Rapport n° 187 (2016-2017) de Mmes Dominique ESTROSI SASSONE et Françoise GATEL , fait au nom de la commission spéciale, déposé le 6 décembre 2016

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N° 187

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 décembre 2016

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission spéciale (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE , relatif à l' égalité et à la citoyenneté ,

Par Mmes Dominique ESTROSI SASSONE et Françoise GATEL,

Sénateurs.

(1) Cette commission spéciale est composée de : M. Jean-Claude Lenoir, président ; Mmes Dominique Estrosi Sassone, Françoise Gatel, rapporteurs ; Mme Aline Archimbaud, MM. Philippe Dallier, René Danesi, Christian Favier, Jacques-Bernard Magner, Jacques Mézard, Mme Sophie Primas, MM. Yves Rome, Jean-Pierre Sueur, Henri Tandonnet, vice-présidents ; Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Loïc Hervé, Alain Vasselle, secrétaires ; Mmes Maryvonne Blondin, Agnès Canayer, M. Jean-Claude Carle, Mme Françoise Cartron, M. Francis Delattre, Mme Catherine di Folco, M. Daniel Dubois, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Frédérique Gerbaud, Corinne Imbert, Françoise Laborde, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Jean-Jacques Lozach, Hugues Portelli, Mme Christine Prunaud, MM. Alain Richard, René Vandierendonck, Michel Vaspart, Yannick Vaugrenard, Mme Évelyne Yonnet.

Voir les numéros :

Première lecture : 3679 , 3851 et T.A. 787

Commission mixte paritaire : 4155

Nouvelle lecture : 4141 , 4191 et T.A. 838

Première lecture : 773 , 827 , 828 (2015-2016) et T.A. 4 (2016-2017)

Commission mixte paritaire : 69 et 70 (2016-2017)

Nouvelle lecture : 148 et 188 (2016-2017)

AVANT-PROPOS

Le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté est animé d'une noble ambition à laquelle votre commission spéciale et le Sénat ont souscrit : favoriser la cohésion nationale en commençant par l'engagement des jeunes, en améliorant l'accès de tous au logement et en luttant contre les discriminations de toutes sortes.

En première lecture, l'Assemblée nationale a fait de ce texte un « cabinet de curiosités », quintuplant son volume et éloignant son contenu de l'ambition initiale.

En cet été 2016, votre commission spéciale et le Sénat ont étudié de façon approfondie la version du texte proposée par l'Assemblée en première lecture. Vos rapporteurs ont consacré plus de 62 heures à des auditions, la commission spéciale s'étant réunie quant à elle plus de 33 heures.

Le Sénat a ensuite siégé près de 45 heures, à l'issue desquelles, après l'adoption de 131 amendements, il avait très largement recentré le texte sur ses objectifs initiaux, tenté de simplifier les dispositifs et limité les contraintes pesant sur les entreprises et les collectivités territoriales.

Après l'échec de la commission mixte paritaire, l'Assemblée nationale a confirmé en nouvelle lecture qu'elle n'entendait pas s'engager sur la voie du compromis.

À l'exception de la réserve civique, sur laquelle le Sénat avait marqué son accord avec les principes du projet de loi, l'Assemblée nationale a réaffirmé ses divergences sur les dispositifs les plus importants, même si elle a adopté conformes quelques articles et s'est ralliée à plusieurs suppressions sur des sujets secondaires.

Elle a en outre réinséré dans le texte de nombreux dispositifs que la commission spéciale et le Sénat avaient jugés sans lien avec son objet et adopté plusieurs dispositions contraires à la règle de l'entonnoir.

Le service civique aurait pu faire l'objet d'un accord, or les députés ont rétabli plusieurs modifications que le Sénat avait contestées, telles que l'introduction des syndicats de salariés dans la gestion du dispositif.

L'Assemblée nationale a rétabli plusieurs dispositions remettant en cause la majorité légale à l'âge de 18 ans et affaiblissant la protection des mineurs. Le Sénat considère qu'un débat autonome approfondi devrait avoir lieu sur ce point. Les députés ont également rétabli les dispositifs créant une confusion entre engagement associatif et emploi, comme l'élargissement des possibilités de rémunérer les dirigeants associatifs de moins de trente ans.

Ils ont réintroduit la plupart des contraintes pesant sur les collectivités locales que le Sénat avait voulu supprimer, notamment l'obligation de mise à disposition de « moyens matériels » aux parlementaires.

En matière de liberté d'expression, l'Assemblée est revenue sur les propositions que le Sénat avait formulées en matière d'abus commis sur internet. Il faudra traiter à nouveau ce sujet, car d'importants dommages peuvent être infligés en toute impunité.

Sur le volet du texte relatif à l'éducation, les députés ont signifié leur opposition aux modifications apportées par le Sénat, en refusant notamment le régime déclaratif encadré que la commission spéciale avait proposé pour l'ouverture des écoles privées.

Au sujet du régime applicable aux gens du voyage, l'Assemblée nationale n'a conservé aucune des propositions du Sénat et a fait fi des difficultés rencontrées par les élus locaux.

Les philosophies des deux assemblées sont également inconciliables quant aux obligations de construction et aux attributions de logements sociaux. Les députés ont supprimé le dispositif de contractualisation entre l'État et les communes que le Sénat avait adopté pour adapter aux réalités du terrain les obligations de la loi « Solidarité et renouvellement urbains ». Ils sont également revenus sur les modifications tendant à conserver aux maires certaines de leurs prérogatives en matière d'attributions.

En matière d'urbanisme, si l'Assemblée nationale a souscrit à quelques avancées introduites par le Sénat, elle a rétabli des processus contraignants d'intercommunalisation des documents d'urbanisme.

Pour cet ensemble de motifs, votre commission spéciale considère qu'un nouvel examen détaillé du projet de loi ne permettrait pas de rapprocher les points de vue de l'Assemblée nationale et du Sénat, et propose donc à ce dernier d'adopter une motion tendant à opposer la question préalable.

Réunie le mardi 6 décembre 2016 sous la présidence de M. Jean-Claude Lenoir, président, sur proposition de Mmes Françoise Gatel et Dominique Estrosi Sassone, rapporteurs, la commission spéciale a décidé de proposer au Sénat d'opposer la Question préalable au projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté, en nouvelle lecture.

En conséquence, elle n'a pas adopté de texte sur le projet de loi.

I. TITRE IER : ÉMANCIPATION DES JEUNES, CITOYENNETÉ, PARTICIPATION, ET DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉDUCATION

A. LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA RÉSERVE CIVIQUE

Les dispositions concernant la réserve civique se sont avérées consensuelles et la plupart des précisions apportées par le Sénat ont été reprises par l'Assemblée nationale, comme en témoigne l'adoption conforme des articles 3, 5, 6 et 7 bis .

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ENGAGEMENT DES JEUNES

L'Assemblée nationale a rétabli l'article 7 ter permettant aux associations agréées par le ministère de la jeunesse et dont l'instance dirigeante est composée de membres dont la moyenne d'âge est inférieure à trente ans de rémunérer leurs dirigeants pendant une durée qui peut atteindre six ans. Le Sénat s'y était opposé, évoquant le risque de dévoiement de l'engagement associatif .

En ce qui concerne le service civique , l'Assemblée nationale a élargi aux sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements, aux sociétés dont la Banque de France détient la totalité du capital, ainsi qu'aux centres dramatiques nationaux, lorsqu'ils ont le statut de SARL 1 ( * ) ou de SCOP 2 ( * ) , la possibilité d'accueillir un volontaire du service civique alors que le Sénat était plus réservé compte tenu du risque de substituabilité du service civique à un stage ou un emploi (article 10) .

L'obligation de formation des tuteurs introduite par le Sénat a été reprise par l'Assemblée nationale. En revanche, l'Assemblée nationale a rétabli la mention explicite des organisations syndicales en tant qu'organismes saisis par le préfet dans le cadre de la coordination de ses actions en matière de service civique alors que le Sénat ne souhaitait pas faire référence aux organisations syndicales afin d'éviter toute confusion entre les missions de service civique et l'emploi (article 12 ter ) .

L'Assemblée nationale a maintenu la suppression d'un rapport sur la faisabilité et l'opportunité d'un déploiement contraignant des offres de missions de service civique dans les collectivités publiques (article 12 septies ) ainsi que la suppression de l'expérimentation d'un service civique obligatoire (article 12 nonies ) .

En revanche, elle a rétabli l'article 15 autorisant un mineur de seize ans révolus à être nommé directeur ou codirecteur de la publication d'un journal ou d'un support en ligne de communication au public en dépit des conséquences juridiques négatives qu'avait mises en évidence le Sénat . Les jeunes mineurs deviennent responsables pénalement et civilement des propos tenus dans la publication, même s'ils ne les ont pas écrits eux-mêmes.

L'Assemblée nationale a partiellement pris en compte les réserves du Sénat concernant la possibilité pour un mineur d'être chargé de l'administration d'une association sans l'accord préalable de ses parents (article 15 ter ) . Un accord écrit de ces derniers serait requis lorsque l'enfant à moins de seize ans. La question reste entière pour les mineurs âgés de seize à dix-huit ans. L'association aurait une obligation d'information mais la mise en oeuvre de cette disposition sera très difficile à vérifier en pratique.

Votre rapporteur se félicite, en revanche, de la suppression de la réforme de l'émancipation des mineurs (article 19 ter ) , mesure fondamentale en termes de droit civil que les députés avaient souhaité insérer dans le projet de loi, sans étude d'impact préalable.

C. DISPOSITIONS RELATIVES AUX ASSOCIATIONS

L'Assemblée nationale, à l'initiative du gouvernement, a repris tout en l'adaptant l'amendement voté par le Sénat et visant à imposer aux associations « mixtes » à objet partiellement cultuel régies par la loi de 1901 3 ( * ) les mêmes obligations en termes de transparence comptable qu'aux associations cultuelles visées par la loi de 1905 4 ( * ) (article 8 septies ) . Désormais, ces associations devront tenir un état du patrimoine et des comptes annuels et seront soumises au contrôle financier du ministre des finances et de l'inspection générale des finances. En outre, les actes de gestion financière et d'administration légale des biens accomplis par les directeurs ou administrateurs seront chaque année présentés au contrôle de l'assemblée générale des membres de l'association et soumis à son approbation.

À l'article 15 sexies , tout en ratifiant l'ordonnance n° 2015-904 du 23 juillet 2015 portant simplification du régime des associations et des fondations, le Sénat avait adopté un amendement tendant à annihiler les effets de ses articles 8 à 10, pour un double motif :

- sur la forme, il avait estimé que ces dispositions excédaient le champ de l'habilitation donnée au Gouvernement. En effet, ces trois articles modifient les règles applicables aux organismes faisant un appel public à la générosité alors que le champ de l'habilitation se limite aux associations et aux fondations ;

- sur le fond, le Sénat était opposé à l'allègement des contraintes imposées à ces organismes introduit par les articles 8 à 10 de ladite ordonnance à travers l'instauration d'un seuil (qui, dans la rédaction initiale, devait être précisé par décret) en-deçà duquel les organismes ne sont pas obligés de déclarer les montants perçus à l'issu de l'appel public à générosité ni d'établir un compte d'emploi annuel des ressources collectées auprès du public.

La commission spéciale de l'Assemblée nationale avait repris les arguments du Sénat et proposé l'adoption conforme de cet article. Toutefois, à l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a ratifié l'ordonnance précitée dans sa totalité en se contentant de préciser que le seuil au-delà duquel les organismes faisant un appel public à la générosité sont soumis à des contraintes de déclaration ne pouvait pas être supérieur à 75 000 euros.

D. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉDUCATION

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale n'a retenu des apports du Sénat que quelques modifications mineures ou d'ordre rédactionnel ; ainsi les articles 14, 14 bis A, 14 ter , 14 quinquies et 14 septies ont fait l'objet d'une adoption conforme.

En revanche, les articles supprimés par le Sénat au motif qu'ils sont sans portée normative ou manifestement d'ordre réglementaire ont été presque systématiquement rétablis : il en va ainsi des articles 14 quater , 47 bis et 47 quinquies .

Sans surprise, l'Assemblée nationale a également rétabli la rédaction qu'elle avait adoptée en première lecture s'agissant des principaux points de désaccord , en particulier les articles 14 bis , relatif au contrôle de l'instruction à domicile, et 14 decies , qui habilite le Gouvernement à modifier par ordonnance la législation applicable aux conditions d'ouverture des établissements privés d'enseignement scolaire. Votre rapporteur maintient les objections qu'elle avait formulées sur ces deux articles ainsi que ses réserves sur la constitutionnalité de l'instauration d'un régime d'autorisation préalable pour l'ouverture d'un établissement privé, tel que le prévoit l'article 14 decies .

