Rapport n° 370 (2014-2015) de Mmes Catherine DEROCHE , Dominique ESTROSI SASSONE et M. François PILLET , fait au nom de la commission spéciale, déposé le 25 mars 2015

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N° 370

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 mars 2015

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission spéciale (1) sur le projet de loi , CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance , l' activité et l' égalité des chances économiques ,

Par Mmes Catherine DEROCHE, Dominique ESTROSI SASSONE et M. François PILLET,

Sénateurs

Tome I : Rapport

(1) Cette commission spéciale est composée de : M. Vincent Capo-Canellas , président ; Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone, M. François Pillet, rapporteurs ; MM. Alain Bertrand, Jacques Bigot, Mmes Nicole Bricq, Annie David, Jacky Deromedi, M. Jean Desessard, Mmes Pascale Gruny, Élisabeth Lamure, MM. Didier Mandelli, Yannick Vaugrenard , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean-Marc Gabouty, Claude Raynal , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Philippe Bas, Jean Bizet, Jean-Pierre Bosino, Henri Cabanel, Philippe Dominati, Mmes Anne Emery-Dumas, M. Jean-Jacques Filleul, Mmes Catherine Génisson, Corinne Imbert, Sophie Joissains, Fabienne Keller, MM. Jean-Claude Lenoir, Didier Marie, Jean-Pierre Masseret, Pierre Médevielle, Michel Raison, Alain Richard, Jean-Pierre Sueur, Henri Tandonnet.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

2447 , 2498 et T.A. 473

Sénat :

300 et 371 (2014-2015)

Réunie les 17, 18, 24 et 25 avril 2015, sous la présidence de M. Vincent Capo-Canellas, président , votre commission a examiné le rapport de Mmes Catherine Deroche , Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet sur le projet de loi n° 300 (2014-2015) pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale .

Les trois rapporteurs ont successivement présenté leurs observations et leurs propositions sur les 295 articles du projet de loi, répartis en trois volets consacrés respectivement aux dispositions économiques, sociales et juridiques.

Votre commission a examiné 976 amendements .

Elle a adopté 347 amendements, dont 289 sur la proposition de ses trois rapporteurs. Elle a également adopté sans modification de nombreux articles du projet de loi ( 124 au total).

Parmi les amendements adoptés par votre commission, plusieurs suppriment des demandes d'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, qui n'ont pas lieu d'être ou réduisent l'ampleur de leur périmètre. À cet égard, sans remettre en cause la pertinence de la législation déléguée, pour des objets précisément définis ou de nature très technique, votre commission s'est attachée à garantir le respect des prérogatives parlementaires en limitant les habilitations au strict nécessaire, privilégiant, à chaque fois, les solutions qui permettaient un examen éclairé et public des dispositions envisagées. Elle a ainsi accepté le principe des ordonnances sur le canal Seine-Nord Europe (article 3 bis A), la liaison « Charles-de-Gaulle Express » (article 3 bis ) ou la carte d'identité virtuelle des entreprises (article 60). Elle a au contraire supprimé le recours aux ordonnances pour la réforme très large du code de l'environnement (article 28) et encadré strictement celle relative la constitution de structures d'exercice interprofessionnelles associant des professions juridiques entre elles et des professions juridiques et du chiffre (article 21).

Pour les mêmes motifs tenant à la permanence d' incertitudes majeures sur les intentions du Gouvernement , elle a supprimé l'article 50 A du projet de loi visant à lever les obstacles à la création de sociétés de projet pour l'acquisition de matériels de la défense.

D'autres amendements suppriment des demandes de rapports du Gouvernement au Parlement. Particulièrement nombreuses dans le texte transmis au Sénat, - plus d'une vingtaine - ces demandes de rapports ne sont le plus souvent qu'une réponse politique, sans contenu normatif, à une question posée par des parlementaires auxquels le Gouvernement n'est pas en mesure d'apporter une réponse positive.

Votre commission a principalement adopté des amendements précisant et complétant les dispositifs votés à l'Assemblée nationale pour les rendre opérants, modérer certains de leurs aspects qui risquaient de conduire à des blocages ou supprimer les mesures qui sortaient manifestement du domaine législatif et relevaient du domaine réglementaire . C'est le sens des positions qu'elle a prises concernant, par exemple, le permis de conduire (articles 8 ter et suivants), les nouvelles règles de tarification et d'installation des professions réglementées (articles 12 à 16), la réforme des tribunaux de commerce (articles 65 à 68) ou le travail dominical et en soirée (articles 71 à 82).

Elle a aussi complété le projet de loi pour proposer quelques dispositions fortes mais équilibrées qui seront de nature à véritablement favoriser la croissance, l'activité et par conséquent l'emploi.

Parmi ces mesures figurent, notamment, la fin du monopole de SNCF Mobilités pour les transports ferroviaires régionaux (article 1 er quinquies ), le doublement du plafonnement du dispositif « ISF PME » en contrepartie d'un ciblage plus restrictif (article 35 ter B), l'abaissement à 12 % du taux du forfait social applicable à un plan d'épargne pour la retraite collectif (article 35 nonies ), le lissage dans le temps des effets du franchissement des seuils sociaux (article 87 A), la simplification du compte pénibilité (article 97 quinquies ), ou encore l'assouplissement des conditions de conclusion des accords de maintien de l'emploi (article 98 A).

La commission spéciale a adopté le projet de loi ainsi modifié .

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Au cours de sa réunion du mercredi 10 décembre 2014, la Conférence des Présidents a décidé que le projet de loi pour la croissance et l'activité, alors en cours d'examen à l'Assemblée nationale, serait renvoyé, le moment venu, au Sénat, à une commission spéciale.

Dans cette perspective, et afin de faciliter le travail préparatoire de l'examen de ce texte, la Conférence des Présidents a autorisé la constitution d'un groupe de travail préfigurant cette commission spéciale, composé de 37 sénateurs désignés à la proportionnelle des groupes politiques. La composition du groupe de travail a été proclamée en séance publique le 14 janvier 2015 et il a tenu sa réunion constitutive le 20 janvier.

Après la transmission du texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale le 19 février 2015, le groupe de travail s'est constitué en commission spéciale.

I. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION SPÉCIALE.

A. DES AUDITIONS NOMBREUSES, COUVRANT L'ENSEMBLE DES SUJETS TRAITÉS

Entre le 20 janvier et le 20 mars 2015, de nombreuses auditions ont été organisées. Elles ont permis au groupe de travail puis à la commission spéciale d'entendre cinq ministres (Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche, François Rebsamen, ministre du travail de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice et Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense), des économistes et des personnalités qualifiées. Les auditions plénières ont été systématiquement ouvertes à l'ensemble des sénateurs et à la presse 1 ( * ) .

Entre le 4 février et le 12 mars, les trois rapporteurs ont, pour leur part, organisé 104 auditions, ouvertes à l'ensemble de leurs collègues de la commission spéciale et recueilli de très nombreuses contributions écrites 2 ( * ) .

Enfin, dès le 7 février, avec l'accord du bureau de la commission, un « espace participatif » a été ouvert sur la page du site Internet du Sénat réservée à la commission. Cette démarche participative a connu un grand succès puisqu'au 13 mars, date de sa fermeture, 218 contributions avaient été recueillies.

B. LES DOMAINES RESPECTIFS DES RAPPORTEURS

Pour l'examen du projet de loi, comprenant initialement 106 articles, la commission spéciale de l'Assemblée nationale avait désigné un rapporteur général et huit rapporteurs thématiques 3 ( * ) .

Votre commission spéciale, dès la constitution du groupe de travail préfiguratif a fait le choix d'une formation beaucoup plus resserrée, en désignant trois rapporteurs, chargés respectivement d'un des trois volets principaux du texte.

Le tableau suivant précise les responsabilités de chacun des rapporteurs :

Volet « social »

Mme Catherine Deroche

Articles 34 à 40, 40 ter : épargne salariale

Article 42 : filiales de centres hospitaliers universitaires (CHU)

Article 64 : rapport sur les retraites supplémentaires

Articles 71 à 82 bis : exceptions au repos dominical et en soirée

Articles 85 à 94 bis : application du droit du travail, dialogue social, simplifications pour les entreprises

Articles 95 à 97 bis A : détachement de salariés

Articles 98 à 104, 105 à 106 : licenciement, dispositions finales

Volet « économie »

Mme Dominique Estrosi Sassone

Articles 1 à 9 quater : ARAFER, transport par autocar, autoroutes, permis de conduire

Articles 10 A à 10 quinquies : distribution, urbanisme commercial

Articles 11 bis A, 11 bis , 11 ter A, 11 ter B, 11 quater A à 11 nonies : consommation

Article 22 ter : régime des gens de mer

Articles 23 à 25 octies : urbanisme, logement

Articles 26 à 28, 28 ter à 33 septies C, 33 nonies : environnement, télécoms

Articles 40 bis A à 40 ter A : financement de l'économie

Article 40 quater : bourses régionales

Articles 43 A à 54 quater : participations publiques, industrie

Articles 60 A, 60, 60 ter à 63, 105 A : labels, facturation électronique, dispositions diverses

Articles 97 bis à 97 quater : transport maritime et fluvial

Volet « justice »

M. François Pillet

Article 11 : injonction structurelle

Articles 11 bis B, 11 bis C, 11 ter : droit de la consommation

Articles 12 à 22 bis : professions réglementées, sociétés d'exercice libéral

Article 28 bis : cession du fonds de commerce

Article 33 septies : publicité sur internet

Articles 41 A à 41 ter : propriété industrielle

Articles 55 A à 58 quater : droit commercial et droit des sociétés, commande publique

Articles 59 à 59 quinquies : pouvoirs de l'Autorité de la concurrence

Articles 60 bis , 65 à 70 ter : tribunaux de commerce et procédures collectives

Article 63 bis : comptes rendus de mandat

Article 64 bis : « retraites-chapeaux »

Articles 83 à 84 bis : justice prud'homale

II. UN TEXTE DISPARATE ET INSTABLE

A. UN FIL CONDUCTEUR TÉNU

L'exposé des motifs du projet de loi pour la croissance et l'activité le présente comme un texte qui « vise à assurer la confiance, à simplifier les règles qui entravent l'activité économique et à renforcer les capacités de créer, d'innover et de produire des Français et en particulier de la jeunesse ».

Les intitulés des trois titres qui le composent sont marqués de la même ambition et résonnent comme une devise : « Libérer l'activité - Investir - Travailler ».

D'un avis général, pourtant, et à l'examen du contenu des articles qu'il contient, le projet de loi qui vous est présenté s'apparente plutôt à un classique projet de loi portant diverses mesures d'ordre économique et social auquel on aurait joint quelques dispositions relatives à l'administration de certaines professions du droit et réformant certaines juridictions.

C'est en effet le caractère hétéroclite des mesures proposées qui frappe en premier lieu : du permis de conduire au régime de la location en meublé et à la justice prud'homale, le projet de loi touche à tous les secteurs. Cette caractéristique s'est amplifiée encore au cours des débats à l'Assemblée nationale, en commission spéciale puis en séance publique. Elle s'accompagne d'un écart considérable entre les divers articles, au regard de leurs enjeux, sociaux, financiers ou économiques.

Le second reproche entendu sur ce projet de loi porte sur le décalage entre l'ambition affichée (et la médiatisation extrême accompagnant le texte) et la prudence des réformes proposées, particulièrement quand il s'agit de redonner des marges de manoeuvre et de compétitivité à l'économie française et aux entreprises.

C'est ce que notait Jacques Attali devant votre commission 4 ( * ) , déclarant : « Ce n'est pas pour son contenu que la loi Macron doit être votée, mais parce qu'elle pourrait annoncer d'autres lois portant sur des sujets de fond. Elle est un peu comme le démarreur d'une voiture, dont le conducteur appuiera ensuite sur l'accélérateur ».

Cette appréciation était confirmée, avec des nuances, par les économistes entendus par votre commission 5 ( * ) :

- « il ne faut pas surestimer les effets macroéconomiques que l'on peut attendre de ce texte, dont les mesures restent d'ampleur limitée » - Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France stratégie ;

- « Au total, ce projet de loi comporte bien quelques éléments positifs [...] Reste que l'on est loin du texte historique qui répondrait aux besoins de l'économie française » - Henri Sterdyniak, directeur du département économie de la mondialisation de l'OFCE ;

- « les curseurs vont dans le bon sens, mais le texte n'agira qu'à la marge [...] on s'en tient à des modifications cosmétiques, faites pour servir une entreprise de communication politique » - David Thesmar, professeur à HEC, membre du Conseil d'analyse économique ;

- « les mesures introduites par le projet de loi restent incrémentales, elles n'en vont pas moins dans la bonne direction » - Pierre Cahuc, professeur à l'École polytechnique, membre du Conseil d'analyse économique.

B. UNE ÉLABORATION LABORIEUSE

1. Des lacunes dans l'évaluation

Comme la Constitution l'exige 6 ( * ) , le projet de loi a été déposé accompagné d'une étude d'impact dont on aurait pu penser - compte tenu de l'intitulé même du projet - qu'elle fournirait des indications précises sur les conséquences des mesures proposées en terme d'emploi, de croissance, d'attractivité du territoire et même de pouvoir d'achat.

À cet égard, l'étude d'impact s'est révélée très fragile, au point que les ministres concernés par le texte ont renoncé eux-mêmes à présenter des objectifs chiffrés. Emmanuel Macron, ministre en charge du texte, déclarait ainsi devant votre commission 7 ( * ) : « J e pourrais vous donner des chiffres de mes services sur l'impact en termes d'emploi. Je préfère être prudent, comme sur les questions de pouvoir d'achat : toutes les études sont à dix ans. Selon France Stratégie, l'ouverture des transports créerait 10 000 emplois, l'ouverture dominicale plusieurs milliers, plus au moins 2 000 dans les zones touristiques internationales et les gares. Je préfère évaluer régulièrement ces effets . »

Pour pallier les insuffisances de l'évaluation initiale, le ministre de l'économie a pris une initiative originale qui s'est avérée, in fine , assez peu concluante. À sa demande et sous l'autorité de France Stratégie, a été mise en place en janvier 2015 une « commission d'étude des effets de la loi pour la croissance et l'activité », composée de dix experts indépendants et chargée de « mettre à la disposition du public « parlementaire » et du grand public des notes de synthèse sur les points les plus marquants de la loi ».

Après avoir remis dans un délai très court cinq études portant sur l'urbanisme commercial, les professions réglementées, la justice prud'homale, l'ouverture de l'offre de transport par autocar et la réforme du travail dominical, la commission a cessé de fonctionner. Elle n'a donc pas examiné les nombreuses et importantes modifications ainsi que les nouveautés intégrées par l'Assemblée nationale. Au total, elle aura surtout servi - sans grand succès - à appuyer les argumentaires développés par le ministre de l'économie pour convaincre la majorité de l'Assemblée nationale.

2. Une instabilité peu commune

Dernière caractéristique du projet de loi, son instabilité, la commission spéciale de l'Assemblée nationale décidant au cours des débats, le plus souvent avec l'accord du Gouvernement, d'intégrer de nouvelles dispositions majeures ou d'en retirer d'autres. Ce phénomène d'« entrée-sortie » a trouvé une illustration frappante s'agissant de la question du secret des affaires.

Les articles 64 ter à 64 octies visant à instaurer un régime de protection civile et pénale du secret des affaires ont ainsi été adoptés en commission à l'initiative de notre collègue député Richard Ferrand, rapporteur général de la commission spéciale. Ces articles reprenaient la proposition de loi n° 2139 déposée sur le sujet le 16 juillet 2014 par nos collègues députés Bruno Le Roux, président du groupe SRC, et Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Suscitant une polémique de la part d'une partie des médias, craignant que ces dispositions n'entravent ou ne sanctionnent les enquêtes journalistiques, ces dispositions ont été supprimées en séance par l'Assemblée nationale.

Vos rapporteurs estiment cependant indispensable que la France puisse se doter, comme d'autres pays, d'un dispositif efficace de protection des secrets d'affaires, très attendu par les entreprises, en complément des mécanismes actuels, notamment, de protection de la propriété industrielle, en vue de protéger les entreprises françaises contre l'espionnage économique. À cet égard, vos rapporteurs se réjouissent de l'avancement de l'examen, au Parlement européen, de la proposition de directive sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d'affaires) contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites, présentée par la Commission européenne en novembre 2013 et approuvée par le Conseil de l'Union européenne en mai 2014. Ainsi, le moment venu, la France devra transposer cette directive. Devant votre commission, le ministre de l'économie a indiqué que le sujet pourrait être traité parallèlement à l'examen du projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes, déposé à l'Assemblée nationale le 12 juin 2013 sans avoir encore été examiné en séance publique.

3. Un parcours difficile

Adopté en conseil des ministres le 10 décembre 2014, le projet de loi a été déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 11 décembre, la procédure accélérée étant engagée le même jour par le Gouvernement.

S'en est suivie une très longue procédure d'examen devant l'Assemblée nationale, en commission comme en séance publique, les débats étant prolongés d'une semaine supplémentaire.

Ainsi, la durée d'examen du texte en commission spéciale a dépassé les 80 heures dont plus de 74 consacrées à l'examen des articles et de 1 741 amendements.

La durée totale d'examen du texte en séance publique s'est établie à plus de 111 heures au terme desquelles l'ensemble des articles avait été adoptés le 14 février 2015.

Initialement constitué de 106 articles, le projet de loi a été porté à 209 articles par la commission spéciale de l'Assemblée nationale et à 295 articles à l'issue des débats en séance publique.

Face aux difficultés d'assurer une majorité pour l'adoption de l'ensemble du texte, le 17 février, le Premier ministre engageait la responsabilité du Gouvernement en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution sur le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Après le rejet de la motion de censure lors du vote intervenu le 19 février 2015, le projet de loi considéré comme adopté en première lecture, a été transmis au Sénat.

Votre commission a procédé à un examen positif et exigeant des dispositions qui lui étaient soumises. Elle a adopté, au terme de ses travaux un texte de 254 articles dont le tableau suivant présente les principaux apports.

LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION SPÉCIALE

I. LE VOLET « ÉCONOMIE »

MOBILITÉ

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à créer deux nouvelles recettes pour l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), assises sur les entreprises de transport public routier de personnes et les concessionnaires d'autoroutes ( article 1 er ) ;

- à élargir l'ouverture des données des services de transport aux horaires constatés et aux tarifs (article 1 er quater) ;

- à autoriser, dès le 1 er janvier 2019, l'ouverture à la concurrence totale ou partielle des conventions de délégation de service public régissant les transports ferroviaires organisés par les régions (1 er quinquies nouveau) ;

- à protéger davantage les services publics de transport vis-à-vis des services de transport par autocar librement organisés ou réalisés dans le cadre d'un cabotage , à l'article 2 (augmentation à 200 kilomètres de la distance en-dessous de laquelle un service pourra être interdit ou limité ; suppression de l'avis conforme de l'ARAFER) ;

- à préciser que l'évaluation préalable à la signature du contrat entre une auto-école et un élève a lieu en sa présence physique (article 8 quinquies) ;

- à supprimer l'article 8 sexies afin de rétablir la condition d'ancienneté du permis de conduire pour exploiter une auto-école ;

- à supprimer la qualification de « service universel » donnée au passage des épreuves du permis de conduire (article 9) ;

- à supprimer le recours à des agents publics ou contractuels comme examinateurs de l'épreuve pratique du permis de conduire (article 9) ;

- à obliger les auto-écoles à afficher le taux de réussite de leurs élèves, rapporté au nombre moyen d'heures d'enseignement suivies (article 9).

COMMERCE - COMMUNICATION

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à écarter le dispositif visant à faciliter les changements d'enseigne : insuffisamment ciblées, ces mesures risquent, en particulier, de perturber le commerce franchisé, associatif et coopératif (article 10 A) ;

- à supprimer la restriction du champ de la convention écrite formalisant le résultat des négociations commerciales aux seules relations entre un fournisseur et un distributeur de commerce de détail, en excluant les grossistes (article 10 B) ;

- à s upprimer l'alourdissement excessif , à hauteur de 5 % du chiffre d'affaires réalisé en France, de l'amende sanctionnant les pratiques commerciales abusives (article 10 D) ;

- à rejeter, au nom du principe de libre administration des collectivités territoriales , la possibilité pour le ministre de l'économie ou le représentant de l'État dans le département de saisir l'Autorité de la concurrence à l'occasion de l'élaboration d'un document d'urbanisme d'une collectivité territoriale (article 10) ;

- à renforcer la simplification des procédures administratives en matière d'urbanisme pour les projets soumis à autorisation d'exploitation commerciale (article 10 ter ) ;

- à supprimer l'article 11 bis A qui introduit une sanction redondante relative à l'utilisation du drapeau bleu-blanc-rouge pour signaler l'origine française d'un produit ;

- à supprimer l'obligation de disposer d'une prescription médicale en cours de validité pour se faire délivrer des verres correcteurs (article 11 quater C nouveau ) ;

- à permettre aux professionnels de la restauration qui le souhaitent, de bénéficier de la qualité d'artisan (article 11 quater D nouveau ) ;

- à permettre à l'ARCEP d'émettre un avis public sur les conditions tarifaires d' accès aux réseaux d'initiative publique (RIP) des collectivités (article 33 septies C) ;

- à mettre en place un dispositif visant à assurer une meilleure couverture des zones « blanches » et « grises » de téléphonie mobile (article 33 septies D) ;

- à encadrer les relations entre les hôteliers et les plateformes de réservation par Internet via un mécanisme de contrat de mandat (article 33 octies A).

URBANISME - ENVIRONNEMENT - LOGEMENT

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à assouplir la procédure de changement d'usage d'un logement constituant le logement unique en France d'un Français établi hors de France (article 24 bis ) ;

- à supprimer le caractère obligatoire de la mise en concurrence du syndic sortant , tout en préservant le droit pour le conseil syndical d'y procéder et le droit de chaque copropriétaire pris individuellement de pouvoir le demander (article 25 bis E) ;

- à assouplir le régime de dissolution des associations syndicales autorisées (article 25 nonies ) ;

- à étendre aux zones tendues la possibilité pour les organismes HLM de vendre des logements à une personne privée lorsque ces logements font partie d'un programme de construction composé majoritairement de logements sociaux (article 25 decies ) ;

- à supprimer les habilitations à légiférer par ordonnance en matière d'évaluation environnementale, de participation du public et d'accélération du règlement des litiges (article 28)

- à supprimer le droit de retrait de l'administration pour les décisions de non-opposition à la déclaration préalable (article 28 bis A) ;

- à réserver l'action en démolition aux constructions situées dans des zones, espaces ou secteurs présentant des enjeux particuliers (article 29) ;

- à encadrer le droit de recours en matière d' installations d'élevage Seules les personnes ayant participé à la phase de consultation du public préalable à la décision administrative état désormais recevables à agir (article 27 ter nouveau).

FINANCEMENT DE L'ÉCONOMIE - FISCALITÉ

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à rendre la réduction d'impôt «Madelin » éligible au plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 euros, contre 10 000 euros dans le droit en vigueur (article 35 ter C nouveau) ;

- à doubler le montant du plafond de la réduction d'impôt « ISF-PME » , ce qui le porte à 90 000 euros en contrepartie du meilleur ciblage qui pourrait être exigé par la Commission européenne, (article 35 ter B nouveau ) ;

- à mieux encadrer les prêts de trésorerie interentreprises (article 40 bis A) ;

- à favoriser le développement des biocarburants produits à partir de matières premières d'origine animale ou d'huiles usagées en exonérant de taxe générale sur les activités polluantes les opérateurs respectant les objectifs d'incorporation de biocarburants (article 54 bis ) ;

- à supprimer l'article 50 A qui levait les obstacles juridiques à la création de sociétés de projet en permettant à l'État de vendre du matériel militaire à ces sociétés et de les louer par la suite.

II. LE VOLET « SOCIAL »

EXCEPTIONS AU REPOS DOMINICAL ET EN SOIRÉE

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à rétablir la possibilité subsidiaire, pour les commerces situés dans les zones touristiques internationales, les zones touristiques et les zones commerciales, d'ouvrir le dimanche en l'absence d'accord collectif sur la base d'une décision de l'employeur, approuvée par référendum et offrant des contreparties aux salariés (article 76) ;

- à conserver le régime juridique actuel pour les commerces de moins de onze salariés situés dans les zones touristiques en les exonérant de l'obligation d'être couverts par un accord collectif et d'offrir des contreparties pour ouvrir le dimanche (article 76) ;

- à maintenir la réglementation existante pour l' ouverture dominicale jusqu'à 13 heures des commerces de détail alimentaire situés dans les zones touristiques internationales et dans les gares (article 78) ;

- à préserver l'équilibre atteint à l'Assemblée nationale sur les « dimanches du maire » , tout en supprimant la disposition selon laquelle les grandes surfaces devaient déduire de ces dimanches trois jours fériés travaillés ainsi que celle prévoyant que le conseil municipal devait débattre de l'ouverture dominicale des bibliothèques (article 80) ;

- à fixer, comme dans le projet de loi initial, à trente-six mois la période de transition dont disposeront les commerces situés dans les zones touristiques et les périmètres d'usage de consommation exceptionnel (PUCE) actuels pour se mettre en conformité avec les nouvelles obligations sociales issues de ce projet de loi (article 82).

DROIT DU TRAVAIL

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à supprimer l'article 82 bis , introduit par l'Assemblée nationale et qui autorisait les préfets, dans les départements d'outre-mer, à remplacer certains jours fériés nationaux par des jours fériés locaux ;

- à supprimer la demande d'habilitation du Gouvernement à réformer par ordonnance les pouvoirs de l'inspection du travail (article 85) ;

- à supprimer la peine d'emprisonnement d'un an associée au délit d'entrave à la constitution d'une institution représentative du personnel, en contrepartie du relèvement à 15 000 euros de l'amende correspondante (article 85 bis ) ;

Votre commission spéciale a également adopté trois amendements de son rapporteur afin de rapprocher le projet de loi de son ambition initiale, développer la croissance et relancer l'activité :

- un dispositif de lissage dans le temps des effets du franchissement des seuils sociaux a été mis en place et l'effectif à partir duquel l'élection de délégués du personnel est obligatoire a été porté de onze à vingt et un salariés (article 87 A) ;

- le compte personnel de prévention de la pénibilité a été simplifié , son fonctionnement administratif pour les employeurs a été allégé et les risques professionnels pris en compte ont été recentrés sur les facteurs aisément mesurables (article 97 quinquies ) ;

- les conditions de conclusion des accords de maintien de l'emploi ont été largement assouplies et la possibilité de conclure des accords pour développer l'emploi dans les entreprises a été ouverte aux partenaires sociaux, ces deux types d'accords relevant désormais d'un régime juridique unique dérogatoire au droit commun de la négociation collective (article 98 A).

ÉPARGNE SALARIALE ET ACTIONNARIAT SALARIÉ

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à abaisser de 16 à 12 % le taux du forfait social applicable à un plan d'épargne pour la retraite collectif ( Perco) dont au moins 7 % des fonds sont destinés au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire (article 35 nonies ) ;

- à obliger les branches professionnelles à négocier avant le 30 décembre 2017 un accord d'intéressement qui sera directement applicable par les entreprises souhaitant y avoir recours (article 36 ter nouveau ) ;

- à suspendre pendant trois ans l'obligation de conclure un accord de participation si une entreprise qui franchit le seuil de cinquante salariés dispose déjà d'un accord d'intéressement et qu'elle l'applique continûment pendant cette période (article 36 quater nouveau ) ;

- à supprimer l'obligation de mettre à disposition des représentants du personnel le livret d'épargne salariale sur la base de données économiques et sociales de l'entreprise (article 39 bis ) ;

- à exonérer de forfait social pendant trois ans les entreprises employant moins de cinquante salariés qui concluent pour la première fois un accord de participation ou d'intéressement, puis à leur appliquer un taux réduit de 8 % pendant les trois années suivantes (article 40 ter ).

III. LE VOLET « JUSTICE »

PROFESSIONS JURIDIQUES RÉGLEMENTÉES

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à réaffirmer la spécificité de la prestation juridique en créant un code de l'accès au droit et de l'exercice du droit destiné à rassembler les dispositions relatives notamment à l'aide juridique et à l'exercice du droit par les professions juridiques ou judiciaires réglementées (article 12 A) ;

- à retirer du code de commerce les dispositions relatives aux tarifs des prestations des professions juridiques réglementées et à supprimer la compétence conjointe du ministre de l'économie et de celui de la justice pour l'édiction desdits tarifs tout en conservant la compétence uniquement consultative de l'Autorité de la concurrence (article 12) ;

- à rétablir la finalité d'origine des mécanismes de péréquation et de remise tarifaire en supprimant le caractère interprofessionnel du fonds prévu à l'article 12 et en créant un fonds par profession. Ce fonds est affecté au financement des actes accomplis à perte par les professionnels et à l'indemnisation éventuelle des titulaires d'offices auxquels l'installation d'un nouvel office a pu causer un préjudice. Il n'est donc plus affecté au financement de l'aide juridictionnelle (article 12).

- à donner compétence au seul ministre de la justice pour établir, après avis de l'Autorité de la concurrence, la carte délimitant les zones où l'implantation de nouveaux offices est libre (article 13 bis ) ;

- à préciser comment les demandes concurrentes d'installation devraient être régulées et à définir le régime applicable au troisième type de zone compris entre les zones carencées et celles où l'installation d'un concurrent pourrait mener à la faillite d'un office déjà établi (article 13 bis ) ;

- à encadrer le régime juridique de la société d'exercice multiprofessionnel que le Gouvernement souhaite créer par ordonnance en complétant les garanties propres à ces sociétés (article 21) ;

- à supprimer, à titre conservatoire, les articles 20 ter et 22 pour rappeler l'importance, pour les sociétés d'exercice du droit, des garanties mises en place afin d'assurer que la société est bien dirigée ou contrôlée par des professionnels exerçant la même activité que celle de ces sociétés.

DISPOSITIONS RELATIVES AUX AVOCATS

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à conférer un caractère expérimental à l'extension du périmètre de postulation à l'ensemble du ressort de la cour d'appel afin d'en évaluer au préalable les conséquences sur le maintien des barreaux des plus petites juridictions (article 13) ;

- à préciser que les avocats disposant d'un bureau secondaire dans le ressort d'un tribunal de grande instance, autre que celui où ils ont leur bureau principal, ne seront soumis aux obligations en matière d'aide juridique que dans le ressort du tribunal de grande instance où ils disposent de leur bureau principal (article 13) ;

- à ne pas soumettre au contrôle de la DGCCRF les conventions d'honoraires conclues entre un avocat et son client (article 13).

DROIT DES AFFAIRES ET JURIDICTION COMMERCIALE

Les principaux amendements adoptés par votre commission visent :

- à renforcer le caractère contradictoire et les garanties pour les entreprises dans la procédure d' injonction structurelle dans le secteur du commerce de détail, à la disposition de l'Autorité de la concurrence (article 11) ;

- à confier au conseil national des greffiers des tribunaux de commerce la mission de diffuser, gratuitement, en vue de leur réutilisation, les données du registre du commerce et des sociétés , tout en assurant la protection des données personnelles des dirigeants d'entreprise, et corrélativement à supprimer le rôle de l'Institut national de la propriété industrielle à l'égard de ce registre (article 19) ;

- à simplifier les règles de cession des fonds de commerce (article 28 bis ) ;

- à maintenir l'obligation d'un acte extrajudiciaire , dans le cadre des baux commerciaux , pour le congé donné par le bailleur au locataire (article 56) ;

- à préciser que l'accord amiable de recouvrement des petites créances conclu par l'entremise d'un huissier n'aura force exécutoire que s'il est homologué préalablement par un juge (article 56 bis ) ;

- à préciser que le droit de rétractation des consommateurs pourra toujours s'exercer dès la conclusion du contrat en matière de vente à distance et pas seulement une fois la livraison effectuée (article 58) ;

- à mieux prendre en compte les participations détenues par une société dans le cadre de la limitation du cumul des mandats sociaux dans les sociétés anonymes (article 58 bis A) ;

- à désigner au moins un tribunal de commerce spécialisé dans le ressort de chaque cour d'appel pour connaître des procédures collectives concernant les entreprises les plus importantes, sa compétence n'étant automatique que pour les entreprises de plus de 250 salariés (article 66) ;

- à améliorer la prise en compte des groupes de sociétés dans le cadre des procédures de sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire , le même tribunal étant compétent pour une société et pour ses filiales (article 67 bis ) ;

- à limiter la procédure d'éviction des actionnaires opposés à un plan de redressement judiciaire comportant une modification du capital à la « cession forcée » de leurs actions , en raison des risques juridiques concernant la « dilution forcée », et aux seules entreprises de plus de 250 salariés au lieu de 150 (article 70).

JURIDICTION PRUD'HOMALE

Tout en marquant son accord avec la réforme de la juridiction prud'homale proposée aux articles 83 et 84 , votre commission a souhaité affirmer plus fortement la vocation judiciaire des conseillers prud'hommes. Elle a par ailleurs renforcé les pouvoirs de mise en état des conseillers rapporteurs devant le conseil des prud'hommes et instauré, en appel, le principe d'une procédure essentiellement écrite.

EXAMEN DES ARTICLES
TITRE IER - LIBÉRER L'ACTIVITÉ
CHAPITRE IER - Mobilité

Article 1er (art. L. 2131-2, L. 2132-1, L. 2132-4, L. 2132-5, L. 2132-7, L. 2132-8, L. 2135-1, L. 2135-2, L. 2135-3, L. 2135-7, L. 2135-13, L. 2331-1, L. 2341-1 du code des transports) - Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER)

Objet : cet article transforme l'autorité de régulation des activités ferroviaires en une autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, dont les compétences sont étendues aux secteurs autoroutier et du transport public routier de personnes.

I - Le dispositif proposé et les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le présent article propose la transformation de l'autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF), créée par la loi relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports, dite « ORTF », du 8 décembre 2009, en une autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER). Outre le secteur ferroviaire, cette autorité sera compétente dans le domaine des services réguliers non urbains de transport routier de personnes , comme le prévoit l'article 2, et des concessions autoroutières , comme le prévoit l'article 5.

En conséquence, plusieurs dispositions du code des transports concernant l'ARAF sont modifiées. Le présent article étend par exemple les incompatibilités du président ou des membres du collège de l'ARAFER, et octroie à la nouvelle autorité indépendante les mêmes pouvoirs d'investigation que ceux dont dispose l'ARAF dans ces nouveaux domaines (droit d'accès à la comptabilité et aux informations économiques, financières et sociales nécessaires et accès aux locaux 8 ( * ) ).

Il habilite également le Gouvernement à procéder par ordonnance pour mettre en cohérence la structure et le contenu du code des transports et du code de la voirie routière avec cette évolution.

À l'initiative des rapporteurs, les députés ont étendu les pouvoirs de l'ARAFER en matière de sanctions administratives aux nouveaux secteurs dans lesquels elle sera compétente . Elle pourra ainsi mettre en demeure une entreprise de transport public routier de personnes, un concessionnaire d'autoroute ou une entreprise intervenant dans le secteur des travaux, fournitures et services sur le réseau autoroutier qui refusera de lui donner accès à sa comptabilité ou à ses informations économiques, financières et sociales 9 ( * ) .

Ils ont également prévu, à l'initiative de notre collègue député Bertrand Pancher, du groupe UDI, la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'opportunité de confier à l'ARAFER la régulation des activités fluviales, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

L'élargissement des compétences de l'ARAF au secteur routier a été préconisé par l'Autorité de la concurrence à deux reprises : dans son avis du 27 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar 10 ( * ) , et dans son avis du 17 septembre 2014 sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires 11 ( * ) . Il permettra à l'autorité de régulation d'avoir une vision globale sur l'ensemble des transports terrestres, qui sont souvent en concurrence.

L'extension des missions de l'ARAFER doit toutefois s'accompagner de nouvelles sources de financement. À défaut, ses recettes seraient exclusivement issues du secteur ferroviaire, ce qui ne serait pas équitable. L'étude d'impact annexée au présent projet de loi évalue la charge de travail supplémentaire induite par les nouvelles missions de l'ARAFER à six équivalents temps plein de catégorie A, pour chacun des secteurs considérés. En termes budgétaires, le secrétaire d'État aux transports Alain Vidalies a estimé ce besoin à deux millions d'euros « tout au plus » . Votre rapporteur relève toutefois que les missions de l'ARAFER ont été étendues lors du passage du texte à l'Assemblée nationale, ce qui pourrait conduire à une réévaluation de ces montants.

Votre commission n'a pas souhaité reporter le débat sur le financement de l'autorité, dans la mesure où il est directement lié aux articles 1 er , 2 et 5 du présent texte. Elle a ainsi adopté un amendement du rapporteur créant, d'une part, un droit fixe dû par les entreprises de transport public routier de personnes, lors du dépôt de la déclaration d'ouverture ou de modification d'un service susceptible d'être interdit ou limité par une autorité organisatrice, en application de l'article 2, d'autre part, une contribution pour frais de contrôle applicable aux concessionnaires d'autoroutes . Les montants de ces deux contributions seront arrêtés par les ministres chargés des transports et du budget sur proposition de l'ARAFER, à l'intérieur d'une fourchette fixée par la loi.

Votre commission a aussi adopté un amendement du rapporteur qui précise, dans les dispositions générales relatives à l'ARAFER, que ses rapports sont rendus publics, sous réserve des secrets protégés par la loi. Cette disposition est déjà prévue pour ses propositions, avis et décisions.

Enfin, elle a supprimé la demande de rapport du Gouvernement au Parlement sur l'extension des missions de l'ARAFER à la régulation des activités fluviales. En effet, le projet de loi, dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, comporte plus d'une vingtaine de demandes de rapport du Gouvernement ou d'administrations publiques au Parlement, sur des sujets divers et variés.

Votre commission n'est pas favorable à ces demandes de rapport, qui correspondent souvent à un affichage et permettent rarement de résoudre concrètement les problèmes identifiés. Le contenu très général de la plupart de ces rapports, résultant du manque de précision des demandes, ainsi que les délais dans lesquels ils sont fournis - lorsqu'ils le sont - en amoindrissent l'utilité pour le Parlement. Il est de plus toujours loisible aux commissions compétentes de se saisir des différents sujets évoqués dans le cadre de leurs travaux de contrôle de l'action du Gouvernement.

Votre commission a également adopté plusieurs amendements rédactionnels du rapporteur.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 1er bis (art. L. 224-6 [nouveau] du code de l'environnement) - Normes d'émission de polluants atmosphériques des autocars

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, soumet les autocars à des normes d'émission de polluants atmosphériques définies par arrêté des ministres chargés de l'économie et des transports.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le règlement n° 595/2009 12 ( * ) impose, depuis le 1 er janvier 2014, la norme d'émission de polluants atmosphériques EURO VI pour les camions et bus neufs.

Le présent article additionnel, inséré en séance à l'initiative de notre collègue député François-Michel Lambert et de députés du groupe écologiste, soumet les services réguliers de transport par autocar librement organisés, tels que définis à l'article 2 du présent projet de loi, à des normes d'émission de polluants atmosphériques définies par arrêté des ministres chargés de l'économie et des transports.

II - La position de votre commission

La disposition introduite par les députés répond à la volonté de limiter les impacts du développement du transport par autocar sur l'environnement. Elle ne devrait pas se traduire par des contraintes excessives pour les entreprises de transport par autocar. Interrogé à ce sujet par votre rapporteur, le secrétaire d'État aux transports, Alain Vidalies, a en effet annoncé l'établissement d'un échéancier progressif concerté avec les professionnels du secteur.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 1er ter (art. L. 317-9 [nouveau] du code de la route) - Équipement des autocars en éthylotests anti-démarrage

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, impose la présence d'un éthylotest anti-démarrage dans chaque autocar.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

En application de l'article 70 bis de l'arrêté du 2 juillet 1982 relatif aux transports en commun de personnes, modifié par arrêté du 13 octobre 2009, l'ensemble des autocars devront être équipés en éthylotests anti-démarrage (EAD) au 1 er septembre 2015.

Le présent article additionnel, adopté en séance à l'initiative de notre collègue député Denis Baupin et de députés du groupe écologiste, élève cette obligation au niveau législatif, en renvoyant à un décret en Conseil d'État les conditions d'application de l'article.

II - La position de votre commission

La disposition figurant à cet article additionnel relève du domaine réglementaire, et est déjà satisfaite par l'arrêté du 2 juillet 1982 relatif aux transports en commun de personnes.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 1er quater (art. L. 1115-1 et L. 1115-2 [nouveaux] du code des transports) - Accès aux données des services réguliers de transport public de personnes

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, prévoit la mise en ligne des principales données des services réguliers de transport public de personnes.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, adopté en séance à l'initiative de députés du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP), impose la mise en ligne des principales données des services réguliers de transport public de personnes, sous un format ouvert et librement réutilisable, en insérant un nouvel article L. 1115-1 dans le code des transports. Celui-ci précise que ces données incluent les arrêts, les horaires planifiés et les informations sur l'accessibilité aux personnes handicapées.

Le nouvel article L. 1115-2 indique quant à lui que les modalités d'application de l'article L. 1115-1 seront déterminées par décret en Conseil d'État, après consultation des organisations représentatives des autorités organisatrices et des opérateurs de transport concernés.

II - La position de votre commission

Comme l'ont relevé l'Autorité de la concurrence, dans son avis du 27 février 2014 13 ( * ) , mais aussi la commission d'étude des effets de la loi pour la croissance et l'activité, dans sa fiche sur l'ouverture de l'offre de transport par autocar 14 ( * ) , l'ouverture et la mise à disposition des données relatives aux transports est un facteur essentiel au développement de l'intermodalité comme à une concurrence saine entre les différents services de transport.

C'est la raison pour laquelle votre commission a adopté un amendement du rapporteur qui renforce la portée de cet article, en prévoyant un accès aux données relatives aux horaires constatés , qui prennent en compte les retards observés, ainsi qu'aux tarifs . Ces deux informations sont en effet indispensables à une parfaite information des usagers , et leur permettront de choisir le service de transport qui leur est le plus approprié.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 1er quinquies (nouveau) (art. L. 2121-4 et L. 2141-1 du code des transports) - Ouverture à la concurrence des transports ferroviaires régionaux

Objet : cet article, inséré par votre commission à l'initiative du rapporteur, permet l'ouverture à la concurrence totale ou partielle des conventions de délégation de service public régissant les transports ferroviaires organisés par les régions, dès le 1 er janvier 2019.

Depuis 2001, trois « paquets ferroviaires » européens ont permis une ouverture à la concurrence progressive du transport ferroviaire. Le fret international a été ouvert à la concurrence à partir de 2003 sur le réseau transeuropéen, puis à partir de 2006 sur l'ensemble du réseau ; le fret domestique l'a été à partir de 2007. Depuis 2010, les services internationaux de voyageurs sont aussi libéralisés, avec des possibilités de cabotage dans des conditions encadrées.

Le règlement n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, aussi appelé règlement « OSP 15 ( * ) », prévoit 16 ( * ) qu' à compter du 3 décembre 2019 , « toute autorité compétente qui recourt à un tiers autre qu'un opérateur interne attribue les contrats de service public [ferroviaires] par voie de mise en concurrence » , sauf dans certains cas :

- si la valeur annuelle moyenne du contrat est inférieure à un million d'euros ou qu'il a pour objet la fourniture annuelle de moins de 300 000 kilomètres, le contrat peut être attribué directement (sauf interdiction en vertu du droit national) ;

- en cas d'interruption de services ou de risque imminent d'une telle situation ;

- si l'autorité compétente décide d'attribuer ce contrat directement et que le droit national le permet, cette dérogation n'étant possible que pour les services de transport ferroviaires.

Des discussions autour d'un quatrième « paquet ferroviaire » ont été lancées début 2013, dans la perspective d'une libéralisation totale des services de transport ferroviaire (ouverture à la concurrence des services non conventionnés et, pour les services conventionnés, suppression de la possibilité d'attribuer directement un contrat pour les services de transport ferroviaire).

Plusieurs avantages sont attendus de cette ouverture à la concurrence , comme l'ont relevé le rapport de Francis Grignon sur les conditions d'une expérimentation de l'ouverture à la concurrence des services ferroviaires régionaux de voyageurs de mai 2011, les Assises du ferroviaire organisées à l'automne 2011 par la ministre de l'écologie Nathalie Kosciusko-Morizet et le ministre des transports Thierry Mariani, le rapport de la mission sur l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs , présidée par Claude Abraham en 2011, l'avis du Conseil économique, social et environnemental de juillet 2012 sur l'ouverture à la concurrence des services ferroviaires régionaux de voyageurs ou encore la fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT). Parmi ces bénéfices figurent une meilleure maîtrise des coûts de production du service ferroviaire, une amélioration de la qualité de service, ainsi qu'une meilleure information des autorités organisatrices de transport.

Ces attentes font déjà l'objet d'une certaine actualité, si l'on se considère les remontrances récurrentes des régions vis-à-vis de la SNCF. Elles deviendront d'autant plus importantes avec la libéralisation des services de transport par autocar, prévue à l'article 2 du présent projet de loi. La concurrence entre ces deux modes de transport va être accrue, et l'attractivité du transport ferroviaire ne pourra être maintenue qu'à la condition d'une amélioration effective de sa qualité et d'une réduction de ses coûts.

C'est la raison pour laquelle votre commission a adopté un amendement du rapporteur visant à anticiper l'échéance européenne, en autorisant, dès le 1er janvier 2019, l'ouverture à la concurrence totale ou partielle des conventions de délégation de service public régissant les transports ferroviaires organisés par les régions.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 2 (art. L. 3111-17 à L. 3111-21, L. 3111-21-1, L. 3111-22 à L. 3111-25 [nouveaux] du code des transports) - Ouverture des services de transport non urbains par autocar

Objet : cet article autorise l'organisation de services de transport non urbains par autocar de façon libre et octroie à l'ARAFER de nouvelles compétences dans le secteur du transport public routier de personnes.

I - Le dispositif proposé

A. L'ouverture des services de transport non urbains par autocar (articles L. 3111-17 à L. 3111-19 [nouveaux] du code des transports)

Dans le cadre juridique actuel, des services réguliers de transport par autocar, y compris interrégionaux, peuvent être institués :

- par les autorités organisatrices de transport (AOT) (départements, régions ou État), en application des articles L. 3111-1, L. 3111-2, L. 3111-3 et L. 2121-6 du code des transports ;

- dans le cadre d'un cabotage sur un trajet international, en application de l'article L. 3421-2 du même code.

Dans ce dernier cas, le service de transport doit être autorisé au préalable par l'État et répondre à plusieurs conditions :

- il doit être interrégional ;

- il doit rester accessoire par rapport au service international, ce qui se traduit par la fixation de seuils maximaux en termes de chiffre d'affaires et de nombre de passagers ;

- il ne doit pas compromettre l'équilibre économique d'un contrat de service public de transport de personnes existant (qu'il soit ferroviaire ou routier).

Le présent article autorise les entreprises de transport public routier de personnes établies en France à organiser librement des services réguliers non urbains de transport par autocar.

Toutefois, une autorité organisatrice de transport pourra interdire ou limiter certaines liaisons, lorsqu'elles portent une atteinte substantielle à l'équilibre économique de services de transport qu'elle organise. Le projet de loi initial prévoit une telle possibilité pour les liaisons infrarégionales.

De telles décisions seront prises après un avis conforme de l'ARAFER. Si celle-ci estime nécessaire de limiter un service régulier non urbain de transport routier, elle proposera à l'AOT la mise en place de règles objectives, transparentes et non discriminatoires. Le projet de loi initial prévoit que la saisine de l'ARAFER peut s'effectuer par les AOT concernées, les entreprises de transport public de personnes, et l'ARAFER disposera d'une faculté d'autosaisine, et que l'ARAFER dispose de 4 mois pour rendre sa décision.

Les dispositions du présent article s'appliqueront en Ile-de-France 17 ( * ) , avec des adaptations. Y sera considéré comme « service non urbain » tout service dont la distance excède un seuil fixé par décret. Le chiffre de 50 kilomètres est cité dans l'étude d'impact annexée au projet de loi.

B. Les compétences de l'ARAFER dans le secteur du transport public routier de personnes (articles L. 3111-20 à 3111-25 [nouveaux] du même code)

L'ARAFER devra remettre un rapport annuel d'activité sur les services de transport public routier de personnes librement organisés. Elle pourra recueillir toutes les données utiles à cette fin.

L'article précise qu'elle aura les mêmes prérogatives que celles dont dispose aujourd'hui l'ARAF en matière de contrôle administratif, et le fait de s'opposer à l'exercice des fonctions de ses agents sera également passible de sanctions pénales (six mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende, ainsi que les peines complémentaires mentionnées aux articles L. 2135-10 et L. 2135-11 du code).

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

A. L'ouverture des services de transport non urbains par autocar

À l'initiative des rapporteurs, les députés ont substitué un critère de distance kilométrique à la référence au caractère infrarégional d'un service, pour l'exercice du droit d'opposition des AOT. Une AOT pourra interdire ou limiter des services réguliers de transport non urbain sur une liaison d'une distance inférieure ou égale à 100 kilomètres , lorsque ces services sont assurés sur une liaison assurée sans correspondance par un service régulier de transport qu'elle a institué et que ces services « portent, seuls ou dans leur ensemble, une atteinte substantielle à l'équilibre économique de la ligne ou des lignes de transport susceptibles d'être concurrencées » 18 ( * ) . Cette rédaction se substitue à celle du projet de loi initial, qui évoque une atteinte substantielle « à l'équilibre économique du service public ».

L'Assemblée nationale a créé un régime déclaratif et précisé la procédure applicable, qui répond au schéma suivant :

Procédure applicable pour l'ouverture ou la modification
d'un service inférieur à 100 kilomètres,
d'après le texte résultant des travaux de l'Assemblée nationale

Source : commission spéciale du Sénat

Avec ce schéma, la possibilité de saisine offerte aux entreprises de transport et la faculté d'autosaisine de l'ARAFER sont supprimées. La saisine de l'ARAFER par l'AOT devra contenir, « sous peine d'irrecevabilité, tous les éléments objectifs de justification nécessaires à son instruction par [l'ARAFER] 19 ( * ) ». Les saisines et les avis de l'ARAFER devront être motivés et rendus publics.

B. Les compétences de l'ARAFER dans le secteur du transport public routier de personnes

Les députés ont complété les attributions de l'ARAFER, en indiquant qu'elle devra veiller, non seulement au bon fonctionnement du transport public régulier de personnes, mais aussi « à la cohérence de l'offre de services de transport collectifs » et à la « satisfaction des besoins 20 ( * ) » , ainsi qu'au « développement de l'intermodalité notamment avec les modes de déplacement non polluants 21 ( * ) » .

À l'initiative des rapporteurs, ils ont précisé le contenu du rapport de l'ARAFER, qui n'est plus désigné sous les termes de « rapport d'activité » et devient un rapport sur les services de transport public routier de personnes librement organisés. Il devra évaluer « l'impact du développement du transport public routier de personnes librement organisé en tenant compte de l'impact environnemental, de la cohérence intermodale des services de transports collectifs et de l'égalité des territoires 22 ( * ) » et contenir des données par sexe et recenser « les actions de promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes mises en oeuvre par [l'ARAFER] 23 ( * ) ».

Sur proposition des rapporteurs, les pouvoirs de l'ARAFER en matière de communication des données ont aussi été renforcés. Elle pourra ainsi, par une décision motivée, imposer la transmission régulière d'informations par les entreprises ferroviaires et de transport par autocar. Celles-ci seront par ailleurs tenues de lui fournir les informations statistiques concernant l'utilisation, la fréquentation, les zones desservies, les services délivrés et les modalités d'accès aux services proposés. Les députés ont précisé une nouvelle fois que les manquements à ces obligations pourront faire l'objet de sanctions administratives, comme ils l'avaient déjà indiqué à l'article 1 er .

III - La position de votre commission

A. L'ouverture des services de transport non urbains par autocar

La piste d'un recours accru aux autocars a été évoquée à de nombreuses reprises comme une alternative pertinente au train : dans les conclusions de la commission n° 3 des Assises du ferroviaire, organisées à l'automne 2011, par le rapport du 27 juin 2013 de la commission « Mobilité 21 », transpartisane, présidée par le député Philippe Duron, par l'avis de l'Autorité de la concurrence du 27 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar ou encore par le rapport de la Cour des comptes d'octobre 2014 intitulé « la grande vitesse ferroviaire : un modèle porté au-delà de sa pertinence » .

En effet, les services ferroviaires ne répondent pas à la totalité de la demande de transport collectif. L'autocar peut être une alternative au train, lorsqu'il n'existe pas de desserte de la destination par voie ferrée, ou qu'elle implique un ou plusieurs changements, lorsque le train s'avère trop coûteux ou offre une qualité de service insuffisante, ou encore pour des raisons pratiques. Dans ces différents cas de figure, la libéralisation des transports par autocar permettra de remplacer l'usage de la voiture individuelle, ou le recours au covoiturage, par l'utilisation d'un transport collectif, à l'heure où 83 % de la mobilité des Français est assurée par la voiture individuelle.

Si votre commission soutient cette réforme, elle a considéré que ses modalités de mise en oeuvre n'étaient pas suffisamment protectrices des services de transports financés par les autorités organisatrices de transport. C'est la raison pour laquelle elle a adopté un amendement du rapporteur, qui modifie plusieurs aspects du dispositif.

L'augmentation à 200 kilomètres du critère de distance kilométrique

Elle a augmenté à 200 kilomètres la distance en-dessous de laquelle un service de transport par autocar pourra être interdit ou limité par une AOT. Ce chiffre, proposé par l'Autorité de la concurrence, correspond au seuil à partir duquel il existe une différence notable de temps de trajet entre les modes ferroviaire et routier, et par conséquent, à partir duquel la concurrence entre ces deux modes devient plus faible.

L'augmentation de cette distance kilométrique protégera davantage les services mis en place par les autorités organisatrices, non seulement vis-à-vis des services de transport par autocar librement organisés, autorisés par le présent article, mais aussi par rapport aux services de cabotage réalisés dans le cadre de dessertes internationales, puisque l'article 3 du présent projet de loi aligne les procédures applicables dans ces deux cas. L'augmentation est par ailleurs d'autant plus pertinente que les périmètres des régions sont amenés à s'élargir.

Cette disposition ne devrait pas freiner outre-mesure le développement des services de transport par autocar, puisque l'étude d'impact annexée au présent projet de loi évalue à 7 % seulement la part des trajets par autocar qui seront effectués entre 50 et 200 kilomètres . En outre, s'il s'avère que ce seuil est trop élevé, il pourra toujours être modifié par la voie législative, une fois que la représentation nationale disposera de plusieurs années de recul sur le développement des services de transport par autocar.

Votre commission a aussi précisé également que la distance kilométrique de 200 kilomètres est mesurée entre deux points d'arrêt , afin d'éviter toute confusion entre les concepts de « ligne » et de « liaison ».

La suppression de l'avis conforme de l'ARAFER

La commission a aussi remplacé l'avis conforme de l'ARAFER par un avis simple, afin de donner davantage de latitude aux autorités organisatrices de transport. S'il est utile que celles-ci puissent recueillir l'avis de l'autorité de régulation, dans une perspective d'harmonisation des méthodes employées pour mesurer l'impact des nouveaux services de transport par autocar sur les transports publics existants, la décision d'interdire ou de limiter un service doit revenir entièrement aux autorités organisatrices de transport, qui en seront responsables.

L'extension de la notion d'atteinte à l'équilibre économique

Votre commission a étendu la notion d'atteinte à l'équilibre économique, afin d'élargir, pour les autorités organisatrices de transport, les possibilités de limitation ou d'interdiction d'une liaison de transport par autocar. En effet, la rédaction retenue par l'Assemblée nationale ne prend pas suffisamment en compte les effets péréquateurs d'un contrat de service public considéré dans son ensemble, dans lequel des lignes rentables contribuent à financer des lignes déficitaires.

La diminution des recettes d'une ligne rentable, concurrencée par un nouveau service d'autocar, peut très bien, sans remettre en cause directement son équilibre économique, menacer la viabilité de lignes déficitaires que ces recettes servaient à financer. La rédaction par votre commission permettra l'interdiction ou la limitation de la liaison par autocar dans une telle situation.

Dans un souci de sécurité juridique, votre commission a également supprimé la possibilité, pour une entreprise de transport par autocar, de commercialiser un service dès qu'elle l'a déclaré, lorsque d'autres services librement organisés ont déjà été mis en place sur la même liaison. En effet, l'existence de services librement organisés sur la liaison ne garantit pas que l'autorité organisatrice de transport ne pourra pas interdire ou limiter ce service.

Aux alinéas fixant les délais dans lesquels la commercialisation des services pourra être réalisée, votre commission a substitué les termes d' « assurer un service » à ceux de « commercialiser un service », parce que c'est bien la mise en oeuvre du service qui ne devra pas démarrer avant l'expiration des délais prévus pour l'interdiction ou la limitation d'un service.

Pour clarifier la procédure applicable, l'ordonnancement et la numérotation des articles de la section ont été modifiés : le II de l'article L. 3111-17 a été transformé en un nouvel article L. 3111-17-1, et le II de l'article L. 3111-18 a été transformé en un nouvel article L. 3111-18-1.

B. Les compétences de l'ARAFER dans le secteur du transport public routier de personnes

L'instauration d'une autorité de régulation ne devait pas conduire à dessaisir les administrations publiques compétentes de l'ensemble de leurs prérogatives. À l'initiative du rapporteur, votre commission a supprimé, par amendement, l'obligation faite à l'ARAFER d'évaluer, dans le cadre de son rapport annuel, l'impact du développement des services de transport par autocar sur l'environnement, la cohérence intermodale et l'égalité des territoires , ce que pourrait aussi faire l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie par exemple. En outre, il peut apparaître exagéré d'exiger un tel examen à un rythme annuel, alors que la libéralisation des transports par autocar a vocation à être pérenne. Il n'entre pas non plus dans les missions de l'ARAFER de mettre en oeuvre des actions de promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine des services de transport par autocar, ce qui a conduit votre commission à supprimer cette disposition.

Enfin, pour des raisons techniques, votre commission a supprimé, à titre transitoire 24 ( * ) , l'avis de l'ARAFER sur les modalités d'application de la section, puisque cette autorité ne verra le jour qu'après un délai de six mois après la promulgation de la loi, alors que des services librement organisés supérieurs à 200 kilomètres pourront être effectués dès la promulgation de la loi.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 (art. L. 1221-3, L. 3111-1, L. 3111-2, L. 3111-3, L. 3421-2, L. 3451-2, L. 3452-5-1, L. 3452-6, L. 3452-7, L. 3452-8, L. 3521-5 et L. 3551-5 du code des transports) - Coordination

Objet : cet article de coordination modifie plusieurs dispositions du code des transports pour tirer les conséquences du dispositif prévu à l'article 2 du présent projet de loi.

I - Le dispositif proposé

Le présent article modifie plusieurs dispositions du code des transports afin de prendre en compte la possibilité offerte aux entreprises de transport par autocar de commercialiser des « services librement organisés ».

Il modifie, à l'article L. 3421-2, le régime applicable au cabotage. L'État devra obligatoirement autoriser 25 ( * ) , pour une durée déterminée, les entreprises de transport public routier de personnes à assurer des services réguliers non urbains « suivant les modalités prévues à l'article L. 3111-17 », à l'occasion d'un service régulier de transport routier international de voyageurs, toujours à condition que l'objet principal de ce service soit le transport de voyageurs entre des arrêts situés dans des États différents.

L'objectif poursuivi est d'aligner la procédure applicable au cabotage sur celle retenue pour les transports librement organisés , conformément à l'article 16 du règlement n° 1073/2009 du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l'accès au marché international des services de transport par autocars et autobus, et modifiant le règlement n° 561/2006. Celui-ci interdit en effet d'imposer aux transporteurs non-résidents des dispositions législatives, réglementaires et administratives différentes de celles applicables aux transporteurs résidents. Cela signifie que pour les liaisons réalisées en cabotage inférieures à 200 kilomètres, la même procédure que celle prévue à l'article L. 3111-17, avec une possibilité d'interdiction ou de limitation par une AOT, s'appliquera.

L'article L. 3452-6 punit aujourd'hui d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'exercer une activité de transporteur public routier sans autorisation ou le fait de réaliser des opérations de cabotage sans y avoir été admis. Le présent article étend cette sanction au fait d'effectuer un service de transport en infraction à une interdiction ou limitation prévue à l'article L. 3111-17.

Il prévoit enfin que les dispositions relatives aux services librement organisés et au cabotage ne seront pas applicables à Mayotte 26 ( * ) , à Saint-Pierre-et-Miquelon 27 ( * ) , à Saint-Martin, ni à Saint-Barthélemy 28 ( * ) .

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

À l'initiative des rapporteurs, les députés ont prévu, à l'article L. 3452-6, que le fait d'effectuer un service de transport en infraction à une interdiction ou limitation prévue à l'article L. 3111-17 pourra faire l'objet d'une peine complémentaire d'interdiction d'effectuer ou de faire effectuer des opérations de transport pendant une durée maximale d'un an.

Ils ont aussi rendu possible l'immobilisation des autocars en infraction avec une interdiction ou une limitation prononcée par une AOT, à l'article L. 3451-2.

L'article L. 3452-8 punit aujourd'hui d'une amende de 15 000 euros le fait, pour l'entreprise ayant commandé des prestations de cabotage routier de marchandises, de ne pas respecter le cadre applicable en la matière. Les députés ont étendu cette sanction au fait de recourir à une entreprise de transport public routier de personnes pour exécuter des services librement organisés alors que l'entreprise n'y a pas été autorisée en application des articles L. 3113-1 ou L. 3411-1, c'est-à-dire qu'elle n'est pas inscrite au registre national (article L. 3113-1) ou ne dispose pas d'une licence communautaire ou de transport intérieur (article L. 3411-1).

Pour ces deux infractions, l'Assemblée nationale a également prévu une peine complémentaire d'interdiction d'effectuer ou de faire effectuer des opérations de transport sur le territoire national pendant un an maximum .

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable au renforcement du dispositif des sanctions adopté par l'Assemblée nationale.

Elle a adopté un amendement du rapporteur qui étend la sanction prévue en cas de non-respect d'une interdiction ou d'une limitation imposée par une AOT :

- au non-respect de l'obligation de déclaration d'une liaison inférieure à 200 kilomètres, prévue à l'article L. 3111-17-1 ;

- au non-respect des délais prévus à l'article L. 3111-18-1 pour la mise en oeuvre de ces liaisons.

Elle a aussi adopté un amendement rédactionnel afin de préciser la procédure applicable en cas de cabotage international.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 bis A - Habilitation à créer par ordonnance une société de projet pour le canal Seine-Nord Europe

Objet : cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives permettant la création d'une société de projet dédiée à la réalisation de l'infrastructure du canal Seine-Nord Europe et au développement économique associé.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article a été inséré en séance publique à l'initiative du Gouvernement.

Il habilite le Gouvernement à adopter par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi, les mesures relevant du domaine de la loi ayant pour objet la création d'un établissement public chargé de la réalisation d'une infrastructure fluviale reliant les bassins de la Seine et de l'Oise au réseau européen à grand gabarit, et du développement économique associé à cette infrastructure. L'établissement public sera une société de projet, créée sur le modèle de la Société du Grand Paris, qui associera à la maîtrise d'ouvrage des représentants de l'État, d'établissements publics et de collectivités territoriales participant au financement du projet.

Le Gouvernement a indiqué que l'habilitation doit permettre :

- de définir les missions et le périmètre d'intervention de la société de projet ;

- de fixer les règles de gouvernance de cet établissement public ;

- de modifier le code des transports pour assurer la complémentarité de ses missions avec Voies navigables de France (VNF).

En application de l'article L. 4311-1 du code des transports, il revient aujourd'hui à VNF, établissement public à caractère administratif, d'assurer « l'exploitation, l'entretien, la maintenance, l'amélioration, l'extension et la promotion des voies navigables ainsi que de leurs dépendances ». L'habilitation permettra la création d'un établissement public spécifique, compétent pour le développement de cette nouvelle infrastructure fluviale, et associant des représentants de l'État, des collectivités territoriales et d'établissements publics. Au terme des travaux de réalisation du canal, son exploitation sera confiée à VNF.

Le canal Seine-Nord Europe est l'élément central du projet européen Seine-Escaut, qui vise la réalisation d'une liaison fluviale à grand gabarit entre la France, la Belgique et les Pays-Bas. Le canal Seine-Nord Europe sera long de 107 kilomètres et connectera les bassins de la Seine et de l'Oise au réseau européen.

Un projet de partenariat public-privé avait été envisagé en 2009 pour réaliser cette infrastructure. Cette procédure n'a pas abouti, en raison d'une sous-estimation des coûts et d'une surestimation des recettes 29 ( * ) . Une mission de reconfiguration du projet, confiée au député Rémi Pauvros par le Ministre délégué chargé des transports, a rendu en décembre 2013 un rapport préconisant une maîtrise d'ouvrage publique et un rééquilibrage du financement grâce à une contribution accrue de l'Union européenne . Une mission administrative de l'Inspection générale des finances (IGF) et du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a remis un rapport en janvier 2015, qui propose de confier la réalisation du canal à une structure dédiée, rassemblant les différentes parties prenantes . Une mission de préfiguration a été confiée à Rémi Pauvros en décembre 2014 pour préparer la mise en place de cette structure et renforcer la coopération entre les différents établissements publics et collectivités territoriales participant au financement du projet.

Le coût de réalisation du tronçon central est évalué à 4,8 milliards d'euros . Le programme de financement intitulé « Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) », prévu sur 2014-2020, doit permettre de financer jusqu'à 40 % du coût des travaux . Il est prévu que L'État et les collectivités territoriales financent respectivement 22 % du projet, le recours à l'emprunt devant financer les 16 % restants. Le dossier de demande de subvention pour le MIE a été déposé conjointement avec la Belgique auprès de la Commission européenne le 26 février 2015, et porte sur un total de 5,5 milliards d'euros, intégrant les travaux d'accompagnement en amont et en aval du canal.

Schéma de financement envisagé fin 2013

Financement

État

22 %

Collectivités territoriales

22 %

Dette

16 %

Union européenne

40 %

Source : rapport de Rémi Pauvros sur la mission de reconfiguration
du canal Seine-Nord Europe, 11 décembre 2013

Le canal Seine-Nord Europe a fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique le 11 septembre 2008. La modification du tracé nécessite une déclaration d'utilité publique modificative . L'enquête publique doit être lancée d'ici la fin de l'année 2015. Le Gouvernement souhaite débuter les travaux en 2017 pour une première mise en service du canal en 2023.

II - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article, qui permet de faciliter le lancement du projet de canal Seine-Nord Europe. Cette infrastructure est en effet dotée de nombreux atouts pour l'aménagement du territoire, la relance de la croissance et le développement durable de notre pays. L'adoption de cet article est également un signal positif à destination des institutions européennes, au moment où le dossier de demande de subvention vient d'être déposé.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 3 bis - Habilitation à légiférer par ordonnance pour permettre la réalisation du « Charles-de-Gaulle Express »

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de sécuriser le nouveau montage retenu pour la réalisation du « Charles-de-Gaulle Express » (CDG Express).

I - Le droit en vigueur

Le projet « Charles-de-Gaulle Express » vise à réaliser une desserte ferroviaire dédiée entre Paris et l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle . À l'heure actuelle, la liaison entre l'aéroport et la capitale ne permet pas d'offrir une qualité de service au niveau des autres grands hubs internationaux : les autoroutes A1 et A3 sont parmi les axes les plus chargés d'Ile-de-France, avec des trafics journaliers moyens allant jusqu'à 190 000 véhicules, dont un tiers en provenance ou à destination de l'aéroport ; quant au RER B, il est déjà saturé et s'adresse davantage aux voyageurs du quotidien qu'aux passagers aériens ; ce constat est renforcé avec la mise en service, depuis 2013, du RER B+ qui accroît le nombre de dessertes omnibus jusqu'à l'aéroport, limitant les dessertes directes aux seules heures creuses.

Par conséquent, l'objectif de CDG Express est de proposer une desserte quotidienne tous les quarts d'heure depuis la gare de l'Est , de 5 heures à minuit, et pour un temps de parcours de 20 minutes. Le tracé utilisera en partie des sillons existants, auxquels s'ajouteront huit kilomètres de voies nouvelles entre Mitry-Claye et l'aéroport, quatre nouveaux ponts, un tunnel sous les pistes et des aménagements de quais à la gare de l'Est et à Magenta. La mise en service de la ligne est envisagée à horizon 2023 . Le coût du projet est estimé à 1,85 milliard d'euros, dont environ 200 millions d'euros liés au matériel roulant, auxquels s'ajoutent 120 millions d'euros de travaux nécessaires sur le territoire de Roissy-Charles-de-Gaulle.

En pratique, le projet CDG Express a fait l'objet d'un débat public en 2003 et d'une déclaration d'utilité publique le 19 décembre 2008. Sa réalisation a été initiée en 2006 dans le cadre d'une délégation de service public , autorisée par l'article 22 de loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports (désormais codifié à l'article L. 2111-3 du code des transports) et dont les modalités sont fixées par le décret n° 2007-453 du 27 mars 2007.

Un groupement conduit par Vinci a été désigné en 2009 concessionnaire pressenti pour réaliser ce projet. Mais la procédure n'a pas abouti en raison de difficultés économiques et financières et de la complexité technique des travaux à réaliser , en zone dense et sous exploitation ferroviaire. Les négociations avec le groupement ont été arrêtées fin 2011 .

Après l'échec de cette concession, Réseau Ferré de France (RFF) et Aéroports de Paris (ADP) ont proposé à l'État plusieurs scénarios de relance. L'option retenue par l'accord interministériel de décembre 2013 vise à confier directement la réalisation de l'infrastructure à une société dédiée , filiale commune de l'établissement public SNCF Réseau et de la société anonyme ADP.

Dans un avis rendu le 1 er octobre 2014, le Conseil d'État a confirmé la faisabilité juridique de ce montage, sous réserve d'une modification de l'article L. 2111-3 du code des transports , qui devra faire référence à la constitution de cette entité dédiée et non plus à un montage de délégation de service public.

II - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, « toute mesure relevant du domaine de la loi permettant la réalisation d'une infrastructure ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle et modifiant notamment l'article L. 2111-3 du code des transports ». Cette nouvelle rédaction de l'article L. 2111-3 précisera la mission de l'entité dédiée et les modalités de réalisation de l'infrastructure .

Il n'est pas possible d'insérer directement ces dispositions dans le présent projet de loi, dans la mesure où le nouveau montage doit préalablement recueillir l'avis favorable de la Commission européenne au regard de sa compatibilité avec les règles de concurrence définies par le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Un dossier d'information lui a été transmis le 19 décembre 2014.

Le recours à l'ordonnance est donc justifié pour accélérer la mise en oeuvre de ce dispositif, une fois l'accord de la Commission européenne obtenu, dans un calendrier contraint par des échéances internationales , notamment en cas de candidature de Paris à l' organisation des jeux olympiques 2024 ou de l'exposition universelle 2025 .

III. - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article qui permettra d'accélérer un projet vital pour l'avenir de Roissy-CDG, dont la desserte est déjà saturée. Il est impératif que les travaux puissent débuter comme prévu en 2017.

Elle déplore en revanche le manque d'informations sur le financement du projet et les modalités de constitution de la filiale entre ADP et SNCF Réseau. Puisque le dossier a déjà été transmis à la Commission européenne, il n'est pas possible de croire que le Gouvernement n'a pas ces éléments en sa possession.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 3 ter - Rapport de l'ADEME sur l'impact du développement du transport par autocar sur l'environnement

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, prévoit l'élaboration d'un rapport par l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) sur l'impact du développement du transport par autocar sur l'environnement.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, inséré en commission spéciale à l'initiative de notre collègue député Jean-Frédéric Poisson et de députés du groupe UMP, prévoit l'élaboration d'un rapport par l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) sur l'impact du développement du transport par autocar sur l'environnement, notamment en termes d'émissions de gaz à effet de serre, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 3 quater A - Rapport sur les conséquences du développement du transport par autocar pour les usagers

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement sur les conséquences, pour les usagers, du développement du transport par autocar.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, inséré en séance à l'initiative de notre collègue député André Chassaigne et de députés du groupe GDR, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur « les conséquences, pour les usagers, du développement du transport par autocar, en termes de sécurité, de confort et de fiabilité » , dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 3 quater B - Rapport sur l'évolution de l'offre ferroviaire

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement sur l'évolution de l'offre ferroviaire.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, inséré en séance à l'initiative de notre collègue député André Chassaigne et de députés du groupe GDR, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur « l'évolution de l'offre ferroviaire et les moyens de remédier à l'érosion du trafic, tant en matière d'investissement que de politique tarifaire, de taux de remplissage des liaisons, d'information du public et d'adaptation de l'offre de service public aux besoins des usagers » , dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 3 quater - Rapport sur l'impact du développement du transport par autocar sur les industriels

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement sur l'impact du développement du transport par autocar sur les industriels.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, inséré en commission spéciale à l'initiative de notre collègue député Jean-Frédéric Poisson et de députés du groupe UMP, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur « l'impact du développement du transport par autocar sur les industriels et les constructeurs automobiles français » , dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 3 quinquies (nouveau) - Coordination des actions d'aménagement des gares routières

Objet : cet article, inséré par votre commission à l'initiative de notre collègue Fabienne Keller, définit les compétences des collectivités territoriales en matière de coordination des actions d'aménagement des gares routières.

Cet article additionnel a été créé à l'initiative de notre collègue Fabienne Keller. Il prévoit que les régions, et sur les territoires où elles existent les métropoles et les communautés urbaines, sont compétentes en matière de coordination des actions d'aménagement des gares routières. Toutefois, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre pourra exercer cette compétence à la place de la région, s'il en fait la demande. Un décret en Conseil d'État fixera les modalités d'application de cet article.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 4 - Gares routières de voyageurs

Objet : cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives définissant les règles applicables en matière de création, d'aménagement et d'exploitation des gares routières de voyageurs, ainsi que les modalités du contrôle de ces règles par l'ARAFER.

I - Le dispositif proposé et les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure législative nécessaire pour :

1° modifier les règles applicables en matière de création, d'aménagement et d'exploitation des gares routières de voyageurs par les personnes publiques et privées, définir les principes applicables en matière d'accès à ces gares et modifier les règles de police qui y sont applicables ;

2° confier à l'ARAFER la compétence d'en édicter des règles d'accès, d'en assurer le contrôle et de définir les conditions dans lesquelles elle peut être saisie en cas de différend portant sur l'accès à ces gares ou leur utilisation ;

3° codifier les dispositions de l'ordonnance n° 45-2497 du 24 octobre 1945 sur les gares routières de voyageurs.

L'ordonnance devra être prise dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.

Les députés ont imposé une saisine préalable de l'ARAFER sur le projet d'ordonnance 30 ( * ) et en ont complété le champ. L'ordonnance compte ainsi également parmi ses objectifs l'intégration des gares routières dans les schémas régionaux de l'intermodalité 31 ( * ) , la définition des principes applicables pour satisfaire le besoin en stationnement sécurisé des vélos dans et aux abords de ces gares 32 ( * ) , l'élaboration de règles applicables au transport de vélos dans les autocars 33 ( * ) , la modification des règles de police applicables pour garantir l'accès des usagers, notamment les personnes handicapées et à mobilité réduite et les cyclistes 34 ( * ) , ainsi que l'encouragement à l'intermodalité avec les modes de déplacement non polluants 35 ( * ) .

Au 2°, l'ARAFER sera désormais chargée de « préciser » les règles d'accès et non plus de les « édicter » 36 ( * ) . Les députés ont indiqué qu'elle pourra prononcer des sanctions 37 ( * ) .

II - La position de votre commission

Lors de la réunion de la commission spéciale, votre rapporteur a fait part de sa vive préoccupation concernant la question des gares routières.

Le cadre juridique qui leur est applicable est obsolète et doit être réformé. L'ordonnance du 24 octobre 1945 opère une distinction entre gare privée et gare publique. Une gare est dite publique « lorsque toute entreprise de transports publics de voyageurs desservant la localité a le droit de l'utiliser. » Mais l'ordonnance ne définit pas a priori de collectivité compétente pour l'octroi de droits en gare. Elle renvoie à « l'autorité qui a concédé ou affermé une gare routière publique de voyageurs » . En pratique, ce sont souvent les départements, les communes ou les EPCI qui ont exercé cette compétence.

L'Autorité de la concurrence, comme la commission d'études des effets de la loi pour la croissance et l'activité, ont insisté sur l'enjeu que constituait le développement des gares routières pour la réussite de la libéralisation du transport par autocar prévue à l'article 2 du projet de loi.

Dans son avis du 27 février 2014 38 ( * ) , l'Autorité de la concurrence relève l'insuffisance du nombre de gares, et, lorsqu'elles existent, la difficulté, pour les entreprises de transport public, d'identifier les collectivités qui en sont responsables . C'est la raison pour laquelle elle a préconisé un recensement des principales gares routières, avec l'identification des entités responsables de leur accès et la centralisation de leurs coordonnées. Elle a aussi souligné les enjeux que constituent les gares routières en termes de concurrence.

La commission présidée par Anne Perrot a constaté que les gares routières sont « relativement peu développées », et qu'« il semble qu'elles ne soient pas toutes en mesure d'accueillir une activité sensiblement supérieure », ce qui en fait « la principale difficulté identifiée » pour l'application de la libéralisation du transport par autocar. Si elle considère que ce développement sera largement assuré par les opérateurs, sans charge pour les collectivités, elle évoque le risque d'une « certaine désorganisation (gares routières éloignées les unes des autres, éloignées des gares ferroviaires, etc.) », « faute d'une action de coordination entre les projets de création ou d'agrandissement qui seront décidés ».

Interrogés à ce sujet par votre rapporteur, les services des ministères concernés reconnaissent qu'il s'agit d'une question importante, mais admettent ne pas savoir les orientations principales qui seront prises dans ce domaine, en particulier en ce qui concerne la clarification des compétences. Le recensement évoqué par l'Autorité de la concurrence en février 2014 n'a pas encore été initié.

Cette incertitude est d'autant plus inquiétante que la libéralisation des transports par autocar entrera en vigueur dès la promulgation de la loi pour les services supérieurs à 200 kilomètres , et pour les autres, six mois après la promulgation de la loi. Il est donc nécessaire d'agir vite, pour éviter le développement anarchique de ces gares, indépendamment des autres modes de transport.

C'est cette urgence qui a conduit votre commission à maintenir l'habilitation prévue au présent article , malgré son caractère très insatisfaisant. Elle invite en effet le Parlement à se dessaisir d'un sujet majeur, alors même que le Gouvernement lui-même ne sait pas ce qu'il compte faire.

Elle a adopté un amendement du rapporteur, qui supprime l'avis de l'ARAF, dans la mesure où l'ARAFER ne sera créée qu'au bout de six mois après la promulgation de la loi, soit après le délai fixé pour la rédaction de cette ordonnance.

Il revient également sur une grande partie des dispositions introduites à l'Assemblée nationale, dont la multiplication a eu pour effet de porter atteinte à la clarté et à la cohérence du dispositif. Ainsi, la rédaction initiale du 1° de l'article est rétablie. Seule une référence à la codification y a été introduite, en remplacement du 3° qui est supprimé, dans la mesure où la codification de l'ordonnance n° 45-2497 du 24 octobre 1945 sur les gares routières de voyageurs ne s'effectuera pas à droit constant.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 4 bis - Différenciation des tarifs de péage autoroutier en faveur des véhicules sobres ou utilisés en covoiturage

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, autorise la différenciation des tarifs des abonnements des péages autoroutiers en faveur des véhicules les plus sobres ou utilisés en covoiturage.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article, inséré en séance à l'initiative de notre collègue député Denis Baupin et de députés du groupe écologiste, autorise la différenciation des tarifs des abonnements des péages autoroutiers « afin de favoriser les véhicules les plus sobres et les moins polluants, ainsi que ceux identifiés comme étant utilisés de manière régulière en covoiturage ou par au moins trois personnes. » Il indique que « cette différenciation est mise en oeuvre sans justifier de modifications du rythme précis d'inflation des tarifs et sans augmentation de la durée des concessions autoroutières », et renvoie la détermination des modalités d'application de l'article à un décret en Conseil d'État.

II - La position de votre commission

La question de la modulation des péages en fonction du caractère écologique des véhicules est déjà abordée dans le cadre du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, encore en discussion. L'article 9 bis AA de ce texte, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture, impose en effet une tarification réduite pour les véhicules sobres et peu polluants, à l'occasion de tout renouvellement ou renégociation de délégation et de cahier des charges.

Par souci de cohérence, il convient de ne pas multiplier des dispositifs répondant au même objectif dans des textes différents . Votre commission a donc adopté l' amendement de suppression proposé par le rapporteur.

Par ailleurs, votre rapporteur n'est pas favorable à la mesure proposée, qui pénaliserait les ménages les plus modestes, qui ne sont pas en mesure de renouveler leur véhicule, et encore moins d'acheter des véhicules électriques ou hybrides ou répondant aux dernières normes européennes d'émission de polluants atmosphériques.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 5 (art. L. 122-7, L. 122-8, L. 122-8-1, L. 122-8-2, L. 122-8-3, L. 122-9, L. 122-10, L. 122-11, L. 122-12, L. 122-13, L. 122-13-1, L. 122-14, L. 122-15, L. 122-16, L. 122-17, L. 122-17-1, L. 122-17-2, L. 122-17-3, L. 122-17-4, L. 122-17-5, L. 122-18, L. 122-19, L. 122-19-1, L. 122-20, L. 122-21 [nouveaux] du code de la voirie routière) - Régulation du secteur autoroutier

Objet : cet article établit un certain nombre de règles destinées à renforcer la régulation du secteur autoroutier.

I - Le droit en vigueur

A. Les relations contractuelles entre l'État et les sociétés concessionnaires d'autoroutes et la régulation des tarifs de péage

Le réseau autoroutier français a essentiellement été fondé sur le principe de la concession de la construction et de l'exploitation des autoroutes. L'État est lié aux sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) par des contrats de concession, aussi appelés conventions de délégation, qui déterminent les conditions dans lesquelles elles exercent les missions qui leur sont confiées par l'État et en contrepartie desquelles elles sont autorisées à percevoir des péages, en application de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière.

On distingue plusieurs catégories de concessionnaires :

- les SCA « historiques », nées à partir des années 1950, essentiellement sous la forme de sociétés d'économie mixte (SEMCA) à capitaux publics, et qui ont été privatisées en 2006 39 ( * ) ; s'y ajoute la société COFIROUTE, créée en 1970 sous la forme d'une société privée ;

- les SCA récentes, constituées à partir des années 2000, qui exploitent un réseau moins étendu et parfois moins rentable que les premières SCA, dans des conditions moins avantageuses 40 ( * ) ;

- deux SCA à capitaux majoritairement publics, les sociétés « tunnelières » Autoroute et tunnel du Mont-Blanc (ATMB) et la Société Française du tunnel routier du Fréjus (SFTRF).

Le décret du 25 janvier 1995 relatif aux péages autoroutiers prévoit une hausse annuelle minimale des tarifs égale à 70 % de l'inflation. Les SCA peuvent toutefois signer des contrats de plan avec l'État, qui prévoient la réalisation d'investissements complémentaires au cahier des charges initial, en contrepartie d'une compensation. Celle-ci prend en général la forme d'une évolution de la loi tarifaire, mais peut aussi se traduire par un allongement de la durée de la concession. Lorsque de tels contrats sont signés, ce qui est très fréquemment le cas, la hausse des péages s'établit à 80-85 % de l'inflation, auquel s'ajoute un pourcentage correspondant à la compensation des investissements prévus.

Dans son rapport de juillet 2013 41 ( * ) , la Cour des comptes a pour sa part démontré que la compensation des investissements prévus dans les contrats de plan s'est systématiquement effectuée à l'avantage des SCA, tant en ce qui concerne le champ des investissements compensés que le montant de cette compensation. L'évaluation ex ante des coûts des travaux réalisés dans ce cadre par l'État souffre notamment de la fragilité des hypothèses retenues sur des périodes aussi longues que la durée des concessions, comme du manque de communication de la part des SCA d'un certain nombre de données concernant les investissements antérieurs par exemple.

Jusqu'à présent, ce sont les services de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) qui ont été chargés de la négociation des contrats de plan avec les SCA, comme du contrôle de leur mise en oeuvre. Ils s'assurent en particulier du respect, par les SCA, des lois tarifaires applicables. Si leur rôle est reconnu s'agissant du contrôle du respect des normes techniques des infrastructures gérées par les SCA, plusieurs rapports ont relevé des insuffisances dans le suivi, par l'administration en général, des aspects financiers des contrats de concession.

Dans son avis du 17 septembre 2014 42 ( * ) , l'Autorité de la concurrence a dénoncé ce mécanisme d'indexation des tarifs de péages sur l'inflation, dans la mesure où il est déconnecté des coûts réellement supportés par les SCA. Il leur octroie une « rente », qui n'apparaît pas justifiée par le niveau de risque qu'elles supportent, compte tenu de leur situation de monopole 43 ( * ) .

L'autorité s'est aussi interrogée sur la pertinence de la succession des contrats de plan dans le temps, qui risque d'avoir pour conséquence de prolonger à l'infini les concessions, « éloignant toujours plus le retour des autoroutes concédées dans le giron de l'État ainsi que leur éventuelle réattribution après mise en concurrence », à l'heure où le Gouvernement était sur le point de signer un « plan de relance autoroutier » avec les SCA.

Cette appellation fait référence à un ensemble de contrats de plan, dont le montant initial envisagé était de 3,6 milliards d'euros, en contrepartie d'un allongement des concessions pouvant aller jusqu'à six ans. Il a été approuvé par Bruxelles à hauteur de 3,2 milliards d'euros, mais a fait l'objet d'un certain nombre de critiques ou de réserves. L'Autorité de la concurrence n'a pas hésité à parler d' « adossement 44 ( * ) » à son sujet.

B. La régulation des marchés de travaux, fournitures et services du réseau autoroutier concédé

Les SCA sont soumises à des obligations différentes en matière de marchés de travaux, fournitures et services, selon leur caractère public ou privé et leur histoire.

Régime juridique

Sociétés concernées

Chapitre 3 du titre II du décret n° 2010-406 du 26 avril 2010 relatif aux contrats de concession de travaux publics et portant diverses dispositions en matière de commande publique

COFIROUTE : 12% du réseau, 14% du chiffre d'affaires du secteur

Publicité et mise en concurrence des marchés de travaux d'un montant égal ou supérieur à 4.845.000 € HT, sauf si passés avec une entreprise liée

ADELAC, ALBEA, ALICORNE, A'LIENOR, ALIS, ARCOUR, ATLANDES, CEVM (nouvelles concessions créées à partir des années 2000) : 6 % du réseau, 6 % du chiffre d'affaires du secteur

Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics

ATMB, SFTRF (sociétés majoritairement publiques) :

12 % du réseau, 3 % du chiffre d'affaires du secteur

Publicité et mise en concurrence des marchés de travaux, de fournitures et de services au-delà de certains seuils (5 186 000 € HT pour les marchés de travaux, 207 000 € HT pour les fournitures et services)

Dispositions contractuelles dérogatoires au décret n° 2010-406

APRR, AREA, ASF, ESCOTA, SANEF, SAPN (anciennes sociétés d'économie mixte privatisées) : 80 % du réseau,

77 % du chiffre d'affaires du secteur

Publicité et mise en concurrence des marchés de travaux dépassant le seuil de 2 millions d'€ HT et pour les marchés de fournitures et services dépassant le seuil de 240.000 € HT

Source : étude d'impact annexée au présent projet de loi et commission spéciale du Sénat

Les règles applicables aux SCA « historiques » sont d'origine contractuelle : ce sont les contrats de concession qui font référence au décret n° 2005-1742 qui applique l'ordonnance n° 2005-649, avec des seuils de mise en concurrence inférieurs à ceux du décret. Créée sous la forme d'une société de droit privé dès l'origine, COFIROUTE a quant à elle toujours bénéficié d'un régime particulier, beaucoup moins contraignant.

À l'exception de COFIROUTE, chaque SCA possède une commission consultative des marchés (CCMC), chargée d'émettre un avis consultatif sur les procédures de passation de marchés. Ces commissions et les marchés qu'elles supervisent sont soumis au contrôle d'une instance nationale, la commission nationale des marchés des SCA et des ouvrages d'art.

Dans son avis du 17 septembre 2014, l'Autorité de la concurrence a constaté que les obligations de publicité et de mise en concurrence des SCA étaient globalement respectées, tout en déplorant que certaines sociétés refusent de communiquer à leur CCMC toutes les informations nécessaires au contrôle de la régularité des marchés. Elle a en outre constaté qu'une part importante des marchés de travaux des SCA privatisées a été attribuée à une entreprise liée (appartenant au même groupe), un phénomène facilité par l'appartenance de plusieurs SCA à de grands groupes de travaux publics. Par ailleurs, il est apparu que la commission nationale des marchés des SCA et des ouvrages d'art n'avait pas les moyens de ses missions. C'est la raison pour laquelle l'Autorité de la concurrence a formulé une série de recommandations pour améliorer les conditions de la concurrence dans les appels d'offres des concessionnaires.

II - Le dispositif proposé

A. La régulation des tarifs de péage (articles L. 122-12 à L. 122-14 [nouveaux] du code de la voirie routière)

Le présent article dispose que l'ARAFER est consultée, dans les conditions définies par voie réglementaire, sur les projets de modification de la convention de délégation, du cahier des charges annexé ou de tout autre contrat, lorsqu'ils ont une incidence sur les tarifs des péages. L'avis de l'ARAFER sera rendu public, sous réserve du secret des affaires. Un décret pris en Conseil d'État après avis de l'ARAFER déterminera les modalités d'application de ces dispositions.

B. La régulation des marchés de travaux, fournitures et services du réseau autoroutier concédé (articles L. 122-15 à L. 122-23 [nouveaux] du code de la voirie routière)

Le présent article inscrit dans la loi les obligations de publicité et de mise en concurrence applicables aux marchés de travaux, fournitures ou services passés par les concessionnaires d'autoroutes, en les homogénéisant. Il soumet les SCA « historiques », y compris COFIROUTE, à plusieurs dispositions de l'ordonnance n° 2005-649, déjà applicable aux concessionnaires à capitaux majoritairement publics. Les manquements à ces obligations de publicité et de mise en concurrence seront sanctionnés. En particulier, l'ARAFER sera habilitée à engager un référé précontractuel auprès du juge administratif.

L'ARAFER devra élaborer chaque année un rapport sur ces marchés et les travaux réalisés en exécution des marchés. Elle pourra aussi recueillir des données, procéder à des expertises et mener des études et toutes actions d'information nécessaires dans ce secteur. Un décret pris en Conseil d'État après avis de l'ARAFER déterminera les modalités d'application de ces dispositions.

C. Modalités de contrôle (articles L. 122-24 à L. 122-26 [nouveaux] du code de la voirie routière)

L'ARAFER aura dans le secteur autoroutier, comme dans le secteur du transport par autocar, les mêmes prérogatives que celles dont dispose aujourd'hui l'ARAF en matière de contrôle administratif, et le fait de s'opposer à l'exercice des fonctions de ses agents sera également passible de sanctions pénales (six mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende, ainsi que les peines complémentaires mentionnées aux articles L. 2135-10 et L. 2135-11 du code des transports).

III - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

A. La régulation des tarifs de péage (articles L. 122-7 à L. 122-9 [rétablis] du code de la voirie routière)

Les députés ont étendu le rôle de l'ARAFER, qui sera consultée non seulement lorsque le contrat a une incidence sur les tarifs des péages, mais aussi lorsqu'il modifie la durée de la concession 45 ( * ) . Ils ont précisé, à l'initiative des rapporteurs, que l'ARAFER devra se prononcer dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Elle sera aussi consultée sur tout nouveau projet de délégation 46 ( * ) . Tous ces documents, accompagnés de l'avis de l'ARAFER, devront être transmis au Parlement avant leur signature , après avis du Conseil d'État lorsqu'il est requis 47 ( * ) .

En outre, ils ont indiqué l'ARAFER pourra rendre un avis sur les « conditions de mise en oeuvre » des conventions de délégation déjà conclues, soit d'office, soit à la demande du ministre des transports 48 ( * ) .

L'Assemblée nationale a aussi prévu, à l'initiative des rapporteurs, que l'ARAFER devra établir, au moins une fois tous les cinq ans, un rapport public sur l'économie générale des concessions , notamment au regard des modifications contractuelles intervenues et des révisions des tarifs de péage.

Enfin, les députés ont précisé, à l'initiative des rapporteurs, que les revenus additionnels des tarifs de péages résultant des modifications contractuelles devront couvrir les dépenses de toute nature liées à la construction, à l'exploitation, à l'entretien, à l'aménagement ou à l'extension de l'infrastructure, l'amortissement des capitaux investis par le délégataire ainsi qu'une rémunération raisonnable et conforme aux conditions du marché , tels qu'ils peuvent être évalués avant la conclusion de l'avenant.

B. La régulation des marchés de travaux, fournitures et services du réseau autoroutier concédé (articles L. 122-10, L. 122-11 [rétablis], L. 122-12 à L. 122-18 [nouveaux] du code de la voirie routière)

À l'initiative des rapporteurs, les députés ont inscrit dans la loi l'obligation, pour chaque SCA dont la taille excède un seuil fixé par voie réglementaire, de disposer d'une commission des marchés , dont ils ont renforcé les pouvoirs 49 ( * ) . Chaque commission devra être composée en majorité de personnalités indépendantes du concessionnaire et comprendre un représentant de l'ARAFER ou du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Elle devra définir les règles internes pour la passation et l'exécution des marchés et veiller à leur respect. Un avis conforme de l'ARAFER sera requis sur ces règles et la composition de la commission.

L'attribution des marchés sera soumise à l'avis préalable de la commission des marchés, qui le transmettra à l'ARAFER et l'informera de tout manquement constaté. Le concessionnaire ne pourra refuser de suivre l'avis de la commission des marchés que par une décision de son conseil d'administration ou de son conseil de surveillance.

La commission des marchés devra enfin être informée des avenants aux marchés conclus par le concessionnaire, ainsi que de la liste des entreprises avec lesquelles il conclut des marchés en dehors du champ où des règles de passation des marchés s'appliquent.

L'Assemblée nationale a aussi défini des règles relatives à la passation des contrats concernant les installations annexes à caractère commercial situées sur le réseau autoroutier (stations-services, commerces d'alimentation et de restauration), toujours à l'initiative des rapporteurs 50 ( * ) . Elle a instauré des règles de publicité et de procédures de passation des contrats, qui seront précisées par voie réglementaire. L'ARAFER devra se prononcer sur le respect de ces règles, dans un délai d'un mois à compter de sa saisine.

Enfin, les députés ont adopté un autre amendement des rapporteurs visant à autoriser l'ARAFER à obtenir, par décision motivée, la transmission régulière d'informations et de données par les concessionnaires d'autoroutes et par les entreprises intervenant sur le réseau autoroutier. Ils seront tenus de lui fournir toute information relative aux résultats financiers de la concession, aux coûts des capitaux investis sur le réseau, aux marchés de travaux, aux services rendus à l'usager et tout élément statistique relatif à l'utilisation et à la fréquentation du réseau.

IV - La position de votre commission

Le secteur autoroutier fait l'objet d'une vive actualité depuis la publication de l'avis de l'Autorité de la concurrence en septembre dernier. Des groupes de travail ont été constitués au sein des commissions du développement durable de chaque assemblée, pour approfondir le sujet. Notre collègue président-rapporteur de la mission d'information de l'Assemblée nationale, Jean-Paul Chanteguet, du groupe socialiste, républicain et citoyen, en a conclu à la nécessité de résilier les contrats de concession. Au Sénat, le groupe de travail présidé par Jean-Jacques Filleul et Louis-Jean de Nicolaÿ a remis le 17 décembre 2014 ses recommandations, articulées autour de trois axes (« renforcer la transparence et la régulation du secteur » , « changer de modèle pour les contrats de plan » , « avancer sur le chemin d'une reprise en main par l'État des concessions autoroutières » ). Votre commission se félicite qu'une bonne partie des recommandations de ce groupe de travail aient été intégrées au présent texte, lors de son passage à l'Assemblée nationale. L'Autorité de régulation a en effet vu ses compétences et ses pouvoirs renforcés, tandis que des mesures ont été prises pour favoriser la transparence du secteur, au présent article et à l'article 6.

En adoptant les amendements de son rapporteur, votre commission a souhaité préciser et consolider ces avancées d'un point de vue juridique. Elle a ainsi indiqué que l'avis de l'ARAFER sur les contrats signés entre l'État et les autoroutes portera notamment sur le respect de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière, qui n'autorise la signature de contrats de plan qu'à la « condition stricte de leur nécessité ou de leur utilité, ainsi que de leur caractère accessoire par rapport à l'ouvrage principal » et prévoit que l'allongement de la durée d'une convention de délégation ou l'augmentation des tarifs doivent être « strictement limités à ce qui est nécessaire ». Les débats suscités par le plan de relance autoroutier négocié par le Gouvernement ont démontré l'intérêt d'une telle précision.

L'existence de ces dispositions à l'article L. 122-4 a aussi conduit votre commission à supprimer la référence introduite par les députés à « la rémunération raisonnable et conforme aux conditions du marché », qui est déjà satisfaite par cet article L. 122-4.

Votre commission a aussi supprimé la référence à la possibilité, pour l'ARAFER, de rendre un avis sur « les conditions de mise en oeuvre » des conventions de délégation déjà conclues, dans la mesure où cette formulation n'est pas suffisamment claire. Il revient aujourd'hui à la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer de s'assurer du respect des contrats que l'État a signé avec les SCA. Quant à l'analyse ex post des prévisions et évaluations financières, l'ARAFER pourra la réaliser sans que cette mention soit nécessaire, dans le cadre de son rôle d'information défini à aux articles L. 122-8-1 et L. 122-19-1.

Pour simplifier le texte, elle a supprimé le détail du contenu du rapport de l'autorité de régulation sur l'économie générale des conventions de délégations, qui n'a pas à être précisé par la loi.

En ce qui concerne les règles applicables aux marchés de travaux, fournitures et services, votre commission a supprimé la référence à la présence d'un représentant de l'ARAFER au sein des commissions des marchés des sociétés d'autoroutes, dans la mesure où l'autorité de régulation pourra être amenée à se prononcer dans un second temps sur ces marchés.

Elle a aussi modifié la section relative aux contrats régissant les installations annexes pour l'adapter au droit existant et supprimer des difficultés d'application d'ordre juridique. En effet, les contrats de sous-concession ne sont pas des marchés au sens de la commande publique, et les exemptions prévues par le texte de l'Assemblée nationale ne sont pas justifiées. Votre commission a également précisé que l'attributaire du contrat devra être agréé préalablement à la signature du contrat, afin de sécuriser le dispositif d'un point de vue juridique.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 5 bis A - Réservation de voies de circulation aux transports en commun, taxis, véhicules sobres, véhicules de services d'autopartage ou utilisés en covoiturage

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, autorise la réservation de voies de circulation sur les autoroutes aux transports en commun, taxis, véhicules sobres, véhicules de services d'autopartage ou utilisés en covoiturage, aux heures de forte fréquentation.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article, inséré en séance à l'initiative de notre collègue député Denis Baupin et de députés du groupe écologiste, autorise la réservation d'une voie de circulation sur les autoroutes comportant au moins trois voies et traversant ou menant vers une métropole aux véhicules les plus sobres et les moins polluants, aux transports en commun, aux taxis, aux véhicules de services d'autopartage et aux véhicules utilisés en covoiturage, aux heures de forte fréquentation. Les modalités d'application du présent article sont renvoyées à un décret en Conseil d'État.

II - La position de votre commission

La question de la réservation des voies de circulation à certains types de véhicules est déjà abordée dans le cadre du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, encore en discussion. L'article 14 quater du texte, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat, prévoit en effet la remise d'un rapport sur la question. Par souci de cohérence, il convient de ne pas multiplier des dispositifs répondant au même objectif dans des textes différents. Votre commission a donc adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 5 bis - Rapport sur la modulation des tarifs de péage autoroutier en fonction du nombre de passagers ou du caractère écologique du véhicule

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement sur l'opportunité de pratiquer une modulation des tarifs de péage autoroutier en fonction du nombre de passagers et une tarification préférentielle pour les véhicules considérés comme écologiques.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article, inséré en commission spéciale à l'initiative de notre collègue député Philippe Vigier et de députés du groupe UDI, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'opportunité de pratiquer une modulation des tarifs de péage autoroutier en fonction du nombre de passagers et une tarification préférentielle pour les véhicules considérés comme écologiques, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 6 (art. L. 122-4 et L. 122-4-1 [rétabli] du code de la voirie routière) - Mécanisme correcteur en cas de bénéfices supérieurs aux estimations. Mise en ligne des contrats entre l'État et les sociétés d'autoroutes

Objet : cet article oblige les SCA et l'État à insérer, dans les conventions de délégation, un mécanisme correcteur applicable lorsque les résultats financiers excèdent les prévisions initiales. Il impose également la mise en ligne de l'ensemble des documents contractuels liant l'État aux SCA.

I - Le dispositif proposé et les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le présent article prévoit que les décrets pris en Conseil d'État pour instaurer les péages et pour déterminer les modalités d'application des dispositions relatives aux contrats de plan sont arrêtés après avis de l'ARAFER.

Les députés ont adopté un amendement des rapporteurs, qui indique que le cahier des charges annexé à chaque convention de délégation devra prévoir un dispositif de modération des tarifs de péage, de réduction de la durée de la concession ou une combinaison des deux, applicable lorsque les revenus des péages ou les résultats financiers excèdent les prévisions initiales. En cas de contribution de collectivités territoriales ou de l'État au financement de la délégation, le dispositif peut prévoir, à la place ou en complément, un partage d'une partie des résultats financiers de la délégation au profit de l'État et des collectivités territoriales contributrices.

À l'initiative des rapporteurs toujours, l'Assemblée nationale a imposé la publication en ligne de la convention de délégation, du cahier des charges annexé, des autres documents contractuels et de leurs avenants , selon les modalités arrêtées par l'autorité administrative compétente et sous réserve du respect du secret des affaires.

II - La position de votre commission

Si la publication au Journal officiel des conventions de délégation est obligatoire, puisqu'ils sont approuvés par décret en Conseil d'État, les documents techniques annexés au contrat ne sont jamais publiés, pour de strictes contraintes pratiques (nombre de pages et taille des documents). Ils sont toutefois consultables par le public dans les locaux du ministère chargé des transports, sous réserve des secrets protégés par la loi.

Votre commission a adopté un amendement du rapporteur pour prévoir les cas où le volume ou les caractéristiques des documents contractuels ne permettent pas leur mise à disposition par voie électronique. Dans ces situations, l'autorité compétente arrêtera les modalités de leur consultation.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6 bis - Ratification de l'ordonnance relative à la participation de la société du Grand Paris à certains projets du réseau des transports en Ile-de-France

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'initiative du Gouvernement, ratifie l'ordonnance n° 2014-690 du 26 juin 2014 relative à la participation de la société du Grand Paris à certains projets du réseau des transports en Ile-de-France.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

L'ordonnance n° 2014-690 du 26 juin 2014 relative à la participation de la société du Grand Paris à certains projets du réseau des transports en Île-de-France a été autorisée par l'article 8 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

Conformément à cet article, elle modifie la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris pour permettre à la société du Grand Paris (SGP) de financer des projets d'infrastructure de transport du réseau existant , aujourd'hui géré par la RATP ou SNCF Réseau, ayant au moins une correspondance avec le réseau de transport public du Grand Paris. La SGP pourra aussi être désignée maître d'ouvrage de projets de création ou d'extension d'infrastructures du réseau de métropolitain ayant au moins une correspondance avec le réseau de transport public du Grand Paris, en signant une convention avec la RATP. Dans ce cas, la SGP sera propriétaire des ouvrages qu'elle réalise. La RATP restera néanmoins compétente pour exercer ses compétences de gestionnaire d'infrastructure. Une convention entre la RATP et la SGP déterminera les droits et obligations relatifs à l'exercice de cette compétence.

L'ordonnance permet aussi au Syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF) de confier à la SGP, par voie de convention, toute mission d'intérêt général présentant un caractère complémentaire ou connexe à ses missions. L'État et les collectivités territoriales possèdent déjà cette faculté.

II - La position de votre commission

L'ordonnance n° 2014-690 du 26 juin 2014 relative à la participation de la société du Grand Paris à certains projets du réseau des transports en Ile-de-France respecte le champ de l'habilitation en vertu de laquelle elle a été prise.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 6 ter (nouveau) (art. L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales) - Prise en charge des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) sur les parties annexes du réseau autoroutier

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'initiative de notre collègue Éric Doligé, précise que les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) sont pris en charge par les sociétés d'autoroutes y compris sur les parties et les installations annexes du réseau autoroutier.

L'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales prévoit aujourd'hui que les interventions effectuées par les SDIS sur le réseau routier et autoroutier concédé font l'objet d'une prise en charge par les sociétés concessionnaires d'ouvrages routiers et autoroutiers. Une convention entre les SDIS et les sociétés concessionnaires doit être signée à cet effet, selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé des finances.

L'arrêté du 7 juillet 2004 pris en application de cette disposition propose, en son annexe, un modèle de convention particulièrement restrictif quant au périmètre géographique sur lequel ces interventions sont prises en charge . Il fait en effet référence au réseau autoroutier « à l'exclusion des ouvrages particuliers (grands tunnels par exemple) et des aires annexes ». Or, nombre d'interventions des SDIS ont lieu sur des aires annexes, et des désaccords apparaissent souvent entre les SDIS et les sociétés concessionnaires sur le périmètre de cette prise en charge.

En réponse à une question écrite à ce sujet 51 ( * ) , le ministère de l'Intérieur avait évoqué, en avril 2014, une modification de l'arrêté du 7 juillet 2004 pour pallier ces difficultés. Cet arrêté n'a toutefois pas encore été modifié à ce jour.

C'est la raison pour laquelle votre commission a adopté un amendement de notre collègue Éric Doligé, modifié à l'initiative du rapporteur, afin de préciser, à l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales, que les interventions des SDIS sont prises en charge par les sociétés concessionnaires y compris sur les parties annexes et les installations annexes du réseau routier et autoroutier concédé.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 7 - Entrée en vigueur des dispositions relatives à la mobilité

Objet : cet article détermine les dates d'entrée en vigueur des dispositions relatives à la mobilité du présent projet de loi (ARAFER, transport par autocar, secteur autoroutier).

I - Le dispositif proposé et les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le présent article n'a fait l'objet que de modifications rédactionnelles ou de coordination à l'Assemblée nationale. Son I diffère de six mois à compter la promulgation de la loi l'entrée en vigueur :

- des dispositions relatives à l'ARAFER (I et III de l'article 1 er ) ;

- de l'ouverture des services de transport par autocar, pour ce qui concerne les liaisons susceptibles d'être interdites ou limitées par une AOT (articles L. 3111-17 à L. 3111-24 du code des transports, créés à l'article 2) ;

- de la sanction prévue en cas de non-respect de l'article L. 3111-17, prévue au 6° du I de l'article 3 ;

- des dispositions relatives au secteur autoroutier (articles 5 et 6).

Le II du présent article précise quant à lui que les règles de passation des contrats de travaux, fournitures et services sur le réseau autoroutier, établies à l'article 5, s'appliquent aux marchés passés par les concessionnaires d'autoroutes pour lesquels une procédure de publicité est engagée après le délai de 6 mois à compter de la promulgation de la loi, même en cas de clause contraire de la convention de délégation ou du cahier des charges annexé.

II - La position de votre commission

Votre commission a adopté un amendement de coordination, résultant des modifications adoptées aux articles 1 er , 2 et 3. Cet amendement réintroduit l'avis de l'ARAFER sur les modalités d'application de certaines dispositions, six mois après l'entrée en vigueur de la loi, soit au moment où cette autorité sera effectivement créée.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8 (art. L. 3120-2, L. 3121-3 [rétabli], L. 3121-5 et L. 3121-11 du code des transports, art. 5 et 6 de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014, art. 230-19 du code de procédure pénale et art. L. 311-3 du code de la sécurité sociale) - Stationnement des voitures de transport avec chauffeur (VTC) aux abords des gares et des aéroports

Objet : cet article supprime la dérogation à l'interdiction de stationnement aux abords des gares et aérogares pour les VTC qui peuvent justifier une réservation, clarifie au sein du code les conditions de cessibilité des licences de taxis par les personnes morales, et procède à des modifications rédactionnelles.

I - Le droit en vigueur

A. La réglementation de l'activité des taxis

La réglementation de l'activité des taxis est fondée sur des motifs économiques (impossibilité de mettre en concurrence un taxi hélé sur la voie publique) et sur un impératif de sécurité publique (occupation du domaine public).

Cette réglementation concerne :

- l'accès à la profession de chauffeur de taxi , conditionné par l'obtention d'un certificat de capacité professionnelle et la délivrance d'une carte professionnelle, une visite médicale périodique et le respect d'un certain nombre d'incompatibilités 52 ( * ) ;

- l'exercice de l'activité de taxi , conditionné par la détention d'une autorisation de stationnement (ADS), communément appelée « licence », délivrée par l'autorité administrative (le maire ou le préfet de police à Paris), par ordre chronologique d'inscription sur une liste d'attente ; seuls les chauffeurs de taxis titulaires d'une licence sont ainsi autorisés à circuler et stationner sur la voie publique ; ils ont le monopole de la maraude ;

- les prix pratiqués , définis par l'État, par l'intermédiaire des préfectures qui agréent un tarif départemental.

La loi n° 2014-1104 du 1 er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur a mis fin au principe de cessibilité des licences de taxis, tout en prévoyant une dérogation pour toutes celles délivrées antérieurement à la publication de la loi (article L. 3121-2 du code des transports).

Les nouvelles licences délivrées seront donc désormais valides pendant trois ans, renouvelables dans des conditions fixées par décret, tandis que les anciennes licences pourront donc toujours être cédées à titre onéreux à un successeur présenté à l'autorité administrative, mais seulement si elles ont fait l'objet de quinze ans d'exploitation effective pour la première cession, ce délai étant ramené à cinq ans une fois la première cession intervenue.

B. Les véhicules de transport avec chauffeur (VTC)

Le régime juridique de l'activité des voitures de tourisme avec chauffeur a été créé par la loi « Novelli » de 2009. L'exercice de cette activité était soumis à la détention d'une « licence de grande remise » délivrée par le préfet du département du siège de l'exploitant.

La loi du 1 er octobre 2014 précitée a fixé, dans le code des transports aux articles L. 3122-5 à L. 3122-12 (et non plus dans le code du tourisme), un nouveau régime juridique applicable aux VTC, rebaptisés « voitures de transport avec chauffeur » .

La tarification des services de VTC est notamment encadrée : le principe est celui d'une tarification forfaitaire, déterminée avant la course, au moment de la réservation préalable, et exclut toute tarification kilométrique.

La procédure d'immatriculation auprès d'Atout France a été supprimée : les exploitants doivent désormais s'inscrire sur un registre et remplir un certain nombre de conditions (concernant les véhicules, les conducteurs et les capacités financières). L'exercice de cette activité est également subordonné à la délivrance d'une carte professionnelle et est incompatible avec l'activité de conducteur de taxi .

Au-delà de l'interdiction de la maraude, l'article 8 de la loi précitée a également introduit une interdiction de stationner aux abords des gares et des aérogares pour les VTC au-delà d'une durée, fixée par décret, avant la prise en charge de leur client.

Une dérogation à cette interdiction a été adoptée au Sénat en séance publique : elle concerne les cas où le VTC peut justifier d'une réservation préalable ou d'un contrat le liant au client final, afin de répondre aux aléas des transports ferroviaires et aériens.

L'argument avancé était également d'ordre économique et écologique : il apparaissait inopportun d'obliger les véhicules à repartir à vide pour ensuite revenir toujours à vide.

II - Le dispositif proposé et les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'article 8 du projet de loi initial prévoyait de supprimer la dérogation introduite en séance publique au Sénat pour les VTC justifiant d'une réservation préalable ou d'un contrat.

En commission spéciale à l'Assemblée nationale, un amendement du Gouvernement réécrivant l'article 8 a été adopté. Présenté comme « purement rédactionnel », il le modifie néanmoins substantiellement.

Le I prévoit :

- au , une nouvelle rédaction de la fin de l'article L. 3120-2 du code des transports mais qui aboutit au même résultat de suppression de la dérogation pour le stationnement des VTC aux abords des gares et aérogares lorsqu'ils ont une réservation ;

- au , le rétablissement de l'article L. 3121-3 du code des transports.

Cet article, qui prévoit les conditions de cession des licences de taxis par les personnes morales en cas de cessation d'activité, de fusion ou de décès, n'a pourtant été abrogé par la loi du 1 er octobre 2014, que pour les licences délivrées après la publication de la loi : il continue à s'appliquer dans sa version antérieure à toutes les anciennes licences ;

- au , la modification de l'article L. 3121-5 du code des transports : dans le droit actuel, les nouvelles licences sont prioritairement délivrées aux titulaires d'une carte professionnelle qui peuvent justifier de deux ans d'expérience dans les cinq ans précédant leur inscription sur la liste d'attente ; il est ici prévu de compter ces deux ans d'expérience dans les cinq ans précédant la délivrance de la licence, afin de ne pas donner de priorité à des personnes pouvant justifier d'une telle ancienneté par rapport à une date située dix à vingt ans dans le passé ;

- au , la modification de l'article L. 3121-11 de façon à ce que l'autorisation de stationnement permette aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle « dans le ressort de l'autorisation défini par l'autorité compétente ».

Le II prévoit :

- au , de déplacer au sein du code des transports l'article relatif aux signes distinctifs que l'autorité administrative peut fixer pour les taxis (de la section 1 relative à la définition des taxis à la section 2 relative à l'exercice de la profession de taxi) ;

- au , de supprimer le II de l'article 6 de la loi du 1 er octobre 2014 qui prévoyait que l'article L. 3121-3 du code des transports s'applique toujours pour les licences délivrées antérieurement à la loi, par coordination avec le 2° du I.

Le III prévoit deux dispositions rédactionnelles afin de mettre en cohérence le code de procédure pénale et le code de la sécurité sociale avec la loi du 1 er octobre 2014.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur a proposé à la commission spéciale, par amendement , de supprimer le 1° du I du présent article , dans la mesure où il revient sur un point d'équilibre, trouvé au Sénat lors de l'examen de la loi du 1 er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur.

Ce point d'équilibre résidait dans l'obligation d'un « retour à la base » pour les VTC après chacune de leurs courses par souci de préserver aux taxis le monopole de la maraude, avec une dérogation introduite par notre collègue Vincent Capo-Canellas en séance publique. Elle avait pour objectif de ne pas faire de cette obligation un frein à l'activité économique des VTC, voire même une remise en cause de leur existence. Un argument écologique avait également été mis en avant dans la mesure où le retour de VTC « à vide » jusqu'à leur base lorsqu'ils viennent d'un aéroport notamment serait de nature à générer une grande quantité de gaz à effet de serre.

Elle a également souhaité clarifier le 2° du I, afin de bien préciser que l'article rétabli ne vise que les autorisations de stationnement délivrées avant la promulgation de la loi du 1 er octobre 2014 , qui sont bien les seules à demeurer cessibles.

Enfin, elle a présenté un amendement de coordination entre la modification rédactionnelle opérée par le 7° dans le code de la sécurité sociale et la loi du 1 er octobre 2014.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8 bis A (art. L. 130-4 et L. 142-4-1 du code de la route, art. L. 2241-1 du code des transports) - Constatation des infractions au code de la route sur les parcs de stationnement situés dans l'enceinte des gares

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, permet aux agents des parcs publics de stationnement situés sur le domaine public ferroviaire de constater certaines infractions au code de la route.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale à l'initiative des rapporteurs, permet aux agents des exploitants des parcs publics de stationnement situés sur le domaine public ferroviaire, assermentés et agréés par le représentant de l'État dans le département, de constater les infractions relatives à la circulation, à l'arrêt et au stationnement des véhicules, dans l'emprise du parc public. Il modifie à cet effet l'article L. 130-4 du code de la route et l'article L. 2241-1 du code des transports. La modification de l'article L. 142-4-1 est une mesure de coordination.

II - La position de votre commission

Votre commission n'a pas émis d'objection à cette disposition qui existe déjà pour les agents des exploitants d'aérodromes.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 8 bis (art. L. 212-1 du code des assurances) - Bureau central de tarification

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, indique que le bureau central de tarification est tenu de statuer sur les demandes qui lui sont adressées.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

L'article L. 212-1 du code des assurances dispose que toute personne assujettie à l'obligation d'assurance qui, ayant sollicité la souscription d'un contrat auprès d'une entreprise d'assurance couvrant en France les risques de responsabilité civile résultant de l'emploi de véhicules terrestres à moteur, se voit opposer un refus, peut saisir un bureau central de tarification. Ce bureau a pour rôle exclusif de fixer le montant de la prime moyennant laquelle l'entreprise d'assurance intéressée est tenue de garantir le risque qui lui a été proposé. Il peut, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, déterminer le montant d'une franchise qui reste à la charge de l'assuré.

Le présent article, inséré en commission spéciale à l'initiative de son président, François Brottes, indique que le bureau central de tarification est tenu de statuer sur les demandes qui lui sont adressées.

II - La position de votre commission

L'ajout d'une précision, selon laquelle le bureau de tarification est tenu de statuer sur les demandes qui lui sont adressées ne paraît pas utile. Votre commission observe que l'ajout de cette mention dans l'ensemble de notre corpus juridique, à chaque fois qu'une commission ou qu'une administration est chargée d'une mission, complexifierait significativement notre droit. Elle a donc adopté l' amendement de suppression proposé par le rapporteur.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 8 ter (art. L. 212-4 et L. 213-6 du code de la route) - Sanctions pénales en cas d'animation de stages de sensibilisation à la sécurité routière sans autorisation ou sans agrément

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, soumet à des sanctions pénales l'animation de stages de sensibilisation à la sécurité routière sans l'autorisation ou l'agrément prévus par le code de la route.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a encadré l'organisation des stages de sensibilisation à la sécurité routière. Ceux-ci ne peuvent avoir lieu sans l'autorisation administrative mentionnée à l'article L. 212-1 du code de la route, et doivent être effectués par un établissement ayant obtenu un agrément délivré par l'autorité administrative, comme le prévoit l'article L. 213-1 du même code. Ces règles ne sont aujourd'hui assorties d'aucune sanction pénale.

Le présent article additionnel, inséré à l'initiative du Gouvernement, prévoit de telles sanctions pénales en cas de non-respect de ces dispositions. Il s'agit des mêmes sanctions que celles aujourd'hui applicables en cas de réalisation d'activités d'enseignement de la conduite sans autorisation ou d'exploitation d'une auto-école sans agrément, déterminées aux articles L. 212-4 et L. 213-6 du même code, à savoir un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende, auxquels peuvent s'ajouter des peines complémentaires.

II - La position de votre commission

Cet article additionnel complète utilement le code de la route et n'appelle pas d'objection.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 8 quater (art. L. 213-1 et L. 213-5 du code de la route) - Simplification de la procédure d'agrément des établissements d'enseignement et de formation en matière de conduite et de sécurité routière

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, supprime l'obligation, pour l'autorité administrative compétente, de consulter une commission avant de délivrer l'agrément d'un organisme d'enseignement ou de formation à la conduite et à la sécurité routière.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

L'article L. 213-1 du code de la route dispose que l'agrément des établissements d'enseignement de la conduite et de la sécurité routière et de formation des candidats à l'un des titres ou diplômes exigés pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite est délivré par l'autorité administrative, après avis d'une commission . Il s'agit de la commission départementale de la sécurité routière, dont la composition et les attributions sont définies aux articles R. 411-10 à R. 411-12 du même code. Elle comprend des représentants des services de l'État, des élus départementaux et communaux, des représentants des organisations professionnelles, des fédérations sportives et des associations d'usagers.

Le présent article additionnel a été créé à l'initiative du Gouvernement. D'après l'exposé de l'amendement, en pratique, lorsque la commission départementale examine en section spécialisée les demandes d'agrément, elle comprend le plus souvent uniquement des représentants de l'État et des professionnels. Or, la présence de ceux-ci dans une instance chargée de rendre un avis sur la demande d'ouverture d'un concurrent potentiel est susceptible de présenter un risque d'incompatibilité avec le droit communautaire, en particulier avec l'article 14 de la directive 2006/123 dite « services », qui interdit « l'intervention directe ou indirecte d'opérateurs concurrents, y compris au sein d'organes consultatifs, dans l'octroi d'autorisations ou dans l'adoption d'autres décisions des autorités compétentes [...] ». Cette consultation ralentit en outre la procédure d'obtention de l'agrément.

Le présent article supprime donc l'obligation, pour l'autorité administrative compétente, de consulter la commission avant de délivrer les agréments des écoles de conduite et autres organismes de formation visés à l'article L. 213-1 du code de la route.

II - La position de votre commission

Cet article allège une procédure administrative, tout en assurant sa conformité au droit européen. Votre commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8 quinquies (art. L. 213-2 du code de la route) - Contrat entre l'établissement d'enseignement à la conduite et à la sécurité routière et l'élève

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, autorise la conclusion en ligne du contrat entre l'établissement d'enseignement et l'élève. Il impose par ailleurs une évaluation préalable, par l'établissement, de l'élève conducteur, avant la conclusion de tout contrat.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

L'article L. 213-2 du code de la route dispose que les conditions et les modalités de l'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière font l'objet d'un contrat écrit entre le candidat et l'établissement.

Le présent article additionnel, adopté en commission spéciale à l'initiative de son président, François Brottes, précise que ce contrat écrit peut être conclu à distance. L'objectif poursuivi par l'auteur de l'amendement est de lever « une rigidité règlementaire qui entrave l'innovation via les nouveaux moyens de communication et la création de modèles alternatifs pour l'enseignement de la conduite. »

À l'initiative de notre collègue député Marcel Bonnot et de députés du groupe UMP, le présent article a été complété en séance, pour indiquer que ce contrat est conclu après une évaluation préalable, par l'établissement, de l'élève conducteur. Le but de cette disposition est de mesurer avant la signature du contrat les besoins de formation de l'élève et son coût prévisible. Elle figure déjà à l'article R. 213-3 du code, ainsi que dans l'arrêté du 5 mars 1991 relatif à l'exploitation des établissements d'enseignement de la conduite des véhicules à moteur et de la sécurité routière.

II - La position de votre commission

Votre commission n'est pas opposée à la possibilité offerte aux auto-écoles de conclure des contrats en ligne avec les candidats. Elle a néanmoins adopté un amendement du rapporteur précisant que l'évaluation préalable à la signature de ce contrat doit s'effectuer en la présence physique de l'élève.

En effet, cette évaluation est destinée à déterminer la formation la plus adaptée à l'élève, dans son propre intérêt. Elle doit pouvoir donner lieu à un échange entre l'élève et l'établissement. Or, si elle n'était effectuée qu'en ligne, par un questionnaire à choix multiples par exemple, l'élève pourrait être tenté de se faire aider pour y répondre, empêchant ainsi l'auto-école d'évaluer son véritable niveau de connaissances.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8 sexies (art. L. 213-3 du code de la route) - Suppression de la condition d'ancienneté du permis de conduire pour gérer une auto-école

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, supprime la condition d'ancienneté du permis de conduire pour obtenir l'agrément nécessaire à l'exploitation d'un établissement d'enseignement ou de formation à la conduite et à la sécurité routière.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

L'article L. 213-3 du code de la route prévoit une condition d'ancienneté du permis de conduire pour pouvoir exploiter ou être dirigeant d'un établissement d'enseignement ou de formation à la conduite et à la sécurité routière.

Le présent article additionnel, créé à l'initiative du Gouvernement, supprime cette condition d'ancienneté. Ce faisant, il autorise l'exploitation d'auto-écoles par des personnes ne possédant pas le permis de conduire.

II - La position de votre commission

Votre commission a estimé qu'il était légitime d'exiger d'un exploitant d'une auto-école qu'il dispose du permis de conduire. Elle a donc adopté un amendement de suppression. Elle invite le Gouvernement à prendre la mesure d'application de cette disposition législative, aujourd'hui inexistante 53 ( * ) .

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 8 septies - Rapport sur la création d'une filière française de déconstruction des navires

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, prévoit la remise par le Gouvernement d'une étude de faisabilité sur la création d'une filière française de déconstruction des navires.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel a été adopté à l'initiative de notre collègue député François-Michel Lambert et de députés du groupe écologiste. L'étude de faisabilité devra être remise au Parlement dans les six mois suivant la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 8 octies (art. L. 214-1 à L. 214-4 [nouveaux] du code de la route) - Comité d'apprentissage de la route

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, crée un comité d'apprentissage de la route, qui devra être consulté sur les projets de loi concernant à titre principal le permis de conduire, ainsi que sur les mesures prises en vue de garantir un droit universel à l'accès aux épreuves du permis de conduire sur tout le territoire.

I - Le droit en vigueur et le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Il existe plusieurs instances consultatives dans le domaine de la sécurité routière, de nature réglementaire.

Le conseil national de la sécurité routière (CNSR) , créé par le décret n° 2001-784 du 28 août 2001, est associé à l'élaboration et à l'évaluation de la politique des pouvoirs publics en matière de sécurité routière.

Composition du CNSR

Le CNSR est composé de trois personnalités qualifiées désignées par le ministre chargé de la sécurité routière, deux sénateurs, deux députés, un membre du Conseil économique, social et environnemental, un représentant des régions, un représentant des départements, un représentant des communes ou des groupements de communes, un membre du conseil de la jeunesse, un membre du Conseil national des transports, huit représentants des entreprises et institutions intéressées par la sécurité routière, désignés par le ministre chargé de la sécurité routière, dix-sept représentants d'associations agissant dans le domaine de la sécurité routière, désignés par le ministre chargé de la sécurité routière, deux représentants des professions médicales et des associations et fondations oeuvrant dans le domaine de l'hospitalisation ou de la santé publique, désignés par le ministre chargé de la santé, les ministres concernés (finances, emploi, justice, intérieur, éducation nationale, défense, transports, jeunesse, recherche, santé) ou leurs représentants, le délégué interministériel à la sécurité routière et le président de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives.

Source : décret n° 2001-784 du 28 août 2001 portant création du Conseil national
de la sécurité routière et modifiant le décret n° 75-360 du 15 mai 1975
relatif au comité interministériel de la sécurité routière

Le conseil supérieur de l'éducation routière (CSER) , créé par le décret n° 2009-1182 du 5 octobre 2009, est placé auprès du ministre chargé des transports, qui peut le saisir de toute question relative à l'éducation routière, notamment l'apprentissage de la conduite, le permis de conduire et l'organisation des professions. Il peut présenter toutes propositions au ministre chargé des transports dans le domaine de l'éducation routière.

Composition du CSER

Le CSER est composé de vingt-huit membres : cinq représentants de l'État (le délégué à la sécurité et à la circulation routières, le vice-président du Conseil général de l'environnement et du développement durable, en tant que représentants du ministre chargé des transports, le directeur de la modernisation et de l'action territoriale, en tant que représentant du ministre de l'intérieur, le directeur général de l'enseignement scolaire, en tant que représentant du ministre chargé de l'éducation nationale, le directeur général du travail, en tant que représentant du ministre chargé du travail), trois représentants des collectivités territoriales (désignés respectivement par l'Association des régions de France, l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France), douze représentants élus des professionnels exerçant dans le champ de la formation à la sécurité routière (six représentants des responsables d'établissements et six représentants des salariés), trois représentants de la société civile (un représentant des consommateurs désigné sur proposition des organisations de consommateurs et après avis du ministre chargé de la consommation, un représentant des associations oeuvrant pour la sécurité routière désigné par le ministre chargé des transports, un membre du Conseil national de la jeunesse), et cinq personnalités qualifiées choisies en raison de leurs activités professionnelles ou de leurs travaux en matière d'éducation routière désignées par le ministre chargé des transports.

Source : décret n° 2009-1182 du 5 octobre 2009 relatif
au Conseil supérieur de l'éducation routière (CSER)

Le présent article additionnel, adopté à l'initiative des rapporteurs, crée une nouvelle instance consultative, le comité d'apprentissage de la route , qui sera présidé par le ministre de l'intérieur ou son représentant. Le président du CNSR en sera membre de droit. Il réunira des sénateurs et des députés, des ministres, des organisations représentatives des auto-écoles, des acteurs de l'apprentissage de la route en ligne, des enseignants, des organisations syndicales, des organisations de prévention de la sécurité routière, des organisations de consommateurs et des organisations d'automobilistes. Il devra être consulté sur les projets de loi concernant à titre principal le permis de conduire, ainsi que sur les mesures prises en vue de garantir un droit universel à l'accès aux épreuves du permis de conduire sur tout le territoire. Il pourra se saisir de toute question relative à l'organisation du service universel du permis de conduire, notamment en matière de répartition des places d'examen aux épreuves. Il sera informé annuellement de l'évolution d'indicateurs de performance permettant de mesurer les conditions d'accès effectif aux épreuves du permis de conduire et d'évaluer la qualité de l'apprentissage. Il adressera chaque année un rapport au Parlement. Ses avis devront être mis à la disposition du public par voie électronique. Sa composition et ses modalités de fonctionnement seront fixées par voie réglementaire. Il devra se réunir sans délai dès la promulgation de la loi.

II - La position de votre commission

Votre commission n'est pas favorable à cet article additionnel sur lequel elle a adopté un amendement de suppression, pour des raisons de fond comme de forme. Elle considère tout d'abord qu'il est préférable d'améliorer, au besoin, le fonctionnement des deux instances de consultatives déjà existantes, que sont le CNSR et le CSER, plutôt que de créer une nouvelle instance, qui complexifierait davantage le paysage administratif .

Elle relève en outre que la création d'une telle instance relève du domaine réglementaire et non législatif . On comprendrait mal son inscription dans la loi, alors que le CNSR et le CSER ont été mis en place par voie réglementaire. La rédaction proposée est d'autant plus surprenante que le présent article fait référence au CNSR, de nature réglementaire.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 9 (art. L. 211-2 à L. 211-8 [nouveaux], L. 213-7-1 [nouveau], L. 223-1, L. 221-1 A [nouveau], L. 221-3, L. 221-3-1, L. 221-4, L. 221-5, L. 221-6, L. 221-7, L. 221-8 [nouveaux] du code de la route, L. 312-13 du code de l'éducation) Externalisation de l'épreuve théorique générale du permis de conduire et des épreuves pratiques des diplômes professionnels poids-lourds

Objet : cet article réforme les modalités de passage des épreuves du permis de conduire.

I - Le droit en vigueur et le dispositif proposé

Les modalités de délivrance du permis de conduire sont définies dans la partie réglementaire du code de la route, aux articles R. 221-1 à R. 221-21. 1 300 inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière (IPCSR), répartis dans 700 centres, assument la fonction d'examinateur. Leur nombre insuffisant a créé un engorgement des centres d'examen, avec pour conséquence de longs délais de passage des épreuves, qui peuvent renchérir de façon conséquente le coût de la préparation au permis de conduire. Le délai moyen d'attente entre les deux premiers passages de l'épreuve pratique du permis de conduire s'élève à 98 jours à l'échelle nationale, mais il peut atteindre 5 mois dans certains départements, comme en Ile-de-France. Dans les autres pays européens, ce délai s'élève en moyenne à un mois et demi.

En France, le coût moyen du permis de conduire s'élève à 1 600 euros, mais peut s'envoler pour ceux qui échouent au premier passage après un apprentissage classique, pour atteindre 2 000, 2 500 voire 3 000 euros 54 ( * ) . Dans ce contexte, chaque mois de délai en moins ferait économiser 200 euros environ au candidat concerné.

Pour répondre à cette difficulté, le ministre de l'intérieur a lancé une réforme du passage du permis de conduire, composée de plusieurs volets :

- la mobilisation, à titre temporaire, depuis le 1 er juillet 2014, de retraités de la gendarmerie et de la police nationale ainsi que d'autres agents publics pour décharger les inspecteurs de la surveillance de l'épreuve théorique du permis de conduire (le code). Cette mesure permet de dégager 142 000 places supplémentaires pour le permis B, mais ne peut être pérennisé ;

- la réduction de 35 à 32 minutes de l'épreuve pratique du permis B, par voie réglementaire, depuis le 1 er août 2014, afin de permettre le passage de 13 examens par jour au lieu de 12, ce qui représente, sur une année, 110 000 places supplémentaires pour le permis B 55 ( * ) ;

- l' externalisation de l'épreuve du code et de certains permis poids lourds prévue par le présent article , qui doit remplacer le dispositif de mobilisation évoqué ci-dessus et offrir 142 000 places supplémentaires par an.

L'objectif de cette réforme est de réduire à 45 jours le délai moyen de passage entre les épreuves pratiques du permis de conduire d'ici l'été 2016, si l'on en croit l'étude d'impact annexée au présent projet de loi.

Le présent article organise l'externalisation de certaines épreuves en créant une nouvelle profession réglementée, celle d'organisateur de l'épreuve théorique générale et des épreuves pratiques des diplômes professionnels en vue de l'obtention du permis de conduire d'une catégorie de véhicule du groupe lourd . Il insère à cet effet un nouveau chapitre dans la partie législative du code de la route, intitulé « vérification d'aptitude, délivrance et catégories », et comprenant six nouveaux articles, les articles L. 221-3 à L. 221-8.

L'article L. 221-3 dispose que l'organisation des épreuves théoriques en vue de l'obtention du permis de conduire et des épreuves pratiques des diplômes professionnels en vue de l'obtention du permis de conduire d'une catégorie de véhicule du groupe lourd est assurée par l'autorité administrative ou par des personnes agréées à cette fin par celle-ci. Les frais perçus par les organisateurs agréés auprès des candidats seront réglementés par décret pris après avis de l'Autorité de la concurrence.

L'article L. 221-4 prévoit que l'organisateur agréé d'une épreuve du permis présente des garanties d'honorabilité, de capacité à organiser l'épreuve, d'impartialité et d'indépendance à l'égard des personnes délivrant ou commercialisant des prestations d'enseignement de la conduite. Il devra s'assurer que les examinateurs qu'il recrute présentent bien les garanties de compétence, d'impartialité et d'honorabilité mentionnées à l'article L. 221-6.

L'article L. 221-5 indique que l'organisation d'une épreuve répond au cahier des charges défini par l'autorité administrative, qui en contrôle l'application. L'organisateur agréé devra souscrire l'engagement de donner à l'autorité administrative l'accès au local où sont organisées les épreuves.

Des sanctions sont prévues en cas de non-respect de ces dispositions, allant de la suspension à la suppression de l'agrément mentionné à l'article L. 221-3. Les modalités d'application de l'ensemble des articles du chapitre seront fixées par décret en Conseil d'État.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le passage du permis de conduire qualifié de service universel (alinéa 3)

Les députés ont adopté un amendement du rapporteur thématique, Gilles Savary, et du président de la commission spéciale, François Brottes, sous-amendé à l'initiative du rapporteur général, Richard Ferrand, visant à affirmer que l'accès aux épreuves théoriques et pratiques du permis de conduire est un service universel . Il précise que tout candidat se présentant librement ou par l'intermédiaire d'un établissement ou d'une association agréés et ayant déposé une demande de permis de conduire devra se voir proposer une place d'examen, sous réserve d'avoir atteint le niveau requis.

Le redéploiement de 35 examinateurs (alinéa 7)

L'Assemblée nationale a étendu la possibilité d'externaliser l'organisation des épreuves pratiques aux épreuves pratiques des titres professionnels des permis de conduire des catégories de véhicules du groupe lourd, outre les épreuves pratiques des diplômes professionnels 56 ( * ) . D'après l'exposé de l'amendement, l'objectif est de dégager de cette responsabilité 35 inspecteurs, ce qui représente l'équivalent de 92 000 épreuves pratiques du permis B par an.

Le recours à des agents publics ou contractuels comme examinateurs en cas d'engorgement (alinéas 9 à 11)

Les députés ont adopté un amendement du Gouvernement prévoyant que dans les départements où le délai moyen entre deux présentations d'un même candidat à l'épreuve pratique du permis de conduire de véhicules du groupe léger est supérieur à 45 jours, l'autorité administrative recourt à des agents publics ou contractuels comme examinateurs , en nombre suffisant pour garantir que le délai n'excède pas cette durée.

Les délits de violence et d'outrage prononcés à leur encontre seront sanctionnés de la même manière que ceux réalisés à l'encontre des inspecteurs. Un décret déterminera les conditions de formation, d'impartialité et d'incompatibilité de ces agents et la durée pour laquelle cette habilitation sera délivrée.

La suppression de la durée minimale de formation pratique en cas d'apprentissage classique (alinéa 24)

Les députés ont également précisé 57 ( * ) que pour chaque catégorie de formation, le ministre chargé de la sécurité routière définit les compétences à atteindre. Les formations sanctionnées par un examen du permis de conduire ne seront plus soumises à une durée minimale obligatoire, sauf pour l'apprentissage anticipé de la conduite (aussi appelée « conduite accompagnée »). Cette durée minimale est aujourd'hui fixée par décret à 20 heures.

L'encouragement aux modes d'apprentissage de conduite accompagnée et la définition de leur régime dans la loi (alinéas 25 à 35)

À l'initiative des rapporteurs, les députés ont aussi prévu que les établissements d'enseignement de la conduite et les associations qui réalisent de telles prestations proposent à chaque élève, lors de son inscription, l'un des modes d'apprentissage de conduite accompagnée suivants : l'apprentissage anticipé de la conduite, l'apprentissage en conduite supervisée, l'apprentissage en conduite encadrée et l'apprentissage en conduite libre sur véhicule à double commande. Ils ont détaillé dans la loi le régime applicable à chacun de ces modes d'apprentissage, aujourd'hui définis dans la partie réglementaire du code de la route, aux articles R. 211-3 à R. 211-5-2.

Le régime applicable à chacun des modes d'apprentissage
de conduite accompagnée dans le texte issu de l'Assemblée nationale

L'apprentissage anticipé de la conduite est dispensé aux élèves âgés de quinze à dix-huit ans en vue de l'obtention du permis de conduire des véhicules légers. Il ouvre droit à une réduction du délai probatoire suivant l'obtention du permis de conduire. Il comprend, d'une part, une période de formation initiale dans un établissement ou une association agréés et, d'autre part, une période d'apprentissage en conduite accompagnée, sous la surveillance constante et directe d'un accompagnateur remplissant des conditions fixées par décret, pendant laquelle l'élève doit parcourir une distance minimale pendant une durée minimale.

L'apprentissage en conduite supervisée est ouvert à tout élève âgé d'au moins dix-huit ans inscrit pour suivre une formation à la conduite des véhicules légers, sous la surveillance constante et directe d'un accompagnateur, après validation de sa formation initiale par l'enseignant de conduite. Cet apprentissage ne sera soumis à aucune condition de distance ou de durée minimales, contrairement au droit réglementaire en vigueur.

Les personnes suivant une formation professionnelle en vue de l'obtention d'un diplôme de l'éducation nationale permettant la délivrance du permis de conduire peuvent pratiquer la conduite encadrée , sur un véhicule léger, sous la surveillance constante et directe d'un accompagnateur remplissant des conditions fixées par décret. La conduite encadrée est accessible à partir de l'âge de seize ans aux élèves ayant validé la formation préalable à l'obtention du permis de conduire des véhicules légers.

Sauf lors des périodes de conduite accompagnée définies précédemment, l'apprentissage de la conduite des véhicules légers sur la voie publique peut être effectué en conduite libre sur un véhicule à double commandes, avec un accompagnateur justifiant d'une formation spécifique à l'utilisation de ce type de véhicule précisée par décret. Contrairement au droit actuel, cette formation spécifique peut être proposée à titre gratuit ou onéreux par les personnes proposant à la location ce type de véhicule. Le fait de mettre à disposition le véhicule à double commandes sans s'être assuré du respect par l'accompagnateur de son obligation de formation est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Source : texte issu des travaux de l'Assemblée nationale

Organisation du passage du code dans les locaux des lycées et établissements régionaux d'enseignement adapté (alinéa 42)

Les députés ont adopté un amendement de François Brottes qui autorise l'organisation du passage de l'épreuve théorique du permis de conduire dans les locaux des lycées et établissements régionaux d'enseignement adapté, en dehors du temps scolaire.

Le renforcement des exigences applicables aux organisateurs des épreuves et aux examinateurs (alinéas 14 et 16)

L'Assemblée nationale a précisé, à l'initiative des rapporteurs, que les activités d'organisateurs d'épreuves du permis de conduire et d'examinateurs sont incompatibles avec toute activité d'enseignement de la conduite ou d'exploitant d'établissement de formation à la conduite. A également été ajoutée, pour les examinateurs, une exigence d'indépendance à l'égard des personnes délivrant ou commercialisant des prestations d'enseignement de la conduite 58 ( * ) .

Attestation provisoire d'obtention du permis de conduire pour les scooters (alinéa 34)

À l'initiative des rapporteurs, les députés ont imposé la délivrance d'une attestation provisoire d'obtention du permis de conduire, dans l'attente de la délivrance de celui-ci, pour les véhicules à moteur de deux ou trois roues d'une cylindrée maximale de 50 cm 3 ou d'une puissance maximale de 4 kW et qui ne dépassent pas 45 km/h de vitesse. Il s'agit d'accélérer l'accession à des prestations de location de scooters pour les personnes en insertion, l'impression et l'envoi au domicile du permis pouvant prendre du temps.

Démarches d'amélioration de la qualité des prestations de formation (alinéas 38 à 40)

L'Assemblée nationale a adopté un amendement des rapporteurs qui dispose que les établissements et associations d'enseignement et de formation à la conduite s'engagent dans des démarches d'amélioration de la qualité des prestations de formation qu'ils délivrent. La labellisation ou la certification par un organisme accrédité pourront les faire accéder à des droits ou à des dispositifs particuliers. Ces établissements et associations devront transmettre les renseignements et documents relatifs à l'organisation et à la qualité de la formation qui leur seront demandés par le comité d'apprentissage de la route.

III - La position de votre commission

Votre commission partage pleinement l'objectif de réduction des délais de passage aux épreuves pratiques du permis de conduire, qui ne sont pas acceptables. Elle souscrit à la réforme engagée par le ministre de l'intérieur à cette fin, à savoir l'externalisation de l'épreuve théorique du permis de conduire et de certaines épreuves pratiques concernant les poids lourds. Il s'agit d'un enjeu essentiel pour l'accès des jeunes à l'emploi.

Toutefois, votre commission considère, d'une part, que l'on ne réglera pas cette question par des mots, mais par des actions concrètes, d'autre part, que l'ampleur de l'enjeu ne doit pas conduire le législateur à adopter des mesures dérogatoires au droit commun sans en avoir préalablement examiné les répercussions de façon approfondie. Elle a donc adopté plusieurs amendements en ce sens.

La suppression de la qualification de « service universel »

Votre commission a ainsi supprimé l'affirmation suivant laquelle le passage du permis de conduire est un service universel. Cette notion est aujourd'hui utilisée dans les secteurs des industries de réseau (télécommunications, services postaux, électricité) pour imposer la fourniture d'un service public minimal dans un environnement concurrentiel. Or, le présent projet de loi conserve le caractère public de l'organisation des épreuves du permis de conduire . Le renvoi à la notion de service universel n'est donc pas approprié. De plus, la portée normative de ce concept est limitée.

Par ailleurs, l'arrêté du 22 octobre 2014 fixant la méthode nationale d'attribution des places d'examen du permis de conduire prévoit déjà que tout candidat au permis de conduire se voit proposer une place d'examen, qu'il se présente en candidat libre ou par l'intermédiaire d'un établissement. L'affirmation suivant laquelle « tout candidat se présentant librement ou par l'intermédiaire d'un établissement ou d'une association agréés et ayant déposé une demande de permis de conduire devra se voir proposer une place d'examen, sous réserve d'avoir atteint le niveau requis » n'est donc pas utile. L'expression « sous réserve d'avoir atteint le niveau requis » pourrait en outre poser des difficultés d'application.

La suppression de dispositions de nature réglementaire

Votre commission a également supprimé l'ensemble des mesures de nature réglementaire. Les dispositions relatives à la conduite accompagnée introduites à l'Assemblée nationale correspondent, dans une large mesure, à la reproduction littérale des articles R. 211-3 à R. 211-5-2 du code de la route. Outre qu'elle représenterait une entorse à la répartition des normes entre la loi et le règlement, l'élévation de ces dispositions au niveau législatif rendrait difficile, à l'avenir, la moindre modification relative aux dispositifs de conduite accompagnée. Il faudrait en effet à chaque fois trouver un véhicule législatif adapté, ce qui n'est pas toujours aisé. Ainsi, contrairement à l'objectif affiché, l'inscription de ces dispositions dans la loi n'irait pas nécessairement dans le sens d'une promotion de la conduite accompagnée, puisqu'elle priverait le pouvoir exécutif de la souplesse nécessaire aux adaptations ultérieures de ce mode de formation.

Aussi votre commission a-t-elle supprimé ces dispositions, bien qu'elle partage pleinement l'objectif de promotion des différents modes de conduite accompagnée, qui permettent aux candidats d'obtenir de meilleurs résultats aux épreuves du permis de conduire à un moindre coût. Il revient désormais au Gouvernement de procéder aux améliorations envisagées, parmi lesquelles la suppression des conditions de distance et de durée minimales aujourd'hui imposées pour la conduite supervisée, telle que l'avait prévue les députés.

Votre rapporteur est en revanche opposé à la suppression de la durée minimale de formation, aujourd'hui fixée à vingt heures. Les députés avaient proposé cette mesure pour lutter contre les dérives tarifaires pratiquées par certaines auto-écoles, qui proposent des forfaits de vingt heures de conduite à des tarifs très attractifs, mais facturent ensuite très cher le coût des heures supplémentaires, alors que la durée moyenne de formation s'élève aujourd'hui à trente ou trente-cinq heures. Il ne semble toutefois pas opportun d'accréditer l'idée suivant laquelle aucune durée minimale de formation n'est nécessaire. En outre, la suppression de la durée minimale de formation ne ferait que déplacer le problème, puisque des forfaits de 10 ou 15 heures à prix cassés, avec surfacturation des heures supplémentaires, pourraient alors être proposés.

Votre rapporteur considère qu'il n'est pas non plus approprié de permettre aux loueurs de véhicules à double commande d'assurer eux-mêmes la formation nécessaire à leur utilisation, comme l'a prévu l'Assemblée nationale. Cette formation doit continuer à être assurée par des professionnels de l'enseignement de la conduite. Enfin, la sanction prévue pour la mise à disposition d'un véhicule à double commande sans s'être assuré du respect, par l'accompagnateur, de son obligation de formation, fixée à un an et 15 000 euros d'amende, semble disproportionnée et pourrait être remplacée par une contravention, qui relève aussi du domaine réglementaire.

En tout état de cause, il appartient au Gouvernement de procéder ou non à ces modifications, qui ne relèvent pas du domaine législatif.

Suivant le même raisonnement, votre commission a supprimé l'affirmation suivant laquelle les activités d'organisateurs d'épreuves du permis de conduire et d'examinateurs sont incompatibles avec toute activité d'enseignement de la conduite ou d'exploitant d'établissement de formation à la conduite, dans la mesure où l'article prévoit déjà de telles garanties d'indépendance et d'impartialité, qui seront définies par voie réglementaire.

La suppression du recours à des agents publics ou contractuels comme examinateurs

À l'initiative du rapporteur, votre commission a supprimé la disposition prévoyant le recours à des agents publics ou contractuels comme examinateurs pour le passage des épreuves pratiques du permis de conduire , dans les départements où le délai moyen entre deux présentations du même candidat à ces épreuves est supérieur à 45 jours.

Ce dispositif est dérogatoire par rapport au droit commun, puisque ce sont aujourd'hui des inspecteurs recrutés sur concours qui font passer ces épreuves. Or, il s'appliquera à l'ensemble du territoire, dans la mesure où le délai moyen entre deux présentations est au moins supérieur à 65 jours dans la très grande majorité des départements. Cette mesure revient donc, dans les faits, et sans que cela soit véritablement assumé, à revenir sur l'organisation actuelle du passage des épreuves pratiques du permis de conduire.

La mesure proposée ne soumet ces nouveaux examinateurs à aucune condition de compétence, alors que le passage de l'épreuve pratique requiert davantage de compétences que l'organisation d'une épreuve théorique, qui répond à un processus largement automatisé, réalisé sur boîtiers électroniques. Elle pourrait ainsi créer des inégalités entre les candidats.

Introduite en séance à l'Assemblée nationale, elle n'a en outre été assortie d'aucune étude d'impact permettant de connaître son coût global (nombre d'agents concernés, coûts de mise à disposition des agents, mais aussi de formation) et ses effets estimés sur la réduction des délais de passage des épreuves. De fait, ces éléments sont toujours en cours d'examen. En l'absence de ces informations, votre commission a considéré qu'il n'était pas raisonnable de maintenir ce dispositif dans la loi.

Votre rapporteur s'interroge par ailleurs sur la nécessité d'un tel dispositif au regard de la réforme initialement prévue par le ministre de l'intérieur, qui avait déjà pour objectif de réduire le délai de passage entre deux épreuves à 45 jours d'ici l'été 2016.

L'obligation d'affichage des taux de réussite, rapportés au nombre d'heures suivies

Votre commission a remplacé les dispositions relatives à la labellisation et la certification des auto-écoles par une obligation d'affichage des taux de réussite aux différentes épreuves du permis de conduire, rapportés au volume moyen d'heures d'enseignement suivies .

Cette mesure, qui avait été insérée en commission spéciale à l'Assemblée nationale, puis remplacée en séance par les dispositions relatives à la labellisation et la certification, correspond à une attente forte de nos concitoyens, puisqu'elle permettrait de lutter contre les dérives tarifaires aujourd'hui observées dans certaines auto-écoles.

Plusieurs opposants à cette mesure ont redouté qu'elle entraîne la sélection, par les auto-écoles, des candidats les plus susceptibles de réussir dans des délais rapides. Cette crainte ne semble pas fondée, au regard de l'intérêt commercial constitué par un candidat au permis de conduire, mais aussi et surtout, parce qu'il est interdit, pour une auto-école, de refuser l'inscription d'un élève. L'article L. 122-1 du code de la consommation dispose en effet qu' « il est interdit de refuser à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime ».

L'affichage des résultats et les démarches de labellisation et de certification ne sont pas des dispositifs contradictoires, et doivent tous deux être encouragés. La certification de la qualité de la formation à la conduite figure parmi les mesures du comité interministériel à la sécurité routière (CISR) du 13 janvier 2009 relatif à la réforme du permis de conduire et fait partie des sujets en cours d'examen par le Gouvernement. Votre rapporteur y est très favorable, mais relève que la labellisation ou la certification n'exigent pas nécessairement de disposition législative, et doivent rester une démarche volontaire des auto-écoles.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 9 bis A (art. L. 141-1 du code de la consommation, art. L. 213-2 et L. 213-2-1 [nouveau] du code de la route) - Interdiction des frais de présentation des candidats aux épreuves du permis de conduire

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, interdit la perception de frais pour la présentation d'un candidat aux épreuves du permis de conduire et encadre les frais perçus pour l'accompagnement d'un candidat à ces épreuves.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, adopté à l'initiative des rapporteurs, interdit la perception de frais pour la présentation d'un candidat aux épreuves du permis de conduire, et encadre les frais facturés au titre de l'accompagnement du candidat à l'épreuve. L'objectif poursuivi est de mettre fin aux dérives constatées dans le secteur, certaines auto-écoles profitant de la rareté des places d'examen et de la méthode d'attribution pour facturer aux élèves des sommes très élevées pour leur simple présentation aux épreuves. En revanche, l'accompagnement du candidat à l'épreuve pourra donner lieu à la perception de frais, mais ceux-ci seront réglementés.

Les manquements à ces dispositions seront passibles de sanctions allant de 3 000 euros pour une personne physique à 15 000 euros pour une personne morale.

II - La position de votre commission

Votre commission est favorable à ce dispositif, qui permettra de lutter contre les pratiques tarifaires abusives pratiquées par certaines auto-écoles, alors que le passage du permis de conduire est gratuit.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 9 bis (art. L. 213-4-1 [nouveau] du code de la route) - Répartition des places d'examen au permis de conduire

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, affirme que les places d'examen au permis de conduire doivent être attribuées dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, adopté en commission spéciale à l'initiative de notre collègue député François Brottes et amendé en séance à l'initiative des rapporteurs 59 ( * ) , dispose que la répartition des places d'examen au permis de conduire attribuées aux établissements d'enseignement de la conduite est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, ne portant pas atteinte à la concurrence entre ces établissements. Ces places devront être attribuées de manière à garantir l'égal accès des candidats libres à une place d'examen. La méthode nationale de répartition sera définie par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière.

II - La position de votre commission

La portée normative du présent article semble limitée, d'autant que l'arrêté du 22 octobre 2014 fixant la méthode nationale d'attribution des places du permis de conduire prévoit déjà un accès des candidats libres aux épreuves du permis de conduire, dans les mêmes conditions que les candidats inscrits par l'intermédiaire d'une auto-école. Il dispose en effet que « le nombre de places accordées mensuellement aux candidats libres est établi afin que le délai d'attente pour les candidats libres entre la première présentation et la deuxième soit égal au délai d'attente moyen constaté dans le département ». Votre commission a donc adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 9 ter - Rapport sur le passage du code lors de la journée défense et citoyenneté

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur le passage du code lors de la journée défense et citoyenneté.

Le présent article additionnel, adopté en commission spéciale à l'initiative de notre collègue député François Brottes, président de la commission, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur les conditions dans lesquelles le passage de l'épreuve théorique du permis de conduire pourrait être proposé aux jeunes de seize à dix-huit ans dans le cadre de la journée défense et citoyenneté.

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 9 quater - Rapport sur la circulation des véhicules à délégation partielle ou totale de conduite

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement sur la circulation des véhicules à délégation partielle ou totale de conduite.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel, adopté à l'initiative de députés du groupe écologiste, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur les conditions dans lesquelles les véhicules à délégation partielle ou totale de conduite pourront circuler librement sur la voie publique.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

CHAPITRE II - Commerce

Article 10 A (art. L. 341-1 à L. 341-4 [nouveaux] du code de commerce) - Réseaux de distribution commerciale

Objet : cet article vise à faciliter les changements d'enseigne pour les commerçants.

I - Le dispositif proposé

L'Autorité de la concurrence a rendu le 7 décembre 2010 un avis relatif aux contrats d'affiliation de magasins indépendants 60 ( * ) . Cet avis a mis en évidence l'existence d'importants effets restrictifs de concurrence découlant du fait que les commerçants membres d'un réseau de distribution sont généralement pris dans un enchevêtrement d'obligations contractuelles vis-à-vis de celui-ci qui les en rendent captifs. Les changements d'enseigne deviennent alors extrêmement difficiles. Ces obligations naissent d'une pluralité de contrats : contrats de franchise ou d'adhésion à une coopérative de commerçants indépendants, contrats d'approvisionnement, de location-gérance, de bail, pacte d'associés, etc. L'analyse « séparée » des différents contrats en jeu ne permet pas d'appréhender la nature et l'ampleur réelles des barrières au changement d'enseigne dans le secteur de la grande distribution.

Parmi les freins au changement d'enseigne, l'Autorité de la concurrence relevait, dans son avis précité :

- des durées de contrats trop longues et leur reconduction tacite, ainsi que des clauses d'indemnisation en cas de rupture anticipée du contrat ;

- une opacité due à l'existence d'une pluralité de contrats dont les termes ne coïncident pas ;

- des clauses de non-réaffiliation et de non-concurrence post-contractuelles, dont le champ d'application dans le temps et dans l'espace est parfois extrêmement large et qui rendent très difficile la réinstallation des commerçants concernés ;

- la présence, dans la plupart des contrats, de droits de priorité valables pendant toute la durée du contrat et plusieurs années après l'arrivée à échéance de ce dernier, clauses qui limitent les possibilités de cession des entreprises.

En 2011, le projet de loi « Lefebvre » renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs 61 ( * ) , présenté par le Gouvernement Fillon, contenait un article destiné à lutter contre les effets restrictifs de concurrence dus à l'organisation en réseau de la grande distribution. Les dispositions de cet article avaient été adoptées aussi bien par l'Assemblée nationale que par le Sénat. Toutefois, le projet de loi n'était pas allé au bout de la navette et cet article n'est donc jamais entré en vigueur.

L'article 10 A du présent projet de loi, issu d'un amendement de notre collègue député François Brottes, président de la commission spéciale, est la reprise, sous une forme condensée de la version de l'article 1 er du projet de loi « Lefebvre » voté par le Sénat en décembre 2011.

Cet article 10 A dispose que :

- l'ensemble des contrats conclus entre un commerçant et son réseau, ayant pour but commun l'exploitation d'un magasin du réseau et comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d'exercice par le commerçant de son activité, prennent fin à la même date, par l'échéance ou par la résiliation d'un des contrats (article L. 341-1 [nouveau] du code de commerce) ;

- toute clause ayant pour effet de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant, après l'échéance ou la résiliation d'un des contrats liant le commerçant au réseau de distribution, est réputée non écrite (article L. 341-2 [nouveau]). Cette disposition répond directement à une des observations de l'Autorité de la concurrence concernant l'effet anticoncurrentiel des clauses post contractuelles ;

- ces contrats ne peuvent être conclus pour une durée supérieure à neuf ans et ne peuvent être renouvelés par tacite reconduction (article L. 341-3 [nouveau]) ;

- les règles statutaires et décisions collectives adoptées conformément aux lois relatives aux associations, aux sociétés civiles, commerciales ou coopératives ne peuvent faire obstacle aux trois dispositions précédentes (article L. 341-4 [nouveau]).

II - La position de votre commission

Le présent article 10 A soulève de nombreuses interrogations.

En premier lieu, votre rapporteur observe que les mesures envisagées concernent la totalité du commerce de détail alors que le dispositif originel imaginé par l'Autorité de la concurrence et introduit dans le projet de loi « Lefebvre » ciblait spécifiquement la grande distribution à dominante alimentaire et faisait suite à une étude approfondie de ce secteur particulier. Or, aucune étude d'impact ne permet aujourd'hui de justifier l'élargissement du champ d'application envisagé. Cette extension constitue un saut dans l'inconnu.

En deuxième lieu, même recentré sur les grandes surfaces alimentaires, le dispositif ne paraît pas vraiment de nature à changer les conditions de la concurrence dans les zones de chalandises locales. Remplacer une enseigne par une autre ne modifiera pas vraiment la donne et à supposer qu'il existe une enseigne dominante dans une zone, l'Autorité de la concurrence a les moyens de la forcer à céder certains points de vente.

En troisième lieu, votre rapporteur observe que les dispositions proposées n'auront aucun impact sur le commerce intégré mais qu'elles vont perturber l'organisation et la gestion de certains groupements coopératifs et associatifs . Ce sont ces derniers en effet qui recourent, pour formaliser les engagements entre les commerces adhérents et le réseau, à des contrats à durée indéterminée ou à des contrats à durée déterminée tacitement reconductibles. Ce sont eux également qui recourent à des engagements d'adhésion de long terme assortis de pénalités financières en cas de sortie.

Enfin, tout en partageant l'objectif de fluidifier les mouvements d'enseigne, votre rapporteur n'est pas encore totalement convaincu de la pertinence des solutions proposées :

- sur la question de la durée des engagements, il convient de rappeler que le choix pour un commerçant d'adhérer à un groupement est libre. Les conditions d'adhésion sont connues au départ et relèvent de la liberté des contrats. En outre, les dispositions statutaires ou les clauses contractuelles qui prévoient un engagement d'une durée minimale peuvent se justifier par le fait que l'adhérent bénéficie des investissements collectifs du groupement. En revanche, il est nécessaire que la durée d'engagement minimal et la pénalité exigée en cas de sortie anticipée correspondent à la durée d'amortissement des investissements. Or, le juge veille au respect de cette proportionnalité : lorsqu'un commerçant quitte un groupement de façon anticipée et qu'il conteste la pénalité demandée, il vérifie que cette pénalité a bien pour contrepartie le coût d'amortissement des investissements collectifs. Dans le cas inverse, le juge annule ou réduit cette pénalité ;

- pour remédier à cette opacité due à l'existence d'une pluralité de contrats dont les termes ne coïncident pas, prévoir un terme identique est une disposition de bon sens. Il faut en effet que tous les contrats prennent fin en même temps pour permettre de quitter le groupement. Toutefois, pour obtenir ce résultat, l'article 10 A interdit, sans réelle justification, de recourir à des contrats à durée indéterminée ou à durée déterminée tacitement reconductibles, qui sont pourtant un mode assez courant de formalisation des relations entre un commerçant et son réseau. Or, de tels contrats, lorsqu'ils présentent un caractère accessoire à l'adhésion à une association ou à une coopérative, prennent fin simultanément dès lors que le commerçant cesse d'être membre de son groupement.

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement de suppression, considérant que ses inconvénients l'emportaient sur ses avantages en l'état actuel de sa rédaction. Elle a souhaité que les échanges avec les acteurs concernés se poursuivent néanmoins sans exclure que, d'ici à la séance publique, ce travail collectif aura porté des fruits et permettra d'envisager l'introduction de dispositions plus ciblées et moins perturbatrices pour le commerce franchisé, associatif et coopératif.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 10 B (art. L. 441-7 du code de commerce) - Formalisation de la négociation commerciale dans une convention unique

Objet : cet article restreint le champ de la convention écrite formalisant le résultat des négociations commerciales aux seules relations entre un fournisseur et un distributeur de commerce de détail.

I - Le dispositif proposé

Depuis la loi de modernisation de l'économie de 2008 62 ( * ) , une convention écrite doit être conclue entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services pour indiquer les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale (article L. 441-7 du code de commerce).

La convention précise les obligations du distributeur en contrepartie des ristournes et remises consenties par le fournisseur par rapport aux conditions générales de vente (CGV) ; le prix des « services distincts » (autrement dit les « marges arrière ») proposés par le distributeur et couverts par la convention annuelle doit apparaître sur la facture des fournisseurs, cette dernière devant indiquer les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services. Ces dispositions sont destinées à assurer une certaine transparence dans les négociations commerciales et à permettre la sanction des clauses abusives .

La loi du 17 mars 2014 sur la consommation 63 ( * ) a renforcé le formalisme de la convention écrite, ainsi que les sanctions qui accompagnent la non signature de cette convention, mais sans modifier véritablement la logique de l'article L. 441-7.

L'article 10 B, issu d'une proposition de nos collègues députés, Catherine Vautrin et Razzy Hammadi, restreint considérablement le champ d'application de l'article L. 441-7. Au lieu d'être obligatoire dans toute relation commerciale entre un fournisseur et un distributeur, la convention écrite formalisant le résultat des négociations commerciales ne concernerait plus que les relations entre un fournisseur et un distributeur de commerce de détail. Recentrées sur les relations fournisseurs/grande distribution, ces dispositions nouvelles excluent donc les relations impliquant le commerce de gros.

II - La position de votre commission

Cet article a pour effet de supprimer la convention unique pour tout un pan des relations commerciales, ce qui paraît excessif à votre rapporteur, qui, en conséquence, a proposé par amendement la suppression de l'article .

Pour autant, la confédération du commerce de gros (CGI), la Fédération des industries mécaniques (FIM) et la Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC), que votre rapporteur a entendues, estiment que le renforcement par la loi « Hamon » du formalisme encadrant les relations commerciales est doublement inadapté au monde des relations entre fournisseurs et grossistes .

D'une part, le but de ce formalisme accru était de limiter le déséquilibre qui caractérise la relation entre la grande distribution et ses fournisseurs. Les entreprises du monde des relations entre fournisseurs et grossistes, qui ne connaissent pas le même déséquilibre dans les rapports de forces, estiment que, dans leur cas, un surcroît de formalités n'a pas de justification réelle.

D'autre part, par nature, les relations commerciales entre fournisseurs et grossistes sont plus mouvantes que celles qui existent entre fournisseurs et commerce de détail. Entre ces derniers, la négociation commerciale porte essentiellement sur le référencement annuel d'un produit standard dans un rayon. La distribution professionnelle est pour sa part soumise en permanence à des négociations tarifaires liées à des demandes spécifiques de ses clients, ainsi qu'à des fluctuations de prix au jour le jour affectant des milliers de références, qui sont de plus renouvelées régulièrement. Il en résulte que le cadre légal en vigueur, par sa rigidité, n'est tout simplement pas en phase avec la réalité des affaires . Difficiles à respecter même pour les acteurs de bonne foi, ces obligations font peser une réelle insécurité juridique et un risque de sanctions administratives coûteuses.

En particulier, l'intangibilité du prix convenu dans la convention unique et la nécessité de formaliser par avenant toute évolution du tarif en cours d'année sont source de complexité administrative. À chaque modification de prix, en application de la loi « Hamon », il faut formaliser l'accord des parties par un avenant, ce qui aboutit à plusieurs milliers d'avenants par an.

L'entrée en vigueur de la convention unique au plus tard au 1 er mars et l'interdiction de toute rétroactivité des conditions commerciales conclues à cette date sont également l'objet de critiques. La FIM et la CGI font valoir que les parties ont besoin d'avoir connaissance des résultats complets de l'exercice précédent et d'utiliser les deux premiers mois de l'année pour finaliser leurs négociations commerciales. Les conditions commerciales de l'année, dont la négociation est finalisée au 28 février, devraient donc pouvoir être appliquées de façon rétroactive au 1 er janvier.

Les professionnels concernés travaillent actuellement sur un aménagement du formalisme des négociations commerciales pour les entreprises n'entrant pas dans le champ du commerce de détail . On pourrait ainsi envisager de maintenir le formalisme poussé issu de la loi de modernisation de l'économie et de la loi « Hamon » pour les relations entre fournisseurs et commerce de détail, et de mettre en place un formalisme allégé dans le cas des relations commerciales n'incluant pas le commerce de détail. Si ce travail aboutit d'ici à la séance publique, votre commission souhaite qu'il puisse être intégré dans le présent projet de loi.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 10 C (art. L. 441-8 du code de commerce et L. 631-25-1 du code rural et de la pêche maritime) - Clause de renégociation du prix des contrats dont la durée d'exécution dépasse trois mois

Objet : cet article précise le champ d'application de la clause de renégociation du prix des contrats dont la durée d'exécution dépasse trois mois.

La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation a créé, à l'article L. 441-8 du code de commerce, un mécanisme obligatoire de renégociation des prix applicable aux contrats d'une durée d'exécution supérieure à trois mois portant sur la vente de certains produits, dont les prix de production sont significativement affectés par des fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires.

Cette renégociation a pour finalité une répartition équitable, entre les parties, de l'accroissement ou de la réduction des coûts de production résultant de ces fluctuations de prix. Elle tient compte notamment de l'impact de ces fluctuations sur l'ensemble des acteurs de la chaîne d'approvisionnement. Il s'agit de faire en sorte qu'un acteur de la chaîne de valeur en position économiquement dominante (donneur d'ordre dans une relation de sous-traitance, grande surface dans une relation fournisseur/distributeur) ne tire pas un profit exclusif d'une évolution favorable des prix ou transfère toute la charge sur ses partenaires en cas d'évolution défavorable.

Adopté sur proposition de notre collègue députée, précédemment rapporteure de la loi sur la consommation, Annick Le Loch, l'article 10 C apporte deux précisions sur le champ d'application de l'article L. 441-8 :

- il ne s'applique pas aux contrats qui ne comportent pas d'engagement sur le prix d'une durée d'au moins trois mois (autrement dit, il ne s'applique pas à des contrats dans lequel le prix est de toute manière renégociable trimestriellement indépendamment de l'article L. 441-8). Cette disposition vise notamment les contrats prévoyant un prix indexé sur une cotation ou un cours de marché, du type du marché au cadran pour le porc ;

- il s'applique aussi aux contrats portant sur la conception et la production de produits répondant aux besoins particuliers de l'acheteur. Il s'agit de la sorte d'inclure sans ambiguïté les produits vendus sous marque de distributeur par la grande distribution.

Cet article modifie également par coordination l'article L. 631-25-1 du code rural et de la pêche maritime.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 10 D (art. L. 442-6 du code de commerce) - Sanction contre certaines pratiques commerciales abusives

Objet : cet article modifie la sanction applicable à certaines pratiques commerciales abusives.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 442-6 du code de commerce sanctionne certaines pratiques commerciales abusives, telles que le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, ou encore le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Cet article du code de commerce prévoit également, parmi les réponses répressives possibles contre ces pratiques commerciales abusives, que le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 2 millions d'euros.

L'article 10 D prévoit de modifier le montant de cette amende en la portant à 5 % du chiffre d'affaires réalisé en France par la personne coupable de cette pratique.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur note que l'amende de 2 millions d'euros est déjà d'autant plus conséquente qu'elle s'accompagne de la répétition de l'indu quand elle est prononcée. L'article 10 D l'alourdit considérablement en la portant à 5 % du chiffre d'affaires réalisé en France par l'auteur des pratiques abusives. Votre commission a donc adopté un amendement de suppression du présent article, estimant qu'une telle sanction, plus qu'exemplaire et dissuasive, est avant tout disproportionnée.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 10 (art. L. 752-5-1 [nouveau] du code de commerce) - Saisine de l'Autorité de la concurrence sur les documents d'urbanisme

Objet : cet article permet au ministre de l'économie ou au représentant de l'État dans le département de saisir l'Autorité de la concurrence à l'occasion de l'élaboration d'un document d'urbanisme d'une collectivité territoriale.

I - Le dispositif proposé

Cet article crée un article L. 752-5-1 dans le code de commerce pour prévoir que l'Autorité de la concurrence peut être consultée, en matière d'urbanisme commercial, par le ministre chargé de l'économie ou le représentant de l'État dans le département ou la région sur les projets d'élaboration, de révision ou de modification d'un schéma de cohérence territoriale (SCOT), d'un plan local d'urbanisme (PLU) ou du schéma directeur de la région d'Île-de-France. L'avis doit être rendu avant l'ouverture de l'enquête publique.

II - La position de votre commission

Cet article pose des obstacles de principe et des difficultés techniques.

Concernant les principes, votre rapporteur considère que donner au ministre de l'économie et à l'Autorité de la concurrence un droit de regard sur l'élaboration des documents d'urbanisme, fut-ce par une simple procédure consultative liée à l'urbanisme commercial, constitue une forme d'ingérence dans l'exercice par les collectivités de leur liberté d'administration. Cela témoigne d'une méfiance vis-à-vis d'elles, comme si on craignait qu'elles abusent du modeste pouvoir régulateur qui leur a été concédé par la réforme de l'urbanisme commercial opérée en 2014.

À cet égard, il peut être utile de rappeler que la loi de modernisation de l'économie de 2008 64 ( * ) et la loi artisanat et commerce de 2014 65 ( * ) ont strictement recentré l'urbanisme commercial sur les questions urbanistiques. La loi autorise les documents d'urbanisme à traiter du commerce uniquement sous l'angle de l'aménagement du territoire, ce qui se justifie par le fait que le commerce peut avoir un impact fort sur l'organisation des territoires. Ainsi, les schémas de cohérence territoriale (SCOT) et les plans locaux d'urbanisme (PLU), pas plus que les commissions départementales d'aménagement commercial, n'ont pour mission d'opérer une sorte de police économique entre les formes de commerces au sein d'un territoire. Toute règle ou décision d'autorisation administrative limitant la liberté d'installation sans s'appuyer sur un motif d'intérêt général suffisant relatif à l'aménagement du territoire est donc voué à être annulé par le juge administratif.

Certes, il vaut mieux prévenir les entorses à la liberté d'installation des commerçants qu'annuler des documents ou des décisions d'urbanisme, mais si le Gouvernement estime utile d'instaurer une possibilité de consultation en amont de l'approbation du document d'urbanisme sur sa compatibilité avec le droit de la concurrence, pourquoi ne pas donner la faculté de saisine de l'Autorité de la concurrence aux collectivités concernées ? Pourquoi réserver cette faculté au ministre ou au représentant de l'État dans le département si ce n'est parce qu'on considère qu'elle constitue une protection contre les excès supposés des documents d'urbanisme en matière d'implantation commerciale ?

Concernant les insuffisances techniques du dispositif proposé, elles témoignent d'un manque de familiarité avec la législation de l'urbanisme :

- l'objet même de la saisine n'est pas clairement défini. Le texte de l'article 10 indique en effet que l'Autorité de la concurrence peut être consultée en matière d'urbanisme commercial. Mais la notion d'urbanisme commercial n'est pas définie dans le code de l'urbanisme, qui parle plutôt d'orientations relatives à l'équipement commercial et artisanal ou de conditions d'implantation des équipements commerciaux ;

- le document faisant l'objet de la saisine n'est pas non plus identifié, car on ne sait pas à quel stade de l'élaboration du document cette saisine intervient. On peut supposer qu'il s'agit du projet arrêté, sans qu'on pût en être certain ;

- les circonstances de la saisine sont également sujettes à interrogation. Une saisine lors de l'élaboration ou de la révision du document a un sens. Mais pourquoi la prévoir aussi à l'occasion d'une modification, qui, par définition, est porteuse de changements ne remettant pas en question les grands équilibres du document d'urbanisme ?

- enfin, on ne comprend pas pourquoi des dispositions relatives à la procédure d'élaboration ou de révision des documents d'urbanismes figurent dans le code de commerce, au sein du chapitre consacré aux autorisations d'exploitation commerciales, et non dans le code de l'urbanisme.

Pour toutes ces raisons, sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement de suppression de l'article 10.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 10 bis (art. L. 752-6 du code de commerce) - Règles concernant l'extension de la surface de vente

Objet : cet article restreint le champ d'application des critères relatifs au développement durable lors de la décision de la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC).

I - Le dispositif proposé

Dans la rédaction actuelle de l'article L. 752-6 du code de commerce, la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) prend en compte la qualité environnementale du projet et son insertion paysagère et architecturale lorsqu'elle est amenée à rendre une décision relative à :

- l'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet ;

- l'extension de la surface de vente d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet.

Cet article 10 bis , introduit à l'initiative du Gouvernement, vise à ce que la CDAC prenne en compte la qualité environnementale et l'insertion paysagère et architecturale du projet uniquement dans le premier cas.

L'argument invoqué pour justifier cette modification est qu'un ensemble commercial peut compter plusieurs bâtiments, plusieurs propriétaires, plusieurs exploitants, différentes enseignes. Exiger que chaque extension de surface de vente dans un ensemble impose de revoir les performances énergétiques et l'architecture de tous les bâtiments revient à bloquer toute évolution, ne serait-ce que parce que le propriétaire d'un local ne peut exiger des autres propriétaires des locaux de l'ensemble commercial qu'ils réalisent eux aussi des travaux.

II - La position de votre commission

Cet article apporte une simplification qui était demandée par les professionnels de l'immobilier commercial.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 10 ter (art. L. 425-4 du code de l'urbanisme) - Simplification des procédures administratives en matière d'urbanisme

Objet : cet article introduit une double simplification des procédures administratives en matière d'urbanisme pour les projets soumis à autorisation d'exploitation commerciale.

I - Le dispositif proposé

Cet article, introduit à l'initiative du Gouvernement, apporte deux modifications à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme relatif au permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale.

Le 1°, créé en séance publique, précise qu'un porteur de projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale peut, le cas échéant, se contenter de déposer un permis de construire modificatif lorsque son projet subit une modification substantielle au sens de l'article L. 752-15 du code de commerce. Cela constitue une simplification des formalités administratives actuellement prévues par l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de la loi artisanat, commerce et très petites entreprises précitée, car, jusqu'à présent, dans le cas d'une modification substantielle du projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale n'emportant pas de conséquences en matière d'autorisation du droit des sols, le pétitionnaire devait redéposer un dossier de permis de construire complet (donc procéder à une nouvelle étude d'impact, une nouvelle enquête publique, ce qui ouvre de nouvelles possibilités de recours). La nouvelle rédaction proposée par le Gouvernement pour l'article L. 425-4 permet de se limiter à un permis de construire modificatif dès lors que les modifications substantielles du projet commercial restent sans conséquence sur l'application du droit des sols.

Le 2° faisait l'objet d'un article 11 quater . Réintégré par l'Assemblée nationale au sein du présent article, en séance publique, il supprime l'interdiction de céder ou de transmettre une autorisation d'urbanisme valant autorisation d'exploitation commerciale. La possibilité de modifier le nom du bénéficiaire de l'autorisation d'urbanisme par cession ou transmission constitue là-encore un élément de souplesse dans le montage des opérations d'immobilier commercial, la possibilité de transférer les autorisations évitant au nouveau porteur de projet d'avoir à déposer un nouveau dossier de demande d'autorisation d'urbanisme.

II - La position de votre commission

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a souhaité pousser plus loin la simplification administrative prévue au 1° de l'article 10 ter . Elle a donc adopté un amendement en disposant que, si la modification du projet concerne uniquement les paramètres commerciaux du projet sans avoir d'impact sur ses paramètres urbanistiques, le porteur de projet pourra se contenter de faire une nouvelle demande d'autorisation d'exploitation commerciale. Une nouvelle demande de permis de construire, même modificatif, ne sera plus nécessaire.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 10 quater (art. L. 462-10 [nouveau] du code de commerce) Information de l'Autorité de la concurrence sur les accords ayant pour objet de négocier des achats groupés

Objet : cet article institue un mécanisme d'information de l'Autorité de la concurrence sur les accords ayant pour objet de négocier des achats groupés.

I - Le dispositif proposé

Cet article complète les attributions de l'Autorité de la concurrence en créant dans le code de commerce un mécanisme d'information préalable de l'Autorité de la concurrence concernant tout accord entre des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales exploitant, directement ou indirectement, un ou plusieurs magasins de commerce de détail de produits de grande consommation, ou intervenant dans le secteur de la distribution comme centrale de référencement ou d'achat d'entreprises de commerce de détail, visant à négocier de manière groupée l'achat ou le référencement de produits ou la vente de services aux fournisseurs .

Un décret en Conseil d'État doit fixer le seuil de chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises parties à l'accord et le seuil de chiffre d'affaires total hors taxes réalisé à l'achat en France dans le cadre de l'accord, au-delà desquels s'applique cette obligation d'information préalable.

II - La position de votre commission

En octobre 2014, le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique et la commission des affaires économiques du Sénat ont saisi l'Autorité de la concurrence pour avis concernant les relations commerciales entre la grande distribution et les industriels. Ces saisines portent plus particulièrement sur l'impact sur la concurrence de la « concentration des centrales d'achat de la grande distribution », ainsi que (pour ce qui concerne la saisine du Sénat) sur la possibilité d'envisager « un seuil de concentration des achats au-delà duquel les opérateurs ne pourraient se situer ».

Ces deux saisines interviennent après plusieurs rapprochements à l'achat dans le secteur de la grande distribution à dominante alimentaire en 2014 (Système U et Auchan en septembre ; Intermarché et Casino en octobre ; Carrefour et Provera en décembre). Ces mouvements ont ravivé les craintes d'un nouveau renforcement du pouvoir de marché de la grande distribution par rapport à leurs fournisseurs, PME ou ETI.

Les dispositions figurant à l'article 10 quater sont la conséquence directe de ces deux saisines et traduisent sur le plan législatif une des propositions de l'Autorité. Cette dernière a en effet jugé qu'un véritable contrôle ex ante , prenant la forme d'une autorisation préalable, n'était pas opportun, car les modalités pratiques de mise en oeuvre d'un tel accord, observables uniquement ex post , déterminent largement, de son point de vue, l'existence d'un risque concurrentiel. Ce risque dépend notamment du champ de la négociation opérée en commun et des fournisseurs visés.

L'Autorité estime en revanche qu'une information préalable présente pour elle une utilité opérationnelle, puisque cela lui permettrait de détecter plus précocement des situations de concentration excessive et, le cas échéant, d'enclencher plus vite une procédure de contrôle. Cette procédure d'information constitue également un signal aux acteurs de marché concernant la détermination de l'Autorité à lutter contre toute concentration à l'achat susceptible de constituer une atteinte au fonctionnement normal de la concurrence.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 10 quinquies (art. L. 752-15 du code de commerce) - Coordination de références

Objet : cet article effectue des corrections de références à l'article L. 752-15 du code de commerce pour tenir compte des dispositions de l'article 10 ter du présent projet de loi.

Dans le droit en vigueur, les deux derniers alinéas de l'article L. 752-15 du code de commerce traitent du sujet de l'incessibilité des autorisations d'exploitation commerciale (AEC) :

- l'avant-dernier alinéa étend aux « drive » le principe de l'interdiction de la cession ou de la transmission des AEC ;

- le dernier alinéa introduit une dérogation à cette interdiction générale lorsque l'autorisation d'exploitation commerciale est sollicitée par le demandeur en qualité de promoteur.

À partir du moment où le 2° de l'article 10 ter du projet de loi revient sur l'interdiction de céder ou transmettre les AEC, il devient nécessaire de supprimer ces deux alinéas par cohérence. C'est l'objet de cet article 10 quinquies .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 11 (art. L. 464-8 et L. 752-26 du code de commerce) - Réforme de la procédure d'injonction structurelle en matière de concurrence dans le domaine du commerce de détail

Objet : cet article vise à instaurer, dans le domaine du commerce de détail, une nouvelle procédure d'injonction structurelle, susceptible d'être ouverte par l'Autorité de la concurrence en cas de position dominante d'un opérateur soulevant des préoccupations de concurrence, en substitution de l'actuelle procédure d'injonction structurelle, ouverte uniquement en cas d'abus de position dominante et jamais utilisée depuis son instauration.

I - Un débat de fond sur l'accroissement des missions et des pouvoirs de l'Autorité de la concurrence

Comme de nombreux collègues l'ont exprimé, pour le déplorer pour certains d'entre eux, le présent projet de loi tend à accroître significativement les prérogatives et les pouvoirs d'enquête de l'Autorité de la concurrence, ainsi que les missions qui lui sont dévolues.

Ces missions s'ajouteraient aux trois missions actuelles de l'Autorité, présentées dans l'encadré ci-après. Pour faire face à cet accroissement, son président, entendu par votre commission ainsi que par votre rapporteur, a régulièrement demandé l'accroissement des moyens de fonctionnement de l'Autorité pour assurer et maintenir l'efficacité de son action, en particulier en matière de répression des pratiques anticoncurrentielles. Votre rapporteur acquiesce, en effet, à l'idée que l'attribution de nouvelles missions ne doit en aucun cas conduire à affaiblir l'action de l'Autorité dans ce domaine, qui est le coeur de son activité au service du bon fonctionnement des marchés, dans l'intérêt des consommateurs.

Les missions actuelles de l'Autorité de la concurrence

L'Autorité de la concurrence est une autorité administrative indépendante, qui « veille au libre jeu de la concurrence » et « apporte son concours au fonctionnement concurrentiel des marchés aux échelons européen et international » (article L. 461-1 du code de commerce). Elle a pris la suite du Conseil de la concurrence créé en 1986, avec des pouvoirs plus larges en matière notamment d'enquête, en application de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie et de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence prise sur son fondement.

L'Autorité exerce ses attributions par un collège de dix-sept membres, dont son président, nommés pour cinq ans par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'économie (articles L. 461-1 et L. 461-2 du code de commerce).

Le président de l'Autorité de la concurrence est nommé par le Président de la République, après avis public des commissions parlementaires compétentes, en application de l'article 13 de la Constitution, en raison de ses compétences dans les domaines juridique et économique. Le président est assisté de quatre vice-présidents.

Outre le président, le collège comprend :

- six membres ou anciens membres du Conseil d'État, de la Cour de cassation, de la Cour des comptes ou des autres juridictions administratives ou judiciaires ;

- cinq personnalités choisies en raison de leur compétence en matière économique ou en matière de concurrence et de consommation ;

- cinq personnalités exerçant ou ayant exercé leurs activités dans les secteurs de la production, de la distribution, de l'artisanat, des services ou des professions libérales.

Depuis la réforme de 2008, l'Autorité de la concurrence dispose de ses propres services d'instruction, dirigés par un rapporteur général nommé par arrêté après avis du collège (article L. 461-4 du code de commerce). Auparavant, elle devait s'appuyer sur les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour mener ses enquêtes sur les pratiques anticoncurrentielles. La DGCCRF continue toutefois à transmettre à l'Autorité des indices de ces pratiques.

Le code de commerce confie trois missions à l'Autorité de la concurrence :

- une mission de contrôle et d'autorisation préalable, au vu de l'atteinte éventuelle à la concurrence, le cas échéant sous conditions, des opérations de concentration économique les plus importantes sur le marché français (seuils de notification : 150 millions d'euros de chiffre d'affaires mondial de l'ensemble issu de l'opération ou 50 millions d'euros de chiffre d'affaires en France pour au moins deux des entreprises concernées par l'opération), sous réserve de la compétence de la Commission européenne pour les opérations de niveau communautaire (articles L. 430-3 à L. 430-10 du code de commerce) ;

- une mission de poursuite et de répression des pratiques anticoncurrentielles, telles que les abus de position dominante et les ententes, définies aux articles L. 420-1 à L. 420-6 du code de commerce (articles L. 462-5 à L. 462-8 du code de commerce) ;

- une mission consultative d'avis sur les questions intéressant la concurrence, de sa propre initiative ou à la demande du Gouvernement, de façon obligatoire sur les projets de texte réglementaire, des commissions parlementaires, des collectivités territoriales, des organisations professionnelles ou syndicales, des associations de consommateurs, ainsi que des juridictions dans le cadre des affaires contentieuses dont elles sont saisies en matière de concurrence (articles L. 462-1 à L. 462-4 du code de commerce).

Les décisions de l'Autorité au titre du contrôle des concentrations peuvent donner lieu à un recours devant le Conseil d'État. Il s'agit en effet de décisions d'autorisation de nature administrative.

Les décisions de l'Autorité en matière de pratiques anticoncurrentielles peuvent faire l'objet d'un appel devant la cour d'appel de Paris, sans effet suspensif, sans préjudice d'un éventuel sursis à exécution), puis d'un pourvoi devant la Cour de cassation.

La mission de sanction des pratiques anticoncurrentielles peut donner lieu à des injonctions et, le cas échéant, à des engagements de la part des entreprises concernées reçus par l'Autorité. Elle peut également donner lieu au prononcé de sanctions, principalement pécuniaires, pour un montant annuel global de 350 millions d'euros environ ces dix dernières années. Une procédure de non-contestation de griefs permet aux entreprises qui reconnaissent les faits qui leur sont reprochés de bénéficier d'une minoration du montant des sanctions pécuniaires encourues. Une procédure de clémence permet aux entreprises qui dénoncent une infraction à laquelle elles ont participé de bénéficier d'une exonération totale ou partielle de sanctions pécuniaires.

En complément de sa mission de sanction des pratiques anticoncurrentielles, dans le domaine du commerce de détail, l'Autorité dispose d'un double pouvoir d'injonction structurelle, lui permettant d'enjoindre aux entreprises concernées de résilier des contrats et accords ayant constitué leur puissance économique, voire de céder une partie de leurs actifs si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective. Il s'agit, d'une part, depuis 2008, d'un pouvoir général en cas d'abus de position dominante et, d'autre part, depuis 2012, d'une prérogative particulière dans les départements et certaines collectivités d'outre-mer en cas de simple position dominante, compte tenu des caractéristiques économiques et géographiques de ces territoires. Aucun de ces pouvoirs n'a été utilisé par l'Autorité.

Pour coordonner l'action des autorités nationales de concurrence en vue d'une bonne application des règles de concurrence au niveau du marché européen, l'Autorité de la concurrence coopère avec la Commission européenne et ses homologues des autres États membres de l'Union européenne au sein du réseau européen de la concurrence (REC), dans le cadre fixé par le règlement européen (CE) n° 1/2003 du 16 décembre 2002. Le cadre du droit national de la concurrence est en effet fixé par les traités européens.

Source : commission spéciale du Sénat

Ainsi, outre le présent article, qui vise à rendre plus opérationnelle la procédure d'injonction structurelle créée en 2008 en refondant ses critères d'engagement, de nombreux articles du projet de loi ont pour objet d'étendre les missions et de renforcer les pouvoirs de l'Autorité de la concurrence :

- avis de l'Autorité de la concurrence sur les règles d'encadrement des contrats d'affiliation dans le secteur du commerce de détail ;

- avis de l'Autorité de la concurrence sur les documents d'urbanisme au titre de l'urbanisme commercial, à la demande du Gouvernement ou du préfet ;

- rénovation de la procédure générale d'injonction structurelle sur le modèle de la procédure ultramarine, ouverte en l'absence d'infraction au droit de la concurrence, mais sur le fondement de simples « préoccupations de concurrence » ;

- avis de l'Autorité de la concurrence sur les tarifs et l'installation des professions réglementées, lui conférant un rôle de régulation sectorielle éloigné de ses missions initiales de protection de la concurrence ;

- accès de l'Autorité de la concurrence aux données des opérateurs de communications électroniques (« fadettes ») dans le cadre de ses enquêtes de concurrence.

Votre commission a toutefois supprimé les articles 10 A et 10, visant respectivement les contrats d'affiliation dans le commerce de détail et l'avis de l'Autorité sur les documents d'urbanisme.

S'agissant de l'injonction structurelle, l'exemple anglais avancé pour la justifier est inopérant. En effet, contrairement à la France, il n'existe pas au Royaume-Uni d'obligation de notification préalable à l'autorité de régulation des opérations de concentration en vue de leur contrôle a priori au regard de leur impact sur la situation de concurrence du marché concerné. Dans ces conditions, l'autorité de régulation a besoin de disposer d'un moyen d'agir a posteriori sur les concentrations effectuées lorsqu'elles portent une atteinte trop lourde à la concurrence, y compris sur la structure des entreprises ainsi constituées. Ce pouvoir a été utilisé dans les secteurs des aéroports et du ciment, mais jamais dans le secteur du commerce de détail, pour lequel il a été écarté en 2008 par l'autorité de régulation comme étant inadapté au regard des objectifs recherchés, après avoir été envisagé. En Allemagne, après avoir envisagé d'introduire un mécanisme d'injonction structurelle, le gouvernement y a renoncé en 2010.

Plusieurs personnes entendues par votre rapporteur, notamment les universitaires spécialistes du droit de la concurrence, ont souligné le risque susceptible de résulter de l'extension des missions de l'Autorité, y compris à l'égard de secteurs particuliers qu'elle devrait réguler, indépendamment de la question de ses moyens de fonctionnement. Les exemples italien comme espagnol montreraient que les autorités nationales de concurrence, victimes de leur succès en quelque sorte dans la répression des infractions aux règles de la concurrence, ont reçu de nouvelles attributions, dans la régulation de secteurs particuliers, ayant eu pour effet de diluer et d'affaiblir leur mission générale et leur crédibilité. Il serait regrettable, selon votre rapporteur, que l'efficacité unanimement reconnue de l'Autorité dans sa mission première de protection de la concurrence soit affaiblie, dans un « scenario à l'italienne », du fait d'une dispersion de ses missions et de ses moyens d'action.

II - Les différentes procédures d'injonction structurelle

A. La procédure d'injonction structurelle instaurée en 2008

La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a instauré une procédure d'injonction structurelle, susceptible d'être engagée par l'Autorité de la concurrence en cas d'abus de position dominante d'une entreprise dans le secteur du commerce de détail (article L. 752-26 du code de commerce).

Ainsi que le président de l'Autorité de la concurrence l'a indiqué à votre rapporteur, cette procédure d'injonction structurelle n'a jamais été utilisée depuis 2008, compte tenu de la difficulté à en réunir les conditions de déclenchement.

Cette procédure précise qu'en cas d'exploitation abusive d'une position dominante ou d'un état de dépendance économique, l'Autorité peut dans un premier temps recourir à son pouvoir d'injonction, pour demander à l'entreprise de mettre fin à ses pratiques abusives dans un délai déterminé, ainsi qu'à son pouvoir de sanction pécuniaire. Ces facultés ne sont en réalité que le rappel des prérogatives qu'elle détient déjà pour faire cesser de telles pratiques anticoncurrentielles (article L. 464-2 du code de commerce).

En revanche, la procédure prévoit ensuite que l'Autorité peut, par une décision motivée prise après un débat contradictoire, constater que ses injonctions et sanctions pécuniaires n'ont pas permis de mettre fin à l'abus et recourir alors à un pouvoir spécifique d'injonction structurelle. Ce pouvoir lui permet d'enjoindre à l'entreprise de modifier ou résilier les accords ayant permis de constituer « la puissance économique qui a permis ces abus », mais aussi de « procéder à la cession d'actifs, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective dans la zone de chalandise considérée ». L'Autorité fixe les délais dans lesquels ses injonctions doivent être appliquées par l'entreprise.

Une telle prérogative, au nom de la protection de la concurrence, est particulièrement rigoureuse, vis-à-vis notamment du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre des entreprises concernées, qui sont tenues de céder une partie de leurs actifs, en l'espèce des surfaces commerciales, à certains concurrents, dans des conditions, en outre, qui ne peuvent pas permettre d'en retirer un prix sérieux compte tenu de l'obligation de céder.

Il convient de rappeler, cependant, que cette prérogative a été créée pour mettre un terme à une infraction de concurrence lorsqu'aucune autre mesure n'a permis de le faire. Il s'agit d'une solution de dernier recours.

Tel n'est pas le cas dans la procédure envisagée par l'article 11 du présent projet de loi, dont le déclenchement ne résulterait pas d'un abus de position dominante, mais d'une simple position dominante reposant sur certains critères. L'injonction structurelle pourrait ainsi être prononcée alors qu'aucune infraction n'a été formellement constatée par l'Autorité. Ce faisant, l'article 11 reprend et étend des procédures prévues outre-mer.

B. Les procédures d'injonction structurelle instaurées pour l'outre-mer en 2012 et 2013

Compte tenu du contexte particulier de concurrence des économies ultramarines, généralement insulaires et comportant un nombre d'opérateurs limité du fait de l'étroitesse du marché local, caractérisées par conséquent par une dépendance à l'égard de quelques entreprises et importateurs, la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer a institué un mécanisme d'injonction structurelle, dans le secteur également du commerce de détail, reprenant celui instauré en 2008 en supprimant la condition initiale d'abus de position dominante (article L. 752-27 du code de commerce).

Ce mécanisme ne s'applique que dans les départements d'outre-mer, ainsi que dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna. La loi dispose d'ailleurs que l'Autorité peut y recourir « eu égard aux contraintes particulières de ces territoires découlant notamment de leurs caractéristiques géographiques et économiques ».

Ainsi que le président de l'Autorité de la concurrence l'a indiqué à votre rapporteur, cette procédure d'injonction structurelle propre à l'outre-mer n'a jamais été utilisée depuis 2012, mais elle aurait incité, dans un cas, des entreprises à mettre un terme à des pratiques qui auraient pu en relever.

Cette procédure suppose d'abord que l'Autorité constate l'existence d'une position dominante « qui soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix ou de marges élevés (...) en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur économique concerné ». La situation de position dominante n'est pas caractérisée par une part du chiffre d'affaires total sur le marché concerné, à l'inverse de ce que prévoit l'article 11 du projet de loi. On peut relever la difficulté à apprécier le caractère élevé des prix et marges, dès lors que sont concernés des opérateurs intervenant outre-mer, supportant des contraintes de coûts plus lourdes, rendant la comparaison plus délicate à établir dans le secteur économique concerné.

L'Autorité fait ensuite connaître ses « préoccupations de concurrence » à l'entreprise, qui dispose de deux mois pour proposer des engagements en vue d'y répondre. La procédure d'engagements est une méthode habituelle devant l'Autorité de la concurrence, pour les entreprises concernées par une enquête en matière de pratique anticoncurrentielle (article L. 464-2 du code de commerce). Elle permet de simplifier et accélérer la procédure, dès lors que les entreprises concernées proposent de modifier leur comportement.

Si aucun engagement n'a été présenté ou si elle juge que ceux qui ont été présentés sont insuffisants, l'Autorité peut, par une décision motivée prise après un débat contradictoire, recourir aux mêmes prérogatives que celles qui lui ont été dévolues dans le cadre de la procédure d'injonction structurelle instaurée en 2008 : injonction de modifier ou résilier les accords ayant permis de constituer « la puissance économique qui permet les pratiques constatées en matière de prix ou de marges » ainsi que de « procéder à la cession d'actifs si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective ». L'Autorité fixe, dans la limite d'une durée très brève de deux mois, les délais dans lesquels ses injonctions doivent être appliquées par l'entreprise.

L'ignorance des injonctions est sanctionnée dans les conditions de droit commun des injonctions de l'Autorité (sanction pécuniaire). Dans le cadre de cette procédure, qui ne repose initialement sur aucune infraction, l'Autorité ne dispose que de pouvoirs d'enquête restreints : elle peut obtenir communication de toute information et entendre tout tiers intéressé, mais elle ne peut pas, par exemple, ordonner de visites ou saisies.

L'objectif recherché par le Gouvernement en 2012, avec la mise en place de ce mécanisme, était de pouvoir imposer une concurrence plus soutenue dans des territoires où, pour des raisons structurelles, elle était nécessairement réduite, en vue de faire diminuer autant que faire se peut les prix des biens de consommation courante pour les consommateurs.

Contestée par les représentants des entreprises pour l'atteinte qu'elle porte à la liberté d'entreprendre et au droit de propriété, cette procédure n'a pas donné lieu à un contrôle de la part du Conseil constitutionnel.

Par ailleurs, votre rapporteur indique que la Nouvelle-Calédonie, compétente en matière de droit de la concurrence, a adopté en 2013 une loi du pays relative à la concurrence, inspirée du droit national et ayant pour objet notamment d'instaurer une procédure d'injonction structurelle en cas de position dominante, sans la limiter toutefois au secteur du commerce de détail. Cependant, les critères d'ouverture de la procédure néo-calédonienne, permettant au gouvernement local de faire connaître ses préoccupations de concurrence à l'entreprise, sont doubles : soit des prix ou marges élevés en comparaison des moyennes constatées dans le secteur concerné, soit la détention dans une zone de chalandise d'une part de marché dépassant 25 %, représentant un chiffre d'affaires supérieur à 600 millions de francs CFP.

C. La procédure d'injonction structurelle prévue par le projet de loi

L'article 11 du projet de loi s'inspire directement de la procédure mise en place pour l'outre-mer par la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 précitée, pour remplacer celle instituée en 2008 et demeurée inefficace. Elle est ainsi ouverte alors qu'aucune infraction aux règles de la concurrence n'a été constatée, mais uniquement une situation de position dominante, qui soulève des « préoccupations de concurrence ».

Il y est toutefois ajouté un critère de détention, par l'entreprise ou le groupe d'entreprises dont la position dominante soulève les préoccupations de concurrence de l'Autorité de la concurrence, d'une part de marché d'au moins 50 %, de nature à renforcer les exigences permettant de recourir à ce mécanisme, de façon à tenir compte du fait qu'il ne s'applique pas à des économies ultramarines où la concurrence est structurellement amoindrie. Les critères d'engagement de la procédure sont donc plus rigoureux.

Ainsi, en cas de position dominante et de détention d'une part de marché supérieure à 50 % dans le secteur du commerce de détail par une entreprise ou un groupe d'entreprises pratiquant des prix « ou » des marges élevés par rapport aux moyennes constatées dans le secteur, de nature à soulever des « préoccupations de concurrence », l'Autorité de la concurrence peut faire part de ces préoccupations à l'entreprise. Celle-ci dispose d'un délai de deux mois pour proposer des engagements en vue de mettre fin à ces préoccupations, comme dans la procédure applicable outre-mer.

Le projet de loi précise que la part de marché est évaluée en fonction du chiffre d'affaires réalisé dans la zone de chalandise « ou » des surfaces commerciales exploitées dans cette zone. Ces deux critères alternatifs ne sont pas expressément précisés dans le dispositif ultramarin. L'appréciation de l'Autorité se fait nécessairement au niveau de chaque zone de chalandise, pour apprécier l'état de la concurrence au niveau des marchés locaux et non au niveau national.

