Rapport général n° 140 (2019-2020) de Mme Christine LAVARDE , fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2019

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N° 140

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 ,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 11b

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

(Programmes 203 « Infrastructures et services de transports », 205 « Affaires maritimes » et 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉS DE VOYAGEURS

Rapporteur spécial : Mme Christine LAVARDE

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, MM. Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Jean Bizet, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348

Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Sur le programme 203 « Infrastructures et services de transport »

1) La programmation financière annexée au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit que l'Agence de financement des infrastructures des transports de France (AFITF) est dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022 pour investir dans les infrastructures de transport, soit un peu moins de 2,7 milliards d'euros par an , puis de 14,3 milliards d'euros sur la période 2023-2027, soit un peu moins de 2,9 milliards d'euros par an .

2) Les 13,4 milliards d'euros annoncés pour la période 2018-2022 constituent un effort financier très significatif de la part de l'État , puisqu'ils représentent une hausse de 40 % des crédits qu'il consacre aux infrastructures de transport .

3) Toutefois, alors que la LOM n'a pas encore été promulguée, les promesses formulées par le Gouvernement ont déjà été écornées , puisque le budget de l'AFITF pour 2019 n'a pas été de 2 684 millions d'euros comme annoncé mais de 2 480 millions d'euros , soit 204 millions d'euros de moins en raison de recettes des amendes radar deux fois inférieures aux prévisions.

4) En 2020, le Gouvernement annonce que les dépenses de l'AFITF, dont votre rapporteur spécial déplore que le Parlement soit toujours aussi peu associé à leur détermination , augmenteront de 502 millions d'euros , ce qui représenterait une hausse de 20,2 % des crédits .

5) Pour financer cette somme considérable, il a prévu, entre autres recettes, de taxer le transport aérien en mettant en place une écocontribution qui n'a rien d'une véritable taxe environnementale et de réduire de 2 euros par hectolitre le tarif réduit de TICPE des transporteurs routiers . Il s'agit là d'une mesure qui viendrait mettre en péril la compétitivité des transporteurs français , raison pour laquelle votre commission des finances propose au Sénat de la rejeter. Le problème d'un financement soutenable et pérenne de l'AFITF demeure donc largement devant nous .

6) Les crédits du programme 203 diminueront légèrement en 2020 de -0,3 % en crédits de paiement (CP) à 3 183,7 millions d'euros . La subvention à SNCF Réseau diminuera de -0,9 % et celle de Voies navigables de France de - 0,4 % . Les 11 millions d'euros du budget de l'Autorité de régulation des transports (ex-ARAFER) sont désormais portés par le programme, les taxes à faible rendement qui lui étaient affectées ayant été supprimées .

7) SNCF Réseau, qui deviendra au 1 er janvier 2020 une société anonyme, devra poursuivre le grand plan de modernisation du réseau ferré . L'entreprise bénéficiera d'un équilibre financier assaini grâce à la reprise de 25 milliards d'euros de sa dette par l'État prévue à l'article 76 du présent projet de loi de finances.

8) Alors que la Société du Grand Paris , chargée de construire pour 32,6 milliards d'euros le Grand Paris Express, a déjà bénéficié de 100 millions d'euros de recettes supplémentaires en 2019, l'Assemblée nationale a adopté dans le cadre du présent projet de loi de finances une nouvelle hausse de 44 millions d'euros de la taxe sur les bureaux en Île-de-France, limitée à un périmètre dit « premium », ainsi qu' un prélèvement de 75 millions d'euros sur les recettes tirées des droits de mutation à titre onéreux des départements franciliens . Quels que soient les mérites du projet, les entreprises franciliennes expriment aujourd'hui un véritable ras-le-bol fiscal et le plan de financement de la SGP doit être revu .

9) La poursuite de la hausse des effectifs de la SGP , qui passeront de 430 ETPT en 2019 à 585 ETPT en 2020, va en revanche dans le bon sens, compte tenu de l'ampleur des enjeux techniques et financiers à maîtriser .

10) Voies navigables de France continue à consentir d'importants efforts de réduction de ses personnels , avec 112 ETPT en moins en 2020. Dans un contexte où la taxe hydraulique va se transformer en redevance domaniale , VNF va bénéficier de subventions d'investissement plus importantes de l'AFITF pour remettre à niveau le réseau dont il a la charge .

Sur le programme 205 « Affaires maritimes »

1) Le programme 205 « Affaires maritimes » joue un rôle économique et social important et porte des fonctions régaliennes essentielles , la France disposant du deuxième domaine maritime le plus vaste du monde , avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE) , dont 97 % outre-mer .

2) La dotation du programme en 2020 s'établit à 156,1 millions d'euros en AE et 157,3 millions d'euros en CP, en baisse de -1,5 % en AE mais en hausse de 2,9 % en CP .

3) Le principal fait saillant du programme 205 en 2020 concerne la subvention du ministère à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) , qui atteindra 10,7 millions d'euros , un chiffre sans précédent. Cette hausse de 73,0 % de la dotation de l'État à la SNSM vise à accompagner l'association dans le renouvellement de sa flotte .

Sur le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs »

1) Depuis 2011, l'État est devenu l'autorité organisatrice des lignes de train d'équilibre du territoire (TET) , qui jouent un rôle important en matière d'aménagement du territoire, et sont exploitées depuis le 1 er janvier 2012 sous la dénomination « Intercités ».

2) Le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » vient compenser le déficit d'exploitation de SNCF Mobilités dû aux TET ainsi que la régénération du matériel roulant .

3) Les crédits affectés au compte d'affectation spéciale (CAS) représenteront 312,7 millions d'euros en 2020, en baisse de -13,0 % par rapport à 2019, dont 76,7 millions consacrés au déficit d'exploitation des lignes transférées aux régions . Le fait que les montants affectés au CAS commencent à diminuer tend à montrer que la réforme menée ces dernières années (fermeture de lignes de nuit, transfert de lignes de jour aux régions, efforts de productivité demandés à SNCF Mobilités) commence à porter ses fruits.

Au 10 octobre 2019, date limite fixée par la LOLF, 86 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues à votre rapporteur spécial .

PROGRAMME 203
« INFRASTRUCTURES ET SERVICES DE TRANSPORTS »

Depuis deux ans, de nombreux travaux ont été conduits, notamment dans le cadre des Assises de la mobilité , pour repenser la politique des transports de notre pays, laquelle avait donné lieu dans les vingt années précédentes à un certain nombre de dérives, en particulier la dégradation des grands réseaux structurants (routier, ferré, fluvial) indispensables aux transports du quotidien.

Ces travaux ont débouché sur le projet de loi d'orientation des mobilités (LOM), auquel est pour la première fois annexée une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transports qu'avait réclamée le groupe de travail constitué par notre commission des finances sur le financement des infrastructures de transport dans son rapport d'information « Infrastructures de transport : sélectionner rigoureusement, financer durablement » 1 ( * ) présenté en septembre 2016.

Cette programmation financière, qui porte sur la période 2018-2027, permet à notre pays de disposer enfin d'une feuille de route validée par le Parlement dans un domaine stratégique pour notre avenir, même si elle est loin de répondre à tous les défis de la mobilité au XXI e siècle.

Alors que les engagements financiers du Gouvernement pour 2019 n'ont pas été respectés, 2020 constituera la première année de mise en oeuvre de cette programmation financière postérieure à la promulgation de la LOM.

Le Parlement devra donc veiller à ce que celle-ci soit pleinement respectée .

I. LE PROJET DE LOI D'ORIENTATION DES MOBILITÉS (LOM) PRÉVOIT D'AUGMENTER DE 40 % LE BUDGET CONSACRÉ AUX INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT SUR LA PÉRIODE 2018-2022

Le financement par l'État des infrastructures de transports repose largement sur une agence , l'AFITF , celui des services de transports étant pour sa part porté par le programme 203 « Infrastructures et services de transport » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Adopter une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transports crédible consiste donc avant tout à déterminer le montant du budget de l'AFITF pour les années à venir et à identifier les recettes qui lui permettront de le financer.

L'Agence de financement des infrastructures de transport de France
(AFITF)

L'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) est un établissement public administratif de l'État créé en 2004 2 ( * ) dont la tutelle est assurée par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) .

Elle est administrée par un conseil d'administration composé de douze membres comprenant six représentants de l'État, un député, un sénateur, trois élus locaux et une personnalité qualifiée. Elle est présidée depuis avril 2018 par le maire d'Angers Christophe Béchu.

Mais elle dépend entièrement pour son fonctionnement de la DGITM . Ainsi que le reconnaît elle-même l'AFITF, elle est « un opérateur transparent » 3 ( * ) , une simple caisse de financement dont les décisions engagent directement l'État .

Comme le rappelle le projet annuel de performances pour 2019, « à partir de 2006, notamment à la suite de l'extension de son domaine d'intervention au financement des contrats de projets État-régions , l'AFITF est devenue l'acteur privilégié du financement de l'ensemble des infrastructures de transport (hors domaine aérien). Son champ d'intervention ne se limite donc pas aux grands projets d'infrastructures d'intérêt national , mais inclut les dépenses de modernisation , de gros entretien et de régénération des réseaux , et, pour les transports collectifs de personnes, les projets portés par les communautés d'agglomération ».

Pour assurer son financement, l'AFITF bénéficie de taxes qui lui sont affectées par l'État ( cf. infra ), à qui elle reverse ensuite les deux tiers de son budget sous forme de fonds de concours, en ayant préalablement « fléché » les sommes ainsi reversées vers des projets précis (routes, ferroviaires, fluvial, etc.). Elle favorise ainsi le report modal , en contribuant avant tout au financement d'infrastructures ferroviaires et fluviales grâce à des ressources provenant du secteur routier .

Source : commission des finances du Sénat

A. 13,4 MILLIARDS D'EUROS POUR LA PÉRIODE 2018-2022 PUIS 14,3 MILLIARDS D'EUROS POUR LA PÉRIODE 2023-2027 POUR LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT

La programmation financière pluriannuelle annexée au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) fixe pour la première fois la trajectoire des investissements en matière d'infrastructures de transport pour les 10 ans à venir .

Une programmation financière préparée par le Conseil d'orientation des infrastructures de transport (COI)

Dans le cadre de la préparation du projet de loi d'orientation des mobilités (LOM), le Gouvernement a confié à un Conseil d'orientation des infrastructures de transport (COI) présidé par l'ancien député Philippe Duron, la mission de lui proposer une programmation pluriannuelle des infrastructures de transports crédible et financée .

Le COI a rendu le 1 er février 2018 à la ministre des transports son rapport intitulé « Mobilités du quotidien : répondre aux urgences et préparer l'avenir », dans lequel il proposait trois scénarios de programmation financière pour les infrastructures de transport en se projetant sur une période de 20 ans , c'est-à-dire jusqu'en 2037 .

Il s'agissait de rétablir la soutenabilité du budget de l'AFITF mais également d'affirmer des priorités stratégiques , en dépit des nombreux engagements financiers pris par le passé et qui continueront longtemps à peser sur les comptes de l'agence (ce sera le cas, notamment, du financement des lignes LGV mises en service ces dernières années).

Le scénario n° 2 du COI, qui avait clairement la préférence de ses membres, mobilisait environ 60 milliards d'euros pour l'AFITF au cours des vingt prochaines années. Il portait les dépenses de l'agence à 3,0 milliards d'euros par an dès 2019, soit 55 % de plus que la moyenne de la période 2012-2016 . Il nécessitait de dégager 600 millions d'euros de recettes supplémentaires pour le secteur des transports tous les ans.

Selon le COI, ce scénario permettait de passer enfin à la vitesse supérieure en matière de restauration et de modernisation des réseaux existants et de débuter un certain nombre de grands projets de LGV en commençant par les noeuds ferroviaires , dont la réduction de la saturation est également utile aux transports du quotidien.

Source : commission des finances, d'après le rapport du Conseil d'orientation des infrastructures de transport du 1 er février 2018

Cette programmation prévoit que l'AFITF sera dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022 pour investir dans les infrastructures de transport, soit un peu moins de 2,7 milliard d'euros par an , puis de 14,3 milliards d'euros sur la période 2023-2027, soit un peu moins de 2,9 milliards d'euros par an .

Il apparaît que le scénario du Conseil d'orientation des infrastructures de transport (COI) dont se rapproche le plus la programmation financière retenue par le Gouvernement est le scénario n° 2 qui prévoyait 60 milliards d'investissements en vingt ans, soit 15 milliards d'euros d'investissements sur la période 2018-2022 .

Manqueront néanmoins 1,6 milliard d'euros pour atteindre ce scénario, ce qui a suscité des déceptions légitimes.

Les montants prévus par la LOM sont toutefois nettement supérieurs à ceux dont a effectivement bénéficié l'AFITF sur la période 2013-2017, à savoir 9,5 milliards d'euros .

Les 13,4 milliards d'euros pour la période 2018-2022 correspondent de fait à un effort financier très significatif de la part de l'État , puisqu'ils représenteront une hausse de 40 % des crédits qu'il consacrera aux infrastructures de transport .

Sur cette somme, 3,4 milliards d'euros devraient venir financer de grands projets déjà engagés, voire même déjà mis en service (c'est le cas des quatre LGV mises en service en 2016 et en 2017). 3,1 milliards d'euros seront destinés à la régénération des réseaux existants , 4,0 milliards d'euros au financement des contrats de projet État-Régions (CPER) et 1,7 milliard d'euros au renouvellement du matériel roulant des trains d'équilibre du territoire (TET).

En ce qui concerne la répartition de ces crédits par modes de transport, on constate que 51 % des 13,4 milliards d'euros devraient être consacrés au rail , 38 % au routier , 6 % au fluvial et au portuaire et 5 % aux autres formes de mobilité .

Les cinq priorités prévues par le projet de loi d'orientation des mobilités

Le rapport annexé au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit que les investissements portés par l'AFITF, mais également par le budget du programme 203 et par les opérateurs publics tels que Voies navigables de France (VNF) ou SNCF Réseau, se concentreront au cours des vingt années à venir sur cinq grandes priorités .

La première d'entre elles consiste à mieux entretenir et à moderniser les réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux existants , dont l'état s'était considérablement dégradé .

Le réseau routier national non concédé devrait ainsi bénéficier de 31 % de moyens supplémentaires sur la décennie 2018-2027 par rapport à la décennie précédente. 3,6 milliards d'euros par an devraient être investis par SNCF Réseau sur le réseau ferroviaire existant au cours des dix prochaines années, ce qui représente une hausse de + 50 % par rapport à la décennie précédente . L'AFITF verserait 30 millions d'euros supplémentaires par an à Voies navigables de France (VNF) jusqu'en 2022 puis 60 millions d'euros supplémentaires par an à compter de 2023 en faveur du réseau fluvial.

La deuxième priorité consiste à désaturer les grands noeuds ferroviaire , ce qui permet à la fois d'améliorer le fonctionnement des services ferroviaires du quotidien (RER, TER) mais également de rendre plus crédible la perspective d'une réalisation de certaines grandes lignes LGV , en particulier la liaison Bordeaux-Toulouse.

Il est prévu que 2,6 milliards d'euros pourraient être consacrés à cette priorité dans les dix ans à venir par l'État, SNCF Réseau et les collectivités territoriales, la part de l'État s'élevant à 1,3 milliard d'euros via l'AFITF.

La troisième priorité est le désenclavement routier des villes moyennes et des territoires ruraux . Cette priorité se matérialiserait notamment par la réalisation d'une vingtaine d'opérations de désenclavement routier au sein des contrats de plan État-Région (CPER), pour un montant de 1 milliard d'euros sur dix ans .

Le développement des mobilités propres (transports en commun, vélo, marche à pied, etc.) constitue la quatrième priorité portée par la LOM. Il est notamment prévu de lancer plusieurs appels à projets qui pourraient représenter environ 1,2 milliard d'euros sur dix ans.

Enfin, la dernière priorité annoncée est celle du rééquilibrage du transport de marchandise de la route vers le train et le transport fluvial , qui s'accompagne nécessairement d 'un meilleur aménagement des ports et de leur hinterland . Les crédits consacrés à cette politique par l'État représenteraient 1 milliard d'euros au cours du quinquennat et 2,3 milliards d'euros sur 10 ans.

Source : commission des finances, d'après le rapport annexé au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM)

B. SI LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE PRÉVUE PAR LA LOM EST RESPECTÉE, L'AFITF VERRA SES MOYENS AUGMENTER DE 20 % EN 2020

1. Après une première année qui n'a pas été conforme à la programmation financière, l'AFITF doit être doté en 2020 des 2,9 milliards d'euros prévus par la LOM

Ainsi que le prévoit le rapport annexé au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM), les 13,4 milliards d'euros de crédits de paiement que la programmation pluriannuelle des investissements dans les infrastructures de transport prévoit pour l'AFITF pour la période 2018-2022 devaient être répartis de la façon suivante :

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Dépenses de l'AFITF (en millions d'euros courants)

2 246 + 327 au titre du règlement définitif de l'écotaxe

2 684 (prévu initialement)

2 480 (désormais)

2 982

2 687

2 580

Alors que la LOM n'a pas encore été promulguée, les promesses formulées par le Gouvernement ont déjà été écornées , puisque le budget de l'AFIFT pour 2019 n'a pas été de 2 684 millions d'euros mais de 2 480 millions d'euros , soit 204 millions d'euros de moins en raison de recettes des amendes radar beaucoup moins importantes que prévu.

Le budget 2019 de l'AFITF était censé marquer une augmentation de 19,5 % du budget de l'agence par rapport à 2018 (hors règlement définitif de l'écotaxe). La hausse n'a été que de 10,4 % , soit une augmentation significative mais deux fois inférieure à ce qui était attendu.

Tout l'enjeu du budget 2020 de l'AFITF est donc désormais de prévoir un volume de dépenses conforme au montant prévu par la LOM et, surtout, de disposer des recettes nécessaires pour les financer.

Selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, et sous réserve de modifications susceptibles d'intervenir d'ici à l'adoption du budget de l'AFITF par son conseil d'administration au mois de décembre, les crédits de paiement de l'AFITF devraient bien atteindre 2 982 millions d'euros en 2020 , soit une hausse de 502 millions d'euros (+20,2 %) par rapport à 2019.

Comme le montre le graphique ci-dessous, ce montant traduira une montée en puissance sans précédent du budget de l'AFITF par rapport aux années précédentes, laquelle méritera, si elle est effectivement réalisée, d'être saluée compte tenu des contraintes qui pèsent sur nos finances publiques.