Les députés ont également rétabli l'article 47 relatif à l'accès des élèves à la restauration scolaire dans le premier degré , qui fait également l'objet d'un profond désaccord ; son examen à l'Assemblée nationale a vu la position du Sénat caricaturée. L'article 47 ne se contente pas, par une rédaction maladroite, de transcrire dans le code de l'éducation une jurisprudence qui ne fait qu'appliquer l'interdiction générale des discriminations et le principe d'égalité devant les services publics, ce dernier étant principe à valeur constitutionnelle. Il crée également un droit, applicable sur une partie seulement du territoire, qui implique, pour les communes mettant en oeuvre ce service, l'obligation d'y admettre l'ensemble des enfants, alors même que la restauration scolaire demeure un service public facultatif. Transformer la restauration scolaire en un service public obligatoire, à l'instar de ce qui a cours dans le second degré, serait une voie plus cohérente ; votre rapporteur a invité, de manière répétée mais en vain, le Gouvernement à suivre cette voie, la plus à même de garantir l'accès de tous les enfants à la restauration scolaire.

E. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'Assemblée nationale a rétabli les dispositions de l'article 16 , qui confie à la région le rôle de chef de file en matière de politique de la jeunesse ainsi que de coordination des politiques d'information en direction de la jeunesse. Le Sénat n'avait pas souhaité revenir sur la répartition des compétences issue de la loi NOTRe.

À l'article 16 bis , relatif aux conseils de jeunes, les députés sont revenus sur l'abaissement à vingt-trois ans de l'âge maximal des participants ; une exigence de parité dans la composition des conseils a été insérée.

En ce qui concerne les dispositions relatives aux CESER, l'Assemblée nationale a rétabli la rédaction de l'article 16 ter qu'elle avait adoptée en première lecture. En revanche, elle a maintenu la suppression de l'article 16 quater , qui prévoyait que la composition des CESER devait refléter l'ensemble des classes d'âge de la population, et de l'article 16 decies qui réduisait le seuil de mise en place des conseils de développement fixé par la loi NOTRe.

Votre rapporteur rappelle, enfin, que l'article 16 quinquies tel qu'adopté par l'Assemblée nationale demeure inapplicable en pratique : l'exigence selon laquelle le conseil de développement « reflète la population du territoire concerné » est complètement dépourvue de consistance juridique. Il est d'ailleurs étonnant que cette disposition ait été supprimée pour les CESER (article 16 quater ) et pas pour les conseils de développement.

F. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DU TRAVAIL ET À LA PROTECTION SOCIALE

Votre rapporteur constate qu'un seul article relatif au droit du travail a fait l'objet d'un accord avec les députés : l'article 14 bis A , inséré à l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues membres du groupe Union des démocrates et indépendants et réécrit en séance publique au Sénat, qui vise à favoriser la mobilité internationale des apprentis. Cet article permet à l'apprenti, pendant sa période de mobilité, de maintenir son statut de stagiaire de la formation professionnelle et de le faire bénéficier d'une aide financière prise en charge par les organismes paritaires collecteurs agréés.

En revanche et sans surprise, les députés ont rétabli l'article 8 qui instaure un nouveau congé spécifique, dans le code du travail, destiné à l'exercice de responsabilités associatives. Considérablement élargi en première lecture à l'Assemblée nationale notamment à tous les membres d'un conseil citoyen ou à toutes les personnes apportant un concours à une mutuelle, ce dispositif avait été supprimé par le Sénat en raison de la complexité qu'il ajoutait à un droit déjà étoffé (16 dispositifs de congé spécifique existent déjà) en particulier pour les petites entreprises. Conformément à la remarque de votre rapporteur, la rédaction adoptée en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale tient compte désormais de la nouvelle architecture du code du travail issue de la dernière loi sur le travail du 8 août 2016 5 ( * ) .

Supprimé par le Sénat, l'article 11 bis qui prévoit d'associer les représentants du personnel dans les entreprises ou dans les administrations publiques au contrôle de l'utilisation du recours à des services civiques a été rétabli par l'Assemblée nationale. Les députés n'ont donc pas suivi la position du Sénat selon lequel cet article, en introduisant la notion de service civique dans le code du travail, introduit une confusion alors même que les services civiques ne sont pas, par nature, des emplois salariés.

De même, l'Assemblée nationale a rétabli dans sa rédaction issue de la première lecture l'article 19 quinquies qui permet d'inclure la préparation au permis de conduire parmi les formations éligibles au compte personnel de formation (CPF). Les députés ont donc supprimé d'une part, l'ouverture du CPF aux formations aux permis deux-roues et poids lourds et d'autre part, le principe d'une alimentation par anticipation du CPF pour les apprentis afin qu'ils puissent bénéficier de ce financement pour la préparation au permis B. Ces dispositions avaient été adoptées par le Sénat en première lecture.

L'Assemblée nationale a également rétabli l'article 19 septies A , qui vise à inscrire dans la loi la règle, en vigueur depuis 2009, selon laquelle les allocataires du contrat d'insertion dans la vie sociale sont automatiquement éligibles au dispositif de caution publique mis en place dans le cadre du « permis à un euro par jours ».

En séance publique, les députés, à l'initiative de notre collègue Jean-Patrick Gille et contre l'avis de la commission spéciale et du Gouvernement, ont complété cet article d'un I visant à créer un livret d'épargne non défiscalisée dédié au financement du permis de conduire. Outre qu'elle n'apporte rien au droit existant, chacun étant libre de mettre de l'argent de côté pour financer le permis de conduire de ses enfants, cette disposition totalement nouvelle et excédant le cadre de l'article 19 septies A semble contraire à la règle dite de « l'entonnoir ».

S'agissant des dispositions relatives à la protection sociale, l'Assemblée nationale a confirmé la suppression de deux demandes de rapports ( articles 18 bis et 18 ter ) ainsi que la présentation des droits sociaux ouverts aux 18-30 ans lors de la journée défense et citoyenneté (article 15 bis ) .

Elle est en revanche revenue sur l'ensemble des autres dispositions sociales adoptées ou rejetées par le Sénat. Les députés ont en particulier rétabli leur rédaction bavarde de l'article 17 relatif à l'instauration d'une information obligatoire des jeunes concernant leurs droits sociaux en matière de santé par les organismes gestionnaires des régimes obligatoires d'assurance maladie. Ils ont également maintenu leur volonté de légaliser une règle de gestion de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) contenue actuellement dans une circulaire ( article 17 bis ).

De même, la demande de rapport concernant la mise en place d'un service public décentralisé de la petite enfance ( article 16 A ) a été maintenue.

G. LES DISPOSITIONS DIVERSES

L'Assemblée nationale a réintroduit au sein du titre I er des dispositions que le Sénat avait jugées sans lien avec le texte lors de la première lecture et donc contraires à l'article 45 de la Constitution : articles 16 sexies et 16 septies (consultation de la population pour l'élaboration du schéma directeur de la région Ile-de-France), article 16 octies (consultation publique pour le SRADDET) et article 19 bis (dématérialisation de la procédure de naturalisation).

Nos collègues députés n'ont d'ailleurs pas tenté de démontrer le lien, même indirect, entre ces dispositions et la version initiale du présent projet de loi.

De même, nos collègues députés ont confirmé des dispositions ne présentant aucun caractère normatif comme la possibilité pour l'État de mettre à disposition d'associations des biens saisis lors d'une procédure pénale (article 15 quinquies ) .

Si votre rapporteur se félicite de l'accord trouvé sur l'élection du candidat le plus jeune en cas d'égalité des voix (article 15 decies ) , elle exprime ses plus vives inquiétudes concernant l'article 15 undecies qui prévoit que le communes mettent à la disposition des parlementaires, à titre gratuit, « les moyens matériels leur permettant de rencontrer les citoyens » .

En premier lieu, cet article crée une nouvelle contrainte pour les collectivités territoriales. Il manque, en outre, de précision : le terme « moyen matériel » pourrait par exemple permettre à un parlementaire de solliciter le prêt d'un véhicule communal pour aller « rencontrer les citoyens ».

En second lieu, deux nouvelles dispositions ont été ajoutées par l'Assemblée nationale alors qu'elles n'avaient été adoptées par aucune des deux chambres en première lecture. Elles sont donc contraires à la règle constitutionnelle de « l'entonnoir » .

Sont concernés :

- le II de l'article 15 undecies , qui revient sur une pratique républicaine consistant, pour les communes, à prêter des salles de réunion à l'ensemble des candidats à une élection. Seule les locations retranscrites dans les comptes de campagnes seraient désormais possibles ;

- le III de ce même article qui étend la mesure aux consulats ou ambassades 6 ( * ) .

Enfin, l'Assemblée nationale a rétabli plusieurs articles visant la remise d'un rapport ou contenant des dispositions non normatives .

Ainsi, elle a rétabli l'article 15 septies qui prévoit la remise d'un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative. De même, elle a rétabli l'article 19 septies reconnaissant le droit de chaque jeune à bénéficier d'une expérience professionnelle ou associative à l'étranger et l'article 19 octies prévoyant la remise d'un rapport étudiant les modalités de création d'un Office francophone et méditerranéen de la jeunesse.

II. PRINCIPALES DISPOSITIONS DU TITRE II RELATIF AU LOGEMENT, À L'URBANISME ET AUX GENS DU VOYAGE

A. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX ATTRIBUTIONS DE LOGEMENTS SOCIAUX, À LA MOBILITÉ ET AU RENFORCEMENT DE LA DÉMOCRATIE LOCATIVE DANS LE PARC SOCIAL

En matière d'attributions de logements sociaux , le Sénat avait proposé à l' article 20 plusieurs modifications afin :

- d'instaurer un dispositif de contractualisation entre les collectivités locales concernées et le préfet pour définir les obligations de mixité sociale. Le Sénat avait en effet proposé d'aller jusqu'au bout de la logique en supprimant toute référence à un taux et en laissant les acteurs locaux trouver un accord avec le préfet pour établir ce taux en fonction de la situation locale. Il ne s'agissait pas d'exonérer les collectivités de leur obligation en matière de mixité sociale mais de permettre une meilleure adaptation de l'objectif aux réalités du terrain dans un souci d'efficacité et de bonne gestion ;

- de revenir au projet de loi initial en ne prévoyant pas de substitution automatique du préfet aux collectivités locales, aux bailleurs et aux réservataires, lorsque ces derniers n'atteignent pas leurs objectifs de mixité sociale ;

- de supprimer la création d'une pré-commission d'attribution dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ;

- de supprimer dans la liste des personnes prioritaires les personnes menacées d'expulsion sans relogement ;

- de maintenir les délégations de contingent préfectoral aux maires pour le passé et pour l'avenir.

Les députés sont revenus sur l'ensemble de ces modifications et ont rétabli les dispositions qu'ils avaient adoptées en première lecture. Ils ont en outre :

- étendu les obligations de mixité sociale aux attributions de logements non réservés ou pour lesquels l'attribution à un candidat présenté par le réservataire a échoué ;

- précisé que les délégations de contingent préfectoral seront résiliées de plein droit dans les communes carencées ;

- rétabli au sein de cet article 20 les dispositions de l'article 33 bis C qui avaient été supprimées par le Sénat et qui prévoyaient qu'en Ile-de-France toutes les questions de relogement relatives aux ménages bénéficiaires du DALO seraient traitées par le préfet de région et non par le préfet de département.

L 'article 20 quater qui autorise à déroger aux règles de répartition du contingent communal entre le maire de la commune et les maires d'arrondissement, pour les relogements résultant de situation de péril ou de catastrophe a été rétabli par les députés.

À l'article 21 , les députés ont rétabli l'obligation de substitution du préfet en cas de manquement d'Action logement à ses obligations de mixité sociale. S'agissant de l'Association foncière logement, ils ont limité les obligations de mixité sociale prévues à l'article 20 aux seuls logements conventionnés de l'association.

À l'article 22 , les députés ont rétabli les dispositions du projet de loi initial qui retirait aux maires certaines prérogatives comme la possibilité de créer une commission d'attribution ou l'attribution d'une voix prépondérante dans les commissions d'attribution. En outre, les députés n'ont pas suivi le Sénat qui avait souhaité, à l'initiative de votre rapporteur et du groupe socialiste et républicain, pérenniser les commissions d'attribution dématérialisées, supprimant dans un premier temps cette disposition avant de décider en séance publique de prolonger l'expérimentation de trois années supplémentaires alors même qu'ils reconnaissaient les effets positifs de ce dispositif. Dans un souci de clarification, ils ont en outre précisé que les commissions d'attribution seraient composées de six membres représentant les organismes HLM.

S'ils ont conservé, à l'article 24, la possibilité de choisir le champ d'application du dispositif de location voulue conformément à la rédaction du Sénat, ils ont en revanche rétabli la publicité des logements vacants des organismes HLM avant le 1 er janvier 2020.

À l'article 25 , ils ont rétabli la collecte du numéro INSEE par les bailleurs sociaux, alors même que le Sénat l'avait supprimée en raison des réserves exprimées par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sur l'intérêt d'utiliser ce numéro dans le cadre de l'élaboration des cartographies. De même, ils ont supprimé l'avis de la CNIL sur le décret pris en Conseil d'État sur les conditions de traitement des données recueillies au cours des enquêtes par les organismes HLM.

L'article 25 bis sur les conditions d'occupation d'un logement social a été adopté conforme.