Si aucun engagement n'a été présenté ou si elle juge que ceux qui ont été présentés sont insuffisants, l'Autorité peut, par une décision motivée prise après un débat contradictoire, recourir aux mêmes prérogatives que celles qui lui ont été dévolues dans le cadre de la procédure d'injonction instaurée en 2008. D'une part, elle peut enjoindre à l'entreprise de modifier ou résilier les accords ayant permis de constituer « la puissance économique qui permet les prix ou les marges élevés constatés ». D'autre part, elle peut enjoindre de « procéder (...) à la cession d'actifs, y compris de terrains, bâtis ou non, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective ». L'Autorité fixe, dans la limite d'une durée de trois mois dans le premier cas et sans aucune limite minimale ou maximale de durée dans le second cas, les délais dans lesquels ses injonctions doivent être appliquées par l'entreprise.

La résiliation des accords peut consister, par exemple, à exiger d'un magasin affilié à un enseigne de grande distribution très présente dans la zone de chalandise qu'il change d'affiliation, tandis que la cession d'actifs peut conduire à exiger la cession de magasins possédés en propre par une enseigne dominant la zone de chalandise. Il s'agit, selon le président de l'Autorité de la concurrence, d'animer la concurrence locale en assurant une plus grande diversité des enseignes au sein des zones de chalandise.

L'ignorance des injonctions est sanctionnée de la même manière que dans la procédure ultramarine, c'est-à-dire dans les conditions de droit commun (sanction pécuniaire). De même, comme cette procédure ne repose initialement sur aucune infraction, l'Autorité ne dispose que de pouvoirs d'enquête restreints, comme dans la procédure ultramarine : elle peut obtenir communication de toute information et entendre tout tiers intéressé, mais elle ne peut pas, par exemple, ordonner de visites ou saisies.

Le projet ajoute, comme pour les décisions prises par l'Autorité de la concurrence dans le cadre de la procédure applicable outre-mer ainsi que pour toutes les décisions prises en matière de pratiques anticoncurrentielles, que les décisions prises en application de cette nouvelle procédure peuvent faire l'objet, dans un délai d'un mois, d'un recours devant la cour d'appel de Paris, sans que ce recours ait un caractère suspensif (article L. 464-8 du code de commerce). Il s'agit de l'application à cette nouvelle procédure des règles procédurales de droit commun en matière de concurrence.

Toutefois, comme pour toute décision de l'Autorité en cette matière, celles prises en application de la nouvelle procédure, enjoignant la remise en cause d'accords commerciaux ou la cession d'actifs de l'entreprise, peuvent donner lieu à la saisine du premier président de la cour d'appel de Paris, en vue de demander le sursis à exécution de la décision (article L. 464-8 du code de commerce). Le sursis à exécution peut être ordonné si la décision contestée « est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est intervenu, postérieurement à sa notification, des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité ». En toute hypothèse, en fonction de son impact pour l'entreprise, l'obligation de céder des actifs économiquement importants pourrait être de nature à « entraîner des conséquences manifestement excessives », du fait du caractère irréversible de la cession et de la perte nette de chiffre d'affaires qui en résulterait.

III - Constitutionnalité et opportunité de la nouvelle procédure

Les représentants des entreprises, singulièrement des entreprises du commerce et de la distribution, entendus par votre rapporteur, ont fait part de leur opposition au pouvoir d'injonction structurelle prévu à l'article 11 du présent projet de loi, en substitution du mécanisme instauré en 2008. Tout en souhaitant sa suppression, ils ont notamment souligné l'absence de garanties suffisantes, selon eux, avant le prononcé par l'Autorité de la concurrence d'une décision enjoignant de céder des actifs, ainsi que les conséquences irréversibles d'une cession dans l'hypothèse d'une décision mal fondée.

A. L'absence de risque constitutionnel sérieux

Si l'injonction structurelle porte incontestablement atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre des entreprises concernées, elle peut ne pas y porter une atteinte disproportionnée si elle est justifiée par un intérêt général suffisant, lequel consiste à favoriser la concurrence sur le marché concerné.

Le Conseil constitutionnel a considéré qu'il en était ainsi, dans sa décision n° 2013-3 LP du 1 er octobre 2013 sur la loi du pays relative à la concurrence en Nouvelle-Calédonie précitée (considérants 13 à 15) 66 ( * ) .

En effet, sur la procédure d'injonction structurelle néo-calédonienne, très semblable à celle mise en place pour l'outre-mer et donc également à celle proposée par le présent projet de loi, il a considéré que l'injonction en vue de corriger les accords à l'origine de la puissance économique ou de céder des actifs, afin de permettre une concurrence effective, poursuit bien un « objectif d'intérêt général ». Il a précisé que les critères retenus, notamment la part de marché d'au moins 25 %, étaient, « compte tenu de la situation particulière de la concurrence dans certains secteurs économiques en Nouvelle-Calédonie », « en rapport direct avec l'objet de la loi du pays ». Il a considéré que l'injonction de céder des actifs, lorsque cette mesure est le seul moyen de remédier au défaut de concurrence, ne constituait pas, dans ces conditions, une « atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ».

Votre rapporteur estime donc que le dispositif prévu par le projet de loi ne soulève aucune difficulté sérieuse de constitutionnalité, puisqu'il est conçu dans des termes similaires à celui soumis à l'examen du Conseil et qu'il est assorti de critères d'engagement plus stricts, avec l'exigence d'une part de marché d'au moins 50 % dans la zone de chalandise et non 25 %.

B. Une procédure pouvant être utile dans certaines situations

Si l'injonction structurelle vise l'ensemble du commerce de détail
- par exemple l'hypothèse dans laquelle un même boulanger détiendrait deux des trois boulangeries d'une petite ville -, votre rapporteur précise que le secteur de la grande distribution est principalement concerné. Seraient visées des zones de chalandise dans lesquelles une majorité des enseignes commerciales appartiennent ou dépendent du même groupe.

Tout en rappelant la forte concentration du secteur français de la grande distribution, et donc la difficulté à animer la concurrence alors qu'il est difficile de créer de nouvelles surfaces commerciales et de construire de nouveaux magasins, du fait des règles de l'urbanisme commercial comme de la rareté et du coût du foncier dans certaines grandes agglomérations, votre rapporteur considère que l'injonction structurelle peut être un outil utile, de dernier recours toutefois. Elle pourrait s'appliquer dans des hypothèses de concurrence structurellement insuffisante en raison de facteurs exogènes qui empêchent la concurrence de se développer, du fait de barrières à l'entrée ne dépendant pas des opérateurs présents. La situation de la concurrence dans la grande distribution à Paris constitue sans doute un cas d'école, tant il est difficile de créer de nouveaux magasins pour favoriser la concurrence.

En tout état de cause, une telle procédure ne saurait être utilisée si d'autres moyens permettent d'aboutir à un meilleur niveau de concurrence. Il appartiendra donc à l'Autorité d'y recourir avec prudence et parcimonie.

IV - La nécessité de mieux encadrer la nouvelle procédure

Sans remettre en cause, pour des motifs de constitutionnalité comme d'opportunité, la nouvelle procédure d'injonction structurelle proposée par le projet de loi, votre commission a cependant été soucieuse de l'encadrer plus rigoureusement et de renforcer son caractère contradictoire, compte tenu de l'issue à laquelle elle peut aboutir. En effet, la cession de magasins peut s'apparenter à une sanction alors même qu'aucune infraction n'a été constatée.

Votre commission a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement visant à préciser les conditions dans lesquelles cette procédure peut être ouverte par l'Autorité de la concurrence, à renforcer les garanties procédurales et le caractère contradictoire pour l'entreprise, à ajuster le déroulement de la procédure, en fonction des mécanismes procéduraux déjà en vigueur devant l'Autorité, ainsi qu'à clarifier la rédaction.

En premier lieu, il s'agit d' écarter le critère non pertinent de prix élevés , posé par le projet de loi comme critère alternatif à celui de marges élevées pour permettre l'engagement de la procédure. Compte tenu à la fois du principe de liberté des prix et des facteurs constitutifs des prix, l'existence de prix élevés ne saurait constituer en elle-même un indice de défaut de concurrence. En effet, des coûts d'exploitation plus élevés d'un magasin (coûts de transport, loyer...) peuvent à eux seuls expliquer des prix plus élevés. Le critère de marges élevées est, quant lui, plus pertinent, à condition de viser des marges nettes anormalement élevées. En effet, ce critère permet de mieux rendre compte du profit retiré par l'entreprise de la position dominante qu'elle détient dans une zone de chalandise : cette situation lui permet de pratiquer des marges nettes plus élevées qu'elle n'aurait pas pratiquées sinon. C'est ce que devra démontrer l'Autorité de la concurrence dans ses préoccupations de concurrence.

Il appartiendra à l'Autorité d'évaluer la marge nette globalement sur les produits commercialisés, en comparaison de ce qui est pratiqué dans le secteur économique concerné. Elle devra également prendre en compte les politiques commerciales consistant à pratiquer des marges délibérément variables selon les produits ou les magasins.

Votre commission a approuvé les autres critères d'engagement de la procédure, en particulier la détention d'une part de marché de plus de 50 %, qui permet de caractériser la position dominante. Elle a toutefois considéré que, pour l'évaluation de la part de marché de l'entreprise, seul le critère du chiffre d'affaires réalisé dans la zone de chalandise était pertinent, mais pas celui des surfaces commerciales exploitées dans cette même zone.

En deuxième lieu, votre commission a tenu à mieux préciser le déroulement de la procédure conduisant l'Autorité de la concurrence à formuler ses préoccupations de concurrence. L'Autorité serait tenue de formaliser ces préoccupations d'abord dans un rapport dûment justifié, établi après un premier échange avec l'entreprise et à l'issue d'une séance devant le collège de l'Autorité 67 ( * ) . Ce rapport devrait être accompagné des documents sur lesquels se fonde le rapporteur et des observations faites par l'entreprise. Il serait soumis ensuite à l'entreprise, qui pourrait formuler des observations dans un délai de deux mois.

Au vu des observations de l'entreprise sur son rapport, l'Autorité pourrait soit abandonner ses préoccupations de concurrence soit les confirmer, le cas échéant en les modifiant, par une décision motivée. Les préoccupations de concurrence seraient ainsi définitivement formulées au terme d'une enquête approfondie et contradictoire.

En troisième lieu, votre commission a également voulu renforcer le caractère contradictoire de la suite de la procédure, après la formulation définitive des préoccupations de concurrence, laquelle impose à l'entreprise de présenter des engagements pour remédier à ces préoccupations. Si ces engagements ne sont pas jugés suffisants, l'Autorité devrait demander à l'entreprise, par une décision motivée prise après un débat contradictoire, de présenter de nouveaux engagements. Après seulement, si les engagements demeurent insuffisants ou dans l'hypothèse où aucun engagement n'a été présenté, l'Autorité pourra, par une décision motivée après un ultime débat contradictoire devant son collège, enjoindre à l'entreprise de corriger les actes et accords à l'origine de la puissance économique ayant conduit au niveau anormalement élevé des marges.

L'Autorité ne pourrait enjoindre à l'entreprise de céder certains de ses actifs, dont il est précisé qu'ils doivent appartenir à l'entreprise, qu'à la condition clairement exprimée de justifier dans sa décision que l'injonction portant sur les actes et accords ne permettrait pas de mettre un terme à ses préoccupations de concurrence et que seule la cession des actifs le permette. Il s'agit de faire de la cession d'actifs une solution circonscrite et dûment motivée, qui ne peut être que de dernier recours.

En quatrième lieu, votre commission a prévu des délais plus longs , qui semblent plus raisonnables pour l'entreprise concernée et permettraient un examen plus approfondi et plus contradictoire avec l'Autorité :

- deux mois pour formuler des observations sur les premières préoccupations de concurrence, présentées dans le rapport de l'Autorité ;

- trois mois au lieu de deux pour présenter des engagements, délai pouvant être porté à quatre mois sur décision de l'Autorité ;

- six mois au moins et non trois mois au plus pour résilier des accords et actes commerciaux ;

- six mois au moins pour céder des actifs, alors que le projet de loi ne comporte aucun délai minimal ou maximal.

Dans la mesure où l'entreprise tenue de céder certains de ses actifs sera nécessairement en situation défavorable de négociation, d'autant qu'elle devra souvent les céder à des concurrents, il semble à votre rapporteur plus raisonnable de lui ménager un délai plus long, pour que ces négociations soient moins désavantageuses et ne conduisent pas à devoir brader le prix sous la pression d'un délai trop court.

En cinquième lieu, votre commission a interdit toute utilisation des informations obtenues par l'Autorité de la concurrence à l'occasion de cette procédure sans infraction dans le cadre d'une procédure contentieuse ultérieure pour pratique anticoncurrentielle.

En dernier lieu, pour coordonner les différentes procédures suivies par l'Autorité de la concurrence et garantir aux entreprises une certaine stabilité et prévisibilité du contrôle opéré par l'Autorité, votre commission a écarté la possibilité d'engager une procédure d'injonction structurelle, ouverte en cas de position dominante, dans l'hypothèse où une enquête pour abus de position dominante, dans le même secteur économique et la même zone de chalandise, a été close depuis moins de trois ans par la constatation qu'aucune infraction ne pouvait être établie.

Au nom de la loyauté du contrôle de l'Autorité de la concurrence, la procédure d'injonction structurelle ne saurait servir, en effet, à intervenir sur une situation dans laquelle l'Autorité ne parvient pas à prouver l'existence d'une infraction d'abus de position dominante.

Votre commission a également écarté la possibilité d'engager une procédure d'injonction structurelle à l'encontre d'une entreprise issue d'une opération de concentration autorisée par l'Autorité et dont les conditions ont été respectées par les parties. Sur ce point, à l'initiative de notre collègue Jean-Marc Gabouty, votre commission a adopté un amendement précisant que l'Autorité ne pouvait intervenir par injonction structurelle en l'absence de modification substantielle de la situation de concurrence dans le secteur économique et la zone de chalandise concernés.

En effet, par nature, toute décision d'autorisation de concentration est une appréciation de l'impact de la nouvelle structure d'entreprise sur la situation de concurrence du marché pertinent concerné. Par les conditions dont elle assortit son autorisation, en exigeant par exemple la cession d'une partie des surfaces commerciales dans le cas d'une fusion dans le commerce de détail, l'Autorité intervient déjà de façon structurelle sur l'entreprise concernée, pour limiter l'impact négatif de la concentration sur la situation de concurrence du secteur concerné dans les différentes zones de chalandise.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu que l'Autorité puisse revenir sur une autorisation régulièrement exécutée en l'absence de modification substantielle de la situation de concurrence dans le secteur économique et la zone de chalandise concernés. En revanche, si l'Autorité peut démontrer une telle modification substantielle, lorsqu'elle exprime ses préoccupations de concurrence, elle pourra engager une injonction structurelle à l'encontre d'une entreprise issue d'une concentration régulièrement réalisée.

Entendu par votre rapporteur, le président de l'Autorité a considéré que la procédure d'injonction structurelle ne pourrait pas être utilisée en tout état de cause pour prendre la suite d'une enquête infructueuse pour abus de position dominante, ni pour revenir sur une autorisation de concentration dont les conditions ont été respectées par les parties.

S'agissant des voies de recours, votre commission n'a pas souhaité donner un caractère suspensif aux recours formés devant la cour d'appel de Paris à l'encontre des décisions d'injonction, y compris portant sur la cession d'actifs, par cohérence avec le régime procédural actuel prévu en matière de concurrence. Votre rapporteur a considéré que le sursis à exécution devrait permettre d'obtenir la suspension des décisions d'injonction les plus lourdes pour les entreprises concernées. À cet égard, la procédure applicable outre-mer depuis 2012 n'a pas donné de caractère suspensif au recours.

V - La position de votre commission

En l'absence de risque constitutionnel manifeste, votre commission a néanmoins souhaité mieux encadrer la procédure d'injonction structurelle instituée par le projet de loi, à la disposition de l'Autorité de la concurrence pour remédier à des situations locales de concurrence insuffisante dans le secteur du commerce de détail. En effet, cette procédure peut conduire à l'obligation pour les entreprises concernées de céder une partie de leurs actifs, ce qui pourrait être perçu comme une sanction, portant atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre, alors même que la procédure est ouverte, par construction, en l'absence de toute infraction.

Votre commission a tenu, en particulier, à préciser les conditions d'ouverture et les critères d'engagement de la procédure, à renforcer son caractère contradictoire entre l'Autorité de la concurrence et l'entreprise, à ajuster son déroulement, en fonction des mécanismes procéduraux déjà en vigueur devant l'Autorité, ainsi qu'à clarifier sa rédaction.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 11 bis AA (nouveau) (art. L. 211-5-1 du code des assurances) - Paiement direct par l'assureur, par subrogation, du réparateur automobile non agréé choisi par l'assuré

Objet : cet article vise à organiser le paiement direct par l'assureur du réparateur automobile non agréé choisi par l'assuré en cas de dommage garanti par le contrat d'assurance, au titre de la liberté de choix du réparateur.

Introduit par votre commission, par l'adoption d'un amendement présenté par notre collègue Philippe Adnot, l'article 11 bis AA du projet de loi vise à rendre plus effective la liberté de choix du réparateur automobile par un assuré en cas de sinistre couvert par son assurance automobile.

Pour mieux garantir la liberté de choix de l'assuré, l'article L. 211-5-1 du code des assurances, issu de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, a déjà prévu que tout contrat d'assurance souscrit dans le cadre de l'assurance automobile obligatoire au titre de la responsabilité civile devait mentionner « la faculté pour l'assuré, en cas de dommage garanti par le contrat, de choisir le réparateur professionnel auquel il souhaite recourir ».

Or, en pratique, si l'assureur règle souvent le réparateur automobile agréé auprès de lui, sans que l'assuré soit tenu de faire l'avance des frais, ce n'est pas nécessairement le cas lorsque l'assuré s'adresse à un réparateur non agréé auprès de son assureur. Dans ces conditions, l'assuré doit avancer les frais et attendre d'être remboursé par l'assureur.

L'article 11 bis AA permet de surmonter cette difficulté, à l'aide d'un simple mécanisme de subrogation, en complétant l'article L. 211-5-1 précité. Il précise qu'en cas de réparation d'un véhicule ayant subi un dommage garanti par le contrat, l'assuré peut se faire subroger par le réparateur de son choix dans l'exercice des droits qu'il détient à l'encontre de son assureur au titre de son indemnité d'assurance.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 11 bis A (art. L. 121-1 du code de la consommation) - Utilisation du drapeau bleu-blanc-rouge dans la présentation d'un produit

Objet : cet article encadre l'utilisation du drapeau bleu-blanc-rouge pour signaler l'origine française d'un produit.

I - Le dispositif proposé

Cet article, qui résulte d'un amendement de notre collègue député Yves Jégo, inclut dans les pratiques commerciales trompeuses, définies à l'article L. 121-1 du code de la consommation, la pratique commerciale consistant à apposer ou à faire apparaître un drapeau bleu-blanc-rouge sur un produit vendu en France qui ne bénéficie pas d'une appellation d'origine, d'une indication géographique ou qui n'a pas fait l'objet d'un processus de certification attestant son origine française.

II - La position de votre commission

La tromperie sur l'origine constitue d'ores et déjà une pratique commerciale trompeuse dans la rédaction actuelle de l'article L. 121-1 du code de la consommation. Les allégations trompeuses sur l'origine, comme l'utilisation injustifiée du drapeau bleu-blanc-rouge sur un emballage, sont donc contrôlables et sanctionnables en application du droit actuel.

Par ailleurs, les dispositions sur les pratiques commerciales trompeuses doivent respecter une directive européenne d'harmonisation maximale (directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur). L'article 11 bis A, dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, n'est pas conforme à cette directive.

Enfin, paradoxalement, à supposer même qu'il soit conforme au droit européen, cet article aurait pour effet, au lieu d'améliorer l'information des consommateurs, de la dégrader. À titre d'exemple, l'ensemble des démarches d'origine mises en oeuvre par les interprofessions ou les filières agricoles avec le soutien du Gouvernement, telles que « Viandes de France » (étiquetage Viande Bovine Française, Viande Ovine Française, etc.), qui ne relèvent ni d'une appellation d'origine ni d'une indication géographique ni d'une certification seraient désormais interdites en application de cet article. Pour maintenir le logo bleu-blanc-rouge, les producteurs et les distributeurs devraient mettre en place un processus de certification, qui se répercuterait sur les prix de vente et rendrait les produits français plus chers que les produits étrangers concurrents. Finalement, la désignation de l'origine France risquerait soit de disparaître, soit d'être cantonnée aux produits haut de gamme.

C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 11 bis B (art. L. 141-1, L. 421-2 et L. 421-6 du code de la consommation) - Suppression d'une clause illicite dans un contrat en cours

Objet : cet article vise à étendre l'action en suppression de clause illicite aux contrats en cours, qu'ils soient ou non encore commercialisé.

La lutte contre les clauses abusives ou illicites dans les contrats de consommation repose sur plusieurs actions judiciaires, à vocation préventive ou curative.

Les unes (actions en suppression) visent à obtenir du juge qu'il enjoigne au professionnel, le cas échéant sous astreinte, de supprimer les clauses illicites des contrats mis en cause, les autres (actions en déclaration), qu'il répute non écrites les mêmes clauses pour tous les contrats identiques conclus par le professionnel concerné, ce qui évite de faire dépendre la cessation du trouble de la bonne volonté de ce dernier 68 ( * ) .

Ces actions peuvent être engagées soit par la DGCCRF (article L. 141-1 du code de la consommation), soit directement par les associations de consommateurs (article L. 421-6 du même code) soit à l'occasion de l'exercice de l'action civile, lorsque le professionnel est poursuivi pour une infraction pénale (article L. 421-2 du même code), soit en intervenant auprès de ces mêmes consommateurs, si ceux-ci ont engagé une action en réparation contre le professionnel (article L. 421-7 du même code).

Le présent article, issu d'un amendement de séance publique de notre collègue député Joël Giraud et de plusieurs de ses collègues, repris par la commission spéciale, porte seulement sur les actions en suppression de clauses illicites et vise à revenir sur une jurisprudence de la Cour de cassation qui en a restreint le champ.

En effet, la haute juridiction civile a tiré argument du caractère préventif de ces actions pour refuser qu'elles puissent s'appliquer à des contrats certes toujours en cours, mais qui ne sont plus proposés aux consommateurs 69 ( * ) .

Le présent article lève cette restriction en précisant que l'action peut s'appliquer à des contrats en cours, indépendamment du fait qu'ils soient ou non encore commercialisés .

Votre rapporteur observe que la lacune décrite peut d'ores et déjà être comblée par l'engagement de l'action en déclaration de nullité des clauses illicites, récemment créée, puisque cette dernière s'applique indifféremment aux contrats en cours, encore proposés ou non à la signature des clients.

Toutefois, la précision apportée est bienvenue, sous réserve d'une clarification rédactionnelle que votre commission spéciale a apportée au texte par amendement .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 11 bis C (art. L. 421-7 du code de la consommation) - Assignation conjointe du professionnel fautif par le consommateur lésé et les associations de défense des consommateurs, dans le cadre d'une action en réparation

Objet : cet article vise à reconnaître aux associations de consommateurs le droit, non seulement d'intervenir à l'instance introduite par un consommateur, mais aussi d'en engager une conjointement avec lui.

Un plaideur peut agir en justice par voie d'action ou par voie d'intervention. Dans le premier cas, il est à l'origine de l'instance : ses prétentions en constituent l'objet principal. Dans le second, l'instance est déjà en cours : le plaideur est tiers au procès et son intervention lui permet de s'y joindre.

La plupart des actions en justice ouvertes aux associations de défense des consommateurs leur permet d'agir par voie d'action et d'être ainsi à l'origine de l'instance : action civile contre une infraction pénale 70 ( * ) , action en cessation d'agissement illicite 71 ( * ) , action en représentation conjointe 72 ( * ) ou action de groupe 73 ( * ) .

Une seule action fait exception, celle de l'article L. 421-7 du code de la consommation 74 ( * ) . L'association ne peut agir, dans ce cadre, que par voie d'intervention, en se joignant à une action en réparation introduite préalablement par un ou plusieurs consommateurs.

Cette limitation, réaffirmée par la Cour de cassation 75 ( * ) , interdit aux associations d'assigner, conjointement avec les consommateurs lésés, le professionnel fautif. Or, cette assignation conjointe pourrait faciliter l'action en justice de certains justiciables, qui y renoncent aujourd'hui par crainte des lourdeurs de la procédure judiciaire : épaulés par l'association, dès l'introduction de l'instance, ils se lanceraient sans doute plus facilement dans la procédure.

Le présent article vise à lever cette limitation. Il remplace la section dédiée à « l'intervention » des associations par une section dédiée à une nouvelle « action en réparation » mise en oeuvre par ces mêmes associations.

Contrairement à ce que cet intitulé pourrait laisser entendre, cette action en réparation ne se limiterait pas à l'indemnisation d'un préjudice : l'association pourrait aussi l'engager pour faire cesser les agissements illicites du professionnel, conformément aux prérogatives qu'elle tient des articles L. 421-2 et L. 421-6 du code de la consommation.

En outre, l'action en cause ne serait pas une action de plein exercice , puisque l'association ne pourrait l'engager seule : elle devrait l'introduire conjointement avec un consommateur souhaitant voir réparer son préjudice, ou intervenir dans une instance déjà ouverte.

Cette brève description manifeste la nature hybride et complexe de la nouvelle action ainsi créée, qui soulève plusieurs questions : n'est-il pas contradictoire de reconnaître à quelqu'un compétence pour introduire avec un autre une action en justice, sans lui reconnaître cette compétence en propre ? L'action de l'association tombe-t-elle si le consommateur renonce à l'instance, dans la mesure où l'association n'est pas compétente pour introduire seule cette action ?

Votre rapporteur s'est par ailleurs interrogé sur le périmètre de la limitation actuelle et l'effet de la modification proposée.

Celle-ci ne concerne pas en réalité, l'action en cessation d'agissement illicite, puisque les articles L. 421-2 et L. 421-6 du code de la consommation permettent d'ores et déjà à l'association d'agir seule, ou conjointement avec les consommateurs lésés. La limitation ne concerne donc que l'action indemnitaire en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs. Le législateur a souhaité la lier à une action individuelle, afin d'éviter que les associations puissent l'engager indépendamment du préjudice personnel d'un consommateur.

La rédaction proposée conserve ce lien, mais son effet est limité : d'ores et déjà, les associations peuvent assister les consommateurs dans leur action judiciaire ; leur permettre d'assigner le professionnel conjointement avec eux ne représente pas forcément une amélioration considérable. En outre, on constate que l'indemnisation du préjudice porté à l'intérêt collectif des consommateurs est généralement très faible et fixée par les juridictions à l'euro symbolique.

Compte tenu des inconvénients ou des incertitudes précédemment relevées, l'intérêt de la modification proposée n'est pas apparu suffisant à votre commission, qui a par conséquent adopté l'amendement de suppression de son rapporteur.

Votre commission a supprimé cet article.

Article 11 bis (art. L. 917-6 et L. 927-4 [nouveaux] du code de commerce) - Consultation de l'Autorité de la concurrence dans certains territoires ultra-marins

Objet : cet article prévoit que la consultation de l'Autorité de la concurrence sur les documents d'urbanisme n'est applicable ni à Mayotte ni à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Dans sa rédaction initiale, le I de l'article 105 du présent projet de loi disposait que les articles 10 et 11 de ce même projet de loi ne sont applicables ni à Mayotte ni à Saint-Pierre-et-Miquelon.

En commission, nos collègues députés ont estimé que la non-applicabilité de l'article 10 dans ces territoires devait être maintenue, mais ils ont codifié cette disposition en créant deux articles L. 917-6 et L. 927-4 dans le code de commerce. Procéder à cette codification est l'objet de l'article 11 bis .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 11 ter A (art. L. 117-1 du code de la consommation) - Transparence sur les conditions sociales de fabrication d'un produit

Objet : cet article supprime le renvoi à un décret prévu à l'article L. 117-1 du code de la consommation relatif à l'information des consommateurs sur les conditions sociales de fabrication d'un produit.

L'article L. 117-1 du code de la consommation oblige le fabricant, le producteur ou le distributeur d'un bien commercialisé en France à transmettre au consommateur, qui en fait la demande et qui a connaissance d'éléments sérieux mettant en doute le fait que ce bien a été fabriqué dans des conditions respectueuses des conventions internationales relatives aux droits humains fondamentaux, toute information dont il dispose portant sur les éléments suivants : origine géographique des matériaux et composants utilisés dans la fabrication, contrôles de qualité et audits, organisation de la chaîne de production et identité, implantation géographique et qualités du fabricant, de ses sous-traitants et fournisseurs. Le dernier alinéa de cet article du code de la consommation précise que la liste des conventions concernées est précisée par décret.

Le Gouvernement n'ayant pas publié le décret prévu à l'article L. 117-1 du code de la consommation, les députés ont décidé de supprimer le renvoi à un décret dont l'utilité n'apparaissait pas évidente.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 11 ter B (art. L. 121-102 du code de la consommation) - Délai de rétractation en matière de vente d'or et de métaux précieux

Objet : cet article prolonge jusqu'à quarante-huit heures le délai de rétractation en matière de vente d'or et de métaux précieux.

I - Le dispositif proposé

La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a introduit dans le code de la consommation (articles L. 121-102 et suivants) des dispositions encadrant les contrats de vente de métaux précieux par un consommateur à un professionnel. Ce dispositif comporte notamment un droit de rétractation d'une durée de vingt-quatre heures.

L'article 11 ter B fait passer à quarante-huit heures cette durée de rétractation. Il précise par ailleurs les conséquences de la décision de rétractation : elle met fin aux obligations des parties. Le consommateur rembourse au professionnel le prix perçu et, en contrepartie, ce dernier lui restitue le ou les objets achetés. À défaut de restitution, le professionnel verse au vendeur une somme équivalente au double de la valeur du ou des objets achetés.

II - La position de votre commission

La position que le Sénat avait tenté de faire prévaloir lors de l'examen de la loi relative à la consommation était un délai de quarante-huit heures pour la durée de rétractation. Votre rapporteur se réjouit donc que cette position prévale désormais.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 11 ter (art. L. 423-6 du code de la consommation) - Versement des indemnisations reçues dans le cadre d'une action groupe sur le compte CARPA de l'avocat assistant l'association de consommateurs

Objet : le présent article vise à prévoir que les indemnisations versées aux consommateurs dans le cadre d'une action de groupe pour laquelle l'association est assistée par un avocat, transitent par la caisse des règlements pécuniaires des avocats à laquelle cet avocat est affilié.

I - Le dispositif proposé

La procédure d'action de groupe créée par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation distingue la phase de jugement sur la responsabilité du professionnel et celle d'indemnisation des consommateurs lésés par la faute de ce dernier.

Au cours de cette seconde phase, les consommateurs, dûment informés, décident d'adhérer ou non à l'action de groupe et de réclamer leur indemnisation auprès du professionnel, directement ou par le truchement de l'association. Cette phase est susceptible de durer plusieurs mois, selon la complexité de l'affaire et la difficulté à évaluer précisément les préjudices 76 ( * ) . En outre, les montants en jeu peuvent être considérables et concerner un nombre très élevé de consommateurs.

Pour toutes ces raisons, il est apparu nécessaire d'entourer cette procédure de suffisamment de garanties, afin notamment d'assurer la sécurité des fonds remis transitoirement à l'association requérante , ainsi que leur disponibilité pour être versés à leurs destinataires légitimes.

À l'initiative de notre collègue Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois, le Sénat a retenu une garantie similaire à celle prévue pour le maniement des fonds par les notaires, les administrateurs ou les mandataires judiciaires : leur dépôt à la Caisse des dépôts et consignations (CDC), sur un compte réservé à l'association requérante, qui ne peut faire l'objet de mouvement en débit que pour le versement des sommes dues aux intéressés (article L. 423-6 du code de la consommation).

Outre sa simplicité et sa solidité éprouvée, ce dispositif présente un autre avantage : le dépôt est rémunéré, ce qui évite la dévalorisation des sommes versées .

Le présent article, qui résulte d'un amendement de notre collègue députée Colette Capdevielle et plusieurs de ses collègues, adopté en commission, crée toutefois une exception à ce dispositif : lorsque l'association se sera adjoint l'assistance d'un avocat, les fonds pourront être déposés sur un compte ouvert par cet avocat auprès de la caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) du barreau dont il dépend.

Les auteurs de l'amendement ont en effet tiré argument de l'obligation faite aux avocats de verser les fonds qu'ils reçoivent pour leurs clients sur le compte qu'ils détiennent auprès de cette caisse 77 ( * ) . Le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, a quant à lui estimé que cet amendement n'était pas contraire à l'esprit de la loi sur la consommation et que « ce geste favorable aux avocats sera bien accueilli par la profession et facilitera la compréhension d'autres dispositions prévues par le présent projet de loi » 78 ( * ) .

II - La position de votre commission

La parfaite correspondance de cet amendement avec l'esprit de la loi de 2014 n'est toutefois pas acquise : le choix du législateur a été d'installer les associations agréées, mandataires des consommateurs lésés, au coeur de la procédure, ce que reflète l'article L. 423-6 précité, puisque les fonds sont versés sur un compte ouvert au nom de l'association, à la Caisse des dépôts et consignations.

En outre, l'obligation légale de versements des fonds à la CARPA connaît plusieurs exceptions. Le code de procédure civile d'exécution a en particulier récemment retenu la consignation du prix de la vente amiable sur autorisation judiciaire auprès de la Caisse des dépôts et consignations 79 ( * ) , alors que précédemment, les avocats procédaient à ces consignations auprès de leurs CARPA.

Surtout, votre rapporteur observe que le présent article n'est pas sans conséquence sur le droit à indemnisation des consommateurs lésés. En effet, le produit des fonds déposés à la CARPA ne profite pas à leurs destinataires, mais sert uniquement à rémunérer d'une part, les « services d'intérêt collectif de la profession » d'avocats, d'autre part les « dépenses de fonctionnement du service de l'aide juridictionnelle et le financement de l'aide à l'accès au droit » 80 ( * ) .

À l'inverse, comme on l'a vu précédemment, les fonds déposés à la CDC sont rémunérés, ce qui profitera aux consommateurs lésés. Compte tenu des montants en jeu et de la durée d'immobilisation des fonds, cette rémunération n'est pas négligeable.

Le versement des fonds à la CARPA n'est donc pas anodin. Toutefois, il peut parfois apparaître plus commode à l'association, puisque cela la dispensera d'avoir à ouvrir un compte à la CDC. Elle devra ainsi arbitrer entre la commodité de ce recours à la CARPA et l'intérêt qui s'attache à la rémunération des sommes en jeu.

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement rédactionnel rendant plus explicite qu'il n'appartient qu'à l'association de choisir l'une ou l'autre de ces deux solutions.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 11 quater A (art. L. 312-7-1 [nouveau] du code monétaire et financier) - Mobilité bancaire

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, permet aux personnes qui ouvrent un nouveau compte de dépôt de bénéficier d'un service de redirection de leurs opérations de leur ancien compte vers le nouveau.

I - Le dispositif proposé

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue député Jean-Charles Taugourdeau et de plusieurs de ses collègues du groupe UMP, avec un avis favorable de la commission et une demande de retrait du Gouvernement, vise à favoriser la mobilité bancaire.

Il introduit un nouvel article L. 312-7-1 au sein du code monétaire et financier qui permet à une personne qui ouvre un nouveau compte de dépôt de demander la « redirection » de ses opérations de son ancien compte vers son nouveau compte, à l'instar de ce que pratique La Poste lors d'un changement d'adresse.

Ce service doit obligatoirement être proposé et serait effectif pendant une durée de treize mois. Le prix facturé au client serait plafonné.

II - La position de la commission

La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite « loi Hamon », a introduit un article L. 312-1-7 au sein du code monétaire et financier qui encadre d'ores et déjà la mobilité bancaire en prévoyant les droits et obligations de la banque de départ, de la banque d'arrivée et du client. Ce dispositif n'est toutefois pas encore pleinement opérant puisque son décret d'application n'a pas encore été pris.

En parallèle, suite à la remise du rapport d'Inès Mercereau sur la portabilité du compte bancaire 81 ( * ) , le Gouvernement a demandé au secteur bancaire et aux associations de consommateurs de faire de nouvelles propositions en vue de faciliter la mobilité bancaire . C'est ainsi que le Comité consultatif du secteur financier devrait examiner, dans tous les prochains jours, plusieurs propositions du secteur bancaire .

Au demeurant, le rapport Mercereau montre, au travers des exemples anglais et néerlandais, que la redirection automatique est loin de ne présenter que des avantages.

En effet, si son coût a pu être limité aux Pays-Bas, c'est parce que les démarches à la charge du client restent nombreuses. En revanche, au Royaume-Uni, le développement de la redirection automatique a coûté près de 750 millions de livres, soit plus d'un milliard d'euros. Or, dans les deux cas, aucune augmentation significative en termes de mobilité bancaire n'a pu être observée. Le rapport Mercereau indique même que, au Royaume-Uni, seuls 37 % des personnes qui ont utilisé ce service le considèrent comme fiable.

En tout état de cause, il apparaît précipité de légiférer sur ce sujet alors que la réflexion se poursuit . Votre rapporteur a donc proposé un amendement de suppression du présent article. Si le Comité consultatif du secteur financier parvenait à un accord, il sera possible d'intégrer, au stade de l'examen en séance publique, les dispositions législatives qui se révéleraient nécessaires à la mise en oeuvre d'un nouveau système de mobilité bancaire.

Votre commission spéciale a supprimé cet article .

Article 11 quater B (art. L. 165-9 et L. 165-9-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale) - Extension aux produits d'optique-lunetterie de l'obligation de fournir à l'assuré un devis normalisé

Objet : cet article vise à étendre aux opticiens l'obligation de fournir à l'assuré un devis normalisé prévue pour les audioprothésistes.

I - Le dispositif proposé

Dans la partie du code de la sécurité sociale consacrée aux conditions de prise en charge des dispositifs médicaux à usage individuel, l'article L. 165-9 oblige tout audioprothésiste à remettre à l'assuré ou à son ayant droit, avant la conclusion du contrat de vente, un devis normalisé . Ce devis précise le prix de vente hors taxes de l'appareillage proposé, les prestations associées, ainsi que le prix net toutes taxes comprises à payer et le tarif de responsabilité correspondant. Avant le paiement, l'audioprothésiste remet à l'assuré une note détaillée reprenant les mêmes éléments et cette note est jointe à la feuille de soins. L'audioprothésiste conserve un double du devis et de la note durant deux ans. Les infractions à ces exigences sont constatées par les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et punies de contraventions de la 5 e classe soit 1 500 euros au plus, portés à 3 000 euros en cas de récidive.

L' article 11 quater B soumis au Sénat résulte de l'adoption par les députés, en séance publique, d'un amendement présenté par notre collègue député Razzy Hammadi, qui prévoit, pour l'essentiel, d' étendre aux produits d'optique-lunetterie l'obligation de fournir à l'assuré un devis normalisé , cette obligation ne concernant, dans le droit en vigueur, que les audioprothésistes.

L'amendement, soutenu et sous-amendé par le Gouvernement, signale l'opacité des tarifs et craint que, dans un contexte de plafonnement des remboursements, la qualité des prestations diminue. Il vise donc à protéger le consommateur en lui permettant d'effectuer des comparaisons qualité-prix.

Le texte adopté par les députés prévoit également le renforcement des sanctions applicables en cas de manquement, avec une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale. Enfin, il précise que la note et les informations d'identification et de traçabilité  du produit vendu devraient être transmises à l'organisme de sécurité sociale auquel est affilié l'assuré.

II - La position de votre commission

Cet article 11 quater B appelle trois observations principales.

Il convient de rappeler qu'avant son adoption en séance publique, les députés ont émis, au stade de l'examen en commission, un avis défavorable à cette disposition en faisant observer qu'elle aurait pu prendre place plus aisément dans la future loi de santé .

De plus, s'agissant de la méthode, certains professionnels concernés par cette disposition soulignent l' absence de concertation préalable
- souvent utile pour bien s'assurer de ne pas introduire dans le droit une nouvelle « usine à gaz » - alors même qu'ils adhèrent pleinement au principe de transparence et réfléchissent à des mécanismes, qui au-delà des exigences légales, permettraient au consommateur de bénéficier d'informations extrêmement précises sur la provenance exacte des produits qui lui sont fournis.

Enfin, l'urgence d'un tel dispositif est d'autant moins avérée que le droit en vigueur prévoit très largement l'information du consommateur et qu'en pratique, pour que leurs clients puissent bénéficier d'un remboursement, les opticiens établissent d'ores et déjà des devis détaillés à l'intention des organismes de sécurité sociale et des mutuelles.

Du point de vue juridique, on peut également noter que cet article prévoit, pour étendre aux opticiens un texte prévu pour les audio-prothésistes, d'utiliser le terme générique de « vendeur ». Cela amène à relever le lien entre le droit de la consommation et le droit de la sécurité sociale tout en se demandant, de façon plus générale, dans quelle mesure il est logique de demander au Parlement de légiférer au cas par cas, afin d'adapter l'exigence d'un devis pour des professions particulières. Il convient, à ce titre, de rappeler que l'obligation générale d'information précontractuelle, qui est d'ordre public, fait l'objet des articles L. 111-1 à L. 111-7 du code de la consommation.

Sur la base de ces considérations, votre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 11 quater C (nouveau) (art. L. 4362-10 du code de la santé publique) - Suppression d'un obstacle à l'activité des opticiens-lunetiers

Objet : cet article, inséré par votre commission spéciale, vise à supprimer une norme qui semble désormais bloquer toute possibilité de délivrance, par les opticiens, de verres correcteurs sans ordonnance.

À l'initiative du rapporteur, la commission spéciale a adopté un amendement qui, en pleine conformité avec l'objet du présent projet de loi, vise à supprimer un obstacle à l'activité des opticiens-lunetiers résultant de l'ajout, en 2014, d'une phrase à la portée juridique incertaine dans le code de la sécurité sociale.

De 1945 à 2014 , l'article L. 4362-10 du code de la santé publique n'interdisait pas aux opticiens-lunetiers de délivrer des verres correcteurs sans prescription aux personnes de plus de 16 ans. Ce cadre juridique permettait, en particulier, aux professionnels d'assurer le remplacement de lunettes cassées ou perdues ainsi que de satisfaire immédiatement la demande des touristes étrangers plutôt que de leur imposer, au préalable, d'attendre plusieurs semaines pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologue et une ordonnance.

Depuis la loi de mars 2014 dite « Hamon » 82 ( * ) , la France semble bien être devenue l'un des seuls pays de l'Union européenne à interdire, en toutes circonstances, la vente d'équipements d'optique sans présentation d'une ordonnance, sous peine d'une amende de 3 750 euros.

Encore faut-il préciser que cette singularité juridique repose sur une prescription dont la portée est, à l'heure actuelle, incertaine puisque l'administration  aurait lancé une étude pour déterminer si la première phrase de l'article L. 4362-10 du code précité (« La délivrance de verres correcteurs est subordonnée à l'existence d'une prescription médicale en cours de validité . ») s'applique ou pas aux ressortissants étrangers. En bonne logique, on peut faire observer que si l'exégèse en cours de cette interdiction de vente sans ordonnance concluait, au final, que celle-ci ne s'applique pas aux ressortissants non communautaires, certains professionnels pourraient alors théoriquement être mis en cause pour refus de vente. La situation actuelle est donc peu intelligible.

Économiquement, la profession fait valoir que dans de nombreux magasins des zones touristiques et frontalières, une grande partie du chiffre d'affaires provient de la vente d'équipements à des touristes et des étrangers : elle a donc alerté le Sénat sur ce frein à l'activité qui menacerait 2 400 emplois.

L'ambiguïté juridique de cette nouvelle norme, sa singularité dans l'Union européenne et la certitude de ses effets économiques néfastes justifient sa suppression sans remettre en cause l'utilité de la prescription médicale préalable.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 11 quater D (nouveau) (art. 19 de la loi n° 96-603 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat) - Reconnaissance de la qualité d'artisan aux restaurateurs

Objet : cet article vise à permettre aux professionnels de la restauration qui le désirent de bénéficier de la qualité d'artisan.

À l'initiative, d'une part, de notre collègue Didier Guillaume et des membres du groupe socialiste et apparentés et, d'autre part, de nos collègues Jacques Mézard et Alain Bertrand, votre commission a adopté un amendement portant article additionnel qui reconnaît la qualité d'artisan aux personnes physiques et personnes morales exerçant l'activité de fabrication de plats à consommer sur place et qui n'emploient pas plus de 10 salariés.

Il faut noter qu'il s'agit d'une faculté, puisque les personnes physiques et morales visées par cet amendement peuvent s'immatriculer au registre des métiers. Ainsi, bien que l'immatriculation au registre des métiers implique des démarches administratives et des coûts, en l'espèce ces coûts seraient librement choisis par les personnes concernées. Votre rapporteur a été sensible au caractère facultatif du dispositif et estime que cela détermine grandement son acceptabilité, car une immatriculation obligatoire au registre des métiers, qui est jusqu'à présent la règle dans le secteur artisanal, aurait imposé des coûts administratifs et financiers à des entreprises qui n'étaient pas demandeuses de la qualité d'artisan.

Il faut noter aussi que l'amendement proposé fait référence à l'article 19 et non pas à l'article 16 de la loi de 1996 sur l'artisanat 83 ( * ) : le dispositif n'établit donc pas de lien obligatoire entre qualification et exercice de l'activité de cuisinier. Il n'y a pas création d'une barrière à l'entrée et définition d'une profession réglementée, ce qui serait rédhibitoire du point de vue de la Commission européenne.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 11 quinquies (art. L. 441-6 du code de commerce et art. 121 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives) - Aménagement des règles sur les délais de paiement

Objet : cet article complète la transposition de la directive du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement et pérennise le régime dérogatoire des secteurs commerciaux à saisonnalité marquée.

I - Le dispositif proposé

Cinq secteurs économiques, caractérisés par la très forte saisonnalité de leurs ventes (équipements de sports d'hiver, jouet, horlogerie, cuir et matériels d'agro-équipement), bénéficient, depuis la loi de modernisation de l'économie de 2008 84 ( * ) , de dérogations au régime général sur les délais de paiement. Ces dérogations sont possibles dans le cadre d'accords interprofessionnels conclus par tous les acteurs d'une même filière.

Ces dérogations ont déjà été renouvelées. L'article 121 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives (transposant la directive 2011/7/UE du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales) a ainsi prorogé cette possibilité de dérogation pour trois ans - donc jusqu'en 2015.

En commission spéciale, nos collègues députés ont introduit l'article 11 quinquies pour prolonger de nouveau ce dispositif de dérogation en permettant qu'à leur expiration, les accords soient renouvelés pour trois ans par les parties signataires, sous réserve que les nouveaux délais de paiement convenus ne soient pas supérieurs à ceux applicables au 31 décembre 2011.

En séance publique, un amendement du Gouvernement a complètement réécrit l'article qui comporte désormais deux volets : l'un concerne les règles générales relatives aux délais de paiement ; l'autre concerne spécifiquement les secteurs à saisonnalité très marquée.

Pour ce qui est des règles générales relatives aux délais de paiement , l'article 11 quinquies apporte des modifications à l'article L. 441-6 du code de commerce en réponse à des remarques de la Commission européenne concernant la transposition de la directive 2001/7/UE du 16 février 2011. Cette directive pose en effet le principe d'un plafonnement à 60 jours des délais de paiement convenus entre les parties (30 jours à défaut de stipulation contractuelle sur ce point). Elle impose également aux États membres un certain nombre d'obligations (indemnisation en cas de retard de paiement, sanction des clauses contractuelles et pratiques abusives notamment). À la suite de la notification dans la loi du 22 mars 2012 précitée de la transposition par les autorités françaises, la Commission européenne a donc souhaité que ces précisions soient apportées dans la formulation du droit interne, afin de le mettre en conformité avec l'article 3(5) de la directive précitée.

Les a) et b) du 1° du I de l'article 11 quinquies apportent donc les précisions requises par la Commission. L'article 441-6 dispose désormais que le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser 60 jours à compter de la date d'émission de la facture. Par dérogation, un délai maximum de 45 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier.

En ce qui concerne les secteurs à saisonnalité marquée , l'article 11 quinquies prend acte du fait, après deux périodes transitoires, qu'ils sont structurellement dans l'impossibilité de se conformer au plafond légal des délais de paiement. Le choix est donc fait de pérenniser leur régime dérogatoire. Ces secteurs pourront désormais, à titre permanent, convenir de délais plus longs que la normale sous réserve d'un accord de l'ensemble des acteurs économiques des filières concernées.

II - La position de votre commission

Il était devenu manifeste que les secteurs couverts par les accords interprofessionnels permettant de déroger aux règles sur les délais de paiement n'étaient structurellement pas en mesure de se conformer au plafond légal. Dans ces conditions, il était plus clair et plus sécurisant pour les acteurs concernés de prendre acte de la situation et de pérenniser leur régime transitoire.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 11 sexies (art. 1er de la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie) - Comptes bancaires inactifs

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, oblige les établissements ayant identifié un compte inactif du fait du décès de son titulaire à demander « aux établissements compétents » la déclaration de succession du défunt .

I - Le dispositif proposé

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Barbara Pompili et des membres du groupe écologiste, avec l'avis défavorable du Gouvernement et une demande de retrait de la commission. Il complète la loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence 85 ( * ) .

L'article 1 er de cette loi prévoit notamment qu'un compte bancaire est réputé inactif si, à l'issue d'une période de douze mois suivant le décès de son titulaire, aucun de ses ayants droit « n'a informé l'établissement tenant le compte de sa volonté de faire valoir ses droits sur les avoirs et dépôts qui y sont inscrits ». Les établissements ont l'obligation de consulter le Répertoire national d'identification des personnes physiques afin d'identifier les titulaires du compte qui seraient décédés.

Les auteurs de l'amendement font valoir que l'établissement tenant le compte n'a pas l'obligation de rechercher les ayants droit. Il doit seulement informer les ayants droit qu'il connait du caractère inactif du compte. Le présent article oblige donc l'établissement à demander « une copie de la déclaration de succession auprès des établissements compétents » .

II - La position de votre commission

Des amendements de même nature avaient été présentés et rejetés lors de l'examen par le Sénat de la loi du 13 juin 2014 précitée 86 ( * ) .

Le Parlement avait alors estimé que, pour un compte bancaire, la recherche des ayants droit incombe d'abord aux notaires. Ceux-ci ont d'ailleurs l'obligation de consulter le Fichier des comptes bancaires (FICOBA) lorsqu'ils règlent une succession (article L. 151 B du livre des procédures fiscales).

En outre, l'article 800 du code général des impôts prévoit des dispenses à l'obligation de dépôt d'une déclaration de succession (actif brut inférieur à 50 000 euros pour les ayants droit en ligne directe ou inférieur à 3 000 euros pour les autres). Ce document n'existe donc pas toujours .

Le présent article soulève d'autres problèmes .

Sur le fond, le fait qu'un établissement teneur de compte puisse se faire communiquer une déclaration de succession pose une question de principe quant au respect de la vie privée . En effet, une déclaration de succession comprend de nombreux éléments d'ordre patrimonial (composition et valeur de l'actif successoral) et privé (nom, domicile, lien de parenté, noms des enfants des ayants droit), qui pourraient notamment être utilisés à des fins commerciales.

Enfin, sur la forme, le présent article prévoit que la demande est adressée « aux établissements compétents », expression pour le moins imprécise. Il ne prévoit pas non plus que lesdits « établissements compétents » soient obligés de transmettre cette information une fois que la demande leur est parvenue.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a adopté un amendement de suppression de votre rapporteur.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 11 septies (art. 3 de la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie) - Assurance-vie en déshérence

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, oblige les assureurs vie à demander la déclaration de succession du défunt lorsqu'ils ne connaissent pas les coordonnées du bénéficiaire du contrat d'assurance vie.

I - Le dispositif proposé

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Barbara Pompili et des membres du groupe écologiste, avec l'avis défavorable du Gouvernement et une demande de retrait de la commission. Il complète la loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence 87 ( * ) .

L'article 3 de cette loi prévoit notamment qu'un assureur vie « dispose d'un délai de quinze jours, après réception de l'avis de décès et de sa prise de connaissance des coordonnées du bénéficiaire [du contrat d'assurance vie] ou au terme prévu pour le contrat, afin de demander au bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie de lui fournir l'ensemble des pièces nécessaires au paiement ».

Le présent article complète cette disposition en précisant que « si l'entreprise d'assurance n'a pas connaissance des coordonnées du bénéficiaire, elle dispose d'un délai de quinze jours, après réception de l'avis de décès, afin de demander une copie de la déclaration de succession auprès d'un notaire ou d'un centre des impôts ».

II - La position de votre commission

Le présent article apparaît largement inopérant .

En effet, les contrats d'assurance vie ne font pas partie de l'actif successoral . Le propre de ces contrats est de désigner un bénéficiaire : il peut bien sûr s'agir des héritiers mais également de personnes, physiques ou morales, qui n'ont pas la qualité d'ayants droit et qui ne sont donc pas inscrites sur la déclaration de succession . C'est ainsi que de nombreuses associations perçoivent le bénéfice d'une assurance vie au décès d'un assuré, sans même savoir qu'elles en étaient bénéficiaires.

Dès lors, si l'entreprise d'assurance n'a pas connaissance des coordonnées du bénéficiaire, la déclaration de succession ne lui apportera pas nécessairement plus de renseignements.

Au surplus, comme l'a relevé le ministre lors des débats devant l'Assemblée nationale, « [l'amendement tel qu'il est rédigé pose] tout d'abord des problèmes de séquençage. Le dépôt de la déclaration de succession par les héritiers auprès du centre des finances publiques du domicile du défunt intervient dans les six mois suivant le décès, mais il n'est pas exclu que l'établissement s'adresse aux services fiscaux avant que ceux-ci ne disposent de l'information sollicitée ».

En outre, la transmission de la déclaration de succession pose des problèmes en termes de respect de la vie privée , déjà évoqués pour l'article 11 sexies .

Enfin, et surtout, le présent article est juridiquement inutile puisque les assureurs vie ont l'obligation d'engager toutes les démarches permettant de retrouver le bénéficiaire du contrat d'assurance vie , sans qu'il soit nécessaire que la loi en précise les modalités.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a adopté un amendement de suppression de votre rapporteur.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 11 octies (art. 4 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation) - Double affichage du prix

Objet : cet article rend possible les pratiques de double affichage du prix sans limitation dans le temps.

I - Le dispositif proposé

L'article 4 de la loi n° 2014?344 du 17 mars 2014 relative à la consommation prévoit que, à titre expérimental, du 1 er janvier 2015 au 31 décembre 2017, les vendeurs de produits peuvent pratiquer l'affichage d'un double prix pour un même bien : un prix de vente et un prix d'usage (ce dernier désigne la valeur marchande associée à l'usage du service rendu par un bien meuble, et non à la propriété de ce bien).

L'article 11 octies , tout en conservant au double affichage du prix son caractère facultatif, rend possible les pratiques de double affichage du prix sans limitation dans le temps. Cela revient à pérenniser ce qui n'était jusqu'à présent qu'une simple disposition expérimentale.

II - La position de votre commission

La pratique du double affichage du prix peut avoir un intérêt pour certains produits, lorsque la location est une véritable alternative à l'acquisition. Votre rapporteur ne voit donc pas d'opposition à pérenniser le double affichage, dès lors qu'il s'agit d'une simple faculté.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 11 nonies - Rapport sur les pratiques commerciales différenciées en fonction du sexe

Objet : cet article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport portant sur les conséquences du marketing différencié en fonction du sexe, les écarts de prix selon le sexe du consommateur et les inégalités pesant sur le pouvoir d'achat des femmes et des hommes.

Le présent article, créé par l'Assemblée nationale en séance publique, à l'initiative de notre collègue députée Catherine Coutelle et sous-amendé par les rapporteurs spéciaux, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement, avant le 30 septembre 2015 sur les conséquences du marketing différencié en fonction du sexe, les écarts de prix selon le sexe du consommateur et les inégalités pesant sur le pouvoir d'achat des femmes et des hommes.

Conformément à sa position générale sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

CHAPITRE III - Conditions d'exercice des professions juridiques réglementées

Initialement , le présent chapitre était exclusivement dédié à deux types de professions réglementées , parmi toutes celles que compte notre législation : les professions du droit et les professions du chiffre celles d'experts-comptables et de commissaires aux comptes. Les députés y ont joint celle des architectes , à l'article 22 bis , et celle des gens de mer , à l'article 22 ter .

Les professions réglementées du droit

De nombreux professionnels relèvent de cette catégorie : les avocats, les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation (aussi dénommés « avocats aux conseils »), les administrateurs et mandataires judiciaires, les commissaires-priseurs judiciaires, les conseillers en propriété industrielle, les huissiers de justice, les juristes d'entreprises et les notaires. Ces professionnels du droit ne sont pas les seuls à exercer le droit puisque d'autres professions, comme les experts comptables ou les agents immobiliers, peuvent exercer cette activité à titre accessoire.

Parmi les professions du droit, on distingue les professions judiciaires , qui regroupent les auxiliaires de justice (par exemple les avocats, les commissaires-priseurs judiciaires, les administrateurs ou mandataires judiciaires, ou les huissiers de justice), des professions juridiques , qui interviennent indépendamment de tout procès, comme, en principe, les notaires ou les juristes d'entreprise.

Une autre distinction peut être établie entre celles dont l'exercice est libéral et celles dont il est salarié, comme les juristes d'entreprises. La plupart peuvent toutefois exercer sous l'une ou l'autre forme 88 ( * ) . Il en va ainsi des notaires, des avocats ou des huissiers de justice.

Enfin, une dernière distinction oppose les professionnels libéraux indépendants , qui peuvent s'installer librement, comme les avocats, les administrateurs judiciaires, les mandataires judiciaires ou les conseillers en propriété industrielle, et les officiers publics et ministériels .

Cette dernière dénomination recouvre deux réalités, qui peuvent se cumuler. L'officier ministériel est appelé ainsi parce qu'il est nommé par le ministre de la justice. Parmi ces officiers ministériels, certains sont aussi officiers publics , dans la mesure où ils peuvent établir des actes authentiques qui font foi jusqu'à inscription de faux en écriture publique.

Ainsi, les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation et les commissaires-priseurs judiciaires ont seulement la qualité d'officiers ministériels. Les greffiers des tribunaux de commerce, les notaires et les huissiers de justice ont, eux, la qualité d'officiers publics et ministériels.

Source : commission spéciale du Sénat

Article 12 A (nouveau) - Création d'un code de l'accès au droit et de l'exercice du droit

Objet : le présent article additionnel, issu d'un amendement de votre rapporteur, tend à créer un code de l'accès au droit et de l'exercice du droit, destiné à rassembler tous les textes épars qui régissent aujourd'hui les professions juridiques et judiciaires réglementées, l'exercice du droit et les dispositifs d'accès au droit.

Placé en tête du chapitre consacré aux professions réglementées, cet article vise un double objectif.

Il s'agit, tout d'abord, d'assurer une meilleure accessibilité et une plus grande lisibilité des textes qui régissent l'exercice du droit et l'organisation des professions réglementées.

Ceux-ci se caractérisent en effet, aujourd'hui, par leur dispersion et leur ancienneté.

Ainsi, sans compter les administrateurs et mandataires judiciaires, les greffiers de tribunaux de commerce ou les conseillers en propriété industrielle, dont le régime est codifié 89 ( * ) , plus d'une cinquantaine de textes régissent l'organisation et le fonctionnement des professionnels libéraux du droit.

Certains de ces textes remontent parfois à plus d'un siècle 90 ( * ) . Bien qu'ils aient été modifiés à de nombreuses reprises, deux difficultés subsistent.

La première tient à la confusion entre ce qui relève de la loi et ce qui relève du pouvoir réglementaire : conçus à des époques où cette distinction n'avait pas la même force qu'aujourd'hui, ils renvoient au règlement des mesures qui auraient aujourd'hui leur place dans la loi 91 ( * ) , et inversement.

La deuxième difficulté tient à la sédimentation inévitable des réformes successives, qui, faute d'une refonte globale, ont laissé subsister des dispositions caduques ou inadaptées à l'exercice moderne de ces professions 92 ( * ) , ou rendu le droit moins lisible ou trop complexe 93 ( * ) .

Le présent article additionnel est aussi motivé par la volonté de faire le compte de ce que les professions du droit ont en commun et de ce qui les distinguent. Sans renouer avec l'idée d'une unique profession du droit 94 ( * ) , étrangère à la tradition française et contraire aux spécificités de nos professions, il s'agirait de mettre en avant les points de convergence entre certaines de ces professions, comme en matière de tarifs , de déontologie ou de formes sociales d'exercice , en respectant ce qui les distingue.

À ce stade des travaux parlementaires, l'article 12 A se limite à créer un code de l'accès au droit et de l'exercice du droit , sans procéder aux opérations légistiques nécessaires pour le garnir. L'extension à l'accès au droit du périmètre de ce code rend compte du rôle éminent que jouent les professions juridiques et judiciaires réglementées en ce domaine.

Votre commission a adopté cet article ainsi rédigé.

Article 12 (art. L. 441-1 à L. 444-5 [nouveaux], L. 462-1, L. 462-4, L. 464-1, L. 663-2, L. 663-3 et L. 743-13 du code de commerce, art. L. 113-3 du code de la consommation et art. 1er de la loi du 29 mars 1944 relative aux tarifs des émoluments alloués aux officiers publics ou ministériels) - Réglementation des tarifs des officiers publics ou ministériels et de certaines professions juridiques

Objet : le présent article réforme le dispositif d'établissement des tarifs de certaines professions juridiques et judiciaires réglementées en modifiant les critères de fixation de ces tarifs et en rendant l'Autorité de la concurrence compétente pour se prononcer sur ceux-ci.

I - Le contexte

A. Un constat sévère sur le niveau actuel des tarifs et la forte rentabilité qu'ils assurent aux professions concernées...

Comme plusieurs des dispositions du projet de loi relatives aux professions réglementées, le présent article est directement inspiré par les conclusions de trois rapports successifs , les deux derniers reprenant largement les analyses du premier : celui, non publié, de l'inspection générale des finances, celui de M. Richard Ferrand, aujourd'hui rapporteur général du présent texte à l'Assemblée nationale 95 ( * ) et celui d'une mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale 96 ( * ) sur le sujet.

Ces rapports font le constat d'un décalage entre les gains résultant, pour ces professions, de l'application des barèmes tarifaires auxquels elles sont soumises et celle des coûts auxquels elles font face. Il en résulterait une croissance du chiffre d'affaires des professionnels bien supérieure à l'inflation et un taux de rentabilité beaucoup plus élevé que le taux moyen observé pour l'ensemble des entreprises.

Trois phénomènes expliqueraient cette situation.

En premier lieu, la rémunération tarifaire de certains actes aurait considérablement augmenté en raison de facteurs exogènes, sans lien avec les coûts correspondants pour le professionnel. Ainsi, la forte hausse des prix de l'immobilier a mécaniquement entraîné une hausse de la rémunération proportionnelle des notaires pour les actes de mutation immobilière, sans que cela soit justifié par une complexification des opérations auxquelles ils devaient procéder. S'appuyant sur le rapport de l'inspection générale des finances, l'étude d'impact jointe au projet de loi rappelle qu'entre 2002 et 2012, le tarif perçu par les notaires aurait augmenté de 159 % pour la vente d'un appartement parisien de soixante mètres carrés et de 77 % pour la vente d'une maison de cent mètres carrés à Clermont-Ferrand.

En second lieu, les revalorisations successives des barèmes tarifaires 97 ( * ) , intervenues aux cours des dernières années auraient été pour la plupart supérieures à l'inflation. L'étude d'impact donne l'exemple des huissiers de justice, dont les tarifs auraient cru de 9 points de plus que l'inflation de 1996 à 2012 ou celui des greffiers de tribunaux de commerce, dont le taux de base aurait augmenté, hors inflation, de 7,5 % entre 2000 et 2012.

Enfin, ces mêmes revalorisations n'auraient pas tenu compte des gains de productivité permis par les nouvelles technologies, la réduction de certains formalismes ou les investissements des professionnels.

À ce premier constat s'ajouterait un second : l'empilement des régimes tarifaires et l'absence de critères clairs pour leur fixation rendraient le dispositif particulièrement complexe et illisible , pour les professionnels comme pour les justiciables.

Se défendant de vouloir stigmatiser une profession plus qu'une autre, le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, a estimé que les officiers publics ou ministériels bénéficiaient objectivement d'un effet de rente 98 ( * ) , auquel il convenait de mettre fin en réformant les conditions dans lesquelles leurs tarifs sont établis et en garantissant une plus grande transparence sur les critères retenus à cette fin.

B. ... qui doit toutefois être nuancé

Des travaux qu'il a conduits, votre rapporteur tire la conviction que ce constat et cette conclusion ne peuvent être accueillis sans réserve.

Il observe tout d'abord que l'évolution dénoncée est inséparable d'un choix, celui de concilier deux exigences contraires : assurer aux justiciables, pour les actes les plus fréquents, le plus faible coût possible, et garantir, en même temps, un maillage territorial suffisant, ce qui impose de garantir aux officiers publics ministériels une rentabilité suffisante, même lorsque les prestations qu'ils délivrent consistent essentiellement en ces actes faiblement rémunérés.

En effet, la solution pratiquée pour y parvenir consiste à appliquer aux tarifs une péréquation , certains des actes pratiqués, les plus nombreux, étant volontairement maintenus en-deçà du coût de revient et d'autres bien au-delà, afin que les quelques actes rémunérés plus chers compensent le manque à gagner de l'ensemble de ceux accomplis à perte. Concrètement, la rentabilité des offices notariaux est assise sur les ventes immobilières, dont le tarif est proportionnel, qui rétribuent, indirectement, les autres actes proposés, sur une base forfaitaire, par le notaire.

Or, comme l'Autorité de la concurrence elle-même l'a reconnu dans son avis du 9 janvier 2015 99 ( * ) , cette péréquation, qui assure la subsistance des plus petits offices, situé dans des territoires où les prix de l'immobilier sont bas et les transactions rares, permet aux offices mieux achalandés de réaliser de plus substantiels bénéfices : l'inégalité de situation des différentes structures ou la différence du panier de prestations qu'elles délivrent effectivement expliquent pour une part les sur-rémunérations observées.

Par ailleurs, votre rapporteur rappelle que les professions juridiques ont vu leurs conditions d'exercice évoluer : des tâches nouvelles leur ont été confiées, certains monopoles ont été démantelés 100 ( * ) , certaines de leurs prestations ont été soumises à de nouvelles concurrences 101 ( * ) . Il serait faux de les taxer d'immobilisme.

Enfin, votre rapporteur souligne qu'en tout état de cause, la responsabilité de la fixation des tarifs échoit au Gouvernement : en la matière, l'essentiel du droit est de niveau réglementaire, la loi fixant seulement le principe d'un tarif, mais non les critères 102 ( * ) . Il n'est donc pas juste d'imputer aux seules professions la responsabilité de la situation actuelle.

Les tarifs des professions du droit

En matière de prestation juridique, le principe est celui de l'honoraire libre. Toutefois, la rémunération des professionnels peut être réglementée lorsque cette réglementation sert un objectif d'intérêt général . Il en va ainsi lorsqu'il s'agit d'assurer une égalité d'accès à la prestation offerte, grâce à un prix unique, d'éviter toute négociation du prix de la rédaction d'un acte authentique, ou de garantir une rémunération suffisante au professionnel en compensation des contraintes qui pèsent sur lui.

La réglementation prend la forme d'un barème tarifaire , qui fixe, prestation par prestation, la rémunération versée au professionnel, nommée « émolument ».

Cette réglementation tarifaire concerne principalement les officiers publics ou ministériels . Elle s'applique aussi, bien qu'ils n'aient pas cette qualité, aux administrateurs et mandataires judiciaires, ainsi qu'aux avocats. Ces derniers perçoivent des émoluments de postulation, le plus souvent négligeables par rapport à leurs honoraires, lorsqu'ils accomplissent, pour le plaideur, des actes de procédure devant les juridictions 103 ( * ) .

Le principe d'une rémunération tarifaire est fixé par la loi (art. 1 er de la loi du 29 mars 1944 pour les officiers publics ou ministériels, art. 10 de la loi du 31 décembre 1971 pour la postulation des avocats). En revanche son régime et ses conditions sont définis par le pouvoir réglementaire.


Les types de tarifs et d'émoluments

D'une profession à l'autre, les barèmes varient sensiblement, en raison, d'une part, de la nature différente des actes délivrés ou des diligences accomplies et, d'autre part, de la diversité des modalités de calcul retenues.

Ainsi, les émoluments peuvent être composés :

- de droits fixes , dont le montant est soit exprimé en euros, soit en unité d'un taux de base lui-même défini par voie réglementaire. Ainsi, par exemple, la délivrance d'une assignation par un huissier de justice est facturée 8,5 fois le taux de base de 2,20 euros (soit 18,7 euros). Le mandataire judiciaire touche quant à lui pour l'ensemble de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire un droit fixe de 2 500 euros ;

- de droits proportionnels à la valeur de l'affaire ou du bien concerné. Le commissaire-priseur judiciaire perçoit ainsi 0,1 % de la valeur de la prisée lors d'une vente judiciaire portant sur des biens de plus de 34 500 euros.

Dans un cas comme dans l'autre, la valeur nominale du droit peut varier selon certaines circonstances ou elle peut être affectée d'un coefficient. Ainsi, le droit fixe d'un huissier est multiplié par 0,5 lorsque la créance à recouvrer est inférieure à 128 euros, par 1 entre 128 et 1 280 euros et par 2 au-delà. Le droit proportionnel d'un notaire sur une vente immobilière varie quant à lui de 4 % pour un bien d'une valeur inférieure à 6 000 euros à 0,825 % pour un bien d'une valeur supérieure à 60 000 euros.

Parfois, cette technique du coefficient multiplicateur ou du droit proportionnel permet d'intéresser le professionnel à la performance de la diligence qu'il accomplit. Tel est le cas, dans l'exemple précédent pour le recouvrement de créance.

À ces droits proportionnels ou fixes peuvent s'ajouter des débours, qui correspondent aux remboursements des avances de frais effectuées par les professionnels, des frais de dossiers ou des frais de déplacements (tel est le cas par exemple pour les huissiers de justice).

Par ailleurs, lorsqu'une profession est autorisée à effectuer les prestations d'une autre profession, elle en applique généralement le tarif.

Toutes les prestations offertes par les professionnels ne sont pas forcément tarifées : celles qu'ils peuvent accomplir en concurrence avec d'autres professionnels du droit sont généralement en honoraires libres. Il arrive toutefois que certaines prestations non exclusives soient elles aussi tarifées, comme le sont, par exemple, les négociations immobilières conduites par les notaires.


La possibilité de remises

En principe, le tarif ne peut être modifié par le professionnel. Toutefois, ce dernier peut être autorisé, dans certains cas, à consentir des remises. Il en va ainsi pour les notaires, qui peuvent renoncer totalement à leurs émoluments, en accorder une réduction à leur client pour la part dépassant 80 000 euros, ou proposer une remise libre, dans les cas de négociation ou de transaction. En revanche, ils ne peuvent consentir d'autres remises qu'avec l'autorisation de la chambre dont ils dépendent.

Source : commission spéciale du Sénat

II - Les dispositions du projet de loi et les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Le présent article ne remet pas en cause le caractère réglementé des tarifs pratiqués par la plupart des professions juridiques et judiciaires. En revanche, inspiré par une approche économique, il vise à instiller plus de concurrence ou de transparence dans la fixation de ceux-ci.

Symboliquement, il détache les dispositions législatives relatives aux barèmes tarifaires de la loi du 29 mars 1944 104 ( * ) pour les intégrer, modifiées, dans un nouveau titre IV bis (articles  L. 444-1 à L. 444-4) du livre IV du code de commerce consacré à la liberté des prix et de la concurrence.

Surtout, il enrichit le régime législatif actuel en intervenant sur quatre éléments : le périmètre des autorités compétentes pour fixer les tarifs, les critères retenus pour établir le niveau de prix de chaque prestation, la prise en compte d'une péréquation nécessaire dans la rémunération des professionnels, les possibilités de négociation des tarifs.

Le nouveau dispositif qu'il met en place concernerait exclusivement les prestations des commissaires-priseurs judicaires, des greffiers de tribunaux de commerce, des huissiers de justice, des administrateurs judiciaires, des mandataires judiciaires et des notaires (nouvel article L. 444-1 du code du commerce). Il laisse en revanche de côté les tarifs liés à la postulation des avocats.

A. Une compétence de fixation des tarifs étendue à l'Autorité de la concurrence et au ministre de l'économie

Le nouvel article L. 444-3 du code commerce adjoindrait au ministre de la justice, aujourd'hui seul compétent pour arrêter le tarif de chaque prestation, celui de l'économie. La portée symbolique d'une telle disposition est forte.

Surtout, compétence est donnée à l'Autorité de la concurrence, aux articles L. 462-1 et L. 462-4 du même code, pour se prononcer par avis public, à la demande du Gouvernement ou de sa propre initiative, sur les prix et tarifs réglementés. Cette compétence ne se limite pas aux tarifs des professions juridiques, mais s'étend à tout type de prix régulés.

Actuellement, ces articles visent, plus généralement, sa compétence pour se prononcer sur les questions relatives à la concurrence. Votre rapporteur observe que cette formulation générale ne lui a en rien interdit de rendre récemment au Gouvernement un avis sur les tarifs des professions juridiques réglementées 105 ( * ) ou sur les prix de l'électricité 106 ( * ) , comme le président en exercice de cette institution l'a rappelé lors de son audition,

À l'initiative des rapporteurs de leur commission spéciale, les députés ont toutefois souhaité que ces avis soient précédés d'une consultation des organisations professionnelles et des instances ordinales concernées ainsi que des associations de défense des consommateurs agréées. Ces consultations, à la charge de l'Autorité de la concurrence, devraient être ouvertes dans les cinq jours ouvrables suivant la saisine ou l'auto-saisine de l'Autorité de la concurrence 107 ( * ) .

Les députés ont précisé que lorsqu'elle se sera saisie d'office, l'autorité devra rendre son avis au plus tard un mois avant la révision du prix ou du tarif en cause, cette date lui étant obligatoirement communiquée deux mois avant son échéance.

Même si elle ne transparaît pas clairement du dispositif proposé, qui ne prévoit pas une telle automaticité, la volonté du Gouvernement semble être de construire la réévaluation des tarifs à partir de l'avis préalable de l'Autorité de la concurrence, que celui-ci intervienne avant chaque révision quinquennale des tarifs ou dans l'intervalle, si une difficulté lui est signalée. Cette autorité est ainsi appelée à jouer un rôle clé dans la démarche d'objectivisation de la fixation des tarifs.

B. Une explicitation des critères de fixation des tarifs

Lors des débats à l'Assemblée nationale, le ministre de l'économie a insisté sur la volonté du Gouvernement de rendre plus transparente la détermination des tarifs et de l'asseoir sur des critères objectifs. Le nouvel article L. 444-2 traduit cette volonté, puisqu'il précise que les tarifs concernés prennent en compte « les coûts pertinents du service rendu et une rémunération raisonnable, définie sur la base de critères objectifs ».

Ces deux concepts, et particulièrement celui de « rémunération raisonnable » ont donné lieu, en séance publique à l'Assemblée nationale, à un débat nourri, plusieurs orateurs soulignant leur imprécision.

La rapporteure thématique, notre collègue députée Cécile Untermaier et le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, ont indiqué qu'il reviendrait au pouvoir réglementaire de les préciser, mais que ceux-ci étaient suffisamment clairs. Le ministre de l'économie a notamment fait valoir que la notion de « rémunération raisonnable » était définie à plusieurs reprises dans les textes de loi, et qu'elle recouvrait « la prise en compte des coûts réels, des investissements réalisés et du coût du capital ainsi que des risques encourus » 108 ( * ) .

Votre rapporteur observe toutefois que cette dernière définition intègre des éléments, comme les coûts réels ou le coût du capital, qui sembleraient plutôt relever de la notion de « coûts pertinents » qui est distinguée, par le présent article, de celle de « rémunération raisonnable ».

En outre, si cette dernière notion est bien utilisée par deux textes de loi 109 ( * ) , les définitions qui en sont données diffèrent sensiblement. Il en va de même pour la notion, proche et d'usage plus fréquent, de « rémunération normale » 110 ( * ) . À chaque fois, il semble que le législateur ait tenu à préciser comment il fallait entendre, dans ce cas, la qualité d'une telle rémunération.

Le nouvel article L. 444-4 renverrait à un décret en Conseil d'État, pris après avis de l'Autorité de la concurrence, le soin de déterminer les modes d'évaluation de ces coûts pertinents et de cette rémunération raisonnable.

C. L'instauration d'une double péréquation des tarifs

Le présent article a tenté de traduire juridiquement l'une des réalités économiques de la pratique tarifaire actuelle : la rémunération plus élevée de certains actes rares compense la perte nette que provoquent d'autres actes, plus fréquents, rémunérés en-deçà de leur prix coûtant.

En effet, et ce point a été fortement souligné par les représentants des professions entendus par votre rapporteur, une application stricte de la règle du prix coûtant conduirait à un renchérissement considérable de nombreuses prestations délivrées aux citoyens. Une telle évolution serait contraire à l'objectif assigné au texte, d'une redistribution de pouvoir d'achat au profit de nos concitoyens. Votre rapporteur souligne, à cet égard, combien cette compensation implicite manifeste le service rendu par ces professions et leur rôle pour garantir l'accès au droit des justiciables.

Le présent article prévoit par conséquent, au nouvel article L. 444-2 du code de commerce, une dérogation - appelée, selon toute vraisemblance, à devenir régulière - aux critères du coût pertinent et de la rémunération raisonnable : le barème tarifaire pourrait mettre en place, pour chaque profession, une péréquation des tarifs applicables à l'ensemble des prestations qu'elles servent.

Il précise que cette péréquation peut notamment justifier que les tarifs sur les transactions immobilières soient fixés proportionnellement à la valeur du bien ou du droit en cause, si celle-ci est supérieure à un seuil fixé réglementairement.

Les députés ont complété ce dispositif de péréquation, à l'initiative de leurs rapporteurs. Souhaitant assurer la pérennité des petits offices notariaux, qui ne peuvent pas forcément compter sur un nombre suffisant de transactions immobilières, ils ont prévu la création d'un fonds national de péréquation interprofessionnelle , alimenté par un prélèvement sur les tarifs immobiliers précités.

Toutefois, si la rédaction retenue évoque l'idée d'une redistribution nationale des sommes écrêtées, elle ne mentionne, comme finalités, que le financement de l'aide juridictionnelle , de l'accès au droit et des maisons de justice et du droit .

Ceci traduit une confusion entre deux objectifs totalement différents : la péréquation interne aux professions, et le souhait de faire participer toutes les professions du droit au financement de l'aide juridique 111 ( * ) .

Les représentants du conseil supérieur du notariat entendus par votre rapporteur se sont étonnés de cette confusion entre deux logiques étrangères l'une à l'autre et ils ont marqué leur opposition à ce que le fonds de péréquation interprofessionnelle serve un autre objectif que cette péréquation entre offices.

Dans l'intention des auteurs du dispositif, le fonds serait commun à toutes les professions : chacune y abonderait et, dans des conditions non précisées, certaines en recevraient des subventions au profit de leurs professionnels les plus fragilisés. L'Assemblée nationale a repoussé des amendements contraires à cette logique qui visaient à remplacer cette inter-professionnalité par une intra-professionnalité , en organisant cette péréquation profession par profession.

D. Une négociabilité des tarifs à travers un mécanisme de corridor tarifaire ou de remise partielle

Initialement, le présent article tentait d'instaurer une marge de négociation sur les tarifs, en les établissant sous la forme d'une fourchette, avec une valeur minimale et une valeur maximale au plus deux fois supérieure à la première 112 ( * ) . Ce dispositif rompait avec le principe d'unicité de prix, sur l'ensemble du territoire, des émoluments perçus par les officiers publics ou ministériels.

Après l'avoir une première fois réduit en commission spéciale, les députés, à l'initiative de leurs rapporteurs, ont supprimé, avec l'avis favorable du Gouvernement, ce corridor tarifaire . Celui-ci est apparu incompatible avec certaines caractéristiques des fonctions d'officiers publics et ministériels.

En effet, en permettant aux professionnels de proposer des prestations au tarif maximum, il leur ouvrait la possibilité d'évincer, par une hausse du prix, certains clients, ce qui aurait été contraire à leur obligation d'instrumenter. En outre, les émoluments d'un huissier étant parfois acquittés par le débiteur de celui qui demande le recouvrement de sa créance, le professionnel et son client auraient pu s'entendre sur un prix plus élevé, payé par un tiers. Enfin, la possibilité d'imposer des tarifs plus élevés s'accommode mal du monopole territorial dont jouissent certains professionnels, comme les greffiers de tribunal de commerce.

Cette suppression du corridor tarifaire n'a cependant concerné que sa partie haute, puisque l'Assemblée nationale y a substitué une faculté de remise , fortement encadrée, qui doit répondre à trois conditions.

En premier lieu, elle ne peut concerner que les tarifs proportionnels sur des biens ou des droits immobiliers.

En second lieu, elle ne peut porter que sur des tarifs de moyenne gamme, dont le montant est compris entre deux seuils fixés par arrêté conjoint des ministres de la justice et de l'économie.

Enfin, le montant des remises octroyées doit être fixe et compris, lui aussi, dans des limites définies par voie réglementaire.

Votre rapporteur observe que ce dispositif, assez complexe, de remise encadrée est, sur certains points, en retrait par rapport aux règles en vigueur. Ainsi, les notaires peuvent-ils aujourd'hui librement consentir des remises sur leur part d'émoluments supérieurs à 80 000 euros 113 ( * ) , ainsi que sur ceux qu'ils touchent dans le cadre d'une négociation immobilière ou d'une transaction 114 ( * ) .

E. Des dispositions complémentaires ou de coordination

Afin de garantir la transparence des prix et de faciliter la mise en concurrence des professionnels, un nouvel article L. 444-3-1 adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, à l'initiative des rapporteurs, impose aux professionnels d'afficher les tarifs qu'ils pratiquent dans leur lieu d'exercice et sur leur site internet.

Cette disposition est partiellement redondante avec celle prévue au deuxième paragraphe (II.) du même article, qui soumet les professionnels concernés aux obligations d'information du consommateur et d'affichage du prix, applicables à tout prestataire de service en vertu de l'article L. 113-3 du code de la consommation.

Le troisième paragraphe du présent article (III.) abroge l'article 1 er de la loi précité du 29 mars 1944 sur les tarifs des émoluments alloués aux officiers publics ou ministériels, à compter d'une date fixée par décret, et au plus tard un an après la promulgation de la présente loi. Il s'agit de permettre le basculement de l'ancien système qui repose sur cet article 1 er de la loi du 29 mars 1944 vers le nouveau, en permettant au pouvoir réglementaire de prendre entre temps, les mesures nécessaires.

Outre plusieurs coordinations, destinées à substituer aux règles législatives existantes pour les administrateurs judiciaires, les mandataires judiciaires et les greffiers de tribunaux de commerce celles du nouveau dispositif créé, les dispositions restantes assurent l'application du présent article à Wallis-et-Futuna.

III - La position de votre commission

Votre commission spéciale reconnaît, comme les professionnels eux-mêmes, la nécessité d'une réévaluation régulière des tarifs , ainsi que l'intérêt qui s'attache à ce que la détermination des barèmes soit plus pertinente et plus transparente.

En revanche, elle marque ses réserves vis-à-vis de l'approche exclusivement économique qui inspire certaines des dispositions du présent texte. En effet, une telle approche prend insuffisamment en compte les missions particulières confiées aux professions concernées ainsi que les sujétions qui leur sont imposées. Or, votre commission estime que les missions de service public confiées aux officiers publics et ministériels et à certains auxiliaires de justice, le haut niveau de sécurité juridique qu'ils offrent à nos concitoyens, et le maillage territorial qu'ils assurent, justifient que, sans pour autant les soustraire au jeu d'une concurrence encadrée, leurs prix soient réglementés et qu'ils leur garantissent un juste niveau de rémunération.

Par conséquent, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté plusieurs amendements , qui traduisent les trois infléchissements qu'il lui a paru nécessaire de donner au présent texte.

• Tenir compte de la spécificité de l'activité juridique, qui n'est pas une marchandise comme les autres

Votre commission a tout d'abord adopté deux amendements destinés à réaffirmer la spécificité des prestations délivrées par les professions juridiques et judiciaires réglementées.

Le premier retire le dispositif proposé du code de commerce pour l'introduire, directement, au présent article. Tel a d'ailleurs été le choix du Gouvernement s'agissant du dispositif relatif à la liberté d'installation des officiers publics ou ministériels, qui a été intégré directement à l'article 17, puis 13 bis du texte, sans être ni codifié ni rattaché à une autre loi plus spécifique.

En effet, rien ne justifie ce rattachement au code de commerce. Le code du commerce régit les actes des commerçants . Or, l'appartenance à une des professions juridiques et judiciaires concernées est incompatible avec la qualité de commerçant .

Les rapporteurs à l'Assemblée nationale et le Gouvernement ont pris argument du fait que le code de commerce contient d'ores et déjà des dispositions relatives aux tarifs des greffiers de tribunaux de commerce et à ceux des administrateurs et mandataires judiciaires. Toutefois, ceci s'explique par le fait que le code de commerce définit les règles relatives au tribunal de commerce et aux procédures collectives, qui constituent le cadre d'exercice des professionnels concernés. Poussé à son terme, le même raisonnement imposerait de fixer les tarifs des huissiers de justice dans le code de procédure civile et celui des notaires dans le code civil. L'argument ne peut donc être retenu.

Surtout, l'effet symbolique de ce rattachement au code de commerce est de confondre les prestations juridiques offertes par les intéressés, en particulier celles constitutives de prérogatives de puissance publique, avec n'importe quel produit commercial. Votre commission a jugé cette confusion inadéquate.

Le deuxième amendement adopté par votre commission spéciale restitue au seul ministre de la justice la compétence pour arrêter le tarif des professions concernées, en supprimant celle, conjointe, du ministre de l'économie.

En effet, dans la mesure où le garde des sceaux demeure la seule autorité de tutelle de ces professions, rien ne justifie que soit reconnue, s'agissant des tarifs, une compétence résiduelle au ministre de l'économie, à moins que lui soit attribuée une compétence générale pour fixer les prix de toutes les professions réglementées, y compris ceux des professionnels de santé.

Aux yeux de votre commission, l'avis préalable de l'Autorité de la concurrence constitue une mesure suffisante pour apporter un éclairage plus objectif sur la structure des tarifs et leurs perspectives d'évolution, sans qu'il soit besoin d'y adjoindre l'appréciation du ministre de l'économie en plus de celui de la justice.

Enfin, un dernier amendement rappelle la règle selon laquelle, sauf disposition contraire, lorsqu'un professionnel est autorisé à exercer une activité dont la rémunération est fixée par un tarif propre à une catégorie d'auxiliaire de justice ou d'officier public ou ministériel, sa rémunération est arrêtée conformément aux règles dudit tarif. Ainsi, l'activité accessoire de prisée judiciaire des huissiers relève actuellement du tarif des commissaires-priseurs judiciaires, qui exercent cette activité à titre principal. De la même manière, les fonctions remplies par les administrateurs ou mandataires judiciaires donnent lieu à un émolument calculé sur la base du même tarif, lorsque les mêmes prestations sont accomplies par un autre professionnel.

• Garantir à tous les professionnels concernés une juste rémunération

Comme votre rapporteur l'a souligné précédemment, la notion de « rémunération raisonnable » n'est pas si claire que cela, les exemples généralement fournis montrant que, d'un texte à l'autre, sa définition varie. Surtout, ces définitions portent sur la vente de produits, alors qu'il s'agit ici d'une prestation de service.

Le rapport précité de l'Autorité de la concurrence propose de distinguer la rémunération raisonnable des investissements et celle du travail fourni par le professionnel, en évaluant cette dernière par rapport à d'autres professions comparables ou à l'exercice salarié de cette même profession. Votre rapporteur observe toutefois que, par rapport à d'autres professionnels libéraux, les officiers publics ou ministériels sont soumis à certaines sujétions de service public (comme l'obligation d'instrumenter, les restrictions d'installation ou de développement, les obligations d'archivage etc .) ou certaines limitations d'exercice qui doivent être compensées dans la rémunération qui leur est offerte. À cette fin, il a soumis à votre commission un amendement , qu'elle a adopté, précisant que la rémunération raisonnable tient compte de ces sujétions.

Un second amendement adopté par votre commission précise les modalités de consultation, par l'Autorité de la concurrence, des organisations professionnelles concernées, afin qu'elles puissent lui soumettre leurs observations sur la réévaluation des tarifs. Il procède en outre à une simplification de la rédaction retenue pour les articles du code de commerce relatifs à l'avis de l'autorité sur ces questions tarifaires.

• Renforcer le mécanisme de péréquation et éviter sa dénaturation

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a souhaité clarifier et généraliser l'exception de péréquation prévue au nouvel article L. 444-2 du code de commerce.

En effet, elle a tout d'abord observé, avec son rapporteur, que la rédaction retenue est manifestement très influencée par la situation des notaires, puisqu'elle ne retient que la possibilité d'une péréquation sur les tarifs des transactions immobilières. Or, si une telle péréquation est bien à l'oeuvre dans les études notariales, elle ne fonctionne pas à l'identique pour d'autres professions, dont certaines prestations rémunératrices peuvent porter sur des transactions mobilières (comme le recouvrement de créances pour les huissiers ou l'inscription de gage pour les greffiers de tribunaux de commerce).

Votre commission a par conséquent étendu, par amendement , le périmètre des actes rémunérateurs susceptibles de compenser le maintien de la tarification relative à d'autres prestations, à un prix inférieur au prix coûtant.

Votre commission s'est ensuite interrogée sur l'opportunité d'utiliser le fonds de péréquation interprofessionnelle créé par le présent texte au profit du financement de l'aide juridictionnelle et des maisons de justice et du droit.

Votre rapporteur a tout d'abord relevé que ces deux missions relevaient prioritairement de financements publics et qu'il s'agissait ici d'en faire porter le coût sur les professionnels et donc sur leurs clients. En outre, il a rappelé que la question d'une taxe sur la rédaction d'actes juridiques était débattue et qu'elle concernait la totalité des professions du droit, des avocats, non concernés par le présent dispositif, jusqu'aux notaires, en passant par les praticiens occasionnels du droit que sont, par exemple, les experts-comptables.

Pour cette raison, il lui est apparu contestable de soumettre d'ores et déjà certains professionnels à ce prélèvement obligatoire, alors que d'autres en seront dispensés.

Surtout, il a fait valoir qu'une telle disposition dénaturait le mécanisme du fonds interprofessionnel, qui est en principe destiné à assurer une subvention de financement au profit des professionnels contraints d'effectuer un nombre trop important d'actes à perte, grâce au prélèvement effectué sur ceux qui accomplissent un nombre suffisant d'actes très rémunérateurs.

Votre commission a par conséquent adopté son amendement supprimant la référence au financement de l'aide juridique , de l'accès au droit ou des maisons de la justice et du droit.

Le même amendement supprime le caractère interprofessionnel du fonds. En effet, la péréquation mise en oeuvre par le fonds peut se concevoir comme un correctif des insuffisances de la péréquation tarifaire, puisque cette dernière est construite pour un panier de prestations moyen. Or, ce panier ne constitue pas la réalité de l'activité de toutes les études : certaines bénéficieront d'un panier beaucoup plus rémunérateur et d'autres d'un panier bien moins profitable. La péréquation financière compense partiellement cette inégalité de situation. Il y a donc un lien entre péréquation tarifaire et péréquation financière et il est logique que l'une, comme l'autre, soit organisée spécialement au sein de chaque profession. Sinon, ceci revient à faire payer d'autres professionnels (et donc leurs clients) pour les imperfections du système de péréquation tarifaire retenu pour une seule profession.

Enfin, par coordination avec la position défendue par votre commission à l'article 13 bis , votre rapporteur a fait adopter un amendement étendant la compétence du fonds de péréquation interprofessionnelle à l'indemnisation des professionnels ayant subi un préjudice du fait de l'installation d'un nouveau concurrent . Ce dispositif évitera que celui qui crée un nouvel office doive assumer la charge d'indemniser lui-même ses confrères déjà en place, ce qui est anticoncurrentiel et prive d'effet la liberté d'installation reconnue au même article. Grâce au fonds de péréquation, cette indemnisation justifiée des professionnels sera financée par l'ensemble de leurs clients.

• Simplifier et encadrer le mécanisme de la remise tarifaire

Votre commission s'est enfin interrogée sur les conséquences du mécanisme de remise tarifaire adopté par les députés.

Comme votre rapporteur l'a souligné précédemment, il présente la particularité d'être en retrait par rapport à certaines possibilités offertes aujourd'hui aux notaires. En outre, il ne s'applique qu'aux transactions immobilières, laissant ainsi de côté tous les actes portant sur des biens mobiliers, même les plus rémunérateurs.

Surtout, il ne concernerait que des transactions portant sur des biens dont la valeur est comprise entre un seuil plancher et un seuil plafond, c'est-à-dire des transactions de moyenne gamme . Les transactions sur les biens de haut de gamme, les plus rémunératrices, sont ainsi mises à l'abri de toute concurrence par le biais de la remise.

Au contraire, les prestations de moyenne gamme, qui ne sont sans doute pas les plus rémunératrices, pourraient, elles, être soumises à cette remise. Or, il s'agit, bien souvent, de celles qui assureront, dans les petites études, l'équilibre économique de la structure. Paradoxalement, le mécanisme de la remise risque de mettre en péril les unités économiques les plus fragiles et de préserver les plus rentables.

Considérant ce mécanisme dangereux pour le maillage territorial des officiers publics ou ministériels et contraire au principe d'une juste concurrence encadrée, votre commission a adopté l' amendement de son rapporteur y substituant une remise possible, sur les droits proportionnels, immobiliers ou non, pour un émolument supérieur à un seuil fixé par arrêté ministériel.

Votre commission a par ailleurs supprimé la précision ajoutée par les députés selon laquelle le montant de la remise octroyée devrait lui-même être fixe et compris dans des limites fixées par voie réglementaire. En effet cette disposition qui pouvait se justifier lorsque le professionnel était autorisé à pratiquer des prix supérieurs à son tarif, dans le cadre du corridor tarifaire, puisqu'elle l'obligeait alors à imposer ce surcoût, également, à tous ses clients, n'a plus de raison d'être depuis la suppression de ce dispositif. Au contraire, elle limiterait considérablement l'intérêt de la remise.

Un autre amendement de votre commission a prévu de renvoyer à un décret en Conseil d'État, la détermination des autres types de remises qui peuvent être consenties par les intéressés lorsque les prestations auxquelles s'applique leur tarif entrent en concurrence avec d'autres prestations accomplies par des professionnels qui ne sont pas soumis, sur ce point, à un barème tarifaire. Cet amendement évitera que, par exemple, les notaires ne puissent plus consentir de remise en matière de négociation immobilière, alors que d'autres professionnels, avec lesquels ils sont en concurrence, comme les agents immobiliers, peuvent fixer plus librement leur rémunération.

• Coordinations diverses

Votre commission a procédé à quelques corrections d'ordre rédactionnel, notamment pour maintenir la soumission des administrateurs et des mandataires judiciaires à la règle, édictée à l'article L. 663-2 du code de commerce selon laquelle la rémunération perçue sur la base du tarif est exclusive de toute autre rémunération.

Elle a par ailleurs réécrit la disposition transitoire relative au passage du système tarifaire actuel au nouveau système en prévoyant que les tarifs établis sur la base de l'ancien mécanisme demeureraient en vigueur jusqu'à leur modification par les textes pris en application du nouveau tarif.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 13 (art. 1er, 5, 8, 8-1, 10 et 53 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et art. L. 141-1 du code de la consommation) - Postulation dans le ressort de la cour d'appel - Bureaux secondaires - Fixation des honoraires des avocats et suppression du tarif

Objet : le présent article modifie la réglementation qui régit les avocats sur trois points. Il étend à la cour d'appel le ressort de postulation des avocats, aujourd'hui limité au TGI ; il facilite la création de bureaux secondaires ; il impose l'établissement d'une convention d'honoraire et supprime le tarif de postulation.

I - L'extension à la cour d'appel du ressort de postulation des avocats et ses conséquences sur la création de bureaux secondaires

A. La modification proposée

On distingue généralement deux activités dans la pratique judiciaire des avocats : la plaidoirie, qui consiste à représenter et défendre des parties en justice, et la postulation. Cette dernière correspond au pouvoir de réaliser, au nom du plaideur, les actes de procédure que requiert son action en justice.

Longtemps les deux activités ont été distinguées parce qu'elles correspondaient chacune à une profession : la plaidoirie aux avocats, la postulation aux avoués près les tribunaux de grande instance ainsi qu'à ceux près les cours d'appel. Après la fusion des avocats avec ces deux professions, en 1971 pour les premiers et en 2011 pour les seconds, la distinction ne joue plus que pour déterminer la compétence territoriale des avocats 115 ( * ) .

Le principe, fixé à l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 116 ( * ) , est que les avocats peuvent plaider, sans limitation territoriale, devant toutes les juridictions françaises, alors qu'ils ne peuvent postuler que devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est établie leur résidence professionnelle, ainsi que devant la cour d'appel dont ce tribunal dépend.

Ainsi, l'avocat d'un plaideur attrait devant une autre juridiction que celle devant laquelle il est autorisé à postuler doit s'adjoindre l'aide d'un avocat du barreau concerné, afin que ce dernier puisse postuler à sa place. Ce recours à un avocat postulant est aux frais du plaideur.

Le présent article vise à élargir le périmètre de compétence de l'avocat à l'ensemble des tribunaux de grande instance de la cour d'appel , afin de simplifier la représentation des justiciables dans le ressort de cette cour et limiter les frais de procédure devant les juridictions concernées. Il modifie, pour ce faire, les articles 5 et 8, relatifs respectivement à la compétence territoriale de postulation des avocats et à celle des associations ou sociétés d'avocats 117 ( * ) . Il supprime par conséquent les dispositions spécifiques relatives à la multipostulation entre les TGI de Bordeaux et Libourne et ceux de Nîmes et d'Alès. En revanche, celles relatives à la multipostulation dans la région parisienne sont conservées, dans la mesure où elles couvrent deux ressorts de cour d'appel (Paris et Versailles).

Initialement, toute l'activité de postulation était concernée. Un amendement des rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale a toutefois exclu trois séries d'actes de cette extension de compétences de la postulation :

- les procédures de saisie immobilière, de partage et de licitation ;

- les actes accomplis par l'avocat au titre de l'aide juridictionnelle. Cette exception rend compte du fait que les obligations d'aide juridique sont organisées barreau par barreau ;

- les actes accomplis dans des affaires où l'avocat concerné n'est pas celui qui plaide. Il s'agit d'éviter qu'un avocat établi dans le ressort d'un TGI puisse postuler pour le compte d'un confrère d'une autre cour d'appel auprès d'un autre TGI que le sien.

Les rapporteurs thématiques ont fait valoir que ces exceptions étaient inspirées de l'expérience de la multipostulation limitée entre Bordeaux et Libourne, et Nîmes et Alès 118 ( * ) : les barreaux intéressés auraient estimé que c'était grâce à ces exceptions que les barreaux d'Alès et de Nîmes avaient pu se maintenir.

Votre rapporteur observe que ces exceptions ne sont pas récentes : elles s'appliquent, depuis 1971, à la multipostulation organisée dans le ressort des cours d'appel de Paris et de Versailles.

Jugeant souhaitable que le réseau privé virtuel des avocats, aujourd'hui calqué sur les limites actuelles de postulation, soit adapté pour intégrer l'extension proposée par le présent article, les députés ont repoussé d'un an l'entrée en vigueur de la présente disposition, à l'initiative des rapporteurs de leur commission spéciale.

B. La position de votre commission

Le présent dispositif pose une question délicate.

Sans être négligeables, les mérites qu'elle présente n'atteignent pas forcément l'ampleur que leur prête l'étude d'impact.

Certes, il sera plus simple pour le justiciable d'avoir un seul avocat plutôt que deux. Mais, bien souvent, son seul interlocuteur est celui qui le représente, le postulant n'étant en lien qu'avec cet avocat et n'interférant pas dans ses relations avec son client.

En outre, l'économie réalisée est limitée : le postulant est rémunéré sur la base d'un tarif et il est indifférent, de ce point de vue, que la somme soit payée directement à l'avocat chargé de la plaidoirie, parce qu'il sera aussi compétent pour postuler, ou à celui chargé de la postulation. Il est vrai cependant que, de plus en plus souvent, les avocats ne présentent même plus d'état de frais de postulation à leur clients : la rémunération des diligences de postulation est alors soit supprimée soit incluse forfaitairement dans les honoraires de plaidoirie.

Le principal intérêt de cette multipostulation dans le ressort d'une cour d'appel est la concurrence qu'elle favorise entre les différents professionnels, puisque ceux-ci pourraient étendre leur champ d'activité à d'autres tribunaux.

Toutefois, l'extension du ressort de postulation n'est pas sans risque pour la pérennité de certains barreaux . Les représentants du conseil national des barreaux et ceux de la conférence nationale des bâtonniers ont insisté sur ce point lors de leur audition. Ils ont notamment fait valoir que, même si elle constitue une part marginale de l'activité de certains cabinets d'avocats, la postulation pour le compte d'un confrère joue un rôle important pour l'équilibre financier de nombre de structures. En outre, elle leur permet de disposer d'une clientèle institutionnelle essentielle, les grandes entreprises s'efforçant d'avoir un correspondant avocat au sein de chaque barreau.

La représentante de la conférence nationale des premiers présidents de cour d'appel, Mme Dominique Lottin, s'est inquiétée des conséquences, sur le fonctionnement des plus petites juridictions, de la disparition de leur barreau ou de la réduction trop importante de leur effectif.

Le risque d'une dévitalisation de certains territoires doit être pris en considération.

Les enseignements livrés par la Chancellerie au rapporteur général de la commission spéciale de l'Assemblée nationale sur l'expérience de la multipostulation à Bordeaux et Libourne, et Nîmes et Alès, contredisent quelque peu l'appréciation globalement positive évoquée par les rapporteurs de cette même commission à l'appui de leur amendement relatif aux exceptions à l'extension de la multipostulation : « La Chancellerie a également indiqué à la mission que, bien que les dispositifs de multipostulation existants n'englobent pas l'ensemble du ressort d'une cour d'appel, la multipostulation effective dans les ressorts de Bordeaux-Libourne avait conduit à ce qu'environ 30 % des désignations par le bureau d'aide juridictionnelle portent sur des avocats du barreau de Bordeaux et que la vérification des dépens (état de frais de postulation) représenteraient le même pourcentage avec une augmentation marquée sur les derniers mois.

Selon la Chancellerie, le bâtonnier de Libourne aurait indiqué que ses confères avaient perdu depuis la mise en place de la multipostulation 70 à 80 % des dossiers de postulation.

Une note de l'observatoire du CNB du 7 octobre 2014 fait apparaître que dans le classement des dix barreaux dans lesquels les revenus moyens des avocats sont les plus faibles, on retrouve cinq des barreaux situés dans une zone de multipostulation : trois barreaux de la cour d'appel de Paris (Seine Saint-Denis, Val de Marne et Essonne), ainsi que les barreaux de Libourne et d'Alès ».

Certes, on peut espérer que les avocats des plus petits TGI gagnent en compensation des clients d'autres ressorts de tribunaux, mais ceci supposera l'établissement d'un bureau secondaire, avec le risque qu'à terme ils y transfèrent leur résidence professionnelle. Le maintien, à un effectif convenable, des barreaux concernés, dépendra de l'existence, sur place, d'une clientèle locale suffisante. Les données géographiques pourront aussi jouer leur rôle, notamment lorsque l'éloignement entre les juridictions rendra peu probable l'exercice de la profession à cheval entre le cabinet et le bureau secondaire.

Votre commission constate que le succès de la réforme n'est pas acquis et regrette le manque d'évaluations préalables . Attachée à la défense du maillage territorial, elle estime que la preuve doit d'abord être faite qu'il n'y sera pas porté atteinte et que le bénéfice qu'en tireront certains justiciables ne sera pas acquis au détriment d'autres qui verraient leurs avocats s'éloigner du tribunal dont ils dépendent.

Jugeant plus prudent de procéder par étape, elle a adopté l'amendement de son rapporteur donnant une portée expérimentale à la disposition. L'extension de la postulation au ressort de la cour d'appel serait ainsi testée, pendant cinq ans, dans deux ressorts de cour d'appel, afin qu'au terme d'une évaluation rigoureuse il soit décidé de la généraliser ou, au contraire, d'y mettre fin.

Votre rapporteur souligne que le recours à une expérimentation préalable est d'ailleurs au nombre des recommandations formulées par notre collègue députée Cécile Untermaier, dans le rapport de la mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur les professions du droit 119 ( * ) .

II - Un assouplissement du régime de création des bureaux secondaires

A. La modification proposée

Le droit en vigueur autorise les avocats à ouvrir des bureaux secondaires dans le ressort du TGI d'un autre barreau que le leur (article 8-1 de la loi précitée du 31 décembre 1971). Toutefois, cette création d'une structure secondaire est soumise au respect de trois conditions :

- en informer son conseil de l'ordre ;

- solliciter l'autorisation du conseil de l'ordre de l'autre barreau. Ce dernier statue dans les trois mois et son défaut de réponse vaut acceptation. Cette autorisation ne peut être refusée que pour des motifs tirés des conditions d'exercice de la profession dans le bureau secondaire ;

- l'avocat doit exercer, au sein de ce bureau secondaire, une activité professionnelle effective sous peine de fermeture sur décision du conseil de l'ordre du barreau dans lequel il est situé.

La réglementation est motivée par le souci d'éviter les adresses de façade, sans activité réelle.

Le projet de loi initial prévoyait d'instituer une totale liberté d'établissement de bureaux secondaires, en substituant à l'autorisation par le conseil de l'ordre du barreau en cause, une simple information de ce barreau. Il s'agissait, notamment, d'accompagner l'extension du champ de la postulation en permettant aux avocats d'ouvrir plus facilement un bureau dans le ressort des TGI auprès ils pourraient nouvellement postuler, ou, pour ceux qui auraient déplacé leur résidence professionnelle et se seraient inscrits à un nouveau barreau, de convertir leur ancien cabinet en bureau secondaire.

Un amendement des rapporteurs thématiques, adopté en commission spéciale, est revenu sur cette suppression de la procédure d'autorisation. Selon eux, la crainte que les conseils de l'ordre puissent opposer, en opportunité, des refus défensifs aux demandes de création d'un bureau secondaire qui leur serait adressées, n'est pas fondée : la jurisprudence rappelle bien que le seul critère sur lequel ils peuvent fonder ce refus est celui des conditions d'exercice de la profession dans le bureau secondaire.

En revanche, cet amendement a réduit de trois à un mois le délai d'instruction de la demande.

Par ailleurs, il a fait obligation aux avocats qui disposent d'un bureau secondaire en dehors du ressort de leur barreau de satisfaire à leurs obligations en matière d'aide judiciaire et de commission d'office dans chacun des TGI où ils sont établis. Le but est de garantir leur présence effective pour accomplir ces missions.

B. La position de votre commission

Votre commission a jugé raisonnable le maintien de l'autorisation d'ouverture d'un bureau secondaire, et acceptable le raccourcissement du délai dans lequel elle doit être prononcée.

En revanche, elle s'est interrogée, avec son rapporteur, sur l'obligation faite à l'avocat de satisfaire aux exigences de l'aide judiciaire dans tous les ressorts où il est implanté. Il lui est apparu que ce dispositif, dont la visée est légitime, puisqu'il s'agit de lutter contre les bureaux secondaires fictifs, faisant office de simples boîtes aux lettres, posait trois difficultés.

En premier lieu, il est contradictoire avec l'exception de postulation prévue aux nouveaux articles 5 et 8, puisque cette dernière interdit, en principe, à un avocat d'un autre barreau de postuler au titre de l'aide judiciaire.

En deuxième lieu, il soumet l'avocat au contrôle de deux bâtonniers différents, pour ce qui concerne sa contribution à l'aide judiciaire.

Enfin, il ne précise pas si l'intéressé voit ses obligations en matière d'aide judiciaire doublées, puisqu'il doit les satisfaire dans deux ressorts différents, ou si elles demeurent inchangées, l'avocat devant seulement les accomplir en deux endroits différents. Dans ce dernier cas, rien n'est dit non plus sur le mécanisme de répartition et la décision commune des bâtonniers concernés.

Par conséquent, elle a adopté l'amendement de son rapporteur supprimant cette disposition.

III - L'obligation d'établissement d'une convention d'honoraires et la suppression du tarif de postulation

A. La modification proposée

Le présent article aménage, à l'article 10 de la loi du 31 décembre précitée, le régime juridique des rémunérations perçues par les avocats.

L'honoraire devient la règle, quelle que soit la nature juridique de l'activité réalisée par l'avocat pour son client : postulation, consultation, assistance, conseil, rédaction d'acte juridique ou plaidoirie.

Ce faisant, il supprime les droits et émoluments de postulation perçus par l'avocat. Cette suppression répond à celle des mêmes droits et émoluments pour l'appel, consécutive à la fusion de la profession d'avocat et d'avoué. Elle entérine l'abandon progressif de cette rémunération par les avocats eux-mêmes, n'établissant plus d'états de frais relatif à cette postulation, lorsqu'ils assurent en plus la plaidoirie de la partie, préférant s'en tenir à leurs honoraires. Surtout, elle rend compte de la désuétude du tarif, qui n'a pas fait l'objet d'une revalorisation depuis un décret du 21 août 1975 120 ( * ) .

À l'initiative de nos collègues députés Colette Capdevielle et Martial Saddier et plusieurs de leurs collègues, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a apporté une exception à cette suppression, et maintenu le principe d'un tarif en matière de saisie immobilière et de sûretés judiciaires. Cette exception se justifie par le rôle particulier confié à l'avocat dans ces procédures, sous le contrôle du juge.

Le texte renvoie au décret les modalités de fixation du tarif. Actuellement, pour ces contentieux particuliers, le décret du 2 avril 1960 121 ( * ) renvoie au tarif des notaires.

La seconde modification affectant le cadre juridique de rémunération des avocats est la consécration de la convention d'honoraires. Aujourd'hui, celle-ci est facultative, sauf en matière de procédure de divorce, où elle est obligatoire depuis la loi du 13 décembre 2011 122 ( * ) .

Le présent article impose la conclusion d'une telle convention, sauf urgence ou force majeure ou lorsque la rémunération de l'avocat est totalement prise en charge par l'État au titre de l'aide juridique 123 ( * ) . Cette convention serait écrite et elle préciserait le montant des honoraires ou leur mode de détermination, en couvrant les diligences prévisibles 124 ( * ) ainsi que les divers frais et débours 125 ( * ) envisagés.

Le texte proposé reproduit par ailleurs les dispositions du droit en vigueur sur les critères de fixation des tarifs 126 ( * ) et l'encadrement des honoraires de résultats.

En revanche, il supprime les barèmes indicatifs des honoraires pratiqués par les avocats pour les procédures de divorce, qui devaient être publiés par le ministre de la justice après avis du conseil national des barreaux mais n'ont pu l'être, en raison de l'opposition de ce conseil à ce type de barèmes 127 ( * ) .

Le deuxième paragraphe du présent article soumet le respect par les avocats de l'obligation de convention d'honoraires au contrôle de la DGCCRF prévu au III de l'article L. 141-1 du code de la consommation. Les agents habilités de cette direction pourront utiliser la plupart des prérogatives d'enquête dont ils disposent en vertu des articles L. 450-1 et suivants du code de commerce : accès aux locaux professionnels, communication sur place, ou sur convocation, de tout renseignement ou document, ainsi que, dans le cadre d'enquête conduite par le ministre chargé de l'économie, saisie et perquisition, sous le contrôle du juge des libertés et de la détention. La DGCCRF pourra, en vertu du VII du même article L. 141-1 du code de la consommation, sanctionner les manquements constatés par une injonction administrative, puis une amende administrative, voire en saisir le juge civil (VIII du même article L. 141-1).

Une seule limite à ces pouvoirs d'investigation et de sanction a été apportée, en commission spéciale, à l'initiative des rapporteurs : le nécessaire respect du secret professionnel des avocats.

B. La position de votre commission

Votre commission a considéré que la suppression du tarif de postulation et l'obligation de convention d'honoraires constituaient des progrès. Toutefois, par coordination avec le maintien d'une compétence locale de postulation en matière non seulement de saisie immobilière mais aussi de licitation et de partage, elle a adopté un amendement ajoutant ces deux dernières prestations au nombre de celles qui, par exception, feront l'objet d'un tarif.

La disposition donnant compétence à la DGCCRF sur les conventions d'honoraires des avocats lui est quant à elle apparue présenter certains risques. D'une part, elle s'ajoute à la régulation ordinale, par le bâtonnier, au risque de la contredire. D'autre part, elle risque d'aboutir à une double sanction, disciplinaire et administrative, sans que soit prévue de coordination entre elles.

Surtout, votre commission a considéré, avec son rapporteur, que la seule réserve du secret professionnel, ne garantira pas qu'il n'y soit porté atteinte, dans la mesure où aucune garantie supplémentaire n'est ajoutée. En particulier, la présence du bâtonnier n'est pas prévue lors des perquisitions éventuelles.

En outre, d'un point de vue pratique, il est impossible d'apprécier si les honoraires ont bien été fixés conformément aux règles légales, sans examiner quelles diligences et quels travaux l'avocat a effectués. Or, ces diligences et ces travaux sont justement couverts par le secret professionnel : le contrôle exercé par la DGCCRF n'est pas seulement incompatible avec la régulation ordinale de l'activité d'avocat, il est aussi pratiquement impossible.

Pour ces raisons, votre commission a adopté l'amendement de son rapporteur supprimant cette disposition.

IV - Des dispositions de coordination

Les derniers paragraphes du texte sont consacrés à l'application outre-mer des dispositions modifiées (III.), ainsi qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon (III. bis ) 128 ( * ) .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 13 bis (art. L. 462-10 [nouveau] du code de commerce) - Liberté encadrée d'installation des notaires, des huissiers de justice et des commissaires-priseurs judiciaires

Objet : cet article, qui reprend le contenu de l'article 17 supprimé, instaure une liberté d'installation encadrée au profit des notaires, des huissiers de justice et des commissaires-priseurs judiciaires.

Dressant, dans l'étude d'impact, le constat d'une régression du nombre d'offices depuis trente ans (- 18 % entre 1982 et 2012 pour les offices d'huissiers de justice ; - 11 % pour ceux de notaires entre 1980 et 2012, avec seulement 17 offices créés chaque année en moyenne depuis cinq ans) et d'une divergence, dans certains départements, entre la densité des offices et celle de la population, le Gouvernement a jugé nécessaire, à l'article 17, de mettre en place une liberté encadrée d'installation des officiers publics ou ministériels 129 ( * ) , afin de favoriser l'implantation de nouveaux professionnels.

Les règles aujourd'hui en vigueur en matière de localisation
des offices publics ou ministériels

Nommés par arrêté du ministre de la justice, les officiers publics ou ministériels ne sont pas libres de s'installer où ils le souhaitent, ni de développer leur office au-delà des limites qui leur ont été assignées.

Les procédures de création, de transfert ou de suppression d'offices 130 ( * ) associent, sous l'autorité du ministre de la justice qui arrête la décision, les représentants ordinaux des professionnels concernés et, pour les professions d'huissiers et de notaires, une instance spécialisée, respectivement, la commission de localisation des offices d'huissiers de justice (CLHUJ) et la commission de localisation des offices de notaires (CLON).

Ces deux commissions, créées en 1986, sont chargées d'assister le ministre de la justice dans la gestion prévisionnelle de la localisation des offices, afin d'en adapter la carte à l'évolution géographique, économique et démographique, et garantir ainsi un maillage territorial conforme aux besoins du public.

Ces commissions de huit membres, composées à parité de représentants de la profession et de représentants de la justice ou de l'administration, établissent tout d'abord des prévisions quinquennales sur la localisation et le nombre des offices ou de professionnels, et formulent des recommandations adressées au ministre de la justice, qui les notifie, une fois approuvées, aux organismes professionnels. Ces prévisions sont établies à partir des données statistiques de l'INSEE ou du ministère de la justice, et, surtout, à partir des données fournies par les professions elles-mêmes 131 ( * ) .

Les mêmes commissions donnent un avis sur chaque projet de création, de transfert ou de suppression d'un office, ainsi que sur chaque projet d'ouverture d'un bureau secondaire ou de transformation d'un tel bureau en un office distinct.

Chaque année, le ministre de la justice arrête, au vu des propositions éventuellement formulées par la commission de localisation, la liste des offices qu'il envisage de créer et lance un appel à candidature. Puis il convoque les candidats répondant aux conditions requises à passer un examen. À l'issue de ce dernier, les candidats sont classés par la commission compétente selon la profession 132 ( * ) . Le garde des sceaux désigne le titulaire du nouvel office en suivant en principe l'ordre de classement.

La création de l'office peut donner lieu, six ans après, à une indemnisation versée aux confrères de l'impétrant, qui subissent un préjudice du fait de son installation. En l'absence d'accord amiable, le garde des sceaux fixe le montant et la répartition des indemnités.

Jamais, jusqu'à présent, ce mécanisme d'indemnisation n'a été mis en oeuvre.

Source : commission spéciale du Sénat

I - Une liberté d'installation encadrée

A. Le texte du Gouvernement

Initialement, le Gouvernement a proposé à l'article 17, aujourd'hui supprimé au profit du présent article, de confier aux ministres de l'économie et de la justice la charge d'établir une carte de l'implantation des offices , sur proposition de l'Autorité de la concurrence 133 ( * ) . Ceci signifie que les ministres ne pourraient qu'entériner cette proposition ou la refuser, sans pouvoir la modifier.

Cette carte distinguerait deux types de zones :

- celles où l'implantation est libre, parce que l'implantation actuelle des offices n'apparaît pas suffisante pour assurer une proximité convenable de service. Toutefois, la carte devrait prévoir une « montée en charge » progressive du nombre de zones d'implantation libre, afin de ne pas causer de préjudice anormal aux offices existants ;

- celles où elle serait de nature à porter atteinte à la continuité de l'exploitation des offices existants ou à compromettre la qualité du service rendu. Dans ces zones, le ministre pourrait refuser une demande d'installation, en raison, notamment, des caractéristiques du territoire et du niveau d'activité économique des professionnels concernés. Toutefois, il lui appartiendrait de solliciter auparavant l'avis de l'Autorité de la concurrence et de rendre cet avis public. En outre, à défaut de réponse dans les quatre mois, le silence du ministre vaudrait acceptation.

Votre rapporteur souligne que cette distinction ne rend pas compte de l'ensemble des situations possibles : il est tout à fait envisageable de concevoir des zones où l'implantation actuelle des offices permet d'assurer une proximité de service suffisante et où l'implantation d'un nouvel office, même s'il conduit à une réduction significative du chiffre d'affaires des autres offices, ne serait pas de nature à compromettre gravement leur exploitation ou la qualité de service offert. Aucune règle n'est donc définie pour de telles zones.

En l'absence de candidat dans les zones d'installation libre, le ministre de la justice devrait, après avis de l'Autorité de la concurrence, ouvrir un concours en vue d'une titularisation dans un office nouveau ou de la création d'un bureau annexe par un officier déjà titulaire. En cas d'échec du concours, il devrait confier la fourniture des services d'intérêt général à la chambre départementale des professionnels concernés, aux frais des officiers publics ou ministériels de son ressort.

Enfin, le texte initial du Gouvernement reprenait, en l'adaptant, le dispositif réglementaire 134 ( * ) d'indemnisation, par le créateur de l'office, des confrères auxquels son installation aurait porté préjudice. Ce préjudice aurait été calculé à partir de la dépréciation de la valeur patrimoniale de l'office qui résulte de la perte de chiffre d'affaires causée par la concurrence du nouvel arrivant.

À défaut d'accord, et contrairement au droit actuel, l'indemnisation devrait être fixée par le juge de l'expropriation 135 ( * ) . Un délai de six ans après l'installation du nouvel arrivant serait ouvert aux intéressés pour former leur demande d'indemnisation.

B. Les modifications apportées par les députés

En commission spéciale, à l'initiative de leurs rapporteurs, les députés ont basculé, en les modifiant sensiblement, ces dispositions de l'article 17 au présent article, afin qu'il précède les articles 14, 15 et 16, censés tirer les conséquences de ce nouveau dispositif, profession par profession.

Surtout, au-delà de corrections formelles nécessaires, l'Assemblée nationale y a apporté, en commission spéciale comme en séance publique, plusieurs modifications importantes.

En premier lieu, elle a introduit un second critère pour la délimitation des zones d'implantation libre : il s'agit non seulement de remédier à une faible proximité géographique des services, mais aussi à une offre insuffisante de services . Par ailleurs, elle a imposé que la carte énonce des recommandations sur le rythme d'installation compatible, dans les zones libres, avec une augmentation progressive du nombre de professionnels : il s'agit d'éviter qu'un afflux de demandes mal géré aboutisse à une concurrence effrénée, contraire aux intérêts de tous.

En deuxième lieu, les députés ont distingué dans deux parties différentes, la définition et le régime juridique applicable à la zone d'implantation libre (paragraphe I. et II.) et à celle où l'implantation peut être refusée (paragraphe III.).

En troisième lieu, nos collègues de l'Assemblée nationale ont limité le champ d'application de ce nouveau dispositif aux créations d'office . En effet, le terme « d'installation » employé à l'origine par le Gouvernement pouvait recouvrir aussi celui « d'association dans une structure déjà existante » ou de « reprise d'un office à céder ». Or, il aurait été contraire au principe du droit de présentation comme à la liberté contractuelle des associés, d'imposer aux uns et aux autres, au nom de la liberté d'installation, quelqu'un qu'ils n'auraient pas choisi.

Par ailleurs, nos collègues de l'Assemblée nationale, ont estimé, à juste raison, que le mécanisme de « nomination tacite », faute, pour le ministre de la justice, d'avoir répondu dans les délais, était incompatible avec la qualité et les pouvoirs que cette nomination conférait à l'officier public ou ministériel concerné. Ils l'ont par conséquent supprimé.

Les députés ont aussi souhaité que l'Autorité de la concurrence, avant de rendre son avis sur la carte des implantations d'office puisse recevoir les contributions éventuelles des associations de défense des consommateurs, des instances ordinales des professions, et tous les candidats potentiels. Ils lui ont imposé de rendre public, dans les cinq jours, l'engagement de la procédure d'avis sur la carte.

En outre, ils lui ont fait obligation, lorsqu'elle rend son avis, de formuler des recommandations de nature à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux offices publics ou ministériels.

Enfin, ils ont exclu l'application du présent article aux départements d'Alsace et à la Moselle, dans la mesure où l'installation des officiers publics ou ministériels répond à un autre système que celui en vigueur dans le reste de la France : le droit de présentation n'y existe pas, ce qui fait que les offices sont, sans exception, pourvus par concours. Toutefois les députés ont prévu de demander au Gouvernement un rapport sur l'opportunité d'étendre l'application du présent dispositif à ces départements.

II - La position de votre commission

Votre commission constate que le projet de loi instaure une liberté d'installation encadrée , limitée exclusivement aux zones où la proximité ou l'offre de service sont insuffisantes.

Marquant son accord avec cette ambition raisonnable, elle a toutefois jugé nécessaire, à l'initiative de son rapporteur, de modifier sensiblement le dispositif proposé, selon quatre directions.

• Réaffirmer la compétence du ministre de la justice et clarifier le rôle de l'Autorité de la concurrence

Conformément à son vote à l'article 12, votre commission a supprimé, par amendement , la compétence du ministre de l'économie pour établir, avec le ministre de la justice, la carte des zones carencées en offices publics ou ministériels. En effet, votre rapporteur observe, d'une part, que le ministre de l'économie n'est pas le ministre responsable de la régulation de ces professions et, d'autre part, que l'approche économique est suffisamment représentée par l'Autorité de la concurrence.

Un autre amendement de votre commission remplace le pouvoir de proposition de cette dernière autorité par un avis simple . Ce pouvoir de proposition, qui liait nécessairement la compétence du ministre de la justice, lui est en effet apparu incompatible avec la portée donnée par le présent texte à la définition des zones qui en résulte. La concurrence ou la libre installation ne sont pas les seuls impératifs à prendre en considération lorsqu'il s'agit de décider s'il convient de nommer quelqu'un dans un office public : la sécurité juridique doit pouvoir éventuellement primer et il revient au ministre de la justice d'en décider, suivant les circonstances.

Surtout, votre commission a considéré qu'on ne pouvait séparer responsabilité et décision . S'il revient, ce que nul ne conteste, au ministre de la justice d'être l'autorité de tutelle des officiers publics ou ministériels, son pouvoir d'appréciation ne peut être transféré à une autre autorité, qui lierait sa décision sans en assumer elle-même la responsabilité.

Par ailleurs, un amendement de votre commission a clarifié la procédure selon laquelle l'Autorité de la concurrence livre ses avis sur la liberté d'installation, en réaffirmant le pouvoir de saisine du ministre de la justice ainsi que la possibilité pour l'autorité de présenter elle-même ses recommandations. En revanche, votre commission a supprimé la précision selon laquelle l'autorité devait aussi formuler des recommandations relatives à l'égal accès des femmes et des hommes aux offices publics ou ministériels : une telle appréciation ne relève absolument pas de son champ de compétence et risquerait de faire perdre à ses observations la légitimité que lui gagne son expertise.

Enfin, votre commission a adopté des amendements identiques de nos collègues Philippe Adnot, Vincent Delahaye, Jacqueline Deromedi, Didier Mandelli, Jacques Mézard et Henri Tandonnet tendant à imposer une analyse économique et pas exclusivement démographique de l'évolution prévisible du nombre de professionnels installés, pour délimiter les zones carencées.

• Aménager la procédure de libre installation pour tenir compte des demandes concurrentes

Votre rapporteur observe que le présent article n'évoque pas la situation de concurrence de demandes à laquelle, dans les zones de libre installation, le garde des sceaux pourrait être confronté. Or, comment concilier dans ce cas le principe de libre installation et la régulation de l'offre de service qui peut être compromise si plusieurs offices sont créés au même endroit ?

Votre commission a par conséquent adopté à son initiative un amendement qui prévoit que le ministre de la justice mette les demandeurs en concours, afin de les classer par ordre de mérite, avant de désigner ceux qui pourront créer un office. De la même manière, il est nécessaire de prévoir la situation dans laquelle, compte tenu des créations déjà intervenues, l'offre ou la proximité de services est devenue satisfaisante, avant que la carte ait été révisée. Dans ce cas, votre commission propose de donner au ministre de la justice toute latitude pour refuser les demandes d'installation qui lui seraient encore adressées. Le ministre pourra d'ailleurs être guidé dans son appréciation par les recommandations sur l'augmentation progressive du nombre d'offices à créer.

• Clarifier le régime applicable aux zones intermédiaires

Comme on l'a vu précédemment, le dispositif retenu par le Gouvernement et les députés distingue deux zones et en laisse une troisième dans l'ombre : entre les zones où la proximité ou l'offre de services est insuffisante et celles où la création d'un nouvel office porterait atteinte à l'exploitation des offices existants et compromettrait la qualité du service rendu, il y a celles où l'offre de service est satisfaisante et où un office pourrait être créé, sans forcément compromettre la qualité du service ni porter atteinte à l'exploitation d'autres offices.

Dans le silence du texte, on ne sait pas si le ministre de la justice pourrait, alors, refuser une nouvelle demande de création d'un office.

Une telle lacune du texte pose le question de la conformité de cette disposition à la Constitution, compte tenu de la jurisprudence constitutionnelle sur l'incompétence négative du législateur.

Il est apparu à votre commission raisonnable de combler cette lacune et de conserver, dans ce cas-là, au ministre un réel pouvoir d'appréciation. En effet, l'installation d'un concurrent créera un préjudice pour les offices déjà en place qu'il conviendra de réparer. En outre, dans un secteur déjà correctement pourvu, il est légitime que le ministre influe sur les choix de localisation de l'intéressé, dans la mesure où cette zone intermédiaire n'est pas aussi correctement définie que les zones carencées.

D'ailleurs, le ministre pourrait être utilement guidé dans son appréciation par l'avis préalable de l'Autorité de la concurrence.

Ainsi, votre commission a estimé qu'il n'y avait pas lieu de traiter différemment ce troisième type de zone du second, et elle a adopté un amendement les soumettant au même régime d'autorisation décidée par le ministre de la justice.

• Renforcer le dispositif indemnitaire

Votre commission a adopté deux amendements sur cette question.

Conformément à son vote sur l'article 12, votre commission a prévu la prise en charge totale, par le fonds de péréquation professionnelle, de l'indemnisation que le nouvel officier public ou ministériel doit à ses concurrents que la création de son office a lésés. Cette mesure permettra que la profession, dans son ensemble, participe à l'installation de nouveaux professionnels.

Par ailleurs, votre commission a remplacé le renvoi, en cas de désaccord sur l'indemnisation, au juge de l'expropriation par un renvoi au tribunal de grande instance, juge de droit commun. Il s'agit en effet d'un contentieux indemnitaire entre personnes privées, qui porte sur un préjudice financier en raison de la captation d'une part de chiffre d'affaires. Le juge de l'expropriation ne paraît pas le plus adapté, lui qui connaît traditionnellement d'affaires qui opposent la puissance publique aux particuliers et qui portent avant tout sur une privation de propriété.

• Coordinations et dispositions diverses

Outre plusieurs amendements rédactionnels, votre commission a différé l'entrée en vigueur du présent article afin de la coordonner avec celle des articles 14 à 16 qui déclinent chacun, dans le texte propre à chacune des professions, les principes établis au présent article.

Par ailleurs, conformément à la position qu'elle a adoptée sur les demandes de rapport adressées au Gouvernement, elle a supprimé celle relative à l'examen de l'opportunité de l'extension en Alsace et en Moselle du dispositif proposé.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 14 (art. 2, 4, 10, 52 et 68 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat) - Application aux notaires du principe de liberté encadrée d'installation - Limite d'âge pour l'exercice de cette profession - Suppression de la possibilité d'habilitation des clercs

Objet : cet article, d'une part, applique aux notaires les principes de liberté encadrée d'installation établis à l'article précédent, d'autre part, instaure une limite d'âge de soixante-dix ans pour l'exercice de cette profession. Enfin, il supprime le dispositif d'habilitation des clercs qui permet au notaire d'autoriser ceux-ci à procéder à la lecture des actes et à recueillir la signature des parties.

I - Les modifications proposées

A. L'application aux notaires du principe de liberté encadrée d'installation

Dans le projet de loi initial, le présent article posait, à l'article 4 de la loi du 25 ventôse an XI 136 ( * ) , le principe selon lequel le ministre de la justice devait obligatoirement faire droit aux demandes d'installation d'une personne répondant aux conditions de nationalité, d'aptitude, d'honorabilité, d'expérience et d'assurance requises. Le même article rappelait, par renvoi au dispositif de l'article 17, d'une part, les conditions dans lesquelles un appel à candidature doit être organisé dans les zones carencées, et, d'autre part, celles dans lesquelles la nomination peut être refusée dans les autres zones.

Les votes intervenus à l'Assemblée nationale ont rendu cette disposition, qui a été adaptée en conséquence, redondante avec celles de l'article 13 bis. La règle selon laquelle il est fait droit aux demandes d'installation dans une zone carencée, d'une personne répondant aux exigences requises, est donc énoncée deux fois : une fois à l'article 13 bis , pour les notaires, les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice et une fois, pour chaque profession, dans un article particulier de leurs textes constitutifs.

Votre rapporteur souligne que la rédaction retenue pour cet article 4 supprime l'obligation de résidence à laquelle les notaires étaient jusqu'à présent tenus.

La nouvelle rédaction de l'article 4 entrerait en vigueur un an après la promulgation de la loi.

B. L'instauration d'une limite d'âge pour l'exercice de la profession de notaire

Aux termes de l'article 2 de la loi précitée du 25 ventôse an XI, les notaires sont nommés « à vie ». Ils peuvent toutefois prendre leur retraite et être autorisés, par le ministre de la justice, à cesser leur activité.

S'inspirant du dispositif de droit local en vigueur en Alsace et en Moselle, les rapporteurs thématiques ont proposé à la commission spéciale de l'Assemblée nationale d'introduire une limite d'âge de soixante-dix ans pour l'exercice des fonctions de notaire.

Afin d'éviter une vacance d'office, les titulaires qui auraient dépassé cet âge pourraient être autorisés à continuer d'exercer leurs fonctions, jusqu'au jour où leur successeur prêtera serment, pour une durée qui ne pourra excéder six mois.

On compte aujourd'hui 131 notaires âgés de plus de 70 ans, ce qui représente 1,40 % du nombre total de notaires, et 1 624 notaires âgés de plus de 60 ans et de moins de 70 ans, ce qui représente 17,4 % de l'effectif de la profession. Les auteurs de cet amendement ont estimé qu'il fallait, « dans un souci d'équité générationnelle », faciliter l'entrée de jeunes professionnels.

Les députés ont aussi étendu aux notaires d'Alsace et de Moselle la limite à six mois, de la durée d'exercice des fonctions dans l'attente de la prestation de serment du successeur.

Le présent dispositif entrerait en vigueur un an après la promulgation de la loi.

C. Suppression de la possibilité d'habilitation des clercs

À l'initiative de ses rapporteurs thématiques, la commission spéciale a proposé de mettre fin à la possibilité donnée aux notaires par l'article 10 de la loi précitée du 25 ventôse an XI, d'« habiliter un ou plusieurs clercs assermentés à l'effet de donner lecture des actes et des lois et recueillir les signatures des parties ».

En principe seul un notaire peut accomplir les formalités propres aux actes authentiques, comme la lecture aux parties ou le recueil de leur consentement ou de leur signature. L'habilitation permet au notaire titulaire de l'office de confier ce soin à un clerc assermenté, à charge pour lui ensuite d'apposer sa signature, qui conférera alors à l'acte un caractère authentique, comme s'il avait procédé lui-même depuis le début.

Ce dispositif permet ainsi à un même notaire d'augmenter sensiblement le nombre d'actes authentiques qu'il peut émettre, en le déchargeant de l'accomplissement de certaines formalités chronophages 137 ( * ) .

Reprenant les analyses déjà formulées par la mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur les professions juridiques réglementées 138 ( * ) , ainsi que par le rapport précité de l'Autorité de la concurrence 139 ( * ) , les rapporteurs de la commission spéciale ont estimé qu'un tel dispositif était un frein à l'accès de jeunes professionnels au notariat salarié, puisque le titulaire de l'office pouvait habiliter autant de clercs qu'il le souhaitait et éviter ainsi de recruter des notaires salariés pour accomplir les actes qu'il n'a pas le temps d'accomplir lui-même.

Sa suppression est donc motivée par le souci de faciliter l'accès au salariat des notaires stagiaires, en créant un appel d'air au sein des offices, en forçant les titulaires de l'office à recruter des professionnels salariés afin de maintenir le même niveau d'activité que leur permettait d'atteindre le mécanisme des clercs habilités.

Le texte prévoit une période transitoire de six mois, pour permettre aux clercs habilités, qui souvent disposent, en tant que notaires stagiaires, des diplômes et de l'expérience requis pour être nommés notaires, de préparer leur intégration dans la profession.

La suppression de l'habilitation entrerait en vigueur un an après la promulgation de la loi, afin de laisser le temps aux intéressés de préparer leur reconversion.

D. Coordinations outre-mer

Enfin, le présent article procède à une correction nécessaire de l'article 68 de la loi du 25 ventôse an XI, relatif à l'applicabilité de la loi à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Mayotte étant devenue un département français cette mention n'est plus nécessaire, pas plus que pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Seule la mention de la spécificité de l'organisation juridictionnelle de cette dernière collectivité doit être conservée, puisqu'un tribunal de première instance y tient lieu de tribunal d'instance et de tribunal de grande instance.

II - La position de votre commission

Votre commission a adopté plusieurs amendements de son rapporteur.

Tirant les conséquences de son vote à l'article 13 bis , votre commission a tout d'abord rectifié la rédaction proposée pour l'article 4 de la loi du 25 ventôse an XI, afin, d'une part, de rappeler la compétence du ministre de la justice pour nommer les notaires et arrêter les créations, les transferts ou les suppressions d'office, et, d'autre part, de préciser, par renvoi au dispositif de l'article 13 bis du présent texte, les conditions dans lesquelles il fait droit ou refuse la création d'un nouvel office.

Ce renvoi évite l'effet de redondance qu'entraînait la répétition à l'article 4 précité de la rédaction retenue à l'article 13 bis du présent projet de loi.

Votre commission a jugé l'instauration d'une limite d'âge pour l'exercice des fonctions de notaire opportune. Toutefois, elle a supprimé , en raison des inconvénients qu'elle présente, la limitation à six mois de la durée pendant laquelle le notaire de plus de soixante-dix ans peut rester en fonction dans l'attente de la prestation de serment de son successeur. En effet, l'application stricte de cette règle, dans des zones où le ministre de la justice peinerait à susciter des vocations, pourrait conduire à la vacance de l'office, alors même que le titulaire serait d'accord pour continuer d'exercer ses fonctions. En outre, le ministre de la justice dispose de toutes les prérogatives nécessaires pour surmonter l'inertie d'un notaire qui refuserait de passer le flambeau à son successeur.

S'agissant de l'habilitation de certains clercs, votre rapporteur note que ce dispositif entre en concurrence avec l'exercice salarié de la profession notariale. Poser la question de sa suppression est donc légitime.

Il observe toutefois qu'on ne peut exclure que cette suppression prive certains clercs, qui ne souhaitent pas, ou ne peuvent pas prétendre à devenir notaire, d'une part importante de leur activité.

En outre, dans les premiers temps, la réforme tarifaire risque de placer les offices dans une situation d'incertitude sur l'évolution de leur rémunération. Une telle situation n'est manifestement pas favorable à l'investissement ni au recrutement de nouveaux salariés ou d'associés.

On ne peut exclure que ce contexte contrecarre l'effet d'appel d'air que la suppression de l'habilitation tente de susciter en forçant les notaires à recruter des notaires salariés afin de maintenir le même niveau d'activité que précédemment.

Votre commission spéciale a jugé préférable d'étaler dans le temps les effets de cette réforme, afin d'éviter qu'elle manque son but, faute d'avoir pris le temps nécessaire pour l'atteindre correctement. À l'initiative de son rapporteur elle a donc adopté un amendement rendant immédiate la suppression de la faculté d'habilitation mais conservant, pour cinq ans, les effets des habilitations conclues avant le 1 er janvier de cette année.

Ce délai de cinq ans devrait être suffisant aux titulaires d'offices pour faire des choix d'investissement ou de recrutement conformes aux nouvelles conditions de la rentabilité de leurs structures. Il devrait aussi permettre aux clercs qui n'auraient pas encore le diplôme de notaire de préparer les conditions de leur recrutement en qualité de notaire salarié ou leur installation.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 15 (art. 3, 4 et 4 bis de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers) - Application aux huissiers du principe de liberté encadrée d'installation - Extension du ressort de compétence des huissiers - Limite d'âge pour l'exercice de cette profession

Objet : cet article, comme le précédent pour les notaires, applique aux huissiers de justice le principe de liberté encadrée d'installation et instaure une limite d'âge pour l'exercice de cette profession. Il procède aussi à une extension de leur ressort de compétence.

I - Les modifications proposées

• Application aux huissiers de justice du principe de liberté encadrée d'installation

Le présent article réalise la même modification que le précédent pour les notaires en rappelant, dans un nouveau chapitre I er bis de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers les nouvelles règles applicables en matière de libre installation et de nomination des huissiers de justice.

• Limite d'âge pour l'exercice de la profession d'huissier de justice

À l'initiative de leurs rapporteurs, les députés ont transposé aux huissiers de justice, comme ils l'ont fait pour les notaires à l'article 14, la limite d'âge de soixante-dix ans, pour l'exercice de la profession, qui s'applique en Alsace et en Moselle.

Ils ont aussi limité à six mois la durée pendant laquelle le professionnel concerné peut continuer d'exercer dans l'attente de la prestation de serment de son successeur.

• Extension du ressort de compétence des huissiers de justice

Le ressort de compétence territoriale des huissiers a progressivement augmenté depuis moins de dix ans 140 ( * ) . Initialement confiné au ressort du tribunal d'instance près duquel ils étaient établis, il a été une première fois étendu au tribunal de grande instance en 2009 141 ( * ) , puis, il y a quelques mois à peine, à celui du département où ils ont leur résidence 142 ( * ) .

Ce ressort de compétence concerne à la fois les activités du monopole des huissiers que sont les significations (premier alinéa de l'article 1 er de l'ordonnance précitée du 2 novembre 1945) 143 ( * ) , le recouvrement judiciaire des créances, les constats qu'ils peuvent dresser et les mesures conservatoires après l'ouverture d'une succession, ainsi que des activités hors monopole, comme le recouvrement amiable des créances ou les ventes volontaires ou judiciaires de meubles (deuxième alinéa de l'article 2 de ladite ordonnance).

S'agissant de leur service d'audience, celui-ci s'effectue au sein de la cour ou du tribunal auprès duquel ils sont établis.

Enfin, aucun ressort n'est mentionné pour les autres activités qu'ils accomplissent à titre accessoire, comme l'administration d'immeubles.

Le projet de loi vise à étendre une nouvelle fois le ressort de compétence des huissiers de justice. Le but est de permettre à certaines structures de se développer en allant conquérir des marchés situés en dehors de leur ressort actuel, soit sur des concurrents, soit dans des endroits aujourd'hui délaissés.

Pour ce faire, le présent article élève au niveau législatif les règles de compétence territoriale des huissiers de justice. Le nouveau dispositif mis en place à l'article 3 de l'ordonnance précitée du 2 novembre 1945 distingue deux cas.

Le premier est celui du monopole de signification d'actes et de décisions de justice. Le ressort est étendu du département à la cour d'appel.

Le second est celui des autres activités en monopole ou hors monopole , y compris les activités pratiquées à titre accessoire. Le ressort serait alors national.

Conscient que le changement d'échelle proposé, qui survient quelques mois à peine après un précédent changement, nécessitait de donner plus de temps à la réforme, les rapporteurs thématiques ont proposé de repousser d'un an après la promulgation du présent texte, l'entrée en vigueur des règles de compétence territoriale.

La nouvelle rédaction retenue pour l'article 3 renvoie par ailleurs à un décret en Conseil d'État la définition des conditions d'aptitude à la fonction d'huissier, du ressort territorial de leur obligation de prêter leur ministère ou leur concours 144 ( * ) , des règles applicables à leur résidence professionnelle, des modalités suivant lesquelles ils peuvent être admis à constituer des groupements ou des associations, et, enfin, de leurs obligations professionnelles.

En séance publique les députés ont précisé, à l'initiative de leur commission spéciale, que ce décret devrait notamment fixer les conditions de reconnaissance de l'expérience professionnelle des clercs salariés pour l'accès à la profession d'huissiers. En effet, les rapporteurs thématiques ont fait valoir que cette profession était la seule qui ne prévoyait pas une telle voie d'accès à la profession.

II - La position de votre commission

Par cohérence avec les positions qu'elle a retenues à l'article 14 pour les notaires votre commission a adopté deux amendements tendant, pour le premier à procéder à une réécriture de la disposition relative au pouvoir de nomination du garde des sceaux afin d'éviter les redondances avec l'article 13 bis , et, pour le second, à supprimer la limitation à six mois de la durée pendant laquelle un officier public ou ministériel peut continuer d'exercer, passé soixante-dix ans, dans l'attente de la prestation de serment de son successeur.

Votre rapporteur s'est interrogé sur la pertinence de la nouvelle extension de ressort de compétence retenue pour les huissiers de justice : en modifier aussi considérablement le tracé, six mois à peine après une première réforme, n'est pas forcément de bonne méthode. Certains professionnels ont pu investir, afin d'ouvrir des bureaux secondaires et leurs projets pourraient être remis en cause.

Toutefois, il observe que, lors de leur audition, les représentants de la chambre nationale des huissiers de justice n'ont pas contesté le principe de cette réforme, mais qu'ils ont seulement émis le voeu qu'elle soit différée jusqu'au 1 er janvier 2017, afin de permettre à chacun de s'y préparer. Votre commission a adopté un amendement en ce sens.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 16 (art. 1er-1, 1er-1-1 et 1er-1-2 [nouveaux], 1er-2, 1er-3, 2 et 12 de l'ordonnance du 26 juin 1816 qui établit, en exécution de la loi du 28 avril 1816, des commissaires-priseurs judiciaires dans les villes chefs-lieux d'arrondissement, ou qui sont le siège d'un tribunal de grande instance, et dans celles qui, n'ayant ni sous-préfecture ni tribunal, renferment une population de cinq mille âmes et au-dessus, art. 56 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques)
Application aux commissaires-priseurs judiciaires du principe de liberté encadrée d'installation - Autorisation d'installation des bureaux secondaires - Limite d'âge pour l'exercice de cette profession

Objet : Comme les précédents, le présent amendement tire les conséquences, pour les commissaires-priseurs judiciaires de l'instauration d'une liberté d'installation encadrée et il les soumet par ailleurs à une limite d'âge pour l'exercice de la profession. Il prévoit par ailleurs de faciliter l'ouverture de bureaux secondaires.

I - Les modifications proposées

• Application aux commissaires-priseurs judiciaires du principe de liberté encadrée d'installation

Comme les deux précédents, le présent article intègre, dans un nouvel article 1 er -1-1 de l'ordonnance statutaire des commissaires-priseurs judiciaires 145 ( * ) , le dispositif de libre installation encadrée prévu à l'article 13 bis du projet de loi.

Il maintient les précisions relatives à la création, au transfert ou à la suppression d'un office, fixées à l'article 1 er -1 de l'ordonnance du 26 juin 1816, en supprimant toutefois l'alinéa qui prévoit que la création intervient après avis de la chambre nationale et de la chambre de discipline du ressort où est prévue cette création. Il supprime aussi la limitation, dans le périmètre du département, des transferts d'office.

Alors que le projet initial ouvrait la possibilité à un même titulaire de détenir plusieurs offices, des amendements des rapporteurs thématiques et de plusieurs autres députés sont intervenus pour conserver le dispositif en vigueur depuis 2005, qui limite cette faculté à deux offices pour un même titulaire. Nos collègues députés ont en effet estimé que si cette disposition vise à mieux répondre au problème des déserts juridiques, aller plus loin risquerait de conduire à des positions dominantes de certains professionnels.

• Limite d'âge pour l'exercice de la profession

De la même façon qu'aux articles précédents, l'Assemblée nationale a choisi d'instaurer, à l'initiative de ses rapporteurs, une limite d'âge pour l'exercice de la profession de commissaire-priseur judiciaire, fixée, comme en Alsace et en Moselle, à soixante-dix ans.

• Autorisation d'installation de bureaux secondaires

Le projet de loi initial prévoyait, comme à l'article 13 pour les avocats, de substituer au régime d'autorisation d'ouverture d'un bureau secondaire, prévu à l'article 12 de l'ordonnance du 26 juin 1816, un régime déclaratif, qui aurait permis aux intéressés d'installer un nouveau bureau n'importe où sur le territoire, après en avoir seulement informé les procureurs généraux de la cour d'appel où leurs offices sont situés et de celle où leurs bureaux doivent être établis.

En séance publique, nos collègues députés ont adopté un amendement de leurs rapporteurs revenant au principe de l'autorisation d'ouverture. Ils ont craint, en effet, que cette disposition profite avant tout aux professionnels les mieux établis et favorise la constitution de très puissants offices. Le dispositif qu'ils ont retenu s'articule toutefois avec celui de l'article 13 bis , puisqu'il prévoit que, lorsque dans les zones carencées le ministre de la justice aura, faute de candidats à l'installation, lancé un appel à manifestation d'intérêt, cet appel vaudra autorisation d'ouvrir un bureau annexe.

• Coordinations diverses

Le présent article adapte le texte de l'ordonnance de 1816, pour tenir compte du fait, à l'article 3 de cette ordonnance, que Mayotte est devenue un département français et que la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon relève du droit commun en la matière.

Le deuxième paragraphe du présent article repousse d'un an l'entrée en vigueur du dispositif de libre installation encadrée ainsi que celui relatif à l'instauration d'une limite d'âge. Le troisième, introduit à l'initiative des rapporteurs thématiques, met en oeuvre une coordination rendue nécessaire par la suppression, à l'article 2 de l'ordonnance du 26 juin 1816, du dispositif d'indemnisation des offices lésés par l'installation d'un nouveau concurrent, et son remplacement par celui de l'article 13 bis du présent projet de loi.

II - La position de votre commission

Votre commission a adopté les deux mêmes amendements qu'aux articles précédents, consistant, pour le premier à procéder à une réécriture de la disposition relative au pouvoir de nomination du garde des sceaux afin d'éviter les redondances avec l'article 13 bis , et, pour le second, à supprimer la limitation de la durée pendant laquelle l'officier de plus de soixante-dix ans peut continuer à exercer dans l'attente de la prestation de serment de son successeur.

Elle a par ailleurs remplacé, à l'initiative de son rapporteur, la facilité d'installation d'un bureau secondaire dans les zones carencées par un mécanisme d'autorisation implicite, au terme d'un délai de deux mois, valable même en dehors de ces zones.

En effet, votre rapporteur a observé que le dispositif retenu par l'Assemblée nationale posait un problème, puisqu'il pouvait conduire à ce que, lors de l'appel à manifestation d'intérêt, plusieurs professionnels décident de s'implanter sans que le procureur général, compétent en principe pour décider de cette installation, puisse s'y opposer puisque l'autorisation sera réputée avoir été donnée. En outre, on ne peut exclure que l'ouverture de nouveaux bureaux annexes dissuade des commissaires-priseurs d'y installer un office, ce qui irait contre l'objectif recherché.

Il est préférable de privilégier un mécanisme d'autorisation implicite , en l'absence de réponse, semblable à celui prévu pour les avocats 146 ( * ) . Votre commission a retenu un délai de deux mois , double de celui applicable aux avocats, parce que le procureur général doit solliciter l'avis des chambres de discipline dans le ressort desquelles sont situés l'office et le bureau annexe. Il est donc nécessaire d'en tenir compte dans la fixation du délai. L'amendement adopté par votre commission prévoit d'ailleurs qu'à défaut d'avis rendu dans le mois, cet avis des chambres de discipline est réputé favorable.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 16 bis (art. L. 741-1 du code de commerce) - Limite d'âge pour l'exercice de la profession de greffier de tribunal de commerce

Objet : le présent article vise à soumettre les greffiers de tribunaux de commerce, comme les autres professions, aux articles 14 à 16, à la même limite d'âge de soixante-dix ans pour l'exercice de leur activité.

Adopté par les députés en commission spéciale, à l'initiative de leurs rapporteurs thématiques, le présent article vise à encourager le renouvellement des titulaires de greffe de tribunal de commerce. Les auteurs de l'amendement ont en effet souligné que 13 greffiers de tribunaux de commerce étaient âgés de plus de 70 ans, ce qui représentait 5,5 % de l'effectif de la profession.

Comme aux articles précédents, votre commission a supprimé par amendement la limitation de la durée pendant laquelle le greffier de plus de soixante-dix ans pouvait continuer d'exercer sa profession dans l'attente de la prestation de serment de son successeur.

Votre commission spéciale a adopté cet article 16 bis ainsi modifié.

Article 17 (suppression maintenue) - Liberté encadrée d'installation des notaires, huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires

Objet : le projet de loi initial comportait, à l'origine, dans un article spécifique, les dispositions relatives à la liberté encadrée d'installation de certains officiers publics ou ministériels.

Ces dispositions ont été transférées par les députés à l'article 13 bis , afin qu'elles précèdent leur déclinaison, aux articles 14 à 16, pour les trois professions considérées. L'article a par conséquent été supprimé.

Votre commission spéciale a maintenu la suppression de l'article 17.

Article 17 bis (art. L. 462-11 [nouveau] du code de commerce, art. 3 de l'ordonnance du 10 septembre 1817 qui réunit, sous la dénomination d'ordre des avocats au Conseil État et à la Cour de cassation, l'ordre des avocats aux conseils et le collège des avocats à la Cour de cassation, fixe irrévocablement, le nombre des titulaires, et contient des dispositions pour la discipline intérieure de l'ordre, art. 18 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles) - Liberté encadrée d'installation des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation - Restriction de l'accès à la profession aux seuls titulaires de l'examen d'aptitude

Objet : le présent article, issu d'un amendement des rapporteurs thématiques, adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, tend à appliquer, aux avocats aux conseils, le dispositif de liberté encadrée organisé par le présent projet de loi

La profession d'avocat aux conseils

Comparée aux autres officiers publics ou ministériels, la profession d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation (dite, aussi, « avocat aux conseils »), qui dispose du monopole de représentation devant les deux plus hautes juridictions de notre pays, présente plusieurs particularités.

En premier lieu, les avocats aux conseils sont officiers ministériels, nommés par le garde des sceaux, mais ils ne sont pas officiers publics : ils ne peuvent établir d'actes authentiques. Les prestations qu'ils proposent sont comparables à celle des avocats à la cour, seule change la juridiction auprès de laquelle ils plaident.

En deuxième lieu, ils ne sont pas soumis à un tarif et, comme les avocats, relèvent du régime de l'honoraire libre, sauf lorsqu'ils interviennent au titre de l'aide juridictionnelle.

Enfin, ils ne peuvent s'établir qu'à Paris. Le nombre d'offices - soixante - est stable depuis 1817, même si un décret du 23 avril 2009 a supprimé tout numerus clausus en reconnaissant au garde des sceaux la possibilité de créer de nouveaux offices.

Source : commission spéciale du Sénat

I - Les modifications proposées

Le projet de loi d'origine ne contenait aucune disposition relative aux avocats aux conseils.

Toutefois, dans son rapport d'information sur les professions du droit, notre collègue députée, Cécile Untermaier avait estimé, tout en saluant la qualité et la compétence de ces professionnels, que leur statut ne se justifiait plus, dans la mesure où les avocats aux conseils ne joueraient plus le rôle de filtre des recours en cassation qui est censé être le leur. Elle avait notamment fait valoir que le nombre d'affaires nouvelles portées devant la Cour de cassation était passé de 26 595 en 2005 à 30 165 en 2012, soit une progression de 13 % 147 ( * ) .

Elle avait par conséquent recommandé de supprimer leur charge d'officier ministériel, de les indemniser de la perte de leur droit de présentation, de maintenir un barreau spécialisé et d'organiser un concours permettant d'augmenter très sensiblement le nombre de professionnels.

L'amendement qu'elle a déposé en commission spéciale avec les autres rapporteurs, dont est issu le présent article, ne reprend pas cette recommandation. Toutefois, il est inspiré par la même analyse : évoquant une « augmentation exponentielle du nombre des pourvois », il dénonce le « malthusianisme » de la profession, qui serait visible dans le fait que depuis l'ouverture en 2013 de la possibilité de porter de trois à quatre le nombre d'associés, un seul office y ait recouru.

Le dispositif adopté reprend le schéma général de l'article 13 bis en l'adaptant aux spécificités de la profession d'avocats aux conseils :

- l'Autorité de la concurrence siégeant dans un collège élargi 148 ( * ) rendrait un avis, rendu public tous les deux ans, sur le rythme d'augmentation souhaitable du nombre d'offices 149 ( * ) ;

- cet avis lierait la compétence du garde des sceaux pour réguler la création d'offices ministériels, puisque ce dernier ne pourrait refuser une demande d'installation conforme aux recommandations formulées par l'Autorité de la concurrence, dès lors que l'intéressé présenterait les qualités requises ;

- en l'absence de demande exprimée dans les six mois à compter de la publication de l'avis, un appel à manifestation d'intérêt serait lancé par le ministre de la justice ;

- le nouvel entrant devrait une indemnisation aux confrères auxquels son installation porterait préjudice. En l'absence d'accord, le juge de l'expropriation en fixerait le montant et la répartition.

La procédure proposée présente deux spécificités par rapport à celle de l'article 13 bis .

La première tient à ce que la totalité des offices est située à Paris . Il n'y a donc pas, à proprement parler, de zones carencées ni de zones suffisamment pourvues. Le principe est alors uniquement celui de la liberté d'installation dans les limites définies par l'Autorité de la concurrence.

La seconde spécificité concerne les critères retenus pour apprécier l'opportunité de créer de nouveaux offices : il s'agit de prendre en considération les exigences d'une bonne administration de la justice ainsi que de l'évolution du contentieux devant les hautes juridictions. Votre rapporteur souligne que la rédaction retenue supprime l'obligation faite au ministre de la justice de solliciter préalablement à la création d'un office, l'avis des chefs des hautes juridictions comme celui du conseil de l'Ordre des avocats aux conseils.

Le troisième paragraphe du présent article précise que seuls peuvent accéder à la profession d'avocat aux conseils ceux qui ont suivi la formation et subi l'examen d'aptitude prévus par décret. Ce faisant la rédaction retenue supprime la faculté aujourd'hui ouverte aux professeurs d'université en droit, aux membres du Conseil d'État, à ceux de la Cour de cassation et à ceux de la Cour des comptes, d'accéder à la profession d'avocat aux conseils, en étant dispensés de la formation comme de l'examen d'aptitude.

Enfin, un dernier paragraphe introduit à l'initiative de la commission spéciale, en séance publique, et présenté comme une simple coordination, étend aux avocats aux conseils la procédure de l'article 11 de la loi précitée n° 90-1258 du 31 décembre 1990, qui permet, en cas de mésentente entre les associés, d'autoriser l'officier public ou ministériel qui se retire de l'office, à solliciter la création d'un nouvel office à son profit.

Votre rapporteur observe qu'une application insuffisamment régulée de ce dispositif permettrait, le cas échéant, une multiplication des offices d'avocats aux conseils.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur observe que l'analyse sur laquelle repose le présent article ne peut être accueillie sans réserve.

Certes, comme l'a d'ailleurs reconnu lors de son audition Hélène Farge, présidente du conseil de l'ordre des avocats aux conseils, ces derniers n'ont pas encore suffisamment utilisé les possibilités qui leur ont été ouvertes pour intégrer de nouveaux associés ou salariés 150 ( * ) . Les progrès accomplis sont encore trop timides.

Toutefois, l'augmentation du nombre des offices ne constitue pas la seule exigence à prendre en compte. La régulation des flux contentieux dirigés vers les hautes juridictions, à laquelle ils contribuent, peut justifier de limiter le nombre de professionnels en exercice, afin d'éviter que, pour assurer la rentabilité de leur structure, ceux-ci acceptent des dossiers qui n'ont pourtant aucune chance de faire l'objet d'une cassation.

À cet égard, votre rapporteur ne partage pas les observations formulées par la rapporteure thématique, notre collègue députée Cécile Untermaier, sur l'insuffisance ou le mauvais fonctionnement du filtrage des saisines opéré par les avocats aux conseils. En effet, ces observations s'appuient sur un constat contestable, celui de « l'augmentation exponentielle du nombre de pourvois », entre 2005 et 2012.

Or, si l'on se rapporte aux statistiques présentées par la Cour de cassation elle-même dans son rapport annuel, on observe une certaine irrégularité du nombre d'affaires nouvelles portées devant cette juridiction : avec 30 213 saisines, le niveau atteint en 2004 est très légèrement supérieur à celui de 2012 (30 165 saisines), lui-même bien supérieur à celui de 2013 (28 297 saisines).

En réalité, l'évolution du nombre des saisines dépend de l'activité juridictionnelle observée devant les cours inférieures et l'on constate, avec un décalage, des évolutions similaires devant les cours d'appel, sauf en matière de contentieux pénal, ce qui est tout à fait significatif. Le contentieux pénal augmente presque continûment devant la Cour de cassation entre 2005 et 2013 151 ( * ) , alors, qu'à l'inverse du contentieux civil, il régresse devant les cours d'appel. Or, ce contentieux est le dernier pour lequel la représentation par un avocat aux conseils n'est pas obligatoire, ce qui éclaire, a contrario , le rôle joué par la profession dans les autres contentieux.

Fondé, aux yeux de votre rapporteur, sur un constat contestable , le présent article propose un dispositif inadapté .

En effet, il prive le ministre de la justice de tout pouvoir d'appréciation et investit, à l'inverse, l'Autorité de la concurrence d'une tâche qui n'entre absolument pas dans son champ de compétence : déterminer, au regard de l'évolution du contentieux et des exigences d'une bonne administration de la justice, le nombre d'auxiliaires de justice dont il convient de favoriser le recrutement ou l'installation.

C'est pourquoi votre rapporteur a proposé à votre commission un amendement , qu'elle a adopté, restituant au garde des sceaux la compétence pour décider de la création de nouveaux offices. Il reviendrait, tous les deux ans, au ministre de la justice d'examiner s'il y a lieu à la création de nouveaux offices. À cette occasion, il solliciterait l'avis des chefs des hautes juridictions, celui du conseil de l'Ordre des avocats aux conseils et celui de l'Autorité de la concurrence, saisie conformément à l'article L. 462-1 du code de commerce 152 ( * ) . Ces avis seraient rendus publics.

Par ailleurs, le dispositif d'indemnisation serait conservé, mais modifié conformément à ce que votre commission a voté à l'article 13 bis : en l'absence d'accord, le juge compétent serait celui du tribunal de grande instance et non le juge de l'expropriation.

Enfin, votre commission a supprimé la disposition introduite au troisième paragraphe du présent article, qui avait pour effet d'interdire toute dispense de formation ou de diplôme, même à l'égard des professeurs d'université ou des membres du Conseil d'État ou de la Cour de cassation. Elle a aussi supprimé la disposition ouvrant la possibilité à l'associé d'un office de le quitter et d'être autorisé à en ouvrir un second, en raison des risques qu'elle présentait de créations insuffisamment régulées de tels offices.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 17 ter (art. 15 de l'ordonnance du 10 septembre 1817 qui réunit, sous la dénomination d'Ordre des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, l'ordre des avocats aux conseils et le collège des avocats à la Cour de cassation, fixe irrévocablement, le nombre des titulaires, et contient des dispositions pour la discipline intérieure de l'Ordre, art. L. 141-1 du code de la consommation) - Fixation des honoraires des avocats aux conseils

Objet : le présent amendement vise à étendre aux avocats aux conseils le régime de fixation des honoraires instauré, pour les avocats à la cour, par l'article 13 du présent texte.

Les avocats aux conseils déterminent librement leurs honoraires, sans qu'une disposition législative ou réglementaire, semblable à celle relative aux avocats à la cour 153 ( * ) , en fixe régime.

En séance publique, à l'initiative de leurs rapporteurs thématiques, les députés ont souhaité combler cette lacune en transposant les mesures adoptées, pour les avocats à la cour, à l'article 13 du présent texte.

Ainsi, les avocats aux conseils devront établir une convention d'honoraires, sauf en cas d'urgence ou de force majeure, ou lorsque le professionnel interviendra au titre de l'aide juridictionnelle. Ces honoraires devront être fixés, selon les usages, en tenant compte de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, ainsi que des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences prévisibles qu'il effectuera.

En outre, le présent article rappelle la prohibition de l'honoraire uniquement fixé en fonction du résultat, sous la réserve d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.

Enfin, comme à l'article 13, compétence est donné à la DGCCRF pour s'assurer du respect des exigences relatives à la convention d'honoraires, sous réserve du secret professionnel qui protège les échanges entre l'avocat et son client. Votre rapporteur constate à cet égard que la rédaction retenue à cet article est beaucoup plus précise qu'à l'article 13, puisqu'elle énumère le type d'actes ou d'échanges auxquels s'applique cette protection du secret professionnel.

Préciser les règles de fixation des honoraires des avocats aux conseils, et combler ainsi, même en l'absence d'abus constaté, une lacune du droit, est opportun.

En revanche, votre commission a supprimé , comme à l'article 13, la compétence donnée à la DGCCRF pour contrôler le respect de l'exigence de convention d'honoraires, estimant que ce contrôle est incompatible avec la protection du secret professionnel et qu'il fait double emploi avec le contrôle ordinal propre à la profession.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 18 (art. 1er ter de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat ; art. 3 ter de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers ; art. 3 de l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945 relative au statut des commissaires-priseurs ; art. L. 743-12-1 du code de commerce) - Augmentation du nombre de notaires, huissiers, commissaires-priseurs judiciaires et greffiers de tribunaux de commerce pouvant exercer, en qualité de salariés, dans un office donné

Objet : le présent article vise à augmenter le plafond d'emploi d'officiers publics ou ministériels salariés susceptibles d'exercer dans un même office et à interdire toute clause de non-concurrence.

I - La modification proposée

À l'origine, seuls pouvaient exercer la profession d'officier public ou ministériel, le titulaire ou les associés d'un office.

À partir de 1990 154 ( * ) , les notaires ont été autorisés, comme les avocats, à exercer, sous la responsabilité du titulaire ou des associés de l'office, en qualité de salarié. Cette disposition visait à la fois à permettre le développement de certaines structures et à ouvrir une perspective de carrière aux notaires stagiaires, dans l'attente de leur installation comme titulaire ou associé d'un office.

Toutefois, afin de limiter le recours à cette faculté et privilégier la création de nouvelles études ou l'association à des offices existants, la règle du « un pour un » a été instaurée : il ne pouvait y avoir plus d'un notaire salarié par titulaire ou associé de l'office.

Nommé par le garde des sceaux, le notaire salarié exerce la plénitude des compétences d'un notaire titulaire, la seule différence majeure étant qu'il ne peut développer de clientèle propre et qu'il agit sous la responsabilité professionnelle de son employeur.

Ce régime de salariat a, vingt ans plus tard, été étendu aux autres officiers publics ou ministériels : les huissiers de justice et les greffiers de tribunaux de commerce en 2010 155 ( * ) , les commissaires-priseurs judiciaires en 2011 156 ( * ) et les avocats aux conseils en 2014 157 ( * ) . Cette même année, la règle du « un pour un » a été abandonnée pour les notaires, au profit de celle de deux notaires salariés pour un titulaire ou un associé 158 ( * ) .

Le salariat des officiers publics et ministériels a connu un certain succès : selon les chiffres cités par notre collègue députée Cécile Untermaier dans son rapport sur les professions juridiques réglementées 159 ( * ) , les notaires salariés ne représentaient que 3,2 % de l'ensemble des notaires titulaires en 2004, et 11,3 % en 2013. On comptait la même année, 82 huissiers salariés, 14 commissaires-priseurs judiciaires salariés et, en 2014, 4 greffiers de tribunal de commerce salariés, ce qui représentait, pour chaque profession, entre 2 et 4 % de l'effectif total.

En dépit de la progression enregistrée, la part du salariat reste modeste si on l'apprécie à l'échelle de l'ensemble de la profession. Ainsi l'Autorité de la concurrence relève, dans son avis précité, qu'on comptait en 2014 seulement 0,37 notaire salarié par office en société. Le plafond d'emploi est encore loin d'être atteint. Il semble que le recours au salariat soit inégal, certains offices, qui profitent d'une forte activité, trouvant dans cette ressource un moyen utile et moins coûteux 160 ( * ) de développer leur offre de service, sans avoir à recourir à de nouvelles associations.

Faute d'études plus précises, il est difficile de caractériser les logiques qui président au recours au salariat : s'agit-il d'une forme d'exercice choisie par les intéressés, de préférence à l'installation ou à l'association au sein d'un office ? S'agit-il d'une phase de transition entre le statut de clerc et celui de titulaire ? Ou bien le dispositif limite-t-il les possibilités d'installation ou d'association ?

Le présent article semble trancher en faveur des deux premières options, puisqu'il vise à étendre les possibilités de recours au salariat .

Le projet de loi initial adoptait même une position très marquée, puisqu'il prévoyait de supprimer tout plafond de recrutement de salariés, pour les notaires, les huissiers de justice, les commissaires-priseurs judiciaires et les greffiers de tribunaux de commerce 161 ( * ) .

Les rapporteurs thématiques de la commission spéciale de l'Assemblée nationale ont déclaré « ne pas être convaincus que la faculté de recourir de façon illimité au salariat contribue à favoriser l'accès (notamment des jeunes et des femmes) à des professions dont la vocation première est de s'exercer dans un cadre libéral » 162 ( * ) . À leur initiative, la commission spéciale a choisi une voie médiane entre la suppression de tout plafond et le maintien du droit en vigueur : le passage à une règle de « un pour quatre ». Ainsi, quatre officiers publics ou ministériels salariés pourraient être recrutés par titulaire ou associé, au sein d'un même office.

Le même amendement des rapporteurs thématiques vise à bannir les clauses de non concurrence que les employeurs feraient signer à leurs salariés. Il s'agit de supprimer ce frein conventionnel à la sortie du salariat au bénéfice d'une installation comme concurrent de l'office que l'on a quitté.

En séance publique, la commission spéciale a fait adopter plusieurs amendements abaissant ce plafond de recrutement à deux salariés pour un titulaire ou associé. Une exception a été prévue pour les notaires, afin de tenir compte de la suppression de l'habilitation des clercs, qui doit susciter un élan de recrutement de salariés : la règle du « quatre pour un » s'appliquera à eux jusqu'au 1 er janvier 2020, après quoi, le plafond sera rétabli à deux pour un. Dans l'esprit de ses auteurs, cette disposition doit permettre que la phase de recrutement massif de notaires salariés ne soit qu'une transition vers leur propre installation ou leur association.

Un rapport serait demandé au Gouvernement, dans un délai de deux ans, afin de connaître l'évolution du nombre d'officiers publics ou ministériels salariés et celle de la proportion de jeunes et de femmes parmi ces salariés.

II - La position de votre commission

La question du plafond de recrutement de salariés ne peut être débattue sans la rattacher aux conséquences, pour l'activité des professions concernées, des mesures prévues dans le projet de loi.

Or, les mêmes observations que votre rapporteur a formulées s'agissant de la suppression, à l'article 14, des clercs habilités, sont ici valables : le projet de loi vise à réduire la rentabilité des offices publics ou ministériels, ce qui pourrait conduire à une contraction de leur activité que ne devrait pas contrecarrer l'installation limitée de nouveaux professionnels dans les zones carencées. Il est donc peu vraisemblable que se produise un choc de recrutement qui permette d'atteindre les plafonds d'emploi rehaussés par le présent article.

Au contraire, dans un contexte d'incertitude sur la rentabilité future, une part des recrutements devrait avoir un objet défensif, destiné à différer l'association d'un nouveau professionnel au sein de l'office. Augmenter trop fortement le plafond de recrutement risque donc de jouer contre le développement de l'exercice libéral de ces professions.

En outre, s'agissant des notaires, l'effet, à partir de 2020 du retour à la règle du « un pour deux », alors que celle du « un pour quatre » aura été en vigueur pendant quatre ans pose problème : faudra-t-il licencier les salariés en surnombre ou bien ceux-ci seront-ils maintenus dans leur activité ? Dans ce dernier cas, la question de la constitutionnalité de la disposition au regard du principe d'égalité pourrait se poser puisque certains offices bénéficieraient par rapport à d'autres, en particulier, ceux qui se créeraient après 2020, d'un surcroît de salariés et donc d'un avantage concurrentiel.

Votre rapporteur a par conséquent proposé à votre commission un amendement , qu'elle a adopté, visant à appliquer à l'ensemble des professions concernées la règle du « deux pour un » aujourd'hui applicable aux notaires, sans l'élever, pour ces derniers à « quatre pour un ».

Par ailleurs, votre rapporteur souligne que le basculement d'une partie de la profession de l'exercice libéral vers le salariat risque d'avoir un impact sur le financement de la caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels qui couvre les huissiers de justice, les commissaires-priseurs judiciaires ou commissaires-priseurs de vente volontaire, les administrateurs et mandataires judiciaires et les greffiers de tribunaux de commerce. Les dirigeants de cette caisse ont en effet indiqué à votre rapporteur que les salariés de ces professions cotisaient au régime général, contrairement aux professionnels libéraux. Toute augmentation du salariat au détriment de l'exercice libéral, la prive donc de recettes nécessaires à son équilibre, alors que ce dernier a déjà été fragilisé par la suppression de la profession d'avoués.

La préoccupation ainsi exprimée est légitime. Votre rapporteur, suivi par votre commission, a proposé d'appliquer aux professions concernées le dispositif retenu pour les avocats ou les experts-comptables, au sein desquelles le salariat est développé depuis plus longtemps. Ce dispositif prévoit en effet que tout professionnel inscrit à l'ordre cotise au régime complémentaire, quel que soit son mode d'exercice, individuel, en société ou salarié. Les conséquences, sur l'équilibre du régime d'assurance vieillesse, du basculement de professionnels d'un mode d'exercice à l'autre sont ainsi neutralisées.

Votre commission spéciale a par ailleurs supprimé la demande de rapport prévue au cinquième paragraphe du présent article.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 19 (art. L. 123-6 du code de commerce et art. L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle) - Diffusion des informations issues du registre du commerce et des sociétés et modalités de gestion du registre dans les départements d'outre-mer

Objet : cet article vise, d'une part, à organiser la diffusion gratuite en « open data » des informations issues du registre du commerce et des sociétés, sous l'égide de l'Institut national de la propriété industrielle, et, d'autre part, à confier à la chambre de commerce et d'industrie, à titre expérimental, dans trois départements d'outre-mer la gestion matérielle du même registre.

I - La diffusion en « open data » des informations issues du registre du commerce et des sociétés

En premier lieu, l'article 19 du projet de loi propose de confier à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) 163 ( * ) la mission de diffuser et mettre gratuitement à disposition du public les données du registre national du commerce et des sociétés (RNCS), pour permettre leur réutilisation, dans une logique d'« open data » des données de publicité légale des entreprises. Votre commission approuve l'objectif ainsi recherché. Les données du RCS constituent bien des données publiques, qui peuvent donc donner lieu à une réutilisation au sens de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal.

L'article 19 du projet de loi complète à cette fin l'article L. 123-6 du code de commerce, relatif à la tenue du registre du commerce et des sociétés (RCS) 164 ( * ) , registre de publicité légale, par le greffier du tribunal de commerce 165 ( * ) , ainsi que l'article L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, qui énumère les missions de l'INPI.

Le greffier de chaque tribunal de commerce, chargé de la tenue et de la gestion du RCS, devrait transmettre à l'INPI, par voie électronique et sans frais, un document valant original des inscriptions effectuées au registre et des actes et pièces qui y sont déposés. Actuellement, l'INPI est légalement chargé de centraliser les RCS au sein du RNCS, ce qu'il fait à partir des documents numérisés transmis par les greffes, sous forme d'un stockage de ces documents. La transmission électronique prévue par le projet de loi vise à permettre techniquement de constituer un RNCS dématérialisé effectif et consultable, sous forme d'une base de données opérationnelle qui n'existe pas en tant que telle aujourd'hui. La reconstitution au sein de l'INPI d'un RNCS sous forme électronique est la condition de la mise en oeuvre directe par l'INPI d'une politique d'« open data » sur les données du RCS, mais elle permettrait également une diffusion électronique de l'information légale sur les entreprises équivalente à celle réalisée aujourd'hui par les greffiers, par l'intermédiaire de leur groupement d'intérêt économique (GIE) Infogreffe.

Le greffier devrait aussi transmettre à l'INPI, par voie électronique et sans frais ni délai, « les résultats des retraitements des informations contenues dans les inscriptions, actes et pièces (...), dans un format informatique ouvert de nature à favoriser leur interopérabilité et leur réutilisation ». Ces transmissions d'information devraient permettre à l'INPI d'assurer directement la diffusion des données issues du RCS en « open data » en vue de leur réutilisation.

Dans le texte initial du projet de loi, l'article 19 était rédigé sous forme d'une habilitation, au titre de l'article 38 de la Constitution, visant à permettre, « notamment en modifiant les conditions dans lesquelles l'Institut national de la propriété industrielle centralise le registre national du commerce et des sociétés, de faciliter l'accès du public aux données contenues dans ce registre ainsi que la réutilisation de ces informations ».

A. Les relations actuelles entre les greffiers des tribunaux de commerce et l'Institut national de la propriété industrielle et la diffusion des données du registre du commerce et des sociétés par voie électronique

En l'état du droit, le code de commerce dans sa partie réglementaire organise les relations entre les greffiers des tribunaux de commerce, chargés de la tenue du RCS, et l'INPI, chargé, en application de l'article L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, de la centralisation des RCS au niveau national 166 ( * ) et de la diffusion des informations correspondantes. Confiée à l'INPI dès sa création par la loi en 1951 167 ( * ) , cette fonction de centralisation résulte historiquement de la nécessité d'éviter tout risque de perte ou de destruction des données de publicité légale de chaque RCS, en conservant un double de toutes les informations et pièces annexées.

L'article R. 123-80 du code de commerce prévoit ainsi la tenue d'un registre national par l'INPI, le RNCS, pour centraliser les documents valant originaux des RCS tenus dans chaque greffe 168 ( * ) . À cette fin, chaque greffier doit transmettre à l'INPI un exemplaire des inscriptions effectuées au greffe et des actes et pièces qui y sont déposés. Cette transmission s'effectue « le cas échéant par voie électronique », ce qui est en pratique le cas pour les RCS tenus par les greffiers des tribunaux de commerce, par des moyens informatiques mis en place à cette fin 169 ( * ) , tandis que la transmission pour les registres du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ainsi que des départements d'outre-mer continue à s'opérer sous forme papier, nécessitant une numérisation des documents ainsi transmis par un prestataire de l'INPI. Pour assurer le financement de cette mission de centralisation et d'archivage, en application de l'article R. 123-163 du code, une taxe est prélevée par le greffier, au profit de l'INPI, sur les formalités effectuées au RCS 170 ( * ) , en plus des émoluments perçus par le greffier sur ces formalités 171 ( * ) .

Puisque le RCS est un registre de publicité légale, devant permettre l'information des tiers, l'article R. 123-150 dispose que le greffier et l'INPI « sont astreints et seuls habilités à délivrer à toute personne qui en fait la demande des certificats, copies ou extraits des inscriptions portées au registre et actes déposés en annexe ». Le greffier y répond en établissant, aux frais du demandeur, en fonction du tarif 172 ( * ) , une copie intégrale, un extrait ou un certificat selon les cas, sur papier, par voie électronique ou sur support électronique (articles R. 123-52, R. 123-52-1 et R. 123-52-2). L'INPI y répond en délivrant, moyennant le paiement d'une redevance 173 ( * ) , un certificat, une copie ou la communication des renseignements figurant au RNCS, des copies pouvant être diffusées à titre de renseignement par voie électronique ; l'INPI peut également délivrer un certificat attestant qu'une personne ne figure pas dans une immatriculation portée au RNCS (article R. 123-153).

L'article R. 123-152-2 précise que la délivrance des copies, extraits et certificats du RCS sur support électronique est assurée par un système d'information agréé par le conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC) 174 ( * ) .

L'article R. 741-5 dispose que la délivrance par voie électronique des copies, extraits ou certificats du RCS peut être organisée par l'intermédiaire d'un groupement « chargé de centraliser les appels et de les orienter vers le greffe concerné » : il s'agit du groupement d'intérêt économique (GIE) Infogreffe, créé en 1986 par les greffiers des tribunaux de commerce 175 ( * ) , qui a mis en place une structure informatique permettant d'assurer l'interface avec l'ensemble des RCS et qui gère le site internet Infogreffe . Ce même article R. 741-5 précise que le GIE peut « conclure aux mêmes fins des accords avec l'INPI pour les attributions de celui-ci », c'est-à-dire notamment la gestion du RNCS. Il ajoute enfin que « les informations sont délivrées telles qu'inscrites aux registres ou sur les actes annexés, sans subir de traitement quelconque ».

Les copies, extraits et certificats ainsi délivrés électroniquement par le GIE Infogreffe ont même valeur légale que ceux délivrés sur papier par le greffier, au greffe ou par voie postale.

Ainsi, en droit, tant les greffiers des tribunaux de commerce, le cas échéant par voie électronique via le GIE Infogreffe, que l'INPI délivrent, aux frais du demandeur, les mêmes informations issues du RCS.

En pratique également, avant 2009, l'INPI comme le GIE Infogreffe diffusaient les mêmes informations légales issues du RCS. S'agissant de la diffusion par voie électronique, l'INPI diffusait les données du RNCS sur le site internet Euridile , à partir des éléments qui lui étaient transmis par les greffiers et qui devaient donc être saisis par ses soins au sein d'une base de données, par l'intermédiaire d'un prestataire, tandis que le GIE Infogreffe diffusait les mêmes données, directement issues du RCS de chaque greffe par l'intermédiaire des outils informatiques qu'il a créés, sur le site internet Infogreffe . En outre, l'INPI avait développé une activité de mise à disposition des données du RNCS aux fins de réutilisation, sous forme de licences contre redevance 176 ( * ) . L'objectif de diffusion « open data » en vue de réutilisation poursuivi par l'article 19 du projet de loi concerne la diffusion de ces licences, qui deviendraient gratuites.

Compte tenu de la redondance entre ces deux missions, source de dépenses publiques inutiles, afin de rationaliser la diffusion de la publicité légale sur les entreprises, le Gouvernement décida que l'INPI devait se limiter, au titre du RNCS, à une mission d'archivage numérique des données du RCS transmises par les greffiers, pour respecter a minima sa mission légale de centralisation des données du RNCS, tandis que le GIE Infogreffe continuerait seul à les diffuser par voie électronique.

Aussi, comme le permet l'article R. 741-5 précité, un accord passé en avril 2009 entre l'INPI et le GIE Infogreffe a organisé les conditions de cette clarification de leurs missions respectives, permettant à l'INPI d'économiser les frais de mise en forme des données, de gestion de sa base de données et de diffusion électronique des données du RNCS. Le site Euridile a ainsi été fermé, l'INPI conservant sa fonction d'archivage et de communication, sous forme papier, des données du RNCS 177 ( * ) , tandis que le GIE Infogreffe a continué à assurer la diffusion électronique des données des RCS.

Cet accord a aussi prévu que l'INPI pourrait toujours commercialiser les licences de réutilisation des données du RCS, sans avoir pour autant à les alimenter ou à les distribuer d'un point de vue technique, ces missions étant directement assurées par le GIE Infogreffe et par les greffiers 178 ( * ) . Ces licences sont de deux types : une licence dite « IMR » (immatriculation, modification et radiation des sociétés enregistrées au RCS), à 237 000 euros, et une licence dite « Comptes annuels des sociétés », à 260 000 euros. Ces deux licences sont commercialisées auprès d'opérateurs privés, qui utilisent les données du RCS pour leurs activités propres (analyse de solvabilité, « scoring »...) ou qui exercent une activité de diffusion d'informations économiques et juridiques sur les entreprises. Selon l'INPI, entendu par votre rapporteur, il existe six licenciés pour la licence « IMR » et cinq pour la licence « Comptes annuels » 179 ( * ) .

Comme l'indique l'Autorité de la concurrence dans son avis, « le rôle de l'INPI se limite à commercialiser ces contrats, à en être le signataire et à percevoir les redevances ». Le produit des redevances est partagé entre l'INPI, pour lequel il représente une recette quasiment nette de toute dépense, et le GIE Infogreffe, de façon à couvrir les coûts de constitution, de distribution, de mise à jour et de maintenance juridique et technique des licences.

Par conséquent, il apparaît clairement à votre rapporteur que l'INPI ne dispose plus désormais des capacités techniques pour assurer directement la diffusion par voie électronique des données issues du RCS, soit au titre de l'information légale soit sous forme globale dans le cadre des licences, du fait même de l'accord de 2009 dont l'objet était d'organiser son retrait technique - et non juridique - de cette activité, au profit du seul GIE Infogreffe. Si toutefois, conformément à sa mission légale, en vertu de l'article L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, l'INPI continue à assurer sa mission de conservation et de diffusion des informations provenant des RCS, au titre du RNCS, il s'agit pour lui d'une mission résiduelle, alors que ses défis actuels résident dans la promotion auprès des entreprises de la protection des droits de propriété industrielle (brevets, marques, dessins et modèles...) et de la valorisation de l'innovation, dans une économie de la connaissance, ainsi que le directeur général de l'INPI l'a indiqué à votre rapporteur.

Dans ce contexte, votre rapporteur s'interroge d'ailleurs sur l'utilité véritable du maintien de l'attribution à l'INPI de la mission de centralisation matérielle du RNCS, à l'heure du numérique, alors que les données des RCS sont aujourd'hui numérisées et sécurisées par les greffiers eux-mêmes, qui en assurent une diffusion dont l'efficacité et la fiabilité ne sont pas contestées. Quant au tarif des greffiers pour obtenir communication de ces informations, il appartient au Gouvernement de l'adapter pour en réduire le coût, dans le cadre proposé par l'article 12 du présent projet de loi.

B. À qui confier la responsabilité de la diffusion en « open data » des données issues du registre du commerce et des sociétés ?

Dans son avis du 9 janvier 2015 sur les professions réglementées 180 ( * ) , l'Autorité de la concurrence s'est interrogée sur la problématique abordée par l'article 19 du projet de loi, résultant selon elle « la dualité des opérateurs autorisés à diffuser au public des copies des inscriptions portées aux registres de publicité légale dont ils ont la charge (INPI et greffes des tribunaux de commerce) ». Toute en recommandant de confier à un opérateur unique la centralisation et la diffusion des données du RNCS, tout en permettant leur réutilisation sous forme de licences gratuites, elle a étudié les deux hypothèses consistant à confier cette mission soit à l'INPI soit au GIE Infogreffe, sans formuler de choix, laissant ce soin au Gouvernement et au Parlement.

Selon l'Autorité de la concurrence, dans le dispositif issu de l'accord de 2009 entre l'INPI et le GIE Infogreffe, « l'INPI ne fait qu'assurer des missions d'archivage des données constitutives du RNCS et de négociation des licences de réutilisation dont il est le titulaire », comme l'a bien relevé votre rapporteur. En effet, comme cela a été indiqué supra , ces licences sont en pratique élaborées techniquement, distribuées et mises à jour par le GIE Infogreffe, tandis que le RNCS ne constitue pas une base de données permettant la diffusion par voie électronique des données des RCS, mais simplement un outil de stockage.

Or, en confiant à l'INPI la mission de mettre à disposition du public les données du RNCS, gratuitement dans une logique d'« open data », en utilisant les informations qui devraient être transmises électroniquement et sans frais par les greffiers, l'article 19 du projet de loi exigerait de construire au sein de l'INPI une architecture informatique qui n'existe plus depuis 2009, pour créer un RNCS dématérialisé, structure comparable dans ses finalités à celle dont dispose le GIE Infogreffe aujourd'hui. Ceci représenterait un coût important pour l'INPI, comme l'a souligné l'Autorité de la concurrence. Une telle décision conduirait en fait à reconstituer le « doublon » que l'accord de 2009 entre l'INPI et le GIE Infogreffe visait précisément à supprimer, puisque le GIE devrait en tout état de cause continuer à diffuser l'information légale du RCS par voie électronique, pour le compte des greffiers des tribunaux de commerce.

Votre rapporteur s'interroge sérieusement sur la rationalité d'une telle décision, du point de vue bien sûr du bon emploi des deniers publics, mais aussi du point de vue du coût pesant sur les entreprises. En effet, si les entreprises doivent payer les émoluments des greffiers pour leurs formalités au RCS, elles doivent également payer la taxe affectée à l'INPI sur ces mêmes formalités, laquelle ouvre aussi droit à des émoluments spécifiques pour les greffiers au titre des diligences de transmission accomplies. Aussi résulterait-il une économie de la suppression de la mission résiduelle de centralisation du RNCS par l'INPI, comme l'a d'ailleurs relevé l'Autorité de la concurrence, dans son avis du 9 janvier 2015 précité.

À ce stade, trois options apparaissent à votre rapporteur, en dehors de l'adoption sans modification du dispositif de l'article 19 du projet de loi, qui ne semble guère raisonnable compte tenu des choix opérés en 2009.

La première option consisterait, tout en maintenant la mission légale de l'INPI de centralisation et de diffusion des données du RNCS, avec le système des licences, de conserver la répartition actuelle des tâches entre l'INPI et le GIE Infogreffe . Il s'agirait simplement de prévoir expressément dans la loi la diffusion gratuite des données en vue de leur réutilisation, qui appartiendrait toujours juridiquement à l'INPI et serait comme aujourd'hui sous-traitée au GIE Infogreffe, dans le cadre de l'accord conclu en 2009 : le seul changement serait la gratuité des licences.

La deuxième option consisterait à confier dans la loi la diffusion en « open data » des données du RCS au GIE Infogreffe , sous l'autorité du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC). Cette mise à disposition aux fins de réutilisation devrait être gratuite, comme en dispose déjà l'article 19 du projet de loi.

La troisième option, non exclusive de la deuxième et plus radicale, consisterait à supprimer tout rôle de l'INPI en matière de centralisation et de diffusion du RNCS, considérant qu'une telle mission est devenue obsolète depuis l'accord de 2009. Compte tenu des conditions de gestion électronique du RCS par le GIE Infogreffe, dans une ère de numérisation de l'information légale, la problématique de conservation par un établissement public unique au niveau national a très largement perdu de sa pertinence. Dans son avis précité, l'Autorité de la concurrence affirme d'ailleurs qu'« il paraît opportun de confier la mission de centralisation des données légales d'entreprises à un opérateur unique », avant de préciser que, « dans la mesure où les greffiers des tribunaux de commerce assurent dès à présent sur un plan opérationnel l'ensemble des missions qui pourraient ainsi être confiées à l'opérateur public, l'autre option serait de centraliser la tenue du RNCS autour du GIE Infogreffe ».

En tout état de cause, il ressort manifestement des éléments à la disposition de votre rapporteur qu'il ne serait pas rationnel et cohérent de confier aujourd'hui à l'INPI une mission à laquelle il a clairement renoncé du point de vue technique depuis l'accord de 2009 avec le GIE Infogreffe. Aussi votre commission a-t-elle adopté un amendement , à l'initiative de son rapporteur, visant à confier au CNGTC la mission de diffuser gratuitement les données du RCS en vue de leur réutilisation au sens de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée. Votre rapporteur insiste sur le fait que cette mission est distincte de celle de communication sur demande de l'information légale sur les entreprises, comme de celle d'archivage au titre du RNCS.

Du point de vue de l'utilisateur des informations sur les entreprises, qu'il s'agisse de la publicité légale ou des données agrégées à réutiliser dans le cadre des licences, il n'y aurait aucun changement par rapport à la situation actuelle. Dans les faits, dans le cadre des licences commercialisées par l'INPI, l'interlocuteur technique est déjà le GIE Infogreffe.

En outre, dès lors que cette mise à disposition des données du RCS en vue de leur réutilisation serait gratuite, comme le prévoit le projet de loi, l'INPI perdrait de toute façon le produit des recettes de commercialisation des licences « IMR » et « Comptes annuels ». Dans ces conditions, le fait que ces licences soient distribuées par l'INPI ou le GIE Infogreffe apparaît sans incidence financière pour l'INPI.

À cet égard, votre rapporteur rappelle que l'INPI a fait l'objet d'un référé de la Cour des comptes le 20 octobre 2014, dans lequel était relevée « la prospérité de l'établissement public découlant du modèle économique des offices de propriété industrielle », la mission de centralisation du RNCS n'étant jugée qu'accessoire 181 ( * ) . Du fait des ressources tirées des redevances des titres de propriété industrielle et surtout de leurs annuités de maintien en vigueur, la Cour a pu qualifier la situation financière de l'INPI de « très confortable » et ses réserves financières sans emploi accumulées d'« excessives » 182 ( * ) . Si la Cour a recommandé que l'INPI renforce ses efforts de promotion de la protection de la propriété industrielle et du brevet européen, elle n'a rien formulé sur l'activité accessoire de centralisation du RCS.

Dans ces conditions, rien ne s'oppose à confier juridiquement au GIE Infogreffe, sous l'autorité légale du CNGTC, la mission qu'il exerce déjà dans les faits depuis longtemps de mise à disposition des licences de réutilisation des données du RCS.

Dans un second temps, sur la proposition de son rapporteur, votre commission a également adopté un amendement visant à retirer à l'INPI sa mission résiduelle de centralisation et de diffusion des données du RNCS, qui ne consiste en pratique qu'à archiver des documents, sous forme papier et numérique, et à en délivrer des copies, extraits et certificats sous forme papier, par courrier. Cette mission - déjà exercée en pratique et de façon satisfaisante par le GIE Infogreffe sous une forme électronique - relèverait désormais juridiquement aussi des greffiers des tribunaux de commerce, par l'intermédiaire de leur conseil national, dont le statut et les fonctions sont fixés par l'article L. 741-2 du code de commerce.

À cet égard, votre rappelle que les autres registres de publicité légale tenus par les greffiers des tribunaux de commerce ne font l'objet d'aucune centralisation par l'INPI (registre des gages sans dépossession, registre des protêts, registre des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée...).

Une telle évolution présenterait l'avantage de recentrer l'INPI sur sa mission essentielle de protection et de promotion de la propriété industrielle. Elle permettrait également aux entreprises de réaliser une économie, avec la suppression de la taxe perçue au profit de l'INPI à l'occasion des formalités effectuées au RCS. Selon votre rapporteur, la situation financière de l'INPI lui devrait permettre d'absorber cette perte de recettes.

C. Un enjeu de protection des données personnelles des dirigeants des entreprises immatriculées au registre du commerce et des sociétés

Outre la question de l'attribution de la mission légale de diffusion des données du RCS en « open data », l'article 19 du projet de loi soulève une difficulté du point de vue de la protection des données personnelles des dirigeants des entreprises immatriculées.

En effet, conformément aux articles R. 123-37 et R. 123-54 du code de commerce, toute personne physique tenue à l'immatriculation au RCS doit déclarer ses nom, prénoms, domicile personnel, date et lieu de naissance et nationalité, de même que toute personne morale tenue à l'immatriculation doit déclarer les mêmes informations pour tous ses dirigeants et mandataires sociaux.

Or, s'il est normal que l'information légale sur les entreprises au titre du RCS - à commencer par l'extrait K bis , « fiche d'identité » de l'entreprise - comporte ces indications personnelles sur leurs dirigeants, votre rapporteur s'étonne cependant de ce que les informations distribuées sous licence 183 ( * ) aux fins de réutilisation comportent aussi ces données personnelles. En effet, une telle situation permet en pratique la mise en place de traitements automatisés de données personnelles, sans cadre légal clair, par exemple pour identifier toutes les sociétés qui ont été créées par une même personne.

La diffusion de données publiques en vue de leur réutilisation par des tiers, en particulier par des opérateurs privés, qui constitue la logique de l'« open data », ne saurait en aucun cas méconnaître l'exigence impérieuse de protection de la vie privée et des données à caractère personnel. Attachée à cette exigence, votre commission a prévu, dans l' amendement évoqué supra destiné à confier la mission de diffusion gratuite des données du RCS, que cette mission devait s'effectuer dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. En d'autres termes, sauf à recueillir le consentement des personnes concernées, hypothèse qui semble hors de propos à votre rapporteur, les données sur les entreprises ainsi diffusées dans les licences « open data » devraient être anonymisées et expurgées de toute donnée à caractère personnel.

II - La délégation, à titre expérimental, de la gestion matérielle du registre du commerce et des sociétés à la chambre de commerce et d'industrie dans certains départements d'outre-mer

En second lieu, l'article 19 du projet de loi propose de déléguer, à titre expérimental pour une durée de trois ans au plus, la « gestion matérielle » du registre du commerce et des sociétés (RCS) à la chambre de commerce et d'industrie (CCI), dans les trois départements d'outre-mer de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion, par une convention passée entre la CCI et le ministre de la justice. Ces expérimentations s'engageraient au plus tard le 1 er janvier 2016 et donneraient lieu à un rapport d'évaluation.

L'objectif recherché est l'amélioration du fonctionnement du RCS, en particulier la réduction des délais de traitement des formalités.

Introduit par l'Assemblée nationale, en séance publique, à l'initiative du Gouvernement, ce dispositif expérimental remet en cause les modalités de fonctionnement du RCS dans les départements d'outre-mer, dont la tenue est actuellement assurée par les greffes des tribunaux mixtes de commerce (TMC), qui sont les greffes publics des tribunaux de grande instance (TGI), et non des greffiers de tribunal de commerce, officiers publics et ministériels.

A. Le dysfonctionnement du registre du commerce et des sociétés dans les départements d'outre-mer et la faculté de déléguer sa gestion matérielle à la chambre de commerce et d'industrie

En l'état du droit, il existe déjà un dispositif donnant la faculté au ministre de la justice, par convention, de déléguer la « gestion matérielle » du registre du commerce et des sociétés (RCS) aux chambres de commerce et d'industrie dans les départements d'outre-mer ainsi que dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy 184 ( * ) .

Mentionné à l'article L. 123-6 du code de commerce et résultant de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, dite « loi Lurel », ce dispositif de délégation facultative prévoit que le greffe demeure « compétent pour le contrôle des actes et des extraits du registre ainsi que pour toute contestation entre l'assujetti et la chambre compétente ».

Depuis 2012, ce mécanisme de délégation à la CCI n'a jamais été mis en oeuvre par la garde des sceaux.

L'objectif légitime recherché par ce dispositif était une amélioration du fonctionnement du RCS dans ces collectivités, actuellement tenu par les fonctionnaires du greffe du TGI, chargés du greffe du TMC, et non par des greffiers de tribunal de commerce comme c'est le cas en métropole en dehors des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle 185 ( * ) . En effet, dans les départements d'outre-mer, le RCS connaît notoirement de graves dysfonctionnements, caractérisés principalement par un retard important, pouvant atteindre plusieurs mois, dans l'accomplissement des formalités (immatriculation de sociétés, inscriptions, dépôt d'actes et pièces exigé par les lois et règlements) et dans la communication des informations demandées par les entreprises ou les tiers au titre de la publicité légale (communication des extraits K bis des sociétés immatriculées par exemple).

Ces graves dysfonctionnements sont déjà bien connus du législateur, pour avoir été plusieurs fois rappelés dans divers débats législatifs depuis plusieurs années. Ils constituent un grave préjudice pour les entreprises des cinq départements d'outre-mer, qui relèvent de sept RCS 186 ( * ) , ainsi que des deux collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, qui relèvent du RCS de Basse-Terre en Guadeloupe. La capacité juridique des entreprises, la sécurité juridique de leurs actes ainsi que l'information des tiers sont gravement compromises.

La situation préoccupante des greffes des TMC et singulièrement du RCS dans les départements d'outre-mer a donc perduré, jusqu'à ce que soit mis en oeuvre, à l'initiative de la ministre de la justice et avec la contribution du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC), un plan de redressement de la situation à compter de septembre 2014. Mis en oeuvre sur la base des conclusions d'un audit préalable de la situation pour bien identifier les difficultés, ce plan prévoit des moyens spécifiques : renfort ponctuel de personnel, amélioration des outils informatiques et formation du personnel des greffes. Selon les informations fournies à votre rapporteur par le Gouvernement, ce plan commence à produire ses résultats, les stocks de formalités à accomplir ont diminué et les délais de délivrance des extraits K bis ont pu être réduits.

B. Les incertitudes liées à une délégation de la gestion du registre du commerce et des sociétés aux chambres de commerce et d'industrie

Le dispositif prévu par le projet de loi est certes expérimental.

Cependant, outre que la notion de « gestion matérielle » du RCS n'est pas précise et soulève de nombreuses questions - les formalités et demandes de communication d'informations devraient-elles être faites auprès du greffe ou de la chambre, de quelle manière le greffe pourrait-il assurer le contrôle des opérations réalisées par des personnels qui ne sont pas placés sous son autorité, par exemple -, votre rapporteur s'interroge sérieusement sur la capacité des services des chambres concernées à prendre en charge une telle mission nouvelle. Les chambres ne disposent évidemment pas à ce jour des personnels disponibles et formés à une telle mission, ni des équipements informatiques nécessaires, a fortiori dans un contexte de sévère réduction des moyens budgétaires des CCI, décidée par le Gouvernement dans la loi de finances pour 2015. Des personnels devraient donc être recrutés et formés et des investissements importants réalisés.

