DEUXIÈME PARTIE : UN ACCORD INTERGOUVERNEMENTAL INDISPENSABLE AU FONCTIONNEMENT DU FONDS DE RÉSOLUTION UNIQUE

Deux principales raisons expliquent que le règlement européen relatif au mécanisme de résolution unique (MRU) ait été accompagné d'un accord intergouvernemental, ayant un statut de traité international, sur le transfert et la mutualisation des contributions au fonds de résolution unique (FRU). D'un point de vue juridique, certains États membres, en particulier l'Allemagne, ont fait valoir que l'article 114 du Tratité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) n'aurait pas représenté une base juridique suffisante pour lever un impôt bancaire, en organiser le transfert dans un fonds européen ainsi que la mutualisation . D'un point de vue diplomatique, il s'agissait en outre de conditionner le MRU à un accord obtenu à l'unanimité des États membres participants , et nécessitant en outre une ratification , tandis que le règlement européen est d'application directe, sans validation par les Parlements nationaux.

La France a combattu cette idée dans la négociation, estimant que l'ensemble des règles contenues dans l'AIG aurait pu figurer directement dans le règlement MRU. Cependant, les États membres ont finalement décidé de dissocier le MRU en deux piliers, le transfert et la mutualisation des contributions étant prévus par un traité intergouvernemental.

En conséquence, l'article 77 du règlement MRU prévoit que « le recours au Fonds est subordonné à l'accord par lequel les États membres participants conviennent de transférer au Fonds les contributions qu'ils perçoivent au niveau national conformément au présent règlement et à la directive 2014/59/UE, et est conforme aux principes définis dans cet Accord ». Ainsi, c'est le seul recours du FRU qui est conditionné à la mise en oeuvre de cet accord. Le MRU pourrait, en toute rigueur, fonctionner sans l'AIG, c'est-à-dire sans le FRU ; il serait cependant privé d'une de ses composantes essentielles, qui en assure la crédibilité financière.

L'accord concernant le transfert et la mutualisation des contributions au fonds de résolution unique (ci-après AIG) a été signé à Bruxelles le 21 mai 2014, par l'ensemble des États membres de l'Union européenne, à l'exception du Royaume-Uni et de la Suède 26 ( * ) . Il comporte quatre titres et 16 articles, ainsi que deux déclarations d'intention. L'accord présente deux principaux objets :

- sécuriser juridiquement et organiser le transfert des contributions des banques au fonds de résolution unique ;

- prévoir les conditions d'utilisation des ressources du Fonds dans la période transitoire , marquée par une mutualisation progressive des compartiments nationaux.

I. LE TRANSFERT DES CONTRIBUTIONS DES ÉTABLISSEMENTS

L'article 3 de l'AIG prévoit que les « parties contractantes s'engagent conjointement à transférer au Fonds, de manière irrévocable, les contributions qu'elles perçoivent auprès des établissements agréés sur leur territoire respectif en vertu des articles 69 et 70 du règlement MRU, et conformément aux critères fixés auxdits articles et dans les actes délégués et actes d'exécution qui y sont visés ».

Conformément à l'article 70 du règlement MRU, le conseil de résolution unique (CRU) est chargé de calculer la contribution individuelle de chaque établissement (voir supra ). En revanche, il ressort de l'AIG que la collecte elle-même des contributions est bien nationale ; celles-ci seront perçues annuellement et devront être transférées avant le 30 juin de chaque année 27 ( * ) .

Il convient de souligner que ces modalités s'appliquent aussi bien aux contributions ex ante (contributions permettant d'atteindre le niveau-cible dans la phase transitoire) qu'aux contributions ex post (contributions permettant de rétablir le niveau du fonds en cas d'intervention).

En outre, l'article 3 de l'AIG prévoit que les États signataires s'engagent à transférer les contributions perçues avant la date d'application de l'AIG et sur la base de la directive BRR . Cette disposition vise les contributions de l'année 2015 , qui seront perçues par chaque État membre en application de la directive BRR dans le cadre de la constitution de leur système de résolution national. S'agissant des États membres de la zone euro, ce système de résolution national est intégré au MRU dès le 1 er janvier 2016. En conséquence, les contributions perçues en 2015 devront être transférées au FRU « au plus tard le 31 janvier 2016 » 28 ( * ) .

Ainsi, dès le premier semestre de son entrée en vigueur, le fonds de résolution unique disposera de ressources équivalent à deux annuités sur huit, soit environ 11,6 milliards d'euros .


* 26 En effet, l'ensemble des États membres ayant vocation à rejoindre la zone euro, à l'exception de ces deux États à qui une dérogation spécifique est accordée par les traités, ils ont vocation à rejoindre l'union bancaire et le mécanisme de résolution unique.

* 27 Pour les établissements français, il s'agit d'une modification du calendrier, puisque les contributions au Fonds de garantie des dépôts et de résolution sont jusqu'alors sollicitées, par arrêté du ministre, vers le mois de novembre de chaque année.

* 28 Ou au plus tard un mois après l'entrée en vigueur de l'accord si celui-ci n'est pas encore entré en vigueur le 1 er janvier 2016.

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