Les députés ont rétabli les dispositions de l'article 26 A relatif aux personnes chargées de mener les enquêtes de l'INSEE alors même que la ministre du logement et de l'habitat durable a reconnu devant les députés qu'il s'agissait d'un « cavalier législatif » .

L' article 26 relatif aux conventions d'utilité sociale, qui avait été supprimé par le Sénat lors du vote sur l'article, a été rétabli. Le gouvernement comme il s'y était engagé devant les sénateurs a revu le dispositif expérimental permettant la convergence vers un loyer unique et qui déroge aux dispositions introduites dans la loi.

À l'article 28 bis relatif aux modalités de contrôle du préfet des décisions d'aliénation de patrimoine par des organismes HLM, les députés ont supprimé la précision insérée à l'initiative de nos collègues sénateurs du groupe socialiste et républicain selon laquelle les décisions d'aliénation devaient être prises sur une période de 24 mois.

En matière fiscale , les députés ont supprimé l'article 28 quater BCA relatif aux modalités de compensation de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) en faveur des logements sociaux considérant que cette disposition relevait de la loi de finances. L' article 28 quater A adopté conforme par le Sénat a été rouvert en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale afin d'assurer une coordination avec la Constitution. Les députés ont précisé que la convention d'utilisation de l'abattement de TFPB devrait être signée avant le 31 mars 2017 au lieu du 1 er janvier 2017. En effet, ils ont estimé que « sans cette précision, cette disposition risquait d'avoir, pour 2017, un effet rétroactif contraire à la Constitution ». Cependant lors de l'examen en séance publique, les députés ont supprimé l'article à l'initiative du Gouvernement. Si votre rapporteur peut entendre la nécessité de rouvrir l'article pour assurer le respect de la Constitution, toutefois elle s'étonne que le gouvernement ait profité de cette procédure pour demander la suppression de l'article pour des motifs d'opportunité afin de proposer des aménagements au dispositif dans le cadre des projets de loi de finances.

Les députés ont adopté des précisions rédactionnelles à l'article 28 quater BC relatif aux apports commerciaux ou professionnels au capital des filiales de logements intermédiaires et ils ont adopté conforme l'article 28 quater BD relatif aux modalités de relogement des locataires dans le cadre du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU).

Les députés ont également rétabli l' article 28 quinquies , supprimé sur proposition de votre rapporteur, qui oblige les associations locales de locataires à s'affilier à une organisation nationale. Votre rapporteur se réjouit en revanche que l'Assemblée nationale ait voté conforme la suppression de l'article 28 septies , qui ouvrait de manière non raisonnée l'action de groupe dans le domaine du logement social.

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS

S'agissant des modifications de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU , les députés ont rétabli leur texte revenant ainsi sur les dispositions adoptées par le Sénat qui avait souhaité :

- instaurer un contrat d'objectifs et de moyens conclu entre le maire et le préfet qui définirait le taux de logements sociaux que la commune doit atteindre ainsi que l'échéance à laquelle elle doit l'atteindre (art. 29) ;

- compléter la liste des logements pouvant être décomptés afin de prendre en compte les aires permanentes d'accueil des gens du voyage, les places des résidences universitaires des CROUS, et plusieurs dispositifs en faveur de l'accession sociale à la propriété (art. 29) ;

- supprimer , dans un contexte de baisse des dotations, l'aggravation des sanctions financières prononcées à l'encontre des communes carencées en logements sociaux (art. 31 à 31 bis ).

En outre, à l'article 29, l'Assemblée nationale a complété la liste des logements décomptés afin d'y insérer sous certaines conditions les logements du parc privé objet d'un dispositif d'intermédiation locative et elle a précisé qu'en cas de fusion de communes, les dispositions de la loi SRU continueront de s'appliquer sur le territoire de la commune qui était déjà soumise à ces règles dans l'attente d'un inventaire des logements sociaux réalisé sur le territoire de la commune nouvelle.

À l'article 30 , les députés ont précisé que la contribution financière obligatoire de la commune au financement d'opérations de construction de logements sociaux et aux dispositifs d'intermédiation locative ne pourrait être déduite du prélèvement lorsque la commune ne s'est pas acquittée volontairement de ces sommes .

Estimant que le présent projet de loi ne serait pas promulgué au 1 er janvier 2017, ils ont également adopté aux articles 30 et 31 des dispositions permettant d'appliquer rétroactivement dès le 1 er janvier 2017 les nouvelles dispositions des articles L. 302-7, L. 302-9-1 et L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation. Votre rapporteur s'est interrogée sur la compatibilité avec la Constitution d'une application rétroactive de dispositions pouvant être qualifiées de sanction (ex. transfert des droits de réservation aux préfets, augmentation de la contribution de la commune au financement d'opérations de construction de logements sociaux et aux dispositifs d'intermédiation locative, augmentation du potentiel fiscal qui sert de base au calcul du prélèvement).

Les députés ont rétabli l'article 31 bis qui supprime la DSU pour les communes carencées alors même que le gouvernement avait proposé de maintenir la suppression de cet article considérant qu'il contrevenait au principe constitutionnel de libre administration des collectivités et au principe d'égalité de traitement des communes devant la loi. Au même article 31 bis , ils ont prévu que le gouvernement remettrait un rapport au Parlement sur la possibilité de moduler l'aide aux maires bâtisseurs , en méconnaissance de l'article 45 de la Constitution (règle de l'entonnoir). En effet, dans sa décision n° 2014-701 DC du 9 octobre 2014 Loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt , le Conseil constitutionnel a jugé que l'introduction par amendement, postérieurement à la première lecture, d'une disposition relative à la remise d'un rapport méconnaissait la règle de l'entonnoir, même lorsque le sujet de ce rapport correspond au droit substantiel modifié par les dispositions en discussion.

Sur les établissements publics fonciers , outre des modifications rédactionnelles les députés ont adopté à l' article 32 plusieurs précisions. L'extension du périmètre d'un établissement public foncier local (EPFL) sera soumise à l'accord du préfet. L'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ou la commune, fusionné devra se prononcer dans un délai de six mois et non plus trois mois sur son adhésion à l'EFPL. Si l'EPCI, ou la commune, fusionné décide de ne pas adhérer, l'EPFL demeurera compétent pendant deux ans sur les seules parties du territoire de l'EPCI qui étaient déjà dans son périmètre. Les comités régionaux de l'habitat et de l'hébergement (CRHH) seront consultés sur les créations d'établissement public foncier d'État et d'établissement public foncier local. Enfin, les CRHH recevront le bilan des établissements publics fonciers. Votre commission spéciale avait estimé que la communication de ce bilan au CRHH relevait du niveau règlementaire et avait en conséquence soulevé l'irrecevabilité de l'amendement contenant de telles dispositions. Votre rapporteur constate que cette disposition a cependant été introduite en nouvelle lecture et ne peut que s'interroger sur le lien de cette disposition nouvelle avec celles restant en discussion qui portent sur les modalités de création et d'extension des établissements publics fonciers.

C. LES DEMANDES D'HABILITATION À LÉGIFÉRER ET LES MESURES DIVERSES

S'agissant des demandes d'habilitation à légiférer et les mesures diverses, les députés ont adopté plusieurs articles conformes ou avec des modifications n'appelant pas d'observations particulières de votre rapporteur. Ainsi, les députés ont adopté les articles 32 bis A à 32 bis BE relatifs à l'habitat indigne et introduits par le Sénat, conformes ou avec des modifications rédactionnelles ou de coordination. Ils ont cependant méconnu l'article 45 de la Constitution et la règle dite de l'entonnoir en ajoutant à l'article 32 bis BA la remise d'un rapport pour réaliser un état des lieux sur les missions exercées par les services communaux d'hygiène et de santé .

Ils ont également modifié l'article 33 bis AG relatif aux modalités d'exercice de la fonction de syndic de logements dans le parc privé par les organismes HLM afin de porter de 20 % à 30 % la part maximale du chiffre d'affaires généré par les copropriétés du parc privé dans le chiffre d'affaires global de l'activité.

Le Sénat avait supprimé à l'article 33 la majorité des demandes d'habilitations à légiférer par ordonnances afin de modifier directement le droit en vigueur aux articles 33 bis AB à 33 bis AF. Les députés ont poursuivi ce travail en modifiant le droit en vigueur relatif aux ascenseurs et aux plans locaux d'urbanisme. Ils ont adopté conforme l'article 33 bis AB relatif au montant du dépôt de garantie dans le parc social.

Toutefois, votre rapporteur a constaté que plusieurs articles de ce chapitre III, pourtant moins clivants que ceux relatifs aux attributions et aux constructions de logements sociaux, n'ont pas été adoptés conformes, les députés ayant inséré des dispositions nouvelles dont le lien avec les dispositions du projet de loi initial ou avec les dispositions restant en discussion n'est pas avéré et qui semblent ainsi contraires à l'article 45 de la Constitution.

Ainsi, l'Assemblée nationale a réintroduit au sein du titre II des dispositions que le Sénat avait jugées sans lien avec le texte lors de la première lecture et donc contraires à l'article 45 de la Constitution . Tel est le cas du VI de l'article 33 qui concerne la définition de l'intérêt communautaire dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

À l'article 33 bis AC , les députés ont adopté une disposition relative aux caractéristiques de la décence des logements en colocation . Votre rapporteur ne peut que s'interroger sur le lien de cette disposition avec le projet de loi initial qui porte sur la mixité dans l'habitat et sur la construction de logements sociaux et non sur le logement comme l'avait d'ailleurs rappelé Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable devant votre commission spéciale 7 ( * ) . En tout état de cause, le gouvernement ayant choisi d'insérer en nouvelle lecture cette disposition dans un article relatif à la caution de la personne morale en matière de bail, votre rapporteur ne peut qu'émettre des doutes sur le lien de cette disposition nouvelle avec les dispositions du texte restant en discussion .

À l'article 33 bis AD , les députés ont précisé que les honoraires du syndic pour la réalisation de certaines prestations relatives aux frais de recouvrement des charges de copropriété ne peuvent excéder des montants fixés par décret. Votre rapporteur considère que cette disposition nouvelle est contraire à l'article 45 de la Constitution. En effet, un amendement présentant une disposition identique a été déclaré irrecevable en première lecture en application de l'article 45 de la Constitution , votre commission spéciale estimant que cette disposition ne présentait pas de lien avec les dispositions du projet de loi initial relatives aux procédures du mandat ad hoc et de l'administration provisoire applicables aux copropriétés en difficulté.

À l'article 33 bis AE (construction et gestion des résidences universitaires par des organismes HLM), les députés ont adopté outre des modifications rédactionnelles, un paragraphe nouveau instaurant un dispositif expérimental pour une durée de quatre ans autorisant le gestionnaire d'une résidence universitaire qui n'est pas totalement occupée après le 31 décembre de chaque année à louer les locaux inoccupés pour des séjours d'une durée inférieure à trois mois s'achevant au plus tard le 1 er septembre et notamment à des publics reconnus prioritaires pour l'attribution d'un logement social.

De même, les députés ont rétabli l'article 33 bis C dans une nouvelle rédaction sans lien avec les dispositions initiales relatives à la procédure de relogement des ménages bénéficiaires du DALO en Ile-de-France afin de préciser que le financement des diagnostics sociaux serait assuré par le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL).

Ils ont également rétabli l'article 33 bis D relatif à la publicité de certaines informations du registre des syndicats de copropriétaires, que le Sénat avait supprimé aux motifs que cette disposition portait une atteinte disproportionnée à la vie des copropriétaires et dont le lien avec le texte n'était pas avéré.

En nouvelle lecture, l'Assemblée a rétabli, contre l'avis du Gouvernement en commission, la contraventionnalisation de l'infraction d'occupation illégale des halls d'immeubles ( article 33 bis A ), en violation de l'article 37 de la Constitution et des articles 111-2 et 111-3 du code pénal. Cette mesure aurait pour conséquence un affaiblissement de la répression, notamment en rendant impossible le placement en garde à vue des prévenus.

En nouvelle lecture, nos collègues députés ont introduit une réforme des procédures de surendettement en créant un nouveau paragraphe (V) à l'article 33 septdecies . L'insertion de cette disposition s'avère clairement contraire à la règle constitutionnelle de l'entonnoir , l'Assemblée nationale ne l'ayant pas traitée en première lecture et le Sénat l'ayant rejetée 8 ( * ) .

Par ailleurs, les députés ont clairement marqué leur désaccord avec le Sénat soit en réécrivant entièrement certains articles, soit en supprimant des articles insérés par le Sénat.

Ainsi, les députés ont réécrit l'article 33 bis AF relatif au contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières ainsi que l'article 33 bis AA qui prévoyait que soit réputée écrite dès la conclusion du contrat la clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit du bail en cas d'inexécution des obligations du locataire résultant de troubles de voisinage constatés par décision passée en force de chose jugée. Ils ont décidé dans cet article 33 bis AA que le contrat de bail serait résilié de plein droit, à la demande du bailleur, lorsque le locataire ou un des occupants du logement a fait l'objet d'une condamnation passée en force de chose jugée pour trafic de stupéfiants et que ces faits se sont déroulés dans le logement, l'immeuble ou le groupe d'immeubles.

