Rapport général n° 108 (2017-2018) de M. Philippe DALLIER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2017

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N° 108

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2017

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2018 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 6a

COHÉSION DES TERRITOIRES - LOGEMENT ET VILLE (PROGRAMMES 177 « HÉBERGEMENT, PARCOURS VERS LE LOGEMENT ET INSERTION DES PERSONNES VULNÉRABLES », 109 « AIDE À L'ACCÈS AU LOGEMENT », 135 « URBANISME, TERRITOIRES ET AMÉLIORATION DE L'HABITAT » ET 147 « POLITIQUE DE LA VILLE »)

Rapporteur spécial : M. Philippe DALLIER

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 235 , 264 rect. , 266 rect. , 273 à 278 , 345 et T.A. 33

Sénat : 107 et 109 à 114 (2017-2018)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. Sur la mission « Cohésion des territoires » :

1. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, le Gouvernement a fait le choix de créer une nouvelle mission « Cohésion des territoires » , en regroupant les crédits de deux précédentes missions « Égalité des territoires et logement » et « Politique des territoires ». Les crédits consacrés à la politique du logement figurent ainsi de nouveau dans la même mission que les crédits consacrés à la politique de la ville, ce qui est bienvenu compte tenu de leurs liens étroits.

2. Cette nouvelle mission représente 4 % du budget général de l'État, avec 16,5 milliards d'euros inscrits en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement.

Le poids de chaque programme dans la mission est très différent puisque le programme 109 « Aide à l'accès au logement » comprend à lui seul 82 % des crédits de la mission (13,6 milliards d'euros), tandis que les trois programmes de l'ancienne mission « Politique des territoires » ne représentent que 4 % du montant total de l'enveloppe .

3. La mission voit ses crédits de paiement se réduire de 9,5 % et ses autorisations d'engagement de 11,4 % par rapport à 2017 . Elle constitue ainsi l'un des principaux postes d'économie sur le budget général de l'État pour 2018 puisqu'elle est la mission qui connaît la plus forte baisse de crédits, avec une enveloppe qui diminue d'1,7 milliard d'euros en crédits de paiement et de 2,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement.

4. Sur le triennal 2018-2020 , cette tendance se poursuit , avec une baisse de 8,3 % en valeur et de 10,6 % en volume entre 2018 et 2020, tandis que, parallèlement, les crédits du budget général augmenteraient de 3 % en valeur et de 0,5 % en volume.

Entre 2017 et 2020, le budget de la mission « Cohésion des territoires » passerait ainsi de 18,26 milliards d'euros à 15,15 milliards d'euros en valeur et 14,63 millions d'euros en volume.

5. La diminution en 2018 de la dépense publique de l'État est principalement supportée , en volume, par l'aide à l'accès au logement (programme 109). Les autres programmes connaissent des évolutions contrastées .

6. Les dépenses fiscales rattachées à la mission restent importantes puisqu'avec 14,5 milliards d'euros en prévision en 2018, elle représentent l'équivalent de 88 % des crédits budgétaires. Elles sont également globalement dynamiques , en progression de 2 % par rapport à 2017 (+ 300 millions d'euros).

7. S'agissant de la politique du logement du Gouvernement , alors que celui-ci a présenté sa « stratégie » pour le logement en septembre 2017 et annoncé un projet de loi sur ce sujet pour le début de l'année 2018, le projet de loi de finances pour 2018 proposé à l'examen des deux assemblées envoie des signaux contradictoires au secteur de l'immobilier .

D'un côté, il prolonge des dispositifs d'incitation fiscale à l'investissement locatif (dispositif « Pinel ») et le prêt à taux zéro , tout en resserrant leur usage ; de l'autre, il rend plus difficile l'accession sociale à la propriété , en supprimant les aides personnelles au logement « accession », il transforme l'impôt de solidarité sur la fortune en un impôt sur la fortune immobilière et il réduit drastiquement les capacités d'investissement des bailleurs sociaux .

II. Sur le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » :

1. Le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » connaît une nouvelle année de forte augmentation de ses crédits , avec 12,2 % de hausse correspondant à 212 millions d'euros . Elle profite exclusivement à l'action 12 « Hébergement et logement adapté », les dispositifs d'hébergement d'urgence bénéficiant d'une hausse de leur enveloppe budgétaire de 208 millions d'euros (826,6 millions d'euros en 2018) et le logement adapté de 31 millions d'euros supplémentaires (313,9 millions d'euros).

2. Il s'agit d'un rebasage des crédits bienvenu , qui intervient après que le précédent gouvernement a déjà augmenté les crédits du programme de 15 % pour 2017 et alors qu'auparavant, l'insincérité budgétaire chronique était dénoncée chaque année . Ces efforts ne peuvent donc qu'être salués.

3. Pour autant, cette enveloppe bien dotée ne permettra pas de dégager de moyens supplémentaires puisque le budget pour 2018 est déjà inférieur de près de 40 millions d'euros à la dépense attendue en fin d'année 2017 , compte tenu du schéma de fin de gestion annoncé (y compris le décret d'avance du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance et le projet de décret d'avance de novembre 2017) et de l'ouverture de 89,6 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2017.

4. Il est donc d'ores et déjà acquis que des crédits viendront à manquer au cours de l'année 2018, sauf à parvenir à contenir une dépense qui ne cesse pourtant d'augmenter puisqu'elle a progressé de près de 60 % depuis 2011 , pour atteindre près de 2 milliards d'euros en 2017 .

5. Les besoins couverts par le programme restent globalement mal maîtrisés . Malgré l'augmentation indéniable des moyens alloués aux dispositifs d'hébergement d'urgence et à la veille sociale, la demande non satisfaite reste très forte et le nombre de nuitées hôtelières financées par l'État pour pallier le manque de places continue de progresser , pour atteindre 42 646 places en 2016, soit une hausse de plus de 200 % depuis 2010.

La question de la prise en charge par les crédits du programme d'une partie des dépenses liées à l'hébergement des migrants reste également posée.

6. Le Gouvernement s'engage dans un plan de restructuration du secteur de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion (AHI) prometteur et qui devrait permettre de dégager des économies , mais il doit encore se concrétiser . Le passage des centres d'hébergement d'urgence sous le régime de l'autorisation et de la tarification, la généralisation de la contractualisation pluriannuelle et l'établissement de tarifs-plafonds à partir de l'enquête nationale de coûts (ENC) ne peuvent qu'être soutenus. Cette réforme devra être suivie avec attention.

7. Si le plan « logement d'abord » rejoint les préoccupations de votre rapporteur spécial , appelant de ses voeux à développer une offre permettant de désengorger les dispositifs d'hébergement d'urgence saturés, notamment par l'intermédiation locative, il apparaît qu'il ne connaît aucune traduction concrète dans le projet annuel de performances et qu'il ne disposera probablement que de marges budgétaires extrêmement limitées pour sa mise en oeuvre.

III. Sur le programme 109 « Aide à l'accès au logement » :

1. Le programme 109 « Aide à l'accès au logement » connaît une baisse de ses crédits de 12,4 % pour atteindre 13,6 milliards d'euros en 2018, avec une diminution de la dépense de l'État liée aux aides personnelles au logement de 1,9 milliard d'euros en un an.

2. Les baisses enregistrées au titre des aides personnelles au logement et, en conséquence, de la subvention d'équilibre versée par l'État au Fonds national d'aide au logement (Fnal) s'expliquent principalement par les dispositions prévues à l'article 52 du projet de loi de finances pour 2018 et rattaché à la présente mission.

3. Elles portent aussi les conséquences de l'abattement forfaitaire de 5 euros décidé par le Gouvernement à l'été dernier et appliqué à l'ensemble des aides servies à compter du 1 er octobre 2017. Cette mesure, prise pour équilibrer le Fnal en 2017 mais pour laquelle il n'est prévu aucune date de fin, permet une économie estimée à 400 millions d'euros en année pleine.

4. Il ne convient pas de remettre en cause le constat du Gouvernement d'une situation financière globalement saine des organismes de logement social dont il convient d'ailleurs de se féliciter puisqu'elle permet de financer de la construction et de la rénovation de logements. De même, des regroupements de structures seraient probablement possibles et mêmes souhaitables afin de rationaliser le secteur du logement social.

5. Pour autant, le dispositif brutal proposé à l'article 52 du projet de loi de finances, avec principalement la mise en place d'une « réduction de loyer de solidarité » dans le secteur du logement social couplée à une baisse des aides personnalisées au logement (APL) des allocataires quasi équivalente, correspond à une ponction difficilement soutenable pour le secteur du logement social , en réduisant leur autofinancement d'au moins 1,7 milliard d'euros. Leur santé financière est, dès lors, directement entamée.

6. Le dispositif de mutualisation financière annoncé et les contreparties proposées (prêts, stabilisation du taux du livret A...) ne permettent pas de garantir que le secteur du logement social ne se retrouve pas durablement déstabilisé , au risque de se propager dans le secteur du bâtiment .

7. Le dispositif proposé par l'article 52 est, en outre, déséquilibré puisqu'il pèse davantage sur les bailleurs sociaux qui comptent le plus de ménages modestes bénéficiant des APL.

8. En tout état de cause, il ne s'agit en aucun cas d'une réforme de structure, ni d'un facteur d'amélioration du pouvoir d'achat des Français , les locataires ne bénéficiant finalement que très peu de la baisse de loyers puisqu'elle est répercutée sur le montant des APL. C'est bien avant tout une mesure de rendement budgétaire .

9. Un travail de concertation et de compromis est en cours pour proposer un ensemble de mesures permettant d'assurer la soutenabilité du dispositif pour le secteur du logement social.

10. Par ailleurs, des réformes structurelles du système des aides personnelles au logement restent nécessaires, notamment pour garantir une certaine équité . Un taux d'effort minimal des ménages devrait ainsi être réellement pris en compte dans le calcul de ces aides. De même, votre rapporteur spécial suivra avec intérêt la mise en oeuvre, annoncée pour 2019 de la prise en compte contemporaine des revenus des allocataires.

IV. Sur le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » :

1 . La tendance au désengagement de l'État pour le financement des aides à la pierre se confirme , avec 50 millions d'euros seulement inscrits pour 2018 (200 millions d'euros en 2017).

2. Parallèlement, le Fonds national des aides à la pierre (Fnap) continue de bénéficier d'une enveloppe de 425 millions d'euros (AE=CP), avec une contribution des bailleurs sociaux passant de 270 à 375 millions d'euros.

3. Des ressources suffisantes doivent être maintenues pour le Fnap dans la mesure où les restes à payer demeurent élevés , avec une estimation à près de 2 milliards d'euros à fin 2017.

4. Le retour de l'État dans le financement de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) est bienvenu , avec 110 millions d'euros inscrits pour 2018 et l'annonce d'une enveloppe d'1,2 milliard d'euros sur le quinquennat pour le programme « Habiter mieux », dans le cadre du « Grand plan d'investissement ». Ces crédits viennent prendre le relais du Fonds d'aide à la rénovation thermique (Fart) auparavant financé par le programme d'investissements d'avenir.

5. Le budget de l'Anah semble davantage sécurisé mais il reste soumis à l'aléa du cours des cessions de quotas carbone .

6. Prenant acte de la mise en extinction du dispositif des « maires bâtisseurs », l'État doit trouver les moyens d'inciter les collectivités territoriales à construire.

V. Sur le programme 147 « Politique de la ville » :

1. Les crédits de la politique de la ville se trouvent sanctuarisés , avec une stabilisation des crédits à l'exception de ceux consacrés à la rénovation urbaine. Pour autant, cela ne permet pas de rassurer les acteurs, après la forte mesure de régulation budgétaire opérée en juillet 2017.

2 . Le Gouvernement affiche de fortes ambitions en termes de rénovation urbaine , avec une enveloppe pour le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) passant de 6 à 10 milliards d'euros .

3. Si ces perspectives ne peuvent être que partagées, plusieurs interrogations restent en suspens quant à la soutenabilité financière du programme.

4. La situation financière de l'Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru) paraît plutôt assurée à court terme et le financement du NPNRU globalement couvert mais, en revanche, une impasse de trésorerie à moyen ou long terme est également identifiée et une solution doit être trouvée.

5. Par ailleurs, 4 milliards d'euros restent à couvrir pour le NPNRU et devaient être partagés entre Action logement et les organismes de logement social. Il est permis de s'interroger sur les capacités de ces derniers à y participer , compte tenu de la réduction de leur autofinancement.

6. Après l'échec de 2013, un nouveau dispositif expérimental d'emplois francs bénéficiant aux demandeurs d'emplois résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville est engagé par le Gouvernement et porté par la mission « Travail et emploi ». Aucune raison n'invite à s'opposer par principe à une telle initiative mais l'on peut s'interroger sur son efficacité .

Au 10 octobre 2017, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 48 % des réponses portant sur les programmes 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », 109 « Aide à l'accès au logement », 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et 147 « Politique de la ville » de la mission « Cohésion des territoires » étaient parvenues à votre rapporteur spécial .

PREMIÈRE PARTIE - PRÉSENTATION GLOBALE DE LA MISSION

I. UNE NOUVELLE MISSION CONSACRÉE À LA COHÉSION DES TERRITOIRES ET FORTEMENT SOUMISE À LA CONTRAINTE BUDGÉTAIRE

1. 16,5 milliards d'euros pour une mission regroupant désormais les missions « Égalité des territoires et logement » et « Politique des territoires »

Le nouveau gouvernement a fait le choix de créer une mission « Cohésion des territoires », regroupant les crédits de deux précédentes missions, à savoir la mission « Égalité des territoires et logement » et la mission « Politique des territoires ».

Cette évolution a été opérée tandis qu'était mis en place le ministère de la cohésion des territoires.

La mission regroupe six programmes , pour atteindre 16,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Elle représente 4 % du budget général dans la version du projet de loi de finances déposé par le Gouvernement devant l'Assemblée nationale.

L'on ne peut que constater le poids très différent de chaque programme dans la mission, voire disproportionné pour le programme 109 « Aide à l'accès au logement ». En effet, tandis que celui-ci comprend 13,6 milliards d'euros (AE=CP), soit 82 % des crédits de la mission, et principalement destinés au financement des aides personnelles au logement, le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » ne comprend que 34 millions d'euros en autorisations d'engagement et 27,4 millions d'euros en crédits de paiement.

Les programmes de l'ancienne mission « Politique des territoires » ne représentent ainsi que 4 % du montant total de l'enveloppe allouée à la mission « Cohésion des territoires ».

Répartition des crédits de la mission entre programmes

(en pourcentage)

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances de la mission annexé au projet de loi de finances initiale pour 2018

Les programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État », qui ont trait à l'aménagement du territoire, sont spécifiquement examinés par Bernard Delcros, rapporteur spécial au nom de la commission des finances du Sénat, et font ainsi l'objet d'un rapport séparé.

La création de cette mission « Cohésion des territoires » s'est accompagnée de points positifs.

Tout d'abord, les crédits consacrés à la politique du logement , qu'il s'agisse des aides à la pierre ou des aides à la personne, figurent de nouveau dans la même mission que les crédits consacrés à la politique de la ville .

Depuis que la mission « Politique des territoires » avait été créée dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2015 1 ( * ) , votre rapporteur spécial, qui suivait les crédits de la mission « Égalité des territoires et logement », et notre ancien collègue Daniel Raoul, en sa qualité de rapporteur spécial des crédits du programme 147 « Politique de la ville », regrettaient que ces politiques publiques soient séparées alors qu'elles entretiennent des liens très étroits.

Ensuite, le programme 337 « Conduite et pilotage des politiques du logement » a été supprimé et n'a pas été transféré dans la mission « Cohésion des territoires ». Il figurait dans l'ancienne mission « Égalité des territoires et logement » pour y accueillir les crédits consacrés aux effectifs et à l'essentiel des crédits de masse salariale du ministère chargé du logement. Pourtant, en gestion, ces crédits étaient intégralement transférés vers le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Tous les crédits de personnels ont donc été regroupés, en prévision comme en exécution, au sein du programme 217 dans le projet de loi de finances pour 2018, ce qui constitue une mesure de bon sens et de bonne gestion , soutenue par votre rapporteur spécial au cours des précédentes années.

Évolution des crédits de la mission « Cohésion des territoires »

(en milliers d'euros et en pourcentage)

Exécution 2016

LFI 2017

PLF 2018

Évolution LFI 2017/ PLF 2018 (%)

Évolution LFI 2017/ PLF 2018

(volume)

Programme 177
Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

AE

1 752,05

1 741,7

1 953,7

12,2 %

212,0

CP

1 751,2

1 741,7

1 953,7

12,2 %

212,0

Programme 109
Aide à l'accès au logement

AE

15 356,99

15 469,4

13 556,2

- 12,4 %

- 1 913,2

CP

15 356,99

15 469,4

13 556,2

- 12,4 %

- 1 913,2

Programme 135
Urbanisme, territoires
et amélioration de l'habitat

AE

848,38

398,8

311,6

- 21,9 %

- 87,2

CP

828,23

353,2

311,6

- 11,8 %

- 41,6

Programme 112
Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

AE

169,9

452,1

191,0

- 57,8 %

- 261,1

CP

223,0

247,3

254,9

3,1 %

7,6

Programme 162
Interventions territoriales de l'État

AE

38,6

29,9

34,0

13,7 %

4,1

CP

36,3

29,3

27,4

-6,5 %

- 1,9

Programme 147
Politique de la ville

AE

389,6

514,4

430,4

- 16,3 %

- 84,0

CP

390,7

429,4

430,4

0,2 %

1,0

Total mission

AE

18 555,52

18 606,2

16 476,8

- 11,4 %

-2 129,4

CP

18 586,42

18 270,2

16 534,1

- 9,5 %

-1 736,1

Nb : hors programme 337 « Conduite et pilotage des politiques du logement » dont les crédits ont été intégrés au programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances initiale pour 2018 et au projet annuel de règlement pour 2016

2. Une enveloppe qui se réduit de 9,5 % par rapport à 2017 puis encore de 8,5 % selon les prévisions du triennal 2018-2020
a) Une mission qui constitue un des principaux postes d'économies sur le budget 2018 et aux crédits en forte baisse sur l'ensemble du triennal

Avec 1,7 milliard d'euros de baisse de crédits de paiement en valeur (et 1,9 milliard d'euros en volume), la mission « Cohésion des territoires constitue la mission qui contribue le plus à la réduction des dépenses publiques sur le budget général de l'État , loin devant la mission « Travail et emploi » qui voit sa dotation budgétaire diminuer de 1,2 milliard d'euros et la mission « Administration générale et territoriale de l'État », avec une enveloppe inférieure à 2017 de 400 millions d'euros 2 ( * ) . Toutes les autres missions ont des baisses de crédits inférieures à 100 millions d'euros.

La mission « Cohésion des territoires » enregistre ainsi une diminution de 9,5 % en crédits de paiement (et 11,5 % en autorisations d'engagement) en valeur, contre 10,4 % en volume.

Missions connaissant des baisses de crédits supérieures
à 100 millions d'euros en 2018 (hors CAS « Pensions »)

(en milliards d'euros - axe de gauche -
et en taux d'évolution - axe de droite)

Source : commission des finances (à partir des données budgétaires)

L'analyse du triennal 2018-2020 met également en évidence l'effort considérable que le Gouvernement fait peser sur la mission « Cohésion des territoires » pour réduire les dépenses publiques.

Au-delà de la réduction des crédits enregistrée entre 2017 et 2018 et précédemment décrite, l'enveloppe consacrée à la mission devrait encore connaître une baisse de 8,3 % en valeur et de 10,6 % en volume entre 2018 et 2020 , tandis que les crédits du budget général (hors dettes, remboursements et dégrèvements et pensions) augmenteraient de 3 % en valeur et de 0,5 % en volume, hors économies complémentaires attendues du processus « Action publique 2022 ».

Principales évolutions de crédits du budget triennal de l'État et par mission
entre 2018 et 2020

(en milliards d'euros constants de 2017)

Source : commission des finances (à partir des données du projet de loi de programmation des finances publiques)

Ainsi, le budget de la mission passerait de 18,26 milliards d'euros en 2017 , en volume comme en valeur, à 15,15 milliards d'euros en valeur et 14,63 milliards d'euros en volume en 2020.

Évolution des crédits de la mission sur le triennal 2018-2020
comparé au budget général

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Crédits de paiement

LFI 2017

LFI 2017 Format 2018

2018

2019

2020

Évolution 2018/2017

Évolution 2020/2018

En valeur absolue

En %

En valeur absolue

En %

Cohésion des territoires

En valeur

18,26

18,26

16,53

14,95

15,15

- 1,73

- 9,5%

- 1,38

- 8,3%

En volume

18,26

18,26

16,37

14,64

14,63

- 1,89

- 10,4%

- 1,73

- 10,6%

Budget général de l'État

En valeur

234,66

236,05

241,53

242,83

248,81

5,48

2,3%

7,28

3,0%

En volume

234,66

236,05

239,14

237,81

240,30

3,09

1,3%

1,16

0,5%

Nb : il s'agit de crédits de paiement, hors dette, remboursements et dégrèvements et CAS « Pensions »

Source : commission des finances du Sénat

b) Une diminution des dépenses publiques principalement supportée par l'aide à l'accès au logement, les autres programmes connaissent des évolutions contrastées

En volume, l'essentiel de la baisse des crédits sur la mission « Cohésion des territoires » porte sur le programme « Aide à l'accès au logement » , avec une enveloppe budgétaire réduite de 1,9 milliard d'euros, correspondant à 12,4 % de moins qu'en 2017, pour atteindre 13,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement .

Ainsi, le programme tire essentiellement les conséquences de l'article 52 du projet de loi de finances qui prévoit une économie d'1,7 milliard d'euros 3 ( * ) , dont 1,5 milliard d'euros issu de l'instauration d'une réduction de loyer de solidarité qui s'appliquerait dans le secteur du logement social et, en contrepartie, d'une baisse des aides personnalisées au logement (APL) versées aux allocataires.

Cette diminution des crédits provient également de l'impact de la baisse forfaitaire de 5 euros par mois , qui a été appliquée à toutes les aides à compter du 1 er octobre 2017 4 ( * ) et pour laquelle l'économie est estimée à 400 millions d'euros en année pleine. Certes, elle s'est appliquée dès 2017 mais a nécessairement un impact sur le montant des aides versées en 2018 puisqu'elle n'était pas prévue dans la loi de finances initiale pour 2017 ou du moins pas à cette hauteur 5 ( * ) .

Parallèlement, les autres programmes de la mission connaissent des évolutions contrastées .

Évolution des crédits par programme de la mission
entre 2017 et 2018

(en %)

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances de la mission « Cohésion des territoires », annexé au projet de loi de finances pour 2018

Avec 212 millions d'euros supplémentaires, le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » connaît une hausse de 12 % pour atteindre 1,95 milliard d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement. Cette évolution correspond à un effort remarquable de meilleure sincérité de la prévision initiale, déjà lancé l'an dernier par le précédent gouvernement (+ 15 %).

Pour autant , comme cela sera montré infra , cette enveloppe supplémentaire ne permet en aucun cas de dégager des moyens nouveaux ni même d'ailleurs d'éviter une sur-exécution des crédits du programme en cours d'année 6 ( * ).

Le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » voit ses autorisations d'engagement réduites de 22 % et les crédits de paiement de 16 % , sous l'effet conjugué de la quasi-suppression du financement des aides à la pierre par les crédits de l'État (50 millions d'euros seulement en 2018, contre 200 millions d'euros en 2017) et de la mise en extinction du dispositif des « maires bâtisseurs » (70 millions d'euros en autorisations d'engagement et 24,4 millions d'euros en crédits de paiement en 2017) 7 ( * ) .

Toutefois, parallèlement, le Gouvernement a fait le choix de financer de nouveau une partie de l'activité de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) par des crédits budgétaires , dans le cadre du « Grand plan d'investissement » et de la lutte contre les « passoires thermiques ». Ainsi, 110 millions d'euros de crédits nouveaux sont inscrits pour 2017 au profit du programme « Habiter mieux » de l'agence.

S'agissant enfin des programmes issus de la mission « Politique des territoires » , l'on peut constater qu'ils participent également de l'effort de maîtrise budgétaire . Certes, les crédits de paiement sont relativement préservés , voire bénéficient d'une légère hausse s'agissant du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ». Toutefois, les projets inscrits sur plus long terme se trouvent plus nettement limités en termes de crédits inscrits, voire sont freinés .

Le programme 112 enregistre une baisse de près de 60 % de ses autorisations d'engagement compte tenu principalement du transfert des contrats de ruralité et du pacte État-métropoles sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » 8 ( * ) .

S'agissant du programme 147 « Politique de la ville » , les crédits d'intervention qui lui sont consacrés se trouvent sanctuarisés , mais tandis que le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) doit bénéficier d'une enveloppe de l'État d'1 milliard d'euros sur l'ensemble de sa période de mise en oeuvre, seuls 15 millions d'euros (AE=CP) sont inscrits pour le financer en 2017.

II. DES DÉPENSES FISCALES DYNAMIQUES

Sur l'ensemble de la mission, les moindres recettes enregistrées au titre des dépenses fiscales qui lui sont rattachées à titre principal (sur impôts d'État et sur impôts locaux, pris en charge par l'État) représentent l'équivalent de 88 % des crédits budgétaires , avec un total de 14,5 milliards d'euros en prévision pour 2018.

Les dépenses fiscales de la mission sont globalement dynamiques puisqu'elles augmentent sur la quasi-totalité des programmes et au total de 300 millions d'euros par rapport à 2017 (soit + 2 %).

Dépenses fiscales relevant de la mission

(en millions d'euros)

Dépenses fiscales sur impôts d'État

Programme

2016

2017

2018

177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes défavorisées

nc

nc

109 Aides à l'accès au logement

65

64

60

135 Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

13 404

13 113

13 471

112 Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

433

459

470

147 Politique de la ville

348

360

371

Total

14 250

13 996

14 372

Dépenses fiscales sur impôts locaux pris en charge par l'État

Programme

2016

2017

2018

177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes défavorisées

0

0

0

109 Aides à l'accès au logement

37

38

40

135 Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

97

75

63*

112 Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

9

7

7

147 Politique de la ville

127

77

77

Total

270

197

124

Total général

14 520

14 193

14 496

* Le coût de l'exonération en faveur des immeubles à caractère social n'est toutefois par renseigné.

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances de la mission « Cohésion des territoires », annexé au projet de loi de finances pour 2018

Concernant plus spécifiquement les dépenses fiscales liées au logement , qui représentent plus de 13,5 milliards d'euros sur le seul programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » , l'augmentation de la perte de recettes de près de 350 millions d'euros entre 2017 et 2018 correspond essentiellement à la hausse de la TVA à 10 % pour les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien (+ 100 millions d'euros), au prêt à taux zéro (+ 175 millions d'euros, soit une hausse de 22,5 %) et à la montée en charge du dispositif « Pinel » d'incitation fiscale à l'investissement locatif dans le logement intermédiaire (+ 200 millions d'euros, pour atteindre 554 millions d'euros en 2018).

Il convient d'ailleurs de mentionner le fait que les articles 39 et 40 du projet de loi de finances pour 2018 prévoient de prolonger pour 4 ans le prêt à taux zéro (PTZ) et le dispositif « Pinel », tout en resserrant les conditions de mise en oeuvre, notamment par un recentrage sur les zones les plus tendues pour la construction neuve.

Parallèlement, l'extinction de plusieurs dispositifs produit ses effets , avec en particulier une baisse de 100 millions d'euros de la dépense fiscale relative aux deux dispositifs « Robien » d'incitation à l'investissement locatif (95 millions d'euros de moindres recettes en 2018).

Par ailleurs, le crédit d'impôt sur le revenu au titre des intérêts d'emprunts ne représente plus que 100 millions d'euros, contre 414 millions d'euros en 2016 et une prévision de 147 millions d'euros pour 2017

Enfin, il semble désormais confirmé que l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) ne parvient pas à trouver son marché malgré les modifications législatives apportées pour favoriser sa distribution . La dépense fiscale associée est en constante baisse, passant de 110 millions d'euros en 2015 à 75 millions d'euros en 2016 et 51 millions d'euros en 2018. Il conviendrait probablement de s'interroger sur la pertinence de maintenir en l'état ce dispositif .

À ce titre, la revue de dépenses sur les aides à la rénovation énergétique des logements privés, réalisée par l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'environnement et du développement durable et rendue en avril 2017, met en évidence les difficultés rencontrées pour la mise en oeuvre de ce dispositif mais considère qu'il doit être conservé, notamment car il peut s'avérer intéressant en cas de remontée des taux d'intérêt. Le rapport indique toutefois qu'il figure parmi les dispositifs financiers pouvant voir leur fonctionnement simplifié. Les corps d'inspection proposent ainsi de maintenir l'éco-PTZ pour 2018 et d'en « dresser un bilan d'ici fin 2018, afin d'éclairer les pistes d'évolution ».

Plus globalement, la revue de dépenses précitée met en évidence le fait que les aides, qui ont représenté 3,2 milliards d'euros en 2016, ont été assez instables et qu'« au regard de l'effort financier réalisé, les résultats de la politique de soutien à la rénovation énergétique paraissent modestes ».

Parmi les pistes d'amélioration proposées, il est intéressant de noter que le rapport mentionne notamment l'unification du taux de TVA à 10 % pour l'ensemble des travaux réalisés dans les logements privés, par souci de simplification et du fait du caractère peu incitatif de la différence de taux. Le groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur le financement et la fiscalité du logement, dont votre rapporteur spécial était membre et qui avait rendu ses conclusions en octobre 2015, était déjà parvenu aux mêmes constats et conclusions 9 ( * ) .

SECONDE PARTIE - LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES PROGRAMMES « LOGEMENT ET VILLE »

I. PROGRAMME 177 « HÉBERGEMENT, PARCOURS VERS LE LOGEMENT ET INSERTION DES PERSONNES VULNÉRABLES »

1. Plus de 200 millions d'euros de crédits supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2017...

Pour 2018, le projet de loi de finances initiale prévoit une augmentation des crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de 212 millions d'euros , en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, par rapport à la loi de finances pour 2017. Cela correspond à une hausse de 12,2 % de l'enveloppe initiale, laquelle atteint ainsi 1,95 milliard d'euros .

Évolution des crédits par actions du programme (AE=CP)

(en euros)

Intitulé de l'action

Exécution 2016

LFI 2017

PLF 2018

Évolution 2018/2017

En valeur absolue

En %

11 - Prévention de l'exclusion

AE

64 835 827

62 061 191

50 445 224

- 11 615 967

- 18,7 %

CP

64 841 872

62 061 191

50 445 224

- 11 615 967

- 18,7 %

12 - Hébergement et logement adapté

AE

1 677 223 999

1 669 285 619

1 894 189 982

224 904 363

13,5 %

CP

1 676 313 224

1 669 285 619

1 894 189 982

224 904 363

13,5 %

14 - Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale

AE

9 989 584

10 332 657

9 058 657

- 1 274 000

- 12,3 %

CP

10 041 188

10 332 657

9 058 657

- 1 274 000

- 12,3 %

Total

AE

1 752 049 410

1 741 679 467

1 953 693 863

212 014 396

12,2 %

CP

1 751 196 284

1 741 679 467

1 953 693 863

212 014 396

12,2 %

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances pour 2018 et le rapport annuel de performance pour 2016

Cet effort budgétaire profite exclusivement à l'action 12 « Hébergement et logement adapté » dont la dotation progresse même de 225 millions d'euros , et en particulier les dispositifs d'hébergement d'urgence puisque le budget qui leur est consacré augmente de 208 millions d'euros , soit une hausse de 34 % par rapport au projet de loi de finances pour 2017, pour atteindre 826,6 millions d'euros. Parallèlement, la veille sociale progresse de 4 % (126,5 millions d'euros).

Les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) voient en revanche leur dotation se réduire de 4,6 % , avec 627,2 millions d'euros en 2018. Votre rapporteur spécial aura l'occasion d'y revenir. Cette tendance s'explique notamment par les économies attendues avec la mise en place de tarifs-plafonds à compter de 201810 ( * ).

Enfin, les dispositifs consacrés au logement adapté (maisons-relais et pensions de famille, intermédiation locative...) bénéficient de 31 millions d'euros supplémentaires , avec une enveloppe fixée à 313,9 millions d'euros.

Répartition des crédits au sein des dispositifs de logement adapté

(en millions d'euros)

Nb : ALT 1 (allocation de logement temporaire) correspond à l'aide aux organismes qui logent temporairement des personnes défavorisées et qui ne peuvent être hébergées en CHRS.

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2018

L' action 11 « Prévention de l'exclusion » connaît une baisse de 18,7 millions d'euros qui concerne à la fois :

- les allocations et prestations d'aide sociale versées aux personnes âgées et handicapées, en baisse de 7,1 millions d'euros par rapport à 2017, pour atteindre 33 millions d'euros. La direction générale de la cohésion sociale explique cette diminution de crédits par un ajustement de l'enveloppe aux dépenses réellement constatées tandis qu'est enregistrée une baisse tendancielle du nombre de bénéficiaires toutes prestations confondues ;

- l'« allocation de logement temporaire 2 » (ALT 2), destinée à financer le fonctionnement des aires d'accueil de gens du voyage et qui ne bénéficierait plus que de 15,4 millions d'euros, correspondant à une diminution de 2 millions d'euros des crédits inscrits par rapport à 2017. Cette enveloppe tient compte de la mise en oeuvre d'une réforme prévue pour le 1 er janvier 2018. En effet, cette aide a déjà été modifiée en 2015 pour tenir compte du taux d'occupation de ces aires avec la création d'une part variable. Elle va encore évoluer avec une modulation des parts fixe et variable permettant « d'inciter les gestionnaires à développer l'occupation des aires d'accueil et ainsi à rendre plus efficient le dispositif ». Il conviendra toutefois de s'assurer que la part fixe soit toujours suffisamment attractive en termes de création d'aires d'accueil.