Reste néanmoins le point le plus difficile : financer cette hausse sans pénaliser des secteurs importants de notre économie , contrairement à ce que prévoit le Gouvernement (voir infra ).

Évolution du budget de l'AFITF entre 2016 et 2023

(en millions d'euros courants)

Source : AFITF

Le contrôle que le Parlement est en mesure d'effectuer sur le budget
de l'AFITF demeure toujours aussi insatisfaisant

Pour assurer son financement, l'AFITF bénéficie de taxes qui lui sont affectées par l'État, à qui elle reverse ensuite les deux tiers de son budget sous forme de fonds de concours qui viennent compléter les crédits du programme n° 203 « Infrastructures et services de transport » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Mais ces fonds de concours ne sont qu'évaluatifs, si bien que le Parlement a impérativement besoin de connaître le budget initial prévisionnel de l'AFITF au moment où il se prononce sur les crédits du programme n° 203.

En effet, sans ce document, le circuit budgétaire du financement des infrastructures et la multiplicité des organismes concernés (SNCF Réseau, Voies navigables de France, grands ports, collectivités territoriales, etc.), rendent très difficile - voire impossible - de savoir quel est le montant effectivement consacré aux infrastructures de transport en France.

L'an passé, Fabienne Keller, alors rapporteur spécial, avait réclamé que le budget prévisionnel de l'AFITF soit systématiquement transmis au Parlement avant l'examen de la loi de finances, afin que députés et sénateurs puissent enfin opérer un contrôle complet des crédits destinés par l'État au financement des infrastructures de transport.

De fait, même si ledit budget n'est adopté qu'en décembre par son conseil d'administration, il est déjà largement finalisé au moment où le Parlement examine le projet de loi de finances, puisqu'il est nécessairement établi parallèlement à celui du programme 203 dont il constitue le complément.

Une fois de plus, ce budget n'a pas été transmis à votre rapporteur spécial et les quelques informations relatives à l'AFITF qu'elle a obtenues l'ont été au moyen des questionnaires qu'elle a envoyés et des auditions qu'elle a menées.

Elle ne peut donc que déplorer le fait que l'utilisation des crédits de l'AFITF demeure beaucoup trop soustraite à un contrôle effectif du Parlement.

Source : commission des finances du Sénat

2. Plusieurs recettes nouvelles sont affectées à l'AFITF pour financer les 500 millions d'euros de dépenses supplémentaires prévues en 2020
a) Parmi les recettes habituelles de l'AFITF, le produit des amendes radar fait cette année l'objet d'une prévision plus sincère

Les recettes de l'AFITF sont constituées par différentes taxes affectées . Depuis 2015, elle ne reçoit plus de subvention d'équilibre de l'État (jusqu'en 2014, ladite subvention était portée par le programme 203).

Comme c'est le cas depuis 2015, le budget de l'AFITF sera avant tout financé en 2020 par le produit de la TICPE , pour un montant fixé à 1 587 millions d'euros en 2020 , soit une hausse de 381 millions d'euros par rapport à 2019 (+ 31,6 %) , en prenant en compte les 70 millions d'euros de recettes supplémentaires issues du coup de rabot sur la dépense fiscale en faveur des transporteurs routiers de marchandise prévu par l'article 19 du projet de loi de finances (cf. infra ).

Il s'agit là d'un exemple d'utilisation vertueuse de la fiscalité écologique : une partie des recettes d'une taxe pesant sur les carburants routiers sont affectées à une agence qui finance en majorité des modes de transport alternatifs à la route .

Le financement de l'AFITF par la TICPE

La loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 avait prévu l'affectation à l'AFITF, en remplacement de l'écotaxe poids lourds, d'une augmentation de 2 centimes d'euro par litre de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole pour les véhicules légers et de 4 centimes pour les poids lourds, soit une recette pour l'AFITF de 1 139 millions d'euros en 2015, permettant notamment de contribuer au financement de l'indemnité de 528 millions d'euros versée en 2015 à Écomouv'.

La loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a ramené le montant de TICPE affecté à l'AFITF à 715 millions d'euros dans la mesure où les paiements échelonnés à Écomouv' se limitent désormais à 48 millions d'euros par an.

Alors que la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 avait affecté 1 076 millions d'euros à l'AFITF, le présent projet de loi de finances lui affecte 1 517 millions d'euros en 2020.

Source : commission des finances du Sénat

La deuxième grande recette de l'AFITF est la taxe d'aménagement du territoire (TAT) 4 ( * ) acquittée par les concessionnaires d'autoroute, à raison du nombre de kilomètres parcourus par les usagers.

Le produit de cette taxe affecté à l'AFITF augmentera lui aussi de 34 millions d'euros (+6,5 %) pour atteindre 523 millions d'euros en 2020, contre 523 millions d'euros en 2019. L'affectation à l'agence de ces recettes supplémentaires sera notamment permise par la baisse de 46,5 millions d'euros du montant de TAT affectée au compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » (voir infra ).

À noter que le Gouvernement a fait adopter par l'Assemblée nationale à l'article 27 du projet de loi de finances un amendement qui prévoit l'indexation de la TAT sur l'inflation. Cette mesure est censée rapporter à l'AFITF plus de 1 milliard d'euros d'ici la fin de la durée des concessions actuelles (elles s'achèvent en 2032) pour financer le canal Seine-Nord Europe.

Toutefois, elle fait courir à l'État un risque de contentieux avec les sociétés concessionnaires d'autoroutes en modifiant l'équilibre économique des contrats conclus avec celles-ci. C'est la raison pour laquelle le rapporteur général a proposé à votre commission des finances de supprimer le dispositif introduit par l'Assemblée nationale .

La redevance domaniale versée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes constitue la troisième recette de l'AFITF. En 2020, son produit devrait être légèrement supérieur à celui de 2019 , à 357 millions d'euros .

Si les montants de produit de ces trois taxes affectées à l'AFITF prévus en loi de finances apparaissent plutôt fiables 5 ( * ) , la situation est très différente pour sa quatrième recette majeure , à savoir une partie du produit des amendes des radars automatiques du réseau routier national.

En effet, le Gouvernement avait estimé que l'AFITF percevrait à ce titre 500 millions d'euros en 2019. Or la prévision actuelle n'est plus que de 226 millions d'euros en 2019, soit quasiment moitié moins . Pour mémoire, le montant perçu en 2018 n'avait été que de 248,2 millions d'euros alors que la loi de finances initiale pour 2018 avait prévu des recettes de 457,5 millions d'euros .

Estimant que le montant de recettes d'amendes radar annoncé pour 2019 par le Gouvernement était clairement surestimé , Fabienne Keller, rapporteur spécial du budget des transports l'an dernier avait écrit dans son rapport spécial que « le fait que les recettes de l'AFITF atteignent véritablement 2,7 milliards d'euros en 2019 apparaît pour le moins douteux . Partant, il est peu probable que l'agence soit à même de couvrir toutes ses dépenses prévues pour 2019 et elle risque fort de devoir reporter certaines d'entre elles, comme elle s'apprête du reste à le faire pour les dépenses de 2018 ».

Les faits lui ont indéniablement donné raison . Votre rapporteur spécial note toutefois que la prévision annoncée par le Gouvernement cette année en matière de recettes issues des amendes radars - 191 millions d'euros - paraît beaucoup plus conforme aux résultats obtenus en 2018 et attendus pour 2019.

Les recettes de l'AFITF de 2017 à 2020

(en millions d'euros)

2017

2018

2019

2020

2020/2019

Taxe d'aménagement du territoire

565

472

523

557

+ 6,5 %

Redevance domaniale

350

355

355

357

+ 0,5 %

Amendes radars

400

450

226

191

- 15,5 %

TICPE

735

1 076

1 206

1 517

+ 25,8 %

TICPE transport routier

-

-

-

70

+ 100 %

Ecocontribution billets d'avion

-

-

-

230

+ 100 %

Plan de relance autoroutier

100

60

60

60

-

Remboursement d'avances directes

75

-

- 100 %

Versement région Normandie

-

35

35

-

- 100 %

Total

2 150

2 448

2 480

2 982

+ 20,2 %

À la suite du protocole d'accord conclu le 9 avril 2015, l'AFITF perçoit également depuis 2015 une contribution volontaire exceptionnelle des sociétés concessionnaires d'autoroutes pour un montant total de 1,2 milliard d'euros courants sur la durée des concessions autoroutières répartis en fonction du trafic de chaque concession. Ainsi, 100 millions d'euros ont été versées chaque année à l'AFITF de 2015 à 2017. Le reliquat est désormais versé progressivement jusqu'en 2030 . La somme prévue en 2020 est de 60 millions d'euros .

b) Des recettes nouvelles qui posent d'importantes difficultés et ne sont pas acceptables en l'état

Deux recettes nouvelles au profit de l'AFITF ont été prévues dans le cadre du projet de loi de finances 2020, pour un montant estimé à 300 millions d'euros .

Annoncées opportunément à l'issu du conseil de défense écologique du 9 juillet dernier pour favoriser une issue positive de la réunion de la commission mixte paritaire qui devait statuer sur le texte du projet de loi d'orientation des mobilités, ces deux recettes ne sont pas satisfaisantes .

Il s'agit tout d'abord du coup de rabot de 2 centimes d'euros par litre sur le tarif réduit de TICPE des transporteurs routiers prévu à l'article 19 du projet de loi de finances, mesure dont le rendement sera de 70 millions d'euros en 2020 puis de 140 millions d'euros par an à compter de 2021.

Or, il est bien établi que 75 % des poids lourds étrangers circulant en France ne s'y approvisionnent pas en carburant , ce qui signifie que la TICPE sur le carburant des poids lourds pèse essentiellement sur les entreprises françaises .

Votre commission des finances a par conséquent décidé de supprimer cet article qui risque de déstabiliser les transporteurs routiers français vis-à-vis de leurs concurrents étrangers en aggravant le déficit de compétitivité dont ils souffrent déjà, puisque le tarif de TICPE applicable en France est actuellement de 43,19 euros par hectolitre , contre 33,00 euros par hectolitre en Espagne, 35,26 euros par hectolitre en Belgique et 35,50 euros par hectolitre au Luxembourg.

L'autre mesure nouvelle destinée à financer l'AFITF est l' « écocontribution » sur le transport aérien prévue à l'article 20 du projet de loi de finances. Conçue comme une majoration de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) , elle devrait rapporter 230 millions d'euros à l'agence en 2020.

Si votre commission des finances a décidé de maintenir cette taxe qui n'a d'environnementale que le nom pour ne pas définitivement mettre en péril l'équilibre financier de l'AFITF , elle considère néanmoins que celle-ci viendra pénaliser des transporteurs aériens français sur qui pèse déjà une fiscalité très lourde.

C'est pourquoi elle prévoit notamment de baisser d'autres taxes applicables aux compagnies aériennes - en particulier la taxe de l'aviation civile - et de créer un dispositif de suramortissement pour encourager l'achat d'avions plus propres.

Compte tenu de ces observations, votre rapporteur spécial considère que le problème du financement de l'AFITF reste pour l'heure irrésolu . Il n'est pas légitime que l'abandon de l'écotaxe poids lourds en 2014 puis la baisse du produit des amendes radar à compter de 2018 pénalisent en bout de chaîne les transporteurs routiers français ou les compagnies aériennes .

Pour trouver de nouvelles ressources, le Gouvernement pourrait, contrairement aux parlementaires qui sont contraints par les règles de la recevabilité financière, affecter davantage de TICPE à l'AFITF , ce qui serait logique pour une taxe environnementale, ou bien encore trouver enfin un moyen de faire contribuer à l'entretien de nos routes les poids lourds étranger qui ne font que traverser notre pays sans même s'y ravitailler en carburant.

Le montant des restes à payer de l'AFITF a diminué en 2019, tout comme la dette de l'établissement vis-à-vis de SNCF Réseau

Le financement des infrastructures de transport se caractérise par sa pluri-annualité . Qu'il s'agisse de l'État ou de l'AFITF, les projets engagés une année font l'objet de décaissements réguliers les années suivantes tout au long de leur réalisation.

D'après les documents transmis à votre rapporteur spécial, l'AFITF devrait avoir engagé au 31 décembre 2019 41,9 milliards d'euros depuis sa création et les mandatements s'élèveraient à 30,5 milliards d'euros .

L'AFITF doit donc faire face à ses engagements passés pour des montants très substantiels .

Fin 2019, une somme d'environ 11,3 milliards d'euros restait ainsi à mandater , soit un montant légèrement inférieur à quatre exercices au regard du budget 2020 de l'AFITF. Ce montant est en baisse par rapport aux années précédentes, puisque les restes à payer s'élevaient en moyenne à 12 milliards d'euros .

Si l'AFITF est endettée vis-à-vis de SNCF Réseau, sa dette tend à se réduire rapidement puisque elle est passée de 677 millions d'euros en 2014 à 220 millions d'euros en 2018.

Elle devrait encore diminuer de 77 millions d'euros en 2019 pour atteindre 143 millions d'euros . Cette somme est due au gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire au titre de la ligne à grande vitesse (LGV) Sud Europe Atlantique.

II. UN PROGRAMME 203 PRINCIPALEMENT DÉDIÉ AUX SERVICES DE TRANSPORT

A. EN 2020, LES CRÉDITS DU PROGRAMME 203 DIMINUERONT DE 6,1 % EN AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT ET DE 0,3 % EN CRÉDITS DE PAIEMENT

Le programme 203 « Infrastructures et services de transports » est doté pour 2020 de 3 159,1 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 3 183,7 millions d'euros en crédits de paiement (CP) contre 3 365,6 millions d'euros en AE et 3 193,6 millions d'euros en CP en 2019.

Il enregistre donc en 2020 une nette baisse de -6,1 % de ses crédits en AE , avec 206,5 millions d'euros en moins, et de -0,3 % de ses crédits en CP , avec 9,9 millions d'euros en moins.

En autorisations d'engagement (AE), connaîtront une baisse significative de leurs crédits :

- l'entretien des routes , avec 48,3 millions d'euros de moins en AE (-14,4 %), montant en partie compensé par une hausse des crédits de l'AFITF ;

- les transports collectifs , avec une baisse de 129,8 millions d'euros (-85,2 %), ce qui marque un retour à la normale après le niveau exceptionnel d'engagements de 2019 ;

- les lignes aériennes d'aménagement du territoire , avec 17,7 millions d'euros de moins qu'en 2019 (-32,4 %), 2019 ayant été, là encore, une année hors normes en matière d'engagements.

En crédits de paiement (CP), les crédits dédiés à l'entretien des routes diminueront de 13,4 millions d'euros par rapport à 2019 (-4,2 %), un montant toutefois plus que compensé par des hausses de crédits de l'AFITF .

On note en revanche des augmentations sur les postes suivants :

- 10,2 millions d'euros supplémentaires pour les transports collectifs (+81,3 %), début de traduction des engagements souscrits en 2019 ;

- 3,4 millions d'euros en plus pour les lignes aériennes d'aménagement du territoire (+ 9,6 %), avec la montée en puissance des contrats signés en 2019.

Les crédits des fonctions support sont enfin marqués par une nette augmentation de 11,1 millions d'euros en AE et en CP (+ 60,7 %), qui s'explique par un changement de périmètre du programme : à compter de 2020, la subvention pour charges de service public de l'Autorité de régulation des transports (ART) 6 ( * ) , auparavant financée par des taxes affectées supprimées par l'article 6 du présent projet de loi de finances, fait l'objet d'une budgétisation.

Si le Président de l'autorité, entendu par votre rapporteur spécial, n'a p as émis d'objection quant au changement de mode de financement de l'ART , il a en revanche fait valoir la nécessité de lui affecter des postes supplémentaires , compte tenu des missions nouvelles qui lui ont été attribuées par la loi Pacte 7 ( * ) et qui lui seront attribuées par la loi d'orientation des mobilités (LOM) 8 ( * ) .

Alors que l'ART réclamait 20 ETPT supplémentaires , il ne lui en a été attribué que 4 , ce qui paraît très insuffisant pour qu'elle puisse remplir ses nouvelles missions convenablement.

Répartition des crédits de paiement du programme 203
en 2019 et en 2020

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performance pour 2020

Comme l'illustre le graphique ci-dessus et comme le montre le tableau ci-après, la subvention à SNCF Réseau continuera en 2020 à représenter 75,4 % des crédits du programme 203 avec 2 399,7 millions d'euros (pour plus de détails, voir l'analyse de la situation financière de SNCF Réseau infra ).

Suivent ensuite l'entretien du réseau routier , avec 304,4 millions d'euros et la subvention pour charges de service public de l'établissement public Voies navigables de France (VNF) avec 250,1 millions d'euros (pour plus de détails, voir l'analyse de la situation financière de VNF infra ).

Évolution des crédits du programme 203
entre 2019 et 2020

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programme 203

LFI 2019

PLF 2020

Écart

LFI 2019

PLF 2020

Écart

01-Routes-développement

-

-

-

-

-

-

04-Routes-entretien

335,9

287,6

-14,4 %

317,8

304,4

-4,2 %

41-Ferroviaire

2 402,2

2 398,3

-0,9 %

2 421,2

2 399,7

-0,9 %

42-Voies navigables

251,5

250,1

-0,4 %

251,5

250,1

-0,4 %

43-Ports

99,8

101,0

1,2 %

99,8

101,0

1,2 %

44-Transports collectifs

152,4

22,6

-85,2 %

12,4

22,6

81,3 %

45-Transports combinés

27,1

27,1

-

32,1

32,1

-

47-Fonctions support

18,3

29,4

60,7 %

18,3

29,4

60,7 %

50-Transport routier

5,6

5,6

-

5,6

5,6

-

51-Sécurité ferroviaire

-

-

0,2

100 %

52-Transport aérien

54,7

37,0

-32,4 %

34,9

38,3

9,6 %

TOTAL

3 365,6

3 159,1

-6,1 %

3 193,6

3 183,7

-0,3 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2020

Un taux de mise en réserve de 4 % (contre 3 % en 2019) pour les crédits hors dépenses de personnel (titre 2) arrêté par le Gouvernement pour le projet de loi de finances 2020 s'appliquera aux crédits du programme 203 .