Les conditions financières d'une telle délégation ne sont en rien précisées et votre rapporteur s'interroge sur le coût qui ne manquerait pas d'en résulter pour le budget déjà très contraint du ministère de la justice.

La faisabilité concrète d'une telle délégation n'a pas fait l'objet d'une étude d'impact sérieuse, comme en son temps la faculté de délégation, qui ne figurait pas en 2012 dans le texte initial du Gouvernement. Compte tenu du fonctionnement du RCS, la séparation de sa gestion matérielle et de son contrôle est difficile à mettre en oeuvre. En effet, les opérations matérielles d'immatriculation ou de dépôt et les opérations de contrôle par le greffier de la régularité de ces formalités, en vertu des articles R. 123-92 et suivants du code de commerce, sont étroitement imbriquées puisqu'elles sont réalisées aujourd'hui par les mêmes personnes. Ainsi, l'article R. 123-94 énonce que « le greffier, sous sa responsabilité, s'assure de la régularité de la demande » : votre rapporteur s'interroge sur la réalisation de ce contrôle par la CCI et sur la responsabilité qui pourrait en résulter pour les agents ou les élus de la CCI.

Dans ces conditions, de quelle manière serait traité le contentieux susceptible de naître d'une difficulté dans l'accomplissement d'une formalité au registre, si celle-ci a été enregistrée par le personnel de la CCI ? En effet, les agents de la CCI ne sont pas placés sous l'autorité du greffier chargé de la tenue du registre. La régularité des opérations matérielles réalisées par les agents de la CCI devraient en principe être systématiquement vérifiées par le greffier, ce qui occasionnerait des délais nouveaux.

Par ailleurs, on ne saurait écarter le risque de conflit d'intérêts, dans la mesure où les CCI sont dirigées par des chefs d'entreprise élus, à raison de leur rôle de représentation des entreprises 187 ( * ) , alors que le RCS vise à assurer la publicité légale des informations concernant les mêmes entreprises. De telles informations peuvent avoir une répercussion négative sur les entreprises concernées, par exemple l'ouverture d'une procédure collective 188 ( * ) , ou peuvent être relatives à des entreprises concurrentes de celles des membres de la CCI. Des membres de la CCI, eux-mêmes dirigeants d'entreprises immatriculées au RCS, pourraient vouloir influer sur les informations portées au registre par les agents de la CCI, placés sous leur autorité.

Votre rapporteur juge que la gestion, même matérielle, d'un registre de publicité légale concernant des entreprises ne saurait être assurée par les représentants de ces mêmes entreprises. La représentation des entreprises n'est pas compatible avec la gestion du registre du commerce et des sociétés.

Par exemple, l'article L. 123-5 du code punit de 4 500 euros d'amende et de six mois de prison le fait de donner, de mauvaise foi, des indications inexactes ou incomplètes en vue d'une immatriculation, d'une radiation ou d'une mention complémentaire ou rectificative au RCS. En cas d'omission intentionnelle ou de fausse déclaration d'un membre élu de la CCI sur son entreprise, dans quelle mesure l'agent de la CCI pourrait-il s'y opposer et dans quelle mesure le greffe du TMC pourrait-il le contrôler ?

Comment pourrait s'exercer de manière effective la surveillance du président du tribunal ou du juge commis à cet effet sur la tenue du registre, comme le prévoit l'article L. 123-6 du code, si le registre n'est plus tenu matériellement par le greffe du tribunal ? Le contrôle s'en trouverait sérieusement amoindri, alors qu'il s'agit d'un registre de publicité légale, justifiant un contrôle sous l'autorité du juge de la régularité des actes et des informations portées au registre.

Enfin, la délégation de gestion aux CCI ne conduirait pas à résoudre le problème du raccordement des RCS ultramarins aux outils informatiques mis en place par les greffiers des tribunaux de commerce pour dématérialiser les formalités, assurer la sécurisation des données et permettre leur diffusion par voie électronique. Les délais de traitement ne pourraient donc pas être réduits à ce que les entreprises métropolitaines connaissent.

In fine , même s'il ne s'agit évidemment pas pour votre rapporteur de remettre en cause la qualité du travail des chambres consulaires outre-mer et de leurs élus, dans le cadre des missions qui leur sont aujourd'hui dévolues par la loi pour accompagner les entreprises, il n'est pas possible d'ignorer les risques que la délégation de la gestion du RCS comporte, tant du point de vue des conditions matérielles que des éventuels conflits d'intérêts.

L'ensemble de ces motifs expliquent d'ailleurs vraisemblablement que la possibilité de délégation prévue depuis 2012 par l'article L. 123-6 du code de commerce n'ait jamais été utilisée par la garde des sceaux. Pour les mêmes motifs au demeurant, votre rapporteur doute qu'une telle délégation permette de remédier aux dysfonctionnements constatés.

Votre commission a donc souhaité supprimer cette délégation de la gestion matérielle du RCS aux CCI, en dépit de son caractère expérimental.

C. Les moyens de remédier structurellement au dysfonctionnement du registre du commerce et des sociétés dans les départements d'outre-mer

Votre commission estime qu'il ne faut pas fragiliser la qualité et la fiabilité de l'information légale sur les entreprises des départements d'outre-mer par un mode de gestion inapproprié du RCS. La nécessaire et urgente amélioration du fonctionnement du RCS doit donc emprunter d'autres voies que celle de la délégation aux CCI.

Or, en dépit de premiers résultats que votre rapporteur salue bien volontiers, le plan de redressement du RCS dans les départements d'outre-mer, mis en oeuvre par le ministère de la justice en septembre 2014, n'apporte qu'une réponse partielle et temporaire à un problème structurel, du fait des moyens limités et des urgences budgétaires nombreuses de ce ministère. Il convient par conséquent de mettre en oeuvre la réponse structurelle efficace que le législateur a déjà retenue il y a plusieurs années.

En effet, afin de remédier à cette situation connue, l'article 34 de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées a prévu que le greffe des TMC, dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État, était assuré par un membre de la profession de greffier de tribunal de commerce (article L. 732-3 du code de commerce). Par la suite, un décret n° 2012-439 du 30 mars 2012 a prévu que le greffe de chacun des sept TMC devait être tenu par un greffier de tribunal de commerce, sans exception.

En dépit de cette intention claire du législateur, aucune procédure de recrutement de greffiers n'a été engagée à la suite de la publication de ce décret pour pourvoir le greffe des TMC 189 ( * ) .

Au vu de l'efficacité du fonctionnement des greffes métropolitains tenus par des greffiers des tribunaux de commerce, caractérisée par une grande rapidité dans l'accomplissement des formalités, à l'aide de moyens informatiques performants, fiables et mutualisés, votre commission ne peut que rappeler la pertinence du choix du législateur en 2011. Aussi a-t-elle adopté un amendement , à l'initiative de son rapporteur, visant à affirmer au niveau législatif que le greffe de chaque TMC dans les départements d'outre-mer doit être tenu par un greffier de tribunal de commerce, en supprimant la délégation expérimentale du RCS aux CCI.

Concernant les objections susceptibles d'être formulées à l'encontre de la création de sept nouveaux offices de greffier de tribunal de commerce, outre que celle-ci permettrait au greffe du TMC et au RCS de bénéficier d'un fonctionnement normal tout en déchargeant les fonctionnaires des greffes des TGI concernés, votre rapporteur observe que le présent projet de loi prévoit de réformer différents aspects de la profession de greffier de tribunal de commerce pour la moderniser, sans pour autant la remettre en cause. Ainsi, si la procédure actuelle de recrutement d'un greffier pour pourvoir le greffe d'un nouveau tribunal de commerce - procédure applicable dans le cas présent pour le greffe des TMC - peut paraître insuffisamment sélective, il convient de noter que l'article 20 du projet de loi sollicite une habilitation, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, pour « améliorer, par la voie du concours (...), le recrutement des greffiers ».

III - La position de votre commission

D'une part, tout en approuvant l'objectif de mise à disposition des données du registre du commerce et des sociétés (RCS) gratuitement, dans une logique d'ouverture des données publiques en vue de leur réutilisation, votre commission a considéré qu'il n'était pas pertinent d'en confier la responsabilité opérationnelle à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI). En effet, depuis l'accord conclu en 2009 avec le groupement d'intérêt économique (GIE) Infogreffe, créé par les greffiers des tribunaux de commerce, chargés de la tenue du RCS, l'INPI s'est désengagé de la gestion technique effective du registre national du commerce et des sociétés (RNCS).

Dans ces conditions, votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement visant à confier au conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, instance créée par la loi, la mission de diffusion gratuite, à ses frais, des données publiques du RCS, laquelle pourra être mise en oeuvre par le GIE Infogreffe. Elle a également adopté un amendement visant à retirer à l'INPI sa mission de centralisation du RCS.

D'autre part, si les dysfonctionnements récurrents du RCS dans les départements d'outre-mer, tenu par les greffes publics des tribunaux mixtes de commerce (TMC), préoccupent depuis longtemps le législateur, votre commission considère que confier la gestion matérielle du RCS aux chambres de commerce et d'industrie (CCI), même de façon expérimentale, soulève de lourdes questions, tant d'un point de vue pratique et financier que du point de vue des conflits d'intérêts qui pourraient en résulter au sein des CCI.

Souhaitant une solution structurelle allant au-delà du seul plan de redressement mis en place par le ministère de la justice, votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement visant à supprimer la délégation expérimentale du RCS aux CCI et à réaffirmer l'intention du législateur exprimée en 2011 et jamais appliquée, consistant à nommer des greffiers de tribunal de commerce pour assurer le greffe des TMC, avec un niveau de qualité équivalent à celui des greffes métropolitains des tribunaux de commerce.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 20 (art. L. 811-5 et L. 812-3 du code de commerce) - Facilitation des conditions d'accès aux professions d'administrateurs ou de mandataires judiciaires et de greffiers de tribunaux de commerce - Habilitation du Gouvernement à créer, par ordonnance, une profession de commissaire de justice fusionnant les huissiers et les commissaires-priseurs

Objet : le présent article vise d'une part réformer les conditions d'accès aux professions d'administrateur ou de mandataire judiciaire et de greffiers de tribunaux de commerce et, d'autre part, à créer une nouvelle profession de commissaire de justice.

Initialement le projet de loi comportait quatre demandes d'habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires aux réformes proposées.

I - La réforme des conditions d'accès aux professions d'administrateur et de mandataire judiciaires

A. La modification proposée

La première demande d'habilitation concernait, au premier paragraphe, les professions d'administrateur et de mandataire judiciaires. Partant du constat d'un manque de professionnels, alors que leur installation n'est pas réglementée, contrairement à celle des officiers ministériels, le Gouvernement souhaitait répondre aux besoins nombreux des juridictions en matière de procédures collectives en aménageant et en diversifiant les voies d'accès à ces professions.

En effet, les effectifs de ces professions stagnent : on dénombrait 119 administrateurs judiciaires et 306 mandataires judiciaires en 2014, chiffre comparable à ceux des dix dernières années. Leur pyramide des âges vieillit, puisque près des deux tiers ont plus de cinquante ans, la moyenne d'âge s'établissant, selon l'étude d'impact, à 53,5 ans.

Les fonctions d'administrateur ou de mandataire judiciaires ne peuvent être exercées, à titre principal, que par des personnes inscrites sur une liste établie par une commission nationale 190 ( * ) . Pour être inscrit sur cette liste, il faut, d'une part avoir réussi l'examen d'accès au stage professionnel, d'autre part avoir accompli ce stage, d'une durée de trois à six ans, et, enfin, avoir réussi l'examen d'aptitude aux fonctions concernées 191 ( * ) .

Des dispenses peuvent être accordées aux personnes qui remplissent certaines conditions d'expérience professionnelle ou de détention de titres ou de diplômes universitaires : dispense de l'examen d'accès au stage professionnel ; dispense, attribuée par la commission nationale, d'une partie du stage et de tout ou partie de l'examen d'aptitude. Seule la dispense totale de stage est impossible .

En commission spéciale à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a proposé d'introduire directement dans le texte la réforme qu'il envisageait d'adopter par ordonnance. Elle repose sur trois piliers :

- la consécration, au niveau législatif, d'un « diplôme de master en administration et liquidation d'entreprise en difficulté », dont il n'est pas clair, compte tenu de la rédaction retenue, si sa détention pourrait permettre ou non d'être inscrit sur la liste de qualification aux fonctions d'administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire sans avoir à subir l'examen d'accès au stage, ni à accomplir ce stage, ni à réussir l'examen d'aptitude aux professions considérées ;

- la suppression de la compétence de la commission nationale pour délivrer ou non des dispenses de stages ou d'examen d'aptitude ;

- l'instauration d'une possibilité de dispense totale de stage, qui permettrait à certaines personnes, répondant à des conditions de compétence et d'expérience professionnelle fixée, par décret en Conseil d'État, de ne pas avoir à travailler auprès d'un administrateur ou d'un mandataire judiciaire avant de créer leur propre structure.

B. La position de votre commission

Lors des auditions de votre rapporteur, la dispense totale de stage a été fortement critiquée par les représentants du conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires. Ceux-ci ont rappelé l'utilité de ce stage pour se former à la pratique des procédures collectives et les risques qu'il y aurait à confier le sort d'une entreprise, de ses salariés et des créances détenues sur elle à des personnes qui n'auraient pas eu l'occasion de mettre en oeuvre des procédures de liquidation ou de redressement judiciaire.

Votre rapporteur reconnaît l'importance, en cette matière, de l'expérience professionnelle. Il relève aussi que l'installation parfois tardive de certains professionnels n'est pas seulement due à l'exigence du stage, à laquelle beaucoup pourraient satisfaire, mais surtout aux coûts d'association avec des professionnels déjà installés ou aux difficultés de lancement d'une nouvelle structure, lorsque l'on est insuffisamment connu des tribunaux de commerce chargés de désigner les professionnels en charge de chaque dossier.

Pour autant, on peut concevoir que certains praticiens des procédures collectives, comme des experts-comptables ou des avocats spécialisés dans ces contentieux, puissent faire valoir leur expérience professionnelle, si elle est suffisante 192 ( * ) , et être dispensés du stage de trois ans. Votre rapporteur constate d'ailleurs que la loi le prévoit, s'agissant de personnes qui justifient avoir acquis, dans l'Union européenne, une qualification suffisante pour l'exercice de ces professions 193 ( * ) .

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a toutefois rétabli, par amendement , la compétence de la commission nationale pour décider de l'octroi ou non d'une dispense du stage professionnel ou de la réussite à l'examen d'aptitude. La possibilité d'une dispense totale du stage serait ainsi conservée, mais la commission nationale serait chargée de s'assurer que l'expérience professionnelle de l'intéressé est suffisante.

Un second amendement adopté par votre commission précise par ailleurs que la détention du diplôme de master en administration et liquidation des entreprises 194 ( * ) dispense seulement de l'examen du stage. Il lève ainsi une ambiguïté rédactionnelle, qui pouvait faire croire que ce diplôme pourrait aussi dispenser de l'accomplissement du stage professionnel et de la réussite à l'examen d'aptitude.

II - La création d'une profession de commissaire de justice et la réforme des ventes judiciaires

A. La modification proposée

Le projet de loi comportait initialement deux demandes d'habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour réformer les ventes judiciaires et créer une profession de commissaire de justice à partir des trois professions de commissaire-priseur judiciaire, d'huissier de justice et de mandataire judiciaire.

Ces deux réformes trouvent leur origine dans une inspiration commune : plusieurs professions interviennent, à divers titres, pour effectuer les mêmes opérations de liquidation ou de vente et il convient de simplifier l'organisation actuelle, afin de limiter les conflits possibles et les incertitudes suscitées par cette complexité.

Tel était notamment le constat établi par la commission présidée par Jean-Michel Darrois en 2009 195 ( * ) , qui a notamment recommandé la création d'une profession unique de l'exécution des décisions de justice. Celle-ci aurait regroupé les commissaires-priseurs judiciaires, chargés des ventes judiciaires, les huissiers de justice, chargés des significations et du recouvrement amiable ou judiciaire, et les mandataires de justice, chargés, dans les liquidations judiciaires, de représenter l'intérêt collectif des créanciers, de procéder à la réalisation de l'actif et d'en répartir le produit entre les créanciers.

Le Gouvernement a repris cette idée en proposant la création d'une profession de commissaire de justice issu de la fusion des trois professions précitées.

À l'initiative de ses rapporteurs, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a cependant exclu les mandataires judiciaires du périmètre de cette nouvelle profession. En effet, à la différence des commissaires-priseurs judiciaires et des huissiers de justice, ces professionnels ne procèdent eux-mêmes à aucun acte d'exécution forcée. Dépourvus de clientèle, ils n'agissent que sur mandat de justice. En outre, ils ne sont ni officiers publics, ni officiers ministériels. Enfin, les confondre avec les deux autres, dans une même profession, aurait conduit à des conflits d'intérêts majeurs, puisqu'un même commissaire de justice, mandaté par la juridiction pour représenter les créanciers aurait pu faire procéder à l'exécution forcée du recouvrement qu'il aurait ordonné.

La commission spéciale de l'Assemblée nationale a par ailleurs précisé le champ de l'habilitation en imposant que la fusion soit opérée progressivement et qu'elle prenne en compte les incompatibilités et les risques de conflits d'intérêts propres à l'exercice des missions de chaque profession concernée.

La seconde habilitation demandée par le Gouvernement concernait la clarification des ventes judiciaires de meubles, qui peuvent aujourd'hui être pratiquées à titre accessoire ou principal par cinq professions : les commissaires-priseurs judiciaires, les huissiers de justice, les notaires, les greffiers de tribunaux de commerce et les courtiers de marchandise assermentés. Cette clarification se serait accompagnée de la création d'une liste des professionnels compétents, destinée à l'information du public
- cette dernière disposition relevant, manifestement, du pouvoir réglementaire.

Dès le stade de la commission spéciale, le Gouvernement a déposé un amendement 196 ( * ) supprimant cette seconde habilitation, au motif que la création du commissaire de justice satisferait suffisamment l'objectif de clarification poursuivi.

B. La position de votre commission

Votre rapporteur constate que le projet de création d'une profession de commissaire de justice ne fait pas l'unanimité au sein des professions concernées par la fusion.

Lors de son audition par votre rapporteur, le président de la chambre nationale des huissiers de justice, M. Patrick Sannino en a largement défendu le principe. En revanche, la chambre des huissiers de justice de Paris a fait connaître à votre rapporteur son opposition à ce projet.

Les représentants de la chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires ont, eux aussi, marqué leur vive opposition à cette réforme, estimant que les deux métiers étaient trop différents pour être confondus. Ils ont notamment souligné combien le coeur de leur pratique était l'évaluation des biens, qui suppose une formation initiale particulière et un exercice régulier.

Votre rapporteur constate toutefois que la fusion en une profession n'interdira pas une spécialisation d'exercice. Surtout, la réforme vise à remédier à l'imparfaite couverture du territoire en offices de commissaires-priseurs judiciaires, qui conduit les huissiers de justice à assumer leur mission de vente judiciaire, lorsque ceux-ci ne sont pas en mesure de le faire. En ce sens, elle est justifiée. L'essentiel est de garantir qu'elle ne portera pas atteinte à la qualité des prestations assurées.

C'est pourquoi, tout en proposant à votre commission de retenir le principe d'une profession unique, votre rapporteur a soumis à son approbation un amendement précisant que les exigences de qualification aujourd'hui propres à chaque profession devront être préservées : ainsi un membre de cette future profession ne pourra réaliser des prestations propres aux commissaires-priseurs qu'à la condition qu'il ait, par exemple, suivi une formation en art qui lui permette d'évaluer correctement les objets qui lui sont remis pour une vente.

Un amendement de notre collègue Jean Desessard et des membres du groupe écologiste, adopté par votre commission, impose par ailleurs la prise compte, par l'ordonnance, des règles de déontologie de ces professions.

III - La réforme des conditions d'accès à la profession de greffiers de tribunaux de commerce

A. La modification proposée

Par rapport aux autres professions d'officiers publics ou ministériels, l'accès à celle de greffier de tribunal de commerce présente une particularité : les contraintes liées à l'exercice par le titulaire de son droit de présentation ne sont pas contrebalancées par la possibilité pour les nouveaux entrants de s'installer dans un office nouvellement créé.

En effet, le nombre de greffes de tribunaux de commerce est, par définition, le même que celui des tribunaux de commerce, et il n'est pas envisageable d'en créer un supplémentaire, sauf cas exceptionnels 197 ( * ) .

Ce faisant, en dehors du salariat, la seule voie d'accès à cette profession est d'être présenté par le titulaire ou les associés en poste. Il en résulte une circulation des offices entre parents et enfants ou au sein d'une même famille plus importante que dans d'autres professions 198 ( * ) .

En sollicitant, au présent article une habilitation à prendre les mesures requises par ordonnance, le Gouvernement souhaite promouvoir une voie d'accès à cette profession plus méritocratique, fondée sur un concours. À l'issue de ce dernier, les candidats seraient classés par ordre de mérite afin de succéder au titulaire.

Le texte de l'habilitation demandée précise qu'il appartiendra au Gouvernement de fixer les conditions financières de cette mesure. En effet, la procédure de concours restreindra la liberté d'exercice par le titulaire de l'office, de son droit de présentation. Or, le choix de ce dernier peut être déterminé, sous le contrôle de la Chancellerie, par l'offre financière que lui propose chaque candidat. S'il lui est fait obligation de choisir le premier du concours, sa marge de négociation sur le prix qui lui sera payé est réduite à néant. Il est donc nécessaire de prévoir de quelle manière sera fixé le prix de revente du droit de présentation au premier du classement, afin que le titulaire ou les associés ne soient pas lésés.

B. La position de votre commission

Le dispositif proposé paraît opportun. En outre, dans la mesure où il prévoit les conséquences financières de la création d'un concours, il respecte les droits des greffiers en place.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 20 bis (art. 22 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable) - Extension du périmètre des activités exercées, à titre accessoire, par les experts-comptables

Objet : le présent article vise à étendre le champ des activités que les experts-comptables peuvent effectuer à titre accessoire, sans qu'elles se rattachent par ailleurs à une mission comptable qui leur soit assignée.

I - La modification proposée

Introduit à l'initiative du Gouvernement en commission spéciale à l'Assemblée nationale, le présent article visait initialement à supprimer la règle dite du « double accessoire » à laquelle les experts-comptables sont aujourd'hui soumis pour toutes leurs activités autres que comptables.

Cette règle du  « double accessoire » est édictée à l'article 22 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 199 ( * ) . Elle vise à autoriser ces professionnels à effectuer des consultations, des études ou des travaux pour des clients sous une double réserve :

- ces activités doivent demeurer accessoires dans leur chiffre d'affaires ;

- elles ne doivent intervenir qu'à l'occasion d'une mission principale d'ordre comptable effectuée pour les mêmes clients qui sollicitent ces activités, ou être directement liées à l'accomplissement de cette mission.

L'amendement adopté par la commission spéciale avait supprimé la seconde réserve pour tous les travaux, avis ou études d'ordre statistique, économique, administratif, social et fiscal. Il l'avait en revanche maintenue pour les consultations, études et travaux d'ordre juridique, ainsi que pour la rédaction d'actes sous seing privé.

Une opposition très vive s'est manifestée contre cet amendement. Les représentants du conseil national des barreaux ont estimé qu'il était porté atteinte à la frontière qui sépare les activités du chiffre et celles du droit, et qu'une concurrence inopportune était alimentée entre ces professions.

Le Gouvernement en a tenu compte et proposé un amendement en séance publique, adopté par les députés, qui a précisé que les travaux et études accomplis hors de toute mission comptable ne pourront être d'ordre juridique.

II - La position de votre commission

Votre commission spéciale a jugé nécessaire de lever toute ambiguïté sur le dispositif proposé et de maintenir les périmètres actuels de compétence entre les différentes professions du chiffre et du droit , s'agissant des questions juridiques.

Interrogés par votre rapporteur lors de leur audition, les représentants du conseil supérieur des experts-comptables ont d'ailleurs déclaré souhaiter seulement s'assurer de pouvoir réaliser des études ou des travaux non juridiques indépendamment de toute prestation comptable.

Votre rapporteur rappelle que cette demande avait d'ores et déjà été satisfaite, il y a quatre ans 200 ( * ) , s'agissant des missions d'assistance pour les démarches déclaratives à finalité fiscale, sociale ou administrative. Il s'agissait alors d'autoriser les cabinets d'experts comptables à établir les fiches de paie ou les déclarations d'impôts d'entreprises dont ils ne géraient pas forcément les comptes.

En outre, il observe qu'il peut être difficile de distinguer ce qui, dans une consultation d'ordre fiscal ou social relève ou non du juridique, puisqu'il s'agit, à chaque fois, d'examiner ce que permet ou interdit le droit. À l'inverse, il est évident que les prestations d'ordre statistique, économique ou administratif ne concernent pas les autres professions du droit.

C'est pourquoi, il a proposé à votre commission un amendement qui distingue entre les prestations d'ordre statistique, économique et administratif et celles d'ordre juridique, fiscal et social. Les premières pourraient être effectuées indépendamment de toute mission comptable, à la différence des secondes, qui resteraient soumises au droit actuel.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 20 ter (art. 1er bis AA [nouveau] de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, art. 1er bis de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, art. 1 bis [nouveau] de l'ordonnance n° 45-2593 relative au statut des commissaires-priseurs, art. 7, 8 et 87 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, art. 3-2 [nouveau] de l'ordonnance du 10 septembre 1817 qui réunit, sous la dénomination d'Ordre des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, l'ordre des avocats aux conseils et le collège des avocats à la Cour de cassation, fixe irrévocablement, le nombre des titulaires, et contient des dispositions pour la discipline intérieure de l'Ordre, art. L  811-7 et L. 812-5 du code de commerce et art. L. 1242-2 et L. 1251-6 du code du travail) - Possibilité pour les professions judiciaires et juridiques réglementées d'exercer sous quelque forme juridique que ce soit, qui ne leur confère pas la qualité de commerçant et qui soit compatible avec leurs obligations déontologiques

Objet : le présent article vise à autoriser l'exercice libéral du droit sous quelque forme juridique que ce soit, sauf celles qui confèrent à leurs associés la qualité de commerçant (sociétés en nom collectif ou sociétés en commandite).

Cet article est le premier d'un trio (article 20 ter , article 21 et article 22) qui ont pour objet commun d'assouplir les règles relatives à l'exercice en société des professions du droit et de faciliter le recours à l'interprofessionnalité capitalistique en supprimant certaines des garanties aujourd'hui prévues : l'article 20 ter autorise le recours à n'importe quelle forme juridique, l'article 21 prévoit la création, par ordonnance, d'une société d'exercice libéral multiprofessionnelle et l'article 22 réforme le régime actuel de la société d'exercice libéral et celui des sociétés de participations financières de profession libérale.

Les formes juridiques d'exercice
des professions juridiques et judiciaires réglementées

Les professionnels du droit peuvent exercer soit à titre individuel, soit en société. En dehors de l'association, parfois utilisée par les avocats, deux types de structures s'offrent aux professionnels du droit pour pratiquer collectivement leur activité : la société civile professionnelle et la société d'exercice libéral. Un troisième type de structure a été créé au début des années 2000 afin de favoriser le rapprochement capitalistique des structures : les sociétés de participation financière de professions libérales (SPFPL).

1. Les sociétés civiles professionnelles (SCP)

Régies par les lois n° 66-879 du 29 novembre 1966 et n° 90-1258 du 31 décembre 1990, les SCP se définissent comme des personnes morales, constituées entre des personnes physiques exerçant une profession libérale soumise à un statut réglementé ou dont le titre est protégé. Le plus souvent, leur objet social est l'exercice collectif de la profession commune à tous ses membres. Par exception, il peut se limiter à la seule mise en commun de moyens (on la désigne alors comme une « société de moyens »).

À l'exception des sociétés d'architecte, les SCP sont toutes des sociétés mono-professionnelles 201 ( * ) .

Leur régime juridique se caractérise par la responsabilité indéfinie et solidaire de chaque associé aux dettes de la société. Inversement, la société est tenue solidairement aux dettes contractées par un associé dans le cadre de son activité.

Une SCP ne peut faire l'objet de financements extérieurs. Ceci limite les possibilités d'investissement, puisque toute augmentation de capital doit être le fait d'un associé. En outre, les cessions de parts sociales à un tiers sont soumises à des règles strictes, destinées à protéger les intérêts des associés restants : le cessionnaire doit être agréé par des associés représentants les trois quarts. En cas de refus persistant, le cédant peut obtenir de la société le rachat de ses parts à un prix fixé amiablement ou par expert.

Dès 1966 a été discutée l'opportunité d'ouvrir aux professions libérales les formes de sociétés commerciales, afin de limiter leur exposition personnelle aux dettes de la société, de faciliter la transmission des parts sociales et de favoriser le développement capitalistique de ces structures. Des préoccupations liées à la déontologie de certaines des professions concernées (en particulier celles du droit), ainsi qu'à la nécessité de préserver l'indépendance qui caractérise l'activité libérale ont conduit à concevoir un objet juridique intermédiaire entre ces sociétés commerciales et les SCP : les sociétés d'exercice libéral.

2. Les sociétés d'exercice libéral (SEL) en matière juridique

Les SEL, constituées pour l'exercice d'une profession libérale réglementée ou dont le titre est protégé, peuvent emprunter quatre formes juridiques calquées sur celles de sociétés commerciales : la société à responsabilité limitée (SELARL), la société anonyme (SELAFA), la société par actions simplifiée (SELAS) et la société en commandite par actions (SELCA).

Sauf disposition contraire de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ou des décrets dérogatoires qu'elle a prévus, le régime juridique d'une SEL est celui de la société commerciale à laquelle elle correspond.

L'article 1 er de ladite loi évoque la possibilité de SEL multiprofessionnelles. Toutefois, les décrets qui auraient dû être pris en ce sens ne l'ont jamais été. Les SEL sont donc exclusivement monoprofessionnelles.

La loi du 31 décembre 1990 définit un certain nombre de garanties, dérogatoires au droit des sociétés commerciales, afin d'assurer l'indépendance d'exercice des professions en cause et d'éviter qu'elles puissent être soumises au contrôle de tiers.

Ces garanties se déclinent en quatre types principaux :


Garanties sur la détention majoritaire du capital et des droits de vote

L'article 5 de la loi précitée exige que plus de la moitié du capital social et des droits de vote soit détenue par des professionnels en exercice dans la SEL, soit directement, soit indirectement, par une SPFPL ou une société en participation.

Par dérogation (art. 5-1), plus de la moitié du seul capital social peut être détenue par des personnes physiques ou morales qui exercent la même profession que celle de la SEL, mais dans une autre structure. Ceci vaut aussi pour une SPFPL, mais à la condition que la majorité du capital social et des droits de vote de cette SPFPL soit détenue par des professionnels exerçant la même profession que la SEL.

Cette double garantie sur le capital social et, surtout, sur les droits de vote vise à assurer que les décisions stratégiques sur la SEL et celles relatives aux conditions d'exercice de la profession, seront bien prises par les principaux intéressés, c'est-à-dire, les professionnels qui y travaillent.


Garanties sur la détention minoritaire du capital social

L'article 5 limite les personnes susceptibles d'être actionnaires minoritaires d'une SEL. Il s'agit d'éviter l'intrusion de tiers, étrangers à l'exercice de la profession en cause.

Peuvent ainsi seuls être actionnaires minoritaires les professionnels exerçant la même profession que la SEL, mais en dehors de celle-ci, les anciens associés de la SEL ou leurs ayants droit (mais pendant une durée limitée), des SPFPL ou des SEP et d'autres professionnels intervenant aussi dans le domaine du droit 202 ( * ) . Ceci permet donc à des avocats d'être actionnaires minoritaires d'une SEL de notaires.

Une personne frappée d'une interdiction d'exercice ne peut pas détenir de parts d'une SEL exerçant la même profession.


Garantie sur la composition des organes dirigeants et celles du conseil d'administration et du conseil de surveillance

Afin de garantir un contrôle effectif de la part des associés exerçant dans la société, l'article 12 de la loi du 31 décembre 1990 précitée impose que leurs soient attribués tous les postes dirigeants ainsi qu'au moins les 2/3 des postes de membres du conseil d'administration et du conseil de surveillance.

En outre, par exception au droit commun des sociétés, toute convention passée par les dirigeants et la société est exclusivement soumise au vote des associés en exercice dans ladite société lorsqu'elle porte sur les conditions dans lesquelles ils exercent leur profession.

Dans le même ordre d'idée, l'article 10 soumet la cession à un tiers de parts d'une SELARL à l'approbation des ¾ des seuls associés en exercice dans la société (des 2/3 pour une SELAFA).


Garanties propres aux contrôles du ministre de la justice et des ordres professionnels

L'article 3 soumet les SEL à un double agrément pour l'exercice de leur profession : celui de l'ordre professionnel correspondant, auquel elles doivent se déclarer, et celui du ministre de la justice, pour les offices publics ou ministériels.

L'article 10 prévoit qu'un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles le ministre de la justice donne son agrément à la cession de parts d'une SEL, au retrait du cédant et à la nomination du cessionnaire qui lui succède. Ce dispositif permet de maintenir un contrôle de l'autorité publique sur la transmission des offices ministériels.


Garanties diverses

Enfin, dans le souci d'éviter que les règles puissent être tournées, par l'utilisation de certaines facilités du droit des sociétés, les articles 8 à 12 interdisent le recours à certaines d'entre elles (prohibition des actions à vote double, qui sont seules accessibles aux professionnels en exercice dans la société, interdiction de la détention, par ces derniers, d'actions sans droit de vote et interdiction, d'une manière générale des actions de préférence faisant obstacle aux règles de majorité et d'exercice des fonctions dirigeantes de la loi du 31 décembre 1990).

3. Les sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL)

Ces sociétés, créées par la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF) sont des holdings , constituées sous forme de société commerciale, ayant pour objet la détention de parts ou d'actions de SEL relevant toutes de la même profession (SPFPL monoprofessionnelles, art. 31-1 de la loi du 31 décembre 1990) ou de professions différentes (SPFPL multiprofessionnelle, art. 31-2). Ces sociétés peuvent aussi détenir des participations dans tout groupement de droit étranger consacré à l'exercice d'une ou de plusieurs de ces professions. Enfin, elles peuvent avoir des activités accessoires en relation directe avec leur objet et destinées exclusivement aux sociétés dont elles détiennent des participations. Il s'agit principalement de fonctions support.

Les SPFPL connaissent le même type de garanties que les SEL, s'agissant des actionnaires majoritaires ou des actionnaires minoritaires. Mais celles-ci s'appliquent, non à des professionnels en exercice dans la société (par définition, la SPFPL n'est pas une société d'exercice professionnel), mais à des professionnels exerçant la ou les mêmes professions que celles des SEL détenues.

En revanche, la garantie relative à la détention des postes de dirigeants ou de membres du conseil d'administration ou de surveillance s'applique elle aussi, comme pour les SEL, aux professionnels en exercice dans la société détenue. Ceci garantit qu'ils conservent la maîtrise des décisions relatives à l'organisation du travail dans la SEL.

En outre, les SPFPL ne peuvent être détenues par des SPFPL ou des SEP.

Les SPFPL multiprofessionnelles présentent deux particularités :

- elles ne concernent, parmi les professions juridiques, que celles d'avocat, de notaire, d'huissier et de commissaire-priseur judiciaire, et, parmi les professions techniques, celles d'expert-comptable, de commissaire aux comptes et de conseillers en propriété industrielle ;

- elles ne peuvent détenir la majorité des parts d'une SEL que si elles-mêmes sont détenues à majorité par des professionnels exerçant la même activité que celle de la SEL. Cette restriction, prévue à l'article 6 est importante, puisqu'elle interdit qu'une SPFPL soit majoritaire dans plus d'un type professionnel de SEL.

Source : commission spéciale du Sénat

I -  La modification proposée

Introduit à l'initiative des rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, le présent article procède à certaines des modifications que le Gouvernement entendait opérer par ordonnance, conformément à l'habilitation qu'il sollicitait au 4° de l'article 21.

Il s'agissait, pour le Gouvernement de permettre le recours à toute forme juridique, à l'exclusion de celle conférant la qualité de commerçant à leurs associés, pour l'exercice des professions d'avocat, de notaire, d'huissier de justice, de commissaire-priseur judiciaire, d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire. Le texte de l'habilitation demandée précisait que la répartition du capital et des droits de vote devrait être soumise à des conditions assurant le respect des règles déontologiques propres à chaque profession.

Le texte proposé par les rapporteurs de la commission spéciale décline, profession par profession (un amendement en séance publique y a ajouté celle d'avocat aux conseils) 203 ( * ) , la possibilité de recourir à toute forme juridique pour l'exercice de l'activité en cause, en y apportant seulement deux garanties :

- la majorité des droits de vote et du capital social devrait être détenue, non pas par des membres ou des sociétés exerçant la même profession, mais par toute personne physique ou morale appartenant à l'une quelconque des professions juridiques ou judiciaires réglementées ;

- un décret en Conseil d'État serait chargé de déterminer les conditions d'application du présent dispositif, « dans le respect des règles de déontologie applicables à chaque profession ».

Le présent article reconnaît par ailleurs aux personnes physiques ou morales exerçant légalement une profession juridique ou judiciaire dans un État membre de l'Union européenne ou dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou dans la Confédération suisse, les mêmes prérogatives qu'à un professionnel établi en France.

II - La position de votre commission

Votre commission estime que le présent article, comme l'article 22, soulève de sérieuses difficultés.

• Une opportunité de la mesure qui n'est pas assurée

En effet, l'étude d'impact, très lacunaire, ne produit aucun élément concret sur les problèmes que la législation actuelle poserait aux professions du droit. Elle se limite à souligner que « les aménagements proposés présenteront des avantages économiques (investissements, création sociétés et emplois - sic ), en tant que les professionnels disposeraient d'une plus grande latitude pour choisir la forme juridique qui s'adapte le mieux à leur activité [... et qu'ils] permettront de faciliter la constitution de réseaux transeuropéens » 204 ( * ) .

Les rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale ont, pour leur part, fait valoir que « les entrepreneurs qui choisissent un statut juridique le font selon des critères de simplicité, de protection juridique et de fiscalité. Le choix du statut a un impact non seulement sur l'objet mais également sur les charges fiscales et sociales auxquelles l'activité est soumise ».

Ces constats , dont leurs auteurs déduisent la nécessité de réformer entièrement le droit applicable aujourd'hui, ne peuvent être accueillis sans réserve . En effet, votre rapporteur rappelle que, parmi les formes de sociétés aujourd'hui ouvertes aux professionnels du droit, comptent les différentes déclinaisons des sociétés d'exercice libéral (SELAS, SELAFA, SELARL, SELCA). Or, celles-ci ne diffèrent des autres formes de sociétés commerciales que par les règles de détention capitalistique et d'attribution des postes dirigeants. Leur régime fiscal ou social est en tout point identique à celui des sociétés commerciales.

Certes les contraintes relatives à la détention du capital et des droits de vote peuvent constituer un frein à la prise de participation par d'autres sociétés, puisque celles-ci ne pourront pas toujours prendre le contrôle de l'entité en cause. Mais votre rapporteur souligne que ce frein, voulu par le législateur, est justement destiné à garantir aux professionnels concernés une indépendance consubstantielle à leur activité.

Surtout, l'argument relatif à l'urgence de favoriser les prises de participation dans ces sociétés repose sur une prémisse contestable : les professions du droit auraient besoin d'importants investissements. Il faut, à cet égard, rappeler que parmi toutes les professions libérales, les professions du droit sont loin d'être celles qui requièrent les investissements les plus considérables : nombre de professions médicales et de même de professions techniques (comme les architectes) sont plus dépendantes, pour leur croissance, de tels investissements. On peut dès lors s'étonner qu'on choisisse de déréguler par priorité les professions du droit .

• Une réduction contestable des garanties offertes aux professions du droit...

Si, compte tenu des exigences européennes relatives à la liberté de circulation des capitaux et à la liberté d'établissement, l'ouverture du capital des sociétés d'exercice du droit à des professionnels ou des sociétés européennes n'est pas contestable, le choix de considérablement réduire le niveau de garanties offert aux praticiens du droit, en France, l'est beaucoup plus.

Comme on l'a vu précédemment 205 ( * ) , le système actuellement en vigueur repose sur une double exigence : assurer aux professionnels en exercice dans la société la maîtrise des conditions de leur exercice professionnel et soustraire leur activité à l'influence déterminante de tiers extérieurs à leur profession.

Or, le présent article remet en cause ces principes, puisqu'il autorisera, par exemple, la détention de sociétés d'avocats par des notaires, ou celle de sociétés d'huissiers de justice par des avocats. Les associés minoritaires de ces sociétés, ou les professionnels en exercice au sein de celles-ci seraient donc privés de la maîtrise de leurs conditions de travail.

En outre, compte tenu du champ d'application retenu, on peut craindre que les sociétés concernées soient structurellement confrontées à des conflits d'intérêts récurrents : une société d'administrateurs judiciaires pourrait-elle être détenue par des mandataires judiciaires, alors que la loi de 1985, en séparant ces deux activités avait entendu mettre fin à de tels conflits d'intérêts ? Une société d'avocat pourrait-elle posséder une société d'avocats aux conseils sans que se pose la question du suivi de la clientèle de la première par la seconde, jusqu'en cassation ?

La seconde garantie prévue par le présent article ne paraît pas à la hauteur des difficultés soulevées, pour deux raisons.

En premier lieu, le renvoi à un décret en Conseil d'État d'une question aussi essentielle que la prévention des problèmes déontologiques, pose problème. Votre rapporteur s'interroge à cet égard sur le risque qu'un tel renvoi soit constitutif d'un cas d'incompétence négative, constitutionnellement sanctionné.

En second lieu, s'il s'agit de reproduire, dans un texte réglementaire, des dispositions analogues à celles aujourd'hui prévues par la loi, l'étape n'est pas nécessaire et il serait préférable de conserver les textes actuels.

• ... difficilement justifiable au regard de garanties dont bénéficient les professions du chiffre

Votre rapporteur observe par ailleurs une différence de traitement entre les professions du droit et celles du chiffre.

En effet, si les experts-comptables et les commissaires aux comptes peuvent recourir à tous les types de forme juridique possibles, à l'exclusion de ceux qui confèrent la qualité de commerçant à leurs associés, les garanties d'indépendance qui leur sont attribuées sont bien supérieures à celles que prévoit le présent article.

Ainsi, l'article 7 de l'ordonnance statutaire des experts comptables 206 ( * ) prévoit que les deux tiers des droits de vote d'une société d'expertise comptable doivent être détenus par des experts comptables ou d'autres sociétés d'expertise comptable. En outre, il est interdit à tout autre personne de détenir, directement ou indirectement, une partie des droits de vote de nature à mettre en péril l'exercice de la profession, l'indépendance des intéressés ou le respect par ces derniers des règles inhérentes à leur statut ou à leur déontologie. Afin de garantir un contrôle ordinal efficace, la société est aussi tenue d'adresser annuellement au conseil de l'ordre dont elle dépend une liste de ses associés, ainsi que toute modification apportée à celle-ci.

Les règles applicables aux commissaires aux comptes sont encore plus rigoureuses : non seulement les trois quarts des droits de vote doivent être détenus par des commissaires aux comptes ou des sociétés exerçant cette profession, mais, lorsqu'une société en détient une autre, les actionnaires minoritaires ne peuvent détenir plus du quart des droits de vote des deux sociétés. Par ailleurs, les dirigeants de la société, ainsi que les trois quarts des membres des organes de gestion, d'administration, de direction ou de surveillance doivent être des commissaires aux comptes 207 ( * ) .

La différence de traitement entre les professions du chiffre et celles du droit que crée le présent article en autorisant, pour les secondes, une détention majoritaire par une autre profession de droit, ne paraît pas justifiée, alors que l'indépendance d'officiers publics ou ministériels ou celle d'auxiliaires de justice est aussi importante pour la sécurité juridique et la protection de nos concitoyens que celle des professionnels du chiffre.

Après en avoir débattu, votre commission a estimé, avec son rapporteur, que si une évolution des formes juridiques d'exercice des professions du droit était envisageable, faute d'un niveau de garanties suffisant, le texte proposé ne pouvait être retenu. Elle a par conséquent adopté les amendements de suppression déposés par le rapporteur, ainsi que par Mme Cécile Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 20 quater - Habilitation en vue de permettre la désignation d'huissiers de justice et de commissaires-priseurs judiciaires pour exercer, à titre habituel, certaines fonctions de mandataire judiciaire

Objet : cet article tend à habiliter le Gouvernement en vue de permettre la désignation des huissiers de justice et des commissaires- priseurs judiciaires pour exercer, à titre habituel, les fonctions de mandataire judiciaire dans les petites liquidations judiciaires sans salarié et dans les procédures de rétablissement personnel.

I - Les règles de désignation des mandataires judiciaires par le tribunal

Dans le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, le tribunal désigne en principe un administrateur et un mandataire judiciaire. Dans le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, il désigne un mandataire judiciaire, en qualité de liquidateur de l'entreprise, et dans certains cas un administrateur judiciaire.

Selon l'article L. 812-2 du code de commerce, le tribunal peut choisir le mandataire judiciaire sur la liste des mandataires judiciaires établie par la commission nationale d'inscription et de discipline, laquelle inscrit sur cette liste les personnes ayant satisfait aux règles d'accès à la profession (condition de nationalité et de probité, diplôme, examen d'accès au stage professionnel, stage de trois à six ans et examen d'aptitude), ou bien désigner « une personne physique justifiant d'une expérience ou d'une qualification particulière au regard de la nature de l'affaire et remplissant » les conditions de nationalité et de probité des mandataires judiciaires, après avis du parquet 208 ( * ) . Dans ce second cas, sont prévues des règles de prévention des conflits d'intérêts pour le professionnel concerné. Celui-ci doit respecter les règles applicables à la profession de mandataire judiciaire. En outre, la personne ainsi désignée à titre dérogatoire « ne peu[t] exercer les fonctions de mandataire judiciaire à titre habituel ».

Cette procédure dérogatoire permet ainsi, en principe, de désigner un huissier de justice, un commissaire-priseur judiciaire ou encore tout autre professionnel susceptible de présenter les qualifications requises.

Cependant, selon les représentants des tribunaux de commerce entendus par votre rapporteur, il est extrêmement rare que soit désigné un professionnel qui n'est pas mandataire judiciaire pour exercer les fonctions de mandataire judiciaire. Cette situation s'expliquerait par le fait qu'aucun autre professionnel qu'un mandataire judiciaire ne disposerait, en pratique, des compétences et de l'expérience requises pour exercer de façon efficace ces fonctions, alliant droit et chiffre : compétence en droit, notamment en droit du travail, en droit des procédures collectives et en droit commercial, et compétence en gestion et comptabilité. Cette situation s'expliquerait aussi par le fait que la responsabilité professionnelle d'un mandataire judiciaire étant souvent très importante, au vu des sommes manipulées, il est astreint à une assurance professionnelle bien plus lourde que la plupart des autres professions réglementées, qui ne disposent pas d'un tel niveau de garantie en cas de sinistre professionnel.

II - La finalité de l'habilitation sollicitée par le Gouvernement

Après que la commission spéciale de l'Assemblée nationale a sorti la profession de mandataire judiciaire de l'habilitation visant, à l'article 20 du projet de loi, à créer une nouvelle profession de commissaire de justice avec les professions d'huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire, en raison de ses spécificités, l'Assemblée nationale, en séance, a introduit le présent article 20 quater , à l'initiative du Gouvernement, dont l'amendement a été assorti d'un sous-amendement émanant de la commission.

L'article 20 quater , dans ses dispositions résultant de l'amendement du Gouvernement, sollicite une habilitation, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, en vue d'ouvrir la possibilité pour le tribunal de désigner des huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires pour exercer « à titre habituel » certaines fonctions de mandataire judiciaire . Cette ordonnance devrait également prévoir les modalités de rémunération de ces fonctions ainsi que l'adaptation des règles applicables aux mandataires judiciaires pour la discipline, le contrôle, la comptabilité et la représentation des fonds.

De plus, l'article 20 quater , dans ses dispositions résultant du sous-amendement de la commission, vise les fonctions de mandataire judiciaire pour les procédures de liquidation judiciaire ou de rétablissement personnel lorsque le débiteur n'a pas de salarié et que son chiffre d'affaires annuel n'excède pas 100 000 euros , sans préciser s'il est pris en compte hors taxes. Compte tenu des seuils fixés par les articles L. 641-2 et D. 641-10 du code de commerce pour la procédure de liquidation judiciaire simplifiée, obligatoire pour les entreprises ayant au plus un salarié et 300 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes, les huissiers et commissaires-priseurs judiciaires ne procéderaient qu'à des liquidations judiciaires simplifiées. Ainsi, le sous-amendement de la commission à l'Assemblée nationale a restreint le champ de l'habilitation sollicitée par le Gouvernement.

Le délai d'habilitation est fixé à dix mois. En vertu de l'article 106 du projet de loi, le projet de loi de ratification de l'ordonnance devra être déposé devant le Parlement dans les cinq mois de la publication de l'ordonnance.

Les deux professions d'huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire sont toutes les deux concernées par la présente habilitation, sans doute en raison de l'habilitation prévue à l'article 20 du projet de loi pour les fusionner dans une seule et nouvelle profession de commissaire de justice . La présente habilitation reprend également une proposition formulée par l'Autorité de la concurrence dans son avis du 9 janvier 2015 209 ( * ) .

Selon les chiffres fournis à votre rapporteur, sur 44 443 liquidations judiciaires ouvertes en 2013, 25 647 liquidations concernaient des entreprises dont le chiffre d'affaires était inférieur à 100 000 euros ou inconnu, avec des salariés ou non. On peut estimer à 20 000 environ le nombre de liquidations chaque année concernant des entreprises sans salarié et ayant réalisé moins de 100 000 euros de chiffre d'affaires. La possibilité de désigner un huissier de justice ou un commissaire-priseur judiciaire concernerait donc près de la moitié des liquidations judiciaires chaque année.

En tout état de cause, votre rapporteur tient à rappeler que, en vertu de l'article L. 812-2 du code de commerce, toutes les fonctions de mandataire judiciaire sont juridiquement ouvertes à un huissier de justice comme à un commissaire-priseur judiciaire, à condition de les exercer à titre non habituel. C'est sur ce dernier point seulement qu'intervient en réalité l'habilitation, en vue de permettre l'exercice à titre habituel , mais pour certaines fonctions de mandataire judiciaire seulement.

Enfin, votre rapporteur relève ce qui semble être une erreur dans la rédaction de l'habilitation, s'agissant de la possibilité d'une désignation pour une procédure de rétablissement personnel. Une telle procédure est en effet prévue en cas de surendettement des particuliers, pour les situations dans lesquelles seul l'effacement des dettes est possible : il ne peut pas y avoir de critères de nombre de salariés ou de chiffre d'affaires, puisqu'il ne s'agit pas d'une procédure concernant les entreprises. Sans doute faut-il comprendre qu'est ici visée la procédure de rétablissement professionnel , instituée par l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives et inspirée de la procédure de rétablissement personnel. Cette procédure très courte permet d'éviter la liquidation judiciaire tout en bénéficiant d'un effacement des dettes, pour un petit entrepreneur de bonne foi en cessation de paiements sans salarié et avec un actif inférieur à 5000 euros. De plus, elle ne dessaisit pas l'entrepreneur, qui peut donc continuer à disposer de ses biens et créer une nouvelle entreprise. En ouvrant la procédure, le tribunal désigne en effet un mandataire judiciaire.

III - Un doute sérieux sur l'utilité et la pertinence de cette habilitation

Si le conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires a, logiquement, fait part de la forte hostilité de la profession à une telle perspective, les représentants des juges consulaires, interrogés par votre rapporteur sur ce point, ont indiqué qu'il était très peu vraisemblable qu'un tribunal de commerce utilise à l'avenir la faculté de désigner un huissier de justice ou un commissaire-priseur judiciaire pour les liquidations judiciaires modestes, compte tenu des qualifications exigées d'un mandataire.

Dans ces conditions, ouvrir les fonctions de mandataire judiciaire, à titre habituel, aux huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires paraît voué à l'échec ou, à tout le moins, ne pourrait rencontrer qu'un succès limité. Il semble toutefois à votre rapporteur que, compte tenu des missions des mandataires judiciaires, les effectifs de leur profession mériteraient de progresser, de façon à traiter de façon plus rapide et efficace les liquidations de faible importance.

Dès lors, on ne peut guère imaginer qu'un huissier de justice ou un commissaire-priseur judiciaire puisse tirer une rémunération suffisante de l'exercice « à titre habituel » des fonctions de mandataire judiciaire, a fortiori si sont seules concernées les liquidations judiciaires sans salarié et inférieures à 100 000 euros de chiffre d'affaires, et donc la grande masse des liquidations impécunieuses, ainsi que les procédures de rétablissement professionnel.

Au surplus, entendue par votre rapporteur, la chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires a fait savoir que la profession n'était pas intéressée par les fonctions de mandataires judiciaires pour procéder à de petites liquidations, car elle ne dispose pas des compétences requises. En revanche, la chambre nationale des huissiers de justice a fait connaître son intérêt pour un tel élargissement des compétences de sa profession. Le fait de mêler ces deux professions résulte néanmoins vraisemblablement du projet de création de la profession de commissaire de justice, à l'article 20 du texte.

Outre le peu d'intérêt que cette faculté de désignation rencontrerait auprès des tribunaux, limitant de fait son utilité réelle, plusieurs limites et objections sont également apparues à votre rapporteur, faisant douter de sa pertinence même.

D'une part, alors que les mandataires judiciaires sont désignés pour des mandats de justice uniquement et n'ont pas de clientèle, les huissiers de justice ont une clientèle et peuvent potentiellement se trouver en situation de conflit d'intérêts , entre les intérêts d'un client et les intérêts des créanciers de l'entreprise pour laquelle ils ont reçu un mandat de justice. On ne saurait imaginer, par exemple, un huissier désigné mandataire pour liquider une entreprise pour ou contre laquelle il a cherché à recouvrer une créance.

Quelle serait l'indépendance d'un huissier désigné mandataire pour liquider une entreprise qui est un de ses clients ? Quelle serait sa neutralité dans la représentation de l'intérêt collectif des créanciers, mission première du mandataire, si un des créanciers est un de ses clients ? Le fait que seraient seules concernées de petites liquidations sans salarié ne saurait atténuer ces fortes difficultés de principe, qui vont à l'encontre de l'organisation comme de l'évolution des professions d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire depuis trente ans.

À cet égard, votre rapporteur tient à rappeler qu'un des objectifs de la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires-liquidateurs et experts en diagnostic d'entreprise, présentée par notre ancien collègue Robert Badinter, alors garde des sceaux, était de mettre un terme aux problèmes récurrents de conflit d'intérêts des anciens syndics de faillite, chargés à la fois de gérer le débiteur et de défendre les intérêts de ses créanciers : il en est résulté la fin de la profession discréditée de syndic et la création des deux professions d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire, incompatibles entre elles et dont le statut comporte des garanties d'indépendance fortes, dans l'intérêt des entreprises en procédure collective.

L'ordonnance devrait donc prévoir des règles très strictes en matière de conflit d'intérêts, et d'autant plus strictes que les fonctions de mandataire seront exercées « à titre habituel ». La gestion concomitante de la clientèle et des mandats de justice sera particulièrement complexe, en particulier dans les petits bassins économiques, sauf à conserver une activité d'huissier très limitée voire résiduelle. Il semblerait dans ce cas étrange à votre rapporteur qu'un huissier de justice soit amené à exercer sa profession d'origine à titre seulement accessoire.

D'autre part, dès lors que seraient concernées les petites liquidations judiciaires, dont les liquidations impécunieuses, votre rapporteur s'interroge sur les modalités de financement de la rémunération d'un huissier de justice ou commissaire-priseur judiciaire pour ces liquidations impécunieuses , c'est-à-dire celles dont le produit de la réalisation des actifs du débiteur ne permet pas au liquidateur d'obtenir une somme d'au moins 1 500 euros hors taxes à titre de rémunération, selon l'article L. 663-3 du code de commerce. Il appartient dans ce cas au tribunal de déclarer le dossier impécunieux, au vu des justificatifs présentés par le liquidateur. Selon les informations fournies à votre rapporteur, on recense de l'ordre de 25 000 procédures impécunieuses par an, à rapporter à 45 000 liquidations judiciaires environ.

Actuellement, un mécanisme de rémunération forfaitaire est prévu pour les dossiers impécunieux 210 ( * ) , en application des articles L. 663-3 et R. 663-41 à R. 663-50 du code de commerce : le tribunal fixe la somme perçue par le liquidateur à la différence entre la rémunération effectivement perçue par le liquidateur et le seuil de 1500 euros précité. Cette somme est versée par le fonds de financement des dossiers impécunieux (FFDI), géré par la Caisse des dépôts et consignations et financé par une quote-part des intérêts servis par la Caisse sur les fonds déposés par les administrateurs et mandataires judiciaires 211 ( * ) , lesquels sont tenus de déposer à la Caisse toute somme perçue dans le cadre des procédures pour lesquelles ils ont été désignés.

Ce mécanisme de financement des dossiers impécunieux fonctionne grâce à un principe de péréquation au sein de la profession. Les procédures qui impliquent un maniement de fonds important permettent de financer les procédures impécunieuses, de façon aujourd'hui équilibrée.

Comme la désignation d'autres professionnels comme mandataire judiciaire est extrêmement peu fréquente et n'est pas réservée aux petites procédures, elle ne pèse pas aujourd'hui sur le FFDI. En revanche, si les huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires pouvaient exercer à titre habituel les fonctions de liquidateur pour les petites liquidations et donc pour les liquidations impécunieuses - en supposant qu'ils soient désignés - ils bénéficieraient du mécanisme de financement du FFDI, alors qu'ils n'y contribueraient que relativement peu. En tout état de cause, ils devraient être tenus à l'obligation de dépôt des fonds des procédures auprès de la Caisse des dépôts et consignations, ce qui n'est pas le cas pour les fonds de tiers détenus au titre de l'activité d'huissier de justice 212 ( * ) .

Enfin, les huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires qui souhaiteraient exercer à titre habituel ces fonctions de mandataire judiciaire devraient souscrire des assurances spécifiques pour garantir à un niveau adéquat leur responsabilité professionnelle, quand bien même les dossiers concernés ne représenteraient que des montants limités.

À cet égard, la caisse de garantie des administrateurs et mandataires judiciaires 213 ( * ) ne garantit, en vertu de l'article L. 814-3 du code de commerce, que les seuls professionnels inscrits sur les deux listes des administrateurs et mandataires, qui sont tenus d'adhérer et de cotiser. Cette caisse permet de garantir leur responsabilité civile professionnelle en cas de sinistre. Chaque administrateur et mandataire est également tenu de souscrire une assurance par l'intermédiaire de la caisse, pour couvrir les conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile professionnelle, incluant les négligences et fautes de ses salariés. L'article L. 814-5 du code prévoit que les mandataires qui ne sont pas inscrits sur la liste nationale des mandataires judiciaires - cas de figure qui concernerait les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires dans le dispositif prévu par le présent article - doivent justifier de garanties pour le remboursement des fonds et d'une assurance spécifique.

Pour conclure, votre rapporteur s'interroge sur les conditions dans lesquelles huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires pourraient acquérir les compétences aujourd'hui exigées d'un mandataire judiciaire et dont ils ne disposent pas nécessairement, compte tenu des règles d'accès à leurs professions, quand bien même ne seraient concernées que les petites liquidations judiciaires sans salarié et les procédures de rétablissement professionnel. Certes, ces procédures n'appellent pas a priori de compétence, par exemple, en droit du travail, mais il peut toujours exister un contentieux prud'homal pendant.

IV - La position de votre commission

Votre commission a ainsi considéré que l'habilitation sollicitée par le Gouvernement pour permettre aux huissiers de justice et aux commissaires-priseurs judiciaires d'exercer certaines fonctions de mandataire judiciaire à titre habituel ne se justifiait pas, compte tenu des limites et des nombreuses objections signalées par son rapporteur.

À l'initiative de son rapporteur et de nos collègues Philippe Adnot, Jacques Mézard, Jean-Jacques Hyest, Cécile Cukierman et Jacky Deromedi, elle a donc adopté six amendements en vue de supprimer cette habilitation inutile et non pertinente.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 21 - Habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnance, les mesures nécessaires à la création de sociétés d'exercice libéral multiprofessionnel ainsi qu'à la modernisation des conditions d'exercice de la profession d'expertise comptable

Objet : compte tenu des suppressions intervenues à l'Assemblée nationale, le présent article tend seulement à habiliter le Gouvernement à créer, par ordonnance, des sociétés d'exercice libéral multiprofessionnel et à moderniser les conditions d'exercice de la profession d'expert-comptable.

I - Une habilitation supprimée : celle relative à la création d'un statut d'avocat en entreprise

Initialement, c et article prévoyait aussi deux autres habilitations, l'une pour instituer la profession d'avocat en entreprise, l'autre pour autoriser le recours à toute forme juridique pour l'exercice des professions du droit.

Cette seconde habilitation a, comme on l'a vu, fait l'objet d'une transposition directe, à l'article 20 ter . La première, quant à elle, a été supprimée en commission spéciale à l'Assemblée nationale par plusieurs amendements identiques, proposés par les rapporteurs ainsi que des députés de différents groupes politiques de la majorité et de l'opposition.

La création d'une profession d'avocat en entreprise est l'une des réponses envisageables à une question importante : celle de la confidentialité des échanges entre une entreprise et ceux qui, en son sein, sont chargés de la conseiller juridiquement.

En effet, comme l'ont évoqué, au cours de leur audition par votre rapporteur, les représentants de l'association française des juristes d'entreprise et ceux du conseil national des barreaux, faute d'une telle confidentialité, opposable aux investigations judiciaires, les documents échangés peuvent être saisis dans le cadre d'une procédure engagée en France ou à l'étranger.

Ce risque est conjuré dans d'autres pays soit par le recours à des avocats salariés par l'entreprise, soit par le recours à un privilège de confidentialité. Il conduit en France certains grands groupes à rechercher l'une ou l'autre de ces protections en délocalisant leur direction des affaires juridiques dans un pays qui pratique l'un des deux systèmes, ou en en confiant la direction à un juriste étranger qui bénéficie d'un de ces statuts protégés.

La confidentialité des échanges juridiques au sein d'une entreprise est donc, pour nos sociétés économiques, un enjeu de compétitivité .

Toutefois la solution préconisée par le Gouvernement a fait l'objet d'une vive contestation au motif que l'indépendance qui s'attache à l'exercice de la profession d'avocat serait incompatible avec le lien de subordination indissociable du statut de salarié.

En outre, il a été rappelé que la Cour de justice de l'Union européenne a exclu que le caractère confidentiel des échanges entre un avocat salarié et l'entreprise soit, compte tenu du rapport de subordination qui les lie, opposable aux institutions européennes 214 ( * ) . La Cour a toutefois réservé la possibilité pour chaque État d'en décider autrement, s'agissant de ses procédures internes.

La suppression intervenue à l'Assemblée nationale rend finalement compte, de l'imprécision, à ce stade, de la solution proposée d'un statut « d'avocat en entreprise ». La réflexion doit donc se poursuivre, même si le retard pris est regrettable.

II - La modernisation des conditions d'exercice de la profession d'expert-comptable

L'habilitation initialement prévue visait à étendre le champ des activités effectuées par les experts-comptables dans d'autres domaines que celui des comptes, et indépendamment de toute mission en la matière. Cette habilitation a fait l'objet d'une mesure d'application directe à l'article 20 bis précédemment examiné.

Un amendement des rapporteurs, adopté en commission spéciale, y a substitué une nouvelle habilitation pour, d'une part, autoriser la rémunération au succès pour les experts-comptables et, d'autre part, transposer à cette profession la directive du 20 novembre 2013 relative aux qualifications professionnelles.

Cette directive vise à faciliter la circulation et l'établissement des professionnels dans les différents États de l'Union européenne. Elle prévoit à ce titre plusieurs mesures : création d'une carte professionnelle, modification des conditions de reconnaissance des qualifications professionnelles ou d'exercice à titre temporaire dans un autre État que celui où le titre a été délivré, élaboration d'un cadre commun de formation...

L'instauration d'une rémunération au succès constitue, quant à elle, une innovation. Il s'agirait de lier l'honoraire perçu par le professionnel au résultat de sa prestation pour le client.

Votre rapporteur constate que le texte de l'habilitation ne précise pas si cette rémunération au succès se limitera aux prestations entrant dans le champ d'activité principale de l'expert-comptable ou si elle s'étendra à celles qu'il accomplit, à titre accessoire, en concurrence avec d'autres professionnels.

Si tel était le cas, l'expert-comptable se verrait ouvrir, s'agissant notamment de prestations juridiques, une faculté interdite aux professionnels du droit eux-mêmes ou fortement encadrée 215 ( * ) . C'est pourquoi, afin de lever toute ambiguïté, votre rapporteur a proposé à votre commission, qui l'a adopté, un amendement limitant le champ de la rémunération au succès aux seules missions comptables qui constituent l'activité principale de cette profession.

III - La création de sociétés multiprofessionnelles du droit et du chiffre

A. La modification proposée

La troisième habilitation sollicitée par le Gouvernement a pour objet l'instauration de sociétés multiprofessionnelles du droit, qui autoriserait l'exercice en commun, au sein de la même structure, de deux ou plusieurs des professions suivantes : avocat, avocat aux conseils, commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice, notaire, administrateur ou mandataire judiciaire et expert-comptable.

L'article 1 er de la loi précitée du 31 décembre 1990, relative aux sociétés d'exercice libéral, avait déjà prévu la possibilité de telles sociétés multiprofessionnelles. Toutefois, elle en avait subordonné la création à l'adoption de décrets en Conseil d'État, qui n'avaient jamais été pris.

Le texte de l'habilitation organise le régime juridique de ces sociétés multiprofessionnelles autour de trois garanties.

La première est que la totalité du capital et des droits de vote soit détenue par des personnes physiques ou morales, exerçant, en France ou au sein de l'Europe 216 ( * ) , l'une de ces professions juridiques ou celle d'expert-comptable.

La seconde garantie tient, sans plus de précision, à la préservation des principes déontologiques applicables à chaque profession.

Enfin, la dernière garantie vise la prise en considération des incompatibilités et des risques de conflits d'intérêts propres à chaque profession.

B. La position de votre commission

Votre rapporteur constate, tout d'abord, que le périmètre étendu des sociétés multiprofessionnelles du droit et du chiffre fragilise le dispositif, puisqu'il autorise certaines collaborations source de conflits d'intérêts.

Il serait ainsi envisageable de reconstituer au sein de la même structure une profession d'administrateur et de mandataire judiciaires que la réforme de 1985 sur les procédures collectives avait justement eu pour objet de séparer. De la même manière, associer des avocats à la cour et des avocats aux conseils pose une difficulté dans la mesure où les seconds, pour jouer correctement leur rôle de filtre du contentieux de cassation, doivent être indépendants des avocats qui ont représenté le client jusqu'en appel.

En outre, le dispositif crée une asymétrie entre certaines professions, puisqu'en vertu des règles applicables aux experts-comptables 217 ( * ) , ces derniers ne pourront s'associer sans posséder deux-tiers des droits de vote, ce qui privera les autres professions du contrôle effectif de la société.

Afin de limiter les risques de conflits d'intérêts et de garantir une équité de traitement entre les professions, votre commission a adopté l'amendement de son rapporteur excluant les experts-comptables, les administrateurs et les mandataires judiciaires ainsi que les avocats aux conseils du périmètre de ces sociétés multiprofessionnelles. En revanche, le même amendement y ajoute la profession de conseil en propriété industrielle, ce qui permettra un exercice commun avec la profession d'avocat, offrant ainsi à leurs clients une offre complète, de la conception du brevet à sa défense devant les juridictions.

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a par ailleurs souhaité assurer à chaque profession une maîtrise des conditions d'exercice de son activité au sein de la société.

À cet effet, elle a tout d'abord précisé, par amendement que pouvaient seuls détenir une part du capital ou des droits de vote, des personnes exerçant les mêmes professions que celles de la société. Il s'agit d'éviter qu'une société d'avocats et de notaires puisse être majoritairement détenue par des huissiers ou inversement.

Votre commission a ensuite expressément prévu que soit assurée aux professionnels en exercice au sein de la société la maîtrise des conditions d'exercice de leur activité. Cette garantie s'inspire de celle qui est applicable en vertu de l'article 12 de la loi précitée du 31 décembre 1990 sur les sociétés d'exercice libéral.

Enfin, dernière garantie ajoutée par votre commission, la société multiprofessionnelle devrait assurer la représentation équitable des professions qui la constituent au sein de ses organes de gestion, d'administration, de direction ou de surveillance. Cette disposition évitera toute marginalisation d'une profession au sein de la structure.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

CHAPITRE IV - Dispositions relatives au capital des sociétés

Article 22 (art. 3, 5 à 8, 10 à 13, 31-1 et 31-2 et 34 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales, art. L. 5125-7 et L. 6223-8 du code de la santé publique) - Assouplissement des contraintes de détention du capital dans les sociétés d'exercice libéral du droit et leurs holdings

Objet : le présent article réforme le droit de sociétés d'exercice libéral et de leurs holdings en assouplissant fortement, pour les professions juridiques, les contraintes de détention de capital et de droits de vote.

Le présent article constitue le troisième volet, avec les articles 20 ter et 21, de la réforme des sociétés d'exercice juridique proposé par le présent texte.

Le paysage actuel du droit en la matière, ainsi que le régime juridique des sociétés d'exercice libéral (SEL) et de leurs holdings, les sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL) a été présenté précédemment, dans l'encadré joint au commentaire de l'article 20 ter .

I - Les modifications proposées

Dans le projet de loi initial, l'article 22 contenait une demande d'habilitation à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires pour réaliser cette réforme.

Trois mesures étaient envisagées. Il s'agissait, pour les deux premières, de simplifier la création de SEL et de SPFPL, en modifiant notamment les règles relatives à la détention du capital social et des droits de vote. Enfin, la dernière mesure consistait à étendre le domaine des activités que les SPFPL peuvent exercer au profit des sociétés qu'elles détiennent.

L'étude d'impact évoquait deux pistes : la première était d'autoriser la détention du capital d'une SEL juridique à n'importe quel professionnel du droit ainsi qu'aux experts-comptables en limitant toutefois, pour ces derniers, la détention à un tiers du capital. La seconde piste était de permettre en plus, par dérogation, la détention majoritaire des droits de vote par des personnes exerçant la même profession que la société, mais en dehors de celle-ci.

À l'initiative de ses rapporteurs, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a fait le choix de supprimer la demande d'habilitation et de procéder directement à la réforme envisagée.

Nos collègues députés ont en effet estimé que l'obligation que la majorité des droits de vote et du capital soient détenus par des professionnels en exercice dans la société interdit à une même personne physique d'être actionnaire majoritaire dans plusieurs SEL et que cela empêche une SEL de détenir la majorité d'une autre SEL.

Votre rapporteur observe toutefois que les SPFPL, qui permettent des prises de participations majoritaires dans des SEL, ont justement été conçues pour remédier aux inconvénients ainsi dénoncés.

A. Les modifications relatives aux SEL

Sur ces prémisses, l'Assemblée nationale a adopté un dispositif complexe, qui réduit considérablement la portée des principes généraux définis à l'article 5 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, au profit de dérogations très étendues à l'article 6.

La garantie de détention majoritaire du capital et des droits de vote par des professionnels en exercice dans la société est certes maintenue, mais elle reçoit de très larges exceptions :

- la moitié des droits de vote, en plus de la moitié du capital pourrait être détenue par une personne physique ou morale exerçant la même profession que la société, sans qu'il soit besoin qu'elle exerce cette profession au sein de cette société ;

- pour les professions juridiques, cette exception serait encore plus étendue, puisqu'il suffirait que le détenteur de la majorité des droits de vote ou du capital soit un professionnel du droit 218 ( * ) . Ainsi, une SEL d'avocat pourrait être détenue à 99 % par des officiers publics ou ministériels, et inversement ;

- pour les professions juridiques la règle selon laquelle une SPFPL multiprofessionnelle ne peut détenir la moitié des parts d'une société, qu'à la condition que son propre capital et ses droits de vote soient détenus par des personnes exerçant la même profession de la SEL qui fait l'objet de prise de participation, serait supprimée 219 ( * ) . Ainsi, par exemple, une SPFPL d'huissiers de justice pourrait être l'actionnaire majoritaire de plusieurs SEL de notaires, d'avocats ou de mandataires judiciaires.

Des limites pourraient être apportées à ces dérogations, par décrets en Conseil d'État, pour tenir compte des nécessités propres à chaque profession et dans la mesure nécessaire au respect de l'indépendance de ses membres ou de ses règles déontologiques. Toutefois, votre rapporteur souligne que le texte écarte expressément les professions du droit du bénéfice de ces mesures de protection 220 ( * ) .

Par ailleurs, le présent article supprime aussi la plupart des autres garanties destinés à assurer la maîtrise, par les professionnels en exercice au sein de la société, de leurs conditions de travail.

Tel est notamment le cas des limites relatives à la détention d'actions à droit de vote double à l'article 8 de la loi du 31 décembre 1990, ou de celles de l'article 12, relatives à la composition des organes dirigeants (obligation que les dirigeants et les deux-tiers du conseil d'administration et du conseil de surveillance soient des associés en exercice dans la société), qui ne seraient plus applicables aux professions du droit, lorsque la société serait majoritairement détenue par des professionnels extérieurs à la société.

Enfin, les dispositions de l'article 10, relatives au contrôle, par le ministre de la justice, des cessions de parts et des nominations ou retraits dans une société titulaire d'un office public ou ministériel sont supprimées.

B. Les modifications apportées au régime des SPFPL

En premier lieu, le présent article étend le champ des activités que les SPFPL peuvent exercer au profit des sociétés dont elles détiennent des participations. En effet, jusqu'à présent ces activités ne pouvaient être qu'accessoires et en relation direction avec leur objet. Ces restrictions sont supprimées, la seule condition conservée étant qu'elles soient destinées aux sociétés détenues.

En second lieu, il soumet les SPFPL juridiques à un régime dérogatoire :

- la règle qui impose que la société soit majoritairement détenue, en capital et en droits de vote, par des personnes exerçant la même profession que celle exercée par les sociétés faisant l'objet de prises de participation, est supprimée, au profit d'une règle de détention par tout professionnel du droit. Ainsi, par exemple, une SPFPL de mandataires judiciaires pourrait être majoritaire dans une SEL d'administrateurs judiciaires et une SPFPL réunissant des notaires et des experts comptables pourrait détenir une SEL d'experts-comptables et une SEL d'avocats ;

- pour les SPFPL monoprofessionnelles, il supprime l'obligation que les dirigeants et les deux-tiers des membres des conseils d'administration et de surveillance soient recrutés parmi des associés exerçant les mêmes professions que celles des sociétés possédées. Il la remplace par l'obligation que les organes de contrôle comprennent au moins une personne exerçant cette même profession ;

- s'agissant des SPFPL multiprofessionnelles, qui ne concernent en réalité que des professions juridiques et la profession d'expert-comptable, l'obligation que le capital et les droits de vote soient détenus par des professionnels en exercice dans les sociétés qui font l'objet de la prise de participation est supprimée. De la même manière, les organes dirigeants n'auront plus à recruter principalement parmi ces mêmes professionnels, mais parmi tous autres professionnels du droit.

Pour le surplus, s'agissant des SEL comme des SPFPL, le texte prévoit, conformément aux principes de libre établissement et de reconnaissance des qualifications professionnelles au sein de l'Europe que les règles de détention du capital ou des droits de vote s'appliquent indifféremment, que la personne morale ou physique exerce son activité en vertu du droit français ou du droit équivalent d'un autre État de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou de la Suisse. Il impose par ailleurs l'information, une fois par an, des ordres professionnels des sociétés détenues par la SPFPL sur l'état de composition de son capital.

II - La position de votre commission

À titre liminaire, votre rapporteur observe que les modifications apportées par l'article 22 à la loi du 31 décembre 1990 relative aux SEL et aux SPFPL aggravent la complexité de ce texte et son manque de clarté. Il est à cet égard significatif que l'article 5, censé poser le principe, s'ouvre sur la mention suivante : « I. - Sous réserve de l'article 6 : », qui manifeste que la dérogation est si importante, qu'elle pourrait tenir lieu de principe.

En outre, l'accumulation des renvois et des dérogations rend le droit applicable peu lisible et incertain. La clarté et l'intelligibilité de la loi sont des objectifs de valeur constitutionnelle : la réforme du régime juridique des SEL et des SPFPL ne peut se limiter, si elle doit avoir lieu, à un aménagement des règles, sans une clarification de celles-ci à travers une refonte du texte. Cette préoccupation rejoint celle exprimée par votre commission spéciale, à l'article additionnel 12 A, en faveur de la création d'un code de l'accès au droit et de l'exercice du droit.

L'opportunité d'une réforme des sociétés d'exercice libéral peut être débattue. Votre rapporteur souligne toutefois qu'à aucun moment, lors des auditions, les représentants des professions juridiques qu'il a entendus n'ont évoqué de graves difficultés que leur poserait le régime actuel.

Si des aménagements sont concevables, les modifications proposées au présent article dépassent largement, par leurs conséquences, la mesure nécessaire.

En effet, elles conduisent, s'agissant des professions juridiques, à un affaiblissement considérable des garanties qui leur sont applicables. Cet affaiblissement se résume en trois points : possibilité pour toute profession juridique de détenir la majorité d'une société d'une autre profession juridique ; suppression de la garantie de maîtrise, par les professionnels en activité dans la société, de leurs conditions d'exercice ; suppression des mécanismes existants de contrôle ou des possibilités, au nom de la déontologie ou de l'indépendance des professions, de limiter certaines prises de participation.

Ces affaiblissements de garanties rendent possible des configurations susceptibles de générer des conflits d'intérêt ou de poser des problèmes d'indépendance d'exercice des professions concernées : des avocats pourraient être majoritaires dans une société de notaires et contrôler ainsi le fonctionnement d'un office public ; des administrateurs judiciaires pourraient posséder une SEL de mandataires judiciaires ; une SPFPL réunissant des notaires et des experts-comptables pourrait détenir, en plus de SEL correspondantes à ces deux professions, la totalité des parts (sauf une) d'une SEL d'avocat, dont la dernière part serait attribuée à un avocat sous la responsabilité duquel travaillerait un nombre indéterminé d'avocats salariés...

Votre rapporteur s'est étonné, à cet égard, du traitement particulier réservé aux professions du droit par rapport à d'autres professions, comme les professions de santé ou les professions techniques. Il ne semble pas que les premières aient plus eu à souffrir que les secondes des règles actuelles.

Cette différence de traitement est particulièrement marquée avec les professions du chiffre, auxquelles est assurée, comme on l'a vu précédemment 221 ( * ) , par leurs textes statutaires, une réelle maîtrise de leurs conditions d'exercice au sein des sociétés dont elles peuvent relever.

Une réforme des SEL et des SPFPL est sans doute envisageable, mais elle doit préserver les garanties nécessaires et ne pas défavoriser certaines professions par rapport à d'autres.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a adopté des amendements de suppression déposés par son rapporteur, ainsi que par nos collègues Roland Courteau, Jacques Mézard, Joël Guerriau et plusieurs de leurs collègues du groupe Union des démocrates et indépendants - Union centriste, et Cécile Cukierman et les membres du groupe Communiste républicain et citoyen.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 22 bis (art. 13, 13-1 [nouveau] et 22 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture) - Assouplissement des contraintes de détention du capital dans les sociétés d'architecture

Objet : le présent article, introduit en commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, vise d'une part à autoriser des sociétés d'architecture européennes à détenir des sociétés françaises et, d'autre part, à faciliter la création en France de succursales de telles sociétés.

I - La modification proposée

L'article 13 de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture 222 ( * ) fixe les règles auxquelles doivent se conformer, pour leur composition ou leur détention, les sociétés d'architecture.

Au nombre de ces règles compte l'obligation que la majorité du capital social et des droits de vote soient détenus par des architectes français ou européens ou par des sociétés d'architecture. L'absence de précision sur la nationalité de ces sociétés semble exclure que de telles entités, légalement constituées dans un autre pays de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, puissent devenir actionnaire majoritaire de sociétés françaises.

Le présent article vise à lever cette exclusion, peu conforme à la liberté d'établissement européenne. Ceci devrait permettre aux sociétés d'architecture française de disposer d'apport de capitaux européens, ce qui pourrait favoriser leur propre croissance.

La seconde modification opérée par le présent article consiste à autoriser, dans un nouvel article 13-1 de la loi précitée du 3 janvier 1977, la création en France, par des sociétés d'architecture françaises ou européennes, de succursales dépourvues de la personnalité morale. D'un point de vue juridique, la succursale serait transparente, puisque les architectes exerçant au sein de cette succursale seraient réputés agir sous la responsabilité de la société d'architecture d'origine, dans les conditions fixées par la réglementation française. L'ouverture d'une telle structure serait toutefois subordonnée à l'inscription sur un registre tenu par le conseil régional de l'ordre des architectes dont elle dépendra.

II - La position de votre commission

Entendus par votre rapporteur, les représentants du conseil national de l'ordre des architectes n'ont pas soulevé d'objections au dispositif proposé.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 22 ter (art. L. 5542-32-1, L. 5546-1-1 à L. 5546-1-9, L. 5546-10 à L. 5546-1-15 [nouveaux], L. 5621-1, L. 5621-3, L. 5621-4, L. 5785-1 et L. 5785-5-1 du code des transports) - Services privés de recrutement et de placement de gens de mer

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, vise à clarifier certaines dispositions du code des transports relatives aux services privés de recrutement et de placement de gens de mer.

I - Le droit en vigueur

Les entreprises de travail maritime, ou sociétés de manning , recrutent des gens de mer pour les mettre à la disposition des armateurs . L'armateur n'est pas lié au marin par un contrat de travail puisque c'est la société de manning qui embauche et rémunère le salarié.

Cette modalité d'emploi est autorisée depuis la loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français (RIF). Son encadrement a été fortement renforcé par la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable, dont l'objectif était de transposer les normes sociales de l'Organisation internationale du travail , telles qu'elles résultent de la Convention du travail maritime signée à Genève le 7 février 2006.

Toutefois, certaines dispositions du code des transports, issues de la loi du 16 juillet 2013, se sont révélées insuffisamment précises pour être correctement mises en oeuvre . Il s'agit notamment :

- de l'article L. 5542-32-1 qui oblige l'armateur à garantir financièrement ses obligations de soins et de rapatriement des marins embarqués, dont un règlement précise les modalités d'application au secteur de la pêche ;

- des neuf articles relatifs aux services privés de recrutement et de placement des gens de mer : les articles L. 5546-1-1 à L. 5546-1-7 créent un registre national des services de recrutement et de placement privés de gens de mer, contrôlé par l'autorité administrative et tenant à jour la liste des gens de mer qu'ils ont recrutés ou placés ; ils précisent également les obligations d'information et de vérification de ces opérateurs, en particulier celle de souscrire une garantie financière ; l'article L. 5546-1-8 interdit d'imposer aux gens de mer la prise en charge des frais occasionnés par leur recrutement, y compris les droits de timbre liés à la délivrance de leur passeport ; enfin l'article L. 5546-1-9 applique aux services de recrutement et de placement des gens de mer les règles en vigueur pour les agences de travail temporaire et prévoit les sanctions encourues en cas de manquement à ces règles.

II - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article, introduit en séance publique sur proposition du Gouvernement, prévoit ainsi une rédaction complétée et améliorée de certaines dispositions du code des transports relatives à l'emploi des gens de mer.

Le 1° réécrit l'article L. 5542-32-1 pour préciser la portée de l'obligation de garantie financière exigée en matière de rapatriement des gens de mer . Les dispositions issues de la loi du 16 juillet 2013 se sont avérées trop générales pour permettre aux assureurs de proposer les produits d'assurance adéquats, de sorte que seuls les navires couverts par des mutuelles spécifiques au secteur maritime en bénéficient. En ce qui concerne les navires de pêche, ces nouvelles dispositions ne s'appliqueront plus que pour ceux travaillant habituellement hors des zones économiques exclusives des États parties à l'accord sur l'Espace économique européen .

Le 2° modifie certaines procédures applicables aux services privés de recrutement et de placement des gens de mer :

- à l'article L. 5546-1-1, il est précisé que cette notion recouvre les entreprises de travail temporaire au sens du code du travail qui exercent une activité de placement de gens de mer, et les entreprises de travail maritime au sens du code des transports ; les modalités de la libre prestation de services pour les ressortissants de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen sont également indiquées ;

- à l'article L. 5546-1-5, la portée et les modalités des obligations de garantie et d'assurance des services privés de recrutement et de placement des gens de mer sont précisées, afin de permettre aux assureurs de proposer des contrats adaptés ;

- à l'article L. 5546-1-6, l'agrément des entreprises de travail maritime est supprimé ; en revanche, l'inscription au registre national des services privés de recrutement et de placement des gens de mer est maintenue , assortie des sanctions administratives prévues à l'article L. 5546-1-9 en cas de non-respect de cette obligation ; enfin, la possibilité de recourir aux entreprises de travail maritime est étendue pour l'emploi de gens de mer à bord des navires de plaisance , afin de répondre à une nouvelle demande 223 ( * ) .

Aux dispositions générales des articles L. 5546-1-1 à L. 5546-1-9, sont également ajoutées deux nouvelles séries de dispositions spécifiques : la première comporte les articles L. 5546-1-10 à L. 5546-1-14 et précise les modalités et le contenu du contrat de mise à disposition de gens de mer par les entreprises de travail maritime ; la seconde comporte l'article L. 5546-1-15 et précise la nature du contrat de mission entre le salarié relevant des gens de mer et l'entreprise de travail temporaire .

Le 4° comprend des mesures de coordination .

Le 5° prévoit l' adaptation de ces dispositions à Wallis-et-Futuna .

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article unanimement attendu par la profession et validé par le Conseil supérieur des gens de mer. Il se situe dans le prolongement du travail effectué progressivement depuis 2005 pour encadrer le manning et améliorer la protection offerte aux 7 000 marins actuellement concernés par ce type de contrat sur les navires français.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

CHAPITRE V

Urbanisme

Article 23 (art. L. 101-1 du code de la construction et de l'habitation) - Rapport sur la mobilité dans le parc social

Objet : cet article complète le rapport sur le logement prévu à l'article L. 101-1 du code de la construction et de l'habitation par un volet sur la mobilité dans le parc social.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 101-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que, tous les deux ans, un rapport est présenté par le Gouvernement au Parlement sur la situation du logement en France.

L'article 23 du projet de loi précise que ce rapport inclura désormais également un volet sur le traitement des demandes de mutations et sur les parcours résidentiels.

II - La position de votre commission

Il ne s'agit pas ici d'une nouvelle demande de rapport, mais d'enrichir le contenu d'un rapport au Parlement biannuel déjà prévu par la loi et qui contient des informations utiles et actualisées sur le logement. C'est pourquoi votre commission a décidé de maintenir l'article.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 bis A (art. L. 2252-5 du code général des collectivités territoriales) - Information de la commune à l'occasion d'une demande de garantie d'emprunt pour une opération de logement social

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale, oblige l'opérateur de logement social à informer les communes de la possibilité qu'elles ont de s'adresser à la Caisse de garantie du logement locatif social lorsque leur garantie est sollicitée pour une opération de logement social.

I - Le dispositif proposé

Cet article crée une obligation d'information pour l'organisme qui formule auprès d'une commune une demande de garantie d'emprunt au bénéfice d'une opération de logement social : il sera tenu d'informer cette collectivité de la possibilité de souscrire une garantie de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) prévue à l'article L. 452-1 du code de la construction et de l'habitation. Comme la contrepartie de l'apport d'une garantie par la collectivité à une opération de logement social est un droit de réservation sur un quota de logements mis en location (article L. 441-1 du même code), la substitution de la garantie de la Caisse de garantie du logement locatif social à la garantie de la collectivité implique la perte de son quota de réservation.

II - La position de votre commission

La commission a adopté un amendement de suppression de cet article, dont le contenu normatif est faible. L'existence de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) est en effet prévue par la loi et il paraît peu utile de rappeler aux collectivités que la loi existe. Introduire des obligations d'information de ce type, qui ne sont que des rappels de la loi, complexifie et fragilise les procédures administratives. Par ailleurs, on peut rappeler que le code général des collectivités  territoriales prévoit des ratios prudentiels qui empêchent les communes  de dépasser un certain niveau de garantie et qui sont censés prévenir l'apparition d'un risque de défaut.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 23 bis B (art. 5 de la loi n° 2010-238 du 9 mars 2010) - Délai pour l'installation d'un détecteur de fumée

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale, sécurise la situation juridique des propriétaires dans l'incapacité de procéder à l'installation d'un détecteur de fumée dans les délais requis.

I - Le dispositif proposé

La loi n° 2010-238 du 9 mars 2010 visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation, codifiée aux articles L. 129-8 et L. 129-9 du code de la construction et de l'habitation (CCH), prévoit l'installation dans tous les logements d'au moins un détecteur de fumée normalisé. Cette disposition est entrée en application le 9 mars 2015.

Dans la version initiale de la loi du 9 mars 2010, l'obligation d'installation pesait sur l'occupant du logement, qu'il soit propriétaire ou locataire. L'article 3 de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement 224 ( * ) a transféré cette obligation exclusivement sur le propriétaire. Compte tenu de la date prochaine d'entrée en vigueur de cette obligation, le changement récent du titulaire de l'obligation rend difficile l'installation des détecteurs de fumée dans les temps impartis du fait de l'indisponibilité du matériel et des installateurs.

C'est pourquoi cet article, sans reporter la date d'entrée en application de la loi du 9 mars 2010, s'attache néanmoins à sécuriser la situation juridique des propriétaires dans l'incapacité de procéder à l'installation de ces détecteurs en prévoyant que ceux d'entre eux qui ont signé un contrat d'achat de ce type d'appareil au plus tard au 8 mars 2015 sont réputés satisfaire à l'obligation de l'article L. 129-8, à condition que le détecteur soit effectivement installé avant le 1 er janvier 2016 .

II - La position de votre commission

L'ensemble des bailleurs, notamment sociaux, impactés par le changement du titulaire de l'obligation se retrouvent confrontés à une situation d'engorgement du marché qui les place dans l'impossibilité de satisfaire à leurs obligations dans les délais impartis. Ils accueillent donc avec soulagement les dispositions contenues dans cet article.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 bis (art. L. 301-3, L. 301-5-1 et L. 301-5-2 du code de la construction et de l'habitation, art. L. 3641-5, L. 5217-2 et L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales) - Création d'un « guichet unique » de la délégation des aides à la pierre

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, permet de déléguer les aides en faveur du logement intermédiaire.

I - Le dispositif proposé

Cet article, introduit à l'initiative du Gouvernement, permet de déléguer aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), aux conseils départementaux et aux métropoles les aides en faveur du logement intermédiaire et le conventionnement aux acteurs déjà délégataires des aides à la pierre. L'objectif est de créer un guichet unique des aides au logement sur les territoires concernés (que ce soit sous forme de subventions, de prêts aidés ou d'aides fiscales ; qu'elles soient délivrées par des agréments ou un conventionnement).

Le III de l'article 23 bis dispose que les conventions de délégation déjà conclues avant la promulgation de la présente loi pourront faire l'objet d'un avenant pour prendre en compte ces nouvelles dispositions.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur souligne que l'accroissement du périmètre de délégation permis par l'article 23 bis n'implique en aucun cas la fongibilité entre les différentes aides déléguées, puisque seul le logement social peut être le bénéficiaire des financements des aides à la pierre déléguées sous forme de subvention.

Cette délégation des aides en direction du logement intermédiaire constitue un facteur de simplification administrative mais aussi d'efficacité accrue des politiques locales du logement. Le délégataire disposera en effet des différents leviers de la politique en faveur du logement, à savoir la gestion des aides financières mais aussi la définition du programme local de l'habitat (PLH), ce document pouvant aussi contenir des objectifs de production en matière de logements intermédiaires depuis la publication de l'ordonnance du 20 février 2014 225 ( * ) .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 ter (art. L. 254-1, L. 302-1, L. 302-16, L. 421-1, L. 422-2 et L. 422-3 du code de la construction et de l'habitation) - Suppression de la condition de zonage dans la définition du logement intermédiaire

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, simplifie la définition du logement intermédiaire en supprimant la référence au zonage basé sur la taxe sur le logement vacant.

I - Le dispositif proposé

La définition du logement intermédiaire issue de l'ordonnance du 20 février 2014 précitée s'appuie pour partie sur un zonage et sur un dispositif qui peut être ainsi présenté.

Rappel sur le dispositif de soutien au logement intermédiaire

Selon le ministère du logement, le parc de logement intermédiaire, qui correspond à une offre de logements dont le loyer est compris entre les niveaux de loyer réglementés du parc social et les niveaux de loyer du parc privé, est aujourd'hui quasi inexistant du fait de l'absence de dispositifs de soutien spécifiques. Pour un bailleur, louer dans des conditions intermédiaires équivaut en effet à consentir une perte de loyer. Soutenir le développement du parc intermédiaire implique donc de compenser cette perte. Le dispositif progressivement mis en place par le Gouvernement depuis deux ans à cette fin comprend trois composantes :

1. Un dispositif réglementaire, créé par l'ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire et codifié à l'article L. 302-16 du CCH, qui comporte trois mesures :

? la définition d'un statut du logement intermédiaire permettant aux collectivités territoriales ou leurs groupements d'en prescrire la production au sein des documents de planification et de programmation (PLH). Il s'agit de faciliter la mise en oeuvre de véritables politiques locales de développement du logement locatif intermédiaire - à l'instar de ce que certaines collectivités font d'ores et déjà pour le logement locatif social. Ce régime du logement intermédiaire se caractérise notamment par :

- un zonage . Le logement intermédiaire est défini uniquement dans les communes soumises à la TLV, taxe sur les logements vacants (communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie par l'article 232 du code général des impôts), ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l'article L. 302?5 du code de la construction et de l'habitation (communes dites « champignon ») ;

- l'octroi d'aides de l'État ou des collectivités sous condition de respect de plafonds de ressources par les occupants, ainsi que de plafonds de prix ou, pour les logements donnés en location, de plafonds de loyers. Le décret n° 2014-1102 du 30 septembre 2014 fixe les plafonds de loyer, de prix et de ressources applicables au logement intermédiaire ;

? la création d'un contrat de bail de longue durée dédié à la production de logements permettant aux propriétaires de consentir, le cas échéant avec obligation de construire ou de réhabiliter les constructions existantes, des droits réels à un preneur, conditionnés par le respect d'obligation de plafonds de ressources et de loyers et le cas échéant de clauses anti-spéculatives. L'idée centrale du dispositif proposé est de dissocier le foncier du bâti pour diminuer le prix des logements qui seront proposés sur le marché ;

? la possibilité ouverte aux organismes de logement social , sur agrément du ministre en charge du logement, de créer des filiales dédiées à la réalisation de logements intermédiaires, dès lors qu'ils ont signé un avenant à leur convention d'utilité sociale fixant le cadre de cette nouvelle activité. Une étanchéité est assurée entre l'activité de la filiale et celle de la société-mère.

2. Un dispositif d'aide à l'investissement locatif intermédiaire par les personnes physiques. Il vient en remplacement de l'ancien dispositif d'aide à l'investissement locatif dit « Scellier » qui arrivait à échéance. Codifié à l'article 199 novovicies du code général des impôts, ce dispositif dit « Pinel » résulte de l'article 80 de la loi de loi de finances pour 2013 et de l'article 5 de la loi de finances pour 2015.

Il consiste désormais en une réduction d'impôt de respectivement 12 %, 18 % ou 21% pour la construction ou l'acquisition d'un ou deux logements neufs en contrepartie d'un engagement de location sous plafonds de loyer et de ressources du locataire d'une durée minimum de, respectivement, 6, 9 ou 12 ans. Par ailleurs, pour les investissements réalisés à compter du 1 er janvier 2015, l'investisseur a la possibilité de louer le logement à un ascendant ou un descendant, tout en conservant le bénéfice de l'avantage fiscal, dès lors que les conditions d'application du dispositif sont remplies et, notamment, si les plafonds de loyer et ceux de ressources des ascendants ou descendants locataires sont respectés. Cette réduction d'impôt a été calibrée pour compenser une perte de loyer de 20 % par rapport au niveau des loyers libres. Les préfets de Région ont la possibilité, en fonction du contexte local, de moduler à la baisse localement les plafonds de loyer.

3. Un régime fiscal spécifique aux personnes morales pour le développement de l'offre de logement intermédiaire dans les communes situées en zones tendues . Issu de l'article 73 de la loi de finances pour 2014, il s'applique aux logements neufs dont l'ouverture de chantier est intervenue à compter du 1 er janvier 2014. Il prévoit l'application d'un taux réduit de TVA de 10% (article 279-0 bis A du CGI) et d'une exonération de taxe foncière aux opérations de construction de logements intermédiaires pour une durée maximale de 20 ans (article 1384-0 A du CGI). Le bailleur s'engage à louer les logements concernés, sous plafonds de ressources et de loyers identiques à ceux du dispositif d'aide à l'investissement locatif intermédiaire dit « Pinel ». Le bailleur peut commencer à revendre partiellement ces logements à partir de la 11 ème année (dans la limite de 50 % des logements ayant bénéficié de l'avantage fiscal), puis totalement à partir de la 16 ème année.

Dans la pratique, le zonage « réglementaire » du logement intermédiaire (zonage TLV) ne s'articule pas correctement avec le zonage « fiscal » des dispositifs d'aide existants en faveur du logement intermédiaire (zonage ABC). Les zonages ABC et TLV étant distincts, des logements peuvent aujourd'hui bénéficier des différents dispositifs fiscaux pour la production de logements intermédiaires tout en n'étant pas considérés comme des logements intermédiaires au sens de l'ordonnance du 20 février 2014.

En outre, ce zonage crée des difficultés opérationnelles relatives au régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, introduit par l'article 73 de la loi de finances pour 2014. En effet, le zonage introduit par l'ordonnance du 20 février 2014 ne recouvre pas l'intégralité des zones A et B1 sur lesquelles s'applique ce dispositif. En conséquence, les filiales des organismes HLM dédiées au logement intermédiaire ne peuvent intervenir que sur le zonage prévu par l'ordonnance du 20 février 2014, contrairement à leur maison mère.

L'article 23 ter , introduit à l'initiative des rapporteurs de l'Assemblée nationale, fait donc le choix de supprimer la condition de zonage TLV. Le 1° rectifie à cet effet la définition du logement intermédiaire figurant à l'article L. 302-16 du code de la construction et de l'habitation et les 2° à 5° effectuent des corrections de références par cohérence dans plusieurs articles du même code.

II - La position de votre commission

Cet article apporte une simplification bienvenue au dispositif légal définissant le logement intermédiaire en supprimant un zonage dont la pertinence était discutable.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 quater A (art. L. 411-2, L. 421-1, L. 422-2 et L. 422-3 du code de la construction et de l'habitation) - Exclusion des logements intermédiaires du service d'intérêt économique général (SIEG) au 1er janvier 2020

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale, exclut du champ du SIEG les opérations de construction, acquisition, amélioration, attribution, gestion et cession de logements intermédiaires.

I - Le dispositif proposé

Aux termes de l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, les organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) sont considérés comme des entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général (SIEG) et peuvent donc bénéficier de compensations de service public sous forme d'exonérations fiscales et d'aides spécifiques de l'État.

L'article L. 411-2 dispose également que sont incluses dans le SIEG leurs opérations de construction, acquisition, amélioration, attribution, gestion et cession de logements intermédiaires, à condition que ces logements représentent moins de 10 % des logements locatifs sociaux détenus par l'organisme.

Or, l'inscription du logement intermédiaire dans le champ du SIEG est problématique du point de vue du droit européen, puisqu'il ne s'agit pas d'un service destiné à des groupes sociaux pouvant être considérés comme vulnérables. C'est la raison pour laquelle l'article 23 quater A du projet de loi modifie l'article L. 411-2 et retire le logement intermédiaire du champ du SIEG à compter du 1 er janvier 2020.

Cela n'interdira pas aux organismes d'HLM d'intervenir dans le champ du logement intermédiaire, mais ils le feront dans un autre cadre que le SIEG. L'article complète à cet effet l'objet social des offices publics de l'habitat (art. L. 421-1 du code de la construction et de l'habitation), des sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré (art. L. 422-2 du même code), des sociétés anonymes coopératives de production d'habitations à loyer modéré et des sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré (art. L. 422-3 du même code) en indiquant que ces organismes pourront construire, acquérir, améliorer, attribuer, gérer et céder de tels logements, sans que ces derniers puissent représenter plus de 10 % de leur parc locatif.

II - La position de votre commission

Il s'agit d'une mise en conformité avec le droit européen du droit national sur le logement social et intermédiaire, qui n'implique pas de conséquences pratiques pour les organismes HLM.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 quater (art. L. 421-1, L. 422-2 et L. 422-3 du code de la construction et de l'habitation) - Définition de l'objet social des filiales des organismes HLM dédiées au logement intermédiaire

Objet : cet article élargit l'objet social des filiales d'organismes HLM dédiées au logement intermédiaire.

I - Le dispositif proposé

L'objet social des filiales des organismes HLM dédiées au logement intermédiaire est fixé par la loi (ordonnance du 20 février 2014 précitée).

L'article 23 quater du projet de loi élargit cet objet social dans plusieurs directions en disposant que :

- les filiales des organismes HLM dédiées au logement intermédiaire pourront également acquérir de tels logements, en plus de pouvoir les construire et les gérer ;

- elles pourront acquérir des locaux commerciaux pour les transformer en logements intermédiaires ;

- elles pourront se rassembler au sein d'une filiale de logement intermédiaire et exercer un contrôle conjoint sur elle.

Ces trois modifications sont opérées pour les offices publics de l'habitat (article L. 421-1 du code de la construction et de l'habitation modifié par le I de l'article), pour les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré (L. 422-2 du même code modifié par le II), ainsi que pour les sociétés anonymes coopératives de production d'habitations à loyer modéré et sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré (L. 422-3 du même code modifié par le III).

II - La position de votre commission

Les trois modifications apportées par l'article 23 quater à l'objet social des organismes HLM vont dans le bon sens. La première et la deuxième modification leur offrent de nouveaux moyens d'étendre le parc de logement intermédiaire par inclusion de locaux déjà existants. La troisième permet d'éviter la dispersion de l'action des organismes HLM qui, sans cela, pourraient être conduits à développer chacun leur filiale de logement intermédiaire.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 quinquies (art. L. 421-1, L. 422-2 et L. 422-3 du code de la construction et de l'habitation) - Autorisation du cumul des fonctions d'administrateur, de membre du directoire ou de membre du conseil de surveillance pour les organismes d'HLM et leurs filiales dédiées au logement intermédiaire

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, autorise le cumul des fonctions d'administrateur, de membre du directoire ou de membre du conseil de surveillance pour les organismes d'HLM et leurs filiales dédiées au logement intermédiaire.

I - Le dispositif proposé

L'ordonnance du 20 février 2014 précitée a autorisé les organismes HLM à créer des filiales dédiées au logement intermédiaire. Afin de bien séparer ce qui relève d'un service d'intérêt économique général (le logement social) et ce qui n'en n'est pas (le logement intermédiaire), des règles garantissant l'étanchéité entre la maison mère et la filiale ont été instituées.

Toutefois, certaines de ces règles rendent impossibles aujourd'hui, dans la pratique, la création de filiales par la plupart des organismes HLM de taille moyenne. Parmi ces obstacles juridiques, figure l'interdiction, pour la maison mère et la filiale, d'avoir des administrateurs, des membres du directoire ou des membres du conseil de surveillance communs. Seuls les représentants des collectivités territoriales peuvent aujourd'hui cumuler ces fonctions. Cette situation créé une inégalité entre les offices publics de l'habitat (OPH) et les entreprises sociales de l'habitat (ESH). En effet, si la majorité des membres des conseils d'administration des OPH sont des élus locaux (qui peuvent donc siéger à la fois au conseil de la maison mère et de la filiale), l'interdiction de cumul de ces fonctions - bénévoles ! - empêche les autres organismes HLM de contrôler leur filiale dédiée au logement intermédiaire.

Cet article, introduit par nos collègues rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale supprime donc l'interdiction de cumul pour les trois formes d'organismes HLM et harmonise de ce point de vue le régime des ESH (L. 422-2 du code de la construction et de l'habitation) et des coopératives HLM (L. 422-3) avec celui des OPH (article L. 421-1),

II - La position de votre commission

Un seul opérateur est en fait capable d'investir à grande échelle dans le logement intermédiaire : la SNI (Société nationale immobilière). Or, le mouvement HLM considère que la taille du parc de logements intermédiaires possédé par les organismes (80 000 logements, soit 2 % du parc immobilier des organismes HLM), permettrait de créer 10 à 15 filiales dans le logement intermédiaire. Les dispositions de cet article devraient permettre le développement de ces initiatives.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 sexies - Ratification de l'ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, ratifie l'ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire.

Le 6° de l'article 1 er de la loi n° 2013-569 du 1 er juillet 2013 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction a conduit, dans le délai de huit mois impartis, à la publication de l'ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire.

Le projet de loi de ratification a été enregistré à l'Assemblée nationale le 16 juillet 2014, dans le respect du délai de cinq mois imparti pour ce faire.

Le contenu de cette ordonnance a fait l'objet d'une présentation synthétique lors de l'examen de l'article 23 ter . On doit noter que le texte originel de l'ordonnance fait l'objet de plusieurs modifications dans le présent projet de loi. Compte tenu de ces correctifs, qui vont dans le sens de la simplification administrative et lèvent certains blocages règlementaires injustifiés, le dispositif du logement intermédiaire apparaît aujourd'hui configuré correctement pour remplir sa mission.

Cette dernière observation, votre rapporteur tient à le souligner, est primordiale. Si le développement du logement intermédiaire ne doit en aucun cas se faire au détriment de celui du logement social, dont les besoins sont criants, s'il doit se faire également dans un cadre qui garantit l'étanchéité des fonds publics engagés, il n'en reste pas moins qu'il doit être encouragé. Il répond en effet aux besoins d'une catégorie de la population trop souvent oubliée, trop riche pour bénéficier du logement social, mais pas assez fortunée pour se loger au prix du marché.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 23 septies (nouveau) (art. L. 421-12-1 du code de la construction et de l'habitation) - Rupture amiable du contrat entre un office public de l'habitat (OPH) et son directeur général

Objet : cet article, inséré par votre commission, vise à autoriser une rupture amiable du contrat liant un OPH et son directeur général.

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement portant article additionnel disposant qu'un office public de l'habitat et son président peuvent décider par convention des conditions de la rupture du contrat qui les lie. La convention de rupture définit le montant de l'indemnité de rupture. Les conditions d'application de cette disposition, notamment la définition des modalités de calcul de l'indemnité de rupture, sont précisées par voie réglementaire.

La transposition au cas du directeur général d'un office public de l'habitat, lorsque ce dernier n'est pas un fonctionnaire recruté par la voie du détachement, de la procédure de rupture conventionnelle issue du code du travail permettra d'éviter l'émergence de contentieux coûteux pour les offices.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 24 (art. L. 123-1-11, L. 123-13-2, L. 123-13-3, L. 128-3 et L. 127-2 [nouveau] du code de l'urbanisme et art. L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation) - Zone de majoration de constructibilité pour le logement intermédiaire

Objet : cet article duplique pour le logement intermédiaire le dispositif de majoration des droits à construire existant pour le logement social.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 127-1 du code de l'urbanisme dispose que le règlement du plan local d'urbanisme (PLU) peut délimiter des secteurs à l'intérieur desquels la réalisation de programmes de logements comportant des logements locatifs sociaux bénéficie d'une majoration du volume constructible tel qu'il résulte des règles relatives au gabarit, à la hauteur et à l'emprise au sol. Cette majoration, fixée pour chaque secteur, ne peut excéder 50 %. Pour chaque opération, elle ne peut être supérieure au rapport entre le nombre de logements locatifs sociaux et le nombre total des logements de l'opération.

Le 2° du I de l'article 24 duplique cette disposition pour le logement intermédiaire en insérant un nouvel article L. 127-2 dans le code de l'urbanisme. Le règlement du PLU pourra délimiter des secteurs à l'intérieur desquels la réalisation de programmes de logements comportant des logements intermédiaires bénéficiera d'une majoration du volume constructible ne pouvant excéder 30 %. Pour chaque opération, elle ne pourra être supérieure au rapport entre le nombre de logements intermédiaires et le nombre total de logements.

Par cohérence avec la disposition qui précède, le 1° du I et le II de l'article 24 effectuent des coordinations respectivement dans le code de l'urbanisme et dans le code de la construction et de l'habitation.

Nos collègues députés ont apporté deux modifications de fond au texte initial :

- la première exclut les logements mentionnés à l'article 199 novovicies du code général des impôts du champ d'application de l'article L. 127-2 du code de l'urbanisme, au motif que les logements bénéficiant du dispositif d'aide à l'investissement locatif dit « Pinel » sont tenus à une durée de modération des loyers relativement brève (six ou neuf ans pour le cas général, éventuellement douze ans) alors que la majoration des droits à construire accordée pour les logements intermédiaires est, par nature, définitive. Il n'y a donc pas lieu de cumuler ces deux avantages ;

- la seconde conduit à calculer la majoration de constructibilité en fonction de la surface des logements réalisés et non en fonction de la surface des logements projetés, ce qui est problématique puisque le calcul des droits majorés à construire s'effectue sur un projet de construction et non sur la base du constat des mètres carrés effectivement réalisés.

II - La position de votre commission

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement revenant sur l'une des deux modifications apportées par les députés au texte du Gouvernement. Conditionner le niveau de la majoration de constructibilité au respect d'un taux fondé sur les logements réalisés (et non d'un taux calculé à partir du nombre de logements prévus dans l'opération) est en effet d'une application complexe, car cela nécessite un contrôle a posteriori, et non a priori, comme c'est normalement le cas pour les autorisations d'urbanisme. Par ailleurs, cela créerait une différence de rédaction avec l'article L. 127-1 du code de l'urbanisme, dont l'article L. 127-2 est censé être le miroir, avec le risque que cela entraîne des problèmes d'application et d'interprétation.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 24 bis (nouveau) (art. L. 631-7-1 du code de la construction et de l'habitation) - Allègement de la procédure de changement d'usage en faveur des Français de l'étranger disposant d'un logement unique en France

Objet : cet article, inséré par votre commission, vise à assouplir la procédure de changement d'usage en faveur des Français de l'étranger disposant d'un logement unique en France.

Cet article résulte de l'adoption par la commission d'un amendement portant article additionnel présenté par notre collègue Roger Karoutchi et plusieurs de ses collègues : il vise à permettre aux Français expatriés disposant d'un seul et unique local d'habitation en France de le louer pour de courtes durées sans être soumis au régime d'autorisation prévu par l'article L. 631-7 et suivants du code de la construction et l'habitation.

Situé dans la partie du code de la construction et de l'habitation (CCH) portant sur les changements d'usage et les usages mixtes des locaux d'habitation, l'article L. 631-7 définit le périmètre dans lequel le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable : il s'agit des communes de plus de 200 000 habitants et de celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. L'article L. 631-7-1 porte sur la procédure d'autorisation préalable qui est délivrée par le maire de la commune.

Dans ce cadre, et afin de soumettre le développement des « meublés touristiques » à une procédure de contrôle, l'article 16 de la loi de mars 2014 sur l'accès au logement 226 ( * ) a introduit à l'article L. 631-7 une nouvelle norme : « Le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement d'usage . ». L'article L. 631-7-1 A également issu de la loi de mars 2014 prévoit la possibilité pour le conseil municipal d'instituer un régime d'autorisation temporaire permettant à une personne physique d'exercer cette activité de meublé touristique.

Le texte adopté par votre commission prévoit, en matière de location de courte durée, une dispense d'autorisation dans le cas particulier du local constituant l'habitation unique en France d'un ressortissant français établi hors de France .

Les auteurs de l'amendement soulignent que le droit en vigueur issu de la loi du 24 mars 2014 précitée alourdit considérablement les démarches nécessaires au changement d'usage et risque d'avoir un effet dissuasif. Pour les Français expatriés disposant d'un pied à terre ces nouvelles contraintes pourraient même se traduire par le choix de renoncer à louer pour de courtes durées ces biens, restreignant ainsi l'offre locative touristique et l'offre locative étudiante.

Votre rapporteur fait également observer que la loi de mars 2014 précitée, qui a institué cette procédure d'autorisation assez lourde, en a explicitement dispensé la résidence principale, conformément au dernier alinéa de l'article L. 631-7-1 A. Or le logement unique en France d'un Français de l'étranger ne peut pas satisfaire cette condition. Juridiquement, le présent article apparait donc comme une mesure de simplification et d'équité pour les Français de l'étranger qui conservent leur ancienne ou future résidence principale sur notre territoire. Économiquement, il s'agit de lever un obstacle administratif à l'amélioration de l'offre de logements alors même qu'une demande se manifeste.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 25 (art. 3-2, 8-1, 11-2, 15, 24, 25-3, 25-8 et 25-9 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989) - Clarification du droit des rapports locatifs et mesures de soutien de l'investissement immobilier

Objet : cet article vise à clarifier le droit des rapports locatifs et à favoriser l'investissement immobilier tout en préservant un niveau de protection élevé du locataire.

I - Le dispositif proposé

Cet article vise à modifier plusieurs dispositions de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs 227 ( * ) : il s'agit d'apporter des correctifs aux réaménagements introduits par la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Le but est d'améliorer la sécurité juridique et l'efficacité économique de la loi du 6 juillet 1989 précitée tout en préservant un niveau de protection élevé du locataire.

L'article 25 du projet de loi initial prévoyait une habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance , dans les quatre mois, les mesures législatives afin, selon l'exposé des motifs du projet de loi, préciser les règles relatives aux congés pour vendre, le champ d'application du régime de la colocation, rapprocher le régime de la location en meublé de celui des logements nus et préciser les conditions d'application dans le temps des dispositions de la loi du 6 juillet 1989 résultant de la loi du 24 mars 2014 précitée.

Les députés ont remplacé cet article d'habilitation par des dispositions qui, d'une part, réajustent directement une dizaine de prescriptions issues de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement et, d'autre part, clarifient les modalités d'application de ce texte aux contrats en cours. Il s'agit d'éviter de prolonger trop longtemps une pluralité de régimes locatifs différents.


Le paragraphe I de l'article 25, qui correspond à l'habilitation initialement prévue, a été supprimé par les députés au stade de la commission spéciale.


Le paragraphe II de l'article 25 apporte des modifications à huit articles (3-2, 8-1, 11-2, 15, 24, 25-3, 25-8 et 25-9) de la loi du 6 juillet 1989 modifiés par la loi de mars 2014 pour l'accès au logement. Principalement issu d'un amendement présenté par le Gouvernement en commission, ce paragraphe II vise à renforcer la sécurité juridique des parties au contrat de bail et à améliorer la rédaction de dispositions suscitant des difficultés d'interprétation .

Le 1° du paragraphe II modifie le quatrième alinéa de l' article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989 relatif à l' état des lieux . Il tend à préciser que la possibilité pour le locataire de demander à compléter l'état des lieux ne vaut que pour l' état des lieux d'entrée et exclut donc tout complément pour l'état des lieux de sortie.

Le 2° du paragraphe II modifie l' article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989 relatif à la colocation :

- le a) précise le champ de la colocation en excluant les locations consenties exclusivement à des conjoints et partenaires liés par un pacte civil de solidarité au moment de la conclusion du bail ;

- le b) prévoit des modifications rédactionnelles afin de prévenir les difficultés d'interprétation du régime de solidarité des colocataires. Lorsque le colocataire sortant est remplacé, le législateur souhaitait initialement que la solidarité de ce colocataire ainsi que celle de sa caution s'éteignent. Or la rédaction issue de la loi de mars 2014 précitée ne prévoyait que la fin de la solidarité du colocataire sortant. La nouvelle rédaction qui est ici proposée introduit un pluriel permettant l'extinction de la solidarité tant du colocataire sortant que de sa caution.

Le 3° du paragraphe II concerne la protection du locataire en cas de « vente à la découpe » , formule qui désigne la transformation d'un immeuble bâti en pleine propriété en une copropriété afin de procéder à une vente par lot.

- L'amendement présenté par le Gouvernement en commission prévoyait la suppression de l'article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 , introduit par amendement lors des débats parlementaires sur la loi de mars 2014 précitée, et qui permet de proroger d'office les baux des locataires lors de la division d'un immeuble en plusieurs lots de copropriétés dans une zone tendue. Le Gouvernement a, en effet, estimé que cette disposition, qui se cumule avec les autres protections du locataire en cas de vente à la découpe, introduit une complexité et une rigidité excessives. Tout en maintenant un niveau élevé de protection du locataire, à travers un congé pour vente ne pouvant être délivré moins de 3 ans après l'acquisition du logement occupé, l'amendement du Gouvernement souligne la nécessité de ne pas décourager l'investissement, ce qui suppose que le propriétaire bailleur ne puisse pas se voir interdire la délivrance d'un congé pour vente au-delà de 6 ans après l'acquisition du logement.

- Les députés ont choisi de maintenir l'article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 en adoptant en commission une nouvelle rédaction à l'initiative de notre collègue députée Sandrine Mazetier. Le texte soumis au Sénat repose sur la distinction entre le particulier qui achète un bien occupé et l'opération plus globale de vente à la découpe qui se caractérise par la « mise en copropriété » d'un immeuble . Il prévoit, pour ce seul cas de vente à la découpe, d'une part, que les baux en cours dont le terme intervient moins de trois ans après la date de mise en copropriété, sont prorogés de plein droit d'une durée de trois ans et, d'autre part, que les autres baux en cours sont prorogés pour que le locataire puisse occuper le logement pour une durée de six ans à compter de la mise en copropriété .

Dans l'exposé des motifs, l'amendement adopté par les députés indique que l'intention du législateur, en adoptant la loi de mars 2014 pour l'accès au logement, était de dissuader la spéculation et non l'investissement. Or, selon l'article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989, tel que modifié en 2014, un bailleur peut être dans l'impossibilité de vendre pour une durée pouvant aller jusqu'à 15 ans, ce qui peut dissuader le retour d'investisseurs institutionnels pourtant indispensable en zone tendue. Plutôt que de supprimer l'intégralité de l'article 11-2, le texte adopté par les députés vise à limiter la durée cumulative de prorogation des baux tout en s'appliquant spécifiquement aux ventes spéculatives à la découpe.

Le 4° du paragraphe II concerne l' article 15 (I) de la loi du 6 juillet 1989 relatif aux congés . Dans le droit en vigueur, issu de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement, cet article 15 empêche le bailleur de mettre fin à la jouissance des lieux loués pour vendre son logement avant un délai compris entre 3 et 6 ans après l'acquisition pour un bailleur personne physique et entre 6 à 12 ans pour un bailleur personne morale.

Le texte adopté par les députés vise à réajuster un point d'équilibre entre protection du locataire et fluidité du marché. Il prévoit d'autoriser la délivrance d'un congé pour vente au terme du contrat en cours lorsque la durée restante à courir à la date de l'acquisition est supérieure à trois ans . Il prévoit également d'autoriser le congé pour vente à compter du premier renouvellement ou de la première reconduction du contrat de location lorsque la durée restante à courir à la date d'acquisition du logement est inférieure à trois ans .

S'agissant du congé pour reprise, la nouvelle rédaction proposée par le 4° du paragraphe II clarifie la date de délivrance du congé : certains acteurs ont interprété la rédaction issue de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement comme permettant au bailleur de délivrer un congé six mois avant la fin de la période de deux ans « incompressible », et non six mois avant la fin du bail. Le texte soumis au Sénat maintient le principe du délai incompressible de deux ans mais précise que le congé pour reprise est délivré « au terme du contrat de location ». Le congé ne prend donc effet qu'au terme d'un délai de deux ans à compter de la date d'acquisition.

Rappel sur le droit en vigueur

La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a réaménagé la loi du 6 juillet 1989 précitée. Outre l'encadrement durable des loyers dans les zones tendues, le but de cette réforme était de définir un nouvel équilibre dans les rapports contractuels entre bailleurs et locataires et de protéger ces derniers contre les pratiques abusives qui se sont développées depuis quinze ans.

Parmi ces pratiques figurent des opérations immobilières de rachat de logements occupés pour les revendre rapidement en donnant congé au locataire afin de réaliser une plus-value. Avant la loi ALUR, et en dehors des cas de vente à la découpe, un congé pour vente pouvait être donné six mois après l'acquisition d'un bien occupé , si le bail en cours prenait fin. L'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, modifié par la loi ALUR, a prévu une disposition plus protectrice : « en cas d'acquisition d'un bien occupé, tout congé pour vente n'est autorisé qu'à compter du terme du premier renouvellement du bail en cours ».

Les « ventes à la découpe », par lesquelles un investisseur rachète un immeuble occupé pour le revendre ensuite par lots, a été encadré dès la loi n° 2006-685 du 13 juin 2006 relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble, dite « loi Aurillac ». Dans le cadre d'une vente par lots de plus de dix logements au sein d'un même immeuble, la reconduction du bail est de droit si le congé pour vente intervient moins de deux ans avant le terme du bail (article 11-1 de la loi de 1989). Face au développement de cette pratique, la loi ALUR a élargi l'application de cette disposition aux ventes par lots de plus de cinq logements au sein d'un même immeuble. Parallèlement, un amendement a été adopté au Sénat prolongeant de droit, dans les zones tendues, tous les baux en cours de trois ans en cas de mise en copropriété d'un immeuble de plus de cinq logements (article 11-2 de la loi de 1989).

Or, ces deux dispositions et leur articulation posent problème pour les bailleurs institutionnels qui doivent proposer des contrats de location d'une durée minimale de six ans, et non trois ans.

Dans le cas des ventes à la découpe, la disposition prorogeant d'office de trois ans tous les baux en cours dans les zones tendues (article 11-2) et celle interdisant tout congé pour vente avant le terme du premier renouvellement du bail en cours (article 15) semblent se cumuler . Leur superposition est donc source de complexité et de délais anormalement longs. Pour les bailleurs personnes morales, elle peut en effet aboutir à l'interdiction de tout congé pour vente avant un délai de quinze ans (six ans du bail en cours, prorogation de trois ans et six ans du bail renouvelé).

Source : commission spéciale du Sénat

Le bis du paragraphe II, porte sur l' article 15 (III) de la loi du 6 juillet 1989 relatif à la protection des locataires âgés aux faibles ressources. Son ajout résulte d'un amendement adopté en séance publique à l'initiative de notre collègue député Richard Ferrand.

Selon l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, un locataire âgé de plus de 65 ans, dont les revenus ne dépassent pas un plafond de ressources HLM fixé par arrêté, ne peut faire l'objet d'un congé de la part de son propriétaire si celui-ci ne lui propose pas un logement aux conditions équivalentes. La loi du 24 mars 2014 précitée avait étendu le bénéfice de cette protection au locataire ayant à sa charge une personne âgée remplissant les mêmes conditions. Or, cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel au motif que cette protection avait été instituée quelles que soient les ressources du locataire. Le texte adopté par les députés rétablit donc ce mécanisme en le conditionnant à un plafond de ressources applicable au montant cumulé des ressources du locataire et de celles de la personne qui est à sa charge pour en garantir la conformité à la Constitution.

Le 5° du paragraphe II vise à rétablir la rédaction de l' article 24 (IV) de la loi du 6 juillet 1989 relatif à la résiliation du bail pour impayé sur un point précis, supprimé involontairement par la loi de mars 2014 précitée : les demandes additionnelles aux fins de constat ou de prononcé de la résiliation du bail motivées par l'existence d'une dette locative. Il convient ici de rappeler que notre code de procédure civile distingue, parmi les demandes incidentes en justice, la demande reconventionnelle par laquelle le défendeur prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire et la demande additionnelle par laquelle une partie modifie ses prétentions antérieures.

Le 6° du paragraphe II , qui porte sur l' article 25-3 de la loi du 6 juillet 1989, vise à rendre applicable aux contrats de locations meublées l'article 3 de la même loi qui prévoit certaines mentions obligatoires essentielles pour l'information des locataires (description des locaux, surface habitable, règlement intérieur...) et pour la mise en oeuvre de l'encadrement des loyers (celui du précédent locataire, en particulier).

Le 7° du paragraphe II, qui concerne l' article 28-2 de la loi du 6 juillet 1989 vise à préciser la rédaction des dispositions relatives aux congés applicables aux logements meublés :

- le a) et le b) tendent à harmoniser le formalisme de délivrance du congé en matière de locations meublées et nues ;

- le c) vise à prendre en compte la présence de personnes de plus de 65 ans disposant de faibles ressources à la charge du locataire (cf. supra au 4° bis du paragraphe II).

- et le e) porte sur une erreur de syntaxe.

Le 8° du paragraphe II, qui concerne l' article 25-9 de la loi du 6 juillet 1989 résulte de l'adoption par les députés, en séance publique, d'un amendement présenté par notre collègue député Richard Ferrand. Il vise à préciser l'application de l 'encadrement des loyers dans les locations meublées et à étendre cet encadrement aux logements situés dans une résidence avec services .

D'une part, l'article 17-2 introduit par la loi de mars 2014 précitée précise les modalités d'application de la hausse des loyers convenue entre les parties ou fixée judiciairement lors du renouvellement du bail : cette hausse « s'applique par tiers ou par sixième selon la durée du contrat ». Or cette rédaction s'adapte difficilement aux locations de logement meublé dont la durée minimale est d'une année. Pour répondre à cette difficulté, le paragraphe 8 de l'article 25 prévoit que la hausse du loyer convenue ou fixée judiciairement s'applique au contrat renouvelé. Toutefois, si la hausse est supérieure à 10 % , elle s'applique par tiers annuel au contrat renouvelé et lors des renouvellements ultérieurs.

D'autre part, l'article 25-9 (II) introduit par la loi de mars 2014 exclut du champ d'application de l'encadrement des loyers les logements situés dans une résidence avec services . Au motif que cette application différenciée selon la catégorie de logements n'est pas justifiée, le 8° du paragraphe II prévoit une application des dispositions du I de l'article 17-1 relatives à la révision annuelle des loyers à l'ensemble des logements meublés.

Rappel sur l'encadrement des loyers dans la loi du 6 juillet 1989

L'article 17-1 porte sur la révision annuelle du loyer, limitée à l'indice de référence des loyers (IRL).

L'article 17-2 fixe les modalités de réajustement du loyer en fonction des loyers médians de référence majoré ou minoré en vigueur au moment du renouvellement. D'une part, cet article prévoit la possibilité de recours en diminution du loyer par le locataire dès lors que le loyer est supérieur au loyer médian de référence majoré. D'autre part, il ouvre au bailleur un recours en réévaluation du loyer si le loyer appliqué au locataire est inférieur au loyer médian de référence minoré. En cas de hausse de loyer, un mécanisme d'étalement de cette hausse dans le temps est également prévu.

Source : commission spéciale du Sénat


Le paragraphe III de l'article 25 porte sur les conditions d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi du 6 juillet 1989 qui suscitent, dans le droit actuel issu de la loi de mars 2014, deux séries de difficultés d'interprétation.

D'une part, des incertitudes relayées par la doctrine concernent la détermination des modalités d'application des modifications introduites par la loi de mars 2014 aux baux en cours.

D'autre part, la décision n° 2014-691 DC, du Conseil constitutionnel, en indiquant qu' un contrat reconduit n'est pas un nouveau contrat , a écarté l'application de l'ensemble des nouvelles dispositions de la loi aux contrats en cours. Cette interprétation conduit à maintenir une pluralité de régimes juridiques en matière de baux d'habitation, alors même que certains contrats ont été conclus pour une longue période.

Pour simplifier la situation et la rendre plus intelligible , le paragraphe III de l'article 25, adopté en commission à l'initiative du Gouvernement, définit les modalités d'application particulières de la loi du 6 juillet 1989 pour les contrats en cours lors de l'entrée en vigueur du présent texte.

Conformément au principe du droit au maintien des conventions légalement conclues, le premier alinéa de ce paragraphe III de l'article 25 prévoit que les baux en cours demeurent soumis au cadre juridique qui leur était applicable au moment de leur conclusion, et jusqu'à leur renouvellement ou leur reconduction tacite.

Toutefois, six séries de dispositions qui ne bouleversent pas substantiellement l'équilibre du contrat leurs sont rendues immédiatement applicables . Ces dispositions complètent la liste des dispositions prévues par l'article 14 de la loi pour l'accès au logement de mars 2014 pour les baux conclus avant son entrée en vigueur. Les modifications proposées visent à clarifier l'applicabilité dans le temps de mesures ne figurant pas explicitement dans la liste des mesures applicables aux baux en cours, définie par l'article 14 précitée, mais qui pouvaient théoriquement être immédiatement applicables, puisqu'elles ne modifient pas l'équilibre fondamental du contrat.

Le paragraphe III vise ainsi à rendre immédiatement applicables aux contrats en cours :

-  l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 relatif aux dépôts de garantie ainsi que l'article 24 relatif à la résiliation du contrat pour défaut de paiement du loyer et à la prévention des expulsions applicables aux baux en cours (1° du paragraphe III) ;

- les délais de prescription fixés à l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, dans les conditions fixées par l'article 2222 du code civil, en prenant obligatoirement en compte des faits générateurs postérieurs - mais pas antérieurs - à l'entrée en vigueur de la loi (2° du paragraphe III) ;

- l'article 1724 du code civil relatif aux travaux ouvrant droit à indemnisation des locataires ainsi que les articles 1751 et 1751-1 du même code relatifs à la co-titularité du bail au bénéfice des partenaires liés par un pacte civil de solidarité (3° du paragraphe III) ;

- les divisions d'immeuble en plusieurs lots de copropriété (4° du paragraphe III) ;

- la délivrance des congés , tant pour les locations nues que pour les locations meublées (5° et 6° du paragraphe III).

Enfin, le paragraphe III de cet article 25 prévoit explicitement l'application des nouvelles disposions de la loi aux baux tacitement reconduits afin d'intégrer progressivement ces contrats au nouveau régime de droit commun des baux d'habitation.

Cependant, l'application des dispositions de la loi du 6 juillet 1989 aux baux tacitement reconduits , et non plus seulement aux baux renouvelés, prend en compte la décision du 20 mars 2014 rendue par le Conseil constitutionnel. Celui-ci a reconnu la conformité à la Constitution de la non-application de l'encadrement des loyers en zones tendues aux baux conclus avant l'entrée en vigueur de la loi, ce qui évite de porter « atteinte aux conventions légalement conclues ».

La modification prévue par ce paragraphe III de l'article 25 exclut par conséquent de manière explicite l'application de l'article 17 sur l'encadrement des loyers pour les locations nues, et l'article 25-9 pour les locations meublées, en cas de reconduction tacite des baux , pour se conformer strictement à la décision du Conseil constitutionnel.

Seraient de la même manière exclus du champ de l'application aux baux reconduits tacitement :

- l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 relatif à certaines mentions obligatoires du contrat de location, cette exclusion visant à garantir la validité des contrats reconduits tacitement et qui ne contiendraient pas ces mentions ;

- et les articles 17 et 17-2 de la loi du 6 juillet 1989 relatifs aux actions en diminution et en réévaluation de loyer ; l'article 17-2 prévoit d'ailleurs que ses dispositions sont applicables « lors du renouvellement du contrat » afin de lever l'incertitude dans la mise en oeuvre de ces actions.

Enfin, le projet de loi exclut l'application aux baux meublés reconduits des dispositions limitant à deux mois de loyers le montant du dépôt de garantie exigible par le bailleur. Cette exclusion vise à prévenir les contentieux relatifs aux contrats conclus avant l'entrée en vigueur de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, pour lesquels le dépôt de garantie constitué serait supérieur au nouveau plafond, et dont le locataire pourrait exiger la restitution partielle à la reconduction du contrat.

II - La position de votre commission

Cet article 25 se compose de 43 alinéas modifiant des dispositions issues de la loi du 24 mars 2014 et introduites dans la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. À travers sa technicité, les deux volets - correspondant aux paragraphes II et III de l'article 25 - apparaissent bien comme une tentative de remédier aux difficultés économiques et juridiques suscitées par cette loi du 24 mars 2014.

Au plan économique, cet article vise essentiellement à éviter que les opérateurs institutionnels se détournent de l'investissement dans le logement, tout en préservant un niveau de protection des locataires d'autant plus nécessaire que le logement occupe, dans notre pays une part du budget des ménages bien supérieure à la situation qui prévaut, par exemple, en Allemagne. De ce point de vue, le texte soumis au Sénat vise à trouver un nouvel équilibre.

Pour l'essentiel, le droit en vigueur issu de la loi de mars 2014 précitée a institué un dispositif complexe et des contraintes cumulatives au final extrêmement dissuasives pour les investisseurs institutionnels dont la présence est pourtant indispensable en zone tendue : on citera par exemple le droit au maintien du locataire, qui se traduit par une quasi impossibilité de vendre, pendant une durée pouvant aller jusqu'à 15 ans . Afin de rectifier cette erreur de conception globale, le paragraphe II du présent article 25 prévoit de limiter à 6 ans à compter de la mise en copropriété le cumul de la durée du bail restant à courir et de la prorogation automatique des baux.

Juridiquement, à la complexité intrinsèque des dispositions issues de la loi de mars 2014 s'ajoute la problématique non moins épineuse de l' application de ce texte aux situations en cours . Pour rendre le droit intelligible, la priorité est ici d'éviter de prolonger trop longtemps la coexistence simultanée de plusieurs régimes locatifs différents. En même temps, le Conseil constitutionnel, à propos du volet de la loi de mars 2014 faisant l'objet du présent article 25, a fait référence à la nécessité de ne pas porter une « atteinte excessive aux contrats légalement conclus ».

Le paragraphe III de l'article 25 prévoit de clarifier les conditions d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi du 6 juillet 1989 sur la base de la distinction entre :

- d'une part, les mesures qui modifient substantiellement l'équilibre du contrat, comme l'encadrement des loyers, et ne doivent pas être appliquées aux situations en cours ;

- et, d'autre part, les dispositions qui ne modifient pas fondamentalement l'accord entre le bailleur et le locataire dont l'application immédiate se justifie par la nécessité de simplicité et d'intelligibilité du droit.

Tout en soulignant les conséquences néfastes de l'instabilité et de la complexité des normes issues de la loi de mars 2014 précitée, votre rapporteur estime que les dispositions du présent article, qui reposent sur la volonté d'adopter une « approche mesurée », comme l'a souligné le Gouvernement, et de clarifier le droit, vont indubitablement dans le bon sens, même si elles ne résolvent pas tous les effets pervers de ladite loi.

Contribuant à cet effort de clarification, votre rapporteur a soumis deux amendements de clarification rédactionnelle à votre commission qui les a adoptés. Le premier porte sur la connaissance du dernier loyer « appliqué » au précédent locataire, car le terme « acquitté » figurant dans le droit en vigueur prête à confusion en cas d'impayé. Le second clarifie la rédaction proposée pour l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 relatif au congé pour vente qui concerne, en pratique, un domaine potentiellement conflictuel.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 25 bis A (art. L. 313-3 et L. 342-2 du code de la construction et de l'habitation) - Participation des employeurs à l'effort de construction

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale, vise à encadrer l'activité de l'organisme collecteur rattaché à la SNCF.

I - Le dispositif proposé

Situé dans la partie du code de la construction et de l'habitation consacrée à la participation des employeurs à l'effort de construction dit « 1 % patronal », l'article L. 313-3 définit les ressources et les emplois de cette contribution. Les ressources sont principalement composées des versements des employeurs et des remboursements des prêts antérieurement consentis. L'article L. 313-3 définit ensuite sept catégories d' emplois auxquelles sont consacrées ces ressources : on peut citer les aides à l'accession à la propriété ou à l'accès au logement locatif, le soutien à la construction, les interventions sociales pour le logement ou l'hébergement des personnes défavorisées, la mise en oeuvre du programme national de rénovation urbaine, la requalification des quartiers anciens dégradés ainsi que le soutien à l'amélioration du parc privé.

L' article 25 bis A résulte de l'adoption, en séance publique, d'un amendement de notre collègue député Alain Tourret, rapporteur thématique, qui vise à régler le cas particulier de l'organisme collecteur rattaché à la SNCF. Qualifié de « complexe » par son auteur cet article 25 bis A tend à encadrer l'activité de cet organisme, qui par son statut particulier, échappe au dispositif en vigueur . Cet encadrement concerne les règles d'utilisation des fonds du « 1% patronal » et les frais de fonctionnement de l'organisme.

Plus précisément, la Société immobilière de chemins de fer français (SICF) , filiale de la SNCF, est un organisme agréé habilité à collecter la participation des entreprises à l'effort de construction. Avec la fin, au 1 er janvier 2015, de l'agrément délivré aux organismes d'habitations à loyer modéré, la SICF devient le seul organisme agréé non associé de l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL). Or la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové du 24 mars 2014, prévoit le retour à la contractualisation des emplois des fonds issus de la participation des entreprises à l'effort de construction. Une convention entre l'État et l'UESL a ainsi été signée le 2 décembre 2014. Cependant, les emplois de la participation des entreprises à l'effort de construction collectée par la SICF ne peuvent être régis par une convention dont la SICF, non associée à l'UESL , n'est pas partie.

Cet article vise à prévoir le cas des fonds collectés par les organismes collecteurs non associés de cette même Union : chaque organisme collecteur non associé de l'UESL devra signer une convention avec l'État. Dans la pratique, e n 2015, seule la SICF devrait signer cette convention .

Rappel sur le « 1% logement » devenu « Action logement »

Historiquement, la loi du 11 juillet 1953 a généralisé la démarche volontaire de certains employeurs en faveur du logement de leurs salariés, en imposant aux entreprises de contribuer au financement de la construction à hauteur de 1 % de la masse salariale. Cette contribution, dont l'appellation juridique est « Participation des employeurs à l'effort de construction » (PEEC), a conservé le nom de « 1 % Logement » dans le langage commun, alors même que son taux n'est plus que de 0,45 % depuis 1992. Le « 1 % Logement » a été renommé « Action logement » par délibération du 22 juillet 2009 des partenaires sociaux lors du conseil d'administration de l'Union d'économie sociale du logement (UESL).

L'article 8 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion a réformé l'Action logement en réorientant l'utilisation des ressources vers les priorités du logement et en limitant les coûts de gestion. D'une part, les rôles respectifs de l'État et des acteurs centraux d'Action logement (l'UESL, tête de réseau des organismes collecteurs d'Action logement et l'ANPEEC (Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction) ont été modifiés. D'autre part, l'affectation des ressources issues de la PEEC est définie, après concertation avec les partenaires sociaux, par des dispositions réglementaires et non plus par des accords passés entre les partenaires sociaux et l'État.

En 2014, l'article 123 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové vise à renforcer la coopération entre l'État et l'UESL par la mise en place d'un cadre conventionnel et de renforcer l'UESL dans son rôle de tête de réseau, par de nouvelles missions et de nouveaux moyens.

Financièrement, la participation obligatoire à l'effort de construction s'est élevée en 2013 à 3,3 milliards d'euros dont 1,6 milliard de collecte et 1,7 milliards de remboursements de prêts.

Source : commission spéciale du Sénat

II - La position de votre commission

Votre commission ne voit pas d'objection à opposer à cet article qui comble un vide juridique dans la gestion de ce que le langage courant continue à désigner le « 1 % patronal » même si depuis 1992 le prélèvement se limite à 0,45 % de la masse salariale.

Financièrement, les montants en jeu représentent moins de 1 % des 3,3 milliards d'euros correspondant au total de la participation des employeurs à l'effort de construction en France. En effet, selon le « jaune budgétaire » de 2015 consacré à ce thème 228 ( * ) , la SICF, filiale de la SNCF, a perçu moins de 20 millions d'euros de ressources en 2010 et en 2012 ainsi que 51 millions en 2011 issus du remboursement d'un prêt.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 bis BA (nouveau)(art. 123 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové) - Allongement du délai de mise en oeuvre du nouveau dispositif de regroupement comptable applicable aux organismes gérant la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC)

Objet : cet article, inséré par votre commission, vise à allonger d'un an le délai de mise en oeuvre du regroupement comptable prévu par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové afin d'améliorer le pilotage de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC).

L'article 123 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové a prévu le retour à une contractualisation entre l'État et Action logement en matière de gestion et d'emploi des fonds issus de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC). Simultanément, cet article a renforcé, dans son rôle de pilotage , l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL). Celle-ci est, en effet, la tête de réseau des organismes collecteurs de la participation que sont les comités interprofessionnels du logement (CIL).

La définition de nouvelles obligations comptables est un corollaire de cette inflexion qui tend à optimiser l'usage des fonds destinés au logement des salariés des entreprises cotisantes.

À l'initiative du rapporteur, votre commission a adopté un amendement portant article additionnel ayant pour objet de différer d'un an l'application du nouveau dispositif de regroupement comptable prévu par la loi du 24 mars 2014, applicable aux 550 entités impliquées dans la collecte ou la gestion de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC).

Pour sa mise en oeuvre concrète, ce réaménagement comptable impose, en effet, de préciser son cadre règlementaire spécifique en faisant appel à l'Autorité des normes comptables, ce qui allonge le délai initialement prévu par la loi de mars 2014 précitée.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 25 bis B (art. L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation) - Réduction à un mois du délai de présentation par le réservataire d'un candidat à l'occupation d'un logement social

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale, limite à un mois le délai dont dispose le réservataire pour présenter un candidat à l'occupation d'un logement, dans les zones tendues.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit un mécanisme de réservation d'une partie des logements du parc social au bénéfice des collectivités et de l'État en contrepartie d'un apport de terrain, d'un financement ou d'une garantie financière ou pour la mise en oeuvre du droit au logement. Ces réservations s'effectuent dans le cadre de conventions entre le réservataire et les organismes d'HLM. Les conventions signées jusqu'à la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové alignaient le délai de présentation des candidats par le réservataire sur la durée du préavis du locataire, soit trois mois.

Or, l'article 5 de la loi précitée a modifié l'article 15 de la loi de juillet 1989 229 ( * ) pour réduire de trois à un mois le délai de préavis du locataire d'un logement situé dans certains territoires. Il s'agit de ceux qui sont mentionnés au premier alinéa du I de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989, à savoir les zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements (zones soumises à la taxe sur les logements vacants).

Dans les zones tendues, depuis la loi de mars 2014 précitée, la durée de réservation est donc désormais supérieure à celle du préavis du locataire, ce qui peut conduire à « geler » pendant deux mois l'attribution des logements libérés. C'est pour éviter ce gel que l'article 25 bis B a été introduit par les députés : il dispose que la durée de réservation, dans toutes les conventions en cours et futures, sera d'un mois dans les zones tendues.

II - La position de votre commission

Compte tenu du manque de logements dans les zones tendues, il est nécessaire de réduire au minimum la période de non occupation des locaux entre deux locations successives. La mesure proposée par cet article va dans ce sens.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 bis C (art. L. 131-16 du code du sport) - Conséquences financières des modifications des règlements des fédérations sportives

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, prévoit que les fédérations sportives qui modifient des normes techniques applicables aux équipements sportifs informent des concours financiers qu'elles apportent pour faire face aux travaux rendus nécessaires par ces modifications.

I - Le dispositif proposé

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue député Francis Vercamer et des membres du groupe UDI, avec un avis favorable de la commission spéciale et un avis de sagesse du Gouvernement.

Les fédérations sportives ont pour objet l'organisation de la pratique d'une ou plusieurs disciplines sportives. Pour chaque discipline, une fédération, appelée « fédération délégataire », reçoit une délégation du ministre des sports. Les fédérations délégataires sont chargées de l'organisation des compétitions au niveau national ou local.

À ce titre, conformément à l'article L. 131-16 du code du sport, les fédérations délégataires disposent d'un pouvoir réglementaire, notamment en ce qui concerne les normes auxquelles sont soumis les équipements sportifs .

Notre collègue député Francis Vercamer a fait valoir que les fédérations modifient parfois unilatéralement les normes techniques applicables à leurs disciplines. En séance publique, il a souligné que « ces règles ont parfois des conséquences extrêmement lourdes, en termes de travaux ou d'aménagement. Cela va du revêtement du sol à la hauteur de plafond des salles, en passant par la dimension des terrains ou des équipements et la construction de tribunes .

« Cela pose des problèmes lourds aux communes, sans qu'aucune règle de financement ne soit édictée. Ces travaux ne sont pas anticipés et ils pénalisent l'ensemble des plans pluriannuels d'investissement des communes et de leurs projets. En ces temps de rigueur budgétaire et de baisse des dotations, il me semble important d'encadrer cette évolution des normes. De fait, une fois que les normes sont édictées, les clubs sportifs se tournent vers les communes pour demander la mise aux normes de leurs équipements, de façon à pouvoir garder leur place dans le championnat et à faire jouer les jeunes de la commune - c'est en effet un objectif essentiel des communes que d'essayer d'occuper les jeunes. Aussi se trouvent-elles plongées dans un dilemme : faire les travaux ou fermer les équipements et ne pas permettre au club d'évoluer. Il faut encadrer cela et mettre les fédérations sportives devant leurs responsabilités ».

Le présent article complète ainsi l'article L. 131-16 du code du sport afin de prévoir que les fédérations délégataires « précisent le montant du concours financier apporté à la réalisation des travaux rendus nécessaires, le cas échéant, par la modification de ces règles ».

II - La position de votre commission

Votre rapporteur note tout d'abord que la disposition introduite par l'Assemblée nationale n'a qu'une portée réduite, voire nulle, pour résoudre le problème soulevé. En effet, il sera toujours loisible à une fédération de modifier les normes techniques tout en indiquant qu'elle ne veut ou ne peut apporter des concours financiers.

En outre, le présent article n'a qu'un lien ténu avec l'objet du projet de loi.

Pour ces raisons, votre commission a adopté un amendement de suppression du présent article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article .

Article 25 bis D (art. L. 211-2 du code de l'urbanisme) - Extension du champ des délégataires du droit de préemption urbain

Objet : cet article, inséré par l'Assemblée nationale en séance publique, permet de déléguer le droit de préemption pour des opérations de construction répondant à des objectifs fixés par le programme local de l'habitat (PLH).

I - Le dispositif proposé

L'article L. 213-3 du code de l'urbanisme prévoit que le titulaire du droit de préemption peut déléguer son droit à l'État, à une collectivité locale, à un établissement public y ayant vocation ou au concessionnaire d'une opération d'aménagement. Cette délégation peut porter sur une ou plusieurs parties des zones concernées ou être accordée à l'occasion de l'aliénation d'un bien. Les biens ainsi acquis entrent dans le patrimoine du délégataire.

L'article 25 bis D, résultant d'un amendement de notre collègue députée Annick Lepetit adopté en séance publique élargit la liste des délégataires aux personnes suivantes :

- les sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux (article L. 481?1 du CCH) ;

- les organismes d'HLM ;

- les organismes agréés concourant aux objectifs de la politique d'aide au logement en tant que maîtres d'ouvrage d'opérations d'acquisition, de construction ou de réhabilitation de logements ou de structures d'hébergement en tant que propriétaire ou preneur de bail à construction, emphytéotique ou de bail à réhabilitation (organismes mentionnés à l'article L. 365?2 du CCH).

Cette délégation du droit de préemption n'est cependant autorisée que si l'aliénation porte sur un des biens ou droits affectés au logement. Par ailleurs, les biens acquis par exercice du droit de préemption ne peuvent être utilisés qu'en vue de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction permettant de réaliser les objectifs fixés dans le PLH.

II - La position de votre commission

Si l'article L. 213-3 du code de l'urbanisme prévoit déjà la possibilité de déléguer le droit de préemption, une collectivité peut cependant avoir besoin de recourir à d'autres types d'opérateurs que ceux désignés par cet article, notamment un organisme HLM ou une structure associative agréée. La mesure proposée offre cette souplesse. Elle a par ailleurs le mérite de faire peser le coût de l'opération de préemption sur un tiers, ce qui peut avoir un intérêt du point de vue de la gestion des finances locales. Enfin, la puissance publique conserve un contrôle fort sur le droit de préemption, puisqu'elle décide elle-même de le déléguer et que cette délégation ne peut se faire que pour des projets permettant de réaliser les objectifs fixés par le programme local de l'habitat.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 bis E (art. 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965) - Mise en concurrence obligatoire des syndics ayant été désignés deux fois consécutivement

Objet : cet article, adopté en séance publique à l'Assemblée nationale, assouplit le régime de mise en concurrence obligatoire des syndics introduit par la loi ALUR.

I - Le dispositif proposé

L'article 55 de la loi ALUR a modifié l'article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis afin de rendre obligatoire une mise en concurrence des syndics à chaque renouvellement du syndic : « Au cas où l'assemblée générale est appelée à se prononcer sur la désignation d'un syndic, celle-ci est précédée d'une mise en concurrence de plusieurs projets de contrat de syndic, faisant notamment état des frais afférents au compte bancaire séparé, effectuée par le conseil syndical ». Le conseil syndical peut proposer de ne pas procéder à cette mise en concurrence lorsque le marché local des syndics ne permet pas cette mise en concurrence.

Cette obligation de mise en concurrence, utile en ce qu'elle instille de la concurrence dans un secteur qui en manque, induit toutefois une certaine lourdeur : la mise en concurrence implique en effet un gros travail pour le syndicat de copropriété, travail qui doit être menée de façon obligatoire quasi annuellement, même quand la copropriété est satisfaite du syndic.

L'article 25 bis E qui résulte d'un amendement de notre collègue député Gilles Savary modifie donc les modalités de la mise en concurrence : celle-ci est désormais obligatoire au renouvellement du syndic, mais seulement si ce dernier a déjà été désigné deux fois consécutivement.

II - La position de votre commission

Votre commission, sur proposition du rapporteur, a adopté un amendement qui opère deux modifications sur cet article : une clarification rédactionnelle et une modification de fond visant à rendre facultative la mise en concurrence du syndic en place. En effet, si le texte adopté par l'Assemblée nationale a assoupli le dispositif issu de la loi ALUR, pour autant les écueils d'une mise en concurrence obligatoire ne sont pas gommés dans le texte des députés. En l'absence de mise en concurrence effectuée par le conseil syndical, les copropriétaires procéduriers n'hésitent en effet pas à utiliser cet argument pour saisir la justice et demander la nullité du mandat du syndic, avec toutes les conséquences financières que cela emporte pour les copropriétaires (nomination d'un syndic judiciaire). L'amendement adopté propose donc de supprimer le caractère obligatoire de la mise en concurrence du syndic sortant, tout en préservant le droit pour le conseil syndical d'y procéder et le droit de chaque copropriétaire pris individuellement de pouvoir le demander.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 25 bis F (art. 40 de la loi n° 89-432 du 6 juillet 1989) - Exclusion des logements sociaux conventionnés du régime des locations meublées

Objet : cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, exclut les logements conventionnés HLM du champ d'application des articles de la loi du 6 juillet 1989 qui traitent de la location des logements meublés en tant que résidence principale.

I - Le dispositif proposé

Pour mémoire, jusqu'à la loi de mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), la loi du 6 juillet 1989 ne s'appliquait pas aux meublés. L'article 4 de la loi ALUR leur a étendu certaines des protections existantes pour les locations nues. Toutefois, ce sont les logements meublés du parc locatif libres qui étaient visés par cette extension. Or, par erreur, la rédaction de l'article 40 de la loi du 6 juillet 1989 résultant de la loi ALUR a rendu les dispositions relatives aux meublés également applicables aux logements conventionnés HLM.

II - La position de votre commission

Il s'agit d'un correctif à une erreur manifeste de la loi du 6 juillet 1989 telle que modifiée par la loi ALUR.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 bis (art. L. 133-8 du code de la construction et de l'habitation) - Traitement des foyers de mérule

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, supprime l'obligation d'incinération sur place des déchets infestés par la mérule.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 133-8 du code de la construction et de l'habitation, créé par l'article 76 de la loi n°2014-366 du 24 mars 2014, dispose que, lorsque, dans une ou plusieurs communes, des foyers de mérule sont identifiés, un arrêté préfectoral, consultable en préfecture, pris sur proposition ou après consultation des conseils municipaux intéressés, délimite les zones de présence d'un risque de mérule. Cet article prévoit également qu'en cas de démolition totale ou partielle d'un bâtiment situé dans ces zones, les bois et matériaux contaminés sont incinérés sur place ou traités avant tout transport si leur destruction par incinération sur place est impossible. Nos collègues députés ont supprimé cette dernière obligation qui semble ne pas s'imposer dans le cas de la mérule.

II - La position de votre commission

Cette proposition de suppression d'une obligation manifestement complexe à appliquer est de bon sens car les risques de dissémination de la mérule sont différents de ceux liés aux termites.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 ter (art. L. 201-5 du code de la construction et de l'habitation) - Règles de remboursement des parts sociales d'une société coopérative d'habitants

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, harmonise les règles de remboursement des parts sociales d'une coopérative d'habitant en cas d'exclusion ou de retrait volontaire du sociétaire.

I - Le dispositif proposé

Cet article a été introduit sur proposition du Gouvernement par les députés afin de supprimer une incohérence dans la rédaction de l'article L. 201?5 du code de la construction et de l'habitation, tel qu'issu de la loi ALUR. La rédaction en vigueur conduit en effet à mieux indemniser le coopérateur membre d'une société coopérative d'habitants exclu pour faute que l'associé qui se retire volontairement du capital.

L'article 25 ter du projet de loi modifie donc l'article L. 201-5 du code de la construction et de l'habitation en harmonisant les règles applicables à l'exclusion d'un associé avec celles applicables en cas de retrait d'un associé.

II - La position de votre commission

Il s'agit de la correction d'une erreur manifeste touchant un point secondaire de la loi ALUR.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 quater (art. L. 261-10-1 du code de la construction et de l'habitation) - Conditions d'application de l'article L. 261-10-1 du code de la construction et de l'habitation

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, renvoie à un décret en Conseil d'État la détermination des conditions d'application de l'article L. 261-10-1 du code de la construction et de l'habitation.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 261-10-1 du code de la construction et de l'habitation, issu de l'ordonnance n° 2013?890 du 3 octobre 2013 relative à la garantie financière en cas de vente en l'état futur d'achèvement, rend obligatoire le recours à la garantie financière d'achèvement pour les promoteurs réalisant des opérations de vente en l'état futur d'achèvement.

L'article 25 quater du projet de loi tend simplement à prévoir qu'un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application de cette disposition, en fixant notamment la nature de la garantie financière d'achèvement ou de remboursement.

II - La position de votre commission

Il s'agit de donner une base légale aux modalités de mise en oeuvre de la garantie financière d'achèvement.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 quinquies (art. 25-1 A de la loi n° 2000-321 du 21 avril 2000 ; art. L. 741-2 du code de la construction et de l'habitation) - Assermentation des agents établissant le constat de logement indigne

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, supprime la condition d'assermentation des agents chargés des constats d'insalubrité et de logement indigne.

I - Le dispositif proposé

L'article 90 de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové fixe un délai de trois mois à un agent assermenté pour établir un constat d'insalubrité à compter de la demande exprimée par un citoyen auprès de l'administration. Dans le même sens, l'article 65 de la loi précitée relatif aux opérations de requalification des copropriétés dégradées, prévoit le déplacement d'un agent assermenté pour établir un constat de logement indigne à la suite de toute demande d'un citoyen.

Les agents chargés de ce type de constat sont les inspecteurs d'hygiène et de salubrité. Or, tous les agents exerçant actuellement ce type de compétence ne sont pas assermentés. L'assermentation est une procédure lourde qui consiste en une prestation de serment solennelle devant le juge. Jusqu'alors, l'assermentation d'un agent n'était nécessaire que pour la réalisation d'un constat d'infractions prévues par le code pénal et la rédaction d'un procès-verbal d'infraction aux mesures indiquées par arrêté. La loi ALUR crée ainsi une nouvelle obligation d'assermentation pour l'agent en charge des procédures d'insalubrité d'une part, et de péril d'autre part.

Dans un souci de simplification et afin de ne pas fragiliser les procédures relatives aux polices de l'habitat, cet article, introduit par le Gouvernement, supprime l'obligation d'assermentation dans ces deux cas de figure.

II - La position de votre commission

Cet article 25 quinquies va dans le sens de la simplification et de l'efficacité des procédures administratives que votre commission recommande.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 sexies - Habilitation à légiférer par ordonnance pour créer un bail de longue durée adapté aux opérations d'accession sociale à la propriété

Objet : cet article, inséré par la commission spéciale à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, prévoit la création par ordonnance d'un nouveau type de bail solidaire.

I - Le dispositif proposé

L'organisme foncier solidaire (OFS) constitue une nouvelle catégorie d'acteur foncier crée par l'article 164 de la loi ALUR et codifié à l'article L. 329-1 du code de l'urbanisme.

Ces organismes à but non lucratif sont au service de l'accession à la propriété de ménages modestes ou très modestes. Ils détiennent du foncier qu'il qu'ils louent contre une redevance faible afin d'y construire des logements rendus très abordables par la neutralisation du coût du foncier. Les OFS ont vocation à conserver définitivement la propriété du foncier sur lesquels les bâtiments de logements sont érigés dans le cadre d'un bail de longue durée. Les logements acquis ou construits sont soumis à des conditions d'affectation (usage d'habitation principale ou à usage mixte professionnel et d'habitation principale) et à des conditions de plafond de ressources, de loyers et, le cas échéant, de prix de cession.

Pour que ce dispositif fonctionne, il est nécessaire que la valeur du bien acquis ou construit par les ménages modestes ne diminue pas dans le temps, au fur et à mesure qu'on se rapproche de l'échéance du bail. Or, ni le bail à construction ni le bail emphytéotique ni le bail réel immobilier récemment créé par l'ordonnance du 20 février 2014 (article 4, codifié à l'article L. 254-1 du code de la construction et de l'habitation) ne permettent d'éviter cette perte de valeur. Si le bail réel immobilier (BRI) permet d'imposer une clause d'affectation à un niveau de loyer (ce que ne peuvent les autres baux), l'ordonnance sur le BRI contraint à ce que la valeur du bien immobilier soit adossée à la durée résiduelle du bail (application de l'article L. 254-9 du code de la construction et de l'habitation demandant qu'un décret en Conseil d'État détermine la méthode de calcul de la valeur des droits réels afférents aux logements, objets du bail, appliquée à chaque cession de ces droits). Les autres baux prévoient également des mécanismes similaires, dans la mesure où le bien immobilier, dans le cadre de ce type de baux, a vocation, à l'issue de la durée du bail, à revenir dans le patrimoine du bailleur, parfois sans indemnités pour le preneur.

Un autre problème des baux actuels concerne la possibilité de transmission des logements construits sur le foncier dont l'OFS est propriétaire. Une condition du succès du dispositif OFS est de garantir aux preneurs de pouvoir transmettre à leurs descendants directs ou bien de revendre un bien dont la valeur soit pérenne dans le temps. Or, les baux classiques, y compris le BRI, excluent expressément un non-renouvellement tacite du bail à l'issue de la période du bail et prévoient un retour du bien, parfois sans indemnités, dans le patrimoine du bailleur.

C'est pour répondre à ces deux limites que l'article 25 sexies prévoit une habilitation à légiférer par ordonnance pour créer le dispositif du bail réel solidaire. Ce dernier reposera sur une possibilité de « rechargement ». Il est ainsi proposé que le bail réel solidaire puisse être, non pas renouvelable pour le titulaire mais rechargeable à chaque mutation (vente, héritage), dès lors que le nouveau preneur répond lui-aussi aux critères d'éligibilité. Pour favoriser le maintien du bien dans la sphère de l'accession sociale à la propriété à prix accessible, il est proposé qu'à chaque mutation, dès lors que le nouveau preneur remplit les conditions d'éligibilité, le bail reparte à zéro pour une durée de 99 ans (caractère rechargeable). En revanche, si le nouveau preneur ne remplit pas les critères d'éligibilité, il demeure soumis à la durée résiduelle du bail. À l'issue de celle-ci, le bien reviendrait donc dans le patrimoine de l'OFS qui peut le remettre en location. La possibilité de maintien dans les lieux serait autorisée pour le conjoint survivant, quel que soit son niveau de ressources.

II - La position de votre commission

Alors qu'il existe déjà une pluralité de baux longs susceptibles de permettre des opérations de dissociation du foncier et du bâti, votre rapporteur avait conditionné le maintien de la demande d'habilitation prévue à l'article 25 sexies à une présentation précise, de la part du Gouvernement, des raisons justifiant la création de ce nouveau type de bail dénommé « bail réel solidaire ». Le Gouvernement ayant répondu de manière extrêmement précise aux questions de votre rapporteur, votre commission a décidé de maintenir cet article.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 septies (art. L. 241-1 et L. 243-2 du code des assurances) - Amélioration de l'information des consommateurs concernant l'assurance décennale

Objet : cet article, inséré par l'Assemblée nationale en séance publique, précise les modalités d'information relatives à la souscription par les constructeurs d'une assurance de garantie décennale.

I - Le dispositif proposé

L'article 1792 du code civil pose en principe que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, le rendent impropre à sa destination. Les articles 1792-4-1 à 1792-4-3 limitent cette responsabilité dans le temps à dix ans après la réception des travaux.

Tirant les conséquences de cette présomption de responsabilité établie par les articles 1792 et suivants du code civil, l'article L. 241-1 du code des assurances oblige les constructeurs d'ouvrage :

- à se couvrir par une assurance dite de garantie décennale ;

- à être en mesure de justifier qu'ils ont souscrit un contrat d'assurance de ce type à l'ouverture de tout chantier.

Par ailleurs, l'article L. 243-2 du code des assurances, modifié par l'article 66 de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, prévoit que :

- les personnes soumises aux obligations prévues par l'article L. 241-1 du code précité doivent être en mesure de justifier qu'elles ont satisfait à leurs obligations au moyen d'attestations d'assurance comportant des mentions minimales fixées par un arrêté du ministre chargé de l'économie ;

- pour assurer l'identification du titulaire de l'obligation de garantie décennale, l'acte qui transfère la propriété ou la jouissance d'un bien encore couvert par la garantie décennale doit porter mention de l'existence ou de l'absence d'assurance.

L'article 27 septies du projet de loi résultant de deux amendements identiques de nos collègues députés Philippe Vitel et François Brottes, président de la commission spéciale, a pour but de renforcer la protection des personnes faisant construire un bien ou faisant l'acquisition d'un bien encore couvert, en principe, par une garantie décennale :

- il oblige d'abord les constructeurs à justifier, à l'ouverture de tout chantier, qu'ils ont souscrit un contrat d'assurance les couvrant pour cette responsabilité (alors que le droit actuel les oblige seulement à être en mesure d'apporter cette justification, ce qui veut dire qu'ils ne sont pas tenus de fournir cette information systématiquement, mais seulement si la demande leur en est faite) ;

- il rend plus aisément compréhensible l'information délivrée à l'acquéreur en substituant à l'actuelle « attestation d'assurance dont les mentions minimales sont définies par arrêté » un modèle type d'attestation d'assurance ;

- il oblige à annexer à l'acte de vente cette attestation d'assurance standardisée.

II - La position de votre commission

Après les modifications apportées par la loi relative à la consommation, cet article revient une nouvelle fois sur la question de l'effectivité des dispositions législatives relatives à la garantie décennale. Les précisions nouvelles qui sont ici apportées renforcent l'information des consommateurs et contribuent donc à consolider la confiance dans les professionnels de l'immobilier, ce qui est un facteur pouvant faciliter la reprise du marché de la construction.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 octies (art. L. 211-3 du code de l'urbanisme) - Exclusion du champ du droit de préemption des biens acquis par le preneur d'un bail emphytéotique ou d'un bail à construction conclu lors d'une opération d'accession

Objet : cet article, inséré par l'Assemblée nationale en séance publique, lève un obstacle juridique aux opérations d'accession sociale à la propriété reposant sur un bail emphytéotique ou un bail à construction.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 211-4 du code de l'urbanisme définit les types d'aliénations ou de cessions qui ne sont pas soumis au droit de préemption urbain.

L'article 25 octies du projet de loi élargit ce champ d'exclusion à un nouveau cas de figure, à savoir l'aliénation d'un terrain au profit du preneur à bail emphytéotique ou à construction conclu à l'occasion d'une opération d'accession à la propriété.

Cette disposition est nécessaire pour sécuriser juridiquement les opérations d'accession à la propriété reposant sur un montage faisant appel à ces deux types de baux. Dans ce type de montage en effet, le bailleur (un établissement public foncier, en règle générale) loue un terrain au preneur (généralement, une société HLM) avec un engagement de rachat par le preneur au terme du bail. Le preneur construit ensuite sur le terrain loué des logements qu'il met à la disposition de locataires dans le cadre d'une opération de location-accession. Si le locataire lève l'option pour devenir propriétaire, le bien lui est cédé.

Or, si, jusqu'à la loi ALUR, le droit de préemption de la collectivité était purgé définitivement au moment de la conclusion du bail à construction ou emphytéotique, ce n'est plus le cas désormais. L'article 149 de la loi ALUR a en effet modifié l'article L. 213-8 du code de l'urbanisme pour disposer que, si le propriétaire n'a pas réalisé la vente de son bien sous forme authentique dans le délai de trois ans à compter de la renonciation au droit de préemption, il doit déposer une nouvelle déclaration d'intention d'aliéner. En application de cette disposition, l'accès à la propriété du locataire-accédant n'est plus sécurisé, puisque, théoriquement, la collectivité pourrait préempter le bien au moment où l'option est levée. Certes, on imagine mal une collectivité qui, directement ou par le biais d'un établissement public foncier, est à l'origine du montage, décider de faire échouer l'opération d'accession en préemptant le bien. Cependant le risque existe, ce qui suffit à bloquer l'opération, notamment parce que les partenaires financiers ne souhaitent pas l'assumer.

L'article 25 octies , inséré par un amendement de notre collègue député Daniel Goldberg modifié par le Gouvernement, résout donc la difficulté en sortant les biens acquis par le preneur d'un bail emphytéotique ou d'un bail à construction conclu lors d'une opération d'accession du champ du droit de préemption urbain.

II - La position de votre commission

Il s'agit d'un correctif technique destiné à rendre effective une procédure d'accession sociale à la propriété qui, en elle-même, est assez consensuelle.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 25 nonies (nouveau) (art. 1er, 40 et 41 de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires) - Régime de dissolution des associations syndicales de propriétaires

Objet : cet article vise à assouplir le régime de dissolution des associations syndicales autorisées (ASA).

Cet article résulte de l'adoption par la commission d'un amendement présenté par notre collègue Bruno Sido : son objectif est de lever les freins à la dissolution des associations syndicales autorisées inactives depuis de longues années et qui, néanmoins, dans la pratique, peuvent parfois tenter de remettre en cause a posteriori des permis de construire, délivrés dans le strict respect des règles du droit de l'urbanisme.

Les associations syndicales de propriétaires constituent, depuis le Moyen Age, un outil de regroupement de propriétaires fonciers mettant en valeur leurs biens tout en répondant à des objectifs d'intérêt général. Ces « associations » syndicales ont, malgré leur appellation, le statut d'établissements publics administratifs et disposent de prérogatives de puissance publique pour exécuter certains travaux servant à la fois les intérêts des propriétaires et l'utilité générale. Ce régime favorise ainsi les initiatives privées dans des domaines aussi divers que la prévention contre les risques naturels, l'aménagement des réseaux et la mise en valeur de propriétés. En l'absence de recensement précis, on estime à plusieurs milliers le nombre d'associations syndicales de propriétaires, créées pour la majorité d'entre elles dans le monde rural et agricole, mais aussi pour la gestion des parties communes de lotissements.

L'ordonnance du 1 er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires est la base juridique de ces entités : elle a modernisé le régime juridique applicable en réorganisant des dispositions dispersées et en établissant un équilibre entre l'exercice du droit de propriété et les responsabilités collectives auxquelles celui-ci peut conduire. Elle a également clarifié, par rapport au droit antérieur, les modalités de création et de fonctionnement des associations syndicales ainsi que les moyens d'action de leurs organes.

Le texte adopté par votre commission vise à modifier trois articles de cette ordonnance pour restreindre l'objet des ASA et en faciliter la dissolution , lorsqu'apparaissent des situations de blocage que le droit en vigueur, trop rigide, ne permet pas de résoudre.

Tout d'abord, selon l'article 1 er de l'ordonnance du 1 er juillet 2004, peuvent faire l' objet d'une association syndicale de propriétaires quatre catégories d'actions d'intérêt commun : prévenir les risques naturels ou les pollutions, préserver ou d'exploiter des ressources naturelles, aménager ou entretenir des cours d'eau, voies et réseaux divers, et enfin mettre en valeur des propriétés . Le paragraphe I de l'article adopté par la commission vise ici à introduire une restriction en précisant que cette quatrième activité de mise en valeur des propriétés ne peut faire l'objet d'une association syndicale qu'en l' absence de plan local d'urbanisme , ce qui concerne un assez grand nombre de communes.

Ensuite, l'article 40 de l'ordonnance prévoit aujourd'hui deux possibilités de dissolution d'une association syndicale autorisée.

- La première nécessite une demande de la majorité de ses membres 230 ( * ) et s'effectue par acte de l'autorité administrative ;

- La seconde est la dissolution d'office par acte motivé de l'autorité administrative. Cette possibilité de dissolution requiert qu' une des quatre conditions suivantes soit réunie : la disparition de l'objet de l'ASA ; son inactivité pendant plus de trois ans ; l'obstacle que représente son maintien à la réalisation de projets d'intérêt public dans un périmètre plus vaste que celui de l'association, ou bien l'existence de difficultés graves et persistantes entravant le fonctionnement de l'ASA.

Le paragraphe II de l'article adopté par la commission porte sur ce second régime de dissolution d'office et prévoit de le rendre obligatoire - et non plus facultatif - si une des quatre conditions alternatives requise par l'article 40 de l'ordonnance est satisfaite. Par coordination, le paragraphe III vise à introduire la notion d'acte « constatant » la dissolution de l'ASA dans l'article 41 de l'ordonnance qui en prévoit la publication et la notification.

Favorable à la rationalisation des structures et à l'amélioration de la sécurité juridique sur nos territoires, votre rapporteur a constaté que le présent dispositif se résume à insuffler plus de dynamisme au droit en vigueur en rendant obligatoire un mécanisme de dissolution d'office qui est aujourd'hui facultatif. Elle a cependant signalé que l'impact concret d'une telle réforme sur les quelques milliers d'associations syndicales existantes mériterait d'être précisé. En particulier, la dissolution d'une « association », qui a en réalité un statut de droit public, soulève directement la question du sort de son patrimoine.

Soutenant le principe même d'une initiative dans ce domaine
- quitte à en perfectionner les modalités au cours de la « navette » - notre collègue Alain Richard a, pour sa part, souligné les nombreuses situations de blocage sur le terrain et la nécessité, pour y faire face, de prévoir une législation plus souple.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 25 decies (nouveau) (art. L. 433-2 du code de la construction et de l'habitation) - Extension du mécanisme de la VEFA inversée

Objet : cet article vise à procéder à une extension du champ de la VEFA inversée dans trois directions.

Cet article résulte de l'adoption par votre commission d'un amendement présenté par votre rapporteur.

L'article 103 de la loi de mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a créé le mécanisme de la VEFA inversée, qui permet à un organisme HLM de vendre à des acteurs privés une fraction des logements construits dans un programme de construction composé majoritairement de logement sociaux. Cela permet que la totalité de l'opération de construction soit confiée à un organisme d'HLM qui, à défaut, devrait acquérir les logements sociaux auprès de l'opérateur privé qui interviendrait pour la part « limitée » de logements privés.

Le présent amendement procède à un triple élargissement du champ du dispositif :

- élargissement dans le temps , tout d'abord. Dans le droit actuel, la mise en oeuvre de la VEFA inversée n'est possible que dans les cinq ans suivant la publication de la loi ALUR. L'article 25 decies pérennise la disposition ;

- élargissement dans l'espace également. Le dispositif sera en effet applicable aux zones dites « tendues » (communes soumises à la taxe sur les logements vacants), alors qu'il concerne actuellement seulement le foncier public cédé avec décote en vue de construire des logements (terrains, bâtis ou non, ayant été acquis dans le cadre des articles L. 3211-7 ou L. 3211-13-1 du code général de la propriété des personnes publiques) ;

- fixation du plafond de la part de logements libres à 30 % du total de l'opération de construction (alors que, dans le droit actuel, cette part n'est pas quantifiée, l'article L. 433-2 du code de la construction et de l'habitation se contentant de la qualifier d'accessoire).

Ce dispositif encadré permettra aux organismes d'HLM de contribuer plus activement à la production de logements sociaux dans un souci de mixité sociale. Il leur permettra également de conserver leur expertise en matière de maîtrise d'ouvrage et d'exercer un contrôle direct sur la qualité des logements produits.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

TITRE II - INVESTIR
CHAPITRE IER - Investissement
Section 1 - Faciliter les projets

Article 26 (art. 9 et 20 de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement) - Extension de l'expérimentation d'une autorisation unique pour les installations classées pour la protection de l'environnement

Objet : cet article vise, d'une part, à étendre le champ de l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement à tout le territoire pour les projets présentant un intérêt économique majeur, d'autre part, à habiliter le Gouvernement à pérenniser ce dispositif expérimental par voie d'ordonnance.

I - Le droit en vigueur

L'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement a été prise sur le fondement de l'article 14 de la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

Elle prévoit une expérimentation, dans un nombre limité de régions et pour une durée de trois ans, d'une autorisation environnementale unique pour les projets d'installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), notamment dans le domaine énergétique (éoliennes, méthaniseurs).

Cette autorisation unique permet de délivrer, au sein d'une même décision administrative, les autorisations et dérogations requises au titre du code de l'environnement, du code de l'énergie, du code forestier ou encore du code de l'urbanisme.

L'article 38 ter du projet de loi relatif à la transition énergétique étend l'expérimentation pour les projets énergétiques, initialement prévue pour la Basse-Normandie, la Bretagne, la Champagne-Ardenne, la Franche-Comté, Midi-Pyrénées, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, à l'ensemble du territoire national.

Au plus tard six mois avant la fin de l'expérimentation, soit en 2017, le Gouvernement devra présenter au Parlement un rapport d'évaluation indiquant le bilan et les suites à donner à cette expérimentation.

II - Le dispositif proposé et les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Le présent article complète l'ordonnance précitée afin de généraliser sur l'ensemble du territoire le mécanisme de l'autorisation unique pour les projets d'ICPE non liés à la production d'énergie. À compter de la publication de la loi, pourront en effet bénéficier de cette procédure les projets soumis à autorisation au titre de la législation ICPE et présentant un « intérêt majeur » pour l'activité économique, « compte tenu du caractère stratégique de l'opération concernée, de la valeur ajoutée qu'elle produit, de la création ou de la préservation d'emplois qu'elle permet ou du développement du territoire qu'elle rend possible » .

Le II de l'article 26 habilite par ailleurs le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi sur la croissance et l'activité, afin de lui permettre de prendre toute mesure relevant du domaine de la loi et visant :

- à généraliser de manière pérenne les dispositions de l'ordonnance du 20 mars 2014 sur les installations classées pour la protection de l'environnement et celles de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à loi sur l'eau ;

- à codifier ces dispositions et mettre en cohérence, le cas échéant, les dispositions législatives régissant les autorisations et dérogations intégrées au sein de l'autorisation unique.

En commission spéciale, les députés ont souhaité prévoir que le Conseil national de la transition écologique serait associé à l'élaboration des ordonnances prévues au paragraphe II de l'article 26. À cette fin, le Conseil pourrait mettre en place une formation spécialisée pour assurer le suivi des travaux et la préparation des avis, mis à disposition du public dans les conditions prévues à l'article L. 133?3 du code de l'environnement.

III - La position de votre commission

Votre commission souscrit pleinement à l'extension de l'expérimentation, actuellement en cours, d'une autorisation unique en matière environnementale à l'ensemble du territoire pour les projets présentant un caractère stratégique d'un point de vue économique. Cette extension va dans le bon sens. Les entreprises attendent cette autorisation unique qui, si elle ne supprime pas les décisions qu'elle regroupe, crée un guichet unique du côté de l'administration.

Pour autant, à l'initiative de votre rapporteur, votre commission a, par amendement , supprimé la deuxième partie de l'article qui habilite le Gouvernement à pérenniser ce dispositif expérimental par voie d'ordonnance. Cette pérennisation est largement prématurée dans la mesure où l'expérimentation devra faire l'objet d'un bilan soumis au Parlement courant 2017, conformément à la Constitution.

Votre commission a par ailleurs adopté trois amendements rédactionnels.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 26 bis (art. L. 515-27 du code de l'environnement) - Réduction du délai de recours en matière d'installations d'élevage

Objet : cet article, inséré à l'Assemblée nationale, vise à réduire le délai de recours ouvert pour les tiers en matière d'installations d'élevage.

I - Le droit en vigueur

L'article L. 515-27 du code de l'environnement a été créé par l'article 30 de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche.

Avant ce texte, il existait deux délais en matière de recours pour les installations d'élevage : celui du pétitionnaire était de deux mois, celui des tiers de quatre ans. De ce fait, des installations en fonctionnement depuis des mois voire des années restaient soumises à un risque potentiel d'annulation de l'arrêté préfectoral les ayant créées. La loi de modernisation de l'agriculture a donc réduit le délai de recours pour les tiers à un an.

L'article L. 515-27 prévoit en effet que, « pour les installations d'élevage, les décisions mentionnées à l'article L. 514-6 peuvent être déférées à la juridiction administrative par les tiers, personnes physiques ou morales, les communes intéressées ou leurs groupements, en raison des inconvénients ou des dangers que le fonctionnement de l'installation présente pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, dans un délai d'un an à compter de la publication ou de l'affichage de ces décisions. Ce délai est, le cas échéant, prolongé de six mois à compter de la mise en activité de l'installation » .

II - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

En séance, deux amendements identiques déposés par nos collègues députés Gilles Lurton et Marc Le Fur ont eu pour objectif de soumettre les arrêtés d'autorisation d'exploiter une installation classée d'élevage au délai de recours de droit commun applicable à tous les actes administratifs, à savoir deux mois. Ces deux amendements visaient par ailleurs à supprimer les possibilités de recours existant dans les six mois suivant la mise en service de l'installation.

Un sous-amendement du Gouvernement a été adopté. Le ministre a jugé prématuré de conclure à ce stade sur une telle réduction des délais de recours, dans l'attente des résultats des concertations plus générales actuellement en cours sur le sujet. Le sous-amendement préserve toutefois les dispositions de l'amendement visant à supprimer les possibilités de recours six mois après la mise en service.

III - La position de votre commission

Votre commission se félicite de la réduction du délai de recours ouvert aux tiers en matière d'installations d'élevage, qui passe, par l'adoption du présent article, de dix-huit mois à un an. Cette réduction du délai de recours, encore bien supérieur au délai de droit commun, constitue une simplification bienvenue pour les éleveurs. En outre, la suppression de toute possibilité de recours postérieur à la mise en service de l'installation est un progrès significatif en termes de sécurité juridique pour ces acteurs.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 26 ter (art. L. 515-27 du code de l'environnement) - Harmonisation des règles d'affichage des avis d'ouverture d'enquête publique

Objet : cet article, inséré à l'Assemblée nationale, vise à harmoniser les règles d'affichage des avis d'ouverture d'enquête publique et des permis de construire.

Le présent article résulte de l'adoption par les députés, en séance publique, d'un amendement de notre collègue députée Chantal Guittet. Un amendement identique, non soutenu, avait été déposé par notre collègue député Marc Le Fur.

De même que l'article 26 bis , cet article complète l'article L. 515-27 du code de l'environnement sur les règles applicables aux installations d'élevage.

Il s'agit cette fois de préciser les règles d'affichage en matière de participation du public : « l'affichage des avis d'ouverture d'enquête publique pour les installations d'élevage soumises à l'autorisation ou de consultation du public pour les installations soumises à enregistrement est réalisé dans les mêmes conditions de forme que celles prévues par le code de l'urbanisme pour l'affichage du permis de construire » .

Les auteurs de l'amendement ont rappelé que les règles d'affichage des différents avis exigés par le droit des installations classées et le droit de l'urbanisme sont aujourd'hui multiples. L'objectif est donc d'harmoniser les exigences de forme : dimension des panneaux, taille de la police, couleur du fond du panneau, etc.

Votre commission a estimé qu'il s'agissait d'une simplification utile pour les acteurs de terrain.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 27 (art. 1er et 7 de l'ordonnance n° 2014-356 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'un certificat de projet) - Extension de l'expérimentation d'un certificat de projet

Objet : cet article vise à étendre l'expérimentation d'un certificat de projet à la région d'Île-de-France ainsi qu'aux projets présentant un intérêt économique majeur.

I - Le droit en vigueur

La loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises a prévu l'expérimentation d'un certificat de projet.

L'ordonnance n° 2014-356 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'un certificat de projet autorise les porteurs de projets à demander au représentant de l'État dans le département la délivrance de ces certificats. Sur la base des informations fournies par le demandeur, le préfet doit délivrer, sous deux mois, un document dans lequel il dresse la liste des procédures auxquelles le projet est soumis au titre de différentes législations et réglementations et s'engage sur les délais dans lesquels les décisions relevant de sa compétence seront délivrées.

Les porteurs de projet bénéficient donc, pour une opération donnée, d'un interlocuteur unique, d'un engagement de l'administration sur les procédures nécessaires ou potentiellement nécessaires à la réalisation de l'opération et sur ses délais d'instruction, d'une information sur la viabilité de l'opération par l'identification en amont des éventuels éléments de nature à y faire obstacle, d'une sécurité juridique grâce à une cristallisation du droit applicable, sauf exceptions, à la date de délivrance du certificat, pendant dix-huit mois et d'une pré-instruction par l'administration en vue de l'obtention des autorisations futures.

Ce nouveau dispositif n'est aujourd'hui disponible à titre expérimental qu'en Aquitaine, Bretagne, Champagne-Ardenne et Franche-Comté.

II - Le dispositif proposé

Le présent article inclut l'Île-de-France dans la liste des régions éligibles et prévoit que pourront relever, en Île-de-France, du mécanisme du certificat de projet « les projets de création ou d'extension de locaux ou d'installations, y compris d'installations relevant du titre I er du livre V du code de l'environnement, lorsqu'ils présentent un intérêt majeur pour l'activité économique , compte tenu du caractère stratégique de l'opération concernée, de la valeur ajoutée qu'elle produit, de la création ou de la préservation d'emplois qu'elle permet ou du développement du territoire qu'elle rend possible » .

L'entrée en vigueur en Île-de-France se fera au premier jour du deuxième mois suivant la date de publication de la présente loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Les députés ont adopté cet article sans modification.

III - La position de votre commission

Votre commission souscrit pleinement à l'extension de l'expérimentation du certificat de projet. En effet, pour déterminer la pertinence de ce dispositif, il convient de disposer du plus grand nombre possible de retours d'expériences, ce que l'intégration de la région d'Île-de-France dans le champ d'application devrait permettre.

Elle a adopté un amendement rédactionnel à l'initiative de votre rapporteur.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 27 bis (art. L. 514-6 et L. 553-4 du code de l'environnement) - Harmonisation des délais de recours pour les installations de production d'énergie renouvelable

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale, prévoit d'harmoniser les différents délais de recours pour les projets visant à la production d'énergie renouvelable, en les alignant sur le délai de recours de droit commun de deux mois à compter de la publication de la décision administrative.

I - Le droit en vigueur

Les installations de production d'énergie renouvelable font aujourd'hui l'objet d'autorisations relevant de législations multiples, auxquelles s'attachent, pour les tiers, des délais de recours eux-mêmes différents :

- l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme soumet le permis de construire à un délai de recours de deux mois à compter de l'affichage sur le terrain ;

- pour les autorisations d'exploiter des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et les autorisations délivrées au titre de la loi sur l'eau du 30 décembre 2006 (hydroélectricité, éolien offshore et centrales photovoltaïques au sol), l'article L. 514-6 du code de l'environnement et l'article R. 514-3-1 pris pour son application prévoient un délai de recours d' un an à compter de la publication ou de l'affichage de la décision : ce délai peut toutefois être prolongé jusqu'à six mois après la mise en service de l'installation , lorsque celle-ci n'est pas intervenue dans les six mois suivant la publication ou l'affichage ;

- en ce qui concerne les éoliennes terrestres , l'article L. 553-4 du code de l'environnement prévoit, depuis la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite Grenelle 2, une dérogation à l'article L. 514-6 : l' autorisation d'exploiter délivrée au titre de la législation ICPE fait l'objet d'un délai de recours de six mois à compter de la publication ou de l'affichage de la décision.

L' absence de cohérence de ces délais se manifeste particulièrement lorsqu'une même installation de production d'énergie renouvelable nécessite l'obtention de plusieurs autorisations (permis de construire et autorisation ICPE pour l'éolien par exemple) dont les délais de recours des tiers sont différents. Elle complique également l' identification du point de départ du délai de recours et renforce l' insécurité juridique des projets.

Il en résulte des difficultés de financement qui sont à l'origine d'un renchérissement du coût des projets et pèsent sur la situation économique des filières concernées.

II - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article, introduit par la commission spéciale de l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Denis Baupin, harmonise les différents délais de recours des tiers en les alignant sur le délai de recours de droit commun de deux mois à compter de la publication de la décision administrative , indépendamment de sa nature (permis de construire, autorisation d'exploiter ICPE ou autorisation au titre de la loi sur l'eau).

À cet effet, il intègre dans l'article L. 514-6 le dispositif dérogatoire prévu pour les éoliennes terrestres à l'article L. 553-4, en l'étendant à l'ensemble des installations de production d'énergie renouvelable et en raccourcissant le délai de six à deux mois . En conséquence, l'article L. 553-4, devenu superflu, est abrogé.

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article qui procède à une simplification administrative nécessaire pour le développement des énergies renouvelables . La longueur de ces délais a pour effet de freiner la transition énergétique : il est utile que les bons projets avancent plus vite et que les mauvais soient arrêtés plus rapidement.

Votre commission remarque que cette harmonisation a d'ores et déjà été retenue dans le cadre de l'expérimentation régionale sur l'autorisation unique ICPE pour les projets d'énergie renouvelable , mise en oeuvre pour trois ans en application de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement.

Votre commission a adopté un amendement de clarification rédactionnelle.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 27 ter (nouveau) (article L. 514-6 du code de l'environnement) - Encadrement du droit de recours en matière d'installations d'élevage

Objet : cet article additionnel, inséré par votre commission à l'initiative de Jérôme Bignon, vise à subordonner la possibilité de recours contre une décision relative à une installation d'élevage à la participation à la phase de consultation du public organisée préalablement à cette décision.

I - Le droit en vigueur

L'article L. 514-6 du code de l'environnement est issu de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Il a été codifié par l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de l'environnement.

Cet article précise les règles applicables en matière contentieuse aux ICPE . Il prévoit notamment qu'il s'agit d'un contentieux de pleine juridiction. Un décret en Conseil d'État précise les conditions de délais dans lesquelles les décisions relatives aux ICPE peuvent être déférées à la juridiction administrative (article R. 514-3-1 du code de l'environnement). L'article précise enfin les conditions dans lesquelles les tiers sont admis à contester ces décisions.

II - Le dispositif adopté par votre commission

Votre commission a adopté, à l'initiative de Jérôme Bignon, un amendement complétant l'article L. 514-6 du code de l'environnement pour encadrer le droit de recours en matière d'installations d'élevage soumises à autorisation ou à enregistrement au titre de la législation en matière d'ICPE.

Ne seront recevables à introduire un recours que les personnes ayant participé aux procédures de consultation du public organisées préalablement au rendu de la décision administrative.

La question des recours abusifs en matière d'installations d'élevage est effectivement centrale. L'objectif du présent article est, d'une part, de limiter les recours abusifs tout en garantissant un droit de recours effectif, dans la mesure où personne n'est a priori exclu de ce droit, d'autre part, d'améliorer l'effectivité des procédures de participation du public en incitant à une participation constructive en amont. Le dispositif se veut donc doublement vertueux.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 28 - Habilitation à légiférer par voie d'ordonnance dans le domaine du droit de l'environnement

Objet : cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi visant à accélérer l'instruction et la prise de décisions relatives aux projets de construction et d'aménagement et à en modifier l'évaluation environnementale, réformer les procédures destinées à assurer la participation du public à l'élaboration de certains projets d'aménagement et d'équipement et accélérer le règlement des litiges relatifs aux projets susceptibles d'avoir une influence sur l'environnement.

I - Le dispositif proposé

A. Le dispositif initial

L'exposé des motifs du projet de loi indique que l'article 28 du PJL croissance et activité, « rassemble les habilitations relatives aux mesures de simplification que le Gouvernement pourrait prendre parmi celles qui sont actuellement à l'étude ». Le champ de l'habilitation sollicitée porte sur quatre ensembles de mesures poursuivant un objectif global de modernisation et de simplification du droit de l'environnement et de l'urbanisme.

1. Le premier volet de l'habilitation concerne des mesures d'accélération des procédures d'instruction et de délivrance de l'autorisation des projets de construction et d'aménagement.

Le Président de la République a fixé au Gouvernement un objectif de délivrance des autorisations d'urbanisme dans un délai de cinq mois maximum , à compter du dépôt d'un dossier de demande complet. Le Premier ministre a confié au Préfet honoraire Jean-Pierre Duport une mission visant à définir les réformes qui pourraient être conduites de manière à raccourcir les délais de délivrance des autorisations d'urbanisme. Cette mission a abouti à la transmission d'un rapport non public au Premier ministre en janvier 2015.

Deux sources de blocage ou de ralentissement des procédures d'autorisation d'urbanisme ont été identifiées par la mission Duport.

? La première source de difficulté est liée aux complexités de l'articulation de la procédure de délivrance des autorisations d'urbanisme proprement dites avec un certain nombre de législations distinctes du code de l'urbanisme.

Autorisations d'urbanisme et législations connexes : des articulations complexes

Sur la problématique de l'articulation entre autorisation d'urbanisme et autorisation issue d'une autre législation (code du patrimoine, code l'environnement, etc.), on peut distinguer deux grands cas de figure :

- 1 er cas : il existe déjà une articulation entre le code de l'urbanisme et la législation connexe. Le cas le plus courant est que l'autorisation d'urbanisme tient lieu d'autorisation au titre de la législation connexe, mais seulement après accord de l'autorité compétente au titre de cette législation. On peut citer les exemples suivants : construction, démolition ou de l'aménagement situé dans le champ de visibilité d'un monument historique, dans une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, dans une réserve naturelle nationale ou dans un coeur de parc national ; construction à proximité d'un ouvrage militaire ou à l'intérieur d'un polygone d'isolement d'un établissement de conservation d'explosifs ; construction d'un établissement recevant du public ou d'un immeuble de grande hauteur.

Il peut arriver également que la délivrance de l'autorisation d'urbanisme soit différée dans l'attente de l'accord d'une autorisation relevant d'une législation connexe à l'application du droit des sols. Exemples : construction ou aménagement situé dans une zone de présomption de prescriptions archéologiques ; construction ou aménagement soumis à autorisation de défrichement au titre du code forestier ; construction d'une installation classée pour la protection de l'environnement.

- 2 ème cas : il n'existe aucune articulation entre procédure d'urbanisme et procédure connexe.

Il demeure en effet quelques matières où les procédures d'autorisation d'urbanisme et les procédures connexes s'ignorent. Il a ainsi été envisagé, lors des travaux de la mission « DUPORT », d'introduire des articulations entre les procédures de permis de construire (PC) et d'aménager (PA) et les procédures de déclaration au titre de la loi sur l'eau et de dérogation à l'atteinte aux espèces protégées.

Source : commission spéciale du Sénat

Les points a) et b) de l'habilitation à légiférer par ordonnance prévue au 1° du I de l'article 28 répondent spécifiquement à cette problématique :

- a) réduire les délais de délivrance des décisions prises sur les demandes d'autorisation d'urbanisme, notamment grâce à une diminution des délais d'intervention des autorisations, avis ou accords préalables relevant de législations distinctes du code de l'urbanisme ;

- b) créer ou modifier les conditions d'articulation des autorisations d'urbanisme avec les autorisations, avis, accords ou formalités relevant de législations distinctes du code de l'urbanisme.

? La deuxième source de source de difficulté identifiée par la mission est, selon les termes de l'étude d'impact jointe au projet de loi, l'apparition d'un urbanisme « négocié » où les règles des documents d'urbanisme ne sont pas respectées par l'autorité administrative, tandis que des conditions ne figurant pas dans ces documents d'urbanisme sont imposées aux aménageurs.

Alors que la délivrance de l'autorisation d'urbanisme est un droit pour le pétitionnaire lorsque le projet respecte les dispositions légales ou réglementaires applicables en matière d'urbanisme (décision en conformité et non en opportunité), les porteurs de projet font état d'abus de pouvoir sous la forme de manoeuvres retardant la décision sur des dossiers déposés et respectant les prescriptions réglementaires. La décision de l'autorité administrative qui refuse une autorisation pour de mauvais motifs ou qui la conditionne à des prescriptions abusives peut certes être attaquée et, le cas échéant, annulée, mais la phase contentieuse retarde la réalisation des projets, avec un coût économique parfois important. En outre, lorsqu'une décision de refus est annulée par le juge, il arrive que l'autorité administrative prononce un autre refus en s'appuyant sur des motifs différents, ce qui relance la phase contentieuse.

Les points c) et d) de l'habilitation à légiférer par ordonnance prévue au 1° du I de l'article 28, dans sa rédaction initiale, répondaient à cette problématique :

- le c) prévoyait, dans des termes extrêmement vagues, « d'aménager les pouvoirs du juge administratif lorsqu'il statue sur un recours contre une autorisation d'urbanisme ou le refus d'une telle autorisation » ;

- le d) visait à « définir les conditions dans lesquelles, en cas d'annulation du refus de délivrance d'une autorisation d'urbanisme, le représentant de l'État se substitue à l'autorité compétente pour délivrer cette autorisation ».

Il semblerait que le but de ces deux dispositions était de mettre en place une procédure de réformation des décisions de refus d'autorisation, qui aurait fait intervenir le juge administratif et le préfet. Saisi d'un recours contre un refus d'autorisation d'urbanisme, le juge aurait eu la possibilité, dans des conditions qu'il aurait fallu préciser, de confier au représentant de l'État le soin de délivrer l'autorisation demandée à la place de la commune ou de l'intercommunalité.

? Le champ de l'habilitation prévue au 1° du I prévoit enfin une mesure spécifique aux unités touristiques nouvelles (UTN) .

Le e) vise une troisième source de simplification administrative, plus circonscrite, puisqu'elle se limite aux zones de montagne. Elle entend en effet supprimer la procédure d'autorisation des unités touristiques nouvelles prévue par l'article L. 145-11 du code de l'urbanisme et définir les modalités suivant lesquelles les unités touristiques nouvelles seraient créées et contrôlées dans le cadre des documents d'urbanisme ou des autorisations mentionnées au livre IV de ce code.

Qu'est-ce qu'une UTN

Une UTN est une opération de développement touristique, en zone de montagne, ayant pour objet, en une ou plusieurs tranches, soit de construire des surfaces destinées à l'hébergement touristique ou de créer un équipement touristique comprenant des surfaces de plancher, soit de créer des remontées mécaniques, soit de réaliser des aménagements touristiques ne comprenant pas de surface de plancher dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État (article L.145-9 du code de l'urbanisme).

La procédure d'autorisation des UTN s'applique aux projets situés sur des territoires non couverts par un schéma de cohérence territoriale (SCOT). La création et l'extension d'UTN y sont soumises à une autorisation préfectorale.

Un rapport d'audit du Conseil général de l'environnement et du développement durable sur l'application des dispositions d'urbanisme de la loi montagne remis à la Ministre du logement en octobre 2013 préconise la suppression de cette autorisation administrative préalable à la décision d'autorisation d'urbanisme. Il souligne en effet que cette procédure est à la fois lourde et longue et qu'elle a perdu sa raison d'être du fait du développement des documents d'urbanisme communaux ou intercommunaux, et des chartes des parcs naturels ou des réserves naturelles, qui permettent un aménagement touristique des zones de montagne respectueux de l'environnement.

Source : commission spéciale du Sénat

2. Le deuxième volet de l'habilitation concerne des mesures modifiant les règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, des plans et des programmes, aujourd'hui définie au cas par cas depuis la publication du décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 relatif à l'évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement 231 ( * ) .

Ces mesures pourront concerner :

- la simplification des pratiques existantes ;

- l'amélioration de l'articulation entre les évaluations environnementales de projets différents ainsi qu'entre l'évaluation environnementale des projets et celle des plans et programmes ;

- la modification des règles de désignation et des attributions des autorités environnementales, l'Autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, créée par un décret du 30 avril 2009, étant menacée de sanctions par l'Union européenne ;

- la mise en conformité avec le droit de l'Union européenne et la transposition de la directive du 13 décembre 2011 du Parlement européen et du Conseil concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés.

Les mesures prises dans ce cadre devraient principalement traduire les recommandations :

- du groupe de travail confié à M. Jacques Vernier dans la continuité des travaux de la commission spécialisée du Conseil national de la transition écologique (CNTE) qui doit permettre d'identifier les simplifications pouvant être apportées deux ans après la mise en oeuvre des principales réformes relatives à l'évaluation environnementale et aux études d'impact entrées en vigueur en 2012 et les améliorations à apporter au dispositif des autorités environnementales dans le sens d'une plus grande garantie d'impartialité ;

- de la mission sur l'accélération des projets de construction confiée au Préfet Jean-Pierre Duport, qui doit également proposer des pistes de réformes sur ces questions, notamment sur l'articulation entre l'évaluation environnementale stratégique du document d'urbanisme et l'étude d'impact du projet.

3. Le troisième volet concerne la modernisation et la clarification des modalités de participation, de concertation, de consultation et d'information du public . Ces mesures viseraient notamment :

- une simplification des dispositions des articles L. 120-1 à L. 120-3 du code de l'environnement et une réforme des procédures particulières de participation du public à l'élaboration des décisions ayant une incidence sur l'environnement lorsqu'elles ne sont pas conformes à l'article 7 de la Charte de l'environnement ;

- les modalités de la concertation et de la participation du public ;

- la simplification des modalités des enquêtes publiques.

4. Enfin, le dernier volet concerne l'accélération du règlement des litiges relatifs aux projets susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement, notamment en précisant les conditions dans lesquelles les juridictions administratives peuvent être saisies d'un recours et en aménageant leurs compétences et leurs pouvoirs.

Ces quatre ordonnances devront être prises dans un délai de douze mois sauf pour la transposition de la directive du 13 décembre 2011, pour laquelle le délai est porté à dix-huit mois.

B. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'article 28 a été modifié afin de prévoir que le Conseil national de la transition écologique serait associé à l'élaboration des ordonnances prévues au I de l'article. À cette fin, le CNTE pourra « mettre en place une formation spécialisée pour assurer le suivi des travaux et la préparation des avis, mis à disposition du public ».

En séance publique, l'Assemblée nationale a :

- encadré l'habilitation prévue en précisant que les mesures prises en vertu de cette dernière ne devaient pas « porter atteinte aux principes fondamentaux et aux objectifs généraux du code de l'environnement » ;

- précisé que l'accélération de l'instruction et de la prise des décisions relatives aux projets de construction et d'aménagement concernaient notamment ceux qui favorisent la transition écologique, de même que pour l'accélération du règlement des litiges ;

- supprimé l'habilitation relative à l'aménagement des pouvoirs du juge administratif lorsqu'il statue contre une autorisation d'urbanisme ou le refus d'une telle autorisation ainsi que celle relative à la substitution du préfet au maire pour délivrer une autorisation d'urbanisme ;

- précisé le champ de l'habilitation concernant les modalités de concertation et de participation du public ainsi que des enquêtes publiques en prévoyant le recours aux nouvelles technologies de l'information et de la communication ;

- prévu une information et une consultation du Parlement au cours du processus d'élaboration des ordonnances par le biais notamment d'un « comité de liaison composé de parlementaires ».