L'article 33 octies AA (modalités de facturation de l'eau dans les logements-foyers) introduit par le Sénat a quant à lui été supprimé.

D. LES DISPOSITIONS EN MATIÈRE D'URBANISME

En matière d'urbanisme, l'Assemblée nationale a repris certaines dispositions introduites par le Sénat.

La modification directe de la législation sur les schémas de cohérence territoriale, en lieu et place de le la demande d'habilitation qui figurait initialement au 11° de l'article 33, a ainsi été confirmée par les députés.

De même les députés ont repris, et même étendu, les assouplissements que votre rapporteur avait proposés à l'article 33 bis E concernant divers délais d'évolution des plans locaux d'urbanisme. Les plans d'occupation des sols (POS) et les plans locaux d'urbanisme (PLU) infracommunautaires maintenus en vigueur sur les territoires des EPCI engagés dans une démarche de PLU intercommunal pourront ainsi continuer à produire leurs effets, et même à évoluer, jusqu'au 31 décembre 2019. Les députés ont même très opportunément fait disparaître la notion de « grenellisation des PLU », très insécurisante pour les collectivités territoriales concernées.

En revanche, les députés ont pris une position très éloignée de celle du Sénat sur plusieurs enjeux urbanistiques majeurs .

Ils ont remplacé la demande d'habilitation sur la législation des PLU, qui figurait au 10° de l'article 33, par des modifications du droit en vigueur qui suppriment tout droit d'opposition des communes au transfert de la compétence PLU en cas de fusion mixte :

- le Sénat souhaitait l'introduction d'un droit d'opposition pérenne, à l'image du mécanisme de minorité de blocage figurant à l'article 136 de la loi ALUR. La demande d'habilitation se contentait d'introduire un droit d'opposition transitoire permettant d'écarter le transfert de la compétence pour cinq ans. Le texte voté par les députés acte pour sa part le transfert automatique et définitif de la compétence PLU en cas de fusion mixte, accompagné d'un régime transitoire permettant de maintenir, modifier et même réviser les PLU intracommunautaires pendant cinq ans. C'est donc la position la plus éloignée de celle défendue par le Sénat qui prévaut ;

- sur la question des EPCI de grande taille et sur la possibilité d'y autoriser la mise en place de plusieurs PLU intercommunaux, les députés ont également inséré des dispositions plus contraignantes que celles que souhaitait le Sénat. Cette faculté n'est en effet ouverte qu'aux EPCI de plus de 100 communes, là où le projet d'habilitation visait un mécanisme relativement souple permettant, en fonction des particularités des territoires, d'autoriser plusieurs PLU à partir d'un seuil plus bas, voire même laissé à l'appréciation du préfet.

Les députés ont enfin supprimé la disposition qui permettait de maintenir en vigueur jusqu'à la fin de l'année 2017 les POS en cours de révision, à condition que le débat sur le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du futur PLU ait lieu avant le 24 mars 2017.

E. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX GENS DU VOYAGE

La réforme du régime applicable aux gens du voyage (articles 33 undecies à 33 sexdecies A et articles 48 à 50) proposée par le Sénat n'ont pas été examinée sur le fond par nos collègues députés, qui ont souhaité réintroduire le texte qu'ils avaient voté en première lecture .

Les dispositions adoptées par le Sénat permettaient pourtant de répondre à des difficultés concrètes rencontrées sur le terrain et de clarifier la « loi Besson » du 5 juillet 2000.

Seuls trois apports du Sénat ont été conservés :

- la suppression de l'article 33 duodecies qui permettait d'accroître les pouvoirs de coercition du préfet en qualifiant les aires d'accueil des gens du voyage en projet d'intérêt général ;

- la consultation des EPCI lors de l'élaboration des schémas départementaux d'accueil et d'habitat des gens du voyage (article 33 quaterdecies ) ;

- la compétence de coordination du préfet lors des grands passages (même article 33 quaterdecies ). En pratique, cette compétence sera toutefois très difficile à mettre en oeuvre, l'Assemblée nationale ayant supprimé le mécanisme d'information des préfets et des maires voté par le Sénat.

Par ailleurs, votre rapporteur réitère ses doutes sur la constitutionnalité du dispositif de consignation des fonds des collectivités territoriales 9 ( * ) .

De même, la suppression du dispositif de la commune de rattachement (article 48) pourrait mettre en difficulté notre système électoral.

III. TITRE III : POUR L'ÉGALITÉ RÉELLE

A. LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE

De nombreux points d'accords ont été trouvés sur la fonction publique, notamment en ce qui concerne le troisième concours (article 36) , l'expérimentation d'un nouveau contrat permettant aux jeunes de préparer les concours administratifs (article 36 septies ) ou les conditions de gestion des fonctionnaires territoriaux momentanément privés d'emploi (article 36 nonies ) . Votre rapporteur se félicite également que l'Assemblée nationale n'ait pas réintroduit la disposition prévoyant la présence de parlementaires au sein des jurys de l'ENA (article 36 octies ) , disposition qui aurait été inapplicable en pratique.

Les désaccords qui demeurent sont toutefois fondamentaux et expriment des conceptions différentes de la fonction publique.

Ainsi, nos collègues députés ont souhaité réformer l'ensemble des concours en prévoyant des mises en situation professionnelle dans un article qui portait uniquement sur l'intégration du service civique dans la fonction publique (article 12 quinquies ) .

L'Assemblée nationale a réintroduit, en le modifiant, l'article 36 bis B relatif à la collecte des données des candidats à un concours administratif. Comme en première lecture, votre rapporteur s'interroge grandement sur la constitutionnalité de ce dispositif :

- le périmètre des données concernées est potentiellement très large et concerne l'ensemble des candidats à un concours administratif ;

- l'objectif - mieux connaître le profil des fonctionnaires - aurait pu être atteint par des dispositifs plus souples et notamment par un recueil de données effectué sur la base du volontariat ;

- les conditions de conservation de ces informations ne sont pas précisées, l'article 36 bis B renvoyant à un décret en Conseil d'État, disposition qui semble d'ailleurs entachée d'incompétence négative.

La version initiale de l'article prévoyait, pour mémoire, une conservation au sein du dossier des fonctionnaires, ce qui reste implicitement permis en l'état du texte alors qu'il s'agirait d'une pratique contraire au droit à la vie privée comme l'a rappelé le Conseil d'État dans son avis n° 390136 du 11 juin 2015 sur la déontologie des fonctionnaires.

Enfin, les députés ont prévu un « quota » de contrats PACTE au sein des trois fonctions publiques (article 36 bis C) . Ces contrats devraient représenter au moins 20  % du nombre total de recrutement sans concours des agents de catégorie C.

Cette disposition apparaît doublement inconstitutionnelle :

- elle a été insérée en nouvelle lecture au mépris de la règle de « l'entonnoir » . En effet, L'article 36 bis C tel que voté en première lecture ne traitait que des personnes les éligibles au contrat PACTE et pas des obligations des employeurs publics, un amendement reprenant la présente disposition ayant été écarté par le Sénat 10 ( * ) ;

- elle est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales. En effet, si ce quota n'est pas rempli, l'administration ne pourrait plus recruter d'agents de catégorie C sans concours.

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DU TRAVAIL ET AU HAUT CONSEIL À L'ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

Si l'Assemblée nationale a rétabli les dispositions bavardes supprimées par le Sénat à l'article 35 relatif à l'insertion des actions en faveur de l'amélioration de la maîtrise de la langue française dans le cadre de la formation professionnelle, elle a toutefois suivi la position de la Haute-assemblée en maintenant la suppression des dispositions relatives aux langues régionales. Votre rapporteur avait souligné le risque de discrimination que soulevait cet ajout et se félicite donc de la sagesse des députés.

Suivant la position du Sénat, l'Assemblée a également maintenu la suppression de l'article 61 concernant la portabilité du lundi de Pentecôte, dont la rédaction était incompatible avec la dernière loi sur le travail.

Les députés ont toutefois rétabli l'article 61 bis , instituant une obligation de formation à la non-discrimination à l'embauche pour tous les employés chargés du recrutement au moins une fois tous les cinq ans. À l'initiative du Gouvernement, cette obligation ne concernera toutefois que les entreprises de plus de 300 salariés et non celles de plus de 50 salariés.

Contrairement aux arguments avancés par votre rapporteur sur l'absence de portée de cette mesure et contre l'avis de sa commission spéciale, l'Assemblée nationale a rétabli l'article 61 ter qui confie aux préfets la mission d'identifier les potentiels d'embauche par bassins d'emploi en associant à la fois Pôle emploi et l'Association pour l'emploi des cadres (Apec) afin d'assurer l'inclusion économique des personnes résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Enfin, l'Assemblée nationale a confirmé la simplification de la rédaction, accomplie par le Sénat, de l'article 43 instituant le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Les députés, à l'initiative du Gouvernement, ont toutefois considéré que la saisine du Haut-conseil ne pouvait intervenir que du fait du Premier ministre et du ministre chargé des droits des femmes et non de tout ministre intéressé.

C. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DES DISCRIMINATIONS

En nouvelle lecture, à l' article 37 modifiant la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, l'Assemblée nationale a rétabli à l'identique la rédaction de l'article 37 qu'elle avait adoptée en première lecture.

Votre commission spéciale déplore que l'Assemblée nationale n'ait pas estimé nécessaire d'évaluer les améliorations apportées à la loi du 29 juillet 1881, en particulier celles non contestées par le Gouvernement à savoir : la simplification de la détermination du délai entre la délivrance d'une citation et l'audience de comparution en supprimant la règle complexe des myriamètres et la fin de l'automaticité de la fin des poursuites en cas de désistement du plaignant, ce qui aurait permis d'éviter des plaintes abusives lancées contre la liberté d'expression.

Elle regrette particulièrement que l'Assemblée nationale, qui a accepté sans changement les modifications majeures apportées à la loi du 29 juillet 1881 proposées par le Gouvernement, n'ait pas tenu compte de la position de la commission spéciale quant au risque constitutionnel, au regard notamment des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et du droit à un recours effectif.

Elle rappelle enfin que la proposition de réparer les abus de la liberté d'expression sur le fondement de l'article 1240 du code civil est conforme tant à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qu'à la volonté de la Cour européenne des droits de l'homme de sanctionner ces comportements par la voie du droit civil. 11 ( * )

À l' article 38 , l'Assemblée nationale a rétablit une rédaction prévoyant deux clauses générales d'aggravation des peines liées à des motifs racistes ou sexistes et ajoutant un nouveau motif d'aggravation à raison de « l'identité de genre ». Comme en première lecture, votre commission spéciale rappelle que cette technique légistique ne permet pas de déterminer de façon précise et claire les infractions aggravées, ce qui est contraire au principe constitutionnel de légalité en matière pénale 12 ( * ) , au principe de clarté de la loi pénale, qui découle de la combinaison de l'article 34 de la Constitution et de l'article 8 de la déclaration des droits de l'homme, mais également contraire à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi , qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, qui impose au législateur « d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ». Or ni les notions de « prétendue race » ou « d'identité de genre », ni les clauses générales d'aggravation ne répondent à l'impératif de prévisibilité et de précision de la loi pénale . Enfin, l'extension démesurée de l'aggravation des peines potentiellement applicables à toutes les infractions a pour conséquence d'aggraver, par exemple, des infractions routières précédées d'une injure raciste, sans que celle-ci ne soit nécessairement en lien avec l'infraction aggravée. Ces conséquences imprévisibles sont manifestement disproportionnées et donc contraire au principe de nécessité des peines .

Semble également contraire au principe de nécessité des peines, mais également au principe de légalité en matière pénale l'article 39 bis rétabli par l'Assemblée nationale, créant un délit de discrimination pour faits de bizutage, sans qualifier les distinctions opérées, sans qu'il soit recherché le bien-fondé de celle-ci ou qu'il ne soit nécessaire de rapporter la preuve d'un traitement défavorable infligé à la personne.

À l'article 38 ter , l'Assemblée nationale n'est pas revenue sur la rédaction 13 ( * ) qu'elle avait adoptée en première lecture qui vise, notamment, à créer un nouveau délit de « négation, minoration ou banalisation » des crimes contre l'humanité. Le Sénat n'avait pas suivi votre commission spéciale, qui avait exprimé de sérieuses réserves sur ce sujet.

L'Assemblé nationale n'a pas pris en compte les critiques du Sénat quant aux articles 38 quater et 39, qui ne permettent plus notamment de conditionner une action en justice d'une association pour poursuivre un délit de presse à l'accord de la victime : outre que les termes retenus ne répondent pas à l'exigence de clarté de la loi, ils élargissent de manière disproportionnée les poursuites qui pourraient être engagées.

Votre commission relève néanmoins que les articles 38 bis, 38 quinquies, qui pénalise le fait d'annoncer publiquement la prise en charge d'amendes, et 40 bis ont fait l'objet d'une adoption conforme.

Sans surprise, l'Assemblée nationale a également rétabli la rédaction qu'elle avait adoptée en première lecture sur l'ajout de la notion d'identité de genre, tant en tant que critère de discrimination à l'article 41, qu'à l'article 57 bis . Votre rapporteur maintient les objections qu'elle avait formulées sur ces deux articles ainsi que ses réserves sur la constitutionnalité de ce concept.