Une modulation de la mise en réserve étant toutefois autorisée pour les subventions pour charges de service public, celle de VNF pourra être concernée, tout comme celle de l'ART . Au total, la mise en réserve du programme 203 est estimée par la DGITM à 97,2 millions d'euros en AE et 92 millions d'euros en CP, contre 92,3 millions d'euros en AE et 90,3 millions d'euros en CP estimés dans la loi de finances initiale pour 2019.

Comme évoqué supra , l'une des principales caractéristiques du programme 203 réside dans le poids des fonds de concours , principalement en provenance de l'AFITF , mais également des collectivités territoriales , qui viennent abonder ses crédits, ainsi que le montre le tableau ci-après.

Évaluation des fonds de concours du programme 203 pour 2020

(en millions d'euros)

Programme 203

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

01- Routes - développement

608,0

671,2

04- Routes - entretien

566,4

566,4

41- Ferroviaire

877,0

906,2

42- Voies navigables

1,4

1,8

43- Ports

32,4

43,6

44- Transports collectifs

190,0

311,7

45- Transports combinés

21,0

6,0

47- Fonctions support

1,9

1,9

50- Transport routier

-

-

51- Sécurité ferroviaire

40,0

40,0

52- Transport aérien

-

-

TOTAL

2 338,0

2 548,7

Source : projet annuel de performances pour 2020

Le montant des fonds de concours prévus pour 2020 s'élève à 2 338,0 millions d'euros en AE et 2 548,7 millions d'euros en CP, alors qu'ils représentaient respectivement 2 052,4 millions d'euros en AE et 2 071,8 millions d'euros en CP en 2019. La hausse attendue de ces crédits entre 2019 et 2020 est donc de 285,6 millions d'euros en AE, soit une nette augmentation de + 13,9 % et de 476,9 millions d'euros en CP, soit une forte hausse de + 23,0 % .

Au total, pour 2020, le montant complet des AE inscrites sur le programme 203 s'élèvera donc à 5 497,1 millions d'euros , contre 5 437,6 millions d'euros en 2019, soit une hausse de 1,0 % . Celui des CP atteindra pour sa part la somme de 5 732,4 millions d'euros , contre 5 285,0 millions d'euros en 2019, soit une nette hausse de 8,5 % .

Les fonds de concours représentent 42,5 % des AE et 44,5 % des CP du programme 203 en 2020, alors que cette proportion était de 37,8 % en AE et de 39,2 % en CP en 2019.

Cette évolution traduit la poursuite de la montée en puissance des financements en provenance de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) , qui viennent plus que compenser la baisse des crédits directement inscrits au programme 203 pour 2020.

B. LA MODERNISATION ET LE DÉVELOPPEMENT DES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES RESTERONT EXCLUSIVEMENT FINANCÉS PAR DES FONDS DE CONCOURS EN 2020

L'action 01 « Routes-développement » a pour objet la modernisation et le développement du réseau routier national , concédé comme non concédé, afin de le rendre plus sûr, de réduire les points de congestion chronique, d'améliorer l'accessibilité des territoires et de réduire son impact environnemental.

Elle ne porte aucun crédit budgétaire et est exclusivement financée par des fonds de concours qui devraient représenter en 2020 608 millions d'euros ( 586,7 millions d'euros en 2019) en autorisations d'engagement (AE) et 671,2 millions d'euros ( 589,0 millions d'euros en 2019) en crédits de paiement versés par :

- l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour les opérations qui concernent le réseau routier non concédé 9 ( * ) , à hauteur de 368 millions d'euros en AE et 421,2 millions d'euros en CP ;

- les collectivités territoriales, qui participent au financement de certaines opérations dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER), à hauteur de 240 millions d'euros en AE et 250 millions d'euros en CP.

De nombreux projets seront financés par les crédits des fonds de concours transitant par l'action 01 en 2020, parmi lesquels la route Centre Europe Atlantique dans la région Bourgogne ainsi que le financement du contrat de partenariat pour la construction de la seconde rocade de Marseille (L2) .

Plus généralement, ces crédits permettent également de financer l'apport de l'État aux volets routiers des CPER .

C. L'EFFORT EN FAVEUR DE L'ENTRETIEN DU RÉSEAU ROUTIER NATIONAL NON CONCÉDÉ, TRÈS DÉGRADÉ, ATTEINDRA 870,8 MILLIONS D'EUROS EN 2020, SOIT UNE SOMME SUPÉRIEURE AUX OBJECTIFS DE LA LOM

Les crédits de l'action 04 « Routes-entretien » couvrent les dépenses relatives à l'entretien courant et préventif du réseau routier national non concédé , à son exploitation , aux opérations de réhabilitation ou de régénération routières , aux aménagements de sécurité ainsi qu'à la gestion du trafic et à l'information routière des usagers .

Pour mémoire, le réseau national non concédé comprend 12 000 kilomètres de routes et 12 000 ponts , soit 1 % des routes françaises et 5 % des ponts . D'une valeur estimée à 140 milliards d'euros , il est le support de 18 % du trafic écoulé par la route .

Représentant 9,1 % des crédits du programme 203, l'action 04 portera en 2020 287,6 millions d'euros en AE et 304,4 millions d'euros en CP, soit une baisse de - 14,4 % en AE et de -4,2 % en CP.

Toutefois, les crédits de l'action 04 seront complétés en 2020 par des fonds de concours évalués à 566,4 millions d'euros en AE et en CP, dont 543 millions d'euros en provenance de l'AFITF.

Les 23 millions d'euros de fonds de concours restant (AE=CP) seront apportés par les collectivités territoriales et par des tiers privés .

Au total, 830,6 millions d'euros en AE et 870,8 millions d'euros en CP seront donc consacrés à l'entretien et à la régénération du réseau routier national non concédé , soit des montants en baisse de 21,3 millions d'euros en AE mais en hausse de 37,1 millions d'euros en CP par rapport aux sommes qui étaient prévues par la loi de finances initiale pour 2019.

Il convient en particulier de noter que l'enveloppe portée par l'AFITF représentera en 2020 un effort supplémentaire par rapport à 2019 de 47 millions d'euros , sachant que les crédits consacrés par l'AFITF à l'entretien et à la régénération du réseau routier national non concédé avaient déjà augmenté de 34 millions d'euros en 2019 par rapport à 2018 et de 100 millions d'euros en 2018 par rapport à 2017.

Il y a en effet urgence à moderniser notre réseau routier non concédé : l'état de la structure des chaussées du réseau se dégrade depuis 2009 et plus de la moitié d'entre elles ont besoin d'un entretien urgent . En outre, 1 030 ponts en mauvais état nécessitent des réparations et 2 590 ont besoin d'un entretien .

Trois scénarios de financement
pour le réseau routier national non concédé

Le Gouvernement avait commandé en 2018 un audit externe de l'entretien du réseau routier national non concédé à deux bureaux d'études suisses pour préparer le projet de loi d'orientation des mobilités.

Ceux-ci ont proposé trois scénarios d'investissements pour les vingt prochaines années :

- un scénario à 670 millions d'euros par an , soit la moyenne consacrée à l'entretien et à la modernisation du réseau ces dix dernières années . Selon l'audit, ce niveau d'investissement impliquerait « une aggravation de la dégradation du réseau », « des risques inacceptables et durables pour la sécurité se réaliseraient avec notamment un nombre très important de ponts qu'il faudra fermer ou limiter à la circulation » ;

- un scénario à 800 millions d'euros par an , soit le montant consacré au réseau en 2018 , avec lequel « la dégradation du réseau serait lente et des choix possibles pour sauvegarder une partie des actifs, par exemple les ponts ou les réseaux les plus circulés. Mais une partie du réseau serait à terme affectée par des fermetures ou des limitations de circulation » ;

- un scénario à 1 milliard d'euro , qui permettrait d'enrayer véritablement la spirale de dégradation du réseau.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Sur la base de l'audit externe commandé par le Gouvernement (voir encadré), la programmation des investissements dans les transports annexée au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit que les crédits d'entretien, d'exploitation et de modernisation du réseau routier national non concédé doivent représenter 850 millions d'euros par an d'ici 2022 puis 930 millions d'euros sur la période suivante.

Une telle hausse représente un effort très significatif de + 25 % sur le quinquennat 2018-2022 par rapport au quinquennat précédent.

Votre rapporteur spécial note que le montant de crédits de paiement prévu pour 2020 - 870,8 millions d'euros - est supérieur à l'objectif fixé pour 2022 par la LOM, ce qui témoigne de la prise de conscience collective de la nécessité de consentir de lourds investissements pendant une bonne vingtaine d'année pour être en mesure de sauvegarder notre patrimoine routier .

D. DANS LA MESURE OÙ LES CONTRATS ÉTAT-RÉGIONS 2015-2020 NE DEVRAIENT ÊTRE RÉALISÉS QU'À 60 % EN 2020, ILS SERONT PROLONGÉS JUSQU'EN 2022

L'ensemble des opérations prévues par les contrats État-régions (CPER) pour la période 2015-2020 représente une somme totale de 24,2 milliards d'euros . Plus de 75 % de ces crédits concernent des modes de transport alternatifs à la route , dont 7,6 milliards d'euros pour les transports collectifs en Île-de-France .

Sur ces 24 milliards d'euros , 7,2 milliards correspondent aux financements apportés par l'État (auxquels s'ajoutent 277,9 millions d'euros de VNF ), qui se répartissent de la façon suivante :

Fer

2 098,6 millions d'euros

Routes

3 332,3 millions d'euros

Fluvial

2,4 millions d'euros + 277,9 millions d'euros VNF

Ports

359,8 millions d'euros

Transports collectifs en Île-de-France

1 412,1 millions d'euros

Circulations douces

14,6 millions d'euros

Le taux d'avancement prévisionnel prévu fin 2019 au niveau national est de 43,2 % pour le volet ferroviaire des CPER et de 48,1 % pour leur volet routier , soit des niveaux relativement faibles , qui signifient que les CPER 2015-2020 sont en train de prendre un important retard . À noter que l'Île de France connaît un taux d'avancement plus élevé ( 65 % à fin 2019 ) du fait d'une forte mobilisation autour du projet du Grand Paris et des projets de transport collectif associés.

Selon la DGITM, l'État, via l'AFITF, prévoit de leur consacrer 748 millions d'euros par an environ de 2020 à 2022, soit un peu plus de 10 % par an de l'enveloppe totale de 7,2 milliards d'euros à laquelle il s'est engagé. Eu égard à ce rythme peu rapide, le taux prévisionnel d'avancement des CPER en 2020 serait de 60 % .

Il est d'ores-et-déjà acté que ces CPER feront l'objet d'un report à 2022 , tout en sachant que le taux de réalisation des projets pour une génération de CPER n'est que de 80 % environ . L'élaboration de la nouvelle génération de contractualisation États-régions sera réalisée avec les nouveaux exécutifs régionaux élus en 2021.

E. PARMI LES AUTRES ACTIONS DU PROGRAMME 203, MÉRITE D'ÊTRE SIGNALÉ LE MAINTIEN À UN NIVEAU ÉLEVÉ DES CRÉDITS CONSACRÉS AU DRAGAGE DES PORTS

En 2020, l'action 43 « Ports » sera dotée de 101 millions d'euros (AE=CP), soit une stabilisation à un niveau élevé après les fortes hausses intervenues ces dernières années . Sur ce montant, 93,6 millions d'euros seront consacrés à l'entretien des accès et des ouvrages d'accès des grands ports maritimes (GPM) , c'est-à-dire à leur dragage , qui constitue une priorité pour l'État depuis le comité interministériel de la mer (CIMer) de  2016.

Pour mémoire, le budget consacré au dragage des ports avait augmenté en 2019 de près de 29 millions d'euros par rapport à 2018, sachant que ces crédits avaient déjà été rehaussés en cours de gestion de 26 millions d'euros en 2017, puis avaient bénéficié d'une hausse de 19 millions d'euros dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2018.

Selon les réponses au questionnaire budgétaire, les crédits disponibles permettront désormais de couvrir en quasi-totalité les charges des ports français , de mettre en oeuvre les dispositions de l'article R. 5313-69 du code des transports 10 ( * ) et, surtout, de les faire bénéficier du même niveau de remboursement que les autres principaux ports en Europe .

III. LES TROIS GRANDS OPÉRATEURS DU PROGRAMME FONT FACE À D'IMPORTANTS DÉFIS FINANCIERS

A. SNCF RÉSEAU, POURSUIT LE GRAND PLAN DE MODERNISATION DU RÉSEAU STRUCTURANT ET BÉNÉFICIERA D'UN ASSAINISSEMENT DE SA SITUATION FINANCIÈRE GRÂCE À LA REPRISE DE 25 MILLIARDS D'EUROS DE SA DETTE DÈS 2020

La loi n° 2018-515 pour un nouveau pacte ferroviaire , si elle portait principalement sur l'ouverture à la concurrence du marché domestique de voyageurs et sur la réforme du cadre social des personnels de la SNCF , a également prévu la réorganisation et la transformation en sociétés nationales à capitaux publics de SCNF Mobilités et de SNCF Réseau .

En 2020 et dans les années suivantes, SNCF Réseau va pouvoir poursuivre ses missions, notamment la modernisation du réseau structurant trop longtemps négligé , dans un contexte financier assaini grâce notamment à la reprise d'une partie de sa dette par l'État.

1. Porter à 3,6 milliards d'euros par an le montant des investissements en faveur du réseau structurant le plus circulé devrait permettre de véritablement le moderniser

L'audit du réseau ferré français réalisé en 2005 par l'école polytechnique fédérale de Lausanne, actualisé en 2012, a démontré que le réseau ferré structurant le plus circulé s'était considérablement dégradé en France ces trente dernières années en raison d'investissements d'entretien et de modernisation longtemps très insuffisants 11 ( * ) .

Cette situation pose des problèmes en termes de sécurité mais également d'efficacité, en raison de la multiplication des ralentissements de la circulation des trains sur quelque 5 300 kilomètres du réseau .

Pour y remédier, SNCF Réseau a conçu en 2013 un grand plan de modernisation du réseau qui vise à régénérer notre patrimoine ferroviaire en péril .

Les engagements pris dans le cadre du contrat de performance conclu entre l'État et SNCF Réseau le 20 avril 2017 prévoyaient des investissements de 2,5 milliards d'euros par an en 2018 et en 2019 puis de 3 milliards d'euros par an à compter de 2020 en faveur du réseau .

S'il s'agissait d'un progrès par rapport à la situation antérieure, ce montant paraissait néanmoins insuffisant pour répondre à l'ensemble des besoins , comme l'avait montré le rapport d'information de votre commission des finances « Infrastructures de transport : sélectionner rigoureusement, financer durablement » 12 ( * ) présenté en septembre 2016, qui estimait « qu'il serait nécessaire de porter l'effort consenti par SNCF Réseau entre 3,5 et 4,5 milliards d'euros pendant 15 ans » .

Comme le Gouvernement l'avait annoncé au moment de la discussion du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, la programmation des investissements dans les transports annexé au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit désormais que SNCF Réseau investira 3,6 milliards d'euros par an dans le réseau existant , soit un montant nettement plus conséquent que celui qui était prévu précédemment et plus en adéquation avec ce que votre commission des finances avait préconisé.

2. Une trajectoire financière assainie grâce à la reprise de 35 milliards d'euros de dette par l'État en 2020 puis en 2022

Au 31 décembre 2018, la dette financière nette de SNCF Réseau en valeur de remboursement hors ICNE 13 ( * ) devrait représenter environ 48,2 milliards d'euros , soit 3 milliards d'euros de plus qu'au 31 décembre 2017. Cette dette, dont l'État est largement responsable, génère 1,5 milliard d'euros de frais financiers annuels, grevant les comptes de l'entreprise.

Lors de la discussion du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, l'État s'était engagé à reprendre 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau dans le cadre de la transformation de l'opérateur en société anonyme à capitaux publics .

La première partie de cette reprise de dette interviendra au 1 er janvier 2020 et portera sur une somme de 25 milliards d'euros . Cette reprise est prévue à l'article 76 du présent projet de loi de finances : le commentaire de cet article infra en présente en détail les modalités.

Une seconde reprise de dette - à hauteur de 10 milliards d'euros - interviendra ensuite au 1 er janvier 2022.

Pour éviter que cette dette ne se reconstitue, il est demandé à l'établissement de réaliser des efforts de productivité supplémentaires de l'ordre de 380 millions d'euros en 2026 , portant ainsi la productivité à mettre en oeuvre à plus de 1,6 milliard d'euros en 2026 .

Simultanément, la nouvelle trajectoire d'évolution des péages des activités commerciales (fret et TGV), dont les chroniques d'indexation seront ramenées au niveau de l'inflation générale des prix (IPC) , devrait permettre de faire circuler davantage de trains.

Enfin, SNCF Réseau bénéficiera du renforcement de la règle d'or prévue par la loi pour un nouveau pacte ferroviaire.

3. Les crédits d'intervention du programme 203 à destination de SNCF Réseau diminueront légèrement en 2020

Les liens financiers entre SNCF Réseau et le programme 203 sont très importants puisque l'action 41 « Ferroviaire » , qui représente 75,9 % des crédits dudit programme , porte pour 2020 2 398,3 millions d'euros en AE et 2 399,7 millions d'euros en CP de crédits d'intervention en faveur de SNCF Réseau , soit un montant inférieur de -0,9 % aux 2 421,2 millions d'euros de 2019.

Ces crédits visent à financer l e coût de l'utilisation du réseau ferré national par les trains régionaux de voyageurs (TER) , les trains d'équilibre du territoire (trains Intercités) et les trains de fret , que les péages que perçoit par ailleurs SNCF Réseau ne parviennent pas à couvrir .

En vertu de ce mécanisme, SNCF Réseau percevra ainsi en 2020 :

- 2 034,0 millions d'euros (AE=CP) pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les TER . Ce montant correspond à la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation par les TER du réseau ferré national hors Île-de-France ;

- 253,0 millions d'euros pour le paiement par l'État de la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation du réseau ferré national hors Île-de-France par les trains d'équilibre du territoire (TET), dont l'État est l'autorité organisatrice (voir infra );

- 110,0 millions d'euros pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les trains de fret , y compris le financement du complément de prix visant à contribuer au financement du coût marginal du fret pour SNCF Réseau .

Par ailleurs, 1,4 million d'euros de crédits de paiement sont prévus pour le financement en 2020 du transfert de l'exploitation et de la maintenance à la société LFP , filiale de la SNCF et de l'AFIF espagnole, de la ligne ferroviaire franco-espagnole à grande vitesse Perpignan-Figueras , à la suite de la liquidation du concessionnaire TP Ferro .