On peut signaler enfin qu'en séance, les points c) à d) du 1° du I ont été supprimés , sur proposition du rapporteur et avec accord du Gouvernement, au profit d'une modification directe du droit en vigueur (les dispositions concernées figurent à l'article 28 ter, au commentaire duquel on pourra se reporter).

II - La position de votre commission

Votre rapporteur a considéré que le champ des habilitations prévues à l'article 28 était trop large, trop flou quant aux options retenues, et relevait davantage de choix politiques importants, dont le Parlement devrait être pleinement saisi, que de simples mesures techniques.

Votre rapporteur souligne qu'elle ne peut que partager la plupart des objectifs, très généraux, et qu'il est urgent qu'une réforme clairement délimitée et précise de ces procédures soient présentée devant le Parlement.

Elle regrette que cette demande d'habilitation se fonde sur les conclusions de groupes de travail qui n'ont, pour la plupart, pas fini leurs travaux ou qui viennent seulement d'être mis en place, comme par exemple la commission spécialisée sur la « démocratie participative » présidée par Alain Richard, ou sur les recommandations du rapport remis par le préfet Jean-Pierre Duport au Premier ministre en janvier 2015 mais qui n'a pas été rendu public. En outre, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a annoncé un projet de loi relatif à la modernisation du droit de l'environnement pour l'automne 2015.

Ainsi, malgré la pertinence des diagnostics posés, il n'est pas souhaitable que le Parlement se dessaisisse de sa compétence de législateur au profit de l'exécutif, sur des mesures qui ne sont pas encore arrêtées et qui ne se bornent pas à des dispositions techniques mais relèvent de choix politiques importants et qui doivent être pris en toute transparence.

Sur ce sujet, l'étude d'impact ne fait qu'exposer un choix d'options pour chacune des habilitations, sans indiquer laquelle serait retenue, ou indique simplement que « différentes options étant toujours à l'étude, le Gouvernement n'a pas encore à ce jour arrêté sa position ».

Pour ces raisons, votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur visant à maintenir seulement l'habilitation relative aux unités touristiques nouvelles, dont l'objet est clairement délimité et dont le caractère technique peut justifier le recours à une ordonnance.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi rédigé.

Article 28 bis A (nouveau) (art. L. 424-5 du code de l'urbanisme) - Possibilité de retrait d'une décision de non-opposition à déclaration préalable

Objet : cet article vise à supprimer le droit de retrait pour les autorisations sur déclaration préalable.

Cet article résulte de l'adoption par la commission d'un amendement présenté par M. Mandelli.

L'article 134 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové a modifié l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme en étendant le droit de retrait de l'administration aux décisions de non-opposition à déclarations préalables. Par conséquent, une décision de non-opposition à la déclaration préalable irrégulière peut désormais être retirée par l'autorité qui l'a délivrée dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision, sans préjudice des possibilités de recours ouvertes à tout tiers lésé pendant les deux mois de l'affichage de l'autorisation.

Sur cette question, la loi ALUR avait pris la position inverse de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme. Ce texte avait en effet établi que la décision de non-opposition à la déclaration préalable ne pouvait faire l'objet d'aucun retrait -à la différence du permis de construire, d'aménager ou de démolir. Cette exception se justifiait par le fait que les demandes de déclarations préalables ne sont requises que pour les ouvrages de faible importance et pour lesquels la possibilité de retrait constituait une source de délais supplémentaires inutiles.

Votre commission a donc souhaité revenir à la rédaction de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme antérieure à la loi ALUR. En effet, la possibilité de retirer une décision de non-opposition à la déclaration préalable répond essentiellement à une demande de l'administration, qui peut ainsi réformer ses propres décisions tacites. Votre commission estime que la simplification des démarches et la sécurité juridique des projets doit passer avant les commodités de l'administration.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 28 bis (art. L. 141-12, L. 141-13 et L. 141-19 du code de commerce) - Simplification des règles de cession d'un fonds de commerce

Objet : cet article vise à procéder à plusieurs mesures de simplification des règles de cession des fonds de commerce, en particulier en simplifiant les règles de publication et en supprimant le droit de surenchère du sixième.

I - Le dispositif proposé

Issu d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale, en séance, à l'initiative de notre collègue députée Laure de la Raudière, l'article 28 bis du projet de loi comporte trois mesures de simplification des règles de cession d'un fonds de commerce. Revêtant une complexité et un formalisme bien plus importants que la cession de parts d'une société commerciale, alors que la même activité économique peut être concernée, ces règles demeurent souvent aujourd'hui encore très directement issues de la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce et de la loi du 29 juin 1935 relative au règlement du prix de vente des fonds de commerce.

L'article 28 bis modifie à cette fin le chapitre I er , relatif à la vente du fonds de commerce, du titre IV, relatif au fonds de commerce, du livre I er du code de commerce.

Premièrement, cet article supprime l'obligation de publier la cession du fonds de commerce dans un journal d'annonces légales (article L. 141-12 du code de commerce). Demeurerait l'obligation de publier la cession dans le bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC), consulté de façon électronique par les personnes souhaitant suivre les cessions des fonds de commerce. Cette mesure de simplification constituera une économie pour l'acquéreur du fonds, chargé de la publication.

Deuxièmement, cet article supprime l'obligation d'enregistrement de l'acte de cession, à peine de nullité, lorsque celui-ci est établi par acte notarié et non par acte sous seing privé (article L. 141-13 du code).

Troisièmement, cet article supprime le droit de surenchère du sixième, consistant pour un créancier du vendeur du fonds à former une surenchère représentant le sixième du prix principal du fonds, hors matériel et stocks, lorsque le prix de cession ne suffit pas à le désintéresser. Dans ce cas, le fonds est mis en vente aux enchères (article L. 141-19 du code). En effet, cette faculté est tombée en désuétude, selon les informations dont dispose votre rapporteur. Il existe par ailleurs un mécanisme de surenchère du dixième, à la disposition de tout créancier inscrit sur le fonds.

II - La position de votre commission

Votre commission a approuvé les simplifications ainsi apportées au régime de la vente du fonds de commerce, très peu modifié par le législateur depuis son origine.

À l'initiative de son rapporteur, elle a adopté un amendement visant à procéder aux nombreuses coordinations qui manquaient dans le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Ces coordinations portent sur les articles L. 125-7, L. 141-6, L. 141-14, L. 141-15, L. 141-16, L. 141-17, L. 141-20, L. 141-21, L. 141-22, L. 142-4 et L. 143-11 du code de commerce, l'article L. 324-1 du code des assurances, l'article L. 931-16 du code de la sécurité sociale, l'article 201 du code général des impôts et l'article 22 de la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce.

Par ce même amendement, votre commission a également apporté trois mesures complémentaires de simplification et de clarification, inspirées pour certaines de la proposition de loi n° 790 (2013-2014) de simplification, de clarification et d'actualisation du code de commerce, présentée par notre collègue Thani Mohamed Soilihi 232 ( * ) .

Ces mesures complémentaires de simplification visent ainsi à :

- allonger de quinze à trente jours le délai d'inscription du privilège du vendeur du fonds de commerce au registre tenu par le greffe du tribunal de commerce, par cohérence avec le délai de quinze jours prévu pour l'enregistrement de l'acte de cession du fonds ;

- permettre à un créancier du vendeur du fonds de commerce de former opposition au paiement du prix par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et pas uniquement par acte extrajudiciaire, en vue de faciliter le recouvrement des créances de faible montant ;

- substituer le président du tribunal de commerce au président du tribunal de grande instance en cas de référé du vendeur du fonds pour obtenir le paiement du prix lorsqu'il y a été fait opposition, dans la mesure où les litiges relatifs à la cession du fonds de commerce relèvent déjà du tribunal de commerce.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 28 ter - (art. L. 424-3 du code de l'urbanisme) - Fourniture de la liste complète des motifs de refus à l'occasion du rejet d'une demande d'autorisation d'urbanisme

Objet : cet article, inséré par l'Assemblée nationale en séance publique, oblige l'autorité administrative qui refuse une autorisation de construire à fournir l'intégralité des motifs justifiant son refus.

I - Le dispositif proposé

L'adoption de cet article par les députés est le corollaire direct de leur décision de supprimer les c), c bis) et d) du 1° du I de l'article 28 du projet de loi. Il s'agit d'introduire directement dans le droit applicable, à l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, une disposition qui permette de lutter contre les décisions administratives de refus d'autorisation de construire, lorsque ces refus ont un caractère dilatoire. Il arrive parfois en effet que de nouveaux motifs de refus à une demande d'autorisation soient présentés au pétitionnaire après un premier refus, soit par manque de diligence des services instructeurs soit délibérément lorsque l'autorité compétente ne souhaite pas voir se réaliser un projet de construction.

L'article 28 ter oblige donc l'autorité compétente rejetant une demande de permis de construire ou s'opposant à une déclaration préalable non seulement à motiver sa décision (ce qui est déjà prévu par le droit), mais aussi d' indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition , notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6 du même code.

II - La position de votre commission

La suppression de l'habilitation prévue au c) au d) du 1° du I de l'article 28 par les députés est une bonne chose. On semblait en effet s'orienter vers un renforcement significatif des pouvoirs du juge administratif et du préfet, au détriment de l'exercice par les collectivités territoriales de leur liberté d'administration. La solution trouvée à l'article 28 ter permettra d'obtenir le résultat visé (lutter contre certaines manoeuvres dilatoires dans l'octroi des autorisations de construire) moyennant une modification circonscrite du droit en vigueur.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 28 quater (art. 171 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014) - Modification du champ de l'habilitation prévue à l'article 171 de la loi ALUR

Objet : cet article précise le champ de l'habilitation à légiférer prévue à l'article 171 de la loi ALUR.

L'article 171 de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) habilite le Gouvernement à réécrire le livre I du code de l'urbanisme afin d'en clarifier la rédaction et le plan après intégration des dispositions résultant de ladite loi. Or, ce champ d'habilitation ne permet ni de prendre en compte les modifications postérieures à la loi ALUR ni de transférer des dispositions entre les différents livres constituant le code de l'urbanisme.

L'article 28 quater corrige ces deux insuffisances manifestes.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 28 quinquies - Rapport sur les effets de l'ordonnance du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme

Objet : cet article prévoit la remise au Parlement, avant le 31 décembre 2015, d'un rapport sur l'évaluation des effets de l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme.

I - Le dispositif proposé

Le présent article additionnel inséré en séance publique à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Michèle Bonneton prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement procédant à l'évaluation de l'ordonnance du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression .

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 29 (art. L. 480-13 du code de l'urbanisme) - Sécurisation des projets de construction en recentrant l'action en démolition aux cas où elle est indispensable

Objet : cet article restreint le champ d'application de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme relatif à l'action en démolition.

I - Le dispositif proposé

Si juridiquement rien ne s'oppose à l'engagement ou à la poursuite des travaux en cas d'introduction d'un recours contentieux contre un permis de construire, en réalité, l'opération est immédiatement gelée dans l'attente de la purge de l'ensemble des recours, en partie à cause de l'attitude des banques, des acheteurs pour les ventes en l'état futur d'achèvement et des enseignes pour les créations de surfaces commerciales. Une des explications de ce phénomène réside dans le risque d'une démolition ordonnée par le juge, prévu par l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme :

- le propriétaire peut en effet être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolition du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique dès lors que le permis a été annulé par le juge administratif ;

- cette action en démolition doit être engagée au plus tard dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative.

Pour sécuriser les projets de construction, la solution proposée par le projet de loi initial était de réserver l'action en démolition uniquement aux constructions situées dans des zones, espaces ou secteurs présentant des enjeux particuliers.

La commission spéciale de l'Assemblée nationale a cependant complètement réécrit l'article 29 par un amendement de notre collègue député Christophe Castaner, rapporteur, qui en réduit fortement la portée : le texte adopté revient à un dispositif très proche du droit en vigueur en posant que toutes les constructions sont susceptibles de faire l'objet d'une action en démolition, dès lors que l'autorisation administrative de construction est définitivement annulée. Pour diminuer la durée de gel des projets, l'article 29 se contente de ramener de deux ans à six mois la durée permise pour engager l'action en démolition (sauf dans des zones énumérées présentant des enjeux particuliers de protection patrimoine, de l'environnement et des paysages, dans lesquelles la durée reste de deux ans). Cette modification, initiée par les députés du groupe écologiste et notamment Michèle Bonneton, se fonde sur l'argument que, en supprimant la possibilité de démolir une construction permise par une autorisation reconnue illégale par le juge administratif, les personnes ayant intérêt à agir se trouveraient devant le fait accompli de la construction édifiée et ne pourraient plus intenter que des actions en réparation.

II - La position de votre commission

Avec la rédaction de l'article 29 issue des travaux de l'Assemblée nationale, le problème du « gel » des projets de construction en raison du risque d'action en démolition demeure entier.

Votre rapporteur estime pourtant que le dispositif proposé par le Gouvernement permettait de concilier accélération des projets de construction et protection des intérêts individuels et collectifs impactés par ces projets. Il permettait que, dans les zones les plus sensibles du point de vue patrimonial, environnemental ou des risques, l'action en démolition continue à s'appliquer comme aujourd'hui. La protection des zones qu'il est impératif de préserver du point de vue de l'intérêt collectif était donc garantie. Dans les autres zones, il supprimait une action en démolition dont on peut remarquer qu'elle n'était que rarement mise en oeuvre. Il s'agit en effet d'une procédure très longue, au coût social parfois important, qui doit par ailleurs se fonder sur le constat par le juge judiciaire de conditions strictes, à savoir que la décision d'autoriser la construction constitue une faute ayant causé un préjudice. Finalement, dans sa version initiale, l'article 29 tirait les conséquences de la disproportion entre les inconvénients de l'action en démolition - qui paralyse tous les projets d'envergure - et son caractère protecteur assez virtuel - puisqu'elle n'est quasiment jamais mise en oeuvre -.

Votre rapporteur rappelle en outre l'existence de la procédure du référé suspension, qui, en tant que mesure d'urgence, permet d'interrompre les travaux dans des délais très rapides s'il y a un doute sur la validité de l'autorisation d'urbanisme. Il est évident que cette procédure serait appelée à se développer si le champ de l'action en démolition était réduit.

C'est pourquoi votre commission, sur proposition de son rapporteur, a adopté un amendement tendant à revenir à une rédaction plus proche de celle du texte initial, qui conserve toutefois les clarifications apportées par l'Assemblée nationale concernant l'énumération des zones les plus sensibles du point de vue patrimonial, environnemental ou des risques. Il s'agit de zones sensibles dans lesquelles l'action en démolition continuerait à s'appliquer comme aujourd'hui.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 30 (art. L. 431-3 du code de l'urbanisme ; art. 4 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture) - Harmonisation des seuils de recours à un architecte pour les exploitations agricoles

Objet : cet article harmonise les seuils de recours à un architecte pour les exploitations agricoles.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 431-1 du code de l'urbanisme pose comme principe que, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, une demande de permis de construire ne peut être instruite que si la personne qui désire entreprendre des travaux soumis à une autorisation a fait appel à un architecte pour établir le projet architectural.

Une exception est cependant introduite par l'article L. 431-3 du code de l'urbanisme pour les personnes physiques et les exploitations agricoles à responsabilité limitée à associé unique (EARL). Pour celles-ci, l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme précise que le recours à l'architecte pour une construction à usage agricole est facultatif lorsque la surface de plancher et l'emprise au sol n'excèdent pas huit cents mètres carrés.

L'article 30 du projet de loi modifie l'article L. 431-3 du code de l'urbanisme pour généraliser à toutes les formes juridiques d'exploitations agricoles la dispense de dérogation dont seules bénéficient aujourd'hui les EARL.

II - La position de votre commission

L'harmonisation des seuils de recours à un architecte pour l'ensemble des exploitations juridiques, quelle que soit leur forme juridique, contribue à supprimer un élément de distorsion de concurrence entre exploitations et constitue un élément de simplification administrative.

On peut remarquer cependant qu'aucune donnée d'impact ne permet de chiffrer la perte de chiffre d'affaires qu'entrainera, pour les architectes, la généralisation de la dérogation. Par ailleurs, le plafond de surface actuel prévu par l'article R. 431-2 (800 m 2 ) est élevé et les architectes soulignent le risque que fait peser la généralisation de la dérogation actuelle sur la qualité des paysages agricoles.

Votre rapporteur estime qu'il doit être possible de trouver un équilibre satisfaisant entre les avantages et les inconvénients des dispositions prévues à l'article 30 du projet de loi en modifiant les seuils de surfaces fixés par décret.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 31 (art. 24-2 et 25 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) - Simplification de la procédure d'autorisation pour l'implantation de la fibre optique dans les parties communes d'un immeuble

Objet : cet article simplifie la procédure d'autorisation pour l'implantation de la fibre optique dans les parties communes d'un immeuble.

I - Le dispositif proposé

L'article 24-2 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis - introduit par l'article 109 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, dite « LME », et modifié par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, - organise les modalités de l'autorisation d'implantation de la fibre optique dans les parties communes d'un immeuble.

Ainsi, selon le droit en vigueur, lorsqu'un immeuble n'est pas équipé de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, toute proposition émanant d'un opérateur de communications électroniques d'installer de telles lignes est inscrite de droit à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale des copropriétaires, qui est tenue de statuer. Cette disposition, qui prévoit une condition de majorité dérogatoire par rapport au droit commun, vise à accélérer le déploiement de la fibre optique dans l'ensemble des zones urbaines, et ainsi à atteindre les objectifs de couverture ambitieux fixés dans le plan France très haut débit à l'horizon 2022 233 ( * ) .

Cependant, dans la mesure où une telle assemblée générale n'est obligatoire qu'une fois par an, en vue d'approuver le budget annuel de la copropriété, l'avancement des projets de développement et d'implantation de la fibre optique s'en trouve conséquemment ralenti. Ceci d'autant plus que les débits fournis en zone urbaine par les lignes ADSL sont souvent perçus par les utilisateurs comme suffisants pour bénéficier des usages les plus courants de l'internet, et ne motivent donc pas le passage à la fibre optique.

Afin d'y remédier, le paragraphe I de cet article prévoit, en modifiant l'article 24-2 précité, de permettre à l'assemblée générale de donner mandat au conseil syndical pour se prononcer sur toute proposition de cette nature d'un tel opérateur. Cette décision, y est-il précisé, peut être prise à la majorité des voix exprimées par les copropriétaires présents ou représentés. Afin de s'assurer que le sujet sera abordé par l'assemblée, l'inscription automatique de cette délégation à son ordre du jour est prévue tant que l'installation n'aura pas été effectuée.

Le paragraphe II de l'article restreint l'application de son I aux seules assemblées générales à venir, c'est-à-dire convoquées après l'entrée en vigueur du présent texte.

En commission, trois amendements de cohérence, de précision et rédactionnel de notre collègue député M. Christophe Castener, rapporteur, ont été adoptés.

En séance publique, les députés ont adopté un amendement du même rapporteur permettant aux assemblées générales de copropriétaires de se prononcer à la majorité des présents - et non de l'ensemble des copropriétaires - pour décider de la mise en place d'antennes-relais collectives en vue de la réception du très haut débit mobile.

À cet effet, l'article est complété par un paragraphe III modifiant en conséquence le h de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 précitée, lequel exige en l'état la majorité des voix de tous les copropriétaires pour l'installation ou la modification d'une antenne collective ou d'un réseau de communications électroniques interne à l'immeuble dès lors qu'elle porte sur des parties communes.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve les améliorations apportées par cet article au dispositif incitant les copropriétés à déployer la fibre optique dans les parties communes de leurs immeubles.

L'objectif d'une couverture la plus large possible de la population en très haut débit mobile, vecteur d'un renforcement de la croissance, des innovations et d'un aménagement harmonieux du territoire, requiert en effet de « pousser » un tel déploiement dans les zones où, paradoxalement, son appétence est aujourd'hui la moins forte.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 32 - Habilitation à prendre par ordonnance les dispositions législatives nécessaires à la transposition des directives n° 2014/53/UE et n° 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil des 16 avril et 15 mai 2014, et à la simplification de la procédure d'établissement des servitudes radioélectriques prévues par le code des postes et communications électroniques.

Objet : cet article autorise le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer les directives n° 2014/53/UE et n° 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil des 16 avril et 15 mai 2014, et pour simplifier la procédure d'établissement des servitudes radioélectriques prévues par le code des postes et communications électroniques.

I - Le dispositif proposé

Cet article prévoit une habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois après la promulgation de la loi, toute mesure législative dans trois domaines distincts.

La transposition de la directive n° 2014/53/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative à l'harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché d'équipements radioélectriques .

Cette directive avait été transposée en droit national à titre principal aux articles L. 32, L. 34-9, L. 36-7, R. 9 et R. 20-1 et suivants du code des postes et des communications électroniques. Or, ces dispositions doivent être modifiées et complétées d'ici le 12 juin 2016 afin de respecter les délais de transposition de la directive n° 2014/53/UE précitée.

Cette dernière modifie le champ d'application de la directive n° 1999/5/CE du 9 mars 1999, instaure un système d'enregistrement tenu par la Commission européenne, adapte le cadre existant aux équipements innovants et prend en considération les nouveaux principes issus du nouveau cadre législatif réglementaire (NLF) ;

La transposition de la directive n° 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à des mesures visant à réduire le coût du déploiement de réseaux de communications électroniques à haut débit .

Elle a quant à elle pour objet de faciliter le déploiement rapide des réseaux de communications électroniques à très haut débit. Elle instaure à cet effet des obligations :

- de transparence et de droit d'accès aux infrastructures physiques existantes dès lors qu'elles peuvent accueillir des infrastructures de réseaux de communications électroniques haut débit ;

- de transparence et de coordination des travaux de génie civil ;

- de pré-équipement des bâtiments neufs et des bâtiments anciens lors de rénovations de grande ampleur ;

- d'accès aux infrastructures dans les bâtiments ou aux abonnés d'un immeuble.

La directive prévoit également la mise en oeuvre de procédures de règlement des différends et de centralisation des informations à une ou plusieurs entités compétentes.

Les dispositions existant en droit national concernant l'ensemble de ces aspects devront être modifiées ou complétées avant le 1 er janvier 2016 afin de respecter les délais de transposition ;

La simplification des dispositions du code des postes et des communications électroniques relatives à l'institution des servitudes de protection des centres radioélectriques .

Environ 5 500 stations sont protégées par 10 000 décrets établissant des servitudes radioélectriques.

Le code des postes et des communications électroniques, dans ses articles L. 54 et suivants, prévoit deux types de servitudes au bénéfice des départements ministériels pour protéger leurs centres radioélectriques : les servitudes contre les obstacles et les servitudes contre les perturbations électromagnétiques.

Les articles L. 56-1 et L. 62-1 du même code prévoient également l'instauration de servitudes radioélectriques au bénéfice des opérateurs de communications électroniques, mais ces dispositions n'ont pas été mises en oeuvre, les textes d'application de ces deux articles n'ayant jamais été pris.

Du fait de la complexité de la réglementation et des difficultés de sa mise en oeuvre, un groupe de travail, piloté par l'Agence nationale des fréquences (ANFr), avait été constitué en 2010 afin de formuler des propositions visant à simplifier la procédure d'adoption des servitudes radioélectriques.

Les mesures envisagées consisteraient à s'inspirer de certaines des propositions du groupe de travail et s'articuleraient autour des trois orientations suivantes :

- établissement des servitudes par arrêté, et non plus par décret, sauf dans le cas de conclusion défavorable de l'enquête publique ;

- suppression du classement des centres en catégories ;

- suppression des servitudes dont bénéficient les opérateurs de communications électroniques en vertu des articles L. 56-1, contre les obstacles, et L. 62-1, contre les perturbations, à l'exception des seules servitudes au bénéfice des centres exploités pour les besoins de la défense ou de la sécurité publique.

La mise en oeuvre des mesures proposées nécessite la modification des articles L. 54 à L. 64 du code des postes et des communications électroniques.

À l'Assemblée nationale, la commission a adopté un seul amendement de précision des rapporteurs. Aucun amendement n'a été adopté en séance.

II - La position de votre commission

Votre commission souscrit à la nécessité d'une transposition rapide et complète des deux directives.

Outre qu'il s'agit d'une obligation communautaire, l'introduction du contenu de la première en droit interne permettra d'améliorer le niveau de conformité des équipements mis sur le marché européen, clarifiera le rôle de chacun des acteurs de la chaîne et améliorera l'information des consommateurs.

La transposition de la seconde contribuera à diminuer les coûts de déploiements des réseaux à très haut débit, ce qui constitue un élément clef en matière de compétitivité.

Enfin, les simplifications envisagées de la procédure d'élaboration des servitudes radioélectriques devraient être une source d'économies pour plusieurs administrations.

Sur la forme toutefois, votre rapporteur, à l'instar de son homologue de l'Assemblée nationale, regrette que le contenu des textes de transposition et de simplification précités, dont une partie a été arrêtée depuis un certain temps, n'ait pas été directement intégré dans le projet de loi, privant ainsi les parlementaires de l'examen de dispositions certes techniques mais néanmoins importantes.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 33 (article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques) - Ratification de l'ordonnance du 12 mars 2014 relative à l'économie numérique et clarification de l'article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques

Objet : cet article vise à ratifier l'ordonnance n° 2014-329 du 12 mars 2014 relative à l'économie numérique et à apporter des modifications rédactionnelles à l'article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de l'article procède à la ratification de l'ordonnance n° 2014-329 du 12 mars 2014 relative à l'économie numérique, qui avait été prise sur le fondement du 5° de l'article 1 er de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

En application de l'article 23 de ladite loi, un projet de loi de ratification de l'ordonnance devait être déposé devant le Parlement au plus tard dans un délai de cinq mois à compter de la publication de l'ordonnance. Le Gouvernement a respecté cette obligation en déposant un tel texte le 30 juillet 2014 devant le bureau de l'Assemblée nationale.

Toutefois, celui-ci ne comportant qu'un seul article, il a été jugé préférable de ne pas encombrer l'ordre du jour pour un projet de loi aussi court et de profiter du présent projet de loi pour ratifier explicitement l'ordonnance précitée.

Cette dernière est divisée en trois titres et huit articles.

Le titre I er , comportant l'article 1 er , regroupe des mesures assurant la conformité au droit de l'Union européenne des dispositions législatives du code des postes et des communications électroniques relatives aux domaines internet de premier niveau correspondant au territoire national .

Comme le souligne le rapport de la commission de l'Assemblée nationale, il s'agissait simplement de réintroduire les dispositions existantes figurant dans le code des postes et des communications électroniques (articles L. 45 à L. 45-7) après les avoir préalablement notifiées à la Commission européenne, conformément à l'article 8 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques, pour éviter tout recours contentieux.

Le titre II , comportant les articles 2 à 4, prévoit ensuite les dispositions nécessaires pour sécuriser le pouvoir de sanction de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) à l'encontre des entreprises opérant dans le secteur des postes et des communications électroniques.

Il s'agit en particulier de tenir compte de la décision n° 2013-331 QPC du 5 juillet 2013 par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions relatives aux pouvoirs de sanction de l'autorité, prévues à l'article L. 36-11 du code des postes et communications électroniques, au motif qu'elles « n'assurent pas la séparation au sein de l'autorité entre, d'une part, les fonctions de poursuite et d'instruction des éventuels manquements et, d'autre part, les fonctions de jugement des mêmes manquements, méconnaissent le principe d'impartialité ».

Du fait de cette décision, l'ARCEP avait été dépourvue de ses moyens coercitifs à l'encontre des opérateurs ne respectant pas la règlementation ou se montrant récalcitrants à appliquer ses décisions. La solution retenue par l'ordonnance a permis d'obtenir la « mise au pas » des opérateurs. Son assise juridique étant toutefois encore insuffisante, il convient désormais de lui redonner l'autorité de la loi, ce à quoi pourvoit cet article.

D'un point de vue technique, deux solutions étaient envisageables pour répondre aux exigences des juges constitutionnels, ceux-ci s'abstenant d'imposer une organisation spécifique : soit une séparation organique, solution la plus radicale, qui a cours par exemple à l'Autorité des marchés financiers (AMF) ; soit une séparation fonctionnelle, que connaît par exemple la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

C'est ce second schéma qui a finalement été retenu dans l'ordonnance. Le collège peut ainsi s'y scinder en deux, avec une formation composée de quatre membres, dont le président de l'autorité, qui adopte les décisions en matière de mise en demeure, d'instruction, de règlement des différends et d'enquête, et une formation composée des trois autres membres, qui adopte les décisions de sanction.

Enfin, le titre III , rassemblant les articles 5 à 8, comprend des dispositions favorisant l'établissement des lignes de communication électronique à très haut débit en fibre optique dans les logements et locaux à usage professionnel existants .

À cet effet, est clarifié le champ d'application du cadre juridique applicable aux conditions d'établissement de ces lignes. Des incertitudes avaient en effet été identifiées quant à l'interprétation de l'article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques, s'agissant des opérations de raccordement final de l'abonné au réseau de fibre optique dans les immeubles existants.

Le texte de l'ordonnance précise à cet égard la personne à qui incombent la réalisation et la prise en charge financière des travaux de raccordement, selon qu'ils se situent dans les parties communes ou privatives. Il est complété par des dispositions de nature à accélérer la prise de décision des copropriétés en vue d'atteindre les objectifs du plan France très haut débit.

Le paragraphe II de l'article 33 apporte des clarifications rédactionnelles à l'article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques.

L'ordonnance n° 2014-329 du 12 mars 2014 précitée a modifié cet article, afin de favoriser l'établissement des lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique dans les logements et locaux à usage professionnel existants. Elle a clarifié le champ d'application du cadre juridique applicable aux conditions d'établissement de ces lignes et l'a complété par des dispositions de nature à accélérer la prise de décision des copropriétés en vue d'atteindre les objectifs du plan France très haut débit.

Le projet de loi propose d'y apporter des améliorations rédactionnelles et clarifications mineures.

Cet article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification, que ce soit en commission ou en séance publique.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la ratification qu'opère cet article. Elle est notamment nécessaire en vue d'affermir le dispositif de sanction de l'ARCEP, et donc d'asseoir l'autorité de cette dernière à l'endroit des opérateurs, qui avait pu être remise en cause dernièrement.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 33 bis (articles L. 111-5-1-1 et L. 111-5-1-2 [nouveaux] du code de la construction et de l'habitation) - Équipement en fibre optique des maisons individuelles et des lotissements neufs

Objet : cet article vise à rendre obligatoire l'équipement en fibre optique des maisons individuelles neuves et des lotissements neufs.

I - Le dispositif proposé

Introduit par la commission de l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Corinne Erhel, cet article additionnel vise à rendre obligatoire l'équipement en fibre optique des maisons individuelles neuves et des lotissements neufs. Concrètement, il s'agit de pré-équiper ces constructions neuves afin de faciliter le déploiement de la fibre optique et l'atteinte des objectifs du plan France très haut débit.

Ces dispositions s'inspirent directement du deuxième alinéa de l'article L. 111-5-1 du code de la construction et de l'habitation, introduit par l'article 29 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME), qui impose l'équipement en lignes à très haut débit des immeubles collectifs neufs. Les maisons individuelles, qui représentent 60 % des logements neufs construits ces dix dernières années selon l'auteur de l'amendement, n'étaient donc pas couvertes par le dispositif en place.

En visant désormais tous les types de constructions, le texte impose donc le pré-équipement en fibre optique de l'ensemble des immeubles à construire, pour tous ceux qui obtiendront leur permis de construire à partir du 1 er juillet 2016. Si cela représente un surcoût pour ces derniers, il restera relativement faible au vu d'une installation des équipements une fois la construction achevée, et évitera d'occasionner toute gêne aux résidents.

En séance publique, trois amendements rédactionnels et de précision du rapporteur ont été adoptés.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve pleinement le dispositif prévu par cet article additionnel. Il est en effet de nature à intégrer l'avenir technologique des communications électroniques - à savoir la fibre optique - dans l'ensemble des constructions à venir, et contribuera donc à atteindre les objectifs de déploiement fixés par le plan France très haut débit.

Elle a simplement adopté un amendement rédactionnel, à l'initiative de votre rapporteur.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 ter (article L. 32 du code des postes et des communications électroniques) - Définition de l'itinérance métropolitaine

Objet : cet article vise à définir les conditions de mise en oeuvre de l'itinérance métropolitaine.

I - Le dispositif proposé

Introduit à l'initiative de notre collègue député François Brottes, président de la commission spéciale, cet article additionnel vise à définir l'itinérance métropolitaine, c'est-à-dire le fait, pour un opérateur mobile, d'accueillir sur son réseau les clients d'un autre opérateur mobile, pour émettre ou recevoir des communications électroniques. Les conditions de mise en oeuvre en sont précisées par l'article 33 quinquies .

Il existe en réalité plusieurs formes de partage des réseaux de communication électronique, comme l'explique de façon détaillée le rapport de l'Assemblée nationale sur le projet de loi :

- le partage - ou mutualisation - des équipements et infrastructures, qui peuvent être passifs ou actifs, c'est-à-dire inertes ou activés par voie électrique ou électronique ;

- le partage des fréquences radioélectriques utilisées par les opérateurs pour transmettre les communications électroniques ;

- l'accueil par un opérateur des clients d'un autre opérateur sur son réseau - ou itinérance proprement dite.

Saisies par le Gouvernement, l'ARCEP et l'Autorité de la concurrence ont rendu deux avis importants en 2013, précisant les conditions dans lesquelles la mutualisation horizontale pouvait être envisagée sur les réseaux mobiles et fixant des conditions à son renforcement.

Le présent article se propose de les intégrer dans la loi et de les codifier au sein du code des postes et des communications électroniques. Pour ce faire, il complète l'article L. 32 dudit code, qui porte définition des principaux termes techniques ensuite utilisés. Après le 17°, qui traite de l'itinérance locale, et le 17° bis , qui aborde l'itinérance ultramarine, il insère ainsi un 17° ter consacré à l'itinérance métropolitaine.

Cette dernière y est définie comme une prestation d'itinérance effectuée par un opérateur autorisé à un autre opérateur mobile « en vue de permettre l'accueil, sur le réseau du premier, des clients du second, pour émettre ou recevoir des communications électroniques ».

Si l'amendement qui a introduit cette première définition a constitué une avancée, il s'est révélé néanmoins insuffisant. Le rapporteur thématique avait ainsi indiqué, dès l'examen en commission, qu'il faudrait la compléter dans la mesure où l'itinérance, comme cela a été souligné, n'est que l'une des différentes modalités de partage des réseaux.

C'est ce qui a motivé l'adoption, en séance publique, d'un nouvel amendement des mêmes auteurs substituant à la définition de l'itinérance métropolitaine celle du « partage d'un réseau radioélectrique ouvert au public ». Celle-ci y est entendue comme « l'utilisation d'éléments d'un réseau d'accès radioélectrique au bénéfice d'opérateurs de communications électroniques titulaires d'une autorisation d'utilisation de fréquences radioélectriques ». La notion, est-il précisé, englobe notamment les prestations d'itinérance ou de mutualisation de réseaux radioélectriques ouverts au public.

Cette nouvelle définition, plus générale et plus complète, permet en outre d'assurer la coordination avec l'article 33 quinquies du texte, qui clarifie le champ des compétences de l'ARCEP au sujet de la régulation des accords de partage de réseaux radioélectriques.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la définition des différentes formes de partage des réseaux de communications électroniques portée par cet article.

Il importe en effet que celles-ci soient précisées de façon claire afin que leur cadre juridique puisse s'appliquer et que l'autorité de régulation du secteur soit en mesure d'en contrôler la mise en oeuvre.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 33 quater (art. L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques) - Actualisation des dispositions relatives aux objectifs de la régulation du secteur des communications électroniques

Objet : cet article additionnel inséré en commission à l'Assemblée nationale tend à réécrire, en les hiérarchisant, les clarifiant et les distinguant, les objectifs de régulation assignés concomitamment à l'ARCEP et au Gouvernement.

I - Le dispositif proposé

Introduit à l'Assemblée nationale en commission à l'initiative de nos collègues députés Jean-Yves Caullet, Corinne Erhel et les députés du groupe socialiste, républicain et citoyen (SRC), dont l'amendement a été sous-amendé par notre collègue députée Laure de La Raudière, cet article additionnel procède à la réécriture du II de l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, relatif aux objectifs de la régulation.

En l'état, et ainsi que l'avait pointé un rapport d'information de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale présenté par Mmes Corinne Erhel et Laure de La Raudière, cet article L. 32-1, qui a été écrit au gré de lois successives, énumère 21 objectifs assignés à la fois à l'ARCEP et au Gouvernement, sans logique d'ensemble.

Cet article vise donc à remettre de l'ordre, sans toucher au fond des compétences, dans une liste qui souffrait de ce manque de cohérence et de lisibilité.

Le II dudit article L. 32-1 recense sous une nouvelle forme les objectifs que doivent poursuivre le régulateur et son ministre de rattachement. Un triple travail de hiérarchisation, de clarification et de distinction entre les deux autorités a été réalisé en vue de rendre cette rédaction plus satisfaisante.

Le III énumère quant à lui les objectifs assignés au seul régulateur.

Enfin, le IV dresse la liste des principes que l'ARCEP et le Gouvernement doivent veiller à respecter dans l'exercice de leur mission de régulation.

En séance publique, ont adoptés huit amendements de notre collègue députée Corinne Erhel tendant respectivement

• dans le II, à :

- étendre l'objectif d'aménagement et d'intérêt des territoires à la diversité de la concurrence dans les territoires ;

- associer le ministre chargé de la consommation à l'objectif de protection des consommateurs ;

- procéder à des améliorations rédactionnelles ;

- associer les ministres chargés de la santé et de l'environnement à l'objectif de niveau élevé de protection de la santé et de l'environnement ;

- insérer deux objectifs liés à la promotion des numéros européens harmonisés pour les services à objet social et la contribution à l'information des utilisateurs finaux lorsque ces services sont fournis, et à la possibilité d'utiliser tous les types de technologies et tous les types de services de communications électroniques dans les bandes de fréquences disponibles pour ces services, sous réserve de faisabilité technique ;

• au III, à :

- associer, le cas échéant, le ministre chargé des communications électroniques aux décisions prises par l'ARCEP ;

- préciser que l'objectif d'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques doit être recherché « en particulier lorsqu'ils bénéficient de subventions publiques conformément aux articles 106 et 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne » ;

• au IV enfin, à préciser que l'action du ministre précité et de l'ARCEP dans ce cadre se fait « sans préjudice » des objectifs définis au II et III, et non « en vue d'atteindre » ces derniers.

Ils ont également, à l'initiative de notre collègue députée Laurence Abeille et les membres du groupe écologiste, rajouté au II un objectif de sobriété de l'exposition de la population aux champs électromagnétiques.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la réécriture de l'article L. 32-1 du code des postes et communications électroniques opérée par cet article. Elle devrait en effet permettre de mieux distinguer les missions communes et spécifiques du Gouvernement et de l'ARCEP en matière de régulation des communications électroniques. A l'heure où cette dernière vient de changer de président, elle permet de lui confier une « feuille de route » claire et cohérente pour la durée de son mandat.

Outre un amendement de coordination présenté par votre rapporteur, votre commission a, sur proposition de notre collègue François Commeinhes, adopté un amendement renforçant l'objectif de protection des consommateurs assigné au régulateur et au gouvernement.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 quinquies A (article L. 33-1 du code des postes et communications électroniques) - Déclaration d'office par l'ARCEP du statut d'opérateur

Objet : cet article additionnel, introduit à l'Assemblée nationale en séance publique, autorise l'ARCEP à déclarer d'office le statut d'opérateur.

I - Le dispositif proposé

Aux termes de l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques, l'exercice d'une activité d'opérateur de communications électroniques - c'est à dire l'exploitation d'un réseau ouvert au public ou la fourniture au public d'un service de communications électroniques - est libre. Elle doit simplement faire l'objet d'une déclaration préalable à l'ARCEP. En effet, cette activité est soumise à un ensemble d'obligations prévues notamment par ledit code, au respect desquelles l'ARCEP doit veiller.

Néanmoins, certains opérateurs ne satisfont pas à l'obligation de déclaration de leurs activités et échappent ainsi aux contraintes qui y sont attachées.

Cet article additionnel, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Richard Ferrand et plusieurs de ses collègues, permet à l'autorité de procéder elle-même à la qualification de l'activité de ces opérateurs, sous le contrôle du juge.

À cet effet, il complète l'article 33-1 précité en vue de reconnaître à l'ARCEP la possibilité d'y procéder d'office, après avoir invité la personne intéressée à le faire d'elle-même rapidement, et en la tenant informée.

II - La position de votre commission

Votre commission souscrit à ce renforcement des pouvoirs de l'ARCEP, en ce qu'elle vise à renforcer l'effectivité du cadre applicable et l'égalité des conditions de concurrence.

À l'initiative de votre rapporteur, elle a adopté un amendement précisant sous quelle formation l'Autorité se réunit en vue de déclarer d'office le statut d'opérateur, afin qu'elle soit bien différente de celle ayant ensuite à prononcer une sanction contre l'opérateur défaillant, le cas échéant.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 quinquies (article L. 34-8-1-1 [nouveau], L. 33-1 et L. 36-8 du code des postes et communications électroniques) - Mise en oeuvre de l'itinérance métropolitaine

Objet : cet article additionnel, introduit en commission à l'Assemblée nationale, vise à définir les conditions de mise en oeuvre de l'itinérance métropolitaine.

I - Le dispositif proposé

Introduit à l'initiative de notre collègue député François Brottes, président de la commission spéciale, cet article additionnel tend, en coordination avec l'article 33 ter , à encadrer la mise en oeuvre de l'itinérance métropolitaine.

Il insère à cet effet un nouvel article L. 34-8-1-1 dans le code des postes et communications électroniques soumettant l'exercice d'une telle prestation d'itinérance à la conclusion préalable d'une convention de droit privé entre les opérateurs mobiles concernés, qui en détermine les conditions techniques et financières.

L'encadrement de cette prestation est prévue à la fois dans l'espace et dans le temps. En outre, il est mentionné qu'elle est communiquée dès sa conclusion à l'ARCEP, qui s'assure qu'elle respecte les principes précités.

En séance publique, a été adopté un amendement de nos collègues François Brottes et Corinne Erhel étendant les dispositions de l'article à l'ensemble des modalités de partage des réseaux radioélectriques ouverts au public, telles que définies par l'article 33 ter du projet de loi, et plus seulement à l'itinérance métropolitaine.

La nouvelle rédaction issue de la séance publique précise en outre le texte en plusieurs points, dont certains sont importants :

- elle illustre le contenu de la convention, en faisant référence aux éléments du réseau d'accès radioélectrique et à l'accueil sur le réseau d'un des opérateurs de tout ou partie des clients de l'autre opérateur ;

- elle donne compétence à l'ARCEP pour connaître les litiges concernant la conclusion ou l'exécution de la convention ;

- surtout, elle permet au régulateur, après avis de l'Autorité de la concurrence, de demander sa modification en vue d'assurer le respect des objectifs généraux de la régulation visés à l'article L. 32-1 du code des postes et communications électroniques ou des engagements souscrits dans les autorisations d'utilisation de fréquences souscrites par les opérateurs ;

- enfin, elle requiert de la convention qu'elle soit assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires lorsqu'elle a pour objet de couvrir, en technologie 2G ou 3G, des zones blanches dans le cadre d'un accord de partage de réseau entre opérateurs.

Enfin, cette rédaction procède aux coordinations nécessaires aux articles L. 33-1 et L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve l'encadrement des prestations d'itinérance métropolitaine permis par cet article.

S'il est formulé de façon générale, il devrait permettre d'adapter l'accord commercial d'itinérance conclu entre Free Mobile et Orange, qui permet au premier de louer une partie du réseau 3G de l'opérateur historique le temps de développer ses propres infrastructures.

En mars 2013, l'Autorité de la concurrence, saisie pour avis par le ministre en charge de l'économie, avait estimé que cet accord ne devait pas aller au-delà de son échéance prévue en 2018, voire devait s'arrêter par plaques régionales à partir de 2016.

Free Mobile était tenu d'atteindre, par son propre réseau 3G, une couverture nationale d'au moins 75 % de la population métropolitaine à partir du 12 janvier 2015. L'ARCEP a réalisé des mesures permettant de conclure que ces obligations ont été respectées.

Toutefois, en vue de mettre en oeuvre l'avis de l'Autorité de la concurrence, qui avait recommandé que cet accord ne se prolonge pas au-delà d'une échéance raisonnable, l'ARCEP pourrait être amenée, grâce à la compétence que lui confère explicitement cet article, à mettre fin à cet accord d'itinérance.

Mais celui-ci n'est pas le seul visé, potentiellement, par cette mesure. L'accord de mutualisation liant les opérateurs Bouygues Telecom et SFR-Numericable, qui ont décidé de mettre en commun en commun une partie de leurs antennes pour la téléphonie mobile et de déployer un réseau partagé pour la 2G, la 3G et la 4G sur une zone correspondant à 57 % de la population - hors grandes agglomérations et zones blanches, est également susceptible d'être visé.

Votre commission a adopté un amendement de M. Philippe Leroy donnant à l'ARCEP, dont la compétence est liée en l'état actuel du texte, une marge d'appréciation pour demander aux opérateurs concernés la révision des conventions d'itinérance ou de mutualisation qu'elle estime devoir être modifiées.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 sexies (article L. 36-7 du code des postes et communications électroniques) - Rapport annuel de l'ARCEP sur l'effort d'investissement
des opérateurs mobiles

Objet : cet article additionnel, introduit en commission à l'Assemblée nationale, charge l'ARCEP de remettre annuellement un rapport sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles.

I - Le dispositif proposé

Introduit à l'initiative de notre collègue François Brottes, président de la commission spéciale, cet article complète l'article L. 36-7 du code des postes et des communications électroniques, relatif au rôle et aux missions de l'ARCEP, afin de charger cette dernière de l'élaboration d'un rapport annuel.

Aux termes du paragraphe I , l'Autorité sera ainsi chargée de retracer chaque année l'effort d'investissement des opérateurs mobiles. Elle devra évaluer les investissements réalisés dans le cadre des opérations de déploiement des infrastructures nouvelles, c'est-à-dire essentiellement les sites d'émission du réseau à très haut débit mobile 4G. L'autorité devra à ce titre analyser la compatibilité des niveaux d'investissement avec les obligations de déploiement mentionnées dans les licences mobiles octroyées aux opérateurs.

Par ailleurs, il est précisé que le rapport évaluera l'impact des accords de mutualisation ou d'itinérance sur l'évolution des déploiements des nouveaux réseaux. Il est en effet attendu de ces accords qu'ils permettent une couverture à la fois plus rapide et plus extensive du territoire en très haut débit mobile.

Le paragraphe II fixe le calendrier de publication de ce rapport, à savoir la période de trois mois suivant la promulgation du présent texte.

En séance publique, deux amendements rédactionnels du rapporteur thématique et un amendement de coordination de notre collègue député François Brottes ont été adoptés.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur n'approuve pas le contenu de cet article, qui charge l'ARCEP de remettre annuellement un rapport sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles. Ceci tant pour des raisons de principe tenant à son hostilité globale à la production de rapports, que parce que les commissions et délégations parlementaires lui paraissent parfaitement aptes, en s'appuyant sur l'expertise de certains acteurs, à réaliser de tels travaux. Enfin, l'ARCEP réalise déjà d'elle-même des analyses sur ce sujet, dont elle rend compte dans ses différentes publications, et notamment dans son rapport annuel.

Pour toutes ces raisons, votre commission, à l'initiative de votre rapporteur, a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 33 septies A (article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques) - Reconnaissance aux collectivités de la qualité de partie dans certaines procédures de règlement des différends devant l'ARCEP et certaines juridictions

Objet : cet article additionnel, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, reconnaît aux collectivités la qualité de partie devant l'ARCEP et les juridictions compétentes pour le règlement de différends mettant en cause l'opérateur auquel elles ont concédé leur réseau d'initiative publique (RIP) et un opérateur tiers.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques a mis en place une procédure de règlement de différend ouverte aux opérateurs jugeant que les conditions d'accès au réseau d'un opérateur tiers ne sont pas équitables, et passant par une saisine de l'ARCEP.

Dans le cas des RIP, il est fréquent que l'exploitation du réseau soit confiée par la collectivité territoriale à un opérateur privé, notamment dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un contrat de partenariat.

Dans l'hypothèse d'un règlement de différend impliquant un tel opérateur de RIP et l'opérateur qui souhaite obtenir l'accès à ce réseau, les conditions techniques ou tarifaires imposées par l'ARCEP peuvent avoir un impact sur les conditions de fonctionnement du service public local créé par la collectivité.

Or, si le cadre actuel permet à cette dernière de faire part de son analyse devant l'ARCEP en tant qu'observateur, il ne lui permet pas de former un recours contre la décision de l'ARCEP, ni d'être présente à son initiative aux débats devant le juge d'appel.

Afin de permettre à la collectivité de pouvoir pleinement faire valoir ses droits dans le cadre d'une procédure qui la concerne, il convient de lui reconnaître la qualité de partie devant l'ARCEP et devant les juridictions compétentes, la Cour d'appel de Paris et la Cour de cassation.

C'est ce à quoi procède cet article additionnel, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue député Richard Ferrand et plusieurs de ses collègues du groupe SRC. À cet effet, il complète l'article L. 36-8 précité afin de reconnaître explicitement cette qualité aux collectivités concernées.

II - La position de votre commission

Votre commission souscrit à cette disposition, qui devrait mettre les collectivités en position de mieux faire valoir leurs droits et intérêts devant les autorités et juridictions compétentes, lors d'un conflit opposant l'opérateur utilisant leur RIP et un opérateur tiers.

Sur proposition de votre rapporteur, outre une modification rédactionnelle, votre commission a adopté un amendement confortant les pouvoirs de l'ARCEP. D'une part en donnant une portée rétroactive à certaines de ces décisions, de façon très encadrée. D'autre part en lui permettant de faire valoir ses observations en cas de pourvoi en cassation contre l'une de ses décisions.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 septies B (articles L. 42-1 et L. 44 du code des communications électroniques et des postes) - Possibilité pour l'ARCEP de déléguer certaines décisions

Objet : cet article additionnel, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, autorise l'ARCEP à déléguer certaines décisions d'attribution de ressources en fréquences et en numérotation.

I - Le dispositif proposé

La loi attribue à l'ARCEP la compétence de délivrer des autorisations d'utilisation de fréquences (articles L. 42-1 et L. 42-2 du code des postes et des communications électroniques) et d'attribuer les ressources en numérotation - préfixes, numéros ou blocs de numéros (article L. 44 du même code).

Or, ce pouvoir représente un nombre très important de décisions. Chaque année, l'autorité adopte plus de 1 000 décisions d'autorisation d'utilisation de fréquences « au fil de l'eau », soit plus de 70 % du total de ses délibérations. S'agissant des ressources en numérotation, chaque année, l'ARCEP adopte près de 300 décisions individuelles en matière de numérotation, soit plus de 18 % du total des délibérations.

À l'initiative de notre collègue député Richard Ferrand et plusieurs de ses collègues du groupe SRC, les députés ont, en séance publique, inséré un article additionnel permettant à l'autorité de pouvoir déléguer certaines de ces décisions, concernant l'attribution de ressources en fréquences et en numérotation. Sont à cet effet modifiés les articles L. 42-1 et L. 44 précités.

Cette modification permettra d'accélérer les délais de traitement des demandes des entreprises du secteur. En outre, dans un contexte de moyens budgétaires contraints, cette proposition, qui simplifiera le processus interne d'attribution de ces ressources, occasionnera des gains de productivité en termes financiers et humains et la réallocation des ressources à d'autres missions.

En outre, des « garde-fous » sont prévus. Cette possibilité de délégation n'est pas ouverte pour certaines décisions sensibles ou d'importance collective. La décision de l'ARCEP pourra prévoir les modalités selon lesquelles le directeur général devra rendre compte de son activité à son collège. Et l'autorité conservera la possibilité d'abroger à tout moment cette décision de délégation de pouvoir.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve pleinement la délégation de décision permise par cet article. Elle porte en effet exclusivement sur la délégation des décisions d'attribution, qui ne posent pas de problème de rareté ou de concurrence, et qui sont adoptées de façon quasi-automatique par l'ARCEP. Cet assouplissement du cadre règlementaire va donc dans le sens d'une fluidification du fonctionnement de l'autorité, et donc d'un meilleur service rendu aux usagers et aux entreprises.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a simplement adopté un amendement de précision, pour que cette délégation se fasse du collège de l'ARCEP au profit, non de son directeur général, mais de son président, quitte pour ce dernier à la répercuter sur les niveaux décisionnels inférieurs.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 septies C - Publication par l'ARCEP de lignes directrices portant sur les conditions tarifaires d'accès aux infrastructures et réseaux à très haut débit

Objet : cet article additionnel, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, confie à l'ARCEP la mission d'édicter des lignes directrices pour la fixation des tarifs d'accès aux RIP.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales ouvre aux collectivités et à leurs groupements la possibilité d'intervenir dans le domaine des communications électroniques afin de pallier un éventuel déficit d'offres privées sur leurs territoires.

Il les autorise à établir un RIP en vue de le mettre à disposition d'opérateurs ou de l'exploiter directement pour fournir de la bande passante ou des lignes abonnés à des fournisseurs de service, voire à fournir un accès à l'utilisateur final en cas d'insuffisance avérée de l'initiative privée.

Ces RIP, qui ont d'abord servi à réaliser des boucles locales haut débit, puis très haut débit, vont être amenés à se multiplier avec la mise en oeuvre du plan France très haut débit. Leurs tarifs d'accès étant libres, sous réserve du respect des principes concurrentiels et réglementaires encadrant leur déploiement, il appartient donc à chaque collectivité de déterminer les niveaux tarifaires de ses offres de gros.

Or, alors que les négociations sont en cours entre les opérateurs et les collectivités, il est nécessaire de fournir des lignes directrices aux collectivités, afin de les aider à déterminer un tarif d'accès juste et pertinent, permettant d'une part d'assurer la rentabilité de leurs investissements, et d'autre part d'éviter une dérive des finances publiques. En effet, la fixation d'un tarif d'accès à un tarif trop bas générerait un niveau de subventions publiques trop important.

À l'initiative de notre collègue député Richard Ferrand et plusieurs de ses collègues du groupe SRC, les députés ont donc introduit en séance publique cet article additionnel proposant, sans préjudice des compétences dont dispose l'ARCEP en matière de règlement des différends, de confier au régulateur la mission d'édicter, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, des lignes directrices en vue de l'harmonisation des pratiques des collectivités, dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales et du principe de liberté contractuelle.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve la fixation de telles lignes directrices. La publication d'un tel référentiel, qui répond d'ailleurs à une demande des collectivités, devrait en effet leur permettre de déterminer plus aisément leurs offres tarifaires de gros, et de se prémunir de contentieux futurs.

Votre commission, à l'initiative de votre rapporteur, a entendu, en adoptant un amendement à cet effet, permette à l'ARCEP d'émettre un avis public sur les conditions tarifaires d'accès aux RIP, afin de protéger les collectivités de politiques tarifaires excessivement concurrentielles, qui pourraient tirer les tarifs vers le bas et donc réduire les recettes qu'elles pourront tirer de ces réseaux.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 33 septies D (nouveau) (articles L. 32, L. 34-8-1 et L. 34-8-5 [nouveau] du code des postes et communications électroniques) - Obligation de couverture dans les zones « blanches » et « grises » de téléphonie mobile

Objet : cet article met en place un dispositif visant à assurer une meilleure couverture des zones « blanches » et « grises » de téléphonie mobile.

À l'heure où se déploie le réseau de téléphonie mobile 4G, les zones « blanches » (zones n'étant couvertes par aucun opérateur) et « grises » (zones couvertes par un seul opérateur) de téléphonie mobile sont encore relativement importantes sur notre territoire en technologie 2G et, plus encore, 3G. L'ARCEP estime ainsi à environ 0,18 % de la population (soit environ 100 000 habitants) les premières et à 2 % (soit environ 1 100 000 habitants) les secondes.

Les zones blanches ont fait l'objet de diverses initiatives visant à en assurer la couverture. Un premier programme de résorption de ces zones en de téléphonie mobile de deuxième génération a été lancé en 2003. Initié par une convention nationale passée entre l'État, l'Association des départements de France (ADF), l'Association des maires de France (AMF), l'ARCEP et les opérateurs (Orange, SFR et Bouygues télécom à l'époque), ce programme a organisé la couverture de plus de 3 000 communes. Suite à un second recensement en 2008, 364 nouvelles communes répondant aux critères du programme ont été intégrées à celui-ci.

S'agissant de la technologie 3G, un accord cadre de partage d'installations de réseau en « RAN sharing » a été conclu en février 2010 par les trois opérateurs historiques En juillet 2010, Free Mobile les a rejoints.

En dépit de ces différentes actions, le problème des zones blanches n'a pas été résolu à ce jour, et pourrait même s'être aggravé dans certains cas. Au printemps 2014, l'ARCEP a ainsi ouvert une étude révélant que seul un quart de la couverture prévue par le plan initial avait effectivement été déployé. Le Parlement, et plus singulièrement le Sénat, s'est alarmé de cette situation, qui constitue un frein pour le développement économique et territorial de notre pays.

Ainsi, la proposition de loi de nos collègues Philippe Leroy et Hervé Maurey relative à l'aménagement numérique du territoire, adoptée à l'unanimité par notre assemblée en février 2012, contenait, à l'article 6, une disposition instaurant une obligation de couverture des zones « blanches » et « grises » en recourant à l'itinérance locale ou à la mutualisation des infrastructures.

L'article 27 bis du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), examiné et adopté par le Sénat et l'Assemblée nationale respectivement en janvier et mars de cette année, a repris en substance le dispositif prévu dans la proposition de loi relative à l'aménagement numérique du territoire précitée, en l'élargissant à l'ensemble des technologies de téléphonie mobile existantes ou à venir.

C'est un dispositif équivalent que votre commission, sur proposition de M. Jacques Mézard, a adopté un amendement tendant à insérer un article 33 septies D.

Le de ce dernier insère dans le code des postes et communications électroniques un nouvel article L. 34-8-5 comportant quatre alinéas.

Le premier alinéa contraint les opérateurs chargés d'assurer une prestation d'itinérance locale, en application de l'article L. 34-8-1 du même code, à couvrir en téléphonie mobile 2G l'ensemble des zones non couvertes par l'ensemble des opérateurs. Ces zones, est-il indiqué, incluent les centre-bourgs et les axes de transport prioritaires, dont la couverture reste insatisfaisante.

Le deuxième alinéa autorise le recours à la mutualisation des infrastructures entre opérateurs pour assurer cette desserte.

Le troisième alinéa prévoit un mécanisme d'identification des zones précitées qui associe, sous le pilotage du préfet, les départements, les opérateurs et l'ARCEP.

Le quatrième alinéa contraint les opérateurs, sur la base de l'identification ainsi réalisée, à se répartir les zones à couvrir en élaborant un calendrier de mise en oeuvre d'un plan de desserte concerté, objet d'une consultation de l'ARCEP. Le ministre compétent est appelé à l'approuver, la couverture effective devant alors avoir lieu dans les trois ans.

Le 2° étend le champ de la prestation d'itinérance locale, au-delà de la 2G, à toutes les générations suivantes, qui sont appelées progressivement à en prendre le relai. Il adapte pour ce faire les articles L. 32 et L. 34-8-1 du code des postes et communications électroniques.

Votre rapporteur estime que l'inclusion d'une même disposition volontariste de ce type dans deux projets de loi actuellement en discussion devant le Parlement est appréciable. Elle est en effet de nature à marquer la volonté des élus nationaux, qui ont pour beaucoup des responsabilités politiques à l'échelon local, d'aller désormais rapidement vers une résorption des zones non - ou mal desservies - par les services de téléphonie mobile, si importants pour assurer la pérennité et le développement de nos territoires ruraux.

Cette action rejoint - et met en réalité en oeuvre - les annonces du Premier ministre, M. Manuel Vals. Le 13 mars dernier à Laon, dans le cadre du comité interministériel à la ruralité, le Premier ministre a ainsi dévoilé plusieurs mesures et objectifs visant à désenclaver les campagnes, parmi lesquels l'obligation de couvrir les zones blanches en 2G et en 3G dans les 18 mois.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 33 septies (art. 20 et 23 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques) - Conditions d'application des règles encadrant l'achat d'espace publicitaire à la publicité sur internet

Objet : cet article vise à préciser les conditions d'application à la publicité sur internet des règles de transparence applicables en matière d'achat d'espaces publicitaires.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue député François Brottes, président de la commission spéciale chargée d'examiner le présent projet de loi, l'article 33 septies vise à réaffirmer clairement que les règles actuelles régissant l'achat d'espaces publicitaires par un intermédiaire au profit d'un annonceur, dans le cadre d'un contrat écrit, s'appliquent « sur quelque support que ce soit », c'est-à-dire y compris à la publicité sur internet.

Destinées à assurer aux annonceurs la transparence des transactions d'achats d'espaces publicitaires et à remédier aux pratiques antérieures qui pouvaient avoir cours entre intermédiaire et vendeur d'espaces publicitaires, ces règles sont issues de de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin ». Ces règles précisent notamment que le vendeur d'espaces doit rendre compte directement à l'annonceur dans le mois de la diffusion du message publicitaire des conditions dans lesquelles la prestation d'achat d'espaces a été réalisée. Elles comportent également des dispositions particulières de compte rendu en cas de modification dans les conditions de diffusion du message publicitaire.

Votre rapporteur considère que la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 précitée est à l'évidence applicable à la publicité sur internet. La circonstance selon laquelle internet n'existait pas lorsqu'elle a été promulguée ne saurait faire prétendre qu'elle ne devrait pas s'appliquer à internet.

Les personnes entendues par votre rapporteur, représentant tant les annonceurs publicitaires, c'est-à-dire les entreprises qui achètent des espaces publicitaires, que les agences médias, prestataires des entreprises dans leurs campagnes publicitaires, ont confirmé l'analyse de votre rapporteur. Ils ont aussi indiqué que les pratiques contractuelles respectaient généralement les prescriptions de la « loi Sapin ».

Dans ces conditions, en dehors d'une volonté pédagogique, votre rapporteur considère peu utile de préciser que les obligations rappelées supra s'appliquent bien « sur quelque support que ce soit ».

L'article 33 septies du projet de loi dispose toutefois que, « dans les secteurs de la publicité digitale », ces obligations de compte rendu peuvent être adaptées, selon des modalités précisées par décret en Conseil d'État. Il s'agit de tenir compte des modalités techniques particulières existant en matière d'achat d'espaces publicitaires sur internet, qui font intervenir des systèmes d'enchères automatisées en fonction de critères variables qui ne sont pas toujours susceptibles d'être fixés a priori .

II - La position de votre commission

Si votre commission a estimé qu'il n'existait aucun doute juridique sur l'application de la loi du 29 janvier 1993 précitée à l'achat d'espaces publicitaires sur internet, elle a néanmoins jugé utile de permettre dans ce cas une adaptation des modalités de compte rendu prévues par cette loi.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 33 octies A (nouveau) (art. L. 311-2-1 à L. 311-2-4 [nouveaux] du code du tourisme) - Encadrement des relations entre les hôteliers et les plateformes de réservation par Internet

Objet : cet article inséré par votre commission encadre les relations entre les hôteliers et les plateformes de réservation par Internet via un mécanisme de contrat de mandat.

Internet occupe aujourd'hui une place substantielle dans le marché du tourisme. Le quart des produits achetés en ce domaine le sont ainsi en ligne, tandis que 16 000 hôtels pouvaient être réservés de cette façon dans notre pays en 2013. Cette révolution numérique a provoqué l'apparition et le développement de nombreuses plateformes de distribution - les Online Travel Agency (OTAs) -, qui sont désormais des acteurs incontournables du secteur.

Ces plateformes Internet de réservation en ligne (Booking.com, Ebookers.fr, Expedia.fr, Lastminute.com, Promovacances.com ...) prennent ainsi une importance croissante, 30 % du chiffre d'affaires de l'hôtellerie passant déjà par le Web, sans que le prestataire final, celui qui est ancré dans le territoire, n'ait son mot à dire.

Or, ces plateformes imposent leur politique tarifaire aux commerçants, qui n'ont plus d'autres choix que de travailler avec elles : plus du tiers du chiffre d'affaires de l'hôtellerie de notre pays passe en effet par elles désormais. Les commissions qu'elles imposent aux professionnels ont explosé ces dernières années : elles représentent désormais jusqu'au triple de celles des agences de voyage traditionnelles, et ont augmenté de 27,5 % entre 2008 et 2010.

En outre, dans une perspective davantage liée aux intérêts financiers publics, ces plateformes réalisent des bénéfices pour des prestations achetées par des consommateurs nationaux ou réalisées sur notre territoire, qui échappent quasi entièrement à notre système fiscal.

La dégradation des relations commerciales découlant de ces évolutions a un impact sur l'économie générale de notre pays. Plus qu'elles ne libèrent des marges de manoeuvre pour de nouveaux projets touristiques, les OTAs « captent » les capacités financières des hôteliers et réduisent leurs capacités d'investissement ainsi, par conséquent, que leur capacités à embaucher.

Les acteurs territoriaux du tourisme sont aujourd'hui à une période charnière, hésitant entre l'opportunité que constituent des technologies numériques (qui augmentent la visibilité de leur offre, permettent de mieux communiquer avec les vacanciers, facilitent les réservations, etc.) et les menaces dont elles sont porteuses.

Le risque, à terme, est que la vente par l'intermédiaire des OTA's prenne le pas sur celle réalisée directement sur Internet par les hôteliers. Ce qui accroitrait nécessairement la dépendance des seconds aux premiers, qui seront en mesure d'exiger encore davantage de disponibilités, d'augmenter leurs commissions ou de durcir les relations contractuelles.

Afin de prévenir une telle évolution, votre commission a adopté un amendement portant article additionnel de notre collègue Jean-Claude Lenoir, qui encadre les rapports commerciaux entre hôteliers et OTAs à travers l'instauration d'un contrat de mandat, à l'instar de ce qui a été prévu pour les relations entre agences de publicité et annonceurs par la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin ».

Cet article additionnel modifie le chapitre I er (Hôtels) du titre I er (Hôtels, restaurants, cafés et débits de boisson) du livre III (Équipements et aménagements) du code du tourisme. Il crée en son sein une section 1 (Des contrats relatifs à l'hôtellerie) comprenant une sous-section 1 (reprenant l'actuelle section 1, et les articles L. 311-1 à L. 311-5, qui deviennent respectivement les articles L. 311-1-1 à L. 311-1-5) ainsi qu'une sous-section 2 (Des rapports entre hôteliers, comportant les articles L. 311-2-1 à L. 311-2-4 nouveaux).

L' article L. 311-2-1 assimile à un contrat de mandat, régi par les articles 1984 et suivants du code civil, tout contrat passé entre un hôtelier et une plateforme de réservation en ligne ayant pour objet la location de chambre d'hôtel.

Afin d'éviter toute politique de prix imposée par la plateforme dans le cas d'une commercialisation directe par l'hôtelier de ses chambres, il est précisé que l'existence d'un tel contrat de mandat n'empêche pas ce dernier de faire profiter sa clientèle de tout avantage tarifaire qu'il souhaite.

L' article L. 311-2-2 précise le contenu du contrat de mandat, soit les conditions de rémunération du mandataire (c'est-à-dire la plateforme) par le mandant (l'hôtelier), librement déterminées par les parties, ainsi que le prix de chaque chambre à louer et de tout autre service.

L' article L. 311-2-3 prévoit des sanctions pénales relativement importantes applicables à toute plateforme ayant opéré des réservations pour le compte d'un hôtelier sans conclure de contrat de mandat, ou bien n'ayant pas respecté ses dispositions tarifaires et de rémunération.

La liste des agents de l'État habilités à constater ces infractions est prévue, par un renvoi à l'article L. 450-1 du code de commerce.

Enfin, l' article L. 311-2-4 précise le champ d'application du dispositif. Géographiquement, il vise toute location réalisée pour un hôtel implanté en France, où que soit établie la plateforme de réservation. Dans le temps, il est prévu que les contrats passés entre hôteliers et plateformes de réservation en ligne avant la présente loi cessent de produire leurs effets dès son entrée en vigueur.

Votre commission a estimé que ce dispositif, s'il est sans doute perfectible techniquement, et s'il peut largement évoluer au regard des négociations en cours entre les différents acteurs, notamment d'ici la séance publique, a le mérite de poser un premier cadre à des relations contractuelles devenues par trop déséquilibrées entre les centrales de réservation en ligne et les hôteliers nationaux.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 33 nonies - Rapport sur l'accélération de la croissance des éco-PME

Objet : cet article prévoit la remise au Parlement, au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi, d'un rapport sur l'opportunité de lancer une initiative « accélérateur de croissance » en faveur des éco-petites et moyennes entreprises

Le présent article adopté par la commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Arnaud Leroy prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'opportunité d'établir une sorte de « feuille de route » en faveur des PME intervenant dans les secteurs de la croissance verte.

Conformément à sa position générale sur les demandes de rapports, votre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Section 2

Améliorer le financement

Les articles 34, 35, 35 quinquies à 40 et 40 ter de la présente section mettent en oeuvre une réforme de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié qui a été précédée d'une longue concertation.

La feuille de route de la première grande conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012 avait en effet prévu l'organisation d'une « négociation interprofessionnelle en 2013 sur les dispositifs de participation financière et d'épargne salariale ». Afin d'engager un travail préalable de diagnostic et d'échanges, le conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (Copiesas), instauré par la loi du 3 décembre 2008 234 ( * ) , n'a toutefois été effectivement mis en place que le 20 juin 2014. Ses travaux ont pu s'appuyer sur le rapport de l'inspection générale des finances (IGF) et de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) de décembre 2013, qui dégageait plusieurs pistes de réflexion 235 ( * ) .

Le conseil a rendu son rapport le 26 novembre 2014, en articulant ses 31 propositions autour de deux axes : d'une part, l'élargissement et la simplification des dispositifs de partage des résultats et d'épargne salariale, d'autre part, leur orientation vers le financement de l'économie 236 ( * ) .

Les partenaires sociaux n'ont pas conclu d'accord national interprofessionnel sur ce sujet, se contentant d'un projet de position commune le 22 décembre 2014 qui reprend une grande partie des propositions du Copiesas 237 ( * ) .

Selon le Gouvernement, le coût annuel de la réforme de l'épargne salariale telle que prévue par le projet de loi initial oscillerait entre 60 et 80 millions d'euros par an .

Les autres articles qui ont, pour la plupart, été ajoutés lors de la séance publique à l'Assemblée nationale, concernent la propriété industrielle, la société de libre partenariat et des sujets très divers relatifs au financement de l'économie.

Article 34 (art. 80 quaterdecies, 150-0 D, 182 A ter, 200 A et 223 A du code général des impôts, L. 136-2, L. 136-6, L. 137-13, L. 137-14 et L. 137-15du code de la sécurité sociale, L. 225-102 et L. 225-197-1 du code de commerce, L. 3332-14 du code du travail et art. 32-3 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Telecom) - Aménagement du dispositif d'attribution d'actions gratuites

Objet : cet article vise à assouplir les conditions d'attribution des actions gratuites et à mettre en place un régime fiscal et social plus favorable. Les gains d'attribution sont imposés selon les modalités applicables aux plus-values mobilières et soumis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. La contribution salariale spécifique est supprimée, tandis que le taux de la contribution patronale est abaissé. Un régime dérogatoire plus incitatif est prévu pour les PME.

I - Le droit existant

Le dispositif d'attribution d'actions gratuites, mis en place par l'article 83 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, permet, sous certaines conditions, de procéder, au profit des membres du personnel salarié et des mandataires sociaux des sociétés par actions, à une attribution gratuite d'actions.

D'après le rapport sur les Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2015, le coût pour l'État associé à ce dispositif s'élève à 33 millions d'euros en 2013.

Les bénéficiaires du dispositif d'attribution d'actions gratuites

Ce dispositif a vocation à s'appliquer aux sociétés par actions tant cotées que non cotées. Il s'agit :

- des sociétés anonymes ;

- des sociétés par actions simplifiées ;

- des sociétés en commandite par actions.

Aux termes de l'article L. 225-197-1 du code de commerce, peuvent bénéficier de l'attribution d'actions gratuites :

- les salariés de la société émettrice ou certaines catégories d'entre eux ;

- le président du conseil d'administration ;

- le directeur général ;

- les directeurs généraux délégués ;

- les membres du directoire ;

- le gérant.

Aux termes de l'article L. 225-197-2 du code de commerce, le dispositif peut être étendu, sous certaines conditions, aux sociétés filiales, aux sociétés mères et aux sociétés soeurs de la société émettrice.

Source : commission spéciale du Sénat

A. La procédure d'attribution

La procédure est encadrée afin de garantir la transparence des attributions. Le I. de l'article L. 225-197-1 du code de commerce précise le régime d'attribution des actions gratuites.

L'assemblée générale extraordinaire (AGE) , sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, et sur le rapport spécial des commissaires aux comptes, peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire à procéder à une attribution gratuite .

Dans ce cadre, l'AGE détermine :

- le pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué , qui ne peut toutefois excéder 10 % du capital social (30 % lorsque l'attribution bénéficie à l'ensemble du personnel salarié), tandis que l'écart entre le nombre d'actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq ;

- le délai pendant lequel cette autorisation peut être utilisée par le conseil d'administration ou le directoire ;

- la période d'acquisition , dont la durée minimale ne peut être inférieure à deux ans : il s'agit de la période comprise entre l'attribution des actions gratuites et leur acquisition effective, généralement assortie de conditions de performance et de présence ;

- la durée minimale de conservation , qui ne peut être inférieure à deux ans, sauf si la période d'acquisition est au moins égale à quatre ans : cette période débute à partir de l'attribution effective des actions.

Le II de l'article L. 225-197-1 précise par ailleurs qu'une attribution gratuite ne peut pas avoir pour effet qu'un bénéficiaire détienne plus de 10 % du capital social.

Une fois l'autorisation donnée, un rapport spécial informe chaque année l'assemblée générale ordinaire des opérations réalisées (art. L. 225-197-4 du code de commerce).

Le conseil d'administration ou le directoire détermine l'identité des bénéficiaires des attributions d'actions et fixe tant les conditions que les critères d'attribution des actions.

B. Le régime d'imposition

L'attribution d'actions gratuites peut donner lieu à quatre gains :

- le gain d'acquisition, qui correspond à la valeur, à leur date d'acquisition, des actions attribuées ;

- la plus-value de cession , qui correspond à la différence entre le prix de cession et la valeur des actions à leur date d'acquisition ;

- les dividendes perçus à raison des actions gratuites ;

- l'indemnité compensant la renonciation ou la perte des actions gratuites en cours d'acquisition.

1. Le gain d'acquisition

Le I. de l'article 80 quaterdecies du code général des impôts précise le régime fiscal du gain d'acquisition pour les actions attribuées à compter
du 28 septembre 2012.

Le gain est soumis au titre de l'année de cession à l'impôt sur le revenu selon les règles de droit commun des traitements et salaires (barème progressif de l'impôt sur le revenu, sans abattement pour durée de détention). Si les actions sont cédées pour un prix inférieur à leur valeur à la date de l'acquisition, la moins-value est déduite du montant du gain d'acquisition, dans la limite de ce montant.

Le gain d'acquisition est par ailleurs soumis aux prélèvements sociaux (CSG et CRDS) au titre des revenus d'activité (8 %). La fraction de CSG de 5,1 % est déductible des revenus imposables.

Aux termes des articles L. 137-13 et L. 137-14 du code de la sécurité sociale, des contributions spécifiques s'ajoutent aux prélèvements sociaux sur les revenus d'activité pour les actions gratuites attribuées à compter du 16 octobre 2007 :

- une contribution salariale portant sur le gain d'acquisition, dont le taux est de 10 % pour les actions attribuées depuis le 18 août 2012 ;

- une contribution patronale portant soit sur la juste valeur des actions telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés, soit sur la valeur des actions à la date de la décision d'attribution, dont le taux est de 30 % pour les actions attribuées depuis le 18 août 2012.

2. La plus-value de cession

Aux termes du V. de l'article 80 quaterdecies du code général des impôts, ce gain est imposé selon le régime de droit commun des plus-values de cession de valeurs mobilières prévu à l'article 150-0 A.

En conséquence, les abattements prévus au 1. de l'article 150-0 D et à l'article 150-0 D ter en matière d'impôt sur le revenu sont applicables :

- 50 % pour les titres détenus depuis deux ans et moins de huit ans ;

- 65 % pour les titres détenus depuis au moins huit ans.

Des abattements plus incitatifs (jusqu'à 85 % pour les titres détenus depuis au moins 8 ans) sont par ailleurs prévus pour les plus-values mobilières réalisées sur des titres de PME respectant certains critères.

La plus-value de cession est également soumise aux prélèvements sociaux au titre des revenus du patrimoine (15,5 %). La CSG est déductible à hauteur de 5,1 % des revenus imposables.

II - Le dispositif proposé

A. La mise en place d'un régime fiscal et social plus favorable pour le gain d'acquisition

1. Un alignement sur le régime fiscal et social des plus-values mobilières

Le I. du présent article propose de modifier le régime fiscal applicable au gain d'acquisition, qui serait désormais aligné sur celui des plus-values mobilières , et non plus sur celui des traitements et salaires.

En conséquence, les abattements pour durée de détention déjà applicables à la plus-value de cession pourraient permettre de réduire sensiblement l'imposition du gain d'acquisition.

Les A . et B. du II. visent par ailleurs à soumettre le gain d'acquisition aux prélèvements sociaux au titre des revenus du patrimoine (15,5 % contre 8 % actuellement). Cette hausse serait plus que compensée par les aménagements proposés concernant les contributions spécifiques. La CSG reste déductible à hauteur de 5,1 % des revenus imposables.

2. Une suppression de la contribution salariale spécifique

Le D . du II. propose la suppression de la contribution salariale spécifique (10 % actuellement).

3. Un allègement de la contribution patronale spécifique, dont les PME seraient exonérées à condition de ne pas avoir distribué de dividendes

Le C . du II. propose une adaptation de la contribution patronale spécifique.

Le taux de la contribution serait abaissé à 20 %.

La contribution ne s'appliquerait plus aux attributions gratuites décidées par des sociétés répondant à la définition européenne des PME qui n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création, dans la limite, par salarié, du plafond annuel de la sécurité sociale (38 040 euros en 2015).

Par ailleurs, l'assiette de la contribution est modifiée : la possibilité d'appliquer la contribution sur la juste valeur des actions telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés est supprimée. La contribution ne pourrait désormais s'appliquer que sur la valeur, à leur date d'acquisition, des actions attribuées. Outre la simplification induite par la suppression du droit d'option, la référence aux « actions attribuées » permet d'éviter que la contribution s'applique alors même que la décision d'attribution n'est pas suivie d'effet, conformément à une jurisprudence de la Cour de cassation 238 ( * ) .

B. Un assouplissement de la procédure d'attribution

Le III. du présent article propose un assouplissement de la procédure d'attribution.

L'écart entre le nombre d'actions distribuées à chaque salarié pourrait désormais être supérieur au rapport de un à cinq actuellement prévu dans le droit en vigueur lorsque le nombre total des actions attribuées gratuitement n'excède pas 10 % du capital social (15 % pour les PME non cotées).

La durée minimale de la période d'acquisition serait réduite de deux à un an , tandis que la durée cumulée des périodes d'acquisition et de conservation ne pourrait désormais être inférieure à deux ans (contre quatre ans dans le droit en vigueur).

C. Entrée en vigueur

Aux termes du IV . du présent article, les dispositions décrites ci-dessus s'appliqueraient aux actions gratuites dont l'attribution a été autorisée par une décision de l'assemblée générale extraordinaire postérieure à la publication de la présente loi.

La majorité des attributions étant autorisées au cours du premier trimestre de l'année, le présent article s'appliquerait pour la plupart des sociétés à partir de 2016.

III - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

En commission spéciale, deux amendements présentés par nos collègues députés Richard Ferrand, rapporteur général, et Christophe Castaner, rapporteur thématique, ont été adoptés.

Le premier vise à anticiper l'entrée en vigueur du présent article au 1 er janvier 2015.

Compte tenu des difficultés juridiques et opérationnelles liées à une entrée en vigueur anticipée du dispositif, un amendement du Gouvernement est revenu sur ce point en séance publique , tandis que plusieurs amendements rédactionnels du rapporteur thématique, acceptés par le Gouvernement, ont par ailleurs été adoptés.

Le second amendement adopté en commission spéciale propose de modifier l'article L.225-102 du code de commerce, qui fixe les modalités du calcul de la part des titres de l'entreprise détenus par les salariés.

Dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, lorsque le rapport présenté par le conseil d'administration lors de l'assemblée générale en application de l'article L. 225-102 établit que les actions détenues par le personnel de la société ainsi que par le personnel de sociétés qui lui sont liées au sens de l'article L. 225-180 représentent plus de 3 % du capital social de la société, un ou plusieurs administrateurs sont élus par l'assemblée générale des actionnaires sur proposition des actionnaires visés à l'article L. 225-102.

Dans le dispositif actuel, les actions détenues directement ne sont prises en compte que durant les périodes d'incessibilité et aucune référence n'est faite aux actions gratuites. D'après l'objet de l'amendement, les modifications apportées visent à prendre en compte les actions attribuées gratuitement aux salariés et à supprimer la condition relative à la période d'incessibilité.

IV - La position de votre commission

A. Restaurer l'attractivité fiscale et sociale des actions gratuites

Dans un contexte marqué par une baisse du nombre d'opérations d'attributions, la mise en place d'un cadre fiscal plus incitatif se justifie.

Dans une large mesure, le présent article vise en effet à revenir sur les différentes hausses d'impôts adoptées ces dernières années par le Gouvernement , qui avaient conduit à un taux marginal d'imposition très élevé sur le gain d'acquisition :

Taux d'imposition

Avant la réforme

Après la réforme, sans prise en compte de l'abattement
pour durée
de détention

Après la réforme, sous réserve d'une détention comprise entre
2 et 8 ans

Après la réforme, sous réserve d'une détention supérieure
à 8 ans

Taux marginal d'imposition pour un contribuable situé dans
la tranche à 45 % de l'IR et redevable de la surtaxe 239 ( * )

64,5 %

62 %

38,8 %

31,8 %

Taux marginal d'imposition pour un contribuable situé dans la tranche à 30 % 240 ( * )

46,5 %

44 %

29,8 %

25,5 %

Source : commission spéciale du Sénat

En prenant l'hypothèse d'une durée de détention comprise entre deux et huit ans , le taux marginal est de 38,8 % dans le premier cas et de 29,8 % dans le second, ce qui représenterait une amélioration substantielle du cadre fiscal applicable aux actions gratuites.

L'effet d'attractivité, essentiellement lié à l'abattement pour durée de détention, serait par ailleurs renforcé par l'allègement de la contribution patronale spécifique.

B. Une mesure qui vise à répondre aux problématiques de recrutement des PME et à prévenir les risques de délocalisation des centres de décision des grands groupes

Le caractère faiblement ciblé du dispositif proposé devrait se traduire par un gain proportionnellement plus important pour les salariés et mandataires sociaux des grandes entreprises .

Ce résultat est confirmé par les analyses d'échantillons effectuées par l'Autorité des marchés financiers (AMF) : parmi les sociétés des deux échantillons étudiés, 16 % des PME ont recours à ce type d'instruments, contre 65 % des grandes entreprises 241 ( * ) .

Ce faible ciblage pourrait sembler en contradiction avec la raison d'être initiale du dispositif, qui devait permettre aux entreprises de tailles moyennes ou petites d'attirer des compétences fortes et des dirigeants expérimentés qu'elles ne peuvent pas encore rémunérer à leur juste valeur.

En réalité, les modifications proposées traduisent l'émergence d'un deuxième objectif : prévenir les risques de délocalisation des centres de décision des grands groupes. En effet, selon les éléments fournis par Emmanuel Macron, ministre de l'économie, « plus du quart de nos entreprises du CAC 40 est en train de se détricoter via leur comité directeur » 242 ( * ) . Le présent article permettrait ainsi de rapprocher le cadre fiscal français des dispositions applicables dans les autres pays d'Europe continentale, afin de limiter les risques de fuite des centres de décision.

C. Un coût très incertain pour les finances publiques

Votre rapporteur ne peut que regretter que l'étude d'impact ne permette pas de chiffrer l'incidence budgétaire de la réforme concernant l'impôt sur le revenu.

Concernant les prélèvements sociaux, le coût annuel de la suppression de la cotisation sociale salariale est estimé à 25 millions d'euros, tandis que le coût annuel de la réduction de la contribution sociale patronale est estimé à 100 millions d'euros.

D. Des incitations contradictoires concernant la durée de détention

La décision d'aligner le régime fiscal applicable au gain d'acquisition sur celui des plus-values mobilières renforce l'incitation des bénéficiaires d'actions gratuites à conserver leurs titres afin de bénéficier de l'abattement pour durée de détention.

À l'inverse, le fait que la durée cumulée des périodes d'acquisition et de conservation puisse désormais être comprise entre deux et quatre ans apparaît contraire aux objectifs de fidélisation des salariés et de stabilisation du capital social des entreprises, ce que confirme l'analyse de la position de l'AMF en la matière. En effet, l'AMF recommande actuellement « d'encourager une application exigeante de cette obligation de conservation » dans l'optique « d'intéresser les dirigeants des valeurs moyennes et petites aux perspectives à long terme des sociétés » 243 ( * ) . À titre de comparaison, les dispositifs d'attribution d'actions gratuites imposent une durée minimale de détention de sept ans en Allemagne et de cinq ans au Royaume-Uni pour bénéficier des allègements fiscaux et sociaux prévus.

Si cet ajustement peut se justifier pour certaines startups soutenues par des business angels dont l'horizon d'investissement est nécessairement limité, il apparaît nettement plus discutable pour les entreprises matures et les filières industrielles classiques.

En conséquence, votre rapporteur a proposé à votre commission qui l'a adopté un amendement visant à maintenir l'aménagement proposé tout en restreignant son champ d'application aux PME.

E. Les nouvelles modalités du calcul de la part des titres de l'entreprise détenus par les salariés proposées par l'Assemblée nationale sont problématiques

D'après l'objet de l'amendement, les modifications apportées visent à prendre en compte les actions attribuées gratuitement aux salariés et à supprimer la condition relative à la période d'incessibilité.

Ces modifications posent néanmoins un problème pour identifier les actions détenues par le personnel salarié puisque les actions au porteur seraient désormais incluses dans la part des titres de l'entreprise détenus par les salariés . Or, connaître l'identité de l'actionnaire nécessiterait le recours à une procédure particulièrement lourde pour arriver jusqu'à l'identité du porteur. C'est pour cette raison qu'une telle modification a toujours été écartée depuis 1994 244 ( * ) .

Par ailleurs, compte tenu des différents articles visés, la rédaction de l'Assemblée nationale ne permettrait pas de prendre en compte les actions attribuées gratuitement aux salariés et ferait perdre à certains salariés leur droit de participer à la désignation d'un administrateur.

En conséquence, l'amendement adopté par votre commission vise à :

- ne prendre en compte que les actions détenues au nominatif ;

- inclure effectivement les actions gratuites en faisant référence à l'article L. 225-197-1 du code de commerce ;

- permettre aux salariés ayant obtenu des actions au titre d'anciens dispositifs (plans d'actionnariat, privatisations, etc.) de participer à la désignation d'un administrateur en continuant de les inclure dans les modalités du calcul de la part des titres de l'entreprise détenus par les salariés.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 34 bis A (nouveau) (art. L. 131-1 du code des assurances) - Possibilité pour un contrat d'assurance vie de prévoir le règlement des sommes dues sous forme de parts de fonds commun de placement à risque

Objet : cet article, introduit par la commission spéciale, vise permettre à un contrat d'assurance investis pour plus de 125 000 euros en unités de compte de prévoir que le règlement des sommes dues par l'assureur est effectué par la remise de parts de fonds communs de placement à risques ou de fonds professionnels spécialisés investis en titres financiers de petites et moyennes entreprises et d'entreprises de tailles intermédiaires non admis à la négociation sur un marché réglementé.

Le présent article a été introduit à la suite de l'adoption par votre commission, contre l'avis du rapporteur, d'un amendement, présenté par notre collègue Philippe Adnot ainsi que plusieurs autres sénateurs.

Il tend à modifier l'article L. 131-1 du code des assurances en indiquant qu'un contrat d'assurance, sous réserve qu'il comporte un montant minimum investi en unités de comptes de 125 000 euros, puisse « prévoir que le règlement est effectué par la remise de parts de fonds communs de placement à risques ou de fonds contractuels spécialisés investis en titres financiers de petites et moyennes entreprises ou d'entreprises de taille intermédiaire non admis à la négociation sur un marché réglementé, dans une proportion n'excédant pas la part du capital garanti investi en unités de comptes constituées de tels titres, laquelle part est plafonnée à 10 % du montant total du contrat ».

Votre rapporteur relève que le dispositif proposé présente les caractéristiques suivantes :

- les parts de fonds commun de placement à risques (FCPR) sont peu liquides et la durée de vie de ces fonds est en général d'une dizaine d'année ;

- le capital n'est pas garanti et le risque de perte est très important ;

- c'est l'assureur et non l'assuré qui choisit les fonds dont les parts sont remises en règlement des sommes dues et le dispositif proposé n'encadre pas l'âge des fonds ni leur durée de vie résiduelle ;

- la mesure proposée vise également les versements au bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie.

Selon l'objet de l'amendement, le dispositif proposé viserait à autoriser les assureurs à pouvoir offrir des contrats investis partiellement en non coté en permettant leur règlement, à hauteur de cet investissement partiel, en titres non cotés en vue de faciliter et d'augmenter le financement des TPE/PME/PMI par l'assurance vie. Il permettrait en outre « à un certain nombre de nos concitoyens d'alimenter ces nouveaux contrats en France plutôt qu'à l'extérieur », étant souligné que « les flux, par exemple, vers le Luxembourg réalisés par les résidents français restent très soutenus à ce titre et sont en progression ».

Le rapporteur estime que le succès incontestable de l'assurance vie luxembourgeoise ne repose pas sur la possibilité pour l'assureur de régler les sommes dues sous forme de titres non cotés. L'assurance vie luxembourgeoise offre une souplesse dans la gestion des actifs sans doute plus grande que les contrats français. Ceux-ci peuvent cependant tout à fait être investis dans des titres non côtés.

S'agissant de l'objectif de financement de l'économie, le rachat ou le dénouement d'un contrat d'assurance vie partiellement investis en titres non cotés n'implique pas la cession de ces titres : l'assuré ne détient pas des titres qu'il faudrait vendre en cas de sortie du contrat, mais des unités de comptes déterminant la valeur de ses droits. Conformément aux règles prudentielles en vigueur, l'assureur dispose à tout instant de suffisamment de liquidités pour faire face à ses engagements sans devoir compter sur la vente, toujours délicate, de titres non cotés. Au surplus, la vente éventuelle de ces titres ne porte pas atteinte au financement des entreprises concernées.

Dès lors, la conséquence principale du dispositif proposé est de transférer le risque de liquidité vers l'assuré.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 34 bis B (nouveau) (art. L. 213-14 du code monétaire et financier) - Restriction aux personnes physiques de l'interdiction pour les dirigeants d'une association de détenir des obligations émises par celle-ci

Objet : cet article, introduit par la commission spéciale, tend à limiter aux dirigeants personnes physiques l'interdiction de détenir directement ou indirectement les obligations émises par leur association.

I - Le dispositif proposé

Le dispositif proposé, adopté à l'initiative de notre collègue Didier Mandelli avec l'avis favorable du rapporteur, vise à modifier l'article L. 213-14 du code monétaire et financier afin de préciser que le principe selon lequel « les obligations émises par les associations dans les conditions prévues à la présente sous-section ne peuvent être détenues, directement ou indirectement, par leurs dirigeants de droit ou de fait » ne s'applique qu'aux dirigeants personnes physiques.

Cette interdiction a été introduite par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, qui par ailleurs a rendu plus attractif le rendement maximum offert par les obligations émises par des associations. Il s'agissait ainsi d'éviter tout usage abusif des émissions obligataires, notamment comme instrument de rémunération détournée de responsables associatifs.

L'auteur de l'amendement souligne à cet égard la spécificité de la situation des personnes morales administratrices d'association : « Un grand nombre de projets associatifs sont en effet soutenus par des personnes morales. Ces dernières peuvent manifester leur soutien par une participation à la gouvernance, en tant qu'administrateur, mais aussi par un soutien financier, par exemple sous forme de souscription d'une émission obligataire. Ce peut être par exemple le cas dans les Chambres Régionales de l'Économie Sociale et Solidaire, dont le rôle est par ailleurs renforcé dans la loi relative à l'économie sociale et solidaire ».

II - La position de votre commission

Le rapporteur approuve la mesure proposée qui permet de corriger un effet non désiré de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 34 bis C (nouveau) (art. L. 18 du livre des procédures fiscales) - Réduction du délai imparti à l'administration pour se prononcer sur une demande de rescrit-valeur

Objet : cet article, introduit par la commission spéciale, tend à abaisser à quatre mois le délai dans lequel l'administration doit se prononcer sur la demande de rescrit-valeur que lui adresse un contribuable.

I - Le dispositif proposé

Le présent article, adopté par votre commission spéciale à l'initiative de notre collègue Jacques Mézard et avec un avis favorable du rapporteur, tend à réduire de six mois à quatre mois le délai dans lequel l'administration doit se prononcer sur une demande de rescrit-valeur. Ce dispositif, prévu par l'article L. 18 du livre des procédures fiscales permet au dirigeant d'entreprise, qui envisage de donner les titres d'une société, de soumettre préalablement à l'administration fiscale la valeur vénale pour laquelle il les estime. En cas d'acceptation, l'assiette taxable ne peut être remise en cause.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur approuve la mesure proposée qui permet de rapprocher les délais de réponse de l'administration du rythme de la vie des affaires.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 34 bis (art. L. 214-34, L. 214-36 et L. 214-51 du code monétaire et financier) - Extension de l'objet social des organismes
de placement collectif immobilier

Objet : cet article, introduit en séance publique par l'Assemblée nationale, vise à permettre aux organismes de placement collectif immobilier (OPCI) d'acquérir, à titre accessoire, des meubles et biens d'équipement affectés à des biens immobiliers placés en location.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 214-34 du code monétaire et financier dispose que les organismes de placement collectif immobilier (OPCI) ont pour seul objet « l'investissement dans des immeubles destinés à la location ou qu'ils font construire exclusivement en vue de leur location, qu'ils détiennent directement ou indirectement, y compris en l'état futur d'achèvement, toutes opérations nécessaires à leur usage ou à leur revente, la réalisation de travaux de toute nature dans ces immeubles, notamment les opérations afférentes à leur construction, leur rénovation et leur réhabilitation en vue de leur location et accessoirement la gestion d'instruments financiers et de dépôts ».

Le présent article, adopté en séance publique par l'Assemblée nationale à l'initiative des rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement, tend à compléter ces dispositions afin de permettre aux OPCI d'acquérir, à titre accessoire et en vue de leur location, des meubles meublants, des biens d'équipement ou tous biens meubles affectés aux immeubles détenus et nécessaires à leur fonctionnement, à leur usage ou leur exploitation par un tiers.

En conséquence, il vise également à modifier l'article L. 214-36 du code monétaire et financier définissant la composition de l'actif des OPCI, qui pourrait ainsi comporter, directement ou indirectement, ces meubles, ainsi que l'article L. 214-51 du même code fixant le calcul du résultat des OPCI, afin d'y intégrer à ce dernier le produit tiré de la location de biens meublés.

II - La position de votre commission

Le dispositif proposé vise à répondre au besoin de financement de locaux meublés, en particulier des résidences pour étudiants ou personnes âgées. Les OPCI ne pourront cependant devenir gérant de résidences. En effet, les meubles et l'immeuble auquel ils sont attachés, devront être donnés en location à un tiers exploitant.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 (art. 163 bis G et 154 quinquies du code général des impôts) - Aménagement du cadre fiscal applicable aux bons de souscription de part de créateur d'entreprise (BSPCE)

Objet : cet article vise à assouplir certaines conditions d'attribution des BSPCE en faveur des entreprises créées dans le cadre d'une restructuration ou s'engageant dans la création de filiales. À cette occasion, il confirme la non-déductibilité de la CSG afférente aux plus-values à long terme et aux gains réalisés lors de la cession des titres souscrits en exercice des BSPCE.

Le dispositif des BSPCE, introduit par l'article 76 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998 et codifié à l'article 163 bis G du code général des impôts, permet aux jeunes entreprises d'intéresser à leur capital leurs salariés ainsi que leurs dirigeants par l'attribution de bons incessibles donnant droit de souscrire des titres représentatifs du capital de leur entreprise à un prix fixé au jour de leur attribution.

Pour les salariés et dirigeants bénéficiaires, les BSPCE constituent un mode de rémunération analogue aux options sur titres, le gain net réalisé lors de la cession des actions souscrites en exercice des BSPCE dépendant de l'appréciation du titre depuis la date d'attribution du bon.

D'après le rapport sur les Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2015, le coût total du dispositif est de 4 millions d'euros en 2013 et devrait s'établir à 5 millions d'euros en 2014 et 2015.

I - Le droit existant

A. Les conditions d'attribution des BSPCE sont restrictives pour les entreprises créées dans le cadre d'une restructuration ou s'engageant dans la création de filiales

Les sociétés créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes ne sont pas éligibles au dispositif.

Il existe toutefois une exception pour les sociétés créées par voie « d'essaimage », c'est-à-dire répondant aux conditions prévues au I. de l'article 39 quinquies H du code général des impôts relatif à la provision pour prêts d'installation consentis par les entreprises à leurs salariés.

Une filiale d'une société émettrice ne peut donc attribuer des BSPCE à ses propres salariés et dirigeants que si elle a été créée par voie « d'essaimage ».

Cette dernière condition est particulièrement restrictive et ne concerne que les filiales :

- créées par des membres du personnel de la société émettrice ;

- bénéficiant de la part de la société émettrice de prêts à taux privilégié ou dont la société émettrice a souscrit au capital.

Par ailleurs, une société ne peut attribuer des BSPCE ni aux salariés ni aux dirigeants de ses filiales.

Les conditions d'attribution des BSPCE

Les sociétés souhaitant attribuer des BSPCE doivent satisfaire aux six conditions cumulatives suivantes :

a) Être une société par actions.

b) Être une société de moins de quinze ans.

c) Être une société non cotée ou de petite capitalisation boursière : seules sont éligibles les sociétés non cotées ou dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou organisé d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen et dont la capitalisation boursière est inférieure à 150 millions d'euros. Toutefois, lorsqu'elles dépassent ce seuil, les sociétés concernées peuvent, pendant les trois ans suivant la date de ce dépassement, continuer à attribuer des BSPCE.

d) Être passible en France de l'impôt sur les sociétés.

e) Être une société détenue directement et de manière continue depuis sa création par des personnes physiques ou par des personnes morales elles-mêmes détenues par des personnes physiques : seules sont éligibles les sociétés dont le capital est détenu directement et de manière continue pour 25 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales elles-mêmes directement détenues pour 75 % au moins de leur capital par des personnes physiques.

f) Ne pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes.

La société éligible peut attribuer des BSPCE :

- aux membres de son personnel salarié ;

- à ses dirigeants soumis au régime fiscal des salariés.

En conséquence, une société ne peut attribuer des BSPCE ni aux salariés ni aux dirigeants de ses filiales. Par ailleurs, dans les SA et les SAS, les administrateurs ou les membres du conseil de surveillance sont exclus du dispositif.

Source : commission spéciale du Sénat

B. Le régime d'imposition des gains

Bien que les BSPCE constituent des titres proches des stock-options , le gain net réalisé lors de la cession des titres souscrits en exercice des BSPCE reste soumis à l'impôt sur le revenu au taux proportionnel de 19 % (30 % lorsque le bénéficiaire exerce son activité au sein de la société depuis moins de trois ans à la date de la cession).

L'article 17 de la loi de finances rectificative pour 2014 a toutefois précisé explicitement que les abattements fixes et pour durée de détention applicables aux plus-values imposées selon le barème de l'impôt sur le revenu ne s'appliquent pas aux gains de cession des titres souscrits en exercice des BSPCE.

Au regard des prélèvements sociaux, le gain net est soumis aux prélèvements sociaux dus au titre des revenus du patrimoine (taux de 15,5 %).

II - Le dispositif proposé

A. Un assouplissement des conditions d'attribution des BSPCE en faveur des jeunes entreprises s'engageant dans la création de filiales ou créées dans le cadre d'une restructuration

1. Les sociétés émettrices pourraient attribuer des BSPCE aux salariés et aux dirigeants de leurs filiales

Le I. A. 2° a) du présent article propose que les sociétés éligibles puissent attribuer des BSPCE aux membres du personnel salarié et aux dirigeants soumis au régime fiscal des salariés d'une société :

- qui répond aux cinq premières conditions relatives aux entreprises précédemment décrites ;

- dont elles détiennent au moins 75 % du capital ou des droits de vote.

Une société mère créant une société fille qu'elle détient à 75 % au moins pourra donc continuer à intéresser les salariés et dirigeants éligibles de sa filiale à l'ensemble de son activité.

Afin de limiter les risques d'optimisation , le I. A. 3° b) du présent article propose toutefois de préciser que, dans le cas où une société attribue des BSPCE aux salariés et aux dirigeants d'une filiale, le respect de la condition tenant à la capitalisation boursière est apprécié en faisant masse de la capitalisation de la société attributaire et de celle de ses filiales dont le personnel a bénéficié de distributions de la part de la société attributaire au cours des douze derniers mois.

2. Les sociétés éligibles qui se restructurent pourraient attribuer des BSPCE

Le I. A. 3° b) du présent article propose que toute société créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes puisse attribuer des BSPCE si toutes les sociétés prenant part à l'opération répondent aux cinq premières conditions relatives aux entreprises précédemment décrites.

Afin de limiter les risques d'optimisation, il est toutefois proposé de préciser que :

- le respect de la condition tenant à la capitalisation boursière soit apprécié en faisant masse de la capitalisation de l'ensemble des sociétés issues de l'opération ;

- le respect de la condition tenant à la jeunesse de la société soit apprécié en tenant compte de la date d'immatriculation de la plus ancienne des sociétés ayant pris part à l'opération.

B. Une clarification du régime d'imposition

1. Une clarification de la condition portant le taux d'imposition à 30 %

En matière d'impôt sur le revenu, le taux est actuellement porté à 30 % lorsque le bénéficiaire exerce son activité « dans la société depuis moins de trois ans à la date de la cession ».

Le I. A. 1° du présent article propose de préciser cette condition en indiquant que l'activité doit avoir été exercée dans la société « dans laquelle il a bénéficié de l'attribution des bons ».

Par ailleurs, dans le cas où une société attribue des bons aux salariés et aux dirigeants d'une filiale, il serait tenu compte, pour l'appréciation de cette limite, de la période d'activité éventuellement effectuée :

- au sein d'une filiale de la société émettrice ;

- au sein de la société mère.

2. La confirmation de la non-déductibilité de la CSG afférente

En matière d'impôt sur le revenu, le I. B. du présent article propose de préciser explicitement la non-déductibilité de la CSG afférente :

- aux gains réalisés lors de la cession des titres souscrits en exercice des BSPCE ;

- aux plus-values à long terme.

Cette exclusion était déjà prévue par le Bulletin officiel des finances publiques - Impôts (BoFIP ) .

C. Entrée en vigueur

Le II. du présent article prévoit les modalités d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions.

Ainsi, le A du I s'applique aux BSPCE attribués à compter de la publication de la présente loi, tandis que le B du I s'applique à compter de l'imposition des revenus de l'année 2015.

III - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

En séance publique, deux amendements rédactionnels présentés par notre collègue député Christophe Castaner, rapporteur thématique, acceptés par le Gouvernement, ont été adoptés.

IV - La position de votre commission

Cet assouplissement des conditions d'attribution des BSPCE se justifie.

Il est important de tenir compte du fait que de nombreuses jeunes entreprises ont besoin de se rapprocher d'une autre ou de créer une filiale lorsqu'elles sont amenées à développer plusieurs activités.

Cette mesure est particulièrement attendue dans le domaine du numérique et a été plébiscitée à l'occasion des Assises de l'entrepreneuriat 2014 et de la réunion du conseil stratégique de l'attractivité.

De plus, les risques d'optimisation sont limités par l'appréciation des conditions tenant à la capitalisation boursière et à la jeunesse des sociétés prenant part aux différentes opérations.

Il est néanmoins regrettable que l'étude d'impact ne chiffre pas le coût supplémentaire induit par le dispositif proposé.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 bis A (art. 231 ter du code général des impôts et L. 520-7 du code de l'urbanisme) - Exonération pour certains locaux de la taxe annuelle
sur les locaux à usage de bureaux, de commerce ou de stockage
et de redevance sur la création de bureaux, de locaux commerciaux et de stockage perçues en Île-de-France

Objet : cet article prévoit d'exonérer de taxe annuelle sur les locaux de bureaux, de commerce, de stockage et de redevance annuelle sur la création de bureaux, des locaux à usage de bureaux ou de commerces répondant à certains critères, en visant plus spécifiquement les pépinières d'entreprises, les incubateurs, les hôtels d'entreprises et les « fab lab ».

I - Le droit existant

En région Île-de-France, les locaux relevant de l'immobilier d'entreprise (bureaux, commerce, stockage, surfaces de stationnement) se voient appliquer, en complément des impôts fonciers, une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement ainsi qu'une redevance pour la construction, la reconstruction ou l'agrandissement de ces mêmes locaux.

A. La taxe annuelle sur les locaux de bureaux, de commerce et de stockage

L' article 231 ter du code général des impôts prévoit une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux situés en Ile-de-France. Elle est due pour l'année entière, par les personnes publiques ou privées, soit propriétaires de biens imposables, soit titulaires d'un droit réel.

Les tarifs applicables divergent selon les catégories de locaux (bureaux, locaux commerciaux, locaux de stockage et surfaces de stationnement...) et un zonage en trois circonscriptions :

- 1 ère circonscription : Paris et le département des Hauts-de-Seine ;

- 2 ème circonscription : les communes de l'unité urbaine de Paris (délimitée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et du budget) autres que Paris et les communes du département des Hauts-de-Seine ;

- 3 ème circonscription : les autres communes de la région d'Île-de-France.

Appartiennent également à la troisième circonscription les communes d'Ile-de-France, quelle que soit leur situation géographique, lorsqu'elles sont « éligibles à la fois, pour l'année précédant celle de l'imposition, à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et au bénéfice du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France, respectivement prévus aux articles L. 2334-15 et L. 2531-12 du code général des collectivités territoriales ».

Un tarif réduit est, par ailleurs prévu, dans chaque circonscription, pour la taxe applicable aux locaux à usage de bureaux dont sont propriétaires « l'État, les collectivités territoriales, les organismes ou les établissements publics sans caractère industriel ou commercial, les organismes professionnels ainsi que les associations ou organismes privés sans but lucratif à caractère sanitaire, social, éducatif, sportif ou culturel et dans lesquels ils exercent leur activité ».

Les tarifs applicables sont établis chaque année en tenant compte de l'évolution de l'indice du coût de la construction (ICC).

Tarif unitaire applicable au 1 er janvier 2015

1 ère circonscription

2 ème circonscription

3 ème circonscription

Locaux à usage de bureaux

17,08 euros

10,13 euros

4,86 euros

Locaux à usage de bureaux -tarif réduit

8,46 euros

6,07 euros

4,40 euros

Locaux commerciaux

7,53 euros

3,88 euros

1,95 euros

Locaux de stockage

3,89 euros

1,95 euros

0,99 euros

Surfaces de stationnement

2,27 euros

1,31 euros

0,66 euros

NB : les tarifs baissent de 0,61 % de 2014 à 2015 compte tenu de l'évolution de l'ICC publiée par l'INSEE au troisième trimestre 2013 (1637) et 2014 (1627).

Source : Bulletin officiel des finances publiques

La taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux est à la fois affectée à :

- la région Ile-de-France , avec un montant maximal de 183 millions d'euros (article L. 4414-7 du code général des collectivités territoriales) ;

- l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL) , pour 80,25 % de la part non affectée à la région Ile-de-France (article 57 de la loi de finances initiale pour 2006 245 ( * ) ). Cela correspond à 133 millions d'euros pour 2015, selon le tome I du Voies et moyens annexé au projet de loi de finances initiale ;

- la Société du Grand Paris (SGP) , en vertu du C du I de l'article 31 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, avec un plafond fixé à 375 millions d'euros pour 2015 ;

- l'État pour le reste (évaluation à 33 millions d'euros pour 2015 d'après le tome I du Voies et moyens annexé au projet de loi de finances initiale).

Sont exonérés du paiement de cette taxe annuelle :

- les locaux et surfaces de stationnement qui sont situés dans une zone de redynamisation urbaine ou une zone franche urbaine-territoire entrepreneur ;

- les locaux et surfaces de stationnement appartenant aux fondations et aux associations, reconnues d'utilité publique, dans lesquels ils exercent leur activité ainsi que les locaux spécialement aménagés pour l'archivage administratif et pour l'exercice d'activités de recherche ou à caractère sanitaire, social, éducatif ou culturel ;

- les locaux administratifs et les surfaces de stationnement des établissements publics d'enseignement du premier et du second degré et des établissements privés sous contrat ;

- les locaux à usage de bureaux d'une superficie inférieure à 100 mètres carrés, les locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 mètres carrés, les locaux de stockage d'une superficie inférieure à 5 000 mètres carrés et les surfaces de stationnement de moins de 500 mètres carrés annexées à ces catégories de locaux ;

- les locaux de stockage appartenant aux sociétés coopératives agricoles ou à leurs unions.

B. La redevance pour création de bureaux

En vertu des articles L. 520-1 et suivants du code de l'urbanisme, une redevance est perçue en Ile-de-France pour la construction, la reconstruction ou l'agrandissement de locaux à usage de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage tels que définis pour l'application de la taxe annuelle ci-dessus présentée et prévue à l'article 231 ter du code général des impôts.

Est assimilée à la construction de locaux de bureaux, de commerce ou de stockage la transformation en de tels locaux de ceux qui étaient précédemment affectés à un autre usage.

Les tarifs de la redevance varient selon les mêmes catégories de biens et le même zonage géographique (circonscriptions) que pour la taxe annuelle sur les locaux de bureaux, de commerce et de stockage. Toutefois, l'article 27 de la loi du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 246 ( * ) a instauré une tarification unique pour les locaux de stockage, quelle que soit leur implantation géographique.

Comme l'avait indiqué notre collègue Albéric de Montgolfier, rapporteur général au nom de la commission des finances, ce tarif unique sur la construction de locaux de stockage visait ainsi « à mettre fin à un phénomène de déplacement des implantations nouvelles de sites de stockage en périphérie de l'Île-de-France -les tarifs étant actuellement plus élevés pour les zones centrales-, les éloignant ainsi des lieux de consommation ».

Les tarifs applicables correspondent au 1 er janvier 2015 aux montants suivants par mètre carré de construction (en euros) :

1 ère circonscription

2 ème circonscription

3 ème circonscription

Locaux à usage de bureaux

368,95

229,52

92,24

Locaux commerciaux

128,71

80,44

32,18

Locaux de stockage

13,95

13,95

13,95

Source : commission spéciale d'après l'arrêté du 30 décembre 2014 relatif à l'actualisation annuelle des tarifs au mètre carré pour le calcul de la redevance pour la création de locaux à usage de bureaux, des locaux commerciaux et des locaux de stockage en région d'Ile-de-France

Les communes qui ne sont plus éligibles « soit à la dotation de solidarité urbaine, soit au bénéfice du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France, respectivement prévus aux articles L. 2334-15 et L. 2531-12 du code général des collectivités territoriales, bénéficient, au titre de l'année suivant cette perte d'éligibilité et pendant les deux années suivantes, d'un abattement respectivement des trois quarts, de la moitié et du quart de l'augmentation du tarif de la redevance liée à cette perte d'éligibilité ».

Le produit de la redevance revient à la région Île-de-France pour être attribué à son budget d'équipement, en vue « du financement d'infrastructures routières et d'équipements nécessaires au desserrement d'activités industrielles ou tertiaires » (article L. 520-4 du code de l'urbanisme).

D'après le tome I du Voies et moyens annexé au PLF 2015, la redevance correspond à une exécution de 127 millions d'euros en 2013 et une prévision de 128 millions d'euros en 2014 et 129 millions d'euros en 2015.

En vertu de l'article L. 540-7 du code de l'urbanisme, sont exonérés de cette redevance :

- les bureaux faisant partie d'un local principal d'habitation ;

- les locaux « affectés au service public et appartenant ou destinés à appartenir à l'État, aux collectivités territoriales ou aux établissements publics ne présentant pas un caractère industriel et commercial ainsi que ceux utilisés par des organismes de sécurité sociale ou d'allocations familiales et appartenant ou destinés à appartenir à ces organismes ou à des sociétés civiles constituées exclusivement entre ces organismes » ;

- les locaux des établissements industriels lorsqu'il s'agit de bureaux dépendants de locaux de production ou d'une superficie inférieure à 1 000 mètres carrés indépendants des locaux de production ;

- les locaux de recherche compris dans les établissements industriels ;

- les bureaux de professions libérales et d'officiers ministériels ;

- les locaux affectés aux associations reconnues d'utilité publique ;

- les locaux situés en zone franche urbaine (ZFU) ou en zone de redynamisation urbaine (ZRU) ;

- les surfaces de stationnement annexées aux locaux de bureaux, de commerce ou de stockage et assujettis à la taxe annuelle prévue à l'article 231 ter du code général des impôts.

II - Le dispositif proposé

À l'initiative de Seybah Dagoma, Pascal Cherki, Sandrine Mazetier, Annick Lepetit et Fanélie Carrey-Conte, l'Assemblée nationale a inséré le présent article tendant à exonérer à la fois de taxe annuelle sur les locaux de bureaux, de commerce et de stockage (en créant un 1° bis au sein du V de l'article 231 ter du code général des impôts) et de redevance pour création de bureaux en Ile-de-France (par un nouvel alinéa à l'article L. 520-7 du code de l'urbanisme) les « locaux à usage de bureaux ou de commerces, flexibles et ouverts à une multiplicité d'utilisateurs, proposant des services communs et favorisant le travail collaboratif, dans un but de soutien à l'emploi au travers de la création d'entreprises et d'activités économiques ».

L'amendement a été adopté avec l'avis défavorable de la commission spéciale et du Gouvernement, le rapporteur spécial ayant toutefois indiqué qu'à titre personnel, il s'en remettait à la sagesse de l'assemblée.

D'après l'exposé des motifs de l'amendement et les débats en séance à l'Assemblée nationale, sont en particulier visés pour cette exonération les pépinières et incubateurs d'entreprises, les hôtels d'entreprises ainsi que les « fab lab » (pour « fabrication laboratory »), qui correspondent à des ateliers de fabrication numérique partagés.

III - La position de votre commission

L'exonération de la taxe annuelle sur les locaux de bureaux, de commerce et de stockage et de la redevance pour création de locaux de bureaux, de commerce et de stockage applicables en Ile-de-France est justifiée , d'après les auteurs de l'amendement adopté à l'Assemblée nationale, par le fait que ces locaux sont dédiés à des entreprises se situant au stade de leur création ou au tout début de leur développement et que les hôtels et pépinières d'entreprises ainsi que les incubateurs sont susceptibles de proposer des loyers moins élevés .

En outre, il est avancé que ces structures mériteraient d'être développées autour des grands pôles universitaires et de recherche qui se constituent en Ile-de-France .

Votre commission partage le constat selon lequel l'importante réforme de la taxe et de la redevance opérée en 2010 , à l'article 31 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010, a pu avoir un impact sur certains locaux compte tenu de l'augmentation des tarifs unitaires, de l'élargissement de l'assiette et des changements de zonage par la création de l'unité urbaine de Paris.

Elle rappelle aussi que l'article 34 de la loi du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 247 ( * ) a déjà procédé à des aménagements à l'augmentation de la redevance sur la création de bureaux . Ainsi, celle-ci avait été lissée sur trois ans (entre 2011 et 2013) pour les locaux commerciaux et de stockage qui n'étaient pas compris dans le champ de la redevance en 2011 et les locaux à usage de bureaux situés dans les communes ayant changé de circonscription à la suite de la modification du zonage. La durée du lissage a même été portée à six ans - de 2011 à 2015 - dans les communes pour lesquelles, compte tenu de la redéfinition du zonage opérée en 2010, le « saut » était de deux circonscriptions 248 ( * ) .

En outre, l'article 27 précité de la loi du 30 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 a également aménagé la réforme de 2010 en prévoyant une tarification unique pour les locaux de stockage sur l'ensemble du territoire de l'Ile-de-France et en gelant l'augmentation du tarif pour les bureaux situés dans les communes encore concernées, en 2015, par le dispositif de lissage prévu par l'article 34 de la loi du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

Votre commission considère que le présent article propose l'institution d'une nouvelle niche fiscale alors que l'effet réellement désincitatif de cette taxe et cette redevance sur l'installation d'incubateurs en Ile-de-France ne semble pas clairement démontré .

En outre, comme les députés et le Gouvernement l'ont indiqué en séance publique à l'Assemblée nationale, la rédaction actuelle ne permet pas de couvrir précisément l'objectif visé et pourrait conduire à des abus .

Votre commission a donc adopté un amendement de suppression proposé par son rapporteur

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 35 bis B - Demande de rapport sur le calcul de la TVA sur les services en ligne

Objet : cet article prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement portant sur les conséquences du passage au principe de destination pour le calcul de la TVA sur les services en ligne.

I - Le dispositif proposé

Jusqu'au 1 er janvier 2015, les services en ligne étaient imposables au taux de TVA en vigueur de l'État où est établi le vendeur , en vertu du « principe du pays d'origine ». Ce principe, fixé par la directive « TVA » n° 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, s'appliquait aux prestations de services de télécommunication, radiodiffusion et télévision et autres services en ligne 249 ( * ) .

L'application aux biens immatériels du principe du pays d'origine avait toutefois pour conséquence de faciliter le transfert de bénéfices vers des États membres à la fiscalité relativement plus favorable , réduisant ainsi la substance imposable des grands États. L'exemple le plus couramment cité est celui d' iTunes , plateforme proposant des morceaux de musique à télécharger : l'entreprise étant domiciliée au Luxembourg, tous les morceaux achetés dans un État membre de l'Union européenne se voyaient appliquer la TVA luxembourgeoise.

Ainsi, depuis le 1 er janvier 2015, c'est le « principe de destination » qui s'applique : la TVA est facturée au taux en vigueur dans l'État où est établi le consommateur . Afin de simplifier les démarches, un système de « guichet unique », ou « mini-guichet », a été mis en place : celui-ci permettra aux entreprises de s'enregistrer, de déclarer et d'acquitter la TVA dans leur propre État de façon centralisée. L'administration se charge ensuite de transmettre chaque trimestre les éléments déclarés et de reverser la TVA aux États de consommation.

En dépit de cette mesure de simplification, le passage au principe de destination demeure une contrainte pour de nombreuses petites et moyennes entreprises du secteur des services en ligne, par exemple les vendeurs indépendants de livres électroniques. Ces entreprises doivent en effet calculer et appliquer un taux de TVA différent pour chaque pays , ce qui entraîne des charges supplémentaires et, surtout, brouille la lisibilité de leur grille tarifaire.

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Frédéric Lefebvre, avec l'avis défavorable de la commission mais favorable de son rapporteur à titre personnel, et avec l'avis favorable du Gouvernement.

Il prévoit que « le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 septembre 2015, un rapport sur les conséquences pour le e-commerce des nouvelles modalités de calcul de la taxe sur la valeur ajoutée . Ce rapport détaille les implications pratiques pour ces entreprises du changement de mode de détermination du taux applicable au e-commerce et envisage les éventuelles mesures de compensation vis-à-vis de ce secteur ».

II - La position de votre commission

Votre rapporteur partage pleinement les préoccupations des auteurs de l'amendement quant aux conséquences sur les petites entreprises du changement de calcul de la TVA sur les services en ligne.

Il convient toutefois de rappeler que ce changement, s'il entraîne certaines complications, constitue un progrès majeur dans la lutte contre l'optimisation fiscale des entreprises et contre la concurrence fiscale agressive au sein de l'Union européenne . L'application du taux en vigueur dans le pays du consommateur permet ainsi de mettre fin à la déconnection entre l'obligation fiscale d'une part et la réalité économique d'autre part, qui prévalait jusqu'alors.

Il semble par ailleurs difficile d'envisager des mesures de compensation, de portée générale ou sectorielle , consécutives à un changement des règles de calcul de la TVA.

En tout état de cause, et en cohérence avec sa position générale sur les demandes de rapport adressées au Gouvernement, votre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 35 bis (art. 199 terdecies-0 A et 885-0 V bis du code général des impôts) - Réduction de dix à sept ans du délai pendant lequel les remboursements d'apports donnent lieu à reprise de l'avantage fiscal « ISF-PME » ou « Madelin »

Objet : cet article vise, pour les réductions d'impôt dites « Madelin » et « ISF-PME », à ramener de dix à sept ans le délai au cours duquel les remboursements d'apports donnent lieu à reprise de l'avantage fiscal.

I - Le droit existant

Les réductions d'impôt sur le revenu dite « Madelin » et d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dite « ISF-PME » s'appliquent aux versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature, par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité de certaines petites et moyennes entreprises (PME).

Elles sont codifiées, respectivement, aux articles 199 terdecies-0 A et 885-0 V bis du code général des impôts.

D'après le rapport sur les Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2015, le coût pour l'État associé à ces avantages fiscaux s'élève à 92 millions d'euros pour le dispositif « Madelin » et à 468 millions d'euros pour la réduction d'impôt « ISF-PME ».

A. Les clauses anti-abus du dispositif « Madelin »

Le dispositif « Madelin »

Aux termes de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, la réduction d'impôt sur le revenu est égale à 18 % des versements effectués. Ces versements sont retenus dans la limite annuelle de 50 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 100 000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune.

Cet avantage fiscal fait partie de ceux dont le cumul ne peut aboutir à une réduction d'impôt supérieure à 10 000 euros. L'éventuel excédent peut être reporté sur l'impôt sur le revenu dû au titre des années suivantes jusqu'à la cinquième inclusivement.

Le bénéfice de l'avantage fiscal est subordonné au respect, par la société bénéficiaire de la souscription, des conditions suivantes :

- être une société non cotée ;

- employer moins de cinquante salariés et réaliser un chiffre d'affaires annuel ou un total de bilan inférieur à 10 millions d'euros au cours de l'exercice ;

- avoir été créée depuis moins de cinq ans ;

- avoir son siège social sur le sol européen ;

- être soumise à l'impôt sur les sociétés ;

- compter au moins deux salariés ;

- exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole à l'exclusion des activités procurant des revenus garantis en raison de l'existence d'un tarif réglementé de rachat de la production, des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier, des activités immobilières et de l'activité de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil ;

- satisfaire à la définition des petites et moyennes entreprises qui figure à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun : les PME, au sens communautaire, sont définies comme des entreprises dont l'effectif est strictement inférieur à 250 personnes et dont soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros, soit le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros ;

- être en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion et ne pas être qualifiable d'entreprise en difficulté au sens du droit européen.

Les investissements éligibles peuvent se faire au travers de holdings, si la société :

- vérifie les conditions ci-dessus, sauf celles liées à l'activité et au fait de compter au moins deux salariés ;

- a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés mentionnées ci-dessus ;

- a exclusivement pour mandataires sociaux des personnes physiques ;

- respecte les obligations de communication à l'égard de ses actionnaires.

Source : commission spéciale

1. L'exclusion des garanties en capital

La société bénéficiaire des versements ne peut accorder aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en contrepartie de leurs souscriptions.

2. L'exclusion des souscriptions donnant lieu à des contreparties

La société bénéficiaire des versements ne peut offrir de contrepartie à la souscription autre que les seuls droits résultant de la qualité d'actionnaire ou d'associé.

3. L'exclusion des sociétés à raison de la nature de leurs actifs

Afin de ne pas favoriser l'investissement dans des sociétés ne présentant que peu de risques, la société bénéficiaire des versements ne peut pas avoir un actif constitué de façon prépondérante de métaux précieux, d'oeuvres d'art, d'objets de collection, d'antiquités, de chevaux de course ou de concours ou, sauf si l'objet même de son activité consiste en leur consommation ou en leur vente au détail, de vins ou d'alcools.

4. Les conditions relatives à la détention des titres

Lorsque tout ou partie des actions ou parts ayant donné lieu à la réduction est cédé avant le 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription, il est pratiqué au titre de l'année de la cession une reprise des réductions d'impôt obtenues.

Les mêmes dispositions s'appliquent en cas de remboursement des apports aux souscripteurs avant le 31 décembre de la dixième année suivant celle de la souscription.

Une exception existe néanmoins pour les parts investies dans des entreprises solidaires mentionnées à l'article L. 3332-17-1 du code du travail et agréées en vertu du même article ainsi que dans des établissements de crédit ou des sociétés de financement dont 80 % de l'ensemble des prêts et des investissements sont effectués au sein de ces entreprises, pour lesquelles le remboursement doit intervenir après le 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription.

B. Les clauses anti-abus du dispositif « ISF-PME »

Le dispositif « ISF-PME »

Aux termes de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, la réduction d'ISF s'élève à 50 % des versements effectués par le contribuable, l'avantage fiscal ne pouvant être supérieur à 45 000 euros.

Dans l'ensemble, le bénéfice de l'avantage fiscal est subordonné au respect, par la société bénéficiaire de la souscription, des mêmes conditions que pour le dispositif « Madelin », à l'exception des trois conditions suivantes :

- employer moins de cinquante salariés et réaliser un chiffre d'affaires annuel ou un total de bilan inférieur à 10 millions d'euros au cours de l'exercice ;

- avoir été créée depuis moins de cinq ans ;

- être en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion et ne pas être qualifiable d'entreprise en difficulté au sens du droit européen.

Les conditions d'investissement au travers de holdings sont les mêmes que pour le dispositif « Madelin ».

Source : commission spéciale du Sénat

Les clauses anti-abus sont les mêmes que pour le dispositif « Madelin », à l'exception des conditions relatives à la détention des titres.

En effet, lorsque tout ou partie des actions ou parts ayant donné lieu à la réduction est cédé avant le 31 décembre de la cinquième année, aucune reprise des réductions d'impôt obtenues n'est effectuée en cas :

- de fusion ou de scission, si les titres reçus en contrepartie sont conservés jusqu'au même terme ;

- d'annulation des titres pour cause de pertes ;

- de cession stipulée obligatoire par un pacte d'associés ou d'actionnaires, si le prix de vente des titres cédés est intégralement réinvesti sous douze mois dans des sociétés éligibles ;

- d'offre publique d'échange de titres, si les titres reçus sont ceux d'une société répondant aux conditions d'éligibilité des sociétés cibles du dispositif.

Pour le dispositif « Madelin », le bulletin officiel des finances publiques (BoFIP) reprend toutefois une grande partie de ces clauses anti-abus . Ainsi, les opérations d'offre publique d'échange, de fusion ou de scission sont considérées comme des opérations intercalaires sans incidence sur les réductions d'impôt obtenues. L'obligation de conservation est transférée sur les titres reçus en échange. Par ailleurs, en cas d'annulation pour cause de pertes, le BoFIP précise que la réduction d'impôt sur le revenu n'est pas remise en cause dès lors qu'il n'y a pas eu de remboursement d'apports aux associés ou actionnaires. En revanche, le BoFIP ne reprend pas explicitement l'exception prévue en cas de cession stipulée obligatoire par un pacte d'associés ou d'actionnaires, bien qu'elle soit appliquée dans la pratique.

II - Le dispositif proposé

Le présent article, introduit en commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés Richard Ferrand, rapporteur général, et Christophe Castaner, rapporteur thématique, avec l'avis favorable du Gouvernement, propose de revenir partiellement sur une des clauses anti-abus commune aux deux dispositifs.

Ainsi, le délai pendant lequel les remboursements d'apports donnent lieu à reprise de l'avantage fiscal serait réduit de dix à sept ans.

III - La position de votre commission

Cet assouplissement des conditions relatives à la détention des titres des deux dispositifs apparaît légitime.

Les risques d'optimisation sont limités par la nécessité de conserver les titres pendant cinq ans et par l'obligation de réemploi en cas de sortie avant cette échéance. Ainsi, l'interdiction de remboursement des apports avant dix ans représente une contrainte supplémentaire qui ne semble pas justifiée.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 ter A (art. 199 terdecies-0 A et 885-0 V bis du code général des impôts) - Aménagement des conditions relatives à la détention des titres pour les dispositifs « ISF-PME » et « Madelin »

Objet : cet article prévoit, pour les réductions d'impôt dites « Madelin » et « ISF-PME », un aménagement des conditions relatives à la détention des titres.

I - Le dispositif proposé

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Bernadette Laclais, avec l'avis défavorable du Gouvernement et de la commission spéciale, propose un aménagement des conditions relatives à la détention des titres pour les dispositifs « ISF-PME » et « Madelin ».

A. Deux aménagements spécifiques au dispositif « Madelin »

1. Un durcissement de la condition de non-remboursement des apports pour les sociétés de financement investissant principalement au sein de certaines entreprises solidaires

Le présent article propose d'augmenter de cinq à dix ans le délai pendant lequel les remboursements d'apports pour les parts investies dans des sociétés de financement dont 80 % de l'ensemble des prêts et des investissements sont effectués en faveur d'entreprises solidaires donnent lieu à reprise de l'avantage fiscal « Madelin ».

Le délai de cinq ans reste inchangé pour les parts investies directement dans ces entreprises solidaires ainsi que dans les établissements de crédit dont 80 % de l'ensemble des prêts et des investissements sont effectués en faveur de ces entreprises solidaires.

2. Une harmonisation partielle des exceptions à la condition de conservation pour une durée minimale de cinq ans

Le présent article propose d'inscrire au IV de l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts les exceptions à la condition de conservation pour une durée minimale de cinq ans actuellement prévues par le BoFIP en cas de fusion, de scission et d'annulation des titres pour cause de pertes. Les opérations seraient considérées comme des opérations intercalaires sans incidence sur les réductions d'impôt obtenues. L'exception prévue au troisième alinéa du IV de l'article en cas de liquidation judiciaire de la société est également rappelée.

Si ces exceptions sont déjà inscrites dans la loi pour le dispositif « ISF-PME », l'harmonisation des clauses anti-abus des deux dispositifs n'est toutefois que partielle . Pour le dispositif « Madelin », aucune exception à la condition de détention ne serait prévue au IV de l'article 199 terdecies -0 A en cas :

- d'offre publique d'échange de titres (cette exception est toutefois prévue explicitement par le BoFIP) ;

- de cession stipulée obligatoire par un pacte d'associés ou d'actionnaires.

B. Un nouvel assouplissement de la condition de conservation pour les deux dispositifs « Madelin » et « ISF-PME », sous réserve d'un réinvestissement

Le troisième alinéa du I. 1° b) et le I. 2° du présent article proposent d' autoriser pour les deux dispositifs le maintien de l'avantage fiscal en cas de cession avant cinq ans des titres souscrits à l'origine dans une société éligible créée depuis moins de sept ans, sous réserve du réinvestissement intégral dans un délai de douze mois au sein de sociétés éligibles.

Aux termes de l'article, la condition de réinvestissement porte sur :

- le prix de vente des titres cédés, si « le prix de cession est inférieur au montant initialement investi, net d'impôt et de taxes, des titres cédés » ;

- le montant initialement investi, le cas échéant.

Les titres ainsi souscrits doivent être conservés jusqu'au même terme .

C. Un gage de la perte de recettes pour l'État

Les dispositions du présent article incluent un gage portant sur la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, que le Gouvernement, défavorable à cette initiative, n'a pas levé.

II - La position de votre commission

Il ne semble pas opportun de soutenir la nouvelle exception à la condition de détention de cinq ans introduite par le présent article, dans un souci de stabilisation de l'actionnariat des PME. Le Gouvernement a par ailleurs indiqué que cette condition de détention constitue un élément décisif dans la négociation en cours avec la Commission européenne sur la refonte du dispositif « ISF PME », qui doit permettre de le rendre compatible avec les nouvelles règles européennes sur les aides d'État.

L'alignement des exceptions à la condition de détention prévues pour le dispositif « Madelin » sur celles actuellement prévues pour le dispositif « ISF-PME » pose également problème . L'harmonisation proposée n'est que partielle et la rédaction de l'Assemblée nationale paraît complexe. Par ailleurs, le durcissement de la condition de non-remboursement des apports pour les sociétés de financement investissant principalement dans certaines entreprises solidaires, qui s'appliquerait uniquement au dispositif « Madelin », semble contradictoire avec cet objectif.

En conséquence, votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur visant à :

- revenir sur la création d'une exception à la condition de détention de cinq ans en cas de réinvestissement ;

- revenir sur le durcissement de la condition de non-remboursement des apports pour les sociétés de financement investissant principalement au sein de certaines entreprises solidaires ;

- procéder à un alignement complet des exceptions à la condition de détention de cinq ans prévues par la loi pour le dispositif « Madelin » sur celles actuellement prévues pour le dispositif « ISF-PME » : dans un souci de lisibilité et de sécurité juridique, il ne semble pas satisfaisant que ces exceptions soient prévues par le BoFIP pour le dispositif « Madelin » et par la loi pour le dispositif « ISF-PME ».

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 35 ter B (nouveau) (art. 885-0 V bis du code général des impôts) - Doublement du plafonnement du dispositif « ISF-PME »

Objet : cet article vise à doubler le plafond de la réduction d'impôt « ISF-PME » en contrepartie du ciblage plus restrictif qui pourrait être exigé par la Commission européenne dans le cadre de la négociation en cours sur la refonte de ce dispositif.

I - Le droit existant

Le dispositif ISF-PME fait actuellement l'objet d'une négociation entre le Gouvernement et la Commission européenne afin de le rendre compatible avec le nouveau règlement européen déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur 250 ( * ) . La principale difficulté résulte du fait que le nouveau régime prévoit un ciblage des sociétés éligibles plus restrictif que dans le dispositif « ISF-PME » en vigueur. Sont désormais admissibles à ce type de dispositif les PME non cotées qui remplissent au moins une des conditions suivantes :

- elles n'exercent leurs activités sur aucun marché ;

- elles exercent leurs activités sur un marché, quel qu'il soit, depuis moins de sept ans après leur première vente commerciale ;

- elles ont besoin d'un investissement initial en faveur du financement des risques qui, sur la base d'un plan d'entreprise établi en vue d'intégrer un nouveau marché géographique ou de produits, est supérieur à 50 % de leur chiffre d'affaires annuel moyen des cinq années précédentes.

Il est particulièrement surprenant que le Gouvernement ne se soit pas encore saisi du problème , alors même que le nouveau règlement est déjà entré en vigueur et que cela fait plus de deux ans que ces modifications sont discutées. À titre de comparaison, le régime britannique dit « Enterprise Capital Fund », qui permet à des fonds bénéficiant d'un soutien public d'investir dans de petites et moyennes entreprises affectées par une défaillance du marché, a été refondu dès le début de l'année 2014 251 ( * ) .

II - Le texte adopté par votre commission

Votre rapporteur s'inquiète des conséquences que pourrait avoir ce nouveau ciblage sur l'investissement dans les petites et moyennes entreprises. En conséquence, votre commission a adopté l' amendement de votre rapporteur visant à encourager le Gouvernement, en contrepartie du ciblage plus restrictif qui pourrait être exigé par la Commission européenne dans le cadre de la négociation en cours, à doubler le plafond du dispositif « ISF-PME », qui est actuellement de 45 000 euros . Pour cette raison, le présent article s'applique uniquement à compter du 1 er janvier 2016.

Par ailleurs, cet aménagement permettrait de rapprocher progressivement le cadre fiscal français des dispositions applicables dans les autres pays d'Europe continentale. À titre de comparaison, le montant du nouveau plafond (90 000 euros) resterait plus de dix fois inférieur au plafond anglais du dispositif « Enterprise Investment Scheme » (un million de livres).

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 35 ter C (nouveau) (art. 200-0 A du code général des impôts) - Éligibilité du dispositif « Madelin » au plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 euros

Objet : cet article vise à placer la réduction « Madelin » sous le plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 euros plutôt que sous celui de 10 000 euros.

I - Le droit existant

Aux termes de l'article 200-0 A du code général des impôts, le dispositif « Madelin » fait partie de ceux dont le cumul ne peut aboutir à une réduction d'impôt supérieure à 10 000 euros.

La réduction d'impôt sur le revenu dite « Madelin » est égale à 18 % des versements effectués, dans la limite annuelle de 50 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 100 000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune. Pour un couple, le dispositif « Madelin » permet donc en théorie une réduction d'impôt d'un montant maximum de 18 000 euros.

Or, du fait du plafonnement des niches fiscales de 10 000 euros, pour les sommes investies au-delà de 55 500 euros (et non 100 000 euros), le foyer fiscal ne peut donc plus bénéficier de la réduction d'impôt pour l'année correspondant aux versements.

II - Le texte adopté par votre commission

Votre commission a adopté l' amendement de votre rapporteur visant à renforcer les fonds propres des petites et moyennes entreprises en assouplissant le dispositif « Madelin », qui est actuellement pénalisé par cette incohérence.

Ainsi, le présent article propose de placer la réduction d'impôt dite « Madelin » sous un plafonnement global des niches fiscales de 18 000 euros (au lieu de 10 000 euros), afin de permettre réellement aux foyers fiscaux d'investir jusqu'à 100 000 euros dans le cadre de ce dispositif.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 35 quater (art. L. 214-154, L. 214-162-1 à L. 214-162-14 [nouveaux] du code monétaire et financier, art. L. 651-2 du code de la sécurité sociale, art. 8 bis, 38, 39 terdecies, 125-0 A, 150-0 A, 163 quinquies B, 209-0 A, 239 bis AB, 242 quinquies, 730 quater, 832, 1655 sexies A [nouveau], 1655 sexies B[nouveau], 1763 B et 1763 C du code général des impôts) - Création de la société de libre partenariat

Objet : cet article, introduit en séance publique par l'Assemblée nationale, vise à créer et fixer une nouvelle forme de fonds professionnel spécialisé, la société de libre partenariat.

I - Le dispositif proposé

A. Le nouveau paysage de la gestion d'actif issu de la directive du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs

La directive 2011/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs (directive dite « AIFM » 252 ( * ) ), transposée dans l'ordre juridique français par l'ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013 modifiant le cadre juridique de la gestion d'actifs, avait non seulement pour objectif la prévention des risques systémiques et la protection de l'épargnant mais également une meilleure intégration des marchés financiers européens.

Elle a permis aux gestionnaires européens de fonds européens de commercialiser plus librement leurs fonds dans l'Union européenne grâce à un système de « passeports », donnant ainsi naissance à un véritable marché unique européen des fonds d'investissement alternatifs (FIA).

Dans cette perspective, l'ordonnance précitée du 25 juillet 2013 comportait des mesures destinées à améliorer l'attractivité de la Place financière de Paris, pour les investisseurs institutionnels français mais également pour les investisseurs étrangers susceptibles d'investir dans des fonds français, en améliorant la lisibilité du cadre juridique français et en procédant à une rationalisation de la gamme des véhicules d'investissement régulés de droit français.

Les organismes de placement collectif (OPC), dont le périmètre est inchangé, se répartissent désormais en deux catégories :

- les fonds conformes à la directive OPCVM IV, désormais seuls à être qualifiés d'« OPCVM » ;

- les FIA.

Au sein de ces FIA sont distingués :

- les fonds ouverts aux investisseurs non professionnels ;

- les fonds ouverts aux investisseurs professionnels, notamment les fonds professionnels spécialisés et les fonds professionnels de capital investissement (FPCI).

S'agissant spécifiquement des fonds professionnels spécialisés, cette catégorie est issue du regroupement :

- des anciens organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) contractuels, c'est-à-dire les sociétés d'investissement en capital variable (SICAV) contractuels et les fonds commun de placement (FCP) contractuels ;

- des anciens fonds communs de placement à risque (FCPR) contractuels.

Désormais, aux termes de l'article L. 214-154 du code monétaire et financier, un fonds professionnel spécialisé prend la forme d'une SICAV 253 ( * ) ou d'un FCP 254 ( * ) . Selon le cas, sa dénomination est alors respectivement celle de « société d'investissement professionnelle spécialisée » ou de « fonds d'investissement professionnel spécialisé ».

Face au développement des Specialized Investment Fund (SIF) luxembourgeois ou des Qualifying Investor Fund (QIF) irlandais, ces fonds professionnels spécialisés ont vocation à offrir aux investisseurs professionnels un véhicule de droit français régulé, disposant d'une très grande flexibilité sur la nature des actifs éligibles, sur les ratios d'investissement comme sur la gestion du passif.

De fait, les fonds d'investissement spécialisés sont réservés aux « clients professionnels » mentionnés à l'article L. 214-155 du code monétaire et financier.

La notion de « client professionnel »

À la suite de la révision de la directive « Prospectus » réalisée par la directive 2010/73/UE du 24 novembre 2010, la notion d'investisseur qualifié a été remplacée par celle de client professionnel.

L'article L. 214-155 du code monétaire et financier définit le client professionnel comme celui qui possède l'expérience, les connaissances et la compétence nécessaires pour prendre ses propres décisions d'investissement et évaluer correctement les risques encourus.

Si elle ne fait pas déjà partie des autres clients professionnels ou contreparties éligibles de plein droit listés aux articles D. 533-11 et D. 533-13 du code monétaire et financier, une personne morale doit, pour pouvoir prétendre à la qualité de client professionnel, remplir au moins deux des trois critères mentionnés à l'article D. 533-11 du code monétaire et financier pour être considérée comme un client professionnel :

- total du bilan égal ou supérieur à 20 millions d'euros ;

- chiffre d'affaires net ou recettes nettes égaux ou supérieurs à 40 millions d'euros ;

- capitaux propres égaux ou supérieurs à 2 millions d'euros.

Le client non professionnel peut renoncer à une partie de la protection que lui offre ce statut en demandant à être traité comme un client professionnel sur option dans les conditions de l'article 314-6 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Le prestataire de services d'investissement effectue alors une évaluation visant, entre autres, à s'assurer que la personne remplit au moins deux des trois critères suivants :

- la détention d'un portefeuille d'instruments financiers d'une valeur supérieure à 500 000 euros ;

- la réalisation d'opérations, chacune d'une taille significative, sur des instruments financiers, à raison d'au moins dix par trimestre en moyenne sur les quatre trimestres précédents ;

- l'occupation pendant au moins un an, dans le secteur financier, d'une position professionnelle exigeant une connaissance de l'investissement en instruments financiers.

Source : commission spéciale du Sénat

Par ailleurs, certains véhicules, qui ne constituent pas des OPC et n'étaient jusqu'à alors pas régulés, sont, depuis la transposition de la directive AIFM, placés sous le contrôle de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Ils entrent désormais dans la catégorie des « Autres FIA », créée dans le code monétaire et financier.

Malgré cette rationalisation, la gamme des fonds d'investissement français n'intègre toujours pas de véhicule équivalent aux limited partnerships anglo-saxons, qui réunissent plusieurs associés, certains dont la responsabilité est pleine à l'égard des obligations de la structure, d'autres dont la responsabilité est limitée à leurs apports. Les limited partnerships sont généralement considérés comme transparents sur le plan fiscal, les revenus de la société n'étant imposés qu'entre les mains des associés pour la part qui leur revient.

Au contraire, d'autres pays d'Europe continentale ont profité de la transposition de la directive AIFM pour créer de tels véhicules afin d'attirer les investisseurs anglo-saxons et nordiques familiers de ce type de montage et ainsi profiter de la concurrence accrue sur le marché du capital-investissement.

En particulier, les sociétés en commandite spéciales (SCSp) instituées par le Luxembourg en 2013 255 ( * ) ont connu un succès important, plus 290 d'entre elles ayant été créées dans l'année qui a suivi, au détriment des FPCI français.

B. La société de libre partenariat, nouvelle forme de fonds professionnel spécialisé placé sous le régime de la société en commandite simple

Le présent article a été introduit par la commission spéciale de l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Arnaud Leroy et avec l'avis favorable du Gouvernement.

Le dispositif proposé tend à modifier l'article L. 214-154 du code monétaire et financier afin d'ajouter la société en commandite simple aux formes que peut prendre un fonds professionnel spécialisé, qui serait alors dénommé « société de libre partenariat » (SLP).

Les modalités de fonctionnement de ce type de société sont en effet proches de celles d'un limited partnership .

Il s'agirait ainsi d'une société de personnes, de nature commerciale, composée de deux groupes d'associés :

- les commandités, commerçants, personnellement et solidairement responsables de tout le passif social ;

- les commanditaires, qui ne sont pas commerçants et ne sont responsables des dettes sociales que dans la limite de leurs apports. Leur statut est similaire à celui des associés d'une société à responsabilité limitée (SARL). Ils ont un droit d'information mais ne peuvent accomplir aucun acte de gestion externe même avec un mandat.

La SLP se distinguerait cependant sur certains points afin de tenir compte de sa nature de véhicule d'investissement réglementé.

Ainsi, la gestion de la SLP pourrait être déléguée par le gérant à une société de gestion de portefeuille ou à un gestionnaire agréé conformément à la directive AIFM.

Alors que l'article L. 222-6 du code du commerce prévoit que l'associé commanditaire est tenu, solidairement avec les associés commandités, des dettes et engagements de la société résultant d'éventuels actes de gestion, qui lui sont par principe prohibés, le gérant ou la société de gestion d'une SLP pourrait détenir des parts de commanditaire sans que son implication dans la gestion de la société soit de nature à remettre en cause sa responsabilité limitée.

Parmi les autres spécificités qui distingue le régime de la SLP de celui de droit commun des sociétés en commandite simple, figure par exemple une dérogation au principe d'unicité du patrimoine de la société et aux dispositions de l'article 2285 du code civil : le dispositif proposé prévoit en effet que la SLP peut comporter un ou plusieurs compartiments si ses statuts le prévoient et que, sauf stipulation contraire de ses statuts, les actifs d'un compartiment déterminé ne répondent que des dettes, engagements et obligations et ne bénéficient que des créances qui concernent ce compartiment.

Le dispositif proposé autorise en outre une large liberté contractuelle aux SLP.

Par dérogation aux dispositions générales du code monétaire et financier, chaque SLP fixerait ainsi dans ses statuts :

- sa politique d'investissement et donc les biens éligibles à son actif. La SLP pourrait ainsi investir dans tout type de bien respectant les critères fixés par l'article L 214-154 du code monétaire et financier 256 ( * ) . Le dispositif proposé prévoit expressément que l'actif de la société « peut comprendre des avances en compte courant consenties, pour la durée de l'investissement réalisé, à des sociétés dans lesquelles la société de libre partenariat détient une participation », ainsi que « des droits représentatifs d'un placement financier émis sur le fondement du droit français ou étranger dans une entité ».

- les modalités d'émission et de libération des parts et titres ;

- la périodicité minimale et les modalités d'établissement de la valeur liquidative ;

- les conditions d'allocation du boni de liquidation ;

- la durée des exercices comptables, qui ne peut excéder douze mois, sauf pour le premier exercice qui peut s'étendre sur dix-huit mois ;

- les modalités de répartition de tout ou partie des actifs, y compris le remboursement d'apports aux associés ainsi que les conditions dans lesquelles la SLP peut en demander la restitution totale ou partielle ;

- les conditions et modalités de modification des statuts.

Le dispositif proposé permettrait en outre aux FIA professionnels déclarés de se transformer sans dissolution en société de libre partenariat dans les conditions définies par leurs statuts ou leur règlement. Les porteurs de parts ou actionnaires existants deviendraient associés commanditaires de la SLP.

C. Le régime fiscal des SLP

1. Un régime de « transparence » fiscale

En l'état actuel du droit, les sociétés de personnes mentionnées à l'article 8 du code général des impôts suivent un régime dit de « translucidité » fiscale, qui préserve la personnalité fiscale de l'entité considérée, l'impôt étant acquitté pour le compte de cette entité par chacun des associés sur la quote-part du résultat correspondant à ses droits. Cependant, dans le cas particulier des sociétés en commandite simple, si les associés commandités sont bien personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits, l'article 206 du code général des impôts prévoit que la part de bénéfices correspondant aux droits des commanditaires est soumise à l'impôt sur les sociétés.

Le régime normal des sociétés en commandite simple, s'il était appliqué aux SLP, ne pourraient assurer l'absence de frottement fiscal entre les actifs du fonds et les investisseurs, ceux-ci étant soumis à une imposition moins favorable que s'ils détenaient directement ces actifs.

La nécessité de garantir une neutralité fiscale aux investisseurs a d'ailleurs conduit à ce que les bénéfices réalisés par un OPC ne soit imposés qu'entre les mains des porteurs de parts ou d'actions, au moment de leur distribution 257 ( * ) :

- les FCP, qui ne possèdent pas la personnalité morale, échappent par nature à l'impôt sur les sociétés ;

- les SICAV sont quant à elles explicitement exonérées d'impôt sur les sociétés par le 1° bis A de l'article 208 du CGI s'agissant « des bénéfices réalisés dans le cadre de leur objet légal ».

Pour autant, leur « transparence fiscale », largement assurée dans les faits en droit interne, n'est pas explicitement affirmée et n'est ainsi pas reconnue par certains États, notamment l'Allemagne qui semble priver les souscripteurs de fonds français, en particulier de fonds professionnels de capital investissement, du bénéfice d'une fiscalité favorable sur les plus-values. Les limited partnerships bénéficient quant à eux généralement d'un régime de transparence fiscale de nature à répondre à la demande de neutralité fiscale des investisseurs.

Pour garantir cette neutralité aux investisseurs résidents comme non-résidents, le dispositif proposé tend à assurer la transparence fiscale des sociétés de libre partenariat en insérant dans le code général des impôts un article 1655 sexies qui prévoit que « les sociétés de libre partenariat régies par l'article L. 214-154 du code monétaire et financier sont réputées ne pas avoir de personnalité distincte de celles de leurs membres pour l'application des impôts directs, des droits d'enregistrement ainsi que des taxes assimilées ». Les associés seraient ainsi « personnellement soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, suivant le cas, pour la part des revenus et gains sociaux correspondant à leurs droits dans la société ».

Ces dispositions reprennent celles de l'article 1655 ter du CGI relatives aux sociétés immobilières de copropriété qui constituent aujourd'hui l'unique exemple en droit français d'entités véritablement et explicitement transparentes sur le plan fiscal.

Ce régime devrait éviter aux investisseurs étrangers le risque de subir une double imposition et de voir l'administration fiscale de leur pays de résidence remettre en cause la nature des revenus encaissés via une SLP.

S'agissant des investisseurs français, le régime de transparence implique une imposition des revenus et plus-values encaissés par la SLP, qu'ils soient ou non distribués, et non des écarts de la valeur liquidative des parts ou actions de l'OPC comme c'est le cas pour les véhicules existants.

2. La possibilité pour les investisseurs résidents de France de bénéficier des avantages fiscaux des fonds professionnels de capital investissement

Le dispositif proposé introduit au sein du code général des impôts un article 1655 sexies B tendant à ce que la SLP offre la possibilité aux investisseurs résidents de France de bénéficier du régime fiscal des fonds professionnels de capital investissement (FCPI), à la condition que la SLP s'engage à respecter les quotas d'investissements prévus pour ces fonds (qui sont dans ce cas dits « FPCI fiscaux ») ayant pour objet d'investir principalement dans des sociétés européennes non cotées.

La SLP permettrait aux investisseurs résidents français de bénéficier des régimes de faveur applicables aux FPCIs : pour les personnes physiques, le régime d'exonération d'impôt sur le revenu, sous réserve de prendre un engagement de conservation des parts pendant cinq ans, et pour les personnes morales, le régime des plus- values à long terme, sous réserve de conserver les parts au moins cinq ans.

Pour cela, la SLP devrait ainsi investir au moins 50 % des sommes appelées auprès de ses investisseurs dans des titres de capital ou donnant accès au capital, de sociétés non cotées, localisées dans l'Espace économique européen et exerçant une activité industrielle, commerciale, ou artisanale.

Le dispositif proposé procède aux coordinations nécessaires afin que les dispositions formant ce régime fiscal et prévoyant les sanctions en cas de non-respect du quota d'investissement visent les SLP.

II - La position de votre commission

La création des SLP vient combler un véritable manque dans la gamme des fonds d'investissement français, qui détournaient d'importants investisseurs institutionnels étrangers vers des véhicules gérés et régulés dans d'autres pays de la zone euro, en particulier le Luxembourg.

L'attractivité des fonds français présente un double enjeu : la gestion d'actifs constitue, d'une part, un secteur d'activité en lui-même, source d'emplois qualifiés, et, d'autre part, l'un des canaux de financement de l'économie. Or, en matière de capital investissement, secteur dont relèvent les SLP, des fonds gérés en France sont bien plus susceptible de contribuer au financement de PME et ETI française que des fonds étrangers.

Votre rapporteur approuve donc pleinement le dispositif proposé qui a le mérite supplémentaire de ne pas créer une nouvelle niche fiscale, mais de fonder l'attractivité de ce nouveau véhicule d'investissement sur un mode de gouvernance adaptés à la demande d'une partie de la clientèle institutionnelle internationale.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 quinquies (art. L. 214-164 du code monétaire et financier) - Renforcement de la présence des salariés au sein du conseil de surveillance des FCPE

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, tend à porter de 50 % à deux tiers la représentation minimale des salariés au sein du conseil de surveillance des fonds commun de placement d'entreprise.

I - Le dispositif proposé

Contrairement à un fonds commun de placement (FCP) classique, les porteurs de parts d'un FCPE sont représentés au sein d'un organe de supervision, le conseil de surveillance. Ce conseil de surveillance est chargé notamment de l'examen de la gestion financière, administrative et comptable du fonds. Il peut pour cela demander à entendre la société de gestion, le dépositaire et le commissaire aux comptes du fonds.

En outre, le conseil de surveillance décide des fusions, scissions ou liquidations et des modifications du règlement prévues par ce dernier.

Il peut par ailleurs exercer les droits de vote attachés aux titres détenus par le FCPE et décider de l'apport de ces titres dans le cas d'opérations telles que des offres publiques d'achat ou d'échange.

L'article L. 214-124 du code monétaire et financier prévoit que le conseil de surveillance d'un fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) est composé de salariés représentant les porteurs de parts, eux-mêmes porteurs de parts et, pour moitié au plus, de représentants de l'entreprise.

Le règlement du fonds détermine les modalités de désignation des représentants des porteurs de parts soit par élection, soit par choix opéré par le comité d'entreprise ou par les organisations syndicales représentatives.

Le présent article, introduit par la commission spéciale à l'initiative des rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement, vise à renforcer la présence des salariés dans ce conseil de surveillance, qui passerait de 50 % à deux tiers au minimum. Le ratio minimal des représentants de l'entreprise serait ainsi abaissé à un tiers.

Un amendement adopté en séance publique à l'initiative des rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement a précisé que les dispositions de cet article seront applicables au renouvellement du conseil de surveillance suivant d'au moins six mois la publication de la loi.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur estime que les conseils de surveillance de FCPE, majoritairement paritaires, fonctionnent de manière satisfaisante et que la modification de leur composition emporterait plus de difficultés qu'elle ne viendrait en résoudre, en particulier dans les sociétés non cotées qui assurent la liquidité des titres détenus par les salariés.

Aujourd'hui, la parité des conseils de surveillance donne les garanties nécessaires au dirigeant d'entreprise pour qu'il développe en toute confiance l'actionnariat salarié au sein de sa société.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 35 sexies (art. L. 214-164 du code monétaire et financier) - Extension des conditions que les sociétés de gestion des fonds communs de placement d'entreprise doivent respecter dans l'achat ou la vente des titres ainsi que dans l'exercice des droits qui leur sont attachés

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, tend à permettre au règlement d'un fonds commun de placement d'entreprise d'imposer à la société de gestion de prendre en compte le type d'entreprise financée dans ses décisions d'investissement.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 214-164 du code monétaire et financier dispose que le règlement d'un fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) « précise, le cas échéant, les considérations sociales, environnementales ou éthiques que doit respecter la société de gestion dans l'achat ou la vente des titres ainsi que dans l'exercice des droits qui leur sont attachés. Le rapport annuel du fonds rend compte de leur application, dans des conditions définies par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers. »

Le présent article, introduit par la commission spéciale à l'initiative de ses rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement, tend à ajouter aux « considérations sociales, environnementales ou éthique » dont le règlement d'un FCPE peut imposer le respect à la société de gestion celles « tenant aux types d'entreprises financées ».

Selon les auteurs de l'amendement, les règlements des fonds d'épargne salariale pourraient ainsi orienter les fonds investis vers les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaires (ETI).

II - La position de votre commission

Le dispositif proposé est particulièrement imprécis. Son intention est de plus satisfaite par le droit existant. En effet, le règlement d'un fonds peut déjà définir une politique d'investissement prenant en compte la taille des entreprises financées.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 35 septies (art. L. 214-165 du code monétaire et financier) - Distribution facultative de dividendes dans les fonds communs de placement d'entreprise

Objet : cet article, introduit en commission spéciale par l'Assemblée nationale, vise à mettre fin à l'obligation, pour les fonds communs de placement d'entreprise dits « d'actionnariat salarié », de prévoir la distribution des dividendes attachés aux actions du portefeuille du fonds.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 214-165 du code monétaire et financier régit les fonds commun de placement d'entreprise dits « d'actionnariat salarié », dont plus du tiers de l'actif est composé de titres émis par l'entreprise. Il dispose notamment que « le règlement du fonds prévoit que les dividendes et les coupons attachés aux titres compris à l'actif du fonds sont distribués aux porteurs de parts, à leur demande expresse, suivant des modalités qu'il détermine ». Cette disposition permet aux salariés de percevoir immédiatement le produit des actifs investis dans un FCPE, alors même que les sommes issus des versements réalisés sur ce fonds restent indisponibles.

Cette obligation a été instaurée par la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social. Antérieurement, les salariés actionnaires doivent attendre la fin de la période d'indisponibilité des fonds pour percevoir les sommes correspondant aux dividendes versés.

Il s'agissait, selon notre collègue député Patrick Ollier, alors rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économique, à l'initiative duquel cette disposition a été introduite par l'Assemblée nationale, de « renforcer la perception par les salariés du lien entre leur travail et le résultat de l'entreprise ».

Le présent article, introduit par la commission spéciale à l'initiative des rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement, vise à revenir sur cette obligation.

II - Les propositions de votre commission

Notre collègue Isabelle Debré, dans son rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, indiquait, au sujet de l'obligation de distribution des dividendes, être « favorable à cette mesure d'assouplissement qui donne plus de liberté aux salariés détenteurs de parts de FCPE » même si « elle n'en sous-estim [ait] pas les coûts de gestion ».

Cette réserve s'est trouvée confirmée dans le rapport du Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (COPEISAS) du 26 novembre 2014. Celui-ci souligne en effet que l'obligation de distribution des dividendes est « source de contraintes logistiques fortes pour des sommes souvent très minimes par actionnaire ».

De fait, le dispositif proposé correspond à la proposition n° 30 du COPIESAS.

Il reviendrait désormais au règlement du FCPE d'indiquer si les dividendes sont distribués ou capitalisés dans le fonds.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 octies (art. L. 135-3 et section 2 du chapitre VII du code de la sécurité sociale) - Suppression de la contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectif

Objet : cet article, inséré par l'Assemblée nationale, supprime à compter du 1 er janvier 2016 la contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectif (Perco).

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Instauré par la loi du 22 juillet 1993 258 ( * ) , le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est un établissement public à caractère administratif dont la mission est de financer, au moyen de recettes qui lui sont affectées, divers avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale, servis par les régimes vieillesse de la sécurité sociale. Le FSV finance ainsi le minimum vieillesse, certains avantages familiaux et diverses cotisations afférentes à des périodes non travaillées.

L' article L. 135-3 du code de la sécurité sociale définit les ressources dont bénéficie le FSV.

Parmi celles-ci figure, au 10° sexies , le produit de la contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectif , instituée à l'article L. 137-5 du même code.

Acquittée par les employeurs et affectée exclusivement au FSV, cette contribution est égale à 8,2 % de la fraction de l'abondement de l'employeur au Perco qui excède la somme de 2 300 euros par an et par bénéficiaire 259 ( * ) .

L'article 35 octies du projet de loi supprime, à compter du 1 er janvier 2016, le 10 sexies de l'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale, et abroge en conséquence la section 2 du chapitre VII du titre III du livre I er de ce code, qui est consacrée à la contribution précitée et comprend uniquement l'article L. 137-5.

Aucune modification n'a été apportée à cet article en séance publique à l'Assemblée nationale.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur déplore la situation financière dégradée du Fonds de solidarité vieillesse. Malgré des ressources de 21,4 milliards d'euros en 2013, son déficit s'est élevé à 2,9 milliards d'euros. Il devrait malheureusement être du même ordre cette année selon les prévisions du Gouvernement retenues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Pour autant, votre rapporteur souscrit à l'analyse des auteurs de l'amendement à l'origine de cet article qui soulignent que la contribution sur les abondements des employeurs aux Perco génère des « effets désincitatifs » à leur développement, tout en procurant une « recette limitée » pour les finances publiques (7 millions d'euros par an). La suppression de cette contribution avait d'ailleurs été demandée pour les mêmes raisons par le Copiesas 260 ( * ) .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 nonies (art. L. 137-17 [nouveau] du code de la sécurité sociale et art. L. 214-164 du code monétaire et financier) - Abaissement du taux du forfait social relatif aux versements sur un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) orienté vers le financement de l'économie

Objet : cet article, adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, abaisse de 20 à 16 % les versements issus de la participation ou de l'intéressement sur un Perco, dont au moins 7 % des titres sont destinés au financement des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI).

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) est un dispositif qui permet au salarié de se constituer une épargne , accessible au moment de la retraite sous forme de rente ou, si l'accord collectif le prévoit, sous forme de capital.

L'article 35 nonies , qui instaure une nouvelle forme de Perco (parfois appelé « Perco plus »), comprend deux parties.

En premier lieu, il rétablit l'article L. 137-17 du code de la sécurité sociale, afin d'instaurer un taux de forfait social réduit (16 %) pour les Perco dont au moins 7 % des titres sont susceptibles d'être employés dans un plan d'épargne en actions (PEA) destiné au financement des PME.

Le forfait social

Instauré en 2009 et défini à l'article L. 137-15 du code de la sécurité sociale, le forfait social est une contribution patronale qui s'applique, sauf exceptions, aux éléments de rémunération ou de gain non soumis aux cotisations sociales mais assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG).

Depuis sa création, son taux a été relevé presque chaque année , passant de 2 % en 2009, à 4 % en 2010, 6 % en 2011, 8 % au 1 er janvier 2012 puis 20 % depuis le 1 er août de la même année.

Un taux réduit de 8 % s'applique néanmoins aux contributions des employeurs destinées au financement de la prévoyance complémentaire des salariés et aux sommes affectées à la participation dans les sociétés coopératives ouvrières de production.

Depuis 2009, le forfait social porte sur toutes les rémunérations issues de l'épargne salariale au sens large (régimes d'intéressement, de participation, plans d'épargne d'entreprise ou interentreprises, Perco) ainsi que sur certaines prestations de retraite supplémentaire. Dès 2010, son assiette n'a cessé d'être élargie, et concerne par exemple depuis 2012 la part des indemnités de rupture conventionnelle non assujettie à la CSG.

Le forfait social ne s'applique pas :

- aux sommes déjà frappées par la contribution patronale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions et sur les attributions d'actions gratuites ;

- aux indemnités de licenciement, de mise à la retraite ou de départ volontaire ;

- à la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés.

Le rendement du forfait social est passé de 300 millions d'euros en 2009 à 4,6 milliards d'euros en 2013 . Les deux tiers de l'augmentation observée entre ces deux dates s'expliquent par l'augmentation du taux, environ 30 % par l'élargissement de l'assiette, et les 5 % restants reflètent l'évolution spontanée de l'assiette.

La Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) reçoit l'essentiel (80 %) du produit du forfait social : 16 points quand le forfait est égal à 20 % ; 6,4 points quand son taux est réduit à 8 %. Le reliquat est versé au FSV.

Source : les Comptes de la sécurité sociale, septembre 2014

S'agissant du volet ressources, les sommes recueillies sur le Perco doivent provenir :

- soit de l'intéressement ;

- soit de la participation ;

- soit de diverses contributions énumérées au premier alinéa de l'article L. 3334-6 du code du travail 261 ( * ) .

S'agissant du volet emploi, les fonds du Perco doivent remplir deux conditions cumulatives, inscrites dans son règlement :

- ils doivent être affectés par défaut à un placement permettant de réduire progressivement les risques financiers 262 ( * ) ;

- ils doivent servir à l'acquisition de parts de fonds, dans des conditions fixées par décret, comportant au moins 7 % de titres susceptibles d'être employés dans un plan d'épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire 263 ( * ) .

En second lieu, le présent article assure une coordination juridique à l'article L. 214-164 du code monétaire et financier, qui définit les règles de fonctionnement des fonds communs de placement d'entreprise .

Le droit en vigueur prévoit que les fonds qui peuvent être souscrits dans le cadre d'un Perco ne peuvent détenir, pour des raisons de liquidité, plus de 5 % de titres non cotés, ou plus de 5 % de titres de l'entreprise qui a mis en place le Perco 264 ( * ) . Le projet de loi porte ces deux taux à 10 %.

Aucune modification n'a été apportée à cet article en séance publique.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur considère que si cet article reprend en partie la proposition n° 8 du rapport de l'IGF-Igas précité 265 ( * ) , le taux réduit du forfait social à 16 % risque d'être insuffisamment attractif pour drainer des capitaux en faveur de cette nouvelle forme de Perco orientée vers le financement de l'économie.

C'est pourquoi, à l'initiative de votre rapporteur, votre commission spéciale a adopté un amendement pour baisser ce taux à 12 %. Cette position est cohérente avec celle des partenaires sociaux qui, dans leur position commune du 22 décembre 2014 proposaient que « les sommes issues de l'intéressement, de la participation et de l'abondement, placées à moyen ou à long terme dans tous produits investis au bénéfice de l'économie, soient assujetties à un forfait social réduit » 266 ( * ) . En outre, l'amendement permet aux fonds visés au présent article d'investir également dans des parts de fonds communs de placement autorisés par le code monétaire et financier.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 35 decies (art. L. 3315-2 du code du travail) - Blocage par défaut des sommes issues de l'intéressement sur un plan d'épargne entreprise ou interentreprises en cas d'absence de choix du salarié

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, vise à proposer le placement par défaut des sommes issues de l'intéressement sur un plan d'épargne entreprise (PEE).

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

En l'état actuel du droit, la participation et l'intéressement suivent deux régimes distincts :

- par défaut, les sommes issues de la participation sont investies pour moitié dans un plan d'épargne d'entreprise (PEE), indisponible pendant cinq ans, et pour la seconde moitié dans un plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO), indisponible jusqu'au départ à la retraite, s'il en existe un dans l'entreprise. Les sommes ainsi versées échappent à l'impôt sur le revenu ;

- par défaut, les sommes issues de l'intéressement sont versées au salarié et doivent être intégrées aux revenus imposables du foyer. Ce n'est que si le salarié le demande que ces sommes sont versées sur le PEE ou le PERCO, échappant ainsi à l'impôt sur le revenu.

Le dispositif proposé, introduit par la commission spéciale à l'initiative des rapporteurs, tend à modifier l'article L. 3315-2 du code du travail afin de les sommes issues de l'intéressement dont le salarié n'a pas demandé le versement soient investies intégralement dans un PEE.

Il prévoit cependant un « droit de rétractation » pour le salarié qui pourrait ainsi demander le déblocage de son intéressement placé par défaut dans le PEE, dans un délai de trois mois après qu'il a été informé du blocage de ses avoirs.

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative des rapporteurs, un amendement visant à apporter des précisions relatives aux modalités d'information des salariés. Il est ainsi prévu que l'accord d'intéressement précise les modalités d'information du salarié sur l'affectation des sommes. À défaut de précision dans l'accord, ces conditions et modalités seraient déterminées par décret.

II - La position de votre commission

Le rapport de la mission d'évaluation relative au diagnostic sur les dispositifs d'épargne salariale de décembre 2013 267 ( * ) préconise d' « aligner », dans le silence du salarié, « les modalités de versement de l'intéressement sur celles de la participation (épargne, dont 50 % placés automatiquement sur le PERCO) ». Il indique également que « dans l'hypothèse où la constitution d'une épargne longue en vue de la retraite serait privilégiée », il conviendrait de « favoriser les versement sur le PERCO ».

Le rapport du COPIESAS propose également « d'harmoniser les procédures en privilégiant l'épargne et en évitant une fiscalisation parfois subie par incompréhension ou négligence ».

L'harmonisation préconisée par le COPIESAS n'est pourtant que partielle : si le principe consisterait bien « à investir par défaut les avoirs issus de la participation comme de l'intéressement, en laissant l'opportunité au bénéficiaire d'en demander la disposition immédiate » , le « mode d'investissement » serait différencié « 50 % de la participation et 100 % de l'intéressement dans le PEE et 50 % de la participation dans le PERCO s'il existe dans l'entreprise (100 % dans le PEE dans le cas contraire) ». Le rapport du COPIESAS ne justifie pas cette différence de traitement.

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale reprend la proposition du COPIESAS plutôt que celle de la mission d'évaluation. Les sommes issues de l'intéressement seraient bien placées par défaut, mais seulement dans le PEE. Pourtant le rapport de la commission spéciale de l'Assemblée nationale sur le présent projet de loi indique que « l'objet de cet article est d'harmoniser la logique » de l'intéressement et de la participation » et que « cela permettrait d'améliorer la lisibilité des dispositifs et de développer le financement de l'économie en incitant à l'épargne ». Il explique ainsi que « le présent article simplifie et homogénéise donc les dispositifs d'épargne salariale en instaurant pour l'intéressement un dispositif déjà mis en place pour la participation ».

La différence de régime qui demeurerait malgré tout entre les deux dispositifs n'est pas mentionnée et, a fortiori , pas expliquée.

Votre rapporteur propose de parfaire l'alignement du régime de l'intéressement sur celui de la participation, en prévoyant que, dans le silence du salarié, les sommes sont partagées à parts égales entre le PEE et le PERCO. Cette harmonisation a également pour intérêt de favoriser le développement du PERCO, qui représente une épargne de long terme et permet aux salariés de se constituer un revenu de complément au moment de leur départ en retraite.

De même, il convient d'harmoniser les modalités d'interrogation et d'information des salariés sur l'affectation des sommes issues de l'intéressement et de la participation. En effet, comme l'indique le COPIESAS « lorsque les deux mécanismes ont été mis en place au sein d'une entreprise, les dates d'interrogation des salariés sont le plus souvent distinctes et peuvent revêtir des formes différentes, source de confusion ». Par conséquent, votre rapporteur propose de retenir les dispositions actuellement en vigueur pour la participation, qui renvoient à un décret le soin de définir les modalités d'information des salariés.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 35 undecies (art. L. 3324-12 et L. 3334-11 du code du travail) - Instauration d'une gestion par défaut du plan d'épargne pour la retraite collectif en fonction de l'âge

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, vise à proposer que les sommes investies dans un plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO) fassent, dans le silence du salarié, l'objet d'une gestion pilotée en fonction de l'âge de ce dernier.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Pour la gestion de leur épargne retraite , les salariés ont généralement le choix entre une gestion libre (les salariés gèrent eux-mêmes l'affectation de leurs versements sur les fonds proposés dans leur PERCO ou leur contrat d'assurance collectif d'épargne retraite (dit contrat « article 83 ») ou une gestion pilotée en fonction de leur horizon de départ.

La gestion libre est l'option par défaut pour les PERCO . Il revient alors au salarié de prendre les décisions d'investissement. Dans le silence du salarié, les sommes placées sur le PERCO sont investis dans les produits les moins risqués, c'est-à-dire principalement des fonds monétaires . Ceux-ci offrent une grande sécurité mais une rémunération très faible . Ils sont composés essentiellement de titres de dette de qualité, d'une durée de vie très courte (moins d'un an), émis par des États, des sociétés financières et des grandes sociétés.

Or le PERCO a par construction un horizon de long terme puisque les sommes sont indisponible jusqu'au départ en retraite du salarié , sauf évènement particulier. Cet horizon devrait permettre d'investir dans des actifs moins sécurisés, mais offrant un meilleur rapport risque-rendement sur le long terme.

La gestion pilotée permet, sans que le salarié ait à s'en occuper, d'adapter l'allocation des actifs à l'horizon d'investissement afin d'optimiser le rapport risque-rendement. Elle consiste essentiellement, au fur et à mesure que la date de sortie du PERCO se rapproche, à réduire progressivement la part des actifs risqués , notamment l'investissement en actions, au profit de produits de taux plus sûrs (obligataires et monétaires).

Le présent article, adopté par la commission spéciale à l'initiative des rapporteurs, vise à faire de la gestion pilotée en fonction de l'âge du salarié l'option par défaut du PERCO .

En séance publique, un amendement a été adopté à l'initiative de notre collègue député Christophe Castaner, rapporteur thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, afin de fixer au 1 er janvier 2016 la date d'application de cet article .

II - La position de votre commission

Votre rapporteur approuve ce dispositif favorable à l'épargne longue et au financement de l'économie . Si le salarié conserve la possibilité d'opter pour une gestion libre, la gestion pilotée est bien celle qui correspond le mieux à l'objet du PERCO, qui est d'offrir un complément de retraite au moment de la cessation d'activité du salarié.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 35 duodecies (art. L. 3334-6 du code du travail) - Possibilité pour l'employeur d'abonder le Perco même en l'absence de contribution du salarié

Objet : cet article, inséré par l'Assemblée nationale, autorise l'employeur à alimenter unilatéralement, à travers un versement unique ou des versements périodiques, un Perco, dans la limite de plafonds définis par décret.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le second alinéa de l'article L. 3334-6 du code du travail dispose actuellement que si le règlement du Perco le prévoit, les entreprises peuvent effectuer un versement initial , dans la limite d'un plafond fixé par décret, même en l'absence de contribution du salarié. Ce versement est alors soumis au même régime social et fiscal que celui qui s'applique aux contributions des entreprises aux régimes de participation et d'intéressement.

Le présent article propose une nouvelle rédaction de cet alinéa, afin d'assouplir les conditions imposées aux versements unilatéraux de l'employeur sur le Perco.

En effet, si le règlement du plan le prévoit, les entreprises pourront, même en l'absence de contribution du salarié :

- soit effectuer un versement initial ;

- soit effectuer des versements périodiques , sous réserve d'une attribution uniforme à l'ensemble des salariés, la périodicité de ces versements devant être déterminée dans le règlement du plan.

Cet article renvoie à un décret le soin de fixer ces différents plafonds de versement annuel.

Il ne modifie pas le régime social et fiscal applicable aux contributions de l'employeur. Celles-ci ne peuvent se substituer à aucun des éléments de la rémunération des salariés.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à la philosophie de cet article, qui autorise les versements de l'employeur pendant toute la durée de vie du Perco, afin d'encourager le développement de ce dispositif . Votre rapporteur sera néanmoins vigilant quant aux montants des plafonds qui seront retenus par le pouvoir réglementaire : trop faibles, ils risqueraient de rendre inopérantes les dispositions de cet article 268 ( * ) .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 36 (art. L. 3314-9 et L. 3324-10 du code du travail) - Harmonisation de la date de versement des primes d'intéressement et de participation

Objet : cet article vise à harmoniser les dispositions relatives aux délais de versement des primes d'intéressement et de participation et à fixer un taux unique d'intérêt de retard en cas de dépassement de ces délais.

I - Le dispositif proposé

En l'état du droit, la date limite de versement est différentes pour les sommes dues au titre de l'intéressement et celles dues au titre de la participation doivent être versées aux salariés. De même, le taux d'intérêt de retard à la charge de l'employeur en cas de dépassement de cette date est différent selon le dispositif en jeu.

Pour ce qui concerne l'intéressement, l'article L. 3314-9 du code du travail fixe la date limite de versement au dernier jour du septième mois suivant l'exercice de calcul. Les sommes versées au-delà de cette date produisent des intérêts calculés au taux légal.

Pour ce qui concerne la participation, l'article D. 3324-21-2 du même code dispose que le versement doit intervenir avant le premier jour du cinquième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée. Au-delà de cette date, les entreprises complètent le versement prévu au premier alinéa par un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre chargé de l'économie.

Le présent article a pour objet de fixer une date limite unique pour le versement des primes d'intéressement et de participation, à savoir le dernier jour du cinquième mois suivant l'exercice de calcul au titre duquel les droits.

Pour ce qui concerne l'intéressement, le I du présent article tend ainsi à modifier l'article L. 3314-9 du code du travail de manière de manière à ce que celui-ci dispose que « toute somme versée aux bénéficiaires en application de l'accord d'intéressement au-delà du premier jour du sixième mois suivant la clôture de l'exercice produit un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux fixé à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération ». Ce taux est le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre chargé de l'économie.

Pour ce qui concerne la participation, le II du présent fixe au premier jour du sixième mois suivant l'exercice au titre duquel les droits sont nés la date de départ du délai de cinq ans durant lequel les sommes dont le versement n'a pas été demandé par le salarié sont indisponibles.

Le déclenchement d'intérêts de retard resterait défini au niveau réglementaire.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur approuve le principe du dispositif proposé, qui s'inscrit dans un objectif de simplification et d'harmonisation des dispositifs et s'inspire directement des recommandations du Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (COPIESAS). Il faut relever que le taux d'intérêt de retard retenu est plus favorable que le taux légal applicable jusqu'ici en matière d'intéressement. Les conséquences pour les employeurs devraient être limitées dans la mesure où les retards de paiement restent très exceptionnels.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 36 bis (art. L. 3322-9 du code du travail) - Négociation obligatoire d'un régime de participation par les branches professionnelles avant le 30 décembre 2017

Objet : cet article, issu d'un amendement présenté par nos collègues députés MM. Jean-Christophe Fromantin, Francis Vercamer et Michel Zumkeller et adopté en commission spéciale, vise à obliger les branches professionnelles à négocier un accord de participation avant le 30 décembre 2017, cet accord pouvant être appliqué directement au sein des entreprises. À défaut d'initiative de la partie patronale avant le 31 décembre 2016, une organisation représentative de salariés serait fondée à demander dans les quinze jours l'ouverture d'une négociation.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 3322-9 du code du travail dispose que chaque branche professionnelle devait négocier, au plus tard le 30 décembre 2009, un régime de participation qui pouvait soit reprendre la formule légale de calcul de la réserve spéciale de participation, soit établir une formule spécifique comportant pour les salariés des avantages au moins équivalents.

Il autorisait les entreprises à opter pour l'application de l'accord négocié au niveau de la branche, et pour l'adhésion à un plan d'épargne interentreprises défini par accord de branche si celui-ci le prévoyait.

À défaut d'initiative de la partie patronale au plus tard le 31 décembre 2007, la négociation devait s'engager dans les quinze jours si une organisation de salariés représentative le demandait.

Le présent article actualise ces dispositions en remplaçant, au premier alinéa, la date du 30 décembre 2009 par celle du 30 décembre 2016 , et au second alinéa, la date du 31 décembre 2007 par celle du 31 décembre 2015 .

Un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques a été adopté en séance publique afin de reporter d'un an , au 30 décembre 2017 et au 31 décembre 2016 respectivement, les deux dates-butoirs arrêtées en commission spéciale.

Un second amendement des mêmes auteurs a clarifié la possibilité pour les entreprises employant moins de cinquante salariés non assujetties à l'obligation de mettre en place un régime de participation d'opter pour l'application directe d'un accord de branche par décision unilatérale de l'employeur .

II - La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à la conclusion d'accords de branche pour améliorer la diffusion des régimes de participation dans les entreprises. Les auteurs de l'amendement à l'origine de cet article soulignaient que parmi les quelque 33 000 accords relatifs à la participation signés en 2012, seulement 17 accords ou avenants l'ont été au niveau des branches professionnelles. Cet article ne prévoyant aucune sanction des branches professionnelles en cas de non-respect de l'obligation de négocier, votre rapporteur appelle le ministère du travail à suivre avec vigilance la mobilisation des partenaires sociaux afin qu'il ne reste pas lettre morte.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 36 ter (nouveau) (art. L. 3312-2, L. 3312-8 et L. 3312-9 [nouveau] du code du travail) - Négociation obligatoire d'un régime d'intéressement par les branches professionnelles avant le 30 décembre 2017

Objet : cet article additionnel, issu d'un amendement présenté par votre rapporteur et adopté par votre commission spéciale, vise à obliger les branches professionnelles à négocier un accord d'intéressement avant le 30 décembre 2017, cet accord pouvant être appliqué directement au sein des entreprises, notamment celles employant moins de cinquante salariés. A défaut d'initiative de la partie patronale avant le 31 décembre 2016, une organisation représentative de salariés serait fondée à demander dans les quinze jours l'ouverture d'une négociation.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission spéciale a inséré cet article 36 ter dans le projet de loi afin de transposer aux accords d'intéressement la négociation de branche prévue à l'article 36 bis , dans le but de favoriser leur diffusion dans les petites entreprises.

Cet accord devra en effet prendre en compte les spécificités des entreprises employant moins de cinquante salariés au sein de la branche, qu'elles soient ou non pourvues d'institutions représentatives du personnel (article L. 3312-2 du code du travail), en proposant notamment plusieurs formules d'intéressement.

À travers une modification de l'article L. 3312-8 du même code, cet accord sera directement applicable par l'entreprise , par parallélisme des formes avec le troisième alinéa de l'article 36 bis .

À défaut d'initiative de la partie patronale avant le 31 décembre 2016, une organisation représentative de salariés est fondée à demander dans les quinze jours l'ouverture d'une négociation , comme le prévoit le nouvel article L. 3312-9.

Cet amendement reprend ainsi la proposition n° 8 du Copiesas qui souhaitait qu'en deçà d'un effectif de cinquante salariés, l'employeur puisse mettre en place un régime d'intéressement par décision unilatérale, la branche professionnelle lui fournissant un dispositif « clé en main ».

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 36 quater (nouveau) (art. L. 3322-3 du code du travail) - Suspension pendant trois ans de l'obligation de conclure un accord de participation pour les entreprises bénéficiant d'un accord d'intéressement et franchissant le seuil de cinquante salariés

Objet : cet article additionnel, issu d'un amendement présenté par votre rapporteur, dispense pendant une période maximale de trois ans les entreprises qui ont déjà conclu un accord d'intéressement et qui franchissent le seuil de cinquante salariés de l'obligation de négocier un accord de participation.

L'article L. 3322-3 du code du travail dispose que si une entreprise ayant conclu un accord d'intéressement vient à employer au moins cinquante salariés, ce n'est qu'à l' expiration de cet accord que l'employeur est obligé de conclure un accord de participation.

Le présent article offre plus de souplesse aux entreprises en leur permettant de bénéficier d'un délai de trois années (soit la durée d'un accord d'intéressement) avant de mettre en place un régime de participation, à condition évidemment que l'accord s'applique continûment pendant cette période.

Après cette période, le droit en vigueur autorise l'entreprise, si elle le souhaite, à conclure un accord de participation sur la base de calcul et de répartition utilisée dans l'accord d'intéressement. Le présent article ne revient pas sur cette faculté.

Cet article s'inscrit par conséquent dans la continuité de la proposition n° 3 du rapport du Copiesas , qui prévoyait notamment qu'en cas de franchissement du seuil de cinquante salariés, une entreprise déjà dotée d'un accord d'intéressement ait la possibilité de prolonger la validité de cet accord pour une période maximale de cinq ans.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 37 (art. L. 3332-17 du code du travail) - Modalités de mise en place d'un plan d'épargne d'entreprise selon les règles en vigueur en matière de participation

Objet : cet article vise à porter au niveau législatif l'alignement des modalités de mise en place d'un plan d'épargne d'entreprise sur celles applicables en matière de participation.

I - Le dispositif proposé

En l'état actuel du droit, les dispositions relatives à la mise en place de l'épargne salariale sont, selon les dispositifs, tantôt définies dans la loi
- participation, intéressement et plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO), tantôt précisées par décret - plan d'épargne d'entreprise.

Le dispositif proposé tend à inscrire dans la loi les modalités de mise en place du plan d'épargne d'entreprise. Conformément au droit actuel, celles-ci sont identiques à celles applicables en matière de participation (article L. 3322-6 du code du travail).

II - La position de la commission

Votre rapporteur est favorable à cette mesure d'harmonisation, qui améliore la lisibilité des dispositions relatives à la mise en place de l'épargne salariale.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 37 bis A (art. L. 3332-17 du code du travail) - Extension de l'objet social des organismes de placement collectif immobilier

Objet : cet article, introduit en séance publique par l'Assemblée nationale, vise à permettre aux fonds commun de placement d'entreprise d'investir plus largement dans des organismes de placement collectif immobilier.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article introduit en séance publique par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Alain Tourret, avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement, vise à modifier l'article L. 3332-17 du code du travail afin que les fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) puissent investir dans des organismes de placement collectif immobilier (OPCI) jusqu'à 30 % de leur actif.

Les OPCI, agréés et régulés par l'Autorité des marchés financiers (AMF), sont investis pour une proportion allant de 60 % à 90 % dans des actifs immobiliers, principalement d'entreprise, tout en maintenant une poche de liquidités d'au moins 10 %.

En l'état actuel du droit, les FCPE ne peuvent investir dans OPCI qu'à hauteur de 10 % maximum (« poche libre »), alors qu'ils sont autorisés à détenir jusqu'à 30 % de parts de fonds communs de placements à risques (FCPR).

Il résulte du dispositif proposé que le cumul des investissements dans des FCPR et des OPCI ne pourrait excéder 30 % de l'actif du FCPE.

Selon l'auteur de l'amendement, cet assouplissement des conditions d'investissement des FPCE vise à ouvrir à ces derniers, plus largement qu'actuellement, une classe d'actifs « destinée par nature à une détention de long terme » , qui correspond à l'horizon de détention de l'épargne salariale.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur approuve cet assouplissement des conditions d'investissement des FCPE, qui permettra de placer l'épargne des salariés dans des supports adaptés à son horizon de détention et offrant un rendement intéressant.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 37 bis (art. L. 3333-7 du code du travail) - Amélioration de la gouvernance des plans d'épargne interentreprises

Objet : cet article, introduit en séance publique par l'Assemblée nationale, vise à permettre une modification du règlement d'un plan d'épargne interentreprises dès lors qu'une majorité d'entreprises ne s'y oppose pas.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Aux termes de l'article L. 3333-3 du code du travail, le règlement d'un plan d'épargne interentreprises « détermine notamment :

1° Les entreprises signataires ou le champ d'application professionnel et géographique ;

2° La nature des sommes qui peuvent être versées ;

3° Les différentes possibilités d'affectation des sommes recueillies, en particulier le nombre, l'orientation de gestion et le profil de risque des fonds utilisés ;

4° Les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs ;

5° La liste de différents taux et plafonds d'abondement parmi lesquels les entreprises souhaitant effectuer des versements complémentaires à ceux de leurs salariés pourront opter ;

6° Les conditions dans lesquelles sont désignés les membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement prévus par le règlement du plan et les modalités de fonctionnement des conseils. »

L'article L. 3333-7 du même code dispose que le règlement d'un PEI « peut prévoir qu'un avenant relatif aux 2°, 3° et 5° du règlement de ce plan peut être valablement conclu s'il est ratifié par une majorité des entreprises parties prenantes au plan ».

Il prévoit cependant une facilité lorsqu'il s'agit d'intégrer les modifications rendues nécessaires par des dispositions législatives ou réglementaires postérieures à l'institution du plan. Dans ce cas, la modification du règlement « s'applique à condition que la majorité des entreprises parties prenantes ne s'y oppose pas dans un délai d'un mois à compter de la date d'envoi de l'information ».

Le présent article additionnel, adopté par la commission spéciale à l'initiative des rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement, vise à étendre cette facilité à l'ensemble des modifications visant les 2°, 3° et 5° du règlement.

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article en séance publique.

II - La position de votre commission

Le dispositif proposé est de nature à faciliter les ajustements techniques parfois nécessaires touchant le règlement de PEI. En effet, la règle de la majorité positive peut être paralysante, les plans d'épargne interentreprises regroupant parfois plusieurs centaines d'entreprises n'ayant pas de lien entre elles.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 38 (art. L. 3334-2 du code du travail) - Assouplissement des règles relatives à la mise en place d'un plan d'épargne pour la retraite collectif

Objet : cet article assouplit les modalités d'élaboration du plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco), en autorisant notamment l'employeur à soumettre au personnel, en cas d'échec de la négociation, la ratification de certaines mesures consignées dans le procès-verbal de désaccord.

I - Le dispositif proposé

Le présent article modifie l'article L. 3334-2 du code du travail, qui fixe les règles relatives à la mise en place du Perco .

Cet article prévoit actuellement qu'un Perco peut être mis en place à l'initiative de l'entreprise ou par accord collectif de travail sans recourir à une institution de retraite professionnelle collective, à condition que ce plan ne soit pas proposé sur le territoire d'un autre État membre ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen. Si la voie de l'accord est privilégiée, l'entreprise doit alors se conformer aux dispositions de droit commun prévues au livre II de la deuxième partie du code du travail, qui porte sur la négociation collective, les conventions et les accords collectifs de travail (articles L. 2211-1 à L. 2283-2).

Il dispose également que si l'entreprise compte au moins un délégué syndical ou est dotée d'un comité d'entreprise, elle doit négocier le Perco dans les mêmes conditions que celles prévues pour un accord de participation 269 ( * ) . Si, au terme de la négociation, aucun accord n'a été conclu, un procès-verbal de désaccord doit alors être établi, et consigner en leur dernier état les propositions respectives des parties et les mesures que l'employeur entend appliquer unilatéralement.

Le présent article maintient ces dispositions mais procède à deux modifications de l'article L. 3334-2.

En premier lieu, il précise que la mise en place du Perco doit suivre les mêmes règles que les accords de participation , sans les conditionner à l'existence d'un délégué syndical ou d'un comité d'entreprise, et supprime en conséquence la référence très large et contraignante aux règles de droit commun en matière de négociation collective.

En second lieu, il indique que l'employeur peut soumettre à la ratification du personnel les mesures consignées dans le procès-verbal de désaccord , qui devront alors obtenir les deux tiers des suffrages pour être approuvées.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Aucune modification n'a été apportée à cet article à l'Assemblée nationale.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur approuve cet article, qui permettra le développement des Perco grâce à l'utilisation des règles très souples applicables au régime de participation.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 39 (art. L. 3332-10 et L. 3334-8 du code du travail) - Alimentation du plan d'épargne pour la retraite collectif et du plan d'épargne d'entreprise par des jours de repos non pris par le salarié

Objet : cet article autorise les salariés qui ne disposent pas d'un compte épargne temps (CET) à verser sur un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) les sommes correspondant à dix jours maximum de congés non pris, contre cinq aujourd'hui. En outre, le montant des sommes correspondant aux jours de repos non pris, inscrit dans un CET, ne sera plus pris en compte dans le calcul du plafond légal de versement annuel sur un plan d'épargne d'entreprise (PEE).

I - Le dispositif proposé

Le présent article modifie les articles L. 3332-10 et L. 3334-8 du code du travail.

• Le deuxième alinéa de l'article L. 3334-8 du code du travail dispose qu'en l'absence de compte épargne-temps (CET) dans l'entreprise, le salarié peut, dans la limite de cinq jours par an , verser les sommes correspondant à des jours de repos non pris sur le Perco. Il peut également affecter ces sommes au financement de prestations de retraite qui revêtent un caractère collectif et obligatoire. Ces dispositions ne s'appliquent que pour les congés au-delà de vingt-quatre jours ouvrables, afin d'éviter tout détournement dans leur utilisation.

Le présent article maintient ces dispositions mais relève le plafond de cinq à dix jours , comme prévu actuellement pour les bénéficiaires d'un CET 270 ( * ) .

• Le premier alinéa de l'article L. 3332-10 du code du travail définit le plafond légal qui s'applique aux versements annuels d'un salarié ou d'un ancien salarié sur son plan d'épargne d'entreprise (PEE) . Ce plafond ne peut excéder un quart de sa rémunération annuelle ou de son revenu professionnel imposé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente 271 ( * ) .

Le troisième alinéa définit deux exceptions à ce principe général, puisque ne sont pas prises en compte dans le calcul du plafond :

- les sommes inscrites à un CET et qui sont utilisées pour alimenter un Perco ;

- celles utilisées pour alimenter un PEE , à condition qu'elles servent à l'acquisition de titres de l'entreprise ou d'une entreprise qui lui est liée , ou de parts ou d'actions de fonds d'épargne salariale .

Le présent article élargit la portée de la première exception, en prévoyant que le montant des sommes correspondant à des jours de repos non pris, inscrit dans un CET, est également sans incidence sur le calcul du plafond légal relatif aux versements annuels d'un salarié ou d'un ancien salarié sur son PEE.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Aucune modification n'a été apportée à cet article à l'Assemblée nationale.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à cet article, qui rétablit une forme d'égalité entre les salariés qui détiennent un compte épargne temps et ceux qui en sont dépourvus 272 ( * ) , et qui encourage le développement du Perco et du PEE en assouplissant les règles de calcul du plafonnement des versements opérés par le bénéficiaire.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 39 bis (art. L. 3341-6 du code du travail) - Contenu du livret d'épargne salariale et communication aux représentants du personnel

Objet : cet article additionnel, inséré par l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption en commission spéciale d'un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques, restreint la portée du livret d'épargne salariale, qui ne doit plus traiter de l'ensemble des dispositifs légaux mais seulement de ceux mis en place dans l'entreprise, et oblige l'employeur à le porter à la connaissance des représentants du personnel.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article L. 3341-6 du code du travail prévoit actuellement que tout salarié d'une entreprise proposant un dispositif d'intéressement, de participation, un plan d'épargne entreprise, un plan d'épargne interentreprises ou un plan d'épargne pour la retraite collectif reçoit, lors de la conclusion de son contrat de travail, un livret d'épargne salariale présentant l'ensemble de ces dispositifs.

Le présent article opère deux modifications à cet article.

D'une part, il limite la portée du livret, qui devra désormais se cantonner aux dispositifs mis en place au sein de l'entreprise .

D'autre part, il complète l'article L. 3341-6 par un alinéa, qui prévoit que le livret d'épargne salariale doit être également porté à la connaissance des représentants du personnel , le cas échéant en tant qu'élément de la base de données économiques et sociales . Cette base, instaurée par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, regroupe diverses informations mises à disposition du comité d'entreprise et, à défaut, des délégués du personnel, portant notamment sur les investissements dans l'entreprise, la rémunération des salariés, dirigeants et financeurs, les aides publiques et les crédits d'impôts reçus, ou encore les contrats de sous-traitance qu'elle a conclus.

Aucune modification n'a été apportée à cet article en séance publique.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur estime que la limitation du livret d'épargne salariale aux dispositifs effectivement mis en place dans l'entreprise répond à un souci de pragmatisme louable. Cette mesure faisait d'ailleurs l'objet de la proposition n° 19 du rapport du Copiesas du 26 novembre 2014. Votre rapporteur souscrit en outre à la demande des partenaires sociaux, exprimée dans leur position commune précitée du 22 décembre dernier, que soit mis en place un site internet de référence sur l'épargne salariale, afin de délivrer une « information simple, accessible et exhaustive » aux salariés, à leurs représentants et aux entreprises.

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement supprimant l'obligation pour l'employeur , de nature réglementaire, de mettre à disposition des représentants du personnel ce livret sur la base de données économiques et sociales , compte tenu des difficultés qu'entraîne son développement dans de nombreuses entreprises.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 39 ter (art. L. 3341-7 du code du travail) - Communication au salarié quittant l'entreprise sur les dispositifs d'épargne salariale

Objet : cet article additionnel, issu d'un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, vise à mieux informer un salarié qui quitte son entreprise sur les frais de tenue de compte-conservation de ses dispositifs d'épargne salariale.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article L. 3341-7 du code du travail définit les droits à l'information sur les dispositifs d'épargne salariale dont bénéficient les salariés qui quittent l'entreprise.

Cet article dispose que tout bénéficiaire quittant l'entreprise doit recevoir un état récapitulatif de l'ensemble des sommes et valeurs mobilières épargnées ou transférées au sein de l'entreprise dans le cadre des dispositifs de participation et de plans d'épargne salariale.

Il prévoit également que cet état distingue les actifs disponibles (en mentionnant tout élément utile au salarié pour en obtenir la liquidation ou le transfert), et ceux qui sont affectés au plan d'épargne pour la retraite collectif (en précisant les échéances auxquelles ces actifs seront disponibles ainsi que tout élément utile au transfert éventuel vers un autre plan).

En outre, l'état récapitulatif est inséré dans un livret d'épargne salariale dont les modalités de mise en place et le contenu sont fixés par un décret en Conseil d'État.

Le numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques est la référence pour la tenue du livret du salarié. À ce titre, ce numéro peut figurer sur les relevés de compte individuels et l'état récapitulatif.

Le présent article maintient ces dispositions, mais prévoit que lors du départ de l'entreprise du bénéficiaire, cet état récapitulatif devra l'informer sur les frais de tenue de compte-conservation , qui seront pris en charge soit par l'entreprise, soit par prélèvements sur ses avoirs .

Aucune modification n'a été apportée à cet article en séance publique.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur approuve cet article, qui améliore l'information des salariés qui quittent leur entreprise sur les frais de tenue de compte-conservation des dispositifs d'épargne salariale. Cette mesure avait d'ailleurs fait l'objet de la proposition n° 21 du rapport précité du Copiesas , qui visait à éviter que les salariés découvrent une diminution de leurs avoirs, quelques années après leur départ de l'entreprise, du fait des prélèvements de frais opérés par la société de gestion.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 39 quater (art. L. 3346-1 du code du travail) - Avis obligatoire du Copiesas sur tout projet de loi ou d'ordonnance de déblocage de l'épargne salariale

Objet : cet article, adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, oblige le Gouvernement à saisir le Copiesas de tout projet de loi ou d'ordonnance portant sur le déblocage de l'épargne salariale.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

La loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail a institué, à l'article L. 3346-1 du code du travail, le Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (Copiesas).

Présidé par le Premier ministre ou par son représentant, il se voit attribuer deux missions :

- promouvoir auprès des entreprises et des salariés les dispositifs de participation, d'intéressement, d'épargne salariale et d'actionnariat salarié ;

- évaluer ces dispositifs et formuler toute proposition susceptible de favoriser leur diffusion.

Il peut également être saisi par le Gouvernement et par les commissions compétentes de chaque assemblée parlementaire de toute question entrant dans son champ de compétences.

Ses rapports et recommandations sont communiqués au Parlement et rendus publics.

Un décret détermine sa composition et ses modalités de fonctionnement, dans des conditions de nature à assurer son indépendance et sa représentativité et à garantir la qualité de ses travaux 273 ( * ) .

Le présent article maintient ces dispositions mais prévoit que le Copiesas devra être saisi par le Gouvernement de tout projet de loi ou d'ordonnance de déblocage de l'épargne salariale.

Les cas de déblocage anticipé de la participation

L'article R. 3324-22 du code du travail dresse la liste des situations, appréciées de manière restrictive, permettant de débloquer la participation :

- mariage ou conclusion d'un pacte civil de solidarité ;

- naissance ou arrivée au foyer d'un enfant en vue de son adoption, dès lors que le foyer compte déjà au moins deux enfants à sa charge ;

- divorce, séparation ou dissolution d'un pacte civil de solidarité, sous conditions ;

- invalidité de l'intéressé, de ses enfants, de son conjoint ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;

- décès de l'intéressé, de son conjoint ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;

- rupture du contrat de travail, cessation de son activité par l'entrepreneur individuel, fin du mandat social, perte du statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé ;

- affectation des sommes épargnées à la création ou reprise d'une entreprise ;

- affectation des sommes épargnées à l'acquisition d'une résidence principale, à son agrandissement ou à sa remise en état à la suite d'une catastrophe naturelle ;

- situation de surendettement de l'intéressé.