L'Assemblée nationale a réintroduit , en le modifiant, l'article 42 relatif au testing au droit civil. Les rapporteurs ont toutefois admis que cette disposition était satisfaite par le droit en vigueur 14 ( * ) , ce qui confirme son caractère superfétatoire.

Elle est revenue sur plusieurs arbitrages rendus lors de la loi « Justice du XXI ème siècle » promulguée il y a moins d'un mois :

- en prévoyant, sans étude d'impact préalable, un fonds de soutien à l'action de groupe (article 63) que les magistrats seront bien en peine de mettre en oeuvre ;

- en permettant aux associations d'initier une action de groupe dans le monde de l'entreprise alors que cette prérogative était jusqu'alors réservée aux syndicats (article 60) .

Nos collègues députés ont également sollicité plusieurs rapports au Gouvernement avant le 31 mars 2017 (articles 54 et 54 bis ) et ont adopté une mesure contraire au droit communautaire de la commande publique (article 60 bis ) 15 ( * ) .

D. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'AUDIOVISUEL

Votre rapporteur se félicite que les députés aient entendu raison et supprimé en conséquence l'article 45 , relatif à l'introduction d'un quota de langues régionales au sein de la proportion d'oeuvres musicales d'expression française devant être diffusées par les stations de radio.

Si la rédaction du Sénat à l'article 44 B a été conservée, les députés l'ont modifiée pour y réintroduire la notion d'« image des femmes ». Votre commission spéciale y avait préféré celle, juridiquement plus pertinente, de dignité de la personne.

En revanche, les articles 44 A et 44, qui portent tous deux sur la représentation dans les médias audiovisuels de la « diversité de la société française » et qui avaient été supprimés par le Sénat, ont été rétablis par l'Assemblée nationale . Les réserves formulées par le Sénat à l'article 44 ont été en partie entendues, puisque les députés n'ont pas rétabli son 2° qui imposait aux chaînes de télévision de transmettre au CSA des indicateurs quantitatifs sur la représentation, dans leurs programmes, de la « diversité de la société française ». Votre rapporteur s'interroge sur la légitimité de cette démarche au regard des principes fondamentaux de notre droit constitutionnel, si cet objectif devait devenir contraignant .

E. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ALIMENTATION

En nouvelle lecture, les députés ont rétabli les articles 47 sexies et 47 septies , dont les dispositions reprennent celles qui figuraient dans la proposition de loi visant à favoriser l'ancrage territorial de l'alimentation , adoptée en première lecture par le Sénat le 19 mai 2016 et qui n'a pas été inscrite depuis en deuxième lecture à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Malgré les efforts sémantiques déployés par les députés pour rattacher la question de l'alimentation durable aux notions d'égalité et de citoyenneté, ces dispositions sont dépourvues de lien, même indirect, avec projet de loi initial ; en conséquence, ce dispositif apparaît clairement comme un cavalier législatif.

F. LES DISPOSITIONS DIVERSES

Des dispositions sans lien, même indirect, avec le texte ou contraires à l'entonnoir ont été adoptées par nos collègues députés au sein du titre III :

- l'article 68 prohibant les fessées données par les parents à leurs enfants (aucun lien, même indirect, avec la version initiale du présent projet de loi) ;

- l'alinéa 2 de l'article 56 ter qui étend cet article aux conjoints de Français détenteur d'une carte de résident alors que cette disposition concernait, en première lecture, uniquement le cas du regroupement familial (entonnoir).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 6 décembre 2016, la commission spéciale a examiné le rapport et le texte sur le projet de loi n° 148 (2016-20174) relatif à l'égalité et à la citoyenneté.

M. Jean-Claude Lenoir , président . - Notre collègue Louis Pinton est brutalement décédé le jeudi 17 novembre à quelques pas du Sénat, avant la séance des questions au gouvernement. Son décès nous a affligés. Son éloge funèbre sera prononcé en séance publique par Gérard Larcher, dont il était proche, mais je voulais lui rendre un bref hommage au début de la réunion de notre commission spéciale, car il en a été un membre apprécié et assidu, en particulier lors des réunions d'élaboration du texte début septembre, où nous souhaitions une forte participation.

Louis Pinton était une figure politique du département de l'Indre, dont il a présidé le conseil général de 1998 à 2016. Il était né dans un village creusois très voisin de l'Indre, et a accompli sa carrière dans le canton de Neuvy-Saint-Sépulchre, et dans la jolie commune d'Orsennes dont il fut maire. Vétérinaire de métier - comme le président Larcher - il était membre de la commission des affaires sociales, non par hasard mais parce qu'il l'avait demandé. C'était un humaniste engagé, qui a beaucoup travaillé sur des textes d'intérêt social. Il est remplacé par Frédérique Gerbaud, fille de notre ancien collègue François Gerbaud, qui s'est fait connaître à la télévision, puis à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Je vous propose d'observer quelques instants de recueillement.

( Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence )

Il est parfois cruel de présider une commission : j'ai rendu un hommage similaire à Michel Houel devant la commission des affaires économiques aujourd'hui même.

Nous examinons à présent le projet de loi « Égalité et citoyenneté » en nouvelle lecture. L'horaire inconfortable s'explique par le bouleversement de l'ordre du jour à la suite de la fin rapide du débat sur le projet de loi de finances : la commission des affaires sociales et la commission des affaires économiques ont dû se réunir cet après-midi pour examiner le projet de loi montagne, et également la proposition de loi relative au délit d'entrave à l'IVG en ce qui concerne la commission des affaires sociales, deux textes qui viennent plus tôt que prévu en séance publique.

Nos deux rapporteurs vont nous dire dans un instant leur avis sur le projet de loi Égalité et citoyenneté tel qu'il ressort de la nouvelle lecture de l'Assemblée. L'échec de la commission mixte paritaire ne laissait pas entendre que les députés jugeaient possible un compromis sur les sujets importants, ce que la majorité sénatoriale a vivement regretté. Le projet qui nous revient de l'Assemblée comporte encore 146 articles en discussion. L'Assemblée n'a adopté que 39 articles dans la rédaction du Sénat. Elle a néanmoins maintenu 23 suppressions que nous avions effectuées, preuve que nous avons fait oeuvre utile en dénonçant de nombreux articles additionnels aberrants ou sans lien avec le projet de loi.

Mme Françoise Gatel , rapporteur . - Louis Pinton avait siégé à la commission des affaires sociales la veille, ou le matin même, de son décès. J'avais eu un échange avec lui sur le projet de loi « Égalité et citoyenneté », et il m'avait ensuite fait parvenir un petit mot citant De la démocratie en Amérique , de Tocqueville.

M. Jean-Claude Lenoir , président . - Un auteur de la Manche !

Mme Françoise Gatel , rapporteur . - Je méditerai longtemps, sans doute, cet extrait.

Lors de la réunion de la commission mixte paritaire du 25 octobre, les désaccords entre l'Assemblée et le Sénat se sont révélés trop forts pour s'entendre sur un texte commun. J'avais été assez choquée par les propos du rapporteur général Razzy Hammadi qui a regretté « le temps perdu pour un résultat dont nous connaissions l'issue dès les premières heures du débat » et qui a pris prétexte de l'échec de la commission mixte paritaire pour exprimer la nécessité « d'envisager une réforme de la procédure parlementaire ». À mon avis, si réforme il devait y avoir, il faudrait d'abord supprimer la procédure accélérée utilisée si souvent par le Gouvernement - et encore sur le délit d'entrave à l'IVG -, qui empêche un examen approfondi des projets de loi et fait obstacle à la recherche d'un accord.

Il conviendrait aussi que la majorité gouvernementale ait l'honnêteté de reconnaître que, dès le départ, ce texte n'avait pas vocation à rechercher des solutions pérennes dans un esprit de consensus, mais à permettre à une gauche désarticulée et atomisée d'esquisser un signe de ralliement à quelques mois des élections présidentielles. Nous ne pouvons que regretter cette situation, alors que chacun d'entre nous partage l'objectif initial : refaire société dans un contexte, indiscutablement, de délitement du lien social.

Les apports du Sénat ont souvent été rayés d'un trait de plume, sur des arguments de principe qui nous semblent parfois bien éloignés du pragmatisme qui nous est cher. Dans ce contexte où la volonté de consensus est peu manifeste, il ne nous paraît pas utile de poursuivre le dialogue et nous proposerons sans doute l'adoption d'une motion tendant à opposer la question préalable.

Je vais toutefois, par acquit de conscience, vous présenter le texte adopté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale, en commençant par les aspects positifs.

D'abord, malgré le Sénat- bashing caractéristique d'une certaine bien-pensance, le Sénat, au moins, débarrasse les projets de loi des nombreuses dispositions non législatives, des rapports plus ou moins utiles ou encore des mesures irréalistes votées dans le feu de l'enthousiasme par nos collègues du palais Bourbon mais qui complexifient et dégradent la loi.

Ainsi, l'Assemblée a suivi le Sénat en confirmant la suppression des articles instaurant une « ardente obligation pour la Nation d'offrir des missions de service civique », d'un rapport sur la faisabilité et l'opportunité d'un développement contraignant des offres de service civique dans les collectivités territoriales, d'un autre sur la possibilité de créer une allocation d'études et de formation pour l'autonomie des jeunes ou encore sur l'expérimentation du service civique obligatoire. Les députés ont également renoncé à instaurer un quota d'oeuvres en langues régionales parmi les oeuvres musicales diffusées par les stations de radio, qui venait bouleverser tout l'édifice de la récente loi sur la création. Il en va de même de l'instauration de quotas fondés sur l'âge dans la composition de chaque conseil économique, social et environnemental régional (CESER) ou de la réduction du seuil de mise en place des conseils de développement fixé récemment par la loi NOTRe. De même, l'Assemblée a renoncé à instaurer la portabilité du lundi de Pentecôte, qui n'avait plus de sens depuis l'adoption de la dernière loi « travail ».

Je regrette néanmoins que tous les articles de ce type - irréalistes, incongrus ou invraisemblables - n'aient pas disparu. La réserve et le service civiques faisaient dès le départ l'objet d'un relatif consensus entre nos deux assemblées et plusieurs dispositions adoptées par le Sénat ont été intégrées par l'Assemblée nationale, telles que l'obligation de formation des tuteurs ou le principe de non-substituabilité de la réserve civique à un emploi ou à un stage, auquel nous étions très attachés. Comme quoi, il arrive que l'Assemblée nationale soit sage...

Trois derniers points de satisfaction : l'accord auquel nous avions abouti avec le Gouvernement lors de la séance publique pour avancer sur la question importante de la mobilité internationale des apprentis ; le maintien de l'essentiel de la rédaction simplifiée de l'article 43 adoptée par le Sénat, qui instaure le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes ; enfin l'Assemblée s'est finalement rangée à l'avis du Gouvernement - et au nôtre - pour supprimer les disposition sur les langues régionales dans la formation professionnelle.

En revanche, il existe des points de sérieuse divergence.

L'Assemblée nationale a rétabli de nombreux articles introduits en première lecture et qui n'ont aucun lien, même indirect, avec le projet de loi initial. Il en est ainsi des dispositions qui reprennent celles de la proposition de loi visant à favoriser l'ancrage territorial de l'alimentation et dont les conséquences pour les collectivités territoriales seront lourdes.

En nouvelle lecture, des dispositions ont également été adoptées au mépris de la règle de l'entonnoir, par exemple aux articles 15 undecies - mise à disposition d'une permanence aux parlementaires par les communes -, 19 septies A - épargne pour le permis de conduire - et 56 ter - extension des dispositifs de délivrance des titres de séjour en cas de violences familiales - sur lequel le Gouvernement partageait la position du Sénat. Le rapport de notre commission détaillera nos doutes quant à constitutionnalité de certains de ces articles.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale n'a pas tenu compte des craintes réelles et fondées émises par le Sénat sur la remise en cause souterraine de l'âge de la majorité légale à 18 ans, sous prétexte de donner de nouveaux droits - non essentiels à la cohésion sociale, pas plus qu'à l'intégration des jeunes - aux mineurs de 16 ans voire moins, avec pour conséquence la suppression de dispositifs essentiels à la protection des mineurs. Ainsi, a été rétabli l'article autorisant un mineur de seize ans à être nommé directeur de publication d'un journal ou d'un support en ligne de communication, avec pour effet gravissime de rendre les jeunes mineurs pénalement et civilement responsables de propos tenus dans la publication, même s'ils ne les ont pas écrits eux-mêmes.

Je regrette également que l'Assemblée nationale ait rétabli la possibilité, pour des associations de jeunes financées quasi exclusivement par des fonds publics, de rémunérer pendant une durée qui peut atteindre six ans leurs dirigeants âgés de moins de trente ans au moment de leur élection. Il s'agit d'un vrai dévoiement de l'engagement associatif.

L'article 15 undecies va créer de nouvelles contraintes pour les communes, qui devront mettre à la disposition des parlementaires, à titre gratuit, « les moyens matériels leur permettant de rencontrer les citoyens ». Chers collègues, rien ne vous empêchera demain de demander à toute commune de votre circonscription de vous prêter un véhicule communal pour aller rencontrer vos électeurs. C'est tendre le bâton pour se faire battre, alors même que la démocratie représentative est de plus en plus contestée !