B. LA CONSTRUCTION DU GRAND PARIS EXPRESS FAIT PESER UNE CHARGE FISCALE DE PLUS EN PLUS LOURDE SUR LES ENTREPRISES FRANCILIENNES

La loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, dont l'article 1 er dispose que « le Grand Paris est un projet urbain, social et économique basé sur la construction d'un nouveau réseau de transport public », a créé la Société du Grand Paris (SGP) , établissement public de l'État à caractère industriel et commercial (EPIC) dont « la mission principale est de concevoir et d'élaborer le schéma d'ensemble et les projets d'infrastructures composant le réseau de transport public du Grand Paris et d'en assurer la réalisation ».

Le réseau du Grand Paris Express

Baptisé Grand Paris Express , le réseau de transport public porté par la SGP est constitué de 72 gares (que la SGP a pour mission de construire et d'aménager) et de 200 kilomètres de lignes nouvelles interconnectées au réseau existant (métro, RER et transilien) :

- la ligne 15 reliant Noisy-Champs, Champigny, La Défense, Saint-Denis-Pleyel, Rosny-Bois-Perrier ;

- la ligne 16 de Noisy-Champs à Pleyel via Clichy-Montfermeil et Aulnay-sous-Bois ;

- la ligne 17 de Pleyel au Mesnil Amelot en passant par Le Bourget ;

- la ligne 18 d'Orly à Versailles en passant par le plateau de Saclay.

À ces quatre lignes nouvelles viennent s'ajouter les prolongements de la ligne 14 au nord, entre Saint-Lazare et Pleyel, et au sud, entre Olympiades et Orly ainsi que le prolongement de la ligne 11 entre Rosny-Bois-Perrier et Noisy-Champs.

Source : Société du Grand Paris (SGP)

1. Le coût du Grand Paris Express est désormais estimé à 35 milliards d'euros

Depuis la réévaluation intervenue à l'automne 2017 , le coût du Grand Paris Express est évalué à 35 milliards d'euros aux conditions économiques de 2012, le coût moyen au kilomètre s'élevant à 150 millions d'euros .

S'ajoutent à cette somme environ 3 milliards d'euros de contributions de la SGP à plusieurs projets d'infrastructures de transports en Île-de-France :

- 798 millions d'euros au titre de la participation de 55 % de la SGP au prolongement de la ligne 14 jusqu'à Mairie de Saint-Ouen ;

- 450 millions d'euros pour la réalisation des interconnexions avec le réseau existant ;

- 1,6 milliard d'euros pour la participation de la SGP au plan de mobilisation de la région (Éole, ligne 11, schéma directeur des RER).

À la suite de la réévaluation du coût du Grand Paris Express , le Gouvernement a confirmé le 22 février 2018 la réalisation de l'ensemble du réseau mais a substantiellement modifié les dates de mise en service de certaines lignes.

Il a également demandé à l'équipe dirigeante de la SGP de réduire le coût du projet de 10 % en procédant à un vaste travail d'optimisation qui est actuellement en cours.

Mais à ce jour, 600 millions d'euros seulement d'économies ont été identifiées, ce qui paraît très peu à l'échelle du projet.

Les travaux sont en cours sur les lignes 14, 15 sud, et le tronc commun des lignes 16 et 17. Pour les lignes 15 Est et Ouest, le choix a été fait en 2019 de passer en conception-réalisation, le lancement des premiers appels d'offre étant prévus en 2020.

Selon les réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial, la mise en service de la ligne 14 et du tronc commun des lignes 16 et 17 pour les Jeux Olympiques de 2024 n'est pas remise en cause. En ce qui concerne les lignes 17 et 18, les premiers appels d'offre sont en cours.

Si le budget pour 2020 de la Société du Grand Paris (SGP) n'est pas encore précisément connu, il pourrait atteindre 4,4 milliards d'euros selon les projections transmises à votre rapporteur spécial dans le cadre des réponses au questionnaire budgétaire, soit une hausse de 818 millions d'euros environ par rapport à 2019.

Le budget de la Société du Grand Paris de 2016 à 2022
(projections à partir de 2020)

(en millions d'euros)

En M€

2016

2017

2018

2019

(estimé)

2020

(projection)

2021

(projection)

2022

(projection)

Dépenses totales (A)

909

1782

2654

3574

4392

4402

4368

GPE

629

1314

2119

2894

3907

4117

4203

Contributions (Ligne 14 entre Saint-Lazare et Mairie de Saint-Ouen, Plan de mobilisation et réseaux existants)

281

468

535

680

485

285

165

Recettes totales (B)

515

536

600

736

686

690

694

Taxes affectées

508

532

566

682

686

690

694

TSBCS

326

349

382

466

466

466

466

TSE

117

117

117

117

117

117

117

IFER

65

66

67

75

75

75

75

TASS

n.a.

n.a.

n.a.

4

8

12

16

Taxe de séjour

n.a.

n.a.

n.a.

20

20

20

20

Ressources propres et autres

7

4

34

54

-

-

-

Emprunts

0

700

2365

3300

Environ 3600

Environ 3600

Environ 3600

Source : réponses au questionnaire budgétaire
2. Un plan de financement qui repose largement sur la fiscalité affectée à la SGP
a) Des hausses de recettes qui pèsent désormais de façon excessive sur les entreprises franciliennes et, bientôt, sur les départements

Pour financer ses dépenses, la SGP dispose jusqu'en 2018 :

- de trois recettes fiscales affectées , pour un montant de 566 millions d'euros en 2018 ( 67 millions d'euros au titre de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau-IFER, 382 millions d'euros au titre de la taxe locale sur les bureaux en Île-de-France et 117 millions d'euros au titre de la taxe spéciale d'équipement) 14 ( * ) ;

- d'un engagement de l'État et des collectivités territoriales à lui verser des dotations en capital , auxquelles la SGP pourrait faire appel en tant que de besoin, et qui représenteraient au maximum respectivement 1 milliard d'euros et 225 millions d'euros ;

- à compter des mises en services, des produits de son domaine (péages, redevances commerciales, etc.).

Ces recettes ne paraissaient toutefois plus suffisantes depuis que le coût total du projet avait été réévalué à 35 milliards d'euros .

Dans son rapport remis au Premier ministre en juillet 2018 sur les ressources de la société du Grand Paris 15 ( * ) , le député Gilles Carrez avait considéré que la SGP avait besoin d'une somme comprise entre 200 et 250 millions d'euros de ressources annuelles supplémentaires .

Dans le cadre de la loi de finances pour 2019, le Parlement a prévu plusieurs recettes nouvelles pour la SGP :

- des évolutions de la taxe locale sur les bureaux en Île-de-France , avec une augmentation de 10 % des tarifs en zone 1 , la fin des dérogations dans cette même zone et l'intégration des parkings commerciaux dans l'assiette de cette taxe ;

- la création d'une part régionale de la taxe de séjour , dont le rendement est estimé à 20 millions d'euros environ ;

- le reversement de la totalité de l'IFER à la SGP , pour un rendement de 8 millions d'euros ;

- le versement du surplus de la taxe additionnelle sur les surfaces de stationnement (TASS) au-delà des 66 millions d'euros versés à la région Île-de-France, pour un rendement estimé à 4 millions d'euros .

Si ces prélèvements nouveaux avaient été contestés par les entreprises franciliennes et ont provoqué des difficultés pour les petits gestionnaires de parkings commerciaux , ils avaient malgré tout été adoptés par le Parlement, compte tenu de l'ampleur des besoins financiers de la SGP.

Le nouvel aménagement de la taxe locale sur les bureaux en Île-de-France inséré par l'Assemblée nationale à l'article 5 bis du présent projet de loi de finances définit une nouvelle zone , dite « premium », qui regrouperait des arrondissements représentant à peu près la moitié ouest de Paris (les 1 er , 2 e , 7 e , 8 e , 9 e , 10 e , 15 e , 16 e et 17 e ) et plusieurs communes de la première couronne ouest (Boulogne-Billancourt, Courbevoie, Issy-les-Moulineaux, Levallois-Perret, Neuilly-sur-Seine et Puteaux), considérés comme particulièrement attractifs pour les locaux à usage de bureaux .

Dans cette zone, le tarif appliqué pour les locaux à usage de bureaux serait de 23,19 euros pour le tarif normal et de 11,51 euros pour le tarif réduit, soit un surplus de 20 % par rapport aux tarifs applicables dans l'actuelle zone 1 . Le tarif applicable aux autres locaux demeurerait identique.

Le rendement de cette mesure est évalué à 44 millions d'euros .

Par ailleurs, a également été introduit par l'Assemblée nationale un article 72 septies qui prévoit d'affecter à la SGP un prélèvement de 75 millions d'euros en 2020 sur les recettes tirées des droits de mutation à titre onéreux des départements franciliens ( 60 millions d'euros pour les années suivantes).

Si votre rapporteur spécial entend les besoins de financement de la SGP , elle considère que la pression fiscale qui pèse sur les entreprises franciliennes au titre de la taxe locale sur les bureaux est désormais trop forte et que la nouvelle hausse proposée par la majorité de l'Assemblée nationale n'est pas acceptable .

Le Gouvernement a enfin fait parvenir au Parlement le 18 novembre 2019 le rapport prévu par l'article 167 de la loi de finances pour 2019 , lequel disposait que « le Gouvernement présente au Parlement avant le 1 er octobre de chaque année un rapport relatif à l'évolution des dépenses et des ressources de la Société du Grand Paris . Ce rapport détaille notamment les prévisions des coûts de réalisation du projet, des impositions de toutes natures affectées à l'établissement ainsi que de l'encours en principal des emprunts contractés par ce dernier ».

Mais ce document ne présente aucune vraie solution et n'évoque même pas les nouvelles hausses de recettes pour la SGP actuellement en cours de discussion. Ce rapport aurait pourtant dû suggérer des modifications du plan de financement de la SGP susceptibles de permettre de ne pas pénaliser davantage les entreprises , quitte à allonger la durée des emprunts de la société dans un contexte de taux d'intérêt exceptionnellement bas.

b) Un recours de plus en plus important à l'emprunt

Depuis 2015, la SGP a dépensé davantage qu'elle ne percevait de recettes, ce qui l'a conduit à consommer progressivement le fonds de roulement qu'elle avait accumulé depuis 2010 . Elle l'a totalement épuisé depuis la fin de l'année 2017 . Son besoin de financement est désormais couvert par le recours à l'emprunt.

Elle a ainsi signé en 2014 un protocole d'accord avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qui prévoit qu'elle bénéficiera de 4 milliards d'euros de prêts du fonds d'épargne d'ici 2022. Une première tranche de 1 milliard d'euros a ainsi été débloquée en 2015.

Toujours en 2015, la SGP a également emprunté 1 milliard d'euros auprès de la Banque européenne d'investissements (BEI) 16 ( * ) , dans le cadre d'une enveloppe globale qui pourra s'élever au maximum à 4 milliards d'euros à l'horizon 2023.

Par ailleurs, la SGP peut désormais emprunter sur les marchés financiers car elle n'est plus considérée comme un ODAC par l'INSEE . Elle a été notée pour la première fois par l'agence Moody's l'an dernier et a reçu la note Aa2/Prime-1 , ce qui montre que l es marchés financiers considèrent sa structure financière comme particulièrement robuste .

En 2018, la SGP a notamment bénéficié d'un tirage de 300 millions d'euros auprès de la CDC (en revolving indexé sur l'inflation) et d'un tirage de 300 millions d'euros également auprès de la BEI (amortissable à 40 ans).

Elle a surtout bénéficié en octobre 2018 d'une première émission obligataire verte de 1,75 milliard d'euros (emprunt à 10 ans au taux de 1,15 %).

En 2019, elle a déjà réalisé deux émissions obligataires de 1,0 milliard d'euros et 2,0 milliards d'euros en profitant de taux très bas.

Au total, ses obligations privées présentent actuellement une maturité moyenne de 18 ans (mais avec des placements allant jusqu'à 50 ans) et un taux moyen de 1,34 % .

c) Pour la deuxième année consécutive, les effectifs de la SGP vont augmenter puisque le nombre d'ETPT passera de 430 en 2019 à 585 en 2020

Jusqu'en 2018, le plafond d'emploi de la société du Grand Paris n'était que de 240 ETPT , un chiffre notoirement insuffisant , compte tenu de l'ampleur des risques financiers, techniques et de sécurité présentés par un chantier d'une telle ampleur.

Le Gouvernement a entendu les inquiétudes qui s'exprimaient sur le sujet puisque les effectifs de la SGP ont doublé en 2019 pour atteindre 430 ETPT . Le mouvement devrait se poursuivra en 2020 puisque le plafond d'emplois de l'opérateur sera de 585 ETPT .

Il était en effet indispensable que la SGP dispose de collaborateurs en nombre suffisant pour contrôler avec précision et minutie le travail des quelque 2 000 personnes qui travaillent pour elle dans le cadre de contrats d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) .

C. VOIES NAVIGABLES DE FRANCE VA PERCEVOIR 23 MILLIONS D'EUROS DE CRÉDITS D'INVESTISSEMENTS SUPPLÉMENTAIRES DE L'AFITF AFIN DE POURSUIVRE LA RÉNOVATION DE SON RÉSEAU

1. Des ressources relativement stables mais des effectifs en forte baisse

Voies navigables de France (VNF) , établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de la transition écologique et solidaire, gère le réseau de voies navigables français . Il est chargé de son exploitation , de son entretien , de sa maintenance , de son amélioration ainsi que de son extension .

La loi n° 2012-77 du 24 janvier 2012 relative à Voies navigables de France lui a transféré au 1 er janvier 2013 les services de navigation de l'État , jusqu'alors mis à sa disposition, et qui comptaient quelque 4 000 agents .

Le réseau géré par l'établissement comprend 6 700 kilomètres de voies navigables , plus de 3 000 ouvrages d'art et 40 000 hectares de domaine public en bordure de voie d'eau.

Le projet stratégique de VNF pour la période 2015-2020 vise d'abord à hiérarchiser les différents segments du réseau , avec une offre de service fret sur le réseau à grand gabarit , une offre touristique sur les voies navigables plus modestes qui s'y prêtent et une offre de gestion hydraulique pour les autres usages de l'eau (agriculture, industrie, etc.). VNF est particulièrement attentif aux enjeux écologiques , comme en atteste sa démarche de labellisation ISO 14 000 , le déploiement d'un label « développement durable » et sa coopération accrue avec les agences de l'eau .

Son contrat d'objectifs et de performance, qui se fait attendre depuis longtemps, a fait l'objet d'une inscription dans la loi d'orientation des mobilités, ce qui laisse espérer qu'il pourrait enfin être adopté en 2020.

VNF devrait compter 4 182 ETPT en 2020, dont 4 152 sous plafond et 30 hors plafond (il s'agit d'emplois aidés). Son schéma d'emploi pour 2020 prévoit une diminution de 112 ETPT contre 96 ETP en 2019. Sa masse salariale représentait 256,6 millions d'euros en 2019.

Dans le cadre d'Action publique 2022, il est prévu que VNF diminue ses effectifs d'une centaine d'ETPT par an , pour passer sous la barre des 4 000 ETPT d'ici la fin de la législature . 1 900 départs à la retraite sont prévus dans les dix ans à venir, soit près de 50 % des effectifs actuels , si bien que les objectifs assignés à l'opérateur apparaissent relativement réalistes. Votre rapporteur spécial note toutefois que la diminution prévue en 2020 est particulièrement forte et suscite des inquiétudes au sein de l'opérateur.

La subvention pour charges de service public que reçoit l'établissement sur les crédits du programme 203 représente environ 39 % de ses ressources . Cette subvention s'établira en 2020 à 250,5 millions d'euros (AE=CP), soit un montant inférieur de 1 million d'euros à celui de 2019, ce qui lui permettra quasiment de couvrir ses dépenses de personnel.

À compter du 1 er janvier 2020, la taxe hydraulique que percevait VNF sera remplacée par une redevance domaniale , créée par voie réglementaire 17 ( * ) . Son fait générateur sera le même que celui de la taxe hydraulique, à savoir le prélèvement ou le rejet d'eau , quel qu'en soit le but (refroidissement d'installations industrielles, irrigation, eau potable, évacuation des eaux, etc.). Son rendement devrait être analogue à celui de la taxe hydraulique, soit 127 millions d'euros par an environ. On peut regretter que le décret de mise en oeuvre de cette redevance ne soit toujours pas paru à un mois de son entrée en vigueur.

Les recettes propres de l'établissement, qui correspondent à ses redevances domaniales et à ses péages représentent 49,0 millions d'euros 18 ( * ) , soit seulement 8,0 % environ de ses recettes . Il importe que l'établissement s'attache à les développer et à les dynamiser pour compenser le recul des dotations de l'État.

2. Comme le prévoit la LOM, VNF doit continuer à investir massivement sur son réseau avec le soutien financier de l'État

Plusieurs épisodes de crues survenues ces dernières années ont mis en évidence les fragilités du vieillissant réseau de voies navigables géré par VNF, avec notamment la rupture d'une digue sur le Loing en 2016.

Un audit réalisé par le cabinet MENSIA et le bureau d'études ARCADIS a en effet montré que les investissements réalisés ces dernières années en matière de voies navigables avaient été insuffisants.

Il fait ainsi état d'un besoin d'investissement de 245 millions d'euros par an pendant dix ans 19 ( * ) , dont 120 millions d'euros pour le réseau à grand gabarit .

En 2018 et en 2019, VNF a investi 164,7 millions d'euros puis 174,5 millions d'euros pour la régénération, la modernisation et le développement de nos voies navigables , soit des montants très inférieurs aux chiffres avancés par l'audit. L'opérateur avait bénéficié à cette fin de subventions de l'AFITF qui représentaient respectivement 80 millions d'euros en 2018 et 90 millions d'euros en 2019.

L'audit ayant montré combien ces montants demeuraient insuffisants pour empêcher la dégradation du réseau , la programmation des investissements dans les transports prévoit que l'État augmentera les crédits de l'AFITF consacrés à sa régénération et à sa modernisation pour atteindre en moyenne 110 millions d'euros par an entre 2019 et 2022 puis 130 millions d'euros par an entre 2023 et 2027. L'objectif visé est d'atteindre un montant d'investissement total moyen de 190 millions d'euros par an, en prenant en compte également les capacités d'investissement propres de VNF et les cofinancements des collectivités territoriales.