De nombreuses lois ont été adoptées ces dernières années pour autoriser, en plus des situations évoquées précédemment, le déblocage de l'épargne salariale, afin de renforcer le pouvoir d'achat des salariés. Le dernier exemple en date remonte à la loi n° 2013-561 du 28 juin 2013 portant déblocage exceptionnel de la participation et de l'intéressement.

Source : commission spéciale du Sénat

Aucune modification n'a été apportée à cet article en séance publique.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur considère que le présent article offre un bon équilibre en reconnaissant le rôle confié au Copiesas sans empiéter sur les prérogatives du Gouvernement. Si ce dernier conserve la faculté de demander l'avis du conseil sur toute question entrant dans son champ de compétences, il sera dorénavant obligé de recueillir son avis sur tout projet de loi ou d'ordonnance visant à débloquer l'épargne salariale. Le présent article reprend ainsi fidèlement la première proposition du rapport IGF-Igas précité qui souhaitait que le conseil « soit saisi pour avis de tout projet de déblocage exceptionnel de l'épargne salariale » 274 ( * ) .

Cette proposition est plus mesurée que celle formulée par le Copiesas (proposition n° 10 du rapport du 26 novembre 2014), qui conditionnait toute initiative gouvernementale relative au déblocage exceptionnel de l'épargne salariale à son avis conforme. Les partenaires sociaux, à travers le projet de position commune du 22 décembre 2014, n'ont d'ailleurs pas explicitement plaidé pour un renforcement du rôle du conseil. En revanche, ils ont souhaité que « les pouvoirs publics s'engagent à stabiliser le cadre de l'épargne salariale » et qu'en cas d'éventuels changements, ils soient associés et invités à négocier conformément à l'article L. 1 du code du travail 275 ( * ) .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 40 (art. L. 3312-5 du code du travail) - Possibilité pour les salariés de demander la renégociation d'un accord d'intéressement proposé par l'employeur et ratifié par référendum

Objet : cet article autorise les salariés à demander la renégociation d'un accord d'intéressement issu d'un projet de l'employeur ratifié à la majorité des deux tiers par le personnel, dans les trois mois précédant sa date d'échéance.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 3312-5 du code du travail définit les quatre modalités de conclusion d'un accord d'intéressement , valable pendant une durée maximale de trois ans :

- par convention ou accord collectif de travail ;

- par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ;

- par accord conclu au sein du comité d'entreprise ;

- à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d'un projet d'accord proposé par l'employeur.

Cet article prévoit que si aucune des parties habilitées à négocier ou à ratifier un accord d'intéressement, conformément aux trois premières modalités définies, ne demande de renégociation dans les trois mois précédant la date d'échéance de l'accord, ce dernier est renouvelé par tacite reconduction , à condition que l'accord d'origine en prévoie la possibilité.

Cette disposition ne permet donc pas aux salariés de demander la renégociation d'un accord d'intéressement proposé par l'employeur et qui a été approuvé par un référendum interne à l'entreprise .

C'est précisément cet obstacle que supprime l'article 40 du projet de loi.

Par ailleurs, cet article prévoit que tout accord d'intéressement, quelle que soit la modalité de conclusion retenue, ne peut être reconduit tacitement que pour une durée maximale de trois ans .

Aucun amendement n'a été adopté sur cet article à l'Assemblée nationale.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur constate que cet article opère une harmonisation des conditions autorisant les salariés à demander la renégociation d'un accord d'intéressement, quelles que soient ses modalités de conclusion. Il considère que le renforcement des droits des salariés ainsi prévu ne portera pas atteinte à la continuité des accords actuellement appliqués dans les entreprises.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 40 bis A (art. L. 511-6 et L. 511-7 du code monétaire et financier) - Autorisation du prêt de trésorerie interentreprises

Objet : cet article autorise les entreprises à s'accorder entre elles des prêts de trésorerie à moins de deux ans.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Jean-Christophe Fromantin, avec un avis de sagesse de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, autorise les entreprises à accorder des prêts de moins de deux ans à d'autres entreprises avec lesquelles elles entretiennent des liens économiques le justifiant (donneurs d'ordre / sous-traitants).

C'est le sens du I du présent article qui introduit un nouveau 3 bis au sein de l'article L. 511-6 du code monétaire et financier, relatif aux dérogations au « monopole bancaire » d'octroi des crédits. En effet, l'article L. 511-5 du code monétaire et financier pose le principe selon lequel seuls les établissements de crédit et les sociétés de financement peuvent accorder des prêts (le « monopole bancaire »). Il faut donc créer une dérogation pour que toute autre personne puisse octroyer un crédit.

Le II du présent article complète également l'article L. 511-7 du code monétaire et financier afin de prévoir que les entreprises peuvent « pratiquer des opérations de crédit [...] avec d'autres entreprises partenaires, y compris lorsqu'il n'y a pas de liens de capital entre ces entreprises. Ces crédits sont formalisés sous la forme d'un contrat de partenariat entre les sociétés ».

II - La position de votre commission

En séance publique, notre collègue député Jean-Christophe Fromantin a défendu sa proposition en arguant qu'une « grande partie de nos entreprises connaissent des problèmes voire, dans certains cas, déposent le bilan, pour des problèmes de trésorerie. [...]

« Les banques sont extrêmement réservées sur cette question de la trésorerie, parce que financer du court terme ne rapporte pas beaucoup d'argent, parce que ce n'est pas un levier très valorisant et que, même si les produits de trésorerie font partie de la gamme des banques, celles-ci ne s'engagent pas pour autant sur la voie du financement des facilités de caisse ou de trésorerie.

« Cet amendement propose donc une chose très simple, qui se pratique dans d'autres pays : laissons à deux entreprises, qui sont en relation commerciale, la possibilité de s'octroyer des facilités de trésorerie dans un acte sous seing privé, donc de gré à gré .

« Ainsi, une entreprise donneuse d'ordres travaillant avec un sous-traitant qui connaît des difficultés ne peut pas aller au-delà du crédit fournisseur qu'elle peut lui accorder en facilitant les délais de paiement. Mais elle pourrait aller un peu plus loin en lui accordant une ligne de trésorerie sur deux ans maximum, dans le cadre d'un contrat, de manière à surmonter ce passage difficile . L'entreprise donneuse d'ordres le ferait d'autant plus qu'elle connaît le sous-traitant : étant son acheteur, elle est la mieux placée pour juger la qualité des produits de ce sous-traitant, l'aider à maintenir l'équilibre et à assurer sa pérennité.

« Il ne s'agit donc pas de bouleverser le monopole bancaire [...] mais d'étendre une exception qui existe déjà puisqu'à l'intérieur d'un groupe, ce crédit entre filiales ou entre entreprises est possible ; mais souvent, une relation commerciale de confiance est au moins aussi forte qu'à l'intérieur d'un groupe ».

Sur le fond, cette idée paraît bonne puisque certaines grandes entreprises connaissent une situation de trésorerie surabondante tandis que des PME rencontrent des difficultés d'accès au crédit court terme. Au surplus, le crédit interentreprises tel qu'il est ouvert par le présent article pourrait présenter un double avantage pour le prêteur : soutenir son sous-traitant et obtenir un rendement supérieur de sa trésorerie compte tenu de l'environnement de taux très bas actuellement.

Cependant, le Gouvernement et plusieurs députés ont mis en avant des inquiétudes quant à cette nouvelle possibilité de prêt interentreprises.

Tout d'abord, il convient que ce dispositif ne devienne pas un moyen de contourner la législation sur les délais de paiement.

De même, une situation dans laquelle un donneur d'ordre prête à son sous-traitant peut conduire ce dernier à se retrouver dans une situation de dépendance économique accrue.

Par ailleurs, il importe que l'activité de prêt d'une entreprise demeure accessoire par rapport à son activité principale. En effet, il faut que la dérogation au « monopole bancaire » ne permette pas de contourner les règles applicables aux établissements de crédit. Au surplus, compte tenu des risques inhérents à l'activité de prêt, la limitation de cette activité revêt un caractère protecteur pour l'entreprise.

Au regard de ces différents éléments, votre rapporteur, par amendement , a proposé une rédaction nouvelle du présent article .

Ainsi, tout en conservant l'esprit initial de l'article, la rédaction adoptée par votre commission prévoit que :

- seules les micro-entreprises, les PME ou les ETI pourront être emprunteurs 276 ( * ) ;

- une convention de prêt sera conclue entre les deux parties. Un décret précisera les clauses obligatoires et interdites de cette convention afin d'éviter toute stipulation léonine ;

- les conventions de prêt seront soumises au régime des conventions réglementées pour l'entreprise prêteuse. En effet, étant donné le risque auquel s'expose l'entreprise, il apparaît nécessaire de soumettre cette convention à un formalisme accru ;

- le prêteur sera limité dans sa capacité de prêt afin que l'activité de crédit soit toujours considérée comme une activité accessoire au regard de l'activité principale ;

- l'emprunteur sera, lui aussi, limité dans sa capacité d'emprunt de sorte qu'il ne soit pas dépendant d'un financeur et surtout qu'il soit en capacité de rembourser.

Pour autant, cette nouvelle rédaction mérite encore d'être ajustée pour rendre le dispositif tout à la fois solide et opérant.

Il convient en premier lieu de permettre la publicité, au moins restreinte, des conventions de prêt conclues entre deux entreprises. En effet, toute analyse du risque de solvabilité d'une entreprise doit reposer d'abord sur une connaissance exhaustive de l'ensemble des engagements qu'elle a pris. À ce titre, il ne faudrait pas qu'un prêt interentreprises puisse être ignoré soit d'un établissement de crédit, soit de toute personne susceptible de lui consentir un autre prêt.

Votre commission s'est également interrogée sur la nécessité de fixer des plafonds maximum tant à l'emprunteur qu'au prêteur. Outre la difficulté de trouver le bon calibrage, cette disposition risque de limiter excessivement les acteurs qui voudraient s'engager dans un système de prêt interentreprises. À cet égard, la liberté contractuelle peut se révéler préférable, même si elle comporte des risques plus grands.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié .

Article 40 bis B - Habilitation à réformer, par ordonnance, le régime juridique des bons de caisse

Objet : cet article habilite le Gouvernement à réformer le régime juridique des bons de caisse et à adapter le droit afin de permettre l'intermédiation des bons de caisse par des plateformes de financement participatif.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, avec un avis favorable de la commission.

Il habilite le Gouvernement « à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, toutes mesures relevant du domaine de la loi visant à :

« [réformer le régime juridique des bons de caisse], afin notamment de renforcer la protection des souscripteurs et de préciser les obligations des émetteurs de bons de caisse, et à prendre toute mesure de coordination rendue nécessaire ;

« 2° Adapter les dispositions relatives au financement participatif [...] , notamment pour permettre l'intermédiation des bons de caisse [...] ou faciliter l'intermédiation des titres de créances dans le cadre du financement participatif ».

II - La position de votre commission

Les bons de caisse sont régis par les articles L. 223-1 à L. 223-4 du code monétaire et financier. Ils sont délivrés par un commerçant, en contrepartie d'un prêt , qui s'engage à « payer à échéance déterminée ». Ils ne peuvent être souscrits à plus de cinq années d'échéance.

Ce mode de financement est tombé en désuétude chez les commerçants. Seuls quelques établissements de crédit émettraient encore des bons de caisse. D'après des éléments transmis à votre rapporteur, l'encours des bons de caisse ne serait plus que de 1,8 milliard d'euros alors qu'il s'élevait à 31,2 milliards d'euros en 1994.

Le régime juridique des bons de caisse présente par ailleurs plusieurs ambiguïtés. En effet, il s'agit d'un instrument à mi-chemin entre un crédit et un titre financier. Or l'article L. 211-1 du code monétaire et financier dispose expressément que les bons de caisse ne sont pas des titres financiers. En outre, la souscription de bons de caisse peut s'apparenter à une activité de crédit, qui n'est, à ce jour, pas régulée comme telle. Il faut souligner incidemment que le bon de caisse pouvant être « au porteur », cet instrument pose un problème en termes de lutte contre le blanchiment des capitaux.

Cette incertitude juridique pourrait se révéler problématique avec le renouveau de cette technique de financement par le biais du financement participatif ( crowdfunding ). En effet, il semblerait que des plateformes utilisent les bons de caisse pour assurer l'intermédiation entre des entreprises emprunteuses et des particuliers prêteurs.

Le présent article vise donc à remettre à plat l'ensemble du régime des bons de caisse afin de sécuriser juridiquement les opérations conduites sur ces plateformes.

Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur que les travaux préparatoires à cette ordonnance ont à peine débuté et qu'une concertation approfondie avec l'Autorité des marchés financiers et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution devait être engagée.

En tout état de cause, votre rapporteur a souhaité que soit maintenue cette habilitation, dès lors qu'elle peut permettre de régler un problème identifié et qu'elle est de nature à favoriser le financement de l'économie.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 40 bis C - Rapport sur la responsabilité sociétale des investisseurs institutionnels

Objet : cet article oblige la Caisse des dépôts et consignations et les autres « investisseurs institutionnels agréés ou réglementés » à produire des informations sur la prise en compte d'objectifs sociaux, environnementaux et de qualité de gouvernance dans leur politique d'investissement .

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Eric Alauzet et des membres du groupe écologiste, avec un double avis de sagesse de la commission et du Gouvernement.

Il prévoit que « la Caisse des dépôts et consignations et les autres investisseurs institutionnels agréés ou réglementés mentionnent, dans leur rapport annuel et dans les documents destinés à l'information de leurs souscripteurs, les modalités de prise en compte dans leur politique d'investissement des critères relatifs au respect d'objectifs sociaux, environnementaux et de qualité de gouvernance. Ils précisent la nature de ces critères et la façon dont ils les appliquent, selon une présentation type fixée par décret. Ils indiquent comment ils exercent les droits de vote attachés aux instruments financiers résultant de ces choix ».

II - La position de votre commission

Il convient tout d'abord de souligner le caractère imprécis , et donc peu normatif, du présent article. Hormis la Caisse des dépôts qui est un acteur bien identifié, les « investisseurs institutionnels » ne constituent pas une catégorie juridique homogène.

Par ailleurs, la Caisse des dépôts publie chaque année un « rapport de responsabilité sociétale ». Quant aux autres investisseurs, l'article 225 de la loi dite « Grenelle II » 277 ( * ) a d'ores et déjà étendu aux principales entreprises financières et non financières l'obligation d'un rapport annuel sur la responsabilité sociale et environnementale .

Votre commission spéciale a supprimé cet article .

Article 40 bis (art. L. 144-1 du code monétaire et financier) - Fichier bancaire des entreprises (FIBEN)

Objet : cet article donne aux mutuelles et aux institutions de prévoyance la possibilité d'accéder au FIBEN, d'une part, et habilite le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures afin d'aménager les dispositifs de suivi du financement des entreprises, d'autre part .

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article L. 144-1 du code monétaire et financier prévoit que la Banque de France peut « communiquer tout ou partie des renseignements qu'elle détient sur la situation financière des entreprises [...] aux établissements de crédit et établissements financiers [...].

« Elle peut aussi communiquer ces renseignements aux entreprises d'assurance habilitées, dans les conditions prévues par le code des assurances, à pratiquer en France des opérations d'assurance crédit ou de caution, sous réserve que leurs interventions s'adressent à des entreprises ».

En pratique, cet article constitue la base légale au Fichier bancaire des entreprises (FIBEN).

Le FIBEN

« La banque de données FIBEN (Fichier bancaire des entreprises) est aujourd'hui un fichier de référence pour l'ensemble de la profession bancaire.

« Les entreprises qui y sont recensées font l'objet d'une cotation qui fournit des éléments d'appréciation de leur capacité à honorer leurs engagements financiers à un horizon de trois ans.

« Constituée au départ pour la mise en oeuvre de la politique monétaire, la banque de données FIBEN est également utilisée pour l'analyse des risques de crédit . Elle permet notamment d'apprécier la qualité d'un portefeuille de crédits, de détecter les financements les plus risqués .

« Les établissements de crédit et des administrations à vocation économique peuvent adhérer aux services FIBEN. Depuis 2010, les assureurs crédit et les assureurs caution pour les entreprises peuvent également accéder à une partie des services FIBEN. Les adhérents s'engagent par contrat à respecter les règles de confidentialité ».

Source : http://www.fiben.fr/fiben-en-quelques-lignes.htm

Le présent article a été introduit par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, avec un avis favorable du rapporteur.

Le I du présent article prévoit que les entreprises d'assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance qui investissent dans des prêts ou des titres assimilés 278 ( * ) pourront désormais accéder au FIBEN , ainsi que certaines sociétés de gestion définies par décret. Il procède aussi à différentes coordinations au sein de l'article L. 144-1 du code monétaire et financier.

Le II du présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance « les mesures relevant du domaine de la loi afin d'aménager les dispositifs de suivi du financement des entreprises mis en place par la Banque de France et l'Autorité des marchés financiers ».

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements présentés par notre collègue député Christophe Castaner, rapporteur thématique, avec l'avis favorable du Gouvernement. Le premier est rédactionnel, tandis que le second fixe un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi pour prendre l'ordonnance prévue par le II du présent article.

II - La position de votre commission

Devant la commission spéciale de l'Assemblée nationale, Emmanuel Macron, ministre de l'économie, a expliqué que « le financement des entreprises a connu une mutation profonde [...] reposant sur une diversification des instruments de financement et des financeurs. [...] Nous avons élaboré un cadre réglementaire prudent afin de sécuriser les financeurs et les entreprises ; le Gouvernement souhaite poursuivre cette démarche d'accompagnement de ces nouveaux acteurs du financement - qu'il s'agisse des entreprises d'assurance, des mutuelles, des institutions de prévoyance, des sociétés de gestion, des gérants de fonds de prêt à l'économie - en leur autorisant l'accès au fichier bancaire des entreprises - FIBEN - dans le cadre de leur activité de prêt. [...]

« Au-delà de la mesure technique, cette disposition s'avère importante pour favoriser la désintermédiation du financement de l'économie ; on a incité de nombreux acteurs non bancaires à assumer cette fonction, si bien que l'accès au FIBEN les aidera dans cette tâche ».

Quant à l'habilitation prévue au II du présent article, le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur qu'elle vise deux objectifs. Tout d'abord, il envisage un « toilettage » plus approfondi des dispositions de l'article L. 144-1 du code monétaire et financier.

Ensuite, le Gouvernement souhaiterait disposer d'un outil de suivi des placements privés 279 ( * ) afin d'assurer une plus grande transparence à ce marché . D'après les informations transmises à votre rapporteur par le Gouvernement, des travaux de la Place de Paris et au niveau européen sont en cours sur ce sujet, mais « ces travaux ne sont pas encore conclus et n'ont donc pas permis de retenir un modèle clair mais, selon toute vraisemblance, une base légale semble nécessaire pour permettre une déclaration des opérations systématiques à des fins :

« - de surveillance micro-économique du marché ;

« - d'articulation avec le FIBEN qui, en l'état actuel du droit, ne peut pas collecter d'information sur des titres, or les deux tiers du marché des placements privés prennent la forme d'un titre ;

« - de suivi macro-économique.

« Par ailleurs, ce travail [doit permettre] de préciser les responsabilités des différents superviseurs concernés ce qui nécessitera des dispositions de niveau législatif.

« Dans ces conditions, l'habilitation vise à pouvoir traduire rapidement le résultats des efforts de l'ensemble de la place qui travaille à localiser à Paris un marché particulièrement prometteur et essentiel au bon financement (sous droit français avec des investisseurs institutionnels ?de proximité?) des entreprises de taille intermédiaire françaises ».

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 40 ter A (art. L. 511-6 du code monétaire et financier) - Dérogation au monopole bancaire pour les mutuelles et les institutions de prévoyance

Objet : cet article crée une dérogation au monopole bancaire pour les mutuelles et les institutions de prévoyance, à l'instar de ce qui existe déjà pour les entreprises d'assurance .

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale, à l'initiative de nos collègues députés Gérard Bapt et Bernadette Laclais, avec un double avis favorable de la commission et du Gouvernement, celui-ci ayant aussi présenté un sous-amendement qui a été adopté.

L'article L. 511-5 du code monétaire et financier « interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit ou une société de financement d'effectuer des opérations de crédit à titre habituel ». C'est le principe du « monopole bancaire ». Seules les banques, régulées et supervisées de manière appropriée, ont normalement le droit d'accorder des prêts .

Toutefois, l'article L. 511-6 du même code liste un certain nombre d'exceptions, dont bénéficient notamment les entreprises d'assurance régies par le code des assurances.

L'amendement présenté par nos collègues députés tend à élargir cette exception aux institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale. Par cohérence, le sous-amendement du Gouvernement a proposé de l'élargir également aux mutuelles régies par le code de la mutualité .

II - La position de votre commission

Ainsi que l'a souligné notre collègue députée Bernadette Laclais lors de la présentation de son amendement, cette disposition est cohérente avec le récent décret 280 ( * ) autorisant les mutuelles et les institutions de prévoyance à investir dans les prêts et les fonds de prêts à l'économie et qui doit permettre de faciliter le financement des entreprises .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 40 ter (art. L. 137-16 du code de la sécurité sociale) - Abaissement du taux de forfait social de 20 à 8 % pendant six ans pour les très petites, petites et moyennes entreprises qui mettent en place pour la première fois un dispositif de participation ou d'intéressement

Objet : cet article, introduit en commission spéciale à l'Assemblée nationale par le Gouvernement, vise à abaisser à partir du 1 er janvier 2016 le taux du forfait social de 20 % à 8 % pendant six ans pour les très petites, petites et moyennes entreprises qui mettent en place volontairement pour la première fois un dispositif de participation ou d'intéressement.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article L. 137-16 du code de la sécurité sociale prévoit, en son premier alinéa, que le taux du forfait social est fixé à 20 %.

Toutefois, en son deuxième alinéa, un taux réduit de 8 % est accordé :

- pour les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit ;

- pour les sommes affectées à la réserve spéciale de participation dans les sociétés coopératives de production .

L'article 40 ter complète ce deuxième alinéa par deux alinéas qui prévoient une nouvelle application du taux réduit du forfait social à 8 %.

Ce taux réduit concernera également les sommes versées au titre de la participation et au titre de l'intéressement par une entreprise qui n'est pas soumise à l'obligation de mettre en place un dispositif de participation, si l'une des deux conditions suivantes est remplie :

- l'entreprise conclut pour la première fois un accord de participation ou d'intéressement ;

- elle n'a pas conclu l'un de ces accords au cours des cinq années précédant la date d'effet du nouvel accord.

Ce taux réduit s'appliquera pendant six années à compter de la date d'effet de l'accord 281 ( * ) . Les entreprises qui atteignent ou dépassent l'effectif de cinquante salariés au cours de cette période continueront de bénéficier du taux réduit jusqu'au terme des six années, sauf si cet accroissement résulte de la fusion ou de l'absorption d'une entreprise ou d'un groupe.

En effet, ce taux réduit ne s'appliquera pas dans les cas :

- de cession ou scission à une entreprise d'au moins cinquante salariés ;

- de fusion ou absorption donnant lieu à la création d'une entreprise ou d'un groupe d'au moins cinquante salariés.

Dans ces deux situations, la nouvelle entité juridique est alors redevable, dès sa création, de la contribution au taux de 20 %.

Aucun amendement n'a été adopté en séance publique sur cet article.

II - La position de votre commission

Si votre rapporteur est naturellement favorable à la philosophie de cet article, qui vise à inciter les TPE et PME à mettre en place des accords d'intéressement et de participation, il tient à rappeler au préalable que toute baisse de ressources du régime de la sécurité sociale issue d'une décision du Gouvernement doit lui être intégralement compensée 282 ( * ) . Or, l'abaissement de 20 à 8 % du forfait social instauré par l'article 40 ter représentera un manque à gagner que le Gouvernement peine à estimer. Ainsi, la Cnav, qui perçoit 80 % du produit du forfait social, et le FSV qui bénéficie du reliquat, verront leurs ressources diminuer à compter du 1 er janvier 2016 si le Gouvernement ne prévoit pas de compensation.

Votre rapporteur constate que cet article s'inscrit dans la continuité de la première proposition du rapport du Copiesas, mais manque d'ambition. Partant du constat que 83 % des salariés ont accès au moins à un régime d'épargne salariale dans les entreprises de plus de cinquante salariés, contre seulement 20 % dans les entreprises de dix à quarante-neuf salariés et 12 % dans celles de moins de dix salariés, le conseil proposait en effet d'exonérer du forfait social les TPE et PME qui, volontairement, décident d'opter pour la première fois pour un dispositif d'épargne salariale. Le rapport précité de la mission conjointe d'évaluation de l'IGF et de l'Igas avait également invité le Gouvernement, dans sa proposition n° 19-2, à abaisser le niveau du forfait social pour les entreprises en deçà d'un certain seuil de salariés, quand elles mettent en place un accord de participation ou d'intéressement 283 ( * ) . Dans le même sens, les partenaires sociaux , dans leur position commune précitée du 22 décembre 2014, ont souhaité que « les entreprises de moins de cinquante salariés puissent bénéficier d'une exonération de forfait social pour le premier accord d'intéressement ou de participation conclu pendant une durée de trois ans ». Le taux réduit de 8 % retenu dans le projet de loi constitue certes un avantage par rapport au taux de droit commun de 20 %, mais risque de ne pas être suffisamment attractif pour les entreprises visées par ce dispositif.

C'est pourquoi votre commission spéciale, à l'invitation de son rapporteur, a instauré par amendement une exonération de forfait social pendant trois ans pour les TPE et PME qui mettent en place volontairement, pour la première fois, un dispositif de participation ou d'intéressement, ou qui n'en ont pas conclu les trois années précédant la date d'effet du nouvel accord. Afin de lisser les effets de seuil et promouvoir la pérennité des régimes ainsi mis en place, un taux réduit de 8 % s'appliquera pendant les trois années suivantes , avant un retour au taux de droit commun. Par souci de cohérence juridique, les dispositions du présent article sont codifiées dans un nouvel article L. 137-18 du code de la sécurité sociale.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 40 quater - Rapport sur les bourses régionales

Le présent article a été introduit par la commission spéciale à l'initiative de notre collègue député Jean-Christophe Fromantin, avec un double avis favorable du rapporteur et du Gouvernement.

Il dispose que « dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la création de plateformes de cotations régionales ou de bourses régionales dans chaque métropole régionale, en Hexagone et dans les outre-mer 284 ( * ) , afin de fournir un outil de circuits courts de financement régional ».

Conformément à la position de vos rapporteurs, votre commission a supprimé le présent article , considérant que le sujet évoqué pourrait faire l'objet d'un rapport parlementaire, soit des commissions compétentes concernées, soit au travers une mission commune d'information ou de tout autre mode d'interrogation du Gouvernement, propre au contrôle parlementaire.

Votre commission spéciale a supprimé cet article .

Section 3 - Innover

Article 41 A (art. L. 111-6 du code de la recherche) - Information de la communauté scientifique

Objet : cet article, issu d'un amendement de séance à l'Assemblée nationale, vise à introduire dans le cadre de la stratégie nationale de recherche, définie à l'article L. 111-6 du code de la recherche, l'information de la communauté scientifique sur les matières intéressant les entreprises et l'administration.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Les objectifs et le contenu de la stratégie nationale de recherche, ainsi que les modalités d'évaluation de sa mise en oeuvre sont définis par l'article L. 111-6 du code de la recherche. Cette stratégie comporte une programmation pluriannuelle des moyens, révisée tous les cinq ans, dont l'objectif est le maintien d'une recherche fondamentale de haut niveau. Nos collègues députés Anne-Yvonne Le Dain et Jean-Yves Le Déaut, respectivement vice-présidente et président de l' office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), ont proposé d'intégrer au contenu de cette stratégie l'information des scientifiques dans les domaines intéressant les entreprises et les administrations. Cette information aurait pour objectif de permettre l'approfondissement des connaissances de la communauté scientifique sur les enjeux du monde des entreprises et de l'administration, afin de renforcer l'adéquation entre ces enjeux et la recherche fondamentale.

II - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cette précision.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 41 B (art. L. 131-1 du code de la recherche [rétabli]) - Principe d'innovation

Objet : ajouté en séance publique à l'Assemblée nationale, cet article vise à introduire le principe d'innovation dans le code de la recherche.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

De récents travaux de l'OPECST sur l'innovation ont évoqué l'intérêt d'introduire en droit français, à côté du principe de précaution, le principe d'innovation. En effet, les problèmes d'interprétation et d'application du principe de précaution ont mis en avant la nécessité de préciser ce principe, et notamment de ne pas l'interpréter comme une interdiction, dans un contexte d'incertitude scientifique, de la recherche ou de l'expérimentation. Corollaire du principe de précaution, le principe d'innovation permettrait de garantir la poursuite de la recherche dans les domaines où des incertitudes scientifiques existent.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur constate que le principe d'innovation peut présenter une utilité pour contrebalancer le principe de précaution. Toutefois, par leur nature déclaratoire, les dispositions qui introduisent ici le principe d'innovation dans le code de la recherche ne sont pas de nature à éclairer l'interprétation du principe de précaution. Votre rapporteur rappelle que la proposition de loi constitutionnelle de notre collègue Jean Bizet, adoptée par le Sénat et transmise à l'Assemblée nationale, a eu pour objet de modifier la Charte de l'environnement 285 ( * ) précisément afin de clarifier l'interprétation du principe de précaution, et de mettre en avant une exigence de recherche scientifique et de progrès technique, favorable à l'innovation.

En outre, cet article semble dépourvu de portée normative : en effet, il ne fixe pas de règle. Il indique la manière dont les personnes publiques doivent agir dans le cadre de leurs missions, or tel n'est pas le rôle de la loi.

À l'initiative de son rapporteur, v otre commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 41 (art. L. 423-1 et L. 811-1 du code de la propriété intellectuelle) - Sollicitation personnalisée et publicité des conseils en propriété industrielle

Objet : cet article vise à autoriser les conseils en propriété industrielle à recourir à la publicité et à la sollicitation personnalisée.

I - La modification proposée

Longtemps, le principe a été celui de la prohibition du démarchage en matière de prestations juridiques. Toutefois, un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne relatif à l'interdiction du démarchage pour les experts-comptables, qui a conclu à la contrariété de cette interdiction générale avec la directive « Services » 286 ( * ) , a conduit le Gouvernement, dans la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, à modifier la réglementation applicable aux avocats.

Aux termes de la nouvelle rédaction de l'article 66-4 de la loi du 31 décembre 1971 précitée, le démarchage en matière juridique demeure prohibé et punissable de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 150 000 euros. Toutefois, cette interdiction ne concerne pas les avocats qui peuvent recourir, dans les conditions fixées à l'article 3 bis du même texte, à une sollicitation personnalisée.

Comme cela avait été souligné à l'époque par notre collègue Thani Mohamed-Soilihi 287 ( * ) , cette limitation aux seuls avocats de la possibilité de réaliser de telles sollicitations personnalisées pouvait poser problème puisque d'autres professions, qui relevaient de la directive « Services » étaient, elles aussi, autorisées à pratiquer le droit à titre d'activité principale.

Tel est le cas pour les conseils en propriété industrielle (CPI) dont les actions de démarchage ou de publicité étaient jusqu'à présent enserrées dans des limites très strictes, fixées à l'article L. 423-1 du code de la propriété intellectuelle. En particulier, le démarchage ne pouvait être effectué que par voie postale.

Le présent article vise à aligner le régime juridique applicable aux CPI en ces matières sur celui des avocats, en autorisant le recours à la sollicitation personnalisée et à la publicité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Un amendement adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, à l'initiative des rapporteurs, a ajouté une obligation aux conseils en propriété industrielle qui procéderaient à une sollicitation personnalisée : celle d'accompagner leur démarche de la communication « d'informations générales sur le droit de la propriété industrielle ».

II - La position de votre commission

L'intérêt du dispositif proposé est évident, puisqu'il supprime une inégalité de traitement et qu'il favorisera l'activité des conseils en propriété industrielle auprès des entreprises.

Toutefois, votre commission a supprimé par amendement l'ajout des députés, estimant qu'il contraindrait les professionnels à inclure des documents d'ordre très général dans une démarche qui, pour être efficace, doit être précise et adaptée à celui auquel elle s'adresse. Elle a par ailleurs procédé à une coordination nécessaire au sein de la loi du 31 décembre 1971.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 41 bis A (art. L. 432-2 du code des assurances) - Rapport sur la garantie publique relative à la réassurance des opérations d'export de court terme

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, demande un rapport annuel au Gouvernement sur la garantie publique accordée à la Coface sur un dispositif permettant de réassurer les opérations d'export à court terme.

I - Le dispositif proposé

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Karine Berger, avec les avis favorables du Gouvernement et de la commission.

L'article 77 de la loi de finances rectificative pour 2013 288 ( * ) a accordé à la Coface 289 ( * ) la garantie de l'État , codifiée au e) de l'article L. 432-2 du code des assurances, pour « ses opérations de réassurance des entreprises habilitées à pratiquer en France des opérations d'assurance-crédit, au titre des opérations d'assurance des risques commerciaux à l'exportation d'une durée de paiement inférieure à deux ans que celles-ci réalisent vers des pays autres que les pays de l'Union européenne et les pays à haut revenu de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) , [...] . L'octroi de cette garantie est subordonné à la constatation d'une défaillance du marché de l'assurance-crédit. [...] Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent e, notamment celles ayant trait à la constatation de la défaillance du marché ».

Le présent article complète le e) de l'article L. 432-2 du code des assurances afin de prévoir que « le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1 er octobre de chaque année, un rapport d'évaluation sur l'application du présent e) ».

Cette disposition, déjà introduite par l'Assemblée nationale lors de l'examen de la loi de finances rectificative précitée, avait été censurée par le Conseil constitutionnel pour des motifs de procédure.

II - La position de votre commission

Plusieurs arguments ont conduit votre rapporteur à proposer à votre commission un amendement de suppression de cet article.

Tout d'abord, le décret d'application du e) précité n'a pas été pris . Ce nouveau dispositif de garantie n'est donc pas encore mis en oeuvre .

En outre, le Gouvernement vient d'annoncer qu'il entamait une réflexion sur un éventuel transfert de la gestion des garanties publiques à l'exportation à la Banque publique d'investissement 290 ( * ) . Il ne paraît donc pas opportun de demander un rapport sur un dispositif qui est susceptible d'être prochainement modifié.

Enfin, conformément à sa position déjà exprimée sur des articles précédents, votre commission estime que de trop nombreux rapports sont demandés au Gouvernement alors que le Parlement peut se saisir de lui-même des questions ainsi soulevées.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 41 bis B (art. L. 422-9 du code de la propriété intellectuelle) - Promotion de l'accès aux prestations des conseils en propriété industrielle

Objet : le présent article, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue députée Karine Berger et plusieurs de ses collègues, vise à confier à la compagnie nationale des conseils en propriété industrielle (CPI) la mission de promouvoir l'accès à leurs prestations sur l'ensemble du territoire.

Cette disposition, largement redondante avec la mission dévolue à la compagnie nationale de défendre les intérêts professionnels des CPI, ne paraît pas nécessaire.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 41 bis C - Rapport sur l'accès des PME au conseil en matière de propriété industrielle

Objet : cet article prévoit la remise, par le Gouvernement, d'un rapport au Parlement sur l'accès des petites et moyennes entreprises au conseil en matière de propriété industrielle.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article 41 bis C, introduit en séance publique par un amendement de notre collègue députée Karine Berger et plusieurs de ses collègues, prévoit la remise au Parlement d'un rapport visant à faire l'état des lieux de l'offre et de la demande de conseils en propriété industrielle et des relations de ces derniers avec les petites et moyennes entreprises. L'objet de ce rapport est de proposer des pistes de réflexion pour l'amélioration de l'accès de ces entreprises aux conseils en propriété industrielle, afin d'y favoriser l'innovation.

II - La position de votre commission

Conformément à la proposition des rapporteurs de supprimer l'ensemble des demandes de rapport au Parlement, votre commission a adopté un amendement de suppression de l'article 41 bis C.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 41 bis D - Rapport sur la spécialisation d'un « petit nombre de magistrats » en propriété industrielle

Objet : Ajouté en séance publique à l'Assemblée nationale, cet article vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l'opportunité et les conditions de spécialisation en droit de la propriété industrielle d'un petit nombre de magistrats.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Introduit par un amendement de nos collègues députées Karine Berger et Valérie Rabault, l'article 41 bis D prévoit que le Gouvernement remette au Parlement un rapport relatif à la spécialisation de magistrats dans le domaine de la propriété intellectuelle. Selon les auteurs de l'amendement, cette spécialisation, régulièrement évoquée dans le débat parlementaire, permettrait, par la formation spécialisée et de haut niveau de magistrats, d'améliorer la lutte contre la contrefaçon.

II - La position de votre commission

Nos collègues Laurent Béteille et Richard Yung, dans leur rapport d'information sur la lutte contre la contrefaçon 291 ( * ) avaient montré l'intérêt de la spécialisation des magistrats en matière de propriété industrielle, et plus généralement de propriété intellectuelle. Ces derniers avaient en particulier noté que la loi du 29 octobre 2007 292 ( * ) , en spécialisant les juridictions par le biais du regroupement fonctionnel des contentieux en matière de propriété intellectuelle, constituait un progrès dans la lutte contre la contrefaçon. Mais ils avaient également souligné que la question essentielle était celle des compétences et de l'expertise des magistrats, or le moyen le plus pertinent de renforcer ces dernières passe par le développement et le suivi de parcours professionnels construits autour de la spécialisation en contentieux de la propriété intellectuelle.

Malgré l'intérêt de la question, votre commission spéciale a adopté un amendement de suppression de cet article, conformément à la proposition des rapporteurs de supprimer l'ensemble des demandes de rapport du Gouvernement au Parlement.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 41 bis (art. L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle) - Information de l'inventeur salarié sur le dépôt d'une demande ou l'obtention d'un brevet

Objet : cet article, introduit en commission à l'Assemblée nationale, vise à obliger à l'employeur à informer le salarié auteur d'une invention du dépôt d'une demande de brevet ou de la délivrance d'un brevet protégeant cette invention.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle définit le régime des inventions dont l'auteur est un salarié. Ce régime prévoit notamment qu'appartiennent à l'employeur « les inventions faites par le salarié dans l'exécution soit d'un contrat de travail comportant une mission inventive [...], soit d'études et de recherches qui lui sont explicitement confiées ». Issu d'un amendement du rapporteur général et de l'ensemble des rapporteurs thématiques, l'article 41 bis tend à compléter l'article L. 611-7 en imposant à l'employeur d'informer le salarié auteur d'une invention du dépôt d'une demande de brevet ou de la délivrance d'un brevet concernant cette invention. En précisant les conditions de transparence de la relation entre l'inventeur salarié et son employeur, l'objet de ces dispositions est de prévenir tout contentieux.

II - La position de votre commission

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement à cet article afin de préciser, d'une part, que l'employeur doit informer le salarié dans le cadre du dépôt de demande de tout titre de propriété intellectuelle, et non pas seulement d'un brevet, et, d'autre part, que le salarié doit être informé à la fois lors du dépôt de la demande de titre de propriété et lors de la délivrance, le cas échéant, de ce titre.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié .

Article 41 ter - Rapport sur l'impact, pour le droit, de l'innovation ouverte

Objet : cet article, introduit en commission spéciale à l'Assemblée nationale, tend à demander au Gouvernement la remise d'un rapport au Parlement sur l'impact de l'innovation ouverte sur le droit.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Introduit par un amendement de notre collègue député Jean-Yves Caullet, l'article 41 ter prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport « sur l'impact de l'innovation ouverte pour le droit et la pertinence d'une adaptation des outils juridiques ». Les entreprises pratiquent en effet de plus en plus l'innovation ouverte, fondée notamment sur le partage libre de leur savoir-faire et l'utilisation de licences libres. Le développement de ce mode d'innovation pose la question de l'adaptation du droit de la propriété intellectuelle, fondé sur le système des brevets.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression de l'article 41 ter.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 42 (art. L. 6143-1, L. 6143-4, L. 6143-7 et L. 6145-7 du code de la santé publique) - Filiales des centres hospitaliers universitaires

Objet : cet article vise à permettre, sous conditions, aux centres hospitaliers universitaires de prendre des participations et de créer des filiales.

I - Le dispositif proposé

La possibilité pour les organismes d'enseignement ou de recherche de valoriser commercialement leur savoir-faire a été encouragé dans un contexte de recherche de ressources nouvelles susceptibles de venir compléter des financements publics fragiles . Comme le soulignait notre collègue Philippe Adnot dans son rapport sur la valorisation de la recherche universitaire 293 ( * ) , « si la mission de valorisation de la recherche a été prévue dans les textes législatifs dès 1982, et plus particulièrement dès 1984 pour les universités » sa mise en oeuvre « n'a commencé à se généraliser qu'à partir des textes d'application de la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation ». Par la suite, la loi du 18 avril 2006 294 ( * ) a autorisé les universités à confier à des personnes morales de droit privé leurs activités de valorisation. L'Inserm, le CNRS et les universités ont ainsi pu créer des filiales non soumises aux règles des marchés publics et de la comptabilité publique et embaucher des personnels de droit privé en dehors des règles de recrutement et des plafonds d'emploi qui s'imposent pour leurs personnels propres.

Les centres hospitaliers universitaires (CHU), organismes de soins, d'enseignement et de recherche, qui relèvent de dispositions spécifiques figurant dans le code de la santé publique, n'ont pas été inclus dans ces évolutions législatives alors qu'ils développent une activité de valorisation de la recherche menée en leur sein et d'expertise internationale. Leur capacité d'action se trouve donc entravée, dans un monde de concurrence internationale exacerbée .

Le présent article entend remédier à cette situation en leur étendant les possibilités ouvertes aux organismes de recherche et aux universités. Il comprend quatre dispositions.

Les et de l'article imposent au directeur du CHU (art. L. 6143-7) de soumettre les décisions de prises de participation et les créations de filiales à la délibération du conseil de surveillance de l'établissement (art. L. 6143-1). Son permet au directeur général de l'agence régionale de santé de s'opposer à ces décisions dans un délai de deux mois (art. L. 6143-4).

Le modifie l'article L. 6145-7 pour accorder la possibilité aux CHU de prendre des participations et de créer des filiales sous une double condition. D'une part, cette faculté est limitée à la prestation d'expertise au niveau international , à la valorisation des activités de recherche et de leurs résultats et à l'exploitation des brevets et licences. D'autre part, un cadre fixant les « conditions et limites » de ces dispositions doit être établi par décret en Conseil d'État.

Le déficit lié à ces activités n'est pas opposable aux collectivités publiques et organismes qui assurent le financement de ces établissements. La rédaction actuelle de ce même article L. 6145-7, qui reconnaît aux CHU la possibilité, à titre subsidiaire, « [d'] assurer des prestations de service, [de] valoriser les activités de recherche et leurs résultats et [d'] exploiter des brevets et des licences dans le cadre de services industriels et commerciaux », sans toutefois qu'ils puissent créer une filiale de droit privé dédiée pour le faire, le prévoit déjà.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté un amendement, présenté par son rapporteur général et ses rapporteurs thématiques, permettant aux filiales des CHU de réaliser des prestations de services , et non plus seulement d'expertise, à l'étranger. Il s'agit de leur donner la capacité de promouvoir leur expérience en matière d'équipement médical ou encore de gestion hospitalière.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à cet article qui aligne les conditions de valorisation de la recherche et de l'expertise des CHU sur celles applicables aux autres universités et organismes de recherche.

Il s'interroge néanmoins sur la portée pratique du caractère inopposable des déficits éventuels aux collectivités publiques qui financent les CHU. Quelles seraient les conséquences financières de l'échec d'un projet à l'étranger ?

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

CHAPITRE II

Entreprises à participation publique
Section 1

Ratification et modification de l'ordonnance n° 2014-948
du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations
sur le capital des sociétés à participation publique

L'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique

L'ordonnance , prise sur le fondement de l'article 10 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, comprend 42 articles et procède à la refonte de l'ensemble du cadre juridique applicable à l'État en tant qu'actionnaire de sociétés commerciales . Le cadre juridique applicable à la gestion des établissements publics industriels et commerciaux reste celui défini par la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

Cette refonte était devenue indispensable tant les textes législatifs et réglementaires s'étaient empilés depuis trente ans avec les vagues successives de nationalisation puis de privatisation.

L'ordonnance s'applique à toutes les sociétés commerciales dont l'État ou ses établissements publics détiennent, directement ou indirectement, une participation au capital (article 1 er ) . D'après les éléments transmis par l'Agence des participations de l'État, environ 1 300 sociétés, filiales incluses, seraient ainsi concernées.

Le titre II de l'ordonnance prévoit des règles de gouvernance applicables à ces sociétés.

Il rapproche le mode de nomination des administrateurs de celui en vigueur dans le secteur privé . Le nombre de représentants de l'État au sein du conseil sera proportionnel à sa détention capitalistique, ce qui n'était pas le cas auparavant 295 ( * ) . La taille impérative des conseils d'administration ou de surveillance est supprimée. Ils seront désormais composés de trois à dix-huit membres. En revanche, le nombre de sièges réservés aux salariés reste fixé à un tiers des membres du conseil.

L'ordonnance permet également de choisir les administrateurs représentant l'État parmi des personnes qui ne sont pas agents publics. L'Agence des participations de l'État entend ainsi développer un « vivier » d'administrateurs ayant des expériences diversifiées, venant notamment du secteur privé. La rémunération de ces administrateurs est plafonnée à 30 % des jetons de présence, le surplus étant reversé au budget de l'État.

Enfin, la fonction de l'État actionnaire est bien différenciée de celle de l'État régulateur puisqu'un commissaire du Gouvernement peut être nommé et assister aux séances du conseil avec voix consultative pour exposer la « politique du Gouvernement dans le secteur d'activité [concerné] ».

Le titre III de l'ordonnance porte sur les opérations en capital
- acquisitions ou cessions - conduites par l'État
.

S'agissant des acquisitions, celles-ci sont décidées par un décret lorsqu'elles entrainent le transfert de la majorité du capital d'une société au secteur public. Dans les autres cas, elles sont décidées par arrêté du ministre de l'économie. La Commission des participations et des transferts ( cf. infra ) peut être saisie pour donne un avis simple sur le prix d'achat des titres par l'État.

S'agissant des cessions, plusieurs procédures existent en fonction de la taille de l'entreprise et de la part du capital transféré au secteur privé.

Une autorisation législative est nécessaire lorsque l'opération conduit au transfert au secteur privé de la majorité du capital d'une société :

- lorsque la société est entrée dans le secteur public en application d'une disposition législative ;

- lorsque l'État détient directement, depuis plus de cinq ans, plus de la moitié du capital et que :

* ses effectifs, y compris ceux des filiales, sont supérieurs à 1 000 personnes ;

* ou son chiffre d'affaires consolidé avec celui de ses filiales est supérieur à 150 millions d'euros.

C'est en application de ces dispositions que le projet de loi comprend plusieurs articles autorisant des opérations de privatisation.

La cession est effectuée par décret si elle conduit à ramener la participation en-dessous des deux tiers (possibilité de constitution d'une minorité de blocage contre l'État), ou du tiers (perte de la minorité de blocage). Il en va de même si la cession entraîne le transfert de la majorité du capital dans un cas qui ne nécessite pas une autorisation législative. Dans tous les autres cas, elle est effectuée par arrêté , comme ce fut récemment le cas pour la cession de 3,96 % du capital de la société Safran 296 ( * ) .

Enfin, pour l'application de ces dispositifs, il convient de considérer que la cession d'un actif représentant plus de 50 % de l'actif net comptable est équivalente à la cession de la majorité du capital.

De même, une opération d'augmentation de capital qui a des effets identiques à une cession en termes de perte de contrôle doit être décidée dans les formes rappelées ci-dessus.

L'ordonnance procède également à un renforcement du rôle de la Commission des participations et des transferts .

Ce collège indépendant de personnalités qualifiées a pour mission de rendre un avis conforme sur le prix des cessions réalisées par l'État . Le contrôle de la Commission permet d'éviter que l'État ne cède à vil prix ses participations.

Elle est obligatoirement consultée :

- pour toute cession qui n'est pas opérée sur les marchés financiers ;

- pour toute cession opérée sur les marchés financiers et qui réponde aux critères suivants :

* l'État transfère la majorité du capital d'une société au secteur privé ;

* l'État cède au moins 0,5 % du capital d'une société dont l'effectif est supérieur à 1 000 personnes et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 150 millions d'euros ;

* un établissement public de l'État ou une société dont il est majoritairement actionnaire transfère au secteur privé plus de la moitié du capital d'une société dont l'effectif est supérieur à 1 000 personnes et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 150 millions d'euros.

Article 43 A (art. L. 225-27-1 et L. 225-79-2 du code de commerce, 1136 du code général des impôts, 4, 6-2, 14, 15 et 17 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public) - Mise en cohérence de différents codes et de la loi du 26 juillet 1983 avec l'ordonnance du 20 août 2014

Dans sa version initiale, l'article 43 du présent projet de loi prévoyait une habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance à diverses corrections et modifications de l'ordonnance n° 2014-948.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'habilitation prévue à l'article 43 a été supprimée. Les modifications envisagées ont été introduites dans le présent projet de loi aux articles 43 A, 43 B et 43 C .

Le présent article procède à différentes coordinations entre les dispositions de l'ordonnance et le code de commerce, le code général des impôts et la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la modernisation du secteur public.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 43 B (art. 7, 8, 16, 22, 23, 24 et 34 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Corrections apportées à l'ordonnance du 20 août 2014

Dans sa version initiale, l'article 43 du présent projet de loi prévoyait une habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance à diverses corrections et modifications de l'ordonnance n° 2014-948.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'habilitation prévue à l'article 43 a été supprimée. Les modifications envisagées ont été introduites dans le présent projet de loi aux articles 43 A, 43 B et 43 C .

Le présent article apporte des corrections à l'ordonnance n° 2014-948 ou bien la complète afin de clarifier le droit applicable, notamment en ce qui concerne les règles de représentation des salariés au sein des organes de gouvernance.

En séance publique, à l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements de précision rédactionnelle et un amendement qui complète l'ordonnance.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 43 CA (art. 21-1 [nouveau] de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Règles de cession de la majorité du capital d'une société cotée

Objet : cet article prévoit que le transfert au secteur privé de la majorité d'une société « s'accompagne des garanties nécessaires à la préservation des intérêts essentiels de la Nation dans les domaines concernés ».

En séance publique, à l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a introduit le présent article qui complète l'ordonnance n° 2014-948 précitée en disposant que « sans préjudice des dispositions particulières de l'article 31-1, toute opération de cession par l'État au secteur privé conduisant à transférer la majorité du capital d'une société s'accompagne des garanties nécessaires à la préservation des intérêts essentiels de la Nation dans les domaines concernés . Le cas échéant, le cahier des charges de l'appel d'offres portant cession du capital intègre cette exigence ».

Votre rapporteur note le caractère extrêmement vague de l'expression « intérêts essentiels de la Nation » qui rend le présent article plus déclamatoire que normatif .

Cette imprécision pourrait même se révéler préjudiciable puisqu'elle fait peser une incertitude juridique sur toutes les opérations de cession . Chacune de ces opérations pourra être contestée devant le juge sur le motif qu'un « intérêt essentiel de la Nation » n'a pas été préservé. Dans un tel cas, la conduite de la société sera fortement perturbée puisque le recours en justice fera peser un doute sur l'identité de son actionnaire majoritaire .

En outre, le présent article fait explicitement référence à l'article 31-1 de l'ordonnance ( cf. infra le commentaire de l'article 44) qui régit le recours par l'État aux actions spécifiques. Une action spécifique est un dispositif juridique précisément encadré qui permet à l'État de préserver ses intérêts dans les matières d'ordre public, de santé publique, de sécurité publique ou de la défense nationale . Le présent article est donc au mieux redondant avec les dispositions relatives aux actions spécifiques tout en étant moins précis.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 43 C (art. 41 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Encadrement des opérations de privatisation réalisées par les collectivités territoriales et leurs groupements

Objet : cet article encadre les modalités de cession au secteur privé de la majorité d'une entreprise détenue par une collectivité territoriale.

I - Le dispositif proposé

Dans sa version initiale, l'article 43 du présent projet de loi prévoyait une habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance à diverses corrections et modifications de l'ordonnance n° 2014-948.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'habilitation prévue à l'article 43 a été supprimée. Les modifications envisagées ont été introduites dans le présent projet de loi aux articles 43 A, 43 B et 43 C.

Le présent article porte sur l'encadrement des cessions des participations détenues par des collectivités territoriales.

En l'état actuel, le II de l'article 7 de la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 autorisant le Gouvernement à prendre diverses mesures d'ordre économique et social prévoit que ces cessions « sont soumises à l'approbation de l'autorité administrative, dans des conditions fixées par les ordonnances mentionnées à l'article 5 ».

Les ordonnances mentionnées n'ont finalement pas été prises. Les conditions de l'approbation de l'autorité administrative ont été définies par les articles 20 à 22 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations.

Ainsi, les opérations de cession portant sur des entreprises majoritairement détenues par une collectivité territoriale et dont les effectifs sont supérieurs à 1 000 ou dont le chiffre d'affaires est supérieur à 150 millions d'euros doivent faire l'objet d'une autorisation préalable par décret .

L'article 20 de la loi n° 86-912 précitée dispose que « l'autorisation ne peut être donnée qu'au vu d'un dossier comprenant l'évaluation de la valeur de l'entreprise [...] par des experts indépendants désignés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. [...]

« L'autorisation ne peut être accordée si le prix d'offre ou le prix de cession est inférieur à la valeur fixée par les experts ou si les intérêts nationaux ne sont pas préservés ».

Un avis conforme de la Commission des participations et des transferts - qui fixe alors le prix de cession - est prévu pour les entreprises dont l'effectif dépasse 2 500 personnes ou le chiffre d'affaires 375 millions d'euros.

Les autres opérations font l'objet d'une déclaration préalable au ministre chargé de l'économie, qui peut s'y opposer dans les dix jours.

En l'état actuel, le II de l'article 41 de l'ordonnance n° 2014-948 prévoit le maintien du droit en vigueur - celui issu de la deuxième loi de privatisation de 1986 - pour les opérations de cession des collectivités territoriales.

Le présent article supprime ce II et établit la disposition suivante : « les opérations par lesquelles une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales transfère au secteur privé la majorité du capital d'une société réalisant un chiffre d'affaire supérieur à 75 millions d'euros ou employant plus de 500 personnes, appréciés sur une base consolidée, font l'objet d'une autorisation préalable de l'État, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État ».

II - La position de votre commission

Il faut d'abord souligner que, d'après les informations transmises à votre rapporteur, ce régime d'autorisation préalable n'a jamais été mis en oeuvre depuis sa création. Il soulève cependant une question au regard de sa constitutionnalité.

En 1986, dans sa décision sur la première loi de privatisation (loi n° 86-793 du 2 juillet 1986), le Conseil constitutionnel avait explicitement jugé que les dispositions encadrant la cession de sociétés par les collectivités territoriales et devant être prises par ordonnance « devront respecter le principe de libre administration de ces collectivités posé par l'article 72 de la Constitution » 297 ( * ) .

Finalement, le Gouvernement fit le choix ne pas prendre d'ordonnance et d'inscrire ces dispositions dans la seconde loi de privatisation (loi n ° 86-912 du 6 août 1986). Or cette dernière n'a pas été déférée devant le Conseil constitutionnel. La conformité du régime en vigueur avec le principe de libre administration des collectivités territoriales n'a donc pas été examinée.

Le régime d'autorisation préalable de 1986 avait pour objet d'empêcher une collectivité territoriale de céder une participation à vil prix , d'où le dispositif très circonstancié prévu par la loi. À l'inverse, le droit proposé par le présent article renvoie toutes les modalités de cette autorisation à un décret en Conseil d'État.

En tout état de cause, le régime de l'autorisation préalable - qu'il s'agisse du droit de 1986 ou du droit proposé - laisse subsister un doute sur le degré d'appréciation en opportunité conféré à l'État et donc sur sa conformité avec le principe de la libre administration des collectivités territoriales.

Afin de lever toute ambiguïté tout en contribuant à protéger le patrimoine des collectivités territoriales, votre rapporteur propose de substituer au régime de l'autorisation préalable un avis conforme de la Commission des participations et des transferts, à l'instar de la pratique suivie pour l'État .

En effet, la Commission a pour seule mission de déterminer la valeur de l'actif cédé et n'émet pas d'avis en opportunité .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 43 (art. 2 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Ratification et modification de l'ordonnance n° 2014-948

Objet : cet article procède à la ratification de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.

Le I du présent article ratifie l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique. Conformément à l'article 38 de la Constitution, une ordonnance doit être ratifiée de manière expresse .

Dans sa version initiale, le II du présent article prévoyait une habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance à diverses corrections et modifications rédactionnelles de l'ordonnance n° 2014-948.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'habilitation prévue a été supprimée par la commission spéciale. Les modifications envisagées ont été introduites dans le présent projet de loi aux articles 43 A, 43 B et 43 C.

En séance publique, à l'initiative de nos collègues députés Henri Emmanuelli et Clotilde Valter et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a ajouté un I bis au présent article. Il prévoit que, pour l'application de l'ordonnance, à l'exception du titre II qui concerne la gouvernance des participations, la Caisse des dépôts et consignations est assimilée à un établissement public de l'État .

En effet, plusieurs procédures prévues par l'ordonnance, notamment pour les cessions de participations, dépendent de seuils qui sont calculés en faisant masse des participations détenues par l'État conjointement avec ses établissements publics ou indirectement à travers ces derniers.

Compte tenu de son statut ad hoc , il subsistait une ambiguïté sur le mode de calcul de ces seuils lorsque la Caisse des dépôts détient une participation conjointement avec l'État, que la modification adoptée par l'Assemblée nationale permet de lever.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 43 bis (art. 22 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Abaissement des seuils entraînant la compétence du législateur en cas de privatisation d'une société détenue par l'État

Objet : cet article abaisse de moitié les seuils entraînant la compétence du législateur pour autoriser la privatisation d'une entreprise détenue par l'État.

I - Le dispositif proposé

L'article 22 de l'ordonnance n° 2014-948 précitée prévoit que la cession de la majorité d'une société au secteur privé est autorisée par le législateur si l'État détient depuis plus de cinq ans la moitié du capital et si ses effectifs sont supérieurs à 1 000 ou si son chiffre d'affaires est supérieur à 150 millions d'euros.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, les seuils d'effectif et de chiffre d'affaires visés à l'article 22 de l'ordonnance ont été diminués de moitié, soit 500 personnes ou 75 millions d'euros.

II - La position de votre commission

D'après les informations transmises à votre rapporteur, l'abaissement des seuils à l'article 22 de l'ordonnance conduit à faire rentrer dans le champ de compétence du législateur trois sociétés supplémentaires : la Société de financement local (SFIL), la Semmaris (qui gère la concession du marché de Paris-Rungis) et l'Aéroport de Marseille-Provence.

Le présent article conduit à étendre l'autorisation parlementaire, si une privatisation devait être envisagée, à des sociétés importantes au regard de la sensibilité de leur activité. Elle est donc bienvenue.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 43 ter (art. 26 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Abaissement des seuils entraînant la compétence de la Commission des participations et des transferts en cas de transferts de participations au secteur privé

Objet : cet article abaisse les seuils entraînant la compétence de la Commission des participations et des transferts.

I - Le dispositif proposé

Par analogie avec les modifications apportées par l'article 43 bis du présent projet de loi, la commission spéciale de l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, a diminué de moitié les seuils entraînant la compétence de la Commission des participations et des transferts.

Comme à l'article 43 bis , ils sont réduits de moitié et s'établissent respectivement à 500 personnes ou 75 millions d'euros.

II - La position de votre commission

Le présent article est cohérent avec l'article 43 bis du présent projet de loi, qui a été adopté par votre commission.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 43 quater (art. 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public) - Modalités de désignation des administrateurs des établissements publics

Objet : cet article permet que l'État nomme dans les conseils d'administration ou de surveillance des établissements publics industriels et commerciaux des personnalités qualifiées « ayant une connaissance des problématiques liées à l'innovation et au développement d'entreprises innovantes » .

I - Le dispositif proposé

La loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public régit les établissements publics industriels et commerciaux de l'État.

Son article 5 dispose notamment que « le conseil d'administration ou de surveillance comprend : [...]

« 2° des personnalités choisies, soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit en raison de leur connaissance des aspects régionaux, départementaux ou locaux des activités en cause, soit en raison de leur connaissance des activités publiques et privées concernées par l'activité de l'entreprise, soit en raison de leur qualité de représentants des consommateurs ou des usagers , nommées par décret pris, le cas échéant, après consultation d'organismes représentatifs desdites activités ».

En séance publique, à l'initiative de notre collègue député Bruno Le Roux et des membres du groupe socialiste, avec un double avis favorable de la commission et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a introduit le présent article qui ajoute à la liste des personnalités pouvant être choisies en raison de leur compétence celles qui ont une « connaissance des problématiques liées à l'innovation et au développement d'entreprises innovantes ».

II - La position de votre commission

Cette disposition s'inspire des conclusions d'un rapport d'information sur le développement de l'économie numérique française 298 ( * ) présenté par nos collègues députées Corinne Erhel et Laure de la Raudière.

En tout état de cause, le présent article ne fait qu'offrir à l'État une faculté supplémentaire de choix pour la nomination des personnalités qualifiées.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 44 (art. 31-1 [nouveau] de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Mise en conformité du droit applicable aux actions spécifiques avec le droit européen

Objet : cet article procède à la refonte du régime juridique applicable aux « actions spécifiques » par lesquelles l'État détient des pouvoirs exorbitants du droit commun dans certaines entreprises stratégiques.

I - Le dispositif proposé

L'article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités de privatisation prévoit la possibilité pour l'État de convertir une action ordinaire en une « action spécifique » qui lui donne des droits exorbitants du droit commun.

Ainsi, les droits attachés à une action spécifique permettent à l'État :

- de s'opposer à la montée au capital d'un investisseur français ou étranger ;

- de nommer au conseil d'administration ou de surveillance un ou deux administrateurs sans voix délibérative ;

- de s'opposer à toute cession ou affectation à titre de garantie d'actifs qui serait de nature à porter atteinte aux intérêts nationaux.

Les actions spécifiques détenues par l'État

Thales (décret n° 97-190 du 4 mars 1997 instituant une action spécifique de l'État au capital de Thomson CSF)

L'État dispose des droits et obligations suivants :

i. Approbation préalable par le ministre chargé de l'économie de tout franchissement à la hausse des seuils de détention directe ou indirecte de titres du dixième ou d'un multiple du dixième du capital ou des droits de vote de la société.

Tous les franchissements de seuil ont reçu l'approbation du ministre (montée de Dassault Aviation au capital de Thales en 2009).

ii. Nomination d'un représentant de l'État au conseil d'administration sans voix délibérative ;

iii. Droit d'opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs stratégiques définis par le décret.

Aucun veto n'a été notifié depuis la création de cette action spécifique.

Herakles , filiale de Safran (décret n° 2011-268 du 14 mars 2011 instituant une action spécifique de l'État au capital de SNPE Matériaux Énergétiques)

L'État dispose des droits et obligations suivants :

i. Approbation préalable par le ministre chargé de l'économie de tout franchissement à la hausse des seuils de détention directe ou indirecte de titres représentant le tiers ou la majorité du capital ou des droits de vote de la société ;

Tous les franchissements de seuil ont reçu l'approbation du ministre (création d'Herakles en 2011 par rachat de SPS par SNPE ME).

ii. Nomination d'un représentant de l'État au conseil d'administration sans voix délibérative ;

iii. Droit d'opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs stratégiques définis par le décret.

Aucun veto n'a été notifié depuis la création de cette action spécifique.

GDF-Suez (décret n° 2007-1790 du 20 décembre 2007 instituant une action spécifique de l'État au capital de Gaz de France SA)

L'État dispose des droits et obligations suivants :

i. Droit d'opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs stratégiques suivants : canalisations de transport de gaz naturel situées sur le territoire national ; actifs liés à la distribution de gaz naturel situés sur le territoire national ; stockages souterrains de gaz naturel situés sur le territoire national ; installations de gaz naturel liquéfié situées sur le territoire national.

Aucun veto n'a été notifié depuis la création de cette action spécifique.

Source : Agence des participations de l'État

Le présent article introduit un nouvel article 31-1 au sein de l'ordonnance n° 2014-948, qui modernise le cadre juridique applicable aux actions spécifiques, et abroge l'article 10 de la loi du 6 août 1986 précité.

Ces dispositions n'ont pas été intégrées à l'ordonnance dès sa publication car l'habilitation législative sur le fondement duquel elle a été prise ne le permettait pas.

A. Un encadrement strict par le droit européen

Les actions spécifiques sont des mesures restrictives à la liberté d'établissement ou de circulation des capitaux qui, en tant que telles, sont sévèrement encadrées par le droit européen et par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne.

Le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne autorise cependant quelques restrictions. En matière de liberté d'établissement, il est possible de prévoir des mesures spécifiques pour les ressortissants étrangers « justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique » (article 52 du Traité). En matière de liberté de circulation des capitaux, l'article 65 du Traité stipule que les États membres ont le droit de prendre des « mesures justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique ».

Enfin, l'article 346 du Traité autorise tout État membre à « prendre les mesures qu'il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions et de matériel de guerre ; ces mesures ne doivent pas altérer les conditions de la concurrence dans le marché intérieur en ce qui concerne les produits non destinés à des fins spécifiquement militaires ».

En outre, la Cour de justice de l'Union européenne a considéré que des « raisons impérieuses d'intérêt général » pouvaient justifier des restrictions à la liberté de circulation des capitaux. Dans ce cas cependant, « la réglementation nationale doit être propre à garantir la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint, en vue de répondre au critère de proportionnalité » 299 ( * ) .

B. Un cadre juridique adapté à la marge

Le nouvel article 31-1, introduit dans l'ordonnance n° 2014-948, diverge à la marge du droit actuellement applicable.

Tout d'abord, le droit actuel fait référence à « la protection des intérêts nationaux » tandis que le nouvel article 31-1 prévoit qu'une action spécifique peut être créée si « la protection des intérêts essentiels du pays en matière d'ordre public, de santé publique, de sécurité publique ou de défense nationale » l'exige. Cette formulation est plus conforme au droit européen.

De même, afin de respecter la jurisprudence européenne, le nouvel article 31-1 précise que « les droits pouvant être attachés à une action spécifique [sont] définis dans chaque cas de façon à être nécessaires, adéquats et proportionnés aux objectifs poursuivis ».

Les trois catégories de droits attachés à une action spécifique demeurent inchangées.

Dans le droit actuel, les seuils, (calculés en pourcentage du capital ou des droits de vote) à partir desquels le ministre de l'économie doit émettre un avis préalable avant tout franchissement par un investisseur, sont fixés par le décret qui institue l'action spécifique. Le nouvel article 31-1 précise que ces seuils doivent être un des onze seuils mentionnés à l'article L. 233-7 du code de commerce, calculés en pourcentage du capital ou des droits de vote, allant de 5 % à 95 %.

À l'instar du droit existant, il est prévu qu'un « seuil particulier peut être fixé pour les participations prises par des personnes étrangères ou sous contrôle étranger ».

Dans tous les cas, l'agrément ne peut être refusé que « si l'opération en cause est de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels du pays qui ont justifié la création de l'action spécifique ». Le refus d'agrément doit donc être une décision objective et non discriminatoire conformément à la jurisprudence européenne.

Afin de respecter le principe de stricte nécessité de la mesure dérogatoire, le nombre d'administrateurs sans voix délibérative pouvant être nommés au sein du conseil d'administration ou de conseil de surveillance est ramené à un seul (contre un ou deux dans le droit existant). En effet, dès lors que le représentant de l'État ainsi nommé n'a pas de voix délibérative, un seul administrateur suffit.

Enfin, la possibilité de s'opposer à la cession ou à l'affectation à titre de garantie d'un actif n'est pas modifiée.

Le nouvel article 31-1 reprend la disposition existante selon laquelle, « l'institution [d'une] action spécifique produit ses effets de plein droit. Hormis les cas où l'indépendance nationale est en cause, l'action spécifique peut à tout moment être définitivement transformée en action ordinaire par décret ».

Le II du nouvel article 31-1 reprend des dispositions législatives et réglementaires existantes 300 ( * ) .

Il prévoit que lorsque des prises de participations ont été effectuées en méconnaissance de l'obligation d'obtenir un agrément préalable du ministre de l'économie, les détenteurs des titres sont privés de leurs droits de vote (pour la partie des titres acquise en contravention avec la législation). Le ministre de l'économie informe le président de l'organe délibérant de la société qui, lui-même, doit informer la prochaine assemblée générale des actionnaires.

Dans le droit actuel, les titres ainsi acquis doivent être revendus dans un délai de trois mois, délai au-delà duquel il est procédé à leur vente forcée.

Afin de se conformer à la jurisprudence européenne au regard de la proportionnalité des mesures dérogatoires, le nouvel article 31-1 limite cette obligation de vente dans un délai de trois mois et, éventuellement, de vente forcée aux seuls titres des entreprises « dont l'activité relève des intérêts essentiels de la défense nationale ou de ceux mentionnés à l'article 346 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne » 301 ( * ) .

La vente forcée intervient après information du président de la société et le produit net de la vente des titres est tenu à disposition de leurs anciens détenteurs.

Le III permet qu'une action spécifique puisse être créée dans les entreprises détenues indirectement par l'État au travers de ses établissements publics ou de sociétés.

Enfin, le IV du nouvel article 31-1 prévoit que, en cas de scission ou de fusion d'une entreprise pour laquelle une action spécifique a été instituée, un décret procède à la transformation de ladite action spécifique en action ordinaire puis, dans les dix jours suivant l'opération, une nouvelle action spécifique doit être recréée au titre de la nouvelle entité (fusionnée ou scindée). Le même IV précise que « les droits attachés à cette action spécifique ne peuvent excéder ceux attachés à celle qu'elle remplace ».

C. Des dispositions transitoires

Tout d'abord, le II du présent article prévoit que les actions spécifiques existantes restent en vigueur à la date de publication de la présente loi.

Le V du présent article abroge l'article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations. Le II de cet article 10 reste toutefois applicable « aux sociétés dans lesquelles ont été instituées des actions spécifiques », de sorte que les prises de participations par des personnes étrangères excédant 5 % sont soumises à agrément du ministre de l'économie.

Enfin, les III, IV et VI du présent article procèdent à différentes coordinations avec les dispositions législatives en vigueur, applicables respectivement aux sociétés GDF-Suez, DCNS et SNPE.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale a adopté dix amendements de précision rédactionnelle ainsi qu'un amendement apportant une précision sur le moment auquel la transformation de l'action ordinaire en action spécifique doit intervenir. Un amendement de nature rédactionnelle a également été adopté en séance publique.

II - La position de votre commission

Les actions spécifiques constituent un élément indispensable du maintien de notre souveraineté nationale dans une économie ouverte. À ce jour, deux actions spécifiques concernent la défense nationale et une l'approvisionnement énergétique, pour lesquelles le ministre de l'économie n'a pas eu à utiliser son droit de veto.

Le droit applicable à ces actions était devenu partiellement obsolète du fait de l'évolution du droit européen . Il importe donc de le moderniser et, par ailleurs, de l'intégrer à l'ordonnance n° 2014-948 qui devient le texte unique de référence pour le droit applicable aux sociétés dans lesquelles l'État est actionnaire.

À l'initiative de votre rapporteur, la commission a d'abord adopté un amendement procédant à plusieurs corrections rédactionnelles. Un amendement renvoyant au pouvoir réglementaire les modalités de la vente forcée de titres a également été adopté.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié .

Section 2 - Simplification du cadre juridique de l'intervention de l'État actionnaire

Article 45 (art. 25 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Modification de la composition de la Commission des participations et des transferts

Objet : cet article modifie les règles applicables aux membres de la Commission des participations et des transferts, en prévoyant notamment une composition paritaire.

I - Le dispositif proposé

L'habilitation sur le fondement de laquelle l'ordonnance n° 2014-948 a été prise permettait seulement « d'adapter les compétences de la Commission des participations et des transferts ». Les dispositions de l'article 25 de l'ordonnance relatives à la composition de la Commission et au régime déontologique n'ont donc fait l'objet d'aucune modification par rapport au droit antérieur.

En l'état actuel, la Commission est composée « de sept membres, dont un président, nommés par décret pour cinq ans et choisis en fonction de leur compétence et de leur expérience en matière économique, financière ou juridique ».

Afin de renforcer l'indépendance des membres de la Commission, le présent article prévoit que les mandats seront non renouvelables . La durée du mandat est allongée de cinq à six ans .

L'article 25 de l'ordonnance prévoit que, en cas de vacance, un remplaçant est nommé pour la durée restant à courir du mandat vacant. Le présent article précise que, dans ce cas, si le remplaçant siège pendant moins de deux ans avant l'expiration de son mandat, alors celui-ci peut être renouvelé.

Le présent article dispose également que « la commission comporte autant de femmes que d'hommes parmi les membres autres que son président ».

Enfin, un nouveau IV est ajouté à l'article 25 précité afin de prévoir que « le régime indemnitaire des membres de la commission est fixé par décret ».

Le présent article prévoit l'entrée en vigueur de ces nouvelles règles. Le mandat des membres actuellement en place - nommés en 2013 302 ( * ) - prendra fin à compter de la nomination des nouveaux membres, qui devra intervenir au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi. Les membres actuels pourront faire l'objet d'une nouvelle désignation.

Afin de garantir une certaine continuité dans la composition de la Commission, les sept membres ne seront plus nommés au même moment. Lors de la première constitution, trois membres, tirés au sort, seront nommés pour une durée de trois ans. Ainsi, tous les trois ans, trois ou quatre membres seront nommés.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec un avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale a adopté trois amendements de précision rédactionnelle.

II - La position de votre commission

Le présent article procède à des modifications bienvenues en termes d'indépendance, de parité et de renouvellement des membres de la Commission des participations et des transferts.

En particulier, le renouvellement « par moitié » tous les trois ans évite une perte de mémoire toujours préjudiciable dans ce type de structure.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 46 (art. 32-1 [nouveau] de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Transparence des sociétés holding de l'État pour l'application
des seuils légaux de détention

Pour certaines entreprises, la loi fixe un seuil minimal de détention par l'État. Par exemple, l'article L. 111-67 du code de l'énergie prévoit que la participation de l'État dans EDF ne peut être inférieure à 70 % du capital.

Par ailleurs, l'État ne détient pas en direct toutes ses participations. Par exemple, sa participation dans le constructeur automobile PSA est en réalité détenue par une société - la Sogepa - elle-même propriété à 100 % de l'État. Ce schéma a également été retenu pour la participation détenue dans Thales (par l'intermédiaire de la société TSA). La Sogepa, dans l'exemple retenu, est une société holding dite « transparente », parce que son seul objet social est de détenir les titres pour le compte de l'État.

Le présent article vise à concilier à la fois les exigences législatives en termes de participation minimale et la possibilité de recourir à une société transparente. À cette fin, il complète l'ordonnance n° 2014-948 par un nouvel article 32-1.

Plusieurs articles de l'ordonnance (4, 6, 19, 22) prévoient que, en présence d'une participation détenue par une société transparente, il faut appliquer les dispositions de l'ordonnance « comme si » l'État détenait cette participation en direct .

Le présent article dispose que cette règle est également valable « pour l'application des dispositions législatives prévoyant que la participation de l'État au capital d'une société doit rester supérieure à un seuil » . Ainsi, la détention au travers d'une société transparente est considérée comme une détention directe par l'État.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Section 3 - Autorisation d'opérations sur le capital de sociétés à participation publique

Article 47 (art. 4, 6, 7 et 8 de la loi n° 89-924 du 23 décembre 1989 autorisant le transfert à une société nationale des établissements industriels dépendant du Groupement industriel des armements terrestres (G.I.A.T.) - Autorisation du transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Groupement industriel des armements terrestres (G.I.A.T.) et de ses filiales

Objet : cet article autorise la cession par l'État de la majorité du capital de G.I.A.T au secteur privé. Cette autorisation est nécessaire pour permettre le rapprochement entre Nexter, filiale de G.I.A.T, et l'entreprise allemande Krauss-Maffei Wegmann (KMW) .

I - Le dispositif proposé

Depuis juillet 2014, la société Nexter, filiale à 100 % de G.I.A.T, lui-même détenu par l'État, est entrée en négociation avec la société allemande Krauss-Maffei Wegmann (KMW), intervenant également sur le marché des armements terrestres, en vue d'opérer un rapprochement entre les deux sociétés.

Ainsi, il est prévu que les actionnaires (l'État côté français et la famille Wegmann côté allemand) apportent 100 % du capital de Nexter et de KMW à une nouvelle entreprise - aujourd'hui appelée « Newco ». La Newco serait possédée à 50 % par l'État français (via G.I.A.T) et à 50 % par la famille Wegmann, comme le montre le schéma ci-dessous.

Le I du présent article autorise « le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Groupement industriel des armements terrestres (GIAT) et de ses filiales ».

En application de l'ordonnance n° 2014-948, cette autorisation législative est obligatoire puisque l'État perd la majorité de contrôle - il ne détiendra plus que 50 % du capital.

En outre, le V de l'article 22 de cette ordonnance 303 ( * ) prévoit que la cession de l'actif majoritaire d'une société - comme c'est le cas de Nexter au sein de G.I.A.T - est assimilée à la cession de la société elle-même. Pour cette raison, l'autorisation législative porte sur G.I.A.T même si c'est bien Nexter qui fait l'objet du rapprochement avec KMW.

Schéma de rapprochement de Nexter et de KMW

Source : Nexter

Le II du présent article procède à différentes modifications au sein de la loi n° 89-924 du 23 décembre 1989 autorisant le transfert à une société nationale des établissements industriels dépendant du Groupement industriel des armements terrestres (G.I.A.T).

Outre des ajustements rédactionnels rendus nécessaires par la nouvelle organisation capitalistique, il s'agit surtout de permettre aux fonctionnaires et militaires bénéficiant d'un statut spécifique au sein de Nexter de pouvoir le conserver à l'issue de l'opération s'ils le souhaitent (1° et 2° du II du présent article) .

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

II - La position de votre commission

Le rapprochement prévu entre Nexter et KMW s'inscrit dans un contexte stratégique et industriel qui combine à la fois une diminution des budgets de défense européens, singulièrement dans le domaine de l'armement terrestre, et une concurrence accrue entre une dizaine d'acteurs en Europe.

D'après les éléments transmis par Nexter à votre rapporteur, les budgets d'acquisitions de matériels terrestres en Asie, Amérique du Sud, Europe de l'Est, Afrique et au Moyen-Orient devraient passer de 24 milliards d'euros en 2011 à 31 milliards d'euros en 2017. A l'inverse, en Amérique du Nord et en Europe de l'Ouest, sur la même période, les budgets diminueraient de 35 milliards d'euros à 24 milliards d'euros.

La carte ci-dessous montre que le marché européen comprend à la fois des « poids lourds », l'américain General Dynamics et le britannique BAE Systems, et plusieurs acteurs de taille plus modeste, dont KMW et Nexter.

Or le rétrécissement du marché va conduire à une intensification de la concurrence, d'autant que les constructeurs des pays émergents
- soutenus par une augmentation des budgets militaires nationaux - vont chercher à s'implanter sur le marché européen 304 ( * ) .

Situation concurrentielle sur le marché des armements terrestres en Europe

Source : document transmis à votre rapporteur par Nexter

Dans ce contexte, ni Nexter, ni KMW n'apparaissent comme des entreprises suffisamment solides car trop petites. Lors de son audition par votre rapporteur, le président de Nexter a expliqué que la croissance de l'entreprise nécessite de dégager des ressources pour financer la recherche-développement et l'action commerciale en vue de conquérir de nouveaux marchés.

Le rapprochement entre Nexter et KMW présente plusieurs avantages. Tout d'abord, ce sont des entreprises de taille équivalente comparables sur de nombreux points (effectifs, carnet de commandes, etc.), ce qui permet d'envisager une fusion entre égaux dans laquelle aucune des deux entreprises ne dominerait l'autre. Il s'agit d'un point essentiel dans une industrie de souveraineté.

En outre, si leurs produits sont parfois concurrents, il faut tout de même souligner que leurs gammes sont largement complémentaires. Un des enjeux de ce rapprochement consistera à accentuer cette complémentarité et la différenciation entre les produits.

Les réseaux commerciaux actuels des deux entreprises sont bien distincts, offrant là aussi une bonne complémentarité. Une équipe commune de commercialisation devrait être mise en place.

Enfin, cette opération constitue la première pierre pour la création d'une industrie de défense terrestre véritablement européenne.

Au total, le présent article permet d'opérer ce rapprochement, dans le respect des droits acquis par certains personnels de Nexter. Au regard des éléments présentés par le Gouvernement et par Nexter, votre rapporteur estime que cette la constitution d'un nouveau groupe de défense européen constitue une opportunité à la fois pour l'État français, en tant qu'actionnaire, mais également pour les deux entreprises .

La société « Newco » pourrait être créée dès le second semestre 2015. Néanmoins, l'intégration entre les deux entreprises sera très progressive et devrait s'opérer sur plusieurs années. Dans un premier temps, Nexter et KMW conserveront les autonomies juridiques, leurs marques, leurs sièges sociaux, ainsi que leurs équipes dirigeantes.

Le rôle de la société holding - composée d'un conseil de surveillance, représentant les actionnaires, et d'un directoire comprenant les présidents de KMW et de Nexter - sera d'abord d'assurer la coordination particulièrement en matière de recherche-développement, d'export et de cohérence des gammes.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 48 (art. L. 5124-14 du code de la santé publique) - Modification de l'obligation de détention majoritaire par l'État ou ses établissements du capital de la société anonyme « Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies »

Objet : cet article permet à la Banque publique d'investissement de devenir actionnaire de la société « Laboratoire du fractionnement et des biotechnologies » afin qu'il soit en mesure de financer la construction d'une nouvelle usine.

I - Le dispositif proposé

Le Laboratoire du fractionnement et des biotechnologies (LFB) est une société de biotechnologies, spécialisée dans les produits dérivés du sang, notamment le plasma sanguin.

Le capital du LFB est entièrement détenu par l'État, conformément à l'article L. 5124-14 du code de la santé publique qui dispose que le capital « est détenu en majorité par l'État ou par ses établissements publics ».

Par ailleurs, le même article prévoit que les activités du LFB « relatives à la fabrication des médicaments dérivés du sang destinés au marché français, issus du fractionnement du plasma, sont exercées exclusivement par une filiale [...] créée à cet effet. Le capital de cette filiale est détenu, directement ou indirectement, majoritairement par l'État ou par ses établissements publics ».

À ce jour, l'État détient 100 % du capital et des droits de vote de LFB SA, lui-même détenant à 100 % la filiale spécialisée.

Dans le texte initial du Gouvernement, il était prévu de supprimer du code de la santé publique les deux phrases relatives à la détention majoritaire par l'État et ses établissements publics de la société-mère et de la filiale.

Cette rédaction a conduit à une certaine confusion sur les intentions réelles de l'État . En effet, si le Gouvernement affirme que le présent article vise seulement à faire entrer la Banque publique d'investissement (Bpifrance) au capital du LFB, l'effet juridique de cette rédaction permettait à l'État de se désengager totalement du LFB, y compris en cédant ses actions à des acteurs privés.

C'est pourquoi, la commission spéciale, à l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, avec l'avis favorable du Gouvernement, a réécrit l'article.

D'une part, son I maintient la participation majoritaire par l'État, ses établissements publics ou « d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public ». Cette rédaction garantit une participation majoritaire publique tout en permettant à Bpifrance de monter au capital du LFB.

D'autre part, le II du présent article prévoit que si le LFB devait être privatisé, l'État pourrait prendre un décret afin de créer une action spécifique ( cf. supra commentaire de l'article 44). Cette disposition est juridiquement inutile puisqu'elle ne fait que répéter le droit en vigueur.

De même, en séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, avec un avis favorable du Gouvernement, ajoutant un III au présent article qui prévoit que « tout transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société [LFB] doit être autorisé par la loi ». Là encore, cette disposition est inutile puisque la loi (le I du présent article) prévoit une participation majoritaire du secteur public. Dès lors, si l'État voulait privatiser le LFB, il devrait modifier l'article L. 5124-14 du code de la santé publique et donc soumettre son projet à l'autorisation du Parlement.

II - La position de votre commission

Il convient tout d'abord de souligner que la rédaction du présent article ne permet pas la privatisation du LFB . La détention majoritaire par des acteurs publics est réaffirmée dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale et confirmée par votre commission. Seule une disposition législative pourrait permettre la cession de la majorité du capital du LFB au secteur privé.

Entendu par votre rapporteur, le président-directeur général du LFB a indiqué que le LFB envisage dans les cinq prochaines années de construire une nouvelle usine, implantée en France, à la fois plus moderne et d'une capacité près de quatre fois supérieure à la capacité des deux lieux de production actuels du LFB . Elle devrait employer environ 500 personnes .

Ce projet correspond à un investissement compris entre 250 et 300 millions d'euros, dont 100 millions apportés par de l'endettement et le solde par une augmentation de capital. Le présent article ouvre la possibilité à Bpifrance de souscrire à cette augmentation de capital.

Votre rapporteur souligne que ce projet est vital pour assurer le développement du Laboratoire à l'internationa l (70 % de la production de la nouvelle usine a vocation à être exportée) et donc le maintien de l'expertise française dans un domaine de haute technologie .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 49 - Autorisation du transfert au secteur privé de participations majoritaires de l'État dans deux grands aéroports régionaux

Objet : cet article autorise l'État à céder au secteur privé la majorité du capital des aéroports de Lyon et de Nice.

I - Le dispositif proposé

Dans sa rédaction initiale, le présent article ne comprenait que son I et son II, qui autorisent le transfert au secteur privé de la majorité du capital, respectivement, de la société Aéroports de la Côte d'Azur et de la société Aéroports de Lyon .

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale a complété cet article par un I A et un I B.

Le I A prévoit que, par dérogation au droit en vigueur, « les opérations par lesquelles l'État transfère au secteur privé la majorité du capital d'une société exploitant une infrastructure de transport aéroportuaire ou autoroutière dans le cadre d'une concession accordée par l'État doivent être systématiquement autorisées par la loi ».

Le I B fixe pour sa part les modalités de cession par l'État d'une société exploitant un aérodrome.

Ainsi, son 1° prévoit que le décret de cession est pris sur le rapport des ministres chargé de l'économie et de celui chargé de l'aviation civile.

Son 2° dispose que « le cahier des charges de l'appel d'offres portant sur la cession du capital précise les obligations du cessionnaire relatives à la préservation des intérêts essentiels de la Nation en matière de transport aérien et est approuvé par le ministre chargé de l'aviation civile ». En conséquence, son 3° prévoit que « les candidats détaillent dans leurs offres les modalités par lesquelles ils s'engagent à satisfaire aux obligations mentionnées » ci-dessus.

Enfin, conformément à son 4°, les candidats au rachat des parts de l'État devront disposer « d'une expérience de la gestion aéroportuaire et donnent, dès le stade de l'examen de la recevabilité des offres, des garanties sur leur capacité à exercer les missions prévues au cahier des charges de la concession des aérodromes concernés. Cette capacité est appréciée par l'autorité signataire du contrat de concession aéroportuaire ».

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements de précision rédactionnelle.

II - La position de votre commission

Le Gouvernement a fait le choix de céder plusieurs de ses participations dans des sociétés de gestion d'aéroports régionaux. D'ores et déjà, un consortium d'investisseurs étrangers a été retenu pour la cession par l'État de 49,9 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac, pour un montant de 308 millions d'euros.

Cette opération a été annoncée en juillet 2014 par la publication d'un cahier des charges auquel devaient se soumettre les candidats au rachat des parts de l'État. Son caractère inattendu, voire brutal, a suscité de nombreuses réactions des élus locaux concernés compte tenu de l'importance de cette infrastructure dans le tissu économique de la région toulousaine.

Tout comme à Toulouse, les collectivités territoriales ainsi que les chambres consulaires sont actionnaires minoritaires dans les sociétés de gestion des aéroports de Lyon et de Nice (aéroports de la Côte d'Azur). Elles sont donc concernées en premier lieu par la reconfiguration de l'actionnariat résultant de la cession par l'État de la majorité du capital de ces deux sociétés.

De même, de telles cessions ne manquent pas de soulever des interrogations et des inquiétudes quant au projet d'entreprise qui pourrait être mis en oeuvre par le futur actionnaire majoritaire. C'est pourquoi, à l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure, l'Assemblée nationale a complété cet article afin d'encadrer le cahier des charges de l'appel d'offres.

Néanmoins, il importe également que le Gouvernement conduise un dialogue franc et ouvert avec les collectivités territoriales concernées sur l'avenir des infrastructures aéroportuaires, voire sur le contenu du cahier des charges de l'appel d'offres.

À cet égard, votre commission a été informée que des discussions étaient en cours entre le Gouvernement et les exécutifs locaux concernés. Elle a donc décidé de ne pas modifier le présent article, se réservant la possibilité de proposer, lors de la séance publique, sa suppression ou des modifications au regard des engagements qui pourraient être pris par le Gouvernement.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Section 4 - Dispositions diverses

Article 50 A - Cession et location de matériel militaire

Objet : cet article, introduit en séance publique par l'Assemblée nationale, tend à lever des obstacles juridiques à la mise en place de sociétés de projet en vue de la cession-bail de matériel militaire.

I - Le dispositif proposé

A. La réponse du Gouvernement au besoin de financement du ministère de la défense : les sociétés de projet

1. Le besoin de financement de la défense

L'équilibre de la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019 repose sur la réalisation de ressources exceptionnelles (REX), particulièrement en début de période, la part des REX devant progressivement reculer au profit de crédits budgétaires.

La loi de finances pour 2015 305 ( * ) est revenue sur cette trajectoire en minorant les crédits budgétaire de 600 millions d'euros et en majorant les REX attendues du même montant.

Comparaison LPM/LFI 2015

(en milliards d'euros)

2015

Écart

LPM

PLF

Crédits budgétaires

29,6

29,1

- 0,6

- 2 %

Ressources exceptionnelles

1,8

2,4

+ 0,6

+ 33 %

Total

31,4

31,4

0

0 %

Ces recettes reposent :

- pour 230 millions d'euros sur la cession des emprises parisiennes libérées par le déménagement à Balard ;

- pour 2,17 milliards d'euros au titre de la cession de la bande des fréquences 694-790 MHz (dite « bande des 700 MHz ») libérée par les évolutions de format de la télévision terrestre numérique (TNT).

Le calendrier de cession de la bande des 700 MHz apparaît difficilement tenable .

Compte tenu des délais de consultation et de rédaction du cahier des charges, l'ARCEP ne devrait lancer l'appel d'offre qu'à l'été 2015 pour une attribution au plus tôt à la toute fin de l'année 2015 , ce qui ne permettra pas la perception du produit de cession en temps utile pour financer les programmes d'armement du ministère de la défense.

Il faut relever que le budget de la défense est déjà fragilisé par plusieurs facteurs, notamment :

- un report de charge de 3,4 milliards d'euros constaté fin 2013, qui devrait s'établir à 3,8 milliards d'euros fin 2014, au détriment des fournisseurs de la défense ;

- un surcoût des opérations extérieures supérieur de près de 750 millions d'euros à la prévision , en 2013 comme en 2014. Le dépassement est financé par la « réserve de précaution », qui pèse elle-même au moins à hauteur de 20 % sur la mission « Défense » ;

- un coût de régénération des matériels de retour d'OPEX très supérieur aux prévisions, conjugué au coût du prolongement de la vie de matériels anciens ;

- le renforcement des moyens de lutte contre le terrorisme à la suite des attentats de janvier dernier, notamment la mise en oeuvre de l'opération intérieure Sentinelle, qui mobilise 10 500 militaires et coûte environ un million d'euros par jour selon le ministre de la défense.

L e budget de la défense n'a pas la capacité d'absorber une éventuelle insuffisance des recettes exceptionnelles , sauf à remettre en cause le modèle d'armée défini par la LPM, déjà réduit par rapport à la programmation précédente.

C'est d'ailleurs pour cette raison que la LPM comprend, à l'initiative du Sénat, une « clause de sauvegarde » . Son article 3 dispose ainsi que, « dans l'hypothèse où le montant de ces recettes exceptionnelles ou le calendrier selon lequel les crédits correspondants sont affectés au budget de la défense ne seraient pas réalisés conformément à la présente loi de programmation, ces ressources seraient intégralement compensées par d'autres recettes exceptionnelles ou par des crédits budgétaires sur la base d'un financement interministériel ».

2. Les sociétés de projet

Comme l'indique l'exposé sommaire de l'amendement présenté par le Gouvernement, celui-ci « a décidé de mettre en oeuvre un dispositif de cession/relocation d'équipements militaires visant à obtenir en 2015 les recettes exceptionnelles prévues par la Loi de Programmation militaire.

Ce dispositif s'articule autour des opérations suivantes :

- l'État identifie un équipement précédemment acquis ou en cours d'acquisition dans le cadre d'un marché public de fourniture déjà notifié ;

- l'État, éventuellement associé à un ou plusieurs partenaires privés créent une ou plusieurs sociétés à capitaux majoritairement publics dédiées à l'acquisition et la location de l'équipement ;

- l'État cède à la société de projet la propriété de l'équipement (il pourrait s'agir soit d'une cession d'un matériel déjà livré au ministère de la défense, soit d'une vente à terme d'un équipement en cours de construction) ;

- une fois réceptionné par l'État, l'équipement devient la propriété de la société de projet et est immédiatement loué au ministère de la défense ;

- le ministère de la défense dispose, pendant toute la période de location, de la faculté d'acquérir la propriété de l'équipement. »

B. Le dispositif proposé

1. L'autorisation de cession de matériels militaires

Le dispositif proposé autorise le ministre de la défense à céder des matériels alors même qu'ils continueraient à être utilisés par ses services ou auraient vocation à l'être.

Cette autorisation législative vise à lever l'obstacle que représentent les dispositions de l'article L. 3211-17 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) permettant la vente de biens du domaine privé de l'État et de ses établissements publics « lorsqu'ils ne sont plus utilisés par un service civil ou militaire de l'État ou un établissement public de l'État ».

Elle porte sur les matériels dont l'exportation est soumise à autorisation au titre des articles L. 2335-2 et L. 2335-9 du code de la propriété et de l'article L. 2335-18 du code de la défense.

2. Les garanties tenant à la continuité du service public de la défense nationale

Le dispositif proposé précise que les matériels continueraient à être utilisés dans le cadre d'un contrat de location, avec une société à participation publique majoritaire.

Il indique que ce contrat de location devra comporter des « clauses permettant de préserver la continuité du service public » de la défense nationale.

Il soumet à l'accord préalable de l'État « tout acte de cession, apport ou création de sûreté portant sur les biens aliénés », qui, à défaut, serait frappé de nullité. De même, les biens vendus par le ministère de la défense ne pourraient faire l'objet d'aucune saisie.

3. La levée des obstacles légaux tenant au financement des opérations de vente et de location de matériels militaires

Le présent article prévoit que, contrairement aux interdictions posées par l'article L. 511-5 du code monétaire et financier, les sociétés rachetant les matériels militaires pour les louer à l'État pourront effectuer des opérations de crédit à titre habituel, normalement réservées aux établissements de crédit ou aux sociétés de financement.

Comme l'explique l'exposé sommaire de l'amendement du Gouvernement, cette disposition vise à « éviter que les sociétés de projet créées exclusivement pour les besoins de ces opérations, qui pourraient être assimilées à des opérations de crédit-bail, soient soumises aux contraintes que les dispositions du code monétaire et financier font peser sur les établissements de crédit et les sociétés de financement, notamment en termes d'obtention de l'agrément d'agrément préalable par l'autorité de contrôle prudentiel et de régulation ou de capitalisation ».

Le dispositif proposé tend également à faire échapper ces sociétés aux dispositions de l'article 12 de la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 qui interdit aux organismes français relevant de la catégorie des administrations publiques centrales, au sens du règlement relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux en vigueur, autres que l'État, la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la Caisse de la dette publique et la Société de prises de participation de l'État, de contracter auprès d'un établissement de crédit ou d'une société de financement un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois, ou d'émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée.

Selon l'exposé sommaire de l'amendement du Gouvernement, cette disposition constituerait une « précaution », pour le cas où les sociétés de projet « répondraient aux critères d'appartenance à la catégorie des administrations publiques centrales, au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil du 25 juin 1996 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté ».

4. La demande de rapport au Gouvernement

À l'initiative de notre collègue député Jean-François Lamour et avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un sous-amendement afin de prévoir que le Gouvernement remet au Parlement un rapport :

« 1° Présentant la liste exhaustive des matériels potentiellement concernés par le I du présent article, en précisant l'échéance envisagée pour le rachat en pleine propriété de chacun de ces matériels par l'État ;

2° Exposant les conditions posées à la participation d'investisseurs privés au capital des sociétés de projet ainsi que les garanties qui permettront d'y prévenir la présence d'investisseurs étrangers ;

3° Établissant les modalités de rémunération des sociétés de projet ainsi que l'impact prévisible du dispositif sur l'endettement public. »

Aucun délai n'est prévu pour la remise de ce rapport.

II - La position de la commission

De manière constante, le Sénat a considéré qu' il était indispensable de garantir au ministère de la défense les ressources prévues par la loi de programmation militaire (LPM). En effet, le respect de la programmation conditionne la capacité des forces armées à faire face à la dégradation de la situation sécuritaire sur le plan international et national. L'enjeu est également considérable sur le plan industriel et de l'emploi .

La fragilité des hypothèses du Gouvernement concernant les recettes exceptionnelles du ministère de la défense a maintes fois été dénoncée au Sénat, que cela soit au moment du vote de la loi de programmation militaire 2014-2019 ou de la loi de finances pour 2015.

Cette fragilité est désormais reconnue par le Gouvernement qui a introduit dans le présent projet de loi un amendement visant à lever les obstacles juridiques pour la mise en place de sociétés de projet.

Alors que le montage envisagé par le Gouvernement paraissait encore très flou, les travaux de votre commission et de vos rapporteurs ont permis de clarifier un certain nombre de points :

- l'opération viendrait aggraver le déficit public maastrichtien ;

- les sociétés seraient dans un premier temps exclusivement publiques mais pourraient par la suite accueillir des investisseurs privés ;

- des sociétés pourraient être créées de manière pérenne et fournir des services complémentaires au ministère de la défense.

En revanche, ni le ministère de la défense, ni les ministères de l'économie et des finances n'ont fourni de réponse à la question du coût pour les finances de l'État, que cela soit la rémunération des capitaux investis ou le manque à gagner lié à la cession de participations publiques.

Il apparaît ainsi que, si les sociétés de projet permettent effectivement à court terme de garantir les ressources prévues par la loi de programmation militaire , elles ne sont pas sans risque sur le plan financier et pourraient contribuer à moyen terme à une précarisation supplémentaire des moyens du ministère de la défense, au travers d'une débudgétisation et d'une externalisation croissante .

Cette solution est donc loin d'être idéale mais pourrait être acceptée s'il apparaissait qu'elle était la seule à même d'assurer le financement dont le ministère de la défense a besoin.

Sur ce point, le Gouvernement maintient une grande ambiguïté , que la réponse du Premier ministre au courrier de M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangère et de la défense, n'a fait que confirmer : le « scénario central » serait encore l'attribution du produit de cession de fréquences au ministère de la défense avant la fin de l'année, les sociétés de projet n'étant qu'un plan de repli en cours d'étude.

Les déclarations publiques du ministre des finances, complétées par les éléments recueillis lors de l'audition par votre rapporteur du cabinet du secrétaire d'État au budget, laissent penser qu' une troisième solution est également étudiée par les services de Bercy , qui présenterait moins d'inconvénients que les sociétés de projet mais ne serait pas encore aboutie.

Vos rapporteurs considèrent que ces atermoiements sont particulièrement tardifs . Le ministère de la défense a besoin d'être assuré de ses ressources afin de pouvoir réaliser le programme d'investissement prévu par la LPM. Toute ambiguïté doit donc être levée  au plus vite.

C'est pourquoi vos rapporteurs vous proposent de supprimer l'article 50 A, afin que d'ici l'examen en séance publique du présent projet de loi, les arbitrages du Gouvernement, qui n'ont que trop tardé, soient clairement exposés. Cette suppression constitue un appel solennel au Gouvernement pour qu'il garantisse dans les faits, et non plus seulement dans le discours, le financement de nos forces armées . Pour cela, le Parlement doit être mis en mesure de statuer sur la meilleure solution permettant d'atteindre ce but, y compris, le échéant, si elle consiste en la création de sociétés de projet.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 50 (art. 31-2 [nouveau] de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique) - Obligation de proposer une offre aux salariés
en cas de transfert au secteur privé

Objet : cet article réintroduit dans le droit positif l'obligation de proposer aux salariés des actions de leur société, lorsque l'État procède au transfert au secteur privé d'une partie du capital de cette société.

I - Le dispositif proposé

Avant la publication de l'ordonnance n° 2014-948, l'article 11 de la loi n° 86-912 (seconde loi de privatisation) prévoyait que, en cas de cession d'une participation de l'État sur le marché financier, une partie des titres cédés devait être proposée aux salariés et anciens salariés, à concurrence de 10 % du montant de l'opération.

L'ordonnance n° 2014-948 a abrogé cet article 11. En effet, ce mécanisme était jugé lourd à mettre en oeuvre tout en ne permettant pas de structurer efficacement un actionnariat salarié. De fait, il faut d'abord que l'État décide une cession d'actions pour que les salariés puissent en acquérir.

Le Gouvernement avait donc fait le choix de soumettre les sociétés détenues par l'État au droit commun applicable aux autres sociétés, dans lesquelles l'actionnariat salarié est prioritairement constitué à partir d'augmentations de capital réservées aux salariés (articles L. 3332-18 et suivants du code du travail).

Afin de réaffirmer « l'intention de l'État de jouer un rôle moteur dans le développement de l'actionnariat salarié », selon les termes de l'exposé des motifs du présent projet de loi, le présent article propose de réintroduire un mécanisme de participation pour les salariés des sociétés dont les titres sont cédés par l'État.

Dans sa rédaction initiale, le présent article prévoyait que lors de toute opération de cession de titres sur le marché financier, une assemblée générale extraordinaire devait se prononcer sur un projet de résolution tendant à réaliser une augmentation de capital dans les conditions prévues par le code du travail.

À l'initiative des rapporteurs et avec l'avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a réécrit le dispositif afin de revenir à un état du droit très proche de celui en vigueur avec l'article 11 de la loi de 1986.

En effet, dans son rapport, notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, explique que « la rédaction de l'article 50 apparaît [...] trop restrictive, puisque l'augmentation du capital est décidée, ou non, par l'assemblée générale, qui peut ne pas avoir intérêt à une telle opération. Elle est également en décalage par rapport à la proposition n° 18 du Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (COPIESAS), qui consiste à prévoir un pourcentage de titres réservé aux salariés ou anciens salariés en cas de cession d'une partie du capital dans les sociétés à participation publique.

« L'actionnariat salarié permettant à la fois d'associer plus étroitement les salariés aux évolutions de l'entreprise et la création d'un actionnariat stable, il est proposé de rendre obligatoire une telle offre dans la limite de 10 % de la cession, charge à l'entreprise de consentir des conditions avantageuses pour constituer un tel actionnariat ».

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels.

Ainsi, le présent article prévoit que, pour toute opération de cession de participation sur les marchés financiers entraînant un transfert au secteur privé, « une fraction des titres cédés par l'État, qui ne peut être supérieure à 10 %, est proposée » aux salariés et anciens salariés de la société et de ses filiales adhérents à un plan d'épargne d'entreprise. Cette dernière condition permet d'organiser plus facilement la procédure de cession aux salariés.

Il est également prévu que le conseil d'administration ou le directoire puisse décider que l'entreprise prenne à sa charge une part du prix à la place des salariés, qui ne peut excéder 20 % du prix de cession, ou bien qu'elle accorde un délai de paiement, qui ne peut être supérieur à trois ans.

L'État peut également décider, en accord avec l'entreprise, de lui céder directement les titres, charge à cette dernière de les remettre aux souscripteurs de l'offre. Dans ce cas, les titres détenus par elle ne sont pas comptés dans le calcul du plafond d'auto-contrôle prévu à l'article L. 225-210 du code de commerce et les droits de vote attachés à ces titres sont suspendus.

Les titres non cédés à l'issue d'un délai de trois ans sont vendus sur le marché.

II - La position de votre commission

L'offre réservée aux salariés concomitante à une cession de l'État est en réalité complémentaire des procédures d'augmentation de capital prévues par le code du travail, même si ces dernières apparaissent plus efficaces pour structurer un actionnariat salarié. Votre rapporteur a donc souhaité maintenir le principe d'une offre réservée aux salariés.

Toutefois, à son initiative, votre commission spéciale a adopté un amendement qui procède à plusieurs ajustements rédactionnels. Il prévoit également qu'un arrêté du ministre de l'économie viendra fixer les éléments essentiels de l'offre réservée aux salariés : fraction des titres proposée aux salariés, durée de l'offre, identité du cessionnaire, plafond individuel de souscription ainsi que les modalités d'ajustement de l'offre si la demande est supérieure à l'offre.

Ces éléments sont indispensables pour garantir que le présent article puisse être opérant.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié .

Article 51 (art. L. 2111-10-1 du code des transports) - Définition des ratios d'investissement assurant la soutenabilité du modèle ferroviaire français conformément à la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire

Objet : cet article définit le ratio à partir duquel sont évalués les financements des investissements de développement du réseau ferré national .

I - Le dispositif proposé

L'article L. 2111-10-1 du code des transports prévoit que « les règles de financement des investissements de SNCF Réseau 306 ( * ) sont établies selon les principes suivants : [...]

« les investissements de développement du réseau ferré national sont évalués au regard de ratios définis par le Parlement.

« En cas de dépassement d'un de ces ratios, les projets d'investissements de développement sont financés par l'État, les collectivités territoriales ou tout autre demandeur ».

Ces dispositions, résultant pour une large part des amendements du Sénat lors de l'examen du projet de loi portant réforme ferroviaire, visent à éviter que SNCF Réseau ne s'endette au-delà du raisonnable - au regard de sa dette actuelle - pour financer de nouvelles lignes.

Toutefois, la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire n'a pas précisé les ratios en question, se contentant d'établir qu'ils seront « définis par le Parlement ». L'objet du présent article est donc de définir ces ratios.

Au lieu d'une batterie de ratios, comme cela avait pu être évoqué lors de l'examen du projet de loi portant réforme ferroviaire, le Gouvernement a fait le choix d'en retenir qu'un seul : celui du rapport entre la dette financière nette et la marge opérationnelle de SNCF Réseau . Cet indicateur évalue la capacité de désendettement. Ainsi, pour une marge opérationnelle connue, il donne le nombre d'années nécessaires pour rembourser l'intégralité de la dette (sans endettement nouveau).

En outre, il est également prévu que « les modalités d'application du présent article, notamment le mode de calcul des éléments du ratio [...] et son niveau plafond, sont définies par décret ».

II - La position de votre commission

Au 31 décembre 2014, la dette financière nette de SNCF Réseau est d'environ 36,8 milliards d'euros, tandis que la marge opérationnelle s'élève à 2,1 milliards d'euros. Le ratio dette financière nette sur marge opérationnelle s'établit donc à 17,5.

Il convient de noter l'extrême sensibilité de ce ratio à l'évolution du numérateur ou du dénominateur. Par exemple, pour un même niveau de dette, avec une marge opérationnelle de 1,9 milliard d'euros, le ratio serait de 19,4.

Lors de son audition par votre commission spéciale, Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, n'a pas apporté d'éléments précis sur le mode de calcul du ratio ou, plus encore, sur le niveau plafond envisagé par le Gouvernement. Or, le présent article renvoie pour l'essentiel à un décret, en contradiction avec la volonté affichée par le législateur dans la loi portant réforme ferroviaire.

Faute de disposer d'informations suffisantes, votre rapporteur a proposé un amendement tendant à fixer un plafond maximal du ratio à 25, sachant que le décret pourra retenir un plafond inférieur. Il est même hautement souhaitable, au regard de l'évolution de l'endettement de SNCF Réseau, que le Gouvernement retienne un plafond bien inférieur afin, d'une part, d'assurer la priorité à la maintenance du réseau et, d'autre part, de créer les conditions d'un désendettement de l'entreprise .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié .

Article 52 (art. 7 de la loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle) - Dérogation à l'obligation de déposer une offre publique d'acquisition du fait de l'attribution de droits de vote double

Objet : cet article corrige la rédaction de la dérogation à l'obligation de déposer une offre publique d'acquisition du fait de l'entrée en vigueur de l'attribution de droits de vote double dans les sociétés cotées.

I - Le dispositif proposé

Dans une société par actions, une action donne normalement droit à une voix au sein de l'assemblée générale (« une action = une voix »). Par dérogation à ce principe, l'article 7 de la loi de la loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, dite « loi Florange », a procédé à la généralisation des droits de vote double dans les sociétés cotées.

Concrètement, un investisseur qui détient une action au nominatif 307 ( * ) depuis plus de deux ans verra le droit de vote attaché à cette action doublé (une action = deux voix), lui donnant ainsi plus de poids au sein de l'assemblée générale. Cette disposition vise à renforcer la présence des investisseurs de long terme dans le capital des sociétés cotées françaises.

Le V de l'article 7 précité a prévu une dérogation à l'obligation de déposer une offre publique d'acquisition (OPA) pour les investisseurs qui, du fait de l'obtention de droits de vote suite à la « loi Florange », viendraient à dépasser les seuils à partir desquels une telle offre est obligatoire.

Pour cela, il faut que, pendant la période dérogatoire, le niveau de détention des droits de vote par un investisseur ne dépasse jamais son niveau de détention à la date du 2 avril 2014 (date d'entrée en vigueur de la « loi Florange »).

L'encadré ci-dessous donne un exemple de l'application de cette dérogation.

Exemple

Le dépôt d'une OPA est obligatoire si un actionnaire dépasse le seuil de 30 % des droits de vote.

Au 2 avril 2014, un actionnaire possède 32 % des droits de vote.

Afin de conserver un niveau d'influence identique après l'attribution des droits de vote double, il commence d'abord par réduire sa participation en-dessous du seuil des 30 % (par exemple à 28 %).

Dès que les droits de vote lui sont attribués, son niveau de détention s'établit à nouveau à 32 %.

Puisqu'il ne dépasse pas son niveau de détention à la date du 2 avril 2014, il n'est pas obligé de déposer une OPA alors même qu'il a franchi le seuil de 30 %.

Dans sa rédaction actuelle, cette dérogation est valable jusqu'au 2 avril 2016. Or les premiers droits de vote double pourront, au plus tôt, être attribués à compter de cette date, de sorte que la dérogation devient inopérante .

En outre, il existe deux cas qui conduisent à déposer une OPA :

- si l'actionnaire détient moins de 30 % du capital ou des droits de vote et qu'il dépasse ce seuil ;

- si l'actionnaire détient entre 30 % et 50 % du capital ou des droits de vote et qu'il augmente, sur une période de douze mois glissants, sa participation de plus de 1 % en capital ou en droits de vote - dispositif dit de « l'excès de vitesse ».

La dérogation telle qu'elle est écrite dans le droit actuel ne prend en compte que le premier cas.

Le présent article corrige ces deux points. D'une part, il prolonge la période dérogatoire jusqu'au 31 décembre 2018. D'autre part, il étend la dérogation aux actionnaires qui tomberaient sous le coup du dispositif dit de l'excès de vitesse.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale a adopté un amendement tendant à préciser que la dérogation n'est valable que si l'actionnaire ne dépasse pas, de manière continue jusqu'au 31 décembre 2018 son niveau de détention à la date du 2 avril 2014. En effet, le texte du Gouvernement prévoyait que ce niveau ne devait pas être dépassé seulement à la date du 31 décembre 2018.

II - La position de votre commission

Le présent article, comme le suivant, vient corriger une scorie résultant d'un examen dans la précipitation, pour des raisons d'affichage politique, de la loi dite « Florange ».

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 53 (art. L. 433-1-2 du code monétaire et financier) - Correction du dispositif de caducité d'une OPA

Objet : cet article corrige une scorie dans le dispositif encadrant le régime de caducité des offres publiques d'acquisition.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 433-1-2 du code monétaire et financier établit les conditions dans lesquelles une offre publique d'acquisition (OPA) est caduque, c'est-à-dire lorsque l'auteur de l'offre n'a pas réussi à prendre le contrôle de la société par l'acquisition d'une part des actions représentant plus de 50 % du capital ou des droits de vote de la société.

Il faut d'abord rappeler qu'il existe deux cas qui conduisent à déposer une OPA :

- si l'actionnaire détient moins de 30 % du capital ou des droits de vote et qu'il dépasse ce seuil ;

- si l'actionnaire détient entre 30 % et 50 % du capital ou des droits de vote et qu'il augmente, sur une période de douze mois glissants, sa participation de plus de 1 % en capital ou en droits de vote - dispositif dit de « l'excès de vitesse ».

Lorsque l'OPA est déclarée caduque, toutes les actions acquises lors de l'OPA sont privées de droits de vote 308 ( * ) . Toutefois, cette sanction ne s'applique pas à celles de ces actions qui auraient pu être acquises sans déclencher une OPA.

En effet, un investisseur qui détient 28 % du capital pourrait tout à fait monter jusqu'à 30 % sans lancer d'OPA. Il apparaît donc normal que les actions - acquises lors d'une OPA caduque - qui permettent ce passage de 28 % à 30 % ne soient pas privées de leurs droits de vote. La sanction ne doit s'appliquer qu'à celles des actions qui permettent de dépasser ce seuil.

S'agissant du dispositif « d'excès de vitesse », le même raisonnement devrait s'appliquer mais une erreur de rédaction du code monétaire et financier conduit à une législation plus permissive.

L'évaluation préalable annexé au présent projet de loi illustre ce problème par l'exemple suivant : « dans le cas d'un initiateur qui dispose de 35 % du capital et des droits de vote d'une société qui réalise l'achat d'un bloc de 5 % et atteint ainsi 40 %, il doit donc déposer une offre du fait du dépassement du seuil d'excès de vitesse. S'il n'atteint que 45 % du capital de la cible à l'issue de l'offre, elle devient caduque. Selon les termes de la loi, l'initiateur reviendra alors à 40 % de capital [...] , alors que la volonté du législateur était qu'il revienne à 36 %
- c'est-à-dire à sa détention initiale augmentée d'un pourcent qui correspond à l'excès de vitesse, seuil dont le dépassement constitue le fait générateur de l'obligation de dépôt du projet d'offre publique
».

Le présent article corrige donc l'article L. 433-1-2 du code monétaire et financier afin de mettre en cohérence la lettre de la loi avec l'intention initiale du législateur.

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale a adopté un amendement de précision rédactionnelle.

II - La position de votre commission

Le présent article, comme le précédent, vient corriger une scorie résultant d'un examen dans la précipitation, pour des raisons d'affichage politique, de la loi dite « Florange ».

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 53 bis A - Port autonome de Strasbourg

À l'initiative de notre collègue député Bruno Le Roux et des membres du groupe socialiste, d'une part, et de nos collègues députés Antoine Herth et Patrick Hetzel, d'autre part, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a introduit le présent article.

Il prévoit que, « en cas de transfert d'une activité du port autonome de Strasbourg à [une de ses filiales] , les salariés statutaires du port concourant à titre exclusif ou principal à l'activité transférée sont mis à la disposition de cette société.

« Une convention conclue entre le port autonome de Strasbourg et sa filiale détermine les conditions de mise à disposition du salarié. Elle prévoit les modalités de remboursement au port autonome de la rémunération du salarié ainsi que toutes les cotisations et contributions y afférentes.

« En cas de difficultés économiques conduisant à la suppression de l'emploi occupé par le salarié mis à disposition, la filiale peut résilier la convention de mise à disposition. Le salarié réintègre alors de plein droit le port autonome de Strasbourg. La filiale verse au port autonome de Strasbourg une somme d'un montant égal à l'indemnité qui aurait été due au salarié s'il avait été licencié pour motif économique ».

L'exposé des motifs des deux amendements souligne qu'ils visent « à permettre au port autonome fluvial de Strasbourg de mettre à disposition certains de ses personnels auprès de filiales qu'il souhaite créer pour développer son activité . Le port envisage de créer deux filiales, dans le domaine de l'exploitation portuaire d'une part, et dans le secteur du transport touristique, d'autre part. [...]

« Aucun texte ne prévoyant que des personnels statutaires du port puissent travailler pour le compte de filiales, une disposition législative s'avère nécessaire ».

Le présent article vise à clarifier la situation du personnel statutaire du port autonome et donc à sécuriser, d'un point de vue juridique, le développement du port.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 53 bis - Changement de dénomination de BPI-Groupe

La Banque publique d'investissement a été créée par la loi n° 2012-1559 du 31 décembre 2012 relative à la création de la Banque publique d'investissement .

Du point de vue juridique, cette entité se nomme « BPI-Groupe ».

Or, en pratique, la banque a retenu le nom commercial de « Bpifrance », qui figure sur son logo. En effet, le nom BPI est déjà utilisé par une banque portugaise (Banco BPI).

À l'initiative de notre collègue députée Clotilde Valter, rapporteure thématique, et avec l'avis favorable du Gouvernement, la commission spéciale a introduit le présent article qui remplace dans toutes les dispositions législatives en vigueur la mention de « BPI-Groupe » par celle de « Bpifrance », afin de mettre le droit en cohérence avec la pratique retenue.

Il convient de relever que le présent article devrait être complété par une modification de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, dont l'annexe vise la société anonyme « BPI-Groupe ».

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 53 ter (art. 40-1 [nouveau] de la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière) - Habilitation des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour contrôler le respect des délais de paiement par les entreprises publiques

Objet : cet article habilite les agents de la DGCCRF à contrôler le respect des délais de paiement dans les entreprises publiques.

I - Le dispositif proposé

Les articles 37 à 44 de la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 ont établi un cadre juridique visant à lutter contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique. Or, pour les entreprises publiques soumises à ces dispositions, seuls le Contrôle général économique et financier et les juridictions financières sont habilités à contrôler leur bonne application.

Le présent article, introduit par la commission spéciale, à l'initiative des rapporteurs, avec l'avis favorable du Gouvernement, donne compétence aux agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour contrôler et sanctionner le respect des délais de paiement par les entreprises publiques 309 ( * ) .

Il prévoit en outre que « le dépassement du délai maximal de paiement fixé par décret [...] est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut dépasser 375 000 euros », montant qui est doublé si le manquement est réitéré dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision est devenue définitive.

II - La position de votre commission

Le présent article vise à rendre plus effective l'application des règles essentielles à la confiance réciproque des acteurs économiques.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 53 quater - Prolongation de la concession du marché d'intérêt national Paris-Rungis

Objet : cet article prolonge jusqu'au 31 décembre 2050 la mission d'aménagement du marché d'intérêt national Paris-Rungis confiée à la société d'économie mixte Semmaris.

L'article 2 du décret n° 65-325 du 27 avril 1965 a confié à la Semmaris - société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne - l'aménagement et la gestion du marché d'intérêt national de Rungis.

Une convention de concession a été conclue entre l'État et la Semmaris. Elle fixe l'issue de la concession à l'année 2034.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, le marché est confronté à un besoin d'investissements substantiels qui pourraient ne pas être amortis avant la date limite de la concession. La Semmaris hésiterait donc à réaliser ces investissements.

Pour cette raison, le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Jean-Jacques Bridey, avec un double avis de sagesse de la commission et du Gouvernement, prolonge jusqu'au 31 décembre 2050 la mission d'aménagement et de gestion du marché de Rungis confiée à la Semmaris.

Le principe de cette prolongation n'apparaît pas contestable puisqu'elle est de nature à conforter l'activité du marché. En revanche, la nouvelle date retenue ne doit pas constituer un effet d'aubaine pour la Semmaris et ses actionnaires. À ce titre, le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur que des études sont en cours pour déterminer la date optimale garantissant l'amortissement des investissements projetés. Dans l'attente de la conclusion de ces travaux, votre commission a adopté cet article sans modification.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

CHAPITRE III - Industrie

Article 54 (article L. 592-28-1 [nouveau] du code de l'environnement) - Activités internationales de l'Autorité de sûreté nucléaire

Objet : cet article tend à formaliser dans la loi les activités de coopération de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avec ses homologues étrangères, et à lui permettre d'apprécier les modalités de sûreté des installations nucléaires destinées à l'export.

I - Le dispositif proposé

Créée par la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, dite « loi TSN », codifiée par l'ordonnance n° 2012-6 du 5 janvier 2012 modifiant les livres I er et V du code de l'environnement, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est une autorité administrative indépendante qui a succédé aux services centraux précédemment chargés de ses fonctions.

Dirigée par un collège de cinq commissaires irrévocables nommés pour six ans, elle a pour missions principales :

- de contribuer à l'élaboration de la réglementation, en donnant son avis au Gouvernement sur les projets de décrets et d'arrêtés ministériels ou en prenant des décisions réglementaires à caractère technique ;

- de contrôler le respect des règles et des prescriptions auxquelles sont soumises les installations ou activités qu'elle supervise ;

- de participer à l'information du public, y compris en cas de situation d'urgence.

Sur le plan international, l'ASN intervient à un double titre : en faisant des propositions au Gouvernement pour définir la position française dans les négociations internationales la concernant, et en représentant la France dans les instances internationales compétentes en ces domaines.

Or, le contexte actuel de l'industrie nucléaire mondiale conduit naturellement à redéfinir, ou plutôt à enrichir l'activité de l'ASN au niveau international. Ce contexte est en effet marqué à la fois par une intensification de la concurrence entre les constructeurs de réacteurs nucléaires, et par une place accrue donnée aux enjeux de sécurité dans la mise au point et l'exploitation des centrales.

Or, la France, qui est un acteur historique dans ce secteur, et dont les compétences sont reconnues internationalement, dispose d'atouts pour en faire une filière dynamique à l'export. Cela implique que notre pays, à titre de facteur différenciant, promeuve les technologies les plus sûres, ce qui passe par un processus de certification réalisé par des autorités dont la compétence et l'indépendance sont unanimement reconnues.

C'est dans cette optique que cet article ajoute aux attributions de l'ASN la possibilité de se prononcer, au stade de la conception, sur la sûreté des technologies promues par l'industrie française à l'export, et formalise sa coopération avec les autorités en charge de la sûreté des autres pays.

À cet effet, il insère dans le code de l'environnement un nouvel article L. 592-28-1 comprenant deux alinéas :

- le premier alinéa reconnaît formellement à l'ASN la possibilité de coopérer dans ses domaines d'intervention avec les autorités compétentes des autres États. À la demande de ces dernières, elle fournirait des prestations de conseil et mènerait des missions d'appui technique dans le cadre de conventions qui peuvent prévoir le remboursement des frais exposés.

Cet alinéa ne fait rien d'autre, en réalité, que donner un socle législatif à des pratiques fréquentes de l'autorité, que celle-ci mène de façon bilatérale avec ses homologues de pays souhaitant se doter d'un programme nucléaire ou s'interrogeant sur son opportunité ;

- le deuxième permet à l'ASN, sur saisine de l'autorité administrative et aux frais de l'entreprise intéressée, d'examiner la conformité des options de sûreté des modèles d'installations nucléaires destinées à l'exportation aux exigences s'appliquant en France pour le même type d'installation.

C'est cette disposition qui doit permettre à l'autorité de « labelliser » les réacteurs français à l'export, en vue de soutenir leur compétitivité et de faciliter la conclusion de marchés.

En commission, trois amendements des différents rapporteurs ont été adoptés à l'Assemblée nationale. Ils visent à donner à l'ASN un pouvoir d'appréciation quant aux suites à réserver aux demandes de coopération présentées par ses homologues étrangères ; à supprimer la mention de la saisine de l'autorité administrative, au profit du renvoi à un article en prévoyant les modalités ; à supprimer la référence au paiement des frais correspondant à la prestation de certification des installations à l'export par les entreprises intéressées ; et à exiger de l'autorité qu'elle informe le Gouvernement des conclusions des examens qu'elle a réalisés.

En séance publique, a été adoptée une disposition précisant, sur proposition de notre collègue député Denis Baupin, que l'ASN publie les conclusions de l'examen de sûreté des installations destinées à l'export, plutôt qu'elle n'en n'informe le seul Gouvernement.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve cet article, qui devrait permettre tout à la fois de sécuriser juridiquement les activités de coopérations menées par l'ASN avec ses homologues étrangères à l'échelle internationale, mais aussi de prendre appui sur ses compétences et son indépendance pour soutenir la filière française du nucléaire à l'export.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 54 bis A (art. L. 541-10 du code de l'environnement) - Possibilité de favoriser l'ouverture au public des données des éco-organismes sur la composition des déchets

Objet : cet article, inséré en séance à l'Assemblée nationale, prévoit l'examen, dans le cahier des charges des éco-organismes, de la possibilité de favoriser l'ouverture au public des données relatives à la composition des déchets pris en charge.

I - Le droit en vigueur

L'article L. 541-10 du code de l'environnement contraint les producteurs, importateurs et distributeurs de produits générateurs de déchets de pourvoir ou de contribuer à la gestion de ces déchets.

Ils peuvent satisfaire à cette obligation en mettant en place des systèmes individuels de collecte et de traitement, approuvés par l'État, ou en mettant en place collectivement des éco-organismes à qui ils transfèrent leur obligation, organismes auxquels ils versent une contribution financière et dont ils assurent la gouvernance.

Les éco-organismes doivent répondre à un cahier des charges fixé par arrêté interministériel, après avis de l'instance représentative des parties prenantes de la filière.

Aux termes de l'article L. 541-10, ces cahiers des charges prévoient :

« 1° Les missions de ces organismes, incluant la communication relative à la prévention et à la gestion des déchets, dont la contribution financière aux actions de communication inter-filières menées par les pouvoirs publics. Le montant, le plafond et les modalités de recouvrement de cette contribution financière sont déterminés par le cahier des charges ;

2° Que les contributions perçues par ceux-ci et les produits financiers qu'elles génèrent sont utilisés dans leur intégralité pour ces missions ;

3° Que les éco-organismes ne poursuivent pas de but lucratif pour ces missions ;

4° Les conditions et limites dans lesquelles est favorisé le recours aux entreprises solidaires d'utilité sociale agréées en application de l'article L. 3332-17-1 du code du travail ;

5° Les conditions et limites dans lesquelles sont favorisés la prévention des déchets et leur gestion à proximité des points de production, ainsi que les emplois et investissements induits par ces activités ;

6° Les décisions que l'éco-organisme ne peut prendre qu'après avoir recueilli l'avis de l'instance représentative des parties prenantes de la filière, dont les campagnes de communication grand public de portée nationale ;

7° Les conditions et limites dans lesquelles est mise à disposition une partie des déchets pour leur réutilisation ou celle de leurs pièces détachées. »

II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article résulte de l'adoption, en séance publique, d'un amendement de notre collègue député François-Michel Lambert.

Il complète l'article L. 541-10 du code de l'environnement pour prévoir que les cahiers des charges des éco-organismes déterminent « les conditions dans lesquelles est favorisée l'ouverture au public des données relatives à la composition des déchets dont les éco-organismes ont en charge la prévention et la gestion » .

III - La position de votre commission

L'objectif du présent article est de favoriser l'exploitation de ces informations, notamment par les entreprises proposant des services dans le domaine de la gestion des déchets, de la réutilisation ou du réemploi. Le texte reste cependant assez souple sur l'ampleur et les modalités de l'ouverture des données au public.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 54 bis (Art. 266 quindecies du code des douanes) - Soutien aux biocarburants produits à partir de matières premières d'origine animale

Objet : cet article vise à soutenir le développement des biocarburants produits à partir de matières premières d'origine animale ou d'huiles usagées.

I - Le dispositif proposé

Les biocarburants tirent leur préfixe d'une origine dans la biomasse par opposition aux carburants fossiles. Ils concernent deux grandes filières :

- les filières liquides , comme l'éthanol ou plus globalement la famille des alcools, destiné à une incorporation dans la filière essence, les huiles, comme le biodiesel pour une incorporation dans la filière gasoil et le biojetfuel pour une incorporation dans la filière kérosène (et plus globalement la famille des « hydrocarbures ») ;

- les filières gazeuses , comme le biométhane pour une utilisation « gaz naturel véhicule ».

Au sein des filières liquides, la filière de l'alcool se distingue de la filière des huiles de par les usages auxquels ces biocarburants se destinent : d'une part, les moteurs à allumage commandé qui fonctionnent à l'essence et, d'autre part, les moteurs diesel à allumage par compression fonctionnant au gazole. Pour les premiers, l'incorporation poursuit un objectif de 7 % et concerne le bioéthanol , produit par la fermentation du sucre de betterave ou de canne, ou à partir d'amidon de blé ou de maïs. Pour les seconds, l'incorporation vise un objectif de 7,7 % 310 ( * ) , et il s'agit alors de biodiesel , fabriqué à partir d'huile extraite du colza et du tournesol 311 ( * ) , de soja et de palme (il s'agit alors d'esters méthyliques d'huile végétale ou EMHV), ou de graisses animales ( esters méthyliques d'huile animale ou EMHA) ou d'huiles alimentaires usagées ( esters méthyliques d'huile usagée ou EMHU).

L'article 32 de la loi de finances pour 2005 312 ( * ) a introduit dans le code des douanes l'article 266 quindecies qui soumet, depuis le 1 er janvier 2005, à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) les opérateurs qui mettent à la consommation des carburants contenant une proportion de biocarburants inférieure à l'objectif d'incorporation. L'incorporation de biocarburants dans le carburant est encouragée par l'application d'un taux d'imposition de 7 % ou de 7,7 % du prix HT aux opérateurs qui ne respectent pas les objectifs d'incorporation de biocarburants, ces taux s'appliquent respectivement à la filière essence et à la filière gazole 313 ( * ) . Cette incitation, appelée « TGAP sanction », permet aux opérateurs respectant les objectifs d'incorporation d'échapper à cette TGAP additionnelle . Initialement exprimées en « pouvoir calorifique inférieur », les quantités de biocarburants prises en compte pour la diminution du taux de TGAP sont aujourd'hui traduites en « part d'énergie renouvelable ».

Par ailleurs, a été mis en place un autre régime fiscal incitatif par l'intermédiaire d'une réduction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable aux biocarburants. Cette réduction bénéficie d'un taux décroissant depuis 2014 314 ( * ) et sera supprimée à compter de 2016, conformément aux annonces du Premier ministre lors de la première Conférence environnementale de septembre 2012 315 ( * ) .

À la différence du bioéthanol et des EMHV, les EMHA et EMHU présentent notamment l'intérêt de ne pas entrer en concurrence avec l'alimentation humaine ou animale . Les EMHA et EMHU offrent de plus un bilan plus favorable en termes de réduction des gaz à effet de serre : 83 % pour les EMHA et 75 % pour les EMHU contre 38 % pour les EMHV.

La directive 2009/28/CE du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables prévoit que la part des énergies renouvelables devra s'élever au minimum à 10 % dans chaque État membre en 2020 . Cette même directive dispose dans son article 21 que les biocarburants EMHA et EMHU sont pris en compte pour le double de leur valeur réelle en équivalent énergétique. Ce principe du double comptage est transposé en droit français par l'article 61 de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009 modifiant l'article 266 quindecies du code des douanes. Sur le total d'objectif d'incorporation de biocarburants dans la filière gasoil, alors de 7 %, un pourcentage de 0,35 % est retenu s'agissant des EMHA/EMHU 316 ( * ) . Ce pourcentage est comptabilisé pour le double de sa valeur réelle, soit 0,7 % en vertu du principe de double comptage. De plus, la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 a porté cet objectif d'incorporation à 7,7 %, en distinguant une part de 7 % pour les EMHV et une part de 0,7 % pour les EMHA/EMHU (c'est-à-dire le pourcentage de 0,35 % comptant double). Il peut être relevé que lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2015, le Sénat avait adopté un article, supprimé ensuite par l'Assemblée nationale, visant à doubler la proportion d'EMHA/EMHU pouvant être incorporés dans les carburants afin de bénéficier de la minoration de TGAP biocarburants. La part portée de 0,35 % à 0,7 % comptant double, elle aurait représenté 1,4 % au sein d'un objectif d'incorporation maintenu à 7,7 %. Une telle disposition était donc de nature à modifier l'équilibre entre les filières EMHV et EMHA/EMHU.

Dans ce contexte, le présent article, issu d'une initiative de notre collègue député Christophe Caresche, vise à soutenir le développement des biocarburants EMHA/ EMHU en modifiant l'article 266 quindecies du code des douanes s'agissant du mécanisme de double comptage au titre de la « TGAP sanction » : sur le pourcentage de 0,35 % d'EMHA/EMHU, au moins 0,25 % devront être issus d'un processus d'économie circulaire , selon des conditions et modalités définies par arrêté.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur partage les objectifs de développement des biocarburants EMHA et EMHU poursuivis par le présent article , notamment celui d' encourager l'économie circulaire en offrant de nouveaux débouchés aux graisses animales issues d'abattoirs et impropres à l'alimentation.

Toutefois, elle souligne que le dispositif proposé pourrait conduire à d'importantes difficultés dans sa mise en oeuvre. Tout d'abord, la notion d'économie circulaire reste encore assez incertaine d'un point de vue juridique , bien que précisée dans le projet de loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ensuite, ce dispositif ne crée pas de nouveaux débouchés pour les filières nationales de production d'EMHA/EMHU : il sera tout à fait possible d'importer des graisses animales ou des huiles usagées collectées et transformées à l'étranger.

Votre rapporteur propose donc de mieux répondre aux préoccupations de la filière française des biocarburants EMHA et EMHU et d'en revenir à la rédaction du présent article telle qu'issue du vote à l'unanimité en commission spéciale par nos collègues députés.

Comme l'indique l'objet du premier amendement déposé par notre collègue député Christophe Caresche lors de l'examen du présent projet de loi en commission spéciale : « cette filière offre d'importants débouchés aux graisses animales issues d'abattoirs qu'elle transforme en déchets et participe de ce fait au concept d'économie circulaire. Or, l'article 266 quindecies du code des douanes qui traite de cette filière comporte des imperfections qui en brident le développement. L'amendement propose donc de ne garder dans la loi que la valeur du taux cible (TGAP) et du taux maximum d'incorporation de biocarburants produits à partir de ressources alimentaires et de renvoyer à un arrêté un certain nombre de dispositions législatives introduites récemment et aux conséquences mal maîtrisées ». En effet, la consécration par la loi de deux cibles d'incorporation séparées dans la filière gazole pose question : le fait de fixer une cible de 7 % pour les huiles végétales et une cible de 0,7 % pour les EMHA/EMHU dénature le principe de double comptage de ces derniers au sein d'un objectif global de 7,7 %.

Votre rapporteur promeut donc une approche raisonnable qui ne remet pas en cause l'équilibre général entre les filières de biocarburants d'origine végétale (EMHV) et celles des EMHA/ EMHU incorporés au gazole mais qui permet de répondre aux difficultés soulevées.

En conséquence, votre commission adopte un amendement modifiant la rédaction l'article 266 quindecies du code des douanes, afin de ne conserver dans la loi que la valeur cible du taux de « TGAP sanction » ainsi que le taux maximum d'incorporation de biocarburants , et de renvoyer l'ensemble des autres éléments à un arrêté. Le fait de confier cette tâche au pouvoir réglementaire présente l'intérêt d' une certaine souplesse , qui ne caractérise ni le dispositif en vigueur, ni celui proposé par le présent article. D'après les informations recueillies par votre rapporteure, une réflexion actuellement conduite sous l'égide du Gouvernement, avec la participation des différentes filières de biocarburants, devrait permettre de préciser le contenu de ce futur arrêté .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 54 ter (art. L. 321-19 du code de l'énergie) - Interruptibilité

Objet : cet article instaure un mécanisme de compensation adapté aux électro-intensifs.

I - Le dispositif proposé

Introduit à l'initiative de notre collègue député François Brottes, président de la commission des affaires économiques, l'article 54 ter concerne le dispositif d'interruptibilité de l'article L. 321?19 du code de l'énergie. Ce dernier détermine les conditions de rémunération des entreprises qui accepteraient de se déconnecter instantanément du réseau électrique national en cas de menace grave sur son fonctionnement.

L'article 54 ter dispose que la compensation est déterminée de façon à constituer une capacité totale interruptible permettant d'assurer le fonctionnement normal du réseau public de transport et à refléter le coût complet de la défaillance que l'interruption des consommateurs finals concernés permet de prévenir ou réduire. Cette formulation est censée permettre une compensation sensiblement plus élevée pour les électro-intensifs.

II - La position de votre commission

Lors de l'examen du projet de loi sur la transition énergétique, le Sénat, sur les propositions de la commission des affaires économiques et du Gouvernement, a considérablement renforcé le soutien aux industries électro-intensives afin de rétablir leur compétitivité : outre la modulation de la redevance hydraulique pour favoriser leur approvisionnement, ces entreprises exposées à la concurrence internationale bénéficieront de conditions particulières d'approvisionnement, d'une réduction du tarif d'utilisation des réseaux qui pourra atteindre jusqu'à 90 %, d'une compensation accrue au titre de leur adhésion au mécanisme de l'interruptibilité tandis qu'une réflexion sur la prise en compte des coûts indirects du carbone a été engagée.

Dans le détail, on peut rappeler les dispositions suivantes :

- article 28 : modulation de la redevance hydraulique pour tenir compte de la stratégie de commercialisation du concessionnaire au profit d'industriels électro-intensifs dans le cadre de contrats d'approvisionnement de long terme ou qui auraient investi dans la concession (amendement du rapporteur) ;

- article 42 ter : conditions particulières d'approvisionnement des entreprises électro-intensives exposées à la concurrence internationale en contrepartie d'engagements d'efficacité énergétique ;

- article 43 : modulation du plafond de réduction selon les catégories de bénéficiaires (jusqu'à 90 % pour les entreprises électro-intensives exposées à la concurrence internationale, jusqu'à 50 % pour les installations permettant le stockage de l'énergie [dont les STEP] en fonction de leur efficacité énergétique et jusqu'à 20 % pour les autres sites de consommation) ;

- article 43 bis A : développement de l'interruptibilité. Le dispositif prévoit de compenser les industriels participant au mécanisme dans la limite d'un plafond de 120 euros et de fixer par arrêté le volume annuel des capacités interruptibles ;

- article 44 ter : rapport sur la compensation des coûts indirects du dioxyde de carbone en faveur des secteurs exposés à un risque de fuite de carbone : Article introduit par un amendement du rapporteur

Compte tenu des apports du projet de loi relatif à la transition énergétique sur la question des électro-intensifs, votre commission a adopté un amendement de suppression de l'article 54 ter sur proposition de son rapporteur.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 54 quater (art. L. 524-1 [nouveau] du code de l'énergie) - Entreprises ayant des activités hyper électro-intensives

Objet : cet article pose le principe d'un accès régulé transitoire, pour certains procédés de fabrication hyper-électro intensifs, au coût de revient de l'hydroélectricité, dans l'attente du renouvellement des concessions.

I - Le dispositif proposé

Introduit en commission spéciale à l'Assemblée nationale et étoffé en séance publique, l'article 54 quater instaure des conditions particulières d'approvisionnement en énergie électrique pour les consommateurs finals grands consommateurs d'énergie dont l'activité est exposée à la concurrence internationale. Il prévoit un accès régulé et limité à l'électricité produite par les installations de production hydroélectrique.

II - La position de votre commission

Pour les mêmes raisons que celles exposées dans le commentaire de l'article 54 ter , votre commission a adopté un amendement de suppression de l'article 54 quater , sur proposition de son rapporteur.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

CHAPITRE IV - Simplifier
Section 1 - Alléger les obligations des entreprises

Article 55 A (art. L. 511-21 et L. 512-4 du code de commerce et art. L. 131-29 du code monétaire et financier) - Conditions de rédaction de l'aval donné en vue de garantir le paiement d'une lettre de change ou d'un chèque

Objet : cet article vise à préciser la rédaction de l'aval accordé en vue de garantir le paiement d'une lettre de change ou d'un chèque.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en séance, à l'initiative de notre collègue Véronique Louwagie, l'article 55 A du projet de loi se propose de mieux protéger le donneur d'aval, tiers qui apporte sa garantie personnelle au paiement d'une lettre de change ou d'un chèque en l'avalisant. Cette garantie porte en effet sur ses biens propres. Le donneur d'aval n'aurait pas toujours conscience de la nature de son engagement, de sorte que cet article prévoit qu'il devrait rédiger son aval, à peine de nullité, en précisant qu'il s'engage sur ses biens personnels.

Cet article modifie à cette fin l'article L. 521-4 du code de commerce, sur l'aval garantissant le paiement d'une lettre de change, et l'article L. 131-29 du code monétaire et financier, sur l'aval garantissant le paiement d'un chèque.

II - La position de votre commission

Votre commission considère que le droit actuel est clair, stable et connu des professionnels, de sorte que les précisions supplémentaires qui devraient figurer par écrit dans l'aval, à peine de nullité, en vertu du présent article seraient une source d'insécurité juridique plutôt qu'une protection pour les personnes concernées, qu'il s'agisse du tireur, le créancier, ou du tiré, le débiteur, de la lettre de change, de son bénéficiaire ou du donneur d'aval lui-même.

Au surplus, notre collègue Didier Mandelli a rappelé que la lettre de change et le chèque étaient régis par des textes internationaux très précis. Ainsi, la convention de Genève du 7 juin 1930 portant loi uniforme sur les lettres de change et billets à ordre comporte des dispositions précises, qui ont été reprises à l'identique dans le code de commerce. Il en est ainsi, dans son article 31, pour les conditions dans lesquelles l'aval doit être rédigé. Il en est de même en matière de chèque, avec la convention de Genève du 19 mars 1931 destinée à régler certains conflits de lois en matière de chèques. Dans ces conditions, on peut douter de la conformité de l'article 55 A du projet de loi aux règles établies par le droit international.

Aussi, sur proposition de son rapporteur et de notre collègue Didier Mandelli, votre commission a adopté deux amendements de suppression de cette disposition.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 55 (art. L. 123-28-1 et L. 123-28-2 [nouveaux] du code de commerce) - Allégement des obligations comptables des microentreprises sans salarié en situation de cessation totale et temporaire d'activité

Objet : cet article vise à alléger les obligations comptables applicables aux microentreprises sans salarié lorsqu'elles sont en situation de cessation totale et temporaire d'activité.

I - Le dispositif proposé

Dans un souci de simplification et d'allègement des contraintes qui pèsent sur les entreprises, l'article 55 du projet de loi vise à alléger les obligations comptables des entreprises dites « en sommeil », c'est-à-dire des entreprises en situation de cessation totale et temporaire d'activité, quelle qu'en soit la raison, dont les dirigeants ne souhaitent pas la liquidation, dans l'idée d'une reprise ultérieure de l'activité.

Sont visées par cette mesure les seules microentreprises sans salarié. Le code de commerce est complété à cette fin par deux articles L. 123-28-1 et L. 123-28-2, au sein de la section du livre I er du code relative aux obligations comptables des commerçants.

En application de l'article D. 123-200 du code de commerce, sont des microentreprises les entreprises, personnes physiques ou personnes morales, qui n'excèdent pas deux des trois seuils suivants : 350 000 euros de total du bilan, 700 000 euros de chiffre d'affaires net et dix salariés. Cette définition reprend celle fixée par le droit européen.

Compte tenu de directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, qui harmonise au niveau européen les obligations comptables des sociétés, l'article 55 du projet de loi a dû distinguer selon que l'entreprise « en sommeil » concernée est une personne physique ou morale. Une entreprise personne physique serait dispensée d'établir son bilan et son compte de résultat, tandis qu'une personne morale pourrait n'établir qu'un bilan abrégé et un compte de résultat abrégé, de façon à respecter le texte de la directive.

Pour bénéficier de ces dispositions, les entreprises seraient tenues de demander une inscription modificative spéciale au registre du commerce et des sociétés (RCS), pour cessation totale et temporaire d'activité. Pour éviter tout risque de fraude, mais aussi tout maintien de l'existence d'entreprises qui n'auraient plus vocation avec le temps à reprendre leur activité, le projet de loi comporte des garanties : cette dérogation aux obligations comptables normales serait limitée à deux ans au plus, sauf à ce que l'activité reprenne avant l'expiration de ce délai ; la demande d'inscription modificative devrait s'accompagner d'une déclaration sur l'honneur ; s'agissant d'une personne physique, cette dérogation ne pourrait pas s'appliquer en cas d'opération modifiant la structure du bilan.

Ainsi, au terme du délai de deux ans, le chef d'entreprise aura le choix entre reprendre l'activité de son entreprise ou la liquider. À cet égard, votre rapporteur signale que la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises comporte une habilitation en vue d'instituer une procédure simplifiée de liquidation des sociétés sans salarié et présentant un montant faible d'actifs et de dettes, pour les cas ne relevant pas d'une liquidation judiciaire. Ces mesures de simplification doivent être rapprochées.

En l'état du droit, les entreprises peuvent déjà faire porter au RCS, par une inscription, une cessation totale d'activité, qu'elle soit temporaire ou définitive, en demandant le maintien du bénéfice de l'immatriculation, qu'il s'agisse des personnes physiques (article R. 123-46 du code de commerce) ou des personnes morales (article R. 123-69 du code de commerce). Au terme d'un délai d'un ou deux ans selon le cas, l'entreprise est radiée d'office du registre. Pendant cette période, l'entreprise demeure soumise aux obligations comptables habituelles, qui ne sont pas toujours respectées.

Selon l'étude d'impact, on recenserait près de 90 000 entreprises « en sommeil » au RCS, dont près de 44 000 microentreprises.

II - La position de votre commission

Si votre commission a approuvé cette simplification, elle a toutefois adopté un amendement présenté par son rapporteur, en vue de préciser les conditions dans lesquelles une entreprise pourrait en bénéficier.

Plutôt qu'une demande d'inscription, votre commission a préféré que la dérogation soit possible une fois que l'inscription aura été effectuée auprès du RCS, ce qui permettrait au greffier chargé de la tenue de registre de procéder au contrôle des conditions posées par le législateur, comme il en a l'obligation. La déclaration sur l'honneur ne serait en tout état de cause pas nécessaire, votre rapporteur n'en percevant pas l'utilité. Elle ne présente pas d'intérêt juridiquement, dans la mesure où une inscription frauduleuse peut déjà être sanctionnée (article L. 123-5 du code de commerce).

Par cet amendement, votre commission a également procédé à des clarifications rédactionnelles.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 55 bis (art. L. 441-6-1 du code de commerce) - Simplification de l'obligation de publication d'informations sur les délais de paiement par les sociétés dont les comptes sont certifiés

Objet : cet article vise à simplifier les modalités selon lesquelles les sociétés dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes sont tenues de publier des informations sur les délais de paiement de leurs fournisseurs et de leurs clients.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue député Laurent Grandguillaume, rapporteur thématique, l'article 55 bis du projet de loi vise à simplifier l'obligation, pour les sociétés dont les comptes annuels sont certifiés par un commissaire aux comptes, de publier des informations sur les délais de paiement de leurs fournisseurs et de leurs clients.

Il modifie à cette fin l'article L. 441-6-1 du code de commerce.

Instaurée par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, cette obligation de publication d'informations sur les délais de paiement a pour objectif de permettre de vérifier que les sociétés concernées respectent bien les règles prévues par la loi en matière de délais de paiement. Ces règles sont fixées par l'article L. 441-6 du code de commerce, selon lequel notamment « le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture ». Ces informations doivent également faire l'objet d'une attestation du commissaire aux comptes.

Pour remplir cette obligation, l'article D. 441-4 du code dispose que le rapport de gestion de la société doit mentionner « la décomposition à la clôture des deux derniers exercices du solde des dettes à l'égard des fournisseurs par date d'échéance ».

Dans un souci de simplification, mais aussi compte tenu du fait qu'une société non cotée n'est plus tenue de publier son rapport de gestion depuis la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives 317 ( * ) , l'article 55 bis dispose que les sociétés concernées ne doivent pas publier, mais seulement communiquer des informations sur les délais de paiement. On peut imaginer, par exemple, une communication sur le site internet de la société ou par tout autre moyen, y compris le rapport de gestion s'il est publié.

II - La position de votre commission

Si votre commission a approuvé la simplification ainsi apportée par l'article 55 bis du projet de loi, elle a néanmoins adopté un amendement de son rapporteur, en vue de corriger une erreur de référence. En effet, au lieu de l'article L. 441-6-1 du code de commerce était visé l'article L. 411-6-1.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 55 ter (art. L. 526-1 à L. 526-3 du code de commerce) - Insaisissabilité de droit de la résidence principale de l'entrepreneur individuel à l'égard de ses créanciers professionnels

Objet : cet article vise à instituer une insaisissabilité de droit de la résidence principale de tout entrepreneur individuel, à l'égard de ses seuls créanciers professionnels, en substitution du dispositif actuel d'insaisissabilité volontaire sur déclaration notariée.

I - Le succès mitigé du mécanisme de l'insaisissabilité instauré en 2003 et étendu en 2008

La loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique, dite « loi Dutreil », a voulu instaurer un régime de protection de l'entrepreneur individuel et sa famille, par un dispositif de déclaration d'insaisissabilité de sa résidence principale (articles L. 526-1 à L. 526-3 du code de commerce). Par simple déclaration devant notaire, tout entrepreneur individuel, quelle que soit son activité professionnelle, peut déclarer insaisissable sa résidence principale. La déclaration, qui doit être publiée au fichier immobilier, n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent postérieurement à la publication à l'occasion de l'activité professionnelle de l'entrepreneur.

Un tel dispositif visait à mettre à l'abri le patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel, qui n'avait pas fait le choix de créer une société pour dissocier son patrimoine personnel et son activité professionnelle. En effet, en cas de difficultés économiques, ses dettes professionnelles pouvaient être recouvrées sur son patrimoine personnel. L'insaisissabilité interdit ce cas de figure. La déclaration d'insaisissabilité ne saurait toutefois empêcher un entrepreneur individuel sollicitant un établissement de crédit d'accepter de fournir une garantie sur sa résidence principale. L'accès au crédit demeure une difficulté structurelle insurmontable pour l'entrepreneur qui souhaite protéger son patrimoine et celui de sa famille.

Ce dispositif a été étendu, par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, à l'ensemble des biens fonciers, bâtis ou non, qui ne sont pas affectés à son activité professionnelle par l'entrepreneur.

En dépit de sa simplicité, de la modicité de son coût et de sa réelle efficacité pour un entrepreneur qui n'a pas besoin de crédit, y compris dans le cadre d'une procédure collective 318 ( * ) , la déclaration notariée d'insaisissabilité (DNI) demeure peu connue et n'a rencontré qu'un faible succès.

Lors de la création, par la loi n° 2010-658 du 15 juin 2010, du régime d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL), le Gouvernement, suivi en cela par l'Assemblée nationale, avait envisagé initialement de supprimer la DNI, pour assurer un développement plus rapide de l'EIRL. À l'initiative de notre collègue Jean-Jacques Hyest, rapporteur de ce texte, le Sénat a maintenu la DNI, considérant qu'elle constituait pour l'entrepreneur individuel une protection efficace et peu coûteuse, bien que méconnue, et en tout cas plus simple que le régime de l'EIRL de séparation des patrimoines personnel et professionnel de l'entrepreneur, exigeant des formalités assez lourdes, nécessaires à la protection des droits des créanciers.

À l'occasion de son avis sur le programme « Développement des entreprises » du projet de loi de finances pour 2014, notre collègue Antoine Lefèvre, au nom de la commission des lois, avait dressé un bilan détaillé de l'EIRL et une comparaison avec la DNI 319 ( * ) , concluant à la réelle utilité de cette dernière, du fait de sa simplicité. Il avait néanmoins fait état d'un nombre évalué à 37 000 déclarations seulement au 31 juillet 2013.

II - L'insaisissabilité de droit de la résidence principale de l'entrepreneur individuel

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue député Laurent Grandguillaume, rapporteur thématique, l'article 55 ter du projet de loi remplace la déclaration d'insaisissabilité, qui requiert un acte notarié, par une insaisissabilité de droit de la résidence principale, applicable à tous les entrepreneurs individuels, y compris ceux déjà en activité. Les autres biens immobiliers demeurent soumis au régime déclaratif actuel.

Cette mesure de simplification avait été proposée, notamment, lors du 110 ème congrès des notaires de France, en juin 2014.

Pour préserver les droits des créanciers et assurer en conséquence la constitutionnalité du dispositif, l'article 55 ter prévoit que l'insaisissabilité de droit ne serait opposable qu'aux créanciers professionnels dont les droits naissent postérieurement à la publication de la présente loi. Il ne serait pas conforme à la Constitution, en effet, que l'insaisissabilité soit opposable aux créanciers antérieurs, dans la mesure où ceux-ci verraient le gage de leurs créances réduit de la résidence principale de l'entrepreneur, sans opposition possible 320 ( * ) . Les droits des créanciers se rattachent indirectement au droit de propriété.

Le projet de loi ne modifie les articles L. 526-1 à L. 526-3 du code de commerce que de façon ponctuelle, uniquement pour substituer le caractère automatique au caractère déclaratif de l'insaisissabilité, ne remettant pas en cause par ailleurs l'économie générale de ces dispositions.

III - La position de votre commission

Votre commission a approuvé cette mesure de simplification utile et protectrice pour l'ensemble des entrepreneurs individuels. Elle ne peut que se réjouir de ce que notre collègue Jean-Jacques Hyest ait permis le maintien de la déclaration d'insaisissabilité en 2010, sans quoi le dispositif aujourd'hui proposé par le présent projet de loi n'aurait pas pu être envisagé.

Attentive aux droits des créanciers, votre commission a adopté, sur la proposition de son rapporteur, un amendement procédant à quelques clarifications ponctuelles. Il s'agit de prévoir un état descriptif de division en cas d'affectation d'une partie de la résidence principale de l'entrepreneur à son activité professionnelle, de façon à ce que les créanciers professionnels puissent connaître la consistance de leur gage.

Par ce même amendement, votre commission a également prévu le maintien temporaire de l'insaisissabilité en cas de décès de l'entrepreneur, pour les besoins de la succession et jusqu'à sa liquidation, dans la limite de deux ans, rien n'étant prévu par le texte dans ce cas, contrairement au droit actuel qui prévoit que les effets de la déclaration d'insaisissabilité cessent à compter du décès de l'entrepreneur.

Elle a aussi supprimé la règle de remploi des fonds en cas de cession de la résidence principale, selon laquelle les droits sur la nouvelle résidence principale restent insaisissables à hauteur des seules sommes réemployées : une telle règle n'a plus lieu d'être dès lors que la résidence principale, quelle qu'elle soit, est de droit insaisissable, sans quoi la nouvelle résidence serait partiellement saisissable, ce qui semblerait incohérent à votre rapporteur.

Enfin, elle a procédé, par cet amendement, à plusieurs clarifications rédactionnelles.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 56 (art. L. 145-10, L. 145-12, L. 145-17, L. 145-18, L. 145-19, L. 145-47, L. 145-49 et L. 145-55 du code de commerce) - Systématisation de la possibilité de recourir à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans le statut des baux commerciaux

Objet : cet article vise à systématiser la possibilité de recourir à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les relations entre un bailleur et son locataire en matière de baux commerciaux, en complément de l'acte extrajudiciaire.

I - Le dispositif proposé

L'article 20 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a prévu, de façon ponctuelle, que le congé d'un bail commercial pouvait être signifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et pas uniquement par acte d'huissier, au libre choix de chacune des parties.

L'article 56 du présent projet de loi vise à étendre cette faculté de recourir à une simple lettre recommandée avec demande d'avis de réception à la plupart des autres étapes des relations entre bailleur et locataire dans le régime des baux commerciaux.

Seraient ainsi concernés :

- la demande de renouvellement du bail effectuée par le locataire (article L. 145-10 du code de commerce) ;

- l'acceptation par le bailleur du renouvellement du bail, après un congé ou un refus de renouvellement (article L. 145-12) ;

- la mise en demeure du locataire de faire cesser l'inexécution de ses obligations ou la cessation de l'exploitation du fonds de commerce, formalité préalable au refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction pour motif grave et légitime (article L. 145-17) ;

- l'acceptation par le locataire de nouvelles conditions de location, en cas de refus de renouvellement du bail en raison de travaux importants qui nécessitent l'évacuation des lieux, lorsque le bailleur lui propose un nouveau local pour poursuivre l'exploitation de son fonds (article L. 145-18) ;

- l'usage par le locataire évincé du fait de la reconstruction du local commercial qu'il occupe de son droit de priorité sur les locaux reconstruits s'ils comportent des locaux commerciaux (article L. 145-19) ;

- l'information donnée au bailleur par le locataire voulant adjoindre à l'activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires, en vue de leur acceptation par le bailleur (article L. 145-47) ;

- l'information donnée au bailleur par le locataire voulant exercer dans les locaux loués des activités autres que celles prévues au bail, c'est-à-dire un changement d'activité commerciale (article L. 145-49) ;

- l'information donnée au bailleur par le locataire qui renonce à exercer des activités connexes ou complémentaires ou bien d'autres activités (article L. 145-55) 321 ( * ) .

En outre, le présent article prévoit l'application à Wallis-et-Futuna des modifications ainsi opérées au statut des baux commerciaux, ainsi que des modifications déjà opérées par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives, réparant ainsi une coordination oubliée.

Votre rapporteur insiste sur l'exigence de sécurité juridique qui doit prévaloir, s'agissant d'actes qui doivent répondre à un formalisme important à peine de nullité, sans être pour autant des actes courants pour un certain nombre de bailleurs et locataires en dehors d'une gestion professionnelle de locaux commerciaux.

Aussi se satisfait-il de ce que l'Assemblée nationale ait conservé la nécessité d'un acte d'huissier lorsque le bailleur refuse le renouvellement du bail sollicité par son locataire. En effet, l'acte de refus doit indiquer, à peine de nullité, que le locataire, s'il veut contester le refus de renouvellement ou demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal dans les deux ans. Dès lors que la nullité d'un tel acte de refus devrait conduire au renouvellement du bail, il est plus protecteur pour les parties de recourir à l'assistance d'un huissier pour le rédiger et le signifier.

Il relève également que le projet de loi ne substitue pas la lettre recommandée à l'acte d'huissier, mais ouvre seulement une alternative.

II - La position de votre commission

Si elle a admis que l'on puisse davantage recourir, pour des raisons de simplicité comme de coût pour les parties, à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans le régime des baux commerciaux, votre commission a cependant veillé à ce que la sécurité juridique des relations entre bailleur et locataire ne s'en trouve pas excessivement affaiblie.

Ainsi, dans les quelques cas où un acte doit comporter certaines énonciations à peine de nullité, il a semblé préférable à votre commission de conserver le seul acte d'huissier, afin de protéger les parties, en particulier si le bailleur n'est pas un professionnel mais un particulier ou si le locataire n'est pas une grande enseigne mais un petit commerçant. Dans ces cas, il n'est pas certain que le bailleur ou le locataire serait en mesure d'établir des actes formellement réguliers, de sorte que le bail serait renouvelé contre leur volonté voire à leur insu.

Aussi votre commission a-t-elle adopté un amendement en ce sens, à l'initiative de son rapporteur, visant à garantir la sécurité juridique des actes, afin de prévenir les risques contentieux, lorsque la loi prévoit un formalisme substantiel à peine de nullité pour les actes les plus lourds de conséquence.

Les deux actes les plus importants étant le congé (article L. 145-9 du code de commerce) et le refus de renouvellement (article L. 145-10), votre commission a maintenu l'exigence d'un acte extrajudiciaire pour signifier le congé donné par le bailleur, puisque l'Assemblée nationale a maintenu pour sa part l'exigence d'un tel acte pour signifier le refus de renouvellement au locataire. Ce faisant, dans son souci de cohérence, votre commission se voit contrainte de revenir sur la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée.

Par ailleurs, par cohérence, votre commission a également souhaité conserver l'acte extrajudiciaire pour la mise en demeure du locataire en cas d'inexécution de ses obligations (article L. 145-17), laquelle est une formalité préalable au refus de renouvellement du bail sans indemnité, car cette mise en demeure doit respecter un certain formalisme à peine de nullité. En effet, dans une situation comparable, la mise en demeure prévue pour la mise en oeuvre d'une clause résolutoire insérée dans le bail (article L. 145-41), le projet de loi ne remet pas en cause la signification par acte extrajudiciaire, qui doit préciser à peine de nullité que la résiliation ne peut intervenir que dans le délai d'un mois.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 56 bis (art. 1244-4 [nouveau] et 2238 du code civil, art. L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution) - Procédure amiable de recouvrement de créance, par délivrance de titre exécutoire

Objet : le présent article, introduit, en commission spéciale à l'Assemblée nationale, à l'initiative des rapporteurs et de notre collègue député Sébastien Huyghe et plusieurs de ses collègues, crée une procédure amiable de recouvrement de créances, conduite par un huissier de justice.

I - La modification proposée

Les voies de droit pour recouvrer les créances impayées

Plusieurs voies de droit existent pour obtenir le paiement d'une somme d'argent.

La première est celle du recouvrement amiable , qui peut prendre deux formes : le débiteur et le créancier s'entendent sur le montant de la somme à rembourser et les modalités de ce remboursement ; un huissier de justice ou une société de recouvrement sont mandatés par le créancier pour obtenir le paiement volontaire de sa dette par le débiteur.

En l'absence d'accord du débiteur ou si celui-ci revient sur ses engagements, un titre exécutoire est nécessaire. Un tel titre, qui permet ensuite à un huissier de justice de forcer l'exécution de l'obligation de payer, est délivré par un juge.

Le créancier peut obtenir ce titre par anticipation, en faisant homologuer par le juge l'accord auquel il est parvenu avec son débiteur, afin d'être assuré ensuite de pouvoir en poursuivre l'exécution si ce débiteur ne respectait pas les termes de l'accord. Cette homologation peut être l'aboutissement d'une procédure de médiation ou de conciliation conduite, notamment, par un huissier de justice, ou, à travers une convention participative, par un avocat.

Si le créancier ne s'est pas préalablement constitué un titre exécutoire, il doit en obtenir un du juge compétent, en engageant une procédure d'exécution forcée (saisie sur salaire ou saisie d'un bien). Cette procédure, dont le régime est défini dans le code des procédures civiles d'exécution, sera conduite par son huissier.

Une procédure simplifiée d'exécution d'une obligation de paiement existe, celle de l'injonction de payer (art. 1405 et s. du code de procédure civile). Le créancier saisit le juge compétent en fonction du montant de la créance, aux fins de se voir délivrer une ordonnance portant injonction de payer, le juge s'assurant que la créance est certaine (c'est-à-dire qu'elle repose sur une obligation, un contrat non contesté ou un effet de commerce) et exigible. Une fois munie de l'ordonnance, il doit, dans les six mois, la signifier par huissier à son débiteur, qui disposera d'un délai d'un mois pour la contester. Passé ce délai, le créancier pourra obtenir du greffe l'apposition du titre exécutoire sur l'ordonnance.

S'agissant des chèques impayés , le créancier peut, après avoir obtenu, au terme de 30 jours sans paiement, un certificat de non-paiement, remis par sa banque, mandater un huissier aux fins de signifier au débiteur ce certificat. Cette signification vaut injonction de payer dans les 15 jours. À défaut de règlement, l'huissier peut engager, sur la seule base de cette injonction de payer, une procédure d'exécution forcée.

Cette procédure, propre aux chèques sans provisions, est la seule pour laquelle l'huissier est autorisé à délivrer lui-même le titre exécutoire : le législateur a en effet considéré que l'émission du chèque vaut reconnaissance du principe même de la dette.

Source : commission spéciale du Sénat

Motivée par le souci de faciliter le règlement des factures impayées et de raccourcir les retards de paiement, en particulier ceux dont sont victimes les entreprises, la procédure proposée, définie dans un nouvel article 1244-4 du code civil, ne concernerait que des créances ayant une cause certaine (contrat ou obligation statutaire) et qui seraient inférieures à un montant défini par décret. Le Gouvernement a évoqué un plafond de 1 000 à 2 000 euros.

Elle alternerait une phase amiable et, le cas échéant, une phase d'exécution forcée.

La phase amiable, d'une durée de quinze jours, s'engagerait à l'initiative du créancier, par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception invitant le débiteur à participer à celle-ci. L'objet de l'échange entre le créancier et son débiteur serait de s'entendre sur le montant de la dette et les modalités de son règlement.

En cas d'accord entre eux, dans le délai prévu, un huissier de justice pourrait être saisi pour constater les termes de cet accord et délivrer, sans autre formalité, un titre exécutoire. Ce titre permettrait au même huissier, si le débiteur n'honorait pas ses engagements, de procéder à l'exécution forcée de l'accord.

Les frais occasionnés par la procédure de recouvrement amiable seraient à la charge exclusive du créancier, afin de ne pas ajouter à la dette du débiteur. Un décret en Conseil d'État déterminerait les modalités d'application de cette procédure.

L'engagement de la phase amiable suspendrait le délai de prescription de la dette, qui recommencerait à courir à compter de la date du refus du débiteur, constaté par l'huissier, pour une durée qui ne pourrait être inférieure à six mois.

Le texte reprend ici les dispositions relatives au caractère suspensif d'une médiation ou d'une conciliation, prévu à l'article 2238 du code civil. Votre rapporteur observe toutefois que la procédure de recouvrement amiable présente une différence notable avec la situation décrite à l'article 2238 : dans un cas, la suspension de la prescription est acquise en raison de l'accord des deux parties pour participer à une médiation, une conciliation ou une convention de procédure participative, dans l'autre cas elle est acquise du seul fait du créancier. Or, en cas de refus du débiteur, le délai restant à courir ne pourrait être inférieur à six mois. Il y a là, pour le créancier un moyen aisé d'obtenir la suspension du délai de prescription et sa prolongation d'au moins six mois, sans engager d'action en justice .

II - La position de votre commission

Faciliter le règlement des créances est un objectif d'intérêt général. Toutefois, il faut veiller à ne pas priver le débiteur des garanties qu'il tient de la loi, pour contester la créance ou obtenir un délai de grâce, lorsque l'impossibilité à rembourser sa dette est dû à une situation particulière, comme une perte d'emploi 322 ( * ) .

Or, votre rapporteur constate que le dispositif proposé pose, à cet égard, plusieurs difficultés.

Il s'ajoute à une procédure, l'injonction de payer, qui a fait preuve de son efficacité.

En confondant, sur la tête du même professionnel de justice, le pouvoir de procéder à l'exécution forcée de la dette, et celui de conférer à cette dette un caractère exécutoire, il confère à ce dernier un pouvoir exorbitant du droit commun des procédures civiles d'exécution .

Il n'existe qu'un seul cas comparable, celui des chèques sans provision. Mais il diffère nettement de la situation décrite : il s'agit moins de s'interroger sur la validité de la créance, que de s'opposer à la fraude aux moyens de paiement.

À l'Assemblée nationale, le Gouvernement a défendu cette prérogative exorbitante du droit commun conférée à l'huissier de justice en insistant sur l'accord amiable préalable qui la fonde : le débiteur a reconnu sa dette et proposé de la régler.

L'argument, toutefois, ne peut être reçu sans réserve.

En effet, la procédure serait applicable à toutes les créances civiles et, même si elle a été visiblement conçue pour les dettes commerciales, elle concernera aussi les dettes des consommateurs , comme les crédits à la consommation ou les crédits bancaires.

Or, de telles situations, comme l'ont fait remarquer, dans leur contribution écrite, les représentants de l'association nationale des juges d'instance, se caractérisent souvent par l'état de faiblesse du consommateur par rapport au professionnel. Ainsi, certains débiteurs pourraient s'engager dans une procédure dont ils penseront qu'elle leur permet d'obtenir des délais de paiement, mais dont ils ignoreront, qu'une fois leur accord donné par écrit, elle les privera de tout recours efficace 323 ( * ) .

La présence, dans la procédure, d'un officier public et ministériel, rémunéré par le seul créancier, peut aussi être un élément qui incite le débiteur à donner un accord dont il ne mesure pas forcément les effets sur ses possibilités de recours.

Les conséquences d'une confusion entre le pouvoir de procéder à une exécution forcée et celui de conférer le titre nécessaire à cette exécution forcée sont nombreuses : la réalité de la créance ou sa validité ne seront pas appréciées par un juge, alors que tel est le cas dans la procédure d'injonction de payer. De la même manière, l'huissier de justice ne vérifiera pas, comme le ferait un juge, que le contrat ne contrevient pas aux nombreuses dispositions d'ordre public du droit de la consommation. Enfin, cette confusion de deux pouvoirs habituellement séparés crée une situation objective de conflit d'intérêts , puisque le professionnel, rémunéré par le seul créancier, se conférera à lui-même, dans l'intérêt de son client, le pouvoir de procéder à l'exécution forcée.

Votre rapporteur observe, par ailleurs, que la procédure prévue confère à l'huissier de justice une prérogative que n'ont pas les autres intervenants du recouvrement amiable. Ainsi, la convention de procédure participative conduite par un avocat, qui pourrait tout à fait concerner une négociation sur le règlement amiable d'une créance, doit, pour se voir conférer une force exécutoire, être homologuée par un juge. L'accord des parties, impuissant dans ce cas à conférer force exécutoire à la créance, ne le serait pas dans la procédure proposée, pourtant entourée de moins de garanties quant à la conduite des négociations.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a jugé nécessaire, à l'initiative de votre rapporteur de supprimer le pouvoir conféré à l'huissier de délivrer un titre exécutoire. L'amendement qu'elle a adopté a donc rétabli la nécessité d'une homologation judiciaire de l'accord intervenu entre les parties. Cette homologation pourra être obtenue facilement, rapidement et à moindre coût.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 57 - Habilitation en vue de transposer la directive du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession et d'unifier et simplifier les règles applicables aux contrats de concession

Objet : cet article sollicite une habilitation, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, pour autoriser le Gouvernement, d'une part, à transposer la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession et, d'autre part, à unifier, simplifier et mettre en cohérence les règles applicables aux différents contrats de concession.

I - Le dispositif proposé

L'article 57 du projet de loi sollicite une habilitation, au titre de l'article 38 de la Constitution, en vue de prendre par ordonnance les mesures nécessaires, d'une part, à la transposition de la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession et, d'autre part, à l'unification, la simplification et la mise en cohérence des règles applicables aux différents contrats de concession.

Le délai d'habilitation est fixé à neuf mois par le présent article. En vertu de l'article 106 du présent projet de loi, le projet de loi de ratification de l'ordonnance devra être déposé devant le Parlement dans les cinq mois de la publication de l'ordonnance.

Si la transposition de la directive est une obligation européenne, le second volet de l'habilitation se situe dans la perspective d'un futur code de la commande publique , devant remplacer à terme l'actuel code des marchés publics et les divers textes épars régissant la commande publique.

Ce travail de préparation du code de la commande publique a donné lieu à une première habilitation, par l'article 42 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises, en vue d'unifier et de rationaliser les règles applicables aux contrats qui sont des marchés publics au sens du droit de l'Union européenne et aux contrats globaux (contrats de partenariat en particulier). Cette première habilitation a abouti à un projet d'ordonnance, soumis à consultation publique en janvier 2015 mais non encore publié.

Dans un second temps, les deux ordonnances relatives aux marchés publics et aux concessions devraient être regroupées au sein d'un nouveau code unique de la commande publique

Entendue par votre rapporteur, l'Association des maires de France a demandé la suppression de cette habilitation, inquiète de ce qu'elle pourrait conduire à remettre en cause les règles actuelles en matière de délégation de service public et de concessions, telles qu'elles résultent notamment de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin ». L'Association a ainsi demandé une transposition a minima de cette directive et un maintien des règles actuelles.

L'Union nationale des services publics industriels et commerciaux et l'Institut de la gestion déléguée ont également fait part à votre rapporteur de leurs inquiétudes quant à cette habilitation.

Interrogé par votre rapporteur, le Gouvernement a indiqué qu'il ne souhaitait pas faire une transposition de la directive en ce sens.

II - La position de votre commission

Compte tenu des inquiétudes exprimées par l'Association des maires de France et les partenaires privés des collectivités territoriales, dès lors que le Gouvernement a indiqué qu'il ne souhaitait pas remettre en cause le droit français actuel n'entrant pas dans le champ de la directive, votre commission a adopté un amendement , proposé son rapporteur, visant à exclure de façon explicite toute remise en cause des règles actuelles , issues de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, à l'occasion de la transposition de la directive comme de l'établissement de règles harmonisées en matière de concessions.

Votre commission a écarté toute possibilité de sur-transposition ainsi que toute remise en cause des règles applicables aux contrats n'entrant pas dans le champ de la directive. La future ordonnance relative à l'ensemble des contrats de concession devra donc être rédigée à droit constant , sous réserve des modifications nécessaires à la mise en cohérence des textes.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 57 bis - Faculté pour les administrations financières dans les départements d'outre-mer d'attester de la capacité d'une entreprise à obtenir un marché public, pour les dispenser de fournir des attestations fiscales et sociales

Objet : cet article vise à substituer, pour les entreprises des départements d'outre-mer détenant des créances publiques, une attestation certifiant de leur capacité à obtenir un marché public aux attestations prouvant qu'elles ont satisfait à leurs obligations fiscale et sociales.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en séance, à l'initiative de notre collègue député Serge Letchimy, l'article 57 bis du projet de loi propose que les administrations financières - sans que cette notion soit précisée - aient la faculté de délivrer à une entreprise une attestation certifiant de sa capacité à se voir attribuer un marché public, au vu notamment des créances publiques - dont la teneur n'est pas précisée - que cette entreprise détient. Une telle attestation aurait vocation à se substituer aux attestations que doit fournir une entreprise attributaire d'un marché public pour prouver qu'elle satisfait à ses obligations fiscales et sociales.

Ce dispositif s'appliquerait uniquement dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, départements et régions d'outre-mer ainsi que collectivités à statut particulier.

Actuellement, en vertu de l'article 46 du code des marchés publics, une entreprise obtenant un marché public est tenue de fournir à la personne publique qui a organisé le marché des « attestations et certificats délivrés par les administrations et organismes compétents prouvant qu'il a satisfait à ses obligations fiscales et sociales ». Un marché ne peut pas être attribué à une entreprise qui n'est pas en mesure de fournir de tels documents.

Un arrêté interministériel du 31 janvier 2003 a précisé la liste des impôts et taxes ainsi que des cotisations et contributions sociales qui doivent donner lieu à la présentation d'un certificat. Il a aussi précisé les services et organismes compétents pour l'établissement de ces certificats.

Ainsi, les comptables publics établissent les certificats certifiant du paiement de l'impôt sur le revenu, de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée, tandis que les services fiscaux concernés établissent les certificats certifiant de la souscription des déclarations correspondantes. Les attestations certifiant du paiement d'un certain nombre de charges sociales, dont les cotisations de sécurité sociale et la contribution sociale généralisée, sont établies par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) ainsi que les caisses générales de sécurité sociale (CGSS), qui jouent le rôle des URSSAF dans les départements d'outre-mer.

Or, dans les départements d'outre-mer, votre rapporteur rappelle qu'il est fréquent que les entreprises locales postulant à un marché public souffrent de difficultés de trésorerie et ne soient pas à jour par conséquent de leurs obligations fiscales et sociales, telles qu'elles sont fixées par l'arrêté du 31 janvier 2013 précité. Formellement, elles ne peuvent donc pas prétendre à l'obtention d'un marché public.

La question ne se pose pas toutefois pour des entreprises nationales qui postulent pour des marchés publics locaux de taille importante, mais pour les entreprises locales seulement.

Un des facteurs explicatifs de ce phénomène de dettes fiscales et sociales récurrentes des entreprises locales serait les délais avec lesquels les collectivités publiques locales paient les entreprises attributaires de leurs marchés publics, notamment en matière de travaux publics, compte tenu de leurs propres difficultés de trésorerie voire de leurs difficultés budgétaires parfois très lourdes, ne respectant pas l'obligation d'équilibre budgétaire pour certaines d'entre elles.

À cet égard, dans leur rapport d'information d'avril 2011 sur leur mission en Guadeloupe, Guyane et Martinique 324 ( * ) , nos deux anciens collègues Christian Cointat et Bernard Frimat avaient exposé les difficultés budgétaires importantes de ces communes, caractérisées par des dépenses de personnel très lourdes et dynamiques, des recettes fiscales faibles et stagnantes et des capacités d'investissement insuffisantes.

Ainsi, l'objectif recherché par l'article 57 bis du projet de loi est de permettre a priori au comptable public de la collectivité territoriale concernée d'établir une attestation consistant en réalité à énoncer qu'une entreprise, qui n'est certes pas en règle au titre de ses obligations fiscales et sociales, peut obtenir un marché public de cette collectivité, car celle-ci lui doit des sommes importantes qui lui permettraient, si elles étaient réglées, de se mettre à jour de ses obligations fiscales et sociales.

II - La position de votre commission

S'il comprend pleinement la situation difficile tant économiquement que juridiquement des entreprises ultramarines qui interviennent sur le seul marché local et dépendent significativement des marchés publics locaux, votre rapporteur ne saurait souscrire à des dispositions aussi dérogatoires, qui heurtent le principe d'égalité dans l'accès à la commande publique. Ces dispositions consistent, en outre, à considérer comme normale la situation dans laquelle une entreprise ne paie pas ses impôts et charges sociales et une collectivité territoriale ne règle pas ses fournisseurs et ses contractants, alors qu'il existe dorénavant des règles en matière de délai de paiement par les personnes publiques 325 ( * ) , applicables outre-mer 326 ( * ) . Ce délai est fixé à trente jours pour les collectivités territoriales, sous peine du paiement d'intérêts moratoires et d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

En outre, tel qu'il est rédigé, le dispositif de l'article 57 bis demeure très imprécis sur les critères sur le fondement desquels pourrait être établie une attestation particulière se substituant aux attestations des organismes fiscaux et sociaux. Il confie l'établissement des attestations de substitution à des « administrations financières », sans préciser lesquelles, alors qu'il devrait s'agir selon toute vraisemblance du comptable public, fonctionnaire relevant de l'administration des finances publiques. Il n'ouvrirait qu'une simple possibilité, non contraignante, d'établir une telle attestation. En outre, celle-ci serait établie « au regard notamment des créances publiques » détenues par l'entreprise sollicitant l'attestation, sans que soit précisée la nature de ces créances, qui pourraient concerner l'État ou un établissement public, et le fait que ces créances devraient concerner a priori la collectivité qui envisage d'attribuer un marché à l'entreprise qui sollicite une telle attestation.

Enfin, compte tenu du régime de responsabilité auquel est soumis tout comptable public, responsable sur ses propres deniers de toute erreur commise dans l'exercice de ses fonctions, votre rapporteur s'interroge sur le caractère opérant d'un tel dispositif facultatif et sur son acceptation par les comptables concernés.

Face à ces incertitudes et imprécisions, votre commission a adopté un amendement , à l'initiative de son rapporteur, visant à supprimer ce dispositif, en dépit des réels problèmes rencontrés localement. Il convient d'explorer d'autres pistes pour y remédier.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 58 (art. L. 121-16-1, L. 121-21, L. 132-2, L. 141-1 et L. 141-1-2 du code de la consommation, art. L. 465-2 du code de commerce et art. 17-2 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce) - Plafonnement des frais mis à la charge des entreprises en cas de publicité de la sanction ou de l'injonction les concernant - Report, à la livraison du produit, de la possibilité de rétractation - Suppression de l'amende sanctionnant l'absence d'information sur les prix pratiqués par les professionnels de l'immobilier

Objet : outre quelques précisions rédactionnelles, le présent article vise, d'une part, à plafonner les frais de publicité mis à la charge des entreprises faisant l'objet d'une sanction ou d'une injonction administrative, d'autre part, à reporter, pour les contrats à distance, la possibilité pour le consommateur de se rétracter, à la livraison du produit et, enfin, à supprimer une sanction pénale applicable aux professionnels de l'immobilier.

I - Le plafonnement des frais de publicité mis à la charge des entreprises sanctionnées par la DGCCRF

A. La modification proposée

Lors des débats sur le projet de loi relatif à la consommation 327 ( * ) , qui a conféré à la DGCCRF un pouvoir de sanction administrative, la possibilité d'imposer à l'entreprise fautive une mesure de publicité de la décision de sanction ou d'injonction prononcée à son encontre a été introduite à l'initiative du Sénat. Notre collègue Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois, avait notamment défendu l'intérêt d'une telle publicité en ces termes : « sauf disposition expresse, les sanctions administratives ne sont soumises à aucune publicité, contrairement aux condamnations pénales, ce qui nuit aux consommateurs, parce qu'ils ne sont pas informés du comportement fautif et de sa sanction.

Or, cette information pourrait les conduire à être plus vigilants vis-à-vis du professionnel condamné ou à réclamer la réparation de leur préjudice. En outre, la publicité de la sanction a un effet dissuasif puisqu'elle affecte la réputation des entreprises à laquelle celles-ci sont très attachées » 328 ( * ) .

Le dispositif finalement retenu pour les sanctions administratives, aux articles L. 141-1-2 du code de la consommation et L. 465-2 du code de commerce, ainsi que pour les mesures d'injonction de cesser un agissement illicite, à l'article L. 132-2 du code de la consommation, permet à la DGCCRF de décider ou non de rendre publiques ses décisions.

Le Gouvernement fait valoir que, dans certains cas, ces mesures de publicité peuvent constituer une sanction supplémentaire, plus sévère que la sanction encourue. Soucieux, à la fois, d'éviter toute disproportion entre l'agissement sanctionné et la répression opérée par le biais de la publicité imposée au professionnel, et de garantir aux entreprises une certaine prévisibilité sur les sanctions auxquelles elles s'exposent, il a proposé, au présent article, de plafonner le coût de la publication ordonnée par la DGCCRF : celui-ci ne pourrait excéder le plafond légal de la sanction encourue, c'est-à-dire, dans la majeure partie des cas, entre 1 500 et 3 000 euros pour une personne physique et 7 500 à 15 000 euros pour une personne morale.

Il serait par ailleurs précisé que la mesure de publicité est ordonnée aux frais du contrevenant.

B. La position de votre commission

Votre rapporteur rejoint l'analyse de notre collègue Nicole Bonnefoy pour constater que, souvent, la mesure de publicité participe de la réparation sociale du trouble causé par l'agissement illicite dont s'est rendu coupable le professionnel.

Il est légitime que le coût de cette mesure ne soit pas hors de proportion avec la gravité des conséquences des agissements sanctionnés. La plupart du temps, d'ailleurs, ce coût est tout à fait raisonnable, parce que la mesure elle-même est limitée : affichage dans le magasin fautif, publicité dans un journal d'annonce légale, publication sur un site internet etc .

Exceptionnellement, il peut arriver que des mesures plus conséquentes soient ordonnées, parce que le trouble créé par l'agissement le justifie. Il en irait ainsi, par exemple, de la diffusion d'une publicité par envoi postal qui contiendrait des informations erronées ou trompeuses sur les prix pratiqués. Dans une telle situation, le trouble ne pourrait être efficacement combattu que par l'ampleur de la publicité donnée à la sanction.

Limiter par avance le coût possible de cette publicité à la charge du professionnel n'est donc pas forcément opportun. Votre rapporteur observe d'ailleurs que le pouvoir réglementaire n'a fixé aucun plafond dans les textes d'application des dispositions précitées.

Votre commission a par conséquent adopté l'amendement de son rapporteur supprimant ce plafond. Afin de permettre, toutefois, un échange contradictoire sur l'opportunité et la proportionnalité des mesures de publicité envisagées par l'administration, le même amendement prévoit que cette dernière en informe le professionnel, au cours de la procédure préalable au prononcé de la sanction ou de l'injonction.

II - Le report, à la date de la livraison du bien, de la possibilité de rétractation offerte au consommateur, dans le cadre d'une vente à distance

Le droit de la consommation reconnaît aux consommateurs, en matière de vente à distance, de démarchage téléphonique et de vente conclus hors établissement (démarchage, vente à domicile), un droit de rétractation qu'ils peuvent exercer pendant quatorze jours. Ce droit leur permet d'obtenir sans frais l'annulation du contrat conclu avec le professionnel, à la condition de restituer le produit reçu.

En vertu de l'article L. 121-21 du code de la consommation, lorsque le bien est livré, ce délai court à compter de sa réception par le consommateur. Toutefois le même article précise que le droit de rétractation peut, quant à lui, être exercé dès la conclusion du contrat.

Pourtant, arguant d'un usage constant en matière de contrats de vente à distance, un amendement de nos collègues députés Joël Giraud et Alain Tourret, adopté en commission spéciale, a proposé de supprimer cette possibilité pour ces contrats et de ne la conserver que pour les contrats conclus hors établissement.

Votre commission a considéré que rien ne justifiait une telle suppression. La faculté d'exercer son droit de rétractation dès la conclusion du contrat protège le consommateur, puisqu'elle lui permet d'agir à un moment où les formalités de rétractation sont réduites. Puisque le bien ne lui a pas encore été livré, il n'a pas à le retourner au professionnel et peut se contenter d'informer le vendeur de sa rétractation. Il est d'ailleurs paradoxal de contraindre un consommateur qui souhaite se rétracter, à attendre que le bien lui soit livré.

En outre, cette faculté protège le consommateur contre les retards de livraison imputables au professionnel, puisqu'il peut décider d'exercer son droit de rétractation pendant tout le délai qui sépare la conclusion du contrat de la livraison.

Votre commission a par conséquent adopté les amendements de nos collègues François Commeinhes et Claude Kern, supprimant la modification proposée par l'Assemblée nationale.

III - La suppression de l'amende sanctionnant l'absence d'information sur les prix pratiqués par les professionnels de l'immobilier

La loi dite « ALUR » du 24 mars 2014 329 ( * ) a soumis certains professionnels de l'immobilier, agents ou gestionnaires de biens, à l'obligation de mentionner dans leurs documents publicitaires le montant toutes taxes comprises de leurs honoraires exprimé, pour ce qui concerne les opérations de vente, en pourcentage du prix, lorsqu'ils sont à la charge du locataire ou de l'acquéreur 330 ( * ) .

Elle a sanctionné le non-respect de cette obligation d'une amende de 5 e classe, pouvant s'élever jusqu'à 1 500 euros 331 ( * ) .

En séance publique, à l'initiative de notre collègue Joël Giraud et plusieurs de ses collègues, les députés ont supprimé cette contravention, au double motif, d'une part, qu'il s'agirait d'une simplification pour les professionnels concernés, et, d'autre part, que l'amende risquerait de se cumuler avec une sanction administrative, ce qui serait inconstitutionnel.

Votre rapporteur rappelle que l'article L. 141-1-2 du code de la consommation prévoit expressément le cas d'un tel cumul et qu'il dispose, conformément à la jurisprudence constitutionnelle 332 ( * ) , que, lorsqu'une amende administrative est susceptible de se cumuler avec une sanction pénale, le montant global des sanctions prononcées ne peut dépasser le maximum légal encouru le plus élevé.

La crainte évoquée n'est donc pas fondée et rien ne justifie de revenir, un an après, sur ce qu'a décidé le législateur.

Votre commission a par conséquent adopté un amendement supprimant le paragraphe II. bis introduit par les députés.

IV - Dispositions de coordination

Le présent article compte par ailleurs plusieurs dispositions de coordination destinées à prévoir l'application des sanctions pénales propres aux contrats conclus à distance ou hors établissement, aux contrats de vente ou de construction immobilière relevant de ces deux catégories, ainsi qu'à procéder aux corrections rédactionnelles nécessaires pour confirmer la possibilité pour la DGCCRF d'utiliser ses pouvoirs en matière de clauses illicites, abusives ou interdites dans les contrats conclu par un consommateur ou un non-professionnel.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 58 bis A (art. L. 225-94-1 du code de commerce) - Restriction des règles de cumul des mandats pour les dirigeants mandataires sociaux dans les grandes sociétés cotées

Objet : cet article vise à limiter à trois, au lieu de cinq, le nombre total de mandats sociaux qu'un directeur général, membre du directoire ou directeur général unique peut détenir dans les grandes sociétés cotées, lui permettant de détenir, outre son mandat de dirigeant, deux mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance.

I - Les règles actuelles de cumul des mandats sociaux

Les règles de cumul des mandats sociaux dans les sociétés anonymes revêtent aujourd'hui une grande complexité, dans la mesure où plusieurs dispositifs s'imbriquent les uns dans les autres, à l'issue d'une sédimentation importante compte tenu des interventions jadis fréquentes du législateur.

S'agissant des sociétés à conseil d'administration, l'article L. 225-21 du code de commerce dispose qu'une même personne physique 333 ( * ) ne peut exercer simultanément plus de cinq mandats d'administrateur. Toutefois, les mandats exercés dans des sociétés contrôlées ne sont pas pris en compte, tandis que les mandats exercés dans des sociétés non cotées ne comptent que pour un seul mandat, à condition de ne pas excéder cinq mandats de ce type au total.

S'agissant des sociétés à conseil de surveillance et directoire, les mêmes règles résultent de l'article L. 225-77 pour les mandats de membre du conseil de surveillance.

L'article L. 225-94 précise que la limitation du nombre de mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance pour une même personne s'applique au cumul des mandats d'administrateur et de membre du conseil de surveillance. Une même personne physique ne peut donc pas détenir plus de cinq mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance, sans préjudice des dérogations dans les sociétés contrôlées ou non cotées.

Ces règles de cumul ne concernent que les mandats non exécutifs d'administrateur et de membre du conseil de surveillance. Les règles sont plus restrictives pour les mandats exécutifs, à savoir directeur général dans les sociétés à conseil d'administration - ce mandat pouvant être cumulé avec la présidence du conseil - et membre du directoire ou directeur général unique 334 ( * ) dans les sociétés dualistes à conseil de surveillance et directoire.

S'agissant des sociétés à conseil d'administration, l'article L. 225-54-1 indique qu'une même personne physique ne peut exercer simultanément plus d'un mandat de directeur général. Un deuxième mandat exécutif peut toutefois être exercé dans une société contrôlée et un autre mandat exécutif peut être exercé dans une société non cotée.

S'agissant des sociétés à conseil de surveillance et directoire, les mêmes règles résultent de l'article L. 225-67 pour les mandats exécutifs.

L'article L. 225-94 précise que les mandats de directeur général et de membre du directoire ou directeur général unique sont assimilés sous l'angle des règles de cumul des mandats exécutifs, de même que pour les mandats non exécutifs.

Enfin, l'article L. 225-94-1 ajoute qu'une même personne physique ne peut exercer simultanément plus de cinq mandats de directeur général, de membre du directoire, de directeur général unique, d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance 335 ( * ) . Ne sont toutefois pas pris en compte les mandats non exécutifs exercés dans des sociétés contrôlées 336 ( * ) .

L'ensemble des règles de cumul ne s'appliquent logiquement que pour les mandats dans les sociétés ayant leur siège sur le territoire français. Le code de commerce comporte également des règles de résolution en cas de dépassement du nombre des mandats autorisés.

II - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en séance publique, à l'initiative de nos collègues députées Karine Berger et Valérie Rabault, l'article 58 bis A du projet de loi vise à limiter davantage les règles de cumul des mandats, pour les personnes détenant un mandat exécutif. Ces règles renforcées de cumul ne s'appliqueraient que dans les sociétés cotées.

L'objectif ainsi recherché est de conduire les dirigeants mandataires sociaux à se consacrer plus pleinement à leurs fonctions exécutives, à limiter la « consanguinité dans les conseils d'administration ou de surveillance », selon les termes de notre collègue Valérie Rabault, et à diversifier la composition de ces conseils.

Le directeur général, le membre du directoire ou le directeur général unique d'une société cotée employant plus de 5 000 salariés, incluant ceux de ses filiales françaises directes et indirectes, ou de 10 000 salariés, incluant ceux de ses filiales françaises et étrangères directes et indirectes, ne pourrait exercer, outre son mandat exécutif, que deux mandats non exécutifs au sein de sociétés cotées, administrateur ou membre du conseil de surveillance.

Ces dispositions conduiraient, en réalité, à intégrer dans la loi des règles actuelles de gouvernement d'entreprise, édictées par les organisations représentant les entreprises et souvent qualifiées de « soft law ».

Dans sa version de juin 2013, le code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées, établi par l'Association française des entreprises privées (AFEP) et le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) - autrement appelé code AFEP-MEDEF -, comporte déjà une disposition de même nature. En effet, il prévoit qu'« un dirigeant mandataire social ne doit pas exercer plus de deux autres mandats d'administrateur dans des sociétés cotées extérieures à son groupe, y compris étrangères » 337 ( * ) .

En d'autres termes, dans une société cotée, le directeur général, pour les sociétés à conseil d'administration, ou bien le membre du directoire ou le directeur général unique, pour les sociétés dualistes à conseil de surveillance et directoire, ne peut détenir que deux autres mandats non exécutifs d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance dans une autre société cotée française ou étrangère. Le code AFEP-MEDEF ne prévoit pas de restriction en fonction de la taille de la société.

Le code de gouvernement d'entreprise pour les valeurs moyennes et petites 338 ( * ) , établi en décembre 2009 par Middlenext, association professionnelle française des valeurs moyennes cotées, recommande que « l'administrateur, lorsqu'il exerce un mandat de « dirigeant », n'accepte pas plus de trois autres mandats d'administrateur dans des sociétés cotées, y compris étrangères, extérieures à son groupe » 339 ( * ) .

Votre rapporteur rappelle que les sociétés cotées ne se réfèrent pas toutes à un code de gouvernement d'entreprise. À ce titre, les articles L. 225-37 et L. 225-68 du code de commerce disposent ainsi :

« Lorsqu'une société se réfère volontairement à un code de gouvernement d'entreprise élaboré par les organisations représentatives des entreprises, le rapport prévu au présent article précise également les dispositions qui ont été écartées et les raisons pour lesquelles elles l'ont été. Se trouve de surcroît précisé le lieu où ce code peut être consulté. Si une société ne se réfère pas à un tel code de gouvernement d'entreprise, ce rapport indique les règles retenues en complément des exigences requises par la loi et explique les raisons pour lesquelles la société a décidé de n'appliquer aucune disposition de ce code de gouvernement d'entreprise. »

Si les représentants des entreprises entendus par votre rapporteur ne se sont pas opposés au présent article, ils ont néanmoins fait part de leur préférence pour la « soft law » et l'autorégulation, du fait de leur souplesse, à l'inverse de la règle législative, caractérisée par nature par sa rigidité. Ils ont néanmoins indiqué que les règles de cumul des mandats étaient très largement appliquées dans les sociétés cotées.

III - La position de votre commission

Votre commission n'a pas formulé d'opposition à ce que la règle de cumul des mandats figurant dans le code AFEP-MEDEF et concernant les seuls détenteurs de mandats exécutifs dans les sociétés cotées soit reprise au niveau législatif.

Par l'adoption d'un amendement présenté par son rapporteur, outre une clarification rédactionnelle, votre commission a souhaité s'en tenir à la règle du code AFEP-MEDEF, en excluant les critères alternatifs de nombre minimal de salariés. En effet, de tels critères sont une source de complexité et peuvent créer des effets de seuil, alors que le critère de la cotation peut déjà justifier à lui seul de façon objective une règle plus restrictive, dans l'intérêt de la protection des épargnants.

De plus, par coordination, votre commission a également souhaité extraire de ces règles restrictives les sociétés dans lesquelles est détenue une participation 340 ( * ) , par assimilation avec le régime des sociétés contrôlées, ainsi que les sociétés d'investissement, dont l'objet même est de prendre des participations dans d'autres sociétés.

Enfin, votre commission a précisé les conditions d'entrée en vigueur de ces nouvelles règles, en prévoyant que les directeurs généraux, membres du directoire et directeurs généraux uniques disposent d'un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi pour se mettre en conformité. À défaut, ils seraient réputés démissionnaires de tous leurs mandats.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 58 bis (art. L. 223-18, L. 912-1 et L. 952-2 du code de commerce) - Simplification des règles de transfert du siège d'une société à responsabilité limitée à l'initiative de son gérant

Objet : cet article vise à permettre que le transfert du siège d'une société à responsabilité limitée sur l'ensemble du territoire français puisse être décidé par le gérant puis ratifié ultérieurement par l'assemblée des associés.

I - Les règles actuelles de transfert du siège d'une société à responsabilité limitée

Le siège social d'une société à responsabilité limitée (SARL) étant une clause statutaire, son déplacement doit s'opérer par une modification des statuts par l'assemblée des associés, dans les conditions prévues par l'article L. 223-30 du code de commerce. Toutefois, l'article L. 223-18 du code prévoit que le déplacement du siège social dans le même département ou un département limitrophe peut être décidé par le gérant, sous réserve d'une ratification ultérieure de la décision par les associés à une majorité qualifiée des parts sociales.

Des dispositions analogues existent pour les sociétés anonymes, avec une distinction selon que le déplacement du siège est prévu ou non dans le même département ou un département limitrophe.

On peut effectivement considérer que le déplacement du siège dans un même espace géographique constitue en réalité un simple acte de gestion de l'entreprise, mission relevant de la responsabilité du gérant. Il n'en serait pas de même pour un transfert du siège en un lieu très éloigné.

La loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises est venue simplifier ces dispositions, à l'initiative de notre collègue André Reichardt, rapporteur de ce projet de loi au nom de la commission des lois, qui a converti une habilitation générale sur ce point en une modification directe et précise du code de commerce.

Dorénavant, la décision de transfert du gérant n'a plus à être ratifiée par les associés à une majorité qualifiée des trois quarts des parts sociales, mais à une majorité simple des parts sociales (renvoi à l'article L. 223-9 du code de commerce), susceptible d'être réduite à une majorité simple des votes émis en cas de seconde convocation.

Par ailleurs, toute modification statutaire du siège pour prévoir un transfert en dehors du même département ou d'un département limitrophe est dorénavant acquise à la majorité simple des parts sociales, et plus à la majorité qualifiée des trois quarts des parts sociales ou, s'agissant des SARL constituées depuis 2005 341 ( * ) , à la majorité qualifiée des deux tiers des votes émis.

Ainsi, de façon homogène et sans préjudice d'éventuelles actions pour abus de majorité, le transfert du siège social d'une SARL doit être approuvé par les associés à une majorité simple des parts sociales, soit sous forme d'une ratification d'une initiative du gérant pour un transfert dans le même département ou un département limitrophe, ayant pour effet de modifier les statuts, soit sous forme d'une modification normale des statuts en assemblée des associés pour un transfert dans un autre lieu.

II - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative du Gouvernement, l'article 58 bis du projet de loi vise à permettre au gérant de prendre l'initiative de décider du transfert du siège d'une SARL en tout point du territoire français, sous réserve d'une ratification ultérieure par les associés, avec les règles de majorité simplifiées instaurées en 2014, en vue de modifier en conséquence les statuts de la société.

En séance, lors de l'examen de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 précitée, le Sénat avait refusé un tel amendement du Gouvernement, considérant qu'une telle faculté laissée au gérant excédait la gestion courante de la société et pouvait conduire à des abus en cas de conflit entre le gérant et les associés. La commission mixte paritaire réunie le 25 novembre 2014 sur ce texte s'en était tenue, pour l'essentiel, à la position prise par le Sénat. Les conclusions de la commission mixte paritaire ont été approuvées par les deux assemblées et n'ont pas été modifiées sur ce point.

III - La position de votre commission

Dans la mesure où le présent article vise expressément à revenir sur un accord intervenu entre le Sénat et l'Assemblée nationale en commission mixte paritaire, il y a seulement quelques mois, votre commission a estimé qu'il n'était pas respectueux du travail parlementaire et qu'il ne saurait être accepté. La question a déjà été tranchée par le Parlement.