Le rebasage opéré pour 2018 intervient après que le précédent Gouvernement a déjà augmenté les moyens du programme 177 de 15 % l'an dernier , dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2017 . Cet effort ne peut qu'être salué , votre rapporteur spécial n'ayant pas manqué de mettre en évidence, pendant de nombreuses années, la sous-budgétisation chronique de ce programme. Ainsi, en 2016, la prévision initiale était déjà inférieure de 78 millions d'euros par rapport à l'exécution 2015 et ce sont finalement 238 millions d'euros supplémentaires qui ont dû être ouverts.

En outre, le contrôle budgétaire mené par votre rapporteur spécial en 2016 sur les dispositifs d'hébergement d'urgence 11 ( * ) a démontré les effets négatifs du manque de crédits initiaux sur l'activité des organismes sur le terrain : les services déconcentrés qui doivent « gérer la pénurie » budgétaire, surtout les associations qui sont parfois allées jusqu'à mobiliser leur propre trésorerie par pallier les manques de moyens de l'État.

La hausse des crédits du présent programme participe ainsi de l'effort de correction des sous-budgétisations constatées au sein du budget de l'État. Si c'est déjà considérable, il ne faudrait pas croire pour autant que cette enveloppe permettra de dégager des moyens supplémentaires pour les structures sur le terrain.

2. ... pour un budget 2018 pourtant déjà inférieur de plus de 35 millions d'euros à la dépense attendue en 2017 : des crédits manqueront probablement en cours d'exécution

Malgré le rebasage opéré dans le projet de loi de finances initiale pour 2017, l'enveloppe prévue cette année pour le programme était déjà inférieure de près de 10 millions d'euros à l'exécution 2016. Votre rapporteur spécial avait, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2017, annoncé le dépassement des crédits prévus, tout en saluant l'effort de meilleure sincérité du budget.

Depuis, 122 millions d'euros en autorisations d'engagement et 120 millions d'euros en crédits de paiement supplémentaires ont d'ores et déjà été ouverts par le décret d'avance du 20 juillet 201712 ( * ).

Le projet de loi de finances rectificative pour 2017 de fin d'année devrait ouvrir 89,6 millions d'euros supplémentaires (AE=CP) , auquel s'ajoutent au total 246,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et 163 millions d'euros en crédits de paiement au titre des modifications intervenues en cours de gestion (dont le décret d'avance précité du 20 juillet dernier). En outre, un projet de décret d'avance examiné par votre commission des finances en novembre 2017 prévoit d'ouvrir de nouveau 65 millions d'euros (AE=CP) . Toutefois, la direction générale de la cohésion sociale prévoit que 70,2 millions d'euros ne devraient pas pouvoir être consommés en toute fin de gestion et seraient ainsi reportés sur 2018.

L' exécution 2017 devrait ainsi connaître un dépassement de 331 millions d'euros en autorisations d'engagement et 247 millions d'euros en crédits de paiement par rapport à la prévision initiale.

En outre, les 200 millions d'euros inscrits en crédits nouveaux sur le programme pour 2018 ne permettent d'ores et déjà pas de couvrir les besoins constatés en 2017 . Au contraire, avec 1,95 milliard d'euros, la dotation prévue pour 2018 e st déjà inférieure de 35 millions d'euros à celle de l'année en cours .

Évolution des crédits de paiement du programme 177 entre 2011 et 2018

(en millions d'euros)

* Pour 2018, il s'agit du projet de loi de finances initiale

** Pour 2017, il s'agit d'une prévision au regard des ouvertures de crédits et des éléments recueillis auprès du Gouvernement

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Il est donc d'ores et déjà certain que des crédits manqueront en cours d'année en 2018, d'autant que la dépense sur le programme n'a cessé d'augmenter fortement au cours des dernières années. Entre 2012 et 2017, elle a connu une hausse de 60 %, pour atteindre presque 2 milliards d'euros cette année.

Évolution des crédits exécutés sur le programme
entre 2011 et 2017

(en millions d'euros)

Nb : le montant indiqué pour 2017 constitue une estimation compte tenu des crédits supplémentaires qui ont été ouverts par le décret d'avance du 20 juillet 2017 et des ouvertures prévues dans le projet de décret d'avance et le projet de loi de finances rectificative pour 2017 actuellement en cours d'examen. Il tient compte aussi du fait que 70,2 millions d'euros pourraient ne pas être consommés cette année et reportés sur 2018.

Source : commission des finances d'après les données budgétaires

3. Des besoins couverts par le programme qui restent très largement mal maîtrisés

Le nombre de places ouvertes au titre de l'hébergement d'urgence généraliste n'a cessé de progresser au cours des dernières années, cette tendance se confirmant au 31 décembre 2016 avec une progression de près de 9 % du parc en un an, correspondant à plus de 10 000 places supplémentaires , et pour atteindre un total de 122 854 places .

Selon les informations fournies par la direction générale de la cohésion sociale, 4 200 places supplémentaires ont depuis été pérennisées en cours d'année 2017 , expliquant notamment la sur-exécution du programme (estimation 25 millions d'euros).

Par ailleurs, 15 000 places avaient été ouvertes à la fin du mois de janvier pour répondre aux besoins de l'hiver 2016-2017, engendrant une dépense supplémentaire plus importante que prévue, d'autant qu'elles ont ensuite été fermées de façon progressive et plus tardive qu'habituellement, entre les mois de mars et juin.

Malgré l'augmentation indéniable des moyens alloués aux dispositifs d'hébergement d'urgence et à la veille sociale, la demande non satisfaite reste très forte .

À titre d'exemple, le Samu social de Paris, particulièrement sollicité puisque le 115 a reçu à lui seul 1 756 093 appels en 2016 et répondu à 473 346 d'entre eux, indique dans son rapport annuel que « le taux quotidien de réponse positive (chance d'avoir un hébergement attribué dans la journée, suite à l'appel au 115) » s'élève à 67 % des hommes isolés, 30 % des femmes isolées et seulement 17 % de personnes en famille.

Malgré le plan de résorption des nuitées d'hôtels du précédent gouvernement, le nombre de places en hôtels continue par ailleurs d'augmenter , passant ainsi à 42 646 places en 2016 , contre 37 962 en 2015 et seulement 13 948 en 2010, soit une hausse de plus de 200 % en 6 ans.

Évolution du nombre de nuitées hôtelières financées par l'État
au titre de l'hébergement d'urgence de droit commun

(en nombre de places)

Source : commission des finances d'après les données du rapport annuel de performances de la mission annexé au projet de loi de finances pour 2018

Certes, l'on peut tout de même constater que l'augmentation est moins forte que par le passé , avec 12,3 % entre 2015 et 2016, mais le nombre de places supplémentaires reste très élevé (près de 4 700 places en un an). Surtout, le ralentissement du recours aux nuitées d'hôtel peut aussi s'expliquer sur certains territoires par la saturation de l'occupation des places d'hôtels à bas prix, empêchant d'en réserver davantage.

La solution de l'hôtel, peu coûteuse au prix moyen à la place et comparé aux autres dispositifs, n'est pas satisfaisante, tant en termes de qualité d'hébergement (en particulier pour les familles) que pour l'accompagnement social souvent défaillant.

L'an dernier, afin d'offrir d'autres possibilités d'accueil, mobilisables de façon alternative à l'hôtel et permettant d'améliorer l'accueil et l'accompagnement social des personnes sans abri ou mal logées, le ministère chargé du logement et le ministère de l'intérieur avaient passé un marché public de 5 000 places d'hébergement chacun .

Concernant l'hébergement d'urgence de droit commun, 3 674 places (4 prestataires) ont finalement été retenues dans le cadre de ce marché. Les places devaient être livrées à 50 % à trois mois à compter de mars 2017 (notification du marché) et à 100 % à six mois. C'est bien le cas désormais, selon la direction générale de la cohésion sociale.

En revanche, certains lieux initialement prévus n'ont finalement pas été retenus, compte tenu notamment des réticences de certaines collectivités territoriales qui pouvaient par ailleurs rencontrer déjà d'importantes difficultés sociales sur leur territoire.

Ces nouvelles places sont occupées pour un coût qui reste maîtrisé, autour de 19 euros par jour et par personne.

Il convient également de noter que le programme 177 est souvent utilisé pour couvrir les besoins là où d'autres programmes ne sont pas en mesure d'intervenir . Ainsi en est-il notamment dans l'accueil des demandeurs d'asile et, plus largement, des migrants.

Certes, les centres d'accueil et d'orientation (CAO) ne sont plus financés sur les crédits du programme. En revanche, ce dernier prend encore en charge les dépenses liées à l'hébergement d'urgence des migrants parisiens (« HU migrants parisiens »), qui est passé de 4 000 à 10 000 places, et en assurant également le coût des transferts. Cela représenterait environ 150 millions d'euros qui devraient, en toute logique, plutôt peser sur les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». En principe, l'enveloppe consacrée à l'hébergement des « migrants parisiens » devrait effectivement bientôt figurer au sein du programme 303 « Immigration et asile ».

En tout état de cause, le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » continue également d'accueillir des demandeurs d'asile, soit avant qu'ils n'aient obtenu un entretien au guichet unique de demande d'asile, soit une fois qu'ils ont été déboutés, sans que l'on puisse en mesurer le nombre ou la proportion.

4. Des efforts de restructuration du secteur de l'hébergement prometteurs mais qui doivent encore se concrétiser

Afin d' assurer une meilleure équité dans les moyens alloués aux organismes oeuvrant dans le secteur de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion (AHI) mais aussi dans l'accueil des personnes logées, le Gouvernement a annoncé un plan de restructuration qui devrait également permettre de dégager, à terme, des économies .

Ainsi, l'ensemble des places d'hébergement, hors dispositif de nuitées d'hôtel, devrait passer progressivement sous le régime de l'autorisation et de la tarification , alors qu'à l'heure actuelle, 50 % du parc correspond à des places d'hébergement d'urgence financées par subvention.

La direction générale de la cohésion sociale explique que cela devrait permettre une « recomposition de l'offre par appels à projet » en s'appuyant sur une généralisation de la contractualisation pluriannuelle , avec les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM).

En outre, dès 2018 , le Gouvernement va établir des tarifs-plafonds pour les CHRS , puis pour l'ensemble des structures, à partir des données disponibles dans l'enquête nationale de coûts (ENC). Ces plafonds seront établis par « groupes homogènes d'activité et de missions » (GHAM) qui existent d'ores et déjà dans l'ENC.

L' article 52 bis du projet de loi de finances pour 2018, inséré sur proposition du Gouvernement par l'Assemblée nationale, tend ainsi à obliger les CHRS à remplir annuellement l'enquête nationale de coûts . Il prévoit en particulier que les éléments pour l'année 2016 devront être remplis d'ici au 31 mars 2018.

Une telle démarche ne peut qu'être soutenue par votre rapporteur spécial. Elle devrait, en effet, renforcer la convergence tarifaire qu'il appelait lui-même de ses voeux dans son contrôle budgétaire précité sur les dispositifs d'hébergement d'urgence 13 ( * ) .

En outre, les CPOM permettront aux structures concernées d'avoir une meilleure visibilité des moyens qui leur sont octroyés et qui leur seront dès lors garantis sur cinq ans.

Le développement d'un statut unique à l'ensemble des structures devrait également permettre de rationaliser et simplifier le secteur. Certes, certaines d'entre elles auront à procéder à des ajustements de leur modèle et la réforme devra être réalisée en concertation avec l'ensemble des acteurs, mais il apparaît justifié de prévoir un cadre juridique et financier unique .

Il convient également de mieux maîtriser les coûts des centres , en les obligeant à se recentrer sur leur « coeur de métier » et en se rapprochant des coûts moyens constatés.

Le conventionnement permet aussi de dégager des économies. À titre d'exemple, la convention conclue entre la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (Drihl) et l'association Aurore prévoit une réduction de 6 % du coût en cinq ans.

En 2018, le Gouvernement compte sur une première économie de 10 à 20 millions d'euros grâce à cette réforme.

Votre rapporteur spécial suivra donc avec attention la mise en place de cette réforme qui débute avec l'article 52 bis et une concertation nationale.

Le projet de loi relatif au logement devrait comprendre des mesures permettant de concrétiser cette restructuration du secteur AHI.

5. L'annonce du dispositif « logement d'abord » : l'absence de traduction dans le projet annuel de performances, des marges budgétaires extrêmement limitées et des obstacles à sa mise en oeuvre

Le 11 septembre 2017, le président de la République Emmanuel Macron a annoncé la création de 50 000 places pour des personnes sans abri ou mal logées dans le cadre de dispositifs de logement adapté, afin d'éviter qu'elles ne passent par les dispositifs d'hébergement d'urgence par ailleurs saturées.

Ainsi, le plan « logement d'abord », tendrait à créer 10 000 places de pensions de famille et 40 000 places en intermédiation locative, notamment dans le cadre du dispositif Solibail.

Dans son rapport précité sur les dispositifs d'hébergement d'urgence, votre rapporteur spécial avait lui-même souligné l'importance de développer le logement adapté afin de permettre la sortie des dispositifs d'hébergement d'urgence. Il est certain que cela peut également être positif si cela permet d'éviter d'y entrer.

Selon la « Stratégie logement » du Gouvernement, le plan prévoit également un accompagnement social renforcé des personnes logées afin de les aider à se « réhabituer » à vivre dans un logement.

Des plateformes territoriales d'accompagnement doivent également être mises en place (notamment les 15 premières dans des territoires volontaires après appels à candidatures) et regrouper les collectivités territoriales et les opérateurs « pour un suivi renforcé et global ».

Les objectifs fixés en la matière par le Gouvernement ne peuvent qu'être partagés , puisqu'ils doivent permettre de sortir de la gestion de l'urgence dans l'urgence et de trouver d'autres solutions que la création de centres, ou pire, l'achat de nuitées d'hôtels .

Toutefois, le plan ne se trouve absolument pas traduit, dans les faits, dans le projet annuel de performances relatif à la mission « Cohésion des territoires » (annexé au projet de loi de finances pour 2018). Aucun crédit n'est directement fléché pour ce plan à ce stade.

Sur la forme , il est assez peu satisfaisant pour le Parlement de s'exprimer sur un budget qui devrait donc être remanié afin d'intégrer les mesures d'un plan gouvernemental annoncé mais qui ne se concrétise pas dans les crédits budgétaires.

Sur le fond , comme cela a été vu précédemment, la tendance haussière de la dépense sur ce programme et les besoins en termes d'hébergement d'urgence sont tels qu'il est difficile de prévoir quelles seront les marges de manoeuvre du Gouvernement pour mettre en place ce plan du « logement d'abord ».

D'après les informations recueillies auprès de la direction générale de la cohésion sociale, ce sont principalement les économies attendues sur la restructuration du secteur AHI qui devraient permettre de dégager quelques millions d'euros.

Il convient aussi de rappeler les obstacles qui rendent difficiles le développement de l'intermédiation locative et auxquels le plan du Gouvernement ne semble répondre que très imparfaitement.

Tout d'abord, il reste très difficile de mobiliser le parc privé dans les zones tendues , face à une pénurie de logements proposés.

À cela, le groupe de travail sur le financement et la fiscalité du logement créé au sein de la commission des finances du Sénat, dont votre rapporteur spécial était membre et qui a rendu ses conclusions en octobre 201514 ( * ), avait préconisé de renforcer les avantages issus du dispositif d'incitation fiscale à l'investissement locatif dans l'ancien dit dispositif « Borloo ». Il a été entendu puisque ce dernier a été remplacé par le dispositif « Cosse » qui améliore les taux d'abattement d'imposition des revenus locatifs applicables pour la location de ménages modestes, en particulier dans le cadre de l'intermédiation locative (85 % d'abattement). Il convient d'espérer que ce nouveau dispositif permettra d'attirer davantage les bailleurs. Toutefois, il ne faut pas oublier que généralement, le développement de telles mesures dans les zones tendues prive parallèlement d'autres ménages d'un accès audit logement.

Ensuite, il existe une véritable méconnaissance du dispositif de l'intermédiation locative et des campagnes de communication doivent être fréquemment prévues , tant à destination des bailleurs que des intermédiaires (agences immobilières...) pour permettre une plus grande captation de logements.

Par ailleurs, les services déconcentrés et les associations n'ont pas toujours les moyens et l'expertise nécessaires pour mettre en place l'intermédiation locative . Il convient d'espérer que les plateformes territoriales pourront également jouer ce rôle auprès des territoires les moins développés en la matière.

Enfin, il est assez étonnant de constater que le Gouvernement prévoit également , dans le cadre de ce plan « logement d'abord », une accélération de la production de logements sociaux et très sociaux tandis que, parallèlement, il présente une réforme qui tend à réduire drastiquement l'autofinancement des bailleurs sociaux (article 52 du projet de loi de finances pour 2018 rattaché à la présente mission) 15 ( * ) .

Les principales recommandations formulées par le rapporteur spécial
dans le cadre de son contrôle sur les dispositifs d'hébergement d'urgence

Recommandation n° 1 : Mettre un terme définitif à la sous-budgétisation initiale du budget consacré à l'hébergement d'urgence, afin de sécuriser le financement des dispositifs et permettre aux services déconcentrés une gestion plus efficace de leurs crédits au cours de l'année.

Recommandation n° 2 : Mettre fin à la sous-budgétisation chronique du programme 303 « Immigration et asile » de la mission « Immigration, asile et intégration », pour éviter qu'un nombre important de demandeurs d'asile non logés ne soit pris en charge sur les dispositifs de droit commun et pour qu'ils disposent d'un accompagnement plus adapté.

Recommandation n° 3 : Rééquilibrer la répartition des crédits entre les régions afin que les crédits initialement prévus soient plus proches de la consommation finalement exécutée.

Recommandation n° 4 : Améliorer le pilotage de cette politique publique, en renforçant notamment le suivi de l'activité des services déconcentrés et des structures qui y participent, ainsi que des crédits exécutés.

Recommandation n° 5 : Éviter de trop grandes distorsions dans l'interprétation de l'accueil inconditionnel et continu des personnes sans abri en situation de détresse prévu dans le code de l'action sociale et des familles, afin de garantir une égalité de traitement des situations sur l'ensemble du territoire national.

Recommandation n° 6 : Poursuivre les efforts de rationalisation des coûts, en généralisant, en particulier, la politique de convergence tarifaire à l'ensemble des structures et en systématisant le conventionnement.

Recommandation n° 7 : Favoriser la fluidité des informations et le suivi du parcours des publics hébergés, en poursuivant notamment le développement des services intégrés d'accueil et d'orientation uniques (SIAO uniques) dans tous les départements, par une action renforcée et concertée des services déconcentrés des territoires concernés.

Recommandation n° 8 : Faire en sorte que le système d'information développé pour les SIAO (SI-SIAO) puisse être utilisé, à terme, par l'ensemble des acteurs (volets urgence et insertion), tant pour faciliter la régulation par les structures gestionnaires que pour un meilleur pilotage de cette politique publique, par une meilleure connaissance de la demande (et des parcours des personnes hébergées) et une offre plus adaptée.

Prévoir un temps de mise en place adapté pour certains territoires, en particulier l'Île-de-France, compte tenu de ses spécificités et des outils déjà élaborés par le Samu social de Paris.

Recommandation n° 9 : Parallèlement aux efforts pour contenir le recours aux nuitées hôtelières et à défaut de pouvoir le supprimer à court ou moyen terme, développer les modalités de contrôle de ces structures pour garantir l'accueil de familles dans un hébergement décent (respect des règles de la commande publique, généralisation des chartes de qualité, contrôles effectifs des hôtels et éventuelles sanctions) et offrir un accompagnement social plus actif dans ces établissements.

Recommandation n° 10 : Soutenir les opérations de rachat d'hôtels, afin de rationaliser les coûts tout en offrant de meilleures modalités d'accueil des publics hébergés.

Recommandation n° 11 : Pour agir sur la fluidité des parcours au sein de l'hébergement d'urgence et améliorer ainsi le taux de rotation sur les places existantes, accélérer le développement des solutions plus qualitatives et pas nécessairement plus coûteuses, en particulier dans le logement accompagné, et des solutions de logement pérennes (logements sociaux et privés).

Recommandation n° 12 : Soutenir le développement de l'intermédiation locative et prévenir la pénurie de logements proposés :

- par une communication active à destination des bailleurs et en s'appuyant sur les professionnels de l'immobilier, en particulier les agences ;

- par un dispositif d'incitation efficace envers les bailleurs.

En outre, un soutien renforcé doit être prévu auprès des services déconcentrés et des associations qui rencontrent des difficultés à la mettre en place.

Source : Rapport d'information précité de Philippe Dallier, L'hébergement d'urgence sous forte tension : sortir de la gestion dans l'urgence

II. PROGRAMME 109 « AIDE À L'ACCÈS AU LOGEMENT »

1. Une baisse de la dépense liée aux aides personnelles au logement qui intervient après la réduction brutale de 5 euros

Comme indiqué précédemment, le programme 109 « Aide à l'accès au logement » enregistre une baisse de ses crédits de 12,4 %, pour atteindre 13,6 milliards d'euros (AE=CP) . Il comprend quasi-exclusivement la contribution de l'État au fonds national d'aide au logement (Fnal) qui finance intégralement les trois aides personnelles au logement : aide personnalisée au logement (APL), allocation de logement familiale (ALF) et allocation de logement à caractère social (ALS).

Les besoins de financement par l'État des aides personnelles au logement se trouvent ainsi réduits de 1,9 milliard d'euros entre 2017 et 2018, en baisse de 12,2 % .

Évolution de la contribution de l'État au Fnal

(en milliards d'euros)

Nb : Pour 2017 et 2018, il s'agit de prévisions issues du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances initial.

Entre 2015 et 2016, la très nette hausse s'explique principalement par la « rebudgétisation » des ALF jusqu'à présent financées par la branche famille de la sécurité sociale.

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Cette évolution intervient après que la subvention d'équilibre de l'État a, au contraire, considérablement progressé , sous l'effet de la rebudgétisation des APL et de l'ALF mais aussi de la tendance haussière de la dépense liée aux aides personnelles au logement.

Évolution de la dépense liée aux trois aides personnelles au logement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les chiffres du compte logement 2016

Le fonds national d'aide au logement enregistre ainsi, année après année, des dépenses inéluctablement à la hausse. Les mesures d'économies prises au cours des dernières années ne parvenaient finalement qu'à contenir l'augmentation . D'ailleurs, le projet de loi de finances rectificative de fin d'année pour 2017 prévoit encore une ouverture de crédits à hauteur de 46 millions d'euros.

Évolution des ressources et des charges du Fnal 2010-2018

(échelle de gauche en milliards d'euros - échelle de droite en millions d'euros)

Nb : entre 2015 et 2016, la très nette hausse s'explique principalement par la « rebudgétisation » des ALF jusqu'à présent financées par la branche famille de la sécurité sociale.

Pour 2017 et 2018, il s'agit de prévisions. Pour 2017, le graphique tient compte de l'ouverture de 46 millions d'euros prévus pour être ouverts dans le projet de loi de finances rectificative de fin d'année pour 2017.

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Parallèlement à cette baisse de la contribution de l'État au Fnal, les autres ressources du fonds restent stables en 2018. La contribution des employeurs progresse très légèrement, pour atteindre 2,738 milliards d'euros. Il est nécessaire de faire des prévisions prudentes sur cette ressource, car l'État doit, le cas échéant, compenser la différence en exécution .

Ainsi, en juillet 2017, le manque de financement constaté pour finir l'année s'expliquait non pas seulement par une dépense supérieure à la prévision initiale mais aussi par la moindre recette attendue sur le produit des cotisations employeurs . Un écart d'environ 60 millions d'euros était constaté, de même d'ailleurs qu'en 2016 (entre la prévision initiale et l'exécution).

Prévision des ressources et charges du Fnal en 2018

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Les baisses de la dépense des aides personnelles au logement et, ce faisant, de la contribution de l'État au Fnal, sont permises principalement par la réforme proposée à l'article 52 du projet de loi de finances et rattaché à la mission . Il est ainsi prévu de mettre en place une « réduction de loyer de solidarité » dans le logement social , qui se répercuterait quasi intégralement sur le montant de l'APL versé aux allocataires concernés .

L'article 52 du projet de loi de finances prévoit également :

- la suppression des aides personnelles au logement servies pour l'accession à la propriété (aides personnelles au logement « accession ») ;

- le gel du montant de l'ensemble des aides ainsi que des loyers dans le secteur du logement social .

L'article prévoit également un dispositif de péréquation pour permettre une mutualisation financière entre les organismes et afin de tenir compte de l'impact de la réforme sur chacun d'entre eux.

Parmi les compensations à la création de la réduction de loyer, le Gouvernement propose aussi l'application du supplément de loyer de solidarité dès que les ressources du ménage dépasseraient les plafonds applicables pour l'attribution du logement social (contre 20 % au-dessus des plafonds actuellement), ce qui permettrait de dégager 17 millions d'euros.

Au total, cet article permettrait une économie d'1,7 milliard d'euros pour l'État, y compris l'amélioration de la lutte contre la fraude.

Répartition des économies en dépenses de l'État issue de l'article 52
du projet de loi de finances pour 2018 (version initiale)

(en euros)

Économie en dépenses de l'État

Baisse de la dépense d'APL consécutive à la création de la réduction de loyer de solidarité

1 500 000 000

Baisse de la dépense d'aides personnelles au logement liée au gel de leur indexation et au gel des loyers dans le parc social

100 000 000

Suppression des aides personnelles au logement « accession »

50 000 000

Lutte contre la fraude

50 000 000

Total

1 700 000 000

Source : commission des finances d'après l'évaluation préalable de l'article 52

En outre, il convient de rappeler qu'en juillet dernier, le Gouvernement a également choisi de mettre en place un abattement forfaitaire de 5 euros sur l'ensemble des aides personnelles au logement versées aux 6,5 millions de bénéficiaires , sans distinction (composition familiale, zone géographique, montant du loyer...).

Créant une vive polémique, notamment sur le fait de savoir si elle avait ou non été prévue par le précédent gouvernement lors de l'élaboration du budget initial 16 ( * ) , cette mesure est finalement entrée en vigueur le 1 er octobre dernier.

Il convient d'ailleurs de noter que le dispositif réglementaire est construit de telle façon que désormais, un simple arrêté pourrait modifier le montant de l'abattement applicable à l'ensemble des aides .

En outre, cette mesure , initialement prise pour équilibrer le Fnal en 2017 mais pour laquelle il n'est pas prévu de date de fin, permet probablement de réduire aussi les charges du Fnal en 2018 , avec en année pleine, une économie estimée à 400 millions d'euros.

2. L'article 52 du projet de loi de finances : une mesure de rendement aux conséquences initialement sous estimées voire insoupçonnées par le Gouvernement
a) Une ponction difficilement soutenable pour le secteur du logement social dans la version initiale de l'article 52 et qui s'ajoute aux autres demandes de financement des politiques publiques

Votre rapporteur spécial ne remet pas en cause le constat du Gouvernement d'une situation financière globalement saine des organismes de logement social et s'en félicite plutôt car elle a permis aussi, au cours des dernières années, de favoriser la construction et la rénovation de logements sociaux .

Compte tenu de la forte contrainte budgétaire que connaît l'État et de la nécessité de réduire les dépenses publiques, il comprend aussi que des efforts soient demandés à l'ensemble des acteurs .

Il partage enfin le sentiment que des regroupements de structures seraient probablement utiles et que la recherche d'une rationalisation du secteur du logement social serait bienvenue .

Pour autant, il ne peut soutenir un dispositif aussi brutal dans ses effets , en conduisant environ deux cent bailleurs sociaux à ne plus disposer d'aucune marge de manoeuvre, voire à ne plus être en mesure de maintenir leur activité.

La création de la « réduction de loyer de solidarité » prévue par l'article 52 du projet de loi de finances, dans sa version initiale déposée à l'Assemblée nationale, engendrait ainsi une perte d'autofinancement estimée à 1,7 milliard d'euros pour les bailleurs sociaux , en pesant directement sur les recettes d'exploitation des organismes. Pour mémoire, en 2014 leur autofinancement net s'établissait à 2,2 milliards d'euros et leur autofinancement global (autofinancement net et marges des activités complémentaires telles que la vente d'actifs immobiliers ou financiers) à 3,3 milliards d'euros. La perte de marge de manoeuvre des organismes est donc loin d'être négligeable avec cette réforme . Cette situation peut en particulier avoir un impact direct sur les opérations de constructions et de rénovations , voir sur l'entretien du patrimoine existant.

La santé financière de bailleurs sociaux est directement entamée par le dispositif proposé par le Gouvernement. Pour les seuls offices d'habitations à loyer modéré (OPH), la création de la réduction de loyer de solidarité telle que prévue initialement par le Gouvernement, conduirait à ce que, selon leur fédération, 122 offices soient en autofinancement négatif en 2018 (158 offices en autofinancement inférieur à 2 % et 196 offices en autofinancement inférieur à 5 %) 17 ( * ) .

Il convient de se rappeler que les collectivités territoriales sont généralement garantes des prêts contractés par les bailleurs sociaux et que la déstabilisation financière du secteur du logement social pourrait avoir des répercussions en chaîne qui ont été probablement sous-estimées par le Gouvernement .

En outre, paradoxalement, la réforme est construite de telle façon que ce sont les bailleurs sociaux qui ont le plus grand nombre de ménages modestes et donc bénéficiaires de l'APL qui se verraient davantage touchés par la réforme , sans tenir aucunement compte de leur situation financière.

Certes, un dispositif de mutualisation , permettant une péréquation entre organismes est prévu, mais il est permis de douter de sa capacité à intervenir suffisamment rapidement pour éviter que certains ne se retrouvent complètement paralysés.

De même, des contreparties financières sont avancées par le Gouvernement pour compenser la création de la réduction de loyer, faciliter la gestion des organismes et leur permettre de poursuivre leurs opérations de construction et de rénovation.

Des prêts à taux fixe et remboursement in fine sont notamment envisagés, à hauteur de 4 milliards d'euros, ainsi que des prêts de haut de bilan bonifiés pour 2 milliards d'euros. Un allongement de la maturité de certains prêts adossés sur les fonds d'épargne est également annoncé, sur une durée maximale de 10 ans.

S'il s'agit de dispositions qui devraient effectivement permettre de faciliter la conclusion d'opérations nouvelles par les bailleurs sociaux, toutes ces solutions ne constituent pour autant que des emprunts et donc, encore une fois, de la dette à venir et qu'il faudra bien rembourser .

La stabilisation du taux du livret A est également prévue pour deux ans, avant de revoir son mode de calcul pour 2020 et les années suivantes. Cette mesure, qui a un indéniable effet sur les prêts accordés aux bailleurs sociaux, conduit toutefois à faire porter une partie du coût de la réforme sur les épargnants titulaires d'un livret A. En outre, elle produit un fort effet d'aubaine pour les banques puisque, d'après l'agence d'évaluation Moody's, le passage du taux de 0,75 % à 1 % leur aurait coûté 920 millions d'euros (pour mémoire, sans le gel, la prévision du taux du livret A pour 2018 et 2019 s'établit à 1,25 %).

En tout état de cause, contrairement à ce que le Gouvernement avance, cette mesure n'est ni une réforme de structure, ni un facteur d'amélioration du pouvoir d'achat des Français. Au contraire, c'est bien une mesure de rendement budgétaire .

Les locataires ne bénéficient ainsi que très peu de la baisse de loyers car celle-ci est principalement répercutée sur le montant des APL qu'ils perçoivent . Ainsi, une personne isolée voyant son loyer réduit de 50 euros en zone I ne devrait bénéficier, en réalité, que de 1 à 5 euros à proprement parler.

Les seuls véritables gagnants sont les locataires qui se trouveraient sous les plafonds de loyers et bénéficieraient ainsi de la réduction de loyer de solidarité mais ne toucheraient pas, en revanche, d'APL. En effet, la réforme proposée à l'article 52 déconnecte les plafonds de ressources applicables pour la réduction de loyer et pour l'APL. Ainsi, le Gouvernement estimait à 107 000 ménages le nombre de ces locataires, ce qui est très peu comparé aux 2,3 millions de ménages percevant l'APL.

Toutefois, il semblerait que ce chiffre, comme le reste de la réforme d'ailleurs, ne correspondent pas, en réalité, à un nombre d'allocataires équitablement répartis. Certains organismes compteraient ainsi de nombreux locataires dans ce cas.

Enfin, la création de la réduction de loyer de solidarité intervient alors qu'il est demandé encore davantage aux bailleurs sociaux pour le financement des politiques publiques .

L'article 19 du projet de loi de finances pour 2018 prévoit ainsi que la participation des organismes de logement social au Fonds national des aides à la pierre (Fnap) passe de 270 millions d'euros à 375 millions d'euros (par le biais de leur contribution à la CGLLS notamment), soit 105 millions d'euros supplémentaires pour compenser le fait que la contribution de l'État ne s'élèverait plus qu'à 50 millions d'euros en crédits budgétaires 18 ( * ) .

Ensuite, les bailleurs sociaux constituent des acteurs majeurs pour la mise en oeuvre des programmes de rénovation urbaine . Au titre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), il est envisagé qu'ils interviennent , non seulement chacun directement pour les opérations concernant leurs patrimoine, mais aussi dans le financement du programme lui-même .