De fait, les subventions d'investissement de l'AFITF à VNF devraient représenter 113 millions d'euros en 2020 soit une hausse de 23 millions d'euros (+ 25,6 %) par rapport aux 90 millions d'euros de 2020. Cette forte augmentation, bienvenue, pourrait permettre à l'établissement d'investir entre 230 millions et 240 millions d'euros dans son réseau , contre 174,5 millions d'euros en 2019 ce qui permettrait de progresser vers une véritable remise en état et une régénération du réseau .

PROGRAMME 205
« AFFAIRES MARITIMES »

La France possède le deuxième domaine maritime le plus vaste du monde, avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE) , dont 97 % outre-mer .

L'économie maritime, souvent qualifiée d'« économie bleue », était à l'origine en 2016 de 289 311 emplois directs 20 ( * ) , hors tourisme littoral et emplois indirects, ce qui représente environ 1,5 % de la population active française , et 71,9 milliards d'euros de PIB .

Le programme 205 « Affaires maritimes » porte les crédits budgétaires qui financent l'action maritime de l'État dans ses différentes dimensions : sécurité maritime, protection de l'environnement, formation des gens de mer, soutien au pavillon français, etc.

Dans cette perspective, il s'appuie sur les directions interrégionales de la mer (DIRM) et directions de la mer en outre-mer , ainsi que sur les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) .

Il finance également l'enseignement professionnel maritime : lycées professionnels maritimes, École nationale supérieure maritime (ENSM), bourses des élèves, etc.

Évolution des crédits du programme 205 entre 2019 et 2020, et exécution 2018

(en euros)

Exécution
2018

LFI
2019

PLF
2020

Variation 2020 / 2019

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01- Sécurité et sûreté maritimes

32 106 511

31 846 632

29 892 079

29 277 079

34 870 792

33 430 792

+16,7 %

+14,2%

02- Gens de mer et enseignement maritime

25 380 684

25 626 745

27 288 675

27 303 675

27 183 675

27 183 675

-0,3 %

-0,5 %

03- Flotte de commerce

85 228 759

85 228 759

81 220 000

81 220 000

81 120 000

81 120 000

-0,1 %

-0,1 %

04- Action interministérielle de la mer

8 649 588

11 042 553

18 053 020

13 053 020

11 193 158

13 863 158

-37,8 %

+6,2 %

05- Soutien au programme

8 973 961

8 964 458

6 601 480

6 481 480

6 202 421

6 202 421

-6,0 %

-4,3 %

06- Gestion durable des pêches et de l'aquaculture

80 823

80 824

-

-

-

-

-

-

Total programme 205

160 420 326

162 789 971

163 055 254

157 335 254

160 570 046

161 800 046

-1,5 %

+2,9 %

Source : projet annuel de performances pour 2020

La dotation du programme en 2020, après son examen par l'Assemblée nationale, s'établit à 160,6 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 161,8 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Il devrait donc connaître l'an prochain une baisse de -1,5 % de ses AE mais une hausse de ses CP de +2,9 % .

Le programme 205 est caractérisé par un fort taux de dépenses contraintes et inéluctables , puisque 70 millions d'euro s environ correspondent au fonctionnement technique et opérationnel des services des affaires maritimes, y compris le maintien en conditions opérationnelles des équipements tandis que 80 millions d'euros correspondent aux exonérations de charges sociales pour les marins.

Selon le directeur des affaires maritimes, entendu par votre rapporteur spécial, le programme 205 devrait se voir appliquer en 2020 une réserve de précaution de 3 % de ses crédits hors titre 2 (masse salariale), soit 5,7 millions d'euros en AE et en CP, un niveau légèrement supérieur à celui de 2019 (4,5 millions d'euros en AE et 4,3 millions d'euros en CP). À noter que le programme ne bénéficie pas de mesure de dégel automatique prévue par la lettre plafond.

A. LA SÉCURITÉ ET LA SÛRETÉ MARITIME, BIEN QU'AU CoeUR DES MISSIONS DE L'ÉTAT EN MER, VERRONT LEURS CRÉDITS AUGMENTER EN AE MAIS BAISSER LÉGÈREMENT EN CP

L'action 01 du programme 205 est dédiée à la sécurité et à la sûreté maritimes , qui sont des missions régaliennes par excellence.

En vertu des conventions internationales de l'Organisation maritime internationale (OMI) relatives à la sauvegarde de la vie humaine en mer et à la prévention des pollutions marines, la France est tenue d'exercer un triple rôle en matière de sécurité et de sûreté maritimes :

- elle vérifie la bonne application des normes internationales à bord des navires français en tant qu'État du pavillon ;

- elle contrôle les navires de commerce étrangers qui font escale dans les ports français en tant qu'État du port ;

- elle garantit la sécurité des routes de navigation le long des côtes françaises en tant qu'État côtier .

Regroupant 19,5 % des crédits du programme , l'action 01 est dotée de 30,4 millions d'euros d'autorisation d'engagement (AE) et de 28,9 millions d'euros de crédits de paiement (CP) pour 2020, soit une hausse de 0,5 million d'euros (+1,6 %) des crédits en AE mais une légère baisse de 0,3 million d'euros (- 1,0 %) en CP . A ces crédits budgétaires devraient toutefois venir s'ajouter 3,3 millions d'euros de fonds de concours .

Une somme de 15,9 millions d'euros en AE et de 14,5 millions d'euros en CP, en hausse respectivement de 4,4 millions d'euros en AE et de 0,8 million d'euros en CP par rapport à 2019, sera consacrée à la signalisation maritime , c'est-à-dire au fonctionnement courant et technique des 6 100 phares et balises situés en métropole comme en outre-mer ainsi qu'au service de l'armement des phares et balises (APB) , service à compétence nationale (SCN) basé à Quimper.

La flotte de 35 baliseurs dont dispose l'État possède un âge moyen de 29 ans et six unités ont d'ores-et-déjà dépassé l'âge de 40 ans , ce qui impose un effort sur cinq ans de remplacement de ces six unités par trois navires polyvalents sur la période 2018-2022.

L'acquisition d'un nouveau baliseur pour le port de Brest constitue la priorité de 2020. En 2019, des crédits avaient été consacrés à l'achat d'une nouvelle vedette baptisée Giraglia .

6,7 millions d'euros (AE=CP) sont prévus pour financer la surveillance du trafic maritime réalisée par les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) 21 ( * ) , notamment les systèmes de radiocommunications , les moyens radars ainsi que différents outils tels que Marylin (qui permet de conduire et de planifier les opérations de recherche et de sauvetage en mer ainsi que la recherche de pollutions) et Spationav (outil de surveillance du trafic maritime commun à l'ensemble des gardes côtes).

En 2019, la subvention du ministère à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) , association reconnue d'utilité publique qui participe au sauvetage en mer 22 ( * ) avait augmenté pour la troisième année consécutive jusqu'à atteindre 6,2 millions d'euros (AE=CP), contre 2,3 millions d'euros en 2015. Le Gouvernement prévoyait initialement de reconduire en 2020 cette somme de 6,2 millions d'euros .

Mais par un amendement proposé à l'Assemblée nationale, il a décidé d'augmenter de 4,5 millions d'euros la dotation versée à la SNSM l'an prochain, laquelle atteindra donc 10,7 millions d'euros , un chiffre sans précédent.

Cette hausse de 73,0 % de la dotation de l'État à la SNSM vise à accompagner l'association dans le renouvellement de la flotte et sera donc destinée exclusivement au financement de ses investissements , et non de son fonctionnement courant.

Il s'agit là d'une mesure conforme aux préconisations de la mission d'information du Sénat sur le sauvetage en mer , qui avait plaidé pour u n geste fort de l'État dans son rapport d'octobre 2019 intitulé « Sauvetage en mer : replacer les bénévoles au coeur de la décision » 23 ( * ) .

1,55 million d'euros (AE=CP) sera consacré en 2020 aux 16 centres de sécurité des navires , chargés du contrôle des navires au titre de l'État du pavillon et de l'État du port.

B. LA STABILITÉ DES CRÉDITS DE FORMATION ET DES ACTIONS EN FAVEUR DES GENS DE MER DOIT ACCOMPAGNER LES EFFORTS D'AMÉLIORATION DE LA GESTION DE L'ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE MARITIME (ENSM)

L'action 02 « Gens de mer et enseignement maritime », qui rassemble 17,4 % des crédits du programme 205, regroupe 27,2 millions d'euros ( AE=CP) consacrés à la formation des gens de mer (marine marchande, pêches maritimes, cultures marines, plaisance professionnelle) et au développement de l'emploi maritime . Les crédits de cette action sont quasiment stables par rapport à 2019 .

Sur cette enveloppe, la formation secondaire des gens de mer , dispensée dans les douze lycées professionnels maritimes (LPM) ainsi que dans les centres agréés en outre-mer qui préparent aux métiers de la pêche et à quelques métiers du transport maritime, bénéficie de 5,4 millions d'euros de crédits.

La formation supérieure , pour sa part, est assurée par l'École nationale supérieure maritime (ENSM) , établissement public créé en 2010, situé sur quatre sites (Le Havre, Saint-Malo, Nantes et Marseille) et qui prépare aux carrières d'officier de la marine marchande et délivre le titre d'ingénieur .

La subvention pour charges de service public versée à l'ENSM s'élève à 18,25 millions d'euros en 2020, soit une somme inférieure de 500 000 euros environ à celle de 2019 . Cette subvention finance à plus de 80 % la masse salariale de l'opérateur, qui représente 233 équivalents temps plein travaillés (ETPT) sous plafond et 16 ETPT hors plafond .

La Cour des comptes dans l'insertion de son rapport public annuel 2018 intitulée « L'École nationale supérieure maritime : un avenir à clarifier », avait estimé que la réforme ayant abouti à la création de l'ENSM avait été mal conduite , que la gouvernance de l'école n'était pas satisfaisante et que le maintien de l'école sur quatre sites était trop coûteux .

Pour répondre à ces critiques, l'ENSM s'est réorganisée sur deux sites principaux (Le Havre et Marseille), ne conservant que des antennes sur les sites de Saint-Malo et de Nantes . Les services de direction sont désormais regroupés sur le site du Havre et une profonde refonte de la gouvernance interne de l'École est en train d'être mise en oeuvre.

Parmi les autres mesures financées par l'action 02, 680 000 euros sont consacrés à la formation continue des gens de mer, afin de couvrir la rémunération d'environ 250 stagiaires et de 1 250 mois de stage de formation continue .

Les actions sociales et médicales menées par la direction des affaires maritimes en faveur des gens de mer (aides aux élèves boursiers, services de santé, etc.) sont financées à hauteur de 1,99 million d'euros par les crédits de l'action 02.

C. LES EXONÉRATIONS DE CHARGES PATRONALES EN FAVEUR DU TRANSPORT MARITIME SERONT STABLES EN 2020 POUR SOUTENIR UN SECTEUR QUI FAIT FACE À UNE TRÈS FORTE CONCURRENCE AU NIVEAU MONDIAL

Dans le contexte de la mondialisation, l'action 03 « Flotte de commerce » vise à soutenir le secteur du transport maritime français , confronté à une concurrence internationale exacerbée, en finançant des allègements de cotisations sociales patronales des entreprises d'armement maritime françaises.

Comme le montre l'objectif 2.2 du programme 205, l'objectif du Gouvernement est de parvenir à stabiliser la flotte de transport sous pavillon français , qui a connu une lente érosion ces dernières années, autour de 14 000 marins français et 300 navires .

Dans cette perspective, l'action 03 regroupe 52,0 % des crédits du programme 205 , soit 81,12 millions d'euros (AE=CP), un montant quasiment identique à celui de 2019. Les armateurs continueront donc à bénéficier l'an prochain de l'application de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue qui était venue élargir le périmètre des exonérations de charges sociales patronales des entreprises d'armement maritime relatives à la famille et à l'assurance chômage : elle l'avait étendu aux entreprises exploitant des navires de transport de fret et de service alors qu'elles étaient jusqu'alors réservées aux navires de transport de passagers .

Au total, les crédits de l'action 03 pour 2020 comprennent à ce stade :

- la compensation pour 41,7 millions d'euros (AE=CP), contre 41,3 millions d'euros en 2018, à l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM) de l'exonération des cotisations sociales patronales maladie, vieillesse et accidents du travail pour les marins des navires battant pavillon français soumis à titre principal à une concurrence internationale effective, en application de l'article 10 de la loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français (RIF) ;

- les compensations à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et à Pôle emploi des exonérations de cotisations sociales patronales relatives à la famille et à l'assurance chômage des marins des navires à passagers bénéficiant de l'article 10 de la loi n° 2005-412 précitée, pour un montant de 30,6 millions d'euros contre 30,4 millions d'euros en 2018 ;

- le remboursement à la Compagnie générale maritime et financière (CGMF) à hauteur de 8,8 millions d'euros (AE=CP) des charges spécifiques de retraite et d'accident du travail des personnels sédentaires de l'ancienne Compagnie générale maritime (CGM) , privatisée en 1996. Le nombre des pensionnés relevant de ce régime en extinction baisse chaque année d'une centaine de personnes .

D. DES CRÉDITS EN FAVEUR DE L'ACTION INTERMINISTÉRIELLE DE LA MER QUI RETROUVENT LEUR NIVEAU HABITUEL APRÈS UN PIC D'INVESTISSEMENTS EN 2019

L'action 04 « Action interministérielle de la mer » regroupe 11,2 millions d'euros en AE et 13,9 millions d'euros en CP, des montants en forte baisse de 7,9 millions d'euros en AE (-43,9 %) mais en hausse de 0,9 million d'euros en CP (+6,9 %) par rapport à 2019. La diminution des crédits en AE s'explique par les engagements exceptionnels qui avaient été souscrits en 2019 pour l'achat de nouveaux patrouilleurs.

Ces crédits, qui représentent désormais 7,2 % des crédits du programme 205 , sont consacrés à l'action civile de l'État en mer (AEM) , au dispositif POLMAR terrestre (lutte contre les pollutions maritimes accidentelles) et à la plaisance .

L'action de l'État en mer (AEM) , dotée de 9,3 millions d'euros en AE et de 12,0 millions d'euros en CP, regroupe notamment les crédits dédiés au fonctionnement technique du dispositif de contrôle et de surveillance des activités maritimes (police des pêches, de la navigation, de la sécurité des navires, des épaves, de l'environnement) et ceux relatifs à la surveillance des pêches dans les zones des terres australes et antarctiques françaises (TAAF) .

Dans le cadre de la troisième année de mise en oeuvre du plan de modernisation, l'année 2020 verra l'achat d'un nouveau patrouilleur et le paiement du patrouilleur de 40 mètres pour la Méditerranée acheté en 2019.

1,2 million d'euros (AE=CP), soit un niveau légèrement inférieur à celui de 2019, sont consacrés au fonctionnement de POLMAR-Terre et à l'amélioration des outils de lutte contre la pollution (mise en place de barrages flottants, nettoyage du littoral, stockage et transport des déchets).

460 000 euros , contre 480 000 euros en 2019, sont allouées aux dépenses de plaisance (délivrance des titres de navigation, constitution d'un registre unique d'immatriculation des navires), la France comptant 5 millions de plaisanciers réguliers .

L'action 05 « Soutien au programme » regroupe les 6,2 millions d'euros (AE=CP), contre 6,5 millions d'euros en 2019, soit 4 % des crédits du programme 205 , qui permettent d'assurer le financement des dépenses de fonctionnement des services déconcentrés des affaires maritimes de l'administration centrale de la direction des affaires maritimes : fonctionnement courant et immobilier des sièges, formation des agents, frais de mission, etc.

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE
« SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉS DE VOYAGEURS »

Depuis 2011, l'État est devenu l'autorité organisatrice des lignes de trains d'équilibre du territoire (TET) , qui jouent un rôle important en matière d'aménagement du territoire , et sont exploitées depuis le 1 er janvier 2012 sous la dénomination « Intercités ».

En tant qu'autorité organisatrice, l'État détermine le plan de transport que doit réaliser SNCF Mobilités (fréquence des trajets par lignes, nombres d'arrêts à réaliser par gares).

En contrepartie, il verse chaque année à l'opérateur ferroviaire des compensations 24 ( * ) pour financer une partie de son déficit résultant de l'exploitation des TET ainsi que le programme pluriannuel de maintenance et de régénération de leur matériel roulant .

Les obligations respectives de l'opérateur ferroviaire et de l'État sont formalisées dans des conventions d'exploitation 25 ( * ) , qui s'inscrivent dans le cadre déterminé par le règlement européen (CE) n° 1370/2007 dit « règlement OSP » 26 ( * ) (obligations de service public), sur le fondement duquel l'exploitation des lignes d'équilibre du territoire a pu être qualifiée d'« obligation de service public » susceptible de faire l'objet d'une compensation par l'État 27 ( * ) .

La convention actuellement en vigueur, valable pour la période 2016-2020 , a été adoptée le 27 février 2017 . Elle traduit les profondes évolutions de l'offre TET survenues depuis quatre ans, avec notamment le transfert de nombreuses lignes aux régions .

Les compensations versées par l'État à SNCF Mobilités , mais également celles qui sont désormais prévues pour les régions dans le cadre du transfert de certaines lignes TET, sont portées par le compte d'affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » , qui a été créé par l'article 65 de la loi de finances pour 2011 28 ( * ) , et comporte deux programmes :

- le programme n° 785 « Exploitation des services nationaux de transport conventionnés » , dont les crédits s'élèveront à 246,1 millions d'euros en 2020 en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), contre 286,2 millions d'euros en 2019, soit une baisse de - 14 % ;

- le programme n° 786 « Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés » , qui retracera 66,6 millions d'euros de crédits (AE=CP) en 2020, contre 73,0 millions d'euros en 2019, soit une baisse de - 8,8 % .

Les crédits du CAS représenteront au total 312,7 millions d'euros (AE=CP) en 2020, un montant en baisse de - 13 % par rapport aux 359,2 millions d'euros prévus par la loi de finances initiale pour 2019.