M. Alain Vasselle . - Ce n'est pas sérieux !

Mme Françoise Gatel , rapporteur . - Quand on parle de moyens matériels sans les définir, cela peut viser un véhicule, mais aussi un ordinateur ou que sais-je encore...

Concernant la fonction publique, nous avons certains points d'accord avec l'Assemblée nationale mais il y a deux divergences majeures. D'abord, l'article 36 bis B organise un fichage des candidats aux concours administratifs et donc un nouveau méga-fichier, qui recensera les origines socioprofessionnelles, familiales et même géographiques. Il sera difficile d'expliquer aux maires que nous allégeons les normes tout en ajoutant des novations à l'intérêt discutable, y compris sur le plan des libertés... Puis, l'article 36 bis C impose aux collectivités territoriales de recruter au moins 20 % de leurs agents de catégorie C au travers des contrats de parcours d'accès aux carrières territoriales, hospitalières et d'État (Pacte). L'État fixe ainsi une injonction aux collectivités, contraire au principe de libre administration. Quid si les communes ne peuvent pas s'y plier ?

Concernant les dispositions qui modifient la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, chacun se souvient des cris d'orfraie que le Sénat a suscités par ses propositions pertinentes. Quoi qu'il en soit, l'Assemblée n'a pas estimé nécessaire d'analyser les modifications apportées par le Sénat, dont certaines étaient pourtant acceptées par le Gouvernement. Je suis choquée par le fait que la position du Sénat soit caricaturée comme liberticide sur la question : c'est bien le Gouvernement qui est responsable des plus profonds bouleversements apportées à la loi du 29 juillet 1881 et c'est bien l'Assemblée nationale qui les a acceptées, sans tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Il est savoureux de constater que, quelques semaines après avoir accusé le Sénat de s'attaquer à la liberté d'expression, au sujet d'un amendement de M. Pillet, cosigné avec M. Richard d'après un rapport qu'il avait rédigé avec M. Mohamed Soilihi, c'est l'Assemblée nationale qui semble désormais vouloir la restreindre avec la proposition de loi que nous examinerons demain sur le délit d'entrave numérique à l'IVG, et en dehors du cadre de la loi de 1881. Quelle ironie !

S'agissant de la lutte contre les discriminations, l'Assemblée nationale souhaite déjà revenir sur la loi sur la Justice du XXI ème siècle, qui a été promulguée il y a moins d'un mois. Un fonds de soutien à l'action de groupe est par exemple créé, alors que le Sénat s'y est toujours opposé, même sous la précédente majorité.

Outre qu'elle a multiplié de manière désordonnée le nombre de critères de discrimination, l'Assemblée a rétabli des circonstances aggravantes générales, des délits, qui portent notamment une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression et qui sont contraires aux principes constitutionnels de légalité des délits et des peines, et de nécessité des peines.

L'Assemblée nationale a rétabli le rôle de chef de file de la région en matière de politique de la jeunesse ainsi que de coordination des politiques d'information. C'est revenir sur la loi NOTRe, tant vantée.

Sur l'éducation, nous avions construit un texte sécurisé, qui instaurait un contrôle annuel obligatoire, afin d'éviter les dérives possibles de la liberté d'enseignement. L'Assemblée n'a conservé de notre travail que quelques modifications d'ordre rédactionnel. Outre les dispositions sans portée normative ou de nature manifestement réglementaire qu'elle a rétablies, trois sujets majeurs de divergence demeurent : sur l'article 14 bis , relatif au contrôle de l'instruction en famille, les députés ne nous ont pas suivis. Sur l'article 14 decies , relatif aux conditions d'ouverture des établissements privés d'enseignement scolaire, je rappelle que le ministère de l'éducation nationale souhaitait pouvoir procéder par ordonnance et instaurer un régime d'autorisation. Nous avions proposé un dispositif sécurisé de déclaration préalable. Je maintiens les réserves que j'avais exprimées quant au bien-fondé et à l'efficacité d'un régime d'autorisation - sans parler de sa conformité à la Constitution. Enfin, les députés ont réintroduit un droit d'accès à la restauration scolaire pour les élèves du premier degré, alors que la décentralisation est à la mode.

Sur ce dernier point, je regrette que la position du Sénat ait été violemment caricaturée par le Gouvernement et sa majorité à l'Assemblée. En décembre 2015 comme en octobre dernier, le Sénat ne s'est pas opposé à ce que la restauration scolaire revête un caractère obligatoire, comme dans le second degré ; bien au contraire, j'ai invité le Gouvernement à le proposer au lieu de transférer aux communes de nouvelles charges financières. De toute évidence, la crispation des députés et du Gouvernement sur ce sujet, comme sur l'ensemble de ce projet de loi, traduit leur préférence, poussée au fétichisme, pour les mesures d'affichage, au détriment de véritables solutions.

Bref, la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale confirme le rejet, par les députés, de ce que nous avons tenté de mettre en oeuvre : un dialogue constructif entre assemblées pour rapprocher nos positions. Nous en prenons acte, avec regret et incompréhension, au vu de l'objectif initial de ce texte, que nous partageons, et qui est de construire une République dans la cohésion sociale.

Mme Dominique Estrosi Sassone , rapporteur . - S'agissant du volet logement et gens du voyage, sans surprise, les députés ont rayé d'un trait de plume les principales modifications que nous avions apportées au projet de loi et rétabli leur texte, qu'ils s'agissent des dispositions relatives aux attributions de logements sociaux pour favoriser la mixité sociale, des modifications apportées à la loi SRU ou encore des dispositions relatives aux gens du voyage.

En matière d'attributions de logement et d'obligations de construction de logements, à l'article 20, le Sénat avait proposé plusieurs modifications afin d'instaurer un dispositif de contractualisation entre les collectivités locales concernées et le préfet pour définir les obligations de mixité sociale, de revenir au projet de loi initial en ne prévoyant pas de substitution automatique du préfet en cas de méconnaissance des obligations par les collectivités locales, les bailleurs et les réservataires. Nous avions supprimé la pré-commission d'attribution dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et exclu les personnes menacées d'expulsion sans relogement de la liste des personnes prioritaires. Nous avions également choisi de maintenir les délégations de contingent préfectoral aux maires.

Sans surprise, les députés sont revenus sur l'ensemble de ces modifications. Ils ont en outre étendu les obligations de mixité sociale aux attributions de logements non réservés ou pour lesquelles l'attribution à un candidat présenté par le réservataire a échoué. Ils ont précisé que les délégations de contingent préfectoral aux communes carencées seraient résiliées de plein droit. Ils ont intégré au sein de cet article 20 les dispositions de l'article 33 bis C qui avaient été supprimées par le Sénat et qui prévoyait qu'en Ile-de-France toutes les questions de relogement relatives aux ménages bénéficiaires du DALO à reloger seraient traitées par le préfet de région.

De même, le Sénat avait souhaité à l'article 22 maintenir certaines prérogatives aux maires : possibilité de créer une commission d'attribution avec voix prépondérante au maire dans les commissions d'attribution. Ici aussi, les députés ont rétabli le projet de loi initial qui retirait aux maires ces prérogatives. En outre, les députés n'ont pas suivi le Sénat qui avait souhaité sur ma proposition et celle du groupe socialiste pérenniser les commissions d'attribution dématérialisées. Après avoir supprimé cette disposition en commission, les députés ont finalement décidé en séance de prolonger l'expérimentation de trois années supplémentaires.

S'ils ont conservé à l'article 24 la possibilité de choisir le champ d'application du dispositif de location voulue conformément à la rédaction du Sénat, ils ont en revanche rétabli la mesure de publicité des logements vacants des organismes HLM avant le 1 er janvier 2020.

À l'article 25, ils ont rétabli la collecte du numéro INSEE par les bailleurs sociaux, alors même que le Sénat l'avait supprimée en raison des réserves exprimées par la CNIL.

Les députés ont également rétabli l'article 28 quinquies , supprimé sur ma proposition, qui oblige les associations locales de locataires à s'affilier à une organisation nationale.

S'agissant des modifications de la loi SRU, le Sénat avait souhaité instaurer un contrat d'objectifs et de moyens conclu entre le maire et le préfet et compléter la liste des logements pouvant être décomptés au titre de l'article 55 de la loi SRU afin de prendre en compte les aires permanentes d'accueil des gens du voyage, les places des résidences universitaires des CROUS, et plusieurs dispositifs en faveur de l'accession sociale à la propriété (art. 29). Le Sénat avait voulu supprimer, dans un contexte de baisse des dotations budgétaires, l'aggravation des sanctions financières prononcées à l'encontre des communes carencées en logements sociaux (art. 31 à 31 bis ). Les députés sont revenus sur l'ensemble de ces propositions. En outre, à l'article 29, ils ont complété la liste des logements décomptés afin d'y insérer les logements du parc privé objet d'un dispositif d'intermédiation locative et ils ont précisé qu'en cas de fusion de communes, les dispositions de la loi SRU continueront de s'appliquer sur le territoire de la commune qui était déjà soumise à ces règles dans l'attente de l'inventaire des logements sociaux sur le territoire de la commune nouvelle.

À l'article 30, ils ont précisé que la contribution financière obligatoire de la commune au financement d'opérations de construction de logements sociaux et aux dispositifs d'intermédiation locative ne pourrait être déduite du prélèvement lorsque la commune ne s'est pas acquittée volontairement de ces sommes.

Aux articles 30 et 31, estimant que le texte ne serait pas promulgué au 1 er janvier 2017, les députés ont adopté une disposition permettant d'appliquer rétroactivement, dès le 1 er janvier, les nouvelles dispositions qui prévoient notamment le transfert des droits de réservation aux préfets, ou encore les nouvelles sanctions comme l'augmentation du potentiel fiscal ou encore les nouvelles règles d'exonération pour les communes bénéficiant de la DSU.

Les députés ont rétabli l'article 31 bis qui supprime la DSU pour les communes carencées, contre l'avis du Gouvernement qui considérait que cet article méconnaissait le principe constitutionnel de libre administration des collectivités et le principe d'égalité de traitement des communes devant la loi.

Un point positif : les dispositions relatives à l'habitat indigne ont été adoptées conformes ou avec quelques modifications rédactionnelles ou de coordination.

Le Sénat avait supprimé à l'article 33 la majorité des demandes d'habilitations à légiférer par ordonnances afin de modifier directement le droit en vigueur. Les députés ont poursuivi ce travail en modifiant le droit en vigueur relatif aux ascenseurs et aux plans locaux d'urbanisme. Cependant, je note qu'une partie des dispositions autres que les attributions et la loi SRU, pourtant moins clivantes, n'ont pas été adoptées conformes. En effet, les députés ont complété plusieurs articles avec des dispositions nouvelles dont le lien avec les dispositions restant en discussion n'est pas avéré et qui me semblent contraires au dispositif constitutionnel de l'entonnoir. Je vous donnerai quatre exemples. Ainsi, ils ont adopté dans l'article 33 bis AC relatif à la caution de la personne morale en matière de bail, une disposition relative aux logements en colocation. Deuxième exemple : à l'article 33 bis AD relatif à la procédure du mandat ad hoc et de l'administration provisoire applicables aux copropriétés en difficulté, ils ont adopté des dispositions relatives aux honoraires du syndic pour la réalisation de certaines prestations relatives aux frais de recouvrement des charges de copropriété, disposition que nous avions déclarée irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution. Ensuite, à l'article 33 bis C relatif aux pouvoirs du préfet en matière de DALO, ils ont indiqué que le financement des diagnostics sociaux serait assuré par le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL). Dernier exemple : l'insertion à l'article 33 septdecies de la réforme des procédures de surendettement, alors que le Sénat avait rejeté un amendement identique en première lecture.

De même, les règles relatives à la définition de l'intérêt communautaire des EPCI ont été réintroduites alors qu'elles ne présentent aucun lien, même indirect, avec le texte.

Enfin, les députés ont clairement marqué leur désaccord soit en réécrivant entièrement certains articles - tel est le cas de l'article 33 bis AF relatif au contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières -, soit en rétablissant des articles que nous avions supprimés comme l'article 33 bis D relatif à la publicité de certaines informations du registre des syndicats de copropriétaires, soit en supprimant des articles que nous avions introduits comme l'article 28 quater BCA relatif aux modalités de compensation de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) en faveur des logements sociaux, ou encore l'article 28 quater A relatif à la conclusion d'une convention en contrepartie de l'abattement de TFPB, qui avait pourtant été adopté conforme par le Sénat. Cet article a en effet été rouvert par les députés initialement pour assurer une coordination avec la Constitution - procédure assez peu courante mais qui pouvait s'entendre en l'espèce - avant d'être tout simplement supprimé par un amendement de séance du Gouvernement qui souhaitait aménager ces dispositions dans le cadre des projets de loi de finances !

