf. avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2013-03, op. cit.

* 87 Cf. loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 précitée.

* 88 Le révisé 2013 correspond aux nouvelles prévisions de recettes pour l'année 2013, actualisées au regard des éléments connus (notamment les recettes fiscale encaissées) à la date de préparation du projet de loi de finances pour 2014.

* 89 Ces recettes supplémentaires sont réparties entre 0,4 milliard d'euros au titre de l'impôt sur le revenu ; 0,4 milliard d'euros pour l'impôt sur les sociétés ; 0,3 milliard d'euros s'agissant de l'impôt de solidarité sur la fortune ; 0,2 milliard d'euros pour l'imposition des successions ; 0,1 milliard d'euros pour les droits de mutation à titre gratuit

* 90 Un amendement adopté lors de la discussion à l'Assemblée nationale a prévu que la taxe exceptionnelle de solidarité sur les hautes rémunérations versées par les entreprises ne serait pas déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu, améliorant les recettes fiscales à hauteur de 16 millions d'euros.

* 91 Cette disposition a été supprimée lors des débats à l'Assemblée nationale.

* 92 Cette modification poursuit une évolution engagée dans la LFI 2013 avec l'élargissement de l'assiette à cinq substances polluantes émises dans l'air, un triplement du taux existant sur certains types d'émission et un abaissement du seuil d'assujettissement à la TGAP portant sur les particules fines.

* 93 La troisième loi de finances rectificative pour 2012 a prévu un financement du CICE par la fiscalité écologique à hauteur de 3 milliards d'euros en 2016.

* 94 En outre, la mise en place d'une véritable fiscalité environnementale dans le cadre du PLF 2014 a été confortée par l'adoption, à l'Assemblée nationale, de dispositions tendant :

- d'une part, à la diminution de 10 % à 5,5 % du taux de TVA applicable aux travaux d'amélioration de la qualité énergétique des logements (- 450 millions d'euros) ;

- d'autre part, à l'ajout d'une composante « air » à la taxe sur les véhicules de société, afin de tenir compte des oxydes d'azote, des composés organiques volatiles non méthaniques et des particules en suspension (+ 150 millions d'euros).

* 95 L'impôt sur les sociétés est payé par les entreprises qui en sont redevables sous la forme de quatre acomptes et d'une opération de solde. La somme des quatre acomptes versés est égale à l'impôt dû au titre de l'exercice précédent. A partir du troisième acompte, les entreprises peuvent moduler à la baisse leurs versements afin de tenir compte d'une éventuelle baisse de leur bénéfice courant, ce qu'on appelle l'autolimitation. Pour le quatrième et dernier acompte, les entreprises les plus grandes doivent le moduler à la hausse dès lors que leur bénéfice courant est supérieur à leur bénéfice de l'année précédente ; ce versement supplémentaire prend alors le nom de cinquième acompte.

* 96 Il s'agit de la réforme du 5 ème acompte (à hauteur de 1 milliard d'euros), de la limitation de la déductibilité des charges financières (1,3 milliard d'euros), de la limitation de l'imputation des déficits (0,5 milliard d'euros) et de l'application de la quote-part pour frais et charges sur les plus-values de long terme à la plus-value brute (et non nette), ainsi que l'augmentation de ce taux de 10 % à 12 % (1,4 milliard d'euros).

* 97 Cette progression inclut l'impact des mesures nouvelles. Hors mesures nouvelles, le bénéfice fiscal serait en recul de 3 %.

* 98 Ce transfert permet de compenser l'impact de la baisse du taux de cotisation famille sur l'équilibre du régime général (1,05 milliard d'euros) et de transférer les recettes perçues correspondant à la révision du quotient familial (1 milliard d'euros) et à la suppression de l'avantage fiscal sur la cotisation employeur pour les contrats collectifs santé (1 milliard d'euros).

* 99 Le doublement des taux ne s'est traduit par un doublement des produits attendus, car il a été tenu compte d'une révision à la baisse de la prévision d'assiette.

* 100 Henri Guillaume, rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, juin 2011.