Crédits inscrits au CAS « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs »
en 2020 (AE=CP)

(en millions d'euros)

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2020

2018

(exécuté)

2019

(LFI)

2020
(PLF)

Variation 2019-2020

01-Contribution à l'exploitation des services nationaux de transport conventionnés

545,3

197,0

167,9

- 14,8 %

02-Frais d'enquêtes, d'études et de conseil relatifs à l'exploitation des services nationaux de transport conventionnés

0,1

1,0

1,5

+ 50 %

03- Contributions versées aux régions au titre de l'exploitation des services nationaux de transports antérieurement conventionnés

-

88,2

76,7

13,04 %

Total programme 785

545,3

286,2

246,1

- 14,0 %

01-Contribution au matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

162,6

73,0

66,6

- 8,8 %

02-Frais d'enquêtes, d'études et de conseil relatifs au matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

-

-

-

-

Total programme 786

162,6

73,0

66,6

- 8,8 %

TOTAL CAS

708 ,0

359,2

312,7

- 13,0 %

Le compte d'affectation spéciale est financé par trois taxes affectées , qui assurent son équilibre budgétaire.

La première ressource du CAS est le produit de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF) , dont le montant s'élèvera à 226 millions d'euros en 2020, soit la même somme qu'en 2019 et en 2018, supérieure de 20 millions d'euros aux montants perçus en 2017 et en 2016.

La deuxième ressource du CAS est la contribution de solidarité territoriale (CST) , qui devrait rapporter 16 millions d'euros au CAS en 2020, soit, là encore, le même montant qu'en 2019 et en 2018.

Jusqu'en 2016, la CST représentait une ressource majeure du CAS, puisque son produit lui rapportait 116 millions d'euros .

Mais, dans le cadre de la convention d'exploitation des « trains d'équilibre du territoire » 2016-2020 signée le 27 février 2017 , l'État s'est engagé à ce que cette taxe pesant uniquement sur le chiffre d'affaires de SNCF Mobilités diminue de 50 millions d'euros en 2017 puis de 74 millions d'euros sur chacune des années 2018 à 2022 par rapport au montant atteint en 2016.

Cette diminution de la CST visait à alléger la fiscalité pesant sur l'activité TGV de SNCF Mobilités .

Enfin, le CAS perçoit une fraction de la taxe d'aménagement du territoire (TAT) , pour un montant fixé à 70,7 millions d'euros par l'article 32 du présent projet de loi de finances pour 2020.

Ces dernières années, le produit de TAT affecté au CAS avait augmenté substantiellement afin de financer la hausse de ses crédits mais également pour compenser la baisse des recettes de la contribution de solidarité territoriale (CST) . Le montant de TAT affecté au CAS était ainsi passé de 19 millions d'euros en 2016 à 42 millions d'euros en 2017 puis 141,2 millions d'euros en 2018. Les crédits du CAS ayant baissé une première fois en 2019, le montant de TAT qui lui était affecté a été revu à la baisse à 117,2 millions d'euros en 2019. C'est de nouveau par une diminution de la TAT qui lui est affectée que se traduit la baisse de 46,5 millions d'euros des crédits du CAS.

Les trois taxes affectées au compte d'affectation spéciale

1) La taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF), codifiée à l'article 235 ter ZF du code général des impôts, est due par les entreprises de service de transport ferroviaire de voyageurs . Afin de ne pas pénaliser les nouveaux entrants, seules sont redevables les entreprises ferroviaires réalisant un chiffre d'affaires soumis à la CST supérieur à 300 millions d'euros . À l'instar de la CST évoquée ci-dessous, la TREF pèse pour l'heure uniquement sur les comptes de SNCF Mobilités .

2) Codifiée à l'article 302 bis ZC du code général des impôts, la contribution de solidarité territoriale (CST) est due par les entreprises de service de transport ferroviaire de voyageurs . Cette taxe est assise sur le montant total , déduction faite des contributions versées par l'État en compensation des tarifs sociaux et conventionnés, du chiffre d'affaires de SNCF Mobilités relatif aux prestations de transport ferroviaire de voyageurs non conventionnés , et aux prestations commerciales qui leur sont directement liées , effectuées entre deux gares du réseau ferré national.

Sont donc exclus de l'assiette les services de transport ferroviaire conventionnés par les régions (pour les TER), Île-de-France Mobilités (pour les RER) ou l'État (pour les TET), ce qui revient à ce que la CST soit essentiellement supportée par l'activité grande vitesse (TGV) de SNCF Mobilités.

3) La taxe d'aménagement du territoire (TAT) est prévue à l'article 302 bis ZB du code général des impôts est acquittée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes , à raison du nombre de kilomètres parcourus par les usagers. C'est la seule ressource du CAS qui n'est pas financée par la SNCF et qui obéit à une logique de report modal, de la route vers le rail .

Source : commission des finances du Sénat

I. CES QUATRE DERNIÈRES ANNÉES, L'OFFRE DE LIGNES DE TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE A ÉTÉ PROFONDÉMENT REVUE ET A FAIT L'OBJET D'UNE NOUVELLE CONVENTION ENTRE L'ETAT ET SNCF MOBILITÉS

A. FRÉQUENTATION EN BAISSE, SATISFACTION DES CLIENTS EN RECUL, DÉGRADATION DE LA QUALITÉ DE SERVICE : LA RÉFORME DES LIGNES TET ÉTAIT INDISPENSABLE

Les lignes TET présentaient depuis longtemps un déficit d'exploitation qui s'est aggravé ces dernières années : alors que trois lignes étaient encore rentables en 2011 , elles sont désormais toutes déficitaires .

De fait, la fréquentation des TET a diminué de 20 % depuis 2011 29 ( * ) pour atteindre 34 % de taux de remplissage en 2016 , notamment en raison de l'essor du covoiturage puis de la libéralisation du transport par autocar à partir du second semestre 2015, alors que, dans le même temps, les charges d'exploitation n'ont fait que s'accroître en raison du vieillissement du matériel roulant .

En outre, la satisfaction des clients n'avait cessé de reculer en raison d'une qualité de service insuffisante, d'une dégradation de la ponctualité des trains et de dessertes trop souvent inadaptées aux évolutions des habitudes de mobilité.

En se basant sur les conclusions du rapport remis en 2015 par la commission « TET d'avenir » présidée par l'ancien député Philippe Duron, le Gouvernement a procédé à une réforme en profondeur de l'offre de lignes TET , qui s'est traduite :

- par des fermetures de lignes de nuit ;

- par des transferts de lignes de jour aux régions ;

- par la signature d'une nouvelle convention entre l'État et SNCF Mobilités pour la période 2016-2020.

Le fait que les crédits que porte le programme n° 785 « Exploitation des services nationaux de transport conventionnés » , destinés à compenser les déficits d'exploitation des lignes TET, passent de 286,2 millions d'euros en 2019 à 246,1 millions d'euros en 2020, soit une baisse de - 14,8 % , tend à montrer que cette réforme produit ses effets en termes de réduction de dépenses pour l'État .

B. AU TERME DE LA RÉFORME DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE (TET), L'ÉTAT N'A CONSERVÉ QUE DEUX LIGNES DE NUIT ET SIX LIGNES DE JOUR

1. Une réforme qui amène l'État à se concentrer sur des lignes structurantes ou qui jouent un rôle essentiel en matière d'aménagement du territoire

Prenant acte du fait que les trains de nuit représentaient 25 % du déficit alors qu'ils ne transportaient que 3 % des voyageurs qui utilisaient les lignes Intercités 30 ( * ) , le Gouvernement a décidé de cesser progressivement de financer les six lignes TET de nuit les plus déficitaires entre le 1 er octobre 2016 et le 1 er octobre 2017 31 ( * ) .

Seules les lignes Paris-Briançon et Paris-Rodez-Latour-de-Carol ont conservé un aller-retour quotidien en tant que lignes d'aménagement du territoire , « indispensables en raison de l'absence d'une offre alternative suffisante pour les territoires concernés », ainsi que le précise le projet annuel de performances pour 2020.

En ce qui concerne les lignes de jour , le Gouvernement a confirmé qu'il restait bien l'autorité organisatrice des lignes de longue distance structurantes au niveau national , à savoir les trois lignes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse , Paris-Clermont-Ferrand et Bordeaux-Toulouse-Marseille . Des schémas directeurs , élaborés conjointement par l'État, SNCF Mobilités et SNCF Réseau, en concertation avec les acteurs locaux, devraient être prochainement finalisé pour chacune d'entre elles .

Sont également maintenues sous l'autorité de l'État, au titre de l'aménagement du territoire les trois lignes Nantes-Bordeaux , Toulouse-Hendaye et Nantes-Lyon .

Lignes d'aménagement du territoire
dont l'État reste l'autorité organisatrice

Lignes de nuit

Lignes de jour structurantes

Lignes de jour d'aménagement du territoire

Paris-Briançon

Paris-Orléans-Limoges-Toulouse

Nantes-Bordeaux

Paris-Rodez-Latour-de-Carol

Paris-Clermont-Ferrand

Toulouse-Hendaye

Bordeaux-Toulouse-Marseille

Nantes-Lyon

Source : projet annuel de performances pour 2019

Selon le projet annuel de performances pour 2020, « cette démarche permettra d'améliorer à court, moyen et long termes la qualité du service offert aux voyageurs et la compétitivité de l'offre TET , et de définir une véritable stratégie de desserte TET articulée avec les services TGV et TER ».

2. En 2020, la compensation versée par l'État à SNCF Mobilités diminuera de 14,8 %

En vertu de la convention signée par l'État et SNCF Mobilités, le déficit d'exploitation des TET est évalué chaque année sur la base des prévisions sur l'écart entre la somme des produits (trafic et compensations tarifaires) et les charges d'exploitation, ces dernières incluant l'amortissement du matériel roulant. Il représente habituellement environ 20 % du coût d'exploitation .

L'action 01 du programme 785 « Exploitation des services nationaux de transport conventionnés » regroupe les crédits permettant de contribuer à la couverture de ce déficit . Leur montant représentera 167,9 millions d'euros en 2020, un montant en baisse de - 14,8 % par rapport aux 197,0 millions d'euros prévus en 2019.

Il convient de noter que les crédits de l'action 01 sont supposés assurer un « bénéfice raisonnable » à l'exploitant afin de rémunérer son risque 32 ( * ) .

En l'espèce, bien que SNCF Mobilités ait bénéficié d'une rémunération de 25 millions d'euros chaque année entre 2011 et 2014, elle a enregistré un déficit cumulé de près de 60 millions d'euros sur la même période en raison de son activité TET. Depuis 2015, d'un commun accord entre les parties, la compensation ne prévoit plus de rémunération de l'exploitant .

Depuis 2012, l'action 02 du programme 785 porte les dépenses relatives aux enquêtes de satisfaction et aux frais d'études et de conseil juridique, financier ou technique.

Ces dépenses s'élèveront à 1,5 million d'euros en 2020 (contre 1,0 million d'euros en 2019), une somme relativement importante qui s'explique par les suites de la réforme des TET et par la nécessité d'améliorer la capacité d'expertise de l'État dans l'exercice de son rôle d'autorité organisatrice.

C. LA COMPENSATION VERSÉE PAR L'ETAT AUX RÉGIONS AU TITRE DES LIGNES QU'IL LEUR A TRANSFÉRÉES DIMINUERA EN 2020

À la suite d'un important travail de concertation avec les régions, l'État leur a transféré de nombreuses lignes TET d'intérêt local dont l'offre était souvent imbriquée avec l'offre TER et qui étaient devenues infrarégionales depuis le passage en 2015 de 22 régions métropolitaines à 13 grandes régions.

Six accords de reprises de ligne TET ont ainsi été conclus entre l'État et les régions Normandie, Centre-Val de Loire, Nouvelle Aquitaine, Hauts-de-France, Grand-Est et Occitanie 33 ( * ) .

En contrepartie du transfert de ces lignes aux régions , l'État s'est engagé à renouveler , via l'AFITF, une partie du matériel roulant des lignes transférées (voir infra ) et à prendre à sa charge une partie de leur déficit d'exploitation , selon des modalités propres à chaque région et tenant compte du déficit actuel des lignes TET transférées et de la date de leur reprise par les régions concernées .

Les crédits concernés, retracés dans l'action 03 « Contributions versées aux régions au titre de l'exploitation des services nationaux de transports antérieurement conventionnés » du programme 785 passeront de 88,2 millions d'euros en 2019 à 76,7 millions d'euros en 2020 , soit une diminution de -13,0 % , conformément aux accords signés avec les différentes régions.

Sur cette somme, 13 millions d'euros seront versés à la région Grand Est, 39,2 millions d'euros à la région Centre-Val-de-Loire, 5 millions d'euros à la région Nouvelle Aquitaine, 4,5 millions d'euros à la région Occitanie et 15 millions d'euros à la région Hauts-de-France.

Le tableau ci-après rappelle le contenu financier des accords conclus entre l'État et les régions qui ont repris des lignes TET , tant en ce qui concerne la participation de l'État au financement de leur déficit d'exploitation, qu'en ce qui concerne le financement de leur nouveau matériel roulant (voir infra ).

Les accords de transfert de lignes TET aux régions signés par l'État

Région

Date de signature du protocole d'accord

Lignes transférées

Participation de l'État au financement du matériel roulant / matériel financé par l'État

Participation de l'État au financement de l'exploitation

Normandie

25/04/2016

Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville, Paris-Rouen-Le Havre, Paris-Granville, Caen-Le Mans-Tour et Paris-Evreux-Serquigny

720 millions d'euros

-

Centre-Val de Loire

19/01/2017

Paris-Orléans-Tours, Paris-Bourges-Montluçon et Paris-Montargis-Nevers

460 millions d'euros

49 millions d'euros par an en 2018 et 2019, 39,2 millions d'euros en 2020, 34,3 millions d'euros en 2021 et 24,5 millions d'euros en 2022 et au-delà

Nouvelle Aquitaine

14/02/2017

Bordeaux-La Rochelle, Bordeaux-Limoges et Bordeaux-Ussel

5 rames Alstom Régiolis bimodes

6,7 millions d'euros par an en 2018 et 2019 puis 5 millions d'euros par an de 2020 à 2022

Hauts-de-France

16/03/2017

Paris-Amiens-Boulogne et Paris-Saint-Quentin-Maubeuge/Cambrai

250 millions d'euros + 10 rames Alstom Régiolis bimodes

15 millions d'euros par an à compter de 2019

Grand-Est

03/05/2017

Reims-Dijon, Hirson-Metz et Paris-Troyes-Belfort

19 rames Alstom Coradia Liner

13 millions d'euros par an à compter de 2018

Occitanie

10/05/2017

Clermont-Ferrand-Nîmes et Clermont-Ferrand-Béziers (à titre expérimental)

3 rames Alstom Coradia Liner

4,5 millions d'euros par an pour la ligne Clermont-Ferrand-Nîmes + 2,3 millions d'euros par an en 2017 et 2018 pour la ligne Clermont-Ferrand-Béziers

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

II. LE MATÉRIEL ROULANT DES LIGNES TET EST EN COURS DE RENOUVELLEMENT GRÂCE À DES SUBVENTIONS DE L'AFITF, QUI REPRÉSENTENT PLUS DE 3,5 MILLIARDS D'EUROS

Le parc affecté à l'exploitation des TET est aujourd'hui composé de 256 locomotives de ligne , de 15 automoteurs tri-caisses et de 1 700 voitures , quasi exclusivement des voitures Corail. Propriété de la SNCF, son âge moyen dépasse les 38 ans .

Il convient donc d'assurer son renouvellement pour améliorer la régularité et le confort des lignes TET.

A. LA DIMINUTION DE 8,8 % EN 2020 DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA MAINTENANCE ET AU RENOUVELLEMENT DU MATÉRIEL ROULANT PORTÉS PAR LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE...

Le programme 786 « Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés », doté de 66,6 millions d'euros en 2020 contre 73,0 millions d'euros en 2019, soit une baisse de - 8,8 % , couvre le financement de la part de la compensation des investissements relatifs à la maintenance et à la régénération des matériels roulants affectés à l'exploitation des TET.

Le programme finance donc les dotations pour amortissements et frais financiers relatifs, d'une part, au programme pluriannuel de maintenance et de régénération du matériel roulant existant mis en oeuvre pendant la durée de la convention, et d'autre part, aux investissements qui ont été réalisés avant l'entrée en vigueur de la convention mais n'ont pas encore été amortis .

La convention d'exploitation des TET 2016-2020 signée par l'État et SNCF Mobilités prévoit de consacrer environ 165 millions d'euros sur cinq ans pour assurer le maintien en condition opérationnelle du matériel roulant existant jusqu'à son renouvellement et pour rénover les matériels des lignes de nuit conservées par l'État .

La baisse tendancielle des crédits portés par ce programme traduit toutefois le vieillissement du matériel actuel des lignes TET dont l'État est l'autorité organisatrice et montre qu'il faut rapidement le renouveler, comme le prévoit l'ambitieux programme d'investissements porté par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) en la matière.

B. ... NE DOIT PAS MASQUER L'EFFORT FINANCIER CONSIDÉRABLE - PLUS DE 3,5 MILLIARDS D'EUROS - QUE VA CONSENTIR L'AFITF SUR CE POSTE DE DÉPENSES EN 2020 ET DANS LES ANNÉES QUI SUIVRONT

Ces dernières années, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) a été chargée de financer d'importants programmes de renouvellement du matériel roulant des lignes TET .

Le tableau ci-dessous dresse une liste, amenée à se compléter dans les années à venir, des projets que l'Agence va devoir financer, et qui représentent déjà un montant total de plus de 3,5 milliards d'euros .

Montant des financements apportés par l'AFITF déjà décidés pour le renouvellement du matériel roulant des lignes TET

Année de signature de la convention

Matériel roulant

Montant financé par l'AFITF

Lignes bénéficiaires

Autorité organisatrice

2013

34 rames
« Coralia Liner »

510 millions d'euros

Paris-Troyes-Belfort, Nantes-Bordeaux
et Nantes-Lyon

Région
Grand Est et État

2016

40 rames
« Omneo Premium »

720 millions d'euros

Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre

Région Normandie

2017

30 rames
« Coradia Liner »

362 millions d'euros

Paris-Boulogne, Toulouse-Hendaye, Bordeaux-La Rochelle, Bordeaux-Limoges, Bordeaux-Ussel, le Cévenol et la desserte de Montluçon

Régions et État

2018

19 rames
« Regio 2N »

250 millions d'euros

Paris-Amiens-Boulogne et Paris-Saint-Quentin-Maubeuge/Cambrai

Région
Hauts-de-France

2019

32 rames
« Omneo Premium »

480 millions d'euros

Paris-Orléans-Tours, Paris-Bourges-Montluçon et Paris-Montargis-Nevers

Région
Centre-Val-de-Loire

2019
ou 2020

Nombre de rames non encore déterminé

1,2 milliard d'euros

Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, Paris-Clermont-Ferrand et Bordeaux-Toulouse-Marseille

État

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Si les montants en jeux apparaissent considérables , ils n'en demeurent pas moins indispensables pour améliorer la qualité de service des TET et rendre ces lignes de nouveau attractives pour les clients de la SNCF .