Ainsi, pour passer l'enveloppe du NPNRU de 6 à 10 milliards d'euros comme souhaité par le Gouvernement, 2 milliards d'euros devraient être apportés par les bailleurs sociaux - selon les négociations qui étaient en cours - équivalant à 135 millions d'euros par an (pendant 15 ans) 19 ( * ) .

En conséquence, il conviendrait d'éviter que l'article 52 du projet de loi de finances ne conduise à remettre en cause la mise en oeuvre de politiques publiques aussi essentielles que la construction de logements sociaux et la rénovation urbaine .

Au-delà, ce sont les conséquences en chaîne sur l'ensemble du secteur de la construction, de la rénovation et du marché du logement qu'il convient d'éviter.

b) Le risque de remettre en cause la bonne dynamique du secteur de la construction et de la rénovation

Comme indiqué précédemment, selon les chiffres transmis par le Gouvernement, plus de 120 000 logements sociaux ont été financés en 2016 et un nombre quasi équivalant devrait l'être à fin 2017. Ce sont des chiffres particulièrement bons qu'il convient de souligner.

Or, la réduction des fonds propres engendrée par le présent article risque de conduire les bailleurs sociaux à revoir leurs investissements de façon importante à compter de 2018 , tant dans le domaine de la construction que de la rénovation. Ce ne sont pas les dispositifs de péréquation mis en place ni les compensations financières envisagées par le Gouvernement qui permettront de l'éviter complètement.

Ainsi, selon la Fédération française du bâtiment (FFB), les organismes de logement social représentent à eux seuls 15 % du chiffre d'affaire du secteur .

L'impact de la mesure proposée par le Gouvernement pourrait également avoir des conséquences sur la construction des logements intermédiaires et libres , en particulier dans les territoires concernés par l'application de l'article 55 de la « loi SRU » 20 ( * ) . En effet, certaines communes sont contraintes, dans leurs documents d'urbanisme, de prévoir un certain pourcentage de logements sociaux dans leurs plus grosses opérations immobilières. Si les bailleurs sociaux ne peuvent plus y participer, certains projets pourraient ainsi ne plus se concrétiser.

Il convient d'éviter de casser la dynamique retrouvée après plusieurs années de crise , tandis que, d'après la FFB, 2017 devrait constituer la première année de retour à la création d'emplois dans le secteur du bâtiment.

c) La suppression de l'aide personnelle au logement « accession » : une erreur lorsque l'on veut soutenir l'accession sociale à la propriété

Parmi les autres mesures de l'article 52, figure notamment la suppression de l'aide personnelle au logement « accession » .

Celle-ci avait déjà été envisagée, pour transformer l'aide en « filet de sécurité » pour les accédants à la propriété en difficulté, dans le cadre de la loi de finances pour 2015 21 ( * ) , et le Sénat s'y était opposé. Finalement, la loi de finances pour 2016 22 ( * ) avait confirmé la position du Sénat, en prévoyant le maintien de ces aides.

Il est généralement avancé, pour justifier leur suppression qu'elles bénéficient à un nombre toujours plus restreint d'allocataires et n'auraient pas nécessairement l'effet déclencheur escompté pour la vente, d'autant que serait maintenu le prêt à taux zéro (PTZ).

Toutefois, votre rapporteur spécial ne peut que rappeler les raisons pour lesquelles il considère que les aides personnelles au logement « accession » constitue un dispositif qui mérite d'être conservé . Le dispositif compterait ainsi environ 30 000 nouveaux entrants chaque année.

Tout d'abord, il convient de faciliter l'accession à la propriété des ménages modestes et non de la rendre plus complexe, tandis que les inégalités d'accès à la propriété se renforcent , comme le rapport d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances, a pu le mettre récemment en évidence 23 ( * ) .

Évolution du taux de propriétaires parmi les 25-44 ans

(en %)

Note de lecture : les ménages modestes sont ceux au sein desquels l'âge de la personne de référence est compris entre 25 à 44 ans et qui relèvent du premier quartile de niveau de vie (Q1).

Source : commission des finances du Sénat (d'après : enquêtes logement Insee 1973-2013), rapport d'information n° 75 (2017-2018) d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2017, La « rente immobilière », mythe et réalités

En outre, ces aides à l'accession sont prises en compte par les établissements de crédit pour la détermination du plan de remboursement des ménages et bénéficient majoritairement à des familles .

Les ménages pourraient également être conduits à renoncer à devenir propriétaires , en faisant l'arbitrage de conserver le bénéfice des aides personnelles au logement en restant locataires.

Il est d'ailleurs assez paradoxal que le Gouvernement décide de supprimer ces aides tandis qu'il souhaite développer les cessions dans le secteur du logement social . En effet, selon les chiffres du ministère de la cohésion des territoires, 3 289 logements sur les 8 442 ventes réalisées par les bailleurs sociaux en 2016 l'avaient été au profit des personnes occupant le logement. Il paraît essentiel qu'elles puissent encore bénéficier du « coup de pouce » que peut constituer l'APL « accession ».

d) Une version légèrement assouplie votée à l'Assemblée nationale, avec une montée en charge sur trois ans de la réduction de loyer de solidarité, mais qui doit encore être améliorée

Sur l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à modifier l'économie générale de l'article.

Il prévoit tout d'abord une montée en charge progressive sur trois ans de la réduction de loyer de solidarité, pour obtenir un rendement de 800 millions d'euros en 2018, 1,2 milliard d'euros en 2019 et enfin 1,5 milliard d'euros en 2020 sur les dépenses d'APL.

En contrepartie , afin de maintenir une économie d'1,5 milliard d'euros sur les dépenses de l'État au titre des APL, une partie des ressources de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) serait affectée au FNAL (700 millions d'euros en 2018, 300 millions d'euros en 2019). Le taux de la première cotisation de la Caisse serait porté en conséquence à 8 %.

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale ne remet donc pas en cause la réduction de loyer à hauteur d'1,5 milliard d'euros mais diffère son entrée en vigueur pleine et entière à 2020 .

D'ailleurs, les plafonds de réduction de loyer de solidarité restent identiques à la version initiale de l'article, laissant ainsi possible toute hypothèse de montée en charge par le Gouvernement.

L'Assemblée nationale a également supprimé le fait que le supplément de loyer de solidarité serait désormais appliqué dès que les ressources du ménage dépassent les plafonds applicables pour l'attribution du logement social. En séance publique, le Gouvernement a renvoyé le sujet au projet de loi relatif au logement dans lequel devraient figurer des dispositions sur la politique des loyers dans le secteur du logement social.

Ces modifications apportées par l'Assemblée nationale sont un « premier pas » mais l'article 52 du projet de loi de finances pour 2017 doit encore évoluer afin de rendre le dispositif proposé soutenable pour les organismes de logement social.

3. Un travail de concertation et de compromis en cours pour proposer un ensemble de mesures permettant d'assurer la soutenabilité du dispositif pour le secteur du logement social

Compte tenu des difficultés engendrées par la mise en oeuvre de l'article 52 du projet de loi de finances et des crispations créées, tant dans le secteur du logement social que du bâtiment, votre rapporteur spécial participe, notamment dans le cadre de ses auditions, à la recherche d'une solution de compromis et soutenable pour les bailleurs sociaux .

La solution , certes plus souple, votée par l'Assemblée nationale, ne permet pour autant pas de répondre de façon satisfaisante aux inquiétudes des acteurs du logement social , en particulier s'agissant du montant initial de la réduction de loyer de solidarité en 2018 et de sa montée en charge sur trois ans.

De nombreuses pistes sont ainsi avancées , à l'instar du relèvement du taux réduit de TVA à 10 % sur les travaux de construction et de rénovation des bâtiments. D'ailleurs, le Gouvernement a laissé entendre que cette solution était effectivement à l'étude lors de l'examen de la mission « Cohésion des territoires » à l'Assemblée nationale.

D'autres organismes de logement social proposaient également, comme le suggérait d'ailleurs la Cour des comptes dans un récent référé sur les dépenses fiscales en faveur du logement social, de supprimer l'exonération d'impôt sur les sociétés.

Il est également proposé par certains que la réduction de loyer de solidarité soit transformée en « réduction forfaitaire de charges », laquelle serait assise sur les logements ayant les moins bonnes performances énergétiques. La création d'une nouvelle taxe sur les logements les plus « énergivores » et qui viendrait alimenter le Fonds national d'aide au logement serait également envisagée.

Toutes ces solutions sont expertisées mais l'équilibre permettant à la fois de parvenir à une réduction de la dépense de l'État au titre des aides personnelles au logement et à une solution qui ne risquerait pas de déstabiliser le secteur du logement social , essentiel dans notre politique du logement, n'est, à ce stade, pas atteint .

À titre personnel, votre rapporteur spécial a présenté , à l'occasion de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, un amendement tendant à remonter le taux réduit de TVA à 10 % pour les opérations de construction et de rénovation du secteur du logement social (contre 5,5 % actuellement) , en excluant toutefois les opérations d'accession sociale à la propriété qui n'étaient pas directement concernées par la réforme proposée à l'article 52. Il a été adopté par le Sénat et constitue désormais l'article 6 ter A du projet de loi de finances tel qu'issu de ses travaux.

Calibrée pour avoir un rendement attendu d'environ 600 millions d'euros dès 2018 , cette mesure a finalement été chiffrée à 700 millions d'euros à l'article d'équilibre. Elle constitue l'un des leviers de substitution à une partie de la réduction de loyer de solidarité et/ou à la contribution de la CGLLS au Fnal .

4. Des réformes structurelles des aides personnelles au logement restent nécessaires, notamment pour garantir une certaine équité

Ni l'abattement forfaitaire de 5 euros mis en place par le Gouvernement au cours de l'année 2017, ni les mesures prises au sein de l'article 52 du projet de loi de finances initial pour 2018 (qu'il s'agisse de la réduction de loyers dans le secteur du logement social corrélée à une baisse des APL ou des gels du montant de l'ensemble des aides et des loyers dans le secteur social) ne constituent des réformes structurelles relatives aux aides personnelles au logement .

Pourtant, certaines dispositions pourraient utilement être prises afin d'améliorer le système mis en place, notamment afin de garantir une plus grande équité entre les bénéficiaires et vis-à-vis de l'ensemble des ménages .

Ainsi, comme à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2016, votre rapporteur spécial proposera au Sénat d'adopter plusieurs amendements allant en ce sens, notamment pour prendre en compte un taux d'effort minimal des ménages dans le calcul des aides personnelles au logement , qui serait fonction de la composition du ménage, de leur loyer ou de leur remboursement de prêt et de leurs ressources.

Votre rapporteur spécial suivra également avec intérêt la mise en oeuvre, annoncée pour 2019 , de la prise en compte contemporaine des revenus des allocataires , c'est-à-dire les ressources dont ils disposent pour l'année en cours et non plus celles constatées en année n-2 comme actuellement. Cela permettra ainsi de mieux apprécier la situation réelle des bénéficiaires des aides, avec une économie de plus d'un milliard d'euros par ailleurs attendue 24 ( * ) .

III. PROGRAMME 135 « URBANISME, TERRITOIRES ET AMÉLIORATION DE L'HABITAT »

A. VERS LA FIN ANNONCÉE DES AIDES À LA PIERRE FINANCÉES PAR L'ÉTAT

Pour 2018, le projet de loi de finances prévoit un financement des aides à la pierre par des crédits budgétaires à hauteur de 50 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement , contre 200 millions d'euros en 2017.

La tendance au désengagement de l'État se confirme donc, comme votre rapporteur spécial n'avait cessé de l'annoncer et notamment lors de la création du Fnap. Le financement paritaire État-bailleurs sociaux n'aura finalement jamais été confirmé dans les faits et il est même désormais acquis que les crédits d'aides à la pierre ne seront bientôt plus portés que par les bailleurs sociaux.

Les crédits de paiement inscrits au titre des aides à la pierre sur le budget de l'État ont ainsi été réduits de 90 % entre 2011 et 2018.

Évolution des crédits budgétaires inscrits au titre des aides à la pierre
au sein du programme 135

(en millions d'euros)

Nb : avant la création du Fonds national des aides à la pierre (Fnap) en 2016, les autorisations d'engagement tenaient compte des aides à la pierre qui étaient également financés par le fonds de péréquation. Ce n'est plus le cas depuis la création du Fnap.

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Toutefois, compte tenu de la participation croissante des bailleurs sociaux, le Fonds national des aides à la pierre (Fnap) continue de bénéficier d'une enveloppe de 425 millions d'euros (AE=CP) en 2018, laquelle est inscrite au titre des fonds de concours dans le projet annuel de performances de la mission.

Ainsi, la contribution des organismes de logement social au Fnap, par le biais de leurs cotisations versées à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), passerait de 270 millions d'euros en 2017 à 375 millions d'euros en 2018 , représentant une hausse de 105 millions d'euros (+ 39 % en un an) .

En effet, l' article 19 du projet de loi de finances pour 2018 prévoit de relever de 105 millions d'euros la contribution des bailleurs sociaux au Fnap.

Si aucune hausse de leurs cotisations à la CGLLS n'était prévue dans le texte initial pour couvrir cette enveloppe supplémentaire, l'Assemblée nationale a depuis inséré un nouvel article 52 quater tendant à instaurer une taxe sur le produit des cessions réalisées par les organismes de logement social et dont les recettes qui en sont issues sont destinées à financer le Fnap.

Son rendement serait d' environ 70 millions d'euros , en l'état des ventes réalisées par les bailleurs sociaux en 2016 (8 442 cessions réalisées ; 88 541 euros le prix moyen de cession). Le Gouvernement espère toutefois atteindre 15 000 cessions par an, permettant d'obtenir 130 millions d'euros sur la même base du prix moyen de cession.

Il convient en tout état de cause de maintenir des ressources suffisamment importantes pour le Fnap au cours des prochaines années, dans la mesure où les restes à payer continuent de rester élevés, avec une estimation à près de 2 milliards d'euros à fin 2017 (stable par rapport à fin 2016).

En termes de résultats, les constructions nouvelles et acquisitions représentaient plus de 124 000 logements financés en 2016 (hors construction en outre-mer et dans le cadre de la rénovation urbaine), ce qui constitue une excellente année dont il convient de se féliciter . Les prévisions à fin août 2017 indiquent également près de 120 000 logements financés cette année.

Plus globalement, la construction de logements est nettement repartie et il appartient de rester vigilant quant à l'impact négatif que pourrait avoir certaines des réformes portées par l'actuel Gouvernement , qu'il s'agisse de l'article 52 du projet de loi de finances pour 2018 qui crée d'ici 2020 une perte d'autofinancement de 1,7 milliard d'euros sur les bailleurs sociaux, au risque qu'un certain nombre d'entre eux ne puisse y faire face, ou même du recentrage de l'impôt de solidarité sur la fortune sur les seuls biens immobiliers, avec la création de l'impôt sur la fortune immobilière (article 12 du projet de loi de finances pour 2018).

B. LE RETOUR DE L'ÉTAT DANS LE FINANCEMENT DE L'ANAH : UN SOUTIEN BIENVENU POUR COMPENSER LA FIN DES ENGAGEMENTS DU PIA, LA NÉCESSITÉ DE FIXER DES OBJECTIFS RÉALISTES

1. Une enveloppe budgétaire bienvenue de 110 millions d'euros en 2018 et d'1,2 milliard d'euros sur le quinquennat, pour prendre le relais du PIA qui s'achève

Pour la première fois depuis 2013 (ou 2012 si l'on tient compte du fait que les crédits inscrits en 2013 n'ont finalement jamais été versés à l'Anah), le programme 135 de la mission « Cohésion des territoires » prévoit une nouvelle enveloppe de 110 millions d'euros (AE=CP) pour 2018, destinée à lutter contre les « passoires thermiques » des ménages les plus précaires en finançant le programme « Habiter mieux ».

Ces crédits sont d'ailleurs compris dans les 1,2 milliard d'euros que le Gouvernement entend consacrer à ce programme au cours du quinquennat et qui figurent parmi les 57 milliards d'euros du « Grand plan d'investissement » (GPI) lancé le 25 septembre 2018.

Présentation synthétique des investissements du Grand plan d'investissement par axe d'intervention

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances d'après les données du rapport au Premier ministre sur le grand plan d'investissement 2018-2022, septembre 2017

Les montants annoncés en faveur de ce programme géré par l'Anah sont donc conséquents et l'on ne peut que se réjouir du retour de l'État, par des crédits budgétaires, dans le financement de cette politique publique essentielle pour accompagner les ménages modestes et favoriser la transition énergétique.

Ils garantissent, en effet, une ressource stable - les crédits du GPI ne devant, en principe, pas faire l'objet de mise en réserve ni de régulation en cours d'année - et assurée sur cinq ans , selon les engagements pris par le Gouvernement.

Cette évolution rejoint les préconisations de votre rapporteur spécial qui, au cours de l'examen des derniers projets de loi de finances, appelait de ses voeux l'attribution de ressources permettant de sécuriser le budget de l'agence, lequel repose essentiellement sur les cessions de quotas carbone dont le cours ne cesse de varier.

En outre, les dotations accordées chaque année devraient même progresser puisqu'avec 1,2 milliard d'euros pour la période 2018-2022 et 110 millions d'euros inscrits pour 2018, près d'1,1 milliard d'euros restent disponibles pour les quatre années à venir.

En revanche, ces crédits budgétaires ne constituent pas des moyens nouveaux pour l'Anah , même si l'enveloppe est conséquente . En effet, ils prennent surtout le relais du Fonds d'aide à la rénovation thermique (Fart) , issu du premier programme d'investissements d'avenir (PIA 1). Initialement doté de 500 millions d'euros en 2010, il a finalement atteint, par le biais de redéploiement de crédits de programmes, 687 millions d'euros. Il permet de financer l'aide de solidarité écologique (ASE) qui complète les subventions spécifiques de l'Anah dans le cadre du programme « Habiter mieux ». Les engagements pour la période 2010-2016 ont atteint 552 millions d'euros.

Conformément à la convention conclue lors de la création de ce fonds, les engagements sur le programme s'achèvent à la fin de l'année 2017 . Les crédits non employés seront ainsi rendus au budget général de l'État . L'Anah espère que ces crédits, qui devraient représenter autour de 30 millions d'euros d'après les dernières estimations, lui reviendront.

2. Un budget de l'Anah davantage sécurisé mais toujours soumis à l'aléa du cours des cessions de quotas carbone

À ce stade et contrairement aux autres années, votre rapporteur spécial n'a pas eu connaissance des hypothèses de travail de l'Anah pour le budget 2018 , en termes de ressources et de dépenses, faute de validation par les ministères de tutelle de l'agence. Il a donc travaillé à partir des éléments figurant dans les réponses à son questionnaire budgétaire et des informations recueillies lors de l'audition de Blanche Guillemot, directrice générale de l'Anah.

Les ressources devraient, en tout état de cause, rester les mêmes :

- principalement le produit de la mise aux enchères des quotas carbone ;

- le produit de la taxe sur les logements vacants, affecté à l'agence pour un montant maximal de 21 millions d'euros ;

- la contribution des fournisseurs d'énergie ;

- la contribution de la caisse nationale de la solidarité pour l'autonomie. Un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale permet de prolonger la participation de la CNSA au financement de l'adaptation des logements à la perte d'autonomie, à hauteur de 20 millions d'euros en 2018 (contre 40 millions d'euros par an pour la période 2015-2017).

Comparaison du budget de l'Anah sur la période 2016-2018
par nature du financement

(en millions d'euros)

Nb : pour 2018, le budget présenté ne tient pas compte des 110 millions d'euros affectés au titre du programme « Habiter mieux » car les précédents budgets ne tenaient pas compte des crédits du PIA dont ils prennent principalement le relais. Toutefois, ils constitueront bien une ressource stable de l'Anah en 2018 et intégrée à son budget.

Source : commission des finances d'après les chiffres fournis par l'Anah lors de l'audition de sa directrice générale et du questionnaire budgétaire

Il ne devrait en revanche n'y avoir aucune contribution d'Action logement comme par le passé, sauf si la prochaine convention pluriannuelle conclue entre elle et l'État le prévoyait. Toutefois, cette hypothèse est assez peu probable, Action logement étant a priori davantage enclin à soutenir des politiques publiques rejoignant plus directement ses activités. Or l'Anah intervient assez peu sur le secteur locatif.

La contribution de 50 millions d'euros dont a bénéficié l'agence en 2017 par le fonds de financement pour la transition énergétique reste exceptionnelle et ne devrait pas se reproduire en 2018. En effet, ce fonds n'a pas vocation à perdurer.

S'agissant du produit des cessions de quotas carbone, l'aléa de la ressource assurée à l'Anah reste prégnant .

Pour 2018, les hypothèses de l'agence reposent actuellement sur un cours s'établissant avec un prix moyen de 6,2 euros la tonne , en tenant compte d'un accord conclu à Bruxelles au début de l'année 2017 et qui devrait permettre de soutenir le marché du carbone, pour produire surtout ses effets à compter de 2019.

Ces prévisions s'avèrent toutefois incertaines : en 2017, alors que l'estimation s'élevait à 6 euros la tonne dans le budget de l'agence, le cours moyen constaté ne s'est finalement élevé qu'à 4,99 euros la tonne de janvier à juillet. D'un autre côté, la projection pour la période d'août à décembre 2017 est évaluée à 5,3 euros la tonne mais la réalisation pourrait être finalement meilleure compte tenu des cours constatés depuis le mois de septembre. Effectivement, le prix à la tonne s'élève actuellement autour de 7 euros.

Chaque année, la principale ressource de l'Anah reste donc très variable et, en tout état de cause, d'un montant éloigné du plafond d'affectation de cette taxe à l'agence , fixé à 540 millions d'euros.

Évolution du produit des cessions de quotas carbone -
Prévision et réalisé sur la période 2014-2018

(en millions d'euros)

Nb : Pour 2017, il s'agit d'une prévision d'exécution à fin d'année et pour 2018 d'une hypothèse de travail

Source : commission des finances d'après les chiffres de l'Anah et du questionnaire budgétaire

Quoiqu'il en soit, la situation financière de l'Anah est meilleure qu'au cours des années précédentes puisque son fonds de roulement lui permet actuellement de couvrir deux mois d'activité , contre trois semaines auparavant.

3. Des objectifs trop élevés voire irréalistes ?

L'Anah voit ses objectifs maintenus à des niveaux élevés pour 2018, en particulier 75 000 logements rénovés dans le cadre du programme « Habiter mieux », dont 10 000 issus de copropriétés fragiles.

La fixation d'objectifs ambitieux pour les rénovations thermiques est positive mais elle doit également rester réaliste . En effet, en 2016, le nombre de logements à rénover avait été fixé à 50 000 en début d'année, pour être ensuite porté à 70 000 avec des moyens supplémentaires accordés (redéploiement de crédits en faveur du Fart dans le cadre du PIA notamment). Or finalement se sont 40 726 logements qui ont pu être rénovés, soit seulement 58 % de l'objectif révisé en cours d'année.

En 2017, le précédent gouvernement a même porté cet objectif à 100 000 logements, dont 30 000 dans des copropriétés fragiles. Or, d'après les éléments recueillis par votre rapporteur spécial, le résultat devrait plutôt atteindre 60 000 logements cette année, ce qui constituerait déjà une nette augmentation par rapport à 2016 mais loin d'atteindre l'objectif initialement fixé. Celui-ci était d'ailleurs probablement irréaliste . Il est même possible que les résultats obtenus en fin d'année soient encore moins élevés car il s'agit de projections, probablement optimistes, de l'Anah.

C. LA MISE EN EXTINCTION DU DISPOSITIF DES « MAIRES BÂTISSEURS » : COMMENT INCITER LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES À CONSTRUIRE ?

Le projet de loi de finances pour 2018 ne prévoit aucune enveloppe budgétaire pour le dispositif dit des « maires bâtisseurs » , instauré par un décret du 24 juin 2015 25 ( * ) et consistant en une aide financière apportée aux communes participant à l'effort de construction de logements.

Ce dispositif n'a d'ores et déjà pas été reconduit en pratique en 2017 puisque les crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale (24,4 millions d'euros) ont simplement permis de couvrir le paiement de l'aide accordée en 2016 , seuls 4,9 millions d'euros restant ensuite disponibles pour 2017. En conséquence, les 70 millions d'euros d'autorisations d'engagement prévus pour 2017 n'ont pas été engagés.

Pour mémoire, cette aide, créée par voie réglementaire, avait pour objectif d'offrir un soutien financier aux communes qui construisent des logements sociaux dans les zones tendues (A bis , A et B1), afin de les aider à réaliser les équipements et infrastructures publics nécessaires.

Elles doivent disposer d'un potentiel financier par habitant inférieur à 1 030 euros mais ne pas faire l'objet d'un arrêté de carence au titre de l'article 55 de la « loi SRU » 26 ( * ) , codifié à l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation. Le seuil de construction à partir duquel l'aide était versée avait été fixé à 1 % du parc existant.

Un mécanisme d'ajustement du montant de l'aide était également prévu pour permettre au Gouvernement de rester chaque année dans l'enveloppe globale fixée pour le dispositif, tout en tenant compte du nombre de logements autorisés.

Si en 2015, une aide de 2 100 euros par logement financé avait été attribuée à 472 communes (16 722 logements, pour une dépense de 35,1 millions d'euros), elle était retombée à 1 320 euros en 2016 pour chacun des 34 239 logements autorisés dans les 533 communes concernées (équivalant à 45,2 millions d'euros).

À l'occasion de ses précédents rapports, votre rapporteur spécial avait mis en évidence les limites à ce dispositif dont l'objectif ne pouvait toutefois qu'être partagé : sa faible portée , du fait des critères retenus (en particulier s'agissant du potentiel financier), et son caractère difficilement lisible puisque, d'une année à l'autre, les communes n'avaient aucune garantie de pouvoir en bénéficier.

En conséquence, il n'est pas étonnant que ce dispositif soit si rapidement remis en cause . Pour autant, il est nécessaire d'inciter les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à construire , dans un contexte de contrainte budgétaire forte pour les collectivités territoriales.

Le Gouvernement a d'ailleurs annoncé , dans son plan « Stratégie logement », la mise en place d'un dispositif d'intéressement financier à la construction pour les collectivités territoriales s'engageant à construire sur leur territoire. Il serait ainsi en cours d'élaboration dans le cadre d'un groupe de travail sur la réforme de la taxe d'habitation.

Interrogé sur l'avancée de ces travaux, le ministère chargé du logement n'a pas été en mesure d'apporter d'éléments d'information supplémentaires à ce stade.

Le groupe de travail de la commission des finances sur le financement et la fiscalité du logement avait déjà mis en évidence la nécessité de renforcer la possibilité offerte aux collectivités territoriales de capter une partie de la plus-value liée au fait qu'un terrain nu soit devenu constructible 27 ( * ) .

IV. PROGRAMME 147 « POLITIQUE DE LA VILLE » : DES AMBITIONS AFFICHÉES QUI DOIVENT SE CONCRÉTISER

1. Une sanctuarisation des crédits spécifiques de la politique de la ville qui ne permet pas de rassurer les acteurs
a) Un budget stable par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, à l'exception des crédits consacrés à la rénovation urbaine...

Avec 430 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement , le programme 147 « Politique de la ville » est respectivement en baisse de 16,3 % et stable par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

L'importante baisse d'autorisations d'engagement s'explique principalement par le montant de la contribution de l'État au titre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), qui passe de 100 millions d'euros prévus en loi de finances pour 2017 à seulement 15 millions d'euros en 2018.

Toutefois, le nouveau Gouvernement a décidé, en juillet 2017, d'annuler 130 millions d'euros en autorisations d'engagement et 46,5 millions d'euros en crédits de paiement, dans le cadre du décret d'avance précité du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

Parmi ces annulations, figuraient en particulier les 100 millions d'euros d'autorisations d'engagement et les 15 millions d'euros de crédits de paiement inscrits au bénéfice du NPNRU.

Comparaison des crédits du programme 147
entre 2017 et 2018

(en millions d'euros)

Nb : la prévision pour 2017 après décret d'avance correspond à l'enveloppe telle que disponible après application des annulations de crédits prévus par le décret d'avance du 20 juillet 2017 précité.

Source : commission des finances d'après les données des documents budgétaires et du décret d'avance du 20 juillet 2017

Les crédits des actions du programme autres que celle relative à la rénovation urbaine (action 04 « Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie ») restent globalement stables par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Évolution des crédits du programme 147

(en euros)

Actions du programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2017

PLF 2018

Évolution

LFI 2017

PLF 2018

Évolution

01 Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville

335 888 150

335 758 441

- 0,04 %

335 888 150

335 758 441

- 0,04 %

02 Revitalisation économique et emploi

48 522 000

50 330 000

3,73%

48 522 000

50 330 000

3,73 %

03 Stratégie, ressources et évaluation

29 913 510

29 318 354

- 1,99 %

29 913 510

29 318 354

- 1,99 %

04 Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie

100 036 000

15 000 000

- 85,01 %

15 036 000

15 000 000

- 0,24 %

Total du programme

514 359 660

430 406 795

- 16,32 %

429 359 660

430 406 795

0,24 %

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016

S'agissant des crédits consacrés aux actions territorialisées des contrats de ville , prévus à l'action 01 du programme, ils restent parfaitement stables par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, avec 271,75 millions d'euros, auxquels s'ajoutent les 64 millions d'euros consacrés au programme adultes-relais.

Le tableau ci-dessous met en évidence le fait que l'essentiel des enveloppes consacrées à la mise en oeuvre des contrats de ville sont identiques à l'an dernier. Certains ajustements et redéploiement entre actions sont toutefois observés, à l'instar d'une augmentation de 16 % (+ 7 millions d'euros) de la dotation allouée au développement économique à l'emploi et au soutien entrepreneurial, présenté comme un axe prioritaire dans le projet annuel de performances de la mission.

Évolution des crédits consacrés aux actions territorialisées des contrats de ville
et programme adultes-relais en 2017 (action 01)

(en millions d'euros)

PLF 2017

PLF 2018

ACTIONS TERRITORIALISEES DES CONTRATS DE VILLE

270,6

271,8

Pilier Emploi et développement économique

48,6

55,8

Développement économique, emploi et soutien entrepreneurial

44,6

51,8

Écoles de la deuxième chance

4

4

Pilier Cohésion sociale

203,4

195,9

Éducation hors dispositif programme de réussite éducative

22,3

22,3

Programme de réussite éducative

77,3

70

Santé et accès aux soins

10,1

10,1

La culture et l'expression artistique

14,9

14,9

Lien social, participation citoyenne

66,4

66,4

Parentalité et droits sociaux

5,8

5,8

L'accès aux droits et la prévention des discriminations

6,6

6,3

Pilier Cadre de vie et rénovation urbaine

8,6

10

Le volet « habitat et cadre de vie » des contrats de ville

6,3

6,6

Le volet « transport et mobilité »

2,3

3,4

Pilotage, ingénierie et évaluation des contrats de ville

10

10,1

PROGRAMMES ADULTES-RELAIS

67,2

64

TOTAL POUR L'ACTION 01

337,8

335,8

Nb : Le présent tableau reprend la nomenclature du projet annuel de performances de la mission « Cohésion des territoires » annexé au PLF 2018 pour ce qui concerne l'action 01 « Actions territorialisées des contrats de ville et dispositifs spécifiques de la politique de la ville ».

Source : commission des finances du Sénat, d'après les projets annuels de performances relatifs à la mission « Politique des territoires » pour 2017 et à la mission « Cohésion des territoires » pour 2018.

Le programme de réussite éducative connaît au contraire une baisse de 7 millions d'euros expliqué dans le projet annuel de performances par un ajustement à la réalisation pour 2016 et à la prévision de réalisation pour 2017. Cela peut paraître paradoxal que ce programme ne monte pas en puissance parallèlement à la mise en place du programme de dédoublement des classes de CP pour les écoliers scolarisés en REP+ en 2017 et qui devrait se poursuivre pour les CE1 à compter de la rentrée 2018.

S'agissant de l'action 02 « Revitalisation économique et emploi », les crédits consacrés à l'Établissement public d'insertion de la défense (EPIDe) sont maintenus au même montant que ceux prévus dans le projet de loi de finances pour 2017, permettant de soutenir l'activité des centres, notamment celui de Toulouse qui vient d'être créé, ainsi que la mise en place dans nouveau centre dans le Gard.

L'augmentation de 3,73 % de l'enveloppe consacrée à cette action s'explique par la baisse moins rapide qu'attendue des compensations des exonérations de charges sociales en zones franches urbaines en cours d'extinction depuis 2015 (21,5 millions d'euros prévus pour 2018 contre 19,7 millions d'euros dans le projet de loi de finances initiale pour 2017).

b) ... et qui intervient après une forte mesure de régulation budgétaire en juillet 2017

Le décret d'avance précité du 20 juillet 2017 a procédé à une sévère réduction des crédits alloués au programme 147 « Politique de la ville », avec l' annulation de 130,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et 46,5 millions d'euros en crédits de paiement , représentant respectivement 25 % et 11 % des enveloppes initialement inscrites . Cette mesure de régulation budgétaire est donc considérable.

L'annulation a tout d'abord porté sur le nouveau programme nationale de renouvellement urbain (NPNRU) dont le temps de mise en place permettait de supprimer l'ensemble des crédits qui étaient prévus pour son financement en 2017, soit 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et 15 millions d'euros en crédits de paiement.