* 101 Cette évaluation a été conduite en application de l'article 13 de la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, qui disposait que « dans les trois ans suivant l'entrée en vigueur de toute [dépense fiscale ou niche sociale], le Gouvernement présente au Parlement une évaluation de son efficacité et de son coût. Pour les mesures en vigueur au 1 er janvier 2009, cette évaluation est présentée au plus tard le 30 juin 2011 ».

* 102 Depuis la remise du rapport, les travaux se sont poursuivis pour identifier le périmètre exact des niches fiscales et sociales, tendant ainsi à en élargir le champ (hors CICE, les dépenses fiscales s'élèvent à 68,9 milliards d'euros dans le PLF 2014, contre l'estimation de 60 milliards d'euros alors retenue en 2011).

* 103 70,255 milliards d'euros à périmètre 2014.

* 104 Source : réponse au questionnaire budgétaire.

* 105 Ces deux réductions d'impôt ont été supprimées lors des discussions à l'Assemblée nationale.

* 106 Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique.

* 107 Par ailleurs, le produit prévisionnel de la contribution de la CDC représentative de l'impôt sur les sociétés est en augmentation de 142 millions d'euros par rapport à la LFI 2013.

* 108 Centre national du cinéma et de l'image animée.

* 109 Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté un amendement opérant un prélèvement de 11 millions d'euros sur le fonds de roulement de l'Institut national de la propriété intellectuelle (INPI).

* 110 Comme pour l'impôt sur les sociétés, ces régularisations des trop versés d'acompte, compensés sur le solde de l'année suivante, résultent de la mécanique même du dispositif.

* 111 L'évolution des dépenses d'une année sur l'autre doit, pour être pertinente, s'opérer sur des champs comparables d'une année sur l'autre. Sont donc exclus du calcul de la norme les mouvements constituant une simple réimputation en son sein (mesures de transfert) ou les mouvements entre le périmètre de la norme et une autre entité (mesures de périmètre) lorsqu'ils sont équilibrés.

* 112 Désormais intégrées dans le prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales, ces dépenses s'avèrent stables.

* 113 Nicole Bricq, rapport n° 204 (2011-2012) sur le projet de loi de finances pour 2012, tome II. Commentaire de l'article 16 ter du projet de loi.

* 114 Correspondant au produit de (A) + (B) + (C) + (D).

* 115 Un amendement adopté à l'Assemblée nationale a par ailleurs opéré un prélèvement, à hauteur de 11 millions d'euros, sur le fonds de roulement de l'Institut national de la propriété intellectuelle.

* 116 Correspondant au produit de (a) + (b) + (c).

* 117 Correspondant au produit de (i) + (ii).

* 118 Conseil des prélèvements obligatoires, La fiscalité affectée. Constats, enjeux et réformes, La Documentation française, juillet 2013, p. 63. En effet, comme l'observe le CPO, « (...) l'affectation de ressources fiscales constitue un mécanisme asymétrique pour l'Etat :

- en cas de rendements insuffisants pour assurer la couverture des dépenses, l'Etat joue le rôle « d'assureur en dernier ressort » : il intervient en effet en complément des taxes affectées, par le biais de versement de subventions d'équilibre ;

- en cas de taxe dynamique, avec des rendements élevés, les opérateurs bénéficient de surplus de ressources par rapport à leurs besoins, au risque d'introduire une forme de pilotage par les recettes, les incitant à augmenter leur périmètre d'intervention ou à constituer des réserves financières inemployées.

(...) En moyenne, la fiscalité affectée se traduit par un surcroît de dépenses, même si ponctuellement des dotations d'équilibre doivent être versées par l'Etat.

Au total, la mécanique de l'affectation des ressources fiscales apparaît défavorable aux finances publiques ; elle tend à exonérer certaines agences de l'objectif de maîtrise des finances publiques » .

* 119 Ibid. , p. 78.

* 120 Ibid. , p. 112.

* 121 Ibid. , p. 118.

* 122 « L'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) constitue également une forme de débudgétisation particulièrement massive, pointée dans le rapport de l'IGF sur les agences de l'Etat de 2012. L'agence vote en effet des autorisations d'engagement sans qu'aucun plafond n'ait été défini en loi de finances, alors que ses ressources, pour partie constituées de taxes affectées, sont limitées. Il en résulte une trajectoire financière insoutenable, puisque 21 milliards d'euros d'engagements ont été contractés par l'AFITF et ne sont pas couverts par des recettes prévisionnelles d'ici 2014 » ( ibid. , p. 122).