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du Gouvernement, un amendement visant à augmenter de 4,5 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) les crédits du programme 205 « Affaires maritimes » pour permettre une hausse de 73 % de la dotation budgétaire versée par l'État à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) . En contrepartie, cet amendement prévoyait une baisse de 2,5 millions d'euros (AE=CP) des crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transport » permise par une réévaluation à la baisse du besoin de crédits au titre des versements à SNCF Réseau pour la compensation fret.

L'Assemblée nationale a également adopté un amendement d'Eric Cocquerel, rapporteur spécial, et de Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, visant à augmenter de 500 000 euros les crédits du programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » pour financer la création de 8 équivalents temps plein travaillés (ETPT) supplémentaires au bénéfice des parcs nationaux .

Cette hausse était compensée par une baisse de 500 000 euros des crédits consacrés à l'action n° 52 « Transport aérien » du programme 203 « Infrastructures et services de transport ».

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a minoré , à l'initiative du Gouvernement, les crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transport » de 12 150 148 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP). Elle a également minoré de 820 000 euros (AE=CP) les crédits du programme 205 « Affaires maritimes ». Il s'agissait dans les deux cas, selon le Gouvernement, de tenir compte des votes intervenus dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2020.

L'Assemblée nationale a également tire les conséquences, sur les programmes 203 et 205, des décisions annoncées lors du rendez-vous salarial 2019 concernant la revalorisation du barème de remboursement des frais de repas pour les agents publics en formation ou en mission , avec un rehaussement de la prise en charge de 15,25 euros par repas à 17,50 euros . À cette fin, elle a majoré de :

- 49 852 euros (AE=CP) les crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transport » ;

- 32 282 euros (AE=CP) les crédits du programme 205 « Affaires maritimes ».

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 76

Reprise par l'État de la dette de SNCF Réseau à hauteur
de 25 milliards d'euros

Commentaire : le présent article organise la reprise par l'État de 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau via un système de prêts miroirs impliquant la Caisse de la dette publique (CDP).

I. LE DROIT EXISTANT

SNCF Réseau est l'opérateur chargé d'assurer la gestion, l'entretien, la modernisation et l'exploitation du réseau ferré national en vertu de l'article L. 2111-9 du code des transports qui dispose que « SNCF Réseau est le gestionnaire du réseau ferré national ».

Établissement public industriel et commercial (EPIC) ayant succédé à Réseau ferré de France (RFF) à l'issu du vote de la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire, SNCF Réseau deviendra une société anonyme (SA) le 1 er janvier 2020 ainsi que le prévoit la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire.

Ces dernières décennies, SNCF Réseau a été chargée de financer la construction de plusieurs lignes à grande vitesse (LGV) très couteuses . En conséquence, le réseau ferré structurant a souffert d'un sous-investissement chronique , si bien qu'il est désormais devenu impératif de le remettre à niveau dans meilleurs délais . C'est tout l'objet du Grand plan de modernisation du réseau mis en place en 2013 et qui monte actuellement en puissance.

Confrontée à cette tâche considérable, l'entreprise pâtit d'une situation financière très dégradée , principalement en raison des choix politiques ayant présidé à la construction des lignes LGV susmentionnées et qui ont conduit à un emballement de son endettement à partir de 2010.

La Cour des comptes, dans son rapport de décembre 2018 consacré à SNCF Réseau 34 ( * ) écrivait ainsi que « le modèle ferroviaire français ne permet pas aujourd'hui d'assurer l'équilibre financier de SNCF Réseau. L'État n'a pas suffisamment accompagné le gestionnaire d'infrastructure dans le financement des investissements , alors que les efforts conjointement consentis par l'établissement, tant en termes de développement que de renouvellement du réseau, étaient exceptionnels ; il a laissé dériver la dette du gestionnaire d'infrastructure ».

Comme le montre le graphique ci-dessous, la dette nette de SNCF Réseau, qui représentait déjà 20 milliards d'euros à la création de Réseau ferré de France (RFF) en 1997, a franchi la barre des 30 milliards d'euros en 2012 puis celle des 40 milliards d'euros en 2015, la barre des 50 milliards d'euros devant être franchie en 2019.

Le contrat signé par l'État et SNCF Réseau en 2017 - avant la réforme du Pacte ferroviaire - prévoyait qu'elle atteindrait même 60,6 milliards d'euros en 2026, un niveau clairement insoutenable .

Évolution de la dette nette valeur de remboursement de SNCF Réseau

Source : Cour des comptes d'après les données du rapport d'information de l'Assemblée nationale du 19 octobre 2016 et du contrat de performance de SNCF Réseau pour la période 2017-2026

Les derniers chiffres officiels disponibles , à savoir ceux du 31 décembre 2018, montrent que la dette financière nette de SNCF Réseau en valeur de remboursement hors ICNE 35 ( * ) représentait ainsi 48,2 milliards d'euros , un montant en hausse de 3 milliards d'euros de plus par rapport à l'année précédente.

Cette dette exceptionnellement élevée induit pour SNCF Réseau des ratios financiers très dégradés avec par exemple un ratio de dette nette / EBITDA plus de deux fois supérieur aux gestionnaires des réseaux ferrés anglais et autrichiens et plus de quatre fois supérieur à celui du gestionnaire du réseau ferré allemand.

Elle implique également des frais financiers générés par cette dette de 1,5 milliard d'euros par an , une somme très lourde qui pèse fortement sur les comptes de l'entreprise et compromet tout rétablissement financier.

Cette dette était depuis longtemps considérée comme problématique alors même que SNCF Réseau était un EPIC bénéficiant à ce titre de la garantie implicite de l'État.

La transformation de la holding SNCF et de ses deux sociétés filles SNCF Mobilités et SNCF Réseau en sociétés anonymes à capitaux publics à compter du 1 er janvier 2020 change considérablement la donne .

En effet, le maintien pour une société anonyme de ratios financiers aussi négatifs que ceux de SNCF Réseau serait susceptible de provoquer une importante dégradation de la notation de crédit de SNCF Réseau et du groupe SNCF dans son ensemble , la société-mère du groupe SNCF ayant vocation à assurer les financements obligataires de l'ensemble du groupe, y compris celui de SNCF Réseau.

Or, une baisse de la note de la société-mère SNCF, émetteur unique du groupe sur les marchés financiers, aurait pour conséquence une hausse de son coût de financement , un accroissement de la charge d'intérêt de sa dette et une moindre profondeur de marché .

C'est pour assurer la viabilité économique de la nouvelle SNCF issue du pacte ferroviaire de 2018 que l'État s'est engagé le 25 mai 2018 à reprendre 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau dans le cadre de la transformation de l'opérateur en société anonyme à capitaux publics . Cette reprise se fait en deux temps : 25 milliards d'euros repris en 2020 puis 10 milliards d'euros repris en 2022.

Il convient de noter que la reprise partielle de la dette de SNCF Réseau par l'État n'aura en revanche aucun impact sur le déficit public et sur la dette publique , la dette de SNCF Réseau étant désormais considérée comme intégralement publique (voir l'encadré infra ).

La dette de SNCF Réseau considérée
comme une dette publique à compter de l'année 2016

Dans un communiqué de presse en date du 6 septembre 2018, l'Insee a annoncé sa décision de reclasser , en accord avec Eurostat, SNCF Réseau dans la catégorie des administrations publiques (APU) à compter de l'année 2016.

SNCF Réseau avait été classé hors APU en 1997 car ses recettes marchandes représentaient plus de 50 % de ses coûts de production. L'Insee a estimé que ce n'était plus le cas depuis 2016 , compte tenu des nouvelles préconisations européennes pour le calcul de la consommation de capital fixe (CCF) .

La consommation de capital fixe (CCF), qui fait partie des coûts de production de SNCF Réseau, correspond à la dépense d'investissement que devrait consentir chaque année l'entreprise pour compenser l'usure et l'obsolescence des lignes ferroviaires en service .

Pour calculer sa CCF, SNCF Réseau se base sur une valeur des infrastructures calculée sur la base des flux futurs de revenus générés par leur exploitation. Cette valeur est très sensible à la fois aux hypothèses retenues en matières de durée de vie des lignes ferroviaires , mais également de trajectoire des péages futurs .

Soucieux de limiter au maximum le risque d'une sous-estimation des coûts de production, Eurostat a demandé à l'ensemble des pays européens de retenir désormais des hypothèses hautes quant au calcul de la CCF .

L'Insee a procédé à une nouvelle estimation de la CCF de SNCF Réseau qui l'a conduit à constater que la part des coûts de production de SNCF Réseau couverte par des recettes marchandes , si elle était bien supérieure à 50 % pour 2015 et les années antérieures, était passée sous ce seuil en 2016 , en 2017 et qu'il en irait très probablement de même en 2018 .

L'Insee a donc décidé de reclasser SNCF Réseau dans la catégorie des administrations publiques à compter de 2016 , en considérant désormais que cet opérateur est un organisme divers d'administration centrale (ODAC) .

Le fait que SNCF Réseau soit désormais considérée comme une administration publique (en l'occurrence, un ODAC) en comptabilité nationale entraîne deux conséquences :

- son déficit doit être comptabilisé dans le déficit public ;

- sa dette doit être entièrement reclassée en dette publique , et non plus seulement une fraction de sa dette comme c'était le cas depuis 2014.

L'Insee a donc revu à la hausse le déficit public de 3,2 milliards d'euros en 2016 et de 2,2 milliards d'euros en 2017 pour prendre en compte le déficit de SNCF Réseau .

Dans le même temps, la requalification de l'intégralité de la dette de SNCF Réseau en dette publique à partir de 2016 conduit à majorer la dette publique de la France de 35,8 milliards d'euros en 2016 et de 39,4 milliards d'euros en 2017.

Cette opération comptable entraîne une forte hausse du poids de la dette publique par rapport au PIB, passé de 95,6 % en 2015 à 98,2 % en 2016 puis 98,5 % en 2017.

Pour mémoire, 10 milliards d'euros de dettes de SNCF Réseau étaient déjà comptabilisés dans la dette publique depuis 2014 et étaient assimilés à une dette de l'État . L'intégralité de la dette de SNCF Réseau étant désormais considérée comme celle d'un ODAC , les 10 milliards d'euros précités ne seront plus attribués à l'État.

Source : commission des finances du Sénat

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Lors des discussions relatives à la réforme ferroviaire de 2018, le Gouvernement, par la voix du Premier ministre, s'était engagé le 25 mai 2018 à reprendre 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau en deux étapes : 25 milliards d'euros au 1 er janvier 2020 puis 10 milliards d'euros au 1 er janvier 2022.

Le présent article 76 prévoit les dispositions législatives nécessaires à la réalisation de la première étape, à savoir la reprise par l'État de la dette de SNCF Réseau à hauteur de 25 milliards d'euros à compter du 1 er janvier 2020 .

Le dispositif prévu est un mécanisme de prêts miroirs impliquant l'État , SNCF Réseau et un troisième intervenant, la Caisse de la dette publique (CDP) .

Source : SNCF Réseau

Le paragraphe I de l'article 76 prévoit tout d'abord que la Caisse de la dette publique (CDP) est autorisée à contracter avec SNCF Réseau tout prêt ou emprunt, en euros, dans la limite de 25 milliards d'euros de capital à rembourser , incluant l'indexation constatée s'agissant des emprunts indexés sur l'inflation.

Cette autorisation signifie que dès la loi de finances pour 2020 promulguée, SNCF Réseau et la CDP pourront conclure des prêts aux caractéristiques identiques , qualifié de « prêts miroirs » : montants de 25 milliards d'euros en 2020, mêmes échéanciers de paiement des intérêts et du principal, etc. Les contrats de prêts étant symétriques, aucun flux financier ne sera échangé .

Les deux prêts miroirs sont des prêts synthétiques constitués sur la base de l'encours de dette de SNCF Réseau vis-à-vis de ses créanciers (après prise en compte des instruments de couverture) : ils visent à répliquer les caractéristiques (maturités, taux d'intérêt, etc.) de la dette financière de SNCF Réseau .

Les flux de principal et d'intérêts de ces deux prêts synthétiques représentent ainsi une quote-part des flux payés par SNCF Réseau à ses créanciers , dans une proportion égale à la part de 25 milliards d'euros sur la dette totale de SNCF Réseau, soit 47,7 % (voir infra ).

La conclusion des prêts miroirs avec la CDP aura instantanément pour conséquence une augmentation de 25 milliards d'euros de l'actif et du passif de SNCF Réseau , puisqu'une créance de 25 milliards d'euros sur la CDP et un emprunt de 25 milliards d'euros auprès de la CDP seront simultanément inscrits dans son bilan.

La Caisse de la dette publique

La Caisse de la dette publique est un établissement public à caractère administratif (EPA) créé par l'article 125 de la loi n° 2002-1575 du 30 décembre 2002 de finances pour 2003 et modifiant la loi n° 86-824 du 11 juillet 1986 de finances rectificative pour 1986. Elle a pour objet de soutenir sur les marchés financiers la qualité de la signature de l'État. Elle peut à cette fin acheter des titres émis par l'État, garantis par lui ou émis par des établissements ou des entreprises publics, en vue de leur conservation, leur annulation ou leur cession. Elle peut également se voir attribuer tout titre de dette négociable émis par l'État dans le cadre de l'autorisation donnée annuellement au ministre chargé de l'économie et elle est autorisée à prêter et à vendre ces titres. Elle constitue une contrepartie éligible au sens de l'article 30 de la directive 2014/65/UE du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers.

Source : direction générale du Trésor

Dans un deuxième temps, dès lors que ces deux prêts miroirs auront été mis en place, l'État viendra remplacer SNCF Réseau comme débiteur de la CDP par une novation au contrat. Cette substitution sera autorisée par un arrêté des ministres chargés des finances et du budget.

Cette seconde opération est prévue par le paragraphe II de l'article 76 qui dispose que l'État est autorisé à reprendre à compter du 1 er janvier 2020 les droits et obligations afférents aux contrats d'emprunt contractés auprès de la CDP par SNCF Réseau dans la limite de 25 milliards d'euros de capital à rembourser, incluant l'indexation constatée s'agissant des emprunts indexés sur l'inflation.

Une fois cette seconde opération réalisée, l'État sera endetté de 25 milliards d'euros vis-à-vis de la CDP tandis que SNCF Réseau détiendra une créance de 25 milliards d'euros sur la CDP .

La reprise par l'État de la dette de SCNF Réseau vis-à-vis de la CDP se traduira au niveau comptable par une augmentation instantanée des capitaux propres de l'entreprise , à hauteur de 25 milliards d'euros, puisque cette opération sera inscrite directement dans le compte de report à nouveau de l'entreprise.

À l'issue des deux opérations susmentionnées, SNCF Réseau disposera donc de capitaux propres renforcés de 25 milliards d'euros .

Au cours de la durée de vie des prêts, chaque paiement de principal et d'intérêts payé par SNCF Réseau à ses créanciers pour le remboursement de sa dette sera partiellement compensé par un flux venant de l'État et transitant par la CDP pour faire en sorte que la SNCF n'ait pas à assumer le service de la dette correspondant à la part de 25 milliards d'euros reprise par l'État.

Concrètement, cela signifie que l'État versera à SNCF Réseau jusqu'à extinction du stock de dette qui était celui de l'entreprise au 31 décembre 2019 (soit 52,4 milliards d'euros ) un pourcentage des charges financières (coupons) et des échéances de remboursement (principal) que SNCF Réseau continuera normalement à payer à ses créanciers, lesquels ne verront leur situation nullement modifiée par l'opération de reprise de dette.

Ce pourcentage correspondra au rapport entre le montant de la dette reprise, soit 25 milliards d'euros , et le stock total de dette de SNCF Réseau au 31 décembre 2019, soit 52,4 milliards d'euros . Ce pourcentage devrait représenter 47,7 %

Une reprise de dette compatible avec le droit de l'Union européenne
sur les aides d'État

Selon l'évaluation préalable de l'article 76, SNCF Réseau ne relève pas du champ concurrentiel. En effet, l'infrastructure gérée par l'entreprise n'est pas soumise à une concurrence directe et n'est pas conçue pour favoriser de manière sélective une entreprise ou un secteur donné mais procure des avantages à la société dans son ensemble. Ces critères, qui sont repris au paragraphe 211 de la « Communication de la Commission relative à la notion d'aide d'État visée à l'article 107, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (2016/C 262/01) », permettent de confirmer que SNCF Réseau ne relève pas des règles en matière d'aide d'État.

La reprise de dette et son traitement fiscal et comptable dérogatoire - absence de passage par le compte de résultat et incorporation directe au report à nouveau correspondent à une intervention de l'État octroyant un avantage sélectif à SNCF Réseau. Toutefois, une telle intervention ne peut être qualifiée d'aide d'État dans la mesure où la société n'intervient pas sur le champ concurrentiel (voir par exemple la décision de la Commission européenne s'agissant de l'annulation de la dette de OSE, gestionnaire du réseau ferré grec). Il est à noter que la dette reprise par l'État dans le cadre de cette opération correspond exclusivement aux déficits accumulés par SNCF Réseau au titre de son activité de gestionnaire d'infrastructure. Cette mesure est sans impact sur les filiales de SNCF Réseau. De même, elle est sans impact sur la filialisation prévue de Gares & Connexions, gestionnaire des gares qui n'a pas vocation à recevoir de soutien de la part de sa future société mère. De ce fait, une telle intervention n'est pas de nature ni à fausser la concurrence ni à affecter les échanges entre États membres.

Il convient également de relever que la reprise de dette ne bénéficie qu'à SNCF Réseau, et en aucun cas à sa société soeur SNCF Voyageurs, ni à la holding de tête qui, elles, interviennent sur des marchés concurrentiels. En particulier, bien que la société de tête soit l'émetteur unique du Groupe, les financements intra-groupe se feront pour chacune de ses filiales à un coût d'emprunt de SNCF Voyageurs. La reprise de dette ne constitue donc pas une aide d'État au bénéfice des activités concurrentielles du groupe SNCF.