En matière d'urbanisme, l'Assemblée a repris certaines dispositions introduites par le Sénat. La modification directe de la législation sur les schémas de cohérence territoriale, en lieu et place de la demande d'habilitation qui figurait initialement au 11° de l'article 33, a ainsi été confirmée par les députés. De même les députés ont repris, et même étendu, les assouplissements que je vous avais proposés à l'article 33 bis E concernant divers délais d'évolution des plans locaux d'urbanisme. Les POS et PLU infracommunautaires maintenus en vigueur sur les territoires des EPCI engagés dans une démarche de PLU intercommunal pourront ainsi continuer à produire leurs effets, et même à évoluer, jusqu'au 31 décembre 2019. Les députés ont même très opportunément fait disparaître la notion de « grenellisation des PLU », très insécurisante pour les collectivités territoriales concernées.

En revanche, les députés ont pris une position très éloignée de celle du Sénat sur plusieurs enjeux urbanistiques majeurs. Ils ont remplacé la demande d'habilitation sur la législation des PLU, qui figurait au 10° de l'article 33, par des dispositions « en dur » qui suppriment tout droit d'opposition des communes au transfert de la compétence PLU en cas de fusion mixte. Le Sénat souhaitait l'introduction d'un droit d'opposition pérenne, à l'image du mécanisme de minorité de blocage figurant à l'article 136 de la loi ALUR. La demande d'habilitation se contentait d'introduire un droit d'opposition transitoire permettant d'écarter le transfert de la compétence pour cinq ans. Le texte voté par les députés acte pour sa part le transfert automatique et définitif de la compétence PLU en cas de fusion mixte, accompagné d'un régime transitoire permettant de maintenir, modifier et même réviser les PLU intracommunautaires pendant cinq ans. C'est donc la position la plus éloignée de celle défendue par le Sénat qui prévaut.

Sur la question des EPCI de grande taille et sur la possibilité d'y autoriser la mise en place de plusieurs PLU intercommunaux, les députés ont également écrit des dispositions plus contraignantes que celles que souhaitait le Sénat. Cette faculté n'est en effet ouverte qu'aux EPCI de plus de 100 communes, là où le projet d'habilitation visait un mécanisme relativement souple permettant, en fonction des particularités des territoires, d'autoriser plusieurs PLU à partir d'un seuil plus bas, voire même laissé à l'appréciation du préfet.

Les députés ont enfin supprimé la disposition qui permettait de maintenir en vigueur jusqu'à la fin de l'année 2017 les POS en cours de révision, à condition que le débat sur le PADD du futur PLU ait lieu avant le 24 mars 2017.

La réforme du régime applicable aux gens du voyage que nous avions proposée n'a manifestement pas été examinée par les députés, qui ont souhaité réintroduire en bloc le texte qu'ils avaient voté en première lecture. Notre rédaction permettait pourtant de répondre à des difficultés concrètes rencontrées par les élus locaux et visait à clarifier la loi Besson du 5 juillet 2000. Dommage que les députés n'aient pas écouté les retours du terrain.

Enfin, je souhaite réitérer mes doutes sur la constitutionnalité du dispositif de consignation des fonds des collectivités territoriales.

En conclusion, nos divergences avec l'Assemblée sur le titre II sont profondes. Au regard du texte voté par les députés en nouvelle lecture, il est certain que la dernière lecture ne permettra pas de trouver de nouveaux points d'accord. Dès lors, je vous propose de ne pas poursuivre le dialogue et c'est pourquoi je vous propose l'adoption d'une motion tendant à opposer la question préalable.

M. Jean-Claude Lenoir , président . - Merci beaucoup pour votre travail.

M. Jacques-Bernard Magner . - Nous avons entendu ce soir deux rapporteurs véhéments contre l'Assemblée nationale. Elles contestent la volonté de parvenir à un consensus de la part de l'Assemblée mais, elles non plus, n'en ont pas beaucoup manifesté. Je les renvoie dos à dos. La commission mixte paritaire qui s'est tenue dans cette salle a révélé ces divergences. L'Assemblée a fait son travail en reprenant son texte, dont des articles rejetés par le Sénat, parfois sans débat au titre de l'article 45 de la Constitution.

La question préalable interdit, une fois de plus, tout débat. Cela devient une coutume ! Nous n'avons pas pu débattre du projet de loi de finances, ni du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont la situation, pourtant, s'améliore.

Mme Sophie Primas . - De bons petits soldats !

M. Jacques-Bernard Magner . - Le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté est un beau projet. Malheureusement, la question préalable devient un mode de fonctionnement au Sénat ; je le regrette. L'affaiblissement de la Haute assemblée est perceptible et provoque l'incompréhension de nos concitoyens qui se demandent pourquoi elle ne se saisit plus des questions importantes. Elle en fera les frais - je sais que la droite envisage de réduire le nombre de sièges... Mesdames et messieurs de la majorité, vous faites de la politique politicienne et cherchez à gommer les divergences de votre primaire en rejetant en bloc l'action du Gouvernement. Que fait-on ici au Sénat, ce soir ? Le groupe socialiste ne prolongera pas plus longtemps un débat que la question préalable tranchera rapidement.

M. Jean-Pierre Sueur . - J'ai entendu les plaidoyers des deux rapporteurs. Notre situation est banale, fréquente. J'ai longtemps siégé à l'Assemblée nationale, puis au Sénat. Chacune des deux assemblées doit faire son travail. La Constitution dispose qu'en cas d'échec de la commission mixte paritaire, une nouvelle lecture a lieu à l'Assemblée nationale. Le Sénat l'examine ensuite. En dernière lecture, l'Assemblée nationale peut reprendre son texte, ou certains articles adoptés par le Sénat. En adoptant une question préalable - ce qui devient une coutume - le Sénat décide, pour cette partie du travail parlementaire, de ne pas assumer la tâche que lui assigne la Constitution. J'entends certains dire que cela ne sert à rien. Personne n'est obligé de devenir parlementaire !

Pourquoi, en outre, considérer qu'il n'y a pas lieu de débattre de ce texte en nouvelle lecture, et ne pas l'avoir décidé en première lecture ?

Mme Primas a dit tout à l'heure que le groupe socialiste était constitué de soldats. On ne doit pas être traité ainsi.

Le projet de loi a été modifié, heureusement, par le Sénat en première lecture. Puisque la Constitution prévoit une nouvelle lecture, il revient au Sénat de dire ce qu'il pense du texte de l'Assemblée, à moins d'abdiquer du rôle que lui attribue la Constitution.

La question préalable a scandaleusement été adoptée sur le projet de loi de finances. Nous recevons beaucoup de propositions d'amendements de citoyens et de groupes et sommes contraints de leur répondre qu'il n'est pas possible de les prendre en compte - bien que certains de la majorité suggèrent, de façon absurde, de les déposer à l'occasion du projet de loi de finances rectificative.

Pourquoi une question préalable sur le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté ? Ce choix politique est contraire aux intérêts du Sénat.

J'ai déposé sur ce texte deux amendements. Le premier a été rejeté en première lecture au motif ridicule qu'il n'avait pas de lien direct avec le sujet, alors que d'autres bien plus éloignés ont été acceptés. Il s'agissait de répondre à la demande unanime des associations de victimes d'attentats. Le deuxième porte sur la générosité publique. L'Assemblée nationale a adopté une position meilleure que celle du Gouvernement, mais moins bonne que celle du Sénat. Il faut adopter à nouveau la nôtre. Si nous en débattions, l'Assemblée nationale aurait la possibilité de choisir notre rédaction.

Réfléchissez, chers collègues, au rôle constitutionnel du Sénat.

Mme Agnès Canayer . - Je ne comprends pas les arguments juridiques opposés à la question préalable. Une coutume est une répétition dans le temps. Il ne s'agit là que d'une procédure qui a été utilisée à trois reprises, dans des conditions d'ailleurs très différentes. Le Sénat y a recours en raison d'un blocage politique et du rejet de ses positions constructives. C'est le seul moyen de se faire entendre.

Si la Constitution défend le bicaméralisme, elle ne détermine pas la procédure législative. Le recours à la question préalable est justifié par la défense du Sénat, qui joue parfaitement son rôle. Le Sénat a proposé des avancées sur des sujets essentiels, qui n'ont pas été prises en compte.

M. Jean-Pierre Sueur . - Ce pourrait être le cas pour tous les textes !

Mme Évelyne Yonnet . - L'Assemblée nationale et le Sénat ont un désaccord de fond. Leurs majorités différentes ont des visions opposées. Nul besoin d'épiloguer.

Les questions préalables ne me choquent pas. Néanmoins, je suis étonnée d'en compter trois - sur le projet de loi de finances, le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté - en quinze jours. Le Sénat n'en était pas coutumier, et avait réussi, jusqu'à présent, à travailler avec l'Assemblée nationale sur les textes importants.

Mme Sophie Primas . - Ne nous offusquons pas de la situation. Les divergences sur ce texte sont manifestes et les positions si éloignées qu'elles ne sont pas conciliables.

Le dépôt d'une question préalable découle aussi du comportement, au Sénat en commission mixte paritaire, du rapporteur général de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, qui a traité le travail sénatorial avec beaucoup de mépris, contrairement aux usages.

M. Jean-Claude Lenoir , président . - Je m'associe complètement aux propos de Sophie Primas. J'ai été particulièrement choqué par le comportement de certains collègues députés en commission mixte paritaire, en plus des propos qu'ils ont tenus. Nos deux rapporteurs ont exposé avec précision les raisons de nos choix. Nous n'avons pas échangé d'arguments de fond, mais subi des postures méprisantes à l'égard de la Haute assemblée. Nous avons perdu notre temps. Dont acte. Que les députés profitent de celui qui leur reste. Quant à nous, nous garderons notre lucidité.

Nos rapporteurs considèrent que, faute de volonté de compromis de la part de l'Assemblée nationale, il n'y a pas lieu de poursuivre le dialogue sur ce texte et proposent en conséquence l'adoption d'une motion tendant à opposer la question préalable. Elle sera ainsi rédigée : « En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à l'égalité et à la citoyenneté ».

La commission adopte la motion présentée par Mmes Françoise Gatel et Dominique Estrosi Sassone, rapporteurs, tendant à opposer la question préalable au projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté.

Cette motion sera déposée par nos rapporteurs au nom de la commission spéciale. Elle sera discutée et votée dès après la discussion générale, lundi 19 décembre après-midi. L'adoption de cette motion par le Sénat entraînerait la fin du débat en séance publique.

En revanche, il n'en va pas de même en commission : en application du 1 er alinéa de l'article 42 de la Constitution, il nous faut nous prononcer sur l'ensemble du texte. Compte tenu de la motion que nous venons d'adopter, il n'y a pas lieu d'examiner les articles dans le détail. Par cohérence avec la proposition de nos rapporteurs, je vous propose de rejeter le projet de loi.

Les amendements n° s COM-2, 6, 3, 4, 5 et 1 ne sont pas adoptés.

Le projet de loi n'est pas adopté.

Le débat portera donc en séance sur la version du texte adoptée par l'Assemblée, et c'est à cette version que nous proposons d'opposer la question préalable.

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

ARTICLE 8 BIS

Amendement n° COM-2 présenté par

M. SUEUR

Rédiger ainsi cet article :

I. - Aux deux occurrences du 4° de l'article L. 123-16-2 et au premier alinéa de l'article L. 821-6-1 du code de commerce, les mots : « appel à la générosité publique » sont remplacés par les mots : « un appel public à la générosité ».

II. - Le code de l'éducation est ainsi modifié :

1° Le II de l'article L. 241-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « dans le cadre de campagnes menées à l'échelon national » sont supprimés ;

b) Au même premier alinéa, la première occurrence des mots : « appel à la générosité publique » est remplacée par les mots : « un appel public à la générosité » ;

c) Audit premier alinéa, la seconde occurrence des mots : « à la générosité publique » est remplacée par les mots : « public à la générosité » ;

d) (nouveau) Au deuxième alinéa, les mots : « dans le cadre de ces campagnes » sont remplacés par les mots : « auprès du public » ;

2° Au sixième alinéa de l'article L. 719-13, les mots : « appel à la générosité publique » sont remplacés par les mots : « appel public à la générosité ».

III. - À la première phrase du dernier alinéa de l'article 19-8 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, les mots : « appel à la générosité publique » sont remplacés par les mots : « d'appel public à la générosité ».

III bis . - (Non modifié) À l'intitulé de la loi n° 91-772 du 7 août 1991 relative au congé de représentation en faveur des associations et des mutuelles et au contrôle des comptes des organismes faisant appel à la générosité publique, les mots : « appel à la générosité publique » sont remplacés par les mots : « un appel public à la générosité ».

IV. - L'article 42 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du même II est ainsi modifié :

a) Les mots : « dans le cadre de campagnes menées à l'échelon national » sont supprimés ;

b) La première occurrence des mots : « appel à la générosité publique » est remplacée par les mots : « un appel public à la générosité » ;

c) La seconde occurrence des mots : « à la générosité publique » est remplacée par les mots : « public à la générosité » ;

2° À la fin du deuxième alinéa du II, les mots : « auprès du public » sont supprimés.