* 123 Ibid. , p. 129.

* 124 Ibid. , p. 130.

* 125 Ibid. , p. 73.

* 126 Compte tenu du montant des dépenses sous la norme en 2013 (371,9 milliards d'euros) et d'une prévision d'inflation de 1,3 %, le respect de la norme « zéro volume » implique que les dépenses ne doivent pas dépasser 376,7 milliards d'euros. Le PLF 2014 prévoir des dépenses s'élevant à 370,5 milliards d'euros, soit une économie de 6,2 milliards d'euros (1,66 %) par rapport à la norme « zéro volume ».

* 127 Soit une économie de 0,3 milliard d'euros par rapport à l'évolution tendancielle de cette dépense (estimée à + 0,8 milliard d'euros).

* 128 La différence avec la diminution des dépenses par rapport à la LFI 2013 (1,4 milliard d'euros) correspond à des changements de périmètre.

* 129 La LPFP ne prévoyait qu'une diminution de 0,1 milliard d'euros du plafond des taxes affectées en 2014. L'économie sur la norme de dépense s'élève à 528 millions d'euros (cf. supra ), soit un effort supplémentaire de plus de 0,4 milliard d'euros.

* 130 Les transferts aux collectivités territoriales comprennent les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales (LFI 2013 : 55,7 milliards d'euros) et les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (LFI 2013 : 2,7 milliards d'euros), soit 58,4 milliards d'euros en 2013. Le PLF 2014 prévoit 54,3 milliards d'euros de prélèvements sur recettes et 2,6 milliards d'euros de crédits relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », soit au total 56,9 milliards d'euros, en diminution de 1,5 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013, représentant une diminution supplémentaire de 750 millions d'euros par rapport à la baisse prévue par la LPFP (750 millions d'euros).

* 131 Cette révision à la baisse s'explique par des dépenses moins dynamiques que prévu (notamment du fait d'une moindre revalorisation des pensions, compte tenu de la révision à la baisse de l'inflation, et d'un nombre de départs en retraite plus faible qu'initialement envisagé dans la LFI), ainsi que par une dynamique de certaines recettes supérieure aux prévisions (en particulier, les contributions des établissements publics de La Poste et de France Télécom).

* 132 Sur le périmètre de la norme « zéro volume », le montant des économies par rapport à l'évolution tendancielle s'élève à 9 milliards d'euros, en incluant une économie de 0,5 milliard d'euros sur la charge de la dette, au titre de la réduction des déficits engagée depuis 2012.

* 133 Ces dépenses sont évaluées à 99,1 milliards d'euros dans la LFI 2013 et à 99,2 milliards d'euros dans le PLF 2014, soit une augmentation de 0,1 milliard d'euros et une économie de 2,6 milliards d'euros par rapport à l'évolution tendancielle de ces dépenses (estimée à 2,7 milliards d'euros).

* 134 Ces dépenses sont évaluées à 78,3 milliards d'euros dans la LFI 2013 et à 78,1 milliards d'euros dans le PLF 2014, soit une diminution de 0,2 milliard d'euros et une économie de 2,6 milliards d'euros par rapport à l'évolution tendancielle de ces dépenses (estimée à 2,4 milliards d'euros).

* 135 Cette économie se traduit par une diminution de la dotation globale de fonctionnement, répartie entre les collectivités territoriales au prorata de leurs recettes totales, conformément aux préconisations du Comité finances locales, soit - 840 millions d'euros pour les communes et l'intercommunalité (56 %), - 476 millions d'euros pour les départements (32 %) et - 184 millions d'euros pour les régions (12 %).

* 136 Inspection générale des finances (IGF), « Pour des aides simples et efficaces au service de la compétitivité », rapport n° 2013-M-016-02, juin 2013.

* 137 Inspection générale des finances, « L'Etat et ses agences », n° 2011-M-044-01, mars 2012.

* 138 Lors de ses débats, l'Assemblée nationale a ajouté un prélèvement à hauteur de 11 millions d'euros sur le fonds de roulement de l'Institut national de la propriété intellectuelle (INPI).