S'agissant plus spécifiquement des crédits de paiement, les 31 millions d'euros restants à annuler ont été tout d'abord pris sur les crédits portés au niveau national , notamment sur le dispositif adultes-relais qui disposait encore d'une marge budgétaire par rapport à son enveloppe initiale.

Toutefois, 22 millions d'euros ont effectivement dû être remontés des territoires, correspondant à 9 % des crédits . Selon les informations recueillies auprès du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), la répartition a été opérée en fonction des taux de consommation au mois de juillet.

Tous les territoires ont ainsi dû faire remonter au moins 5 % de leur enveloppe, la reprise des crédits ayant représenté entre 5 % et 15 % selon les situations.

Tout en ayant conscience de la contrainte budgétaire à laquelle le Gouvernement doit faire face, votre rapporteur spécial ne peut que regretter que l'on aboutisse à ce type d'annulations particulièrement préjudiciables et comprendre l'incompréhension qu'une telle mesure peut engendrer auprès des acteurs sur le terrain (collectivités territoriales, associations...) mais aussi des populations concernées.

2. Des ambitions affichées dans la rénovation urbaine qu'il reste à confirmer en termes de financements

Le nouveau Gouvernement a affiché de fortes ambitions en matière de rénovation urbaine puisqu'il a en particulier annoncé sa volonté de vouloir passer le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) à 10 milliards d'euros , contre 6 milliards d'euros à l'heure actuelle.

D'ailleurs, un amendement adopté à l'Assemblée nationale a concrétisé cette nouvelle enveloppe de 10 milliards d'euros en l'inscrivant à l'article 9-2 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine ( article 52 sexies du présent projet de loi de finances pour 2018, tel qu'issu des travaux de l'Assemblée nationale). Il précise également qu'un milliard d'euros proviendront de subventions de l'État, conformément aux engagements pris par le Gouvernement.

Pour mémoire, la loi de finances initiale pour 2017 avait d'ores et déjà passé le NPNRU de 5 à 6 milliards d'euros, tout en prévoyant le retour des crédits de l'État dans le financement du programme et de l'Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru).

Toutefois, comme cela a été rappelé précédemment les crédits de paiement inscrits pour 2017 ont finalement été intégralement annulés au cours de l'été 28 ( * ) . L'état d'avancement du NPNRU permettait apparemment de procéder à cette régulation budgétaire.

Si l'on ne peut que partager l'ambition affichée par le Gouvernement en termes de rénovation urbaine, il convient également de rappeler que plusieurs interrogations restent en suspens pour la suite, notamment en termes de financement .

Tout d'abord, l' exécution 2016 a montré que les besoins de décaissements peuvent s'avérer nettement supérieurs à la prévision initiale, conduisant à voter un budget rectificatif qui anticipe notamment la mobilisation de crédits issus de la contribution d'Action logement 29 ( * ) .

Toutefois, selon chiffres transmis par l'Anru, l'exécution 2017 devrait être plus favorable d'un point de vue budgétaire qu'initialement prévu. En effet, les dépenses d'intervention ne devraient finalement s'élever qu'à 486 millions d'euros de crédits de paiement, dont 475 millions d'euros au titre du programme national de rénovation urbaine (PNRU), contre 913,5 millions d'euros initialement prévus, dont 837 millions d'euros pour le PNRU. Cela s'expliquerait par les changements opérés pour simplifier la gestion de la fin du programme, en prévoyant un étalement différent pour les demandes de paiement. Les dépenses, y compris de fonctionnement, devraient ainsi atteindre 507 millions d'euros.

En conséquence, les ressources de l'ANRU devraient finalement s'élever à 645 millions d'euros (contre 900 millions d'euros initialement), avec une participation d'Action logement à « seulement » 610 millions d'euros (850 millions d'euros initialement prévus).

Ainsi, tandis que le niveau de trésorerie de l'agence ne devait laisser que très peu de marge de manoeuvre puisqu'il était estimé à 27 millions d'euros à fin 2017, il s'avère qu'il devrait finalement s'établir à 219 millions d'euros et que la prévision initiale pour 2018 l'estime à 273 millions d'euros.

Le fonds de roulement a quant à lui été considérablement été réduit , passant de 1,6 milliard d'euros en 2013 à 220 millions d'euros en 2016, soit une baisse de 86 % . Il a toutefois légèrement augmenté entre 2015 et 2016. Les prévisions pour 2017 et 2018 n'ont pas été données à votre rapporteur spécial.

Le projet de budget initial pour 2018 prévoit 702 millions d'euros de ressources, avec une participation d'Action logement qui pourrait dès lors être inférieure aux 700 millions d'euros initialement prévue, et des dépenses à hauteur de 650 millions d'euros de crédits de paiement (520 millions d'euros d'autorisations d'engagement), dont 500 millions d'euros au titre du PNRU et 108 millions d'euros pour le NPNRU.

L'ANRU reste quand même prudente sur ces prévisions, notamment sur les décaissements prévus pour la fin du PNRU.

Évolution du niveau de trésorerie et du fonds de roulement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire et aux documents budgétaires.

Par ailleurs, l'engagement de l'État reste pour le moment limité puisque, comme indiqué précédemment, seuls 15 millions d'euros sont inscrits pour 2018 (AE=CP).

Ensuite, si malgré ces quelques difficultés, la situation financière de l'Anru paraît plutôt assurée à court terme et que le financement du NPNRU est aujourd'hui globalement couvert pour 6 milliards d'euros , les projections financières du Gouvernement identifient une « impasse de trésorerie» à moyen et long terme « provenant d'un décalage entre le rythme d'exécution des opérations de renouvellement urbain, sur le PNRU et le NPNRU, et le rythme d'encaissement des ressources , la trajectoire de versement des ressources d'Action logement » (réponse du Gouvernement au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial).

Rappel du rythme de versement de la contribution
d'Action logement 2014-2024

(en millions d'euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Versements d'Action logement

900

850

850

850

700

500

500

500

500

500

500

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Ainsi, « selon les projections financières établies en mai 2017, avec une hypothèse de NPNRU à 6 milliards d'équivalent subvention, et un retour au financement de l'État d'un montant d'1 milliard d'euros à hauteur de 20 % des besoins annuels des crédits de paiements sur le NPNRU de 2017 à 2030, l'Anru devrait faire face à une trésorerie négative de 2018 à 2030 (impasse de trésorerie cumulée atteignant 1, 5 milliard d'euros en 2026) , ce qui se traduirait inévitablement par une très forte dégradation du fond de roulement » (réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial).

Une solution devra donc être trouvée et la mobilisation d'un préfinancement par la Caisse des dépôts et consignations semble désormais écartée alors qu'elle était prévue dans la convention entre l'État, Action logement et l'Anru du 2 octobre 2015 (telle que modifiée en juin 2016).

En effet, les travaux de l'agence et de la Caisse des dépôts et consignations ont fait apparaître qu'un tel prêt ne permettrait pas nécessairement de répondre aux difficultés de trésorerie identifiées et qu'il serait complexe de le mettre en oeuvre. D'après le Gouvernement, un nouveau dispositif devrait être retenu à l'occasion du passage de l'enveloppe du NPNRU de 6 à 10 milliards d'euros.

À ce propos, il reste également à savoir comment seront financés les 4 milliards d'euros supplémentaires .

En principe, 2 milliards d'euros devraient être pris en charge de nouveau par Action logement , qui négocie actuellement avec l'État une nouvelle convention pluriannuelle.

Il était envisagé que les 2 milliards d'euros restant soient couverts par les bailleurs sociaux , mais la réforme proposée à l'article 52 du projet de loi de finances pour 2018 rend difficile toute conjecture sur ce point.

Il conviendra également de s'assurer que les organismes de logement social , qui interviennent par ailleurs financièrement aux côtés de l'Anru pour mettre en oeuvre les opérations de rénovation urbaine, auront encore les moyens de le faire, compte tenu de la réduction de leurs capacités d'autofinancement .

Cela sera d'autant plus le cas que les structures situées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville figurent parmi les bailleurs sociaux qui comptent le plus d'allocataires APL et seront donc les plus touchés par la mise en place d'une « réduction de loyer de solidarité ».

3. Après l'échec de 2013, un nouveau dispositif d'emplois francs porté par la mission « Travail et emploi »

Le Gouvernement a décidé de relancer une nouvelle expérimentation d'emplois francs qui se concrétise, dans le projet de loi de finances pour 2018, par un nouvel article 66 rattaché à la mission « Travail et emploi » et adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

Il est ainsi prévu qu'à titre expérimental, des emplois francs puissent être institués sur une période 18 mois (entre le 1 er avril 2018 et le 31 décembre 2019), par des entreprises implantées sur le territoire national et qui recruteraient un demandeur d'emploi résidant dans certains quartiers prioritaires de la politique de la ville dont la liste devrait être arrêtée. L'embauche devrait prendre la forme d'un contrat de travail à durée déterminée (CDD) ou indéterminée (CDI), pendant au moins six mois.

L'employeur bénéficierait alors, selon l'objet de l'amendement adopté (aucune indication ne figure dans le dispositif voté par l'Assemblée nationale), d'une prime pour l'embauche , correspondant à 5 000 euros par an sur trois ans maximum pour un CDI et à 2 500 euros par an et pendant deux ans maximum pour un CDD de plus de six mois.

Les montants seraient également proratisés en fonction de la quotité de travail et de la durée effective du contrat .

Un rapport d'évaluation doit être réalisé avant le 18 septembre 2019 et remis au Parlement.

Votre rapporteur spécial ne s'oppose pas par principe à une telle initiative mais s'interroge sur l'efficacité d'un dispositif qui, certes sous des formes peut-être plus restrictives, a échoué il y a deux ans .

En effet, le précédent gouvernement a déjà lancé en 2013, sur 10 agglomérations puis 33 sites, un dispositif expérimental des emplois francs, destiné à inciter l'emploi des jeunes âgés de 16 à 30 ans dans les zones urbaines sensibles (ZUS), remplacés depuis par les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).

Les emplois francs pouvaient être créés par des entreprises du secteur marchand, en embauchant des jeunes habitants de ces quartiers depuis au moins six mois et en recherche d'emploi depuis au moins 12 mois au cours des 18 derniers mois.

Pour chaque recrutement en contrat à durée indéterminée et à temps complet, l'employeur recevait une aide forfaitaire de 5 000 euros, versée en deux fois, par Pôle emploi.

L'objectif de 10 000 emplois francs avait été fixé pour le temps de l'expérimentation et les premiers résultats ont rapidement démontré que le dispositif ne fonctionnait pas. En effet, seuls 280 emplois francs ont été signés en 2014, bien loin des 5 000 attendus.

Ce sont principalement les conditions trop contraignantes qui auraient expliqué l'échec de cette expérimentation, laquelle s'est finalement arrêtée dès 2015.

Le Gouvernement actuel considère qu'il offre davantage de souplesse dans son nouveau dispositif. En tout état de cause, celui-ci constituera au mieux un « coup de pouce » pour l'emploi d'habitants de ces quartiers mais ne permettra pas de lutter massivement contre le chômage dont le taux est particulièrement élevé sur ces territoires.

Surtout, c'est la reprise de l'activité économique, la qualité des formations reçues et le développement de ces quartiers, ouverts à davantage de mixité sociale, qui pourront réellement assurer un emploi à leurs habitants .

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 52 (Art. L. 351-2, L. 351-3, L. 411-8-1, L. 441-3, L. 441-11, L. 442-2-1 [nouveau] et L. 481-2 du code de la construction, art. L. 542-2 et L. 831-1 du code de la sécurité sociale) - Réforme des aides au logement et de la politique des loyers dans le parc social

Commentaire : le présent article propose plusieurs mesures tendant à réduire la dépense publique liée aux aides personnelles au logement. Il prévoit en particulier la création d'une réduction de loyer de solidarité applicable aux locataires de logements sociaux dont les ressources sont inférieures à certains plafonds et, en contrepartie, la baisse des aides personnalisées au logement (APL) versées par l'État.

I. LE DROIT EXISTANT

A. DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT SERVIES À PLUS DE 6,5 MILLIONS DE BÉNÉFICIAIRES ET ENTRAÎNANT UNE DÉPENSE PUBLIQUE TOUJOURS PLUS ÉLEVÉE

L'article L. 301-1 du code de la construction et de l'habitation dispose que « toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l'inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d'existence, a droit à une aide de la collectivité pour accéder à un logement décent et indépendant ou s'y maintenir ».

Ces aides personnelles au logement permettent de réduire le taux d'effort des ménages les plus modestes en favorisant l'accès et le maintien dans un logement. Elles peuvent être accordées aux locataires et aux propriétaires (dans ce dernier cas, il s'agit des aides personnelles au logement « accession »).

Il existe trois types d'aides différentes :

- l'aide personnalisée au logement (APL), pour les occupants de logements dits conventionnés ;

- l'allocation de logement familiale (ALF), pour les occupants qui n'entrent pas dans le champ de l'APL et ont une charge de famille. Elle est également versée aux ménages mariés depuis moins de cinq ans ;

- l'allocation de logement sociale (ALS), pour les personnes qui ne perçoivent ni l'APL ni l'ALF.

Les montants de ces aides sont définis en fonction des ressources des demandeurs, de leur situation familiale, de l'implantation géographique du logement et du montant de leur loyer ou de leur remboursement de prêt pour les aides à l'accession.

L'aide tient également compte des charges locatives des bénéficiaires , selon le principe d'un forfait représentatif des charges locatives dit « forfait de charges ».

Le montant de ces aides fait l'objet d'une revalorisation annuelle . Indexée sur l'évolution de l'indice de référence des loyers (IRL), elle est effectuée le 1 er octobre depuis l'adoption de l'article 121 de la loi de finances pour 2014 30 ( * ) et de l'article 77 de la loi n° 2013-1203 de financement de la sécurité sociale pour 2014 31 ( * ) . Elle était auparavant fixée au 1 er janvier de chaque année.

Au 31 décembre 2016, le nombre total des bénéficiaires des aides personnelles au logement s'élevait à 6,481 millions de personnes, en baisse de 0,6 % par rapport à 2015 et 0,9 % par rapport à 2014.

Malgré ces deux années de baisse, le nombre de bénéficiaires a globalement augmenté de 8,5 % depuis 2007, soit 506 000 allocataires supplémentaires.

Bénéficiaires des aides personnelles au logement au 31 décembre 2016

(en milliers de bénéficiaires)

Source : commission des finances d'après les données de la Caisse nationale des affaires familiales et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA)

Il s'agit essentiellement de locataires, puisqu'ils représentent 93 % du total (6,047 millions d'allocataires dans le secteur locatif).

2,831 millions de bénéficiaires le sont au titre de l'APL et relèvent donc du secteur du logement social, ce qui représente un peu moins de 45 % du total. A contrario , le secteur privé couvre 3,65 millions de ménages, répartis entre l'ALF (1,276 millions d'allocataires) et l'ALS (2,374 millions de bénéficiaires).

En termes de dépenses, le montant total des prestations versées au titre des trois aides personnelles au logement n'a cessé d'augmenter au cours des dernières années, pour atteindre 18,1 milliards d'euros en 2016 , dont 17,3 milliards d'euros pour le secteur locatif. Elles représentent ainsi 43 % de l'ensemble des interventions de la puissance publique dans le domaine du logement (aides directes et avantages conférés), lesquelles correspondent à 41,7 milliards d'euros d'après le Compte du logement 2016.

La dépense liée à ces aides a ainsi progressé de plus de 30 % en dix ans .

Depuis la loi de finances pour 2016, l'ensemble des prestations est servi par le Fonds national d'aide au logement (Fnal). Après de nombreuses évolutions, il dispose désormais des ressources suivantes :

- cotisations employeurs (2,738 milliards d'euros en 2018) ;

- produit de la taxe sur les bureaux en Île-de-France (116 millions d'euros en 2018) ;

- produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières (43 millions d'euros en 2018) ;

- contribution de l'État (13,538 milliards d'euros en 2018).

La subvention d'équilibre versée par l'État a, du fait de la hausse des dépenses enregistrées au titre des aides personnelles au logement, mais aussi de la « rebudgétisation » complète des APL et des ALF, considérablement progressé au cours des dernières années. Elle a également connu des périodes d'insincérité budgétaire de la prévision initiale, fréquemment dénoncée par votre rapporteur spécial.

En outre, si diverses mesures d'économie ont été prises au cours des dernières années afin de réduire la dépense liée aux aides personnelles au logement, elles n'ont globalement permis qu'à contenir la hausse 32 ( * ) .

B. LE SECTEUR DU LOGEMENT LOCATIF SOCIAL

D'après l'exposé des motifs qui reprend l'analyse de la Cour des comptes 33 ( * ) , le secteur du logement social bénéficiait de 17,5 milliards d'euros en 2014, dont 8 milliards d'euros d'aides personnelles au logement et 9,5 milliards d'euros d'autres aides aux organismes (notamment pour soutenir la construction, avec des subventions - 2,8 milliards d'euros -, des dépenses fiscales - 4,7 milliards d'euros - et 2,1 milliards d'euros correspondant aux avantages de taux issus de l'accès à l'épargne réglementée de la Caisse des dépôts et consignations ainsi qu'aux prêts d'Action logement).

Le logement social représenterait un logement sur six dans le parc des résidences principales, avec des « gammes de loyers dispersées et insuffisamment corrélées à la capacité d'effort des locataires ».

Selon l'étude de l'INSEE de juillet 2017 sur les conditions de logement en France, les locataires consacraient 28,4 % de leur revenu pour se loger dans le parc privé et 24,1 % dans le parc social en 2013, avec un taux d'effort en hausse de respectivement 4,8 % (parc privé) et 3,9 % (parc social).

En outre, ce taux d'effort progresserait encore davantage pour les ménages les plus modestes puisqu'il serait de + 7,8 % pour les locataires du premier quartile du parc privé et de + 5,1 % pour les locataires du parc social.

Comme votre rapporteur spécial le met également en évidence depuis plusieurs années, l'on constate une situation inégalitaire entre les allocataires des aides personnelles au logement puisqu'il n'y a pas de prise en compte du réel reste à charge.

Selon les données présentées dans l'exposé des motifs, les loyers du secteur social auraient connu une importante augmentation, avec une hausse annuelle moyenne de 1,8 % entre 1984 et 2018, et de 2,8 % par an entre 2006 et 2010 (contre 2,1 % dans le parc privé) 34 ( * ) .

Du point de vue des acteurs, l'on dénombre plus de 1 100 organismes de logement social, parmi lesquels figurent près de 681 organismes d'habitations à loyers modéré (organismes HLM), 188 sociétés d'économie mixte ayant une activité immobilière, 54 sociétés anonymes de crédit immobilier pour l'accession à la propriété et 170 entités n'ayant pas le statut d'organismes d'habitations à loyer modéré mais exerçant une activité de maîtrise d'ouvrage d'insertion.

Parmi les organismes HLM, figurent 264 offices qui gèrent près de 2,3 millions de logements, 230 sociétés anonymes pour environ 2,2 millions de logements, 174 coopératives d'HLM et les sociétés anonymes de crédit immobilier pour l'accession à la propriété (SACICAP).

Les SEM représentent quant à elles 550 000 logements.

La situation financière des organismes de logement social apparaît globalement saine, avec les données suivantes pour 2014 figurant dans l'exposé des motifs et issues de l'analyse de la Caisse des dépôts et consignations 35 ( * ) :

- un excédent brut d'exploitation de 10,4 milliards d'euros, représentant 50 % des loyers, globalement stable depuis 2009 et croissant en volume compte tenu essentiellement de l'augmentation du parc (2 % en 2014) ;

- un autofinancement net de 2,2 milliards d'euros (soit 10,4 % des loyers, entre 7 % et 13 % des loyers entre 2009 et 2014). Il est « stable en 2014 grâce à l'allègement des charges financières induit par la baisse des taux (livret A), qui permet de compenser la hausse du remboursement du capital tirée par l'effort d'investissement » ;

- un autofinancement global, correspondant à l'autofinancement net auquel sont ajoutées les marges des activités complémentaires telles que la vente d'actifs immobiliers ou financiers, de 3,3 milliards d'euros (soit 15,8 % des loyers), qui « vient alimenter les ressources de long terme ».

Leur niveau de trésorerie était évalué à 11 milliards d'euros en 2014.

Toujours selon l'exposé des motifs, les fonds propres des bailleurs sociaux seraient consolidés, avec un poids relativement aux dettes financières passant de 43 % à 52 % entre 2009 et 2014.

Leur potentiel financier connaîtrait également un niveau toujours élevé, avec une moyenne de 1 400 euros par logement entre 2009 et 2014.

Enfin, « les alertes portant sur l'équilibre financier des organismes de logement social sont rares et d'ampleur réduite et la sinistralité du secteur est très faible » (exposé des motifs). En effet, la garantie de la Caisse de garantie du logement locatif social est rarement utilisée.

C. LA PREMIÈRE MESURE PRISE PAR LE GOUVERNEMENT SUR LES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT : LA RÉDUCTION FORFAITAIRE DE 5 EUROS AU 1 ER OCTOBRE 2017

En juillet dernier, le Gouvernement a annoncé qu'il allait réduire de cinq euros l'ensemble des aides personnelles au logement versées à compter du 1 er octobre aux 6,5 millions d'allocataires , afin de tenir dans l'enveloppe initiale du projet de loi de finances pour 2017.

Une vive polémique est née de cette mesure et votre rapporteur spécial a réalisé un contrôle sur pièce et su place à ce sujet à la fin du mois de juillet 36 ( * ) .

Tout d'abord, le nouveau gouvernement la justifiait par le fait que le précédent gouvernement avait déjà prévu, dans sa programmation initiale, un abattement de deux euros par mois dès le mois de janvier, sans qu'il ait pour autant été mis en place. S'il est possible que cela ait été effectivement le cas à l'été 2016, une telle disposition n'avait aucunement été mentionnée comme telle dans le cadre du débat budgétaire .

Ensuite, la mesure décidée correspond à un abattement forfaitaire , applicable à l'ensemble des aides, sans tenir compte ni de la composition familiale ni des ressources des ménages .

Finalement mise en place au 1 er octobre 2017 37 ( * ) , la réduction de cinq euros se présente ainsi comme une mesure pérenne bien qu'elle ait été initialement présentée par le Gouvernement comme permettant de boucler le budget 2017 consacré aux aides personnelles au logement. En année pleine, elle produit une économie estimée à 400 millions d'euros .

Enfin, le dispositif réglementaire permet désormais à un simple arrêté de modifier le montant de l'abattement, à la hausse comme à la baisse .

En tout état de cause, la réduction de 5 euros décidée par le Gouvernement constituait la moins bonne mesure d'économie possible sur les aides personnelles au logement.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à proposer un ensemble de mesures tendant, selon le Gouvernement, à réduire les loyers pratiqués par les organismes de logement social et à diminuer la dépense publique liée aux aides personnalisées au logement (APL).

A. LA BAISSE DES APL VERSÉES AUX LOCATAIRES DU PARC SOCIAL EN CONTREPARTIE DE LA MISE EN PLACE D'UNE « RÉDUCTION DE LOYER DE SOLIDARITÉ »

1. L'instauration d'une « réduction de loyer de solidarité » pour les ménages les plus modestes et occupant un logement dans le parc social

Selon l'exposé des motifs, le présent article tend tout d'abord à proposer une « réponse à l'inflation des loyers dans le secteur social ». En outre, le Gouvernement considère que le loyer pratiqué devrait davantage tenir compte des revenus des locataires.

En effet, le loyer dans un logement social est déterminé en fonction du coût de production et non des ressources des locataires. L'exposé des motifs indique que le montant du loyer est fixé en fonction « plus spécifiquement des conditions historiques de financement du logement ».

Ainsi, le 6° du I du présent article propose de créer , dans un nouvel article L. 442-2-1 du code de la construction et de l'habitation, une « réduction de loyer de solidarité » (RLS) qui serait appliquée, par les bailleurs, aux locataires dont les ressources sont inférieures à un plafond , déterminé en fonction de la composition du foyer et de la zone géographique et occupant un logement ouvrant droit à l'APL et gérés par un organisme de logement social, en vertu de l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation. Il s'agit :

- des offices publics de l'habitat ;

- des sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré ;

- des sociétés anonymes coopératives de production et les sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré ;

- des fondations d'habitations à loyer modéré.

La réduction de loyer de solidarité s'appliquerait également aux logements ouvrant droit à l'APL et gérés par les sociétés d'économie mixte (SEM).

La réduction ne concernerait en revanche pas les logements-foyers conventionnés (en application du 5° de l'article L. 351-2 du code de la construction, tels que les logements foyers de jeunes travailleurs et autres), quel que soit leur statut.

La réduction permettrait ainsi « d'articuler le montant du loyer (fixé en fonction du logement) et le niveau de ressources du locataire, [afin de] moduler le loyer à la baisse pour les ménages dont le revenu est inférieur à un certain niveau de ressource », selon l'évaluation préalable de l'article.

Les plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la réduction de loyer sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés du logement et du budget, dans la limite de montants fixés par la loi et correspondant en 2018 à :

Plafonds de ressources mensuelles applicables
pour la réduction de loyer de solidarité

(en euros)

Bénéficiaire de la réduction de loyer

Montant maximal des plafonds de ressources

Bénéficiaire isolé

1 294

Couple sans personne à charge

1 559

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

1 984

Bénéficiaire isolé ou couple ayant deux personnes à charge

2 361

Bénéficiaire isolé ou couple ayant trois personnes à charge

2 890

Bénéficiaire isolé ou couple ayant quatre personnes à charge

3 334

Bénéficiaire isolé ou couple ayant cinq personnes à charge

3 712

Bénéficiaire isolé ou couple ayant six personnes à charge

4 109

Personne à charge supplémentaire

400

Source : article 52 du projet de loi de finances pour 2018

Ces montants plafonds ainsi que les montants fixés par arrêté sont indexés, au 1 er janvier de chaque année, sur l'évolution en moyenne annuelle de l'indice des prix à la consommation des ménages hors tabac constatée pour l'avant-dernière année précédant la revalorisation.

Les ressources prises en compte sont celles qui le sont déjà pour le calcul des APL en vertu de l'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation.

Le montant mensuel de la réduction de loyer de solidarité serait fixé par un arrêté pris chaque année par les ministres chargés du logement et du budget, dans la limite de montants plafonds fixés dans la loi.

Pour 2018, le présent article prévoit ainsi les plafonds suivants pour la réduction de loyer :

Montants plafonds de la réduction de loyer de solidarité

(en euros)

Bénéficiaire de la réduction de loyer

Montant maximal de la réduction
de loyer

Bénéficiaire isolé

50

Couple sans personne à charge

61

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

69

Par personne supplémentaire à charge

10

Source : article 52 du projet de loi de finances pour 2018

Une personne seule pourrait ainsi voir son loyer réduit de 50 euros maximum, tandis qu'un couple avec deux enfants aurait une baisse d'au plus 79 euros (69 + 10 euros).

L'article dispose que l'arrêté peut également prévoir un montant de réduction de loyer de solidarité spécifique pour les colocations.

Ces montants plafonds pour la réduction de loyer, ainsi que ceux fixés par arrêté sont indexés, au 1 er janvier de chaque année, sur l'indice de référence des loyers (IRL) 38 ( * ) .

L'article précise également que la réduction de loyer de solidarité devrait faire l'objet d'une mention expresse sur la quittance délivrée chaque mois au locataire.

En vertu du 1° du IV du présent article, la réduction de loyer de solidarité serait applicable aux contrats en cours .

Comme l'indique l'évaluation préalable, la présente réforme ne s'appliquerait pas en outre-mer, les APL ne concernant que l'hexagone pour les logements conventionnés.

2. Corrélativement, la diminution de l'APL versée par l'État

Parmi les locataires bénéficiant de la réduction de loyer de solidarité, ceux qui perçoivent des APL connaitraient en contrepartie une baisse du montant de ces aides . Celle-ci serait toutefois légèrement inférieure à la réduction de loyer puisqu'elle serait fixée par décret entre 90 % et 98 % de son montant .

Les bénéficiaires de l'allocation de logement familiale (ALF) et de l'allocation de logement sociale (ALS) ne seraient pas concernées par cette réforme puisqu'elle ne s'appliquerait que pour des logements gérés par des organismes de logement social.

Pour le locataire, le poids du loyer restant à sa charge diminuerait donc très légèrement, selon la fraction retenue pour être imputée par le Gouvernement. Ainsi, pour une réduction de loyer de solidarité de 50 euros, l'APL versée diminuerait corrélativement de 1 euro (si la fraction est fixée à 98 %) à 5 euros (pour une fraction à 98 %) par mois.

La création de la réduction de loyer de solidarité et son imputation, pour partie, sur l'APL du locataire est donc sans impact sur la situation des bénéficiaires de ces aides , à l'exception d'une légère baisse de leurs loyers.

La formule de calcul de l'APL resterait inchangée, indépendamment de la diminution corrélée à la réduction de loyer.

La réforme serait applicable au 1 er janvier 2018. Toutefois, il convient d'ores et déjà de préciser qu'en réalité, les dispositifs nécessaires, tant du côté des bailleurs que des caisses d'allocations familiales (CAF) qui versent les APL, ne pourront être opérationnels avant plusieurs mois, la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) estimant pouvoir être prête à compter d'avril. Des régularisations devraient être opérées pour reprendre les premiers mois.

L'exposé des motifs de l'article précise également qu'un dispositif réglementaire serait pris afin de neutraliser les effets de la réduction de loyer consistant à faire passer le montant de l'APL sous le seuil de non-versement de l'aide. Déjà le Gouvernement a dû prévoir une telle mesure dans son décret tendant à supprimer arbitrairement 5 euros à tous les allocataires à compter du 1 er octobre 2017.

L'instauration de la réduction de loyer de solidarité et son imputation sur le montant des APL versés aux allocataires engendreraient, selon les estimations et la volonté du Gouvernement, 1,5 milliard d'euros de baisse de la dépense publique .

En revanche, la baisse des loyers subie par les bailleurs sociaux serait plus élevée encore, dans la mesure où, comme précisé supra , seule une fraction comprise entre 90 % et 98 % de la réduction est imputée sur le montant de l'APL versée .

Ainsi, selon les estimations figurant dans l'évaluation préalable de l'article, si les montants mensuels plafonds fixés pour la réduction de loyer de solidarité étaient appliqué, cela engendrerait, pour les organismes de logement social, un manque de 1,72 milliard d'euros , ainsi réparti :

Impact de la mise en place de la réduction de loyer de solidarité
sur les organismes de logement social

Type de bailleurs

Ménages (2016)

Réductions annuelles (en M€)

Offices publics d'habitations à loyer modéré (OPHLM)

1 231 270

- 828

Sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré (SAHLM)

1 086 925

- 749

Sociétés d'économie mixte (SEM)

205 806

- 143

Total

2 524 001

- 1 720

Source : évaluation préalable de l'article 52 du projet de loi de finances pour 2018

Certes, ces chiffrages constituent un majorant puisqu'ils prennent l'hypothèse la plus haute en termes de montants de la réduction de loyer.

D'un autre côté, l'Union sociale pour l'habitat estime que le coût de la réforme se situerait pour les organismes plutôt autour d'1,9 milliard d'euros, majorés de 50 millions d'euros par an en tenant compte de l'actualisation de l'indice de référence des loyers et des nouveaux bénéficiaires à intégrer, et sans inclure les coûts de gestion.

En tout état de cause, cette réforme aurait un impact direct et considérable sur le résultat d'exploitation des organismes et leur niveau d'autofinancement .

3. Des contreparties financières à la création de la réduction de loyer de solidarité accordées aux bailleurs sociaux

Le Gouvernement a prévu un certain nombre de contreparties à la création de la réduction de loyer de solidarité pour les bailleurs sociaux.

Tout d'abord, en vertu du 4° du I du présent article, qui modifie l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation, le supplément de loyer de solidarité (SLS) serait désormais appliqué dès lors qu'au cours du bail, les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de ces logements, et non plus, comme c'est le cas actuellement, au-delà d'un seuil de 20 % au-dessus de ces plafonds.

Selon l'évaluation préalable, cette mesure concernerait ainsi 165 000 ménages supplémentaires, pour une hausse du produit de la pénalité correspondant à 17 millions d'euros (toutes choses égales par ailleurs).

En outre, le courrier adressé par le Premier ministre au président de l'Union sociale pour l'habitat (USH) le 10 octobre 2017 fait mention d'une hausse du supplément de loyer de solidarité qui pourrait augmenter la recette de 150 millions d'euros par an. Aucune modalité de mise en oeuvre n'a toutefois été avancée à ce stade, ce qui rend cette contrepartie très aléatoire.

Il convient de préciser qu'en vertu du droit actuel, la totalité des sommes perçues au titre du SLS sont susceptibles d'être affectées à la Caisse de garantie du logement locatif sociale (CGLLS) . Le taux de taxation du SLS a été fixé à 85 % en 2016. En conséquence, ces montants ne bénéficient pas directement aux bailleurs sociaux qui les perçoivent ou alors pour un relativement faible montant .

En outre, l'article L. 441-11 du code de la construction et de l'habitation serait modifié par le 5° du I du présent article, afin de prévoir qu'en cas de non-application du SLS par un bailleur, ce dernier serait passible d'une pénalité dont le montant correspondrait à la totalité des sommes exigibles et non mises en recouvrement (soit 100 % au lieu de 50 % actuellement).

Ensuite, l'essentiel des contreparties proposées ne figurent pas dans le présent article .

