LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté sans modification les crédits de la présente mission.

Elle a par ailleurs supprimé l'article 61.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 29 octobre 2013, sous la présidence de M. Aymeri de Montesquiou, vice-président, puis de M. Philippe Marini, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Michèle André, rapporteure spéciale, sur la mission « Administration générale et territoriale de l'État » (et article 61).

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » bénéficiera, en 2014, d'une enveloppe de 2,7 milliards d'euros de crédits de paiement, hors fonds de concours. Cette hausse de 6,3 % par rapport à 2013 trouve son explication dans l'évolution du programme « Vie politique, cultuelle et associative », particulièrement sensible au cycle électoral.

La suppression de 550 emplois temps plein dans les préfectures et les sous-préfectures sera compensée par la création de plateformes. Visant au regroupement de moyens dans un chef-lieu de département ou de région, elles concernent, depuis 2013, les opérations « Chorus ». Trois régions (Franche-Comté, Lorraine et Picardie) expérimentent des plateformes de naturalisation, et une réflexion est en cours sur la création de plateformes de fabrication des passeports. Ces évolutions nous renvoient à la question de l'avenir de la représentation territoriale de l'État, que j'avais déjà abordée avec vous lors mon récent contrôle budgétaire. Le 9 septembre dernier, le ministre de l'intérieur a confié aux préfets des régions Alsace et Lorraine une « mission d'expérimentation sur la rénovation du réseau des sous-préfectures », dont les conclusions devraient être connues courant 2014.

Le fond de roulement de l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), soit 50,7 millions d'euros en 2013, risque d'être insuffisant en 2014. Provenant essentiellement de l'affectation de taxes et de redevances liées à la délivrance de titres d'identité et à l'immatriculation des véhicules, les ressources de celle-ci visent à couvrir le coût de fabrication des différents titres. Or un adulte paie son passeport 89 euros, quand le coût réel de fabrication se situe entre 55 et 69 euros selon la Cour des comptes. En revanche, la première carte d'identité est gratuite, et le permis de conduire comme le permis de conduire des bateaux de plaisance à moteur ne donnent lieu à aucune affectation de ressources en faveur de l'ANTS, qui assume pourtant leur fabrication. Il semble opportun de remettre à plat le mode de financement de l'ANTS afin de le rendre plus en phase avec son activité réelle. Ne faudrait-il pas aller vers une politique de vérité des prix ? Un alignement du montant du droit de timbre relatif au passeport sur le coût de ce titre serait souhaitable, de même qu'une révision du mode de calcul de la dotation accordée aux mairies procédant à l'enregistrement des demandes de passeport biométrique et à la remise de ce titre.

Trois scrutins seront organisés l'année prochaine. Leur coût sera de 117,6 millions d'euros pour les élections municipales, 56,7 millions d'euros pour les européennes et 1,5 million d'euros pour les sénatoriales. Au regard du coût moyen par électeur inscrit, l'élection présidentielle se révèle la plus coûteuse avec 4,32 euros par électeur : viennent ensuite les cantonales (3,75 euros), les législatives (3,63 euros) et les sénatoriales (seulement 0,32 euro en 2014). Les candidats au Sénat ont désormais l'obligation de tenir un compte de campagne.

En 2013, les dépenses de contentieux devraient atteindre 128,9 millions d'euros. Mon inquiétude porte sur le respect de l'autorisation budgétaire accordée sur l'exercice en cours, et sur la sous-évaluation de ce poste de dépense pour 2014 : 82 millions d'euros sont prévus, soit un montant identique à la dotation initiale pour 2013.

Sous ses réserves, je propose à la commission d'adopter les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » et de chacun de ses programmes.

M. Vincent Delahaye . - Les dépenses de personnel augmentent de 1,2 %, malgré la suppression de 550 emplois. D'où vient ce décalage ? Quant au coût des scrutins, il dépend du nombre de candidats : je suis surpris que les européennes, pour lesquelles seize ou dix-sept listes s'affrontaient la dernière fois, reviennent moins cher que les cantonales.

M. Philippe Dallier . - Il n'y a qu'un tour aux européennes.

M. Francis Delattre . - Je m'abstiendrai sur ce rapport parce qu'en région parisienne, la régionalisation des moyens techniques a pour conséquence que, dans nos départements, par manque d'infrastructures, les préfets ne peuvent coordonner certains dossiers. Ce mouvement, amorcé avant ce gouvernement, en vient à limiter le rôle des préfets de département à la sécurité. Le cas du Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) est éclairant : il y a deux ans, changer un arrêt de bus prenait quinze jours, maintenant cela demande deux ans. Nous avons besoin d'interlocuteurs et de moyens d'action au niveau du département.

- Présidence de M. Philippe Marini, président -

M. Yannick Botrel . - Le décalage entre les 1,2 % d'augmentation des dépenses de personnel et la suppression de 550 emplois temps plein est lié au glissement vieillissement technicité (GVT). Connaissons-nous le taux du GVT sur la globalité des dépenses de personnel ainsi que son évolution ?

M. Edmond Hervé . - L'expression « performance de la vie politique », que je relève page 28 de la note de présentation, pourrait prêter à ambiguïté et à contestation populiste. Ne pourriez-vous pas chercher une formulation plus objective ?

M. Éric Bocquet . - Je voterai contre un budget qui reste dans une logique de recul de l'administration territoriale. Ce dispositif ne remplacera jamais la proximité et la relation humaine dans l'administration.