* 139 Alors que l'évolution tendancielle des dépenses de fonctionnement des opérateurs s'établit à + 0,6 milliard d'euros, elles diminuent (- 0,1 milliard d'euros) dans le PLF 2014, soit une économie par rapport à leur évolution tendancielle de 0,7 milliard d'euros.

* 140 Dont le transfert des emplois du réseau scientifique et technique du ministère de l'égalité des territoires et du logement et du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie vers le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), créé au 1 er janvier 2014 (- 2 966 ETPT pour le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie) et la poursuite du transfert de personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche dans le cadre du passage à l'autonomie des universités (- 1 876 ETPT pour le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche).

* 141 Si l'on intègre les suppressions d'emplois dans les budgets annexes, comme détaillé dans le tableau ci-après, le solde s'établit à - 3 280 ETP.

* 142 Le retour catégoriel correspondait aux mesures catégorielles dont bénéficiaient les agents du fait des économies liées aux suppressions d'emplois qui résultaient, jusqu'en 2012, du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite. Ce retour catégoriel devait être de 50 %, mais cette norme était, en pratique, souvent dépassée.

* 143 274,3 millions d'euros si l'on intègre les budgets annexes, comme dans les tableaux ci-après.

* 144 Votre rapporteur général rappelle que le solde du glissement vieillesse technicité (GVT) combine :

- le GVT positif (+ 1 139,5 millions d'euros dans le PLF 2014), correspondant à l'augmentation de la rémunération individuelle d'un agent en raison de son avancement sur la grille indiciaire (composante vieillesse) et de son changement de grade ou de corps, par concours ou promotion au choix (composante technicité),

- le GVT négatif (- 979,3 millions d'euros dans le PLF 2013), traduisant le fait que les nouveaux entrants, en début de carrière, ont un salaire généralement inférieur aux sortants, qui se trouvaient en fin de carrière.

* 145 La garantie individuelle de pouvoir d'achat, mise en place en 2007, compense la perte d'achat pour les fonctionnaires arrivés, notamment, en fin de carrière. Son mécanisme repose sur une comparaison entre l'évolution du traitement indiciaire brut (TIB) détenu sur une période de référence de quatre ans et celle de l'indice des prix à la consommation (hors tabac).

* 146 Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée. Rapport n° 69 (2012-2013). Citation de l'alinéa 240 du rapport annexé (p. 46).

* 147 Par hypothèse, l'horizon de l'évaluation découle de la date maximale présumée au décès du plus jeune ayant cause participant au système actuel (100 ans).

* 148 Décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse.

* 149 Les crédits de fonctionnement relevant du titre 3 (fonctionnement) couvrent un champ plus large : 55 milliards d'euros dans le PLF 2014 (y compris PIA).

* 150 On entend par intervention de guichet les dispositifs d'interventions versés automatiquement dès lors que le bénéficiaire du dispositif répond aux conditions définies par les textes.

* 151 Il convient d'observer que la nomenclature budgétaire ne distingue pas les dépenses d'intervention de guichet des autres dépenses de titre 6, ce qui ne facilite pas l'édiction de normes spécifiques basée sur une telle classification.

* 152 Source : réponse au questionnaire budgétaire.

* 153 Rapport annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'Etat ».

* 154 Organismes divers d'administration centrale.

* 155 Les primes et décotes à l'émission de titres sont le reflet des écarts entre la valeur d'émission et la valeur de remboursement des titres. Lorsque les émissions se font sur des souches anciennes dont les taux d'intérêt sont plus élevés que le taux de marché, la valeur d'émission est plus élevée que la valeur de remboursement et ce gain de trésorerie (non compté en recette en budgétaire) est étalé par la comptabilité nationale sur la durée de l'emprunt, ce qui se traduit par une clé de passage positive.

* 156 Ce solde intègre le gage sous la norme « zéro valeur » du troisième budget rectificatif de l'Union européenne, adopté fin 2012, à hauteur de 0,8 milliard d'euros.

* 157 1,64 milliard d'euros (cf. supra ).

* 158 Ces amortissements correspondent aux dettes de la SNCF, à hauteur de 1,1 milliard d'euros, et de Charbonnage de France (0,5 milliard d'euros).

* 159 Les éléments soulignés le sont par votre rapporteur général.

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