Ainsi en est-il du maintien du taux du livret A à son niveau actuel , soit 0,75 %, pendant deux ans. Ensuite, une révision de sa formule de calcul serait mise en oeuvre au cours des prochains mois afin de garantir une faible évolution du taux à compter de 2020.

Selon l'évaluation préalable, avec un taux du livret A estimé à 1,25 % en 2018 et 1,5 % en 2019, le gain en termes de baisse de charges financières pour les organismes de logements sociaux serait de 700 millions d'euros en 2018 et de 1 milliard d'euros en 2019, ce dernier chiffre ayant toutefois été revu dans le courrier adressé par le Premier ministre au président de l'Union sociale pour l'habitat, avec 700 millions d'euros inscrits également (pour un taux du livret A évalué aussi à 1,25 % en principe).

Par ailleurs, l'Union sociale pour l'habitat a indiqué à votre rapporteur spécial qu'en réalité, le gain global en intérêts se réaliserait non pas en 2018 et 2019 mais tout au long de la vie des prêts existants, compte tenu des mécanismes de calcul caractérisant les prêts de la Caisse des dépôts et consignations.

De même, le Gouvernement prévoit un allongement de la maturité de certains prêts des fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations. Cette prolongation pourrait aller jusqu'à 10 ans, pour environ 30 milliards d'euros d'encours.

Selon le Gouvernement, cette mesure aurait un impact sur la trésorerie de 250 millions d'euros en 2018 et de 750 millions d'euros en 2019, puis une baisse progressive du gain en trésorerie à compter de 2020, en même temps qu'une hausse de charges limitée mais progressive.

Un ajustement du taux d'intérêt lors de la renégociation des prêts pourrait également être envisagé, avec une enveloppe de remise actuarielle correspondant à environ 300 millions d'euros de baisse d'intérêt et qui aurait un impact d'environ 10 millions d'euros par an.

Afin de maintenir la construction et la rénovation, le Premier ministre a également annoncé aux organismes de logement social la mise en place de 4 milliards d'euros de prêts à taux fixe et remboursement in fine . La moitié serait financée par la Banque européenne d'investissement (BEI) et l'autre par la Caisse des dépôts et consignations.

En outre, 2 milliard d'euros de prêts de haut de bilan bonifiés seraient prévus. Le financement de la bonification pourrait être assuré par Action logement pour un milliard d'euros. Pour le second milliard d'euros, il pourrait provenir des organismes de logement social qui centraliseraient leur trésorerie correspondant aux dépôts de garantie des locataires auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

Le « Grand plan d'investissement » pourrait enfin être revu afin d' augmenter l'enveloppe consacrée aux prêts éco-PLS (prêt logement social) qui sont adossés aux fonds d'épargne. Chaque année, 600 millions d'euros par an pourraient ainsi leur être consacrés jusqu'en 2022 (soit 200 millions d'euros supplémentaires par rapport à ce qui était initialement envisagé).

Enfin, le Gouvernement souhaite que se développent les cessions de logements sociaux , afin de permettre aux bailleurs de disposer de financements nouveaux. En 2016, seuls 8 442 logements ont été vendus.

4. Un dispositif de péréquation pour compenser les risques de déséquilibre du modèle économique au niveau de chacun des opérateurs

a) En principe, un dispositif de mutualisation développé par les organismes de logement social

En vertu du droit actuellement en vigueur, l'article L. 411-8-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit la possibilité pour les conventions conclues entre l'État et l'Union sociale pour l'habitat (USH) de porter sur une mutualisation financière entre les organismes d'habitations à loyer modéré, afin de réaliser des « programmes de construction et de réhabilitation prioritaires ».

En 2015 et 2016, ce dispositif de mutualisation fonctionnait avec environ 200 millions d'euros et l'objectif fixé pour 2017 était d'atteindre 350 millions d'euros.

Le 3° du I du présent article propose de réécrire cet article L. 411-8-1 du code de la construction et de l'habitation afin de prévoir que la mutualisation financière prévue dans ces conventions permette désormais de réaliser les réductions de loyer de solidarité sans déséquilibrer le modèle économique de chacun des bailleurs sociaux, en fonction de leur situation propre .

En effet, comme l'indique l'évaluation préalable, « il conviendra [...] de s'assurer que la mesure ne dégrade pas excessivement la situation économique de chacun des organismes de logement social [...]. Les opérateurs les plus impactés par les baisses de loyers ne seront en effet pas nécessairement ceux qui dégagent aujourd'hui le plus d'excédents ou qui disposent des réserves les plus importantes. Il n'y aura pas non plus nécessairement identité entre les opérateurs les plus impactés par les baisses de loyers et ceux qui bénéficieront des nouvelles mesures de soutien (conditions de financement et SLS) . »

Il s'agit ainsi de permettre aux organismes de logement social de développer un système propre de péréquation tendant à compenser la différence d'impact que la réduction de loyer de solidarité est susceptible d'induire au niveau microéconomique, en fonction de la situation de chaque structure.

L'article prévoit que les conventions conclues entre l'État et l'USH doivent être approuvées par arrêtés des ministres concernés pour que leurs stipulations entrent en vigueur.

b) À défaut, un dispositif imposé par l'État et reposant sur la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)

En l'absence de création d'un dispositif de péréquation par les organismes de logement social au 1 er avril 2018, permettant effectivement de pallier les difficultés engendrées pour certaines structures par la mise en place de la réduction de loyer de solidarité, le II du présent article prévoit d'instaurer cette mutualisation financière par la loi, en développant les missions de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS).

Ainsi, la CGLLS devrait désormais contribuer « notamment par ses concours financiers, au soutien des organismes de logement locatif social dans la mise en oeuvre des réductions de loyer », en vertu du 2° du II du présent article modifiant l'article L. 452-1 du code de la construction et de l'habitation qui définit notamment les missions de la caisse.

Le 3° du II du présent article complète également l'article L. 452-2-1 du code de la construction et de l'habitation, jusqu'à présent relatif à la commission de réorganisation des organismes de logement locatif social, afin de prévoir la création d'une commission de péréquation pour soutenir les organismes de logement social et les SEM dans la mise en place de la réduction de loyer de solidarité. Elle serait placée auprès du conseil d'administration de la CGLLS et statuerait sur les concours financiers qui sont affectés à cette mission.

Afin de financer ce nouveau dispositif de mutualisation financière, le 1° du II du présent article prévoit d' augmenter de 1 % la cotisation principale prévue à l'article L. 452-4 du code de la construction et de l'habitation, pour la passer à 3,5 %.

Selon une estimation fournie par le Gouvernement, 1 % de cotisation principale représente environ 200 millions d'euros de recettes supplémentaires pour la CGLLS et autant de prélèvements supplémentaires sur les organismes de logement social . Même si cette somme ne permet pas de réduire la dépense de l'État et ne figure pas, à ce titre, dans l'incidence budgétaire du présent article, elle constitue bien une charge supplémentaire pour les bailleurs sociaux.

Pour mémoire, la CGLLS est actuellement financée par deux cotisations :

- la première cotisation ou cotisation principale , prévue à l'article L. 452-4 du code de la construction et de l'habitation, versée par les organismes de logement social au titre de leur activité locative sociale et s'élevant actuellement à 2,5 %, sauf pour le supplément de loyer de solidarité dont le taux d'imposition peut désormais atteindre 100 %. Elle a pour assiette les loyers et redevances appelés au concours du dernier exercice clos durant l'année précédant l'année d'imposition, en tenant compte du nombre de bénéficiaires des aides personnelles au logement, du nombre de logements et de logements-foyers situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et du nombre de logements ayant fait l'objet d'une première mise en service au cours de l'année écoulée ;

- la cotisation additionnelle , créée à l'article L. 452-4-1 du code de la construction et de l'habitation et versée pour l'année entière par les organismes d'habitations à loyer modéré, les sociétés d'économie mixtes et les organismes agréés pour la maîtrise d'ouvrage d'insertion au titre de leur activité locative sociale.

Elle a tout d'abord pour assiette une part égale au produit d'une somme forfaitaire par le nombre de logements à usage locatif et d'unités de logements-foyers ouvrant droit à redevance sur lesquels l'organisme est titulaire d'un droit réel. La somme forfaitaire est fixée chaque année, sans pouvoir excéder 10 euros.

Ensuite, elle comprend une part variable ayant pour assiette l'autofinancement net de l'organisme, lequel fait l'objet d'une réfaction en fonction du montant des produits locatifs assujettis, dont le pourcentage est fixé par arrêté et ne peut être inférieur à 5 %. Son montant est calculé en appliquant à la base ainsi déterminée un taux fixé par arrêté, dans les limites de 15 %.

B. LA SUPPRESSION DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT « ACCESSION »

Le présent article prévoit également de supprimer les aides personnelles au logement « accession », le dispositif existant ne devant plus être applicable pour les prêts ou les contrats de location-accession signés à compter du 1 er janvier 2018.

Il modifie ainsi :

- l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation pour ce qui concerne l'APL « accession » ( 1° du I du présent article) ;

- l'article L. 542-2 du code de la sécurité sociale pour l'ALF « accession » ( 1° du III du présent article) ;

- l'article L. 831-1 du code de la sécurité sociale pour l'ALS « accession » ( 2° du III du présent article).

La suppression de cette aide n'aurait donc un impact que sur le flux et non sur le stock .

L'économie engendrée par cette disposition s'élèverait à 50 millions d'euros en 2018.

C. LE GEL DE LA REVALORISATION DES PARAMÈTRES DU BARÈME DES AIDES ET DE LA RÉVISION ANNUELLE DES LOYERS DANS LE SECTEUR SOCIAL EN 2018

Le 2° du IV du présent article prévoit le gel des paramètres du barème des trois aides personnelles au logement en 2018 . La revalorisation, en principe prévue au 1 er octobre de chaque année, en fonction de l'indice de référence des loyers du deuxième trimestre de l'année n-1, ne serait donc pas opérée avant le 1 er octobre 2019.

Au regard respectivement des articles L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation (pour les APL), L. 542-5 du code de la sécurité sociale (pour les ALF) et L. 831-4 du même code (pour les ALS), la révision des paramètres de calcul du barème concerne :

- les plafonds de loyers ;

- les plafonds des charges de remboursement de contrats de prêts dont la signature est postérieure à la date de révision du barème ;

- le montant forfaitaire des charges ;

- les équivalences de loyer et de charges locatives ;

- le terme constant de la participation personnelle du ménage.

Le 3° du IV du présent article pose également l'absence de révision des loyers et redevances maximaux et pratiqués par les bailleurs sociaux au cours de l'année 2018.

En principe, les articles L. 353-9-2 (pour les plafonds de loyers et redevances maximaux des logements conventionnés), L. 353-9-3 (pour les loyers et redevances pratiqués des logements conventionnés) et L. 442-1 du code de la construction et de l'habitation (loyers pratiqués pour les logements des organismes d'habitations à loyer modéré) prévoient également une révision au 1 er janvier de chaque année des loyers et redevances en fonction de l'indice de référence des loyers du deuxième trimestre de l'année n-1.

Ces deux mesures de gel engendreraient une économie totale de 100 millions d'euros pour l'État sur 2018.

Il convient toutefois de préciser que la non-revalorisation des APL ne s'appliquera que pour le quatrième trimestre 2018 (puisque la révision s'opère au 1 er octobre de chaque année). En revanche, elle aura également un impact significatif sur la dépense enregistrée en 2019, puisque la prochaine revalorisation des paramètres de calcul du barème n'aura lieu qu'au 1 er octobre de cette année.

De même, l'absence de révision sur un an produit des effets à long terme sur la hausse tendancielle de la dépense puisqu'ensuite, la revalorisation annuelle partira du montant de 2017, sans rattrapage des conséquences du gel opéré en 2018. Il en est d'ailleurs de même pour les loyers maximaux et pratiqués.

Il convient de noter que l'absence de révision du montant des loyers n'a qu'un impact limité sur la dépense publique, correspondant à l'économie réalisée sur l'APL en l'absence de hausse de loyer, mais engendre une moindre ressource bien plus conséquente pour les bailleurs sociaux.

D. LES INCIDENCES BUDGÉTAIRES DE L'ARTICLE 52 : UNE ÉCONOMIE DE 1,7 MILLIARD D'EUROS

Selon l'évaluation préalable, les mesures proposées par le présent article représenteraient une économie d'1,7 milliard d'euros pour l'État, ainsi répartie :

Répartition des économies en dépenses de l'État issue de l'article 52
du projet de loi de finances pour 2018 (version initiale)

(en euros)

Économie en dépenses de l'État

Baisse de la dépense d'APL consécutive à la création de la réduction de loyer de solidarité

1 500 000 000

Baisse de la dépense d'aides personnelles au logement liée au gel de leur indexation et au gel des loyers dans le parc social

100 000 000

Suppression des aides personnelles au logement « accession »

50 000 000

Lutte contre la fraude

50 000 000

Total

1 700 000 000

Source : commission des finances d'après l'évaluation préalable du présent article

Il convient de noter que 50 millions d'euros sont présentés comme découlant du présent article en luttant contre la fraude mais qu'en réalité, ces économies ne sont pas directement liées aux mesures qui y figurent .

En 2016, le montant des fraudes aux aides au logement a représenté 19,5 % du total de la fraude constatée au sein des caisses d'allocations familiales (CAF) et correspondant à 53 millions d'euros, selon l'évaluation préalable de l'article. Les principaux risques de fraude majeurs et identifiés sont « la dissimulation de ressources, le faux isolement et la non-résidence (dans des proportions moindres) ».

Les méthodes de lutte contre la fraude devraient être reconduites et renforcées par la « sécurisation des données à la source qui devrait permettre d'éviter les fraudes liées à la dissimulation des ressources ».

D'après les informations recueillies auprès du Gouvernement, le niveau élevé de rendement attendu pour cette réforme (50 millions d'euros) serait expliqué, d'une part, par l'augmentation annuelle de détection des fraudes et, d'autre part, par la hausse de la fraude potentielle notamment liée à la mise en place des récentes réformes.

En 2017, la Caisse nationale des allocations familiales prévoit notamment :

- une optimisation de l'« exploration des données » ( datamining ) pour détecter les dossiers à risque ;

- le bénéfice du contrôle de la fraude multi-prestations, compte tenu notamment du fait que les bénéficiaires du RSA socle, qui le sont généralement aussi des aides personnelles au logement, font l'objet d'importants contrôles sur leurs déclarations de ressources.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Sur l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à modifier l'économie générale de l'article en prévoyant principalement :

- une montée en charge progressive sur trois ans de la réduction de loyer de solidarité ;

- en contrepartie, afin de maintenir une économie d'1,5 milliard d'euros sur les dépenses de l'État au titre des APL, une hausse du taux de la première cotisation de la CGLLS à 8 % permettant d'affecter ces ressources au Fonds national d'aide au logement (FNAL) .

Ainsi, le Gouvernement propose, par le biais de cet amendement, que la réduction de loyer de solidarité ne soit plus appliquée que pour obtenir un rendement de 800 millions d'euros en 2018 et 1,2 milliard d'euros en 2019 sur les dépenses d'APL. Ce n'est qu'en 2020 que la réduction de loyer aboutirait à une économie de 1,5 milliard d'euros .

Afin de procéder à cette montée en charge, au cours des prochaines années, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale prévoit que la revalorisation des montants de la réduction de loyer de solidarité correspondrait au moins à l'indexation sur l'indice de référence des loyers . Cette précision permettrait au Gouvernement de procéder aux modulations nécessaires, en 2019 et 2020, pour parvenir aux montants attendus.

Il convient, en effet, de préciser que les montants plafonds de réduction de loyer de solidarité prévus dans le présent article restent identiques à ceux prévus initialement fixés par le Gouvernement . Ainsi, d'un point de vue juridique, rien dans l'article ne l'empêcherait d'appliquer dès cette année la réduction de loyer de solidarité au montant plafond . Seuls les textes réglementaires devraient intervenir pour déterminer les montants réellement applicables.

L'amendement en profite aussi pour définir plus précisément les montants plafonds de la réduction de loyer de solidarité et les montants des plafonds de ressources des locataires , en les distinguant non seulement en fonction de la composition familiale mais aussi de la zone géographique . Ce dernier correspond à celui applicable pour le calcul des aides au logement (zones I, II et III).

Carte du zonage I/II/III notamment applicable
pour les aides personnelles au logement

Source : site Internet du ministère de la cohésion des territoires

Plafonds de ressources mensuelles applicables
pour la réduction de loyer de solidarité après vote à l'Assemblée nationale

(en euros)

Bénéficiaire de la réduction de loyer

Montant maximal

Zone 1

Zone II

Zone III

Bénéficiaire isolé

1 294

1 209

1 171

Couple sans personne à charge

1 559

1 474

1 426

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

1 984

1 880

1 823

Bénéficiaire isolé ou couple ayant deux personnes à charge

2 361

2 239

2 173

Bénéficiaire isolé ou couple ayant trois personnes à charge

2 890

2 749

2 654

Bénéficiaire isolé ou couple ayant quatre personnes à charge

3 334

3 173

3 069

Bénéficiaire isolé ou couple ayant cinq personnes à charge

3 712

3 532

3 410

Bénéficiaire isolé ou couple ayant six personnes à charge

4 109

3 910

3 778

Personne à charge supplémentaire

400

375

350

Source : article 52 du projet de loi de finances pour 2018

Montants plafonds de la réduction de loyer de solidarité
après votes à l'Assemblée nationale

(en euros)

Bénéficiaire de la réduction de loyer

Montant maximal

Zone 1

Zone II

Zone III

Bénéficiaire isolé

50

44

41

Couple sans personne à charge

61

54

50

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

69

60

56

Par personne supplémentaire à charge

10

9

8

Source : article 52 du projet de loi de finances pour 2018

Dans la mesure où la réduction de loyer de solidarité ne permettrait plus que de dégager, sur les dépenses d'APL, une économie de 800 millions d'euros en 2018 et d'1,2 milliard d'euros en 2019, le présent article tel que modifié par l'Assemblée nationale prévoit qu' une fraction du montant des deux cotisations versées par les bailleurs sociaux puisse désormais alimenter le FNAL (nouveau 3° du I du présent article).

Cette fraction serait fixée à 700 millions d'euros pour 2018 et 300 millions d'euros pour 2019 , permettant ainsi de couvrir la moindre baisse de dépenses d'APL et de maintenir la subvention d'équilibre au FNAL à son niveau initial.

Afin que la CGLLS puisse disposer des ressources nécessaires pour participer au financement du FNAL, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale prévoit une augmentation du taux de la première cotisation versée à la CGLLS, qui passerait ainsi à 8 % (contre 2,5 % actuellement et 3,5 % dans la version initiale de l'article 52).

Une recette supplémentaire de 900 millions d'euros peut donc être attendue (voire 1,1 milliard d'euros comparé au taux de la cotisation en vertu du droit actuel), ce qui est supérieur aux 700 millions d'euros que le Gouvernement devait en principe couvrir en compensation de la baisse de la réduction de loyer de solidarité.

L'amendement procède enfin à deux autres modifications .

En premier lieu, le dispositif de péréquation reposant sur les bailleurs sociaux a été supprimé (3° du I du présent article dans sa version initial). Le Gouvernement souhaitant que la mutualisation financière entre les organismes soit mise en place rapidement, l'article tel qu'adopté par l'Assemblée nationale prévoit que le mécanisme initialement proposé à titre subsidiaire et reposant sur la CGLLS soit directement rendu applicable .

En second lieu, il précise que l'enquête annuelle des bailleurs sociaux auprès de leurs locataires , pour déterminer ou non l'application du supplément de loyer de solidarité et prévue à l'article L. 441-9 du code de la construction et de l'habitation, devrait également permettre de déterminer s'ils bénéficient ou non de la réduction de loyer de solidarité .

Enfin, l'Assemblée nationale a adopté trois amendements identiques, présentés respectivement par François Jolivet, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » mais ayant déposé cet amendement à titre personnel, François Pupponi et plusieurs de ses collègues et par Stéphane Peu et plusieurs de ses collègues, tendant à supprimer le fait que le supplément de loyer de solidarité serait désormais appliqué dès que les ressources du ménage dépassent les plafonds applicables pour l'attribution du logement social .

Le Gouvernement s'en est alors remis à la sagesse de l'Assemblée nationale, renvoyant le sujet du supplément de loyer de solidarité au projet de loi relatif au logement, attendu pour 2018 et dans lequel devraient figurer des dispositions sur la politique des loyers dans le secteur du logement social.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE RÉFORME INITIALEMENT TROP BRUTALE, MAL PRÉPARÉE ET AUX CONSÉQUENCES EN CHAINE PROBABLEMENT SOUS-ESTIMÉES PAR LE GOUVERNEMENT

1. Un mécanisme de réduction de loyer de solidarité contestable dans sa mise en oeuvre et ses effets

Pour le moins innovantes dans leur approche, les mesures proposées par le présent article ne sont pas sans poser des difficultés de mise en oeuvre et quant à leurs effets sur le secteur du logement social.

Tout d'abord, si la création de la réduction de loyer de solidarité permet effectivement de réduire les loyers pratiqués d'un montant pouvant aller jusqu'à 69 euros par mois (voir davantage en fonction du nombre de personnes à charge), elle conduit de fait à créer une importante différence de traitement entre les locataires du logement social , avec un fort effet de seuil selon que l'on se situe juste au-dessus ou en-dessous des plafonds de ressources.

Cette différence de traitement se traduit également par le fait que ce sont les locataires dont les ressources sont suffisamment basses pour bénéficier de la réduction de loyer, mais qui ne sont pour autant pas allocataires de l'APL, qui vont être les principaux gagnants de la réforme ( cf infra ).

En outre, cette réforme ne concerne que les bailleurs sociaux, ce qui signifie que rien n'est fait par ailleurs pour les locataires du parc privé, là où l'effet inflationniste des aides a pu, par le passé, être constaté.

À ce titre, la question peut également se poser sur les effets de cette réforme qui s'applique aux contrats en cours . Certes, ce n'est pas le montant du loyer lui-même qui change sur la quittance, mais une réduction qui s'y applique.

L'atteinte sur les contrats en cours ne peut, d'un point de vue constitutionnel, qu'être justifiée « par un motif d'intérêt général suffisant sans méconnaître les exigences résultant des articles 4 et 16 de la Déclaration de 1789 » 39 ( * ) . En l'espèce, ce sont la nécessité d'assurer un logement décent aux personnes résidant en France et la garantie de la maîtrise et de l'équilibre des comptes des administrations publiques qui pourraient le justifier.

Il convient toutefois de rappeler que cette mesure a aussi pour conséquence de réduire considérablement les recettes issues des loyers pour les bailleurs sociaux, ce qui n'est pas non plus sans conséquence sur l'équilibre global de leurs opérations de construction ou d'acquisition des logements concernés . En effet, les prêts sur lesquels ces opérations reposent ont été conclus par les bailleurs sociaux selon un certain rendement de loyers et ils ont aussi été garantis par des collectivités territoriales sur ce fondement.

Ensuite, comme votre rapporteur spécial aura l'occasion d'y revenir, ce sont principalement les organismes de logement social qui logent les ménages les plus modestes qui seront amenés à voir leurs recettes d'exploitation réduites , avec toutes les conséquences à attendre sur leurs capacités d'intervention courante et leurs investissements à venir.

Des difficultés de mise en oeuvre concrètes peuvent également être mises en avant.

S'agissant des bailleurs sociaux, il leur appartiendra de mettre en place la réduction de loyer de solidarité, ce qui nécessite d'importantes évolutions, notamment informatiques. Il est désormais certain que la réforme ne pourra ainsi être mise en place dès le 1 er janvier 2018 comme le prévoit le projet de loi de finances.

La détermination des ressources constitue également un enjeu essentiel . À ce titre, d'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial, il apparaît que les montants plafonds fixés par le présent article ont été arrêtés en référence au revenu fiscal de référence, comme pour le calcul des aides personnelles au logement, mais sans tenir compte de l'abattement de 10 % qui leur est appliqué.

Du côté des caisses d'allocations familiales , il conviendra également de prévoir la baisse concomitante des aides personnelles au logement versées . À ce titre, la Caisse nationale des allocations familiales a indiqué ne pas pouvoir être prête avant avril 2018. Ils devront donc procéder ensuite à de nombreux rappels.

L'une des difficultés qui ont été soulignées lors des auditions de votre rapporteur spécial concernait également la transmission des données des bailleurs sociaux vers les caisses d'allocations familiales .

2. La fragilisation de la situation financière des bailleurs sociaux par ailleurs sollicités pour participer aux politiques publiques de l'État

Selon les chiffres recueillis auprès des bailleurs sociaux, plus de deux cents organismes étaient susceptibles de se trouver dans une position financière difficile, voire dans l'incapacité faire pleinement face à leurs obligations, avec le dispositif proposé initialement par le Gouvernement.

L'impact de la mesure est d'autant plus fort que la réduction de loyers s'impute directement sur l'exploitation des organismes, limitant ainsi considérablement leur marge de manoeuvre.

La perte d'autofinancement engendrée par la réforme est considérable puisqu'1,7 milliard de « ponction » correspondent à près de 80 % de l'autofinancement net des organismes (2,2 milliards d'euros) et un peu plus de la moitié de leur autofinancement global.

La santé financière des bailleurs sociaux se trouve donc indéniablement atteinte . La fédération des offices d'habitations à loyer modéré (OPH) estime ainsi que la création de la réduction de loyer de solidarité telle que prévue initialement par le Gouvernement conduirait à ce que 196 offices soient en autofinancement inférieur à 5 %, dont 158 offices en autofinancement inférieur à 2 % et 122 offices en autofinancement négatif en 2018.

Certes, un dispositif de péréquation est instauré pour pallier ces risques, mais il ne saurait à lui seul absorber un tel choc sur les recettes d'exploitation des organismes.

Il est également paradoxal que le dispositif proposé pèse avant tout sur les bailleurs sociaux comptant le plus grand nombre de locataires modestes . Non seulement il n'est pas cohérent que la réforme ait davantage d'incidence pour les bailleurs qui respectent le plus le caractère social de leur activité, mais en outre cela pourrait avoir pour effet involontaire d'inciter les organismes à éviter de loger les plus précaires .

Il convient également de ne pas sous-estimer le potentiel impact d'un déséquilibre croissant du secteur du logement social sur les collectivités territoriales qui garantissent leurs prêts . En effet, si jusqu'à présent les établissements bancaires ou encore les agences de notation ne tiennent pas nécessairement compte de ces garanties dans l'examen de la situation financière des collectivités territoriales, cela pourrait changer dès lors qu'existe un plus fort risque qu'elles soient appelées à pallier les difficultés financières rencontrées par les bailleurs sociaux. Une vigilance toute particulière doit être portée sur cette conséquence de la réforme .

En outre, tandis que le Gouvernement fait reposer son action sur l'idée que les bailleurs sociaux disposeraient d'une « manne financière », notamment par le biais des APL, et de l'existence de « dodus dormants », il est assez peu probable que ces derniers se trouvent en réalité parmi ceux qui comptent justement le plus de bénéficiaires de l'APL .

Les bailleurs sociaux sont ainsi mis en difficulté par la création de la réduction de loyer de solidarité . Pourtant, parallèlement, le gouvernement leur demande également de participer au financement de plusieurs politiques publiques et pour des montants loin d'être négligeables.

Ainsi, en premier lieu, l'article 19 du projet de loi de finances prévoit que la contribution des organismes de logement social au Fonds national des aides à la pierre (Fnap) passerait de 270 millions d'euros en 2017 à 375 millions d'euros en 2018, soit 105 millions d'euros supplémentaires permettant de combler le désengagement de l'État (avec seulement 50 millions d'euros de crédits au titre des aides à la pierre).

À ce titre, une nouvelle taxe sur le produit des cessions des logements sociaux est également instituée à l'article 52 quater du projet de loi et rattaché à la présente mission, dont le produit devrait être versé à la CGLLS et pourrait ainsi constituer une ressource utile pour le Fnap 40 ( * ) .

En second lieu, les bailleurs sociaux sont appelés par le Gouvernement à participer au financement du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) dont l'enveloppe est prévue pour passer de 6 à 10 milliards d'euros. Ils devraient ainsi contribuer à hauteur de 2 milliards d'euros , correspondant à environ 135 millions d'euros par an pendant 15 ans.

3. Les compensations proposées par le Gouvernement : insuffisantes pour combler la perte d'autofinancement des bailleurs, pour partie subies par les épargnants et faisant des banques les grandes gagnantes

Comme exposé supra , le Gouvernement propose un ensemble de contreparties financières aux bailleurs sociaux, en échange de la baisse de loyers exigée au présent article. Toutefois, la plupart des dispositions ne permettent pas réellement de combler la perte d'autofinancement enregistrée.

Parmi les compensations à la création de la réduction de loyer de solidarité, votre rapporteur spécial ne vous propose pas de revenir sur la suppression des dispositions relatives au supplément de loyer de solidarité. En effet, il existe des enjeux de mixité sociale dans certains quartiers qui ne peuvent être négligés. En outre, l'apport attendu (17 millions d'euros) reste très limité d'autant qu'en l'état actuel du droit, la totalité du produit issu de ce supplément de loyer peut être affecté à la CGLLS, comme rappelé supra (85 % en 2016).

S'agissant des mesures de soutien à l'investissement, la création de prêts à taux fixe in fine et de prêts de haut de bilan est une bonne chose mais cela crée encore de la dette pour des organismes dont les prêts sont, par ailleurs, garantis par les collectivités territoriales.

De même, l'allongement des prêts ne conduit finalement qu'à allonger de la dette. D'ailleurs, comme les bailleurs sociaux l'ont indiqué, cette mesure ne constitue pas une compensation mais facilite l'activité des organismes en allégeant la charge des annuités temporairement mais tout en l'alourdissant à l'issue de la période initiale.

En outre, toutes ces mesures n'ont d'intérêt que si les bailleurs sociaux continuent de disposer des moyens financiers suffisants pour investir. Or, comme cela a été rappelé précédemment, la réduction de loyer de solidarité a un impact direct sur l'autofinancement que ces mesures ne parviennent pas réellement à compenser.

S'agissant du développement des cessions de logements, votre rapporteur spécial est sensible à l'argument selon lequel ce type d'opérations peut permettre aux bailleurs sociaux de disposer de financements susceptibles d'être réinvestis dans la construction de nouveaux biens. Il est vrai qu'un peu moins de 8 500 logements vendus en 2016 correspond à un nombre très faible et il serait probablement possible d'en faire davantage.

Pour soutenir une telle démarche, la création envisagée d'une foncière, mise en place par Action logement et qui viendrait en support pour certaines ventes, est intéressante mais mérite d'être précisément définie afin d'éviter de reporter les difficultés sur cette instance. Le protocole d'accord conclu entre l'État et Action logement le 21 novembre dernier prévoit effectivement la création de cette « structure de portage ».

Il convient aussi de se souvenir que les bailleurs sociaux ne disposent, encore une fois, pas des mêmes capacités de ventes selon les territoires sur lesquels ils se situent (zones tendues, zones détendues...).

En outre, les communes soumises aux obligations de l'article 55 de la « loi SRU » ne soutiendront pas nécessairement une telle démarche dès lors que ces cessions conduiront à abaisser le nombre de logements sociaux pris en compte.

S'agissant de la stabilisation du taux de livret A sur deux ans et de la modification de son mode de calcul , elle conduit à ce qu'une partie de la compensation à l'instauration de la réduction de loyer de solidarité soit supportée par les épargnants . En effet, comme indiqué supra , les prévisions du Gouvernement ont été réalisées avec un taux de 1,25 % en 2018 et de 1,5 % en 2019. Ce sont donc les titulaires de livret A qui financent cette contrepartie et donc, une nouvelle fois, en particulier les classes moyennes qui subiront les conséquences de la réforme proposée .

Au contraire, le gel du taux du livret A profite pleinement aux établissements bancaires qui n'auront pas à mieux les rémunérer. Ainsi, selon l'agence Moody's, une hausse à 1 % du taux du livret A aurait, en effet, eu un coût de 920 millions d'euros pour les banques françaises, soit 2,5 % des bénéfices avant impôts des 5 principaux établissements en 2016 !

Ce formidable effet d'aubaine pour les banques mérite d'être souligné et ne manque pas d'interroger tandis que le Gouvernement estime que les bailleurs sociaux disposent de mannes financières suffisamment importantes pour absorber initialement une baisse de 1,7 milliard d'euros sur les loyers perçus.

4. Une mesure de rendement bien davantage qu'une mesure de réduction des loyers ou qu'une réforme structurelle

a) L'affichage d'une baisse de loyers pour les locataires en réalité très limitée voire quasi-inexistante

Le Gouvernement défend l'idée que le présent article repose sur la volonté de baisser les loyers pratiqués , en particulier pour les ménages les plus modestes. Il considère ainsi que la réforme proposée constitue une réponse à l'inflation constatée des loyers dans le secteur social et permettrait de tenir compte des revenus des locataires pour fixer les loyers. Selon l'exposé des motifs, les loyers fixés pourraient être considérés comme particulièrement élevés au regard des moyens des locataires et de la mission de service public sans but lucratif des organismes sociaux.

En réalité, comme la présentation du dispositif le met en évidence, la quasi-totalité de la baisse de loyer sera absorbée par la réduction concomitante des APL versées aux locataires .

Ainsi, devrait être déduit des APL versées l'équivalent de 90 % à 98 % du montant de la réduction de loyer. Autrement dit, une personne seule dont le logement est situé en zone I devrait en réalité être gratifiée de 1 à 5 euros par mois . Si cette somme peut toujours rendre service à des ménages modestes, elle reste toutefois très faible comparée aux annonces gouvernementales.