M. Gérard Miquel . - Je voterai les crédits, après avoir entendu cet excellent rapport. Cependant, pour compléter les propos de François Delattre, il n'y a pas que la région parisienne qui subisse les inconvénients des mesures prises depuis plusieurs années. Nous sommes en pleine contradiction : nous faisons la décentralisation depuis trente ans, et nous voulons tout garder en l'état. Les dossiers sont dématérialisés, et il ne reste plus rien à faire dans certaines sous-préfectures, sinon maintenir la présence de l'État, c'est-à-dire un bâtiment à entretenir, un chauffeur et quelques collaborateurs. L'exemple des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) est probant : rien de tel pour retarder un projet ! La solution ne consisterait-elle pas à remettre des personnels qualifiés dans les préfectures et redéployer certaines sous-préfectures qui n'ont plus de raison d'être ?

M. Philippe Dallier . - Pourriez-vous vous intéresser aux conditions dans lesquelles les collectivités locales reçoivent les passeports ? Par souci de sécurité toutes les données sont numérisées ; pourtant, en bout de chaîne les passeports sont délivrés par un transporteur lambda. En moins d'un mois nous avons reçu deux fois les passeports de la commune voisine, et il manquait un colis dans une livraison : 40 passeports ont disparu ! Pourquoi dépenser autant d'argent dans la sécurisation des titres alors qu'il y a de telles failles de sécurité ?

M. Aymeri de Montesquiou . - Monsieur Miquel, Clemenceau s'interrogeait déjà sur l'utilité de certaines sous-préfectures. Quant aux élections, je déplore que l'on solde le prix des sénateurs !

M. Philippe Marini, président . - Jusqu'à une époque récente, le coût de leur élection était nul.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - Sauf le coût de l'organisation par les préfectures.

M. Philippe Marini, président . - Et la rémunération de l'électeur.

M. Roger Karoutchi . - D'une part l'État réduit depuis des années ses effectifs, amoindrissant sa capacité d'analyse et de décision, et, d'autre part - comme c'est le cas pour l'accueil des demandeurs d'asile - il concède certaines tâches régaliennes à des associations extérieures, qui ne sont pas habilitées pour les effectuer, et qu'il paie, qu'il subventionne. Cela ne coûte pas moins cher. Je comprends l'habillage électoral de la réduction des effectifs, mais c'est une question d'équilibre, il faut arrêter de déshabiller l'État.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - Bien sûr, les ministres de l'intérieur successifs s'interrogent sur le réseau des sous-préfectures. La nouvelle hiérarchie du préfet de région sur le préfet de département est à mes yeux un vrai problème. Elle fait de ce dernier un « sous » préfet aux prérogatives diminuées, ce qui éloigne l'autorité de l'État du citoyen. On manque de bras : je suis d'accord pour dire, avec Roger Karoutchi, que l'on atteint les limites de l'exercice pour ne pas déshabiller les services régaliens de l'État, dont nous mesurons l'importance stratégique. J'ai le même souci que vous.

L'augmentation des crédits, malgré la diminution des postes, vient bien d'un GVT positif, de 15,8 millions d'euros pour les préfectures, et des pensions qui augmentent de 11,6 millions d'euros.

Le prix des élections est calculé en divisant le coût total par le nombre de citoyens. Les européennes sont un scrutin de liste à un tour. Pour les cantonales, il y a beaucoup de candidats de premier tour et le scrutin présente deux tours. Nous ne soldons pas le prix des sénateurs, cela serait difficile : nous avons tant de valeur, chacun de nous et tous ensemble ! C'est la seule élection où des électeurs sont indemnisés, mais le coût reste très supportable.

L'expression « performance » vient de la maquette du ministère. Je soulignais en fait dans ma note de présentation, page 28, la difficulté à « mesurer la performance ». Dois-je écrire « activité » ?

Il n'est pas possible d'utiliser les passeports perdus, monsieur Dallier, puisqu'ils comportent des empreintes. Je vais toutefois signaler le cas de votre commune à l'ANTS.

M. Philippe Marini, président . - La remarque sémantique d'Edmond Hervé m'incite à vous suggérer l'expression « performance de l'organisation électorale », et non « performance de la vie politique ».

M. Aymeri de Montesquiou . - C'est sans aucun doute la bonne formule.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » .

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - L'article 61 rattaché à la mission propose de dématérialiser la propagande électorale pour les élections européennes...

M. Philippe Dallier . - Quelle mauvaise idée !

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - ... en supprimant l'envoi par courrier de cette propagande et en lui substituant une série de mesures d'information telles que la publication sur des sites Internet, l'affichage des listes quinze jours avant le scrutin devant chaque bureau de vote et une campagne digitale d'information et d'incitation au vote. Le Gouvernement évalue à 27,6 millions l'économie nette.

Cette mesure n'est pas pertinente. Pour nombre d'électeurs la réception de la version papier de la propagande électorale constitue la meilleure ou l'unique voie d'information pour une élection à venir. Ce courrier présente un caractère indispensable. Sa suppression ferait courir le risque d'un taux de participation encore plus faible que par le passé à l'élection européenne, qui souffre traditionnellement d'un désintérêt relatif de la part des Français. La démocratie a un coût, mais c'est un coût d'investissement sur le bon fonctionnement de nos institutions et non pas une dépense à fonds perdus. Je vous propose un amendement de suppression de cet article. Je serai attentive à ce que les 5 millions d'euros budgétés pour la campagne d'information ne disparaissent pas en contrecoup.

M. Vincent Delahaye . - Les élections européennes sont d'autant moins bien choisies pour expérimenter cette dématérialisation qu'elles souffrent d'un manque d'intérêt. Une élection présidentielle, peut-être...

M. Michel Berson . - C'est trop tôt.

La commission a adopté l'amendement proposé par Mme Michèle André, rapporteure spéciale.

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Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la présente mission. Elle a proposé de confirmer la suppression de l'article 61.

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