V. - (Non modifié) Le cinquième alinéa du III de l'article 140 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie est ainsi modifié :

1° À la première phrase, les mots : « appel à la générosité publique » sont remplacés par les mots : « un appel public à la générosité » ;

2° À la seconde phrase, le mot : « publique » est remplacé par les mots : « du public ».

VI, VII, VIII et IX. - (Supprimés)

OBJET

Il s'agit, par cet amendement, de revenir à la version de l'article adoptée en commission par le Sénat en première lecture, qui présente le plus de garanties éthiques par rapport au recours à la générosité publique.

ARTICLE 30

Amendement n° COM-6 présenté par

M. L. HERVÉ

Supprimer les alinéas 12 et 13

OBJET

Les communes contribuent à la construction de logements sociaux sous diverses formes : fourniture de terrains à titre gracieux ou à l'euro symbolique, viabilisation des terrains mis à disposition, apports des financements nécessaires à la réalisation des opérations et prise en charge des garanties d'emprunts des organismes HLM.

En contrepartie de cette contribution, les communes bénéficient de droits à réservation qui leur permettent de répondre à la demande de leurs habitants ou de leurs agents.

Les maires, relais essentiels des politiques de cohésion sociale, ne doivent pas être affaiblis. Les logements sociaux relevant des contingents municipaux ne sont pas exclusivement réservés aux simples administrés de la commune. Les communes utilisent également leur contingent propre, notamment dans les zones tendues, pour allouer un logement aux agents de l'Etat (directeur d'école, enseignants, agents de la police nationale, agents hospitaliers, agents des douanes, agents des préfectures...).

Transférer les droits à réservation des logements sociaux existants des communes vers l'Etat et suspendre ou modifier les conventions de réservation passées par elle serait contreproductif en matière de production de logements sociaux.

De plus, dans la mesure où les services de l'Etat ont géré pendant de nombreuses années leur contingent en stock et non en flux, dans les zones tendues, les agents bénéficient d'un logement sur le contingent communal dans des délais bien inférieurs à ceux de l'Etat.

Très peu de contrats de mixité sociale, initiés par l'instruction du Premier Ministre de juin 2015, ont été signés à ce jour. Or, ils peuvent être un bon outil de mise en action et d'accompagnement des communes carencées, préférable à des démarches de sanctions.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 33 BIS E

Amendement n° COM-3 présenté par

M. L. HERVÉ

Après l'article 33 bis E

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 174-3 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, si le projet de plan local d'urbanisme est arrêté avant le 27 mars 2017, les dispositions du plan d'occupation des sols restent en vigueur jusqu'à l'approbation du plan local d'urbanisme et au plus tard le 31 décembre 2017. »

OBJET

Cet amendement de replis a pour objet de proroger le délai de validité des POS au delà du 27 mars 2017, soit jusqu'au 31 décembre 2017.

En effet, de nombreuses communes n'ont pas pu mener à terme la procédure de révision de leur POS, du fait notamment des différentes réformes portant sur le contenu des PLU intervenues depuis la loi ALUR (Décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du

livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme ; Loi n ° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt).

En l'absence d'un tel dispositif, les POS deviennent caducs sans remise en vigueur du document antérieur et avec application du règlement national d'urbanisme. Une telle situation serait très préjudiciable pour les communes concernées et notamment contradictoire avec l'objectif du présent projet de loi qui prévoit d'élargir le champ de construction des logements sociaux.

De même, les POS contiennent des mesures d'anticipation, notamment des emplacements réservés au bénéfice d'équipements publics de proximité (petite enfance, culture, sport, transports urbains) qu'il serait dommageable, pour les habitants en général, de rendre automatiquement caduques, lorsque les communes n'ont pas pu conduire leur révision avant le 27 mars 2017.

Par ailleurs, cette disposition va dans le sens de L'article 13 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la Simplification de la Vie des Entreprises (SVE), codifiée à l'article L. 174-5 du code de l'urbanisme, qui permet aux territoires sur lesquels a été prescrit un PLUI de bénéficier d'un report de caducité des POS mais aussi des échéances relatives à la mise en compatibilité avec un document de rang supérieur et à la grenellisation des PLU, sous réserve que :

le débat sur le PADD ait eu lieu avant le 27 mars 2017 et que l'approbation du PLUI intervienne au plus tard le 31 décembre 2019.

C'est pourquoi, cet amendement vise à accorder un délai supplémentaire au delà du 26 mars 2017 aux communes qui sont réellement engagées dans leur révision de POS, étant entendu que le projet de plan local d'urbanisme doit avoir été arrêté avant le 26 mars 2017 pour prétendre à cette prorogation.

Ce délai doit permettre le déroulement de la suite de la procédure (consultation des personnes publiques associées, mise à l'enquête publique, approbation) dans des conditions normales de sécurité juridique.

ARTICLE 47

Amendement n° COM-4 présenté par

M. L. HERVÉ

Supprimer cet article.

OBJET

Cet article reprend la proposition de loi instaurant un droit à l'accès au service de restauration scolaire pour tous les enfants scolarisés, dès lors que le service existe, qui n'est pas de nature à prendre en compte les contraintes réelles des communes en termes de capacités d'accueil et de locaux disponibles.

L'instauration d'un tel droit est dissuasive à la mise en oeuvre de services de restauration scolaire là où il n'en existe pas encore et peut être de nature à désorganiser les services de restauration scolaire alors même que leur fonctionnement ne présente pas de difficultés majeures et que rares sont les élèves ne pouvant finalement pas être accueillis.

Elle peut même inciter un certain nombre de communes à fermer leur service de restauration scolaire, dans un contexte budgétaire tendue, sauf à faire payer davantage les familles (qui paient bien souvient moins d'un quart du coût de revient du repas). La mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires a pu déjà provoquer une hausse de la fréquentation des services de restauration scolaire et l'ajout d'un service le mercredi midi. Il est craint que l'instauration d'un droit général engendre une nouvelle augmentation que les communes ne pourront pas assumer, et que des familles s'en saisissent alors qu'elles assuraient jusqu'alors le repas du midi pour leurs enfants. Ceci pose la question de l'encadrement des enfants, qui devra être revu à la hausse.

En outre, la pertinence de l'articulation entre l'instauration d'un droit général et les écoles maternelles, qui sont légalement facultatives, est posée.

L'octroi d'un tel droit constituerait ainsi un premier pas vers la création d'un service public obligatoire de la restauration scolaire, que l'Etat devrait alors compenser intégralement. Il pourrait s'agir d'une première étape visant ensuite les activités périscolaires dans leur ensemble, ce qui serait inacceptable pour les communes.

Au lieu d'une loi, il serait davantage opportun de prévoir un règlement-type sécurisant l'accès au service de restauration scolaire tenant compte des contraintes des communes.

ARTICLE 47 SEPTIES

Amendement n° COM-5 présenté par

M. L. HERVÉ

Supprimer cet article.

OBJET

Cet article reprend la proposition de loi « Allain » favorisant l'ancrage territorial.

Les maires et présidents d'EPCI compétents sont de plus en plus sensibilisés sur la question de la qualité des plats servis dans les restaurants scolaires notamment à travers l'introduction de produits de proximité voire bio. De nombreux exemples soulignent les efforts fournis depuis plusieurs années. En outre, les élus sont soucieux de valoriser au mieux les producteurs agricoles locaux qui participent au dynamisme économique territorial.

Mais pour favoriser cet élan, les élus sont demandeurs d'un accompagnement de l'Etat pour favoriser l'ancrage territorial dans l'alimentation et non pas de l'introduction de nouvelles normes contraignantes à travers des seuils obligatoires pour l'inclusion de produits relevant de l'alimentation durable dans la composition des repas servis en restauration collective.

L'application en 2020 du seuil de 40% de produits relevant de l'alimentation durable et de 20% de produits bio ou issus de surfaces agricoles en conversion, interroge fortement les élus sur la capacité des producteurs bio français à répondre à une telle demande dans ces délais.

L'accompagnement dont ont besoin les collectivités vise :

-              D'une part, à mieux définir les marchés publics et à mieux utiliser les outils juridiques existants pour privilégier les producteurs de proximité. Leur souhait croissant de faire appel aux circuits courts et de proximité se heurte à un certain nombre de contraintes notamment au regard de la maîtrise délicate des dispositions du code des marchés publics.

-              D'autre part, à favoriser la structuration des filières agricoles locales aptes à répondre de manière pérenne aux besoins des collectivités et pouvant utiliser des critères sécurisés juridiquement. De même, les filières existantes, telles que les grossistes alimentaires, pourraient être accompagnées pour mieux répondre aux enjeux de l'alimentation durable.

C'est pourquoi, il est proposé de supprimer cet article.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 57 BIS

Amendement n° COM-1 présenté par

M. SUEUR

Après l'article 57 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 230-30 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elle peut également autoriser la restitution des autres éléments non analysés en vue d'une inhumation ou d'une crémation. »

OBJET

À la suite, notamment, de catastrophes aériennes, d'accidents collectifs ou d'attentats, de nombreux fragments humains sont relevés au sol. Dans le cadre de l'enquête judiciaire, les éléments les plus importants « nécessaires aux besoins de l'enquête ou de l'information judiciaire » (article 230-28 du code de procédure pénale) sont placés sous scellés puis analysés pour identification et aux fins de restitution aux familles endeuillées.

Toutefois, d'autres fragments, de très petite taille, anatomiquement non reconnaissables ou présumés non identifiables, sont également recueillis, l'ensemble constituant un scellé judiciaire à part entière. Pour autant, ils ne sont pas analysés dès lors que les prélèvements biologiques ont permis d'identifier tous les défunts.

La question se pose alors de la destination de ces restes humains. S'agissant des prélèvements biologiques effectués lors d'autopsies judiciaires, le code de procédure pénale dispose dans son article 230-30 que « sous réserve des contraintes de santé publique et lorsque ces prélèvements constituent les seuls éléments ayant permis l'identification du défunt, l'autorité compétente peut autoriser leur restitution en vue d'une inhumation et d'une crémation ».

Toutefois, cet article ne règle pas la question posée, qui est celle du devenir des fragments qui n'ont pas été nécessaires pour identifier les défunts.

Jusqu'à présent, la destruction comme « simple » déchet biologique de ce scellé était ordonné par le magistrat.

Or, l'article 16-1-1 du code civil, issu de la loi relative à la législation funéraire du 19 décembre 2008, dispose que les restes des personnes décédées doivent être traités « avec respect, dignité et décence ».

Il apparaît comme légitime que les familles puissent en demander la restitution.

Dans tous les cas où l'identification des fragments n'a pas été demandée par les autorités compétentes ou les familles, il doit donc pouvoir être envisagé, afin de respecter les termes de l'article 16-1-1 du code civil précité, d'inhumer ces restes humains, ou de les incinérer et de déposer l'urne dans un columbarium, de les sceller sur un monument funéraire, de construire un monument spécifique ou encore de disperser les cendres dans un jardin du souvenir, éventuellement spécifique ou de les disperser dans la nature.

Le présent amendement a pour objet de procéder à la modification législative qui est nécessaire à cet effet.


* 1 Société à responsabilité limitée

* 2 Société coopérative et participative

* 3 Loi du 1 er juillet 1901 relative au contrat d'association

* 4 Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat

* 5 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 6 Pour mémoire, en première lecture, cette problématique - qui n'avait pas été traitée par l'Assemblée nationale - a fait l'objet de l'amendement 349 rect. ter de notre collègue Joëlle Garriaud-Maylam. Cet amendement a été rejeté par le Sénat et ne figure donc pas dans le texte voté en première lecture.

* 7 Devant la commission spéciale le 12 juillet 2016, Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable a ainsi déclaré : « Ce projet de loi n'est pas un texte sur le logement, même s'il comporte un important volet sur ce sujet. Il porte davantage sur la question de la mixité sociale dans l'habitat. »

* 8 Amendement n° 575 du Gouvernement, rejeté par le Sénat lors de sa séance du 12 octobre 2016.

* 9 Cf. le rapport n° 827 (2015-2016) de première lecture, p. 430 à 432.

* 10 Amendement n° 668 du Gouvernement débattu lors de la séance du 12 octobre 2016.

* 11 Dans une décision du 12 juillet 2016, Reichman c/ France, requête n° 50147/11, la CEDH relevait que « le prononcé même d'une condamnation pénale est l'une des formes les plus graves d'ingérence dans le droit à la liberté d'expression, eu égard à l'existence d'autres moyens d'intervention et de réfutation, notamment par les voies de droit civil ».

* 12 Décision du Conseil constitutionnel n° 80-127 DC, 20 janvier 1981, loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes, considérant n° 7.

* 13 En application de l'article 108 du Règlement de l'Assemblée nationale, elle aurait pu remettre en cause les dispositions adaptées conformes par le Sénat, contre l'avis de la commission spéciale, afin « d'assurer le respect de la Constitution ».

* 14 Rapport n° 4191 de nouvelle lecture de l'Assemblée nationale, p. 267.

* 15 Cet article prévoit, en effet, la prise en compte de la politique menée par l'entreprise en matière de lutte contre les discriminations, même si ce critère n'a pas de lien direct avec le marché, ce qui est contraire à la directive « marchés publics » 2014/24/UE.

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