Seuls quelques cas, par ailleurs déjà mis en évidence par votre rapporteur spécial, où le locataire d'un logement social bénéficierait d'une réduction de loyer de solidarité sans toutefois percevoir d'APL conduiraient à une véritable baisse de loyer. Pour autant, cette situation « atypique » ne constitue pas l'essentiel de la réforme. En outre, alors que le Gouvernement estimait à environ 100 000 le nombre de ménages concernés, celui-ci pourrait être en réalité plus important, selon les données qui remontent de certains organismes.

En outre, il ne faut pas oublier le fait que ces baisses de loyer et d'aide au logement ne concernent que les locataires du secteur du logement social, en aucun cas ceux dont les logements sont détenus par les bailleurs privés. Pourtant, ce sont bel et bien ces ménages qui connaissent les risques les plus fort de hausse de loyers et d'effet inflationniste des aides personnelles au logement, à tout le moins dans certains cas (petites surfaces, zones très tendues...).

La politique du Gouvernement est ainsi particulièrement paradoxale vis-à-vis des ménages modestes puisque, d'un côté, il défend l'idée que le projet de loi de finances favoriserait l'augmentation de leur pouvoir d'achat, notamment par une baisse des loyers, et l'accès au logement des plus modestes avec le plan « logement d'abord », mais, d'un autre, seuls les allocataires vivant dans le parc social sont concernés par la mesure.

Surtout, le présent article prévoit le gel des paramètres de calcul des aides personnelles au logement en 2018 tandis que le Gouvernement a déjà mis en place une réduction forfaitaire de cinq euros pour toutes les aides servies à compter du 1 er octobre 2017 !

b) Le présent dispositif n'est pas en soi une réforme structurelle mais vise à pousser le secteur du logement social à se réformer : une anticipation inappropriée au projet de loi relatif au logement attendu pour 2018

Le présent article ne correspond aucunement à une réforme structurelle du dispositif des aides personnelles au logement . Il ne conduit qu'à réduire substantiellement la dépense en contrepartie d'une baisse des loyers pratiqués dans le secteur social. Il vise aussi à inciter les bailleurs sociaux à se regrouper.

À ce titre, le Gouvernement anticipe une restructuration du secteur du logement social qu'il appelle de ses voeux mais sans qu'aucune réflexion n'ait encore réellement abouti sur ses modalités et l'accompagnement apporté .

Ainsi, le projet de loi relatif au logement devrait constituer le véhicule permettant de procéder à des modifications structurantes et à faire évoluer le modèle de façon concertée.

Le fait que le présent article, dans sa version initiale, ait autant anticipé sur les réformes susceptibles d'être mises en place est à la fois contestable, parce qu'il faut généralement plusieurs années pour que des modifications d'organisation et de structures s'accompagne d'économies et de gains de productivité , et aussi contre-productif, puisqu'il a cristallisé la position des bailleurs sociaux, rendant toute concertation plus difficile.

c) Il s'agit avant tout d'une mesure de rendement permettant de réduire les dépenses publiques

Derrière la présentation du Gouvernement, il apparaît que le présent article s'inscrit avant tout dans une logique budgétaire puisqu'il permet de réduire la dépense publique liée aux aides personnelles au logement d'1,5 milliard d'euros d'ici à 2020 dans la version issue de l'Assemblée nationale.

La contribution de l'État au Fnal intègre cette baisse dès 2018 puisque l'Assemblée nationale a prévu, à due concurrence de la baisse de la réduction de loyer en 2018 et 2019, le financement du Fnal par une contribution de la CGLLS. Le budget de l'État consacré aux aides personnelles au logement se réduit même d'1,9 milliard d'euros entre 2017 et 2018 compte tenu des autres mesures prises à l'article 52 et de l'impact en année pleine de la baisse des cinq euros entrée en vigueur au 1 er octobre 2017.

Évolution de la contribution de l'État au Fnal

(en milliards d'euros)

Nb : Pour 2017 et 2018, il s'agit de prévisions issues du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances initial.

Entre 2015 et 2016, la très nette hausse s'explique principalement par la « rebudgétisation » des ALF jusqu'à présent financées par la branche famille de la sécurité sociale.

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Votre rapporteur spécial est conscient des contraintes budgétaires pesant sur l'État et ne peut que soutenir la volonté du Gouvernement de réduire les dépenses publiques . Cet objectif ne doit toutefois pas se cacher derrière un affichage de réduction des loyers ou de réforme structurelle .

5. Des conséquences directes sur le marché du logement et de la construction sous-évaluées par le Gouvernement : le risque de « casser » une dynamique relancée depuis peu

Comme je l'ai rappelé dans la partie du rapport relative à l'examen des crédits de la mission « Cohésion des territoires », le secteur du logement social a porté un nombre important de constructions nouvelles au cours des dernières années, avec plus de 120 000 logements financés en 2016 et presque autant attendus encore en 2017.

Plus globalement, les chiffres de la construction sont plutôt bons et 2017 pourrait constituer la première année de création d'emplois depuis longtemps dans le secteur du bâtiment, selon la Fédération française du bâtiment.

Il convient donc d'éviter de casser cette bonne dynamique obtenue après plusieurs années de crise et d'éviter les conséquences en chaîne que le Gouvernement a manifestement sous-estimées lors de l'élaboration de cet article.

La réduction des fonds propres engendrée par le présent article va nécessairement conduire les bailleurs sociaux à revoir leurs investissements pour l'avenir . Même si des dispositifs de péréquation sont mis en place de même que des mécanismes de financement intéressants, certains organismes ne seront plus en mesure d'assurer les mêmes objectifs de construction.

La rénovation des bâtiments , pourtant essentielle dans de nombreux ensembles, pourrait également pâtir de cette réforme , les bailleurs étant amenés à faire des arbitrages, ce qui devrait alors nécessairement peser sur les locataires.

D'après la Fédération française du bâtiment (FFB), l'activité issue des organismes de logement social constitue 15 % du chiffre d'affaire des entreprises du bâtiment .

En outre, l'impact du présent article risque de dépasser le seul secteur du logement social pour se propager sur la construction du logement intermédiaire et libre . En effet, en particulier sur les territoires concernés par l'application de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, plus connue en tant qu' « article 55 de la loi SRU » 41 ( * ) , certaines communes ont inscrit dans leur plan local d'urbanisme, que les opérations de constructions neuves d'une certaine envergure devaient comprendre un pourcentage significatif de logement sociaux. Si les bailleurs sociaux sont contraints de renoncer à certaines constructions, d'autres logements pourraient ainsi ne pas voir le jour .

6. La suppression inappropriée de l'aide personnelle au logement « accession »

Comme en 2014 , lorsque le précédent gouvernement avait proposé, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2015, de transformer l'aide personnelle au logement « accession » en « filet de sécurité » pour les seuls accédants à la propriété qui seraient en difficulté, votre rapporteur spécial s'oppose à la suppression de ces aides à l'accession sociale à la propriété .

Certes, le nombre de bénéficiaires ne cesse de se réduire au cours des années, avec 435 000 ménages concernés et une dépense de 831 millions d'euros en 2016 , mais cela ne signifie pas pour autant qu'elle ne permet pas de sécuriser efficacement des plans de financement pour ceux qui s'en servent. Ainsi, l'on dénombrerait environ 30 000 nouveaux entrants chaque année.

Montant des prestations versées et nombre des bénéficiaires des aides personnelles au logement « accession »

(en millions d'euros et en milliers de bénéficiaires)

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Dans le cadre de son enquête sur « les aides de l'État à l'accession à la propriété », demandée par le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale et rendue en novembre 2016, la Cour des comptes met en évidence le fait que « l e déclin relatif de ces aides provient essentiellement de la baisse du revenu d'exclusion du barème , qui réduit le nombre de ménages éligibles , alors que des revenus de plus en plus élevés sont nécessaires pour acheter un bien immobilier. L'écart entre le revenu des emprunteurs et le revenu disponible d'un ménage moyen est passé de 15 % en 2010 à 25 % en 2012, ce qui signifie que les accédants sont de moins en moins des ménages modestes. »

Ce dernier constat rejoint également celui du rapporteur général de la commission des finances du Sénat, Albéric de Montgolfier qui, dans son rapport sur « La "rente immobilière" : mythe et réalités », a démontré que l'accession à la propriété des ménages modestes était de plus en plus difficile 42 ( * ) .

Évolution du taux de propriétaires parmi les 25-44 ans

(en %)

Note de lecture : les ménages modestes sont ceux au sein desquels l'âge de la personne de référence est compris entre 25 à 44 ans et qui relèvent du premier quartile de niveau de vie (Q1).

Source : commission des finances du Sénat (d'après : enquêtes logement Insee 1973-2013), rapport d'information n° 75 (2017-2018) d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2017, La « rente immobilière », mythe et réalités

Il est donc totalement paradoxal de supprimer cette aide sociale à l'accession, d'autant qu'elle profite principalement à des familles . À titre d'illustration, 60 % des bénéficiaires le sont au titre de l'allocation logement à caractère familial (ALF), avec 257 000 ménages en 2016, pour une dépense de 584 millions d'euros, soit 70 % du total.

Le paradoxe est confirmé également par le fait que le Gouvernement souhaite, parallèlement à la suppression de ces aides, souhaiter que les cessions de logements sociaux se développent davantage . Si elles sont encore peu nombreuses à l'heure actuelle, avec environ 8 500 cessions au cours des trois dernières années, celles-ci sont réalisées pour près de 40 % d'entre elles avec les locataires-occupants.

Par ailleurs, les établissements de crédits comme le Crédit foncier prennent en compte les aides personnelles au logement « accession » dans le plan de remboursement des ménages .

Il est également possible qu'avec leur suppression, certains ménages, soit ne puissent plus accéder à la propriété, soit décident de ne pas franchir le cap , dès lors qu'ils perdent une aide financière précieuse. Certains pourraient ainsi faire le choix économique de rester locataire . L'État serait alors encore plus perdant puisque l'aide à la location est généralement plus élevée.

En conséquence, il serait fort dommageable de supprimer les aides personnelles au logement « accession » qui, si elles ne suffisent probablement pas, à elles seules, à déclencher une accession à la propriété, permettent de sécuriser l'opération, en complément du prêt à taux zéro . Elles constituent à ce titre un utile « coup de pouce » qui ne saurait être remis en cause .

Au contraire d'ailleurs de la démarche du Gouvernement, la Cour des comptes dans son rapport précité préconisait de modifier les barèmes des aides personnelles au logement « accession » et d'en favoriser le cumul et la complémentarité avec le prêt à taux zéro, lequel devait être, lui-même, recentré sur les ménages les plus modestes (y compris pour financer l'éventuel surcoût de l'amélioration des conditions d'octroi des aides personnelles au logement « accession »).

B. UNE SOLUTION DE COMPROMIS RECHERCHÉE PAR LE SÉNAT

La situation financière globalement saine du secteur du logement social est une réalité qui a permis aux organismes de s'engager dans un nombre important d'opérations de construction et de rénovation de logements sociaux . Votre rapporteur spécial ne peut, à ce titre, que s'en féliciter.

Le Gouvernement s'appuie au contraire sur ce constat pour justifier son choix de réduire les loyers pratiqués pour les ménages les plus modestes dans les logements conventionnés et, en corollaire, diminuer les aides personnelles au logement versées à ces foyers.

Comme indiqué précédemment, la méthode proposée par le gouvernement a été trop brutale et les efforts demandés aux bailleurs sociaux trop importants sur une période trop courte.

Le présent article, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, est plus acceptable du fait de la montée en charge progressive de la réduction de loyer . Toutefois, les montants encore exigés sur trois ans (800 millions d'euros, 1,2 milliard d'euros et 1,5 milliard d'euros) sont encore trop importants et cette solution ne permet pas de répondre aux inquiétudes toujours fortes du secteur du logement social.

Aussi, votre rapporteur spécial participe aux travaux actuellement conduits pour parvenir à une réforme plus soutenable pour l'ensemble du secteur, tout en réduisant la dépense de l'État et en demandant aux organismes de logement social de faire des efforts.

En effet, il n'est pas question de considérer que les bailleurs sociaux n'ont pas à participer à la réduction de la dépense publique , chaque acteur devant au contraire être sollicité , compte tenu de la forte contrainte budgétaire qui s'exerce actuellement sur l'État.

De même, il est probablement nécessaire de rationaliser le secteur du logement social , par des regroupements voire des restructurations. Ce sera notamment l'objet du projet de loi sur le logement attendu pour 2018 et des économies pourront probablement en découler, mais cela prendra du temps.

En outre, votre rapporteur spécial signale depuis de nombreuses années le fait que la dépense liée aux aides personnelles au logement ne cesse de croître , appelant de ses voeux une réforme en profondeur du dispositif actuellement applicable. Ce n'est toutefois, en aucun cas, ce que propose le présent article .

Enfin, avec près de 42 milliards d'euros consacrés à la politique du logement, le manque d'efficience des dispositifs mis en oeuvre au regard des objectifs fixés est fréquemment mis en avant.

En tenant compte de l'ensemble de ces éléments, plusieurs pistes sont avancées pour parvenir à une solution équilibrée. Peu d'entre elles permettent toutefois d'assurer un rendement suffisant pour couvrir l'économie attendue par le Gouvernement.

Le travail de concertation mené repose ainsi sur la recherche d' 1,55 milliard d'euros afin de couvrir :

- la réduction de loyer de solidarité actuellement fixée à 800 millions d'euros et l'augmentation de la CGLLS qui permettrait de financer le Fnal à hauteur de 700 millions d'euros en 2018 ;

- le maintien des aides personnelles au logement « accession » alors que le présent article propose de les supprimer, pour une économie en 2018 de 50 millions d'euros.

Dans un premier temps, votre rapporteur spécial a déjà déposé à titre personnel un amendement tendant à relever le taux de TVA de 5,5 % à 10 % pour l'acquisition de terrains à bâtir, la construction et les travaux de rénovation dans les logements sociaux. Adopté dans le cadre de l'examen de la première partie du projet de loi de finances par le Sénat (de même qu'un amendement identique déposé par Hervé Marseille et le groupe Union centriste, il est devenu l' article 6 ter A , en permettant de dégager 700 millions de recettes supplémentaires pour l'État (selon les chiffres du Gouvernement lors du vote de l'article d'équilibre). Elle avait effectivement été calibrée pour rapporter au moins 600 millions d'euros.

Il s'agit là de la première mesure de substitution au dispositif proposé à l'article 52 tel qu'issu des travaux de l'Assemblée nationale.

Il est également acquis qu'une participation des bailleurs sociaux par le biais de la CGLLS sera demandée pour le financement du Fnal.

En conséquence, la contribution des bailleurs sociaux à la CGLLS devrait être plus importante que celle actuellement demandée . Elle serait toutefois moins élevée que celle inscrite par l'Assemblée nationale avec le vote de l'amendement du Gouvernement qui prévoit un relèvement à 8 % du taux maximal de la cotisation principale.

Il convient d'ailleurs de noter que ce taux de 8 % est prévu dans l'article de façon pérenne alors que la participation de la CGLLS au Fnal ne l'est que pour 2018 et 2019 à ce stade, pour compenser la montée en charge de la réduction de loyer.

Décision de votre commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 52 bis (Art. L. 345-1 du code de la construction et de l'habitation) - Obligation pour les CHRS de remplir annuellement l'enquête nationale de coûts

. Commentaire : le présent article prévoit d'instaurer une obligation pour les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) de renseigner chaque année l'enquête nationale de coûts relative au secteur de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion.

I. LE DROIT EXISTANT

Afin de mieux connaître les prestations assurées dans le secteur de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion (AHI), une enquête nationale de coûts a été mise en place en 2012, à la suite de de la refonte de la politique d'hébergement engagée en 2009.

D'après la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), elle constitue, avec le référentiel national de prestations (RNP), le « socle de référence pour définir au plus près des bénéficiaires les prestations qui sont assurées par les associations et déterminer à quel coût elles le sont ».

Un système d'information pour cette enquête (SI-ENC) a été développé et est utilisé depuis 2014. Il couvre toute l'activité d'hébergement à l'exclusion des activités de veille sociale, d'accueil de jour et de logement.

Les opérateurs sont classés au sein de l'ENC en fonction de « groupes homogènes d'activité et de missions » (GHAM) qui tiennent compte des prestations des établissements concernés autour de leurs activités principales : héberger, alimenter, accueillir et accompagner.

Des tableaux de coûts par GHAM sont ensuite obtenus en fonction du niveau territorial souhaité (département, région, national).

Les données sont mises à la disposition des services déconcentrés de l'État mais aussi des organismes gestionnaires et établissements eux-mêmes, ce qui permet de disposer d'une vue d'ensemble des prestations réalisées et des coûts constatés et, éventuellement, de se comparer.

Comme votre rapporteur spécial avait eu l'occasion de le mettre en évidence dans le cadre de son contrôle sur les dispositifs d'hébergement d'urgence43 ( * ), cette enquête doit permettre de nourrir le dialogue de gestion entre l'État et les organismes gestionnaires, en ayant également une meilleure connaissance de l'offre d'hébergement proposée et des prestations qui y sont associées.

Toutefois, son impact reste insuffisant pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, les services déconcentrés ne s'en servent pas nécessairement lorsqu'ils doivent déterminer le montant de financement de places d'hébergement.

Ensuite, toutes les structures ne renseignent pas encore l'enquête, ce qui ne permet pas d'avoir une vision exhaustive et représentative des activités couvertes ainsi que de leur coût.

Enfin, la qualité des données recueillies reste variable, selon la façon dont l'établissement l'a remplie.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable du rapporteur général de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à insérer le présent article pour prévoir, à l'article L. 345-1 du code de l'action sociale et des familles, l'obligation pour les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) de remplir chaque année l'enquête nationale de coûts ( I du présent article). Il est précisé que le contenu et les modalités de recueil des données sont définis par voie réglementaire.

Par ailleurs, il est prévu, au II du présent article, que les CHRS doivent remplir l'enquête nationale de coûts au plus tard le 31 mars 2018 pour les données relatives à l'année 2016. En cas de donnée non transmises, l'article prévoit que le centre peut se voir appliquer une tarification d'office.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur spécial ne peut que soutenir l'objectif de cet article, ayant lui-même, dans son contrôle précité sur les dispositifs d'hébergement d'urgence , appelé de ses voeux que les établissements soient obligés de remplir l'enquête nationale de coûts . D'ailleurs, en 2016, il avait été indiqué à votre rapporteur spécial qu'un décret en conseil d'État était en cours d'instruction pour instaurer cette obligation.

Cette disposition doit permettre d'avoir une vision exhaustive des prestations et de leurs coûts , afin de parvenir à des résultats plus pertinents issus de cette enquête et à une tarification plus adaptée .

À l'heure actuelle , comme indiqué précédemment, l'enquête nationale de coûts n'est pas obligatoire et repose sur la bonne volonté des établissements et de leurs gestionnaires. Ainsi, elle serait remplie par 70 % des structures selon le Gouvernement.

Il paraît tout-à-fait opportun de faire évoluer cet état de fait et de prévoir une sanction en cas de non-respect de l'obligation de remplir l'ENC, à savoir la possible application d'une tarification d'office.

L'enquête nationale de coûts doit ainsi contribuer à une plus grande convergence tarifaire et, de fait, à une meilleure maîtrise des coûts . La convergence tarifaire n'est ainsi pas appliquée de la même façon sur l'ensemble du territoire, certains préfets ayant d'ores et déjà opéré un important travail au sein même de leur champ territorial de compétences.

De même, le conventionnement doit être renforcé en s'appuyant, pour les aspects financiers, sur les résultats de l'enquête nationale de coûts. Les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) doivent ainsi pouvoir garantir la stabilité des moyens alloués aux CHRS sur plusieurs années, tout en les engageant dans une meilleure maîtrise de leurs coûts. Ainsi, comme indiqué dans le rapport sur les dispositifs d'hébergement d'urgence précité, la convention conclue entre la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (Drihl) et l'association Aurore a prévu une réduction de 6 % du coût en cinq ans.

Votre rapporteur spécial considère toutefois que cette obligation de remplir l'enquête ne devrait pas être réservée aux CHRS mais devrait également concerner toutes les autres structures participant de cette politique publique et concernées par l'ENC, en particulier les centres d'hébergement d'urgence .

Certes, un important travail est actuellement annoncé par le Gouvernement pour procéder à une restructuration du secteur et parvenir à la transformation de nombreux CHU en CHRS et donc à des structures à statut unique, ce dont votre rapporteur spécial se félicite .

Toutefois, même si les services de l'État attendent une mise en oeuvre rapide de cette réforme, il convient de prévoir l'obligation de remplir l'enquête pour les centres d'hébergement d'urgence, d'autant que certains d'entre eux pourraient encore rester financés sous le système de la subvention 44 ( * ).

Toutefois, afin d'éviter qu'une telle obligation pèse sur les plus petites structures, parfois ouvertes temporairement, il conviendrait de limiter cette obligation aux établissements qui seraient ouverts une grande partie de l'année.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 52 ter (Art. L. 351-2-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 542-1 et L. 831-2 du code de la sécurité sociale) - Coordination compte tenu de la création de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en remplacement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et codification du principe de non-éligibilité aux aides personnelles au logement des particuliers rattachés au foyer fiscal de leurs parents assujettis à cet impôt

Commentaire : le présent article prévoit, d'une part, de tirer les conséquences de la création de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), qui se substitue pour partie à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et, d'autre part, de codifier le principe de non-éligibilité aux aides personnelles au logement des particuliers rattachés au foyer fiscal de leurs parents assujettis à cet impôt, tout en précisant le dispositif.

I. LE DROIT EXISTANT

Comme toute personne qui acquitte une charge de loyer, les étudiants qui vivent dans un logement n'appartenant pas à l'un de leurs ascendants sont éligibles aux aides personnelles au logement , qu'il s'agisse, selon les cas, de l'aide personnalisée au logement (APL), prévue aux articles L. 351-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, de l'allocation de logement à caractère familial (ALF), codifiée à l'article L. 542-1 et suivants du code de la sécurité sociale, ou de l'allocation de logement à caractère social (ALS), prévue aux articles L. 831-1 et suivants du code de la sécurité sociale.

Selon les chiffres dont votre rapporteur spécial a pu disposer, un tiers des étudiants bénéficiaient ainsi de l'une de ces trois aides en 2016 , représentant 763 000 étudiants, dont deux tiers d'entre eux qui ne sont pas boursiers (selon les chiffres de la Caisse nationale des allocations familiales).

D'après les chiffres transmis par le ministère du logement dans les réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial, les aides aux étudiants représentaient ainsi une dépense d'1,4 milliard d'euros en 2016.

L'attribution de ces aides est soumise à condition de ressources, correspondant aux revenus nets catégoriels de l'année n-2 tels que connus par l'administration fiscale au titre de l'impôt sur le revenu.

Tandis qu'un nombre important d'étudiants vivent notamment de transferts financiers de leurs parents, le montant réel de ces transferts n'est pas pris en compte dans l'assiette de leurs ressources imposables. En effet, on leur applique simplement un plancher de ressources forfaitaire .

Parallèlement, rien n'empêche non plus les parents de continuer à inclure leur enfant étudiant dans leur déclaration fiscale pour l'impôt sur le revenu (jusqu'à l'âge de 25 ans) et de bénéficier ainsi d'une demi-part au titre du quotient familial.

Toutefois, l'article 143 de la loi de finances initiale pour 2016 45 ( * ) a introduit une limite en prévoyant qu'à compter du 1 er octobre 2016, les particuliers dont les parents seraient redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) - ce qui vise principalement les étudiants - et qui seraient rattachés à leur foyer fiscal ne seraient plus éligibles aux aides personnelles au logement .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par Christelle Dubos et les membres du groupe La République en marche, avec l'avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement, tendant à insérer le présent article pour :

- tirer les conséquences de la création de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) à l'article 12 du projet de loi de finances pour 2018 et ayant vocation à se substituer à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ;

- codifier cette règle d'inéligibilité applicable pour les trois aides personnelles au logement , en modifiant l'article L. 321-2-1 du code de la construction et de l'habitation pour l'APL, l'article L. 542-1 du code de la sécurité sociale pour l'ALF et l'article L. 831-2 du même code pour l'ALS ;

- préciser que cette condition d'éligibilité était appréciée pour chacun des membres du ménage et que sont visés les parents assujettis à cet impôt et non seulement redevables.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Déjà lors de l'examen de la loi de finances pour 2016, votre rapporteur spécial avait dénoncé la portée purement symbolique de cette disposition qui stigmatise les étudiants dont les parents sont assujettis à l'ISF.

En effet, cela revient à ne retenir que la valeur du patrimoine des parents dans l'appréciation de leurs ressources, sans prise en compte de leurs revenus. En outre, l'on ne tient pas compte de l'ensemble du patrimoine puisque certains biens sont exclus de l'ISF (biens professionnels, oeuvres d'art...). Au contraire, la détention d'un bien rendant le contribuable assujetti à l'ISF, par exemple une résidence principale ou secondaire, suffirait à exclure l'étudiant rattaché au foyer fiscal du bénéfice de l'aide alors que cet impôt ne permet pas de juger du niveau de vie réel d'un foyer fiscal.

En outre, cette mesure avait été adoptée sans réflexion plus approfondie sur le régime des aides personnelles au logement applicable aux étudiants . Pourtant, comme votre rapporteur spécial l'avait rappelé, il constitue un dispositif moins ciblé et moins redistributif que pour les autres bénéficiaires, et qualifié ainsi d'« atypique » par la Cour des comptes dans son enquête précitée. Cela s'explique, d'une part, par le fait que le calcul des aides ne tient pas compte du revenu réel des parents et des transferts financiers intrafamiliaux et, d'autre part, par la possibilité de cumuler ces aides avec le bénéfice d'une demi-part fiscale supplémentaire pour le calcul de l'impôt sur le revenu des parents.

La Cour des comptes avait ainsi considéré que ces aides occupaient davantage « une fonction d'aide à l'autonomie des jeunes, réservée à la population étudiante, qu'une fonction d'aide sociale en vue de l'accès au logement ».

Plus généralement, l'enquête de la Cour des comptes a rappelé les effets de seuil particulièrement défavorables aux classes moyennes découlant de l'ensemble des dispositifs d'aides aux étudiants (phénomène de « courbe en U ») : en 2011, les étudiants des 30 % des foyers les plus modestes (déciles 1 à 3) percevaient ainsi 75 % des bourses et 44 % des aides au logement ; a contrario, les étudiants des 20 % des foyers les plus aisés (déciles 9 et 10) cumulent l'essentiel des avantages fiscaux (principalement la demi-part fiscale) et une proportion d'aides personnelles au logement comparable à celle perçue par les étudiants des classes moyennes (déciles 4 à 8). Certes, les effets des avantages fiscaux au profit des derniers déciles ont certainement été réduits depuis par l'abaissement du quotient familial.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, votre rapporteur spécial considère qu'il est encore moins justifié de prévoir que les aides personnelles au logement ne pourraient bénéficier aux seuls étudiants dont les parents seraient assujettis au nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI) . Il crée une distinction entre les étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents en ne tenant plus compte que de leur patrimoine immobilier, en aucun cas des autres biens ni des revenus .

La question peut d'ailleurs également se poser en termes d'égalité de traitement entre les demandeurs puisque l'éligibilité à une aide ne repose plus que sur la forme que prend le patrimoine détenu par les parents de l'étudiant.

En outre, par coordination avec la suppression de l'IFI et de l'ISF par le Sénat lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2018, le présent article n'a pas vocation à être conservé .

En revanche, votre rapporteur spécial considère toujours, comme il l'a déjà défendu lors de l'examen de la loi de finances pour 2016, que la prise en compte des ressources des parents doit faire l'objet d'une réflexion beaucoup plus globale sur la conditionnalité du versement des aides personnelles au logement des étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents .

Dans un souci d'équité, il considère que ce sujet mériterait d'être étudié , tout en tenant compte de la sensibilité du sujet et sans omettre les indéniables difficultés dans lesquelles se trouvent certains étudiants .

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 52 quater (Art. L. 435-1, L. 443-14-1 [nouveau], L. 443-15-2-1, L. 443-15-2-2 et L. 452-3 du code de la construction et de l'habitation) - Création d'une taxe sur le produit des cessions de logements des organismes de logement social

. Commentaire : le présent article tend à instaurer une taxe sur le produit des cessions de logements réalisées par les organismes de logement social, son produit étant versé à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) pour financer le Fonds national des aides à la pierre (Fnap).

LE DROIT EXISTANT

En l'état actuel du droit, les cessions réalisées par les bailleurs sociaux ne sont que très peu taxées.

En effet, les plus-values issues de la vente de logements locatifs sociaux, lesquels répondent à la définition du service d'intérêt général, sont exonérées d'imposition. Les moins-values ne sont, quant à elles, ni récupérables, ni imputables.

Dans l'hypothèse d'une vente dans le délai de cinq ans après l'acquisition, la cession est assujettie à la TVA mais elle est payée par l'acquéreur, l'organisme de logement social se contentant d'en être le collecteur. La taxe de publicité foncière, également due par l'acquéreur, correspond au taux réduit de 0,7 %, sans taxe additionnelle pour les communes.

Pour les autres opérations de vente, les droits de mutation à titre onéreux sont applicables dans les conditions de droit commun (soit une taxe de publicité foncière jusqu'à 4,5 % au profit des départements et une taxe additionnelle de 1,2 % pour les communes), sauf lorsqu'il s'agit d'une cession entre bailleurs sociaux, auquel cas s'applique un droit fixe de 125 euros.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement , avec l'avis favorable de la commission des finances, tendant à insérer le présent article qui vise à instituer une taxe sur le produit des cessions réalisées par les organismes de logement social (organismes d'habitation à loyer modéré et sociétés d'économie mixte agréées) au cours du dernier exercice clos . Il crée ainsi un nouvel article L. 443-14-1 au sein du livre IV du code de la construction et de l'habitation ( du présent article).

La taxe n'est, en revanche, pas applicable aux cessions effectuées par les organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 du code de la construction et de l'habitation (maîtrise d'ouvrage d'insertion) et par les collectivités territoriales pour des logements locatifs sociaux ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement (APL), en vertu respectivement des et du présent article.

Le taux de la taxe serait fixé par arrêté des ministres chargés du logement, de la ville, de l'économie et des finances, après avis de l'Union sociale pour l'habitat (USH), sans pouvoir excéder 10 % .

Son assiette correspondrait au produit total des cessions de logements des organismes de logement social , à l'exception des cessions réalisées, soit au profit d'une collectivité territoriale ou de son groupement et qui s'engage à le mettre à la disposition de personnes défavorisées pendant au moins quinze ans, soit entre bailleurs sociaux (respectivement cinquième et septième alinéas de l'article L. 443-11 du code de la construction et de l'habitation).

Les modalités de déclaration, de paiement et de recouvrement prévues pour les cotisations à la CGLLS à l'article L. 452-5 du code de la construction et de l'habitation ainsi que les dispositions relatifs au contrôle de ces cotisations et tels que fixés à l'article L. 452-6 du même code sont également applicables à la taxe sur les cessions.

Le produit issu de ces cessions devrait être versé à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) . Par coordination, le du présent article modifie donc l'article L. 452-3 du code de la construction et de l'habitation pour prévoir que le produit de cette taxe figure parmi les ressources de la CGLLS.

En outre, en vertu du du présent article qui modifie le 1° du II de l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation, une fraction du produit de cette taxe pourrait être employée à financer le Fonds national des aides à la pierre (Fnap) , au même titre que les deux cotisations des bailleurs sociaux à la CGLLS.

Cette nouvelle source de financement arrive alors que l'article 19 du projet de loi de finances initiale pour 2018 prévoit de relever la participation des organismes de logement social au Fnap de 105 millions d'euros en 2018, pour la passer de 270 à 375 millions d'euros, et tandis que la contribution de l'Etat serait réduite à 50 millions d'euros (contre 200 millions d'euros inscrits initialement en 2017).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Si, dans le principe , l'instauration de la taxation des cessions réalisées par les bailleurs sociaux peut se justifier , il est assez paradoxal que cela soit prévu au moment même où le Gouvernement souhaite justement inciter les organismes à vendre davantage .

En effet, dans le protocole d'accord conclu entre l'Etat et Action logement le 21 novembre dernier, il est prévu que cette dernière mette en place une « structure de portage » pour les ventes de logements sociaux , afin de faciliter l'acquisition, par les locataires, de leur logement social et de développer les parcours résidentiels ainsi que la mixité sociale, tout en constituant également une ressource plus importante en termes de fonds propres pour les bailleurs sociaux.

Cette structure devrait ainsi avoir la « charge d'acheter en bloc des immeubles aux bailleurs sociaux avant de conduire la vente à l'occupant, sous réserve de la mise en place d'un dispositif sécurisé ».

L'objectif du Gouvernement est de doubler le nombre de logements cédés dès l'an prochain . Selon les données recueillies auprès de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), les ventes de logements sociaux à des particuliers ont ainsi représenté environ 8 300 logements au cours des dernières années. Le prix moyen de cession est évalué à 88 541 euros par logement en 2016.

Avec le dispositif proposé par le présent article, le Gouvernement atteindrait ainsi environ 70 millions d'euros de rendement pour le nombre de cessions actuellement constaté, pour passer ensuite à plus de 130 millions d'euros avec un doublement des cessions dès 2018 (soit 15 000 logements vendus).