Aussi votre commission a-t-elle adopté un amendement présenté par son rapporteur en vue de supprimer purement et simplement cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 58 ter (art. L. 225-37, L. 225-68 et L. 226-10-1 du code de commerce et article L. 621-18-3 du code monétaire et financier) - Obligation pour les grandes sociétés cotées de publier des informations sur la diversité de la composition de leurs conseils

Objet : cet article vise à prévoir, pour les grandes sociétés cotées, que le rapport du président du conseil d'administration aux actionnaires inclut des informations sur la diversité de la composition du conseil et la variété des profils professionnels des administrateurs.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue députée Karine Berger, l'article 58 ter du projet de loi exige que, dans les sociétés cotées excédant des seuils de total de bilan, de montant de chiffre d'affaires net et de nombre de salariés fixés par décret, le rapport du président du conseil d'administration ou de surveillance, joint au rapport du conseil à l'assemblée générale des actionnaires, inclut « des informations sur la diversité de la composition du conseil (...), notamment la variété des profils » de ses membres, administrateurs ou membres du conseil de surveillance.

Il complète à cette fin les articles L. 225-37 et L. 225-68 du code de commerce et procède à diverses coordinations au sein de ce même code et au sein du code monétaire et financier.

II - La position de votre commission

Une telle disposition constitue une contrainte supplémentaire pour les sociétés cotées concernées, alors même qu'elle est déjà très largement satisfaite par le droit en vigueur applicable à toutes les sociétés cotées.

En effet, les articles L. 225-37 et L. 225-68 précités prévoient déjà que le président du conseil, dans son rapport, rend compte « de la composition du conseil et de l'application du principe de représentation équilibrée des femmes et des hommes en son sein, des conditions de préparation et d'organisation des travaux du conseil, ainsi que des procédures de contrôle interne et de gestion des risques mises en place par la société ».

Dans ces conditions, les dispositions prévues par le présent article seraient parfaitement redondantes, sauf à considérer que rendre compte de la composition du conseil ne permette pas de donner des informations sur la diversité de sa composition. Aussi votre commission les a-t-elle supprimées, en adoptant un amendement présenté par son rapporteur.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 58 quater (art. L. 232-25 du code de commerce) - Dispense de publication du compte de résultat pour les petites entreprises

Objet : cet article vise à permettre aux sociétés entrant dans la catégorie des petites entreprises d'opter pour l'absence de publication de leur compte de résultat, sauf à l'égard des prêteurs et investisseurs.

I - Les règles actuelles de dispense de publication des comptes

La directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, qui détermine les obligations comptables applicables aux sociétés, autorise les États membres de l'Union européenne qui le souhaiteraient à exempter les petites entreprises 342 ( * ) de l'obligation de publier leur compte de résultat (article 31) et les micro-entreprises 343 ( * ) de l'obligation de publier leurs comptes annuels (article 36) 344 ( * ) .

En dépit de la forte tradition française en matière de publicité légale des informations relatives aux entreprises, notamment les comptes annuels, le débat sur la confidentialité des comptes a été régulièrement nourri par les organisations professionnelles au cours de ces dernières années. À cet égard, depuis 2014, il est désormais possible aux micro-entreprises de demander que leurs comptes ne soient pas rendus publics lors de leur dépôt au registre du commerce et des sociétés (RCS).

Prise sur le fondement d'une habilitation prévue par la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, l'ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014 allégeant les obligations comptables des micro-entreprises et petites entreprises a prévu, entre autres dispositions, que les sociétés qui répondent à la définition des micro-entreprises peuvent déclarer que leurs comptes annuels ne seront pas rendus publics. Cette faculté ne s'applique pas aux établissements de crédit, aux entreprises d'assurance, aux sociétés d'investissement et aux sociétés cotées et n'est pas opposable aux autorités administratives et judiciaires ainsi qu'à la Banque de France, pour l'exercice de leurs missions. L'administration fiscale, par exemple, peut continuer à accéder à l'ensemble des comptes, dont l'obligation d'établissement et de dépôt au RCS n'a évidemment pas été remise en cause (articles L. 232-21 à L. 232-23 du code de commerce).

Ces dispositions figurent dans un nouvel article L. 232-25 du code de commerce, au sein de la section du code relative à la publicité des comptes des sociétés commerciales.

II - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue députée Bernadette Laclais, puis largement modifié en séance publique pour en assurer la conformité à la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 précitée 345 ( * ) , l'article 58 quater du projet de loi propose d'utiliser la faculté offerte par cette directive en matière de dispense de publication du compte de résultat pour les petites entreprises. Il modifie à cet effet l'article L. 232-25 précité du code de commerce.

Par conséquent, cette disposition tend à compléter celle introduite par l'ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014 précitée.

En vertu des articles L. 123-16 et D. 123-200 du code de commerce, sont des petites entreprises celles qui n'excèdent pas deux des trois seuils suivants pendant deux exercices consécutifs : 4 millions d'euros de total de bilan, 8 millions d'euros de chiffre d'affaires net et 50 salariés.

Une telle faculté serait exclue pour les établissements de crédit, les entreprises d'assurance et les sociétés cotées, comme c'est le cas pour les micro-entreprises, mais curieusement pas pour les sociétés d'investissement, alors que c'est pourtant le cas pour les micro-entreprises. Seraient également exclues les sociétés appartenant à un groupe.

Ces dispositions ne remettent pas en cause l'absence d'opposabilité de la confidentialité à l'égard des autorités administratives et judiciaires et de la Banque de France.

En revanche, pour les petites entreprises comme pour les micro-entreprises, l'article 58 quater prévoit que la confidentialité des comptes ne serait pas non plus opposable aux « personnes morales, relevant de catégories définies par arrêté des ministres chargés de l'économie et des finances, qui financent ou investissent, directement ou indirectement, dans les entreprises ou fournissent des prestations au bénéfice de ces personnes morales ». Cette disposition vise à permettre aux établissements de crédit, aux divers organismes prêteurs ou apporteurs de fonds propres, aux sociétés d'investissement ou de capital-risque, ou encore à divers prestataires tels que les assureurs-crédit ou les agences de notation financière et de « scoring », d'accéder directement aux comptes confidentiels. Pareille disposition ne figurait pas dans l'ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014.

III - La position de votre commission

Si votre commission a admis, dans un souci de cohérence, que soit mise en oeuvre la faculté offerte par la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 précitée d'exempter les petites entreprises de l'obligation de publier leur compte de résultat, dans la mesure où la faculté similaire concernant les micro-entreprises est déjà utilisée depuis 2014, elle a cependant considéré, dans un même souci de cohérence, qu'il ne fallait pas permettre un accès de droit aux comptes confidentiels pour des organismes non publics.

L'accès des autorités administratives et judiciaires et de la Banque de France aux comptes confidentiels se justifie de façon objective et nécessaire en raison de leurs prérogatives de puissance publique, aux fins de contrôle, et de leurs missions de service public, par exemple le suivi des difficultés des entreprises par les tribunaux de commerce ou le suivi statistique de l'INSEE.

En revanche, compte tenu de l'équilibre du dispositif, il n'apparaît pas opportun de permettre à des organismes privés de pouvoir accéder aux comptes confidentiels. Outre qu'une telle possibilité tend à largement vider de sa substance le principe même de confidentialité des comptes, alors que le législateur a accepté d'en faire application en 2014, la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 précitée ne prévoit pas un tel accommodement.

De plus, une telle possibilité d'accès aux comptes confidentiels ne présenterait qu'un intérêt limité d'un point de vue pratique.

Une société souhaitant solliciter un soutien financier, sous forme de crédit ou par un apport en fonds propres, ou souhaitant bénéficier d'une notation financière, communiquerait évidemment l'ensemble de ses comptes à l'organisme qu'elle sollicite, sans quoi elle ne pourrait rien obtenir de sa part. Au demeurant, si une entreprise souhaite bénéficier d'une notation pour accroître sa crédibilité commerciale, votre rapporteur juge peu probable qu'elle demande la confidentialité de ses comptes, laquelle pourrait susciter à l'inverse une certaine défiance d'éventuels partenaires commerciaux. À cet égard, il rappelle que, selon les informations qui lui ont été fournies, environ 2 000 sociétés seulement, entrant dans la catégorie des micro-entreprises, ont opté pour la confidentialité de leurs comptes de l'exercice 2014.

Par ailleurs, la rédaction du texte semble receler une ambiguïté : il pourrait être compris que seuls les organismes qui envisagent de financer ou d'investir dans une société pourraient accéder aux comptes confidentiels de cette société. Si tel était le cas, en pratique, le gestionnaire du RCS ne pourrait pas savoir s'il peut déroger à la confidentialité, car l'organisme souhaitant accéder aux comptes ne pourrait pas prouver qu'il est en relation contractuelle avec la société au moment où il solliciterait le registre.

Dans ces conditions, cette disposition a paru à votre commission au mieux inutile et au pire contre-productive. Aussi a-t-elle adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement en vue de la supprimer.

Par ailleurs, par ce même amendement, votre commission a clarifié la rédaction du dispositif - en visant notamment les sociétés qui établissent des comptes consolidés, pour rendre compte correctement de la notion de groupe, qui n'existe pas en droit -, ainsi que de ses conditions d'entrée en vigueur, à compter

des comptes pour 2015 déposés en 2016, et a exclu les sociétés d'investissement de l'option de confidentialité par cohérence avec le régime applicable aux micro-entreprises.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Section 2 - Procédures de l'Autorité de la concurrence

Article 59 - Habilitation en vue de préciser la procédure applicable en matière de contrôle des concentrations économiques et d'améliorer les procédures devant l'Autorité de la concurrence

Objet : cet article visait initialement à habiliter le Gouvernement à préciser, par ordonnance, la procédure de contrôle des concentrations économiques et à améliorer, de même, les procédures devant l'Autorité de la concurrence, en particulier en matière de transaction.

I - Le dispositif proposé

Supprimé par l'Assemblée nationale, en séance, à l'initiative du Gouvernement, l'article 59 du projet de loi sollicitait, dans le texte initial, une habilitation sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, concernant les procédures suivies devant l'Autorité de la concurrence. Il s'agissait, d'une part, de préciser les règles en matière d'autorisation préalable des opérations de concentration économique et, d'autre part, de simplifier les procédures et d'améliorer leur efficacité, notamment en instituant une nouvelle procédure transactionnelle.

Des modifications directes du code de commerce ont été substituées à cette habilitation, pour procéder directement aux mesures envisagées, aux quatre articles 59 bis à 59 quinquies du projet de loi.

II - La position de votre commission

Votre commission ne peut que se réjouir de ce que des modifications envisagées initialement sous forme d'ordonnance aient été transformées en des dispositions figurant directement dans la loi. Elle a ainsi pu examiner ces dispositions, aux articles suivants 59 bis à 59 quinquies du projet de loi

Votre commission spéciale a maintenu la suppression de cet article.

Article 59 bis (art. L. 430-2, L. 430-3, L. 430-4, L. 430-5, L. 430-7, L. 430-8, L. 461-3 et L. 954-2 du code de commerce) - Modernisation des procédures suivies par l'Autorité de la concurrence en matière d'autorisation des opérations de concentration économique

Objet : cet article vise à clarifier et adapter certains aspects ponctuels de la procédure suivie par l'Autorité de la concurrence en matière de contrôle et d'autorisation des opérations de concentration économique.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative du Gouvernement, l'article 59 bis du projet de loi vise à actualiser, moderniser et clarifier, par diverses modifications ponctuelles, la procédure suivie devant l'Autorité de la concurrence pour le contrôle des opérations de concentration économique. Il modifie à cette fin plusieurs articles du titre III, relatif à la concentration économique, au sein du livre IV du code de commerce, relatif à la liberté des prix et à la concurrence.

Ces diverses mesures ont été demandées par l'Autorité et résultent de son expérience et des difficultés pratiques rencontrées en matière de contrôle des concentrations.

En premier lieu, l'article 59 bis du projet de loi apporte une précision sur le mode de calcul du seuil de chiffre d'affaires à partir duquel une opération de concentration qui concerne une entreprise opérant en tout ou partie dans un département ou une collectivité d'outre-mer doit faire l'objet d'une notification préalable à l'Autorité en vue de son autorisation.

En deuxième lieu, il précise que la faculté pour l'Autorité d'accorder une dérogation « en cas de nécessité particulière dûment motivée » pour pouvoir réaliser tout ou partie de l'opération de concentration sans devoir attendre son autorisation doit lui permettre d'assortir cette dérogation de conditions. De façon à éviter que cette possibilité de dérogation soit contournée par les parties, il ajoute que cette dérogation cesse d'être valable si l'opération ne lui a pas été notifiée complètement dans un délai de trois mois à compter de sa réalisation effective.

En troisième lieu, il prévoit que le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer sur une opération de concentration, fixé à vingt-cinq jours dans le cadre d'un examen ordinaire et non approfondi, peut être suspendu par l'Autorité lorsque les parties ont omis de signaler un fait nouveau ou de communiquer des informations demandées dans le délai imparti. L'objectif est de ne pas contraindre l'Autorité à statuer dans un délai bref alors qu'elle ne peut pas disposer de l'ensemble des informations nécessaires.

En quatrième lieu, il prévoit, dans le cadre d'un examen approfondi, lorsque l'Autorité reçoit des engagements de la part des parties en vue de réduire l'impact anticoncurrentiel de l'opération moins de vingt jours avant l'expiration du délai normal, fixé à soixante-cinq jours, que le délai expire vingt jours à compter de la réception des engagements, dans la limite totale de quatre-vingt-cinq jours au lieu de soixante-cinq. Il s'agit, là encore, de permettre à l'Autorité de statuer correctement, dans des délais suffisants, tout en levant une ambiguïté d'interprétation dans la computation des délais dans le cas de présentation d'engagements.

En cinquième lieu, dans l'hypothèse où les injonctions, prescriptions et engagements figurant dans sa décision d'autorisation de l'opération n'ont pas été exécutés par les parties, il permet à l'Autorité d'enjoindre aux parties, sous astreinte, d'appliquer de nouvelles injonctions ou prescriptions. Il s'agit de pouvoir adapter les conditions initialement posées par l'Autorité à une situation nouvelle, lorsque les parties à l'opération, de leur fait ou non, n'ont pas respecté leurs engagements.

En sixième lieu, il vise à permettre au président de l'Autorité ou à un vice-président désigné par lui d'adopter seul les décisions de révision des décisions d'autorisation des opérations de concentration prises au terme d'un examen approfondi, ainsi que les décisions de mise en oeuvre de ces décisions. Ces deux catégories de décisions relèvent aujourd'hui du collège de l'Autorité. Les décisions de révision visent les hypothèses dans lesquelles les parties ayant souscrit des engagements en demandent le réexamen, du fait notamment de circonstances extérieures les empêchant de les appliquer dans de bonnes conditions ou dans le délai prévu, par exemple céder une partie de leur activité, ou du fait de leur perte de pertinence compte tenu des évolutions économiques, de façon à éviter une sanction pour manquement.

Enfin, l'article 59 bis procède aussi à quelques actualisations d'ordre rédactionnel, ainsi qu'à quelques coordinations précisant la procédure selon qu'elle est traitée par l'Autorité ou, s'il a décidé de l'évoquer pour un motif d'intérêt général, par le ministre chargé de l'économie.

II - La position de votre commission

Votre commission a globalement approuvé les mesures proposées pour actualiser et moderniser la procédure de contrôle des concentrations par l'Autorité de la concurrence. Ces mesures n'en remettent en rien en cause l'économie générale ni les garanties pour les parties.

Toutefois, elle s'est interrogée sur la faculté qui serait attribuée au président de l'Autorité de statuer seul pour réviser des décisions prises par l'Autorité au terme d'un examen approfondi de l'opération. Il lui a semblé que le parallélisme des procédures et le maintien des garanties procédurales pour les entreprises concernées, dans la mesure où elles demandent une révision des conditions initiales de l'autorisation qui leur a été accordée, justifiaient de conserver la compétence de l'Autorité. Aussi a-t-elle adopté un amendement en ce sens présenté par son rapporteur. En revanche, confier au président seul le soin de prendre les décisions nécessaires à la mise en oeuvre des autorisations de concentration lui a semblé une simplification bienvenue.

Par ce même amendement, votre commission a procédé à diverses clarifications rédactionnelles et procédurales.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 59 ter (art. L. 450-3 du code de commerce) - Accès de l'Autorité de la concurrence aux factures détaillées des opérateurs téléphoniques dans le cadre des enquêtes de concurrence

Objet : cet article vise à permettre à l'Autorité de la concurrence d'accéder aux factures détaillées fournies par les opérateurs de communications électroniques, pour obtenir des preuves dans le cadre de ses enquêtes sur des pratiques anticoncurrentielles.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative du Gouvernement, l'article 59 ter du projet de loi autorise les agents des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence, placés sous l'autorité de son rapporteur général, à se faire communiquer sur leur demande les données personnelles conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques et les fournisseurs d'accès à internet concernant leurs clients. Il s'agit, autrement dit, de leur permettre d'accéder aux factures détaillées des clients des opérateurs, autrement appelées « fadettes », pour connaître les échanges téléphoniques ou électroniques.

Au titre V du livre IV du code de commerce, relatif aux pouvoirs d'enquête de l'Autorité, l'article L. 450-3 serait complété à cet effet.

Sollicité par l'Autorité elle-même, ce nouveau pouvoir d'enquête vise à lui permettre d'obtenir plus facilement des preuves d'infraction dans le cadre de ses enquêtes en matière de concurrence. En effet, compte tenu des prérogatives actuelles des agents de l'Autorité, en particulier en matière de visite et saisie, les salariés des entreprises impliquées dans des ententes ont généralement soin de ne pas organiser l'infraction à partir de leur lieu de travail et leurs moyens de communication professionnels habituels, de façon à ce que les agents ne puissent pas découvrir de preuves.

Si de nombreux représentants des entreprises entendus par votre rapporteur ont critiqué cette mesure, la jugeant excessive, votre rapporteur tient à signaler que l'Autorité des marchés financiers en dispose, aux fins de constater des infractions au droit boursier 346 ( * ) . La situation étant analogue, il n'y a pas lieu de refuser cette prérogative à l'Autorité de la concurrence.

II - La position de votre commission

La possibilité d'accès aux « fadettes » est prévue par le projet de loi à l'article L. 450-3 du code de commerce, lequel détermine, avec les autres articles L. 450-1 à L. 450-8 du titre V du livre IV du même code, les pouvoirs d'enquête attribués aux agents des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence.

L'article L. 450-3 dispose, entre autres pouvoirs d'enquête, que les agents de l'Autorité peuvent opérer sur la voie publique, pénétrer dans tout local professionnel entre 8 et 20 heures et pénétrer en dehors de ces heures dans tout local ouvert au public ou en cours d'utilisation professionnelle. Ils peuvent accéder entre 8 et 20 heures, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, à un local professionnel également à usage d'habitation. Ils peuvent exiger la communication de tous documents professionnels, sur quelque support que ce soit.

Différents articles de plusieurs codes, dont le code de commerce et le code de la consommation, procèdent par renvoi vers l'article L. 450-3 pour préciser les pouvoirs d'enquête de certains agents publics. Il en est ainsi, par exemple, à l'article L. 141-1 du code de la consommation, concernant les pouvoirs d'enquête des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Les agents de la DGCCRF disposent ainsi quasiment des mêmes pouvoirs que les agents de l'Autorité de la concurrence - laquelle est issue d'un démembrement de l'administration centrale de la DGCCRF - pour rechercher et constater les infractions au droit de la consommation.

Or, dans le cadre de certaines procédures, les agents de l'Autorité ou les autres agents dont les pouvoirs d'enquête sont fixés à partir de ceux des agents de l'Autorité ne peuvent pas utiliser tous les pouvoirs prévus aux articles L. 450-1 à L. 450-8 pour les enquêtes de concurrence, mais seulement certains, dont l'article L. 450-3 347 ( * ) . Dès lors, il a semblé plus raisonnable à votre commission, qui a adopté un amendement en ce sens sur la proposition de son rapporteur, de prévoir l'accès aux « fadettes » dans un nouvel article L. 450-4-1 du code, pour éviter que les renvois à l'article L. 450-3 n'attribuent ce pouvoir dans le cadre de procédures pour lesquelles il serait excessif ou inapproprié.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 59 quater (art. L. 462-8, L. 464-9 et L. 954-14 du code de commerce) - Possibilité pour l'Autorité de la concurrence de rejeter une saisine sur des faits de pratique anticoncurrentielle susceptibles d'être traités par l'administration

Objet : cet article vise à permettre à l'Autorité de la concurrence de rejeter une saisine portant sur des faits de pratique anticoncurrentielle mineurs, sur un marché local, susceptibles d'être traités directement par l'administration en charge de la concurrence.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative du Gouvernement, l'article 59 quater du projet de loi vise à compléter la liste des saisines que l'Autorité de la concurrence peut déclarer irrecevables ou rejeter par une décision motivée. Cette liste figure à l'article L. 462-8 du code de commerce.

À titre d'exemple, l'Autorité peut déclarer une saisine irrecevable pour défaut d'intérêt ou de qualité à agir de son auteur ou lorsque les faits sont prescrits ou n'entrent pas dans sa compétence, et rejeter une saisine si les faits allégués ne sont pas suffisamment étayés ou lorsqu'elle est informée qu'une autorité nationale de concurrence d'un autre État membre de l'Union européenne ou la Commission européenne enquête déjà sur les mêmes faits.

Par l'article 59 quater , il s'agirait de permettre à l'Autorité de rejeter par décision motivée les saisines portant sur des faits pouvant être traités par le ministre chargé de l'économie. En application de l'article L. 464-9 du code de commerce, le ministre 348 ( * ) est en effet compétent pour traiter des pratiques anticoncurrentielles qui « affectent un marché de dimension locale », ne relèvent pas de la compétence de la Commission européenne et mettent en cause des entreprises dont le chiffre d'affaires individuel n'excède pas 50 millions d'euros et le chiffre d'affaires global 200 millions d'euros.

L'objectif recherché est d'éviter l'encombrement de l'Autorité par des affaires de moindre importance, qui devraient relever en tout état de cause du ministre chargé de l'économie.

II - La position de votre commission

Si elle a approuvé la possibilité pour l'Autorité de rejeter les saisines portant sur des faits pouvant être traités par le ministre chargé de l'économie au nom d'une rationalisation cohérente de la répartition des missions entre ces deux autorités administratives, votre commission a cependant adopté un amendement présenté par son rapporteur, en vue de corriger une erreur matérielle dans l'application outre-mer de la présente disposition.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 59 quinquies (art. L. 464-2 du code de commerce) - Substitution d'une procédure de transaction à l'actuelle procédure de non-contestation de griefs devant l'Autorité de la concurrence

Objet : cet article vise à remplacer l'actuelle procédure de non-contestation de griefs par une procédure de transaction plus efficace, permettant au rapporteur général de l'Autorité de la concurrence de fixer le montant maximal de la sanction pécuniaire encourue, dans le cadre des enquêtes sur des pratiques anticoncurrentielles.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative du Gouvernement, l'article 59 quinquies du projet de loi vise à rénover l'actuelle procédure de non-contestation de griefs, à la demande de l'Autorité de la concurrence elle-même, pour en faire une véritable procédure de transaction, en matière de pratiques anticoncurrentielles. Il modifie l'article L. 464-2 du code de commerce à cette fin.

Telle qu'elle est conçue, la procédure de non-contestation de griefs ne permet pas aux entreprises qui s'y engagent de prévoir le montant de l'allègement des sanctions pécuniaires dont elles pourraient bénéficier en reconnaissant les griefs d'infraction qui lui ont été notifiés par l'Autorité. Selon le président de l'Autorité, cette procédure n'est donc pas aussi utilisée qu'elle le pourrait, du fait du manque de prévisibilité qu'elle comporte.

En effet, le code prévoit uniquement que « le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié », alors que l'on ne peut pas connaître à l'avance le montant de la sanction encourue, compte tenu du mode de calcul des sanctions pécuniaires. Dans la limite de « 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en oeuvre », ces sanctions « sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de (...) l'entreprise (...) et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées (...) ».

Il s'agirait donc de prévoir, de façon plus opérationnelle, lorsqu'une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui ont été notifiés par le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence, que celui-ci puisse lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Si l'entreprise accepte la transaction proposée, l'Autorité prononce la sanction pécuniaire dans cette limite maximale. Dans ces conditions, l'entreprise serait en mesure de connaître exactement le montant maximal de la sanction et donc d'apprécier l'intérêt à accepter la transaction et, ainsi, à accélérer la procédure et à en réduire le coût pour elle-même comme pour l'Autorité.

En outre, l'article 59 quinquies du projet de loi permettrait également de simplifier la procédure de clémence, également prévue à l'article L. 464-2, selon laquelle une entreprise qui a commis une infraction en matière de concurrence peut bénéficier d'une exonération totale ou partielle de sanction pécuniaire lorsqu'elle a contribué à établir la réalité de cette infraction en informant l'Autorité de la concurrence 349 ( * ) . Il s'agirait de permettre à l'Autorité de statuer sur cette exonération sans établissement préalable d'un rapport, sous l'autorité de son rapporteur général, mais à l'issue simplement d'une audience du commissaire du Gouvernement et de l'entreprise concernée.

À titre de comparaison, l'actuelle procédure de non-contestation de griefs et la future procédure de transaction disposent déjà que l'Autorité statue après avoir entendu l'entreprise et le commissaire du Gouvernement, sans établissement préalable d'un rapport.

II - La position de votre commission

Si votre commission a approuvé la mise en place d'une authentique procédure de transaction devant l'Autorité de la concurrence statuant sur des pratiques anticoncurrentielles, il lui a semblé que la prévisibilité de la sanction pécuniaire exigeait également que la proposition de transaction comporte un montant minimal, de façon à ce que les entreprises ne puissent pas anticiper à tort une sanction d'un montant très faible. Il lui a également semblé que, dans certains cas, les entreprises pourraient souhaiter ne transiger que sur une partie des griefs, de sorte que la transaction ne pourrait porter, de façon plus souple, que sur une partie des griefs. Votre commission a adopté un amendement , à l'initiative de son rapporteur, pour apporter ces deux précisions.

Par ailleurs, par ce même amendement, pour le bon déroulement des procédures en cours, votre commission a précisé que la nouvelle procédure de transaction ne s'appliquerait qu'aux procédures dont les griefs auront été notifiés après la publication de la présente loi.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Section 3 - Faciliter la vie de l'entreprise

Article 60 A - Reconnaissance des systèmes de garantie ou des labels de commerce équitable

Objet : cet article pose le fondement législatif destiné à permettre la labellisation du commerce équitable.

I - Le dispositif proposé

L'article 60 de la loi n° 2005?882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises avait prévu qu'une commission attribue une reconnaissance publique à des labels privés de commerce équitable. L'objectif était d'endiguer la prolifération de labels et d'initiatives illisibles pour les consommateurs. Cette disposition n'a cependant jamais été appliquée.

Le Gouvernement, qui s'apprête à créer la Commission de concertation du commerce (3C), envisage d'attribuer à cette dernière la compétence de labellisation du commerce équitable prévue par la loi du 2 août 2005. Il est donc nécessaire de modifier légèrement l'article 60 de cette loi pour permettre à la 3C de se charger de cette mission. Tel est l'objet de l'article 60 A du présent projet de loi.

II - La position de votre commission

Mettre un peu de lisibilité dans les labels relatifs au commerce équitable est nécessaire tant du point de vue de l'information du consommateur que de la clarification des conditions de la concurrence pour les acteurs économiques qui se situent sur ce marché.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 60 - Habilitation à légiférer par ordonnance en vue de la création d'une carte d'identité virtuelle des entreprises

Objet : cet article habilite le Gouvernement à légiférer pour mettre en place un identifiant électronique unique pour les entreprises.

I - Le dispositif proposé

L'habilitation prévue au présent article vise à mettre à la disposition des entreprises un dispositif permettant, dans leurs relations dématérialisées avec l'administration et les tiers, de justifier de leur identité et de l'intégrité des documents transmis.

Le délai prévu pour publier l'ordonnance est de neuf mois à compter de la promulgation de la loi. Le délai de ratification de l'ordonnance est fixé à l'article 106 (cinq mois).

II - La position de votre commission

Le règlement européen eIDAS (Electronic Identification and Signature - règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement Européen et du Conseil, du 23 juillet 2014) prévoit une interopérabilité des systèmes d'identification utilisés par les États membres pour accéder à leurs services en ligne, ce qui implique la mise en place d'un identifiant électronique unique, sécurisé et authentifié pour les entreprises. La demande d'habilitation à légiférer par l'article 60 répond à la nécessité pour la France de se conformer à cette règle européenne.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 60 bis - Rapport au Parlement sur le fonctionnement des greffes des tribunaux mixtes de commerce et la tenue du registre du commerce et des sociétés dans les départements d'outre-mer

Objet : cet article demande au Gouvernement la remise d'un rapport au Parlement sur le fonctionnement des greffes des tribunaux mixte de commerce des départements d'outre-mer et sur la mise en oeuvre de la faculté de délégation de la gestion matérielle du registre du commerce et des sociétés aux chambres de commerce et d'industrie dans ces départements et dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.

I - Un rapport inutile sur un sujet bien connu du législateur

Introduit par l'Assemblée nationale, en séance, à l'initiative de notre collègue député Victorin Lurel, l'article 60 bis prévoit la remise d'un rapport au Parlement, dans un bref délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, sur le fonctionnement des greffes des tribunaux mixtes de commerce (TMC) des départements d'outre-mer et sur la mise en oeuvre du dispositif donnant la faculté au ministre de la justice de déléguer la « gestion matérielle » du registre du commerce et des sociétés (RCS) aux chambres de commerce et d'industrie dans ces mêmes départements ainsi que dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy 350 ( * ) .

Mentionné à l'article L. 123-6 du code de commerce et résultant de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, dite « loi Lurel », ce dispositif de délégation facultative prévoit que le greffe demeure « compétent pour le contrôle des actes et des extraits du registre ainsi que pour toute contestation entre l'assujetti et la chambre compétente ».

Depuis 2012, il n'a jamais été mis en oeuvre par la garde des sceaux. Il n'y a donc pas lieu de demander un rapport pour délivrer au Parlement une information déjà connue.

En outre, votre rapporteur a exposé les difficultés que rencontrent les entreprises ultramarines du fait des dysfonctionnements du RCS dans les départements d'outre-mer, à l'occasion de l'examen de l'article 19 du présent projet de loi, qui comporte, dans le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, une disposition visant à procéder à la délégation précitée ouverte par l'article L. 123-6 du code de commerce de façon expérimentale.

II - La position de votre commission

Le projet de loi, dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, comporte plus d'une vingtaine de demandes de rapport au Parlement, sur des sujets divers et variés.

Votre commission n'est pas favorable à la multiplication de ces demandes de rapport, qui correspondent souvent à un affichage politique et permettent rarement de résoudre concrètement les problèmes identifiés. En outre, le contenu très général de la plupart de ces rapports, résultant du manque de précision des demandes, ainsi que les délais dans lesquels ils sont fournis - lorsqu'ils le sont - en amoindrissent l'utilité pour le Parlement.

En l'espèce, les dysfonctionnements du RCS dans les départements d'outre-mer sont déjà bien connus du législateur, ainsi que votre rapporteur l'a déjà indiqué.

En outre, il est toujours loisible de proposer, par voie d'amendement au présent projet de loi ou de proposition de loi, des dispositions de nature à remédier à ces dysfonctionnements. À cet égard, votre rapporteur rappelle qu'à l'article 19 du projet de loi, votre commission a adopté un amendement visant à confirmer la volonté exprimée par le législateur d'attribuer le greffe des tribunaux mixtes de commerce à des greffiers de tribunal de commerce 351 ( * ) , en vue de leur assurer un fonctionnement normal, conforme à la qualité de service que l'on constate dans les greffes métropolitains.

Aussi votre commission a-t-elle, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement visant à supprimer le présent article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 60 ter - Rapport sur la modulation des exigences appliquées par la direction générale des entreprises sur la part française des exportations

Objet : cet article prévoit la remise, dans un délai de six mois, d'un rapport sur la modulation, au cas par cas, des exigences appliquées par la direction générale des entreprises sur la part française des exportations.

I - Le dispositif proposé

Dans le but de mesurer et de renforcer la part française dans la fabrication des produits exportés, l'Assemblée nationale a proposé la remise d'un rapport relatif aux exigences de la direction générale des entreprises en la matière.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 60 quater - Rapport sur l'instruction et l'octroi par la Coface de garanties publiques en faveur des PME

Objet : cet article prévoit la remise, dans un délai de trois mois, d'un rapport sur les règles de délégation de l'État à la Coface pour l'instruction et l'octroi de garanties publiques en faveur des PME.

I - Le dispositif proposé

En vue de simplifier la vie des PME, l'Assemblée nationale propose la remise d'un rapport sur les règles de délégation de l'État à la Coface pour l'instruction et l'octroi de garanties publiques en faveur des PME.

II - La position de votre commission

Conformément à sa position sur les demandes de rapport, votre commission a adopté un amendement de suppression.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 61 - Dérogation pour la SNCF sur les modalités de facturation électronique

Objet : cet article introduit pour les trois EPIC du groupe ferroviaire SNCF des dérogations à l'obligation d'utiliser la plateforme de traitement des factures dématérialisées créée par l'État.

I - Le dispositif proposé

L'ordonnance n° 2014-697 du 26 juin 2014 relative au développement de la facturation électronique prévoit que les titulaires ainsi que les sous-traitants admis au paiement direct de contrats conclus par l'État, les collectivités territoriales et les établissements publics transmettent leurs factures sous forme électronique. Corollairement, l'État, les collectivités territoriales et les établissements publics acceptent les factures transmises sous forme électronique par les titulaires et les sous-traitants admis au paiement direct. L'article 2 de cette ordonnance dispose par ailleurs que, pour la mise en oeuvre de ces obligations, l'État met en place un « portail de facturation » permettant le dépôt, la réception et la transmission des factures sous forme électronique.

L'article 61 du projet de loi introduit une dérogation à ces dispositions générales en prévoyant que la SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités ne sont pas tenues d'accepter les factures transmises sous forme électronique par leurs fournisseurs en utilisant la plateforme commune mise à disposition par l'État. Le motif de cette dérogation est que les sociétés du groupe ferroviaire disposent déjà d'une plateforme dématérialisée proposée à leurs fournisseurs et permettant de recevoir des factures. Ce système gère aujourd'hui, selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, 7 000 factures par jour, dont 40 % en dématérialisation. La mise en place de la plateforme dématérialisée mise à disposition par l'État engendrerait des coûts inutiles et serait contraire à l'objectif de rétablissement de la soutenabilité financière du système ferroviaire.

II - La position de votre commission

Votre commission a approuvé le dispositif proposé.

En outre, sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement qui étend la dérogation prévue à l'article 61 à la Caisse des dépôts et consignations. Cette dernière est en effet déjà engagée dans un processus de dématérialisation de ses factures. Elle a mis en place une solution pour le traitement dématérialisé des factures de ses fournisseurs basée sur un système d'Échange de Données Informatisé (EDI) lui permettant de dématérialiser 50 % de ses factures. Elle prévoit d'étendre ce système afin d'accepter tous types de factures dématérialisées. La mise en place de la plateforme proposée par l'État engendrerait des coûts inutiles dans la mesure où la Caisse des dépôts et consignations, eu égard à son statut spécial, utilise ses propres systèmes d'information et dispose déjà d'un système d'information intégré, notamment en matière de gestion budgétaire et de traitement des dépenses.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 61 bis - Demande d'habilitation à légiférer par ordonnance en matière de développement de la facturation électronique

Objet : cet article vise à autoriser le Gouvernement à mettre en place par ordonnance toute mesure de nature à permettre le développement de la facturation électronique entre les entreprises.

I - Le dispositif proposé

Cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de permettre le développement de la facturation électronique dans les relations entre les entreprises, en facilitant l'acceptation des factures transmises par voie électronique, de façon progressive, pour tenir compte de la taille des entreprises concernées.

II - La position de votre commission

Cette demande d'habilitation à légiférer par ordonnance ne figurait pas dans le projet de loi initial. Ni l'étude d'impact ni les débats en commission et en séance publique à l'Assemblée nationale ne permettent de cerner les mesures que le Gouvernement envisage de prendre dans cette ordonnance. Par ailleurs, la demande d'habilitation ne comporte même pas de délai de publication de cette ordonnance, ce qui dénote une certaine improvisation du Gouvernement dans sa démarche.

Sur proposition de son rapporteur, vote commission a donc supprimé cet article . Le Gouvernement est libre, s'il le souhaite, de redéposer sa demande d'habilitation lors des débats en séance publique au Sénat, en apportant les précisions requises.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 62 (art. L. 581-10 du code de l'environnement) - Publicité dans les grands stades

Objet : cet article introduit un régime dérogatoire aux règles de la publicité sur l'emprise des grands stades.

I - Le dispositif proposé

Dans sa rédaction initiale, l'article 62 rétablit l'article L. 581-10 au sein du code de l'environnement pour autoriser les dispositifs publicitaires, lumineux ou non, implantés sur l'emprise des équipements sportifs ayant une capacité d'accueil d'au moins 30 000 places assises, à déroger aux prescriptions relatives à la publicité fixées par décret en Conseil d'État. Pour mémoire, ces prescriptions règlementaires portent notamment sur l'emplacement, la densité, la surface, la hauteur, l'entretien et, pour la publicité lumineuse, les économies d'énergie et la prévention des nuisances lumineuses (ces prescriptions sont prévues par le premier alinéa de l'article L. 581-9).

La dérogation prévue à l'article L. 581-10 serait soumise à l'autorisation du maire ou du président de l'EPCI compétent.

Cette faculté de dérogation est justifiée par le Gouvernement par le souci de faciliter les recettes publicitaires liées à l'organisation des grands événements sportifs, notamment le prochain Euro de football qui se déroulera en France en 2016.

En séance publique, un amendement ayant reçu l'avis favorable de la commission et l'avis défavorable du Gouvernement a étendu cette mesure aux stades de plus de 15 000 places, au nom d'un traitement équitable entre grands et moyens stades. L'argumentaire de l'amendement fait valoir que l'abaissement du seuil conduirait à l'éligibilité au dispositif de 48 stades au lieu de 12 initialement. Les villes de Bayonne, Clermont-Ferrand, Grenoble, La Rochelle, Montpellier, Paris (avec le stade Jean Bouin), Toulon, Béziers, Dax, Mont-de-Marsan, Tarbes, Bastia, Caen, Évian, Guingamp, Lorient, Metz, Monaco, Reims, Toulouse, Angers, Arles, Auxerre, Brest, Châteauroux, Dijon, Laval, Le Havre, Nancy, Nîmes, Sochaux, Tours, Troyes et Valenciennes seraient désormais concernées par cette disposition, sachant que plusieurs collectivités locales sont propriétaires de tels équipements et subissent de ce fait une charge directe ou indirecte importante pour leurs finances.

II - La position de votre commission

Les stades de grande taille sont des équipements collectifs coûteux à construire et à faire fonctionner. Les collectivités territoriales sont souvent impliquées dans leur financement. Leur coût peut être réduit par le recours encadré au financement publicitaire. Le présent article, tel que modifié par les députés, favorise l'accès à ces financements tout en plaçant l'affichage publicitaire sur l'emprise des stades sous le contrôle des collectivités.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 62 bis (nouveau) (art. L. 581-7 du code de l'environnement) - Publicité dans les grands stades situés hors agglomération

Objet : cet article additionnel vise à étendre le dispositif de l'article 62 aux grands stades situés hors agglomération.

Cet article résulte de l'adoption par votre commission spéciale d'un amendement présenté par notre collègue François-Noël Buffet.

Les dispositions de l'article 62, de par leur inscription dans le code de l'environnement (elles modifient une sous-section 3 intitulée « Publicité à l'intérieur des agglomérations ») ne s'appliquent que dans les agglomérations. Or, il existe des stades situés en dehors des agglomérations, qui ont tout autant besoin de recettes publicitaires que ceux situés en agglomération.

Cet amendement leur étend donc le bénéfice de la mesure en complétant la sous-section 2 relative à la publicité en dehors des agglomérations de la section 2 du chapitre I er du titre VIII du livre V du code de l'environnement.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 63
(art. L. 581-14 du code de l'environnement)
Coordination de références

Objet : cet article corrige une référence dans le code de l'environnement par cohérence avec l'article 62.

L'article L. 581-14 du code de l'environnement prévoit que l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme ou, à défaut, la commune peut élaborer sur l'ensemble du territoire de l'établissement public ou de la commune un règlement local de publicité (RLP) qui adapte les règles nationales prévues à l'article L. 581-9.

Cet article étend cette faculté d'adaptation locale des règles d'affichage, au moyen du RLP, aux conditions d'affichage dans les grands stades mentionnés à l'article L. 581-10, ce qui permet aux collectivités concernées de garder la maîtrise des règles applicables sur l'emprise des équipements sportifs situés sur leur territoire.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 63 bis - Possibilité pour les élus de diffuser auprès des citoyens des documents rendant compte de leurs actions dans le cadre de leurs mandats

Objet : cet article vise à permettre aux collectivités territoriales d'expédier à tout citoyen des documents rendant compte de l'action des élus.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en séance publique, à l'initiative de notre collègue Bruno Le Roux, l'article 63 bis du projet de loi énonce que « tous les citoyens ont le droit de recevoir les documents expédiés par des représentants élus des institutions de la République permettant de rendre compte de leurs actions dans le cadre de leurs mandats, dès lors que cette communication est prise en charge par l'institution dont ils relèvent ».

Une telle disposition suscite, selon votre rapporteur, deux critiques dirimantes.

D'une part, elle ne présente aucun lien, même indirect, avec le projet de loi, de sorte qu'elle constitue manifestement un « cavalier législatif », en contradiction avec l'article 45 de la Constitution.

D'autre part, elle est dépourvue de tout caractère normatif, dès lors qu'il s'agit d'autoriser les élus à adresser à leurs électeurs des documents rendant compte de leur action. Au surplus, une telle affirmation ignore les règles particulières applicables en période de campagne électorale, lesquelles prohibent toute campagne de promotion de l'action d'une collectivité dans les six mois précédant l'élection.

L'objectif assigné à cet article lors des débats à l'Assemblée nationale est de pouvoir passer outre l'autocollant « stop pub » apposé sur les boîtes aux lettres. Or cet autocollant ne possède pas de valeur légale, mais relève au mieux d'une bonne pratique. Au surplus, tel qu'il est diffusé par le ministère de l'écologie comme par des prestataires privés, votre rapporteur constate que cet autocollant ne vise pas l'information publique locale. Dès lors que cette pratique ne présente pas de caractère normatif, il serait paradoxal que le législateur intervienne pour la limiter.

II - La position de votre commission

Constatant l'absence de lien avec le texte et de caractère normatif de l'article 63 bis du projet de loi, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur en vue de le supprimer.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 64 (art. L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale) - Rapport annuel d'information sur les « retraites chapeau »

Objet : cet article impose aux organismes gérant des régimes de retraite chapeau de remettre chaque année un rapport de suivi de leur activité à l'administration.

I - Le dispositif proposé

Les régimes de retraite supplémentaire à prestations définies , dits « retraites chapeau », sont des régimes par lesquels un employeur s'engage directement à verser à ses salariés un complément de retraite , dont le montant est fixé contractuellement, sous forme de rente viagère.

Au sein de cette catégorie, l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale s'applique aux régimes de retraite dont les prestations :

- sont subordonnées à l'achèvement de la carrière du salarié dans l'entreprise ;

- ne se caractérisent pas par un financement de l'employeur individualisable par salarié.

Ce type de régime de retraite, susceptible de concerner tous les salariés , est notamment utilisé par les grandes entreprises pour permettre à leurs cadres supérieurs et à leurs mandataires sociaux de se constituer des droits à la retraite importants sur une courte période de temps et sans contribution de leur part, contrairement aux règles auxquelles obéissent les autres régimes de retraite, afin de les fidéliser . Ces régimes sont soit gérés au sein de l'entreprise elle-même, soit, dans la très grande majorité des cas, externalisés auprès d'un assureur.

Le présent article prévoit que les régimes de retraite chapeau, quel que soit leur mode de gestion, doivent remettre chaque année un rapport de suivi à l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et aux services statistiques des ministères chargés de la sécurité sociale et de la mutualité.

Ce rapport doit retracer , pour l'année passée, le montant des engagements souscrits, le nombre de rentes servies ainsi que leurs montants moyen et médian.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté deux amendements présentés par son rapporteur général et ses rapporteurs thématiques. Le premier a retiré la référence aux « services statistiques » des ministères, qui est une précision ne relevant pas du domaine de la loi. Le second a enrichi le contenu du rapport, en prévoyant qu'il doit également fournir des informations sur les montants minimum et maximum des rentes servies ainsi que sur le nombre de leurs bénéficiaires potentiels .

En séance publique, outre un amendement rédactionnel des rapporteurs, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de nos collègues députées Karine Berger et Valérie Rabault qui vise à mettre à la disposition du public , après anonymisation éventuelle, le rapport réalisé par chacun des régimes.

III - La position de votre commission

D'après une enquête réalisée par l'institut de sondage CSA en mai 2011 et citée par l'étude d'impact annexée au projet de loi, 28 % des « retraites chapeau » concernent potentiellement tous les salariés , 53 % uniquement les cadres et 12 % uniquement les cadres dirigeants . Le rapport au Parlement sur la situation des régimes relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, publié en octobre 2010 352 ( * ) , estimait la pension moyenne à 3 875 euros par an . De très grandes disparités sont toutefois à noter, car selon ce rapport, si 18 % des bénéficiaires touchaient une rente inférieure à 1 000 euros par an , pour 15 % d'entre eux elle était supérieure à 7 000 euros .

Publié en décembre 2014, le rapport conjoint de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale des finances (IGF) sur l'encadrement des « retraites chapeau » 353 ( * ) fournit de nouvelles données sur ces régimes. Plus de 200 000 personnes bénéficieraient d'une retraite à prestations définies et, pour 84 % d'entre elles, la rente serait inférieure à 5 000 euros par an .

Ces régimes de retraite sont régulièrement accusés de donner lieu à des dérives , certains dirigeants bénéficiant de rentes particulièrement élevées au moment de leur départ à la retraite, sans lien avec la situation économique des entreprises ou leur performance à leur tête . Un nombre limité de cas, qui font l'objet d'une intense couverture médiatique , sont concernés : depuis 2010, moins de 50 personnes auraient bénéficié d'une retraite chapeau supérieure à 300 000 euros par an.

Votre rapporteur considère que cet article est de nature à améliorer l'information des autorités publiques et des citoyens , et pourrait conduire à mettre un terme aux excès parfois constatés.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Articles 64 bis (art. L. 225-22-1, L. 225-42-1, L. 225-79-1, L. 225-90-1 et L. 225-102-1 du code de commerce) - Encadrement et mise sous condition de performance des régimes de retraite à prestations définies attribuées aux dirigeants mandataires sociaux des sociétés cotées

Objet : cet article vise à introduire dans la loi des règles d'encadrement des régimes de retraites à prestations définies, autrement appelées « retraites chapeau », versées aux mandataires sociaux dirigeants des sociétés cotées, en liant leur progression aux performances de ces dirigeants et en assurant une plus grande transparence de ces conventions.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue député Laurent Grandguillaume, rapporteur thématique, puis complété en séance publique, l'article 64 bis du projet de loi vise à encadrer, dans le code de commerce, les conditions dans lesquelles les mandataires sociaux dirigeants des sociétés cotées peuvent se voir octroyer le bénéfice de régimes de retraite à prestations définies, aussi appelés « retraites chapeau ».

Les « retraites chapeau » sont des dispositifs purement contractuels et non légaux, institués le plus souvent par des grandes sociétés au profit de leurs mandataires sociaux et de leurs cadres salariés dirigeants. Ces régimes collectifs concernent des catégories particulières dans l'entreprise, mais pas toujours les seuls hauts dirigeants. Ils sont dits à prestations définies, car ils prévoient le versement d'une pension de retraite dont le montant est défini à l'avance, à l'inverse des régimes de retraite collectifs de droit commun, qui sont dits à cotisations définies. Le bénéfice du régime est généralement soumis à une condition de présence dans la société au moment du départ en retraite. Financés par l'entreprise voire directement gérés par elle parfois, ces régimes sont soumis à des règles spécifiques en matière de prélèvements sociaux, déterminées par l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale.

Les dispositions du présent article se situent dans le prolongement du rapport de décembre 2014 sur l'encadrement des « retraites chapeau », par l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales, auquel a notamment contribué M. Jean-Michel Charpin 354 ( * ) . La lettre de mission adressée aux inspections par les ministres compétents demandait, outre un état des lieux 355 ( * ) , la formulation de recommandations pour encadrer les « retraites chapeau » des mandataires sociaux. Ce rapport a relevé quatre faiblesses du régime actuel : « le rythme, parfois très rapide, auquel les droits à pension sont accumulés par les bénéficiaires », « l'absence de lien établi entre le montant des droits (...) et la performance ou la situation de l'entreprise », « l'opacité qui entoure trop souvent ces régimes de retraite » ainsi que « l'absence de contribution du bénéficiaire au financement de sa retraite ».

Excluant l'interdiction des « retraites chapeau » au nom de la liberté contractuelle, les deux inspections ont recommandé d'intervenir par la loi pour, par préférence à d'autres solutions de nature contributive ou fiscale, établir un lien entre les droits acquis et les performances des dirigeants, accroître la transparence sur les dispositifs mis en place et mieux préciser les modes de calcul et d'acquisition des droits pour limiter leur progression. Les recommandations détaillées sont présentées dans l'encadré ci-après.

Principales recommandations du rapport de l'inspection générale des finances
et l'inspection générale des affaires sociales sur l'encadrement des « retraites chapeau »

Établir un lien entre les droits à retraite accumulés et la performance du bénéficiaire au regard de la situation de l'entreprise, afin de faire entrer les « retraites chapeau » dans le « droit commun » des rémunérations différées des mandataires sociaux tel qu'il est défini dans la partie législative du code de commerce. Le conseil d'administration se prononcerait, à chaque augmentation des droits, sur le montant supplémentaire accumulé. Ces droits supplémentaires ne pourraient en aucun cas être supérieurs à ceux qui auraient été accumulés par l'application automatique des règles du régime.

Renforcer l'information générale et individuelle donnée par les entreprises sur les régimes de « retraites chapeau », les droits ouverts aux mandataires sociaux et les charges annuelles afférentes, afin de prévenir les effets de surprise et leurs conséquences néfastes.

Rendre plus rigoureux l'encadrement prévu par les codes de gouvernement d'entreprise, notamment le code AFEP-MEDEF, en matière de retraites supplémentaires. La mission recommande de réduire les plafonds prévus pour le montant total de la rente et le rythme d'accumulation pour les fixer à des niveaux plus raisonnables ; elle recommande de définir plus précisément le revenu de référence qui sert d'assiette au calcul de la rente ; elle estime que l'encadrement prévu ne devrait pas se limiter aux retraites à prestations définies. En revanche, la mission ne recommande pas de fixer de tels plafonds dans la loi ou le règlement, notamment parce que les revenus eux-mêmes ne sont pas plafonnés.

Source : rapport de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales sur l'encadrement des retraites chapeau, décembre 2014

Le projet de loi modifie ainsi sur quatre points le régime applicable aux engagements de retraite à prestations définies bénéficiant aux dirigeants mandataires sociaux des seules sociétés cotées. Ces sociétés sont soumises généralement, en effet, à des règles plus rigoureuses que les autres sociétés, au nom de l'information et de la protection des intérêts des actionnaires et des épargnants, dans la mesure où elles font appel à l'épargne publique.

En premier lieu, le projet de loi soumet les engagements de retraite à prestations définies dans les sociétés cotées au régime des conventions réglementées, c'est-à-dire les conventions conclues, notamment, entre un mandataire social et la société. Déterminé par les articles L. 225-38 à L. 225-42 du code de commerce pour les sociétés à conseil d'administration et par les articles L. 225-86 à L. 225-90 pour les sociétés dualistes à directoire et conseil de surveillance, le régime des conventions réglementées 356 ( * ) , qui ne s'applique pas aux « conventions portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales », prévoit une autorisation préalable, selon le cas, du conseil d'administration ou du conseil de surveillance 357 ( * ) , puis un réexamen chaque année s'il y a lieu. L'autorisation doit être « motivée en justifiant de l'intérêt de la convention pour la société, notamment en précisant les conditions financières qui y sont attachées ». Les conventions autorisées, assorties d'un rapport spécial des commissaires aux comptes, sont ensuite soumises à l'approbation de l'assemblée générale des actionnaires 358 ( * ) .

Ainsi, le projet de loi dispose que les engagements de retraite à prestations définies pris par une société cotée au bénéfice d'un salarié qui est nommé président, du directeur général, d'un directeur général délégué, d'un membre du directoire ou du directeur général unique doivent être soumis au régime des conventions réglementées. Il dispose également que les mêmes engagements pris au bénéfice de ces mêmes mandataires doivent être soumis à ce régime particulier.

En l'état du droit, votre rapporteur relève que le code de commerce dispose déjà que les « indemnités ou (...) avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou du changement de ces fonctions, ou postérieurement à celles-ci » sont soumis au régime des conventions réglementées, dans le cas de la nomination à un mandat social dirigeant d'un salarié de la société qui bénéficie déjà d'un tel avantage comme dans le cas de l'octroi par la société d'un tel avantage à un mandataire social dirigeant. En d'autres termes, un engagement de « retraite chapeau » souscrit par une société au bénéfice d'un mandataire social constitue déjà, par construction, une convention qui doit relever du régime des conventions réglementées. Sur ce point, le projet de loi ne fait donc qu'expliciter, sans innover. Il présente néanmoins le mérite de lever toute éventuelle ambiguïté d'interprétation s'agissant de la soumission des « retraites chapeau » au régime des conventions réglementées.

Le code de commerce précise, en outre, que les autorisations portant sur ces avantages doivent être rendues publiques dans les sociétés cotées.

En deuxième lieu, le projet de loi exige que le bénéfice de tout engagement de retraite à prestations définies soit subordonné au respect de conditions de performance de la part du mandataire social dirigeant qui en bénéficie. En l'état du droit, il est déjà prévu que « sont interdits les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire, appréciées au regard de celles de la société ». Cependant, le code de commerce exclut expressément à ce jour de cette interdiction les « retraites chapeau ». Sur ce point, le projet de loi innove donc véritablement, mettant en oeuvre une recommandation du rapport précité des deux inspections.

En troisième lieu, le projet de loi met en place un plafonnement du rythme annuel de progression des droits acquis par les mandataires sociaux dirigeants au titre d'un régime de « retraite chapeau » dans les sociétés cotées. Il dispose ainsi que l'accroissement des droits acquis chaque année par le bénéficiaire est déterminé avant l'assemblée générale ordinaire par le conseil d'administration ou de surveillance, selon le cas, dans la limite d'un montant représentant 3 % de la rémunération annuelle servant de référence au calcul de la pension versée dans le cadre de ce régime. Là encore, il s'agit d'une innovation, recommandée par le rapport précité des deux inspections.

Enfin, en quatrième lieu, le projet de loi prévoit que le rapport du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, à l'assemblée générale des actionnaires doit faire mention des engagements de retraite et autres avantages viagers.

En l'état du droit, ce rapport doit déjà mentionner la rémunération totale et les avantages de toute nature versés, durant l'exercice, à chaque mandataire social, ainsi que, notamment, « les engagements de toutes natures, pris par la société au bénéfice de ses mandataires sociaux, correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de ces fonctions ou postérieurement à celles-ci ». Le rapport du conseil doit donc déjà mentionner les « retraites chapeau » selon votre rapporteur.

Cependant, il est précisé que le rapport doit « expliciter les modalités précises de détermination de ces engagements ainsi que, pour chaque mandataire social, une estimation du montant des charges annuelles afférentes et du montant des droits acquis ou conditionnels », alors qu'actuellement il doit seulement « préciser les modalités de détermination de ces engagements ». Il s'agirait donc de renforcer l'information des actionnaires sur les règles de calcul des avantages de toutes natures attribués aux mandataires sociaux, et surtout sur ce que représente financièrement pour la société, pour chaque mandataire de façon individuelle, le montant des charges annuelles et celui des droits acquis ou conditionnels correspondant à ces avantages.

Une telle exigence de transparence excède la seule problématique des « retraites chapeau », puisqu'elle s'appliquerait à l'ensemble des divers avantages dont peuvent bénéficier les mandataires sociaux. Votre rapporteur insiste également sur le principe d'individualisation retenu par le texte, qui constitue lui aussi une innovation. L'information actuelle est, en effet, très souvent globalisée pour l'ensemble des mandataires. Dorénavant, le rapport du conseil devrait présenter de façon individuelle des informations sur la situation matérielle offerte par la société à chaque mandataire.

Votre rapporteur précise que ces dispositions ne s'appliqueraient pas aux seules sociétés cotées, ni aux seuls mandataires sociaux dirigeants. Dans toutes les sociétés anonymes, le conseil doit présenter aux actionnaires un rapport comportant, notamment, des informations sur les rémunérations et autres avantages des mandataires sociaux, lesquels sont désignés par les actionnaires, au nom de la transparence des mandataires vis-à-vis de leurs mandants que sont les actionnaires.

Enfin, l'entrée en vigueur de ces dispositions est prévue de manière quelque peu complexe. Les règles encadrant les « retraites chapeau » sont applicables aux engagements pris à compter du 1 er juillet 2015 ainsi qu'à ceux pris à l'égard de dirigeants nommés ou renouvelés à compter de cette même date. Les informations complémentaires à mentionner dans le rapport du conseil sont applicables à compter de l'exercice 2015, en vue de 2016.

Votre rapporteur constate que le projet de loi correspond en partie aux préconisations des codes de gouvernement d'entreprise en matière de « retraites chapeau ». Les représentants des entreprises entendus par votre rapporteur ne se sont d'ailleurs pas opposés au présent article, sous réserve toutefois d'en clarifier la rédaction.

Le code de gouvernement d'entreprise pour les valeurs moyennes et petites 359 ( * ) , établi en décembre 2009 par Middlenext, association professionnelle française des valeurs moyennes cotées, constatant que « très peu de valeurs moyennes et petites ont mis en place un système de retraite supplémentaire pour leurs dirigeants », ne comporte pas de règles particulières, mais une invitation à concevoir un régime « transparent et raisonnable » dans l'hypothèse où un tel régime serait mis en place 360 ( * ) .

Dans sa version de juin 2013, le code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées établi par l'Association française des entreprises privées (AFEP) et le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) - autrement appelé code AFEP-MEDEF -, est beaucoup plus précis et détaillé, ainsi que le montre l'encadré ci-après 361 ( * ) . Il indique d'abord que les régimes de « retraites chapeau » dont bénéficient les dirigeants mandataires sociaux mais aussi les cadres dirigeants « doivent respecter des conditions qui évitent les abus ». De plus, il rappelle la condition de présence dans la société au moment du départ en retraite pour pouvoir en bénéficier. Les recommandations du code vont bien au-delà de ce que prévoit le présent projet de loi, par exemple en prévoyant que le groupe des bénéficiaires doit être plus large que les seuls mandataires sociaux ou qu'une condition d'ancienneté minimale préalable dans la société devrait être requise pour bénéficier d'un tel régime.

S'agissant des recommandations portant sur les sujets encadrés par le présent projet de loi, le code AFEP-MEDEF prévoit, d'une part, que des informations sur les droits potentiels acquis à titre individuel doivent être rendues publiques, ce que prévoit le projet de loi dans le rapport du conseil, et, d'autre part, que la progression annuelle des droits doit être limitée à 5 % de la rémunération du bénéficiaire, ce que prévoit également le projet de loi, avec un plafond toutefois plus limité de 3 %. Concernant la prise en compte de la performance des dirigeants, ce critère fait partie des principes généraux proposés par le code en matière de détermination de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux 362 ( * ) .

Votre rapporteur constate en conséquence, comme en matière de limitation du cumul des mandats pour les mandataires sociaux dirigeants à l'article 58 bis A du présent projet de loi, que le texte se limite pour l'essentiel à reprendre les dispositions du code AFEP-MEDEF. Il ne propose donc pas de mettre en place de réelles contraintes supplémentaires pour les sociétés cotées, à l'exception de celles qui ne respecteraient pas les recommandations du code AFEP-MEDEF. Si le projet de loi apporte donc bien des innovations, c'est principalement d'un point de vue juridique, car en réalité la pratique est déjà largement en cohérence avec ces nouvelles règles.

Dispositions du code AFEP-MEDEF de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées
sur les régimes de retraite supplémentaires

Les régimes de retraite supplémentaires relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, prévus pour des cadres dirigeants et des dirigeants mandataires sociaux, doivent respecter des conditions qui évitent les abus.

Les retraites supplémentaires à prestations définies sont soumises à la condition que le bénéficiaire soit mandataire social ou salarié de l'entreprise lorsqu'il fait valoir ses droits à la retraite en application des règles en vigueur.

Afin de prévenir tout abus, il est nécessaire de poser certaines règles complémentaires (sous réserve des plans fermés à de nouveaux bénéficiaires qui ne peuvent plus être modifiés) :

- un tel avantage doit être pris en compte dans la fixation globale de la rémunération sur la base des principes généraux énoncés ci-dessus ;

- le groupe des bénéficiaires potentiels doit être sensiblement plus large que les seuls mandataires sociaux ;

- les bénéficiaires doivent satisfaire à des conditions raisonnables d'ancienneté dans l'entreprise, d'au minimum deux ans, fixées par le conseil d'administration pour bénéficier des prestations d'un régime de retraite à prestations définies ;

- l'augmentation des droits potentiels doit être progressive en fonction de l'ancienneté dans le régime et ne doit représenter, chaque année, qu'un pourcentage limité à 5 % de la rémunération du bénéficiaire. Cette progressivité doit être décrite ;

- la période de référence prise en compte pour le calcul des prestations doit être de plusieurs années et toute augmentation artificielle de la rémunération sur cette période à la seule fin d'augmenter le rendement du régime de retraite est à proscrire.

Les systèmes donnant droit immédiatement ou au terme d'un petit nombre d'années à un pourcentage élevé de la rémunération totale de fin de carrière sont de ce fait à exclure.

En outre, des informations sur les droits potentiels ouverts à titre individuel, notamment le revenu de référence et le pourcentage maximum dudit revenu auquel donnerait droit le régime de retraite supplémentaire, doivent être rendues publiques. Ce pourcentage ne saurait être supérieur à 45 % du revenu de référence (rémunérations fixes et variables dues au titre de la période de référence).

Source : code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées, juin 2013,
AFEP et MEDEF

II - La position de votre commission

Votre commission a approuvé l'encadrement proposé par le projet de loi en matière de régimes de retraites à prestations définies bénéficiant aux mandataires sociaux des sociétés cotées, ainsi que la transparence plus importante sur ces régimes pour l'ensemble des sociétés. À l'initiative de son rapporteur, elle a toutefois adopté un amendement de simplification et de clarification rédactionnelle, visant notamment à rendre plus intelligible le mécanisme de plafonnement de la progression des droits acquis et à clarifier l'entrée en vigueur de ces nouvelles règles.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

CHAPITRE V - Assurer la continuité de la vie des entreprises
Section 1 - Spécialisation de certains tribunaux de commerce

Article 65 (art. L. 721-1 à L. 721-7 du code de commerce) - Codification des articles du code de commerce relatifs à l'institution et à la compétence des tribunaux de commerce

Objet : cet article vise à créer une section au sein du code de commerce pour distinguer les dispositions relatives à l'institution et à la compétence des tribunaux de commerce non spécialisés de celles relatives aux tribunaux de commerce spécialisés.

I - Le dispositif proposé

L'article 65 du projet de loi est le premier d'une série concernant la réforme de la justice commerciale.

Au sein du chapitre I er , relatif à l'institution et à la compétence, du titre II, relatif au tribunal de commerce, du livre VII du code de commerce, il vise à regrouper au sein d'une nouvelle section les articles L. 721-1 à L. 721-7 actuels, relatifs à l'institution et à la compétence des tribunaux de commerce, de façon à créer au sein du même chapitre une nouvelle section, relative aux tribunaux de commerce spécialisés.

II - La réforme de la justice commerciale

Votre commission souscrit pleinement à l'analyse, qui sous-tend le projet de loi, selon laquelle l'efficacité de la justice commerciale contribue au bon fonctionnement de l'économie, au titre de la sécurité juridique des relations commerciales, ainsi qu'à la compétitivité et au développement des entreprises. En revanche, pour cette même raison, elle déplore que la réforme des tribunaux de commerce, qui vise à renforcer l'efficacité de la justice commerciale, soit partagée entre plusieurs textes, empêchant le Parlement d'avoir une vision d'ensemble et une approche globale de la question.

Ainsi, le présent projet de loi traite de la spécialisation de certains tribunaux de commerce , qui seraient chargés des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises les plus importantes , et comporte certaines dispositions relatives aux procédures collectives et aux professions d'administrateur judiciaire et mandataire judiciaire (accès à la profession et exercice salarié), tandis que le futur projet de loi annoncé par le Gouvernement sur la « justice du XXI ème siècle » devrait aborder, entre autres aspects de la justice commerciale, le statut des juges consulaires (obligation de formation, déontologie...). À cet égard, votre rapporteur insiste sur la nécessité de renforcer les exigences statutaires propres aux juges consulaires, à l'instar de ce que fait le projet de loi pour les conseillers prud'homaux, de façon à les rapprocher du régime de droit commun des juges judiciaires.

Entendue par votre commission, la garde des sceaux a confirmé que le futur projet de loi sur la « justice du XXI ème siècle » aborderait le reste de la réforme de la justice commerciale.

Au surplus, votre rapporteur indique que plusieurs propositions, qui ne sauraient être prises en compte à ce stade dans le présent projet de loi, compte tenu de sa nature et de ses conditions d'examen, pourraient l'être dans la réforme des tribunaux de commerce.

D'une part, pour assurer la cohérence de la juridiction commerciale, la compétence rationae personae des tribunaux de commerce, pour toutes leurs attributions, pourrait être étendue à l'ensemble des entreprises , c'est-à-dire y compris les artisans, les agriculteurs et les professions libérales et, éventuellement, les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique 363 ( * ) , lesquels relèvent dans la plupart des cas de la compétence des tribunaux de grande instance (TGI).

Actuellement, s'agissant du contentieux commercial, le tribunal de commerce est compétent, pour l'essentiel, pour les litiges entre commerçants et entre sociétés commerciales.

S'agissant des procédures collectives, le code de commerce dispose qu'elles peuvent être ouvertes à l'encontre de toute personne exerçant une activité commerciale, artisanale ou agricole, de toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession réglementée, ainsi que de toute personne morale de droit privé. Le tribunal de commerce est compétent pour les entreprises artisanales et commerciales, tandis que le tribunal de grande instance est compétent pour les personnes morales de droit privé non commerçantes et pour les entreprises agricoles ou indépendantes, y compris les professions réglementées.

Une extension de la compétence des tribunaux de commerce à toutes les entreprises permettrait d'en faire de véritables tribunaux économiques ou tribunaux de l'entreprise , avec un contentieux plus étendu et donc une pratique plus soutenue pour les juges consulaires. Dès lors, la question de la spécialisation des tribunaux de commerce se poserait peut-être d'une autre manière.

D'autre part, à titre d'illustration, au titre de la compétence rationae materiae , M. Frank Gentin, président du tribunal de commerce de Paris, a suggéré, lors de l'audience solennelle de rentrée du 15 janvier 2015, d'élargir la compétence des tribunaux de commerce aux baux commerciaux , ce qui peut apparaître tout à fait cohérent. Là encore, une réflexion mérite d'être conduite. De plus, il a également souhaité une évolution de la procédure, de façon à réduire les délais de traitement des affaires.

Enfin, un élargissement du corps électoral comme de la composition des tribunaux de commerce doit être étudié, en complément de l'extension de leurs compétences à toutes les entreprises. À tout le moins faudrait-il que tous les artisans puissent être électeurs et éligibles, dès lors qu'ils relèvent du tribunal de commerce en matière de procédures collectives même lorsqu'ils ne sont pas constitués sous forme de société commerciale.

Actuellement, les juges consulaires sont élus par un collège électoral composé, d'une part, des juges en exercice et des anciens juges et, d'autre part, des délégués consulaires, eux-mêmes élus dans la circonscription de chaque chambre de commerce et d'industrie par un corps électoral composé, pour l'essentiel, des personnes physiques et morales inscrites au registre du commerce et des sociétés, commerçants et sociétés commerciales, ainsi que des cadres dirigeants des sociétés commerciales. Sont éligibles aux fonctions de juge consulaire, les membres du corps électoral des délégués consulaires de nationalité française, âgés d'au moins trente ans, exerçant leurs fonctions depuis au moins cinq ans et n'ayant pas connu de procédure collective.

Par ailleurs, sans nécessairement en partager toutes les conclusions, votre rapporteur tient à signaler que la Cour des comptes, dans le bilan de la réforme de la carte judiciaire figurant dans son rapport annuel pour 2015 364 ( * ) , a appelé à une nouvelle réforme de la carte des tribunaux de commerce, en vue d'en réduire le nombre :

« S'agissant tout d'abord des tribunaux de commerce, plus de la moitié des juridictions commerciales n'atteignent pas les 400 procédures contentieuses par an. Certains tribunaux ont une activité réduite, alors qu'ils sont implantés près d'un tribunal plus important. À cet égard, de nouveaux regroupements de tribunaux de commerce, qui permettraient de garantir une spécialisation adéquate pour les affaires les plus complexes, apparaissent souhaitables du point de vue de l'ordre public économique et de l'efficacité de la justice commerciale. Aussi la Cour réitère la recommandation qu'elle a formulée dans un référé du 13 mai 2013 d'approfondir la réforme de la carte des tribunaux de commerce. »

Cette recommandation reprend les conclusions formulées par la Cour dans son référé de mai 2013 sur l'organisation et le fonctionnement de la justice commerciale 365 ( * ) , portant notamment sur la carte des tribunaux :

« La France comptait 227 tribunaux de commerce en 1998. Il en existe aujourd'hui 134. Malgré cette réduction, plus de la moitié n'atteignent pas les 400 nouvelles procédures contentieuses par an (seuil minimum retenu en 2007 à l'occasion de la réforme de la carte judiciaire). Certains tribunaux ont une activité très réduite, alors qu'ils sont implantés à proximité d'un tribunal plus important. Enfin, dans 60 des 134 tribunaux de commerce, chaque juge traite moins de 15 affaires contentieuses par an. À cet égard, la Cour considère que de nouveaux regroupements de tribunaux sont souhaitables, du point de vue de l'ordre public économique et de l'efficacité de la justice commerciale. Elle recommande en ce sens un approfondissement de la réforme de la carte des tribunaux de commerce concentré sur les zones dotées de plusieurs tribunaux et dont un au moins n'atteint pas la taille critique. »

Dans son référé, la Cour avait également suggéré une « spécialisation adéquate dans les affaires les plus complexes », par la création de pôles régionaux spécialisés pour le traitement de certains types de contentieux particuliers, selon différentes formules envisageables, et par la création de chambres mixtes communes aux tribunaux d'un même ressort de cour d'appel, sans remise de la faculté de « dépaysement des dossiers à fort enjeu ». À cet égard, votre rapporteur rappelle que des tribunaux de commerce ont été spécialisés en matière de concurrence 366 ( * ) - c'est-à-dire un contentieux précis présentant une technicité particulière, à l'instar de la spécialisation opérée pour certains TGI dans certains types de contentieux -, indépendamment de la taille des entreprises concernées.

En revanche, la Cour n'avait pas recommandé une spécialisation des tribunaux de commerce en fonction de la taille des entreprises concernées ou en matière de procédures collectives.

Dans ce référé, la Cour des comptes avait également plaidé en faveur d'une obligation de formation des juges consulaires et d'un renforcement de leurs règles déontologiques, pour garantir leur impartialité, notamment par une déclaration d'intérêts, tout en jugeant « prioritaire » la révision de la carte des tribunaux de commerce.

Ainsi, telle qu'elle est traitée par le présent projet de loi, la question de la spécialisation des tribunaux de commerce peut être perçue comme une façon d'écarter la question d'une nouvelle rationalisation de la carte des tribunaux , laquelle conduirait à leur donner une taille critique permettant aux juges de traiter un nombre suffisant d'affaires, afin de soutenir leur compétence juridictionnelle et de renforcer leur professionnalisation. La compétence se développe et se maintient grâce au traitement d'un nombre suffisamment important d'affaires. En tout état de cause, la spécialisation ne permet pas à elle seule de répondre aux critiques formulées par la Cour des comptes, qui reposent sur l'idée que le bon fonctionnement de la justice doit permettre à chaque justiciable, lorsqu'il s'adresse à son juge naturel, d'avoir affaire à des juges compétents et suffisamment expérimentés.

Enfin, pour être complet, votre rapporteur tient à rappeler le débat récurrent sur l' échevinage , c'est-à-dire la présence au sein des tribunaux de commerce de magistrats professionnels, perspective à laquelle les juges consulaires ont toujours été particulièrement hostiles. Pour contourner cette hostilité, ainsi que la difficulté à créer des postes de magistrats à cet effet dans un contexte budgétaire difficile, il a été envisagé par le Gouvernement un échevinage en appel, dans le cadre des chambres commerciales des cours d'appel, formule également contestée par les juges consulaires.

Votre rapporteur tient cependant à rappeler qu'il existe aujourd'hui des juridictions commerciales échevinées, dont l'efficacité n'est pas remise en cause ni l'existence contestée. D'une part, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, plusieurs chambres commerciales du TGI exercent les compétences du tribunal de commerce. Ces chambres sont présidées par un magistrat du TGI, assisté de deux assesseurs élus comme les juges consulaires. D'autre part, dans les départements et régions d'outre-mer, un tribunal mixte de commerce (TMC) exerce les compétences du tribunal de commerce. Le TMC est présidé par le président du TGI et il est composé de juges élus comme les juges consulaires.

Ainsi, le projet de loi est loin d'épuiser la question de la réforme et de la modernisation des tribunaux de commerce, même si la spécialisation en constitue un aspect important. Votre commission ne peut que déplorer qu'il ne permette pas d'en avoir une approche globale et cohérente.

II - La position de votre commission

Compte tenu des modifications apportées à l'article 66 du projet de loi, rectifiant les modalités de la spécialisation des tribunaux de commerce tout en confirmant l'objectif poursuivi, et modifiant différents aspects du chapitre du code de commerce relatif à l'institution et à la compétence du tribunal de commerce, l'article 65 du projet de loi n'a plus lieu d'être. Aussi votre commission a-t-elle adopté, sur la proposition de son rapporteur, un amendement visant à supprimer cet article par coordination.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 66 (art. L. 721-8 [nouveau] du code de commerce) - Instauration de tribunaux de commerce spécialisés compétents pour traiter des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises les plus importantes

Objet : cet article vise à instaurer des tribunaux de commerce spécialisés, avec compétence exclusive pour traiter des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises dont le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires seraient supérieurs à des seuils fixés par décret, ainsi que des procédures transfrontalières.

I - Le dispositif proposé

Au sein du chapitre I er , relatif à l'institution et à la compétence, du titre II, relatif au tribunal de commerce, du livre VII du code de commerce, l'article 66 du projet de loi crée une nouvelle section consacrée à l'institution et à la compétence de tribunaux de commerce spécialisés, comprenant un unique article L. 721-8. Il propose d'attribuer à cette catégorie particulière de tribunaux de commerce les procédures les plus importantes en matière de prévention et de traitement des difficultés des entreprises.

Cet article prévoit une entrée en vigueur selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, au plus tard six mois après la publication de la loi, étant précisé que les procédures déjà engagées lors de l'entrée en vigueur demeureraient de la compétence des tribunaux déjà saisis.

A. La spécialisation de certains tribunaux de commerce pour traiter des procédures collectives concernant les entreprises les plus importantes

Actuellement, chaque tribunal de commerce 367 ( * ) , quel que soit l'effectif des juges consulaires, est compétent pour connaître des procédures et autres dispositifs prévus au livre VI du code de commerce, pour toute entreprise dont le siège se situe dans son ressort, quelle que soit sa taille : des mesures de prévention des difficultés des entreprises, que sont la procédure d'alerte et de détection à l'initiative du président du tribunal, le mandat ad hoc et la procédure de conciliation, ainsi que des procédures dites « collectives » de traitement des difficultés des entreprises, que sont les différentes variantes de la sauvegarde, le redressement judiciaire, la liquidation judiciaire et le rétablissement professionnel.

Il existe toutefois une spécialisation de certains tribunaux en matière de concurrence, comme le précise l'encadré ci-après.

Les tribunaux de commerce spécialisés en matière de concurrence

La loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques a créé un article L. 420-7 dans le code de commerce pour prévoir que les litiges concernant les pratiques anticoncurrentielles, dites « PAC » (entente, abus de position dominante, prix abusivement bas...), « sont attribués, selon le cas, aux tribunaux de grande instance ou aux tribunaux de commerce dont la liste est fixée par décret ». En outre, l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 a prévu la compétence d'une cour d'appel unique pour connaître des décisions de ces juridictions spécialisées.

Huit tribunaux de commerce ont été spécialisés en matière de PAC, compétents pour les commerçants et artisans, par le décret n° 2005-1756 du 30 décembre 2005 : Marseille, Bordeaux, Lille, Fort-de-France 368 ( * ) , Lyon, Nancy, Paris et Rennes. Le même décret a prévu en appel la compétence de la seule cour d'appel de Paris.

Par la suite, la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a modifié l'article L. 442-6 du code de commerce pour prévoir que les litiges concernant les pratiques restrictives de concurrence, dites « PRC » (obtention d'un avantage commercial sans contrepartie, aussi appelée « fausse coopération commerciale », rupture brutale des relations commerciales établies, déséquilibre significatif dans les obligations des parties...), « sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret ».

Huit tribunaux de commerce ont été spécialisés en matière de PRC, compétents pour les commerçants et artisans, par le décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 : Marseille, Bordeaux, Tourcoing 369 ( * ) , Fort-de-France 1 , Lyon, Nancy, Paris et Rennes. Le même décret a également prévu en appel la compétence de la seule cour d'appel de Paris.

La spécialisation de certains tribunaux de commerce en matière de concurrence a suivi la même logique que la spécialisation de certains tribunaux de grande instance dans certains contentieux, par exemple en matière de propriété intellectuelle : la spécificité et la technicité de ces contentieux appelaient un traitement plus unifié par des juridictions, et donc par des magistrats qui auraient l'habitude de les traiter, permettant une efficacité plus grande dans le fonctionnement de la justice.

Source : commission spéciale du Sénat

Or, il peut arriver des situations dans lesquelles un petit tribunal de commerce, composé d'un faible nombre de juges consulaires et traitant un nombre limité d'affaires, se trouve saisi d'une procédure de redressement judiciaire pour une entreprise de plusieurs centaines de salariés dont le siège est situé dans son ressort. Cette procédure sera nécessairement complexe, pour le tribunal chargé de la conduire, pour le juge-commissaire désigné par le tribunal pour veiller à son bon déroulement et autoriser certains actes, et pour l'administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire désignés par le tribunal, s'ils n'ont pas l'habitude de traiter des procédures lourdes avec de nombreux salariés et créanciers. La complexité pourra aussi s'accroître en raison des répercussions économiques et sociales locales importantes de la procédure, rendant plus délicate l'intervention du tribunal. Dans un tel cas de figure, il ne serait sans doute pas aisé pour le tribunal d'arrêter, dans des délais compatibles avec la situation économique de l'entreprise, un plan de nature à permettre effectivement la poursuite de son activité, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif, objectifs de la procédure. Un tribunal plus important, dont les juges sont habitués à traiter plus souvent des procédures plus nombreuses et impliquant des entreprises de plus grande taille, pourrait dans certains cas intervenir de façon plus efficace pour permettre le succès de la procédure de redressement judiciaire.

Aussi votre commission approuve-t-elle l'objectif du Gouvernement visant à assurer un traitement plus efficace des procédures les plus lourdes , en les confiant à des tribunaux de commerce plus importants, plus habitués à traiter ce type de procédure complexe comportant des enjeux économiques et sociaux plus forts, susceptibles de désigner des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires dans leur ressort eux-mêmes plus habitués au traitement des dossiers complexes.

L'article 66 du projet de loi prévoit ainsi d'instituer des tribunaux de commerce spécialisés (TCS) pour connaître de toutes les procédures prévues au livre VI du code de commerce concernant les entreprises dont le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires seraient supérieurs à des seuils fixés par décret, ainsi que les procédures d'insolvabilité transfrontalières, notamment en application du droit de l'Union européenne. Un TCS serait désigné dans le ressort d'une ou de plusieurs cours d'appel, lesquelles sont aujourd'hui au nombre de 30 à avoir des tribunaux de commerce dans leur ressort 370 ( * ) . Entendu par votre commission, le ministre de l'économie a évoqué une hypothèse de huit ou neuf TCS au total.

Outre le fait que la taille et la complexité d'une affaire ne coïncident pas toujours, votre rapporteur s'est interrogé sur la portée réelle d'une telle spécialisation, conçue comme une attribution automatique de compétence des plus grosses affaires aux tribunaux les plus importants.

D'une part, en pratique, la grande majorité des procédures les plus lourdes et complexes est déjà traitée par les tribunaux de commerce les plus importants, du simple fait de la présence dans leur ressort du siège de la plupart des grandes entreprises. Sont notamment concernés les tribunaux de commerce de Paris et de la petite couronne.

D'autre part, il existe une procédure de délocalisation des dossiers de mandat ad hoc , de conciliation ou de procédure collective, déjà prévue par les articles L. 662-2 et R. 662-7 du code de commerce, « lorsque les intérêts en présence le justifient ». La taille et la complexité d'une affaire peuvent justifier, avec d'autres motifs, un renvoi. Le renvoi à un autre tribunal du ressort de la cour d'appel est à l'appréciation du premier président de la cour d'appel 371 ( * ) , sur la demande du président du tribunal saisi, du débiteur lui-même, du créancier poursuivant ou du parquet. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, cette procédure de délocalisation est utilisée de plus en plus fréquemment, à l'initiative du parquet en particulier.

Dans ces conditions, le nombre de procédures actuellement traitées par le tribunal de commerce du siège et qui, en application de la présente loi, devraient être traitées par un TCS distinct s'avérerait sans doute assez limité. Ainsi estimé, l'impact réel de cette réforme conduit à votre rapporteur à en relativiser la portée, tant pour les tribunaux de commerce qui resteraient non spécialisés qu'au regard des objectifs poursuivis par le Gouvernement.

À titre d'illustration, selon les statistiques fournies par l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS), qui intervient dans les procédures collectives, pour les années 2011 à 2014 372 ( * ) :

- sur 559 affaires concernant des entreprises d'au moins 100 salariés, 269, soit près de la moitié, ont été traitées par quinze tribunaux seulement, qui ont jugé au moins 10 affaires chacun : Bordeaux, Créteil, Épinal, Lille, Lyon, Le Mans, Marseille, Meaux, Nanterre, Nantes, Orléans, Paris, Pontoise, Toulouse et Versailles ;

- sur 90 affaires concernant des entreprises d'au moins 300 salariés, 36 ont été traitées par six tribunaux seulement, qui ont jugé au moins trois affaires chacun : Lyon, Montpellier, Nanterre, Paris, Quimper et Rouen ;

- seulement 45 tribunaux ont connu au moins une affaire concernant 300 salariés ou plus, dont 39 seulement une ou deux affaires ;

- les cinq tribunaux de Bobigny, Créteil, Lyon, Nanterre et Paris ont jugé au moins 14 affaires concernant 100 salariés ou plus et ont jugé au total 141 affaires de ce type, soit le quart du total, dont 68 pour Paris et 33 pour Nanterre.

Par ailleurs, entendue par votre rapporteur, la conférence générale des juges consulaires de France a fait état de l'argument de la proximité . Si une affaire relève d'un TCS, dans certains cas le siège du tribunal pourra être très éloigné du lieu d'implantation de l'entreprise, donc du lieu de résidence de ses dirigeants et de ses salariés, rendant plus difficile leur participation à la procédure, compte tenu du coût et des délais résultant de l'éloignement.

Cependant, il semble à votre rapporteur que cet argument doive être relativisé. En effet, il n'y a pas lieu pour les dirigeants ou les représentants des salariés de se rendre fréquemment au tribunal. En tout état de cause, cette difficulté est moindre pour de grandes entreprises.

S'agissant plus spécialement des divers dispositifs de prévention des difficultés des entreprises, qui présentent l'avantage de la confidentialité par rapport aux procédures collectives, l'argument de la proximité apparaît en revanche ambivalent. En effet, dans certains cas, le chef d'entreprise pourra trouver intérêt à s'adresser au président d'un tribunal éloigné du siège de son entreprise, dans un souci de plus grande discrétion, tandis que dans d'autres cas, la proximité et la simplicité d'accès pourront être préférées. Il faut sans doute aussi distinguer selon les mesures de prévention entre elles : la procédure à l'initiative du président du tribunal, qui peut convoquer le chef d'entreprise s'il a connaissance de difficultés, pour envisager avec lui des mesures de nature à redresser la situation, ou la désignation par le président du tribunal d'un mandataire ad hoc , chargé d'une mission particulière d'accompagnement du chef d'entreprise, sont plus souples et moins formalisées qu'une procédure de conciliation, ouverte par le président du tribunal pour permettre de trouver de façon organisée un accord avec les principaux créanciers, avec l'aide d'un conciliateur désigné par le président.

En conséquence, votre commission considère que, s'il est pertinent de spécialiser certains tribunaux de commerce, il convient de conserver une relative souplesse en pratique tant dans leur champ de compétence que dans leurs modalités de désignation et de saisine, tout en veillant à maintenir un maillage territorial suffisant.

B. Le nombre et la localisation des tribunaux de commerce spécialisés

L'article 66 du projet de loi dispose que, dans le ressort d'une ou de plusieurs cours d'appel, un TCS a « compétence exclusive » pour connaître de certaines procédures plus importantes. Ces tribunaux seraient désignés par décret, qui fixerait également leur ressort et serait pris après avis du conseil national des tribunaux de commerce 373 ( * ) (CNTC).

En premier lieu, votre rapporteur note une ambiguïté de rédaction . Évoquer une « compétence exclusive » peut avoir un double sens : d'une part, cela signifie que seul le TCS connaît de ces procédures importantes, mais, d'autre part, cela pourrait également signifier qu'il ne peut connaître que de ces procédures importantes sans exercer la compétence de droit commun des tribunaux de commerce. Telle n'est pas l'intention du Gouvernement, qui souhaite attribuer aux actuels tribunaux de commerce les plus importants, en plus de leur compétence de droit commun, une compétence spécialisée sur ces procédures les plus importantes.

Tel qu'il est rédigé, le texte permet au Gouvernement de désigner un TCS pour le ressort de plusieurs cours d'appel, permettant ainsi d'aboutir à un nombre de huit ou neuf comme annoncé, sur un total de 134 tribunaux de commerce 374 ( * ) , sans compter les 7 tribunaux mixtes de commerce dans les départements outre-mer et les 7 tribunaux de grande instance à compétence commerciale en Alsace et Moselle 375 ( * ) .

Deux arguments plaident pour une autre règle de désignation, en vue d'un nombre plus significatif de juridictions spécialisées .

D'une part, compte tenu de la réforme que représente la création des TCS pour les entreprises concernées par une procédure collective, dont les dirigeants et les représentants des salariés devraient se déplacer au siège du TCS, lequel n'aurait en outre qu'une connaissance assez lointaine des réalités économiques locales, il semble préférable d'assurer un maillage territorial de plus grande proximité, dans l'intérêt même des entreprises qui devraient relever de la compétence de ces juridictions.

D'autre part, il peut parfois exister dans le ressort d'une même cour d'appel plusieurs tribunaux de commerce ayant l'habitude et la capacité de traiter des affaires complexes . Il en est ainsi, en particulier, dans le ressort de la cour d'appel de Versailles, avec les importants tribunaux de commerce de Nanterre, Pontoise et Versailles. Il en est de même dans le ressort de la cour d'appel de Paris, avec les tribunaux de Paris, Créteil, Bobigny et Meaux. Il en est encore ainsi, par exemple, dans le ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, avec les tribunaux de Nice, Toulon et Marseille.

Votre rapporteur juge qu'il ne serait en rien pertinent de dessaisir, par exemple, le tribunal de Créteil pour confier l'ensemble des procédures les plus importantes de son ressort au tribunal de Paris. Il ne s'agirait pas d'une garantie de meilleur déroulement de la procédure pour les entreprises concernées, mais d'une complication inutile.

Dans ces conditions, puisqu'il n'est guère envisageable de prévoir, d'un point de vue juridique, la désignation d'un ou plusieurs tribunaux dans le ressort d'une ou plusieurs cours d'appel, comme certains de nos collègues le proposent, ce qui reviendrait à permettre au pouvoir réglementaire s'il le souhaite de désigner dans tous les cas un seul tribunal pour le ressort de plusieurs cours d'appel, votre commission a donc considéré qu'il convenait de prévoir la désignation d'au moins un tribunal spécialisé dans le ressort de chaque cour d'appel. Cette règle permettrait la désignation dans certains cas de deux tribunaux, voire plus, et assurerait un maillage territorial suffisant, sans préjudice d'évolutions ultérieures, en fonction de l'évolution de la carte des cours d'appel par exemple.

Votre commission a adopté un amendement en ce sens à l'initiative de son rapporteur. Serait ainsi possible la désignation d'une quarantaine de TCS au plus, soit moins du tiers du nombre total de tribunaux de commerce.

Par ce même amendement, elle a également clarifié l'organisation du chapitre I er du titre II du livre VII du code de commerce, relatif au tribunal de commerce, en s'inspirant de ce qui figure dans le code de l'organisation judiciaire pour la spécialisation des tribunaux de grande instance (TGI) 376 ( * ) . Elle a ainsi distingué une section 1 concernant la compétence commune à tous les tribunaux de commerce, regroupant les articles actuels L. 721-3 à L. 721-7, et une section 2 concernant la compétence particulière à certains tribunaux de commerce, comportant le nouvel article L. 721-8, levant ainsi toute ambiguïté sur la nature de la spécialisation, qui s'ajoute bien à la compétence de droit commun pour les tribunaux concernés. Une erreur matérielle dans l'intitulé du chapitre du code a aussi pu être corrigée.

L'ensemble des modifications apportées à l'article 66 du projet de loi par votre commission figure de façon cohérente dans ce même amendement.

C. Le champ des procédures et des entreprises concernées

L'article 66 du projet de loi prévoit l'attribution exclusive aux TCS de quatre catégories de procédures :

- les procédures prévues au livre VI du code de commerce lorsque le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires du débiteur sont supérieurs à des seuils fixés par décret en Conseil d'État ;

- les procédures prévues au livre VI du code de commerce lorsque le débiteur est une personne morale qui dispose d'établissements dans le ressort de plusieurs tribunaux de commerce ou cours d'appel et dont le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires sont supérieurs à des seuils fixés par décret en Conseil d'État ;

- les procédures pour lesquelles le tribunal est compétent en vertu des textes européens, en l'espèce le règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, actuellement en cours de révision à la suite d'une proposition de la Commission européenne en décembre 2012, mais également les textes européens relative à la défaillance des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement ;

- les autres procédures internationales pour lesquelles le tribunal est compétent du fait de la localisation du centre des intérêts principaux du débiteur en France, c'est-à-dire celles relevant du droit international privé.

Outre que les deux premières catégories sont en partie redondantes et introduisent une certaine complexité, l'expression même de « procédures prévues au livre VI » semble imprécise à votre rapporteur, à un double titre.

D'une part, le livre VI du code de commerce est applicable à des entreprises, personnes physiques ou morales, qui ne relèvent pas toutes du tribunal de commerce. Seules les procédures concernant les entreprises commerciales et artisanales relèvent du tribunal de commerce, les autres relevant du TGI (agriculteurs, professions libérales, associations). Il serait pour le moins paradoxal que les TCS soient compétents pour connaître des procédures concernant des entreprises qui, si elles n'atteignaient pas le seuil de compétence des TCS, relèveraient du TGI...

L'amendement évoqué supra clarifie cette question, en précisant que les TCS sont compétents lorsque le débiteur exerce une activité commerciale ou artisanale, reprenant une formulation déjà utilisée dans le livre VI 377 ( * ) .

D'autre part, le livre VI ne comporte pas seulement des procédures, mais aussi plusieurs dispositifs de prévention , qui ne sont pas qualifiés de procédure par le code : rôle de détection des difficultés des entreprises du président du tribunal et mandat ad hoc . En revanche, sont bien expressément qualifiés de procédures la conciliation, dans le cadre de la prévention, et la sauvegarde, le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire, dans le cadre du traitement des difficultés. Tel qu'il est rédigé, le texte comporte une incertitude sur l'étendue exacte des procédures concernées.

L'amendement évoqué supra clarifie aussi cette question, en prenant en considération que les mesures de prévention, de par leur nature même et leur caractère confidentiel, ne peuvent se traiter que dans la plus grande proximité. On n'imagine guère un chef d'entreprise se rendre à une grande distance au siège du TCS pour évoquer ses difficultés avec le président du tribunal, alors que ce dernier ne connaît pas le tissu économique dans lequel évolue l'entreprise. Il en est de même pour le mandat ad hoc , qui relève d'une logique à peine plus formalisée.

En revanche, s'agissant de la procédure de conciliation , qui est une véritable procédure organisée par le livre VI, faisant intervenir directement les créanciers, même si elle relève encore de la prévention, votre rapporteur estime que la compétence du TCS pourrait être envisagée. Elle pourrait l'être d'autant plus du fait de l'existence de la procédure de sauvegarde financière accélérée (SFA), créée en 2010 à l'initiative de notre collègue Jean-Jacques Hyest, et de la procédure de sauvegarde accélérée, créée en 2014. Ce sont des formes particulières de sauvegarde visant à succéder à une conciliation qui ne parvient pas à aboutir en raison de l'opposition de certains créanciers. Cette imbrication entre la conciliation et la sauvegarde pourrait exiger qu'un même tribunal soit compétent pour les deux, car l'ouverture de la seconde peut suivre l'échec de la première.

Cependant, il pourrait s'avérer préjudiciable de scinder entre deux tribunaux les différents dispositifs de prévention, dont le caractère commun est d'être confidentiels et de relever de la compétence du président du tribunal. Votre commission a donc considéré que devaient seules relever de la compétence des TCS les procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire .

En outre, s'agissant de la deuxième catégorie de procédures visées par l'article 66 du projet de loi, qui ne concernerait, de façon restrictive, que les personnes morales, contrairement à la première, il apparaît que les seuils pourraient ne pas être les mêmes que pour la première catégorie. De plus, le critère de la pluralité d'établissements ne constitue pas en soi un élément de complexité de la procédure : une société peut avoir deux établissements à quelques kilomètres de distance, mais dans le ressort de deux tribunaux. Il est également tautologique de retenir la localisation d'établissements dans le ressort de plusieurs cours d'appel comme critère si l'on retient déjà un critère de localisation dans le ressort de plusieurs tribunaux de commerce : si les établissements relèvent de plusieurs cours d'appel, ils relèvent a fortiori de plusieurs tribunaux de commerce.

Sauf à viser des cas particuliers récents, cette deuxième catégorie ne semble guère pertinente à votre rapporteur. Par sa simplicité et sa généralité, la première catégorie semble pouvoir englober l'essentiel de la seconde, sauf à ce que les seuils prévus pour la seconde soient significativement plus bas, ce qui serait discutable au regard de l'économie générale du texte, qui vise à faire traiter les plus grosses affaires par les TCS et pas les affaires moyennes 378 ( * ) . Votre commission a donc écarté cette seconde catégorie.

S'agissant des deux dernières catégories de procédures, concernant les procédures ouvertes en application d'un texte européen ou international , il apparaît à votre rapporteur qu'elles peuvent effectivement relever d'un TCS, dans la mesure où elles se caractérisent par un élément d'extranéité qui peut être source de complexité pour le tribunal, par l'appréhension du droit européen ou d'un droit étranger, et requérir une expertise particulière.

Pour autant, une procédure concernant une petite entreprise devrait-elle relever d'un TCS sous prétexte, par exemple, qu'un de ses créanciers réside dans un autre État de l'Union européenne ? Un tel cas de figure ne présente en réalité aucune difficulté. En revanche, la procédure est bien plus complexe dans l'hypothèse où le débiteur possède des actifs dans plusieurs États. L'application du règlement européen est en réalité prévue lorsque le débiteur possède des actifs ou établissements dans plusieurs États membres.

D. Les seuils de compétence des tribunaux de commerce spécialisés

L'article 66 du projet de loi prévoit que la compétence des TCS serait de droit lorsque le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires du débiteur seraient supérieurs à des seuils fixés par décret en Conseil d'État. L'étude d'impact évoque les seuils de 150 salariés et de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, lesquels correspondent aux seuils au-delà desquels doivent être constitués des comités de créanciers en application des articles L. 626-29 et R. 626-52 du code de commerce 379 ( * ) . Constituant un élément de complexité de la procédure, ces comités ont pour vocation de contribuer à élaborer le projet de plan dans le cadre d'une sauvegarde ou d'un redressement judiciaire.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, il y aurait de l'ordre de 150 à 200 procédures par an correspondant à ces seuils, dont la plupart sont déjà traitées par les tribunaux de commerce les plus importants en raison de l'implantation du siège des grandes entreprises concernées dans le ressort de ces tribunaux (Paris et Nanterre en premier lieu, mais également Lyon, Bobigny, Créteil...). Seules quelques procédures seraient délocalisées d'office chaque année du fait de la spécialisation. Votre rapporteur souligne toutefois que, dans des petits bassins d'emploi locaux, ces seuils pourraient faire systématiquement relever les entreprises les plus importantes du TCS.

Pour autant, la conférence générale des juges consulaires de France, entendue par votre rapporteur a déploré le caractère symbolique d'une telle spécialisation, qui traduirait l'incompétence des juges consulaires élus dans les tribunaux non spécialisés, alors qu'elle ne concernerait en pratique qu'un nombre restreint de procédures chaque année. Plus largement, un certain nombre de personnes entendues par votre rapporteur - représentants des entreprises, praticiens des procédures collectives ou universitaires - ont douté voire remis en cause l'utilité d'une telle spécialisation, compte tenu de son impact concret limité et de son impact symbolique négatif , y compris pour les petites entreprises qui n'auraient pas accès au TCS.

Lors des auditions de votre rapporteur, deux autres seuils ont été évoqués : d'une part, le seuil de 400 salariés, qui déclenche la compétence du comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) 380 ( * ) , et, d'autre part, le seuil des entreprises de taille intermédiaire (ETI) puis des grandes entreprises, à partir de 250 salariés et 50 millions d'euros de chiffre d'affaires ou 43 millions d'euros de total de bilan. Issu du droit européen, ce second seuil a été intégré en droit français par l'article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, lequel a fixé quatre catégories statistiques d'entreprises 381 ( * ) , dont les différents seuils en termes de nombre de salariés, de chiffre d'affaires et de total de bilan ont été précisés par le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008, reprenant les dispositions européennes.

S'il est vrai que la détermination de seuils de cette nature dans le code de commerce appartient en principe au pouvoir réglementaire, votre rapporteur estime qu'ils pourraient être fixés dans la loi par renvoi, par exemple, à des seuils existants dans d'autres articles législatifs du code, pour lesquels le montant a déjà été fixé par décret, ou aux catégories des ETI et des grandes entreprises, mentionnées au niveau législatif depuis 2008.

E. Le caractère automatique ou non de la compétence des tribunaux de commerce spécialisés

Outre la question des seuils de compétence, celle - qui lui est étroitement liée - du caractère automatique ou non de la compétence du TCS fait l'objet d'appréciations contrastées.

En effet, tel qu'il est rédigé, l'article 66 du projet de loi instaure des TCS pour qu'ils connaissent seuls des procédures importantes. En d'autres termes, cette compétence spécialisée revêt un caractère automatique : dès qu'un débiteur présente les caractéristiques correspondant au champ de la compétence spécialisée du TCS, celui-ci est automatiquement compétent pour connaître de la procédure ouverte à l'égard de ce débiteur, sans appréciation possible de l'opportunité que l'affaire puisse être traitée par le tribunal local du siège.

Les critères de nombre de salariés et de montant de chiffre d'affaires prévus pour déclencher la compétence des TCS ne semblent pourtant pas caractériser de façon absolue les affaires plus complexes. Il peut exister des procédures assez simples concernant des entreprises de plus de 150 salariés, avec un seul site, n'appelant pas de difficultés particulières de suivi de la procédure par le tribunal et les organes de la procédure, alors que des procédures concernant des entreprises de moins de 150 salariés peuvent être complexes, en raison par exemple des particularités des créances financières, issues de montages financiers complexes et nécessitant de faire appel à un comité des créanciers financiers (hypothèse de l'ancienne sauvegarde financière accélérée, conçue pour pouvoir traiter en particulier l'endettement des « LBO » 382 ( * ) ).

Ainsi, le critère de la taille de l'entreprise ne semble rendre compte que de façon imparfaite de la complexité d'une procédure . Dès lors, votre commission s'interroge sur le caractère automatique de la compétence des TCS dès lors que sont franchis les seuils, tels qu'ils sont envisagés par l'étude d'impact. Pour autant, s'en tenir simplement au mécanisme de délocalisation de l'article L. 662-2 du code de commerce, sur décision de la cour d'appel « lorsque les intérêts en présence le justifient », pour appréhender les procédures complexes ne paraît pas suffisant si l'on approuve l'objectif de spécialisation de certains tribunaux de commerce afin de traiter les affaires importantes et complexes. Les affaires les plus importantes s'appréhendent facilement à l'aide de seuils élevés, mais la complexité ne peut s'apprécier qu'au cas par cas, tant il serait difficile d'instaurer dans la loi des critères objectifs et exhaustifs de complexité d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.

Dès lors, la combinaison de critères de taille prévus par le texte et d'une appréciation au cas par cas prévue par la procédure de délocalisation devrait permettre d'identifier plus efficacement les procédures qui devraient relever de la compétence des TCS.

Ainsi, sans remettre en cause l'objectif de spécialisation porté par le projet de loi, votre commission a considéré plus pertinent de prévoir deux niveaux de compétence des tribunaux spécialisés :

- en premier lieu, les TCS seraient compétents de droit - c'est-à-dire de façon automatique - pour les procédures qui sont réellement les plus importantes, c'est-à-dire celles impliquant qui sont au moins des entreprises de taille intermédiaire (ETI), lesquelles emploient au moins 250 salariés ;

- en second lieu, les TCS seraient compétents par renvoi de la cour d'appel - c'est-à-dire de façon facultative , mais la cour étant obligatoirement saisie pour statuer - pour les procédures d'importance plus relative appelant une appréciation au cas par cas, mais présentant une certaine complexité du fait de l'obligation de mettre en place des comités de créanciers, obligation concernant les entreprises qui emploient plus de 150 salariés.

En outre, votre rapporteur précise que l'article 67 modifie l'actuelle procédure de délocalisation « lorsque les intérêts en présence le justifient », pour permettre à la cour d'appel de renvoyer une affaire au TCS en dehors de tout seuil. Cette procédure est à la disposition, notamment, du président du tribunal, du débiteur ou du ministère public. Cette modification paraît tout à fait pertinente, dans la mesure où une petite affaire peut parfois receler un niveau élevé de complexité, ainsi que cela a été évoqué supra . La procédure de délocalisation créerait ainsi un troisième niveau de compétence des TCS.

Selon les informations fournies à votre rapporteur, seraient ouvertes de l'ordre d'une soixantaine de procédures collectives par an impliquant une ETI ou une grande entreprise.

L'amendement évoqué supra prévoit donc, outre la compétence de droit pour les procédures transfrontalières qu'il ne remet pas en cause, une compétence de droit pour les procédures collectives impliquant un débiteur entrant dans la catégorie des ETI ou des grandes entreprises, ainsi qu'une compétence pour les procédures collectives renvoyées par la cour d'appel par l'effet de la procédure de délocalisation. Ces renvois peuvent concerner toute procédure lorsque les intérêts en présence le justifient, ainsi que les procédures exigeant la mise en place de comités de créanciers, sur le renvoi desquelles la cour d'appel devrait obligatoirement statuer. Ainsi, un défaut d'articulation entre les articles 66 et 67 du projet de loi serait corrigé car, tel qu'il est rédigé, le nouvel article L. 721-8 du code de commerce relatif à la compétence des TCS ne fait pas expressément référence aux procédures qui seraient renvoyées en application de l'actuelle procédure de délocalisation.

Pour la cohérence du projet de loi, comme l'article L. 662-2 du code de commerce relatif à la procédure actuelle de délocalisation est modifié par l'article 67 du projet de loi, la mise en place d'une nouvelle procédure de renvoi des affaires vers un TCS, fondée sur une saisine automatique de la cour d'appel au-delà des seuils des comités de créanciers, est prévue par un amendement adopté à l'article 67 par votre commission, à l'initiative de son rapporteur.

Sans remettre en cause la procédure actuelle de délocalisation, qui garde son entière utilité, cette procédure complémentaire consisterait à ce la cour d'appel soit automatiquement saisie lorsqu'une procédure est ouverte à l'égard d'un débiteur ayant un nombre de salariés et un montant de chiffre d'affaires supérieurs aux seuils prévus pour la mise en place obligatoire des comités de créanciers (150 salariés et 20 millions d'euros de chiffre d'affaires), de façon à ce que le premier président de la cour d'appel puisse dans tous les cas se prononcer sur l'opportunité de renvoyer l'affaire devant un TCS. Il appartiendra au premier président de se prononcer rapidement, comme il le fait déjà lorsqu'il est saisi d'une demande de délocalisation. De façon à éclairer sa décision, un avis du ministère public sur l'opportunité du renvoi au TCS serait expressément prévu.

F. La compétence territoriale des tribunaux de commerce spécialisés

L'article 66 du projet de loi dispose que le TCS territorialement compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le centre des intérêts principaux du débiteur . Il ajoute que le lieu d'immatriculation ou, pour les personnes morales, le lieu du siège est présumé être le centre des intérêts principaux.

Cette règle de compétence reprend, en large partie, la règle fixée par l'article 3 du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, applicable aux procédures transfrontalières, sans toutefois la reprendre complètement, s'agissant en particulier de la présomption du lieu du siège comme étant le centre des intérêts principaux jusqu'à preuve contraire. Cet article dispose :

« Les juridictions de l'État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité. Pour les sociétés et les personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu'à preuve contraire, être le lieu du siège statutaire. »

Or, cette règle n'existe pas à ce jour en droit français pour établir la compétence territoriale des tribunaux de commerce. Selon l'article R. 600-1 du code, « le tribunal territorialement compétent pour connaître des procédures prévues par le livre VI (...) est celui dans le ressort duquel le débiteur, personne morale, a son siège ou le débiteur, personne physique, a déclaré l'adresse de son entreprise ou de son activité ».

Ainsi coexisteraient deux règles de compétence différentes selon que seraient concernés les tribunaux de commerce de droit commun ou les TCS. Une telle disparité n'apparaît pas pertinente à votre rapporteur, alors qu'il n'existe aucune obligation de reprendre la définition du règlement européen dans des cas autres que ceux qu'il régit. De plus, dans les cas relevant du règlement européen, il paraît préférable de retenir une rédaction identique à celle établie précisément par le règlement.

Par ailleurs, la notion de lieu d'immatriculation utilisée par le projet de loi ne saurait renvoyer à tous les entrepreneurs individuels, puisque tous ne sont pas soumis à une obligation d'immatriculation, raison pour laquelle l'article R. 600-1 précité évoque tout simplement l'adresse de l'entreprise. Si toutefois l'on ne vise que les entreprises artisanales et commerciales, incluant les sociétés commerciales - seules entreprises à relever de la compétence du tribunal de commerce au titre des procédures collectives -, il est vrai que celles-ci sont tenues de s'immatriculer, les unes au répertoire des métiers et, le cas échéant, au registre du commerce et des sociétés (RCS), et les autres au RCS uniquement.

Afin de préserver la clarté et la cohérence des règles de compétence territoriale, l'amendement évoqué supra retient la règle fixée par le règlement européen, telle qu'elle y est rédigée, pour les procédures transfrontalières entrant dans le champ du droit européen. La règle de compétence territoriale actuelle prévue par le code, reposant sur le siège pour une personne morale ou l'adresse pour une personne physique, serait conservée dans les autres cas, y compris dans le cas des procédures ouvertes en application du droit international privé, lequel renvoie en principe aux règles de compétence juridictionnelle nationales. Rien n'exige sa remise en cause.

Votre rapporteur s'est interrogé sur une harmonisation inverse, qui consisterait à retenir la règle du centre des intérêts principaux du débiteur pour l'ensemble des tribunaux de commerce, pour les procédures collectives comme pour le contentieux commercial. Une telle harmonisation présenterait l'avantage d'une simplification, mais elle pourrait susciter un contentieux nouveau sur la réalité du centre des intérêts principaux et sa distinction avec le lieu du siège, de nature à ralentir les procédures. Au demeurant, selon les informations fournies à votre rapporteur, il ressort de la jurisprudence de la chambre commerciale de la Cour de cassation que la compétence du tribunal du lieu du siège peut être écartée lorsque le centre des intérêts principaux s'en écarte manifestement, pour fictivité du siège.

G. Un traitement plus unifié des procédures collectives concernant les groupes de sociétés

L'article 66 du projet de loi amorce une véritable et nécessaire prise en compte des groupes de sociétés dans le droit des entreprises en difficulté. Ainsi, dans le cas où une procédure est ouverte à l'égard d'une entreprise devant un TCS, celui-ci serait ensuite compétent pour connaître de toute procédure ouverte ultérieurement à l'égard des entreprises - il conviendrait de parler de sociétés pour être juridiquement exact - détenues ou contrôlées par la première entreprise au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3 du code de commerce 383 ( * ) , c'est-à-dire des filiales lato sensu de cette entreprise.

Un traitement plus unifié des groupes de sociétés est attendu depuis longtemps par les praticiens des procédures collectives. Il s'agit de permettre au tribunal saisi de l'ensemble des procédures concernant les sociétés d'un même groupe d'avoir une vision économique et financière de l'ensemble du groupe, pour pouvoir prendre les décisions les plus appropriées au regard de l'ensemble du groupe, en vue de la poursuite de l'activité de l'entreprise, du maintien de l'emploi et la satisfaction des créanciers.

En dehors d'imperfections rédactionnelles, votre rapporteur relève deux limites dans le dispositif ainsi envisagé.

D'une part, il prévoit la compétence du tribunal uniquement pour les procédures ouvertes à l'égard des sociétés détenues ou contrôlées, mais ne prend pas en compte l'hypothèse où une procédure serait d'abord ouverte pour une filiale, avant l'ouverture d'une procédure pour la société-mère. On ne peut écarter une chronologie dans laquelle une procédure collective serait ouverte en premier lieu pour une ou plusieurs filiales opérationnelles, qui regrouperaient les activités de production et l'essentiel des salariés, tandis que la holding ne verrait l'ouverture d'une procédure que plus tard. Dans ce cas, le traitement unifié de l'ensemble des procédures par le même tribunal s'avérerait aussi nécessaire que dans le cas prévu par le projet de loi.

D'autre part, ce nouveau dispositif ne trouverait à s'appliquer que devant le TCS, dans l'hypothèse où la première entreprise entrant dans une procédure relèverait de la compétence du TCS en raison notamment de sa taille. L'effectif salarié et le chiffre d'affaires à l'échelle d'un groupe peuvent être bien supérieurs aux seuils de compétence du TCS, quand bien même ils ne les franchiraient pas au niveau de chaque société du groupe. Dans pareil cas, on peut supposer que pourrait trouver à s'appliquer l'actuelle procédure de délocalisation : l'article 67 du projet de loi prévoit d'ailleurs qu'elle peut se conclure par le renvoi d'une affaire auprès d'un TCS. Au-delà de ce cas, il n'y a pas lieu de considérer que la prise en charge unifiée des groupes serait utile devant les TCS, et non devant les tribunaux de commerce de droit commun. À l'évidence, l'exigence de cohérence économique et procédurale vaut pour tous les groupes concernés par des procédures collectives.

Dans ces conditions, plutôt que de prévoir un dispositif partiel qui ne s'appliquerait que devant les TCS, votre commission a considéré pertinent d'instituer un dispositif procédural complet qui trouverait à s'appliquer dans toutes les procédures collectives. Par cohérence, elle a instauré ce dispositif au sein du livre VI du code de commerce, en adoptant un amendement de son rapporteur tendant à créer à cette fin un article additionnel 67 bis au sein du projet de loi, présenté infra . Aussi a-t-elle supprimé par coordination le dispositif propre aux TCS figurant à l'article 66 du projet de loi.

H. L'entrée en vigueur et les dispositions transitoires

L'article 66 du projet de loi prévoit une entrée en vigueur selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, et au plus tard six mois après la publication de la présente loi. Compte tenu de l'impact de la réforme, cette entrée en vigueur différée semble pertinente.

Est également prévu que les tribunaux initialement saisis demeurent compétents pour statuer les procédures déjà ouvertes devant eux

Si votre rapporteur approuve cette disposition transitoire, conforme au principe de bonne administration de la justice car destinée à éviter de rallonger les procédures en cours par un transfert vers une autre juridiction, il estime que sa rédaction mériterait d'être clarifiée, en reprenant la rédaction habituelle en matière d'application dans le temps des réformes du droit des procédures collectives.

L'amendement évoqué supra clarifie cette formulation, en disposant que l'article 66 du projet de loi est applicable aux procédures ouvertes dans les six mois de la publication de la loi, par cohérence avec l'entrée en vigueur différée.

II - La position de votre commission

À l'initiative de son rapporteur, par un seul amendement adopté à l'article 66 du projet de loi, combiné à un amendement à l'article 67 ainsi qu'à un amendement insérant un article additionnel 67 bis , votre commission a maintenu le principe de spécialisation de certains tribunaux de commerce, tout en adaptant et en clarifiant ses modalités de mise en oeuvre, tant sur l'implantation des futurs tribunaux de commerce spécialisés (TCS) que sur les conditions de leur saisine. Il devrait être désigné au moins un TCS dans le ressort de chaque cour d'appel, compétent de plein droit pour les procédures transfrontalières et pour les procédures impliquant des entreprises de taille intermédiaire et des grandes entreprises, et compétent sur renvoi de la cour d'appel pour les procédures complexes, la cour d'appel devant statuer sur l'opportunité d'un tel renvoi pour toutes les procédures exigeant la mise en place de comité de créanciers.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 67 (art. L. 662-2 du code de commerce) - Prise en compte de la création des tribunaux de commerce spécialisés dans la procédure de délocalisation des affaires devant les tribunaux de commerce

Objet : cet article vise à assurer une coordination entre la procédure de délocalisation des affaires existant pour les tribunaux de commerce, relevant de la cour d'appel, lorsque les intérêts en présence le justifient, et la création des tribunaux de commerce spécialisés.

I - Le dispositif proposé

L'article 67 du projet de loi vise à modifier l'article L. 662-2 du code de commerce, relatif à la procédure de renvoi des affaires d'un tribunal de commerce vers un autre, « lorsque les intérêts en présence le justifient », par la cour d'appel, en l'espèce par son premier président selon l'article R. 662-7 qui précise le déroulement de la procédure. Il s'agirait d'ouvrir la possibilité à la cour d'appel de délocaliser une affaire vers un tribunal de commerce spécialisé (TCS), indépendamment de la taille de l'affaire par rapport aux seuils de compétence des TCS.

Ainsi que cela a été précisé supra à l'article 66 du projet de loi, votre commission approuve cette faculté, qui permettrait de transférer à un TCS une affaire complexe - ou suscitant des difficultés locales particulières, en raison par exemple de conflits d'intérêts - qui n'atteindrait pas les seuils de compétence du TCS.

Tel que modifié par l'Assemblée nationale, l'article 67 prévoit aussi une procédure particulière de renvoi automatique vers le TCS, lorsque les critères de compétence du TCS sont remplis alors que le tribunal saisi n'est pas un TCS. Le président du tribunal saisi devrait saisir immédiatement le premier président de la cour d'appel, lequel aurait ensuite compétence liée, après avis du ministère public cependant, pour transférer l'affaire au TCS.

II - La position de votre commission

Outre son caractère quelque peu réglementaire, en reprenant des dispositions figurant à l'article R. 662-7 précité, votre rapporteur doute de la pertinence d'une telle procédure, applicable dans le cas où un tribunal de commerce de droit commun est saisi à tort d'une affaire relevant d'un TCS.

En effet, les règles actuelles de procédure civile permettent déjà de résoudre ce type de situation, sans qu'il soit besoin de dispositions spéciales.

Par l'adoption d'un amendement présenté par son rapporteur, votre commission a donc supprimé cette procédure inutilement complexe. Par ce même amendement, elle a introduit une procédure complémentaire déjà présentée à l'article 66 du projet de loi.

Cette nouvelle procédure tend à prévoir la saisine automatique de la cour d'appel, afin qu'elle statue, après avis du parquet, pour savoir s'il y a lieu de saisir un TCS en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire concernant un débiteur dont le nombre de salariés et le chiffre d'affaires exigent la constitution des comités de créanciers, soit 150 salariés et 20 millions d'euros.

Il s'agit ainsi de mettre en place un dispositif permettant de vérifier s'il y a lieu de faire traiter la procédure par le tribunal territorialement compétent du siège de l'entreprise ou si, en raison de la complexité de l'affaire et des enjeux économiques et sociaux locaux, il y a lieu de la transférer à un tribunal spécialisé, plus à même de la traiter.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 67 bis (nouveau) (art. L. 662-8 du code de commerce) - Instauration d'un dispositif procédural permettant de faire traiter par un même tribunal l'ensemble des procédures collectives concernant les sociétés d'un même groupe

Objet : cet article vise à instaurer un mécanisme prenant en compte de façon adaptée les groupes de sociétés dans le cadre des procédures collectives, en permettant un traitement unifié par le même tribunal, saisi de l'ouverture de la première procédure, de l'ensemble des procédures concernant les sociétés d'un même groupe.

I - Une prise en compte insuffisante des groupes de sociétés par le droit des procédures collectives

Introduit par votre commission par l'adoption d'un amendement présenté par son rapporteur, l'article 67 bis du projet de loi vise à mettre en place un nouveau mécanisme procédural permettant de prendre en compte les groupes de sociétés, au-delà du mécanisme partiel et limité aux tribunaux de commerce spécialisés (TCS) prévu à l'article 66 du projet de loi.

En l'état du droit des procédures collectives, les groupes de sociétés sont très peu pris en compte. Issu de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, l'article L. 662-8 du code de commerce dispose qu'un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire commun à l'ensemble des procédures peuvent être désignés, le cas échéant pour exercer une mission de coordination, lorsque plusieurs tribunaux sont simultanément saisis de procédures concernant des sociétés contrôlées par la même société ou contrôlant les mêmes sociétés.

Votre commission a approuvé la disposition prenant en compte les groupes dans le cadre de la compétence des TCS, tout en souhaitant son extension et sa systématisation devant tous les tribunaux, d'autant que la jurisprudence n'a pas permis, jusqu'à présent, de pallier le silence du livre VI du code de commerce sur cette problématique.

À titre d'illustration, dans un arrêt du 16 décembre 2014 384 ( * ) , la chambre commerciale de la Cour de cassation a refusé d'admettre l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire commune à trois sociétés, pourtant très intégrées d'un point de vue juridique, économique et financier, considérant que les éléments présentés ne démontraient pas « la confusion des patrimoines des sociétés ou la fictivité de certaines d'entre elles, seules de nature à justifier l'existence, par voie d'extension, d'une procédure collective unique ».

Dès lors que la jurisprudence ne permet pas d'appréhender dans une même procédure les sociétés d'un même groupe, puisque chacune constitue une personne morale distincte, seuls des dispositifs procéduraux appropriés permettraient de traiter de façon cohérente les groupes de sociétés, en faisant en sorte que les procédures différentes concernant les différentes sociétés d'un même groupe soient jugées par un même tribunal.

Or, un traitement unifié par un même tribunal et, le cas échéant, par les mêmes organes de la procédure des groupes présente non seulement un avantage de cohérence procédurale, mais constitue également un gage de plus grande efficacité économique des procédures collectives, par l'approche économique globale qu'elle donne au tribunal.

Un tel regroupement de toutes les procédures concernant les sociétés d'un même groupe devant un même tribunal est une réforme attendue de longue date par les praticiens.

II - La position de votre commission

Dans ces conditions, votre commission a adopté un amendement , à l'initiative de son rapporteur, visant à réécrire l'article L. 662-8 précité, pour que soient traitées par un même tribunal les sociétés d'un même groupe. Cet amendement reprend, en l'étendant à tous les tribunaux, la solution partielle envisagée devant les seuls tribunaux spécialisés.

Le dispositif ainsi adopté prévoit que le tribunal est compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui détient ou contrôle une société pour laquelle a déjà été ouverte une procédure devant lui ou concernant une société qui est détenue ou contrôlée par une société pour laquelle a déjà été ouverte une procédure devant lui.

Habituelles en droit des sociétés, les deux notions de détention et de contrôle sont précisées par les deux articles L. 233-1 et L. 233-3 du code de commerce :

- une société en détient une autre, en qualité de filiale, lorsqu'elle possède plus de la moitié de son capital (article L. 233-1) ;

- une société en contrôle une autre lorsqu'elle détient, directement ou indirectement, une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote, lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord avec d'autres associés, lorsqu'elle détermine seule les décisions, par ses droits de vote, ou lorsqu'elle dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des dirigeants (article L. 233-3).

Le tribunal aurait la faculté de désigner un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire commun à l'ensemble des procédures, sans que cela soit obligatoire, dans l'hypothèse où il aurait désigné un administrateur et un mandataire différent pour chaque procédure. En application du droit commun, il pourrait, en tout état de cause, désigner le même administrateur et le même mandataire.

Ce dispositif réserverait également le cas où une procédure ouverte ultérieurement au sein du groupe devrait relever de la compétence du TCS, en prévoyant que la cour d'appel statuerait sur le renvoi de l'ensemble des procédures devant la juridiction spécialisée.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 68 - Application outre-mer de la spécialisation des tribunaux de commerce

Objet : cet article vise à exclure les départements d'outre-mer ainsi que les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon de la réforme instituant des tribunaux de commerce spécialisés.

I - Le dispositif proposé

L'article 68 du projet de loi dispose que ses articles 65 à 67, relatifs à la spécialisation des tribunaux de commerce, ne sont pas applicables dans les collectivités territoriales régies par l'article 73 de la Constitution - c'est-à-dire les départements et régions d'outre-mer ainsi que les collectivités à statut particulier exerçant les compétences d'un département et d'une région d'outre-mer, soit la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion, Mayotte et la Martinique - et dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Selon les informations communiquées par le Gouvernement à votre rapporteur, il s'agit de prendre en compte l'insularité et l'éloignement, plus important qu'en métropole, considérant qu'il ne serait pas envisageable de faire relever d'un tribunal de commerce spécialisé (TCS) les principales entreprises situées outre-mer, quand bien même s'agirait-il d'un tribunal situé outre-mer, comme c'est le cas pour le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France, spécialisé en matière de concurrence.

En tout état de cause, votre rapporteur relève que la procédure de délocalisation actuellement prévue à l'article L. 662-2 du code de commerce est applicable pour les affaires relevant des tribunaux mixtes de commerce, s'il apparaît qu'une affaire le mériterait.

Un tel choix d'exclusion des entreprises ultramarines du dispositif des TCS s'avère cependant discutable. Si des entreprises d'une certaine taille seulement sont concernées, il pourrait paraître raisonnable, voire très utile dans certains cas compte tenu du poids de ces entreprises dans l'économie insulaire, que l'affaire soit jugée par un tribunal extérieur.

Pour autant, à ce stade, votre commission n'a pas souhaité remettre en cause cette exclusion, n'étant pas en mesure d'en apprécier l'ensemble des conséquences, les avantages comme les inconvénients.

Par ailleurs, tel qu'il est rédigé, l'article 68 du présent projet de loi prévoit que les dispositions de ce texte relatives aux TCS ne sont pas applicables outre-mer. Il serait plus correct juridiquement de prévoir, au sein même du code de commerce, que le nouvel article L. 721-8 du code, qui fixe la compétence des TCS, ne s'applique pas dans les départements d'outre-mer et dans les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

II - La position de votre commission

Si votre commission admet que les procédures ouvertes à l'encontre de grandes entreprises dans les départements d'outre-mer puissent ne pas relever de la compétence des TCS, pour des raisons de commodité pratique, encore faudrait-il que cette exclusion soit codifiée dans le code de commerce. Sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté en ce sens un amendement de codification de ces dispositions au sein de la partie du code de commerce relative à l'outre-mer.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Section 2 - Administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires

Article 69 (art. L. 621-4-1 [nouveau], L. 631-9, L. 641-1-2 [nouveau], L. 936-1 et L. 956-1 du code de commerce) - Désignation obligatoire d'un second administrateur judiciaire et d'un second mandataire judiciaire pour certaines procédures collectives

Objet : cet article vise à déterminer les cas de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire dans lesquels le tribunal doit obligatoirement désigner un second administrateur judiciaire et un second mandataire judiciaire.

I - Le dispositif proposé

Initialement, l'article 69 du projet de loi comportait uniquement une habilitation, au titre de l'article 38 de la Constitution, visant, d'une part, à prévoir la désignation d'un second administrateur judiciaire et d'un second mandataire judiciaire dans certaines procédures et, d'autre part, à permettre le recours au salariat dans les professions d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire.

L'Assemblée nationale a transformé les deux volets de l'habilitation en modifications directes du code de commerce, le premier au sein du même article 69 et le second dans un nouvel article 69 bis .

L'objectif poursuivi par l'article 69, tel qu'il résulte des travaux de l'Assemblée nationale, est de faire en sorte, dans le cadre des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire les plus complexes, qu'il existe une meilleure coordination entre administrateurs et mandataires lorsque sont concernés plusieurs sites voire plusieurs sociétés d'un même groupe.

Ces dispositions seraient introduites au sein du titre II, relatif à la procédure de sauvegarde, du livre VI du code de commerce. Le projet de loi prévoit, par des renvois, leur application aux procédures de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire. Pour la liquidation, l'obligation ne concernerait que la désignation d'un deuxième mandataire judiciaire, car la désignation d'un administrateur n'est pas toujours requise en liquidation.

L'article 69 du projet de loi prévoit ainsi la désignation obligatoire d'au moins un deuxième administrateur et un deuxième mandataire dès le jugement d'ouverture d'une procédure collective dans les cas suivants :

- le débiteur possède un nombre d'établissements secondaires au moins égal à un seuil fixé par décret et situés dans le ressort de tribunaux en dehors de celui du siège du débiteur ;

- le débiteur détient ou contrôle au moins deux sociétés concernées par une procédure collective déjà ouverte ;

- le débiteur est détenu ou contrôlé par une société concernée par une procédure collective déjà ouverte et détenant ou contrôlant une autre société elle-même déjà en procédure collective.

S'ajoute à ces critères l'obligation pour le débiteur principal ou l'une quelconque des sociétés concernées d'avoir un chiffre d'affaires excédant un seuil fixé par décret, sans quoi la désignation du deuxième administrateur et du deuxième mandataire ne serait pas obligatoire.

Il résulte de ces dispositions que l'hypothèse simple d'une société de grande taille, au sein d'un groupe dont la société-mère ou les filiales ne sont pas en procédure collective, et dont le nombre d'établissements est limité, n'entrerait pas dans les cas prévus par l'article 69 du projet de loi si elle demandait l'ouverture d'une procédure collective.

De plus, le projet de loi précise que ce deuxième administrateur et ce deuxième mandataire du débiteur principal doivent aussi être communs à l'ensemble des sociétés concernées. De la sorte, chaque société concernée aurait a priori au moins son administrateur et son mandataire, sous réserve des règles de désignation des administrateurs pour les petites procédures et les liquidations, et toutes les sociétés concernées auraient en plus un même administrateur et un même mandataire s'ajoutant à ceux qu'elles ont déjà.

Il s'agit donc bien de désigner un administrateur et un mandataire « coordonnateurs » de leurs homologues et de l'ensemble des procédures. À cet égard, le projet de loi dispose que ce deuxième administrateur comme ce deuxième mandataire doivent présenter des « conditions d'expérience et de moyens (...) au regard de la complexité de la procédure ou de la taille des entreprises concernées », selon des modalités précisées par décret en Conseil d'État. Une catégorie particulière d'administrateurs et de mandataires devrait donc être distinguée, au sein des listes nationales actuelles, de façon à connaître ceux qui seraient capables de gérer des procédures plus lourdes et complexes.

II - La position de votre commission

Si l'objectif poursuivi par l'article 69 du projet de loi, tel qu'il résulte des travaux de l'Assemblée nationale, est unanimement approuvé, l'idée de rendre obligatoire la désignation d'un second administrateur et mandataire dans certains cas limités a donné lieu à des appréciations très contrastées lors des auditions de votre rapporteur. De plus, le dispositif prévu par le projet de loi se distingue par sa particulière complexité, qui laissera nécessairement de côté un grand nombre de cas dans lesquels la désignation d'un deuxième administrateur ou mandataire pourrait être pertinente. On peut d'ailleurs s'interroger sur l'hypothèse dans laquelle le tribunal omettrait de désigner un second administrateur et un second mandataire, au vu de la complexité de ces règles.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, il apparaît que, d'ores et déjà, les tribunaux ont l'habitude de désigner un deuxième administrateur judiciaire et un deuxième mandataire judiciaire, et au besoin davantage, lorsque la complexité et les spécificités de la procédure l'exigent, par exemple lorsque le débiteur est implanté sur plusieurs sites importants éloignés les uns des autres, de façon à mieux prendre en charge les salariés et les créanciers sur place.

Ainsi, s'agissant, par exemple, de la procédure de sauvegarde, l'article L. 621-4 du code de commerce dispose que le tribunal peut désigner plusieurs administrateurs ou mandataires à la demande du parquet, tandis que l'article L. 621-7 dispose que, par la suite, le tribunal peut d'office, sur proposition du juge-commissaire ou à la demande du parquet, procéder au remplacement de l'administrateur ou du mandataire ou « adjoindre un ou plusieurs administrateurs ou mandataires judiciaires à ceux déjà nommés ».

De plus, il existe déjà dans les faits des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires spécialisés dans les procédures lourdes et complexes. Ces professionnels sont connus des tribunaux et gèrent déjà ces procédures, sans qu'il soit nécessaire d'établir une liste distincte pour les identifier. À cet égard, il convient de rappeler que ces professionnels ont une compétence nationale, même si les tribunaux désignent en général ceux qui se trouvent dans leur ressort pour les procédures courantes.

Il apparaît donc que la pratique satisfait déjà largement l'objectif recherché par l'article 69 du projet de loi.

En outre, les critères définis par l'article 69 du projet de loi peuvent conduire à imposer un deuxième administrateur ou mandataire alors que la complexité de la procédure ne le requerrait pas, tandis qu'ils ne seraient pas de nature à l'exiger pour toutes les procédures objectivement complexes, en particulier en cas de groupe de sociétés.

Votre rapporteur ajoute que, dans certains cas, la désignation d'un deuxième administrateur judiciaire peut se justifier, mais pas toujours celle d'un deuxième mandataire judiciaire, et réciproquement. La désignation d'un deuxième administrateur et d'un deuxième mandataire représenterait également un coût pour les entreprises concernées, même si elles ont une certaine taille et donc de plus grandes capacités financières.

Dans ces conditions, compte tenu de la pratique observée de la part des tribunaux, votre commission a considéré que ces dispositions à la fois rigides, complexes et incomplètes n'étaient pas nécessaires. Elle a adopté, en conséquence, un amendement de suppression présenté par son rapporteur.

Au surplus, votre rapporteur observe que l'article 70 A du projet de loi vise justement à faciliter la désignation d'un deuxième administrateur ou mandataire judiciaire dès l'ouverture de la procédure et non ultérieurement, de façon à ce que le tribunal puisse le faire, pour toute procédure collective, non seulement à la demande du parquet, mais aussi d'office, à la demande du débiteur ou à la demande du créancier poursuivant ayant demandé l'ouverture de la procédure.

Le dispositif de l'article 70 A permet de répondre de façon bien plus simple, souple et efficace à l'objectif légitime poursuivi par l'article 69, tout en laissant au tribunal, selon les circonstances de l'espèce, le soin d'apprécier in concreto s'il y a lieu de désigner un seul ou deux administrateurs et mandataires, voire davantage.

Enfin, votre rapporteur relève que le mécanisme de traitement des groupes de sociétés par un même tribunal, introduit par votre commission à son initiative dans un nouvel article 67 bis du projet de loi, permet de traiter de façon plus cohérente les procédures ouvertes à l'égard de sociétés faisant partie d'un même groupe, sans qu'il soit nécessaire de prévoir dans la loi l'obligation de désigner un administrateur et un mandataire commun. Dans ce cas de figure, le tribunal peut - par construction - désigner pour toutes les sociétés du groupe le même administrateur judiciaire et le même mandataire judiciaire et, au besoin, s'il ne fait pas ce choix, désigner un administrateur et un mandataire commun à l'ensemble des sociétés.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 69 bis A - Rapport au Parlement sur la possibilité de réduire la durée d'une procédure de liquidation judiciaire

Objet : cet article tend à prévoir la présentation d'un rapport au Parlement, par le Gouvernement, sur la possibilité de limiter dans le temps la durée de la procédure de liquidation judiciaire.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale en séance publique, à l'initiative de notre collègue député Francis Vercamer, l'article 69 bis A prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement sur la « possibilité de limiter, dans le temps, la période de liquidation judiciaire, sur le modèle de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée ».

Outre l'objet sur lequel cette demande de rapport est formulée, cet article indique directement le dispositif à étudier pour permettre une telle limitation dans le temps, partant implicitement du postulat selon lequel la lenteur de certaines liquidations est le fait du mandataire judiciaire désigné liquidateur :

« À l'issue de la période déterminée, le tribunal de commerce pourrait alors se saisir de la liquidation. En cas de carence du mandataire judiciaire, le juge pourrait donner ordre de clôturer la liquidation, sans que les opérations postérieures à l'intervention du tribunal de commerce soient rémunérées. Il pourrait également ordonner que le mandataire judiciaire soit rémunéré à hauteur de la moitié des sommes normalement perçues, pendant une période déterminée. Enfin, il pourrait aussi faire le choix de remplacer le mandataire, en cas de carence. »

Si votre commission souscrit à l'idée selon laquelle une liquidation judiciaire n'est jamais assez rapide, en particulier pour les salariés concernés, votre rapporteur signale qu'il existe une procédure de liquidation judiciaire simplifiée , applicable aux entreprises dont l'actif ne comporte pas de bien immobilier, en-deçà de certains seuils : elle est obligatoire pour les entreprises ayant au plus un salarié et 300 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes et elle est facultative, à l'appréciation du tribunal, pour les entreprises ayant au plus cinq salariés et 750 000 euros de chiffre d'affaires hors taxes.

Depuis l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, il existe également une procédure de rétablissement professionnel , sans liquidation, ouverte pour une période de quatre mois pour tout débiteur remplissant les critères d'ouverture de la liquidation judiciaire, lorsqu'il n'a pas de salarié et possède un actif d'une valeur inférieure à 5000 euros.

La procédure de rétablissement professionnel présente l'avantage de ne pas dessaisir le débiteur de la disposition et de l'administration de ses biens, contrairement à la procédure de liquidation jusqu'à sa clôture, ce qui permet à un entrepreneur individuel de gérer ses biens et de reprendre une activité professionnelle. L'objectif visé était le « rebond professionnel ».

Ainsi, il existe, pour les petites entreprises, des procédures adaptées de nature liquidative, qui se déroulent dans des délais relativement brefs. Il est difficile d'envisager une procédure rapide en présence d'un nombre de salariés important et de biens d'une certaine valeur, en particulier des biens immobiliers, dont il faut organiser au mieux la liquidation.

En outre, la procédure telle que décrite par l'article 69 bis A paraît difficile à envisager concrètement. En effet, votre rapporteur ne discerne pas ce que signifie le fait que le tribunal puisse « se saisir » de la liquidation au terme d'une période déterminée.

Enfin, la plupart des éléments envisagés dans la procédure décrite par l'article 69 bis A sont déjà satisfaits par le droit positif.

À la demande notamment du débiteur, par l'intermédiaire du juge-commissaire désigné pour superviser la procédure, le tribunal peut déjà remplacer le liquidateur. Ce cas trouverait évidemment à s'appliquer en cas de carence du liquidateur.

De plus, le liquidateur est tenu d'informer, tous les trois mois, le juge-commissaire, le débiteur et le parquet du déroulement des opérations de liquidation, ce qui permet en principe d'en contrôler le bon déroulement.

En outre, l'article L. 643-9 du code de commerce organise de façon claire les opérations de clôture de la liquidation judiciaire. Le jugement qui ouvre la procédure doit fixer un délai au terme duquel la clôture doit être examinée par le tribunal, ce délai pouvant être prorogé par décision motivée. Lorsque la poursuite de la liquidation n'est plus possible en raison de l'insuffisance des actifs ou est disproportionnée par rapport aux difficultés de la réalisation des actifs résiduels, la clôture est prononcée par le tribunal. Celui-ci peut être saisi à tout moment, à cette fin, par le débiteur lui-même, le liquidateur ou le parquet. Il peut se saisir d'office.

Ainsi, en dépit des difficultés concrètes qui peuvent être rencontrées, la procédure de liquidation judiciaire comporte toutes les garanties pour un achèvement dans les meilleurs délais, compte tenu des actifs à liquider et des créances à désintéresser, à la disposition du tribunal et sous son contrôle, le cas échéant à l'initiative du débiteur lui-même.

II - La position de votre commission

Le projet de loi, dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, comporte plus d'une vingtaine de demandes de rapport au Parlement, sur des sujets divers et variés.

Votre commission n'est pas favorable à la multiplication de ces demandes de rapport, qui correspondent souvent à un affichage politique et permettent rarement de résoudre concrètement les problèmes identifiés. En outre, le contenu très général de la plupart de ces rapports, résultant du manque de précision des demandes, ainsi que les délais dans lesquels ils sont fournis - lorsqu'ils le sont - en amoindrissent l'utilité pour le Parlement.

Enfin, il est toujours loisible de proposer, par voie d'amendement au présent projet de loi ou de proposition de loi, des mécanismes de nature à accélérer la procédure de liquidation judiciaire. En tout état de cause, votre commission considère qu'il existe déjà dans le code de commerce des dispositions correspondant à l'objectif, certes légitime, ainsi recherché.

Aussi votre commission a-t-elle, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement visant à supprimer cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 69 bis (art. L. 811-1, L. 811-3, L. 811-7-1 [nouveau], L. 812-1, L. 812-2-1, L. 812-5-1 [nouveau], L. 814-3, L. 814-12 et L. 814-14 [nouveau] du code de commerce) - Instauration de l'exercice salarié des professions d'administrateur et de mandataire judiciaire

Objet : le présent article vise à transposer aux administrateurs et mandataires judiciaires le même dispositif de salariat que celui applicables aux autres auxiliaires de justice ou officiers publics ou ministériels, en retenant la règle de quatre salariés au plus par titulaire ou associé.

I - La modification proposée

Les professions d'administrateur et de mandataire judiciaires sont les seules qui n'autorisent pas l'exercice salarié de leur membre. Or, elles se caractérisent aussi par la faiblesse de leur effectif : on comptait, en 2014, 118 administrateurs judiciaires (moins d'un par tribunal de commerce) et 311 mandataires judiciaires. Cette faiblesse ne peut être mise sur le compte d'une réglementation malthusienne, puisque, contrairement aux officiers publics ou ministériels, ces professions sont placées sous le régime de la liberté d'installation.

Parmi les mesures envisagées par le projet de loi pour augmenter le nombre de professionnels en exercice 385 ( * ) , l'article 69 prévoyait initialement, comme on l'a vu, d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour autoriser le recours au salariat au sein de ces professions.

À l'initiative des rapporteurs, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a supprimé cette habilitation au profit de l'adoption, au présent article, d'un dispositif d'application directe.

Conçu de manière identique pour les administrateurs et les mandataires judiciaires, il reprend le régime applicable aux avocats ou aux officiers publics ou ministériels, en l'adaptant à la spécificité de leurs missions.

En effet, ces professionnels agissent sur mandat de justice : les tâches que comporte l'exécution de leur mandat leur incombent personnellement 386 ( * ) . Le présent article modifie les articles L. 811-1 et L. 812-1 du code de commerce afin de les autoriser à les déléguer, sous leur responsabilité, à leurs salariés 387 ( * ) . La liste nationale de qualification sur laquelle ces derniers seraient inscrits préciserait à cet égard leur qualité de salarié et le nom de leur employeur.

Les administrateurs et mandataires judiciaires salariés se verraient reconnaître la même garantie d'indépendance, en dépit de leur lien de subordination, que les autres professionnels du droit : aucune disposition de leur contrat de travail ne pourra porter atteinte aux règles déontologiques de leur profession. Les intéressés pourront à cet égard toujours refuser d'accomplir une mission qui leur paraîtrait contraire à leur conscience ou susceptible de porter atteinte à leur indépendance.

L'amendement initial des rapporteurs ne fixait pas de plafond d'emploi de salariés, comme c'est le cas pour les avocats. Il a été sous-amendé par le Gouvernement afin de retenir la règle du « un pour quatre » : une personne physique ne pourra recruter plus de quatre salariés, une société plus que quatre fois le nombre de ses associés.

Le même sous-amendement a repris la règle, instaurée par le présent texte pour toutes les autres professions, selon laquelle toute clause de non-concurrence est réputée non-écrite. Il s'agit d'éviter que les employeurs puissent interdire à leurs salariés de s'installer à leur tour.

Le surplus du régime juridique de salariat serait fixé par décret en Conseil d'État, en vertu d'un nouvel article L. 814-14 du code de commerce. Parmi les règles à concevoir figurent celles relatives aux litiges professionnels intervenant entre l'employeur et son salarié, pour lesquels une médiation préalable du président du conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires serait prévue, ainsi que celles relatives au licenciement de l'intéressé et à son retrait des listes nationales d'administrateur et de mandataire judiciaires.

II - La position de votre commission

Le développement du salariat au sein de ces deux professions est une solution pour compenser leur faible effectif. Toutefois, votre commission s'est interrogée sur la hauteur du plafond retenu. En effet, la compétence des administrateurs et mandataires judiciaires est nationale, ce qui permet à une structure de se voir délivrer des mandats de n'importe quel tribunal de commerce. La réputation joue un rôle important dans ces attributions, ainsi que l'importance de la structure en cause. Or, d'ores et déjà, ces professions se caractérisent, en dépit d'une totale liberté d'installation, par la rareté de celles-ci.

Le développement du salariat pourrait ainsi contrecarrer l'élan que le présent texte tente de donner à l'installation de nouveaux professionnels, car ceux-ci se verraient privés d'un nombre suffisant de mandats, attribués à des sociétés qui auraient quadruplé leur activité grâce au recrutement massif de salariés.

C'est pourquoi, conformément à ses votes précédents, à l'article 18, votre commission a adopté l'amendement de son rapporteur abaissant le plafond d'emploi de salariés à deux par titulaire ou associé.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Section 3 - Efficacité renforcée des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire

Article 70 A (art. L. 621-4 et L. 641-1 du code de commerce) - Facilitation de la désignation de plusieurs mandataires judiciaires et administrateurs judiciaires dans les procédures collectives

Objet : cet article vise à faciliter la désignation de plusieurs mandataires judiciaires et administrateurs judiciaires dès l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.

I - Le dispositif proposé

En application de l'article L. 621-4 du code de commerce, dans le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, le tribunal désigne un mandataire judiciaire et un administrateur judiciaire 388 ( * ) . Le premier est chargé d'agir dans l'intérêt collectif des créanciers et le second de surveiller et d'assister les dirigeants de l'entreprise dans leur gestion. À la demande du parquet, après avoir entendu les observations du débiteur, le tribunal peut désigner plusieurs administrateurs ou mandataires.

L'article L. 621-7 du code ajoute que le tribunal « peut, soit d'office, soit sur proposition du juge-commissaire ou à la demande du ministère public, procéder au remplacement de l'administrateur (...) ou du mandataire judiciaire ou encore adjoindre un ou plusieurs administrateurs ou mandataires judiciaires à ceux déjà nommés ». Le juge-commissaire peut être saisi par l'administrateur, le mandataire, un créancier désigné contrôleur de la procédure ou, s'agissant du remplacement, le débiteur lui-même.

Introduit par l'Assemblée nationale en commission, à l'initiative de notre collègue député Alain Tourret, rapporteur thématique, l'article 70 A du projet de loi propose que le tribunal puisse, dès le jugement d'ouverture de la procédure, désigner d'office, ou à la demande du débiteur, plus d'un administrateur ou mandataire, et plus seulement à la demande du parquet. Cette faculté doit avant tout permettre au tribunal d'apprécier dès le début de la procédure si la taille, la complexité ou les enjeux particuliers de l'affaire justifient la désignation de plusieurs administrateurs ou mandataires, sans faire usage de l'article L. 621-7, lequel intervient après l'ouverture.

L'article 70 A du projet de loi ajoute que la désignation de plusieurs administrateurs ou mandataires peut résulter de la demande d'un créancier poursuivant, alors que la sauvegarde ne peut être ouverte qu'à la demande du débiteur, mais pas d'un de ses créanciers. Votre rapporteur considère qu'il faut supprimer cette mention superflue.

S'agissant de la procédure de redressement judiciaire, le tribunal désigne dans le jugement d'ouverture, en application de l'article L. 631-9 du code de commerce, qui procède par renvoi à l'article L. 621-4, un mandataire judiciaire et un administrateur judiciaire, ce dernier étant chargé, selon la décision du tribunal, d'assister le débiteur dans la gestion de l'entreprise ou d'administrer directement l'entreprise. Le tribunal peut aussi désigner, à la demande du parquet ou d'office, plusieurs mandataires et administrateurs. L'article L. 621-7 précité est applicable au redressement judiciaire.

Le renvoi à l'article L. 621-4 opéré par l'article L. 631-9 permettra, en vertu de l'article 70 A du projet de loi, de désigner plusieurs administrateurs ou mandataires dès le jugement d'ouverture, à la demande du débiteur lui-même. Selon votre rapporteur, il y a lieu de prévoir une telle désignation à la demande du créancier poursuivant, puisque la procédure de redressement judiciaire peut être ouverte à la demande d'un créancier de l'entreprise, ce qui n'est pas le cas de la sauvegarde.

Enfin, s'agissant de la procédure de liquidation judiciaire, le tribunal désigne dans le jugement d'ouverture, en application de l'article L. 641-1, un mandataire judiciaire en qualité de liquidateur, chargé d'agir dans l'intérêt collectif des créanciers et d'administrer l'entreprise dans l'attente de sa liquidation. Dans certains cas 389 ( * ) , en application de l'article L. 641-10, il désigne également un administrateur judiciaire, chargé d'administrer l'entreprise. Il peut, d'office ou à la demande du parquet, en désigner plusieurs.

À l'instar de l'article L. 621-7 précité, l'article L. 641-1-1 dispose que le tribunal « peut, soit d'office, soit sur proposition du juge-commissaire ou à la demande du ministère public, procéder au remplacement du liquidateur (...) ou de l'administrateur s'il en a été désigné (...) ou encore adjoindre un ou plusieurs liquidateurs ou administrateurs à ceux déjà nommés ».

L'article 70 A du projet de loi prévoit que la désignation de plusieurs liquidateurs puisse également être demandée par le débiteur lui-même ou par le créancier poursuivant, qui a demandé l'ouverture de la procédure.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve pleinement la plus grande souplesse qui résulterait de l'article 70 A du projet de loi, pour permettre au tribunal de désigner plusieurs administrateurs judiciaires ou mandataires judiciaires dès le jugement d'ouverture de la procédure collective, en fonction de son appréciation des besoins de l'entreprise et des nécessités de la procédure.

Estimant qu'il y a lieu de ne permettre la saisine du tribunal par le créancier poursuivant, aux fins de désignation de plusieurs administrateurs judiciaires ou mandataires judiciaires, qu'en cas de redressement judiciaire et non de sauvegarde, votre commission a adopté un amendement en ce sens présenté par son rapporteur, corrigeant l'incohérence du texte sur ce point et modifiant en conséquence l'article L. 631-9 du code de commerce.

Par ailleurs, votre commission considère plus pertinent de permettre plus facilement la désignation de plusieurs administrateurs et mandataires, à la demande du parquet ou du débiteur ou bien d'office à l'appréciation du tribunal, en fonction des caractéristiques de l'entreprise concernée et des capacités des professionnels dont la désignation est envisagée, plutôt que de désigner de façon obligatoire dans certains cas, comme le prévoit l'article 69 du projet de loi, un deuxième administrateur et un deuxième mandataire, sans que cela soit toujours utile.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 70 (art. L. 631-19-2 [nouveau] et L. 661-1 du code de commerce) - Instauration de la possibilité pour le tribunal saisi d'une procédure de redressement judiciaire d'ordonner une augmentation de capital ou une cession des parts des actionnaires opposés au plan de redressement

Objet : cet article vise à instaurer, pour le tribunal saisi d'une procédure de redressement judiciaire d'une société employant au moins 150 salariés dont la cessation d'activité créerait un trouble grave à l'économie nationale ou régionale, la faculté d'ordonner une augmentation de capital ou la cession des titres des actionnaires ayant refusé un plan de redressement prévoyant l'entrée au capital de nouveaux actionnaires pour exécuter le plan.

I - La modification du capital d'une société dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire

En cas de redressement judiciaire, l'administrateur judiciaire désigné par le tribunal est chargé, avec le concours du débiteur, d'élaborer un projet de plan de redressement.

Lorsqu'ont été constitués les comités de créanciers 390 ( * ) , l'administrateur leur présente ses propositions en vue de l'élaboration du plan. En outre, tout créancier membre d'un comité de créanciers peut aussi soumettre un projet de plan alternatif, qui fait alors l'objet d'un rapport de l'administrateur. Les comités de créanciers doivent statuer sur le projet de plan élaboré par l'administrateur avec le débiteur ainsi que sur les éventuels plans alternatifs. Le tribunal statue ensuite sur le projet de plan approuvé par les comités de créanciers et le rend exécutoire et opposable.

Qu'il soit élaboré par l'administrateur judiciaire ou par un créancier, le projet de plan peut prévoir une modification de capital, auquel cas il doit être soumis à l'approbation non seulement des comités de créanciers, mais également de l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires (sociétés anonymes) ou de l'assemblée des associés (sociétés par actions simplifiées ou sociétés à responsabilité limitée). L'article L. 631-19 du code de commerce prévoit l'hypothèse où la modification du capital vise à permettre l'entrée au capital de nouveaux actionnaires qui s'engagent à exécuter le plan proposé, par exemple des créanciers. Cette hypothèse peut résulter de l'incapacité ou du refus des actionnaires en place de recapitaliser la société pour permettre sa continuation. Elle peut se traduire par une augmentation de capital au bénéfice de ces nouveaux actionnaires ou par une cession en leur faveur des titres détenus par les actionnaires en place 391 ( * ) . La conversion de créances en titres de capital est également possible.

Compte tenu des conséquences d'une telle entrée au capital sur le niveau de détention du capital et les droits de vote des actionnaires en place, ces derniers sont invités à l'approuver, en assemblée générale extraordinaire. L'approbation est l'hypothèse la plus fréquente, sans quoi le rejet du plan de redressement aurait pour conséquence nécessaire la liquidation judiciaire et la dévaluation définitive des titres de capital des actionnaires en place, ce qui ne correspondrait pas a priori à l'intérêt de ces derniers.

Dans certains rares cas toutefois, selon le Gouvernement, quand bien même cela conduirait à la liquidation judiciaire pure et simple de la société, il arrive que certains actionnaires s'opposent au plan de redressement qui prévoit l'entrée au capital de nouveaux actionnaires pour mettre en oeuvre le plan de redressement, avec de nouveaux capitaux, au point de conduire au rejet du plan et donc à la disparition de l'entreprise et de ses emplois. Cette hypothèse peut recouvrir le cas où un groupe de créanciers souhaite prendre le contrôle de la société en difficulté, ce qui peut supposer l'éviction ou tout au moins la dilution des actionnaires en place à défaut d'accord de leur part.

L'article 70 du projet de loi vise spécialement à surmonter une telle situation de blocage de la part d'actionnaires hostiles au plan et récalcitrants à leur propre éviction.

II - Le dispositif proposé

En cas de redressement judiciaire, dans l'hypothèse du rejet par les actionnaires d'un plan de redressement présenté par des tiers prévoyant une entrée de ces derniers au capital en contrepartie de leur engagement à mettre en oeuvre le plan - situation de l'article L. 631-19 précité -, l'article 70 du projet de loi permet au tribunal 392 ( * ) d'ordonner une augmentation de capital au bénéfice des tiers s'engageant à exécuter le plan ou la cession des titres des actionnaires opposants au bénéfice des mêmes tiers. On peut ainsi parler de « dilution forcée » des actionnaires opposants, du fait de l'augmentation de capital qui tendrait à réduire leur participation, ou de « cession forcée » de leurs actions. Par construction, un tel dispositif ne peut s'appliquer qu'aux entreprises sous forme de société, en particulier les sociétés par actions et les sociétés à responsabilité limitée. La faculté de demander la mise en oeuvre de cette procédure n'appartient qu'à l'administrateur judiciaire et au ministère public.

Le présent projet de loi institue cette procédure au sein d'un nouvel article L. 631-19-2 au sein du titre III, relatif au redressement judiciaire, du livre VI du code de commerce.

Compte tenu de l'atteinte ainsi portée au droit de propriété des actionnaires en place, le projet de loi tend à encadrer le dispositif de façon à ce que cette atteinte ne soit pas disproportionnée au regard de l'objectif jugé d'intérêt général de poursuite de l'activité et de maintien de l'emploi. Ainsi, cette procédure ne concernerait que des sociétés en redressement judiciaire et non en sauvegarde. Elle serait réservée aux entreprises employant au moins 150 salariés ou constituant, au sens du code du travail, une entreprise dominante 393 ( * ) d'une ou de plusieurs entreprises dont l'effectif total serait d'au moins 150 salariés et dont la cessation d'activité serait de nature à « causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale et au bassin d'emploi ». Elle ne pourrait être mise en oeuvre que si la modification du capital apparaît comme la « seule solution sérieuse » 394 ( * ) permettant d'éviter ce trouble, dans un délai d'au moins trois mois après le jugement d'ouverture de la procédure, alors que les possibilités de cession totale ou partielle de l'entreprise auront dû être examinées par le tribunal. Le tribunal devra justifier dans sa décision que les critères et les conditions permettant le recours à cette procédure sont bien remplis et sérieusement la motiver.

Pour mémoire, l'ordonnance n° 67-820 du 23 septembre 1967 tendant à faciliter le redressement économique et financier de certaines entreprises avait institué une « procédure de suspension provisoire des poursuites et d'apurement collectif du passif pour les entreprises en situation financière difficile mais non irrémédiablement compromise, dont la disparition serait de nature à causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale et pourrait être évitée dans des conditions compatibles avec l'intérêt des créanciers ». Cette procédure reposant sur le même critère de « trouble grave à l'économie nationale ou régionale » que celle instituée par le projet de loi devait être ouverte avant la cessation des paiements, donc hors de l'hypothèse actuelle du redressement judiciaire 395 ( * ) . Selon les informations communiquées à votre rapporteur, cette procédure de suspension des poursuites n'a été que très peu voire pas du tout utilisée. Elle a été abrogée par la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises.

Si les conditions prévues par le projet de loi sont réunies, le tribunal peut donc imposer la mise en oeuvre du projet de plan prévoyant l'entrée au capital de nouveaux actionnaires en vue de mettre en oeuvre le redressement de l'entreprise.

Deux mécanismes alternatifs s'offrent alors au tribunal pour assurer l'entrée au capital de ces nouveaux actionnaires et leur garantir la majorité des droits de vote, pour diriger l'entreprise et désigner ses dirigeants.

D'une part, le tribunal peut désigner un mandataire qui serait chargé de convoquer l'assemblée des actionnaires et de voter en lieu et place des actionnaires en place ayant refusé le plan, sous forme de mandat impératif, l'augmentation de capital refusée et prévue par le plan. Cette augmentation de capital au bénéfice des personnes qui se sont engagées à exécuter le plan peut être libérée par conversion des créances que ces personnes détiennent sur la société en redressement.

D'autre part, le tribunal peut ordonner, au profit des personnes qui se sont engagées à exécuter le plan, la cession de tout ou partie des titres des actionnaires ayant refusé la modification du capital prévue dans le projet de plan. D'une façon inutilement complexe selon votre rapporteur, dès lors que sont expressément visés en tout état de cause les actionnaires opposants, le projet de loi ajoute d'autres critères pour identifier les actions susceptibles de faire l'objet de cette « cession forcée » : la détention directe ou indirecte d'une fraction du capital conférant une majorité des droits de vote ou une minorité de blocage, ou bien la disposition de la majorité des droits de vote en application d'un accord avec d'autres actionnaires.

Une fois l'actionnariat de la société modifié par l'un ou l'autre de ces mécanismes, le projet de plan élaboré par les nouveaux actionnaires peut donc être adopté et arrêté par le tribunal.

Le projet de loi précise que les actionnaires en place avant la mise en oeuvre de ces mécanismes, autres que ceux dont les titres ont fait l'objet de la « cession forcée », disposent du droit de se retirer de la société. Cette exception au droit commun des sociétés semble justifiée à votre rapporteur, dans la mesure où ces actionnaires ont été contraints de devenir minoritaires par la décision du tribunal de confier, in fine , la direction de l'entreprise à de nouveaux actionnaires. Ces derniers seraient tenus de racheter les titres des actionnaires souhaitant utiliser cette faculté de retrait de la société.

Pour déterminer la valeur des titres faisant l'objet de la « cession forcée » comme des titres des actionnaires qui souhaitent se retirer, le projet de loi prévoit la désignation d'un expert, devant respecter le principe du contradictoire, par le président du tribunal statuant en la forme des référés. Aucun délai n'est fixé pour l'expertise.

S'agissant du déroulement de la procédure, votre rapporteur y voit un certain manque de lisibilité, accentué par la rédaction jugée perfectible du texte lui-même. Certes, pour décider la « dilution forcée » ou la « cession forcée », le tribunal doit statuer en présence du ministère public, et non après avis simplement du ministère public, ce qui est pertinent compte tenu des lourdes conséquences de sa décision. Les diverses personnes intéressées sont également entendues, dont les actionnaires concernés et les « créanciers ou tiers qui se sont engagés à exécuter le plan ».

En revanche, le tribunal serait d'abord saisi d'une demande de mise en oeuvre de cette procédure, par l'administrateur judiciaire ou le ministère public. Avant que le tribunal statue sur cette demande, devrait être réalisée l'expertise pour déterminer la valeur des titres susceptibles d'être cédés soit sur décision du tribunal soit ultérieurement par droit de retrait. Ensuite seulement le tribunal statuerait sur la demande et fixerait simultanément la valeur des titres au vu de l'expertise. Au vu de l'urgence qu'il y a souvent, en pratique, à régler la situation économique de l'entreprise en redressement judiciaire, votre rapporteur s'étonne de cette procédure, dont le déroulement peut être assez long, dès lors que le jugement de « dilution forcée » ou de « cession forcée » ne peut intervenir qu'après l'expertise 396 ( * ) .

En outre, par cette même décision, de façon quelque peu superflue selon votre rapporteur, le tribunal désignerait un mandataire de justice en vue de réaliser les opérations de cession. Si la cession au prix déterminé par l'expert ne pouvait s'opérer directement entre les parties, la partie la plus diligente aurait de toute façon la faculté de solliciter le tribunal pour qu'il désigne un mandataire en vue d'y procéder.

Par ailleurs, le projet de loi dispose que le tribunal serait tenu de consulter l'Autorité des marchés financiers (AMF) lorsqu'est concernée une société cotée. Cette consultation obligatoire permettrait notamment d'assurer une information appropriée du marché sur la situation de la société et de vérifier en amont les éventuels franchissements de seuil de participation par les nouveaux actionnaires, qui pourraient déclencher l'obligation de déposer une offre publique d'acquisition (OPA) de la société. Outre qu'il semble quelque peu théorique à votre rapporteur qu'une société cotée soit concernée par une telle procédure, il observe que l'article L. 621-20 du code monétaire et financier permet déjà, en tout état de cause, à toute juridiction d'appeler le président de l'AMF à présenter des conclusions lorsque l'affaire dont elle est saisie est en relation avec les compétences de l'Autorité. Votre rapporteur constate, de plus, que le droit des procédures collectives ne mentionne pas l'AMF, y compris dans les cas où une modification du capital est envisagée.

Pour que le tribunal puisse s'assurer de la bonne exécution du plan une fois les nouveaux actionnaires en place, le projet de loi met en place plusieurs dispositifs que votre rapporteur juge utiles, à la charge de ces nouveaux actionnaires. Le tribunal doit subordonner l'arrêt du plan à la conservation des titres par les nouveaux actionnaires pour une certaine durée qu'il fixe et ne peut excéder celle du plan. Il peut aussi subordonner l'arrêt du plan à la présentation par les nouveaux actionnaires de garanties financières suffisantes, par un organisme de crédit 397 ( * ) . L'arrêt du plan est conditionné par le paiement comptant du prix de cession des titres par les nouveaux actionnaires, sous peine de résolution de la cession, ce qui constitue une exigence pour les nouveaux actionnaires. Le commissaire à l'exécution du plan, désigné par le tribunal lorsqu'il arrête le plan, doit vérifier que les nouveaux actionnaires exécutent bien le plan et peut agir en justice si ce n'est pas le cas, prérogatives qui semblent déjà prévues dans le droit commun du redressement judiciaire s'agissant du commissaire à l'exécution du plan.

Reprenant là encore des dispositions déjà applicables dans le droit commun du redressement judiciaire, le projet de loi dispose que le tribunal peut modifier le plan et qu'il peut en prononcer la résolution si les nouveaux actionnaires n'exécutent pas leurs engagements.

Enfin, le projet de loi complète l'article L. 661-1 du code, relatif aux décisions judiciaires prises en matière de procédures collectives susceptibles de faire l'objet d'un appel et d'un pourvoi en cassation, pour y mentionner les décisions prises en matière de « dilution forcée » et de « cession forcée ».

Selon les informations fournies à votre rapporteur, le Gouvernement avait envisagé un tel mécanisme dans le cadre de l'habilitation à réformer les procédures collectives prévue par la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises. Toutefois, en raison des incertitudes pesant sur sa constitutionnalité, il y avait finalement renoncé dans l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives 398 ( * ) , sans pour autant y renoncer définitivement. Le présent dispositif est ainsi le fruit d'une réflexion qui s'est donc prolongée depuis l'année dernière.

Entendus par votre rapporteur, les représentants des tribunaux de commerce et des juges consulaires ont formulé des réserves à l'égard de cette procédure quelque peu exorbitante, sans pour autant la rejeter ou exclure d'y avoir recours dans certaines situations très particulières. Les universitaires entendus par votre rapporteur, de même, ne l'ont pas critiqué dans son principe au point d'en proposer la suppression, même si elle peut soulever quelques interrogations d'ordre constitutionnel.

II - Des interrogations sur la constitutionnalité de la procédure

La procédure instituée par le présent projet de loi soulève, selon votre rapporteur, des interrogations sérieuses quant à sa constitutionnalité, au regard du droit de propriété des actionnaires en place, qui se trouveraient évincés, directement ou indirectement, du fait de la décision du tribunal.

A. La « cession forcée » des parts des actionnaires opposés au plan

Le tribunal dispose aujourd'hui de la faculté d'ordonner la cession des titres de capital des dirigeants de l'entreprise, lorsqu'il subordonne l'adoption du plan à leur remplacement. Le prix de cession est fixé à dire d'expert. En dehors de ce cas très spécifique, il n'existe pas de possibilité de contraindre les actionnaires d'une entreprise en redressement judiciaire de céder leurs parts. Votre rapporteur relève, néanmoins, que la procédure de liquidation judiciaire consiste justement à ce que le tribunal puisse ordonner sa cession, ce qui peut s'analyser en une cession des parts des associés si l'entreprise concernée est une société.

La « cession forcée » des parts des actionnaires opposés au plan peut s'analyser en une atteinte à leur droit de propriété, sous forme en quelque sorte d'une expropriation. Un intérêt général existe toutefois, la continuité de l'activité d'une entreprise de taille importante. De plus, en pareil cas, les actionnaires ainsi expropriés bénéficient d'une contrepartie dans le prix de cession déterminé par le tribunal après expertise.

L'atteinte au droit de propriété des actionnaires en place, qui sont les propriétaires de l'entreprise, ne semble donc pas disproportionnée à votre commission au regard de l'intérêt général poursuivi et des garanties qui sont prévues par le projet de loi.

B. La « dilution forcée » des actionnaires opposés au plan

En l'état du droit, le tribunal ne peut ordonner une augmentation du capital de la société en redressement judiciaire que dans un seul cas, lorsque le montant des capitaux propres est inférieur à la moitié du capital social, du fait des pertes constatées dans les documents comptables. Dans ce cas, les actionnaires sont invités à reconstituer le capital à concurrence du montant proposé par l'administrateur judiciaire, dans la limite minimale de la moitié du capital social. Rien n'était toutefois prévu jusqu'à récemment en cas de refus des actionnaires de procéder à une telle augmentation de capital.

Or, dans l'hypothèse où le capital n'a pas été ainsi reconstitué, à la condition que le projet de plan prévoie une modification du capital en faveur de personnes qui s'engagent à respecter le plan, l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 précitée a donné à l'administrateur judiciaire la faculté de demander au tribunal la désignation d'un mandataire chargé de convoquer l'assemblée des actionnaires, mais aussi de voter à la place des actionnaires opposants sur la reconstitution du capital. Cette atteinte au droit de vote des actionnaires est ainsi prévue dans le cas très particulier de la nécessité de reconstituer le capital social : en droit commun des sociétés, en effet, une société dont les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social encourt la dissolution 399 ( * ) .

En dehors de ce cas spécifique, le droit des procédures collectives ne permet aucune augmentation de capital ordonnée par le tribunal. Une telle faculté, prévue par le projet de loi avec la « dilution forcée » constitue, selon votre rapporteur, une atteinte bien plus grave au droit de propriété des actionnaires en place que la « cession forcée ».

En effet, la « dilution forcée » prive les actionnaires de l'usage d'un élément substantiel du droit de propriété attaché à la détention des actions : le droit de vote, c'est-à-dire le droit de participer aux votes de l'assemblée, qui engagent la société. Le droit de vote constitue avec le droit de percevoir un dividende les attributs du droit de propriété de l'actionnaire.

De plus, cette atteinte au droit de vote est sans contrepartie telle qu'elle est organisée par le projet de loi. Les actionnaires ainsi dilués auront juste la possibilité de se retirer de la société.

III - Un doute sérieux sur la conventionnalité de la procédure

Outre l'interrogation constitutionnelle évoquée supra , le mécanisme de « dilution forcée » suscite également, selon votre rapporteur, une sérieuse interrogation quant à sa conventionnalité, au regard du droit de l'Union européenne et de la jurisprudence de sa Cour de justice.

Ainsi, la récente directive 2012/30/UE du 25 octobre 2012 relative aux sociétés 400 ( * ) , portant notamment sur les modifications de capital, qui n'a fait sur ce point que reprendre les termes de la directive antérieure 77/91/CEE du 13 décembre 1976 401 ( * ) , dispose dans son article 29 que « toute augmentation du capital doit être décidée par l'assemblée générale ». Cette disposition générale est interprétée très strictement par la Cour de justice, comme réservant cette prérogative de décider d'une augmentation de capital exclusivement aux actionnaires eux-mêmes, et non à une instance extérieure comme ce serait le cas avec le présent projet de loi, y compris dans le cas d'une entreprise en difficulté dont il s'agirait d'assurer la continuation 402 ( * ) .

Plus largement, la Cour de justice de l'Union européenne veille avec une grande vigilance au respect constant des droits des actionnaires, comme en atteste l'ensemble de sa jurisprudence en la matière.

Dans ces conditions, il apparaît clairement à votre rapporteur que le mécanisme de « dilution forcée », qui semble clairement incompatible avec le droit européen, présente un très sérieux risque juridique.

Ce risque juridique encouru est d'autant plus sérieux que l'on peut raisonnablement supposer que, dès leurs premières utilisations, les deux mécanismes institués par le présent projet de loi de « dilution forcée » et de « cession forcée » donneront lieu à une saisine du Conseil constitutionnel par la voie de question prioritaire de constitutionnalité et seront aussi contestés sur le fondement du droit européen des sociétés.

IV - La position de votre commission

Selon votre rapporteur, les deux mécanismes de « dilution forcée » et de « cession forcée » permettent d'aboutir à un résultat analogue, c'est-à-dire l'éviction des actionnaires opposés au plan et la prise de contrôle de la société par de nouveaux actionnaires qui se sont préalablement engagés à exécuter le plan de redressement qu'ils ont proposé, sous réserve de leur participation au capital.

Dans ces conditions, il a semblé préférable à votre commission de supprimer le mécanisme de « dilution forcée », dont le risque constitutionnel et conventionnel est très significatif. Sur proposition de son rapporteur, elle a adopté un amendement en ce sens, conservant la seule « cession forcée », mécanisme dont votre commission juge qu'il peut être utile dans certaines situations très spécifiques sans risque constitutionnel grave.

Toutefois, votre commission s'est interrogée sur la réelle pertinence d'instaurer une telle procédure, inspirée par des cas très peu nombreux. Si la loi doit être en mesure de s'adapter à la diversité des situations concrètes qu'elle a vocation à régir, il n'est pas satisfaisant d'y ajouter de nouveaux dispositifs à chaque fois que surgit une situation particulière.

Par ce même amendement, votre commission a cherché à encadrer d'une façon plus rigoureuse le mécanisme de « cession forcée » ainsi qu'à préserver les garanties pour les actionnaires évincés, de façon à en assurer la proportionnalité, au regard de l'atteinte au droit constitutionnel de propriété qu'il représente, compte tenu de l'objectif d'intérêt général poursuivi.

Au nom du principe de proportionnalité, le seuil des entreprises concernées serait relevé, de façon à correspondre davantage à la notion de « trouble grave à l'économie nationale ou régionale », sans quoi toute entreprise d'une certaine taille dans un bassin d'emploi serait potentiellement éligible à cette procédure. Le projet de loi vise les entreprises d'au moins 150 salariés, tandis que votre commission a préféré retenir des seuils déjà connus et plus objectifs, en cohérence, de plus, avec les seuils de compétence qu'elle a déjà établis pour les tribunaux de commerce spécialisés à l'article 66 du projet de loi : seraient concernées les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises 403 ( * ) , soit les sociétés employant au moins 250 salariés et présentant un total de bilan d'au moins 43 millions d'euros ou un chiffre d'affaires d'au moins 50 millions d'euros. Il s'agit ainsi de garantir l'existence d'un objectif d'intérêt général suffisant, c'est-à-dire le redressement des entreprises qui sont réellement les plus importantes, permettant de justifier une telle atteinte au droit de propriété des actionnaires ainsi expropriés.

Pour prendre en compte les groupes de sociétés, comme tente de le faire le projet de loi avec la notion d'entreprise dominante, issue du droit du travail mais inconnue en droit des procédures collectives, votre commission a prévu que la procédure s'appliquerait aux sociétés établissant des comptes consolidés si l'ensemble constitué par les entreprises comprises dans la consolidation représente un nombre de salariés, un chiffre d'affaires ou un total de bilan correspondant aux seuils prévus ci-dessus.

Par ailleurs, par ce même amendement, votre commission a souhaité réécrire la procédure pour la rendre plus claire, plus simple et plus lisible, sans remettre en cause les garanties prévues pour les actionnaires dont les parts font l'objet de la cession ordonnée par le tribunal, tout en reprenant les mécanismes procéduraux existant déjà en matière de procédures collectives.

En particulier, le tribunal devrait exiger de la part des personnes qui se sont engagées à exécuter le plan des garanties suffisantes correspondant à l'ensemble de leurs engagements. Il ne s'agirait plus d'une simple faculté de demander des garanties correspondant à leurs seuls engagements financiers. Les actionnaires repreneurs devraient justifier de garanties économiques et sociales au sens large.

Dans la logique du texte, votre commission est attachée à la faculté offerte aux actionnaires restants de pouvoir se défaire de leurs parts auprès des nouveaux actionnaires, qui seraient tenus de leur racheter. Cette faculté ne doit pas être limitée au moment où le tribunal est saisi de la demande de « cession forcée », mais doit continuer à pouvoir s'exercer ultérieurement, dans un délai qui serait fixé par le tribunal, pour tenir compte des effets dans le temps de la réorganisation du capital. Certains actionnaires restés en place pourront en effet préférer sortir du capital au vu des décisions prises par les nouveaux actionnaires. Ce délai serait nécessairement limité.

Votre commission a également souhaité lever certaines difficultés ou ambiguïtés résultant de la rédaction du texte. Il en est ainsi, par exemple, de l'obligation pour le tribunal de statuer par un seul jugement sur la cession et sur la valeur des parts ainsi cédées ou susceptibles de l'être par usage du droit de retrait des autres actionnaires, alors que l'évaluation de la valeur de ces parts ne peut se faire utilement qu'après la décision de cession, laquelle doit être prise le plus rapidement possible compte tenu de la situation de l'entreprise. Attendre l'expertise de la valeur des parts pour statuer sur la cession constituerait une perte de temps.

S'agissant de l'évaluation de la valeur des parts, votre commission a préféré renvoyer au droit commun du dire d'expert en la matière, à savoir l'article 1843-4 du code civil, qui prévoit déjà la désignation par le président du tribunal d'un expert, lequel doit s'en tenir à la volonté des parties, s'il en existe une, en matière de valeur des parts en cas de cession 404 ( * ) .

Par ce même amendement, votre commission a également supprimé des dispositions inutiles, à l'instar de la consultation obligatoire de l'AMF, ou redondantes, à raison des dispositions du livre VI du code de commerce déjà applicables au redressement judiciaire. Il en est ainsi, par exemple, des dispositions régissant la mission du commissaire à l'exécution du plan ou de la possibilité pour le tribunal de modifier le plan. Par cohérence avec des dispositions analogues du livre VI, elle a exclu l'application de la « cession forcée » aux professions réglementées, en raison des règles restrictives pour l'accès au capital des sociétés constituées pour l'exercice de ces professions.

Enfin, s'agissant de l'entrée en vigueur de cette nouvelle procédure, votre commission a prévu qu'elle ne serait applicable qu'aux procédures de redressement judiciaire ouvertes après la publication de la présente loi, pour éviter toute remise en cause rétroactive des droits des actionnaires dans le cadre des procédures en cours.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 70 bis (art. L. 653-8 du code de commerce) - Restriction des conditions dans lesquelles le tribunal peut prononcer une sanction d'interdiction de gérer une entreprise

Objet : cet article vise à limiter la possibilité pour le tribunal de prononcer une sanction d'interdiction de gérer à l'encontre d'un chef d'entreprise qui a omis de demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire dans les quarante-cinq jours de la cessation des paiements de son entreprise.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative de notre collègue député Alain Tourret, rapporteur thématique, l'article 70 bis du projet de loi vise à restreindre la possibilité pour le tribunal de prononcer une sanction d'interdiction de gérer à l'encontre d'un chef d'entreprise ayant omis de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, comme l'exige la loi, aux seuls cas où cette omission a été commise « sciemment ».

La sanction d'interdiction de gérer peut être prononcée à l'encontre des dirigeants d'une entreprise en procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, à l'instar de la faillite personnelle.

En application de l'article L. 653-8 du code de commerce, la sanction d'interdiction de gérer consiste plus précisément en « l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci ».

Cette sanction peut être prononcée par le tribunal dans d'autres cas : il peut la prononcer à la place de la sanction de faillite personnelle, auquel cas elle constitue une peine plus légère ; il peut également la prononcer à l'encontre d'une personne qui a fait obstacle à la mission de l'administrateur ou du mandataire judiciaire, en omettant sciemment de leur communiquer les informations nécessaires à leur mission.

Votre rapporteur signale d'ailleurs qu'un fichier national automatisé des interdits de gérer (FNIG) a été créé par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives (articles L. 128-1 à L. 128-5 du code de commerce). La gestion de ce fichier est une « mission de service public assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce à ses frais et sous sa responsabilité ». L'objectif du FNIG est de lutter contre les fraudes, de prévenir l'infraction consistant à gérer une entreprise en violation d'une interdiction de gérer, par exemple en essayant de créer une entreprise dans une autre région, et de favoriser l'exécution des sanctions d'interdiction de gérer.

II - La position de votre commission

Si votre commission souscrit pleinement à l'idée selon laquelle la bonne foi du chef d'entreprise doit être prise en compte par le tribunal en cas d'ouverture d'une procédure collective, elle considère qu'il appartient au seul tribunal d'apprécier dans quelle mesure il doit la prendre en compte, en raison de la nature même des responsabilités du chef d'entreprise.

En effet, il appartient au tribunal d'apprécier souverainement si la bonne foi du chef d'entreprise permet de ne pas prononcer cette sanction ou si son incapacité à gérer une entreprise, en dépit même de sa bonne foi, doit conduire à l'écarter de la gestion de toute entreprise, dans l'intérêt même de la vie économique. En effet, dès lors que toute personne peut librement créer une entreprise, votre rapporteur estime effectivement préférable de garder la possibilité d'écarter de la gestion de toute entreprise une personne dont le manque de compétence aura conduit son entreprise à de graves difficultés. C'est le sens du régime de sanction des dirigeants des entreprises concernées par une procédure collective.

Dans le cas présent, demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire dans les quarante-cinq jours de la cessation des paiements, laquelle se caractérise par l'insuffisance de l'actif disponible pour couvrir le passif exigible 405 ( * ) , est une obligation légale - de façon à ce que puisse être réalisé le traitement judiciaire des entreprises en difficulté, afin d'essayer de permettre la poursuite de l'activité, s'il y a lieu, le maintien de l'emploi et, à tout le moins, l'apurement du passif - que tout chef d'entreprise doit pouvoir repérer.

En tout état de cause, le tribunal dispose d'ores et déjà de la faculté d'apprécier dans les faits la bonne foi du chef d'entreprise, dans la mesure où le code de commerce dispose qu'il « peut » prononcer cette sanction.

En conséquence, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement visant à supprimer cet article.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 70 ter - Habilitation en vue de modifier le régime applicable au gage de meubles corporels dans le code civil et au gage des stocks dans le code de commerce

Objet : cet article tend à habiliter le Gouvernement en vue de réformer par ordonnance les règles applicables au gage de meubles corporels définies par le code civil, les règles applicables au gage des stocks définies par le code de commerce, ainsi que les règles applicables au gage de meubles corporels et au gage des stocks dans le cadre des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises.

I - Le dispositif proposé

Introduit par l'Assemblée nationale, en commission, à l'initiative du Gouvernement, l'article 70 ter du projet de loi sollicite une habilitation, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, en vue de clarifier les règles du gage de meubles corporels fixées par le code civil et les règles du gage des stocks fixées par le code de commerce, pour les rapprocher des règles du pacte commissoire et de celles régissant le régime de la dépossession et pour favoriser le développement du financement sur stock. L'habilitation est aussi sollicitée en vue de modifier le régime du gage de meubles corporels et du gage des stocks dans le cadre des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises.

Le délai d'habilitation est fixé à six mois. En vertu de l'article 106 du projet de loi, le projet de loi de ratification de l'ordonnance devra être déposé devant le Parlement dans les cinq mois de la publication de l'ordonnance.

Pour mémoire, selon l'article 2333 du code civil, « le gage est une convention par laquelle le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers corporels, présents ou futurs ». Le gage peut être conclu avec ou sans dépossession du bien gagé entre les mains du créancier bénéficiaire.

Votre rapporteur déplore la rédaction insuffisamment claire de cette habilitation, qui ne permet pas d'en comprendre véritablement les finalités.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, il s'agit en réalité de réformer le régime applicable au gage des stocks, tel qu'il est défini au chapitre VII du titre II du livre V du code de commerce 406 ( * ) , pour pouvoir le rapprocher du régime de droit commun du gage de meubles corporels défini au chapitre II du sous-titre II du titre II du livre IV du code civil 407 ( * ) , afin de le rendre plus efficace pour permettre aux entreprises de se financer davantage à l'aide de leurs stocks grâce au mécanisme du gage des stocks.

L'article L. 527-1 du code de commerce dispose ainsi que tout crédit consenti à une entreprise par un établissement de crédit peut être « garanti par un gage sans dépossession des stocks » détenus par l'entreprise. Constitué par acte sous seing privé, le gage doit être inscrit sur un registre tenu par le greffier du tribunal de commerce pour être valable. L'article L. 527-2 dispose quant à lui qu'« est réputée non écrite toute clause prévoyant que le créancier deviendra propriétaire des stocks en cas de non-paiement de la dette exigible par le débiteur », dérogeant ainsi au droit commun du gage en excluant le pacte commissoire.

Tel qu'il est ainsi défini par le code de commerce, avec exclusion de la dépossession comme du pacte commissoire, ce régime du gage des stocks a été critiqué lors des auditions de votre rapporteur, au point de s'interroger sur la pertinence de son maintien, à côté du régime de droit commun.

Dans le régime de droit commun du gage de meubles corporels, qui pourrait sembler applicable aux stocks d'une entreprise en cas d'accord avec l'établissement de crédit, le débiteur et le créancier gagiste ont la faculté de conclure un pacte commissoire. Ainsi, selon l'article 2348 du code civil, « il peut être convenu, lors de la constitution du gage ou postérieurement, qu'à défaut d'exécution de l'obligation garantie le créancier deviendra propriétaire du bien gagé ». De plus, le régime de droit commun permet la dépossession, laquelle constitue également une garantie importante pour le créancier gagiste, qui a la possibilité d'être en possession du bien gagé. La combinaison des deux lui permet plus facilement d'accepter le gage comme garantie de sa créance.

Or, dans un arrêt de sa chambre commerciale du 19 février 2013, la Cour de cassation a exclu l'application du régime de droit commun défini par le code civil, incluant le pacte commissoire et le gage avec dépossession, dans les cas relevant du régime défini par le code de commerce 408 ( * ) . Elle a jugé que les deux régimes étaient exclusifs l'un de l'autre. La Cour a ainsi exclu la possibilité, dans le cas d'un gage constitué sur des stocks par une entreprise au bénéfice d'un établissement de crédit, qu'il y ait dépossession du bien gagé au profit du créancier et que celui-ci puisse devenir propriétaire du bien gagé si son débiteur n'a pas exécuté l'obligation garantie par le gage.

Dans ces conditions, le gage des stocks s'avère peu intéressant pour le financement des entreprises. Dès lors que l'établissement de crédit sait qu'il ne pourra pas devenir propriétaire des stocks en cas de défaillance de l'entreprise dans le remboursement du crédit qu'il lui a accordé, il n'y guère lieu qu'il accepte ce mécanisme pour garantir un crédit. L'absence de gage avec dépossession, dans cette hypothèse, semble moins problématique à votre rapporteur. La jurisprudence de la Cour de cassation constitue donc un frein à l'accès des entreprises au crédit sur stocks et donc au financement par le crédit bancaire.

L'objectif de l'habilitation est donc de surmonter cette jurisprudence restrictive de la Cour de cassation, afin de permettre le pacte commissoire et la dépossession dans le régime du gage des stocks du code de commerce, en rapprochant celui-ci du régime de droit commun du code civil.

L'objectif économique visé par cette habilitation est de favoriser le financement des entreprises par le mécanisme du gage des stocks, y compris dans le cadre des procédures collectives du livre VI du code de commerce, ce qui constitue le second volet de l'habilitation. Un mécanisme plus efficace de gage des stocks, adapté aux spécificités des procédures collectives, pourrait effectivement permettre de trouver des financements en vue de la continuité de l'activité de l'entreprise, maintenir l'emploi et apurer le passif, qui sont les trois objectifs de ces procédures. Ce second volet de l'habilitation ne précise pas toutefois ces finalités.

II - La position de votre commission

Si votre commission souscrit à l'objectif recherché par l'habilitation, elle déplore qu'une telle modification circonscrite du code de commerce ne soit pas directement proposée par le Gouvernement par voie d'amendement.

Afin de préciser la rédaction de l'habilitation et d'exprimer de façon plus claire les objectifs visés, votre commission a adopté un amendement présenté par son rapporteur.

Ainsi modifiée, l'habilitation vise, d'une part, à rapprocher le régime applicable au gage des stocks défini par le code de commerce du régime de droit commun du gage de meubles corporels défini par le code civil, pour le clarifier et pour rendre possible le pacte commissoire, en vue de favoriser le financement des entreprises sur stocks, et, d'autre part, à modifier le régime applicable au gage de meubles corporels et au gage des stocks dans le cadre des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises, en vue de favoriser la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

TITRE III

TRAVAILLER
CHAPITRE IER

Exceptions au repos dominical et en soirée

Depuis la loi du 13 juillet 1906 409 ( * ) , tous les salariés bénéficient d'un repos hebdomadaire d'une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives, distinct du repos quotidien de onze heures . Cette loi, si elle disposait que ce repos devait être donné le dimanche , comportait déjà des dérogations pour certains secteurs d'activité (hôtellerie, restauration, établissements culturels, etc.). Elle permettait également à une entreprise, au cas où l'absence de tous ses salariés le dimanche « serait préjudiciable au public ou compromettrait son fonctionnement normal », de demander au préfet l'autorisation d'ouvrir le dimanche .

À partir de cette date, et jusqu'à la loi « Mallié » du 10 août 2009 410 ( * ) , la législation a évolué de manière peu ordonnée , aboutissant à créer une réglementation manquant de lisibilité et qui, sur le plan social, n'est pas harmonisée . Ainsi à l'heure actuelle cohabitent des dérogations permanentes , qui sont de droit, des dérogations conventionnelles , sur la base d'un accord d'entreprise, et des dérogations temporaires , accordées par le préfet ou le maire.

Selon la direction de l'animation, de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail 411 ( * ) , 29 % des salariés ont travaillé au moins un dimanche en 2011 , soit près de 6,5 millions de personnes . 13,2 % des salariés, soit 3 millions de personnes , travaillent le dimanche de manière habituelle. Dans le secteur du commerce de détail, 36,8 % des salariés ont au moins travaillé une fois le dimanche.

Il faut également rappeler que ces règles relatives au repos dominical ne s'appliquent pas aux non-salariés ainsi qu'aux commerces n'ayant pas d'employés.

A. Les dérogations permanentes de droit

En application de l'article L. 3132-12 du code du travail, certains établissements « dont le fonctionnement ou l'ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l'activité ou les besoins du public » peuvent attribuer à leurs salariés le repos hebdomadaire par roulement . La liste de ces activités est définie par décret et figure à l'article R. 3132-5. Elle comporte plusieurs dizaines de domaines industriels , de la fabrication de dynamite à celle de paille pour chapeaux, ainsi que de nombreuses activités de services, des entreprises de pompes funèbres aux magasins de fleurs naturelles. Y figurent également depuis 2008 les magasins d'ameublement , à la suite de l'adoption d'un amendement sénatorial 412 ( * ) . La loi ne prévoit pas de compensation spécifique pour les salariés concernés.

Par ailleurs, les commerces de détail alimentaire bénéficient d'une dérogation spécifique. Ils peuvent en effet ouvrir de droit le dimanche jusqu'à treize heures , et non plus midi depuis la loi « Mallié » (article L. 3132-13).

B. Les dérogations conventionnelles

Dans l'industrie , un accord de branche étendu ou un accord d'entreprise peut prévoir que le travail est réalisé de manière continue et accorder en conséquence un repos hebdomadaire par roulement. Une telle organisation doit être justifiée par des « raisons économiques » (article L. 3132-14).

Si aucun accord n'a pu être conclu, l'inspecteur du travail peut autoriser une dérogation au repos dominical si elle tend « à une meilleure utilisation des équipements de production et au maintien ou à l'accroissement du nombre d'emplois » (article R. 3132-9), dès lors que les délégués syndicaux et le comité d'entreprise ont été consultés.

Une équipe de suppléance peut être mise en place pour remplacer un groupe de salariés lors de sa journée de repos et donc bénéficier d'un repos hebdomadaire fixé à un autre jour que le dimanche (article L. 3132-16), tout en bénéficiant d'une rémunération majorée d'au moins 50 % (article L. 3132-19).

C. Les dérogations accordées par le préfet ou le maire

À sa demande, ou si elle se situe dans une zone géographique dans laquelle, pour des raisons économiques , culturelles ou touristiques , le législateur a estimé qu'il pouvait être dérogé au repos dominical, une entreprise peut ouvrir le dimanche. Plusieurs cas de figure se chevauchent, sans que le régime des compensations pour les salariés soit homogène.

La première dérogation est héritée de la loi de 1906 et concerne les établissements par lesquels le repos simultané des salariés serait « préjudiciable au public ou compromettrait leur fonctionnement normal » (article L. 3132-20).

La seconde , issue de la loi « Mallié », concerne les établissements de vente au détail se trouvant dans des « périmètres d'usage de consommation exceptionnel » ( PUCE ), qui sont notamment caractérisés par des habitudes de consommation dominicale et une importante clientèle. Définis par le préfet sur demande du conseil municipal pour une durée de cinq ans, ils se situent dans des aires urbaines de plus d'un million d'habitants (article L. 3132-25-1).

Dans ces deux cas, l'ouverture dominicale est conditionnée à la signature d'un accord collectif ou, à défaut, à une décision unilatérale de l'employeur validée par référendum fixant des contreparties en faveur des salariés privés du repos dominical (article L. 3132-25-3). Seuls les salariés volontaires travaillent le dimanche, et le refus de renoncer à son repos dominical ne peut constituer ni un motif de refus d'embauche, ni un motif de sanction ou de licenciement (article L. 3132-25-4). Les salariés volontaires bénéficient d'une priorité pour obtenir un emploi ne comportant pas de travail dominical et peuvent, chaque année, renoncer à travailler trois dimanches de leur choix. Ils peuvent à tout moment demander, avec un délai de prévenance de trois mois, de cesser de travailler le dimanche.

Une troisième dérogation concerne les zones d'intérêt touristique ou thermales ainsi que les « zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente », définies par le préfet sur proposition du maire. Les commerces de détail peuvent y ouvrir le dimanche. En revanche, et contrairement aux PUCE, ils n'ont aucune obligation d'offrir des compensations , sous forme salariale ou de temps de repos, à leurs employés (article L. 3132-25).

Enfin, chaque maire peut accorder, jusqu'à cinq fois par an , l'autorisation aux commerces de sa commune d'ouvrir le dimanche (article L. 3132-26). La loi fixe le niveau minimal des contreparties que perçoivent les salariés travaillant lors de ces « dimanches du maire ». Leur rémunération est doublée et ils bénéficient d'un repos compensateur équivalent (article L. 3132-27).

Les « dimanches du maire »

A son article 5, la loi du 13 juillet 1906 disposait que « dans tout établissement où s'exerce un commerce de détail et dans lequel le repos hebdomadaire aura lieu le dimanche, ce repos pourra être supprimé lorsqu'il coïncidera avec un jour de fête locale ou de quartier désigné par un arrêté municipal ». Ce régime dérogatoire ne connaissait aucun plafond annuel et ne prévoyait aucune contrepartie sociale obligatoire pour les salariés concernés.

Dans une décision du 22 janvier 1931 413 ( * ) , le Conseil d'État a estimé qu'à Paris, les dimanches précédant Pâques, la Toussaint, Noël et le nouvel an n'étaient pas des fêtes locales. Il a par conséquent annulé l'arrêté du préfet de police qui leur donnait ce caractère et autorisait l'ouverture des commerces à ces dates.

En réaction à cette jurisprudence, qui a rendu inopérant ce motif de dérogation dans les grandes villes, le législateur a réformé le régime des autorisations ponctuelles d'ouverture dominicale accordées par le maire. La loi du 18 décembre 1934 414 ( * ) a autorisé ce dernier (ou le préfet de police à Paris) à supprimer le repos dominical dans les magasins de commerce de détail à trois reprises dans l'année, après avoir recueilli l'avis des représentants des salariés et des employeurs.

Visant à « tenir compte des besoins du public » 415 ( * ) et à protéger le commerce de détail de la crise qu'il traversait alors, cette loi renforce également les droits des salariés travaillant le dimanche puisqu'elle leur octroie une double contrepartie : un doublement de la rémunération ainsi qu'un repos compensateur, qui doit être donné le jour d'une fête légale si le dimanche travaillé la précède.

La loi du 20 décembre 1993 a porté le nombre de ces « dimanches du maire » à cinq, tandis que la recodification du code du travail en 2008 puis la loi « Mallié » du 10 août 2009 ont simplement apporté des adaptations rédactionnelles à ces dispositions, qui sont dans leur essence inchangées depuis plus de quatre-vingt ans.

Source : commission spéciale du Sénat

Par ailleurs, le préfet peut, dans une zone géographique restreinte, prononcer la fermeture d'un secteur d'activité à la même date chaque semaine afin que le repos hebdomadaire soit unifié. En cas d'accord local entre les partenaires sociaux d'une même profession sur les conditions de mise en oeuvre de ce repos hebdomadaire, il peut prendre un arrêté de fermeture de l'ensemble des commerces de cette profession situés dans une même zone géographique (article L. 3132-29), qu'ils emploient ou non des salariés.

Article 71 (art. L. 3132-21 du code du travail) - Fixation d'une durée maximale de trois ans pour les dérogations individuelles ou sectorielles au repos dominical accordées par le préfet

Objet : cet article établit une limitation de la durée des dérogations au repos dominical que le préfet peut accorder aux établissements dont la fermeture le dimanche serait préjudiciable au public ou compromettrait leur fonctionnement normal.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de l'article 71 modifie l'intitulé du paragraphe de la sous-section du code du travail dans lequel figurent les dérogations au repos dominical qui ne sont ni de droit, ni conventionnelles, c'est-à-dire celles qui relèvent du préfet ou du maire. Jusqu'à présent regroupées sous la dénomination « dérogations temporaires au repos dominical », elles deviennent les « autres dérogations au repos dominical ».

Le paragraphe II de l'article rétablit l'article L. 3132-21 du code du travail, qui avait été supprimé par la loi « Mallié » 416 ( * ) du 10 août 2009 et qui prévoyait que les autorisations temporaires ou annuelles d'ouverture le dimanche accordées aux établissements dont la fermeture serait préjudiciable au public ou compromettrait leur fonctionnement normal devaient être d'une durée limitée . Cette loi avait inscrit cette disposition au premier alinéa de l'article L. 3132-25-4, qui rappelle également que dans ces cas de figure le volontariat des salariés est la règle.

Cet article L. 3132-25-4 étant modifié par l'article 77 du projet de loi, l'article L. 3132-21, dans sa nouvelle rédaction, reprend le contenu de son premier alinéa tout en encadrant davantage cette dérogation au repos dominical. Il prévoit en effet qu'elle ne peut avoir une durée supérieure à trois ans . Confirmant le droit existant, toute décision préfectorale l'autorisant doit être précédée d'une concertation puisque les avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie, de la chambre des métiers et de l'artisanat et des syndicats d'employeurs et de salariés de la commune doivent avoir été recueillis.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté deux amendements , l'un rédactionnel de ses rapporteurs et l'autre, de nos collègues Alain Tourret et Joël Giraud, prévoyant que l'avis de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dont la commune est membre doit être sollicité par le préfet avant d'accorder une dérogation au repos dominical à un établissement.

Lors de l'examen du texte dans l'hémicycle, deux amendements des rapporteurs de la commission spéciale ont été adoptés : le premier précise que c'est l'avis de l'EPCI à fiscalité propre qui doit être recueilli et le second prévoit qu'en cas d'urgence , et dans la limite de trois dimanches par an, le préfet peut autoriser l'ouverture dominicale sans que les consultations préalables obligatoires aient été réalisées.

III - La position de votre commission

Cet article 71 confirme le droit existant sans le remettre en cause. Il est l'un des éléments de la réorganisation formelle , au sein du code du travail, des dispositions relatives aux dérogations au repos dominical entreprise par ce projet de loi.

La fixation d'une durée maximale de trois ans pour les dérogations préfectorales reposant non pas sur une zone géographique mais sur les caractéristiques mêmes de l'activité d'une entreprise semble appropriée à votre rapporteur : elle devrait permettre de réaliser leur évaluation une fois leur terme arrivé et ainsi de mieux mesurer l'intérêt de leur renouvellement, si celui-ci est demandé.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, à Paris, le nombre de demandes s'établit en moyenne à 150 par an, alors qu'il varie de 30 à 50 dans les autres départements franciliens. 47 établissements disposent à Paris d'une dérogation de longue durée, c'est-à-dire selon la pratique actuelle de trois ans, dans des secteurs aussi variés que la vente de gaz, la librairie ou les gardiens-concierges. Les dérogations accordées en application de l'article L. 3132-20 sont donc dans leur très grande majorité ponctuelles, et peuvent également apporter une solution aux difficultés rencontrées par des commerces qui, voisins d'une zone dérogatoire au repos dominical, subissent un préjudice en raison de la concurrence des commerces qui y sont ouverts le dimanche.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 72 (art. L. 3132-24 du code du travail) - Dérogation au repos dominical dans les zones touristiques internationales

Objet : cet article institue des zones touristiques internationales, délimitées par les ministres du travail, du tourisme et du commerce, dans lesquelles le repos hebdomadaire peut être donné aux salariés par roulement, un autre jour que le dimanche.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de l'article 72 modifie l'organisation du paragraphe du code du travail 417 ( * ) relatif aux dérogations au repos dominical qui ne sont ni de droit, ni conventionnelles en y insérant une nouvelle catégorie : les dérogations sur un fondement géographique.

Son paragraphe II rétablit l'article L. 3132-24 du code, abrogé par le Conseil constitutionnel dans sa décision 418 ( * ) du 4 avril 2014 en raison de l'atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif et à l'équilibre des droits des parties que représentait le caractère suspensif des recours déposés contre les autorisations d'ouverture dominicale délivrées par le préfet en application de l'article L. 3132-20 419 ( * ) . Dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 3132-24 a un objet différent : il crée des zones touristiques internationales (ZTI).

Dans ces zones, les salariés des établissements de vente au détail « qui mettent à disposition des biens et des services » peuvent se voir accorder le repos hebdomadaire par roulement dès lors qu'un accord collectif prévoit des compensations en faveur des salariés privés du repos dominical. Le travail le dimanche ne peut y être imposé aux salariés, de même que leur refus ne constitue ni une faute, ni un motif de licenciement.

Les ZTI sont délimitées par les ministres chargés du travail, du tourisme et du commerce , après avoir consulté le maire de la commune, le cas échéant le président de l'établissement public de coopération intercommunale ainsi que les organisations représentant les employeurs et les salariés. Deux critères essentiels sont mis en avant pour définir des ZTI : leur « rayonnement international » ainsi que « l'affluence exceptionnelle » de touristes, en particulier étrangers. Les modalités d'application de l'article sont renvoyées à un décret en Conseil d'État.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté quatre amendements rédactionnels à cet article.

Lors de l'examen du projet de loi en séance plénière, l'Assemblée nationale a complété cet article par deux amendements de nos collègues députés membres du groupe SRC. Elle a précisé que ces ZTI devraient être déterminées non plus seulement sur la base de leur rayonnement international mais également en fonction de l'affluence exceptionnelle de touristes résidant exclusivement hors de France et de l'importance de leurs achats . Elle a également institué une procédure d'évaluation de chaque ZTI trois ans après sa création par la remise d'un rapport au Parlement mesurant son impact économique et social.

