EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Saisie en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a, dès le stade de la commission, rétabli sans surprise l'essentiel des deux textes qu'elle avait adoptés en première lecture pour le projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur et le projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen.

Cette situation découle de la forte différence d'appréciation qui s'est manifestée en première lecture entre les deux assemblées sur le bien-fondé et le périmètre de cette réforme, ce qui a logiquement conduit à l'échec de la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 9 octobre 2013.

En effet, en première lecture, après que les deux textes transmis par l'Assemblée nationale furent rejetés en commission le 11 septembre 2013, le Sénat a profondément modifié, en séance publique, le projet de loi organique qui lui était soumis, notamment en différenciant le régime d'incompatibilités applicable aux députés et aux sénateurs, et en complétant le projet de loi par des dispositions modifiant les incompatibilités entre mandats locaux et instituant de nouvelles incompatibilités et éligibilités à destination des collaborateurs politiques du président de la République, des membres du Gouvernement et des autorités exécutives locales.

L'Assemblée nationale a donc confirmé son souhait que la réforme proposée par le Gouvernement et qu'elle a notablement enrichie en première lecture aboutisse malgré l'opposition qui s'est majoritairement exprimée au Sénat.

Depuis l'examen en première lecture, la réflexion s'est poursuivie au sein de notre assemblée avec notamment la présentation le 17 décembre 2013 du rapport d'information présentée par notre collègue Jean-Claude Peyronnet au nom de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation afin de « tirer les conséquences des règles de non-cumul », plaidant ainsi « pour l'association des parlementaires aux commissions locales ». 1 ( * )

I. UN DÉSACCORD PROFOND ET PERSISTANT SUR LES RÈGLES DE CUMUL DES MANDATS ET DES FONCTIONS AINSI QUE SUR CELUI DES INDEMNITÉS

A. LE RETOUR AU PROJET DE LOI ORGANIQUE ADOPTÉ INTIALEMENT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, à deux reprises, un texte appliquant l'ensemble des nouvelles incompatibilités aux députés et sénateurs sans distinction ( articles 1 er , 1 er ter B, 1 er ter et 1 er quater du projet de loi organique ), contrairement au Sénat qui avait souhaité que les sénateurs puissent exercer au moins parallèlement une fonction exécutive locale. Dans ce cadre, le Sénat avait intégré dans la liste des fonctions entrant dans le champ de l'incompatibilité avec le mandat sénatorial les fonctions exécutives au sein des EPCI et des syndicats mixtes. Le Sénat avait ainsi modifié en conséquence l'intitulé du projet de loi organique que l'Assemblée nationale a, en nouvelle lecture, rétabli dans sa version d'origine.

L'Assemblée nationale a rétabli, dans la rédaction qu'elle avait adopté en première lecture après l'avoir complétée par rapport à la proposition du Gouvernement, le périmètre de la nouvelle incompatibilité parlementaire portant sur une fonction exécutive locale ou la présidence de l'organe délibérant lorsqu'elle est dissociée de l'exécutif local ( articles 1 er du projet de loi organique ) qu'il s'agisse des collectivités territoriales de droit commun ou à statut particulier ou des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). De même, l'Assemblée nationale a réintroduit l'incompatibilité avec les fonctions « dérivées » locales, qu'elle avait adoptée à l'initiative de son rapporteur, en première lecture ( article 1 er ter du projet de loi organique ).

Dans le même esprit, l'Assemblée nationale a abrogé de nouveau les dérogations aux incompatibilités frappant un parlementaire lui permettant, dans des conditions précises, d'exercer des fonctions au sein d'organismes « satellites » dès lors qu'il représente sa collectivité et qu'il n'est pas rémunéré ( article 1 er quater du projet de loi organique ).

En revanche, le Sénat a adopté, en première lecture, sans modification l'interdiction pour un parlementaire de recevoir, comme élu local, une délégation accordée par arrêté du maire, du président de conseil général, régional, ou du président de l'EPCI ( article 3 bis du projet de loi organique ).

S'agissant du cumul des indemnités, l'Assemblée nationale n'a pas suivi le Sénat qui avait supprimé l'interdiction du cumul de deux indemnités parlementaires lorsqu'un député devient sénateur ou inversement ( article 1 er ter A du projet de loi organique ), pas plus qu'elle n'a souhaité, comme l'avait pourtant décidé le Sénat en première lecture à l'unanimité, exclure pour un parlementaire la perception des autres indemnités liées à la détention d'un mandat ou de fonctions locaux ( article 3 ter A du projet de loi organique ).

Pour la mise en oeuvre et l'application des nouvelles incompatibilités parlementaires, les deux assemblées avaient adopté dans les mêmes termes, dès le stade de la première lecture, les modalités obligeant un parlementaire à abandonner un mandat ou une fonction en cas d'incompatibilité ( article 2 du projet de loi organique ) ainsi que celles de son remplacement au sein de son assemblée en cas d'abandon du mandat parlementaire ( article 3 du projet de loi organique ).

En revanche, l'Assemblée nationale a supprimé la modification introduite par le Sénat, à l'unanimité, qui visait à obliger à l'organisation d'une élection partielle lorsqu'un parlementaire abandonnait son mandat à la suite du renouvellement au-delà de six mois d'une mission auprès du Gouvernement ( article 3 du projet de loi organique ).

Enfin, un accord entre les deux assemblées est intervenu dès la première lecture sur la date d'entrée en vigueur de la réforme, soit lors premier renouvellement de l'Assemblée nationale et du Sénat suivant le 31 mars 2017 ( article 4 du projet de loi organique ), et sur l'application sur l'ensemble du territoire de la République de cette réforme ( article 3 ter du projet de loi organique ).


* 1 Rapport d'information n° 238 (2013-2014) de M. Jean-Claude Peyronnet, au nom de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation : « Tirer les conséquences des règles de non-cumul : pour l'association des parlementaires aux commissions locales » - décembre 2013.

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