Cessions de logements réalisées à des personnes physiques par les bailleurs sociaux

Source : commission des finances d'après les données de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature

L'instauration d'une telle taxe permet surtout , par les recettes qu'elle procure, de trouver une nouvelle source de financement par les bailleurs sociaux pour le Fonds national des aides à la pierre (Fnap) alors que, comme indiqué précédemment, leur participation est prévue pour augmenter de 105 millions d'euros, pour atteindre 375 millions d'euros, et que la dotation de l'État est réduite à 50 millions d'euros pour 2018.

Enfin, la taxation proposée est conséquente puisqu'elle porte sur l'ensemble du prix de cession , et non simplement sur la plus-value réellement perçues par le bailleur social.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 52 quinquies (Art. L. 2252-2 du code général des collectivités territoriales) - Possibilité ouverte aux collectivités territoriales d'accorder leur garantie pour les emprunts des organismes de foncier solidaire

. Commentaire : le présent article vise à prévoir que les collectivités territoriales puissent apporter leur garantie d'emprunt aux opérations d'acquisition de terrain réalisées par les organismes de foncier solidaire en vue de la construction de logements dans le cadre de baux réels solidaires. Il s'agit ainsi de leur permettre d'être éligibles aux prêts de long terme de la Caisse des dépôts et consignations.

I. LE DROIT EXISTANT

Sur le modèle des « community land trusts » anglo-saxons, l'article 164 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a créé, au sein d'un nouvel article L. 329-1 du code de l'urbanisme, les organismes de foncier solidaire (OFS), destinés à acquérir et gérer des terrains en vue de réaliser des logements et des équipements collectifs conformément aux objectifs de la politique d'aide au logement 46 ( * ) . Ces organismes sans but lucratif sont agréés par le représentant de l'État dans la région.

Ils restent ainsi propriétaires du foncier tout en consentant à un (ou des) preneur(s), « dans le cadre d'un bail de longue durée , s'il y a lieu avec obligation de construire ou de réhabiliter des constructions existantes, des droits réels en vue de la location ou de l'accession à la propriété des logements , à usage d'habitation principale ou à usage mixte professionnel et d'habitation principale, sous des conditions de plafond de ressources, de loyers et, le cas échéant, de prix de cession ».

Le représentant de l'État dans la région peut agréer un organisme existant et exerçant par ailleurs d'autres missions.

L'organisme de foncier solidaire peut également bénéficier de la décote « dite Duflot », prévue à l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

Cette dissociation du foncier (OFS) et du bâti (preneur) vise à faciliter l'accession sociale à la propriété et le développement de l'offre locative à destination des ménages modestes, en limitant le coût de l'opération.

Elle se concrétise par la conclusion d'un bail réel solidaire créé par l'ordonnance n° 2016-985 du 20 juillet 2016 relative au bail réel, laquelle a été prise en vertu de l'article 94 de la loi n° 2015 990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (dite loi « Macron »). Ce nouveau bail est codifié aux articles L. 255-1 à L. 255-19 du code de la construction et de l'habitation.

Le bail est conclu entre l'organisme de foncier solidaire et le preneur pour une durée de 18 à 99 ans, en concédant à ce dernier des droits réels sur le bâti, contre redevance.

Le preneur peut être un ménage modeste qui, répondant aux critères de plafonds de ressources, souhaite accéder à la propriété , un opérateur s'engageant à vendre ses droits attachés au logement à un ménage répondant également aux plafonds fixés ou encore à un opérateur qui s'engage à louer les logements sous réserve également du respect de plafonds de loyer et de plafond de ressources du locataire.

La durée du bail est « rechargeable » , c'est-à-dire qu'elle est renouvelée à chaque cession des droits réels attachés au bâti, dès lors que le preneur continue de remplir les conditions de ressources.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, introduit à l'Assemblée nationale et issu de deux amendements identiques de François Jolivet, rapporteur spécial sur les crédits consacrés au logement au sein de la mission « Cohésion des territoires », et plusieurs de ses collègues, et de Guy Bricout et plusieurs de ses collègues, vise à permettre aux collectivités territoriales d'apporter leur garantie d'emprunt aux opérations d'acquisition de terrain réalisées par les organismes de foncier solidaire , afin que des logements puissent y être construits dans le cadre de baux réels solidaires. L'amendement, déclaré recevable par la commission des finances, a reçu un avis favorable du Gouvernement et de la commission des finances.

Il s'agirait ainsi de permettre aux organismes de foncier solidaire d'obtenir plus facilement les prêts de très long terme de la Caisse des dépôts et consignations (prêts Gaïa ) dont la durée peut aller jusqu'à 60 ans.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le dispositif des organismes de foncier solidaire reste, pour l'heure, relativement limité dans sa mise en oeuvre puisque seulement trois structures de ce type ont été constituées . Il a été volontairement construit en laissant une souplesse quant à la structure juridique choisie pour se développer (association, fondation, filiale d'un établissement...).

Il importe que ces organismes puissent effectivement acquérir des terrains . Destinés à favoriser l'accession sociale en zone urbaine dense, les OFS doivent disposer de terrains qui peuvent représenter entre 25 % et 30 % du coût total de l'opération immobilière. Si certains projets devraient pouvoir reposer sur des dons, pour d'autres le recours à l'emprunt sera nécessaire . Or, les modèles économiques actuellement à l'étude imposent l'obtention de prêts très peu chers ou à tout le moins de très long terme , afin de lisser le coût au maximum.

Certains prêts de la Caisse des dépôts et consignations prévus pour des acquisitions foncières et d'une durée de 20 à 60 ans devraient effectivement permettre de répondre à leur besoin de financement.

D'un point de vue juridique, a priori rien n'empêcherait que les organismes de foncier solidaire bénéficient déjà des prêts de très long terme sur fonds d'épargne.

Toutefois, ceux-ci doivent être garantis, soit par les collectivités territoriales, soit par des cautions bancaires . Or, ces dernières sont très coûteuses et quasiment indisponibles dès lors que les prêts sont d'une durée supérieure à 20 ans d'après les informations recueillies auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

Cet amendement vise donc à opérer une actualisation bienvenue du code général des collectivités territoriales , dans la perspective de développement de l'activité des organismes de foncier solidaire.

Bien entendu, cette éligibilité aux prêts de la Caisse des dépôts et consignations n'induit pas nécessairement que les opérations puissent réellement en bénéficier . C'est l'équilibre économique et financier du montage immobilier envisagé qui permettra ou non d'accéder effectivement au financement par les fonds d'épargne.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 52 sexies (Art. 9-2 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine) - Augmentation à 10 milliards d'euros de l'enveloppe globale du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU)

. Commentaire : le présent article a pour objet de passer de 6 à 10 milliards d'euros le montant de l'enveloppe financière prévue pour le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) sur la période 2014-2024, tout en précisant que l'État participe à hauteur d'1 milliard d'euros.

I. LE DROIT EXISTANT

En vertu de l'article 3 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, un nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) a été instauré.

Il fait l'objet des articles 9-1 à 9-3 du chapitre II bis au sein du titre I er de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

Prenant le relais du programme national de rénovation urbaine (PNRU) qui s'achève, le NPNRU est prévu pour une mise en oeuvre sur la période 2014-2024, confiée à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), dans le cadre des contrats de ville et en tenant compte de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville.

Ainsi, parmi les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), les « quartiers présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants » ont été identifiés pour bénéficier du programme. 216 quartiers d'intérêt national ont été retenus, auxquels s'ajoutent 264 quartiers d'intérêt régional issus des contrats de plan État-régions (CPER).

En vertu de l'article 9-1 de la loi précitée du 1 er août 2003, le NPNRU doit « garantir une reconstitution de l'offre de logements locatifs sociaux démolis compatible avec les besoins structurels en logements locatifs sociaux fixés par les programmes locaux de l'habitat ». Il doit également permettre de mettre en oeuvre des opérations d'aménagement urbain « dont la création et la réhabilitation des espaces publics, la réhabilitation, la résidentialisation, la démolition et la production de logements, la création, la réhabilitation et la démolition d'équipements publics ou collectifs, la création et la réorganisation d'espaces d'activité économique et commerciale ou tout autre investissement contribuant au renouvellement urbain ». Il doit enfin participer au traitement des copropriétés dégradées et de l'habitat indigne .

Ces nouveaux « quartiers ANRU » doivent être couverts par 236 protocoles de préfiguration qui sont, au 30 juin 2017 :

- pour 180 d'entre eux, signés et reçus à l'Anru ;

- pour 50 d'entre eux, en cours de finalisation ou de signature ;

- et les restants encore en cours d'élaboration ou d'instruction.

Dans ce cadre et avant même la conclusion des conventions de renouvellement urbain, sont d'ores et déjà actés la démolition de 11 000 logements locatifs sociaux, la reconstruction de 3 000 logements sociaux neufs hors site et la réhabilitation de 3 000 logements sociaux.

Cinq conventions de renouvellement urbain sont par ailleurs signées.

En termes de financement, l'article 9-2 de la loi précitée du 1 er août 2003 prévoyait initialement 5 milliards d'euros pour la mise en oeuvre du NPNRU , répartie à 83 % pour les quartiers d'intérêt national (4,15 milliards d'euros) et 17 % pour les quartiers d'intérêt régional (850 millions d'euros).

En vertu de la convention du 2 octobre 2015 entre l'État, l'Anru et l'UESL-Action logement, cette enveloppe est couverte par les ressources suivantes :

- 4 milliards d'euros issus d'Action logement, dont 3,2 milliards d'euros de subventions et 800 millions d'euros issus de prêts bonifiés (soit 2,2 milliards d'euros de prêts bonifiés) ;

- 400 millions d'euros par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) ;

- 600 millions d'euros issus des sommes non engagées ou engagées sans être réalisées au titre du PNRU. D'après les informations recueillies auprès du directeur général de l'Anru, ce montant devrait pouvoir être atteint.

L'article 137 de la loi de finances initiale pour 2017 47 ( * ) a porté de 5 à 6 milliards d'euros le montant de l'enveloppe totale consacrée au NPNRU, le milliard d'euros supplémentaire devant être supporté par des crédits budgétaires de l'État .

Au sein du programme 147 « Politique de la ville » de la mission « Politique des territoires », 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et 15 millions d'euros en crédits de paiement étaient effectivement inscrits pour 2017. Toutefois, ils ont finalement été annulés dans le cadre du décret d'avance du 20 juillet 2017 48 ( * ) .

Cette année, le projet de loi de finances pour 2018 prévoit seulement 15 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur les crédits de la mission « Cohésion des territoires » (programme 147 « Politique de la ville »).

Pour 2017, l'Anru prévoit 209 millions d'euros d'autorisations d'engagement au titre du NPNRU, correspondant à 133 millions d'euros pour les protocoles de préfiguration (60 millions d'euros pour l'ingénierie et 73 millions d'euros pour les opérations d'investissement) et à 76 millions d'euros pour la signature des premières conventions. La consommation de 54 millions d'euros de crédits de paiement est également attendue dans le cadre des protocoles, dont 48 millions d'euros pour les opérations d'ingénierie.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement, cinq amendements identiques 49 ( * ) tendant à modifier l'article 9-2 précité de la loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la cohésion urbaine afin de passer de 6 à 10 milliards d'euros l'enveloppe financière consacrée au NPNRU, tout en précisant qu'un milliard d'euros proviendrait de subventions de l'État.

Ils consacrent ainsi dans la loi un engagement du Président de la République

III. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le NPNRU doit disposer des moyens nécessaires pour sa mise en oeuvre et compte tenu du nombre de quartiers retenus et des besoins identifiés pour bénéficier de son intervention, une enveloppe renforcée ne peut qu'être bienvenue .

Le doublement de l'enveloppe initiale devrait ainsi permettre de mener des opérations ambitieuses en termes de rénovation urbaine.

Restent à savoir comment seront couverts ces 4 milliards d'euros supplémentaires . En effet, le milliard d'euros issus des crédits de l'État ne constitue finalement que la confirmation de ce qui avait été annoncé par le précédent Gouvernement.

Conformément à ce qui est prévu dans le protocole d'accord conclu entre l'État et Action logement le 21 novembre dernier, 2 milliards d'euros sont ainsi portés par Action logement qui finançait déjà le NPNRU pour 4 des 5 milliards d'euros initialement prévus. Désormais, elle devrait donc couvrir à elle seule 60 % du financement total du programme.

Par ailleurs, les 2 milliards d'euros restants devraient être apportés par les bailleurs sociaux . Toutefois, cette participation des organismes de logement social dans le financement du programme lui-même (puisque chacun était déjà amené à intervenir dans le financement des opérations de renouvellement urbain concernant son propre parc) est actuellement subordonnée au fait qu'une sortie de crise soit trouvée quant à la réforme portée par l'État à l'article 52 du projet de loi de finances pour 2018 et tendant à prévoir une réduction des loyers d'1,7 milliard d'euros dans le secteur du logement social.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première délibération , l'Assemblée nationale a adopté avec modification l' article 52 rattaché à la mission.

Elle a également inséré cinq articles additionnels (articles 52 bis à 52 sexies ).

En seconde délibération , l'Assemblée nationale a adopté un amendement de crédits tendant à

- majorer de 240 000 euros (AE=CP) les crédits de titre 2 de la mission, au titre du coût prévisionnel de l' indemnité de compensation de CSG , avec 192 000 euros sur le programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 48 000 euros sur le programme « Politique de la ville » ;

- minorer de 7 245 584 euros (AE=CP) les crédits de la mission afin de gager toutes les nouvelles dépenses par des économies complémentaires.

Cette minoration se répartit ainsi :

- 3 484 803 euros sur le programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » ;

- 1 838 050 euros sur le programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » ;

- 91 535 euros sur le programme « Interventions territoriales de l'État » ;

- 1 831 196 euros sur le programme « Politique de la ville ».

Au total , la mission voit donc ses crédits minorés de 7 005 584 euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 novembre 2017 sous la présidence de M. Charles Guené, vice-président, puis de M. Vincent Éblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanismes, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » de la mission « Cohésion des territoires » (et articles 52 à 52 sexies ).

M. Bernard Delcros , rapporteur spécial pour la mission « Cohésion des territoires » des programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État » . - Le projet de loi de finances (PLF) pour 2018 prévoit la fusion de deux missions budgétaires auparavant distinctes, « Égalité des territoires et logement » - qui inclut le logement et l'hébergement d'urgence que présentera Philippe Dallier - et « Politique des territoires », pour plus de cohérence, dans la mission « Cohésion des territoires ». Cela fait coïncider le périmètre de la mission avec celui du ministère de la cohésion des territoires, et rassemble certains dispositifs contribuant à la politique d'aménagement du territoire. Moins cohérent est le transfert du financement des contrats de ruralité et du pacte État-métropoles vers la mission « Relations avec les collectivités territoriales », alors que d'autres outils contractuels comme les contrats de plan État région (CPER) et les contrats de ville restent dans la mission « Cohésion des territoires ».

Toutefois, les programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État » représentent moins de 2 % des crédits de la nouvelle mission « Cohésion des territoires ».

En 2018, le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » devrait s'élever à 191 millions d'euros en autorisations d'engagement, en baisse de 58 %, à cause du transfert de financement des contrats de ruralité et du pacte État-métropoles vers le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements ». Mais les crédits de paiement augmenteront pour financer les contrats signés en 2017, et les nouveaux engagements seront financés par la dotation de soutien à l'investissement public local (DSIL).

En 2018, sont prévues une baisse des nouveaux engagements pour la prime d'aménagement du territoire et la poursuite des efforts sur les dépenses de personnel et de fonctionnement du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET).

Je regrette le transfert du financement des contrats de ruralité vers un autre programme et l'absence de financement dédié à ces contrats. Autant en 2017, la loi de finances prévoyait 216 millions d'euros d'autorisation d'engagement pour les contrats de ruralité, autant en 2018, il n'y a pas de crédits dédiés, alors que cet outil moderne accompagne les territoires et représente un véritable progrès. Fin septembre 2017, 400 contrats avaient été signés sur 480 demandes. Cela montre tout l'intérêt des collectivités pour ce nouvel outil.

Pourtant, le projet de loi de finances pour 2018 marque un recul sur deux points : le transfert des crédits du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » vers le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » et l'absence de crédits dédiés aux contrats de ruralité. Une enveloppe indicative de 45 millions d'euros d'autorisations d'engagement est prévue en 2018 sur la DSIL pour financer la deuxième année des contrats de ruralité signés en 2017. Mais elle sera probablement insuffisante pour signer de nouveaux contrats.

Les moyens prévus en faveur de la prime d'aménagement du territoire étaient initialement de 10 millions d'euros en autorisations d'engagement dans le projet de loi de finances présenté par le Gouvernement. L'Assemblée nationale les a abondés de 5 millions d'euros. Malgré tout, cette somme est largement inférieure à ce qui était attribué auparavant, d'autant que 4 millions d'euros seront déjà nécessaires pour financer la reprise du site de Whirlpool à Amiens. Il restera très peu d'argent pour accompagner les entreprises dans les territoires.

S'agissant de la future Agence nationale de la cohésion des territoires, elle pourra soit prendre la forme d'un véritable opérateur sur le modèle de l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), soit être portée par le CGET. Je suis favorable à cette dernière solution afin de ne pas multiplier les structures.

Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) s'élèvera à 34 millions d'euros en autorisations d'engagement, en hausse, en raison du rattrapage du retard de mise en oeuvre du programme exceptionnel d'investissement en Corse. Trois points méritent d'être soulignés. Une nouvelle action, le « plan littoral 21 » en région Occitanie, est inscrite en 2018. Elle sera abondée d'un million d'euros en autorisations d'engagement. C'est peu, mais le dispositif montera en puissance les années suivantes.

L'action « Eau et agriculture en Bretagne », qui finance le plan de lutte contre les algues vertes, verra ses crédits diminuer fortement en 2018 par rapport à ceux prévus en 2017. Un transfert de crédits de 5 millions d'euros sera effectué en cours d'exécution par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Il est toutefois curieux que seulement 2,5 millions d'euros soient inscrits alors que les besoins sont supérieurs et qu'il sera abondé par ailleurs. Sans être totalement insincère, ce budget manque de lisibilité.

Les moyens dévolus au Marais poitevin seront de nouveau réduits, pour atteindre un million d'euros en autorisations d'engagement. Or un rythme de croisière de 2,5 millions à 3 millions d'euros de crédits par an serait nécessaire. Il y a à la fois un problème de moyens et de méthode. Si une action du PITE ne doit pas durer indéfiniment, il faut trouver au préalable, avec les acteurs locaux, les moyens de poursuivre leurs actions dans le cadre du droit commun.

J'ai donc un avis très réservé sur l'évolution proposée de ces deux programmes entre 2017 et 2018 en raison de l'arrêt du financement des contrats de ruralité par le programme 112, l'absence de financement dédié à ces contrats et la réduction du PITE qui pénalise certains territoires. L'année dernière, j'avais souligné devant le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, en toute objectivité, que les contrats de ruralité représentaient un net progrès. Même si les sommes sont faibles, les actions concrètes sont importantes sur le terrain.

M. Marc Laménie . - Quel est le devenir de la politique d'aménagement du territoire, avec la disparition des contrats de ruralité et des pôles d'excellence rurale ? Dans les années 1970 et 1980, on parlait beaucoup de l'aménagement du territoire, tant dans les zones urbaines que rurales. Aujourd'hui, ce faible écho est inquiétant. Quelles sont les pistes à examiner pour l'avenir ?

M. Patrice Joly . - Les contrats de ruralité ont été mis en place en 2017, après les comités interministériels aux ruralités de 2015-2016. C'est un outil moderne répondant aux besoins du territoire avec des engagements de l'État pluriannuels et multisectoriels, ce qui est important pour développer une approche globale de long terme du développement territorial - ce qui péchait auparavant. Il est très regrettable de diminuer les moyens alloués à cet outil en début de parcours.

L'Agence nationale de la cohésion des territoires doit fournir aux territoires de l'ingénierie de développement, au-delà d'une aide technique. Pour cela, il faut de la matière grise. Cette agence donnerait ainsi à ces territoires ruraux les moyens de penser leur avenir. Pourra-t-elle aussi porter des opérations sur le développement des villes-centres et des centres-villes ? Nous n'avons pas d'information sur cette possibilité. Il faut construire l'avenir des petites communes en grande souffrance. Il est temps d'avoir une véritable politique d'aménagement du territoire et que les territoires ruraux soient traités avec la même attention que les métropoles.

Mme Nathalie Goulet . - J'ai écouté la présentation de ce rapport avec beaucoup d'attention. Il y a énormément de mesures éparpillées en faveur des territoires ruraux, de nombreuses missions et ministères concernés : tantôt pour le haut-débit ; les maisons de santé, l'Office national des forêts ou les routes. Lorsque nous aurons fini de passer du temps à rédiger des contrats - qui manquent d'évaluation et de résultats, et dont les budgets sont coupés en cours de fonctionnement - nous pourrons réellement développer l'intelligence territoriale ! Dispose-t-on d'un récapitulatif de tous les programmes concernant la ruralité ? Nous manquons de visibilité. Comme le disait Marc Laménie, quelle politique veut-on pour les zones rurales, et avec quels emplois ?

M. Bernard Delcros , rapporteur spécial . - Je suis entièrement d'accord avec Patrice Joly : le contrat de ruralité est un outil moderne pour une approche globale et dans la durée et constitue un vrai progrès. Nous devons agir pour garantir une bonne visibilité.

L'Agence nationale de la cohésion des territoires ne résoudra pas tout. Il faut aussi développer de l'ingénierie en interne, c'est complémentaire. En 2017, on pouvait réserver jusqu'à 10 % du montant des contrats à l'ingénierie territoriale en interne. Appuyons-nous sur l'expertise du CGET, quitte à renforcer ses moyens.

Ayons une approche globale de l'aménagement du territoire, des perspectives et des actions inscrites dans la durée, pour donner de la visibilité aux acteurs publics et privés, à moyen et long termes, ainsi que des outils de contractualisation.

Le document de politique transversale ou « orange budgétaire » sur l'aménagement du territoire récapitule l'ensemble des crédits consacrés à ce thème. Il est utile mais mériterait certainement d'être retravaillé.

- Présidence de M. Vincent Éblé, président -

M. Vincent Éblé , président . - Nous passons aux programmes 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », 109 « Aide à l'accès au logement », 135 « Urbanismes, territoires et amélioration de l'habitat » et 147 « Politique de la ville » de la mission « Cohésion des territoires », dont le rapporteur spécial est M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial pour la mission « Cohésion des territoires » des programmes 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », 109 « Aide à l'accès au logement », 135 « Urbanismes, territoires et amélioration de l'habitat » et 177 « Politique de la ville » . - Cette année, l'examen de ces programmes s'est effectué dans des conditions particulièrement difficiles. Nous examinons le rapport à la veille de l'examen du projet de loi de finances en séance publique et pourtant je vais vous proposer de réserver le vote des crédits de la mission et des six articles rattachés. J'estime que nous ne sommes pas encore en mesure de définir une position en raison de la lourdeur du sujet, du manque de disponibilité de l'administration et surtout du manque de bonne volonté de l'administration de Bercy.

Mercredi dernier, je me suis rendu en personne sur place pour m'entendre dire qu'on n'avait reçu mon courriel - envoyé le vendredi précédent - que la veille et que les services étaient d'abord là pour répondre aux demandes du ministre, le Parlement arrivant en second. Je peux le comprendre mais la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) dispose que nous devons recevoir des réponses. Alors que le Gouvernement souhaite que soit trouvé un compromis sur l'article 52, impliquant également d'intervenir sur la TVA en première partie du projet de loi de finances, et que nous devons notamment préparer un amendement complexe, nous avons besoin d'informations. J'ai failli quitter la réunion en cours, je regrette presque de ne pas l'avoir fait.

J'en reviens maintenant aux crédits de la mission. Cette nouvelle mission « Cohésion des territoires » représente 4 % du budget général de l'État, avec 16,5 milliards d'euros inscrits. Le poids de chaque programme dans la mission est toutefois très différent puisque le programme 109, qui comprend les aides personnelles au logement, représente 82 % des crédits de la mission, tandis que les trois programmes de l'ancienne mission « Politique des territoires » ne font ensemble que 4 %.

La mission constitue aussi l'un des principaux postes d'économie dans le budget cette année puisqu'elle connaît la plus forte baisse de crédits parmi toutes, avec des crédits de paiement amputés de 1,7 milliard d'euros.

Cette tendance se poursuit également sur le triennal 2018-2020, la mission enregistrant une baisse de 8,3 % en valeur et de 10,6 % en volume sur la période, tandis que, parallèlement, les crédits du budget général augmenteraient de 3 % en valeur et de 0,5 % en volume. Le Gouvernement fait peser sur la politique du logement ses économies budgétaires. Je m'interroge d'ailleurs sur les méthodes retenues et leur efficacité. Il faudrait construire plus pour répondre à la crise. Lorsqu'on voit que 40 milliards d'euros sont consacrés à la politique du logement et pour un tel résultat, ce n'est pas très efficace. Or, plutôt que de commencer par des réformes structurelles, le Gouvernement taille dans les crédits. Après le creux entre 2012 et 2014, dû à la crise et aux mesures radicales de Cécile Duflot, le secteur était reparti. Avec les mesures actuelles, une inflexion est à craindre. Le Gouvernement a mis la charrue avant les boeufs ! La diminution en 2018 de la dépense publique de l'État est principalement supportée, en volume, par le programme 109 qui porte les aides personnelles au logement. Les autres programmes connaissent des évolutions contrastées. Avec 14,5 milliards d'euros prévus pour 2018, les dépenses fiscales rattachées à la mission restent importantes et sont également globalement dynamiques, avec une progression de 2 % par rapport à 2017 - soit une augmentation de 300 millions d'euros.

Le pilotage de la politique du logement du Gouvernement ne manque pas de m'étonner. À la fois il prolonge des dépenses fiscales comme le dispositif « Pinel » ou le prêt à taux zéro - certes en resserrant leur champ d'application -, il rend plus difficile l'accession sociale à la propriété en supprimant les aides personnelles au logement « accession », alors qu'il incite les organismes de logement social à vendre davantage, il transforme l'impôt de solidarité sur la fortune en un impôt sur la fortune immobilière et il réduit drastiquement les capacités d'investissement des bailleurs sociaux. Il supprime également l'aide aux maires bâtisseurs. Cela me laisse perplexe ; le logement devient la variable d'ajustement budgétaire.

Les crédits du programme 177 connaissent une forte augmentation, avec 12,2 % de hausse, soit 212 millions d'euros. Cela correspond à un rebasage des crédits bienvenu, qui intervient après que le précédent gouvernement a déjà procédé à une hausse de 15 % en 2017. Je ne peux que saluer cette initiative, tant j'ai pu dénoncer au cours des dernières années l'insincérité budgétaire chronique sur ce programme.

Les dispositifs d'hébergement d'urgence bénéficient ainsi de plus de 208 millions d'euros, avec une enveloppe de 827 millions d'euros en 2018, et le logement adapté de 31 millions d'euros supplémentaires, pour un budget de 314 millions d'euros.

Pour autant, nous ne sommes pas au bout de nos peines. Il ne s'agit bien là que d'un rebasage, et encore, car l'enveloppe bien dotée ne permettra pas de dégager de moyens supplémentaires. Le budget pour 2018 est, à ce stade, déjà inférieur de 40 millions d'euros à la dépense attendue en fin d'année 2017.

Pour réaliser des économies, le Gouvernement compte sur l'enquête nationale de coûts applicable à l'ensemble des opérateurs, qui permet à l'État de connaître combien coûtent réellement les prestations. Une fois que les chiffres seront connus, il pourra rationaliser. Mais on attend aussi des efforts pour réduire la « vampirisation » des crédits du programme 177 par le programme 303 « Immigration et asile » dont relèvent en principe les demandeurs d'asile. Environ 150 millions d'euros du programme 177 couvrent actuellement des besoins en Île-de-France pour les migrants. On nous indique que ces dépenses pourraient être reprises par le bon programme en cours d'année. Si je ne demande qu'à y croire, je suis dubitatif.

Le nombre de nuitées hôtelières financées par l'État pour pallier le manque de places continue de progresser avec plus de 42 500 places financées en 2016 et malgré un plan de réduction des nuitées hôtelières mis en oeuvre par le précédent gouvernement. D'anciens hôtels sont également transformés pour devenir des structures d'hébergement pérennes et plus adaptées.

L'évolution du programme 109 « Aide à l'accès au logement » est directement liée à l'article 52 du projet de loi de finances. Il enregistre une baisse de 12,4 %, pour atteindre 13,6 milliards d'euros en 2018. La diminution de la dépense de l'État liée aux aides personnelles au logement s'élève au total à 1,9 milliard d'euros en un an. L'État souhaiterait ainsi économiser 1,5 milliard d'euros en imposant une baisse des loyers aux bailleurs sociaux. En outre, la réduction de 5 euros des aides personnelles au logement (APL) décidée par le Gouvernement à l'été dernier et justifiée par lui par l'insincérité du budget 2017, perdure finalement en 2018, ce qui n'avait pas été précisé pour cette mesure inintelligente - selon les dires du Président de la République. Certes, la baisse de la dépense publique intervient après des années de hausse permanente, mais le dispositif proposé cette fois pour y parvenir ne me convainc pas et même m'inquiète. Nous y reviendrons. En tout état de cause, il ne s'agit pas d'une réforme structurelle du système des aides personnelles au logement que j'appelle pourtant de mes voeux. Nous avions adopté le principe d'un taux d'effort minimal des ménages, je vous le proposerai de nouveau dans le cadre des amendements. Certains éléments doivent évoluer.

Le programme 135 qui concerne en particulier les aides à la pierre connaît des évolutions contradictoires. Traditionnellement, le budget consacré aux aides à la pierre augmente en année électorale et se réduit ensuite. Mais nous nous dirigeons maintenant vers leur extinction. L'État demande donc aux bailleurs sociaux de compenser la réduction des crédits budgétaires par l'augmentation de leur contribution, à travers leur cotisation à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et une nouvelle taxe sur les cessions de logements. Cette contribution passerait de 270 millions d'euros en 2017 à 375 millions d'euros en 2018. En pratique, cela fait longtemps que la parité entre l'État et les bailleurs sociaux a disparu.

En tout état de cause, il est important que des ressources suffisantes soient maintenues pour le Fonds national des aides à la pierre (Fnap) car les restes à payer sont estimés à près de 2 milliards d'euros à fin 2017 sur le programme 135.

En outre, il ne faut pas casser la bonne dynamique actuellement constatée en termes de constructions de logements. Parallèlement, l'État fait son grand retour en tant que financeur de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) par une dotation budgétaire. C'est une très bonne chose : 110 millions d'euros sont inscrits pour le programme « Habiter mieux » en 2018 et une enveloppe d'1,2 milliard d'euros est annoncée sur le quinquennat dans le cadre du « Grand plan d'investissement » (GPI). Ces crédits viennent prendre le relais du Fonds d'aide à la rénovation thermique (Fart) auparavant financé par le PIA (programme d'investissements d'avenir). Le budget de l'Anah semble davantage sécurisé que par le passé mais il reste soumis à l'aléa du cours des cessions de quotas carbone.

Le budget ne comprend plus non plus de crédits pour le dispositif des « maires bâtisseurs », mis en extinction dès 2017.

Enfin, les crédits du programme 147 consacré à la politique de la ville se trouvent globalement sanctuarisés, avec une stabilisation des crédits à l'exception de ceux consacrés à la rénovation urbaine. Pour autant, tandis que l'on célèbre les quarante ans de la politique de la ville, les acteurs de cette politique publique ne sont pas rassurés, notamment en raison de la forte mesure de régulation budgétaire opérée en juillet 2017. Des crédits ont ainsi dû remonter des territoires pour être annulés.

Par ailleurs, le Gouvernement affiche de fortes ambitions en termes de rénovation urbaine, avec une enveloppe pour le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) qui devrait passer de 6 à 10 milliards d'euros. Tout le monde s'en félicite.

La situation financière de l'Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru) paraît plutôt assurée à court terme, tandis que le financement des 6 premiers milliards d'euros du NPNRU est globalement couvert mais plusieurs interrogations restent toutefois en suspens.

Tout d'abord, le niveau de trésorerie est certes meilleur que ce que l'on craignait initialement, avec une prévision supérieure à 200 millions d'euros pour la fin de l'année, mais une impasse de trésorerie à moyen ou long terme est identifiée et une solution doit encore être trouvée.

Ensuite, 4 milliards d'euros restent à couvrir pour le NPNRU - pour passer de 6 à 10 milliards d'euros - et devaient être partagés entre Action logement et les organismes de logement social. Or, avec la réforme qu'on leur impose et la demande de contribuer davantage au financement des aides à la pierre, cela va devenir difficile.

Un nouveau dispositif expérimental d'emplois francs - le précédent ayant échoué sous le mandat de François Hollande - qui bénéficie aux demandeurs d'emplois résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, est proposé par le Gouvernement et porté par la mission « Travail et emploi », avec des conditions un peu différentes. Je doute de sa réelle efficacité.

Après la partie budgétaire, j'en viens maintenant à l'examen de l'article 52 du projet de loi de finances qui est au centre des attentions sur cette mission cette année. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit la création d'une réduction de loyer de solidarité, ou RLS, applicable aux logements ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement (APL) pour les locataires ne dépassant pas certains plafonds de revenus.

Le montant de cette réduction atteindrait, par exemple, 50 euros par mois pour une personne seule ou 69 euros par mois pour un couple avec une personne à charge. Son coût total pour les bailleurs est estimé à au moins 1,7 milliard d'euros.