III - La position de votre commission

La France a accueilli 84,7 millions de touristes étrangers en 2013, pour des recettes estimées à 42,7 milliards d'euros 420 ( * ) . Première destination touristique mondiale , devant les États-Unis et l'Espagne, elle ne figure qu'au troisième rang du classement réalisé sur la base des recettes tirées du tourisme international, loin derrière les États-Unis (130,4 milliards d'euros). En Ile-de-France, 414 000 emplois sont directement liés au tourisme, soit plus de 9 % de l'emploi salarié de la région.

Le tourisme est une activité particulièrement importante pour Paris et sa région : plus de 38 millions de nuitées sont le fait d'une clientèle internationale. Elle est attirée par la richesse de son patrimoine historique et culturel mais également par son offre commerciale , reflet d'un savoir-faire reconnu dans l'industrie du luxe et du rayonnement mondial de plusieurs groupes français dans ce domaine. Atout pour l'attractivité française et facteur de croissance économique reconnu, le tourisme international en France dispose pourtant encore d'un important potentiel de développement.

Comme le souligne le rapport Bailly, la France n'est que le neuvième pays en matière de recettes par visiteur 421 ( * ) . Confronté au développement de destinations concurrentes et à l'émergence d'une nouvelle clientèle issue d'Asie ou d'Amérique du Sud, notre pays ne serait pas suffisamment parvenue à « faire de sa capitale un pôle d'attractivité commerciale », et ce alors que nos voisins assouplissent les conditions d'ouverture des commerces le dimanche pour tenir compte de ces évolutions. Alors que la dépense moyenne par jour d'un touriste italien à Paris est de 119 euros et que celle d'un anglais est de 154 euros , celle d'un chinois est de 185 euros et celle d'un japonais de 214 euros 422 ( * ) . Ce constat met en évidence qu'à côté de la visite des musées et des lieux culturels, le « shopping » est devenu une activité touristique à part entière.

Dans de nombreuses villes de France, et en particulier à Paris, des blocages politiques rendent inopérante la réglementation actuelle en matière de dérogation au repos dominical pour des motifs touristiques et ne permettent pas d'apporter une réponse satisfaisante aux besoins de cette clientèle internationale, qui pourrait à l'avenir faire le choix de se rendre à Londres, Rome, Madrid ou encore Barcelone. Paris ne compte ainsi que sept zones touristiques d'affluence exceptionnelle dans lesquelles, en application de l'article L. 3132-25 du code du travail, les commerces peuvent ouvrir le dimanche.

Les zones touristiques à Paris

- La rue de Rivoli, dans sa partie comprise entre la rue de l'Amiral-de-Coligny et la place de la Concorde (1er arrondissement) ;

- La place des Vosges et la rue des Franc-Bourgeois (3ème et 4ème arrondissements) ;

- La rue d'Arcole (4ème arrondissement) ;

- L'avenue des Champs-Élysées (8ème arrondissement) ;

- Le boulevard Saint-Germain, dans sa partie comprise entre la rue des Saints-Pères et la place Saint-Germain-des-Prés (6ème arrondissement) ;

- Le Viaduc des Arts (12ème arrondissement) ;

- Le quartier de la Butte Montmartre (18ème arrondissement).

Source : commission spéciale du Sénat

Certaines de ces zones sont occupées, dans leur très grande majorité, par des magasins de souvenirs ou des restaurants. Aucune n'inclut de grands magasins, alors qu'une part importante de leur chiffre d'affaires
- la moitié pour les Galeries Lafayette du boulevard Haussmann - provient de leur clientèle étrangère. Des secteurs comme l'avenue Montaigne, la rue du Faubourg-Saint-Honoré ou la place Vendôme, qui concentrent des commerces de luxe prisés d'une clientèle étrangère fortunée, pourraient grandement bénéficier d'une possibilité accrue d'ouverture dominicale.

Lors de sa séance des 9, 10 et 11 avril 2015, le Conseil de Paris a pourtant rejeté plusieurs voeux qui lui étaient présentés visant à étendre les zones touristiques actuelles. Dans ce contexte, votre rapporteur soutient la création de zones touristiques internationales par le Gouvernement. Accompagnées de garanties pour les salariés (accord collectif obligatoire fixant des contreparties, volontariat), elles sont la réponse appropriée à la problématique très spécifique de la consommation des touristes internationaux dans un contexte de concurrence accrue entre les métropoles européennes.

Elles n'ont pas vocation à se multiplier sur le territoire français , à l'exception peut-être de certaines destinations touristiques de bord de mer. De plus, il convient de préciser que la position des élus locaux est prise en compte dans cette nouvelle procédure : les avis du maire et du président de l'EPCI doivent être recueillis avant toute délimitation de ZTI, et il est dans l'intérêt du Gouvernement de tenir compte, dans la mesure du possible, de leurs observations.

Ces ZTI devraient permettre de créer des emplois, d'augmenter l'activité des commerces de détail qui y sont implantés et de redynamiser des quartiers qui actuellement sont désertés le dimanche. Elles sont l'un des symptômes supplémentaires de ce mal français qui force trop souvent le législateur à intervenir pour surmonter des obstructions locales, dont les conséquences économiques et sociales, comme par exemple sur les salariés précaires qui pourraient, pour ceux d'entre eux travaillant à temps partiel, augmenter leur durée de travail et majorer leur rémunération ou déplacer leur repos hebdomadaire pour répondre à des obligations familiales sont négligées. C'est ce que souligne la commission d'étude des effets de la loi pour la croissance et l'activité dans sa note sur le sujet 423 ( * ) . Les exemples étrangers - Canada, États-Unis, Pays-Bas - montrent qu'un assouplissement de la réglementation relative à la fermeture dominicale des commerces se traduit par une hausse de l'emploi et de la durée de travail hebdomadaire.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement supprimant la remise au Parlement par le Gouvernement d'un rapport d'évaluation des effets de chaque zone touristique internationale sur l'ouverture des commerces trois ans après sa délimitation.

Il s'agit d'une mesure de cohérence avec la décision prise par tous les rapporteurs de supprimer les demandes de rapports au Parlement formulées dans le projet de loi, ce qui ne doit empêcher ni le Gouvernement de réaliser de sa propre initiative ce travail d'évaluation afin, le cas échéant, de revoir le périmètre de la zone concernée, ni les commissions permanentes du Parlement de se saisir de cette question si elles le souhaitent.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 73 (art. L. 3132-25 du code du travail) - Dérogation au repos dominical dans les zones touristiques

Objet : cet article permet aux établissements situés dans des zones touristiques caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes d'ouvrir le dimanche.

I - Le dispositif proposé

En l'état actuel du droit, les commerces situés dans les communes d'intérêt touristique ou thermales et dans les « zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente » peuvent de droit être ouverts le dimanche, sans que la loi ne prévoie de compensation obligatoire pour les salariés. La liste de ces communes et le périmètre de ces zones sont définis par le préfet, sur proposition du maire.

L'article 73 du projet de loi réforme ce dispositif , qui figure à l'article L. 3132-25 du code du travail, en substituant à ces quatre catégories les « zones touristiques caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes ». Comme les établissements situés dans les zones touristiques internationales, les commerces présents dans ces zones sont désormais soumis aux articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du code 424 ( * ) et doivent, pour pouvoir ouvrir le dimanche, être couverts par un accord collectif fixant des contreparties en faveur des salariés privés du repos dominical. Le volontariat des salariés travaillant le dimanche est requis, et aucun refus de renoncer au repos dominical ne pourra justifier une sanction ou un licenciement.

L'article L. 3132-25-2, dans sa rédaction issue de l'article 75 du projet de loi, dispose qu'il appartient au maire de demander la création d'une zone touristique et que le préfet de région a la responsabilité de la délimiter.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale n'a adopté qu'un amendement de précision rédactionnelle à cet article, qui n'a ensuite pas été modifié par l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi en séance publique.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à la simplification du zonage dérogatoire au repos dominical et au regroupement des « communes d'intérêt touristique ou thermales » et des « zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente » sous la dénomination unique de « zones touristiques », dont le point commun est « l'affluence particulièrement importante » de touristes qu'ils reçoivent. Si cette formulation peut sembler imprécise et recouvrir des situations très variées, elle est le reflet de la grande diversité des communes touristiques et des attractions culturelles, ludiques ou encore balnéaires qu'elles offrent.

En l'état actuel du droit, l'article R. 3132-20 du code du travail définit plusieurs critères pour qualifier une commune d'intérêt touristique, classification ne devant pas être confondue avec celle de commune touristique et de station classée de tourisme issue du code du tourisme. Elle doit en particulier accueillir une population saisonnière nombreuse et disposer d'une importante offre d'hébergement (hôtels, gîtes, campings, etc.). Il n'y a pas lieu de penser que ces critères devraient évoluer : il appartient au préfet de juger de la pertinence des requêtes formulées par les maires et de s'assurer de la réalité du phénomène touristique dans la zone qu'il lui est demandé de délimiter.

Votre rapporteur est toutefois inquiet des conséquences économiques et sociales de cette réforme dans les petites communes touristiques. Aujourd'hui, les commerces peuvent y ouvrir le dimanche sans offrir de contreparties à leurs salariés. L'article 76 du projet de loi soumet cette ouverture à la conclusion d'un accord collectif en prévoyant, notamment salariales. Il est probable qu'un nombre important d'entre eux ne seront pas en mesure d'offrir de telles compensations et se verront par conséquent contraints de fermer le dimanche. Qui plus est, le délai de trente-six mois que l'article 82 leur accordait pour se mettre en conformité avec ces nouvelles dispositions a été raccourci à vingt-quatre mois par l'Assemblée nationale. On peut craindre les effets délétères sur l'emploi d'une telle mesure dans les plus petites entreprises : c'est pour cette raison que le rapport Bailly proposait d'exempter les commerces de moins de onze salariés des zones touristiques de cette obligation de compensation 425 ( * ) . Pour tenir compte de ces difficultés, votre commission a modifié les articles 76 et 82 du texte.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 74 (art. L. 3132-25-1 du code du travail) - Dérogation au repos dominical dans les zones commerciales

Objet : cet article supprime les périmètres d'usage de consommation exceptionnel (PUCE) issus de la loi « Mallié » et autorise les commerces situés dans les zones commerciales caractérisées par une offre commerciale et une demande particulièrement importantes à ouvrir le dimanche.

I - Le dispositif proposé

A. Les périmètres d'usage de consommation exceptionnel

La loi « Mallié » 426 ( * ) a institué une dérogation au repos dominical reposant sur les comportements habituels de consommation dominicale constatés dans certaines zones géographiques et qui, dans la plupart des cas, se perpétuaient en violation de la réglementation.

Elle a ainsi prévu qu'il était possible de déroger au repos dominical dans les commerces de détail situés dans des « périmètres d'usage de consommation exceptionnel » ( PUCE ) devant cumuler trois caractéristiques : des habitudes de consommation dominicale établies, une importante clientèle et l'éloignement de celle-ci par rapport au PUCE, qui doit être démontré. Le législateur a toutefois restreint la possibilité de créer des PUCE aux unités urbaines de plus d'un million d'habitants et a confié leur délimitation aux préfets. Une fois un PUCE défini, il appartient au préfet d'autoriser les établissements qui y sont situés et qui en font la demande à ouvrir le dimanche. Cette autorisation expire au bout de cinq ans.

Cette ouverture est toutefois conditionnée à la signature d'un accord collectif ou, à défaut, à une décision unilatérale de l'employeur approuvée par référendum fixant des contreparties aux salariés privés du repos dominical. En cas de décision unilatérale, leur rémunération doit être au moins doublée et ils doivent bénéficier d'un repos compensateur. Au total, quarante-et-un PUCE ont été créés depuis 2009 , pour leur très grande majorité (trente-huit) en Ile-de-France.

B. La création des zones commerciales

Estimant que les critères de création des PUCE sont trop restrictifs , favorisent certaines zones géographiques et ne permettent pas de prendre en compte l'évolution des comportements de consommation, le Gouvernement a décidé, sur la base des recommandations du rapport Bailly, de les remplacer. L'article 74 du projet de loi leur substitue des « zones commerciales » en réécrivant l'article L. 3132-25-1 du code du travail. Elles se définissent par leur offre commerciale tout comme par la demande qu'elles suscitent , qui doivent être « particulièrement importantes ».

Comme dans les PUCE, l'ouverture le dimanche dans ces zones commerciales reste soumise à la conclusion d'un accord collectif et doit donc être accompagnée de contreparties pour les salariés privés de leur repos dominical. Elle ne peut plus découler d'une décision unilatérale de l'employeur approuvée par ses salariés. Toutefois, ces zones commerciales se distinguent des PUCE par la disparition du critère démographique qui prévalait jusqu'à présent. Elles ne sont plus réservées aux unités urbaines de plus d'un million d'habitants et sont donc susceptibles d'être créées dans davantage de territoires.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

À cet article, la commission spéciale de l'Assemblée nationale n'a adopté qu'un amendement rédactionnel.

En séance publique, les rapporteurs de la commission spéciale ont complété l'article afin qu'il soit tenu compte d'une éventuelle concurrence frontalière dans la délimitation des zones commerciales.

III - La position de votre commission

Créés pour répondre aux difficultés juridiques suscitées par des pratiques d'ouverture dominicale répandues mais illégales , les PUCE ont permis de satisfaire une demande réelle de la part des consommateurs et d'offrir aux salariés y travaillant des contreparties salariales et un repos compensateur, notamment une rémunération doublée en l'absence d'accord collectif sur le travail dominical dans l'entreprise.

Toutefois, en reposant essentiellement sur des usages de consommation dominicale préexistants , les quarante-et-un PUCE sont à l'origine de distorsions de concurrence . Selon le rapport Bailly, ce dispositif « suscite l'incompréhension des acteurs et génère une conflictualité importante » 427 ( * ) car il favorise ceux qui n'ont pas respecté la loi sans récompenser les comportements vertueux et il exclut les nouvelles structures commerciales. La délimitation de ces zones donne lieu à un insuffisant dialogue territorial et aboutit à des situations « qui défient parfois le bon sens ».

La substitution des zones commerciales aux PUCE, qui s'accompagne d'une simplification des critères retenus , est donc bienvenue. En effet, jusqu'à présent, les PUCE étaient limités aux aires urbaines de plus d'un million d'habitants tout en étant relativement éloignés des zones résidentielles, défavorisant ainsi fortement le commerce de centre-ville.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 75 (art. L. 3132-25-2 du code du travail) - Modalités de définition des zones touristiques et des zones commerciales

Objet : cet article détermine la procédure ainsi que l'autorité compétente pour délimiter ou modifier les zones touristiques et les zones commerciales au sein desquelles il est possible de déroger au repos dominical.

I - Le dispositif proposé

Instituées par les articles 73 et 74 du projet de loi, les zones touristiques , caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes, et les zones commerciales , caractérisées par une offre commerciale et une demande potentielle particulièrement importantes, constituent le coeur du nouveau zonage géographique des dérogations au repos dominical mis en place par ce texte. L'article 76 précise dans quelles conditions elles sont définies, réécrivant l'article L. 3132-25-2 du code du travail qui avait le même objet pour les PUCE, supprimés par l'article 74.

Toute demande , qu'il s'agisse de la délimitation d'une nouvelle zone ou de la modification d'une zone existante, doit émaner du maire de la commune concernée ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), s'il existe. Elle doit être motivée, accompagnée d'une étude d'impact justifiant son bien-fondé et adressée au préfet de région .

Celui-ci instruit la demande et il lui appartient d'y donner une suite après avoir mené une large consultation territoriale . Il doit en effet avoir recueilli les avis du conseil municipal, des syndicats d'employeurs et de salariés, des EPCI éventuellement concernés et du conseil municipal des communes qui ne sont pas à l'origine de la demande et ne font pas partie d'un EPCI mais sur le territoire desquelles se situe une partie de la zone sollicitée. De plus, le préfet doit consulter le comité départemental du tourisme pour les zones touristiques ainsi que la chambre de commerce et d'industrie et la chambre de métiers et de l'artisanat pour les zones commerciales. Jusqu'à présent, la procédure de délimitation des PUCE ne faisait intervenir ni les syndicats, ni les organismes consulaires .

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté onze amendements de ses rapporteurs à cet article. Neuf d'entre eux sont rédactionnels ou précisent une référence juridique. Elle a également prévu que, pour les zones s'étendant sur le territoire de plusieurs communes, la demande de délimitation ou de modification devait être faite par le président de l'EPCI, lorsqu'il existe, après consultation du maire. Elle a enfin fixé un délai de six mois au représentant de l'État pour statuer sur les demandes de délimitation de zones nouvelles et de trois mois pour répondre aux demandes de modification de zones existantes.

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté cinq amendements rédactionnels des rapporteurs de la commission spéciale.

III - La position de votre commission

Les conditions de délimitation des zones touristiques et des zones commerciales définies par cet article constituent la traduction du dialogue territorial que le rapport Bailly appelle de ses voeux afin que, dans la transparence , les intérêts de tous les acteurs intéressés puissent être pris en compte.

Confier cette mission au préfet de région, et non plus au préfet de département, doit permettre de penser ce zonage dérogatoire au repos dominical comme un outil d'aménagement économique du territoire appelant une vision cohérente et coordonnée . Il ne faut pas que deux zones mitoyennes mais situées dans des départements différents se fassent concurrence et se spécialisent dans le même domaine commercial pour la seule raison qu'elles ont été délimitées par deux autorités administratives différentes.

Votre rapporteur estime que l'adjonction d'une étude d'impact préalable à toute demande de création ou modification d'une zone ainsi que la fixation dans la loi d'un délai dans lequel le préfet doit statuer sont des avancées notables, qui font disparaître la possibilité qu'une demande ait été improvisée et garantissent la réactivité de l'administration. La consultation des structures économiques locales, partenaires sociaux et chambres de commerce et des métiers, apporte à cette procédure l'expertise de ceux qui connaissent le mieux les besoins économiques du territoire et la situation des salariés.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 76 (art. L. 3132-25-3 du code du travail) - Contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical

Objet : cet article conditionne l'ouverture dominicale dans les zones touristiques internationales, les zones touristiques et les zones commerciales à la conclusion d'un accord collectif prévoyant des contreparties pour les salariés privés du repos dominical.

I - Le dispositif proposé

L'article 76 modifie l'article L. 3132-25-3 du code du travail qui, dans sa rédaction actuelle, impose, pour ouvrir le dimanche, aux commerces souhaitant bénéficier d'une dérogation individuelle de la part du préfet ou situés dans un PUCE d'être couverts par un accord collectif ou une décision unilatérale de l'employeur approuvée par les salariés par référendum et fixant des contreparties en leur faveur. Il en retire tout d'abord la référence aux PUCE, supprimés par l'article 74, et maintient ce régime pour les autorisations accordées par le préfet en application de l'article L. 3132-20 428 ( * ) .

Il complète ensuite cet article L. 3132-25-3 pour définir les conditions dans lesquelles les commerces de détail peuvent ouvrir le dimanche dans les zones touristiques internationales , les zones touristiques et les zones commerciales . Ces derniers doivent impérativement être couverts par un accord collectif , qu'il soit de branche , d'entreprise ou d'établissement ou par un accord territorial .

Pour les entreprises dépourvues de délégué syndical , l'article fait référence aux modalités de négociation des accords de maintien de l'emploi, institués par la loi du 14 juin 2013 429 ( * ) . Dans ce cas, cet accord peut être négocié avec des représentants élus du personnel mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel. En l'absence de représentants élus du personnel, un salarié peut être mandaté . Tout accord conclu selon ces modalités doit être ensuite approuvé par les salariés .

L'article précise ensuite l'objet de l'accord : il doit fixer les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical. L'employeur doit également prendre des engagements, soit en termes d'emploi soit en faveur de « certains publics en difficulté » ou de personnes handicapées. Il s'agit de la même formule que celle utilisée jusqu'à présent pour les PUCE.

Enfin, l'article L. 3132-25-3 est complété par une disposition applicable aussi bien aux dérogations individuelles qu'à celles liées aux nouvelles zones, et qui figure aujourd'hui à l'article L. 3132-25-4 : quel que soit le cas de figure, l'employeur doit prendre en compte l'évolution de la « situation personnelle » des salariés travaillant le dimanche, selon des modalités que l'accord ou la décision unilatérale doit définir.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté cinq amendements à cet article, dont deux rédactionnels ou de précision. Sur proposition de ses rapporteurs , elle a souhaité remplacer la nécessité, dans les entreprises dépourvues de représentation du personnel , de négocier un accord avec des salariés mandatés, par la possibilité , pour l'employeur, de soumettre à ses employés une proposition de contreparties qui doit être approuvée par les deux tiers des salariés concernés. Elle a également précisé que ces contreparties devaient être « en particulier salariales ». Elle a enfin complété le contenu de l'accord ou de la proposition en prévoyant qu'il devait comprendre des mesures visant à permettre aux salariés privés du repos dominical de concilier vie professionnelle et vie personnelle .

En séance publique, l'Assemblée nationale est revenue sur la modification apportée en commission spéciale permettant à un employeur, à défaut d'accord collectif, d'ouvrir le dimanche si les deux tiers de ses salariés approuvent par référendum sa proposition. Par un amendement des rapporteurs de sa commission spéciale, elle a rétabli la négociation obligatoire d'un accord par des salariés mandatés dans les entreprises ne comptant pas de représentation du personnel. De plus, afin de relancer la négociation de branche sur le sujet du travail dominical, l'Assemblée nationale accorde six mois aux branches du commerce de détail pour engager des négociations sur l'opportunité d'ouvrir le dimanche dans les zones dérogatoires et sur les contreparties à offrir aux salariés. Elle a également étendu l'obligation d'être couvertes par un accord à toutes les entreprises disposant d'espaces de vente dédiés , avec leurs propres salariés, au sein des grands magasins.

Sur proposition de notre collègue députée Catherine Coutelle et de plusieurs députés du groupe SRC, elle a enrichi le contenu de l'accord afin qu'il prévoie des contreparties pour compenser les charges induites , pour les salariés travaillant le dimanche, par la garde de leurs enfants .

III - La position de votre commission

Coeur de la réforme des dérogations à la règle du repos dominical proposée par ce projet de loi , cet article a suscité de vives controverses à l'Assemblée nationale , la plupart des orateurs ne soulignant toutefois pas qu'il représente une importante avancée sociale pour les salariés privés du repos hebdomadaire le dimanche . En effet, il conditionne l'ouverture le dimanche des commerces situés dans les zones commerciales, les zones touristiques et les zones touristiques internationales à la conclusion d'un accord fixant des contreparties en faveur des salariés. Il impose également aux employeurs situés dans les zones touristiques d'offrir des contreparties à leurs salariés, ce qui en l'état actuel du droit n'est pas le cas.

Les débats se sont concentrés sur la question du niveau de ces contreparties et sur l'opportunité d'en fixer le seuil minimal dans la loi . Votre rapporteur y est opposé . L'objectif de la mesure proposée est de traduire dans la loi le second volet des aménagements prônés par le rapport Bailly, c'est-à-dire le renforcement du dialogue social pour les dérogations pérennes au repos dominical , afin que les situations comparables bénéficient d'un même traitement social.

Une fois ce principe établi, et comme l'ont souligné plusieurs des représentants des salariés et des employeurs auditionnés par votre rapporteur, il appartient aux partenaires sociaux , dans le cadre du dialogue social au niveau de la branche, de l'entreprise, de l'établissement ou du territoire, de définir le contenu concret de ces contreparties . Elles ne doivent pas se limiter à des considérations salariales ou à un repos compensateur, mais pourraient également prendre la forme d'un accompagnement des salariés les plus précaires ou encore d'un accès facilité à la formation professionnelle pour ceux privés du repos dominical ou, dans le cas des ZTI, travaillant en soirée.

Les accords territoriaux, des objets juridiques mal définis

Au cours de ses travaux, votre rapporteur a plusieurs fois entendu cités en exemple les cas de Saint-Malo ou de Marseille , villes touristiques ou comportant une zone touristique dans lesquelles un accord entre les partenaires sociaux locaux a permis de fixer des contreparties en faveur des salariés du commerce privés du repos dominical qui vont au-delà de toute obligation légale et prennent la forme d'une majoration salariale ou d'un repos compensateur. Ils ont sans doute inspiré le Gouvernement dans sa volonté, à travers le présent article, de promouvoir les accords territoriaux, bien qu'il n'en existe aucun en Ile-de-France.

Toutefois, la nature juridique de ces accords territoriaux reste imprécise . En application des articles L. 2232-1 et L. 2232-5 du code du travail, le champ d'application territorial des accords interprofessionnels ou de branche peut être national, régional ou local. Vus sous cet angle, les accords territoriaux seraient bien des accords collectifs de travail , susceptibles de faire l'objet d'une extension afin de rendre leurs stipulations obligatoires à tous les employeurs des secteurs d'activité concernés.

Aux yeux de votre rapporteur, telle est bien l'interprétation qui doit être faite de ces accords. Pouvant concerner l'ensemble du commerce de détail d'un territoire, ce sont des accords interprofessionnels . La question de la représentativité des signataires , syndicaux aujourd'hui, patronaux à partir de 2017, se pose alors. Le ministère du travail a-t-il les moyens, et des données suffisamment précises, pour mesurer la représentativité des organisations syndicales de salariés à l'échelle d'une rue, d'un quartier, d'une ville ou d'un département ? Quel est le niveau de précision géographique des données recueillies par le centre de traitement des élections professionnelles (CTEP) et compilées dans le système « MARS » (mesure d'audience de la représentativité syndicale) ? Votre rapporteur n'a pu obtenir de réponse précise sur ce point , si ce n'est des assurances sur la nécessité de laisser la plus grande marge de manoeuvre possible aux partenaires sociaux locaux et la volonté affichée de laisser la jurisprudence trancher les éventuels litiges qui pourraient apparaître.

De fait, il semblerait que pour tout accord d'un niveau infrarégional les résultats des élections professionnelles recueillis par le ministère du travail ne seront pas suffisants pour effectuer une mesure pertinente de l'audience .

Il est certain que le développement des accords territoriaux va s'accompagner de leur contestation . En effet, certaines organisations représentant les salariés pourraient chercher à faire valoir leur droit d'opposition 430 ( * ) à un tel accord. Comment sa mise en oeuvre pourra-t-elle être calculée, alors que les chiffres de la représentativité nationale ne correspondent pas forcément aux différents paysages syndicaux locaux et que le recours à cet agrégat n'irait pas dans le sens de la meilleure prise en compte des spécificités locales que vise l'accord territorial ? Pourtant, selon les informations communiquées à votre rapporteur par la direction générale du travail (DGT), il est envisagé , en l'absence de données sur l'audience des organisations syndicales dans le périmètre de l'accord , de s'appuyer sur les résultats consolidés au niveau national et interprofessionnel .

Votre rapporteur ne juge pas souhaitable de créer une nouvelle catégorie d'accords dérogatoires au droit commun de la négociation collective . Les accords territoriaux doivent s'inscrire dans ce cadre. Il convient dès lors de rappeler, ainsi que l'a précisé la DGT à votre rapporteur, que les accords de Marseille ou de Saint-Malo n'ont pas été étendus , aucune demande en ce sens n'ayant été faite auprès du ministère du travail. Ils ne sont donc applicables qu'aux établissements adhérents aux organisations signataires de l'accord . À Saint-Malo, tout commerçant qui n'est pas membre de l'Union des entreprises 35, organisation territoriale affiliée au Medef et seule signataire patronale de l'accord du 6 mars 2013, peut librement s'en affranchir .

Il est donc indispensable que les partenaires sociaux locaux et le Gouvernement prennent conscience de ces faiblesses juridiques , au risque de voir se développer des accords juridiquement fragiles et peu contraignants , au détriment des salariés et des employeurs qui les appliquent. Les partenaires sociaux doivent demander leur extension , et la représentativité des signataires de ces accords doit être établie , sans contestation possible, afin de garantir leur légitimité.

Source : commission spéciale du Sénat

Ce choix de responsabiliser les représentants des salariés et des employeurs est de nature à développer le dialogue social dans l'entreprise . Il s'inscrit dans la continuité des décisions prises par le législateur depuis 2004 afin de donner un rôle central à la négociation collective dans la détermination des règles portant application des principes généraux du droit du travail. Votre rapporteur en partage la philosophie et considère que cet article en constitue l'approfondissement.

Toutefois, sur proposition de votre rapporteur, votre commission a apporté deux modifications à cet article.

Elle a rétabli la possibilité, à titre subsidiaire, pour les commerces situés dans les ZTI, les ZT et les ZC d'ouvrir le dimanche sur la base d'une décision de l'employeur approuvée par un référendum auprès des employés, à défaut d'accord collectif. En effet, elle a considéré qu'il serait désastreux, en matière d'affichage mais également d'activité, que ce projet de loi offre des possibilités d'ouverture dominicale accrues qui resteraient purement virtuelles en raison du blocage du dialogue social dans une branche, une entreprise ou un établissement. La décision de l'employeur sera soumise aux mêmes obligations de contrepartie que les accords , que ce soit sur le plan salarial ou en matière de compensation des charges induites par la garde des enfants. Elle devra être approuvée , lors d'un référendum, par la majorité des salariés concernés.

Enfin, conformément à l'une des recommandations du rapport Bailly, elle a exonéré les commerces de moins de onze salariés situés dans les zones touristiques de l'obligation d'être couverts par un accord collectif et d'offrir des contreparties aux salariés pour ouvrir le dimanche. Les petits commerçants indépendants, qui assurent l'essentiel de l'animation des centres-villes des communes touristiques, pourraient connaître d'importantes difficultés si l'ouverture dominicale était conditionnée à la fixation de contreparties. Il est donc souhaitable de préserver leurs pratiques de travail dominical actuelles.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 77 (art. L. 3132-25-4 du code du travail) - Volontariat des salariés travaillant le dimanche

Objet : cet article réaffirme le principe du volontariat des salariés travaillant le dimanche en cas de dérogation individuelle ainsi que dans les zones commerciales et l'étend aux salariés des commerces situés dans des zones touristiques et les zones touristiques internationales.

I - Le dispositif proposé

A. Le cadre actuel du volontariat

La loi « Mallié » a imposé le volontariat des salariés privés du repos dominical dans les PUCE qu'elle créait ainsi que dans les entreprises bénéficiant d'une dérogation individuelle délivrée par le préfet en application de l'article L. 3132-20 du code du travail.

Le refus de travailler le dimanche ne peut être retenu comme motif pour exclure une personne d'un recrutement ou comme justification à une mesure discriminatoire , à une sanction ou à un licenciement . Si aucun accord collectif n'a pu être signé mais que l'ouverture dominicale repose sur une décision unilatérale de l'employeur, celui-ci doit demander chaque année aux salariés qui travaillent le dimanche s'ils souhaitent bénéficier de la priorité qui leur est reconnue pour obtenir un poste similaire accompagné du repos dominical. Ces personnes peuvent également à tout moment demander, en respectant un délai de prévenance de trois mois, de cesser de travailler le dimanche. Enfin, elles ont la possibilité de refuser de travailler trois dimanches par an.

Ces règles ne sont applicables ni aux salariés des commerces situés dans des communes d'intérêt touristique ou thermales et dans les « zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente » (article L. 3132-25), ni à ceux employés dans les secteurs d'activité qui bénéficient d'une dérogation permanente de droit (article L. 3132-12). Les « dimanches du maire » sont encadrés par une réglementation spécifique, qui ne prévoit pas le volontariat mais des contreparties précises
(article L. 3132-26).

B. L'extension du volontariat aux zones touristiques

L'article 77 du projet de loi modifie l'article L. 3132-25-4 du code du travail, issu de la loi « Mallié », qui porte sur le volontariat des salariés. Il procède tout d'abord à sa mise en cohérence avec les autres aspects de la refonte du travail dominical prévue par le texte. Il en retire ses premier et troisième alinéas, qui portent respectivement sur la durée limitée des dérogations délivrées et sur la prise en compte de l'évolution de la situation personnelle des salariés travaillant le dimanche, qui sont transférés à l'article L. 3132-20 et à l'article L. 3132-25-3.

Il étend ensuite le champ d'application de la règle du volontariat . Il la maintient pour les dérogations individuelles délivrées par le préfet (article L. 3132-20) et pour les zones commerciales (article L. 3132-25-1), qui prennent la suite des PUCE. Il y fait entrer les zones touristiques internationales (article L. 3132-24), instituées par l'article 72, ainsi que les zones touristiques (article L. 3132-25) réformées par l'article 73.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté deux amendements de ses rapporteurs, l'un rédactionnel et le second tendant à renforcer la réversibilité du choix des salariés travaillant le dimanche en précisant que l'accord collectif conditionnant l'ouverture dominicale détermine les modalités de prise en compte d'un changement d'avis sur cette question.

En séance publique, deux amendements supplémentaires des rapporteurs ont été adoptés, l'un rédactionnel et l'autre obligeant l'employeur à prendre les mesures nécessaires pour que ses salariés privés du repos dominical puissent voter lors d'un scrutin national ou local.

III - La position de votre commission

Une fois encore, cet article constitue une avancée importante pour les salariés travaillant le dimanche dans les ZTI, ZT et ZC ainsi que dans les entreprises bénéficiant d'une dérogation individuelle accordée par le préfet puisqu'il ne remet pas en cause la règle du volontariat en vigueur jusqu'à présent dans les PUCE mais au contraire l'étend aux ZT et ZTI, dans lesquelles un salarié ne peut pas refuser de renoncer à son repos dominical .

Plusieurs des personnes auditionnées par votre rapporteur ont toutefois mis en cause la sincérité de ce volontariat au vu du lien de subordination qui unit le salarié à son employeur et de la nature des rapports de force existant aujourd'hui dans les entreprises , dans un contexte de chômage très élevé. S'il est impossible de nier que certains employeurs malveillants pourraient tenter d'abuser de leur pouvoir et de violer ces dispositions en faisant pression sur leurs salariés ou en conditionnant une embauche au travail dominical, le législateur ne doit pas en tirer un principe général. Les abus doivent être dénoncés par ceux qui en sont les victimes et par les représentants des salariés et doivent être sanctionnés par les tribunaux.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 78 (art. L. 3132-25-5 du code du travail) - Ouverture dominicale des commerces de détail alimentaire dans les zones touristiques internationales et les gares après 13 heures

Objet : cet article autorise les commerces de détail alimentaire situés dans les zones touristiques internationales et dans certaines gares à ouvrir le dimanche après 13 heures, en respectant la règle du volontariat des salariés.

I - Le dispositif proposé

En application de l'article L. 3132-13 du code du travail, les commerces de détail alimentaire bénéficient d'une dérogation permanente de droit au principe du repos dominical puisqu'ils peuvent ouvrir le dimanche matin et donner le repos dominical à leurs salariés à partir de treize heures 431 ( * ) . Ceux-ci bénéficient d'une journée de repos compensateur par quinzaine , sauf ceux d'entre eux âgés de moins de vingt-et-un ans et logés par leur employeur, qui bénéficient d'une après-midi par semaine. Ces commerces ne peuvent pas ouvrir l'après-midi , même s'ils se trouvent dans une zone touristique ou un PUCE.

L'article 78 du projet de loi modifie l'article L. 3132-25-5 du code du travail, qui fixe cette dernière interdiction, pour y prévoir deux exceptions . La possibilité d'ouvrir le dimanche après-midi est ouverte aux commerces alimentaires situés dans les zones touristiques internationales ainsi qu'à ceux situés dans les emprises des gares qui, en vertu de l'article 79 du projet de loi, auront été jugées d'une importance suffisante au vu de leur trafic par les ministres chargés des transports, du travail et du commerce pour que tous leurs commerces puissent déroger au repos dominical.

Dans ce cas, deux régimes cohabiteraient . Jusqu'à 13 heures, la dérogation propre aux commerces alimentaires de l'article L. 3132-13 serait maintenue. À partir de cet horaire, les mêmes règles 432 ( * ) que dans les zones touristiques internationales, les zones touristiques et les zones commerciales s'appliqueraient : accord collectif prévoyant des contreparties en faveur des salariés privés du repos dominical et respect du volontariat de ces salariés seraient obligatoires.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

À cet article, la commission spéciale a adopté un amendement de ses rapporteurs qui en modifie l'économie générale . Au lieu de voir se succéder deux réglementations selon l'heure de la journée, elle a décidé que les magasins alimentaires situés dans les zones touristiques internationales ou certaines gares qui souhaiteraient ouvrir au-delà de treize heures le dimanche seraient soumis au même cadre social que les autres établissements présents dans les zones touristiques internationales, les zones touristiques et les zones commerciales pour l'intégralité de la journée . Pour ceux qui décident de ne pas faire usage de cette possibilité, le droit actuel reste inchangé.

En séance publique, seul un amendement rédactionnel des rapporteurs est venu modifier cet article.

III - La position de votre commission

Permettre aux commerces alimentaires d'ouvrir le dimanche après-midi dans les zones touristiques internationales, au sein desquelles l'ensemble des autres commerces de détail seraient autorisés à ouvrir, est une mesure de cohérence qui, si elle ouvre une première brèche dans le régime spécifique à ce secteur d'activité au regard du repos dominical, permet d'en assurer la régulation au profit des salariés .

En effet, il est vraisemblable que l es pratiques illégales d'ouverture dominicale , déjà répandues à Paris, se développeraient dans des quartiers où seuls les magasins alimentaires seraient tenus par la loi de fermer le dimanche après-midi. De plus, le développement de commerces dont il est difficile de déterminer précisément l'activité principale ou qui, à titre accessoire, vendent des produits alimentaires, est de nature à susciter des distorsions de concurrence au détriment des commerces de nourriture de petite taille , sans que les mécanismes traditionnels destinés à préserver l'équité entre tous les commerçants, comme les arrêtés préfectoraux de fermeture, ne puissent y répondre efficacement.

Dès lors, le législateur est fondé à prévoir une exception à l'interdiction d'ouvrir les commerces alimentaires le dimanche après 13 heures , tout en garantissant à leurs salariés le même traitement que celui dont bénéficient les personnes employées dans d'autres secteurs d'activité l'après-midi dans une ZTI.

De même, reconnaître aux commerces alimentaires situés dans les gares les plus importantes le droit d'ouvrir le dimanche après-midi offre un service supplémentaire aux voyageurs et contribue à la transformation de l'image de ces lieux publics de transit. En y assurant de l'animation, les incivilités comme le sentiment d'insécurité qui peut y régner devraient connaître une diminution. La spécificité des gares par rapport aux autres zones commerciales urbaines ou périurbaines , que ce soit en matière de flux de passage ou de population accueillie, justifie ce régime dérogatoire qui ne devrait pas avoir d'effets concurrentiels disproportionnés.

Votre rapporteur s'interroge toutefois sur les conséquences des modifications apportées par l'Assemblée nationale à cet article . En imposant la conclusion d'un accord collectif et le respect du volontariat pour l'ensemble de la journée du dimanche, y compris pour le créneau s'achevant à 13 heures et au sein duquel les commerces alimentaires peuvent aujourd'hui librement ouvrir en application de l'article L. 3132-13, il est à craindre que nombre d'entre eux renoncent à faire usage de cette nouvelle possibilité qui leur est offerte ou ne soient pas en mesure de le faire.

En conséquence, sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement visant à revenir à la rédaction initiale de cet article , c'est-à-dire faisant la distinction entre la période précédant 13 heures, qui reste soumise au droit actuellement en vigueur, et l'ouverture le dimanche après-midi, qui est conditionnée à la signature d'un accord collectif ou, à défaut, à une décision de l'employeur approuvée par référendum, comme les modifications apportées par votre commission à l'article 76 le permettent.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 79 (art. L. 3132-25-6 du code du travail) - Dérogation au repos dominical dans les gares

Objet : cet article autorise les commerces présents dans certaines gares à ouvrir le dimanche.

I - Le dispositif proposé

L'article 79 du projet de loi propose une réécriture totale de l'article L. 3132-25-6 du code du travail, qui dispose aujourd'hui que les autorisations d'ouverture des commerces situés dans les PUCE délivrées par le préfet ont une durée de validité de cinq ans. L'article 74 remplaçant les PUCE par des zones commerciales, cette précision devient inopérante.

S'y substitue un nouveau régime dérogatoire au repos dominical pour les commerces de détail situés dans les gares, selon deux modalités :

- pour les gares se trouvant dans une zone touristique internationale, une zone touristique ou une zone commerciale, les règles en vigueur dans ces zones s'appliqueraient : les établissements de vente pourraient ouvrir dès lors qu'ils seraient couverts par un accord collectif le prévoyant et offrant des contreparties aux salariés. Leur volontariat devrait être respecté ;

- parmi les gares ne se trouvant pas dans l'un de ces zonages dérogatoires, l'importance de certaines d'entre elles pourrait être reconnue par un arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du travail et du commerce compte tenu de « l'affluence exceptionnelle de passagers » qu'elles accueillent. Les commerces situés en leur sein seraient alors autorisés à ouvrir le dimanche, tout en devant respecter les mêmes règles que dans les différentes zones où le repos hebdomadaire peut être donné par roulement : accord collectif et volontariat seraient obligatoires, tout comme la consultation préalable du maire et, le cas échéant, du président de l'EPCI.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté trois amendements , dont l'un rédactionnel. Un deuxième, présenté par plusieurs commissaires membres du groupe UMP, a prévu que les employeurs et les salariés des commerces situés dans les gares devaient être consultés avant que l'État ne désigne une gare ne se situant pas dans une zone dérogatoire permettant l'ouverture dominicale.

A l'initiative de ses rapporteurs, la commission a, enfin, souhaité clarifier cet article. Dès lors que des gares se situent dans des zones touristiques internationales, des zones touristiques ou des zones commerciales, les règles relatives à celles-ci s'appliquent de plein droit. La commission a donc supprimé l'alinéa de l'article concernant ces zones, le jugeant redondant avec les dispositions introduites par les articles 72, 73 et 74 du projet de loi.

En séance publique, seules quatre modifications rédactionnelles ont été apportées à cet article.

III - La position de votre commission

Les gares ne sont pas des lieux où toute activité cesse le dimanche. Au contraire, certaines situées dans des destinations touristiques ou qui constituent d'importants noeuds ferroviaires connaissent même un regain d'activité et de fréquentation à cette période de la semaine. Comme dans le cas des commerces alimentaires mentionnés à l'article 78, la demande de biens et de services plus généraux n'y est pas la même qu'en centre-ville ou que dans une zone commerciale périurbaine. Elle est particulièrement forte en ce qui concerne les biens culturels ou l'équipement de la personne et compte une forte proportion d'achats d'impulsion . La clientèle étrangère, en particulier en période hivernale ou estivale, y est importante.

Permettre aux commerces situés dans les gares d'ouvrir le dimanche, dans un cadre juridique offrant à leurs salariés les mêmes avantages qu'à ceux travaillant dans une ZT, une ZC ou une ZTI, dès lors qu'une affluence exceptionnelle de passagers y est constatée, est donc, aux yeux de votre rapporteur, un progrès pour les consommateurs et les salariés volontaires .

À cet article, votre commission a adopté deux amendements présentés par votre rapporteur. L'un apporte une précision rédactionnelle , l'autre corrige une incohérence du texte voté par l'Assemblée nationale afin que les commerces alimentaires situés dans des gares se trouvant dans une ZT ou une ZC puissent ouvrir le dimanche après 13 heures. Dans sa rédaction transmise au Sénat, l'article 79 ne le permettait plus puisqu'il excluait de la liste des gares connaissant une « affluence exceptionnelle de passagers » établie par arrêté celles incluses dans une ZTI, une ZT ou une ZC. Or l'article 78 du projet de loi reconnait le droit d'ouvrir le dimanche après-midi uniquement aux commerces alimentaires situés dans une ZTI ou dans l'une des gares mentionnés à l'article 79. Il faut donc prévoir, à l'article 79, la possibilité de désigner des gares situées dans une ZC ou une ZT . C'est par exemple le cas de la gare de Bordeaux Saint-Jean, qui se trouve dans une ville qui est intégralement une zone touristique.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 80 (art. L. 3132-26 du code du travail) - Augmentation du nombre de dimanches du maire

Objet : cet article propose de porter de cinq à douze le nombre de dimanches durant lesquels, sur décision du maire, les commerces de la commune peuvent être ouverts.

I - Le dispositif proposé

En application de l'article L. 3132-26 du code du travail, tout maire
- ou, à Paris, le préfet - peut décider d' autoriser les commerces de détail de sa commune à ouvrir le dimanche jusqu'à cinq fois par an . Cette disposition ne s'applique pas aux secteurs d'activité bénéficiant déjà d'une dérogation permanente de droit au repos dominical, comme l'ameublement ou le bricolage 433 ( * ) , ou d'un régime spécifique comme l'alimentation.

Chaque salarié travaillant lors d'un de ces « dimanches du maire » voit sa rémunération au moins doubler et bénéficie d'un repos compensateur équivalent (article L. 3132-27).

L'article 80 du projet de loi modifie ce régime en portant à douze par an le nombre de « dimanches du maire » . Parmi ceux-ci, cinq liés à « l'existence d'événements particuliers du calendrier » doivent obligatoirement être accordés. Ils sont définis, par arrêté, avant le 31 décembre de l'année précédant celle à laquelle ils s'appliquent. Les sept autres restent facultatifs, et sont, comme dans le droit actuel, à la discrétion du maire.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté un amendement de rédaction globale de cet article présenté par ses rapporteurs qui en modifie l'équilibre . Il prévoit tout d'abord que toute décision du maire visant à autoriser les commerces à déroger au repos dominical doit être précédée de la consultation du conseil municipal. Ensuite, il fait passer de cinq à douze le nombre de « dimanches du maire », mais supprime le caractère obligatoire des cinq premiers : les maires sont donc libres d'accorder chacun d'entre eux, ou de ne pas le faire. Enfin, à partir du sixième dimanche travaillé, l'avis de l'organe délibérant de l'EPCI dont la commune est membre devrait avoir été préalablement recueilli.

En séance publique, l'Assemblée nationale a poursuivi son travail de restriction du champ de cet article en soumettant à l'avis conforme de l'organe délibérant de l'EPCI les décisions d'ouverture des sept derniers dimanches et en imposant, sur proposition de nos collègues députés membres du groupe SRC, aux commerces alimentaires d'une surface supérieure à 400 mètres carrés de déduire trois jours fériés éventuellement travaillés du nombre de « dimanches du maire » durant lesquels ils seraient autorisés à ouvrir.

Elle a également réaffirmé que la liste des « dimanches du maire » devrait être établie, pour l'année suivante, avant le 31 décembre, précision qui avait été supprimée en commission. Enfin, sur proposition de notre collègue députée Aurélie Filippetti, elle a souhaité que les conseils municipaux débattent de l'ouverture des bibliothèques à l'occasion de la détermination des « dimanches du maire » pour l'année qui suivra celle de la promulgation de la loi.

III - La position de votre commission

Le rapport Bailly avait mis en lumière l'existence d'un consensus sur l'insuffisance des cinq « dimanches du maire » au regard des enjeux d'animation commerciale des centres-villes, de la diversité des événements traditionnels locaux et de l'évolution des modes de consommation , bouleversée par l'essor du commerce en ligne. Généralement accordées au mois de décembre ainsi qu'au début des soldes d'hiver et d'été, ces ouvertures dominicales ne sont pas généralisées et ne font l'objet d' aucune concertation entre communes voisines.

Face à ce constat, il proposait de porter le nombre de « dimanches du maire » à douze , nombre jugé suffisant par « la très grande majorité des commerces [...] pour couvrir les besoins occasionnels d'ouverture » 434 ( * ) . Parmi ces douze, cinq auraient été de droit pour les commerçants et sept facultativement octroyés par le maire. Aucune modification du régime social pour les salariés travaillant lors de ces journées n'était jugée souhaitable.

Le projet de loi initial était la traduction fidèle de ces recommandations . Les modifications apportées en commission spéciale puis en séance publique à l'Assemblée nationale en ont fortement réduit la portée , tout en reconnaissant le rôle primordial du maire dans la détermination des orientations commerciales qu'il souhaite que sa ville prenne et celui de l'EPCI dans l'harmonisation des pratiques et l'établissement d'une concurrence équitable au sein de son périmètre.

Il est indéniable que le texte adopté par l'Assemblée nationale aura un effet moindre sur l'emploi et l'activité que celui imaginé par le Gouvernement. En contrepartie, il préserve l'autorité municipale et la possibilité pour celle-ci de réserver le dimanche à des activités familiales , culturelles , religieuses ou de loisirs et de lutter contre ce que certains perçoivent comme une « banalisation » du travail dominical. Il s'agit d'un équilibre fragile , que votre rapporteur considère nécessaire de préserver.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté deux amendements à cet article . Le premier supprime le mécanisme selon lequel les grandes surfaces alimentaires devraient, si elles étaient ouvertes trois jours fériés dans l'année, déduire ces ouvertures des « dimanches du maire ». Le second retire la disposition relative au débat sur l'ouverture dominicale des bibliothèques , qui n'a pas de lien direct avec le projet de loi et que le conseil municipal est libre d'aborder à tout moment de l'année.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 80 bis A (art. L. 3132-13 du code du travail) - Majoration de la rémunération des salariés du secteur alimentaire privés du repos dominical

Objet : cet article, issu de l'adoption de deux amendements identiques lors de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale, impose aux commerces de détail alimentaire de plus de 400 mètres carrés de majorer d'au moins 30 % la rémunération de leurs salariés travaillant le dimanche.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

En matière de repos hebdomadaire, les commerces alimentaires sont soumis à un régime dérogatoire spécifique . L'article L. 3132-13 du code du travail les autorise à ouvrir jusqu'à treize heures . Ils doivent, en compensation, offrir un repos d'une journée tous les quinze jours à leurs salariés qui travaillent le dimanche matin.

L'article 80 bis A, inséré dans le projet de loi à la suite de l'adoption de deux amendements identiques présentés, l'un par les rapporteurs de la commission spéciale, l'autre par quatorze de nos collègues députés membres du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP), complète cet article L. 3132-13 afin d'améliorer les contreparties offertes aux salariés privés du repos dominical dans les plus grands magasins d'alimentation . Dans ceux d'entre eux disposant d'une surface de vente supérieure à 400 mètres carrés , seuil définissant une grande surface au sens de la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) 435 ( * ) , la rémunération des salariés privés du repos dominical devra être majorée d'au moins 30 % .

II - La position de votre commission

L'intention des auteurs de l'amendement qui est à l'origine de cet article, la protection des commerces alimentaires de petite taille, souvent présents en centre-ville, contre la concurrence des grandes surfaces alimentaires, est tout à fait louable et votre rapporteur la partage. Toutefois, la solution retenue marque à la fois une rupture avec le régime en vigueur pour les commerces alimentaires depuis l'origine et une continuité dans la politique menée par les gouvernements qui se sont succédé. Elle poursuit la stigmatisation des grandes surfaces au nom de la protection des petits commerces contre une concurrence jugée déloyale.

Malgré sa volonté d'améliorer la lisibilité et la cohérence des différents régimes dérogatoires au repos dominical, le Gouvernement n'avait pas souhaité, dans ce projet de loi, apporter de modification aux règles relatives aux commerces alimentaires , à l'exception du cas spécifique de ceux situés dans les zones touristiques internationales et dans certaines gares (article 78). Il suivait ainsi les recommandations du rapport Bailly, qui sur ce point ne laisse pas la place au doute : « Il ne semble pas possible d'envisager une évolution vers la fixation d'un régime de compensation pour les salariés travaillant le dimanche dans ce secteur, du fait des risques importants de déstabilisation de celui-ci » 436 ( * ) . Soulignant que le secteur du commerce alimentaire est en redressement depuis plusieurs années, qu'il a « trouvé son équilibre et ses mécanismes d'autorégulation », ce rapport met en garde contre les effets potentiels d'une modification de la législation en la matière, qui pourrait mettre un terme au processus de création d'emplois qui y est à l'oeuvre.

Il est donc paradoxal de prendre une mesure dans le but de protéger le commerce de détail alimentaire alors qu'elle pourrait avoir pour conséquence d'en déstabiliser le fonctionnement et d'en entraver le développement . Il s'agit qui plus est d'une mesure d'affichage , dans le sens où elle est déjà partiellement satisfaite en l'état actuel du droit. En effet, la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001 437 ( * ) (IDCC 2216) prévoit, à son article 5.14.3, que les salariés travaillant habituellement le dimanche et ne bénéficiant pas d'un jour et demi de repos consécutifs dans la semaine voient leur salaire horaire de base majoré de 20 % pour les heures travaillées ce jour-là.

Alors que les emplois créés le sont principalement dans les magasins de grande taille et non dans les supérettes, les pénaliser davantage ne semble pas être judicieux à l'heure où notre pays compte 500 000 demandeurs d'emploi de plus qu'en mai 2012 . C'est plutôt en mettant en valeur la qualité des produits qu'ils proposent et la relation de confiance qu'ils établissent avec leurs clients que les commerces alimentaires de proximité peuvent garantir leur pérennité.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 80 bis B (art. L. 3132-26-1 [nouveau] du code du travail) - Exercice du droit de vote des salariés privés du repos dominical

Objet : cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale sur proposition des rapporteurs de la commission spéciale, prévoit que lorsqu'un scrutin est organisé un « dimanche du maire » l'employeur doit s'assurer que ses salariés puissent aller voter.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Adoptant un amendement présenté par les rapporteurs de la commission spéciale, l'Assemblée nationale a ajouté cet article 80 bis B au projet de loi afin de tenir compte des situations dans lesquelles un « dimanche du maire » correspondrait à la date d'une élection nationale ou locale.

Il crée un article L. 3132-26-1 nouveau dans le code du travail, au sein du sous-paragraphe 438 ( * ) relatif aux dérogations au repos dominical accordées par le maire. Cet article dispose qu'il revient à l'employeur de prendre « toute mesure nécessaire » afin que ses salariés privés du repos dominical lors d'un « dimanche du maire » puissent « exercer personnellement » leur droit de vote . Une obligation similaire figure à l'article L. 3132-25-4 du code, tel que modifié par l'article 77 du projet de loi, pour les commerces bénéficiant d'une dérogation individuelle accordée par le préfet ou situés dans une zone touristique internationale, une zone touristique ou une zone commerciale et ouvrant le dimanche.

II - La position de votre commission

Le travail dominical ne doit pas conduire à priver les salariés concernés de l'un de leurs droits les plus fondamentaux : il n'est donc pas anormal que l'employeur soit tenu par la loi de s'assurer que ses employés puissent se rendre à leur bureau de vote et n'aient pas à voter par procuration.

Ce principe général se heurte toutefois à des considérations pratiques qui risquent d'entraver sa mise en oeuvre. En effet, nombreux sont les salariés qui sont employés en dehors de leur commune de résidence et parcourent de nombreux kilomètres tous les jours pour se rendre sur leur lieu de travail. Leurs horaires devront être adaptés pour leur permettre de se déplacer à leur bureau de vote le matin ou en fin de journée. Le premier scrutin concerné par cette règle pourrait bien être le renouvellement des conseils régionaux, annoncé pour le mois de décembre 2015 et qui devrait coïncider avec l'un des « dimanches du maire » traditionnellement accordés durant la période précédant Noël.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 80 bis (art. L. 3132-27-1 [nouveau] du code du travail) - Volontariat des salariés travaillant lors des « dimanches du maire »

Objet : cet article, issu d'un amendement des rapporteurs adopté par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, prévoit que seuls les salariés volontaires peuvent être privés du repos dominical lors des « dimanches du maire ».

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Sur proposition de ses rapporteurs, la commission spéciale a adopté un amendement insérant cet article 80 bis dans le projet de loi afin que la règle du volontariat des salariés s'applique également lors des « dimanches du maire ». En l'état actuel du droit, elle concerne uniquement les PUCE ainsi que les dérogations individuelles au repos dominical accordées par le préfet. Les articles 72, 73, 74 du texte l'étendent aux zones touristiques internationales, zones touristiques et zones commerciales qu'ils instituent.

Dans l'esprit des auteurs de l'amendement, il s'agit de poursuivre l'harmonisation des régimes sociaux applicables aux différentes dérogations au repos dominical. Dès lors, pour travailler durant les « dimanches du maire », les salariés devront être volontaires et avoir donné leur accord par écrit à leur employeur. Le refus d'être privé du repos hebdomadaire le dimanche ne pourra être retenu comme motif de refus d'embauche, de discrimination, de sanction ou de licenciement.

II - La position de votre commission

Portés de trois à cinq sur proposition du Sénat par la loi du 20 décembre 1993 439 ( * ) , les « dimanches du maire » s'accompagnent d'un régime social dérogatoire et plus favorable aux salariés que les autres exceptions au repos dominical prévues par le code du travail . Traditionnellement concentrées dans la période précédant Noël, ces journées sont synonymes d'une activité particulièrement soutenue pour les commerces de détail .

Le rapport Bailly, tout en proposant d'augmenter le nombre de ces « dimanches du maire », ne jugeait pas souhaitable de leur appliquer la règle du volontariat alors en vigueur dans les PUCE et que le projet de loi étend aux zones touristiques internationales, zones touristiques et zones commerciales qu'il crée 440 ( * ) . Les contreparties accordées par la loi aux salariés sont importantes et le nombre de dimanches concernés (douze au maximum selon le texte adopté par l'Assemblée nationale) est limité.

Toutefois, votre rapporteur estime que le volontariat doit constituer , pour toutes les dérogations au repos dominical qui ne sont pas de droit mais ponctuelles ou liées à une zone géographique spécifique , un principe qui ne saurait être remis en cause . Il est donc souhaitable, concernant les « dimanches du maire », de faire évoluer la réglementation sur ce point, qui est inchangée depuis 80 ans.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 81 (art. L. 3132-29-1 du code du travail) - Travail en soirée dans les zones touristiques internationales

Objet : cet article permet de décaler, pour les commerces situés dans les zones touristiques internationales, l'heure de début du travail de nuit de 21 heures à minuit.

I - Le dispositif proposé

A. La réglementation applicable au travail de nuit

En application de l'article L. 3122-29 du code du travail, toute activité productive réalisée entre 21 heures et 6 heures constitue du travail de nuit . Un accord de branche étendu ou un accord d'entreprise peut décaler d'une heure cette période, de 22 heures jusqu'à 7 heures. A défaut d'accord, l'inspecteur du travail peut autoriser cette modification, après consultation des institutions représentatives du personnel, si « les caractéristiques particulières de l'activité de l'entreprise le justifient ».

Le travailleur de nuit est celui qui accomplit, au moins deux fois par semaine , trois heures au moins de son temps de travail durant la période de nuit ou qui effectue, sur une période de référence définie par accord collectif étendu, un nombre minimal d'heures de nuit. A défaut d'accord, ce seuil est de 270 heures sur douze mois consécutifs 441 ( * ) .

Exceptionnel et devant être justifié par « la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale » (article L. 3122-32), le travail de nuit est subordonné à la conclusion d'un accord de branche étendu ou d'un accord d'entreprise fixant des contreparties en faveur des salariés sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, de compensation salariale (article L. 3122-39). Cet accord doit en outre porter sur 442 ( * ) :

- l'amélioration des conditions de travail ;

- l'articulation de l'activité nocturne et l'exercice de responsabilités familiales et sociales ;

- l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;

- l'organisation des temps de pause.

La durée quotidienne de travail des salariés employés la nuit ne peut en principe pas dépasser huit heures 443 ( * ) . Le plafond de la durée hebdomadaire de travail est quant à lui fixé à quarante heures 444 ( * ) . Des dérogations sont possibles, jusqu'à douze et quarante-quatre heures respectivement, par accord collectif ou lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient dans le premier cas et, toujours par accord, pour répondre aux caractéristiques propres à l'activité d'un secteur dans le second.

Tout travailleur de nuit souhaitant occuper un poste de jour bénéficie d'une priorité pour obtenir un emploi correspondant à sa catégorie professionnelle ou à une catégorie équivalente. De même, lorsque le travail de nuit est incompatible avec des « obligations familiales impérieuses », le salarié peut demander à travailler de jour (article L. 3132-44). Qui plus est, la surveillance médicale des salariés travaillant de nuit est renforcée : un examen préalable à la prise de poste par le médecin du travail est obligatoire, puis il est renouvelé tous les six mois. Par ailleurs, une salariée enceinte peut être affectée à sa demande à un poste de jour, ou l'être si le médecin du travail constate que le poste de nuit est incompatible avec son état (article L. 1225-10). Si un tel reclassement est impossible, son contrat de travail est suspendu et elle bénéficie d'une garantie de rémunération.

L'encadrement du travail de nuit pour les jeunes travailleurs

Des règles spécifiques s'appliquent aux salariés de moins de dix-huit ans. Le principe général selon lequel le travail de nuit leur est interdit (article L. 3163-2), ainsi qu'aux apprentis de moins de dix-huit ans (article L. 6222-26), connaît plusieurs exceptions. Tout d'abord, pour ceux âgés de seize à dix-huit ans, le travail de nuit est compris entre 22 heures et 6 heures. En dessous de seize ans, il débute à 20 heures.

Des dérogations existent pour plusieurs secteurs d'activité, accordées par l'inspecteur du travail pour une durée renouvelable d'un an. Il s'agit de l'hôtellerie, de la restauration, de la boulangerie, de la pâtisserie, des spectacles ainsi que des courses hippiques. Par ailleurs, en cas d'extrême urgence, les jeunes travailleurs de seize à dix-huit ans peuvent travailler de nuit pour des « travaux passagers destinés à prévenir des accidents imminents ou à réparer les conséquences des accidents survenus ».

Source : commission spéciale du Sénat

Enfin, le travail de nuit est l'un des dix facteurs de risques professionnels auxquels l'exposition doit être mesurée dans le cadre du compte personnel de prévention de la pénibilité institué par la loi du 20 janvier 2014 445 ( * ) . Selon les articles R. 4162-2 et D. 4161-2 du code du travail 446 ( * ) , dès lors qu'un salarié a travaillé au moins une heure entre 24 heures et 5 heures durant cent-vingt nuits par an, quatre points sont inscrits sur son compte. Il s'agit de l'un des facteurs qui sont entrés en vigueur le 1 er janvier 2015 et non de l'un de ceux qui ne seront applicables qu'à partir du 1 er janvier 2016.

B. Autoriser le travail en soirée dans les zones touristiques internationales

L'article 81 du projet de loi insère un nouvel article L. 3122-29-1 dans le code du travail afin de mettre en place un régime dérogatoire au travail de nuit dans les zones touristiques internationales , instituées par l'article 72 du projet de loi. Il prévoit que le début de la période de nuit puisse être décalé de 21 heures jusqu'à minuit dans les commerces situés dans ces zones.

Cette possibilité est conditionnée à la conclusion d'un accord collectif . À travers cet accord doit également être offert aux salariés travaillant en soirée un moyen de transport, individuel ou collectif, leur permettant de regagner « en sécurité » leur lieu d'habitation. De plus, la rémunération des heures travaillées entre 21 heures et le début de la période de nuit est au moins doublée et un repos compensateur équivalent est accordé aux salariés.

Enfin, comme pour les dérogations au repos dominical prévues par le présent projet de loi, le travail en soirée repose sur le volontariat des salariés. Seuls ceux ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler après 21 heures. Le refus de travailler en soirée ne peut constituer un motif de refus d'embauche, de discrimination, de sanction ou de licenciement.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté quatorze amendements à cet article, douze de ses rapporteurs et deux déposés par plusieurs de ses membres appartenant au groupe SRC. Sept d'entre eux sont rédactionnels, les autres en enrichissent le contenu. Ils précisent que le moyen de transport mis à la disposition des salariés est à la charge de l'employeur . Ils complètent le contenu de l'accord collectif permettant le travail en soirée, qui doit également permettre de prendre en compte l'évolution de la situation personnelle des salariés concernés , déterminer les modalités selon lesquelles des salariés peuvent changer d'avis, faciliter la conciliation entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle et fixer des contreparties aux charges induites par la garde des enfants dont les parents travaillent en soirée.

Par ailleurs, la commission a souhaité, sur proposition de ses rapporteurs, que les salariées enceintes puissent, à leur demande, cesser de travailler en soirée. Elle a également étendu aux personnes employées entre 21 heures et minuit plusieurs règles applicables aux travailleurs de nuit, comme le refus d'un poste en soirée si celui-ci est incompatible avec des « obligations familiales impérieuses », la surveillance médicale spécifique ainsi que la priorité pour occuper ou reprendre un poste de jour.

En séance publique, six modifications ont été apportées à l'article, dont quatre sont d'ordre rédactionnel ou destinées à assurer sa cohérence. Sur proposition du Gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé que la période de nuit s'achève à 7 heures, et non à 6 heures, si en raison de l'institution du travail en soirée elle débute après 22 heures. Elle a également restreint aux seuls travailleurs en soirée effectuant le nombre d'heures requises pour obtenir la qualification de travailleur de nuit (au moins trois heures deux fois par semaine ou 270 heures sur douze mois consécutifs) l'application des dispositions protectrices applicables aux travailleurs de nuit. Elle a enfin prévu que, lorsqu'elles s'enchaînent, les heures travaillées en soirée et la nuit se cumulent et sont considérées équivalentes pour le calcul de la durée du travail de nuit, à laquelle est conditionné le bénéfice de ces dispositions protectrices.

III - La position de votre commission

Cet article vise à mettre un terme définitif à un débat qui a connu une couverture médiatique très forte, bien que né d'un cas d'espèce d'une ampleur limitée : celui de l'ouverture nocturne des commerces dans les zones les plus touristiques, relancé par l'affaire du magasin de parfumerie Sephora situé sur les Champs-Élysées. Ouvert depuis 1996 jusqu'à minuit en semaine et 1 heure le vendredi et le samedi, il a été contraint de fermer à 21 heures par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 23 septembre 2013 447 ( * ) , confirmé par la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 24 septembre 2014 448 ( * ) .

La haute juridiction a estimé que le travail de nuit ne peut pas être le mode d'organisation normal du travail dans une entreprise et qu'il n'est pas inhérent au commerce de parfumerie . Dès lors, elle ne l'a pas jugé indispensable au fonctionnement de l'établissement, les difficultés de livraison alléguées par l'enseigne pour ouvrir la nuit ne justifiant pas l'ouverture au public tandis que l'attractivité commerciale du lieu ne répondait pas à la nécessité « d'assurer la continuité de l'activité économique » au sens de l'article L. 3122-32 du code du travail.

Si aux yeux de votre rapporteur le travail de nuit doit rester une exception , le cas de certains commerces situés sur les Champs-Élysées et d'autres artères touristiques et commerciales du même type rend nécessaire l'aménagement de son régime juridique. Il faut en effet noter que les salariés qui travaillaient de nuit chez Sephora semblaient, au moins pour une partie d'entre eux, être volontaires et que tous bénéficiaient d'une majoration salariale , d'un repos compensateur , d'un retour en taxi à leur domicile et d'un suivi médical . Selon l'enseigne, 20 % du chiffre d'affaires de ce magasin, qui représente lui-même 6 % du chiffre d'affaires global des 309 magasins du groupe en France, était réalisé après 21 heures .

Offrir aux commerces situés dans une zone touristique internationale la possibilité d'ouvrir en soirée, dans un cadre juridique très protecteur des salariés , qui repose sur le dialogue social et le volontariat, la loi ayant fixé les contreparties minimales, notamment le doublement de la rémunération, permet de tenir compte de la situation de ces lieux qui contribuent à l'attractivité touristique de la France. Il est d'ores et déjà quasiment certain que toutes les ZTI potentielles ne sont pas concernées : ainsi, il est douteux que les magasins de l'avenue Montaigne décident d'ouvrir en soirée. Seules les zones comportant un tissu économique mixte , composé de commerces, de restaurants et d'activités de loisir comme des cinémas verraient un intérêt économique à développer l'ouverture en soirée.

L'Assemblée nationale a renforcé les garanties offertes aux salariés en étoffant le contenu de l'accord collectif requis pour ouvrir après 21 heures. Votre rapporteur y est favorable, en particulier afin de faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et de protéger les salariées enceintes. Il faut surtout rappeler qu'il s'agit de thèmes obligatoires mais non limitatifs , que la négociation collective permet de compléter en fonction des spécificités de l'entreprise.

À cet article, votre commission a adopté un amendement précisant que l'accord collectif conditionnant le travail en soirée pouvait être un accord de branche, d'entreprise, d'établissement ou territorial.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 81 bis (art. L. 3132-29 du code du travail) - Révision des arrêtés préfectoraux de fermeture des commerces

Objet : cet article, ajouté par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, vise à renforcer le formalisme des accords conduisant à des arrêtés préfectoraux de fermeture hebdomadaire des commerces et prévoit le réexamen des arrêtés existants.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

A. Les arrêtés de fermeture

Issu d'une loi du 29 décembre 1923, l'article L. 3132-29 du code du travail permet aux partenaires sociaux d'une même profession, dans un secteur géographique déterminé, de définir les modalités de mise en oeuvre du repos hebdomadaire . Sur la base d'un accord entre représentants des salariés et des employeurs, le préfet du département prend un arrêté de fermeture de tous les commerces concernés à la même date et pour la même durée chaque semaine.

La jurisprudence administrative a établi que l'accord prévu par cet article est un accord sui generis , qui n'est pas régi par les dispositions du code du travail relatives aux accords collectifs. Ainsi, dans une décision du 15 mai 2006 449 ( * ) , le Conseil d'État a jugé qu'un tel accord « a pour seul objet de permettre l'édiction d'un arrêté préfectoral réglementant la fermeture hebdomadaire des commerces de la profession concernée » et n'a donc « pas d'effet juridique propre ».

Toute violation d'un arrêté de fermeture est punie 450 ( * ) d'une amende correspondant à une contravention de cinquième classe (soit au maximum 1 500 euros 451 ( * ) ) par salarié illégalement employé par une personne physique, ou 7 500 euros 452 ( * ) dans le cas d'une personne morale. En cas de récidive, l'amende est portée à 3 000 euros pour les personnes physiques et à 15 000 euros pour les personnes morales, en application des articles 132-11 et 132-15 du code pénal.

Enfin, pour les établissements « concourant d'une façon directe à l'approvisionnement de la population en denrées alimentaires », l'arrêté de fermeture peut être abrogé ou modifié par le ministre du travail après consultation des organisations professionnelles intéressées et une fois expiré un délai de six mois à compter de sa mise en application (article R. 3132-22).

B. L'amendement adopté par la commission spéciale

Sur proposition de ses rapporteurs, la commission spéciale a adopté un amendement insérant un article additionnel 81 bis dans le projet de loi dont l'objet est d'engager la révision des arrêtés actuellement en vigueur dans les différents départements.

Il modifie l'article L. 3132-29 du code du travail en prévoyant tout d'abord qu'un accord devra avoir été « conclu », et non plus être « intervenu », puis en fixant un délai de six mois au préfet à partir de la date de conclusion de l'accord pour prendre l'arrêté de fermeture. L'entrée en vigueur de ces mesures doit intervenir deux ans après la promulgation de la loi et leur application aux arrêtés en vigueur à cette date est explicitement précisée.

C. Le texte voté par l'Assemblée nationale

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par les rapporteurs visant à réécrire l'article et à en simplifier le dispositif .

Il dispose désormais que le préfet doit abroger un arrêté de fermeture s'il est saisi d'une demande en ce sens émanant des organisations syndicales représentatives ou des organisations représentant les employeurs de la zone géographique si ces dernières expriment la volonté de la majorité des membres de la profession situés dans cette zone. Cette abrogation intervient après un délai de trois mois.

II - La position de votre commission

Dans sa décision du 21 janvier 2011 453 ( * ) , le Conseil constitutionnel a confirmé la conformité à la Constitution des arrêtés de fermeture, estimant que leur objectif, « assurer l'égalité entre les établissements d'une même profession, quelle que soit leur taille, au regard du repos hebdomadaire », répond bien à un motif d'intérêt général et ne porte donc pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre .

Se fondant sur une jurisprudence constante du Conseil d'État 454 ( * ) , il a rappelé que l'autorité administrative compétente est tenue d'apprécier « à tout moment » si elle doit maintenir sa réglementation . Il a également souligné que celle-ci doit abroger l'arrêté si « la majorité des intéressés le réclame » et que cet arrêté ne peut être pris qu'en cas d'accord émanant « de la majorité des organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs ».

Au final, cet article vient donc inscrire dans la loi une règle posée de longue date par les juridictions chargées du contentieux des arrêtés de fermeture . En l'état actuel du droit, rien n'empêche un préfet d'abroger des arrêtés de fermeture obsolètes ou ne tenant aucun compte des modes et des besoins de consommation modernes. De plus, la traduction d'un accord des partenaires sociaux par un arrêté de fermeture n'est pas une compétence liée du préfet mais fait partie de son pouvoir discrétionnaire : l'article L. 3132-29 du code du travail dispose bien que le préfet « peut » ordonner la fermeture par arrêté et non qu'il « ordonne ».

Initialement destinés à protéger les grandes entreprises face aux petits établissements qui pouvaient rester ouverts le jour de repos des salariés, les dispositions restrictives ne s'appliquant ni au commerçant, ni aux membres de sa famille, les arrêtés de fermeture sont désormais favorables aux commerces de petite taille qui ne peuvent ouvrir sans salariés et n'ont pas la possibilité, lorsqu'ils bénéficient d'une dérogation au repos dominical, de donner le repos hebdomadaire par roulement.

Il s'agit d'un mécanisme essentiel pour éviter les distorsions de concurrence au sein d'un secteur d'activité et mettre tous ses acteurs sur un pied d'égalité. Il est évident que dans certaines zones, qui sont régies par des arrêtés datant des années 1930, une révision des conditions dans lesquelles le repos hebdomadaire est accordé aux salariés serait la bienvenue. Il serait toutefois souhaitable que les partenaires sociaux eux-mêmes s'emparent de cette question et non l'autorité administrative. Il leur appartient, si le cadre dans lequel ils évoluent ne leur semble plus approprié, de négocier un nouvel accord.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 81 ter (art. L. 3132-27-2 [nouveau] du code du travail) - Concertation locale sur le travail dominical

Objet : cet article institue une procédure annuelle de concertation entre les différents acteurs locaux intéressés, sous l'égide du préfet de région, afin d'évaluer l'impact territorial de l'ouverture des commerces le dimanche.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Sur proposition de notre collègue député Jean-Louis Bricout et de plusieurs de ses collègues membres du groupe SRC, l'Assemblée nationale a ajouté un article 81 ter au projet de loi qui renforce le dialogue territorial sur les dérogations au repos dominical.

Il complète la sous-section du code du travail 455 ( * ) portant sur les dérogations au repos dominical par un nouveau paragraphe intitulé « concertation locale » et comportant un unique article L. 3132-27-2, qui met en place une concertation annuelle sur les pratiques d'ouverture dominicale des commerces de détail . À l'échelle de chaque schéma de cohérence territoriale (SCoT), le préfet de région est chargé de réunir une fois par an l'ensemble des acteurs locaux concernés par cette problématique, soit :

- les maires ;

- les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre (métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération, communautés de communes), soit 2 145 structures au 1 er janvier 2014 ;

- les associations de commerçants ;

- les organisations représentatives des salariés et des employeurs du commerce de détail.

Un dialogue doit s'engager entre ces parties sur l'impact des pratiques de travail dominical sur les « équilibres en termes de flux commerciaux et de répartition de commerce de détail » dans cette zone.

II - La position de votre commission

Désireux de lever les réticences d'une partie des membres du groupe majoritaire de l'Assemblée nationale sur sa réforme, le Gouvernement s'est montré favorable à cette initiative parlementaire visant à instituer une strate supplémentaire de régulation du travail dominical afin de protéger le commerce de centre-ville contre la concurrence de la grande distribution, perçue comme déloyale.

Outre que cette concertation n'équivaut pas à la mise en place d'une instance permanente dotée d'un pouvoir normatif en la matière, il faut rappeler que la plupart des zonages dérogatoires - les zones touristiques et les zones commerciales - sont mis en place à la demande des maires ou des présidents d'EPCI , après consultation de l'organe délibérant de la collectivité. Après examen, le préfet donne une suite positive ou négative à la demande qu'il a reçue. C'est à lui, au cours de cette procédure, d'évaluer si l'autorisation d'une nouvelle dérogation serait de nature à bouleverser l'équilibre commercial local. De plus, l'ouverture de chaque commerce étant ensuite conditionnée à l'accord des partenaires sociaux au niveau de la branche, du territoire, de l'entreprise ou de l'établissement, ces derniers sont pleinement associés à la régulation ex ante de ces pratiques .

Dès lors, il convient de s'interroger sur la pertinence de cette procédure, mais également sur sa place dans la loi . Il est en effet douteux qu'elle relève des principes fondamentaux énoncés à l'article 34 de la Constitution, que ce soit ceux de la libre administration des collectivités territoriales, des obligations civiles et commerciales ou du droit du travail. Il pourrait sans doute être pertinent, dans certains territoires qui comportent d'importants usages d'ouverture dominicale liés à une activité touristique ou commerciale intense, de mesurer à intervalles réguliers les évolutions dans le tissu commercial que ces pratiques ont pu entraîner. Il ne faut toutefois pas généraliser une telle concertation aux centaines de SCoT que compte notre pays , au risque de détourner le préfet de région du reste de ses nombreuses missions, et ce alors que dans de nombreux lieux l'ouverture dominicale des commerces de détail reste essentiellement le fait des magasins alimentaires et des commerces de bouche, qui bénéficient d'un régime dérogatoire spécifique.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 82 - Entrée en vigueur de la réforme du travail dominical

Objet : cet article fixe les modalités d'entrée en vigueur des différents aspects de la réforme du travail dominical proposée par le projet de loi, en particulier pour les commerces qui bénéficiaient déjà d'une dérogation au repos dominical.

I - Le dispositif proposé

L'article 82 clôt le chapitre du projet de loi consacré aux dérogations au repos dominical en déterminant les conditions dans lesquelles ces nouvelles dispositions s'appliquent aux établissements qui ouvrent le dimanche en vertu des régimes dérogatoires actuels.

Les communes d'intérêt touristique ou thermales et les zones touristiques « d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente », au sein desquelles le travail dominical est autorisé, deviennent de plein droit des « zones touristiques » instituées par l'article 73 du projet de loi. Toutefois, alors qu'aujourd'hui la législation ne prévoit ni contrepartie spécifique, ni volontariat pour les salariés privés du repos dominical dans les commerces situés dans ces zones, l'article 76 leur applique ces règles. En conséquence, les établissements concernés disposent d'un délai de trois ans à compter de la publication de la loi pour se mettre en conformité avec ces nouvelles obligations.

Les PUCE deviennent quant à eux de plein droit des « zones commerciales » au sens de l'article 74 du projet de loi. Le travail dominical dans les PUCE est conditionné à la signature d'un accord collectif ou, à défaut, à une décision unilatérale de l'employeur approuvée par référendum. L'article 82 du projet de loi laisse perdurer les accords mais fixe un délai de trois ans pour substituer un accord à toute décision unilatérale.

Enfin, l'augmentation du nombre de « dimanches du maire » s'applique pour la première fois l'année suivant la promulgation de la loi. Pour l'année en cours, l'article les porte toutefois de cinq à six, dont trois devant obligatoirement être accordés par le maire. Leur liste doit être définie par arrêté municipal dans un délai d'un mois à compter de la publication de la loi.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté à cet article douze amendements rédactionnels et de précision de ses rapporteurs.

En séance publique, l'Assemblée nationale a, sur proposition de ses rapporteurs, abaissé de trois à deux ans le délai offert aux commerces situés dans les zones touristiques et les zones commerciales pour se mettre en conformité avec les obligations issues du projet de loi. Elle a également supprimé, par coordination avec les modifications apportées en commission spéciale à l'augmentation du nombre de « dimanches du maire », le dispositif transitoire les concernant. Elle a enfin adopté deux amendements rédactionnels ou de coordination.

III - La position de votre commission

Ce projet de loi renforce la cohérence du cadre juridique des dérogations au repos dominical , en particulier de leur zonage. Il fixe un cadre social uniforme et protecteur des salariés , basé sur le primat de la négociation collective pour déterminer des contreparties et dont le succès conditionne l'ouverture des commerces le dimanche. Il s'agit d'une avancée importante pour eux, qui rompt avec le droit existant dans les zones touristiques, au sein desquelles aucune compensation n'est aujourd'hui prévue par la loi en faveur des personnes privées de leur repos dominical.

Il s'agit d'un changement lourd de conséquences pour les entreprises , en particulier pour les plus petites d'entre elles qui n'ont pas d'institutions représentatives du personnel en leur sein et donc pas de culture du dialogue social. Aux yeux de votre rapporteur, les trente-six mois prévus par le projet de loi initial constituent un délai approprié , notamment pour les entreprises qui ne sont couvertes par aucune convention de branche. La décision prise par l'Assemblée nationale de réduire de douze mois cette durée n'est pas de nature à faire mieux accepter cette réforme par les acteurs économiques à qui elle s'adresse. En conséquence, la commission a adopté un amendement présenté par son rapporteur ramenant ce délai à trente-six mois.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 82 bis (art. L. 3133-1-1 [nouveau] du code du travail) - Modification des jours fériés outre-mer

Objet : cet article autorise le préfet, dans les départements d'outre-mer, à remplacer certains jours fériés nationaux par des jours fériés locaux.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

A. Le régime des jours fériés en droit du travail

En l'état actuel du droit, le code du travail 456 ( * ) reconnaît onze jours fériés , dont six d'origine chrétienne : le 1 er janvier, le lundi de Pâques, le 1 er mai, le 8 mai, l'Ascension (quarantième jour après Pâques), le lundi de Pentecôte, le 14 juillet, l'Assomption (15 août), la Toussaint (1 er novembre), le 11 novembre et le jour de Noël (25 décembre). Parmi ceux-ci, seul le 1 er mai est obligatoirement chômé (article L. 3133-4), sauf dans les entreprises qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail. Dans ce cas, les salariés bénéficient d'un doublement de leur rémunération. De nombreuses conventions collectives prévoient toutefois que la plupart des jours fériés ne sont pas travaillés ou qu'ils donnent lieu à une majoration salariale . Enfin, la journée de solidarité instituée en vue d'assurer le financement d'actions en faveur de l'autonomie des personnes âgées ou handicapées peut se traduire par le travail d'un jour férié précédemment chômé, à l'exception du 1 er mai (article L. 3133-8).

Des régimes dérogatoires subsistent toutefois. Dans les départements de la Moselle , du Bas-Rhin et du Haut-Rhin , deux jours fériés supplémentaires figurent dans la loi : le Vendredi Saint 457 ( * ) ainsi que le lendemain de Noël (article L. 3134-13). Il y prévaut une interdiction générale d'emploi de salariés les jours fériés (article L. 3134-2) qui connaît plusieurs exceptions. Dans les commerces, les salariés ne peuvent travailler le lundi de Pâques, le lundi de Pentecôte et le jour de Noël, ni plus de cinq heures les autres jours fériés, sauf lorsque les circonstances locales rendent nécessaire une activité accrue (article L. 3134-4). Si l'exercice d'une activité se justifie par « la satisfaction des besoins de la population présentant un caractère journalier ou se manifestant particulièrement ces jours-là », l'autorité administrative peut accorder des dérogations au repos dominical. De même, cette interdiction ne s'applique pas aux cafés, hôtels, restaurants et lieux culturels ainsi qu'aux entreprises de transport (article L. 3134-10). Enfin, en Moselle, le préfet peut autoriser l'ouverture ou imposer la fermeture de tous les commerces le Vendredi Saint (article L. 3134-14).

Dans les départements d'outre-mer, la commémoration de l'abolition de l'esclavage est un jour férié depuis la loi du 30 juin 1983 458 ( * ) . Le décret du 23 novembre 1983 459 ( * ) en fixe la date : le 27 mai en Guadeloupe, le 10 juin en Guyane, le 22 mai en Martinique, le 27 avril à Mayotte et le 20 décembre à La Réunion. Le décret du 23 avril 2012 460 ( * ) l'a étendue aux collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, respectivement le 9 octobre et le 27 mai. Le 21 juillet, date anniversaire de la naissance de Victor Schoelcher, est férié en Martinique et en Guadeloupe.

Par ailleurs, concernant Mayotte , l'article L. 222-1 du code du travail qui y est applicable, après avoir dressé la liste des jours fériés légaux, précise qu'elle n'est pas exclusive des stipulations des accords collectifs, des contrats de travail ou des usages qui prévoiraient des jours fériés supplémentaires, « notamment les fêtes de Miradji, Idi-el-Fitri, Idi-el-Kabir et Maoulid ».

B. Permettre de substituer des jours fériés locaux à certains jours fériés nationaux dans les départements d'outre-mer

Sur proposition de notre collègue députée de La Réunion Ericka Bareigts et de plusieurs de ses collègues ultra-marins membres du groupe SRC, l'Assemblée nationale a adopté cet article 82 bis qui insère dans le code du travail un nouvel article L. 3133-1-1 permettant d'adapter la liste des jours fériés outre-mer .

Il dispose que dans les territoires régis par l'article 73 de la Constitution, c'est-à-dire en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion ainsi qu'à Mayotte, le préfet peut remplacer certains jours fériés nationaux par un même nombre de jours fériés locaux afin de tenir compte des « spécificités culturelles, religieuses et historiques » de ces collectivités. Par un sous-amendement des rapporteurs de la commission spéciale, le champ d'application de cet article a été restreint aux seuls jours fériés « non républicains », selon la formule utilisée, excluant ainsi le 1 er mai, le 8 mai, le 14 juillet et le 11 novembre.

II - La position de votre commission

Sans pouvoir mesurer les attentes réelles de nos compatriotes d'outre-mer en la matière, votre rapporteur exprime sa très forte opposition au dispositif proposé par cet article 82 bis . Il ne semble pas abouti juridiquement et demanderait que soit menée une réflexion approfondie avec des représentants de chacun des territoires concernés avant une hypothétique mise en oeuvre.

Du point de vue du droit tout d'abord, confier au préfet le pouvoir de modifier unilatéralement sept jours fériés sans qu' aucun critère d'appréciation autre que la mention des « spécificités culturelles, religieuses et historiques » ne soit précisé dans la loi apparaît comme une délégation insuffisamment encadrée de son pouvoir par le législateur . Si l'article 73 de la Constitution dispose bien que les lois et règlements « peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières » des départements et régions d'outre-mer, la mesure proposée ici va au-delà de la simple adaptation et constitue une véritable transformation du régime actuel, touchant près des deux tiers des jours fériés inscrits dans le code du travail.

Qui plus est, aucune procédure de concertation préalable n'est envisagée par cet article . Alors que les acteurs locaux intéressés seraient nombreux - collectivités territoriales, partenaires sociaux, représentants des cultes - le préfet pourrait décider seul de remplacer les jours fériés de son choix par de nouvelles dates. Il aurait été particulièrement opportun de conditionner cette possibilité soit à un avis conforme de l'organe délibérant de la collectivité régionale ou départementale, soit à un accord conclu entre les représentants des employeurs et des salariés au niveau territorial.

Aux yeux de votre rapporteur, il appartiendrait à la loi ou au pouvoir réglementaire national , ainsi qu'il l'a fait pour la journée de commémoration de l'abolition de l'esclavage, de définir chacun des jours fériés propres à l'une des collectivités régies par l'article 73 de la Constitution. Le bref débat qui a conduit à l'adoption de cet article à l'Assemblée nationale a simplement révélé qu'il répond principalement aux souhaits d'élus réunionnais. Aucun événement de référence, aucune date pour l'un de ces jours fériés n'ont été avancés . Dans ce contexte, et même s'il était favorable à l'esprit de la mesure proposée, le Sénat ne disposerait pas d'éléments suffisants pour soutenir cette initiative reposant sur un cadre juridique fragile. Toutefois, ses principes mêmes sont contestables.

En effet, sur le fond, cet article va à l'encontre de l'unité de la République et fragilise l'un des fondements de notre Nation. Elle envoie un mauvais signal à nos concitoyens, à l'heure où notre pacte républicain est fragilisé, et ouvre la voie à la division . Au-delà de leurs origines chrétiennes, ces jours fériés font partie du noyau intangible des symboles de notre société , qui la structurent et façonnent son identité. Différencier les jours fériés selon les territoires revient à légitimer l'existence de plusieurs républiques concurrentes, qui ne partagent alors plus les mêmes valeurs. Tel n'est pas l'esprit de notre Constitution : le Président de la République l'a lui-même reconnu, puisqu'il a fait part de son souhait de voir cet article retiré du projet de loi.

Saisie de quatre amendements identiques de suppression de l'article présentés par votre rapporteur, par les membres du groupe socialiste, par M. Cadic et M. Charon et plusieurs de ses collègues, votre commission les a adoptés.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

CHAPITRE II - Droit du travail
Section 1 - Justice prud'homale

Article 83 (art. L. 1235-1, L. 1421-2 [nouveau], L. 1423-3, L. 1423-8, L. 1423-9, L. 1423-10-1 [nouveau], L. 1423-12, L. 1423-13, L. 1442-1, L. 1442-2, L. 1442-11, L. 1442-13, L. 1442-13-1 à L. 1442-13-3 [nouveaux], L. 1442-14, L. 1442-16, L. 1442-16-1 et L. 1442-16-2 [nouveaux], L. 1453-4, L. 1453-5 à L. 1453-9 [nouveaux], L. 1454-1, L. 1454-1-1 à L. 1454-1-3 [nouveaux], L. 1454-2, L. 1454-4, L. 2411-1, L. 2411-24 [nouveau], L. 2412-15 [nouveau], L. 2413-1, L. 2421-2, L. 2439-1 [nouveau] du code du travail, art. 2064 et 2066 du code civil, art. L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, art. L. 147 C du livre des procédures fiscales et art. 24 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative) - Réforme de la juridiction prud'homale

Objet : cet article procède à une réforme de la juridiction prud'homale, en réaffirmant la vocation judiciaire des conseillers prud'hommes, en conférant un statut aux défenseurs syndicaux et en rénovant la procédure applicable devant cette juridiction afin d'en augmenter l'efficacité et de réduire ses délais de jugement.

À titre liminaire votre rapporteur s'étonne que cette réforme ait été intégrée au présent texte. Nombre des personnes qu'il a entendues ont d'ailleurs partagé cet étonnement.

En effet, cette réforme ne se rattache au projet de loi que de manière très indirecte, par les éventuelles conséquences économiques qu'un raccourcissement des délais devant les conseils de prud'hommes pourrait produire. D'autres textes l'ont devancée 461 ( * ) et une longue réflexion l'a préparée, celle conduite au sein de la Chancellerie sur la justice du Vingt-et-unième siècle. Isolée dans le présent texte, elle se trouve ainsi coupée de ses prémices, alors qu'elle aurait dû naturellement être traitée, au même titre que les autres juridictions, au sein de la grande réforme judiciaire annoncée à plusieurs reprises par la garde des sceaux.

Les prémices de la réforme des conseils de prud'hommes depuis 2012

D'une part, l'article 21 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi a encouragé le recours, en cas de contestation et d'irrégularité du licenciement devant le juge prud'homal, à la phase de conciliation par l'instauration d'un barème indicatif. Conformément au souhait des partenaires sociaux, le barème défini par le décret d'application 462 ( * ) a prévu que l'indemnité augmente régulièrement selon l'ancienneté du salarié : elle s'élève à deux mois de salaire si le salarié justifie chez l'employeur d'une ancienneté inférieure à deux ans, et atteint quatorze mois de salaire si son ancienneté dépasse vingt-cinq ans. L'article 21 a également limité à deux ans le délai de saisine du juge pour les actions relatives à l'exécution ou la rupture du contrat de travail (sauf exceptions prévues par la loi 463 ( * ) ) et à trois ans la prescription des actions en salaire.

D'autre part, la loi n° 2014-1528 du 18 décembre 2014 relative à la désignation des conseillers prud'hommes a autorisé le Gouvernement, à son article premier, à prendre une ordonnance pour remplacer l'élection des conseillers prud'hommes par une désignation fondée sur la mesure de l'audience des organisations syndicales des salariés et des organisations professionnelles d'employeurs. Son article 2 a prolongé le mandat actuel des conseillers jusqu'au prochain renouvellement général des conseils de prud'hommes, qui devra intervenir avant le 31 décembre 2017.

Enfin, la loi n° 2014-743 du 1 er juillet 2014 relative à la procédure applicable devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié a prévu que, dans cette hypothèse, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes devait statuer dans un délai d'un mois suivant sa saisine, supprimant ainsi la phase préalable de conciliation.

Source : commission spéciale du Sénat

Fortement inspirée du rapport du président Alain Lacabarats 464 ( * ) , elle en reprend le constat : la juridiction prud'homale « ne fonctionne pas dans des conditions conformes aux exigences des standards européens et connait de graves carences » 465 ( * ) .

Alors que les conseils de prud'hommes connaissent d'un plus faible nombre d'affaires par rapport aux tribunaux de commerce, aux tribunaux d'instance et aux tribunaux de grande instance, leurs délais moyens de jugement et leurs taux d'appel sont du double ou du triple des autres juridictions .

Comparaison entre les juridictions prud'homales
et les autres juridictions judiciaires

Juridiction prud'homale

Autres juridictions

Nombre d'affaires nouvelles

(chiffres de 2012)

175 714

TC = 196 630

TI = 674 760

TGI = 929 508

Durée moyenne des affaires

(chiffres de 2012)

11,9 mois

TC = 5,4

TI = 5,8

TGI = 7

CA = 11,4

Taux d'appel

(chiffres de 2012)

62,1 %

TC = 13 %

TI = 6,3 %

TGI = 19,2 %

Taux de renvoi au départage

20 % en 2011
18,3 % en 2012

Taux de conciliation

5,5 % en 2013

Source : rapport Lacabarats

Dans la contribution écrite qu'elle a remise à votre rapporteur, Mme Évelyne Serverin, directeur de recherche émérite au Centre national de recherche scientifique (CNRS) et membre du Conseil supérieur de la magistrature, souligne toutefois l'inégalité de situation des conseils de prud'hommes entre eux : ainsi, les délais les plus longs sont observés au sein des six conseils qui reçoivent le quart des demandes.

Les causes de ces dysfonctionnements sont nombreuses et ne se limitent pas à l'existence, ponctuelle, de situations conflictuelles dans ces juridictions paritaires : le manque de moyens, face à l'augmentation des saisines ; la multiplication des phases judiciaires, entre la conciliation, le jugement et, le cas échéant, si la formation paritaire n'a pu trouver une majorité, le départage ; les défauts de comparution des parties ou les renvois d'audience trop fréquents ; les particularités procédurales comme le caractère oral de la procédure ou la règle de l'unicité de l'instance, qui impose de concentrer dans la même instance toutes les demandes relatives au même contrat de travail...

Comme Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice, l'a indiqué lors de son audition par votre commission, le présent dispositif retient un principe, la conservation du caractère paritaire des conseils de prud'hommes, et propose trois axes de réformes.

I - La réaffirmation de la vocation judiciaire des conseillers prud'hommes

Spécificité française en Europe, le caractère paritaire des juridictions prud'homales traduit l'idée que les conflits du travail doivent être arbitrés par des juges représentants les deux parties en présence, l'employeur et le salarié. Ce paritarisme, qui connaît quelques exceptions, dont la plus notable est le recours à un magistrat professionnel départiteur, lorsque les conseillers prud'hommes ne parviennent pas à s'entendre sur une décision, n'est pas remis en cause par le présent texte.

En revanche, plusieurs dispositions visent à parer à certains dysfonctionnements du paritarisme, lorsque la conflictualité l'emporte sur les exigences qui devraient normalement guider tout juge dans ses fonctions. La solution retenue est de réaffirmer la vocation judiciaire des conseillers prud'hommes en approchant leur statut de celui des magistrats professionnels, s'agissant de leurs missions, de leur formation ou de l'exercice du pouvoir disciplinaire.

A. La définition des obligations auxquelles les juges prud'homaux sont tenus

En vertu du 1° du premier paragraphe du présent article, un nouvel article L. 1421-2 compléterait le chapitre premier du titre II du livre IV du code du travail, sur les dispositions générales relatives aux conseils de prud'hommes, afin d'énumérer les obligations auxquelles ces derniers sont tenus et les principes qui doivent les guider : l'indépendance, l'impartialité, la dignité et la probité.

Comme les magistrats, les conseillers prud'hommes devraient s'abstenir de tout acte ou comportement public incompatible avec leurs fonctions ou de nature à faire naître un doute légitime sur leur impartialité. Ils seraient tenus au secret des délibérations.

Sur deux points, le projet de loi initial allait plus loin que le texte adopté par les députés : d'une part, il évoquait le devoir de réserve qu'impose aux conseillers l'exercice de leur fonction, d'autre part, il leur interdisait toute action concertée - c'est-à-dire une grève - de nature à entraver le fonctionnement des juridictions.

L'une et l'autre de ces dispositions sont apparues, aux yeux des rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, peu compatibles avec l'engagement syndical des conseillers prud'hommes, juges élus. Les rapporteurs ont donc fait adopter deux amendements. Le premier supprime la mention de ce devoir de réserve, mais il conserve l'interdiction d'un comportement public incompatible avec leurs fonctions. Le second limite l'encadrement du droit de grève aux seules actions, qui, aboutissant au renvoi de l'examen d'un dossier, risqueraient « d'entraîner des conséquences irrémédiables ou manifestement excessives pour les droits d'une partie ».

Enfin, un dernier amendement adopté par les députés, à l'initiative de leurs rapporteurs, a remplacé le terme « fonctions » utilisé pour désigner les missions des conseillers prud'hommes par celui de « mandat ». Présenté comme rédactionnel, il a en réalité une forte portée symbolique, puisqu'il fait référence à l'élection des intéressés.

B. Une exigence de formation accrue

Le rapport précité du président Alain Lacabarats insiste fortement sur la nécessité que les juges prud'homaux soient mieux formés à l'exercice des fonctions juridictionnelles.

Deux dispositions du texte traduisent cette exigence. La première précise l'obligation de formation des conseillers prud'hommes, qui échoit à l'État en vertu de l'article L. 1442-1 du code du travail, en créant une formation initiale, qui s'ajoute à l'actuelle formation continue de six semaines. La seconde en tire les conséquences, à l'article L. 1442-2 du même code, sur les congés pour formation que l'employeur doit consentir aux intéressés.

Pendant toute la durée de son mandat, chaque juge prud'homal devrait pouvoir ainsi bénéficier de cinq jours de formation initiale consacrée à l'exercice de sa fonction juridictionnelle, et, comme aujourd'hui, de six semaines de formation continue.

Le non-respect de l'obligation de formation initiale serait sanctionné par la démission d'office de l'intéressé.

C. Une discipline renforcée

Le présent article procède à une refonte des règles disciplinaires relatives aux conseillers prud'hommes.

Cette refonte s'ordonne autour d'une nouvelle instance, la « commission nationale de discipline » à laquelle le pouvoir disciplinaire est confié, en lieu et place de celui du ministre de la justice 466 ( * ) .

La composition de cette commission serait fixée dans un nouvel article L. 1442-13-2 du code du travail. Elle serait présidée par un président de chambre à la Cour de cassation, désigné par le premier président de cette cour (et qui sera vraisemblablement le président de la chambre sociale). Elle comprendrait sept membres en plus du président, désignés pour trois ans ainsi que leurs suppléants :

- un membre du Conseil d'État, désigné par le vice-président du Conseil d'État ;

- deux magistrats du siège des cours d'appel, désignés par le premier président de la Cour de cassation à partir d'une liste composée d'un nom de magistrat par cour d'appel, choisi par le premier président de chacune après avis de l'assemblée générale de ladite cour ;

- deux représentants des salariés et deux représentants des employeurs, conseillers prud'hommes en exercice ou l'ayant été, désignés par leurs représentants au sein du Conseil supérieur de la prud'homie.

Un amendement adopté par les députés à l'initiative de leurs rapporteurs a instauré une stricte parité dans les désignations. Celle-ci pose une difficulté pour la désignation des magistrats du siège, dans la mesure où rien n'oblige les présidents de cour d'appel à se coordonner afin que la liste soit suffisamment paritaire pour que le choix du président de la Cour de cassation ne soit pas limité.

Le quorum pour que la commission délibère valablement serait de quatre membres. La voix du président serait prépondérante. Les décisions de la commission comme celles de son président devraient être motivées (art. L. 1442-16-1 et L. 1442-16-2 [nouveaux] du code du travail).

La commission serait saisie par le ministre de la justice ou par le premier président de la cour d'appel dont dépend le juge prud'homal mis en cause. Le premier président devrait l'entendre préalablement (art. L. 1442-13-3 [nouveau] du code du travail). La compétence disciplinaire des premiers présidents de cour d'appel ne se limiterait pas à cette saisine : ils pourraient aussi rappeler les intéressés à leurs obligations (art. L. 1442-13-1 [nouveau] du code du travail). Initialement, le projet de loi prévoyait que ce rappel prenne la forme d'un avertissement, mais un amendement des rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale a supprimé cette mention, au motif qu'elle pouvait laisser croire qu'elle constituait une sanction susceptible de figurer au dossier du conseiller en cause.

Les sanctions susceptibles d'être prononcées par la commission nationale de discipline reprennent les sanctions actuelles 467 ( * ) sous deux réserves : la censure est renommée blâme et la déchéance est dissociée entre une déchéance assortie d'une interdiction d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme pour une durée maximale de dix ans et une déchéance assortie de la même interdiction définitive (art. L. 1442-14 du code du travail).

La mesure de suspension (art. L. 1442-16 du même code), qui peut frapper un conseiller prud'homme suspecté de faits de nature à entraîner une sanction disciplinaire, est modifiée sur plusieurs points. Elle serait prononcée, pour une durée maximale de six mois 468 ( * ) , après audition de l'intéressé, par le président de la commission nationale, sur proposition du ministre de la justice ou du premier président de la cour d'appel dont dépend l'intéressé. Elle pourrait être renouvelée, mais seulement par la commission nationale, pour six mois au plus.

Enfin, le présent article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 1442-11 du code du travail, prohibant tout mandat impératif, le contrevenant s'exposant à l'annulation de son élection et à être frappé d'inéligibilité. À l'initiative des rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, la sanction complémentaire d'inéligibilité a été remplacée par une interdiction d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme pour une durée maximale de dix ans.

D. La position de votre commission

Votre rapporteur se félicite que la vocation judiciaire des conseillers prud'hommes ait été réaffirmée, parce que la diffusion de cette culture au sein de ces tribunaux peut faciliter le fonctionnement procédural de la juridiction et apaiser certaines conflictualités rémanentes.

À son initiative, votre commission a adopté plusieurs amendements oeuvrant dans le même sens.

Un premier amendement , symbolique, vise à préciser, à l'article L. 1421-2 du code du travail, que les conseillers prud'hommes sont des juges et remplace la mention de l'exercice, par les conseillers, de leur mandat par celle de l'exercice de leurs fonctions.

Un deuxième amendement porte sur la formation initiale. Comme le président Alain Lacabarats l'a relevé au cours de son audition par votre rapporteur, il n'existe pas, actuellement, de formation commune des conseillers prud'hommes et de leurs homologues employeurs alors que rien ne l'interdit. Ce clivage favorise les oppositions alors même que cette formation doit permettre aux intéressés d'accomplir les mêmes fonctions. L'amendement adopté par votre commission précise, par conséquent, que la formation initiale doit être commune aux conseillers employeurs et aux conseillers salariés, et placée sous la responsabilité de l'École nationale de la magistrature. Il s'agit ainsi de favoriser l'émergence d'une culture judiciaire commune.

Le même souci de réaffirmer le rôle de juge impartial des conseillers prud'hommes a motivé l'adoption par votre commission d'un amendement étendant à l'ensemble du conseil de prud'hommes, l'interdiction aujourd'hui faite à un juge prud'homal d'assister ou de représenter une partie devant la chambre ou la section dont il dépend (art. L. 1453-2 du code du travail).

Enfin, un dernier amendement de votre commission remplace l'obligation de désignation paritaire pour les membres de la commission nationale de discipline par une obligation générale d'assurer une représentation équilibrée des hommes et des femmes. Les modalités en seront ainsi fixées par voie réglementaire, ce qui apporte une solution au problème précédemment évoqué de l'absence de coordination, dans les nominations, entre les premiers présidents de cour d'appel.

II - La rénovation de la procédure prud'homale

Le projet de loi procède à d'importantes modifications, qui touchent autant à la composition des juridictions prud'homales qu'à leur organisation ou à la procédure suivie devant eux.

A. Un nouveau dispositif pour remédier aux dysfonctionnements des conseils de prud'hommes

Actuellement, lorsqu'un conseil de prud'hommes ne peut se constituer ou qu'il ne peut fonctionner, le premier président de la cour d'appel, dûment saisi par le procureur général, doit en désigner un autre, ou, à défaut, un tribunal d'instance, pour connaître des affaires qui relèvent de son ressort (art. L. 1423-8 du code du travail).

Le présent projet de loi (aux 4° à 7° du premier paragraphe) refond ce dispositif, qui présente deux défauts : il fait peser la lourde charge du contentieux prud'homal sur des tribunaux d'instance souvent déjà surchargés et qui ne possèdent pas toujours les moyens d'y faire face ; il limite les possibilités d'intervention du premier président de la cour d'appel lorsque, sans cesser tout à fait de fonctionner, le conseil des prud'hommes fonctionne mal.

La première difficulté serait levée par le recours, en lieu et place du tribunal d'instance, à plusieurs juges du ressort de la cour d'appel, spécialement désignés à cet effet par le premier président de ladite cour.

Afin de remédier à la seconde difficulté évoquée, un nouvel article L. 1423-10-1 serait créé dans le code du travail, consacré aux « cas d'interruption du fonctionnement d'un conseil de prud'hommes ou de difficultés graves rendant ce fonctionnement impossible dans des conditions normales ». Les circonstances ainsi décrites sont plus larges que la seule impossibilité de fonctionner, puisqu'elles s'étendent aux graves dysfonctionnements, ce qui autorise une appréciation qualitative.

Dans de telles situations, le premier président pourrait désigner des juges du ressort de la cour d'appel. Contrairement au droit en vigueur, le premier président n'aurait donc pas, d'abord, à examiner la possibilité de confier le contentieux du conseil dysfonctionnel à un autre conseil de prud'hommes 469 ( * ) .

B. De nouvelles règles de composition des formations prud'homales

Afin d'alléger la charge des différentes formations des conseils de prud'hommes et de permettre une meilleure allocation des ressources, le présent article crée une formation restreinte du bureau de jugement, dont il calque la composition (un conseiller prud'homme employeur et un conseiller salarié) sur celles du bureau de conciliation et de la formation de référé.

Un amendement des rapporteurs, adopté en séance publique, limite, dans la loi (art. L. 1423-12 du même code), la composition du bureau de jugement à quatre conseillers, deux employeurs et deux salariés. Ce faisant, il supprime la possibilité, aujourd'hui reconnue par l'article R. 1423-35 du code du travail, de prévoir une composition plus nombreuse.

D'autres dispositions visent à spécialiser certains magistrats professionnels dans le traitement des contentieux prud'homaux. Ainsi, le 20° du premier paragraphe du présent article prévoit que les magistrats départiteurs visés à l'article L. 1454-2 , chargés de présider les formations prud'homales en partage de voix, soient désignés chaque année par le président du tribunal de grande instance, en fonction de leurs aptitudes et connaissances particulières. Afin d'ouvrir plus largement leur recrutement, ils seraient choisis non plus seulement, comme actuellement, parmi les seuls juges d'instance, mais parmi tous les juges du tribunal de grande instance.

Enfin, dans le souci sans doute de favoriser les échanges entre les conseillers prud'hommes et les juges départiteurs, le 4° du premier paragraphe du présent article prévoit de compléter l'article L. 1423-3 du code du travail pour imposer qu'au moins une fois par an, et à chaque fois qu'ils le demandent, les juges départiteurs assistent à l'assemblée générale du conseil des prud'hommes. Les intéressés pourront ainsi débattre à cette occasion des questions relatives au fonctionnement de la juridiction.

C. Le renforcement de la conciliation, de l'orientation et de la mise en état de l'affaire et la transformation du bureau de conciliation

Il s'agit là du coeur de la réforme, qui consiste à renforcer le rôle du bureau de conciliation, renommé « bureau de conciliation et d'orientation », en renforçant son rôle de conciliation et en le chargeant de deux nouvelles tâches : l'orientation et la mise en état de l'affaire 470 ( * ) .

1) La conciliation

Trois dispositions participent du renforcement de l'exigence de conciliation.

La première, issue d'un amendement des rapporteurs, adopté en commission spéciale à l'Assemblée nationale, est symbolique, puisqu'elle se limite à rappeler, dans la nouvelle rédaction de l'article L. 1454-1 du code du travail, cette exigence de conciliation.

La deuxième, introduite en séance publique par un amendement de nos collègues députés Christophe Caresche et Jean-Yves Caullet, sous-amendé par les rapporteurs, autorise le bureau de conciliation et d'orientation à entendre séparément et confidentiellement les parties. Les auteurs de l'amendement justifient cette exception au principe du débat contradictoire par l'utilité qu'elle présente pour faire aboutir la conciliation (art. L. 1454-1 du même code).

Enfin, la dernière disposition en faveur du renforcement de la conciliation est la sanction de la non-comparution d'une partie. Le préalable de la conciliation joue contre le demandeur lorsque le défendeur est absent devant le bureau de conciliation, puisqu'il faut alors renvoyer l'affaire devant la formation de jugement. Afin d'inciter les défendeurs à se présenter à cette audience, un amendement des rapporteurs adopté en séance publique à l'Assemblée nationale, a proposé qu'en cas de non-comparution sans motif légitime le bureau de conciliation et d'orientation puisse immédiatement juger l'affaire, en l'état des pièces et des moyens que la partie comparante a contradictoirement communiqués. Il ne s'agit là que d'une faculté, laissée à l'appréciation du juge.

2) L'orientation

Actuellement, il n'existe pas de procédure d'orientation vers une formation plus qu'une autre. En cas d'échec de la conciliation, l'affaire est seulement transmise au bureau de jugement 471 ( * ) . De la même manière, le juge départiteur n'intervient que s'il y a partage des voix entre les conseillers prud'homaux, quelle que soit la formation en cause (bureau de jugement, bureau de conciliation ou formation de référé) 472 ( * ) . Cette absence d'orientation de l'affaire impose de suivre chaque étape avant d'aboutir à l'étape décisive, ce qui, dans certains cas, allonge considérablement les délais, alors que, dès le début, l'affaire semble destinée au départage.

Afin de créer une possibilité d'orientation plus précoce, le présent article prévoyait à l'origine, en cas d'échec de la conciliation, que le bureau de conciliation et d'orientation puisse, avec l'accord des parties et uniquement pour les contentieux relatifs à un licenciement ou une résiliation judiciaire de contrat de travail, renvoyer l'affaire devant le bureau de jugement dans sa composition restreinte. Obligation était faite à ce dernier de statuer en trois mois. S'il ne s'estimait pas compétent ou en cas de partage, l'affaire aurait été renvoyée au bureau de jugement présidé par un magistrat départiteur ( nouvel article L. 1454-1-1 du code du travail).

Le bureau de conciliation et d'orientation aurait aussi pu renvoyer les parties d'office devant le bureau de jugement présidé par le juge départiteur, en raison, plus largement, de la nature de l'affaire ( nouvel article L. 1454-1-2 du même code). Ce renvoi aurait été de droit à la demande des deux parties. Si une seule le demandait, le bureau de conciliation et d'orientation aurait décidé de la question, sachant qu'en cas de partage des voix, l'affaire devait aller obligatoirement devant le bureau de jugement présidé par le juge départiteur.

Dans un cas comme dans l'autre, il était précisé que la décision d'orientation était une mesure d'administration judiciaire et donc, à ce titre, insusceptible de recours.

Tout en conservant l'inspiration du dispositif ainsi décrit, les rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale ont souhaité le restreindre, afin, d'une part, d'éviter toute automaticité des renvois vers le juge départiteur et, d'autre part, de conserver le plus possible la maîtrise, par les parties, de l'évolution de leur affaire.

Ainsi, dans le premier cas (renvoi vers la formation restreinte du bureau de jugement) les députés ont supprimé le second renvoi automatique vers le bureau de jugement présidé par le juge départiteur, lorsque le bureau de conciliation ne parvient pas en son sein à un accord ou qu'il estime que l'affaire ne relève pas d'un cas de licenciement ou de résiliation judiciaire du contrat de travail. Ce faisant, les députés ont rétabli, dans cette situation, l'obligation d'un départage au sein de la formation restreinte de jugement ou l'obligation pour cette formation de se déclarer incompétente et de renvoyer l'affaire vers le bureau de jugement plénier.

Dans le second cas (renvoi d'office devant le bureau de jugement présidé par le juge départiteur), les députés ont supprimé le caractère automatique des renvois : ceux-ci ne peuvent intervenir qu'à la condition que les parties le demandent ou que la nature de l'affaire l'exige, mais le bureau de conciliation et d'orientation décide souverainement d'y donner suite 473 ( * ) .

3) La mise en état

Le nouvel article L. 1454-1-2 du code du travail, introduit à l'Assemblée nationale, en commission spéciale, par un amendement des rapporteurs, charge le bureau de conciliation et d'orientation d'assurer la mise en état de l'affaire, c'est-à-dire de faire procéder aux débats contradictoires et échanges de pièces et de conclusions qui permettent de mettre l'affaire en état d'être jugée.

Il est toutefois peu vraisemblable que le bureau de conciliation et d'orientation puisse accomplir cette tâche puisque, passée l'audience de conciliation, il lui revient de renvoyer l'affaire vers le bureau de jugement. La mise en état à laquelle il pourra procéder sera uniquement celle des affaires les plus simples, pour lesquelles les parties ont fourni, dès l'origine, les principales pièces nécessaires.

Un second amendement des rapporteurs, adopté en séance publique a donc corrigé cette mention en prévoyant qu'en tout état de cause, il revient au bureau de jugement d'assurer, si nécessaire, cette mise en état lorsque l'affaire lui est renvoyée. Un ou deux conseillers rapporteurs sont alors désignés, qui peuvent prescrire toutes les mesures nécessaires à cet effet 474 ( * ) .

4) L'ouverture d'une nouvelle possibilité de saisine pour avis de la Cour de cassation

Reprenant une recommandation du rapport du président Alain Lacabarats, le quatrième paragraphe du présent article autorise la saisine de la Cour de cassation, par les conseils de prud'hommes, les tribunaux d'instance ou les cours d'appel statuant en matière prud'homale, afin de solliciter son avis avant de statuer sur l'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif présentant une difficulté sérieuse, qui se pose dans de nombreux litiges.

Cette saisine en interprétation, mentionnée à l'article L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, n'est aujourd'hui prévue que pour les lois. Or, en matière de droit du travail, les conventions collectives tiennent lieu de lois aux partenaires sociaux. Votre rapporteur estime, pour cette raison, que l'extension des possibilités de saisine pour avis de la Cour de cassation est tout à fait judicieuse.

D. L'instauration d'un référentiel indicatif pour la fixation judiciaire des indemnités dues par l'employeur au salarié

Comme on l'a vu précédemment 475 ( * ) , la loi du 14 juin 2013 a introduit la possibilité pour l'employeur et le salarié licencié de conclure un accord devant le bureau de conciliation qui prévoit le versement par le premier d'une indemnité au second, fixée conformément à un barème établi en fonction de l'ancienneté du salarié (art. L. 1235-1 du code du travail).

Le Gouvernement a souhaité compléter ce dispositif, uniquement valable lors de la phase de conciliation, pour qu'il puisse s'appliquer aussi lors de la phase de jugement.

À son initiative les députés ont donc voté en séance publique un amendement autorisant les juges à prendre en compte un référentiel indicatif qui serait établi, après avis du Conseil supérieur de prud'homie, selon des modalités définies par décret en Conseil d'État. Il fixerait le montant de l'indemnité susceptible d'être allouée, indépendamment des autres indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en raison du licenciement intervenu, en fonction de l'ancienneté du salarié, de son âge et de sa situation par rapport à l'emploi.

Afin de respecter la liberté d'appréciation du juge, ce référentiel ne s'imposerait pas à lui, sauf si les parties en conviennent.

Votre rapporteur observe que le référentiel sera établi à partir de critères plus nombreux que ceux du barème soumis au bureau de conciliation, qui n'en compte qu'un : la seule ancienneté du salarié. Cette divergence est susceptible de nuire à ce dernier barème, puisque le demandeur ne serait pas incité à y recourir au stade de la conciliation, dans la mesure où il pourra espérer une meilleure indemnité par l'application du référentiel indicatif que pourrait utiliser le juge.

E. La position de votre commission

Votre commission partage les objectifs de la réforme proposée en matière procédurale.

À l'initiative de son rapporteur, elle a souhaité la prolonger, afin de conférer aux juges prud'homaux la possibilité de conduire les débats de manière plus rationnelle, en fixant aux parties des échéances qui évitent les renvois successifs, source d'allongement des délais.

À cet égard, votre rapporteur observe que l'expérience a montré qu'il était possible, tout en conservant le caractère oral d'une procédure, d'améliorer les conditions de la mise en état. C'est ce que la réforme du 1 er octobre 2010 a permis, devant les juridictions judiciaire, sociale ou commerciale 476 ( * ) . Cette réforme n'a toutefois pas concerné les conseils de prud'hommes.

Un premier amendement de votre rapporteur précise que les conseillers rapporteurs, chargés de la mise en état, peuvent adresser des injonctions aux parties, fixer un calendrier de procédure et prévoir la clôture des débats. En rehaussant cette règle procédurale au niveau législatif, il s'agit de conforter les conseillers rapporteurs dans leur rôle d'organisation des débats et des échanges de pièces, en soulignant les moyens dont ils disposent pour contraindre les parties à respecter les exigences procédurales et, le cas échéant, à abandonner tout comportement dilatoire.

Un deuxième amendement précise que, devant la cour d'appel statuant en matière prud'homale, la procédure est essentiellement écrite. La formule, qui s'inspire de celle retenue par le juge administratif pour caractériser la procédure applicable devant lui, n'interdit pas que les parties soient entendues, ni qu'elles débattent de l'affaire devant le juge d'appel. Toutefois, elle leur fait obligation de confirmer, dans des conclusions écrites, les moyens ou les prétentions qu'elles ont fait valoir à l'oral. L'instauration d'une telle procédure en appel permettra de raccourcir les délais d'instruction de l'affaire, au plus grand bénéfice des justiciables.

Dans la pratique, les parties pourront être représentées par leur avocat ou le défenseur syndical. Tel est d'ores et déjà la pratique, en appel, selon le rapport du président Alain Lacabarats, dans 90 % des cas.

Votre commission a par ailleurs apporté deux précisions au présent article.

S'agissant de la non-comparution d'une partie à l'audience de conciliation, elle a rappelé, conformément à la jurisprudence, qu'une partie est réputé comparaître, même si elle n'est pas présente en personne, dans la mesure où elle est représentée par son avocat ou tout autre personne qui en a la compétence (ce qui s'appliquerait aussi, par exemple, au défenseur syndical).

Enfin, à l'article L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, elle a étendu la possibilité de saisir pour avis la Cour de cassation de l'interprétation d'une convention collective à toutes les juridictions judiciaires et non pas seulement aux conseils de prud'hommes, tribunaux d'instance et cours d'appel. En effet, les tribunaux de grande instance, qui sont compétents en matière de conventions collectives ou de conflits collectifs, pourraient utilement profiter de cette faculté.

III - La création d'un statut du défenseur syndical

A. Le dispositif initial

Le présent article instaure un statut à part entière pour le défenseur syndical, en modifiant l'article L. 1453-4 du code du travail qui définit ses missions, et en insérant dans le même code cinq nouveaux articles (articles L. 1453-4-1 à L. 1453-4-5 ).

L'article L. 1453-4 prévoit actuellement que dans les établissements employant au moins onze salariés 477 ( * ) , les salariés exerçant des fonctions d'assistance ou de représentation devant les conseils de prud'hommes et désignés par les organisations syndicales et professionnelles représentatives au niveau national disposent du temps nécessaire à l'exercice de leurs fonctions dans la limite d'une durée ne pouvant excéder dix heures par mois.

Il dispose que ce temps d'intervention n'est pas rémunéré comme temps de travail, mais qu'il est assimilé à une durée de travail effectif. Il est par conséquent décompté pour la détermination de la durée des congés payés, du droit aux prestations d'assurances sociales et aux prestations familiales ainsi qu'au regard de tous les droits que le salarié tient du fait de son ancienneté dans l'entreprise.

Le présent article propose tout d'abord une nouvelle rédaction de l'article L. 1453-4 , qui fait explicitement mention à la dénomination de défenseur syndical . Celui-ci exerce des fonctions d'assistance ou de représentation devant les conseils de prud'hommes, mais également devant les cours d'appel en matière prud'homale, comme c'est d'ailleurs le cas actuellement. Les défenseurs syndicaux seront inscrits sur une liste arrêtée par l'autorité administrative sur proposition des organisations représentatives d'employeurs et de salariés au niveau national dans les conditions définies par décret.

Il insère ensuite les articles L. 1453-4-1 à L. 1453-4-5 dans le code du travail.

L'article L. 1453-4-1 prévoit que dans les établissements mentionnés à l'article L. 2311-1 employant au moins onze salariés, les défenseurs syndicaux disposent du temps nécessaire à l'exercice de leurs fonctions dans la limite de dix heures par mois .

L'article L. 1453-4-2 prévoit que le temps passé par le défenseur syndical hors de l'entreprise pendant les heures de travail pour l'exercice de sa mission est assimilé à une durée de travail effectif .

Il prévoit également que ces absences devront être rémunérées par l'employeur et n'entraîneront aucune diminution des rémunérations et avantages correspondants.

Par ailleurs, il indique que les employeurs seront remboursés par l'État des salaires maintenus pendant les absences du défenseur syndical pour l'exercice de sa mission ainsi que des avantages et des charges sociales correspondants.

Il renvoie enfin à un décret le soin de déterminer les modalités d'indemnisation du défenseur syndical qui exerce son activité professionnelle en dehors de tout établissement ou qui dépend de plusieurs employeurs.

L'article L. 1453-4-3 oblige l'employeur à accorder au défenseur syndical, à sa demande, des autorisations d'absence pour les besoins de sa formation. Ces autorisations seront délivrées dans la limite de deux semaines par période de quatre ans suivant la publication de la liste des défenseurs syndicaux sur laquelle il est inscrit.

Cet article dispose que la durée des congés de formation économique et sociale et de formation syndicale ne peut être imputée sur celle du congé payé annuel. Ces absences doivent être rémunérées par l'employeur, qui peut ensuite déduire ces dépenses de sa participation au financement de la formation professionnelle.

L'article L. 1453-4-4 impose au défenseur syndical de respecter le secret professionnel pour toutes les questions relatives au procédé de fabrication. Il est également tenu à une obligation de discrétion à l'égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l'employeur. Toute méconnaissance de ces obligations peut entraîner la radiation de l'intéressé de la liste des défenseurs syndicaux par l'autorité administrative.

Enfin, l'article L. 1453-4-5 dispose que l'exercice de la mission de défenseur syndical ne peut être une cause de rupture du contrat de travail .

B. Un dispositif renforcé par les députés

En séance publique, outre des amendements rédactionnels ou de correction d'erreur matérielle 478 ( * ) , deux amendements du rapporteur général et des rapporteurs thématiques ont été adoptés afin :

- de préciser que l' obligation de discrétion imposée au défenseur syndical s'étend aux informations de la personne qu'il assiste ou représente, ainsi qu'à celles données par la partie adverse dans le cadre d'une négociation ;

- d'indiquer que l'exercice de la mission de défenseur syndical ne peut être une cause de sanction disciplinaire ;

Surtout, un amendement des mêmes auteurs a étendu au défenseur syndical le statut de salarié protégé , imposant une autorisation de l'inspection du travail avant son licenciement, la rupture de son contrat de travail à durée déterminée, l'interruption ou notification du non-renouvellement de sa mission de travail temporaire.

En premier lieu, après avoir prévu à l'article L. 1453-9 du code du travail que le licenciement du défenseur syndical est soumis à la procédure administrative spécifique présentée par le livre IV de la deuxième partie du même code, l'amendement a complété la liste des salariés protégés définie à l'article L. 2411-1 du code du travail en mentionnant les défenseurs syndicaux 479 ( * ) .

Les 18 catégories actuelles de salariés protégés font l'objet de 13 sections spécifiques dans le code du travail pour préciser la portée de cette protection. C'est pourquoi l'amendement a introduit une 14 e section, comportant seulement l'article L. 2411-24 , afin de prévoir que le licenciement du défenseur syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.

En second lieu, l'amendement complète l'article L. 2412-1 du code du travail, qui fixe la liste des salariés protégés en cas de rupture d'un contrat à durée déterminée (CDD) , et crée une 15 e section, qui comporte uniquement l'article L. 2412-15 . Cet article prévoit que la rupture du CDD d'un défenseur syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail et dans les deux cas suivants :

- avant le terme du contrat, si une faute grave a été commise ou si l'inaptitude du salarié a été constatée par le médecin du travail ;

- à l'arrivée du terme, lorsque l'employeur n'envisage pas de renouveler le contrat comportant une clause de renouvellement.

En troisième lieu, l'amendement complète l'article L. 2413-1 du code du travail, qui fixe la liste des salariés protégés en cas d'interruption ou de notification du non-renouvellement de la mission d'un salarié temporaire, en mentionnant le défenseur syndical.

En quatrième lieu, il étend au défenseur syndical les règles procédurales prévues en cas de mise à pied disciplinaire d'un délégué syndical 480 ( * ) , en complétant l'article L. 2421-2 du code du travail qui fixe le champ d'application de ces règles.

Enfin, l'amendement introduit un chapitre IX à la fin du titre III du livre IV relatif aux sanctions pénales en cas de violation de la protection accordée au défenseur syndical , et qui comporte l'unique article L. 2439-1 . Cet article prévoit qu'est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros le fait de rompre le contrat de travail d'un salarié inscrit sur la liste administrative des défenseurs syndicaux, ou de transférer son contrat de travail lors d'un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, sans obtenir l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail.

C. La position de votre commission

Votre rapporteur approuve la création d'un véritable statut du défenseur syndical, dont la mission est d'assister ou de représenter les salariés comme les employeurs. Demandée de longue date par les organisations syndicales de salariés, et défendue dans le rapport précité de du président Alain Lacabarats 481 ( * ) , cette réforme permettra de combler le vide juridique actuel, que n'est pas parvenu à résorber la jurisprudence. Votre rapporteur est également favorable à la possibilité pour les défenseurs d'intervenir devant la cour d'appel en matière prud'homale, car leur intervention est souvent jugée utile et de qualité.

Il s'étonne toutefois que le Gouvernement ne soit pas en mesure d'évaluer les conséquences financières des nouveaux droits accordés aux défenseurs syndicaux, faute notamment d'en connaître le nombre précis aujourd'hui. Or, le droit de suivre deux semaines de formation par période de quatre ans, ainsi que la possibilité pour l'employeur de demander le remboursement par l'État, dans la limite de dix heures par mois, du maintien du salaire d'un salarié qui occupe une fonction de défenseur syndical, constitueront une charge nouvelle pour les finances publiques.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission spéciale a adopté un amendement de coordination, en prévoyant que le transfert d'un salarié qui occupe une fonction de défenseur syndical, s'il est compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.

IV - La fin du monopole de conciliation des conseils de prud'hommes

Actuellement, le conseil de prud'hommes dispose d'un monopole en matière de conciliation relative à un contrat de travail, ce qui interdit aux parties de tenter de régler leur conflit en dehors d'un recours à la juridiction.

En effet, l'article 24 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative 482 ( * ) , qui définit le cadre juridique de la médiation, exclut qu'elle s'applique aux contrats de travail, sauf lorsqu'ils présentent un caractère transfrontaliers 483 ( * ) . De la même manière, lorsqu'il a créé la convention de procédure participative, qui permet d'organiser une conciliation sous l'égide d'un avocat, le législateur a exclu qu'elle puisse s'appliquer à un différend entre un employeur et son salarié.

Le présent article vise à supprimer ces interdictions, afin de permettre aux parties de se concilier, dans le cadre d'une médiation ou d'une convention de procédure participative, avant, le cas échéant de saisir un juge aux fins d'homologation de leur accord.

Un amendement adopté en commission spéciale à l'initiative des rapporteurs de l'Assemblée nationale a toutefois prévu que, s'agissant des conventions de procédure participative, ne s'appliquerait pas la disposition selon laquelle, l'échec d'une telle convention dispense du préalable de conciliation devant la juridiction devant laquelle le différend est portée 484 ( * ) .

Votre commission a adopté l'article 83 ainsi modifié.

Article 84 - Entrée en vigueur de la réforme de la juridiction prud'homale

Objet : cet article règle l'entrée en vigueur de la réforme de la justice prud'homale.

Sauf mention contraire, le principe est que les dispositions de l'article 83 entrent en vigueur en même temps que la loi. Toutefois, le présent article diffère l'entrée en vigueur de certaines dispositions.

Ainsi, le deuxième paragraphe ( II. ) limite l'application des dispositions relatives à la nouvelle procédure prud'homale aux seules instances introduite à compter de la publication de la loi : il s'agit de ne pas porter atteinte aux instances en cours, en leur appliquant d'autres règles de procédures que celles qu'elles connaissent actuellement. Par exception, la disposition qui prévoit la désignation du juge départiteur parmi les juges du tribunal de grande instance plutôt que seulement parmi les juges d'instance entrerait en vigueur en même temps que la présente loi ( VI. ).

Le troisième paragraphe ( III. ) renvoie l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la formation initiale des conseillers prud'hommes au prochain renouvellement de ceux-ci.

La réforme du régime disciplinaire de ces conseillers n'interviendrait qu'un an et demi après la promulgation de la loi, afin de permettre la mise en place des instances nécessaires ( IV. ). Par dérogation le mandat des membres nommés à la commission nationale de discipline s'étendrait jusqu'au prochain renouvellement des membres du Conseil supérieur de la prud'homie.

L'instauration du défenseur syndical n'interviendrait qu'un an après la publication de la loi ( V. ).

Votre commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement de coordination avec certaines des modifications apportées à l'article 83 à l'Assemblée nationale.

Votre commission a adopté l'article 84 ainsi modifié.

Article 84 bis - Prolongation du mandat des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux

Objet : cet article, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, reporte au mois de janvier 2018 le renouvellement des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux. Il prolonge d'autant le mandat des assesseurs actuellement en fonction.

Le Gouvernement a justifié ce report par les graves dysfonctionnements qui ont marqué les élections de 2010 : en raison d'un manque de candidats, l'abstention s'est élevée à 74 %, de nombreux recours ont été déposés. Au total 18 tribunaux paritaires des baux ruraux n'ont pu se constituer, faute d'assesseurs.

Compte tenu du coût d'organisation de ces élections, il juge nécessaire de conduire une réflexion sur les modalités de désignation de ces assesseurs afin d'identifier les moyens d'éviter les dysfonctionnements constatés.

Votre commission a adopté l'article 84 bis sans modification.

Section 2

Dispositif de contrôle de l'application du droit du travail

L'article 20 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, déposé le 22 janvier 2014 sur le bureau de l'Assemblée nationale et devenu la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, prévoyait une profonde réforme de l'inspection du travail.

Outre une refonte de son organisation au niveau local, régional et national, ce texte créait de nouveaux dispositifs juridiques mis à disposition des agents de contrôle.

a) L'extension du dispositif d'arrêt de chantier

D'une part, le projet de loi renforçait considérablement le dispositif d'arrêt de chantier, qui devenait un arrêt temporaire de travaux ou d'activité à portée plus générale .

Le dispositif de l'arrêt de chantier s'est révélé très efficace pour lutter contre les risques de chute de hauteur, d'ensevelissement, ou liés aux opérations de confinement et de retrait de l'amiante. Créé en 1991, il a été utilisé 9 053 fois en 2011 et n'a pas généré de contentieux devant la Cour de cassation.

Le texte étendait ce dispositif à toutes les entreprises , et visait également l'ensemble des risques liés à l'amiante, ceux liés à des équipements de travail inappropriés ainsi que le risque électrique. L'obligation de procéder à un mesurage des valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) avant de recourir à l'arrêt temporaire d'activité « risque chimique » était également supprimé, afin d'encourager l'utilisation de ce dispositif aujourd'hui tombé en désuétude ( sept utilisations seulement en 2011).

En outre, les contrôleurs du travail pouvaient arrêter eux-mêmes des activités ou des travaux et autoriser leur reprise, sans qu'il fût nécessaire d'obtenir une délégation de l'inspecteur du travail. Enfin, le recours contre une décision d'arrêt de travaux relevait de la compétence du juge administratif.

a) La création des sanctions administratives

D'autre part, le texte créait des sanctions administratives , afin de sanctionner plus rapidement les infractions élémentaires aux dispositions du code du travail.

Ces sanctions concernaient les infractions relatives :

- à la durée maximale du travail, au décompte du temps de travail et aux repos obligatoires ;

- au respect du salaire minimum ;

- aux règles d'hygiène et d'hébergement.

Afin de respecter le principe du contradictoire et les droits de la défense de l'employeur, le texte prévoyait deux filtres dans cette procédure :

- il revenait à l'autorité administrative compétente (autrement dit le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte)) de prononcer l'amende administrative, sur rapport motivé de l'agent de contrôle ;

- avant toute décision, l'administration devait informer par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée en portant à sa connaissance les manquements retenus et en l'invitant à présenter ses observations dans un délai d'un mois.

Le montant de l'amende était plafonné à 2 000 euros par manquement et par travailleur concerné , et pouvait même être doublé si un nouveau manquement était constaté dans un délai d'un an 485 ( * ) . L'autorité administrative chargée de fixer le montant de l'amende devait prendre en compte les circonstances et la gravité du manquement , le comportement de son auteur, ses ressources et ses charges. Le délai de prescription de l'action de l'administration était fixé à deux ans .

En outre, le projet de loi prévoyait que des amendes administratives pouvaient être prononcées si l'employeur ne respectait pas une décision d'arrêt temporaire de travaux ou d'activité ou une demande de vérification, d'analyse ou de mesurage 486 ( * ) .

Lors de l'examen du texte en séance publique le 20 février 2014, le Sénat a adopté les amendements de suppression de ces dispositions présentés par les groupes écologiste, UMP, UDI-UC et CRC, contre l'avis du rapporteur et du Gouvernement. L'opposition du Sénat à la réforme de l'inspection du travail a conduit le Gouvernement à en réaliser une partie par la voie réglementaire.

Le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a en effet publié le 20 mars 2014 le décret n° 2014-359 relatif à l'organisation du système d'inspection du travail, qui reprend seulement les dispositions relatives à la réorganisation du système d'inspection du travail.

La proposition de loi relative aux pouvoirs de l'inspection du travail, déposée par le groupe socialiste, républicain et citoyen et apparentés, a été enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 27 mars 2014. À travers ses cinq articles, elle reprenait l'essentiel des dispositions de nature législative du projet de loi précité.

L'examen de cette proposition, engagé le 14 mai 2014, a cependant été interrompu pour des raisons liées à l'encombrement du calendrier parlementaire.

Le Gouvernement a fait le choix de relancer la réforme de l'inspection du travail en prévoyant, à l' article 85 du présent projet de loi, une habilitation à légiférer par ordonnance sur ce thème.

Article 85 - Habilitation du Gouvernement à réformer par ordonnance l'inspection du travail et à ouvrir un concours spécifique aux contrôleurs du travail pour accéder au corps des inspecteurs du travail

Objet : cet article autorise le Gouvernement à réformer par ordonnance l'inspection du travail afin notamment de renforcer ses prérogatives et de réviser l'échelle des peines en matière de droit du travail. Il l'autorise également à fixer par ordonnance les modalités du concours à l'attention des contrôleurs du travail qui souhaitent devenir inspecteurs.

I - Le dispositif proposé

Cet article autorise le Gouvernement à prendre deux ordonnances , dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution.


La première ordonnance , qui porte sur le système d'inspection du travail et certaines sanctions prévues dans le code du travail, comprendra trois volets.

Le premier volet vise à renforcer le rôle de surveillance et les prérogatives du système d'inspection du travail, à étendre et coordonner les différents modes de sanctions et à réviser l'échelle des peines en matière de droit du travail, notamment de santé et de sécurité au travail.

Le deuxième volet consiste à réviser la nature et le montant des peines et des sanctions applicables en cas d'entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel.

Le dernier volet a pour objet d'abroger les dispositions devenues sans objet et d'assurer la cohérence rédactionnelle au sein du code du travail et entre ce code et les autres codes.


La seconde habilitation autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi afin d'organiser l'accès au corps de l'inspection du travail par la voie d'un concours réservé aux seuls agents relevant du corps des contrôleurs du travail et remplissant des conditions d'ancienneté.

Cette ordonnance s'inscrit dans la continuité de la mesure prévue dans la loi du 1 er mars 2013 portant création du contrat de génération 487 ( * ) , qui avait prévu un examen professionnel pendant trois ans à destination des contrôleurs du travail.

Le plan de transformation d'emploi
des contrôleurs du travail en inspecteurs du travail

Le processus de transformation progressive des contrôleurs du travail (CT) en section en inspecteurs du travail (IT) a été lancé en 2013.

Au 1 er janvier 2013, le corps de l'inspection du travail comptait 1 783 agents (1 245 inspecteurs du travail, 406 directeurs-adjoints du travail et 123 directeurs du travail), tandis que le corps des contrôleurs du travail regroupait 3 423 agents .

L'essentiel des inspecteurs et contrôleurs du travail sont en poste dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte).

Les sections d'inspection , qui sont l'échelon territorial d'intervention de l'inspection du travail, sont animées par 2 229 fonctionnaires de contrôle équivalents temps plein (ETP) : 790 ETP d'inspecteurs du travail, et 1 436 ETP de contrôleurs.

En application de l'article 6 de la loi n° 2013-185 du 1 er mars 2013 portant création du contrat de génération et du décret n° 2013-511 du 18 juin 2013 fixant les modalités exceptionnelles de recrutement dans le corps de l'inspection du travail, ce sont 540 contrôleurs du travail sur trois ans qui, à l'issue d'un examen professionnel et d'une formation de six mois, deviendront inspecteurs du travail.

Ce plan de transformation d'emploi s'est traduit en 2013 par la mise en oeuvre d'un examen professionnel d'inspecteur du travail (EPIT) dont les modalités ont été fixées par le décret précité du 18 juin 2013. En 2013, 1 161 contrôleurs du travail se sont inscrits à l'EPIT. La première promotion de 130 inspecteurs stagiaires est entrée en fonction en juin 2014 ( 205 sont attendus en 2015, comme en 2016).

Source : commission spéciale du Sénat

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Un amendement des rapporteurs thématiques et du rapporteur général, adopté en commission spéciale, a restreint le champ de l'habilitation, puisque la révision de l'échelle des peines prévue dans l'ordonnance ne doit plus porter de façon générale sur le droit du travail, mais est cantonnée aux sujets relatifs à la santé et à la sécurité .

Trois amendements identiques ont été adoptés en séance publique et suppriment la possibilité pour le Gouvernement de réviser, par voie d'ordonnance, la nature et le montant des peines et des sanctions applicables en cas d'entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel 488 ( * ) .

En effet, un amendement du Gouvernement, qui a créé l'article 85 bis , a été adopté au même moment pour inscrire directement dans le projet de loi la suppression de la peine d'emprisonnement en cas de délit d'entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel.

III - La position de votre commission

Sur proposition de votre rapporteur, la commission spéciale a adopté un amendement de suppression de la première habilitation demandée par le Gouvernement, visant à réformer le système d'inspection du travail .

Sur la forme, le Parlement est rarement favorable aux habilitations à légiférer par ordonnance. En outre, l'ordonnance devrait reprendre l'essentiel des dispositions de l'article 20 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, qui a déjà été rejeté par le Sénat. Enfin, une proposition de loi dite « Robiliard », reprenant l'essentiel de l'article 20 précité, a été adoptée par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale le 14 mai 2014, mais n'a pas été examinée en séance publique.

Votre rapporteur déplore le choix du Gouvernement de recourir à une habilitation à légiférer par ordonnance, dans la mesure où le Parlement est informé depuis plus d'un an de ses intentions en matière de réforme de l'inspection du travail. En effet, il aurait été plus cohérent d'insérer dans le présent projet de loi le texte de la proposition de loi relative aux pouvoirs de l'inspection du travail issu des travaux de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, ou de poursuivre l'examen de cette dernière au Parlement. Le Gouvernement justifie le choix de légiférer par ordonnance par la nécessité de poursuivre la réflexion afin de respecter le droit européen et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), et notamment celle reposant sur l'article 4 du protocole n° 7 de la Convention européenne des droits de l'Homme. Cet article stipule que « nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État ». La Cour a eu l'occasion le 20 mai 2014 489 ( * ) d'appliquer ce principe, dit « non bis in idem », jugeant que si une sanction administrative ou pénale a été prononcée, aucune poursuite ne peut plus être engagée pour les mêmes faits . Or, les sanctions administratives prévues initialement par le Gouvernement concernaient les infractions à la durée maximale du travail, au respect du salaire minimum et aux règles d'hygiène et d'hébergement, tout en conservant la possibilité pour l'agent de l'inspection du travail de poursuivre ces infractions par la voie pénale, comme c'est le cas aujourd'hui.

Sur le fond, des inquiétudes ont été exprimées sur les points suivants : montant trop élevé des sanctions administratives, garanties procédurales insuffisantes pour mettre en oeuvre ces sanctions et les transactions pénales, droit de communication des documents accordé aux inspecteurs du travail insuffisamment encadré . Or, le recours à une ordonnance ne permettrait pas de dissiper ces craintes légitimes.

Votre rapporteur a, en revanche, souhaité conserver la seconde demande d'habilitation relative aux concours spécifique ouvert aux contrôleurs du travail.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 85 bis (art. L.2316-1, L. 2328-1, L. 2328-2, L. 2346-1, L. 2355-1, L. 2365-1, L. 2335-1, L. 2375-1, L. 4742-1 du code du travail) - Réforme du délit d'entrave relatif à une institution représentative du personnel (IRP)

Objet : cet article additionnel, introduit par un amendement du Gouvernement, modifie la définition du délit d'entrave relatif aux institutions représentatives du personnel (IRP). Il double l'amende mais supprime la peine d'emprisonnement d'un an pour toute personne qui porte ou tente de porter atteinte à l'exercice régulier des fonctions d'une IRP.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le du présent article modifie le contour du délit d'entrave relatif aux délégués du personnel .

L'article L. 2316-1 du code du travail prévoit que le fait de porter ou de tenter de porter atteinte à la libre désignation des délégués du personnel ou à l'exercice régulier de leurs fonctions est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros.

Le projet de loi apporte deux modifications à cet article :

- il maintient la peine d'emprisonnement d'un an uniquement pour l'entrave à la libre désignation des délégués du personnel, tout en doublant l'amende correspondante (7 500 euros) ;

- il double également l'amende pour toute personne qui porte ou tente de porter atteinte à l'exercice régulier de leurs fonctions, mais supprime la peine d'emprisonnement.

Par coordination, le procède à des modifications analogues dans la définition du délit d'entrave relatif au comité d'entreprise et à toutes les structures assimilables 490 ( * ) . Le modifie dans le même sens l'article L. 2335-1 , qui décline le délit d'entrave aux comités de groupe , tandis que le apporte des modifications similaires à l'article L. 4742-1 , relatif au délit d'entrave à l'action des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Le prévoit que le fait de ne pas établir et de soumettre annuellement le bilan social au comité d'entreprise ou d'établissement dans les entités employant plus de 300 salariés ne sera plus puni par une peine d'emprisonnement , tout en doublant l'amende correspondante 491 ( * ) .

II - La position de votre commission

Votre rapporteur constate que la réforme du délit d'entrave aux institutions représentatives du personnel proposée par cet article, consistant en une suppression partielle de la peine d'emprisonnement, n'est pas conforme à l'engagement du Président de la République de remplacer les peines de prison actuelles par des sanctions financières.

En effet, lors du second Conseil stratégique de l'attractivité organisé le 19 octobre 2014, le Président de la République déclarait que « les peines pénales associées au délit d'entrave, qui parfois même pouvaient être des peines de prisons qui n'étaient bien sûr jamais prononcées mais qui néanmoins pouvaient inquiéter, seront remplacées par des sanctions financières », afin de « donner davantage confiance aux investisseurs étrangers ».

C'est pourquoi votre commission spéciale, sur proposition de votre rapporteur, a adopté un amendement supprimant la peine d'emprisonnement qui était maintenue pour le délit d'entrave à la constitution d'une institution représentative du personnel. En contrepartie, l'amende afférente à ce délit est portée de 7 500 à 15 000 euros.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 86 (art. 155 B du code général des impôts) - Réforme du régime des impatriés

Objet : cet article complète le régime fiscal des « impatriés » afin de prévoir qu'il s'applique également lorsque la personne bénéficiaire change d'emploi à l'intérieur de la même entreprise ou du même groupe, pourvu que son poste reste établi en France.

I - Le dispositif proposé

Comme le rappelle l'évaluation préalable annexée au présent projet de loi, « le régime des impatriés vise à faciliter le recrutement de cadres étrangers à fort potentiel par les entreprises françaises en exonérant notamment la prime d'impatriation , pour un montant forfaitaire évalué à 30 % de la rémunération, ainsi que le surcroît de rémunération liée à l'impatriation elle-même. Les personnes impatriées bénéficient en outre d'une exonération temporaire d'impôt sur la fortune des biens situés hors de France ». Il est applicable pour une période de cinq ans .

Évolution du nombre de bénéficiaires et du coût du régime des impatriés

ANNÉE

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Nombre de bénéficiaires

7 350

7 270

8 430

8 600

9 070

9 840

11 070

Coût (en millions d'euros)

40

50

70

80

110

115

135

Gain moyen annuel par bénéficiaire (en euros)

5 442

6 878

8 304

9 302

12 128

11 687

12 195

Source : évaluation préalable annexée au présent projet de loi

Le régime des impatriés est codifié à l'article 155 B du code général des impôts, qui prévoit qu'il s'applique aux salariés « appelés de l'étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France ».

En l'état actuel du droit, le bénéfice du régime est donc perdu si, au cours des cinq années d'application dudit régime, le salarié change d'emploi, y compris à l'intérieur de la même entreprise ou du même groupe .

Le présent article complète donc l'article 155 B du code général des impôts afin de préciser que « le bénéfice du régime d'exonération est conservé en cas de changement de fonctions, pendant la durée [de cinq ans] , au sein de [la même entreprise] établie en France ou au sein d'une autre entreprise établie en France appartenant au même groupe ».

Cette disposition sera applicable aux changements de fonction intervenus à compter de la publication de la présente loi.

II - La position de votre commission

Le régime fiscal des impatriés fait partie des outils dont la France dispose en matière d'attractivité des grandes entreprises, nécessaire au maintien des sièges sociaux sur notre territoire. Le comité « Guillaume », mis en place en 2011 pour évaluer les dépenses fiscales, avait relevé que ce régime « rencontre un succès important ».

Il est toutefois regrettable qu'une interprétation trop restrictive conduise à le priver de son plein effet. De fait, il est très probable que, sur une durée de cinq ans, un cadre supérieur soit appelé à changer de fonctions au sein de son entreprise, ce qui le conduirait à perdre le bénéfice du régime.

Le présent article retient donc une approche pragmatique favorable à l'emploi très qualifié .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 86 bis (art. L. 312-1 et L. 312-1-3 du code monétaire et financier) - Droit au compte

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, vise à rendre plus efficace la procédure du droit au compte.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le « droit au compte bancaire » est régi par l'article L. 312-1 du code monétaire et financier qui dispose que « toute personne physique ou morale domiciliée en France, dépourvue d'un compte de dépôt, a droit à l'ouverture d'un tel compte dans l'établissement de crédit de son choix . Toute personne physique de nationalité française résidant hors de France, dépourvue d'un compte de dépôt, bénéficie également du droit à l'ouverture d'un tel compte dans l'établissement de crédit de son choix ».

Si un établissement refuse d'ouvrir un compte, la personne concernée peut saisir la Banque de France qui désigne d'office un établissement, qui doit alors ouvrir un compte dans un délai de trois jours.

Par ailleurs, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), l'organe de surveillance des banques, peut sanctionner les établissements qui ne mettent pas en oeuvre la législation relative au droit au compte. C'est ainsi que LCL et la Société générale ont récemment été condamnés à un blâme et à une sanction pécuniaire de 2 millions d'euros par la commission des sanctions de l'ACPR.

Afin de rendre encore plus effective la procédure de droit au compte, le présent article complète l'article L. 312-1 du code monétaire et financier en indiquant que l'ACPR est systématiquement et immédiatement informée par la Banque de France lorsque celle-ci a connaissance d'un refus d'ouverture de compte . Le présent article effectue également une coordination à l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier.

L'ACPR peut ensuite mettre en oeuvre les mesures adéquates, y compris par le biais de son pouvoir disciplinaire, pour que l'établissement respecte ses obligations .

II - La position de votre commission

Le présent article répond à une double préoccupation .

D'abord, il entend améliorer la procédure du droit au compte pour les personnes en situation d'exclusion bancaire.

Ensuite, et comme l'a souligné en séance publique notre collègue député Frédéric Lefebvre, il vise également la situation des Français établis hors de France, en particulier aux États-Unis, pour lesquels certains établissements ont décidé de clôturer unilatéralement leurs comptes ouverts en France 492 ( * ) , en violation de la législation du droit au compte.

Bien évidemment, l'information systématique de l'ACPR ne signifie pas qu'une procédure de sanction sera engagée. De même, l'Autorité n'a pas vocation à traiter chaque dossier individuel. Il s'agit plutôt de lui permettre d'identifier les réseaux bancaires dont les pratiques seraient contraires à la législation.

Ce dispositif a surtout une vertu préventive en signalant aux établissements de crédit qu'ils ne peuvent échapper à leurs obligations en matière de droit au compte.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification .

Article 86 ter - Rapport sur le crédit d'impôt famille

Objet : cet article, introduit par l'Assemblée nationale, demande un rapport au Gouvernement sur le crédit d'impôt famille.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le crédit d'impôt famille est prévu par l'article 244 quater F du code général des impôts. Le crédit d'impôt est accordé aux entreprises qui financent des crèches pour leurs salariés, à hauteur de 50 % des sommes engagées pour leur création et leur fonctionnement. Il s'élève à 25 % des dépenses engagées lorsque l'entreprise verse une aide financière à la garde d'enfants. Son montant est plafonné à 500 000 euros.

D'après le rapport sur les Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2015, le crédit d'impôt famille a concerné 6 190 entreprises en 2013, représentant un coût pour l'État de 59 millions d'euros .

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue députée Catherine Coutelle et de plusieurs membres du groupe socialiste, avec un double avis de sagesse de la commission et du Gouvernement, demande qu'un rapport soit remis au Parlement, dans un délai de six mois, sur le crédit d'impôt famille et « formulant, le cas échéant, des propositions d'amélioration de ce dispositif ».

II - La position de la commission

La demande de nos collègues députés sur le crédit d'impôt famille est pour le moins floue et ne semble pas être motivée par la nécessité de régler un problème identifié .

Au vu de ces éléments et conformément à la position établie par vos rapporteurs, votre commission a adopté un amendement de suppression du présent article. En l'espèce, il sera toujours loisible aux commissions compétentes de se saisir du crédit d'impôt famille et, plus généralement, de la question des modes de garde à l'occasion de l'examen du prochain projet de loi de finances ou du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Votre commission spéciale a supprimé cet article .

Section 3 - Le dialogue social au sein de l'entreprise

Article 87 A (nouveau) (art. L. 2312-1 à L. 2312-5, L. 2322-2 et L. 2391-1 [nouveau] du code du travail) - Aménagement des seuils sociaux

Objet : cet article additionnel, inséré par votre commission spéciale sur proposition de votre rapporteur, relève de onze à vingt et un le nombre de salariés à partir duquel une entreprise doit organiser l'élection d'un délégué du personnel et met en place un mécanisme de lissage dans le temps des conséquences du franchissement des seuils sociaux.

La législation sociale varie selon la taille des entreprises à laquelle elle s'applique. Il est tout à fait logique qu'une entreprise employant plusieurs centaines de salariés, qui réalise un chiffre d'affaires important et dispose de moyens conséquents pour gérer ses ressources humaines, ait à remplir des obligations administratives liées à la nécessité d'entretenir un dialogue social fourni avec les représentants des salariés. Toutefois, une PME ne peut être soumise à ces mêmes obligations .

Au fil des années, l'enrichissement du cadre législatif relatif aux institutions représentatives du personnel (IRP), avec notamment le développement de la consultation du comité d'entreprise sur des thèmes comme les orientations stratégiques de l'entreprise ou le crédit d'impôt compétitivité emploi (2013), a fait apparaître des effets de seuil , incitant les employeurs à limiter la croissance de leur entreprise ou à contourner la réglementation, en créant par exemple des structures indépendantes, pour ne pas dépasser 10 , 20 ou 50 salariés.

Ainsi, selon l'Insee, « en l'absence de discontinuités dans la législation, la probabilité qu'une entreprise de 9 salariés franchisse dans l'année le seuil de 10 salariés passerait de 24,5 % à 29,4 % (+ 5 points). Pour les entreprises de 19 et 49 salariés, les probabilités de franchir les seuils de 20 et 50 salariés seraient supérieures, respectivement, de 9 et 14 points » 493 ( * ) . Régulièrement dénoncée par les chefs d'entreprise et constatée, sur le terrain, par la délégation sénatoriale aux entreprises, l'existence de ces effets de seuil est un obstacle au développement de l'activité .

Cette question a été abordée par les partenaires sociaux dans le cadre de la négociation nationale interprofessionnelle qu'ils ont menée sur le thème de la modernisation du dialogue social d'octobre 2014 à janvier 2015. Son échec illustre toutefois les divergences qui existent entre organisations syndicales et patronales sur cette question.

Alors que le Gouvernement a annoncé le dépôt prochain d'un projet de loi à l'ambition limitée , en particulier sur l'évolution des IRP, votre rapporteur a proposé à votre commission spéciale cet article additionnel qui vise à répondre, dans les plus brefs délais et de manière pérenne, aux difficultés que rencontrent les entreprises lorsqu'elles franchissent un seuil social.

Son paragraphe I porte de 11 à 21 salariés l'effectif à partir duquel la mise en place de délégués du personnel est obligatoire. A l'heure actuelle, et malgré cette obligation, seuls 37 % des établissements de 11 à 19 salariés sont, selon la Dares, dotés d'au moins un type de représentation du personnel 494 ( * ) .

S'inspirant d'une disposition applicable en matière de financement de la formation professionnelle continue (article L. 6331-15 du code du travail), le paragraphe III institue une période de trois ans , à compter du franchissement d'un seuil, durant laquelle les entreprises en croissance seraient exonérées de l'application des obligations auxquelles le droit commun les soumet en matière de représentation et de consultation du personnel (à partir du nouveau seuil de 21 salariés pour les délégués du personnel et de celui de 50 salariés pour le délégué syndical, le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Il s'agit toutefois bien d'une période transitoire , durant laquelle les entreprises sont évidemment libres de mettre en place des institutions représentatives du personnel par voie conventionnelle, si elles le souhaitent.

En conséquence, le paragraphe II supprime une disposition issue de la loi du 14 juin 2013 495 ( * ) , qui prévoit une période de souplesse d'un an en cas de franchissement du seuil de 50 salariés pour se conformer aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise, mais dont le décret d'application n'est jamais paru.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 87 (art. L. 2312-5, L. 2314-11, L. 2314-20, L. 2314-31, L. 2322-5, L. 2324-13, L. 2324-18, L. 2327-7 et L. 2632-1 du code du travail) - Transfert au juge judiciaire de la compétence de l'autorité administrative en matière préélectorale

Objet : cet article propose de confier au juge judiciaire l'intégralité de la compétence en matière de règlement des différends liés aux élections professionnelles dans les entreprises.

I - Le dispositif proposé

A. La répartition des compétences en matière d'élections professionnelles

Toutes les entreprises employant au moins onze salariés sont tenues d'organiser des élections professionnelles visant à désigner les membres des institutions représentatives du personnel (IRP). Il s'agit, entre onze et cinquante salariés, des délégués du personnel (DP), chargés principalement de présenter à l'employeur les réclamations individuelles ou collectives des salariés et de saisir l'inspection du travail en cas d'infraction à la législation du travail (article L. 2313-1 du code du travail). À partir de cinquante salariés, un comité d'entreprise (CE), chargé « d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production » (article L. 2323-1), doit être mis en place. Ces élus du personnel ont un mandat de quatre ans .

Les articles L. 2314-25 et L. 2324-23 confient au juge judiciaire, c'est-à-dire au tribunal d'instance , le contentieux des contestations relatives à l'électorat et à la régularité des opérations électorales ainsi que, pour le CE, à la désignation de représentants par chacune des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise. Toutefois, le code du travail confie à l'autorité administrative , soit le directeur régional de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), soit l'inspecteur du travail, une compétence résiduelle pour trancher les litiges préélectoraux, liés à la préparation des élections et à la définition du cadre dans lequel elles vont se dérouler.

En effet, les élections sont précédées de la négociation par l'employeur et les organisations syndicales d'un protocole d'accord préélectoral afin d'en définir les conditions d'organisation. Celui-ci doit fixer :

- le nombre des collèges électoraux (ouvriers et employés ; ingénieurs, chefs de service, techniciens, agents de maîtrise et assimilés) et leur composition (articles L. 2314-10 et L. 2324-12) ;

- la répartition du personnel et des sièges entre ces collèges (articles L. 2314-11 et L. 2324-13) ;

- les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales, qui doivent respecter les principes généraux du droit électoral (articles L. 2314-23 et L. 2324-21).

Cet accord peut avoir à déterminer la division de l'entreprise en établissements distincts, auprès desquels des DP doivent être élus et, le cas échéant, un CE doit être créé. Il peut également délimiter le périmètre d'une unité économique et sociale (UES), regroupant des sociétés distinctes mais placées sous le même pouvoir de direction afin d'en unifier la représentation du personnel.

La validité de ce protocole est soumise à une double condition de majorité : il doit avoir été signé par la majorité des organisations syndicales l'ayant négocié, et parmi celles-ci doivent figurer les organisations représentatives ayant recueilli la majorité des voix lors des dernières élections professionnelles ou, à défaut, la majorité des organisations représentatives dans l'entreprise (articles L. 2314-3-1 et L. 2324-4-1).

Ainsi, lorsqu'aucun protocole d'accord préélectoral n'a pu être signé, le code du travail confie à l'autorité administrative la mission de répartir les sièges et le personnel entre les différents collèges électoraux (articles L. 2314-11 et L. 2324-13) ou encore d'identifier les établissements distincts qui composent l'entreprise (articles L. 2314-31, L. 2322-5 et L. 2327-7).

B. Unifier la compétence électorale au sein de l'ordre judiciaire

L'article 87 du projet de loi confie au juge judiciaire la résolution de l'ensemble des différends liés à la représentation des salariés dans l'entreprise et à l'élection des représentants du personnel. Lui sont ainsi transférés, en l'absence d'accord préélectoral :

- la fixation des collèges électoraux et la répartition des sièges si l'autorité administrative a imposé, « lorsque la nature et l'importance des problèmes communs aux entreprises du site le justifient », l'élection de délégués du personnel dans les établissements de moins de onze salariés situés sur des sites où sont employés au moins cinquante salariés (article L. 2312-5) ;

- la répartition du personnel dans les collèges électoraux ainsi que celle des sièges entre ces derniers (articles L. 2314-11 et L. 2324-13) ;

- la reconnaissance des établissements distincts pour l'élection des délégués du personnel et des représentants du personnel au comité d'entreprise (articles L. 2314-31 et L. 2322-5) ;

- la reconnaissance des établissements distincts et la répartition des sièges entre les différents établissements et collèges électoraux pour la constitution du comité central d'entreprise (article L. 2327-7).

Le juge judiciaire devient également compétent pour autoriser des dérogations aux conditions d'ancienneté requises pour être électeur (avoir au moins seize ans révolus, avoir travaillé au moins trois mois dans l'entreprise et jouir de ses droits civiques) et éligible (avoir au moins dix-huit ans et avoir travaillé au moins un an dans l'entreprise) aux élections des délégués du personnel (article L. 2314-20) et des représentants du personnel au comité d'entreprise (article L. 2324-18). La consultation des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise, qui était obligatoire lorsque cette tâche était confiée à l'inspecteur du travail, est supprimée .

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté trois amendements rédactionnels ou de coordination de ses rapporteurs à cet article, qui n'a pas été modifié en séance publique.

III - La position de votre commission

La dichotomie actuelle en matière de contrôle de la mise en oeuvre de la représentation des salariés dans l'entreprise, qui confie à l'administration un rôle d'arbitre des désaccords organisationnels préélectoraux, a pu avoir sa justification à une époque où le principe même de la mise en place d'institutions représentatives du personnel pouvait être contesté et où les services de l'État devaient jouer un rôle de médiateur. Aujourd'hui, la situation a évolué : la légitimité de l'autorité judiciaire pour traiter de l'ensemble des questions portant sur les élections professionnelles, de leur préparation à la contestation de leurs résultats, est incontestable

L'état actuel du droit est source de complexité et la norme manque de lisibilité pour ceux à qui elle s'adresse. Sans être un frein au développement du dialogue social dans l'entreprise, elle ne le favorise pas. De nombreuses incohérences peuvent être relevées. Ainsi, comme le souligne l'étude d'impact annexée au projet de loi, si la Direccte peut bien répartir les catégories de personnel entre les collèges électoraux, c'est au juge qu'il appartient de décider à quel collège un salarié appartient. De plus, l'existence de deux voies de recours aurait pour conséquence de fragiliser les IRP nouvellement élues avec la possibilité de voir des élections annulées plusieurs années après leur déroulement.

Dans les faits, l'intervention des Direccte en cas de désaccord préélectoral reste limitée puisque, selon l'étude d'impact, 117 décisions d'arbitrage ont été rendues en 2012. Selon les informations communiquées à votre rapporteur par la Direccte Ile-de-France, l'inspection du travail a réalisé en 2014 à Paris 23 interventions pour régler un différend préélectoral dans une entreprise, tandis que le nombre de décisions prises, au niveau régional, pour ce motif, est compris entre 60 et 80 selon les années. La direction générale du travail (DGT) estime quant à elle que l'inspection du travail a pris en 2012, sur l'ensemble du territoire, 507 décisions relevant de la compétence transférée par le présent article.

Les moyens humains dégagés au sein de l'inspection du travail seront limités et absorbés par la charge croissante liée à l'instruction des recours hiérarchiques en matière de licenciement des salariés protégés. Il n'en reste pas moins que l'unification de la compétence proposée par cet article est une mesure de simplification qui doit être saluée.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 88 (art. L. 3142-7 du code du travail) - Congés de formation économique et sociale ou de formation syndicale

Objet : cet article modifie la définition des organisations syndicales de salariés pouvant offrir des formations économiques, sociales ou syndicales aux salariés et en étend le champ afin de tenir compte des modifications apportées par la loi du 5 mars 2014.

I - Le dispositif proposé

Selon l'article L. 3142-7 du code du travail, tout salarié qui souhaite bénéficier d'une formation économique, sociale ou syndicale dispensée par un organisme rattaché à une organisation syndicale représentative au niveau national ou par un institut spécialisé peut obtenir un congé. Celui-ci est d'une durée maximale de douze jours par an et ne s'impute pas sur les congés payés.

La loi du 5 mars 2014 496 ( * ) a institué un fonds paritaire chargé du financement des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs. Ses ressources proviennent principalement d'une contribution des employeurs et d'une subvention de l'État. Il contribue au financement de la formation économique, sociale et syndicale des salariés appelés à exercer des fonctions syndicales (article L. 2135-11) en versant notamment ses crédits aux « organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel et [à] celles dont la vocation statutaire revêt un caractère national et interprofessionnel et qui recueillent plus de 3 % des suffrages exprimés », au niveau national, lors des dernières élections professionnelles, dès lors qu'elles organisent de telles formations (3° de l'article L. 2135-12).

En conséquence, l'article 88 du projet de loi modifie la rédaction de l'article L. 3142-7 du code du travail pour disposer que les stages et sessions de formation économique ou sociale ou de formation syndicale peuvent être dispensés par des centres non plus rattachés à des « organisations syndicales de salariés reconnues représentatives sur le niveau national » mais aux « organisations syndicales mentionnées au 3° de l'article L. 2135-12 ».

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - La position de votre commission

Jusqu'au 1 er janvier 2015, l'État apportait directement une aide financière à la formation économique, sociale et syndicale des salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales et réalisée au sein de centres de formation rattachés aux organisations syndicales représentatives ou de douze instituts spécialisés agréés. En 2012, 46 127 stagiaires ont été formés, dont 42 497 par les syndicats. Encadrée par des conventions triennales, la dépense pour l'État a été, en 2013, de 22,79 millions d'euros , dont 21,45 millions ont bénéficié aux organisations syndicales et 1,33 million aux instituts du travail.

Depuis cette date, l'État ne verse plus directement de subventions aux organisations syndicales au titre de la formation. Les crédits qui y sont consacrés sont désormais destinés au fonds paritaire de financement du dialogue social, qui est ensuite chargé de les répartir entre les syndicats. Une première part est attribuée proportionnellement à l'audience obtenue par chacun d'entre eux, lors des élections professionnelles, au niveau national et interprofessionnel, tandis qu'une seconde part, qui ne peut être inférieure à 7,9 millions d'euros , est divisée équitablement entre toutes les organisations 497 ( * ) . Sur les 32 millions d'euros que l'État doit verser au fonds, 29 millions sont consacrés au financement de la formation économique, sociale et syndicale. Les instituts du travail continueront à percevoir environ 1,3 million d'euros.

La mesure proposée par cet article a pour effet de clarifier la loi en reconnaissant explicitement à deux organisations supplémentaires la possibilité d'offrir une formation économique, sociale ou syndicale à des salariés. En effet, le droit actuel ne vise que les organisations représentatives au niveau national, c'est-à-dire la CGT, la CFDT, FO, la CFE-CGC et la CFTC. Désormais, cette définition est étendue aux organisations ayant recueilli plus de 3 % des suffrages au niveau national lors de la dernière mesure de la représentativité syndicale. Deux sont concernées : l'Unsa (4,26 %) et Solidaires (3,47 %), tout en sachant que l'Unsa perçoit déjà, depuis au moins dix ans, des fonds à ce titre.

L'objet n'est pas ici de restreindre le droit à un congé de formation économique et sociale ou de formation syndicale. Il s'agit au contraire de tirer les conséquences de la loi du 5 mars 2014, qui a reconnu à ces deux syndicats la possibilité de bénéficier d'un financement de la part du fonds paritaire pour les formations qu'ils dispensent. La modification de l'article L. 3142-7 du code du travail réalisée par cet article ne constitue donc qu'une coordination .

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 89 (art. L. 2314-24 et L. 2324-22 du code du travail) - Transmission aux organisations syndicales des procès-verbaux des élections professionnelles

Objet : cet article rend obligatoire la transmission, par l'employeur, aux organisations syndicales présentes dans l'entreprise, des procès-verbaux des élections des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise.

I - Le dispositif proposé

Lorsque des élections professionnelles se déroulent dans une entreprise, que ce soit pour désigner les délégués du personnel (DP) ou les membres de la délégation du personnel au comité d'entreprise (CE), un procès-verbal du résultat des élections doit être dressé par le bureau de vote. Il doit être transmis dans les quinze jours à l'inspecteur du travail (articles R. 2314-25 et R. 2324-21 du code du travail) ainsi qu'à l'organisme chargé par le ministère du travail de centraliser les résultats obtenus dans chaque entreprise afin de mesurer la représentativité des organisations syndicales au niveau national et interprofessionnel (article D. 2122-7).

L'article 89 du projet de loi complète ces obligations de transmission en prévoyant que l'employeur est tenu d'adresser une copie des procès-verbaux du scrutin pour les DP (article L. 2314-24) ou le CE (article L. 2324-22) aux organisations syndicales ayant présenté une liste ainsi qu'à celles ayant participé à la négociation du protocole d'accord préélectoral, et ce « dans les meilleurs délais ».

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - La position de votre commission

D'après l'étude d'impact annexée au projet de loi, cet article répond à une demande des organisations représentatives des salariés , qui se sont exprimées en ce sens au sein du Haut Conseil du dialogue social. L'information des acteurs du dialogue social dans l'entreprise s'en trouve renforcée, ainsi que la transparence des opérations électorales. Votre rapporteur s'interroge toutefois sur le caractère législatif de cette disposition , alors que c'est un décret qui fixe l'obligation de transmission du procès-verbal à l'inspecteur du travail.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 90 (art. L. 4614-8 du code du travail) - Inscription d'office des consultations obligatoires à l'ordre du jour du CHSCT

Objet : cet article prévoit que les consultations du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) rendues obligatoires par une loi, une disposition réglementaire ou un accord collectif sont inscrites de plein droit à son ordre du jour.

I - Le dispositif proposé

Tout établissement comptant au moins cinquante salariés doit disposer d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), institution représentative du personnel (IRP) chargée de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des salariés , de contribuer à l'amélioration de leurs conditions de travail et de veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières (articles L. 4611-1 et L. 4612-1 du code du travail). Présidé par l'employeur, ses membres sont désignés par les délégués du personnel et les élus siégeant au comité d'entreprise.

L'article L. 4614-8 précise que « l'ordre du jour de chaque réunion est établi par le président et le secrétaire », ce dernier étant choisi parmi les représentants du personnel. Afin d'éviter qu'un désaccord entre eux ne bloque son fonctionnement ainsi que les projets de l'entreprise dont la réalisation est conditionnée à sa consultation, l'article 90 du projet de loi propose que les consultations qu'une disposition législative ou réglementaire ou qu'un accord collectif ont rendues obligatoires soient inscrites de plein droit à l'ordre du jour de la prochaine réunion du CHSCT, soit par son président, soit par son secrétaire.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté un amendement rédactionnel de ses rapporteurs à cet article, qui n'a ensuite pas été modifié en séance publique.

III - La position de votre commission

Les dispositions de cet article s'inspirent du droit actuellement en vigueur pour le comité d'entreprise . En effet, depuis la loi du 18 janvier 2005 498 ( * ) , les consultations de cette IRP rendues obligatoires par la loi, le règlement ou un accord collectif doivent être inscrites de plein droit à son ordre du jour.

Le CHSCT doit être consulté dans de nombreux cas de figure , notamment avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (article L. 4612-8) ou sur tout projet d'introduction de nouvelles technologies et sur ses conséquences sur la santé et la sécurité des salariés (article L. 4612-9). Il rend également un avis sur les documents se rattachant à sa mission, comme le règlement intérieur (article L. 4612-12) et sur les conditions dans lesquelles les équipements de protection individuelle sont mis à disposition des salariés et utilisés (article R. 4323-97).

Il est donc tout à fait souhaitable, aux yeux de votre rapporteur, qu'un défaut d'inscription à l'ordre du jour en raison de tensions entre le président et le secrétaire du CHSCT ne puisse bloquer une consultation obligatoire et entraver la bonne marche de l'entreprise. Toutefois, votre rapporteur partage le point de vue exprimé lors de son audition par Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit du travail à l'École de droit de la Sorbonne, selon lequel il s'agit d'une mesure qui semble aller de soi. Le juge des référés ne devrait pas aujourd'hui avoir à statuer sur des questions d'inscription de consultations obligatoires à l'ordre du jour du CHSCT. Il est regrettable que des tensions réelles persistent dans les entreprises et que le dialogue social y manque parfois tant de maturité qu'il faille que la loi précise de tels détails afin que le juge des référés du tribunal d'instance n'ait plus à trancher ce type de litiges.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 91 (art. L. 2323-4 du code du travail) - Information du comité d'entreprise par le biais de la base de données économiques et sociales

Objet : cet article prévoit que les informations fournies par l'employeur au comité d'entreprise pour formuler ses avis pourront être mises à disposition au sein de la base de données économiques et sociales.

I - Le dispositif proposé

Le code du travail confie au comité d'entreprise une mission générale d'information et de consultation concernant l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise - en particulier sur les projets de restructuration et de compression des effectifs, la formation professionnelle et l'apprentissage, ainsi que lors d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. Pour lui permettre de formuler un avis motivé , le comité d'entreprise « dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur et de la réponse motivée de l'employeur à ses propres observations » (article L. 2323-4 du code du travail).

Transposant l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 499 ( * ) , la loi du 14 juin 2013 500 ( * ) a institué, dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, une base de données économiques et sociales dans laquelle figure « un ensemble d'informations que l'employeur met à disposition du comité d'entreprise » (article L. 2323-7-2). Par ce biais, le comité d'entreprise dispose des éléments d'information contenus dans les rapports qui doivent lui être transmis de manière récurrente par l'employeur.

L'article 91 du projet de loi tire les conséquences de la mise en place de ce nouvel outil, déjà obligatoire dans les entreprises d'au moins trois cents salariés et qui le sera en juin 2015 pour celles dont l'effectif est compris entre cinquante et trois cents salariés, en fixant une dérogation au principe général selon lequel les informations dont dispose le comité d'entreprise lui sont transmises « par écrit » par l'employeur. Il indique, en modifiant l'article L. 2323-4, qu'elles peuvent le cas échéant lui être mises à disposition par le biais de la base de données. En revanche, pour les consultations liées à des événements ponctuels, un envoi par écrit reste obligatoire.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - La position de votre commission

Il s'agit ici d'une mise en cohérence du code du travail avec les modifications apportées en 2013 par la loi relative à la sécurisation de l'emploi afin que le droit soit conforme à la pratique qui est en train de s'installer dans les entreprises grâce à la base de données économiques et sociales. Outil de rationalisation des obligations des employeurs et d'amélioration de l'information des représentants du personnel, cette base de données constitue une avancée importante en faveur de la qualité du dialogue social dans l'entreprise. Mais il faut qu'elle tienne compte des spécificités des entreprises en employant moins de trois cents salariés. Votre rapporteur soutient donc son développement afin qu'elle puisse se substituer, si les partenaires sociaux dans l'entreprise le décident, à la plupart des envois d'information sous forme papier au comité d'entreprise.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Section 4 - Mesures relatives au développement de l'emploi des personnes handicapées et aux contrats d'insertion

Article 92 (art. L. 5212-6 du code du travail) - Prise en compte des travailleurs indépendants handicapés dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Objet : cet article offre aux entreprises la possibilité de s'acquitter partiellement de leur obligation d'emploi de travailleurs handicapés en faisant appel à des travailleurs indépendants handicapés.

I - Le dispositif proposé

A. L'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Toute entreprise comptant au moins vingt salariés est astreinte, en application de l'article L. 5212-2 du code du travail, à une obligation d'emploi de travailleurs handicapés (OETH) équivalente à 6 % de son effectif total.

L'employeur peut s'en acquitter de plusieurs manières : soit en employant directement des travailleurs handicapés, soit partiellement en passant des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestation de service avec des entreprises spécialisées ou en accueillant des stagiaires handicapés, soit en mettant en oeuvre un accord collectif en faveur des travailleurs handicapés, soit en versant une contribution à l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) dont le montant varie, selon la taille de l'entreprise, de 400 à 600 fois le smic horaire par bénéficiaire manquant (articles L. 5212-6 à L. 5212-11).

En contractant avec une entreprise adaptée , un centre de distribution de travail à domicile (CDTD) ou un établissement ou service d'aide par le travail (Esat), une entreprise peut remplir partiellement son obligation dès lors que le montant du contrat passé dépasse 400 à 600 fois le smic, en fonction de la taille de l'entreprise. De plus, il n'est pas possible pour un employeur de s'acquitter de plus de la moitié de son OETH par ce biais (article R. 5212-9).

B. La prise en compte des travailleurs indépendants handicapés

L'article 92 du projet de loi étend le champ de cette modalité d'acquittement partiel de l'OETH en modifiant l'article L. 5212-6 du code du travail afin d'y inclure les travailleurs indépendants handicapés, définis comme des bénéficiaires de l'OETH 501 ( * ) , immatriculés au registre du commerce ou au répertoire des métiers ou bien qui, dans leurs relations avec le donneur d'ordre, définissent seuls leurs conditions de travail.

Il distingue enfin entre deux modalités de détermination de cet acquittement partiel. Il précise qu'il doit être tenu compte du nombre de salariés exerçant pour le compte du travailleur indépendant, sauf si ce dernier relève du régime fiscal de la micro-entreprise ou du régime déclaratif spécial dit « micro-BNC », auquel cas l'acquittement est déterminé de façon forfaitaire.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels de ses rapporteurs à cet article, deux en commission spéciale et un en séance publique.

III - La position de votre commission

Selon les données de la Dares 502 ( * ) , en 2012, 100 300 établissements étaient assujettis à l'OETH, employant un total de 9 045 100 salariés. Parmi ceux-ci, 361 700 étaient éligibles à l'OETH, soit 3,1 % du total. Ces chiffres illustrent l'écart entre l'obligation théorique à laquelle sont soumises les entreprises et la situation réelle de l'emploi de personnes handicapées en France. De trop nombreux employeurs préfèrent encore verser leur contribution financière à l'Agefiph plutôt que d'embaucher un travailleur handicapé, tandis que la dégradation de la situation de l'emploi a eu pour conséquence une diminution du nombre de recrutements ( 38 400 en 2012 contre 41 700 en 2011) ainsi que la baisse, parmi ceux-ci, de la part de CDI.

La mesure proposée par cet article, si elle est d'ampleur limitée , est donc nécessaire et traduit un engagement pris par le Gouvernement lors du comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013. Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, les travailleurs indépendants concernés par cette disposition représentaient en 2008 8 % des bénéficiaires de l'OETH, soit 71 600 personnes 503 ( * ) . Elle ne permettra donc pas de combler le retard pris par de trop nombreuses entreprises, et ne doit pas se substituer à des recrutements de travailleurs handicapés. Il n'en reste pas moins qu'elle peut constituer une solution aux difficultés rencontrées par certaines personnes en situation de handicap ainsi que par certaines entreprises qui ne parviennent pas à satisfaire à leur OETH.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 93 (art. L. 5212-7-1 [nouveau] du code du travail) - Prise en compte des périodes de mise en situation en milieu professionnel dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Objet : cet article permet aux entreprises de déduire de leur obligation d'emploi de travailleurs handicapés les personnes handicapées accueillies en leur sein dans le cadre de périodes de mise en situation en milieu professionnel.

I - Le dispositif proposé

La loi du 5 mars 2014 504 ( * ) a unifié, sous la dénomination de « période de mise en situation en milieu professionnel » (PMSMP), les différents dispositifs d'immersion dans l'activité destinés aux personnes particulièrement éloignées de l'emploi ou suivant un parcours d'insertion.

D'une durée maximale d'un mois , les PMSMP visent à permettre à une personne, qu'elle soit privée d'emploi ou non, de découvrir un métier ou un secteur d'activité, de confirmer un projet professionnel, ou d'initier une démarche de recrutement (article L. 5135-1 du code du travail). Prescrites principalement par Pôle emploi, les missions locales, les Cap emploi et des structures d'insertion par l'activité économique, elles s'adressent aux demandeurs d'emploi, aux jeunes rencontrant des difficultés d'insertion ou encore aux titulaires d'un contrat unique d'insertion (CUI), dans le secteur marchand (contrat initiative emploi) ou non-marchand (contrat d'accompagnement dans l'emploi). Les bénéficiaires d'une PMSMP ne sont pas salariés de la structure qui les accueille mais conservent leur statut antérieur .

L'article 93 du projet insère un article L. 5212-7-1 dans le code du travail afin qu'une entreprise organisant en son sein des PMSMP à destination de personnes handicapées puisse partiellement les déduire de son obligation d'emploi de travailleurs handicapés, sur le modèle de ce que prévoit l'article L. 5212-7 pour les stages. Un décret en Conseil d'État doit venir préciser les modalités de mise en oeuvre et limites de cette disposition.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision du champ de cet article présenté par les rapporteurs de la commission spéciale. Il vise à lutter contre d'éventuels abus , liés à la multiplication de PMSMP au détriment de recrutements stables, en prévoyant que les personnes handicapées accueillies en PMSMP dans l'entreprise doivent s'imputer sur le plafond de stagiaires handicapés pouvant être pris en compte dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés (OETH) de l'entreprise, soit 2 % de l'effectif total de ses salariés.

III - La position de votre commission

Comme l'article 92, cet article 93 vise à inciter les entreprises à rattraper leur retard en matière d'emploi de travailleurs handicapés et leur ouvre une nouvelle possibilité de se mettre en conformité avec leur obligation légale. L'accent est ici mis sur les personnes handicapées qui rencontrent des difficultés particulières d'insertion et d'accès à l'emploi , au profit desquelles un accompagnement renforcé de la part des acteurs du service public de l'emploi est nécessaire.

Toutefois, il est permis de douter que cette disposition constitue « un levier très fort de la politique de l'emploi », ainsi que l'affirme l'étude d'impact annexée au projet de loi. Cette mesure a une portée essentiellement symbolique . En effet, les modalités de calcul du nombre de bénéficiaires de l'OETH reposent, pour les salariés, sur le temps de présence de la personne dans l'entreprise au cours de l'année civile (article L. 5212-14). Pour les stagiaires, le calcul est basé sur la durée du stage rapportée à la durée annuelle de travail applicable en entreprise. Une PMSMP ne pouvant dépasser un mois, et si le mode de calcul utilisé pour les stagiaires est retenu, elle ne comptera, à la durée légale de travail, que pour 0,1 bénéficiaire 505 ( * ) . Sauf à multiplier à outrance les PMSMP, au détriment de leurs bénéficiaires, une entreprise pourra difficilement satisfaire à son OETH grâce à elles. Il n'en reste pas moins que cette mesure technique , qui adapte le droit en vigueur à la réforme de l'insertion réalisée par la loi du 5 mars 2014, n'est pas défavorable aux travailleurs handicapés : il serait donc malvenu de s'y opposer.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement visant à supprimer le recours à un décret en Conseil d'État pour définir les modalités d'application de cet article, seul un renvoi à la « voie réglementaire » étant par exemple prévu à l'article L. 5212-6 du code du travail.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 93 bis (art. L. 5212-7 du code du travail) - Prise en compte des stages de découverte dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Objet : cet article, ajouté en séance publique par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, inclut dans les bénéficiaires de l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés les élèves handicapés de moins de seize ans accueillis en entreprise dans le cadre de stages de découverte.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Issu d'un amendement présenté par le Gouvernement, cet article 93 bis élargit le champ des bénéficiaires de l'OETH pour les entreprises qui y sont soumises en complétant l'article L. 5212-7 du code du travail, qui permet en l'état actuel du droit à un employeur de s'acquitter de son OETH en accueillant en stage des personnes handicapées, dans la limite de 2 % de son effectif.

Il vise à permettre la prise en compte, dans l'OETH, des élèves handicapés de quatrième, de troisième ou de lycée , âgés de moins de seize ans, qui réalisent des périodes d'observation en entreprise et disposent d'une convention de stage. D'une durée maximale d'une semaine, elles sont réalisées durant les vacances scolaires (article L. 332-3-1 du code de l'éducation). Seraient concernés les élèves de l'enseignement général qui bénéficient de la prestation de compensation du handicap (PCH) ou dont les parents reçoivent l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AAEH) ou l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP).

Les rapporteurs de la commission spéciale ont complété cet amendement par un sous-amendement identique à la modification apportée à l'article 93 afin de préciser que ces jeunes s'imputent dans le plafond de 2 % de stagiaires pouvant être admis dans le calcul des bénéficiaires de l'OETH.

II - La position de votre commission

Comme le souligne l'exposé des motifs de l'amendement du Gouvernement, les jeunes collégiens et lycéens handicapés rencontrent d'importantes difficultés pour réaliser les stages de découverte qui sont désormais obligatoires dans l'enseignement secondaire. Cet article, qui traduit dans la loi une décision prise lors de la conférence nationale du handicap du 11 décembre 2014 506 ( * ) , a pour objectif affiché de lever les réticences des entreprises.

Aux yeux de votre rapporteur, il est regrettable que les entreprises aient besoin d'une telle incitation pour accueillir des élèves handicapés pour une période brève afin de leur faire découvrir leur activité et de faire naître chez eux des souhaits d'orientation. Comme pour l'article 93, la mesure proposée ici n'en reste pas moins d'une portée très limitée au regard de l'acquittement de l'OETH puisque la très courte période passée dans l'entreprise par ces élèves ne permet pas, sur l'année, d'améliorer véritablement les résultats en la matière. Il s'agit toutefois d'un signal positif qu'il convient de saluer et d'amplifier en prenant en compte non seulement les périodes d'observation mais surtout les séquences d'observation réalisées par des élèves, qui constituent les véritables « stages de troisième » puisqu'elles sont réalisées non pas durant les vacances scolaires mais durant l'année scolaire. Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement en ce sens .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 94 - Habilitation du Gouvernement à modifier par ordonnance les contrats aidés outre-mer

Objet : cet article habilite le Gouvernement à réformer par ordonnance le droit des contrats aidés outre-mer en substituant le contrat initiative emploi au contrat d'accès à l'emploi et en supprimant le contrat d'insertion par l'activité.

I - Le dispositif proposé

En matière de contrats d'insertion, le droit applicable dans les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer auxquelles cette compétence n'a pas été transférée (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon) tient compte des spécificités économiques et culturelles de ces territoires.

Ainsi, alors que dans le secteur non-marchand le contrat unique d'insertion - contrat d'accompagnement de l'emploi (CUI-CAE) est applicable sur tout le territoire, dans le secteur marchand subsiste un contrat d'accès à l'emploi (CAE-DOM) en lieu et place du contrat initiative emploi (CUI-CIE). De plus, un contrat d'insertion par l'activité (CIA), créé en 1994, avait persisté malgré la mise en place du CUI-CAE et du revenu de solidarité active (RSA), permettant d'employer les bénéficiaires de ce dernier à un programme annuel de tâches d'utilité sociale. Quant aux emplois d'avenir, ils prennent la forme d'un CUI-CIE ou d'un CUI-CAE quel que soit le lieu où ils sont conclus.

Le Gouvernement souhaite clarifier le cadre juridique applicable à ces contrats et harmoniser les régimes applicables dans l'hexagone et outre-mer. À cet effet, l'article 94 du projet de loi l'habilite, par ordonnance , à :

- supprimer le CAE-DOM ;

- étendre et adapter le CUI-CIE aux DOM et à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon ;

- supprimer le CIA.

La durée de l'habilitation est fixée à douze mois à compter de la publication de la loi.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté deux amendements rédactionnels de ses rapporteurs à cet article, qui n'a pas été modifié lors de l'examen du projet de loi en séance plénière.

III - La position de votre commission

La généralisation du CUI-CIE outre-mer est souhaitable au vu des insuffisances du CAE-DOM. Il connait une désaffection croissante : selon les informations communiquées à votre rapporteur, seulement 3 870 ont été signés en 2014, alors que l'objectif était de 5 767 . De plus, l'encadrement et le suivi des bénéficiaires d'un parcours d'insertion est plus développé dans le cadre d'un CIE que dans celui d'un CAE-DOM. Davantage de garanties sont offertes, et des règles plus strictes sont en vigueur afin d'éviter tout effet d'aubaine : il n'est par exemple pas possible pour un particulier employeur de conclure un CIE, contrairement au CAE-DOM.

La suppression des dispositions relatives au CIA répond à l'impératif de clarté et d'intelligibilité de notre droit . Il ne serait en effet plus utilisé depuis 2012, le CUI-CAE l'ayant supplanté en raison d'une meilleure prise en charge des bénéficiaires et d'un pilotage plus précis. L'étude d'impact annexée au projet de loi précise que la Martinique et la Guyane sont les deux derniers départements à avoir eu recours à cet outil en 2011.

Néanmoins, votre rapporteur ne peut que déplorer que le Gouvernement demande à réaliser cette réforme par ordonnance, en dépossédant le Parlement de sa compétence. Qui plus est, il ne s'agit pas de la première demande d'habilitation formulée dans ce projet de loi. Sans nier la nécessité des mesures proposées par cet article, ni même leur technicité, il aurait sans nul doute été possible, durant les six mois de préparation de ce texte, d'y intégrer ces dispositions pleinement rédigées.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 94 bis A (nouveau) (art. L. 5134-1 à L. 5134-19 du code du travail) - Suppression de dispositions obsolètes du code du travail

Objet : cet article additionnel, inséré par votre commission spéciale sur proposition de votre rapporteur, retire du code du travail 19 articles qui ne connaissent plus aucune application et sont relatifs aux emplois jeunes.

Les emplois jeunes ont été institués par la loi du 16 octobre 1997 507 ( * ) afin de « promouvoir le développement d'activités créatrices d'emplois pour les jeunes répondant à des besoins émergents ou non satisfaits et présentant un caractère d'utilité sociale, notamment dans les domaines des activités sportives, culturelles, éducatives, d'environnement et de proximité » (article L. 5134-1 du code du travail). Destinés aux personnes de moins de vingt-cinq ans , ils étaient principalement proposés par des collectivités territoriales, des organismes de droit privé à but non-lucratif et des associations. L'éducation nationale (assistants d'éducation), la police nationale (adjoints de sécurité) et la justice ont également bénéficié de ce dispositif. La durée de ces contrats, lorsqu'ils étaient conclus à durée déterminée, était de cinq ans et chacun donnait lieu au versement par l'État à l'employeur d'une aide de 15 924,55 euros par an (article D. 5134-9) durant cette période.

Mis en place au moment où la situation de l'emploi connaissait une forte embellie, les emplois jeunes ont représenté 410 000 embauches entre 1997 et juin 2002 . A cette date, le programme n'a pas été reconduit, sans pour autant que les conventions en cours soient interrompues. Ainsi, selon la Dares, 151 000 contrats ne s'étaient pas encore achevés à la fin de l'année 2003. La décroissance des bénéficiaires s'est ensuite poursuivie : 99 000 fin 2004, 65 000 fin 2005, 20 000 fin 2007. En raison de mesures de pérennisation prises en faveur du secteur associatif, le dispositif s'est éteint au début des années 2010 508 ( * ) .

Cet outil de la politique de l'emploi à destination des jeunes a depuis été remplacé par plusieurs types de contrats aidés, le plus récent étant l'emploi d'avenir , institué par la loi du 26 octobre 2012 509 ( * ) et ciblé spécifiquement sur les jeunes les plus éloignés de l'emploi, sans qualification et résidant dans une zone urbaine sensible, une zone de revitalisation rurale ou un département d'outre-mer. Il figure pourtant toujours dans le code du travail.

Les emplois jeunes occupent en effet 19 articles de sa partie législative (à la sous-section 1 de la section 1 du chapitre IV du titre III du livre premier de la cinquième partie, soit les articles L. 5134-1 à L. 5134-19) et 13 articles de sa partie réglementaire (D. 5134-1 à D. 5134-13). Afin de simplifier ce code , dont l'inflation et la complexité croissante sont régulièrement dénoncées par tous ceux auxquels il s'applique ou qui en font un usage quotidien (salariés, employeurs, juristes, universitaires, etc.), votre rapporteur a proposé la suppression des dispositions relevant de la loi , leur disparition entraînant mécaniquement celle des dispositions fixées par décret.

Il s'agit d'un premier effort , certes symbolique , pour réduire le volume du code du travail . Il est toutefois indispensable, car dans son ensemble le présent projet de loi ne s'inscrit pas dans cette dynamique vertueuse : dans sa version adoptée par l'Assemblée nationale , il ajoute 33 articles à ce code .

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 94 bis (art. L. 6332-6 du code du travail) - Prise en charge de la rémunération des salariés des TPE en formation

Objet : cet article, inséré dans le texte lors de son examen en séance plénière par l'Assemblée nationale, autorise les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) à prendre en charge la rémunération des salariés des entreprises de moins de dix salariés effectuant une formation.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'accord national interprofessionnel (ANI) du 13 décembre 2013 510 ( * ) est à l'origine d'une profonde réforme du système français de formation professionnelle, avec le passage pour les entreprises d'une obligation de dépenser à une obligation de former . L'un de ses objectifs est d'en faciliter l'accès aux salariés des très petites entreprises (TPE), qui sont aujourd'hui victimes d'importantes inégalités en la matière par comparaison aux salariés des grandes entreprises ou aux cadres. Selon l'article 39 de l'ANI, les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA), auxquels les entreprises versent leur contribution légale et qui financent en retour des actions de formation, peuvent prendre en charge la rémunération des salariés des entreprises de moins de dix salariés qui suivent une formation inscrite dans le plan de formation, si un accord de branche le prévoit et dans la limite du smic horaire.

La loi du 5 mars 2014 précitée a transposé cet ANI dans la loi, sans toutefois faire figurer explicitement dans le code du travail la possibilité pour les OPCA de prendre à leur charge le salaire des salariés des TPE en formation.

Cet article 94 bis corrige cette imprécision . Issu d'un amendement de nos collègues députés du groupe écologiste, il complète l'article L. 6332-6 du code du travail, qui arrête la liste des règles de fonctionnement des OPCA dont la définition relève d'un décret en Conseil d'État, afin qu'il fasse référence à la possibilité de financer la rémunération des salariés des TPE suivant une formation inscrite dans le plan de formation de leur entreprise.

II - La position de votre commission

Les partenaires sociaux, réunis au sein du comité paritaire national de l'emploi et de la formation (Copanef), avaient saisi le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social à la suite de la publication du décret du 24 octobre 2014 sur les OPCA 511 ( * ) en constatant que celui-ci n'offrait pas la possibilité aux OPCA de prendre en charge la rémunération des salariés des TPE partis en formation. Ils ont alors jugé cette absence contraire à « l'esprit de la loi du 5 mars 2014 » mais aussi « à la lettre et à l'esprit de l'ANI du 14 décembre 2013 ».

Dans sa réponse, le ministre avait précisé que la section sociale du Conseil d'État avait demandé le retrait de cette disposition du décret, en raison de l'absence de base légale sur ce point. Le Conseil d'État avait toutefois estimé que les partenaires sociaux, gestionnaires des OPCA, conservaient la possibilité de mettre en oeuvre cette stipulation de l'ANI .

Le présent article vient donner une base légale à cette mesure et corriger un oubli de la loi du 5 mars 2014, sans doute lié à la précipitation dans laquelle elle avait été examinée par le Parlement. Il renforce les moyens mis à la disposition des TPE pour former leurs salariés et l'accompagnement dont elles peuvent bénéficier : votre rapporteur y est très favorable.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Section 5

Lutte contre la prestation de services internationale illégale

De nombreuses entreprises, notamment dans le secteur du BTP et de l'agriculture, sont actuellement menacées par les conséquences du détachement illégal de salariés étrangers et ont alerté les pouvoirs publics sur l'impérieuse nécessité d'en modifier le cadre légal et d'intensifier les contrôles afin de préserver le modèle économique et social français .

Selon des données provisoires de la direction générale du travail (DGT), 210 000 salariés auraient été détachés en 2013 (soit une hausse de 23 % par rapport à 2012), représentant 7,6 millions de jours de travail et 33 000 équivalents temps plein travaillés. On ignore le nombre précis de détachements non déclarés, mais la DGT estimait en 2009 et en 2010 qu'un salarié détaché sur trois, voire un salarié sur deux n'était pas déclaré 512 ( * ) .


• La loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale a renforcé le contrôle par l'administration des déclarations préalables de salariés détachés sur le territoire national.

Cette déclaration doit désormais indiquer les coordonnées du représentant en France de l'employeur étranger , chargé notamment d'assurer la liaison avec les agents en charge de la lutte contre le travail illégal.

En outre, le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui recourt à un prestataire étranger doit désormais vérifier que celui-ci s'est bien acquitté de son obligation de déclaration et de désignation d'un référent, quel que soit le montant de la prestation, sous peine d'une sanction administrative identique à celle qu'encourt un prestataire qui n'a pas effectué sa déclaration préalable.

La loi précitée a introduit une responsabilité financière solidaire du maître d'ouvrage ou du donneur d'ordre pour les salaires minima non versés aux salariés du sous-traitant direct ou indirect, quel que soit son pays d'établissement. Ce mécanisme est conditionné à l'existence préalable d'un signalement de la part d'un agent de contrôle compétent en matière de lutte contre le travail illégal, et à un manquement du maître d'ouvrage ou du donneur d'ordre à ses obligations d'information et d'injonction. Cette responsabilité solidaire ne s'applique pas aux particuliers.

La loi a également donné la possibilité à l'inspection du travail d'obliger le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre à prendre en charge les frais d'hébergement collectif des salariés lorsque ceux-ci sont soumis à des conditions incompatibles avec la dignité humaine . Ce dispositif, qui ne s'applique pas aux particuliers, est soumis à l'existence préalable d'un signalement par un agent de contrôle en charge de la lutte contre le travail illégal.

Elle a par ailleurs autorisé les juges à prononcer comme peine complémentaire pour les principales infractions de travail illégal :

- l'inscription sur une « liste noire » accessible sur un site internet dédié, pour une durée maximale de deux ans, des personnes condamnées ;

- l'interdiction de percevoir toute aide publique pendant une durée maximale de cinq ans.

La loi a également renforcé la lutte contre les abus constatés en matière de cabotage routier .


• Le projet de loi renforce le contrôle des détachements à travers quatre nouvelles mesures :

- il relève substantiellement, de 10 000 à 500 000 euros, le plafond de la sanction administrative qui peut être prononcée contre le prestataire étranger, ou le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui recourt à ses services, en cas de violation des règles relatives à la déclaration préalable de détachement (article 95) ;

- il autorise le Direccte à ordonner la suspension de l'activité d'un prestataire étranger qui a détaché des salariés en cas de manquement grave à l'ordre public social. Ce manquement grave doit concerner la violation des dispositions relatives au Smic, à la durée quotidienne maximale de travail, à la durée hebdomadaire maximale de travail et aux règles de repos quotidien et hebdomadaire. Il peut aussi viser des conditions de travail ou d'hébergement des salariés lorsqu'elles sont incompatibles avec la dignité humaine (article 96) ;

- il adapte au secteur des transports les dispositions issues de la loi du 10 juillet 2014 portant sur la déclaration de détachement et sur les obligations de vigilance et de responsabilité pesant sur le donneur d'ordre (article 96 bis ) ;

- enfin, il rend obligatoire la délivrance d'une carte d' identification professionnelle par un organisme national désigné par décret en Conseil d'État à chaque salarié effectuant des travaux de bâtiment ou de travaux publics pour le compte d'une entreprise établie en France ou pour le compte d'une entreprise établie hors de France en cas de détachement (article 97).

Article 95 (art. L. 1264-3 du code du travail) - Relèvement du plafond de la sanction administrative en cas de non-respect des règles relatives à la déclaration préalable de travailleurs détachés

Objet : cet article relève de 10 000 à 500 000 euros le plafond de la sanction administrative qui peut être prononcée contre le prestataire étranger, ou le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui recourt à ses services, en cas de violation des règles relatives à la déclaration préalable de détachement de travailleurs.

I - Le dispositif proposé

Lors de son examen en mai 2014 au Sénat, la proposition de loi visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale 513 ( * ) a été profondément remaniée, afin de renforcer le contrôle en matière de déclaration préalable des travailleurs détachés, telle que prévu à l'article L. 1264-3 du code du travail.

La loi prévoit ainsi désormais que tout manquement aux règles de déclaration préalable, de la part du prestataire étranger mais aussi du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage français , sera passible d'une sanction administrative prononcée par le directeur de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Dirrecte), après constatation par un des agents de contrôle de l'inspection du travail. Le directeur doit prendre en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que ses ressources et ses charges. Le montant de l'amende ne peut pas dépasser 2 000 euros par salarié détaché, et 4 000 euros en cas de réitération dans un délai d'un an à compter du jour de la notification de la première amende. Toutefois, le montant total de l'amende ne peut être supérieur à 10 000 euros.

C'est ce plafond de 10 000 euros que le projet de loi initial relève à 150 000 euros , afin de renforcer la lutte contre les détachements illégaux de travailleurs sur le sol français.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Aucun amendement n'a été adopté sur cet article en commission spéciale.

En séance publique, un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques a été adopté, portant le plafond total de la sanction à 500 000 euros .

III - La position de votre commission

En préambule, votre rapporteur constate avec regret qu'aucun des décrets d'application de la loi du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale n'a été publié à ce jour. Un tel retard est difficilement compréhensible alors même que la lutte contre le travail illégal est érigée au rang de priorité nationale par le Gouvernement.