En contrepartie, l'APL versée aux locataires serait réduite d'un montant atteignant entre 90 % et 98 % de la baisse de loyer, pour une économie totale pour l'État de 1,5 milliard d'euros.

On peut craindre des effets d'aubaine puisque certains ménages ne percevant pas d'APL pourraient pourtant bénéficier de la baisse de loyer. Mais en général, le différentiel serait assez limité, entre 2 euros et 5 euros par mois, soit un montant symbolique.

Dans les conversations de cage d'escalier, ces différences de traitement risquent d'être incompréhensibles pour les locataires et les bailleurs seront incapables de les expliquer.

Un dispositif de péréquation est également prévu afin de tenir compte des effets de cette réforme sur chacun des organismes de logement social.

L'article 52 supprime également les aides personnelles au logement « accession » et prévoit le gel des barèmes des trois aides ainsi que des loyers du secteur social en 2018.

Parmi les compensations financières prévues pour les bailleurs sociaux, on trouve notamment la stabilisation du taux du livret A à 0,75 % pendant deux ans, avant une révision de son mode de calcul. Pour réaliser 1,5 milliard d'euros d'économies aux frais des bailleurs, l'État leur fournit des prêts, grâce à la Caisse des dépôts et consignations, laquelle leur permet également de rééchelonner leurs dettes. Est-ce suffisant ? C'est tout le débat !

Et au total qui paye la note ? C'est l'épargnant qui finance avec son livret A, dont le taux sera bloqué pendant deux ans.

Et les bénéficiaires sont aussi les banques, puisque la stabilisation à 0,75 % du taux du livret A leur permet d'économiser des sommes considérables : le taux devrait atteindre 1,25 % et selon une agence de notation une hausse de 0,25 % leur aurait coûté 900 millions d'euros. C'est tout de même étonnant. Je regrette que nos collègues communistes ne soient plus là !

Mme Sophie Taillé-Polian . - Nous leur expliquerons !

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial . - En outre, les prêts consentis aux bailleurs sociaux ne remplacent pas des ressources propres, car ils doivent être remboursés, d'autant que les collectivités locales les ont garantis. Si la situation des bailleurs se dégradait, les banques pourraient finir par prendre en compte ces garanties, et beaucoup des collectivités territoriales se trouveraient en grande difficulté. En fragilisant certains maillons, on fait peser un risque sur toute la chaîne.

Quelles sont les possibilités dont nous disposons ? Le Gouvernement semble accepter de se contenter de la moitié de ces économies sur le programme 109, soit 800 millions d'euros. Je présenterai ainsi un amendement prévoyant un relèvement à 10 % de la TVA en première partie sur les opérations neuves et la rénovation de logements en accord avec le Gouvernement. En excluant certains secteurs, on pourrait dégager autour de 600 millions d'euros.

La Cour des comptes avait préconisé que les bailleurs soient soumis à l'impôt sur les sociétés, mais ces derniers n'y sont pas favorables. En effet, s'ils peuvent financer la hausse de la TVA dans leurs opérations en la lissant, ce ne serait pas le cas pour cet impôt. De plus, on peut craindre des opérations d'optimisation fiscale conduisant à réduire les contributions. La TVA apparaît donc comme une part de la solution.

Dans la seconde partie du budget, une autre part repose sur les cotisations à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), qui doivent aussi permettre de réaliser la péréquation nécessaire, car les bailleurs les plus touchés par la réforme du Gouvernement sont ceux qui ont le plus de locataires bénéficiant de l'APL.

Enfin, il est difficile de trouver un accord sur une troisième mesure qui constituerait le dernier étage de la fusée. Les bailleurs ne veulent pas de réduction des loyers, de crainte aussi que le Gouvernement n'en demande toujours plus et alors que l'Assemblée nationale a prévu une montée en charge progressive de la baisse de loyer sur trois ans. Une solution serait peut-être de fixer la réduction de loyer à 500 millions d'euros et d'en rester là, mais je ne sais pas si le Gouvernement accepterait cela.

Une autre possibilité a été évoquée : transformer la réduction de loyer en réduction forfaitaire de charges, pour les bâtiments les plus énergétivores. Toutefois, cela pourrait poser un problème de constitutionnalité notamment en termes de rupture d'égalité.

Enfin, l'idée d'une taxe sur les bâtiments énergivores a été envisagée. Elle serait versée à la CGLLS, avec un rendement intéressant et un effet incitatif sur les bailleurs pour mettre aux normes leur parc ancien. Le risque existerait toutefois que son rendement diminue au fur et à mesure des travaux.

Nous n'avons pas encore trouvé le bon compromis et nous avons besoin d'un peu de temps pour vous proposer une solution définitive. Je suggère donc de réserver notre position sur ce dispositif.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général. - Je ne vais pas reprocher au Gouvernement de tenter de revoir le financement du logement. Le constat est simple : la France est un des pays qui dépense le plus dans le secteur, sans pour autant avoir résolu ses problèmes de prix, de mise aux normes, de mal-logement, etc. Il existe beaucoup d'explications possibles à cette réalité, mais celle-ci est indéniable. Il s'agit d'un des principaux postes de dépense publique mais aussi de captation de l'épargne avec le livret A.

Le Gouvernement prend toutefois le problème à l'envers en envisageant des coupes budgétaires sans s'attaquer au fond.

Aujourd'hui, le parc ancien est aux mains de bailleurs sociaux et de bailleurs privés. L'investissement privé se trouve malmené par la création de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) et son exclusion du prélèvement forfaitaire unique (PFU). Il sera également fragilisé par l'entrée en vigueur du prélèvement à la source, qui empêchera en partie la déduction des travaux.

En ce qui concerne le parc social ouvrant droit à l'APL, le débat sur le relèvement du taux de TVA est légitime.

Mais on passe surtout à côté d'une réforme structurelle des aides personnelles au logement : le reste à charge n'est pas pris en compte, la taille des logements non plus, ce qui conduit, notamment en Île-de-France, des marchands de sommeil à surévaluer les loyers en les « solvabilisant » grâce à l'APL. Le coup de rabot aveugle du Gouvernement apporte donc une mauvaise réponse à une bonne question : le montant de la dépense publique consacré au logement.

Philippe Dallier a tenté de trouver la moins mauvaise solution pour cet article, mais nous avons besoin du soutien du Gouvernement, qui cherche à se dépêtrer du mauvais pas où il s'est mis.

Le Président de la République fera peut-être des annonces jeudi, à l'occasion du congrès des maires. Le sujet est compliqué et les positions sont fluctuantes, il semble donc difficile d'approuver ou non ce budget ce matin.

M. Jean-Marie Morisset , rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales sur les programmes 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » et 109 « Aide à l'accès au logement ». - Le budget du programme 177 était chaque année décrit comme insincère, car la planification y était habituellement inférieure au réalisé de l'année n - 2 ; depuis l'an dernier, il y a une amélioration : elle est inférieure à la prévision d'exécution de l'année en cours !

Il est, certes, difficile de planifier l'urgence sociale. C'est une longue chaîne : la loi nous oblige à héberger inconditionnellement une personne sans abri. Le premier maillon est le 115, qui reçoit 3 000 appels par jour et apporte une réponse positive à moins de la moitié. Ensuite, la phase intermédiaire recouvre les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) et les centres d'hébergement d'urgence (CHU), pour lesquels le budget est en augmentation.

Enfin, le « logement d'abord », sur lequel le Président de la République met l'accent, avec un budget pour le logement adapté qui croît de 25 % et en prévoyant qu'il n'y ait pas de fongibilité, afin qu'il ne soit pas utilisé pour financer les CHU en cours d'année.

L'objectif du programme est de faire diminuer le nombre de personnes dans le circuit et de faire en sorte que les bénéficiaires aient accès à un logement. On arrive alors à une contradiction, puisque parallèlement les bailleurs sociaux rencontrent, de leur côté, des difficultés à planifier des investissements puisqu'ils vont manquer de fonds propres.

À tout ceci s'ajoute la gestion de la crise migratoire, avec les déboutés du droit d'asile qui sollicitent les dispositifs d'hébergement d'urgence de droit commun.

L'accompagnement social rencontre également des difficultés, par manque de moyens budgétaires et malgré les crédits inscrits. Les structures Adoma en sont un exemple. Dans un hôtel où l'on a récemment dû accueillir en urgence 92 personnes, deux accompagnateurs sociaux seulement étaient présents pour prendre en charge l'accueil et le suivi des hébergés.

Enfin, l'enquête nationale de coûts qui doit conduire à réviser les prix plafonds et les prix planchers fait craindre aux opérateurs une mise à niveau des tarifications sur les planchers, les privant ainsi de moyens.

Enfin, en région Nouvelle-Aquitaine, qui regroupe douze départements, des inquiétudes se font jour quant à l'organisation des services, car le personnel baisse dans les directions départementales de la cohésion sociale au profit de la direction régionale, ce qui entraîne la perte du lien de proximité avec le terrain.

M. Dominique de Legge . - Quelle est la conséquence de cette réforme proposée par le Gouvernement sur les obligations de construction de logements sociaux pesant sur les collectivités territoriales et notamment issue de la loi ALUR ?

Il y a une innovation : on met donc en place un dispositif rétroactif alors que le locataire a signé un contrat qui en principe s'impose.

Quid des bailleurs privés conventionnés, dont la convention doit être reconduite ? Ne risquent-ils pas de la dénoncer s'ils sont concernés, au risque d'entraîner un effet inverse à celui qui est recherché ?

La proposition de Philippe Dallier de tenir compte d'un taux d'effort par ménage est bienvenue. Il n'en est d'ailleurs nullement question dans cet article 52 alors qu'une diminution unilatérale, indépendamment du montant du loyer, n'a aucun sens.

M. Philippe Adnot . - Disposez-vous d'une analyse de la situation des offices, comprenant l'identification de ceux qui pourraient se trouver concrètement en difficulté, et donc du nombre de collectivités territoriales qui pourraient être amenées à couvrir leurs engagements ?

M. Antoine Lefèvre . - Je partage la question de Philippe Adnot sur les garanties d'emprunt. Il y a eu des effets d'annonce, mais, si des tendances ont été évoquées par l'Union sociale pour l'habitat, aucun chiffre n'a été avancé.

Cet article 52 a mobilisé tout le secteur du logement social, car ses conséquences peuvent être effroyables, au vu des objectifs de construction et de rénovation de logements sociaux ainsi que de l'importance de la transition énergétique.

Je constate l'absence de crédits dédiés pour les contrats de ruralité, qui ont pourtant rencontré un grand succès. Comment financer aujourd'hui les actions qu'ils ont couvertes ? Je me félicite, en revanche, de la sécurisation du budget de l'ANAH.

Il convient aussi de se pencher sur la péréquation proposée au sein de la CGLLS, car la réforme pénalise les offices les plus vertueux, qui sont bien gérés et accueillent une forte proportion de locataires les plus modestes. Ils pourraient ainsi se trouver empêchés de mener à bien leur mission. Je ne crois pas que la situation permette de les qualifier de « dodus dormants » !

Enfin, je rappelle que les offices intervenant au niveau départemental s'intéressaient à la réhabilitation des friches dans les centres-bourgs ; ce ne sera sans doute pas le cas des gros offices régionalisés dans le cadre d'une restructuration.

M. Arnaud Bazin . - L'article 52 emporte des conséquences en chaîne. Certaines collectivités territoriales pourraient être mises en difficulté avant même d'être appelées à assumer les emprunts, par le simple fait que les banques commencent à considérer ce risque.

En outre, certaines collectivités territoriales sont évaluées par les agences de notation. Aujourd'hui, ce risque est mentionné, mais il est considéré comme virtuel et n'est pas retenu dans l'évaluation. Les agences risquent désormais de le regarder autrement et les conditions financières d'accès des collectivités territoriales au marché obligataire pourraient ainsi changer.

S'agissant de la taxe sur les logements énergivores, je suis perplexe. Un office qui aurait beaucoup de locataires sous APL perdra une partie de ses recettes locatives. Si, de surcroît, ses bâtiments sont énergivores, le peu dont il disposait pour investir sera ponctionné. La prudence s'impose donc.

M. Victorin Lurel . - Hier, lors de la convention nationale d'Action Logement, les ministres Jacques Mézard et Julien Denormandie ont martelé que l'article 52 n'était pas stabilisé et qu'il était appelé à évoluer dans un sens qui conviendrait aux acteurs.

Il n'y a aucune réflexion sur la situation spécifique des outre-mer. Les APL ne s'y appliquent pas mais il faut savoir que les outre-mer participent au financement du Fnap, à travers le supplément de loyer de solidarité, et alors même qu'ils ne bénéficient pas de ses actions. En outre, alors que le revenu médian est plus bas qu'en métropole, l'on atteint plus vite le plafond qui est applicable. Donc l'on paie plus vite le surloyer qui finance le Fnap. Le ministre Julien Denormandie ne savait pas ça.

L'Assemblée nationale a réintroduit le déclenchement du surloyer à 20 % au-delà du plafond de ressources, alors que le texte initial le prévoyait au premier euro. Le problème de son application en outre- mer reste entier.

Il en va de même pour la garantie accordée par la CGLLS. En Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion, les bailleurs sociaux la trouvent trop chère et préfèrent s'adresser aux collectivités territoriales. Département et région garantissent ainsi les prêts, chacun à hauteur de 50 %. Il est arrivé une seule fois qu'une commune a été appelée en garantie et elle n'a pas pu payer. L'État, à travers la Caisse des dépôts et consignations, a dû alors intervenir.

S'agissant de la vente de logements, le dispositif envisagé ne pourrait concerner que les logements appartenant aux collectivités. Dans certains territoires, une seule ville serait alors concernée. Qu'en sera-t-il des autres ? Cela n'a pas été évalué et ne figure dans aucun rapport.

J'ai préparé des amendements sur les sujets, et je souhaite qu'en séance publique on évalue les conséquences de ces mesures destinées à faire des économies tout en sollicitant des structures qui interviennent déjà dans un contexte social difficile et sans bénéficier du système mis en place.

Mme Nathalie Goulet . - Il faut effectuer un contrôle budgétaire global sur le sujet en outre-mer.

Les questions soulevées par cet article concernent le quotidien de millions de Français, il faudrait organiser une conférence de presse avec les principaux acteurs de façon à expliquer les termes de l'équation et à communiquer sur le travail effectué par la commission pour sécuriser la politique du logement.

M. Patrice Joly . - Les mesures prévues sont indifférenciées et ne prennent pas en compte la situation propre des bailleurs sociaux. Or, en fonction des loyers pratiqués, leur impact n'est pas le même.

Un bailleur social situé en zone détendue, par exemple, va perdre 4 millions d'euros de chiffre d'affaires, ce qui anéantira sa capacité d'autofinancement pour l'année. Sur une période de cinq ans, les réhabilitations ou les constructions prévues seront abandonnées. Cela aura aussi des conséquences sociales : les locataires devaient voir leurs charges réduites, ce ne sera pas le cas, des emplois ne seront pas maintenus. Tout ceci n'est pas négligeable pour un bailleur modeste.

Il en va de même de la réhabilitation des centres-bourgs, dont les organismes de logement social sont des opérateurs essentiels. Il y a pourtant urgence !

M. Gérard Longuet . - Puisqu'il nous reste encore du temps pour arrêter la rédaction de l'article 52, je souhaiterais que la commission tienne plus compte de l'analyse géographique différenciée des bailleurs sociaux. La France n'est pas un milieu homogène.

M. Michel Canevet . - Il est nécessaire d'élaborer une stratégie du logement. Nous avons besoin d'une réflexion approfondie plutôt que de mesures à court terme. En Bretagne, la réduction annoncée du nombre d'opérateurs pose question. En analysant la situation de manière uniforme depuis Paris, on rencontrera des difficultés.

S'agissant des aides personnelles au logement, le Gouvernement a annoncé le changement de son mode de calcul, qui est en effet désuet, dans la mesure où il s'appuie sur les ressources de l'année N-2. Comment faire pour que les ressources contemporaines soient mieux prises en compte ? Cette question se pose aussi pour l'application des suppléments de loyers de solidarité. En Bretagne, 1 % des locataires ont des ressources supérieures à 120 % du plafond. On pourrait ainsi trouver des recettes supplémentaires.

Le recentrage du dispositif Pinel suscite également des inquiétudes ; cibler des territoires plus contraints pourrait ainsi provoquer une inflation des prix.

Enfin, la taxe sur la cession des logements sociaux prévue à l'article 52 quater , risque d'avoir un effet contraire aux attentes, à savoir convaincre les opérateurs de vendre une plus grande partie de leur patrimoine. En Bretagne, seuls 10 % des biens mis en vente ont trouvé preneur.

Mme Fabienne Keller . - Quel sera l'effet du relèvement de la TVA sur la construction et les travaux dans les quartiers de rénovation urbaine ?

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial. - Ils en sont exclus s'agissant de l'accession sociale à la propriété.

Mme Fabienne Keller . - C'est précieux car il s'agit d'un élément moteur de la mixité sociale dans ces quartiers.

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial. - Nous l'avons également maintenu pour l'hébergement d'urgence.

Mme Fabienne Keller . - Je sais, par ailleurs, que les zones franches urbaines sont financées par des exonérations sociales ou des dispositifs fiscaux. L'essentiel de ces mesures est-il bien maintenu dans ce projet de budget ?

M. Philippe Dallier , rapporteur spécial. - Dominique de Legge, en effet, les conséquences de l'article 52 sur les obligations faites aux communes posent question.

S'agissant du risque constitutionnel que vous évoquez concernant l'atteinte aux contrats, le Gouvernement prétend qu'il est déminé. La question reste posée, toutefois, car les communes ont garanti des emprunts sur la base des loyers attendus. S'ils diminuent, l'économie générale du contrat en est-elle modifiée ?

Certaines communes ont inscrit dans leurs documents d'urbanisme un pourcentage de logements sociaux obligatoire pour des opérations dépassant un certain nombre de constructions, afin d'atteindre les exigences de la loi SRU. Si elles ne trouvent plus d'opérateurs durant quelques années, vont-elles arrêter de délivrer des permis de construire ? La chaîne du logement, c'est un tout, les opérations sont souvent mixtes et fragiliser un maillon peut conduire à fragiliser l'ensemble.

En ce qui concerne le contrat de location, il ne devrait pas être directement touché. On ajoutera seulement une ligne supplémentaire portant la réduction du loyer, mais je pense que le montant du loyer initial figurera toujours sur la quittance.

La définition d'un taux d'effort minimum est un vrai sujet, je vais en parler à nouveau avec le ministère, qui m'a fourni des simulations sur le sujet. Jacques Mézard a cru que je cherchais ainsi 1,5 milliard d'euros. C'était impossible, car les écarts auraient été trop forts. En revanche, on pourrait ainsi dégager 150 millions ou 200 millions d'euros. L'ensemble du calcul des APL doit être remis en chantier, en lien avec une réforme structurelle, mais cela n'est pas ce que recherchait le Gouvernement.

Philippe Adnot, les offices sont dans des situations disparates, c'est vrai, mais, à quelques exceptions près, ils sont en bonne santé.

Le problème, c'est que le Gouvernement va leur prendre 1,7 milliard d'euros, ce qui représente plus de la moitié de leurs ressources disponibles pour l'autofinancement, et au détriment de ceux qui accueillent le plus de bénéficiaires de l'APL.

Je suis d'accord, Antoine Lefèvre, le budget de l'Anah va dans la bonne direction. La question de la réhabilitation est importante et il convient d'éviter les effets de stop-and-go qui ont été préjudiciables par le passé. C'est positif, même si le produit des cessions de quotas carbone reste aléatoire dans le budget de l'Anah. On nous explique qu'il y a une logique à affecter cette ressource à la politique d'amélioration de la qualité des bâtiments, mais celle-ci est volatile et rend donc le budget imprévisible.

La péréquation au travers de la CGLLS apparaît, en effet, comme un moyen d'alléger le fardeau des bailleurs sociaux les plus concernés par la réduction de loyers.

Arnaud Bazin, c'est vrai, le Gouvernement semble avoir oublié les agences de notation et cela pourrait effectivement avoir des conséquences.

En revanche, dans notre esprit, on ne peut pas qualifier la taxe sur les bâtiments énergivores de double peine : elle doit être vue comme se substituant à la réduction de loyer de solidarité. Il n'est pas question de cumuler les deux.

Victorin Lurel, j'ai toujours regretté que l'outre-mer soit traité en dehors de cette mission. Je découvre que les bailleurs sociaux financent ainsi des dispositifs dont ils ne bénéficient pas, c'est une bizarrerie.

L'Assemblée nationale est revenue sur le supplément de loyer appliqué au premier euro, parce que c'était trop brutal.

L'ensemble des mesures proposées visent d'abord le rendement budgétaire, le Gouvernement n'a évoqué une réforme structurelle que dans un deuxième temps. La restructuration du secteur du logement social va prendre du temps et les économies d'échelle plus encore. En attendant, on prend le risque d'étrangler tout le monde, sans compensation.

Patrice Joly, je partage votre point de vue quant à l'impact socio-économique de ces mesures sur les bailleurs sociaux.

Gérard Longuet, je ne sais pas si nous sommes capables de prendre en compte les différences entre bailleurs sociaux ni si les règles constitutionnelles nous le permettent. La question se posait pour la baisse du forfait de charges : on ne peut pas traiter les gens différemment. C'est sans doute moins problématique pour les bailleurs, mais cela reste compliqué.

Je m'interroge avec vous sur la stratégie du Gouvernement, Michel Canevet. Vos remarques sur le calcul des APL sont exactes. La deuxième étape du projet gouvernemental interviendra l'année prochaine, avec le passage au revenu contemporain. Aujourd'hui, le calcul est fait sur le revenu de N-2 à l'entrée dans le dispositif, ce qui profite, par exemple, aux étudiants qui commencent à travailler. Selon le Gouvernement, cette modification rapportera 1,3 milliard d'euros par an au détriment de ces allocataires.

S'agissant du recentrage du dispositif Pinel, c'est le rapporteur général qui traite de ce sujet. Réjouissons-nous que le dispositif subsiste, même s'il est recentré, ainsi que le PTZ, car il a été question de les supprimer.

Concernant la taxe sur les cessions des logements sociaux, le Gouvernement veut effectivement inciter les bailleurs à vendre pour disposer de fonds propres, mais s'ils le font, on leur prend 10 % du produit. Sacrée logique !

Fabienne Keller, le Gouvernement pensait dégager des montants plus importants par la TVA, mais nous avons exclu certaines opérations, et nous en attendons donc autour de 600 millions d'euros. Concernant les zones franches urbaines, mais je reviendrai vers vous.

Mme Fabienne Keller . - Le financement du dispositif est-il maintenu ?

M. Philippe Dallier . - Jacques Mézard a été interrogé hier sur ce sujet et son ton était plutôt rassurant.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de réserver sa position sur les crédits de la mission « Cohésion des territoires », ainsi que sur les articles 52 à 52 sexies .

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2017, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat de réserver son examen définitif des crédits de la mission « Cohésion des territoires », ainsi que des articles 52 à 52 sexies .

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction du budget

- M. Denis CHARISSOUX, sous-directeur ;

- M. Alban HAUTIER, chef du bureau du logement, de la ville et des territoires ;

- Mme Élise DELAITRE, adjointe au chef du bureau du logement, de la ville et des territoires.

Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

- M. Jean-Philippe VINQUANT, directeur général de la cohésion sociale ;

- M. Christophe PECATE, chef de bureau « Urgence sociale et hébergement ».

Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP)

- M. Laurent GIROMETTI, directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages ;

- M. Arnaud MATHIEU, adjoint à la sous-directrice du financement et de l'économie du logement et de l'aménagement.

Action logement

- M. Jean-Baptiste DOLCI, vice-président d'Action logement, vice-président de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) ;

- M. Bruno ARBOUET, directeur général ;

- M. Roger THUNE, directeur en charge du logement ;

- Mme Valérie JARRY, directrice des relations institutionnelles.

Agence nationale de l'habitat (Anah)

- Mme Blanche GUILLEMOT, directrice générale ;

- M. Grégoire FREREJACQUES, directeur général adjoint ;

- Mme Judith HERPE, cheffe de cabinet.

Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru)

- M. Nicolas GRIVEL, directeur général ;

- M. Damien RANGER, directeur des relations institutionnelles.

Caisse des dépôts et consignations

- M. Olivier MAREUSE, directeur des fonds d'épargne ;

- Mme Marianne LAURENT, directrice des prêts et de l'habitat ;

- Mme Brigitte LAURENT, directrice des relations institutionnelles.

Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf)

- M. Frédéric MARINACCE directeur général délégué chargé des politiques familiales et sociales ;

- M. Bernard TAPIE, directeur des statistiques, des études et de la recherche ;

- Mme Patricia CHANTIN, directrice adjointe de cabinet.

Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET)

- M. Sébastien JALLET, commissaire général délégué, directeur de la ville et de la cohésion urbaine ;

- Mme Marine COURTOIS, cheffe de bureau et adjointe à la responsable du pôle programmation budgétaire et de la stratégie financière.

Crédit foncier

- M. Bruno DELETTRÉ, directeur général ;

- Mme Nicole CHAVRIER, directeur des relations institutionnelles.

Entreprises publiques locales (EPL)

- M. Jacques CHIRON, président d'honneur, ancien sénateur de l'Isère ;

- M. Pierre de LA RONDE, responsable du département immobilier et développement économique.

Fédération des entreprises sociales pour l'habitat (ESH)

- Mme Valérie FOURNIER, présidente ;

- M. Daniel BRIARD, président du comité exécutif du groupe Polylogis et vice-président de la fédération des ESH ;

- M. Didier POUSSOU, directeur général.

Fédération française du bâtiment (FFB)

- M. Jacques CHANUT, président ;

- M. Bernard COLOOS, directeur des affaires économiques, financières et internationales ;

- M. Benoît VANSTAVEL, directeur des relations institutionnelles et parlementaires.

Fédération nationale des Offices Publics de l'Habitat (OPH)

- M. Alain CACHEUX, président ;

- M. Laurent GOYARD, directeur général.

Fédération des promoteurs immobiliers de France (FPI)

- M. Alexis ROUQUE, délégué général ;

- M. Anne PEYRICOT, directrice de cabinet et des relations institutionnelles.

Fondation Abbé Pierre

- M. Christophe ROBERT, délégué général ;

-M. Patrice LANCO, bénévole.

Groupe SNI

- M. André YCHÉ, président du directoire du groupe SNI ;

- M. Vincent MAHÉ, secrétaire général ;

- M. Thierry LAGET, directeur général adjoint en charge des croissances externes et des études ;

- Mme Anne FRÉMONT, directrice des relations institutionnelles et des études.

Union sociale pour l'habitat (USH)

- Mme Marianne LOUIS, secrétaire générale ;

- M. Dominique HOORENS, directeur des études économiques et financières ;

- M. Francine ALBERT conseillère pour les relations avec le Parlement.


* 1 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015. La mission « Politique des territoires » comprenait notamment les crédits de la politique de la ville (programme 147) alors qu'auparavant, ceux-ci figuraient au sein de la mission « Égalité des territoires, logement et ville ».

* 2 Cf. la présentation en commission des finances du rapporteur général sur l'examen des principaux éléments de l'équilibre sur le projet de loi de finances pour 2018 :

http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/finances/PLF_2018/PLFR_2018_PPT_tome_I_vf.pdf

Et le compte rendu de la réunion du 8 novembre 2017

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20171106/fin.html#toc8

* 3 Cf. le II de la deuxième partie du présent rapport.

* 4 Cf. le décret n° 2017-1413 du 28 septembre 2017 relatif aux aides personnelles au logement et au seuil de versement des allocations de logement.

* 5 Cf. la communication de Philippe Dallier aux membres de la commission des finances du 2 août 2017 : http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/finances/evenements/Communication_APL_aout2017.pdf

* 6 Cf. le II de la deuxième partie du présent rapport.

* 7 Voir le IV de la seconde partie du présent rapport.

* 8 Cf. le rapport de Bernard Delcros, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, spécifiquement consacré aux programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État ».

* 9 Rapport d'information n° 99 (2015-2016) « Financement et fiscalité du logement : reconstruire sans démolir », fait au nom de la commission des finances et déposé le 21 octobre 2015.

* 10 Cf. le 4 du présent I.

* 11 Rapport d'information n° 193 (2016-2017) de Philippe Dallier, au nom de la commission des finances du Sénat, L'hébergement d'urgence sous forte tension : sortir de la gestion dans l'urgence.

* 12 Décret d'avance n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 13 « Recommandation n° 6 : Poursuivre les efforts de rationalisation des coûts, en généralisant, en particulier, la politique de convergence tarifaire à l'ensemble des structures et en systématisant le conventionnement. »

* 14 Rapport d'information n° 99 (2015-2016) « Financement et fiscalité du logement : reconstruire sans démolir », fait au nom de la commission des finances et déposé le 21 octobre 2015.

* 15 Cf. le II du présent rapport.

* 16 Cf. la communication de votre rapporteur spécial aux membres de la commission des finances du Sénat le 3 août 2017, à la suite de ses déplacements mercredi 26 juillet 2017 à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (ministère de la cohésion des territoires) et vendredi 28 juillet à la direction du budget (ministère de l'action et des comptes publics).

http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/finances/evenements/Communication_APL_aout2017.pdf

* 17 Pour 264 OPH recensés en juillet 2016.

* 18 Cf. le III de la présente partie du rapport.

* 19 Cf. le IV de la présente partie du rapport.

* 20 Article 55 de la loi n° 2000 1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains dite « loi SRU », codifié à l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation.

* 21 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 22 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 23 Rapport d'information n° 75 (2017-2018) d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2017, La « rente immobilière », mythe et réalités.

* 24 En effet, les situations dégradées des allocataires (par exemple le chômage) peuvent déjà être prises en compte. En revanche, un jeune travailleur peut à l'heure actuelle bénéficier d'une aide personnelle au logement calculée sur ses revenus perçus deux ans plutôt, soit par exemple lorsqu'il était encore étudiant.

* 25 Décret n° 2015-734 du 24 juin 2015 portant création d'un dispositif d'aide aux communes participant à l'effort de construction de logements.

* 26 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains dite « loi SRU ».

* 27 Cf. rapport précité.

* 28 Cf. supra le 1 du présent V.

* 29 Cf. pour le détail la contribution à la loi de règlement pour 2016 de notre ancien collègue Daniel Raoul, alors rapporteur spécial pour les crédits de la politique de la ville. Rapport n° (2016-2017), tome II.

* 30 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013.

* 31 Loi n° 2013-1203 du 24 décembre 2013.

* 32 Concernant l'évolution des dépenses et de la contribution de l'État au Fnal ainsi que les mesures d'économies prises au cours des dernières années, voir la partie budgétaire du présent rapport et les précédents rapports de votre rapporteur spécial sur la mission « Égalité des territoires et logement ».

* 33 Cour des comptes, février 2017, Le logement social face au défi de l'accès des publics modestes et défavorisés.

* 34 Données de la direction de la recherche, des études et de l'évaluation des statistiques, publiées en 2014.

* 35 Caisse des dépôts et consignations, Perspectives, analyse financière rétrospective et prospective des bailleurs sociaux, 2016.

* 36 Cf. la communication de votre rapporteur spécial aux membres de la commission des finances du Sénat le 3 août 2017, à la suite de ses déplacements mercredi 26 juillet 2017 à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (ministère de la cohésion des territoires) et vendredi 28 juillet à la direction du budget (ministère de l'action et des comptes publics).

http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/finances/evenements/Communication_APL_aout2017.pdf

* 37 Décret n° 2017 1413 du 28 septembre 2017 relatif aux aides personnelles au logement et au seuil de versement des allocations de logement et arrêté du 28 septembre 2017 relatif aux aides personnelles au logement et au seuil de versement de l'aide personnalisée au logement.

* 38 Indice de référence des loyers tels que défini à l'article 17-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

* 39 Décision du Conseil constitutionnel 2013-682 DC du 19 décembre 2013 sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

* 40 Cf. le commentaire de l'article 52 quater .

* 41 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (« loi SRU »).

* 42 Rapport d'information n° 75 (2017-2018) d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2017, La « rente immobilière », mythe et réalités.

* 43 Rapport d'information n° 193 (2016-2017) de Philippe Dallier, au nom de la commission des finances du Sénat, L'hébergement d'urgence sous forte tension : sortir de la gestion dans l'urgence.

* 44 Cf. la partie budgétaire du présent rapport.

* 45 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 46 La politique d'aide au logement telle que définie à l'article L. 301-1 du code de la construction et de l'habitation « a pour objet de favoriser la satisfaction des besoins de logements, de promouvoir la décence du logement, la qualité de l'habitat, l'habitat durable et l'accessibilité aux personnes handicapées, d'améliorer l'habitat existant et de prendre en charge une partie des dépenses de logement en tenant compte de la situation de famille et des ressources des occupants. Elle doit tendre à favoriser une offre de logements qui, par son importance, son insertion urbaine, sa diversité de statut d'occupation et de répartition spatiale, soit de nature à assurer la liberté de choix pour toute personne de son mode d'habitation. »

* 47 Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances initiale pour 2017.

* 48 Décret n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 49 Amendements présentés par Mohamed Laqhila, rapporteur spécial des crédits consacrés à la politique de la ville au sein de la mission « Cohésion des territoires », Alain Ramadier, Annaïg Le Meur, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, François Pupponi et plusieurs de ses collègues ainsi que Stéphanie Peu et plusieurs de ses collègues.

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