Pour autant, il approuve cet article qui permettra de lutter plus efficacement contre les fraudes massives à la déclaration de détachement de travailleurs.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 96 (art. L. 1263-3 à L. 1263-6 [nouveaux] du code du travail) - Instauration d'une décision administrative d'arrêt d'activité et d'une sanction spécifique en cas de manquement grave d'un prestataire étranger qui détache des salariés

Objet : cet article autorise le directeur de la Direccte à ordonner la suspension de l'activité d'un prestataire étranger qui a détaché des salariés en cas de manquement grave à l'ordre public social et, en cas de non-respect de cette décision, à prononcer une amende administrative, plafonnée à 10 000 euros par salarié détaché.

I - Le dispositif proposé

Cet article insère quatre nouveaux articles dans le code du travail (L. 1263-3 à L. 1263-6), qui viennent compléter le chapitre III « contrôle » du titre VI « salariés détachés temporairement par une entreprise non établie en France », du livre II de la première partie.

L'article L. 1263-3 du code du travail prévoit que si un agent de contrôle de l'inspection du travail constate un « manquement grave », commis par un employeur établi hors de France qui détache des salariés sur le territoire national, il lui enjoint par écrit de faire cesser la situation dans un délai fixé par décret en Conseil d'État. Il informe de cette situation dans le même temps le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre de l'employeur concerné.

Ce manquement grave doit concerner les dispositions des articles suivants :

- L. 3231-2 qui définit le salaire minimum de croissance ;

- L. 3121-34 qui fixe les règles en matière de durée quotidienne maximale de travail (la durée quotidienne du travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures , sauf dérogations accordées dans des conditions déterminées par décret) ;

- L. 3121-35 relatif à la durée hebdomadaire maximale de travail (elle ne peut dépasser quarante-huit heures , mais en cas de circonstances exceptionnelles, certaines entreprises peuvent être autorisées à dépasser ce plafond, dans la limite de soixante heures).

Les dispositions de l'article L. 1263-3 s'appliquent également si l'agent de contrôle constate des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine 514 ( * ) .

L'article L. 1263-4 indique que si l'employeur n'a pas régularisé la situation dans le délai fixé par l'agent de l'inspection du travail, l'autorité administrative compétente peut, après avoir pris connaissance d'un rapport administratif constatant le manquement et eu égard à la répétition ou à la gravité des faits constatés, ordonner par décision motivée la suspension par l'employeur de la réalisation de la prestation concernée, à titre provisoire, pour une durée ne pouvant excéder un mois .

L'autorité administrative met fin à la mesure dès que l'employeur justifie de la cessation des manquements constatés.

L'article L. 1263-5 prévoit que la décision de suspension de réalisation de la prestation de services prononcée par l'autorité administrative n'entraîne ni rupture, ni suspension du contrat de travail, ni aucun préjudice pécuniaire à l'encontre des salariés concernés, reprenant ainsi les termes mêmes de l'article L. 4731-5 relatif aux droits des salariés en cas d'arrêt de chantier.

Enfin, l'article L. 1263-6 dispose que le fait pour le prestataire de services de ne pas respecter la décision de suspension est passible d'une amende administrative , qui est prononcée par l'autorité administrative compétente, sur rapport motivé d'un agent de contrôle de l'inspection du travail.

L'amende est au plus égale à 10 000 euros par salarié concerné par le manquement.

Les conditions d'application de cette amende administrative sont identiques à celles prévues à l'article L. 1264-3 du code du travail, en cas de violation des règles relatives à la déclaration préalable des travailleurs détachés :

- pour fixer le montant de l'amende, l'autorité administrative devra prendre en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que ses ressources et ses charges ;

- le délai de prescription de l'action de l'administration pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis ;

- l'amende est recouvrée comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre de nombreux amendements rédactionnels, un amendement des rapporteurs thématiques et du rapporteur général, adopté en commission spéciale, a ajouté deux manquements graves autorisant l'administration du travail à suspendre l'activité d'un prestataire étranger en l'État : le non-respect du repos quotidien (onze heures consécutives au minimum 515 ( * ) ), et la violation du repos hebdomadaire (vingt-quatre heures consécutives, en plus du repos quotidien précité 516 ( * ) ).

Aucun amendement n'a été adopté en séance publique sur cet article.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur estime que cette extension de la procédure d'arrêt de chantier constituera une mesure radicale pour sanctionner les manquements les plus graves aux droits des salariés détachés, tels que reconnus par le droit européen. Le prestataire étranger aura naturellement toujours la possibilité de contester cette décision devant le tribunal administratif, y compris par la voie du référé.

A l'invitation de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement de coordination juridique.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi amendé.

Article 96 bis (art. L. 1331-1 à L. 1331-3 [nouveaux] du code des transports) - Adaptation de dispositions relatives à la lutte contre la concurrence sociale déloyale au secteur des transports

Objet : cet article additionnel, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement, adapte au secteur des transports les dispositions issues de la loi du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale portant sur la déclaration de détachement et sur les obligations de vigilance et de responsabilité pesant sur le donneur d'ordre.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Au sein du livre III de la première partie du code des transports, dédié à la réglementation sociale du transport, figure le titre III, relatif aux dispositions applicables aux salariés des entreprises de transport établies hors de France, comportant uniquement l'article L. 1331-1 .

Cet article dispose actuellement qu'un décret en Conseil d'État détermine les conditions particulières d'application de l'article L. 1262-4 du code du travail aux salariés des entreprises de transport routier ou fluvial établies hors de France qui, à la demande de leur employeur, exécutent des opérations de cabotage pendant une durée limitée sur le sol français.

Les règles du cabotage routier de marchandises

Le cabotage routier de marchandises désigne les opérations de chargement et de déchargement effectuées sur le territoire national par un transporteur établi à l'étranger à l'occasion d'un transport international .

L'article 8 du règlement (CE) n° 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 517 ( * ) a fixé les règles encadrant cette activité.

Ainsi, à l'issue du dernier déchargement des marchandises transportées au cours d'un transport international, le transporteur est autorisé, dans un délai de sept jours, à effectuer trois transports de cabotage sur le territoire du pays d'accueil.

À l'intérieur de ce délai de sept jours, les opérations de cabotage sont limitées à un transport de cabotage par État membre dans les trois jours suivant l'entrée à vide sur son territoire.

Le décret n° 2010-389 du 19 avril 2010 relatif au cabotage dans les transports routiers et fluviaux a transposé ces règles en droit interne.

Son article 11 prévoit ainsi que les entreprises établies hors de France qui détachent un ou plusieurs salariés sur le territoire national pendant une durée inférieure à huit jours consécutifs pour réaliser des opérations de cabotage routier ou fluvial ne sont pas soumises à l'obligation de déclaration de détachement.

Au-delà de cette durée, la déclaration préalable de détachement de salariés devient obligatoire, en vertu de l'article 12 du décret.

Source : commission spéciale du Sénat

Transposant les dispositions de l'article 3 de la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs dans le cadre d'une prestation de services, l'article L. 1262-4 du code du travail oblige les employeurs détachant temporairement des salariés sur le territoire national à respecter le « noyau dur » des dispositions légales et des stipulations conventionnelles en matière de législation du travail applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d'activité établies en France.

Le « noyau dur » des droits des salariés détachés

Les prestataires étrangers doivent respecter, à l'égard de leurs salariés détachés en France, les règles du code du travail dans les dix domaines suivants :

- les libertés individuelles et collectives dans la relation de travail ;

- l'interdiction des discriminations et la promotion de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;

- la protection de la maternité, les congés de maternité et de paternité et d'accueil de l'enfant, les congés pour événements familiaux ;

- les conditions de mise à disposition et les garanties dues aux salariés par les entreprises exerçant une activité de travail temporaire ;

- l'exercice du droit de grève ;

- la durée du travail, les repos compensateurs, les jours fériés, les congés annuels payés, la durée du travail et le travail de nuit des jeunes travailleurs ;

- les conditions d'assujettissement aux caisses de congés et intempéries ;

- le salaire minimum et le paiement du salaire, y compris les majorations pour les heures supplémentaires ;

- la santé et sécurité au travail, l'âge d'admission au travail, l'emploi des enfants ;

- le travail illégal.

Source : commission spéciale du Sénat

L' article 96 bis opère une refonte totale du titre III du livre III de la première partie du code des transports. Intitulé « lutte contre la concurrence sociale déloyale », ce titre comporte trois articles, regroupés en un chapitre unique.

Tout d'abord, une nouvelle rédaction de l' article L. 1331-1 est proposée.

Son I prévoit qu'un décret en Conseil d'État fixera les conditions dans lesquelles une attestation établie par les entreprises de transport routier et fluvial mentionnées à l'article L. 1321-1 du même code qui détachent des salariés roulants ou navigants se substitue à la déclaration de détachement de travailleurs de droit commun 518 ( * ) .

Son II indique qu'un décret en Conseil d'État arrêtera la période pendant laquelle doit être assurée la liaison entre les agents en charge de la lutte contre le travail illégal et le référent en France des entreprises de transport routier et fluvial qui détachent des salariés sur le territoire national 519 ( * ) .

Les agents en charge de la lutte contre le travail illégal

L'article L. 8271-1-2 du code du travail définit les différents corps de contrôle compétents pour rechercher et constater les infractions de travail illégal :

- les inspecteurs et les contrôleurs du travail ;

- les officiers et agents de police judiciaire ;

- les agents des impôts et des douanes ;

- les agents des organismes de sécurité sociale et des caisses de mutualité sociale agricole agréés et assermentés ;

- les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes et les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l'autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ;

- les fonctionnaires des corps techniques de l'aviation civile commissionnés à cet effet et assermentés ;

- les fonctionnaires ou agents de l'État chargés du contrôle des transports terrestres ;

- les agents de Pôle emploi chargés de la prévention des fraudes, agréés et assermentés.

Source : commission spéciale du Sénat

Ensuite, le présent article introduit un nouvel article L. 1331-2 dans le code des transports. Cet article prévoit que le destinataire du contrat de transport est considéré, par principe, comme donneur d'ordre pour l'application aux entreprises de transport routier et fluvial des différents articles relatifs à la lutte contre la concurrence sociale déloyale, présentés dans le tableau suivant.

Obligations du donneur d'ordre
en matière de lutte contre la concurrence sociale déloyale

Articles
du code du travail

Contenu

L. 1262-4-1

Le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui contracte avec un prestataire de services qui détache des salariés en France doit remplir son obligation de vigilance auprès de ce dernier, avant le début du détachement, en vérifiant qu'il s'est acquitté des deux obligations suivantes:

- déclaration préalable de détachement des travailleurs auprès de l'inspection du travail ;

- désignation d'un référent en France pendant toute la durée de la prestation.

L. 1264-2

Le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui ne respecte pas son obligation de vigilance à l'égard de son prestataire étranger, encourt une sanction administrative :

- d'au plus 2 000 euros par salarié détaché, voire 4 000 euros maximum en cas de réitération dans un délai d'un an à compter du jour de la notification de la première amende ;

- le montant total de l'amende ne peut toutefois être supérieur à 10 000 euros (ce plafond global étant porté à 500 000 euros par l'article 95 du présent projet de loi).

L. 3245-2

Le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre est financièrement solidaire de la rémunération des salariés du prestataire étranger qui n'a pas respecté les règles relatives au salaire minimum légal ou conventionnel, si deux conditions sont remplies :

- manquement aux obligations d'injonction à l'égard du prestataire (qu'il soit sous-traitant ou cocontractant d'un sous-traitant) ;

- défaut d'information des agents en charge de la lutte contre le travail illégal.

L. 4231-1

Le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre prend à sa charge l'hébergement collectif des salariés de son prestataire lorsque ceux-ci demeurent soumis à des conditions d'hébergement collectif incompatibles avec la dignité humaine , malgré le signalement d'un agent en charge de la lutte contre le travail illégal.

L. 8281-1

Le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre est passible d'une sanction s'il n'a pas exercé son devoir d'alerte lorsqu'il a connaissance du non-respect du « noyau dur » des droits des salariés d'un sous-traitant , défini par l'article L. 1262-4 du code du travail.

Source : commission spéciale du Sénat

Enfin, le présent article introduit dans le même code l' article L. 1331-3 , qui renvoie également à un décret en Conseil d'État le soin de définir les modalités particulières d'application aux entreprises de transport routier et fluvial des dispositions du titre VI, relatif aux salariés détachés temporairement par une entreprise non établie en France, du livre II de la première partie du code du travail (soit les articles L. 1261-1 à L. 1265-1).

II - La position de votre commission

Votre rapporteur est conscient des graves difficultés que connaissent les entreprises de transport routier françaises, qui sont confrontées à la concurrence de leurs homologues européennes ou extra-européennes . Selon les informations fournies par le Gouvernement, cet article ne remet pas en cause les règles du cabotage, mais se limite à autoriser le pouvoir réglementaire à adapter les règles relatives à la concurrence sociale déloyale dans le secteur du transport. C'est pourquoi les organisations professionnelles d'employeurs concernées, tout en saluant l'adoption de ces dispositions, appellent à une modification du règlement européen du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l'accès au marché du transport international de marchandises par route, qui fixe les règles du cabotage.

Le Gouvernement estime que les formalités de déclaration préalable apparaissent peu adaptées dans le secteur du transport, car les travailleurs sont détachés dans des conditions particulières compte tenu de la courte durée de leurs prestations et de la fréquence de celles-ci. C'est pourquoi il est prévu de substituer à cette obligation une attestation en cas de détachement pour l'exécution d'un contrat de transport transnational. Elle informera le conducteur routier de ses droits - notamment le montant minimal du salaire en France - et facilitera le travail des agents de contrôle.

Votre rapporteur sera vigilant sur le contenu du décret en Conseil d'État, et notamment sur la portée de l'attestation et la période minimale pendant laquelle elle devra être mise à disposition des agents de contrôle . Il s'interroge également sur l'existence d'éventuelles exceptions au principe selon lequel le destinataire du contrat de transport doit être considéré comme donneur d'ordre en matière de lutte contre la concurrence sociale déloyale.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 97 (art. L. 8291-1 à L. 8291-3 [nouveaux] du code du travail) - Carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics

Objet : cet article rend obligatoire la délivrance d'une carte d'identification professionnelle à chaque salarié effectuant des travaux de bâtiment ou de travaux publics, quel que soit le lieu d'établissement de son entreprise.

I - Le dispositif proposé

Le projet de loi complète le livre II « lutte contre le travail illégal » de la huitième partie « contrôle de l'application de la législation du travail » du code du travail par un nouveau titre IX intitulé « déclaration et carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics », qui comprend les articles L. 8291-1 à L. 8291-3.

L'article L. 8291-1 rend obligatoire la délivrance d'une carte d'identification professionnelle, par un organisme national désigné par décret en Conseil d'État, à chaque salarié effectuant des travaux de bâtiment ou de travaux publics pour le compte d'une entreprise établie en France ou pour le compte d'une entreprise établie hors de France en cas de détachement. Selon les informations communiquées par le Gouvernement à votre rapporteur, ce rôle devrait échoir à l'Union des caisses de France du réseau congés intempéries BTP 520 ( * ) .

Cette carte devra comporter les mentions relatives au salarié, à son employeur, le cas échéant à l'entreprise utilisatrice, ainsi qu'à l'organisme chargé de sa délivrance.

Un décret en Conseil d'État devra déterminer les modalités de déclaration des salariés par l'employeur afin de délivrer cette carte, en distinguant, pour les employeurs établis hors de France, des règles spécifiques pour les entreprises qui détachent des salariés et pour les entreprises utilisatrices qui recourent à des travailleurs temporaires.

L'article L. 8291-2 instaure une amende administrative en cas de manquement à l'obligation de déclaration précitée, de la part de l'employeur ou, le cas échéant, de l'entreprise de travail temporaire.

L'amende administrative est prononcée par l'autorité administrative compétente, en l'occurrence le Direccte, après constatation par un des agents de contrôle de l'inspection du travail.

Le plafond de l'amende est fixé à 2 000 euros par salarié, et 4 000 euros en cas de réitération dans un délai d'un an à compter du jour de la notification de la première amende. Toutefois, le montant total de l'amende ne peut être supérieur à 150 000 euros , soit le même plafond que celui retenu à l'article 95 du projet de loi initial en cas de violation des règles relatives à la déclaration préalable de travailleurs détachés .

Les conditions d'application de cette amende administrative sont identiques à celles prévues à l'article L. 1264-3 du code du travail, en cas de violation des règles relatives à la déclaration préalable des travailleurs détachés, et à l'article L. 1263-6 du même code dans l'hypothèse où un prestataire étranger ne respecte pas une décision administrative de suspension d'activité 521 ( * ) .

L'article L. 8291-3 prévoit qu'un décret en Conseil d'État déterminera les modalités d'application du dispositif national de délivrance de la carte d'identification professionnelle, ainsi que les données personnelles des salariés devant y figurer, après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Seuls des amendements rédactionnels ont été adoptés en commission spéciale.

Un amendement présenté par nos collègues députés du groupe de l'Union des démocrates et indépendants (UDI) a porté à 500 000 euros le plafond de l'amende en cas de manquement de l'employeur à l'obligation de déclarer les salariés en vue d'obtenir la carte d'identification professionnelle du BTP. Ainsi, le régime de cette amende administrative se trouve aligné sur celui prévu à l'article 95 en cas de défaut de déclaration préalable au détachement.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur rappelle que le débat sur l'opportunité de rendre obligatoire dans le secteur du BTP la carte d'identification professionnelle a déjà eu lieu au Sénat lors de l'examen de la proposition de loi visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale .

La Fédération française du bâtiment (FFB), qui a déjà mis en place cette carte dans son secteur d'activité depuis 2006, plaidait pour sa généralisation obligatoire dans le BTP. Environ 2,4 millions de cartes ont été éditées depuis le début de l'expérimentation et le système a progressivement évolué (mise en place d'un serveur vocal interactif interrogé à distance par les contrôleurs, création d'un hologramme de sécurité). Établie par la caisse des congés payés du secteur, cette carte constitue, selon la FFB, « un outil de contrôle efficace et rapide pour les autorités en charge de procéder à la vérification de la situation des salariés ».

La Fédération nationale des travaux publics (FNTP) s'est toutefois opposée initialement à cette proposition, et souhaiterait que le recours à cette carte demeure facultatif . Elle met tout d'abord en avant la nécessité d'une approche européenne sur cette question. Elle souligne ensuite les spécificités des chantiers de travaux publics, « linéaires, mobiles et avec de multiples entrées », rendant difficile l'utilisation de cette carte. La FNTP regrette également le coût de cette carte, son manque de sécurisation, et son caractère redondant avec d'autres dispositifs (cartes d'accès, passeports sécurité et autres titres d'habilitation). Enfin, la Fédération doute de la pertinence de confier sa délivrance à la caisse des congés payés du BTP, qui ne couvre pas tous les intervenants d'un chantier.

Votre rapporteur considère que les craintes exprimées par la FNTP semblent avoir trouvé des réponses satisfaisantes . En outre, la carte d'identification professionnelle sera entièrement financée par les entreprises concernées par le dispositif, pour un coût modique (moins de 2 euros par salarié). Il n'est pas prévu pour l'instant d'étendre cette carte à d'autres secteurs d'activité comme l'agriculture ou l'industrie, faute d'un organisme de référence comme la caisse de congés payés pour assurer sa gestion.

Sur proposition de votre rapporteur, la commission a adopté un amendement de coordination juridique .

La commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié .

Article 97 bis A (art. L. 1262-2-2 [nouveau] du code du travail) - Télétransmission de la déclaration de détachement de salariés

Objet : cet article additionnel, issu d'un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques adopté en séance publique à l'Assemblée nationale, prévoit que la déclaration préalable de détachement de salariés devra être effectuée en ligne, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'article 97 bis A insère dans le code du travail l'article L. 1262-2-2, qui prévoit qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), fixera les conditions dans lesquelles les employeurs qui détachent des salariés sont tenus de transmettre, par voie dématérialisée, la déclaration préalable de détachement de travailleurs.

Les employeurs concernés sont les prestataires étrangers 522 ( * ) , mais aussi les entreprises de travail intérimaire 523 ( * ) .

II - La position de votre commission

Votre rapporteur constate que cet article rendra obligatoire l'utilisation de l'application Sipsi (Système d'information sur les prestations de service internationales) pour effectuer les déclarations de détachement de salariés. Accessible en ligne sur le site « service-public.fr », elle a été généralisée sur l'ensemble du territoire le 1 er juin 2014 après une phase de test dans trois départements pilotes (la Somme, le Bas-Rhin et la Gironde). Ce dispositif simplifie la procédure pour les entreprises et dématérialise la déclaration pour les services de contrôle. L'application envoie en effet automatiquement un fichier à l'unité territoriale de la Direccte concernée qui le communique à la section d'inspection du travail intéressée. Le ministère du travail estime qu'une déclaration sur trois est aujourd'hui effectuée par télé-déclaration.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 97 bis (art. L. 4451-7 [nouveau], L. 4461-1 et L. 4463-1 du code des transports) - Obligation de matérialiser par écrit le contrat de transport de marchandises par voie fluviale

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative de ses rapporteurs, vise à garantir la sécurité des mariniers en rendant obligatoire la confirmation écrite du contrat de transport de marchandises par voie fluviale avant le déplacement du bateau vers le lieu de chargement.

I - Le droit en vigueur

En l'état actuel du droit, aucune disposition n'impose aux partenaires d'un contrat de transport fluvial de matérialiser par écrit leur accord avant le déplacement du bateau vers le lieu de chargement. Il résulte de cette situation une très forte incertitude juridique pour les transporteurs.

Afin de faire respecter les engagements pris au cours de la négociation , il est aujourd'hui fortement recommandé aux transporteurs d'adresser immédiatement après la négociation une « confirmation de transport ».

Ce document, qui s'inspire directement de la « commande de transport », prévue en matière de transport routier par l'article L. 3222?4 du code des transports 524 ( * ) , permet en effet aux parties de conserver une trace écrite des négociations entreprises au préalable, notamment par téléphone.

Il constitue donc une confirmation des conditions contractuelles préalablement négociées et, sur le plan juridique, une mini-convention écrite qui confirme les conditions de rémunération et énumère les prestations annexe s convenues entre le donneur d'ordre et le transporteur.

II - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article, introduit par la commission spéciale de l'Assemblée nationale sur proposition de ses rapporteurs, vise à transposer le principe de la « confirmation de transport » routier au transport de marchandises par voie fluviale : il impose la conclusion d'un contrat écrit avant le déplacement du bateau vers le lieu de chargement .

Le 1° du présent article insère un nouvel article L. 4451-7 dans le chapitre Ier (« Le contrat de transport ») du titre V (« Contrats relatifs au transport de marchandises ») du livre IV (« Le transport fluvial ») de la quatrième partie (« Navigation intérieure et transport fluvial ») du code des transports.

Le premier alinéa de ce nouvel article L. 4451-7 prévoit que « le contrat de transport conclu entre les parties fait l'objet d'une confirmation approuvée du transporteur et de son co-contractant ». Les contrats à temps ou au tonnage n'étant pas concernés par les mêmes problématiques, cette obligation est limitée au contrat de transport au voyage .

Le deuxième alinéa dispose que le cocontractant est tenu de transmettre à l'entreprise de transport fluvial, par écrit ou sous forme électronique, les informations nécessaires à l'exécution du contrat, avant le déplacement du bateau vers le lieu de chargement .

Le troisième alinéa précise que la confirmation de contrat de transport doit se trouver à bord du bateau ainsi que dans l'entreprise du co-contractant. Elle doit pouvoir être présentée immédiatement aux agents de contrôle assermentés , sous forme écrite ou dématérialisée.

Enfin, le dernier alinéa renvoie à un arrêté du ministre chargé des transports le soin de définir la forme et les informations contenues dans la confirmation de transport.

Le 2° du présent article effectue une coordination à l'article L. 4461-1 qui énumère les documents devant être présentés par les entreprises de transport fluvial aux agents assermentés : il ajoute à cette liste la confirmation du contrat de transport.

Enfin, le 3° du présent article vise à rendre effectives ces nouvelles dispositions, en prévoyant, à l'article L. 4463-1, que le manquement à l'obligation de présentation de la confirmation du contrat de transport aux autorités administratives est passible d'une contravention de grande voirie , comme c'est déjà le cas pour la non-présentation de la déclaration de chargement ou de la lettre de voiture.

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article qui améliore la sécurité juridique du transport fluvial, sans faire peser une contrainte administrative excessive sur les entreprises concernées, dans la mesure où un simple courrier électronique peut tenir lieu de confirmation de transport.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 97 ter (art. L. 4454-3 [nouveau] et L. 4463-5 du code des transports) - Encadrement de la location transfrontalière dans le domaine du transport fluvial de marchandises

Objet : cet article, inséré en commission spéciale à l'Assemblée nationale à l'initiative des rapporteurs, vise à interdire et sanctionner la location transfrontalière de bateau avec équipage pour le transport fluvial.

I - Le droit en vigueur

La pratique de la location de bateau de marchandises avec équipage est aujourd'hui utilisée par des transporteurs établis à l'étranger comme moyen de contourner les règles de cabotage .

Les règles communautaires 525 ( * ) définissent le cabotage fluvial comme la réalisation d'un transport de marchandises (ou de personnes) par voies navigables dans un État membre de l'Union européenne dans lequel l'entreprise qui réalise la prestation de transport n'est pas établie .

En droit français, l'article L. 4413-1 du code des transports fixe une limitation de durée pour réaliser des transports nationaux de cabotage, établie à 90 jours consécutifs ou 135 jours sur une période de 12 mois . L'article L. 4463-4 punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'effectuer un cabotage non autorisé 526 ( * ) . L'article L. 4463-5 punit de 7 500 euros d'amende le non-respect des durées définies à l'article L. 4413-1.

Les règles sociales relatives à l' obligation de déclaration de détachement des salariés travaillant à bord d'un bateau utilisé par une entreprise étrangère pratiquant le cabotage fluvial, sont fixées au niveau réglementaire 527 ( * ) : elles encadrent strictement les dérogations au code du travail pour les activités de cabotage. Ces règles sont communes au transport routier et au transport fluvial .

Nonobstant l'existence de ces dispositions, certaines entreprises établies hors de France continuent à exploiter sur le territoire un bateau de commerce, pour une durée supérieure aux seuils fixés pour le cabotage, en mettant leurs unités fluviales et leurs équipages à la disposition d'un locataire établi sur le territoire .

Cette location transfrontalière de bateau avec équipage ne fait actuellement l'objet d' aucun encadrement juridique . Or elle crée une distorsion de concurrence pour les transporteurs français qui ne sont pas soumis aux mêmes obligations sociales et fiscales.

II - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article, introduit par la commission spéciale de l'Assemblée nationale sur proposition de ses rapporteurs, vise à interdire et sanctionner, comme pour le transport routier, la location transfrontalière de bateau avec équipage pour le transport fluvial.

Le 1° du présent article insère un nouvel article L 4454-3 dans le chapitre IV (« Contrat de location d'un bateau de marchandises ») du titre V (« Contrats relatifs au transport de marchandises ») du livre IV (« Le transport fluvial ») de la quatrième partie (« Navigation intérieure et transport fluvial ») du code des transports : il pose le principe de l'interdiction, pour une entreprise française de transport fluvial, de louer un bateau de marchandises avec équipage à une entreprise établie hors de France .

Le 2° et le 3° opèrent des coordinations juridiques.

Le 4° assortit la méconnaissance de l'interdiction de location transfrontalière d'un bateau de marchandises avec équipage d'une amende pénale de 7 500 euros , en complétant à cet effet l'article L. 4463-5 du code des transports. La sanction est donc identique à celle prévue en cas de non-respect des règles de cabotage.

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article qui contribue à l'effectivité de l'application des règles sur le cabotage et à la lutte contre le dumping fiscal et social au niveau européen.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 97 quater (art. L. 5542?6?1 du code des transports) - Obligation de détenir une copie de l'accord conclu le 19 mai 2008 entre les partenaires sociaux européens à bord des navires

Objet : cet article, inséré à l'initiative des rapporteurs en séance publique à l'Assemblée nationale, impose de détenir à bord de chaque navire effectuant une navigation maritime commerciale une copie de l'accord conclu le 19 mai 2008 entre les partenaires sociaux européens.

I - Le droit en vigueur

L'article 25 de la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable a réécrit en grande partie le titre IV (« Le droit du travail ») du livre V (« Les gens de mers ») de la cinquième partie (« Transport et navigation maritimes ») du code des transports, afin de transposer en droit interne le « socle » des normes sociales de l'Organisation internationale du travail (OIT) relatives au contrat d'engagement des gens de mer, à la nourriture à bord, à l'obligation de soin à bord, au rapatriement en cas de décès, à la protection de la maternité des femmes marins enceintes et à l'obligation de remise par l'armateur d'un état de service aux marins, qui tient lieu de certificat de travail.

La Convention du travail maritime de l'Organisation internationale du travail (OIT)

Cette convention a été adoptée à Genève le 7 février 2006 et est entrée en vigueur le 22 août 2013 , suite à sa ratification par la loi n° 2012-1320 du 29 novembre 2012. S'appliquant au-delà des seuls « marins », à la catégorie des « gens de mer » entendue de façon élargie, elle constitue un véritable code du travail mondial , définissant les conditions minimales requises pour le travail à bord, les conditions d'emploi, d'alimentation, de logement et de loisirs à bord, ainsi que de protection sociale des gens de mer. Elle est la première convention de l'OIT à avoir une portée contraignante et son titre V prévoit un dispositif de contrôle innovant : la certification des navires en matière sociale .

Au niveau européen, les partenaires sociaux se sont saisis de cette convention et sont parvenus à un accord , le 19 mai 2008. Cet accord porte sur les quatre premiers titres de la Convention , relatifs au socle social minimal du travail en mer : c'est sur cette base qu'a été définie la directive du 16 février 2009 528 ( * ) .

S'agissant des mécanismes de contrôle du droit social maritime, deux nouvelles directives 529 ( * ) sont venues préciser les modalités des contrôles effectués par l'État du port (navires étrangers qui escalent dans les ports) et par l'État du pavillon (contrôles que chaque État fait sur les navires qui battent son pavillon).

Source : commission spéciale du Sénat

Parmi les dispositions de la loi précitée, a notamment été créé l'article L. 5542-6-1, qui prévoit qu'à bord des navires effectuant des voyages internationaux, le capitaine détient un exemplaire d'un contrat type, ainsi que les éléments des conventions et accords collectifs qui portent sur les matières contrôlées par l'État du port, dans une ou plusieurs versions en langue étrangère, et au moins en anglais.

II - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article, adopté en séance publique à l'initiative des rapporteurs de la commission spéciale, complète l'article L. 5542?6?1 en ajoutant qu' « à bord des navires effectuant une navigation maritime commerciale, soumis à la convention du travail maritime de l'Organisation internationale du travail, le capitaine détient, le cas échéant par voie électronique, à la disposition des gens de mer, un exemplaire de l'accord conclu le 19 mai 2008 par les associations des armateurs de la Communauté européenne et la Fédération européenne des travailleurs des transports concernant cette convention ».

Ce complément est imposé par le paragraphe 5 de l'article 3 de la directive 2013/54/UE, qui a été adoptée après la loi du 16 juillet 2013 et qui dispose que « chaque État membre veille à ce que les gens de mer à bord de navires battant pavillon dudit État membre aient accès à une copie de l'accord. L'accès peut être assuré par voie électronique ».

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable à cet article qui vise à mettre la législation française en conformité avec la Convention du travail maritime telle que précisée par le droit européen.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Section 5 bis - Simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité

Article 97 quinquies (nouveau) (art. L. 4161-1, L. 4161-2, L. 4162-2, L. 4162-3, L. 4162-12 à L. 4162-14 et L. 4163-2 du code du travail, art. L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale et art. L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime) - Simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité

Objet : cet article additionnel, inséré par votre commission spéciale sur proposition de votre rapporteur, apporte des modifications au régime juridique du compte personnel de prévention de la pénibilité afin d'en simplifier la tenue pour les employeurs et de le recentrer sur des facteurs de risques professionnels aisément quantifiables.

Traduisant une proposition formulée par le rapport Moreau 530 ( * ) , la loi du 20 janvier 2014 531 ( * ) a créé le compte personnel de prévention de la pénibilité (CPPP). Tout salarié du secteur privé ou d'une personne publique employé dans les conditions du droit privé acquiert des droits au titre de ce compte en fonction de son exposition , dans le cadre de son travail, à l'un des dix facteurs de risques professionnels définis par décret 532 ( * ) et identifiés comme ayant des conséquences sur la qualité et l'espérance de vie en bonne santé à la retraite.

Chaque année, le CPPP d'un salarié exposé à l'un de ces facteurs est crédité de quatre points , ou de huit points en cas de polyexposition , dans la limite d'un plafond de cent points . Ils peuvent être utilisés pour financer une action de formation visant à acquérir les qualifications nécessaires pour obtenir un poste moins pénible, pour passer à temps partiel avec une prise en charge de la différence de rémunération et de cotisations sociales ou pour bénéficier d'un départ anticipé à la retraite . Une fiche individuelle retraçant l'exposition de chaque salarié aux facteurs de risques professionnels doit être conservée par l'employeur afin de la déclarer, chaque année, à la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav).

Lors de l'examen de la loi du 20 janvier 2014, l'opposition sénatoriale d'alors, et notamment votre rapporteur, avait alerté le Gouvernement sur les difficultés insurmontables que la mise en oeuvre du CPPP allait engendrer dans certains secteurs, comme le bâtiment, où tous les métiers sont « pénibles » au sens de la loi. Outre une stigmatisation symbolique de ces activités , les modalités retenues donnent naissance à des tâches bureaucratiques que la très grande majorité des entreprises, à l'exception peut-être de celles disposant d'un service des ressources humaines dédié, ne sont pas en capacité de remplir. C'est particulièrement vrai pour les PME , qui constituent la très grande majorité des entreprises françaises.

La prise de conscience tardive du Président de la République et du Gouvernement sur ce sujet ne s'est pas traduite dans les faits . Ainsi, malgré les engagements pris lors de la grande conférence sociale de juillet 2014, un décret du 9 octobre 2014 533 ( * ) est venu définir les seuils d'exposition aux dix facteurs de pénibilité retenus , alors que seuls quatre d'entre eux (le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes, le travail répétitif et les activités exercées en milieu hyperbare) entraient en vigueur le 1 er janvier 2015. Pour certains des six restants, les critères de mesure choisis sont proprement ubuesques . Il en va ainsi des postures pénibles , définies comme positions forcées des articulations, qui relèvent du CPPP si, pendant au moins 900 heures par an, un salarié a maintenu ses bras « en l'air à une hauteur située au-dessus des épaules » ou s'est trouvé dans des « positions accroupies ou à genoux ou [des] positions du torse en torsion à 30 degrés ou [des] positions du torse fléchi à 45 degrés ».

Considérant qu'il n'est pas possible d'attendre le rapport de la mission d'évaluation et d'aménagement de ce dispositif, confiée par le Premier ministre en janvier dernier à notre collègue député Christophe Sirugue et à Gérard Huot, président de la chambre de commerce et d'industrie de l'Essonne et qui doit être remis au mois de juin, votre rapporteur a décidé de proposer à votre commission spéciale des modifications significatives du CPPP, sans remettre en cause le principe même de la prévention de la pénibilité et de la compensation de l'exposition à cette dernière , qui est issu de la loi « Woerth » de 2010 534 ( * ) .

Cet article 97 quinquies nouveau supprime la fiche individuelle retraçant l'exposition de chaque salarié aux facteurs de pénibilité, alors que la plupart des employeurs ne disposent pas des moyens humains et techniques nécessaires pour la remplir et la maintenir à jour.

Il simplifie également les facteurs de pénibilité pris en compte . Il inscrit dans la loi le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes et le travail en milieu hyperbare, qui sont les trois facteurs dont l'exposition est facile à mesurer . Tant que le Gouvernement ne sera pas parvenu à recueillir l'approbation des partenaires sociaux sur des modalités de mesure de l'exposition aux autres facteurs définis par le décret du 9 octobre 2014 (manutention manuelle de charges, postures pénibles, vibrations mécaniques, agents chimiques dangereux, températures extrêmes, bruit, travail répétitif) plus simples et que le législateur n'aura pas eu la possibilité de les apprécier, ils ne pourront pas entrer en vigueur . Si dans le courant de l'année 2015, les concertations sur ce thème aboutissent, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 pourrait venir les inscrire dans la loi.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Section 6 - Amélioration du dispositif de sécurisation de l'emploi

Article 98 A (nouveau) (art. L. 5125-1, L. 5125-2 et L. 5125-4 à L. 5125-6 du code du travail) - Assouplissement des conditions de conclusion des accords de maintien de l'emploi et création des accords de développement de l'emploi

Objet : cet article additionnel, introduit par votre commission spéciale à l'initiative de votre rapporteur, assouplit les conditions de conclusion des accords de maintien de l'emploi et crée des accords de développement de l'emploi soumis aux mêmes règles.

Instaurés par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi 535 ( * ) , les accords de maintien de l'emploi n'ont pas rencontré le succès attendu puisque seulement six ou sept auraient été conclus .

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission spéciale a adopté un amendement portant article additionnel qui vise à assouplir les conditions de conclusion de ces accords « défensifs » , tout en créant des accords « offensifs » pour développer l'emploi dans les entreprises, ces deux accords relevant désormais d'un régime juridique unique dérogatoire au droit commun de la négociation collective. L'objectif est de supprimer les nombreux verrous législatifs qui ont entravé le développement de ces accords, afin d'apporter une véritable flexibilité interne aux entreprises.

L'article supprime diverses obligations formelles pesant sur ces accords comme :

- la clause relative aux « graves difficultés économiques conjoncturelles » qui conditionne l'existence même des accords ;

- le diagnostic préalable analysé avec les organisations syndicales représentatives de salariés ;

- les conditions dans lesquelles les dirigeants et les actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés ;

- la durée maximale de deux ans (la durée de validité de l'accord sera désormais librement fixée par les signataires) ;

- la clause pénale obligatoire en cas de non-respect des obligations de l'employeur 536 ( * ) ;

- la procédure de référé devant le président du tribunal de grande instance l'autorisant à suspendre voire à résilier l'accord.

Cet article 98 A prévoit en outre qu'à défaut d'un accord conclu avec les délégués syndicaux ou des salariés mandatés, l'accord peut être conclu directement avec les représentants du personnel, ou approuvé par les salariés à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés, dans le respect des principes généraux du droit électoral.

Toutefois, il ne remet pas en cause :

- les règles de l'ordre public social auxquelles il ne peut être dérogé (durée maximale du travail, repos quotidien, congés payés, etc.) ;

- le motif économique du licenciement prononcé à l'encontre d'un salarié qui refuse l'application de l'accord.

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 98 (art. L. 1233-5 du code du travail) - Périmètre d'application des critères relatifs à l'ordre des licenciements dans un plan de sauvegarde de l'emploi

Objet : cet article autorise les employeurs qui définissent unilatéralement un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) à fixer le périmètre d'application des critères relatifs à l'ordre des licenciements à un niveau qui ne peut être inférieur à la zone d'emploi d'un établissement.

Le plan de sauvegarde de l'emploi et les modifications
apportées par la loi de sécurisation de l'emploi


• Le licenciement économique désigne toute rupture du contrat de travail , à l'initiative de l'employeur, reposant sur un motif non inhérent à la personne du salarié.

Le motif économique peut donc résulter :

- d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ;

- d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail pour raisons économiques ;

- de difficultés économiques de l'entreprise ;

- de la sauvegarde de sa compétitivité ;

- de sa cessation d'activité.


• Communément appelé « plan social », le plan de sauvegarde de l'emploi n'est obligatoire que dans les entreprises comptant au moins cinquante salariés qui licencient, sur une même période de trente jours , dix salariés ou plus .

Il présente toutes les mesures destinées à éviter les licenciements pour motif économique ou en limiter le nombre. Une attention particulière doit être accordée à certaines catégories de personnel : les salariés âgés et ceux qui présentent des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile.

Concrètement, un PSE peut comprendre les mesures suivantes :

- des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ;

- des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ;

- des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ;

- des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ;

- des actions de formation , de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ;

- la réduction ou l'aménagement du temps de travail ainsi que, sous conditions, des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires.


• La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 précitée n'a pas modifié le contenu du PSE, mais a apporté les modifications suivantes :

- l'employeur peut désormais conclure un accord d'entreprise « majoritaire » pour définir le contenu du plan ;

- les délais de consultation du comité d'entreprise sont simplifiés ;

- les prérogatives de l'administration du travail sont renforcées , car elle doit dorénavant valider les accords sur le PSE ou homologuer les documents unilatéraux de l'employeur, dans des délais légaux respectivement de quinze et vingt-et-un jours ;

- la législation tient compte des spécificités des redressements et liquidations judiciaires ;

- enfin, le juge administratif est désormais compétent pour contrôler ces nouvelles décisions administratives relatives à l'aspect collectif et formel du licenciement économique, tandis que le juge prud'homal demeure compétent pour les recours individuels des salariés licenciés pour motif économique, notamment pour statuer sur la cause réelle et sérieuse du licenciement.

Source : commission spéciale du Sénat

I - Le dispositif proposé

Selon l'article L. 1233-5 du code du travail, lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il doit définir les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements , après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.

Ces critères prennent notamment en compte :

- les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;

- l'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ;

- la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;

- les qualités professionnelles appréciées par catégories de personnel.

Le périmètre d'application de l'ordre des licenciements est en principe constitué par l'ensemble des salariés de l'entreprise qui relèvent d'une même catégorie professionnelle , caractérisée par l'exercice de fonctions de même nature exigeant une formation commune.

Proche d'une jurisprudence de la Cour de cassation 537 ( * ) , l'article 20 de la loi du 14 juin 2013 précitée a indiqué que l'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères légaux. Cette même loi, à travers l'article L. 1233-24-2 du même code, a autorisé l'accord collectif définissant le PSE à modifier la pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements.

Le présent article, dans sa version initiale, a complété ces dispositions par un alinéa précisant que pour les entreprises soumises à l'obligation d'établir un PSE, le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé à un niveau inférieur à celui de l'entreprise .

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques adopté en commission spéciale a précisé que, dans l'hypothèse où le PSE était défini par un document unilatéral de l'employeur, le périmètre d'appréciation de l'ordre des licenciements ne pouvait être inférieur à celui de chaque zone d'emploi , au sens de l'Insee, dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emplois.

La zone d'emploi au sens de l'Insee

Selon l'Insee, une zone d'emploi est un « espace géographique à l'intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent, et dans lequel les établissements peuvent trouver l'essentiel de la main d'oeuvre nécessaire pour occuper les emplois offerts ». Leur élaboration découle des données de flux de déplacements domicile-travail collectées lors des recensements de la population.

Établi pour la première fois en 1983-84, l'atlas des zones d'emploi a été actualisé en 2010. Ainsi, au 1 er juillet 2011, la France comptait 322 zones d'emploi , y compris les départements d'outre-mer (dont Mayotte).

Près de la moitié de la population française réside dans les quarante zones d'emploi les plus peuplées .

Ce zonage peut guider la délimitation de territoires pour la mise en oeuvre des politiques territoriales initiées par les pouvoirs publics ou les acteurs locaux.

Source : commission spéciale du Sénat

Aucun amendement n'a été adopté en séance publique.

III - La position de votre commission

Au préalable, votre rapporteur souhaite indiquer qu'il existe, selon certains praticiens du droit du travail et certains tribunaux, dans le cadre du droit actuel, une incertitude sur la possibilité pour l'employeur d'appliquer les critères d'ordre des licenciements dans le cadre d'un PSE à un niveau inférieur à celui de l'entreprise. Cette interprétation, qui n'est pas partagée par les services du ministère du travail 538 ( * ) , se fonde sur les jugements du tribunal administratif de Cergy-Pontoise 539 ( * ) et de la cour administrative d'appel de Versailles 540 ( * ) qui ont estimé, dans l'affaire Mory-Ducros, que l'employeur ne pouvait unilatéralement instituer un PSE qui prévoit un périmètre inférieur à celui de l'entreprise. Or cette interdiction peut aboutir à des situations ubuesques , préjudiciables aux salariés comme à l'employeur. En effet, une entreprise qui dispose par exemple d'un établissement en difficulté à Lille, nécessitant un PSE, et d'un autre florissant à Marseille, devrait dans cette hypothèse appliquer un ordre des licenciements spécifique à chaque catégorie socio-professionnelle mais commun à ces deux sites. Le risque est alors que l'application de ces critères aboutisse à supprimer des postes à Marseille, et que les salariés de Lille soient in fine licenciés après avoir refusé les postes devenus vacants à Marseille.

Votre rapporteur considère toutefois que la version initiale du projet de loi n'était guère satisfaisante , car elle ne fixait aucune limite à l'employeur qui souhaitait appliquer l'ordre des licenciements à un niveau inférieur à celui de l'entreprise. Rien ne l'aurait en effet empêché d'appliquer cet ordre au niveau d'un atelier, d'un service voire d'une équipe, ce qui aurait été contraire au principe d'objectivité dans le choix et l'application des critères de licenciement dans le cadre d'un PSE.

Le choix de l'Assemblée nationale de retenir comme plancher le niveau de la zone d'emploi au sens de l'Insee constitue, aux yeux de votre rapporteur, un compromis acceptable entre l'échelon de l'entreprise et celui de l'établissement . Si deux établissements appartiennent à une même zone d'emploi, l'employeur pourra appliquer un ordre des licenciements commun à ces deux établissements, car les salariés d'un établissement pourront éventuellement, avec un temps de transport raisonnable, pourvoir des postes dans l'autre entité, devenus vacants en raison de l'application de cet ordre. Cette faculté ne sera pas offerte à l'employeur si les établissements n'appartiennent pas à une même zone d'emploi. Si un seul établissement se trouve sur le territoire de la zone d'emploi, l'employeur pourra appliquer les critères d'ordre du licenciement au niveau de cette entité, mais pas à un niveau inférieur. Ce faisant, la législation continue d'attribuer une sorte de « prime » aux accords collectifs car seule cette voie permet à l'employeur d'appliquer ces critères à un niveau inférieur à l'établissement.

Au final, malgré le caractère inhabituel de l'introduction dans le code du travail d'une notion issue de la statistique publique, votre rapporteur approuve cette disposition, qui offre à l'employeur davantage de souplesse, sans toutefois encourir le risque d'un « ciblage » des salariés à un niveau inférieur à l'établissement . Votre rapporteur souhaite d'ailleurs que cette notion de zone d'emploi soit reprise expressément par la jurisprudence judiciaire lorsqu'elle a à connaître des contentieux liés à la mobilité des salariés, afin de ne pas multiplier les notions concurrentes en droit du travail (bassin d'emploi, zone géographique d'emploi du salarié pour l'accord de mobilité interne, zone d'emploi, etc.)

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 99 (art. L. 1233-53 du code du travail) - Correction d'une erreur matérielle

Objet : cet article vise à corriger une erreur matérielle dans l'article du code du travail qui traite des prérogatives de contrôle reconnues à l'administration en cas de licenciement économique collectif, hors procédure de PSE.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 1233-53 du code du travail définit l'étendue du contrôle par l'autorité administrative des projets de licenciement économique qui concernent :

- les entreprises de moins de cinquante salariés ;

- ainsi que celles de cinquante salariés et plus lorsque le projet de licenciement concerne moins de dix salariés dans une même période de trente jours.

En l'occurrence, l'administration vérifie, dans un délai de vingt et un jours à compter de la date de la notification du projet de licenciement, que :

- les représentants du personnel ont été informés, réunis et consultés conformément aux dispositions légales et conventionnelles en vigueur ;

- les obligations relatives à l'élaboration des mesures sociales en vue d'éviter ou de limiter le nombre de licenciements ont été mises en oeuvre.

Le projet de loi maintient ces dispositions, mais supprime du champ d'application de l'article L. 1233-53 les projets de licenciement qui concernent moins de dix salariés dans une même période de trente jours dans les entreprises de cinquante salariés et plus.

En effet, il s'agit là d'une erreur matérielle car la loi du 14 juin 2013 précitée n'avait pas pour objet de modifier les règles relatives aux « petits licenciements économiques » (entre deux et neuf salariés sur une période de moins de trente jours) dans les entreprises employant plus de cinquante salariés. Ces règles sont régies par une section spécifique du code du travail, qui regroupe les articles L. 1233-8 à L. 1233-20.

Aucun amendement n'a été adopté par l'Assemblée nationale sur cet article.

II - La position de votre commission

Votre rapporteur n'a pas d'observation à formuler sur cet article qui corrige une erreur matérielle dans le code du travail.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 100 (art. L. 1233-4 et L. 1233-4-1 du code du travail) - Aménagement des règles relatives aux offres de reclassement à l'étranger

Objet : cet article pose comme principe que l'employeur, avant un licenciement économique, doit proposer des offres de reclassement pour des emplois situés sur le territoire national, dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie, le salarié dont le licenciement est envisagé ayant accès, à sa demande, à la liste précise des offres d'emploi situées hors du territoire national.

I - Le dispositif proposé

Le I de cet article modifie l'article L. 1233-4 du code du travail, relatif aux offres de reclassement qui doivent être obligatoirement proposées avant tout un licenciement pour motif économique.

Le texte en vigueur prévoit que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé n'a pu être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Il indique que le reclassement du salarié doit s'effectuer sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

Il dispose enfin que les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises.

Le présent article maintient ces dispositions mais précise que les offres de reclassement doivent concerner des emplois disponibles situés sur le territoire national , dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.

Le II de cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 1233-4-1 du même code, qui porte sur les droits des salariés à l'égard des offres de reclassement à l'étranger .

Le texte en vigueur indique que, lorsque l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient est implanté hors du territoire national , l'employeur demande au salarié, préalablement au licenciement, s'il accepte de recevoir des offres de reclassement hors de France , dans chacune des implantations en cause, et sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation.

Il dispose également que le salarié doit manifester son accord, assorti le cas échéant des restrictions susmentionnées, pour recevoir de telles offres dans un délai de six jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l'employeur. L'absence de réponse vaut refus.

Enfin, il prévoit que les offres de reclassement hors du territoire national, qui sont écrites et précises, ne sont adressées qu'au salarié ayant accepté d'en recevoir et compte tenu des restrictions qu'il a pu exprimer. Le salarié reste libre de refuser ces offres. Le salarié auquel aucune offre n'est adressée est informé de l'absence d'offres correspondant à celles qu'il a accepté de recevoir.

La nouvelle rédaction proposée par le présent article indique que le salarié dont le licenciement est envisagé a accès sur sa demande à la liste précise des offres d'emploi situées hors du territoire national disponibles dans l'entreprise ou dans les autres entreprises du groupe auquel elle appartient. En outre, le projet de loi renvoie à un décret le soin de préciser les modalités d'application de l'article L. 1233-4-1.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre des amendements rédactionnels, un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques, adopté en commission spéciale, a réécrit l'article L. 1233-4-1 du code du travail, en vue de simplifier la procédure actuelle , tout en garantissant les droits des salariés. La nouvelle rédaction propose en effet que si l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient comporte des établissements en dehors du territoire national, le salarié dont le licenciement est envisagé peut demander à l'employeur de recevoir des offres de reclassement dans ces établissements. Le salarié doit alors préciser dans sa demande les restrictions éventuelles qu'il souhaite voir appliquer aux offres de reclassement, en matière de localisation et de rémunération notamment. L'employeur est alors obligé de transmettre au salarié concerné les offres correspondantes, qui doivent être écrites et précises.

En séance publique, outre un amendement rédactionnel, un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques a été adopté, indiquant que le décret devra préciser les modalités d'information du salarié sur la possibilité de demander des offres de reclassement hors du territoire national.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur considère que le choix de donner au salarié, et non plus à l'employeur, la responsabilité d'initier la procédure de recherche d'offres de reclassement à l'étranger constitue une mesure de souplesse pour les entreprises, qui ne remet pas en cause les droits des salariés. Il convient de rappeler que cette obligation est aujourd'hui souvent purement formelle, la très grande majorité des salariés licenciés pour motif économique ne souhaitant pas travailler à l'étranger.

Le projet de loi prévoit que l'employeur devra informer les salariés dont le licenciement est envisagé qu'ils ont le droit de demander la liste des offres d'emploi à l'étranger. Mais si aucun salarié ne le demande, ou seulement un faible nombre, l'employeur s'épargnera, grâce au présent article, des démarches inutiles, et pourra d'ailleurs se concentrer sur les demandes des salariés véritablement intéressés par un emploi à l'étranger.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 101 (art. L. 1233-58 du code du travail) - Aménagements des règles relatives au contrôle par l'administration du plan de sauvegarde de l'emploi dans le cadre d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire

Objet : cet article, qui concerne les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire, indique que l'autorité administrative chargée d'homologuer un plan de sauvegarde de l'emploi doit examiner son contenu en fonction des moyens dont dispose l'entreprise.

I - Le dispositif proposé

Le présent article modifie l'article L. 1233-58 du code du travail qui définit les règles à suivre en cas de licenciements économiques dans les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire .

En particulier, le II de l'article L. 1233-58 précise l'étendue du contrôle exercé par l'administration sur l'accord collectif majoritaire ou le document unilatéral de l'employeur (ou, le cas échéant, de l'administrateur ou du liquidateur), définissant le plan de sauvegarde de l'emploi .

Au préalable, il convient de rappeler que l'un des apports essentiels de la loi du 14 juin 2013 précitée a été de permettre à un accord collectif de déterminer le contenu du PSE, à condition d'être signé par une ou plusieurs organisations syndicales ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles 541 ( * ) . L'accord peut comporter un volet facultatif , relatif aux modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements (comme la pondération et le critère d'ordre des licenciements, le calendrier des licenciements, ou encore les modalités de mise en oeuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement 542 ( * ) ). A défaut d'accord collectif majoritaire , l'employeur demeure libre d'élaborer unilatéralement un document définissant le contenu du PSE 543 ( * ) , qui doit alors être assorti des dispositions relatives aux modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements.

L'autorité administrative valide l'accord collectif majoritaire 544 ( * ) dans un délai de quinze jours après s'être assurée que :

- l'accord a été valablement signé ;

- les mesures du volet facultatif respectent le cadre légal ;

- l'accord ne prévoit pas de dérogations interdites par le code du travail (il ne doit pas remettre en cause l'effort de formation, d'adaptation et de reclassement des salariés, les principes généraux d'information et de consultation du comité d'entreprise, et il doit proposer le cas échéant aux salariés le contrat de sécurisation professionnelle) ;

- la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) a été régulière ;

- le contenu du PSE répond aux prescriptions légales ;

- les obligations pour l'employeur de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d'un établissement , issues de la loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle (informations à l'égard des salariés, du comité d'entreprise, de l'autorité administrative et des candidats éventuels à la reprise) ont été respectées.

Cette même autorité homologue le document unilatéral de l'employeur portant PSE après avoir procédé à des vérifications similaires à celles prévues pour l'accord collectif majoritaire, dans un délai de vingt et un jours après réception du document complet 545 ( * ) . Cependant, son contrôle du contenu même du PSE est plus poussé puisqu'elle vérifie notamment l'adéquation du PSE avec les moyens dont dispose l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe, les mesures d'accompagnement compte tenu de l'importance du projet de licenciement, ou encore l'utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE).

Les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire ne sont pas concernées par :

- les délais de droit commun imposés à l'administration pour rendre sa décision 546 ( * ) (qu'il s'agisse d'une décision de validation ou d'homologation, l'administration dispose de huit jours en cas de redressement et de quatre jours en cas de liquidation ) ;

- l'obligation de porter à la connaissance des salariés la décision de l'administration.

En revanche, quelle que soit la situation de l'entreprise 547 ( * ) :

- l'administration doit motiver sa décision , puis la notifier au comité d'entreprise, et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales représentatives qui en sont signataires ;

- le silence gardé par l'autorité administrative vaut décision d'acceptation de validation ou d'homologation 548 ( * ) .

Pour mémoire, parmi les quelques mille PSE mis en oeuvre chaque année en France, un tiers environ s'applique à des entreprises en difficulté . Parmi les refus d'homologation ou de liquidation, un tiers également concerne ces entreprises. Par ailleurs, parmi les 75 plans ayant fait l'objet d'une contestation devant le juge administratif depuis le 1 er juillet 2013, 29 concernaient des entreprises en redressement, et 17 des entreprises en liquidation.

Le projet de loi maintient les dispositions du premier alinéa du II de l'article L. 1233-58 du code du travail , mais il insère à sa suite deux alinéas afin d'assouplir la portée du contrôle par l'administration des PSE concernant les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire .

Le premier alinéa prévoit que par dérogation au 1° de l'article L. 1233-57-3, selon lequel l'autorité administrative chargée d'homologuer un PSE doit examiner les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe, celle-ci contrôle le plan uniquement en fonction des moyens dont dispose l'entreprise en redressement ou liquidation judiciaire .

Le second alinéa indique que, par dérogation aux dispositions de l'article L. 1233-4, l'obligation de formation, d'adaptation et de reclassement doit également être mise en oeuvre au niveau de l'entreprise. Mais si celle-ci appartient à un groupe, il revient à l'employeur, à l'administrateur ou au liquidateur de solliciter les autres entreprises du groupe afin d'établir une liste d'emplois qui y sont disponibles et de la mettre à disposition des salariés susceptibles d'être licenciés.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre des amendements rédactionnels, un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques, adopté en commission spéciale, a supprimé les dispositions introduites par le projet de loi tendant à établir des règles spécifiques pour les offres de reclassement des salariés des entreprises en redressement ou liquidation judiciaire, qui dérogeaient au droit commun prévu à l'article L. 1233-4 du code du travail, tel que modifié justement par l'article 100 du projet de loi.

En séance publique, un amendement des mêmes auteurs a été adopté, pour préciser que si l'autorité administrative doit homologuer le PSE uniquement en considérant les moyens dont dispose l'entreprise, l'employeur reste tenu de rechercher les moyens dont dispose le groupe . Un sous-amendement, présenté par notre collègue députée Colette Capdevielle, a précisé que cette recherche incombait selon le cas à l'administrateur, au liquidateur ou à l'employeur.

Par ailleurs, un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques a intégré au présent article les dispositions de l'article 102 bis , relatif à la neutralisation des conséquences d'une annulation de décision de validation ou d'homologation d'un PSE pour défaut de motivation dans les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire, car elles modifient également l'article L. 1233-58 du code du travail. L'article 102 bis a été supprimé en conséquence.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur rappelle qu'il n'existe pas d'obligation légale pour un groupe de participer au financement du PSE d'une filiale. Cette situation ne pose pas de difficultés particulières pour l'administration lorsqu'elle examine le contenu du PSE d'une entreprise in bonis : le groupe accepte souvent de réaliser des efforts financiers à la hauteur de ses capacités afin d'enrichir le contenu du plan et éviter ainsi le refus d'homologation ou de validation du plan. En revanche, le groupe, même en bonne santé financière, n'a pas forcément intérêt à participer financièrement au PSE de sa filiale en redressement ou en liquidation judiciaire. Il est donc souvent inutile que l'administration examine le PSE d'une entreprise en difficulté en fonction des moyens dont dispose le groupe auquel elle appartient.

Inutile, ce contrôle peut même nuire aux intérêts des salariés . En effet, si l'administration refuse d'homologuer un PSE en estimant que le contenu n'est pas proportionné aux moyens dont dispose le groupe, les salariés se retrouvent démunis et sans ressources au-delà de la période de paiement de salaire garantie par le régime de garantie des salaires (AGS) 549 ( * ) . Ils ne peuvent pas retrouver un autre emploi ou bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle, dans la mesure où leur licenciement n'a pas été autorisé faute de décision administrative favorable. Cette situation d'incertitude se trouve d'ailleurs prolongée si la décision de l'administration autorisant les licenciements n'examine pas les moyens dont dispose le groupe pour apprécier le plan mais se trouve ensuite attaquée par des salariés devant le juge administratif pour ce motif.

Au final, l'obligation pour l'administration de contrôler uniquement le PSE en fonction des moyens dont dispose l'entreprise en redressement ou liquidation judiciaire permet de défendre les intérêts des salariés, de sécuriser le rôle de l'administration du travail, et d'éviter des recours devant le juge administratif.

C'est pourquoi votre rapporteur ne s'oppose pas à cet article, d'autant qu'un amendement adopté à l'Assemblée a rappelé l'obligation « morale » pour l'employeur d'une entreprise en difficulté (ou l'administrateur ou le liquidateur) de rechercher les moyens dont dispose le groupe, sans que le défaut de recherche puisse justifier le refus par l'administration de valider ou homologuer le plan. Par ailleurs, en cas de faillite frauduleuse d'une entreprise, les salariés conservent la possibilité d'engager des actions judiciaires contre le groupe, afin de prouver l'existence éventuelle d'un co-emploi entre ce dernier et sa filiale, ou d'obtenir des dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

A l'invitation de votre rapporteur, votre commission spéciale a adopté un amendement de coordination juridique .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 102 (art. L.1235-16 du code du travail) - Neutralisation des conséquences d'une annulation de décision de validation ou d'homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi pour défaut de motivation

Objet : cet article vise à neutraliser les conséquences de l'annulation par le juge administratif d'une décision de validation ou d'homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi pour défaut de motivation, en permettant à l'administration de reprendre une seconde décision motivée.

I - Le dispositif proposé

Le premier alinéa de l'article L. 1235-16 du code du travail prévoit que l'annulation de la décision de validation d'un accord collectif majoritaire définissant le contenu d'un PSE, ou de la décision d'homologation du document unilatéral de l'employeur, donne lieu, sous réserve de l'accord des parties, à la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Le second alinéa de cet article indique qu'à défaut de réintégration du salarié, ce dernier a droit à une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois . Elle est due sans préjudice de l'indemnité de licenciement de droit commun, qui est due à tout salarié bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée depuis plus d'un an sans interruption, et qui n'a pas commis de faute grave.

Le projet de loi complète l'article L. 1235-16 par deux alinéas pour préciser les conséquences de l'annulation d'une décision de validation ou d'homologation liée à un défaut de motivation.

Le premier alinéa prévoit qu'en cas d'annulation d'une décision de validation ou d'homologation en raison d'une insuffisance de motivation, l'autorité administrative doit prendre une nouvelle décision suffisamment motivée, qui est portée par l'employeur à la connaissance des salariés licenciés à la suite de la première décision, par tout moyen permettant de conférer une date certaine à cette information.

Le second alinéa indique que si l'autorité administrative a satisfait à l'obligation d'édicter une seconde décision suffisamment motivée, l'annulation pour le seul motif d'insuffisance de motivation de la première décision est sans incidence sur la validité du licenciement et ne donne lieu ni à réintégration, ni au versement d'une indemnité à la charge de l'employeur.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre un amendement rédactionnel, un amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques, adopté en commission spéciale, a précisé que l'administration devait prendre sa nouvelle décision d'homologation ou de validation du PSE au plus tard quinze jours à compter de la notification du jugement d'annulation de la décision initiale pour défaut de motivation.

III - La position de votre commission

A la lumière des informations recueillies lors de ses auditions, votre rapporteur considère que cet article ne fait pas obstacle à l'autorité de la chose jugée et ne porte pas préjudice aux droits des salariés.

En effet, l'objectif est d'éviter de créer une insécurité juridique préjudiciable aussi bien aux salariés qu'aux employeurs. Les salariés sont actuellement incités à saisir les conseils de prud'hommes dès lors qu'une décision administrative d'homologation ou de validation du PSE a été annulée par le juge administratif, même si cette annulation se fonde uniquement sur un défaut de motivation. C'est pourquoi cet article fait obstacle aux demandes des salariés en lien avec leur licenciement économique devant la juridiction prud'homale pendant une période de quinze jours maximum, si la décision d'homologation ou de validation du PSE a été annulée uniquement pour un défaut de motivation et que l'administration reprend une décision autorisant le PSE dans ce délai.

La portée de cet article est donc limitée, d'autant qu'entre le 1 er juillet 2013 et mars 2015, seulement 9 décisions d'homologation de PSE ont été annulées pour défaut de motivation . Dans les faits, le juge administratif a annulé des décisions qui n'étaient pas assez exhaustives.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 103 (art. L. 1233-66 du code du travail) - Proposition du contrat de sécurisation professionnelle dans le cadre d'un plan de sauvegarde l'emploi

Objet : cet article oblige l'employeur à attendre la notification par l'autorité administrative de sa décision de validation ou d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi avant de proposer aux salariés de bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

I - Le dispositif proposé

Le premier alinéa de l'article L. 1233-66 du code du travail oblige les employeurs qui ne sont pas soumis à la législation relative aux congés de reclassement 550 ( * ) , à proposer à chaque salarié dont il envisage de prononcer le licenciement pour motif économique le bénéfice du contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Cette proposition doit être présentée lors de l'entretien préalable au licenciement ou à l'issue de la dernière réunion des représentants du personnel lorsqu'il s'agit d'un licenciement collectif.

Le contrat de sécurisation professionnelle avant le 1 er janvier 2015

Créé par la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011 pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels, le contrat de sécurisation professionnelle permet aux salariés dont le licenciement économique est envisagé, de bénéficier d'un parcours de retour à l'emploi pendant une durée maximale de douze mois , et d'une allocation spécifique de sécurisation professionnelle (ASP) égale à 80 % 551 ( * ) du salaire journalier de référence pour les salariés justifiant au moins d'un an d'ancienneté dans l'entreprise (soit l'équivalent du salaire net).

Le CSP concerne toutes les entreprises employant moins de mille salariés, ainsi que les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire, quel que soit leur effectif. Il s'adresse à tout salarié pour lequel l'employeur envisage un licenciement économique, à titre individuel ou collectif, à condition qu'il bénéficie au moins d'un an d'ancienneté, sauf dans les entreprises en difficulté.

La proposition de l'employeur doit être individuelle et écrite , et présentée soit lors de l'entretien préalable au licenciement, soit à l'issue de la dernière réunion des représentants élus du personnel. Le salarié dispose alors d'un délai de réflexion de vingt et un jours , l'absence de réponse valant refus.

L'employeur finance le CSP par le versement à Pôle emploi de l'indemnité compensatrice de préavis (dans la limite de trois mois de salaire), et par un versement au titre du droit individuel à la formation (DIF) acquis par le salarié.

Le contrat de travail d'un salarié ayant accepté un CSP est rompu du fait du commun accord entre les parties. Par conséquent, cette rupture n'entraîne ni préavis, ni indemnité de préavis, mais elle ouvre droit à l'indemnité légale de licenciement, à une éventuelle indemnité conventionnelle, et, le cas échéant, au différentiel entre le montant de l'indemnité de préavis et la contribution de l'employeur au dispositif de la CSP. Pendant la durée du CSP et en dehors des courtes périodes de travail qu'il peut être amené à effectuer, le salarié a le statut de stagiaire de la formation professionnelle .

L'employeur qui a omis de proposer un CSP à un salarié doit verser à Pôle emploi une contribution spécifique correspondant à deux mois de salaire. Cette contribution est portée à trois mois lorsque l'ancien salarié adhère à une CSP sur proposition de Pôle emploi.

Source : commission spéciale du Sénat

Le présent article maintient le dispositif de l'article L. 1233-36, qu'il complète en précisant que si le licenciement pour motif économique donne lieu à un plan de sauvegarde de l'emploi, la proposition de bénéficier de CSP doit être formulée après la notification par l'autorité administrative de sa décision de validation ou d'homologation.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Un amendement du Gouvernement a été adopté en séance publique, afin de modifier l'article L. 1233-69 du code du travail. Cet article prévoit actuellement que les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) peuvent financer le CSP en affectant des ressources destinées aux actions de professionnalisation et au compte personnel de formation. L'amendement rend cette participation des OPCA obligatoire , en renvoyant à un décret le soin d'en préciser les modalités.

Toutefois, un sous-amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques a supprimé l'obligation pour les OPCA d'affecter aux actions du CSP une part des ressources destinées aux actions de professionnalisation.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur estime que cet article est protecteur des droits des salariés qui souhaitent bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle. En effet, quelques rares employeurs ont proposé à leurs salariés de bénéficier d'un CSP avant même d'obtenir la décision d'homologation ou de validation d'un PSE, afin de gagner du temps et de faire des économies de salaire. Or, la décision de l'administration peut intervenir après le délai de réflexion de trois semaines accordé au salarié pour adhérer au CSP, ce qui peut l'empêcher de bénéficier de ce dispositif. D'où la nécessité d'obliger l'employeur à attendre la décision de l'administration de validation ou d'homologation du PSE avant de proposer aux salariés concernés de bénéficier du CSP.

A l'initiative du rapporteur, la commission spéciale a supprimé par amendement le dernier alinéa de cet article, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale, qui a davantage vocation à trouver sa place à l'article 103 bis du projet de loi.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 103 bis (art. L. 1233-69 du code du travail) - Financement par l'entreprise des formations réalisées dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle

Objet : cet article transpose un accord des partenaires sociaux afin de permettre le financement des actions de formation des salariés licenciés pour un motif économique bénéficiant du contrat de sécurisation professionnelle au moyen des sommes consacrées, dans le cadre d'un accord d'entreprise, au financement du compte personnel de formation.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Dans les entreprises comptant moins de mille salariés , l'employeur doit proposer à ses salariés qu'il envisage de licencier pour motif économique le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), qui a pour objet « l'organisation et le déroulement d'un parcours de retour à l'emploi » (article L. 1233-65 du code du travail). Il comprend un accompagnement renforcé de ses bénéficiaires et, le cas échéant, des formations et des périodes de travail en entreprise. Il est financé en partie par l'employeur, qui doit verser à ce titre l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que les droits acquis par le salarié au titre du droit individuel à la formation (DIF). Ce dernier mécanisme a été remplacé le 1 er janvier 2015 par le compte personnel de formation (CPF).

Toute entreprise doit verser une somme au moins égale à 1 % de sa masse salariale à un organisme collecteur paritaire agréé (OPCA) afin de financer la formation de ses salariés. Parmi ce 1 % , une fraction de 0,2 % est dédiée au CPF. Toutefois, l'article L. 6331-10 autorise les entreprises à conclure un accord collectif portant sur le CPF : s'il est décidé qu'au moins 0,2 % de la masse salariale lui est consacrée, l'entreprise n'a pas à verser cette somme à l'OPCA mais la gère directement.

Dans le cadre de leur accord 552 ( * ) sur l'affectation des ressources du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), les partenaires sociaux sont convenus d'assurer un cofinancement du FPSPP et des OPCA pour les actions de formation engagées dans le cadre d'un CSP et éligibles au CPF.

Il est prévu que la part revenant aux OPCA soit issue des sommes qu'ils collectent au titre du CPF. Certaines entreprises n'étant pas tenues, en application d'un accord collectif, de reverser une contribution à leur OPCA pour le CPF, elles doivent financer directement, pour leurs salariés, les formations réalisées au cours d'un CSP en ayant recours aux sommes qu'elles dédient au CPF.

Le présent article 103 bis , issu d'un amendement déposé par les rapporteurs de la commission spéciale, traduit dans la loi ce circuit de financement . Il complète l'article L. 1233-69 du code du travail et dispose que les entreprises couvertes par un accord sur le CPF doivent reverser à leur OPCA tout ou partie des sommes qui y sont consacrées afin de financer des mesures de formation engagées au cours d'un CSP.

II - La position de votre commission

Institué par l'accord national interprofessionnel (ANI) du 31 mai 2011 553 ( * ) et la loi du 28 juillet 2011 554 ( * ) , le contrat de sécurisation professionnelle est un dispositif imaginé par les partenaires sociaux afin de développer l'accompagnement des salariés confrontés aux conséquences des mutations économiques et de diminuer les effets sur l'employabilité des demandeurs d'emploi résultant des ruptures dans les parcours professionnels. Renouvelé récemment 555 ( * ) à l'unanimité des organisations représentatives des employeurs et des salariés, il offre désormais pendant un an 556 ( * ) une allocation égale à 75 % du salaire précédemment perçu et des actions d'appui, d'orientation et de formation afin de définir un nouveau projet professionnel.

L'article 103 bis transpose dans la loi les décisions prises par les partenaires sociaux en application de l'article 15 de l'ANI du 8 décembre 2014, qui définit les actions de formation devant être réalisées dans le cadre du CSP comme celles « permettant un retour rapide à l'emploi durable qui préparent à des métiers pour lesquels les besoins de main d'oeuvre ne sont pas satisfaits ou à des métiers qui recrutent », ouvre aux bénéficiaires du CSP les formations éligibles au CPF et prévoit la participation du FPSPP et des OPCA à leur financement. La prise en compte du cas spécifique des entreprises ayant conclu un accord sur le CPF est donc nécessaire .

Votre rapporteur est donc favorable à cet article. Sur sa proposition, votre commission a adopté un amendement de coordination juridique , qui y insère des dispositions retirées de l'article 103 afin qu'un seul article du projet de loi modifie l'article L. 1233-69 du code du travail. Par ailleurs, le financement par les OPCA des actions de formation réalisées dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle avec les ressources destinées aux actions de professionnalisation a été rétablie . Si le Gouvernement et l'Assemblée nationale affirment que la suppression de cette modalité de financement répondait à une demande des partenaires sociaux, telle n'est pas l'impression qu'a retirée votre rapporteur de ses auditions.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 104 - Entrée en vigueur des articles 98 à 103 du projet de loi

Objet : cet article prévoit que les articles 98 à 103 du présent projet de loi sont applicables aux procédures de licenciement économique engagées après sa publication.

I - Le dispositif proposé

Afin de ne pas remettre en cause la sécurité juridique des procédures de licenciement en cours, les articles 98 à 103 s'appliqueront aux procédures de licenciement pour motif économique engagées après la publication de la présente loi.

Le point de départ d'une procédure de licenciement économique est la première réunion du comité d'entreprise s'il s'agit d'examiner le PSE, en application de l'article L. 1233-30 du code du travail, ou sa consultation, s'il s'agit d'un projet de licencier moins de dix salariés sur une période de trente jours, conformément à l'article L. 1233-8 du code du travail.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Seule une modification rédactionnelle a été adoptée en commission spéciale à l'Assemblée nationale.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur constate que cet article est de nature à assurer la sécurité juridique des procédures de licenciement économique en cours.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

TITRE IV - DISPOSITIONS FINALES

Article 105 A - Rapport sur les tarifs postaux dans les territoires
régis par l'article 73 de la Constitution

Objet : cet article demande la remise au Parlement, avant le 1 er juin 2015, d'un rapport sur les tarifs postaux dans les territoires régis par l'article 73 de la Constitution.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Sur proposition de notre collègue députée de La Réunion Ericka Bareigts et de plusieurs de ses collègues représentant des départements ultramarins, l'Assemblée nationale a inséré dans le projet de loi cet article 105 A afin que le Gouvernement remette au Parlement un rapport étudiant les tarifs postaux dans les territoires régis par l'article 73 de la Constitution - La Réunion, Mayotte, Guyane, Martinique, Guadeloupe - afin d'envisager leur alignement sur ceux en vigueur dans l'Hexagone.

Ce rapport doit notamment étudier les mécanismes qui permettraient d'appliquer les mêmes tarifs que dans l'Hexagone , dans le cadre du service universel postal, quelle que soit la tranche de poids considérée, pour les envois entre ces territoires et la France hexagonale. Il doit évaluer l'impact financier de ces mécanismes et les nécessités d'adaptation de la part des services de l'État, notamment douaniers. Il doit également contenir des prévisions d'impact sur les économies ultramarines.

Aux yeux des auteurs de l'amendement, la situation actuelle est « contradictoire avec la vocation de service public du service universel postal et avec le principe d'indivisibilité de la République ». Ils souhaitent donc que ce rapport constitue la première étape d'une réforme de ces tarifs postaux .

II - La position de votre commission

Dès le début de ses travaux, votre commission a fait part de son opposition au principe même des demandes de rapports, par le Parlement , au Gouvernement ou à des autorités administratives. Ce projet de loi en comptait 25 dans le texte adopté par l'Assemblée nationale. Vos rapporteurs ont proposé de tous les supprimer.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 105 (art. L. 910-1 du code de commerce) - Application de certaines dispositions à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon

Objet : cet article dispose que les articles 10 et 11 du projet de loi ne sont pas applicables dans ces deux collectivités ultramarines et corrige une erreur au sein du code de commerce concernant l'application d'un de ses articles à Saint-Pierre-et-Miquelon.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de l'article 105 du projet de loi exclut l'application à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités d'outre-mer régies pour la première par l'article 73 et pour la seconde par l'article 74 de la Constitution, de deux articles du projet de loi :

- l'article 10, qui confie à l'Autorité de la concurrence une compétence consultative nouvelle en matière d'urbanisme commercial ;

- l'article 11, qui étend le pouvoir d'injonction structurelle dont dispose cette même autorité administrative indépendante afin de lui permettre d'enjoindre à un acteur dominant de céder des actifs.

Le paragraphe II de l'article corrige une incohérence du code de commerce portant sur l'application de son article L. 752-27, qui porte sur le pouvoir d'injonction structurelle de l'Autorité de la concurrence, à Saint-Pierre-et-Miquelon. Ce dernier prévoit expressément qu'il y est applicable de plein droit, alors que jusqu'à présent l'article L. 910-1 disposait qu'il ne l'était pas. Cet article L. 910-1 est donc modifié en conséquence.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Dans un souci de cohérence juridique, la commission spéciale a, sur proposition de ses rapporteurs, supprimé le I de l'article dont une partie est devenue l'article 11 bis , afin de codifier la non-applicabilité des nouvelles missions de l'Autorité de la concurrence en matière d'urbanisme commercial à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte.

De plus, estimant qu'en raison de l'existence d'une procédure d'injonction structurelle spécifique aux départements et collectivités d'outre-mer, à l'article L. 752-27 du code de commerce, les modifications apportées au régime en vigueur dans l'Hexagone ne s'y appliqueraient pas, la commission spéciale a supprimé la mention explicite de la non-application de l'article 11 à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur n'a pas d'opposition à cet article qui apporte une clarification juridique.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 105 bis (art. L. 323-1 à L. 323-10 [nouveaux] du code du travail applicable à Mayotte) - Extension à Mayotte du contrat d'adulte-relais

Objet : cet article étend à Mayotte le contrat relatif aux activités d'adultes-relais, contrat aidé déjà en vigueur dans l'Hexagone depuis 2000.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Inscrit dans le code du travail par la loi de finances pour 2002 557 ( * ) , le contrat d'adulte-relais est un contrat de travail conclu entre un organisme public, une structure de droit privé à but non lucratif ou une personne morale chargée de la gestion d'un service public et une personne d'au moins trente ans à la recherche d'un emploi ou titulaire d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi (CUI-CAE) résidant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.

Soumise à la signature préalable d'une convention entre l'employeur et l'État, la possibilité d'offrir des contrats d'adultes-relais n'est pas destinée à permettre le recrutement de personnes chargées d'assurer le maintien de l'ordre public ou des missions régulières de service public (article D. 5134-146 du code du travail). Au contraire, les adultes-relais doivent « améliorer les relations entre les habitants [des quartiers prioritaires de la politique de la ville] et les services publics, ainsi que les rapports sociaux dans les espaces publics ou collectifs » (article L. 5134-100) en assurant une médiation sociale et culturelle . L'article D. 5134-145 en décline les modalités, citant notamment l'accompagnement des habitants dans leurs démarches, la préservation du cadre de vie ou le dialogue entre les générations.

Les employeurs d'adultes-relais bénéficient d'une aide financière de l'État, dont le montant s'élevait en 2013 à 17 538,40 euros par an 558 ( * ) et en 2014 à 17 784 euros. La loi de finances pour 2015 consacre une dotation de 74,5 millions d'euros à ce programme, qui portait sur 4 027 postes en 2014.

Inséré dans le projet de loi par la commission spéciale sur proposition du Gouvernement, l'article 105 bis étend à Mayotte ce dispositif en l'inscrivant dans le code du travail applicable dans ce département d'outre-mer. Une modification est apportée pour tenir compte de ses spécificités : parmi les organismes pouvant conclure avec l'État des conventions permettant de recruter des adultes-relais, deux sont supprimés
- les établissements publics locaux d'enseignement et les offices publics d'HLM et OPAC, qui n'existent pas sous cette forme à Mayotte - et un est ajouté, la société immobilière de Mayotte, qui tient lieu de bailleur social dans ce territoire. Le reste du cadre juridique des adultes-relais à Mayotte, que ce soit leurs missions, la forme de leur contrat de travail (CDI ou CDD de trois ans renouvelable une fois) et leur modalités de rupture ou encore les conditions pour bénéficier d'une aide financière de l'État, est une reproduction à l'identique de celui applicable dans l'Hexagone.

II - La position de votre commission

Comme le rappelle l'exposé sommaire de l'amendement du Gouvernement, le département de Mayotte fait face à des défis particuliers en matière de politique de la ville : chacune de ses dix-sept communes compte au moins un quartier prioritaire au sens de la politique de la ville et sa croissance démographique est sans égal dans notre pays. Sa population a triplé depuis 1985 et 60 % de ses habitants ont moins de 25 ans .

Développer la médiation sociale à Mayotte semble judicieux, bien que les problématiques en matière d'aménagement urbain, de logement et de relations avec les services publics ne soient pas les mêmes que dans l'Hexagone. On peut également s'interroger sur le nombre de personnes de plus de trente ans disponibles et suffisamment qualifiés pour exercer les missions d'adultes-relais alors que le niveau de qualification reste très faible, qu'un tiers des 25-44 ans n'ont pas été scolarisés 559 ( * ) et que 71 % de la population n'a aucun diplôme . Il est néanmoins nécessaire d'ouvrir aux acteurs sociaux la possibilité de recruter des adultes-relais : à eux de se saisir de cet outil s'ils le jugent pertinent et adapté face aux difficultés qu'ils rencontrent.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté à cet article un amendement supprimant une référence obsolète dans le code du travail.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 106 - Délai de dépôt des projets de loi de ratification des ordonnances

Objet : cet article fixe à cinq mois le délai de dépôt devant le Parlement des projets de loi de ratification des ordonnances prévues par le projet de loi.

En application de l'article 38 de la Constitution, le Parlement peut autoriser le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures qui relèvent du domaine de la loi. Cette habilitation est temporaire et les ordonnances, si elles entrent en vigueur dès leur publication, deviennent caduques si un projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant « la date fixée par la loi d'habilitation ».

L'article 106 fixe un délai de dépôt de cinq mois à compter de cette publication pour les ordonnances prises en vertu des trente-sept habilitations prévues par le projet de loi tel qu'adopté par l'Assemblée nationale (articles 1 er , 3 bis A, 3 bis B, 4, 20 I et II, 20 quater , 21, 25 sexies , 26, 28, 32, 40 bis B, 40 bis , 57, 60, 61 bis , 70 ter , 85 et 94) soit cinq de moins que dans le projet de loi initial et une de plus que dans le texte adopté par la commission spéciale.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LA COMMISSION SPÉCIALE

Mardi 3 février 2015

M. Jacques Attali * ( * ), président de PlaNet Finance

Mardi 10 février 2015

M. Bruno Lasserre* , président de l'Autorité de la concurrence

Mme Anne Perrot* , présidente de la commission d'étude des effets de la loi pour la croissance et l'activité

Mercredi 18 février 2015

M. Pierre Cahuc* , professeur à l'École polytechnique, membre du Conseil d'analyse économique

M. Jean Pisani-Ferry* , commissaire général de France Stratégie

M. Henri Sterdyniak* , directeur du département économie de la mondialisation de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

M. David Thesmar* , professeur à HEC, membre du Conseil d'analyse économique

Mardi 3 mars 2015

M. Alain Vidalies , secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche

Mercredi 4 mars 2015

M. Emmanuel Macron , ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique

Mercredi 11 mars 2015

M. François Rebsamen , ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Mme Christiane Taubira , garde des sceaux, ministre de la justice

Mardi 24 mars 2015

M. Jean-Yves Le Drian , ministre de la défense

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR MME CATHERINE DEROCHE, RAPPORTEURE

Mercredi 4 février 2015

M. Jean-Paul Bailly , président d'honneur du groupe La Poste, auteur du rapport au Premier ministre sur la question des exceptions au repos dominical dans les commerces (novembre 2013) et Mme Stéphanie Le Blanc , rapporteure

Jeudi 11 février 2015

M. Jean-Baptiste de Froment, conseiller de Paris, rapporteur de la mission d'information et d'évaluation du Conseil de Paris sur le travail dominical et nocturne à Paris (décembre 2014)

M. Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Chambre de commerce et d'industrie Paris Île-de-France (CCIP)

M. Jean-Claude Hanus, membre élu et rapporteur des travaux sur le projet de loi

M. Dominique Mocquax , vice-président de la CCI Seine-et-Marne

Mme Anne Outin-Adam, directeur des politiques législatives et juridiques

Mme Véronique Etienne-Martin, directeur des affaires publiques et de la valorisation

Mme Nathalie Lemarchand , géographe à l'université Paris 8

M. Pascal Lokiec , professeur de droit à l'université Paris Ouest Nanterre La Défense

Mardi 17 février 2015

Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC)

M. Jean-Michel Pecorini , secrétaire national en charge du développement syndical, du dialogue social et des unions territoriales

M. Alain Giffard , secrétaire national en charge du secteur économie et industrie

Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC)

M. Joseph Thouvenel , vice-président confédéral

Jeudi 19 février 2015

Force ouvrière (FO)

MM. Pascal Pavageaud et Didier Porte , secrétaires confédéraux

Confédération générale du travail (CGT)

Mme Marie-Laure Bertrand , secrétaire confédérale

M. Paul Fourier , dirigeant confédéral

M. Simon Picou , membre du syndicat, inspecteur du travail

FNATH - Association des accidentés de la vie

M. Arnaud de Broca , secrétaire général

Confédération française démocratique du travail (CFDT)

Mme Lucie Lourdelle , secrétaire confédéral, responsable du service juridique

M. Philippe Couteux , secrétaire confédéral, responsable du service emploi et sécurisation des parcours professionnels

Mardi 3 mars 2015

Mouvement des entreprises de France (MEDEF)

M. Marc Veyron , président du groupe de travail épargne salariale

Mme Dorothée Pineau , directrice générale adjointe

M. Guillaume Ressot , directeur des affaires publiques

Mme Isabelle Djian , directrice de mission en charge des affaires économiques et financières

Union professionnelle artisanale (UPA)

M. Pierre Burban , secrétaire général

Mme Caroline Duc , conseillère technique chargée des relations avec le Parlement

Direction générale du travail (DGT) du ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

M. Yves Struillou , directeur général

Mme Marianne Cotis , cheffe du bureau de la durée et des revenus du travail

Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (Copiesas)

M. Christophe Castaner , vice-président, député des Alpes-de-Haute-Provence

Mercredi 4 mars 2015

M. Pierre Bailly , doyen honoraire de la chambre sociale de la Cour de Cassation

Fédération française des associations d'actionnaires salariés et anciens salariés (FAS)

M. Philippe Lépinay , président

M. Philippe Bernheim , secrétaire général

M. Loïc Desmouceaux , délégué général

Mme Sylvie Ducot , membre du bureau

M. Benoît Gailhac , membre du bureau

M. Laurent Legendre , directeur de l'indice Euronext-FAS IAS

M. Pascal Graff , co-responsable du site internet FAS

Jeudi 5 mars 2015

Association française de la gestion financière (AFG)

Mme Laure Delahousse, directrice des gestions spécialisées et développement

M. Jean-Marc Fournié, responsable épargne entreprise

M. Pierre Schereck, directeur épargne salariale et épargne retraite

Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME)

Mme Geneviève Roy , vice-présidente chargée des affaires sociales

M. Gérard Bohélay , vice-président en charge de la coordination des branches professionnelles

M. Georges Tissié , directeur des affaires sociales

Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) du ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Mme Emmanuelle Wargon , déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle

Mme Fatma Rahil , cheffe de la mission Fonds national de l'emploi

Mardi 10 mars 2015

Fédération nationale de l'habillement (FNH)

M. Bernard Morvan , président

Mme Bernadette Fulton , secrétaire générale

Mme Anne Mazoyer , conseillère spéciale

Fédération du commerce et de la distribution (FCD)

M. Jacques Creyssel , délégué général

M. Antoine Sauvagnargues , responsable des affaires publiques

LVMH - Moët Hennessy - Louis Vuitton

M. Marc-Antoine Jamet , secrétaire général

Mme Gabrielle Guallar , chargée de mission auprès du secrétaire général

Mercredi 11 mars 2015

Groupe Galeries Lafayette

M. Philippe Houzé , président du directoire

Mme Agnès Vigneron , directrice des Galeries Lafayette Haussmann

Jeudi 12 mars 2015

Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) d'Île-de-France

M. Laurent Vilboeuf , directeur régional

M. Marc-Henri Lazar , directeur régional adjoint, responsable de l'unité territoriale de Paris

Fédération française du bâtiment (FFB)

M. Jacques Chanut , président

Mme Laetitia Assali , directrice des affaires sociales

M. Benoît Vanstavel , directeur des relations institutionnelles

Jeudi 19 mars 2015

Comité de liaison intersyndical du commerce de Paris (Clic-P)

M. Alexandre Torgomian , SCID-CFDT

M. Éric Scherrer , SECI-Unsa

M. Laurent Degousée , Sud-Commerce

M. Karl Ghazi , CGT-Commerce

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR MME DOMINIQUE ESTROSI SASSONE, RAPPORTEUR

Mercredi 4 février 2015

Délégation à la sécurité et à la circulation routières (DSCR)

M. Jean-Robert Lopez , préfet, délégué à la sécurité et à la circulation routières

M. Pierre Ginefri , sous-directeur de l'éducation routière et du permis de conduire

M. Frédéric Tezé , adjoint

Organisations syndicales d'inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière

M. Laurent Deville , secrétaire général adjoint de SNICA-FO

M. Christophe Nauwelaers , secrétaire général de l'UNSA-SANEER

M. Ivan Candé , secrétaire général, et M. Jean-Bernard Marcuzzi , secrétaire national du SNPTAS-CGT.

Organisations professionnelles des exploitants des écoles de conduite

M. Patrice Bessone , président, M. Philippe Malpiece , secrétaire général, et Mme Clémence Artur , chargée des affaires publiques au Conseil national des professions de l'automobile (CNPA)

M. Philippe Colombani , président de l'Union nationale des indépendants de la conduite (UNIC)

M. Jean-Louis Bouscaren , président, et M. Patrick Mirouse , vice-président de l'Union intersyndicale des enseignants de la conduite (UNIDEC)

Chambre nationale des salariés responsables (CNSR)

M. Gérard Acourt , président de la commission jeunes et éducation routière

Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF)

M. Pierre Cardo , président

Mme Anne Yvrande-Billon , vice-présidente

M. François Wernert , directeur de cabinet

Association des sociétés françaises d'autoroutes (ASFA)

M. Jean Mesqui , délégué général

M. Christophe Boutin , adjoint

Association des régions de France (ARF)

M. Jean-Yves Petit , vice-président du conseil régional PACA, délégué aux transports

M. Amaury Lombard , conseiller infrastructures, déplacements, transports

Mardi 10 février 2015

Confédération française du commerce de gros et international (CGI)

M. Jacques-Olivier Boudin , président de la commission juridique ;

M. Bernard Van der Elst , membre de la commission juridique (pôle interindustriel)

Mme Delphine Kosser-Glories , conseillère technique en charge des questions économiques et juridiques

M. Cyril Galy-Dejean , chargé des relations institutionnelles

Fédération des industries mécaniques (FIM)

M. Yves Blouin , en charge des questions de droit des affaires

Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD)

M. Jacques Creyssel , délégué général

M. Franck Derniame , directeur des affaires juridiques et fiscales

Mme Fabienne Prouvost , directrice de la communication et des affaires publiques

Mercredi 11 février 2015

Société nationale immobilière (SNI)

M. André Yché , président

M. Thomas Le Drian , directeur de cabinet

Mme Anne Frémont , chargée de mission pour les études et les relations extérieures du groupe SNI

Association des responsables de copropriété

M. Émile Hagège , directeur général

Union nationale pour l'habitat

Mme Mariane Louis , secrétaire générale

M. Frédéric Paul , délégué général

M. Jean-Christophe Margelidon , directeur général adjoint de la fédération des offices publics de l'habitat

Mme Francine Albert , conseillère pour les relations avec le Parlement

UFC-Que Choisir

Mme Karine de Crescenzo , responsable des relations institutionnelles

Mme Laetitia Jayet , chargée de mission relations institutionnelles

Mardi 17 février 2015

Fédération des enseignes du commerce associé (FCA)

M. Éric Plat , président

Mme Alexandra Bouthelier , déléguée générale

M. Alain Souilleaux , directeur juridique

Conseil national de la transition écologique (CNTE)

M. Alain Richard , sénateur, président de la commission spécialisée du conseil pour la modernisation du droit de l'environnement

Mercredi 25 février 2015

Laboratoire français de fractionnement et de biotechnologies (LFB)

M. Christian Béchon , président-directeur général

M. Mazen Elzaabi , directeur des affaires publiques

Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages

M. Laurent Girometti , directeur

Assemblée des communautés de France (AdCF)

Mme Corinne Casanova , vice-présidente

M. Philippe Schmit , délégué adjoint

M. Atte Oksanen , chargé des relations parlementaires

Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC)

M. Éric Jourde , délégué général

M. Gilles Rouvière , directeur délégué aux relations institutionnelles

Fédération des promoteurs immobiliers de France (FPI)

M. François Payelle , président

M. Jean-Michel Mangeot , délégué général

Mardi 3 mars 2015

E.Leclerc

M. Michel-Edouard Leclerc , président

M. Stéphane de Prunelé , secrétaire général

M. Alexandre Tuaillon , chargé de mission

Groupement des Mousquetaires

M. Jacques Woci , directeur général

M. Emmanuel Fouilland , secrétaire général de l'enseigne Intermarché

Personnalités qualifiées

M. Jean-Pierre Duport , préfet honoraire, chargé par le Premier ministre d'une mission sur l'accélération des projets de construction

M. Yasser Abdoulhoussen , chargé de la mission simplification au secrétariat général du Gouvernement, co-rapporteur de la mission sur l'accélération des projets de construction

Mercredi 4 mars 2015

Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

M. Stanislas Martin , administrateur civil, chef du service « Protection des consommateurs et de la régulation des marchés »

Mme Odile Cluzel , chef du bureau en charge des relations commerciales

M. Philippe Guillermin , chef du bureau en charge du droit de la consommation

Système U

M. Serge Papin , président-directeur général

Mme Anne Byzery , directrice juridique

Fédération française des télécoms (FFT)

M. Jean-Marie Danjou , directeur général délégué

Mme Natalie Jouen Arzur , directrice générale adjointe

M. Pierre-Yves Lavallade , directeur général adjoint

Groupe Orange

M. Laurentino Lavezzi , directeur des affaires publiques

Mme Florence Chinaud , directrice des relations institutionnelles

Free

M. Maxime Lombardini , directeur général d'Iliad

Mme Catherine Gabay , directrice aux affaires réglementaires et institutionnelles

France nature environnement

M. Emmanuel Wormser , membre du réseau juridique

Mme Morgane Piederrière , chargée des relations institutionnelles et du suivi législatif

Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, Agence des participations de l'État

Mme Astrid Milsan , directrice générale adjointe

Mme Juliette d'Aboville , responsable du pôle juridique

Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

M. Sébastien Soriano , président

M. Benoît Loutrel , directeur général

M. François Philipponneau , conseiller du président

Jeudi 5 mars 2015

Nexter Systems

M. Philippe Burtin , président-directeur général

Mme Laetitia Blandin , responsable communication

Groupe Casino

M. Claude Risac , directeur des relations extérieures

Auchan

M. Franck Geretzhuber , secrétaire général

M. Patrick Bonnes , directeur de la centrale d'achat

M. Paul Hugo , responsable des relations institutionnelles

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR M. FRANÇOIS PILLET, RAPPORTEUR

Mardi 10 février 2015

Chambre nationale des huissiers de justice

M. Patrick Sannino , président

M. Jean-François Richard , vice-président

M. Gabriel Meccareli , directeur des affaires juridiques

Institut français des experts-comptables et commissaires aux comptes

M. Charles-René Tandé , président

M. Philippe Bonnin , vice-président

M. Bruno Delmotte , secrétaire général

Mercredi 11 février 2015

Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires

Mme Agnès Carlier , présidente

M. François Péron , ancien président

M. Nicolas Moretton , trésorier

Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle

M. Alain Michelet , président

M. Alexandre Lebkiri , vice-président

Mme Stéphanie Célaire , trésorier

M. Marc Bethenod , membre du bureau

Conseil national des greffiers de tribunaux de commerce

M. Philippe Bobet , président

M. Jean Pouradier Duteil , vice-président

M. Bernard Bailet , président d'Infogreffe

Ordre des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation

Mme Hélène Farge , présidente

M. François Pinatal , avocat

Mme Clémence Hourdeaux , avocat

Jeudi 12 février 2015

Institut national de la propriété industrielle

M. Yves Lapierre , directeur général

Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables

M. Joseph Zorgniotti , président

M. Olivier Salamito , secrétaire général

Mme Gaëlle Patetta , secrétaire générale adjointe, directrice juridique

Compagnie nationale des commissaires aux comptes

M. Denis Lesprit , président

M. François Hurel , délégué général

Conseil national de l'ordre des architectes

Mme Catherine Jacquot , présidente

Mme Isabelle Moreau , directrice des relations extérieures et institutionnelles

Table ronde des syndicats représentant les salariés des offices et des études des professions du droit réglementées

M. Antoine Ory , secrétaire général adjoint du syndicat national des professions judiciaires (SNPJ-CFDT), et Mme Christine Wocial , membre de la commission exécutive et du bureau du SNPJ-CFDT

Mme Sandra Wisniewski et M. Christophe Thenault , représentants de CFTC, commerce services et force de vente

Mme Valérie Baggiani , secrétaire fédérale de la Fédération CGT des sociétés d'études

Mme Fabienne Collin , membre du syndicat national des cadres et techniciens du notariat (SNCTN) - affilié à la CFE-CGC

Association française des juristes d'entreprise

M. Hervé Delannoy , président d'honneur

Mme Stéphanie Fougou , présidente

M. Marc Mossé , vice-président

Mardi 17 février 2015

Commission de localisation des offices notariaux

M. Jean-Louis Gillet , président

Conférence nationale des premiers présidents de cours d'appel

Mme Dominique Lottin , première présidente de la cour d'appel de Versailles

Conférence nationale des présidents de tribunaux de grande instance

M. Gilles Accomando , président de la conférence, président du tribunal de grande instance d'Avignon

M. Jean-Luc Stoessle , membre du conseil d'administration, président du tribunal de grande instance de Strasbourg

Associations de consommateurs

Mme Reine-Claude Mader , présidente, et M. David Rodrigues , juriste à Consommation, logement et cadre de vie (CLCV)

Mme Karine de Crescenzo , responsable des relations institutionnelles de l'Union française des consommateurs-Que choisir (UFC-Que choisir), et Mme Laetitia Jayet , chargée de mission relations institutionnelles

Institut de la gestion déléguée

M. Pierre-Emeric Chabanne , délégué général

Union nationale des services publics industriels et commerciaux

Mme Marie Dubois , déléguée générale

Union nationale des professions libérales

M. Michel Chassang , président

M. Philippe Gaertner , vice-président

Mme Chirine Mercier , déléguée générale

Mercredi 18 février 2015

Conseil national des barreaux

M. Pascal Eydoux , président

M. Wiliam Feugère , membre du bureau

Conférence des bâtonniers

M. Marc Bollet , président

Barreau de Paris

M. Laurent Martinet , vice-bâtonnier

M. Nicolas Corato , directeur des affaires publiques et de la communication

M. Xavier Autain , membre du conseil de l'ordre, délégué du bâtonnier aux affaires publiques

Jeudi 19 février 2015

Conseil supérieur du notariat

M. Pierre-Luc Vogel , président

M. Didier Coiffard, premier vice-président

M. Patrice Tartinville , directeur général

Mme Christine Mandelli , chargée des relations institutionnelles

Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires

M. Xavier Huertas , président

M. Marc André , vice-président

Mardi 24 février 2015

Mouvement des entreprises de France

Mme Joëlle Simon , directrice des affaires juridiques

M. Guillaume Ressot , directeur des affaires publiques

Confédération générale des petites et moyennes entreprises

M. Gérard Orsini , président de la commission juridique et fiscale

M. Lionel Vignaud , juriste à la direction des affaires économiques, juridiques et fiscales

Association française des entreprises privées

Mme Emmanuelle Flament-Mascaret , directrice de la concurrence, de la consommation et de la propriété intellectuelle

Mme Odile de Brosses , directrice du service juridique

Mme France Henry-Labordère , directrice des affaires sociales

Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat

M. Alain Griset , président

Mme Véronique Matteoli , directrice adjointe du département des relations institutionnelles nationales

Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie

M. André Marcon , président

M. Bernard Falck , directeur général délégué

M. Jérôme Pardigon , directeur des relations institutionnelles

Mme Corinne Manerouck , juriste à la direction compétitivité des entreprises

M. Jean-Philippe Cavan , chef de projet droit consulaire

Confédération française démocratique du travail (CFDT)

Mme Véronique Descacq , secrétaire générale adjointe

Mme Marie-André Seguin , secrétaire nationale

Mme Lucie Lourdelle , secrétaire confédérale

Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC)

M. Gérard Béhar , expert CFE-CGC au conseil supérieur de la prud'homie

M. Gérard Bervas , président de la 6 e chambre au conseil des prud'hommes de Paris

Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC)

M. Denis Lavat , conseiller confédéral et membre du conseil supérieur de la prud'homie

Confédération générale du travail (CGT)

M. Bernard Augier , membre du conseil supérieur de la prud'homie, président du conseil de prud'hommes de Lyon

Mme Véronique Hosson , conseillère prud'homme à Versailles

M. Jean-Pierre Gabriel , responsable confédéral du service juridique

Force ouvrière (FO)

M. Didier Porte , secrétaire confédéral du secteur juridique

Mme Véronique Lopez-Rivoire , responsable du secteur juridique

Fédération du commerce et de la distribution

M. Jacques Creyssel , président

M. Franck Derniame , directeur des affaires juridiques et fiscales

Mme Fabienne Prouvost , directrice de la communication et des affaires publiques

Union des annonceurs

M. Pierre-Jean Bozo , directeur général

Mme Laura Boulet , directrice des affaires publiques et juridiques

Mme Hanaé Bisquert , juriste à la direction des affaires publiques et juridiques

Mercredi 25 février 2015

Autorité de la concurrence

M. Bruno Lasserre , président

Mme Virginie Beaumeunier , rapporteure générale

M. Éric Maurus , rapporteur

M. Gilles Vaury , rapporteur

M. Sébastien Lecou , économiste

Chambre de commerce et d'industrie de Paris Île-de-France

M. Didier Kling , membre du bureau et trésorier

Mme Anne Outin-Adam , directeur des politiques législatives

Mme Véronique Étienne-Martin , directeur des affaires publiques et de la valorisation

Caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires

M. Roland Bayard , président

M. Alain Géniteau , vice-président

M. Guillaume Destré , directeur

Lundi 2 mars

Conseil supérieur de la prud'homie

M. Jean-François Merle , président

Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

M. Philippe Moreau , chef du département des affaires générales et des prud'hommes, direction générale du travail

Mme Catherine Vedrenne , chef du bureau du conseil des prudhommes et des élections prud'homales, direction générale du travail

Association des maires de France

M. Philippe Laurent , secrétaire général, maire de Sceaux

Mme Nathalie Fourneaux , conseiller technique au service juridique

Personnalités qualifiées

M. Bruno Berger-Perrin , avocat, spécialiste des procédures collectives

M. Frédéric Jenny , professeur d'économie, ESSEC

Mardi 3 mars

Ministère de la justice ( audition sur les professions réglementées)

Mme Delphine Humbert , conseillère droit civil et économique et professions judiciaires au cabinet de la ministre

Mme Samira Jema ï, conseillère parlementaire au cabinet de la ministre

Mme Carole Champalaune , directrice des affaires civiles et du sceau

M. Christophe Tissot , sous-directeur des professions judiciaires et juridiques

Mme Pascale Compagnie , sous-directrice du droit économique

M. François Connault , chef du bureau de la prospective et de l'économie des professions

Mme Valérie Avenel , adjointe à la chef du bureau de la réglementation des professions

M. Patrick Rossi , chef du bureau du droit de l'économie des entreprises

Mme Sarah Van Maele , rédactrice au bureau de la réglementation des professions

Personnalité qualifiée

M. Philippe Roussel-Galle , professeur de droit des entreprises en difficulté

Mercredi 4 mars

Ministère de la justice (audition sur les tribunaux de commerce et le droit des affaires)

Mme Delphine Humbert , conseillère droit civil et économique et professions judiciaires au cabinet de la ministre

Mme Samira Jemaï , conseillère parlementaire au cabinet de la ministre

Mme Carole Champalaune , directrice des affaires civiles et du sceau

M. Patrick Rossi , chef du bureau du droit de l'économie des entreprises

Mme Pascale Compagnie , sous-directrice du droit économique

M. Eloi Buat-Ménard , adjoint à la sous-directrice de l'organisation judiciaire et de l'innovation

Mme Flora Lavergne , rédacteur, secrétaire général du Conseil national des tribunaux de commerce au bureau du droit de l'organisation judiciaire

Conseil national des tribunaux de commerce

M. Jean Bois , vice-président

Mme Flora Lavergne , secrétaire général

M. Yves Chaput , professeur

Conférence nationale des juges consulaires de France

M. Yves Lelièvre , président

M. Jean-Luc Adda , secrétaire général

Lundi 9 mars 2015

Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique

M. Alexis Kohler, directeur du cabinet du ministre

M. Emmanuel Lacresse , directeur adjoint du cabinet du ministre

M. Xavier Hubert , conseiller juridique au cabinet du ministre

Mme Maeva Level, conseillère parlementaire au cabinet du ministre

M. Jean Maïa , directeur des affaires juridiques

Conseil du commerce de France

M. Gérard Atlan , président

Mme Fanny Favorel Pige , secrétaire générale

Personnalités qualifiées

M. Antoine Lyon-Caen , professeur de droit du travail

M. Jean-Emmanuel Ray , professeur de droit du travail

Mardi 10 mars 2015

Union syndicale des magistrats

Mme Véronique Léger, secrétaire nationale

Mme Pascale Loué-Williaume , trésorière, membre du bureau

Syndicat de la magistrature

Mme Marion Lagaillarde , secrétaire nationale

M. Patrick Henriot , secrétaire national

Personnalités qualifiées

M. Alain Lacabarats , auteur du rapport sur la réforme des conseils de prud'hommes, ancien président de la chambre sociale de la Cour de cassation

M. Jean-Yves Frouin , président de la chambre sociale de la Cour de cassation

Mercredi 11 mars 2015

Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique (audition sur les professions réglementées et le droit de la consommation)

M. Emmanuel Lacresse , directeur-adjoint du cabinet du ministre

M. Stanislas Martin , chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés

M. Thomas Piquereau , chef du bureau des services financiers et des professions réglementées

M. Philippe Guillermin , chef du bureau de la politique de protection des consommateurs et de la loyauté

Ministère de la justice (audition sur la justice prud'homale)

Mme Céline Roux , conseillère droit de la famille et droit de l'environnement au cabinet de la ministre

Mme Samira Jemaï , conseillère parlementaire au cabinet de la ministre

Mme Carole Champalaune , directrice des affaires civiles et du sceau

Mme Claire Allain-Feydy , chef du bureau du statut et de la déontologie

Mme Cécile Capeau , chef du bureau du recrutement, de la formation et des affaires générales

Mme Stéphanie Pommier , bureau du droit de l'organisation judiciaire

M. Gilles Malfre , chef du bureau du droit processuel et du droit social

M. Damien Pons , magistrat, rédacteur au sein du bureau processuel et du droit social

Caisse des dépôts et consignations

Mme Odile Renaud-Basso , directrice générale adjointe

Mme Nathalie Gilly , directrice des services bancaires

Mme Lise Bazalgette , chargée des relations institutionnelles à la direction des relations institutionnelles, internationales et européennes

Institut français des praticiens des procédures collectives

M. François Legrand , président

M. Vincent Rousseau , vice-président

M. Auréliano Boccasile , secrétaire général

Mme Dominique Dardel , chargée de communication

Union des entreprises de conseil et achat

M. Pierre Conte , vice-président

M. Bertrand Beaudichon , vice-président délégué

Mme Françoise Chambre , déléguée générale

Personnalités qualifiées

M. Loïc Cadiet , professeur de droit processuel

Mme Françoise Pérochon , professeur de droit des entreprises en difficulté

Mme Marie Malaurie-Vignal , professeur de droit de la concurrence

Contributions écrites particulières ou sollicitées par le rapporteur

M. Bertrand Louvel , premier président de la Cour de cassation, ainsi que les premiers présidents de cour d'appel

Conférence nationale des procureurs de la République

Association nationale des juges d'instance

Association syndicale professionnelle d'administrateurs judiciaires

M. Jean-Pierre Blatter , avocat, spécialiste des baux commerciaux

Mme Véronique Legrand , maître de conférences en droit privé

Mme Évelyne Serverin , directeur de recherche émérite au CNRS


* 1 À l'exception de l'audition du ministre de la défense à laquelle la presse n'a pas été conviée.

* 2 La liste des personnes auditionnées figure en annexe et les comptes rendus des auditons plénières font l'objet d'une publication séparée. Ils sont également disponibles sur le site du Sénat à l'adresse : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/cs-croissance-activite-et-egalite-des-chances-economiques.html

* 3 Il s'agit de M. Richard Ferrand (SRC, Finistère), rapporteur général, et M. Christophe Castaner (SRC, Alpes-de-Haute-Provence), M. Laurent Grandguillaume (SRC, Côte-d'Or), M. Denys Robiliard (SRC, Loir-et-Cher), M. Gilles Savary (SRC, Gironde), M. Alain Tourret (RRDP, Calvados), M. Stéphane Travert (SRC, Manche), Mme Cécile Untermaier (SRC, Saône-et-Loire) et Mme Clotilde Valter (SRC, Calvados), rapporteurs thématiques.

* 4 Réunie le 3 février 2015 en formation de groupe de travail.

* 5 Auditions conjointes du 18 février 2015.

* 6 Article 39 de la Constitution. Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

* 7 Audition du 7 mars 2015.

* 8 Articles L. 2135-2 et L. 2135-3 du code des transports.

* 9 Cette disposition figure au 8° bis (nouveau).

* 10 Avis n° 14-A-05 du 27 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar

http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/14a05.pdf .

* 11 Avis n° 14-A-13 du 17 septembre 2014 sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires, http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/14a13.pdf .

* 12 Règlement (CE) n° 595/2009 du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 relatif à la réception des véhicules à moteur et des moteurs au regard des émissions des véhicules utilitaires lourds (Euro VI) et à l'accès aux informations sur la réparation et l'entretien des véhicules, et modifiant le règlement (CE) n° 715/2007 et la directive 2007/46/CE, et abrogeant les directives 80/1269/CEE, 2005/55/CE et 2005/78/CE.

* 13 Avis n° 14-A-05 du 27 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar précité.

* 14 http://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fiche-offretransport.pdf .

* 15 Obligations de service public.

* 16 À l'article 5.

* 17 Cette mention est nécessaire car la région dispose d'un plan de déplacements urbains unique, ce qui exclut la possibilité d'y réaliser un service de transport « non urbain ».

* 18 Rédaction adoptée à l'initiative de députés des groupes UDI, RRDP et écologiste.

* 19 Amendement adopté à l'initiative de députés du groupe RRDP et de MM. Saddier et Tardy.

* 20 Amendement adopté à l'initiative de députés du groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR).

* 21 Amendement adopté à l'initiative de députés du groupe écologiste.

* 22 Amendement adopté à l'initiative de députés du groupe écologiste.

* 23 Amendement adopté à l'initiative de députés du groupe socialiste, républicain et citoyen (SRC).

* 24 Pendant les six mois suivant la promulgation de la loi, en application des I bis et I ter l'article 7, dans sa rédaction issue des travaux de votre commission.

* 25 La rédaction actuelle du code des transports énonce que « l'État peut autoriser (...) ».

* 26 Article L. 3521-5 rétabli.

* 27 Nouvelle rédaction de l'article L. 3551-5.

* 28 II du présent article.

* 29 Rapport sur le projet de canal Seine-Nord Europe de l'Inspection générale des finances et du Conseil général de l'environnement et du développement durable, janvier 2013.

* 30 À l'initiative de députés du groupe UDI et de MM. Giraud et Tourret.

* 31 À l'initiative de députés du groupe UDI.

* 32 À l'initiative de députés du groupe UMP, écologiste, RRDP et de MM. Alexis Bachelay, Pellois et Gille.

* 33 À l'initiative de députés du groupe écologiste.

* 34 À l'initiative de députés du groupe écologiste.

* 35 À l'initiative de députés du groupe écologiste, de MM. Krabal, Giraud et Tourret.

* 36 À l'initiative de MM. Giraud et Tourret.

* 37 À l'initiative de députés du groupe UDI.

* 38 Relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar.

* 39 Estérel-Côte d'Azur-Alpes (ESCOTA), Autoroutes du Sud de la France (ASF), Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR), Société des autoroutes Rhône-Alpes (AREA), Société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France (SANEF), Société des autoroutes Paris-Normandie (SAPN).

* 40 A'LIENOR, ALIS, ARCOUR, ALICORNE, ADELAC, CEVM, ATLANDES et ALBEA.

* 41 « Les relations entre l'État et les sociétés concessionnaires d'autoroutes ».

* 42 Sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires.

* 43 Cette situation concerne les SCA « historiques », la situation étant différente pour les nouveaux concessionnaires créés à partir des années 2000.

* 44 Affectation au financement de nouvelles sections d'autoroutes des flux de trésorerie issus de l'exploitation des sections existantes, ayant pour corollaire l'attribution de gré à gré, sans mise en concurrence, des concessions d'une même zone géographique à un unique concessionnaire.

* 45 À l'initiative de députés des groupes UDI et RRDP.

* 46 À l'initiative de députés du groupe RRDP.

* 47 À l'initiative de députés du groupe UDI.

* 48 À l'initiative de députés des groupes UDI et RRDP.

* 49 Nouvel article L. 122-13-1.

* 50 Nouveaux articles L. 122-17-1 à L. 122-17-5.

* 51 Question écrite n° 00955 de M. Didier Guillaume, publiée dans le JO Sénat du 19 juillet 2012.

* 52 Article 6 du décret n° 95-935 du 17 août 1995.

* 53 Jusqu'en 2011, une telle mesure d'application n'était pas nécessaire, puisque le code de la route prévoyait aussi une obligation d'expérience professionnelle, qui garantissait la possession du permis de conduire. Mais cette obligation d'expérience professionnelle a été supprimée par la loi n° 2011-12 du 5 janvier 2011.

* 54 Source : site Internet du ministère de l'intérieur.

* 55 Idem.

* 56 À l'initiative des rapporteurs, de députés du groupe socialiste, républicain et citoyen et de MM. Giraud et Tourret.

* 57 À l'initiative de députés du groupe socialiste, républicain et citoyen et de MM. Giraud et Tourret.

* 58 À l'initiative de MM. Hetzel et Tian.

* 59 Et de MM. Giraud et Tourret.

* 60 Avis n° 10-A.26 du 7 décembre 2010 relatif aux contrats d'affiliation de magasins indépendants et les modalités d'acquisition du foncier commercial dans le secteur de la distribution alimentaire.

* 61 Projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs, n° 3508 (Assemblée nationale), déposé le 1 er juin 2011.

* 62 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 63 Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

* 64 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 65 Loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises.

* 66 Le Conseil constitutionnel avait été saisi par onze membres du congrès de la Nouvelle-Calédonie.

* 67 La notification des griefs de concurrence à une entreprise ou un groupe d'entreprises donne lieu à l'établissement contradictoire d'un rapport, sous l'autorité du rapporteur général de l'Autorité, qui est transmis aux parties, qui disposent ensuite de deux mois pour y répondre (article L. 463-2 du code de commerce).

* 68 Ce type d'action, dont les effets s'étendent erga omnes , a été créé par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

* 69 Civ. 1 ère , 1 er février 2015, Bull. civ. I , n° 62.

* 70 Art. L. 421-1 du code de la consommation.

* 71 Art. L. 421-6 du même code.

* 72 Art. L. 421-6 du même code.

* 73 Art. L. 422-1 du même code.

* 74 L'association peut, dans le cadre de cette action, demander plusieurs types de mesures : l'octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif des consommateurs, la cessation d'agissements illicites ou la suppression de clauses abusives, ou encore la diffusion du jugement rendu.

* 75 Civ. 1 ère , 21 février 2006.

* 76 L'adhésion au groupe est ouverte pendant un délai, fixé par le juge, de deux à six mois (art. L. 423-5 du code de la consommation). L'indemnisation proprement dite intervient, quant à elle dans un délai fixé par le juge, qui peut être prolongé par celui ouvert pour contester devant lui le montant de l'indemnisation reçu du professionnel ou son refus de réparer le préjudice (art. L. 423-7 du même code).

* 77 En vertu du 9° de l'article 53 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques .

* 78 Rapport de la commission spéciale de l'Assemblée nationale précité, tome I, p. 324.

* 79 Art. L. 322-4 et R. 322-23 du code des procédures civiles d'exécution.

* 80 Art. 235-1 du décret 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat .

* 81 Inès Mercereau, Portabilité du compte bancaire , décembre 2014.

* 82 Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

* 83 Loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement, à la promotion du commerce et de l'artisanat.

* 84 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 85 Cf. rapport n° 471 (2013-2014) de M. François Marc, fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 avril 2014.

* 86 Cf. compte-rendu intégral des débats de la séance du 7 mai 2014.

* 87 Cf. rapport n° 471 (2013-2014) de M. François Marc, fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 avril 2014.

* 88 Cf. sur ce point le commentaire de l'article 18.

* 89 Pour les administrateurs et mandataires judiciaires, ces dispositions sont codifiées aux articles L. 811-1 à L. 814-13 du code de commerce, pour les greffiers de tribunaux de commerce, aux articles L. 741-1 à L. 744-2 du même code et, pour les conseillers en propriété industrielle, aux articles L. 421-1 à L. 423-2 du code de la propriété intellectuelle.

* 90 Le droit de présentation des officiers ministériels date d'une loi de finances du 26 avril 1816. L'organisation du notariat est fixée par une loi du 25 ventôse an XI et le statut des notaires par une ordonnance du 2 novembre 1945. Les commissaires-priseurs judiciaires sont régis par une ordonnance du 26 juin 1816, les avocats aux conseils, par une ordonnance du 10 septembre 1817, les huissiers de justice, par une ordonnance du 2 novembre 1945.

* 91 Ce qu'illustre le fait que l'article 12 du présent texte élève au niveau législatif des dispositions sur la fixation des tarifs aujourd'hui de niveau réglementaire.

* 92 On peut ainsi s'étonner que l'article 13 du présent projet de loi mentionne l'office des avoués près les tribunaux de grande instance pour définir la compétence résiduelle des avocats en saisie immobilière, alors que cette profession a été fusionnée avec celle des avocats par la loi du 31 décembre 1971.

* 93 L'article 1 er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, contient ainsi des dispositions relatives à la fusion des professions d'avocat, d'avoué et de conseil juridique, au mode d'exercice libéral de cette profession, aux mentions des titres universitaires accolés à la qualité d'avocat, à l'honorariat et à la multipostulation.

* 94 Cette perspective, examinée par la commission présidée par Jean-Michel Darrois, a été rejetée par celle-ci, à l'unanimité, compte tenu, notamment, de la distinction très nette entre les missions d'autorité publique et les autres activités juridiques ou judiciaires ( cf . commission présidée par Jean-Michel Darrois, Rapport sur les professions du droit , La documentation française, mars 2009, p. 25)

* 95 Professions réglementées - Pour une nouvelle jeunesse , rapport de M. Richard Ferrand, parlementaire en mission auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, octobre 2014.

* 96 Professions du droit : des métiers à adapter au XXI e siècle, un modèle à préserver , rapport d'information n° 2475 (XIV e législature), présenté, au nom de la mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur les professions juridiques réglementées, par Mme Cécile Untermaier et M. Philippe Houillon.

* 97 Relativement rares, ces revalorisations seraient intervenues :

- pour les notaires, dont le dernier barème remonte à 1978, en 1981, 1985, 1994, 2006 et 2011, sur la base d'un barème établi en 1978 ;

- pour les huissiers de justice, dont le dernier barème remonte à 1988, en 2007 ;

- pour les administrateurs et mandataires judiciaires, dont le dernier barème date de 1985, en 2004 et 2006 ;

- pour les commissaires-priseurs judiciaires, dont le barème remonte à 1985, en 1993.

* 98 JO AN du 3 février 2015, p. 725.

* 99 « Mais les pouvoirs publics peuvent se trouver face à des cas plus complexes lorsque la régulation ne vise pas à un monopole dont la structure de coûts et le portefeuille d'activités peuvent être modélisés mais concerne un ensemble d'entreprises qui peuvent avoir des tailles, des structures de coûts, des profils de clientèles et des portefeuilles d'activités différents. Dans ces situations, une tarification unique a nécessairement des effets variables sur ces entreprises . Pour certaines, le tarif peut être mal adapté ou trop bas et pour d'autres trop favorable voire déraisonnable. Les demandes de révision tarifaire émanant généralement des entreprises les plus défavorisées, le risque est alors grand de calculer les tarifs de manière à assurer la viabilité des plus faibles en consentant une rente aux plus efficaces ou à celles qui bénéficient du bassin de chalandise le plus favorable » (avis de l'Autorité de la concurrence n° 15-A-02 du 9 janvier 2015 relatif aux questions de concurrence concernant certaines professions juridiques réglementées).

* 100 Notamment, en 2000, celui des commissaires-priseurs pour les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ou celui des avoués près les cours d'appel, en 2011.

* 101 Il en va par exemple ainsi de l'acte d'avocat, qui concurrence partiellement l'acte authentique des notaires.

* 102 Cf . encadré.

* 103 Toutefois cette rémunération par émoluments représente une part très significative de la rémunération des avocats qui interviennent dans le contentieux des ventes judiciaires de meubles ou d'immeubles, puisqu'elle constitue alors leur seule rémunération et qu'elle est fixée conformément au tarif des notaires.

* 104 Loi du 29 mars 1944 relative aux émoluments alloués aux officiers publics et ministériels .

* 105 Avis n° 15-A-02 préc.

* 106 Avis n° 14-A-14 du 26 septembre 2014 concernant un projet de décret modifiant le décret n° 2009-975 du 12 août 2009 relatif aux tarifs réglementés de vente de l'électricité .

* 107 Lorsque l'Autorité de la concurrence se sera saisie d'office, elle devra rendre son avis au plus tard un mois avant la révision du prix ou du tarif en cause

* 108 JO AN du 3 février 2015, p. 739.

* 109 Cf . l'article L. 134-5 du code de commerce, qui indique que l'agent commercial a droit à une « rémunération raisonnable qui tient compte de tous les éléments qui ont trait à l'opération », et l'article 15 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal , qui précise que l'administration peut inclure dans l'assiette d'une redevance d'utilisation d'informations publiques une « rémunération raisonnable de ses investissements ».

* 110 Aux termes de l'article L. 314-7 du code de l'énergie, cette rémunération tient compte « des risques inhérents à ces activités et de la garantie dont bénéficient ces installations d'écouler l'intégralité de leur production à un tarif déterminé ».

* 111 En effet, plusieurs rapports récents ont recommandé d'assurer ce financement par un prélèvement sur certains actes juridiques, sans s'accorder forcément sur les professions susceptibles d'être soumises à ce prélèvement. Ainsi, le rapport de nos collègues Jacques Mézard et Sophie Joissains recommande-t-il de taxer les actes soumis à enregistrement ( Aide juridictionnelle : le temps de la décision , rapport d'information de la commission des lois, n° 680 (2013-2014), consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/notice-rapport/2013/r13-680-notice.html). Celui de M. Jean-Yves Le Bouillonnec, remis à la garde des sceaux en octobre 2014 propose une assiette plus large, étendue à l'ensemble des professions.

* 112 Un décret en Conseil d'État aurait fixé, pour chaque prestation la valeur du ratio entre le minimum et le maximum, dans la limite du double.

* 113 Article 3 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 portant fixation du tarif des notaires .

* 114 Articles 11 et 12 du même décret.

* 115 Elle a aussi une conséquence sur la rémunération perçue : la plaidoirie relève d'honoraires libres, la postulation d'un tarif réglementé.

* 116 Loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques .

* 117 Il supprime aussi la disposition actuellement en vigueur à l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 destinée à permettre le recours, sur autorisation de la cour d'appel, à un avocat postulant d'un autre barreau, lorsque le nombre d'avocats inscrits dans un barreau est jugé insuffisant. Une coordination nécessaire pour cette suppression, à l'article 53 de la même loi, a été adoptée par amendement à l'Assemblée nationale au 6° du premier paragraphe (I.) du présent article.

* 118 Cette multipostulation a été prévue par la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées. Afin d'éviter la suppression des TGI d'Alès et de Libourne au moment de la réforme de la carte judiciaire, leur ressort avait été étendu d'un canton prélevé, respectivement, au ressort du TGI de Nîmes et à celui du TGI de Bordeaux. La multipostulation était, pour les barreaux de Nîmes et de Bordeaux, une compensation de ce prélèvement.

* 119 Professions du droit : des métiers à adapter au XXI e siècle, un modèle à préserver , rapport d'information n° 2475 (AN - XIV e législature), de Cécile Untermaier et Philippe Houillon, fait au nom de la commission des lois, p. 71.

* 120 Décret n° 75-785 du 21 août 1975 relatif aux droits et émoluments alloués à titre transitoire aux avocats à raison des actes de procédure .

* 121 Décret n° 60-323 du 2 avril 1960 portant règlement d'administration publique et fixant le tarif des avoués .

* 122 Loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles .

* 123 Aide juridictionnelle totale ou aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non-juridictionnelles.

* 124 Initialement, le texte du Gouvernement imposait à l'avocat de déterminer l'évolution possible des diligences prévisibles. Deux amendements de nos collègues députés Patrick Hetzel et Alain Chrétien ont supprimé cette mention au motif que, dépendant de l'aléa judiciaire, elle serait source de contentieux entre l'avocat et son client.

* 125 C'est-à-dire les sommes payées par l'avocat pour le compte de son client et que celui-ci doit lui rembourser.

* 126 Les honoraires doivent ainsi tenir compte, selon l'usage, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences qu'il accomplit.

* 127 Cf . la motion adoptée par le CNB, lors de son assemblée générale des 14 et 15 septembre 2012.

* 128 La disposition, introduite à l'initiative de notre collègue député Stéphane Claireaux et plusieurs de ses collègues, vise à tenir compte de l'absence de barreau et d'avocats et de l'existence d'un corps d'agréés près les tribunaux. Elle confère en outre à ces mêmes agréés la possibilité de postuler devant la cour administrative d'appel à laquelle ils sont rattachés, celle de Bordeaux.

* 129 Le texte ne concerne pas les greffiers de tribunaux de commerce qui sont par définition attachés au tribunal dont ils assurent le greffe, ni les avocats aux conseils, qui ne peuvent être établis qu'à Paris (en revanche, des dispositifs spécifiques ont été adoptés pour ces derniers à l'article 17 bis ).

* 130 Ces procédures sont définies aux articles 1 er -1 et suivants de l'ordonnance du 26 juin 1816 pour les commissaires-priseurs judiciaires, aux articles 37 et suivants du décret n° 75-770 du 14 août 1975 pour les huissiers de justice et aux articles 2 et suivants du décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 pour les notaires.

* 131 Les chambres locales établissent ainsi, ressort de cour d'appel par ressort de cour d'appel, des « contrats d'adaptation structurelle », qui définissent, sur une base quinquennale, les accueils de nouveaux professionnels à effectuer, en salariat ou en association, les regroupements ou les créations d'offices envisageables.

* 132 Les attributions et la composition de cette commission sont fixées, pour les notaires, aux articles 49 et suivants du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatifs aux créations suppressions et transferts d'offices de notaires , et pour les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice, aux articles 49-1 et suivants. du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels .

* 133 L'autorité statuerait, aux termes du nouvel article L. 462-10 du code de commerce, dans une formation augmentée de deux personnalités désignées pour trois ans non renouvelables par décret.

* 134 Cf . encadré ci-dessus.

* 135 Ce renvoi au juge de l'expropriation est, vraisemblablement, inspiré par la procédure inédite qui a prévalu pour l'indemnisation des avoués de cour d'appel. La procédure d'indemnisation est définie au chapitre I er du titre premier du livre III du code de l'expropriation.

* 136 Loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat .

* 137 L'article 10 exclut toutefois de son périmètre les actes nécessitant la présence de deux notaires ou de deux témoins (comme un testament authentique) ou certains actes expressément désignés. Il s'agit des articles 73 (consentement au mariage d'un mineur), 335 (acte de notoriété relatif à une filiation établie par possession d'état), 348-3 (consentement à l'adoption), 929 (renonciation à succession), 931 (donation entre vifs), 1035 (révocation d'un testament), 1394 (rédaction de régime matrimonial) et 1397 (changement de régime matrimonial) du code civil.

* 138 Professions du droit : des métiers à adapter au XXI e siècle, un modèle à préserver , rapport d'information n° 2475 (AN - XIV e législature), de Cécile Untermaier et Philippe Houillon, fait au nom de la commission des lois, p. 60.

* 139 Avis de l'Autorité de la concurrence n° 15-A-02 du 9 janvier 2015, précité, p. 77.

* 140 Le texte de référence, en la matière, est le décret n° 56-222 du 29 février 1956 pris pour l'application de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice .

* 141 Décret n° 2007-813 du 11 mai 2007 modifiant la compétence territoriale des huissiers de justice .

* 142 Décret n° 2014-983 du 28 août 2014 relatif à la compétence territoriale des huissiers de justice .

* 143 Pour les significations électroniques, l'huissier compétent peut être indifféremment celui situé dans le département où réside le créancier ou celui situé dans le département où réside le débiteur (art. 5-1, 5-2 et 5-3 du décret précité du 29 février 1956).

* 144 Ceci devrait permettre de fixer par décret le ressort de compétence des huissiers en ce qui concerne leur service d'audience.

* 145 Ordonnance du 26 juin 1816 qui établit, en exécution de la loi du 28 avril 1816, des commissaires-priseurs judiciaires dans les villes chefs-lieux d'arrondissement, ou qui sont le siège d'un tribunal de grande instance, et dans celles qui, n'ayant ni sous-préfecture ni tribunal, renferment une population de cinq mille âmes et au-dessus .

* 146 Cf. , sur ce point, le commentaire de l'article 13.

* 147 Professions du droit : des métiers à adapter au XXI e siècle, un modèle à préserver , rapport d'information n° 2475 (XIV e législature), préc., p. 32 à 40.

* 148 Le collège serait augmenté de deux personnalités qualifiées désignées par décret pour trois ans non renouvelables.

* 149 Un amendement adopté en séance publique à l'initiative des rapporteurs ajoute la nécessité de formuler des recommandations destinées à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes à ces offices.

* 150 La possibilité de recruter un avocat aux conseils salarié par les associés de l'office a été ouverte très récemment, par l'ordonnance n° 2014-239 du 27 février 2014 relative à l'exercice des professions d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et de notaire en qualité de salarié .

* 151 Suivant les statistiques du ministère de la justice, l'augmentation est de 11,26 % entre 2005 et 2013, pour la Cour de cassation, alors que le même contentieux régresse de 6,28 % devant les cours d'appel.

* 152 Votre commission propose de retenir ce renvoi à la procédure générale d'avis de l'article L. 462-1 du code commerce, plutôt que de créer une nouvelle procédure ad hoc .

* 153 Ce régime est fixé, pour les avocats à la cour, à l'article 10 de la loi précitée du 31 décembre 1971.

* 154 Art. 45 de la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

* 155 Art. 17 et 33 de la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 relative à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires .

* 156 Art. 45 de la loi n° 2011-850 du 20 juillet 2011 de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

* 157 Art. 1 er de l'ordonnance n° 2014-239 du 27 février 2014 relative à l'exercice des professions d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et de notaire en qualité de salarié .

* 158 Art. 2 de l'ordonnance du 27 février 2014 précitée.

* 159 Professions du droit : des métiers à adapter au XXI e siècle, un modèle à préserver , rapport d'information n° 2475 (XIV e législature), préc., p. 62.

* 160 Cécile Untermaier note, en faisant référence au rapport de l'inspection générale des finances, que « ces professionnels, qui ont le même diplôme et sont nommés par le garde des sceaux, mais n'étant pas associés au capital, ont une rémunération quatre fois inférieure à celle d'un titulaire et sont majoritairement des femmes (62 %) » ( op. cit . p. 62).

* 161 Dans son avis précité, l'Autorité de la concurrence a elle aussi recommandé la suppression de toute limite au recrutement d'officiers publics ou ministériels salariés.

* 162 Exposé sommaire de l'amendement n° SPE1909.

* 163 L'INPI est un établissement public réputé administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de la propriété industrielle, qui est généralement le ministre chargé de l'économie et de l'industrie.

* 164 En application de l'article R. 123-82 du code de commerce, le RCS comporte le fichier alphabétique des personnes immatriculées, le dossier individuel de chaque personne immatriculée, constitué par la demande d'immatriculation, complétée par les inscriptions subséquentes, et un dossier annexe où figurent les actes et pièces qui doivent être déposés au registre (comptes annuels...).

* 165 Sauf dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et dans les départements d'outre-mer, où le registre du commerce et des sociétés est tenu par le greffe public du tribunal civil compétent en matière commerciale (tribunaux de grande instance et tribunaux mixtes de commerce).

* 166 Cette centralisation concerne également les documents provenant des RCS tenus par les greffes des tribunaux civils à compétence commerciale : tribunaux mixtes de commerce outre-mer et tribunaux de grande instance en Alsace et Moselle. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, les données transmises par les greffiers des tribunaux de commerce représentent 95 % du total.

* 167 Loi n° 51-444 du 19 avril 1951 créant un institut national de la propriété industrielle.

* 168 L'article A. 123-28 du code de commerce dispose que le RNCS « comprend, sous la forme d'un second original ou de documents électroniques (...) l'ensemble des inscriptions des registres du commerce et des sociétés tenus dans chaque greffe [et] l'ensemble des actes et pièces déposés à ces registres ». Les modalités de cette transmission matérielle ou électronique sont précisées par les articles A. 123-29 et suivants.

* 169 Les documents numérisés ainsi transférés sont revêtus du cachet du greffier, leur conférant valeur légale. Le transfert électronique a permis de supprimer, au bénéfice des entreprises, le double dépôt sous forme papier des actes et documents auprès du registre du commerce et des sociétés.

* 170 En application de l'article R. 411-17 du code de la propriété intellectuelle, relatif aux redevances perçues par l'INPI conformément à l'article L. 411-2 du même code, le montant de cette taxe est fixé par un arrêté du 24 avril 2008. Certains actes sont gratuits, tandis que le montant est fixé dans les autres cas à 5,90 ou 11,60 euros. Le produit de cette taxe a représenté 14 millions d'euros en 2013.

* 171 En outre, le greffier perçoit un émolument au titre des diligences de transmission à l'INPI.

* 172 Les émoluments des greffiers des tribunaux de commerce sont fixés à l'annexe 7-5 du code de commerce, en application de l'article R. 743-140 du même code.

* 173 En application de l'article R. 411-18 du code de la propriété intellectuelle, conformément à l'article L. 411-2 du même code, « les recettes accessoires que l'INPI peut percevoir à l'occasion de la communication des pièces et actes dont il assure la conservation (...) sont instituées par des délibérations du conseil d'administration qui en fixent les modalités de perception et le montant ».

* 174 En vertu de l'article L. 741-2, le CNGTC, doté de la personnalité morale, est assuré de représenter la profession des greffiers auprès des pouvoirs publics et de défendre ses intérêts collectifs. Il exerce un rôle d'organisation et de discipline de la profession. Ses membres sont élus. Il est financé par une cotisation obligatoire. Il peut assurer le financement de services d'intérêt collectif. Il est chargé de la tenue, gratuitement, du fichier national automatisé des interdits de gérer (FNIG).

* 175 Le GIE Infogreffe regroupe la totalité des 134 greffes de tribunal de commerce de France et dispose de 32 salariés et d'un budget annuel de 17 millions d'euros.

* 176 Activité développée à partir de 1996 sur le fondement de l'article R. 411-18 du code de la propriété intellectuelle précité.

* 177 Ces missions sont présentées sur le site internet de l'INPI, à l'adresse suivante :

http://www.inpi.fr/fr/societes-registre/la-vie-de-votre-societe/obtenir-une-copie-de-document.html .

Il est possible d'obtenir communication par courrier de données individuelles du RNCS.

* 178 Par ailleurs, l'INPI constitue et diffuse, à des fins de réutilisation, des licences gratuites à partir des informations issues des bases de données relatives aux titres de propriété industrielle, dans les conditions prévues par le décret n° 2014-917 du 19 août 2014.

* 179 La liste de ces licenciés figure sur le site internet de l'INPI, à l'adresse suivante :

http://www.inpi.fr/fr/services-et-prestations/repertoire-des-informations-publiques/licences-rncs/liste-des-licencies.html .

* 180 Avis n° 15-A-02 du 9 janvier 2015 relatif aux questions de concurrence concernant certaines professions juridiques réglementées, pp. 51 et suivantes. Cet avis est consultable à l'adresse suivante : http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/15a02.pdf .

* 181 Ce référé est consultable à l'adresse suivante :

https://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/L-Institut-national-de-la-propriete-industrielle .

* 182 Une part des excédents d'exploitation de l'INPI est régulièrement reversée au budget de l'État, à hauteur de plusieurs millions d'euros par an. Les recettes de l'INPI s'élèvent à 210 millions d'euros environ par an selon son directeur général.

* 183 Est ici concernée la licence dite « IMR ».

* 184 Sont visées la chambre consulaire interprofessionnelle à Saint-Martin et la chambre économique multiprofessionnelle à Saint-Barthélemy.

* 185 Dans son avis du 9 janvier 2015 précité, analysant l'efficacité du « monopole de gestion de l'information légale sur les entreprises » par les greffiers des tribunaux de commerce, l'Autorité de la concurrence considère que « les organisations alternatives mises en oeuvre outre-mer et en Alsace-Moselle sont moins performantes et moins fiables ».

* 186 Sept tribunaux mixtes de commerce sont prévus par l'annexe 7-3 du code de commerce : Basse-Terre et Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), Cayenne (Guyane), Fort-de-France (Martinique), Mamoudzou (Mayotte), Saint-Denis et Saint-Pierre (La Réunion).

* 187 Article L. 710-1 du code de commerce.

* 188 L'extrait K bis fait état de l'ouverture d'une procédure collective.

* 189 Selon l'article R. 732-8 du code de commerce, ces nouveaux greffiers devaient être nommés dans les conditions prévues par les articles R. 742-18 et suivants, c'est-à-dire par le garde des sceaux, sur la proposition d'une commission de sélection chargée d'examiner les candidatures qui lui sont adressées par l'intermédiaire du procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle se trouve le tribunal dont le greffe doit être pourvu. Le procureur général fait procéder à une enquête sur la moralité, les capacités professionnelles et les capacités financières des candidats.

* 190 Cette commission est composée principalement de magistrats : un conseiller à la Cour de cassation, un magistrat de la Cour des comptes, un membre du Conseil d'État, un membre de l'inspection générale des finances, un magistrat du siège d'une cour d'appel, un membre d'une juridiction commerciale, deux professeurs ou maîtres de conférence en droit, sciences économiques ou gestion et deux personnalités qualifiées en matière économique ou sociale.

* 191 Art. L. 811-2 (pour les administrateurs judiciaires) et L. 812-3 (pour les mandataires judiciaires) du code de commerce.

* 192 En particulier s'il leur est arrivé d'avoir été désigné à titre exceptionnel par un tribunal de commerce en lieu et place d'un administrateur ou d'un mandataire judiciaire, en vertu des articles L. 811-2 et L. 812-2 du code de commerce.

* 193 Dernier alinéa de l'article L. 811-5 du code de commerce.

* 194 Votre rapporteur observe par ailleurs que l'intitulé d'un diplôme de master ne relève manifestement pas de la loi.

* 195 Rapport sur les professions du droit , préc., p. 56.

* 196 D'autres amendements de suppression ont été déposés par notre collègue député Philippe Houillon et plusieurs de ses collègues, ainsi que par M. Patrick Hetzel. Ces amendements critiquaient l'imprécision de la demande d'habilitation.

* 197 Tel a été le cas, lors de la création des tribunaux de commerce de Bobigny, Nanterre et Créteil dans les années 1980.

* 198 Le rapport de l'inspection générale des finances, cité par le rapport de la commission spéciale de l'Assemblée nationale relève ainsi qu'en Île-de-France, « trois des quatre greffes des tribunaux de commerce de petite couronne, parmi les plus importants de France, sont ainsi caractérisés par l'association d'un greffier et de deux ou trois de ses enfants (à l'exclusion de tout autre associé) » et que, par ailleurs, « une famille constituée de trois frères et de leurs enfants contrôle quatre greffes, tandis qu'au total sept noms de familles sont associés à vingt et un greffes sur les 134 que compte le pays ». Cf . rapport n° 2498 (AN, XIV e législature), préc., p. 571.

* 199 Ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable .

* 200 Art. 33 de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées .

* 201 Les décrets devant permettre la constitution d'autres types de sociétés civiles interprofessionnelles n'ont pas été pris.

* 202 La loi prévoit que des décrets en Conseil d'État peuvent prévoir de limiter cette possibilité d'être actionnaire minoritaire d'une SEL du même ordre professionnel (droit, santé, expertise technique), « lorsqu'il apparaîtrait que cette détention serait de nature à mettre en péril l'exercice de la profession concerné dans le respect de l'indépendance de ses membres et de leurs règles déontologiques propres ».

* 203 Cette déclinaison s'ouvre, au premier paragraphe, par les huissiers de justice, avec un nouvel article 1 er bis AA de leur ordonnance statutaire, suivi, dans l'ordre des paragraphes, par les notaires, les commissaires-priseurs judiciaires, les avocats, les avocats aux conseils, les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires. Le dernier paragraphe de l'article (VI) est consacré à une coordination rédactionnelle dans le code du travail.

* 204 Étude d'impact jointe au présent projet de loi, p. 122.

* 205 Cf. encadré ci-dessus.

* 206 Ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable .

* 207 Art. L. 822-9 du code de commerce.

* 208 Cette faculté de désigner un professionnel « hors liste » résulte de la loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce.

* 209 Avis n° 15-A-02 du 9 janvier 2015 relatif aux questions de concurrence concernant certaines professions juridiques réglementées, pp. 36 et suivantes. Cet avis est consultable à l'adresse suivante : http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/15a02.pdf .

* 210 Ce mécanisme a été instauré par la loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce.

* 211 Un arrêté du garde des sceaux du 8 août 2014 a fixé à 65 % le taux de prélèvement sur les intérêts servis par la Caisse sur les fonds déposés par les administrateurs et mandataires judiciaires.

* 212 Les huissiers de justice ont cependant la faculté de déposer les fonds de tiers à la Caisse des dépôts et consignations.

* 213 Cette caisse de garantie a été instituée par la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires-liquidateurs et experts en diagnostic d'entreprise. Elle est aujourd'hui régie par les articles L. 814-3 à L. 814-5 du code de commerce.

* 214 « L'exigence d'indépendance implique l'absence de tout rapport d'emploi entre l'avocat et son client, si bien que la protection au titre du principe de la confidentialité ne s'étend pas aux échanges au sein d'une entreprise ou d'un groupe avec des avocats internes » (CJUE, 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals c. Commission , aff. C-550/07 P).

* 215 Cf. l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : « toute fixation d'honoraires, qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire, est interdite. Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu ».

* 216 Plus précisément, l'Union européenne, l'Espace économique européen ou la Confédération suisse.

* 217 Art. 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable .

* 218 3° du I. de la nouvelle rédaction de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1990 précitée, résultant du présent article.

* 219 En effet, le II. du nouvel article 6, qui prévoit en principe le maintien de cette garantie, précise qu'elle s'applique sous réserve des III. des articles 31-1 et 31-2 qui autorisent la détention, par des professionnels du droit, de SPFPL détenant des SEL juridiques.

* 220 Cf. V. de la rédaction proposée pour l'article 6 précité.

* 221 Cf. le commentaire de l'article 20 ter .

* 222 Loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture .

* 223 Les plaisanciers préfèrent désormais louer des navires en se faisant accompagner par des marins professionnels plutôt que de les acquérir et d'en assumer la charge pleine et entière. Il en découle de nouvelles modalités d'emploi par la mise à disposition de personnels qualifiés via des entreprises spécialisées, parfois dans des conditions précaires. D'où l'extension du dispositif proposée par le présent article, afin de mieux encadrer ce secteur et d'offrir une plus grande sécurité juridique aux opérateurs et à leurs clients.

* 224 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.

* 225 Ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire.

* 226 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.

* 227 Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

* 228 Rapport sur la programmation des emplois de la participation des employeurs à l'effort de construction - annexe au projet de loi de finances pour 2015.

* 229 Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

* 230 L'article 14 de l'ordonnance précise que doivent se prononcer favorablement la majorité des propriétaires représentant au moins les deux tiers de la superficie des propriétés ou les deux tiers des propriétaires représentant plus de la moitié de la superficie des propriétés.

* 231 Ce décret prévoit 53 types de plans, schémas, programmes ou documents de planification susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement devant faire l'objet d'une évaluation environnementale à partir du 1 er janvier 2013.

* 232 Cette proposition de loi est consultable à l'adresse suivante :

http://www2.senat.fr/leg/ppl13-790.html .

* 233 Soit la couverture en très haut débit de l'intégralité de la population du territoire métropolitain à cette date, et de la moitié de celle-ci en 2017.

* 234 Loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail, article 20.

* 235 Rapport de la mission d'évaluation relative au diagnostic sur les dispositifs d'épargne salariale, inspection générale des finances, inspection générale des affaires sociales, décembre 2013.

* 236 Rapport du conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié, « Propositions en vue d'une réforme de l'épargne salariale », 26 novembre 2014.

* 237 Position commune des partenaires sociaux du 22 décembre 2014 sur l'association des salariés à la performance et à la création de valeur au sein de l'entreprise.

* 238 Cour de cassation, 2e chambre civile, arrêt n° 743 du 7 mai 2014.

* 239 En prenant pour hypothèse un taux marginal de l'impôt sur le revenu de 45 %, une surtaxe de 4 % au titre de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, auxquels s'ajoutent les prélèvements sociaux, après prise en compte de la déductibilité partielle de la CSG.

* 240 En prenant pour hypothèse un taux marginal de l'impôt sur le revenu de 30 %, auquel s'ajoutent les prélèvements sociaux, après prise en compte de la déductibilité partielle de la CSG.

* 241 Rapport 2013 de l'AMF sur le gouvernement d'entreprise et la rémunération des dirigeants des valeurs moyennes et petites.

* 242 Assemblée nationale, XIVe législature, session ordinaire de 2014-2015 : compte rendu intégral de la troisième séance du vendredi 6 février 2015 ; consultable à l'adresse suivante :

http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2014-2015/20150138.asp#P437284

* 243 Recommandation DOC-2013-20 du 18 novembre 2013.

* 244 Voir à cet égard le rapport n° 63 (2000-2001) de M. Joseph Ostermann, fait au nom de la commission des finances, et plus précisément le commentaire de l'article 13 de ce projet de loi.

* 245 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 246 Loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 247 Loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

* 248 Pour ces communes, l'abattement est égal à 5/6 en 2011, 2/3 en 2012, 1/2 en 2013, 1/3 en 2014 et 1/6 en 2015.

* 249 Pour mémoire, en matière de vente de biens physiques, la règle générale est l'application du principe du pays d'origine. Toutefois, au-delà d'un seuil annuel de chiffre d'affaires (100 000 euros pour la France), c'est le principe de destination qui s'applique.

* 250 Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

* 251 http://europa.eu/rapid/press-release_IP-14-62_fr.htm.

* 252 Alternative Investment Fund Managers.

* 253 Une SICAV est une société anonyme qui émet des actions au fur et à mesure des demandes de souscription. L'investisseur devient actionnaire, peut voter lors de l'assemblée générale et porter sa candidature au conseil d'administration.

* 254 Un FCP est un régime de copropriété. Il émet des parts qui sont achetées par les investisseurs. La gestion du FCP est opérée par une société de gestion (SGP) qui agit au nom des porteurs et doit défendre leur intérêt exclusif. Le FCP lui-même ne possède par la personnalité morale.

* 255 Articles 182 à 207 de la loi du 12 juillet 2013 relative aux gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs, instituant la société en commandite spéciale (SCSp).

* 256 Pour rappel : « 1° La propriété du bien est fondée soit sur une inscription, soit sur un acte authentique, soit sur un acte sous seing privé dont la valeur probante est reconnue par la loi française ;

« 2° Le bien ne fait l'objet d'aucune sûreté autre que celles éventuellement constituées pour la réalisation de l'objectif de gestion du fonds professionnel spécialisé ;

« 3° Le bien fait l'objet d'une valorisation fiable sous forme d'un prix calculé de façon précise et établi régulièrement, qui est soit un prix de marché, soit un prix fourni par un système de valorisation permettant de déterminer la valeur à laquelle l'actif pourrait être échangé entre des parties avisées et contractant en connaissance de cause dans le cadre d'une transaction effectuée dans des conditions normales de concurrence ;

« 4° La liquidité du bien permet au fonds professionnel spécialisé de respecter ses obligations en matière d'exécution des rachats vis-à-vis de ses porteurs et actionnaires définies par ses statuts ou son règlement. »

* 257 Étant entendu que les revenus tirés de certains OPC bénéficient d'avantages fiscaux spécifiques.

* 258 Loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale.

* 259 Conformément au troisième alinéa de l'article L. 443-7 du code de la sécurité sociale, ce plafond peut être majoré de 80 % au maximum lorsque le bénéficiaire acquiert des actions ou des certificats d'investissement émis par l'entreprise ou une entreprise qui lui est liée.

* 260 Op. cit., p. 63.

* 261 Il s'agit principalement des sommes versées sur les plans d'épargne entreprise par les anciens salariés, les chefs d'entreprise et leurs conjoints, les présidents, les directeurs généraux, gérants et membres du directoire et les travailleurs non-salariés, sous conditions. Sont également concernés les abondements par l'employeur des sommes provenant d'un compte épargne-temps transférées vers un Perco.

* 262 Le second alinéa de l'article L. 3334-11 du code du travail dispose en effet qu'il est proposé aux participants au Perco une allocation de l'épargne permettant de réduire progressivement les risques financiers dans des conditions fixées par décret. L'article 35 undecies du présent projet de loi prévoit en outre qu'à défaut de choix explicite du participant, c'est le profil le moins risqué qui sera dorénavant retenu.

* 263 Comme le prévoit l'article L. 221-32-2 du code monétaire et financier, les sommes versées sur le Perco peuvent servir notamment à acheter des actions, des parts de sociétés à responsabilité limitée, ou encore des parts de fonds communs de placement.

* 264 Ce plafond s'applique également aux titres des entreprises ayant établi entre elles des liens financiers et économiques.

* 265 Cette proposition était plus ambitieuse car elle invitait, sur le modèle des fonds solidaires, à rendre obligatoire la proposition d'un fonds PME dans le cadre des plans d'épargne entreprise, contenant une proportion minimale de titres de PME.

* 266 Il convient néanmoins de rappeler que les partenaires sociaux, dans le même document, plaidaient au préalable pour un abaissement général du taux du forfait social à 8 % pour l'ensemble des régimes d'épargne salariale.

* 267 Inspection générale des finances n° 2013-M-015-02, inspection générale des affaires sociales n° 2013-128R.

* 268 Pour mémoire, le plafond pour le versement unique d'amorçage du Perco par employeur s'élève à 375 euros par salarié en 2014.

* 269 L'article L. 3322-6 du code du travail prévoit que les accords de participation doivent être conclus selon l'une des quatre modalités suivantes : 1° par convention ou accord collectif de travail ; 2° par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ; 3° par accord conclu au sein du comité d'entreprise ; 4° à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d'un projet de contrat proposé par l'employeur.

* 270 Un salarié qui dispose d'un CET et qui n'a pas bénéficié d'un abondement en temps ou en argent de l'employeur est notamment exonéré de cotisations sociales, dans la limite d'un plafond de dix jours par an, en application de l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale, tandis que l'employeur est exonéré des cotisations au titre des assurances sociales et des allocations familiales.

* 271 Le deuxième alinéa de cet article pose des règles très proches pour les conjoints du chef d'entreprise et les salariés dont le contrat de travail est suspendu.

* 272 Afin de favoriser le transfert des sommes détenues par un salarié de son CET vers un Perco, le droit en vigueur prévoit un régime fiscal favorable, similaire à celui qui s'applique pour les indemnités de départ en retraite ou en préretraite, à condition que le salarié en fasse la demande expresse.

* 273 Décrets n° 2009-351 du 30 mars 2009 portant diverses mesures en faveur des revenus du travail et n° 2013-1164 du 14 décembre 2013 modifiant la composition du conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié.

* 274 IGF-Igas, op. cit., p. 26.

* 275 Le premier alinéa de l'article L. 1 du code du travail dispose que « tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l'objet d'une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l'ouverture éventuelle d'une telle négociation. ».

* 276 Chacune de ces catégories est définie par le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique.

* 277 Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

* 278 Cf. infra, commentaire de l'article 40 ter A.

* 279 Un placement privé est un instrument de financement permettant à une entreprise de ne s'adresser, pour une émission obligataire par exemple, qu'à un petit nombre d'investisseurs institutionnels (banques, assurances, sociétés de gestion).

* 280 Décret n° 2014-1530 du 17 décembre 2014 modifiant les règles d'investissements des entreprises d'assurances, des institutions de prévoyance, des mutuelles et de leurs unions dans les prêts à l'économie ou les titres assimilés.

* 281 L'amendement initial du Gouvernement prévoyait une durée de trois ans, mais elle a été doublée par un sous-amendement de notre collègue député Christophe Castaner, rapporteur thématique.

* 282 Il résulte en effet de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale que les exonérations sectorielles ou ciblées doivent être compensées par des crédits budgétaires, tandis que la compensation par des recettes fiscales ne concerne que les allègements généraux de cotisations sociales.

* 283 IGF-Igas, op. cit., p. 34.

* 284 Cette précision sur les outre-mer a été introduite par la commission spéciale en séance publique, qui a repris un amendement déposé par notre collègue député Victorin Lurel et plusieurs députés ultra-marins.

* 285 Proposition de loi n° 125 (2013-2014) visant à modifier la Charte de l'environnement pour préciser la portée du principe de précaution.

* 286 CJCE, aff. C-119/09, Société fiduciaire nationale d'expertise comptable contre France , 5 avril 2011.

* 287 Évoquant la question dans son rapport sur le projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, notre collègue s'interrogeait en ces termes : « l'autorisation partielle dont bénéficieront les avocats est-elle compatible avec le fait que d'autres professions, qui peuvent, au titre de leur activité principale ou de leur activité accessoire, en vertu de l'article 54 de la loi précitée du 31 décembre 1971, donner des consultations juridiques ou rédiger des actes sous seing privé, n'auront pas le droit de recourir à de la publicité commerciale ni à une activité de démarchage, si le statut qui les règle ne le prévoit pas expressément » (rapport n° 288 (2013-2014) de M. Thani Mohamed Soilihi, fait au nom de la commission des lois, déposé le 15 janvier 2014, p. 97, disponible à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l13-288/l13-288.html ).

* 288 Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

* 289 La Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur est une filiale à 100 % de COFACE SA. Elle gère plusieurs dispositifs de garanties publiques à l'exportation.

* 290 Communiqué de Coface relatif à la gestion pour le compte de l'État des garanties publiques à l'exportation, 23 février 2015.

* 291 Rapport d'information n° 296 (2010-2011) sur l'évaluation de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/notice-rapport/2010/r10-296-notice.html .

* 292 Loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2009 de lutte contre la contrefaçon.

* 293 Rapport n° 341 (2005-2006) sur la valorisation de la recherche dans les universités.

* 294 Loi n° 2006-450 du 18 avril 2006 de programme pour la recherche.

* 295 La représentation de l'État était limitée à un tiers des membres du conseil dans les sociétés où il possédait plus de 90 % du capital.

* 296 Arrêté du 4 mars 2015 fixant le prix et les modalités d'attribution d'actions de la société Safran.

* 297 Décision n° 86-207 DC du 26 juin 1986.

* 298 Assemblée nationale, rapport d'information n° 704, déposé par la commission des affaires économiques sur le développement de l'économie numérique française et présenté par Mmes Corinne Erhel et Laure de la Raudière, 14 mai 2014.

* 299 Arrêt du 2 juin 2005, Commission/Italie, C-174/04.

* 300 Décret n° 86-1141 du 25 octobre 1986 pris pour l'application de l'article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations.

* 301 Article 346 : « intérêts essentiels [...] qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions et de matériel de guerre ».

* 302 Par décret en date du 25 octobre 2013, sont nommés membres de la Commission des participations et des transferts : M. Bertrand Schneiter, président ; M. Pierre Achard ; M. Daniel Deguen ; M. Philippe Martin ; Mme Ines Mercereau ; M. Philippe Rouvillois ; M. Jean Serisé.

* 303 V de l'article 22 : « Toute opération de cession d'un actif susceptible d'une exploitation autonome représentant plus de 50 % de l'actif net comptable ou du chiffre d'affaires ou des effectifs [...] d'une société détenue à plus de 50 % par l'État est assimilée à la cession de cette société ».

* 304 À titre d'illustration, quinze modèles de blindés légers sont proposés par les constructeurs américains et européens et soixante par les entreprises des pays émergents.

* 305 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 306 Précédemment Réseau ferré de France.

* 307 Une société cotée ne connaît pas le nom de chacun de ses actionnaires, d'autant qu'ils changent quotidiennement. L'inscription « au nominatif » permet à l'investisseur de se faire connaître auprès de la société. Elle a néanmoins un coût et n'est donc utilisée que par les actionnaires qui réalisent un investissement de long terme.

* 308 Si tel n'était pas le cas, l'investisseur bénéficierait d'un effet d'aubaine puisqu'il aurait accru son influence dans la société, éventuellement de manière significative, sans en payer le prix, ce qui ferait échec à l'esprit de la législation sur les OPA.

* 309 II de l'article 1 er de l'ordonnance n° 2004-503 du 7 juin 2004 « on entend par entreprise publique tout organisme qui exerce des activités de production ou de commercialisation de biens ou de services marchands et sur lequel une ou des personnes publiques exercent, directement ou indirectement, une influence dominante en raison de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent ».

* 310 L'article 34 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 a porté cette cible de 7 à 7,7 %.

* 311 Sa production est associée à son principal coproduit, les tourteaux de colza ou de tournesol, pour l'alimentation du bétail.

* 312 Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 313 Ce taux, qui diminue à proportion de la quantité de biocarburants incorporés, évolue en fonction des objectifs nationaux d'incorporation : calculée en euros par hectolitre manquant par rapport à l'objectif d'incorporation, la TGAP n'est due que si ceux-ci ne sont pas atteints. Sa finalité est de ne pas être payée, et son rendement est différent selon les filières.

* 314 Son taux, auparavant de 14 euros/hl pour l'éthanol et de 8 euros/hl pour le biodiesel, est passé respectivement en 2014 à 8,25 euros/hl et à 4,5 euros/hl puis, en 2015, à 7 euros/hl et à 3 euros/hl.

* 315 À l'issue de la première Conférence environnementale en septembre 2012, le Premier ministre a annoncé que « face à la hausse des cours des céréales et des oléagineux sur les marchés mondiaux, le Gouvernement a décidé de demander à nos partenaires européens et au niveau international, une pause dans le développement des biocarburants de première génération. Au plan national, nous avons décidé de plafonner le taux d'incorporation à 7 % et d'atteindre les objectifs communautaires avec des biocarburants de seconde génération. Les agréments seront renouvelés jusqu'au 31 décembre 2015 et le soutien public sera mis en extinction à cette date ».

* 316 Arrêté du 17 janvier 2012 pris en application du d de l'article 1 er et de l'article 3 du décret n° 2011-1468 du 9 novembre 2011 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2011-1105 du 14 septembre 2011 portant transposition des directives 2009/28/CE et 2009/30/CE dans le domaine des énergies renouvelables et des biocarburants, précisant les modalités du double comptage et fixant la liste des biocarburants et des bioliquides dispensés de respecter les critères de durabilité définis à l'article L. 661-5 du code de l'énergie.

* 317 Selon l'article L. 232-21 du code de commerce, le rapport de gestion doit simplement être tenu à la disposition de toute personne qui en fait la demande.

* 318 Par un arrêt du 28 juin 2011 (affaire n° 10-15482), la chambre commerciale de la Cour de cassation a considéré « qu'en cas de liquidation judiciaire, les biens immobiliers ayant fait l'objet d'une déclaration notariée d'insaisissabilité sont exclus du dessaisissement, pour le débiteur, de l'administration et de la disposition de ses biens ». Puis par deux arrêts du 13 mars 2012 (affaires n° 11-15438 et 10-27087), elle a jugé que « le liquidateur n'a pas qualité pour agir (...) en inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité » et que celle-ci « ne permet pas aux organes de la procédure collective d'incorporer l'immeuble concerné dans le périmètre de la saisie des biens appartenant au débiteur ».

* 319 Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/rap/a13-162-8/a13-162-83.html#toc41 .

* 320 Voir à cet égard la décision n° 2010-607 DC du 10 juin 2010 du Conseil constitutionnel sur la loi relative à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (considérants 8 et 9).

* 321 Les articles L. 145-47, L. 145-49 et L. 145-55 du code de commerce, entre autres, organisent la déspécialisation des baux commerciaux.

* 322 Art. 1244-1 du code civil.

* 323 En effet, le caractère exécutoire de la créance ne pourra pas être contesté, puisque le titre délivré par l'huissier sera conforme aux prescriptions légales.

* 324 Ce rapport n° 410 (2010-2011), « Guyane, Martinique, Guadeloupe : L'évolution institutionnelle, une opportunité, pas une solution miracle », s'agissant de la situation financière préoccupante des communes, est consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/rap/r10-410/r10-410_mono.html#toc133

* 325 L'article 37 de la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière dispose ainsi :

« Les sommes dues en principal par un pouvoir adjudicateur, y compris lorsqu'il agit en qualité d'entité adjudicatrice, en exécution d'un contrat ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, ou la délégation d'un service public sont payées, en l'absence de délai prévu au contrat, dans un délai fixé par décret qui peut être différent selon les catégories de pouvoirs adjudicateurs.

« Le délai de paiement prévu au contrat ne peut excéder le délai fixé par décret. »

Sur ce fondement a été pris le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique.

* 326 Sous réserve d'un dispositif transitoire pour Mayotte, en vertu de l'article 18 du décret du 29 mars 2013 précité.

* 327 Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation .

* 328 Avis n° 792 (2012-2013) de Mme Nicole Bonnefoy, fait au nom de la commission des lois, p. 114, disponible à l'adresse : http://www.senat.fr/rap/a12-792/a12-792.html .

* 329 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové .

* 330 Art. 6-1 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce .

* 331 Art.17-2 de la même loi.

* 332 Conseil constitutionnel, n° 97-395 DC du 30 décembre 1997, Rec . p. 333, cons. 41.

* 333 Les règles de cumul des mandats s'appliquent aux seules personnes physiques, étant précisé qu'une personne morale peut être nommée administrateur ou membre du conseil de surveillance, en vertu des articles L. 225-20 et L. 225-76 du code de commerce. Dans ce cas, elle est tenue de désigner un représentant permanent, personne physique soumise aux mêmes règles et obligations, notamment en matière de cumul, et engageant la même responsabilité civile et pénale qu'un mandataire personne physique.

* 334 Lorsque les fonctions du directoire, organe collégial, sont exercées par une seule personne, celle-ci est nommée directeur général unique.

* 335 L'exercice de la direction générale par un administrateur est alors décompté pour un seul mandat.

* 336 Ne sont pas non plus pris en compte les mandats de représentant permanent d'une société de capital-risque, d'une société financière d'innovation ou d'une société de gestion habilitée à gérer les fonds communs de placement, compte tenu de l'objet même de ces sociétés, consistant à prendre des participations dans d'autres sociétés.

* 337 Code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées, juin 2013, AFEP et MEDEF, p. 18. Ce code est consultable à l'adresse suivante :

http://www.afep.com/uploads/medias/documents/Code_gouvernement_entreprise_societes_cotees_Juin_2013.pdf .

* 338 Il s'agit des sociétés dont la capitalisation boursière est inférieure au milliard d'euros.

* 339 Code de gouvernement d'entreprise pour les valeurs moyennes et petites, décembre 2009, Middlenext, p. 12. Ce code est consultable à l'adresse suivante :

http://www.middlenext.com/IMG/pdf/Code_de_gouvernance_site.pdf .

* 340 À la différence d'une filiale, caractérisée par la détention par la société-mère de plus de la moitié du capital (article L. 233-1 du code de commerce), une participation se caractérise par la détention de 10 à 50 % du capital (article L. 233-2). Une société est réputée en contrôler une autre lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote, lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote en vertu d'un accord conclu avec d'autres actionnaires, lorsqu'elle détermine les décisions par ses droits de vote ou lorsqu'elle dispose, en tant qu'actionnaire, du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des mandataires sociaux (article L. 233-3).

* 341 Les règles de modification des statuts des SARL sont différentes selon que la société a été constituée avant ou après la publication de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, celle-ci ayant voulu assouplir ces règles, sans effet rétroactif sauf décision unanime des associés.

* 342 Une petite entreprise est une entreprise qui ne dépasse pas deux des trois critères suivants : 4 millions d'euros de total de bilan, 8 millions d'euros de chiffre d'affaires net et 50 salariés.

* 343 Une micorentreprise est une entreprise qui ne dépasse pas deux des trois critères suivants : 350 000 euros de total de bilan, 700 000 euros de chiffre d'affaires net et 10 salariés.

* 344 Cette directive est consultable à l'adresse suivante :

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2013:182:0019:0076:FR:PDF .

* 345 Dans la rédaction adoptée par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, l'article 58 quater permettait à toute société, quelles que soient sa taille et son activité, de demander la confidentialité de l'ensemble de ses comptes annuels. De la sorte, les sociétés du CAC 40 auraient pu en bénéficier.

* 346 Article L. 621-10 du code monétaire et financier.

* 347 Par exemple en matière de recherche et de constatation des manquements aux règles applicables en matière de ventes aux enchères publiques à distance par voie électronique (article L. 321-3 du code de commerce) ou dans le cadre du pouvoir d'injonction structurelle de l'Autorité de la concurrence outre-mer (article L. 752-27 du code de commerce). Les agents de la DGCCRF ne disposent pas dans tous les cas, par exemple, des pouvoirs de visite et saisie, sur autorisation judiciaire.

* 348 En pratique la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

* 349 L'Autorité de la concurrence adopte dans ce cas un avis de clémence, à la demande du rapporteur général, pour préciser les conditions de cette exonération. Cet avis est transmis à l'entreprise, mais n'est pas publié. L'exonération de sanctions pécuniaires doit être proportionnée à la contribution de l'entreprise à l'établissement de la réalité de l'infraction.

* 350 Sont visées la chambre consulaire interprofessionnelle à Saint-Martin et à la chambre économique multiprofessionnelle à Saint-Barthélemy.

* 351 Disposition précisée à l'article L. 732-3 du code de commerce, qui résulte de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées.

* 352 Réalisé en application de l'article 15 de la loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010.

* 353 Jean-Michel Charpin, Damien Ientile, Nicolas Le Ru, Nathanaël Abecera ; L'encadrement des retraites chapeau , Igas-IGF, décembre 2014.

* 354 Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://proxy-pubminefi.diffusion.finances.gouv.fr/pub/document/18/18580.pdf .

* 355 Ces régimes à prestations définies complètent les régimes obligatoires de base et complémentaires ainsi que les éventuels autres régimes supplémentaires d'entreprise. Le rapport précise que 200 000 personnes environ perçoivent aujourd'hui une retraite à prestations définies, dont 16 % seulement bénéficient d'une pension annuelle supérieure à 5 000 euros. La grande majorité des bénéficiaires n'est donc concernée que par des montants relativement modestes. Moins de 50 personnes perçoivent une « retraite chapeau » de plus de 300 000 euros par an.

* 356 Le régime des conventions réglementées a été renforcé par l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, prise en application de l'article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

* 357 Le mandataire social intéressé ne prend pas part au vote sur l'autorisation le concernant. En outre, les conventions conclues sans autorisation préalable peuvent être annulées.

* 358 En l'absence d'approbation, les conséquences préjudiciables pour la société des conventions peuvent être mises à la charge de l'intéressé.

* 359 Il s'agit des sociétés dont la capitalisation boursière est inférieure au milliard d'euros.

* 360 Code de gouvernement d'entreprise pour les valeurs moyennes et petites, décembre 2009, Middlenext, p. 9. Ce code est consultable à l'adresse suivante :

http://www.middlenext.com/IMG/pdf/Code_de_gouvernance_site.pdf .

* 361 Code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées, juin 2013, AFEP et MEDEF, pp. 28 et 29. Ce code est consultable à l'adresse suivante :

http://www.afep.com/uploads/medias/documents/Code_gouvernement_entreprise_societes_cotees_Juin_2013.pdf .

* 362 Ibid., pp. 21 et suivantes.

* 363 Sont notamment concernées les associations ayant une activité économique.

* 364 Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

https://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Rapport-public-annuel-2015 .

* 365 Ce référé est consultable à l'adresse suivante :

https://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Organisation-et-le-fonctionnement-de-la-justice-commerciale .

* 366 La loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, s'agissant des pratiques anticoncurrentielles, et la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, s'agissant des pratiques restrictives de concurrence.

* 367 En application de l'article L. 610-1 du code de commerce, issu de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, un décret en Conseil d'État détermine la liste des tribunaux, notamment des tribunaux de commerce, compétents pour connaître des procédures du livre VI du code de commerce. Avant la réforme de la carte judiciaire, s'agissant des tribunaux de commerce, la liste prévue à l'article L. 610-1, telle qu'elle résultait du décret n° 2006-185 du 20 février 2006, n'avait écarté que quelques très petits tribunaux de commerce, de sorte que presque tous pouvaient connaître des procédures du livre VI. Depuis la réforme de la carte judiciaire, par le décret n° 2008-146 du 15 février 2008 pour les tribunaux de commerce, tous les tribunaux sont compétents.

* 368 Il s'agit à Fort-de-France d'un tribunal mixte de commerce.

* 369 Le tribunal de commerce de Lille ayant déménagé à Tourcoing, il s'agit du même tribunal.

* 370 Sur un total de 36, incluant l'Alsace et la Moselle ainsi que l'ensemble de l'outre-mer. Le débat sur la révision de la carte des cours d'appel n'a pas été ouvert à ce jour, depuis la réforme de la carte judiciaire, laquelle a concerné les juridictions de première instance.

* 371 Au besoin, le premier président de la cour d'appel peut également transmettre l'affaire au premier président de la Cour de cassation, pour renvoi dans le ressort d'une autre cour d'appel.

* 372 Ces statistiques sont établies sur les seules affaires dans lesquelles intervient l'AGS, devant un tribunal de commerce, pour les commerçants et artisans, ou un tribunal de grande instance, pour les autres. Elles concernent les années 2011 à 2013, ainsi que l'année 2014 jusqu'au 20 novembre.

* 373 Créé en 2005, le conseil national des tribunaux de commerce est un organe consultatif placé auprès du ministre de la justice et présidé par lui.

* 374 La réforme de la carte judiciaire a réduit le nombre de tribunaux de commerce de 191 à 134, avec la suppression de nombreux petits tribunaux et la création de quelques nouveaux tribunaux.

* 375 Les juridictions de Nouvelle-Calédonie et des collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution ne sont pas prises en compte.

* 376 À titre de comparaison, pour les juridictions spécialisées de premier degré, le code de l'organisation judiciaire distingue la compétence commune à tous les tribunaux de grande instance (TGI) et la compétence particulière à certains TGI, dans le cadre de laquelle des TGI spécialement désignés, par décret, sont compétents pour connaître de tel ou tel type d'action, par exemple en matière de propriété intellectuelle (articles L. 211-10 et suivants du code l'organisation judiciaire).

* 377 Article L. 620-2 du code de commerce, par exemple.

* 378 L'étude d'impact ne comporte aucune indication de seuils pour cette catégorie de procédures.

* 379 En deçà de ces seuils, la constitution des comités est possible sans être obligatoire. Il existe un comité des créanciers financiers et un comité des principaux fournisseurs. S'il y a lieu, une assemblée des obligataires est également réunie.

* 380 Le CIRI est chargé d'accompagner les entreprises en difficulté de plus de 400 salariés, en vue d'assurer leur pérennité économique. Le secrétariat du CIRI est assuré par la direction générale du Trésor. Lorsqu'elle emploie moins de 400 salariés, une entreprise relève du comité départemental d'examen des problèmes de financement des entreprises (CODEFI), placé sous l'autorité du préfet.

* 381 Microentreprises, petites et moyennes entreprises (PME), entreprises de taille intermédiaire (ETI) et grandes entreprises. Il existe également en droit européen une catégorie particulière des petites entreprises.

* 382 « Leveraged buy-out » ou rachat d'entreprise par emprunt.

* 383 L'article L. 233-1 dispose qu'une société est la filiale d'une autre lorsque plus de la moitié de son capital est détenu par cette autre société. L'article L. 233-3 énumère plusieurs critères en application desquels une société est considérée comme en contrôlant une autre : détention directe ou indirecte d'une part du capital conférant la majorité des droits de vote, détention de la majorité des droits de vote du fait d'un accord avec d'autres actionnaires, pouvoir de déterminer par ses seuls droits de vote les décisions de l'assemblée des actionnaires et pouvoir de révoquer la majorité des dirigeants et administrateurs.

* 384 Affaire n° 13-24161.

* 385 La simplification des conditions d'accès à ces professions est l'une de ces solutions, prévue à l'article 20 du présent texte.

* 386 Art. L. 811-1 et L. 812-1 du code de commerce. Les mêmes articles leur permettent toutefois de les déléguer, sous leur responsabilité, à des tiers, sur autorisation du président du tribunal de commerce.

* 387 Par coordination, les administrateurs et les mandataires judiciaires salariés n'auraient pas à contracter une assurance de responsabilité civile professionnelle, dans la mesure où ils agissent sous la responsabilité de leur employeur. Le présent article prévoit la coordination nécessaire à l'article L. 814-3.

* 388 Le tribunal peut se dispenser de désigner un administrateur judiciaire lorsque le débiteur compte moins de vingt salariés et moins de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel hors taxes.

* 389 Le tribunal désigne un administrateur judiciaire « en cas de nécessité » ou lorsque l'entreprise compte au moins vingt salariés et 20 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel hors taxes.

* 390 La constitution des comités de créanciers est obligatoire lorsque le débiteur, dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable, emploie un nombre de salariés supérieur à 150 et présente un chiffre d'affaires supérieur à 20 millions d'euros. En deçà de ces seuils, leur constitution est possible à la demande du débiteur ou de l'administrateur judiciaire. Sont constitués un comité des créanciers financiers, regroupant notamment les établissements de crédit, un comité des principaux fournisseurs et, s'il y a lieu, une assemblée des obligataires.

* 391 Dans ce cas, le code de commerce dispose que les clauses d'agrément du cessionnaire ou du nouvel actionnaire, fréquentes dans les sociétés non cotées, sont réputées non écrites.

* 392 Tribunal de commerce lorsque la procédure concerne une entreprise artisanale ou commerciale et tribunal de grande instance dans les autres cas.

* 393 Cette notion s'apparente à celle de groupe de sociétés (article L. 2331-1 du code du travail). Elle n'est pas utilisée en droit des procédures collectives.

* 394 Le caractère sérieux est une notion déjà connue en droit des procédures collectives et fait donc déjà l'objet d'une appréciation par le juge (articles L. 624-2, L. 626-1 et L. 642-4 du code de commerce).

* 395 Un décret en Conseil d'État a déterminé les tribunaux de commerce et les tribunaux de grande instance compétents pour connaître de cette procédure exceptionnelle.

* 396 Dès lors que les actionnaires en place disposeraient du droit de se retirer, en cédant leurs titres aux nouveaux actionnaires, y compris en cas d'augmentation de capital décidée par le tribunal, une telle expertise devrait aussi intervenir dans ce cas et pas seulement en cas de cession des titres ordonnée par le tribunal.

* 397 Le projet de loi dispose aussi ici que le tribunal « peut également subordonner cette conversion de créances en parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital de l'entreprise » ( sic ). Cette formulation dont le sens échappe à votre rapporteur illustre de façon caractéristique la rédaction perfectible de l'article 70 du projet de loi.

* 398 Cette ordonnance a été complétée, dans le cadre de la même habilitation, par l'ordonnance n° 2014-1088 du 26 septembre 2014 complétant l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, laquelle n'a pas repris ce mécanisme.

* 399 Article L. 225-248 du code de commerce. Ces dispositions ne sont logiquement pas applicables aux sociétés en procédure collective.

* 400 Directive 2012/30/UE du 25 octobre 2012 tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 54, deuxième alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital.

* 401 Directive 77/91/CEE du 13 décembre 1976 tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 58 deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital.

* 402 Arrêts Vasko du 24 mars 1992 et Pafitis du 12 mars 1996. Ces arrêts portaient sur une législation grecque permettant à un organisme administratif - la circonstance que le présent projet de loi confie cette mission à un organisme judiciaire n'est pas significativement différente - de décider d'une augmentation de capital concernant une entreprise en difficulté.

* 403 Ces catégories sont prévues par l'article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie et ont été précisées par le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique.

* 404 Cet article dispose notamment :

« Dans les cas où la loi renvoie au présent article pour fixer les conditions de prix d'une cession des droits sociaux d'un associé (...), la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible.

« L'expert ainsi désigné est tenu d'appliquer, lorsqu'elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties. ».

* 405 S'agissant du redressement judiciaire, l'article L. 631-1 du code de commerce dispose que cette procédure est « ouverte à tout débiteur (...) qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements ». L'article L. 631-4 précise que la procédure doit être « demandée par le débiteur au plus tard dans les quarante-cinq jours qui suivent la cessation des paiements s'il n'a pas, dans ce délai, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation ».

* 406 Articles L. 527-1 à L. 527-11 du code de commerce.

* 407 Articles 2333 à 2350 du code civil.

* 408 Pourvoi n° 11-21763. La Cour de cassation a jugé que, « s'agissant d'un gage portant sur des éléments visés à l'article L. 527-3 du code de commerce, les parties, dont l'une est un établissement de crédit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meubles sans dépossession ».

* 409 Loi du 13 juillet 1906 établissant le repos hebdomadaire en faveur des employés et des ouvriers.

* 410 Loi n° 2009-974 du 10 août 2009 réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines agglomérations pour les salariés volontaires.

* 411 Dares Analyses ; « En 2011, 29 % des salariés ont travaillé le dimanche de manière habituelle ou occasionnelle » ; octobre 2012 ; n° 75.

* 412 Par l'article 11 de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. A cette date, antérieure à l'entrée en vigueur de la recodification du code du travail, la liste des dérogations permanentes de droit figurait dans la partie législative du code.

* 413 Conseil d'État, 22 janvier 1931, Sieur Gaunoux.

* 414 Loi du 18 janvier 1934 modifiant l'article 44 du livre II du code du travail relatif à la suppression du repos hebdomadaire dans le commerce de détail, J.O. du 19 décembre 1934, p. 12 362.

* 415 Source : Émile Bender, rapport fait au nom de la commission du commerce, de l'industrie, du travail et des postes sur le projet de loi tendant à modifier l'article 44 du livre II du code du travail relatif à la suppression du repos hebdomadaire, J.O. Annexe n° 626, 13 décembre 1934.

* 416 Loi n° 2009-974 du 10 août 2009 réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires, article 2.

* 417 C'est-à-dire le paragraphe 3 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre II du titre III du livre I er de sa troisième partie.

* 418 Conseil constitutionnel, décision n° 2014-374 QPC du 4 avril 2014, Société Sephora.

* 419 Soit aux établissements dont la fermeture dominicale serait préjudiciable au public ou compromettrait leur fonctionnement normal.

* 420 Source : Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, Chiffres clés du tourisme, édition 2014.

* 421 Jean-Paul Bailly, Vers une société qui s'adapte en gardant ses valeurs, rapport au Premier ministre sur la question des exceptions au repos dominical dans les commerces, novembre 2013, p. 45.

* 422 Source : Comité régional du tourisme Paris région, repères de l'activité touristique 2014.

* 423 Commission d'étude des effets de la loi pour la croissance et l'activité ; Réforme du travail dominical, note, janvier 2015, 9 p.

* 424 Modifiés par les articles 76 et 77 du projet de loi.

* 425 Jean-Paul Bailly, op. cit., pp. 78-79.

* 426 Loi du 10 août 2009 précitée.

* 427 Jean-Paul Bailly, op. cit., p. 22.

* 428 C'est-à-dire aux établissements dont la fermeture le dimanche serait « préjudiciable au public » ou « compromettrait [leur] fonctionnement normal ».

* 429 Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, article 17.

* 430 Reconnu par l'article L. 2232-2 aux organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles.

* 431 Jusqu'à midi avant la loi « Mallié ».

* 432 Qui figurent aux II et III de l'article L. 3132-25-3 et à l'article L. 3132-25-4 du code du travail modifiés respectivement par les articles 76 et 77 du projet de loi.

* 433 En application des articles L. 3132-12 et R. 3132-5 du code du travail.

* 434 Jean-Paul Bailly, op. cit., p. 70.

* 435 D'après les critères définis par l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés.

* 436 Jean-Paul Bailly, op. cit., p. 62.

* 437 Étendue par l'arrêté du 26 juillet 2002 portant extension de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et d'un accord conclu dans le cadre de cette convention collective nationale ; NOR : SOCT0211156A.

* 438 Sous-paragraphe 2 du paragraphe 3 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre II du titre III du livre I er de la troisième partie du code.

* 439 Loi n° 93-1313 quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, article 44.

* 440 Jean-Paul Bailly, op. cit., p. 70.

* 441 Articles L. 3122-31 et R. 3122-8 du code du travail.

* 442 Article L. 3122-40 du code du travail.

* 443 Article L. 3132-34 du code du travail.

* 444 Article L. 3132-35 du code du travail.

* 445 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, article 10.

* 446 Issus des décrets n° 2014-1156 du 9 octobre 2014 relatif à l'acquisition et à l'utilisation des points acquis au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité et n° 2014-1159 du 9 octobre 2014 relatif à l'exposition des travailleurs à certains facteurs de risque professionnel au-delà de certains seuils de pénibilité et à sa traçabilité.

* 447 CA Paris, 23 septembre 2013, n° 12-23124.

* 448 Cass. soc., 24 septembre 2014, n° 13-24851.

* 449 CE, 15 mai 2006, Société Cesagui, n° 277361.

* 450 Article R. 3135-2 du code du travail.

* 451 Article 131-13 du code pénal.

* 452 Article 131-41 du code pénal.

* 453 Conseil constitutionnel, décision n° 2010-89 QPC du 21 janvier 2011, Société Chaud Colatine.

* 454 Conseil d'État, 5 mars 1986, Syndicat du commerce moderne de l'équipement de la maison.

* 455 C'est-à-dire la sous-section 2 de la section 2 du chapitre II du titre III du livre I er de sa troisième partie.

* 456 Article L. 3133-1.

* 457 Pour les communes ayant un temple protestant ou une église mixte.

* 458 Loi n° 83-550 du 30 juin 1983 relative à la commémoration de l'abolition de l'esclavage.

* 459 Décret n° 83-1003 du 23 novembre 1983 relatif à la commémoration de l'abolition de l'esclavage.

* 460 Décret n° 2012-553 du 23 avril 2012 modifiant le décret n° 83-1003 du 23 novembre 1983 relatif à la commémoration de l'abolition de l'esclavage.

* 461 Cf . encadré.

* 462 Décret n° 2013-721 du 2 août 2013 portant fixation du montant du barème de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 1235-1 du code du travail .

* 463 La prescription de deux ans ne s'applique pas aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, ni aux actions liées à un délit de harcèlement moral ou sexuel, ou de discrimination.

* 464 Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXI e siècle , rapport à la garde des sceaux, ministre de la justice, juillet 2014.

* 465 Ibid ., p. 7.

* 466 Dans le droit en vigueur, en effet, les sanctions disciplinaires sont prononcées par arrêté du garde des sceaux pour la censure ou la suspension et par décret pour la déchéance, après que l'intéressé s'est expliqué, devant la section ou la chambre à laquelle il appartient. L'initiative de l'engagement des poursuites appartient au président du conseil de prud'hommes ou au procureur de la République (art. L. 1442-13 et L. 1442-14 du code du travail).

* 467 Actuellement, ces sanctions sont, dans l'ordre : la censure, la suspension pour une durée inférieure à six mois et la déchéance.

* 468 Une exception est prévue : lorsque l'intéressé fait l'objet de poursuites pénales, le président peut le suspendre jusqu'à l'intervention de la décision pénale définitive.

* 469 Cette obligation de désigner, par priorité, un conseil de prud'hommes serait seulement maintenue lorsque la juridiction d'origine n'aura pu se constituer.

* 470 Est rappelée, à l'article L. 1454-1 du code du travail, la mission de conciliation de cette formation.

* 471 Art. R. 1454-17 du code du travail.

* 472 Art. L. 1454-2 et R. 1454-29 du même code.

* 473 Cette liberté d'appréciation du bureau de conciliation et d'orientation est la conséquence d'un amendement des rapporteurs adopté en séance publique, modifiant la rédaction issue de leur amendement de commission.

* 474 L'amendement reprend, à cet égard, la rédaction actuelle de l'article L. 1454-1 du code du travail qui dispose : « Un ou deux conseillers rapporteurs peuvent être désignés pour que l'affaire soit mise en état d'être jugée. Ils prescrivent toutes mesures nécessaires à cet effet. Les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1-2 communiquent aux conseillers rapporteurs, sur la demande de ceux-ci et sans pouvoir opposer le secret professionnel, les renseignements et documents relatifs au travail dissimulé, au marchandage ou au prêt illicite de main-d'oeuvre dont ils disposent ».

* 475 Cf. encadré en tête de commentaire.

* 476 Décret n° 2010-1165 du 1 er octobre 2010 relatif à la conciliation et à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale .

* 477 Cet article vise les établissements mentionnés à l'article L. 2311-1 du code du travail, c'est-à-dire les entreprises de droit privé, mais aussi les établissements publics à caractère industriel et commercial, ainsi que les établissements publics à caractère administratif lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé.

* 478 La rédaction de l'article L. 1453-4-1 du code du travail issue des travaux de la commission spéciale aboutissait à restreindre le bénéfice du contingent de dix heures maximum d'absence par mois aux seuls défenseurs syndicaux présents dans les établissements publics employant au moins onze salariés, alors que le projet de loi initial visait en outre toutes les entreprises de droit privé au-delà de ce seuil.

* 479 Sont notamment concernés par cette autorisation :

- les délégués syndicaux ;

- les salariés appartenant à une institution représentative du personnel (délégué du personnel, membre du comité d'entreprise et des structures assimilées, membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) ;

- les membres du conseil ou administrateur d'une caisse de sécurité sociale ou d'une mutuelle ;

- les conseillers du salarié ;

- ou encore les conseillers prud'hommes.

* 480 L'article L. 2421-1 prévoit qu'en cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé dans l'attente de la décision définitive de l'inspecteur du travail. Cette décision doit, à peine de nullité, être motivée et notifiée à l'inspecteur dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa prise d'effet. Si le licenciement est refusé, la mise à pied est annulée et ses effets supprimés de plein droit.

* 481 Proposition 40 du rapport précité, p. 80.

* 482 Loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative

* 483 En effet, dans ce cas, une directive européenne fait obligation d'autoriser la médiation.

* 484 Il s'agit de la règle mentionnée au deuxième alinéa de l'article 2066 du code civil.

* 485 Les infractions précitées liées à la durée du travail et celles relatives au respect du Smic sont actuellement sanctionnées pénalement par des amendes prévues pour les contraventions de la 3 ème à la 5 ème classe (450 à 1 500 euros), multipliées par le nombre de salariés concernés.

* 486 Dans le premier cas, l'amende était plafonnée à 10 000 euros par travailleur concerné par le manquement, dans le second cas, elle ne pouvait pas dépasser 10 000 euros, quel que soit le nombre de travailleurs concernés.

* 487 Loi n° 2013-185 du 1 er mars 2013 portant création du contrat de génération, art. 6.

* 488 Ces amendements ont été présentés par :

- le rapporteur général et les rapporteurs thématiques ;

- des députés du groupe SRC ;

- des députés du groupe écologiste.

* 489 CEDH, 20 mai 2014, n os 37394/11, Glantz c/ Finlande, et 758/11, Hakka c/ Finlande.

* 490 Il en va ainsi :

- du comité d'établissement et du comité central d'entreprise (art. L. 2328-1 du code du travail) ;

- du comité d'entreprise européen (art. L. 2346-1 du même code) ;

- du comité d'une société européenne (art. L. 2355-1 du même code) ;

- du comité d'une société coopérative européenne (art. L. 2365-1 du même code) ;

- du comité d'une société issue d'une fusion transfrontalière (art. L. 2375-1 du même code) ;

- et du groupe spécial de négociation relatif à ces différentes structures.

* 491 Art. L. 2328-2 du code du travail.

* 492 La nouvelle législation fiscale américaine dite « FATCA » oblige les banques du monde entier à transmettre à l'administration fiscale américaine toutes les données relatives aux comptes détenus hors des États-Unis par des résidents américains. La mise en oeuvre de la législation « FATCA » étant très coûteuse, certains établissements français ont préféré clôturer les comptes des résidents américains, y compris de nationalité française.

* 493 Source : Insee Analyses n° 2, décembre 2011.

* 494 Source : Dares Analyses, Les relations professionnelles au début des années 2010 : entre changements institutionnels, crise et évolutions sectorielles, avril 2013, n° 26.

* 495 Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, art. 23.

* 496 Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, article 31.

* 497 Selon les règles fixées par le décret n° 2015-87 du 28 janvier 2015 relatif au financement mutualisé des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs.

* 498 Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, article 77.

* 499 Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, article 12.

* 500 Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, article 8.

* 501 Répondant aux critères fixés par l'article L. 5212-13 du code du travail : travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 %, bénéficiaires des emplois réservés prévus par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, titulaires de l'allocation aux adultes handicapés, etc.

* 502 Dares Analyses, L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés en 2012, n° 83, novembre 2014.

* 503 Source : enquête Handicap-santé - volet ménages (HSM), Insee - Drees, 2008.

* 504 Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, article 20.

* 505 A la durée légale de 35 heures par semaine correspondent une durée mensuelle de 151,67 heures et une durée annuelle de 1 607 heures.

* 506 Cf. relevé des conclusions de la conférence nationale du handicap, 11 décembre 2014, disponible sur :
http://www.elysee.fr/assets/Confrence-nationale-du-Handicap/11.12-CNH-Relev-des-conclusions.pdf

* 507 Loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes, art. 1 er .

* 508 Source : Dares premières synthèses, Les nouveaux services - emplois jeunes : bilan fin 2003,
n° 20-1, mai 2004.

* 509 Loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 portant création des emplois d'avenir.

* 510 Accord national interprofessionnel du 13 décembre 2013 relatif à la formation professionnelle.

* 511 Décret n° 2014-1240 du 24 octobre 2014 relatif aux organismes paritaires agréés mentionnés aux articles L. 6332-1, L. 6333-1 et L. 6333-2 du code du travail.

* 512 Depuis 2011 cependant, la DGT a abandonné ces estimations. En effet, compte tenu de la forte croissance du nombre de déclarations enregistrées, « le principe de la multiplication du nombre de déclarations paraît de plus en plus infondé et hasardeux » (Source : Analyse des déclarations de détachement des entreprises prestataires de services en France en 2012, direction générale du travail, septembre 2013, p. 19).

* 513 Loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale.

* 514 L'article L. 4231-1 du code du travail, introduit par la loi du 10 juillet 2014 précitée, prévoit déjà la prise en charge par le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre des salariés, détachés ou non, d'un prestataire étranger lorsque leurs conditions d'hébergement collectif sont incompatibles avec la dignité humaine.

* 515 Article L. 3131-1 du code du travail.

* 516 Article L. 3132-2 du même code.

* 517 Règlement (CE) n° 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l'accès au marché du transport international de marchandises par route, et notamment le paragraphe 5 de l'article 8.

* 518 Mentionnée au I de l'article L. 1262-2-1 du code du travail, cette déclaration doit être adressée à l'inspection du travail du lieu où débute la prestation, préalablement au détachement.

* 519 Le II de l'article L. 1262-2-1 du code du travail, introduit par la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 précitée, a en effet obligé l'employeur qui détache des salariés en France à désigner un représentant sur le territoire national, chargé d'assurer la liaison avec les agents chargés de la lutte contre le travail illégal pendant toute la durée de la prestation.

* 520 Il existe actuellement vingt-six caisses dans le BTP, réparties sur l'ensemble du territoire (métropole et départements d'outre-mer), dont deux ont une compétence nationale (la Caisse nationale des travaux publics et la Caisse nationale des sociétés coopératives).

* 521 Cf. les commentaires sous l'article 96 du présent rapport.

* 522 L'article L. 1262-1 du code du travail pose deux conditions cumulatives pour autoriser une entreprise établie hors de France à détacher temporairement des salariés sur le territoire national.

La première condition est qu'il existe un contrat de travail entre l'employeur et le salarié pendant toute la période de détachement.

La seconde condition est que le détachement doit être réalisé dans l'un des trois cas suivants :

- lors d'un contrat entre le prestataire et un client établi ou exerçant en France ;

- entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe ;

- pour le compte propre de l'employeur, sans qu'il existe un contrat entre celui-ci et un destinataire.

* 523 L'article L. 1262-2 dispose qu'une entreprise de travail temporaire établie hors de France peut détacher temporairement des salariés auprès d'une entreprise utilisatrice établie ou exerçant sur le territoire national, à condition qu'il existe un contrat de travail entre l'entreprise étrangère et le salarié pendant toute la période de détachement.

* 524 « En vue de l'exécution d'un contrat de transport public routier de marchandises, le cocontractant de l'entreprise de transport est tenu, préalablement à la présentation du véhicule au chargement, de transmettre à celle-ci, par écrit ou par tout autre procédé permettant la mémorisation, les informations nécessaires à l'exécution du contrat, la liste des prestations annexes convenues ainsi que son acceptation des différentes durées prévues pour la réalisation du contrat et des conditions de rémunération des différentes opérations (...) ».

* 525 Règlement (CEE) n° 3921/91 du Conseil, du 16 décembre 1991, fixant les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux de marchandises ou de personnes par voie navigable dans un État membre.

* 526 Le tribunal peut, en outre, prononcer la peine complémentaire d'interdiction d'effectuer des opérations de transport sur le territoire national pendant une durée d'un an au plus.

* 527 Articles 11 à 16 du décret n° 2010-389 du 19 avril 2010 relatif au cabotage dans les transports routiers et fluviaux.

* 528 Directive 2009/13/CE du Conseil du 16 février 2009 portant mise en oeuvre de l'accord conclu par les Associations des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF) concernant la convention du travail maritime, 2006, et modifiant la directive 1999/63/CE.

* 529 Directive 2013/38/UE du Parlement européen et du Conseil du 12 août 2013 portant modification de la directive 2009/16/CE relative au contrôle par l'État du port et directive 2013/54/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 relative à certaines responsabilités de l'État du pavillon en ce qui concerne le respect et la mise en application de la convention du travail maritime, 2006.

* 530 Yannick Moreau, Nos retraites demain : équilibre financier et justice , rapport au Premier ministre, juin 2013.

* 531 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, art. 10.

* 532 Ce sont, selon l'article D. 4162-2 du code du travail, le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes, le travail répétitif, les activités exercées en milieu hyperbare, les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les agents chimiques dangereux, les températures extrêmes et le bruit.

* 533 Décret n° 2014-1159 du 9 octobre 2014 relatif à l'exposition des travailleurs à certains facteurs de risque professionnel au-delà de certains seuils de pénibilité et à sa traçabilité.

* 534 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, art. 60 et 79.

* 535 Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, art. 17.

* 536 Cette clause, qui constitue en réalité une sanction civile, envoie un signal négatif aux employeurs qui souhaiteraient s'engager dans la conclusion d'un accord de maintien ou de développement de l'emploi.

* 537 La chambre sociale de la Cour de cassation a admis, le 15 mai 2013, qu'un accord collectif conclu au niveau de l'entreprise ou à un niveau plus élevé (groupe ou branche professionnelle) pouvait fixer un périmètre plus restreint.

* 538 L'article L. 1233-24-4 du code du travail est en effet explicite sur ce point. A défaut d'accord collectif définissant le PSE, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. Autrement dit, le document unilatéral de l'employeur peut traiter de la pondération et du périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements (2° de l'article L. 1233-24-2), la référence aux dispositions légales et conventionnelles étant sans effet sur cette faculté.

* 539 TA Cergy-Pontoise, 11 juillet 2014, n° 1404370 et n° 1404270.

* 540 CAA Versailles, 22 octobre 2014, Sté Mory-Ducros.

* 541 Art. L. 1233-24-1 du code du travail, qui fait référence aux résultats du premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel, ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.

* 542 Art. L. 1233-24-2 du même code.

* 543 Art. L. 1233-24-4 du même code.

* 544 Art. L. 1233-57-2 du même code.

* 545 Art. L. 1233-57-3 du même code.

* 546 Le premier alinéa de l'article L. 1233-57-4 du même code prévoit que ce délai est de quinze jours pour valider un accord collectif majoritaire, et de vingt et un jours pour homologuer un document unilatéral de l'employeur.

* 547 Deuxième et troisième alinéas de l'article L. 1233-57-4 du même code.

* 548 Dans ce cas, l'employeur doit transmettre une copie de la demande de validation ou d'homologation, accompagnée de son accusé de réception par l'administration, au comité d'entreprise et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales représentatives signataires.

* 549 Cette période est de vingt et un jours en cas de liquidation et d'un mois en cas de redressement.

* 550 En vertu de l'article L. 1233-71 du code du travail, dans les entreprises ou les établissements d'au moins mille salariés, ainsi que dans les entreprises appartenant à un groupe employant au total au moins mille salariés, l'employeur doit proposer à chaque salarié dont il envisage de prononcer le licenciement pour motif économique un congé de reclassement qui a pour objet de lui permettre de bénéficier d'actions de formation et des prestations d'une cellule d'accompagnement dans les démarches de recherche d'emploi. Ce congé, d'une durée maximale de douze mois, est intégralement financé par l'employeur.

* 551 Niveau désormais fixé à 75 % en application de la convention conclue par les partenaires sociaux le 26 janvier 2015 sur le CSP.

* 552 Accord du 7 janvier 2015 entre les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel portant sur l'affectation des ressources du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), article 4-5.

* 553 Accord national interprofessionnel du 31 mai 2011 relatif au contrat de sécurisation professionnelle.

* 554 Loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011 pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels.

* 555 Par l'accord national interprofessionnel du 8 décembre 2014 relatif au contrat de sécurisation professionnelle.

* 556 Durée qui peut désormais être augmentée à due concurrence des périodes de travail intervenues après la fin de son sixième mois, dans la limite de trois mois.

* 557 Loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002, article 149.

* 558 En application du décret n° 2013-54 du 15 janvier 2013 relatif au montant de l'aide financière de l'État aux activités d'adultes-relais.

* 559 Source : Insee Mayotte infos n° 70, Quatre jeunes sur dix en grande difficulté à l'écrit à Mayotte, février 2014.

* * Entendu par le groupe de travail préfigurant la commission spéciale

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