Source : évaluation préalable de l'article 76

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA NÉCESSITE DE REPRENDRE 35 MILLIARDS D'EUROS DE DETTE DE SNCF RÉSEAU POUR ASSURER LA VIABILITÉ DE L'ENTREPRISE

La reprise de 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau était l'une des promesses majeures formulées par le Gouvernement lors des discussions relatives au nouveau Pacte ferroviaire et conditionnait sa bonne application.

Elle fait d'autant plus consensus que c'est l'État lui-même qui a creusé la dette de l'entreprise en lui faisant porter, année après année, le poids du financement des coûteux projets de développement de lignes à grande vitesse (LGV) qu'il lui commandait.

Créer une SNCF compétitive et moderne , dans un secteur désormais ouvert à la concurrence, était impossible sans l'assainissement financier préalable de notre système ferroviaire que prévoit le présent article.

B. LA SOLUTION DES PRÊTS MIROIRS ENTRE L'ÉTAT, SNCF RÉSEAU ET LA CGP ÉVITE DE NOMBREUX ÉCUEILS ET PÉNALISERA A MINIMA LES FINANCES DE L'ÉTAT

Si la reprise de 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau constitue un dispositif principalement technique , du moins convenait-il de concevoir un mécanisme permettant d'éviter un certain nombre de difficultés .

1. Ne pas modifier la situation des créanciers de SNCF Réseau

En premier lieu, il importait de garantir que les créanciers de SNCF Réseau , qui ont acheté des obligations de l'entreprise, ne verraient pas leur situation modifiée par l'opération de reprise de dette . Dans la mesure où la reprise de dette n'est que partielle ( 25 milliards d'euros sur 52,4 milliards d'euros), il aurait été problématique que certains d'entre eux voient leurs titres rachetés par l'État et d'autres non, au risque de provoquer des ruptures d'égalité de traitement entre eux.

Un rachat de titres de dettes directement auprès des créanciers de SNCF Réseau aurait en outre présenté un risque d'effet d'aubaine , puisque les créanciers auraient pu chercher à céder leurs titres à un prix élevé qui aurait renchéri l'opération pour l'État.

La solution retenue évite ces deux risques : elle n'aura aucun impact sur les créanciers de SNCF Réseau et ceux-ci continueront à détenir leurs obligations comme auparavant . De fait, les flux financiers liés à la reprise de dette n'auront lieu qu'entre SNCF Réseau, la CDP et l'État, si bien que les relations entre SNCF Réseau et ses créanciers demeureront inchangées.

2. Ne pas dégrader de 25 milliards d'euros le besoin de financement de l'État

Le deuxième risque était celui d'une dégradation de 25 milliards d'euros du besoin de financement de l'État en 2020 .

Une telle dégradation aurait été inévitable si l'une des deux solutions suivantes avait été retenue :

- le rachat par l'État de 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau directement sur les marchés . L'État aurait en effet dû émettre 25 milliards d'euros de titres de dette supplémentaire l'an prochain pour pouvoir financer l'acquisition des titres de SNCF Réseau.

- une recapitalisation de SNCF Réseau via une dotation de 25 milliards d'euros . Une telle solution aurait permis de préserver les créanciers et d'améliorer la situation financière de l'entreprise. Mais elle aurait dégradé de 25 milliards d'euros non seulement le besoin de financement de l'État mais également son déficit pour l'année 2020 , une telle dotation étant considérée comme une dépense de l'État prévue en loi de finances.

Contrairement à ces deux hypothèses, la solution retenue a pour effet de lisser l'impact de la reprise de dette sur le besoin de financement de l'État .

L'échéancier des prêts miroirs mis en place entre la CDP, SNCF Réseau et l'État s'étend en effet sur l'ensemble de la durée de vie de la dette de SNCF Réseau , soit jusqu'en 2 119 , l'entreprise disposant de titres de dette dont les durées les plus longues vont jusqu'à 100 ans .

Chaque année, l'État versera à SNCF Réseau, via la CDP, un montant lui permettant de couvrir une part du principal et des intérêts dus à ses créanciers (cette part correspondant à la quote-part de la dette reprise sur la dette totale de l'entreprise).

Ainsi, l'impact sur le besoin de financement de l'État ne se concrétisera qu'à hauteur de la part des échéances d'amortissement en capital et d'intérêts versés chaque année .

Échéancier des remboursements de capital liés à la dette de SNCF Réseau
reprise en 2020

Source : SNCF Réseau

L'impact sur le solde budgétaire, quant à lui, sera limité à la part des intérêts payés chaque année par l'État à SNCF Réseau via la CDP. Ces intérêts représenteront 409 millions d'euros en 2020, 728 millions d'euros en 2021, 717 millions d'euros en 2022 et 660 millions d'euros en 2023. Les crédits concernés seront portés par le nouveau programme 365 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État ».

Pour mémoire, la reprise de la dette de SNCF Réseau n'aura aucun effet sur l'endettement des administrations publiques , SNCF Réseau étant considérée comme une administration publique par l'Insee depuis 2016 (voir encadré supra ).

C. L'AMÉLIORATION TRÈS SENSIBLE DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA NOUVELLE SOCIÉTÉ ANONYME SNCF RÉSEAU

La reprise de 25 milliards d'euros de dette va améliorer immédiatement les ratios financiers de SNCF Réseau, lesquels deviendront compatibles avec ceux d'une société anonyme .

Lorsque l'État se substituera à SNCF Réseau comme débiteur de la CDP, la dette de SNCF Réseau passera de 52,4 milliards d'euros à 27,4 milliards d'euros tandis que ses réserves (qui font partie des capitaux propres) seront augmentées de 25 milliards d'euros .

Comme l'a annoncé le Premier ministre, cette première reprise de dette sera suivie d'une deuxième au 1 er janvier 2022, pour un montant de 10 milliards d'euros , qui augmentera à due concurrence les fonds propres de l'entreprise, lesquels atteindront 18 milliards d'euros contre - 17,0 milliards d'euros avant l'opération de reprise, confortant la stabilité financière de l'entreprise.

Une fois allégée de ces 35 milliards d'euros de dette , SNCF Réseau verra ses frais financiers annuels passer de 1,5 milliard d'euros à 500 millions d'euros environ. Le ratio marge opérationnelle/charges financières passera de 1,3 à 4,2 .

Les économies réalisées par l'entreprise au titre des 25 milliards d'euros représenteront d'ores-et-déjà 409 millions d'euros en 2020, 728 millions d'euros en 2021, 717 millions d'euros en 2022 et 660 millions d'euros en 2023.

Le ratio dette/marge opérationnelle de SNCF Réseau passera de 32 avant la reprise de la dette à 9,4 après reprise puis à 6 à l'horizon 2026 .

D. LA NÉCESSITÉ POUR SNCF RÉSEAU DE RÉALISER D'IMPORTANTS EFFORTS DE PRODUCTIVITÉ ET POUR L'ÉTAT DE SOUTENIR LA MODERNISATION DU RÉSEAU POUR ÉVITER TOUTE RECONSTITUTION DE LA DETTE DE L'ENTREPRISE

Alors que la situation financière de SNCF Réseau va spectaculairement s'améliorer à compter de l'an prochain , tout l'enjeu des années à venir sera de s'assurer que l'entreprise ne reconstituera pas un endettement excessif .

Il sera en premier lieu nécessaire que SNCF Réseau réalise des efforts de productivité. Il a ainsi été demandé à la société de réaliser des efforts de productivité supplémentaires de l'ordre de 380 millions d'euros en 2026 , portant ainsi la productivité à mettre en oeuvre à plus de 1,6 milliard d'euros en 2026 .

Surtout, l'État devra continuer à subventionner les investissements de modernisation et de renouvellement du réseau portés par l'entreprise.

La Cour des comptes, dans son rapport précité, rappelle en effet que « cette mesure [la reprise de 35 milliards d'euros de dette] par l'État n'est pas suffisante . Les besoins d'investissements de renouvellement dans les années à venir sont à un niveau tel que SNCF Réseau ne peut les couvrir par son seul autofinancement , même avec d'importants efforts de performance. La couverture , même partielle, de ces investissements de renouvellement par l'État est une nécessité , au risque de voir la dette du gestionnaire d'infrastructure se reconstituer à moyen terme ».

Il s'agira en effet de ne pas réitérer les erreurs du passé , qui avaient vu l'État se décharger sur SNCF Réseau du financement des coûteux investissements qu'il décidait.

Le renforcement de la règle d'or prévue par la loi pour un nouveau pacte ferroviaire devrait en principe, si celle-ci n'est pas contournée, permettre d'éviter cet écueil .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 76 quinquies (nouveau)

Abandon de créances détenues par l'État sur la Société internationale
de la Moselle

Commentaire : le présent article prévoit l'abandon des créances détenues par l'État sur la Société internationale de la Moselle (SIM), dans la mesure où toute perspective de remboursement de ces actifs totalement dépréciés paraît exclue.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE DE LA MOSELLE (SIM) A ÉTÉ CONSTITUÉE PAR LES ÉTATS RIVERAINS POUR CANALISER LA MOSELLE

La Société internationale de la Moselle (SIM) est une société de droit privé allemand qui a été instituée par une convention du 27 octobre 1956 entre la République française, la République fédérale allemande et le Grand-Duché du Luxembourg en vue de gérer le financement des travaux d'aménagement et de mise au grand gabarit de la Moselle entre Thionville et Coblence.

Il s'agissait également de répartir entre les trois États le montant des péages de navigation encaisses sur ce tronçon.

À cet effet, la Société internationale de la Moselle (SIM), qui a débuté ses activités le 29 janvier 1957 et dont le siège est situé à Trèves, a été dotée en capital par les trois États riverains mosellans et a reçu des prêts ainsi que des garanties de la France et de l'Allemagne.

Les travaux ayant été achevés en 1964, la SIM n'exerce plus qu'une mission d'encaissement et de reversement des recettes issues des péages qu'elle perçoit.

B. NE PRÉSENTANT PLUS DE RÉELLE UTILITÉ ET EN DIFFICULTÉS FINANCIÈRES, LA SIM NE POURRA PLUS REMBOURSER LES SOMMES REÇUES DE LA FRANCE ET DE L'ALLEMAGNE

Selon le Gouvernement, les gérants de la Société internationale de la Moselle (SIM) et les États associés considèrent aujourd'hui que cette entité ne présente plus d'utilité.

Par ailleurs, et surtout, la SIM connaît des difficultés financières depuis plus de 20 ans, en raison notamment d'une diminution significative du trafic sur la Moselle, et par conséquent, d'une réduction importante du montant des péages perçus.

Toujours selon le Gouvernement, ces éléments permettent de conclure qu'aucun remboursement ne pourra plus être effectué par la SIM aux États membres prêteurs.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, issu d'un amendement propose par le Gouvernement avec l'avis favorable de la commission des finances de l'Assemblée nationale, propose d'autoriser le ministre chargé de l'économie à abandonner les créances détenues par l'État sur la Société internationale de la Moselle (SIM), à savoir :

- les diverses mises en jeu de garantie de l'État, accordées entre 1977 et 1981, et imputées sur le compte 2761000000, dans la limite de 72 090 344,75 euros, auxquels peuvent s'ajouter les intérêts contractuels courus et échus ;

- les prêts participatifs accordés entre 1960 et 1979 et imputés sur le compte de prêts du Trésor n° 903-05, dans la limite de 49 903 648,20 euros, auxquels peuvent s'ajouter les intérêts contractuels courus et échus.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Selon le Gouvernement, les créances détenues par l'État sur la Société internationale de la Moselle - 72 090 344,75 euros au titre des appels en garantie et 49 903 648,20 euros au titre de prêts - sont aujourd'hui entièrement dépréciées, en raison de la situation financière très dégradée de la SIM.

Cela signifie que leur abandon n'emportera aucune conséquence en comptabilité générale.

Le Gouvernement précise que l'arrêté du ministre chargé de l'économie par lequel sera décidé cet abandon de créances sera pris de façon coordonnée avec le Gouvernement allemand, lequel doit également obtenir l'autorisation de son Parlement pour consentir son propre abandon de créances à la SIM.

Cette mesure technique d'abandon de créances anciennes et désormais dépréciées paraît justifiée et n'appelle pas de commentaires de la part de votre rapporteur spécial.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 20 novembre 2019, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, puis de M. Yvon Collin, vice-président, la commission a procédé à l'examen des rapports de M. Jean-François Husson, rapporteur spécial, sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et article 76 quater ) et les comptes d'affectation spéciale « Transition énergétique » et « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) », de Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial, sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et articles 76 et 76 quinquies ) et le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », et de M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial, sur le programme « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et articles 76 bis et 76 ter ) et le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

M. Vincent Éblé , président . - Nous examinons à présent le rapport spécial de Jean-François Husson sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et l'article 76 quater , ainsi que sur les comptes d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) » et « Transition énergétique ».

M. Jean-François Husson , rapporteur spécial sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et l'article 76 quater , ainsi que sur les comptes d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) » et « Transition énergétique » . - Nous examinons ce matin les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », qui retrace le financement des politiques publiques menées en matière d'environnement, de transition énergétique et de transports.

Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit une augmentation des crédits de la mission de 9 % à périmètre courant à hauteur de 13,3 milliards d'euros et une augmentation similaire si l'on exclut de son périmètre les transports, analysés par nos collègues Christine Lavarde et Vincent Capo-Canellas.

J'estime qu'il s'agit d'une hausse « en trompe-l'oeil » des crédits de la mission. En effet, trois mesures de périmètre gonflent en effet artificiellement les crédits de la mission : les crédits dédiés au financement du bonus à l'achat de véhicules « propres », inscrits jusqu'à présent sur un compte d'affectation spéciale, sont désormais inscrits sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », augmentant les crédits de la mission de 395 millions d'euros ; les crédits destinés au financement de la prime appelée à remplacer le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) sont également inscrits sur le programme 174, augmentant les crédits de 400 millions d'euros ; un nouveau programme est créé, intitulé « Charge de la dette de SNCF réseau », correspondant à la reprise par l'État de cette dette et doté de 409 millions d'euros.

À périmètre constant, le budget de la mission s'élève à 12,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) et diminue donc de 214 millions d'euros en AE et de 20 millions d'euros en CP.

En excluant les transports, analysés par nos deux collègues, les crédits baissent de 1 %. Le Gouvernement s'appuie donc sur des mesures de périmètre pour afficher une augmentation artificielle des crédits alloués à l'écologie. Ce subterfuge n'est pas à la hauteur des attentes de nos concitoyens s'agissant de l'urgence écologique à laquelle nous faisons face et participe d'une communication abusive, voire éhontée, du Gouvernement.

Par ailleurs, le projet de loi de finances prévoit une réduction de 797 équivalents temps plein (ETP) ; 55 % des départs à la retraite ne sont pas remplacés. Le rythme de baisse des effectifs ministériels est en moyenne de 2 % par an depuis plusieurs années. Je considère qu'il est très difficile de continuer à affirmer qu'il est possible de faire mieux en matière d'écologie et de faire face aux enjeux actuels avec moins de crédits et moins d'emplois.

Après ce constat d'ensemble, je vous présente les enjeux auxquels font face certains opérateurs.

D'abord, 2020 sera l'année de la mise en place de l'Office français de la biodiversité (OFB), fusion le 1 er janvier prochain de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Il est difficile de se prononcer sur le budget de ce nouvel opérateur, car il n'a pas encore été arrêté. On peut le reconstituer, même si ce n'est pas simple au regard des multiples canaux permettant d'assurer son financement.

Compte tenu de la fusion des deux opérateurs, le projet de loi de finances prévoit qu'à compter de 2020, les redevances cynégétiques seront recouvrées par les agences de l'eau. L'article 27 prévoit ainsi de rehausser le plafond global des redevances perçues par les agences de 46,1 millions d'euros, pour le porter à 2,151 milliards d'euros.

Ces redevances cynégétiques s'ajouteront à la contribution annuelle versée par les agences de l'eau à l'AFB et, à partir de 2020, à l'OFB. Je me réjouis que, cette fois, cette évolution n'entraîne pas de mise à contribution directe des agences de l'eau, mais elle ne sera pas sans conséquence en termes de gestion - 2 à 3 ETP seraient nécessaires.

Une subvention pour charges de service public de 41,2 millions d'euros est également prévue sur le programme 113 pour financer le futur OFB, dont 21,5 millions d'euros compensent le manque à gagner de la baisse du permis de chasse, que le Gouvernement n'avait pas compensée à l'ONCFS l'année dernière. Neuf millions d'euros financent le transfert de missions aux fédérations de chasse et 11 millions d'euros complètent les actions « biodiversité » qui seront conduites par les fédérations de chasse.

Grâce à cette subvention nouvelle sur le programme, le compte y est, et les agences de l'eau ne sont pas mises à contribution.

S'agissant des moyens humains, ce nouvel opérateur ne se verra pas appliquer de schéma d'emplois en 2020, tandis que 20 ETP seraient supprimés en 2021 et 40 en 2022.

Cet opérateur bénéficie d'un financement conforté pour assurer sa mise en oeuvre. Il n'en est pas de même de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). En effet, si la subvention qui lui est allouée est stable - 595 millions d'euros en 2020 -, l'agence est confrontée à une baisse d'effectifs, alors même que les missions qui lui sont confiées sont de plus en plus nombreuses. Un schéma d'emplois de 20 ETPT est prévu en 2020, portant le plafond d'emplois à 858 ETPT ; 11 % des effectifs seraient ainsi supprimés sur cinq ans.

Je considère que l'État doit se donner les moyens de mettre en oeuvre les politiques qu'il propose, et qu'une révision de la trajectoire des emplois de l'ADEME devrait être envisagée dans le cadre de l'élaboration du nouveau contrat d'objectif et de performances fixant les orientations de l'agence pour les années 2020 à 2023.

J'aimerais maintenant revenir plus en détail sur certaines politiques financées par la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

S'agissant de la politique de gestion de la biodiversité, 10 millions d'euros seront consacrés en 2020, comme en 2019, au plan Biodiversité. Ce financement est dérisoire, alors que 600 millions d'euros avaient été annoncés par l'ancien ministre lors de la présentation du plan. En réalité, 510 millions d'euros proviendront d'un redéploiement des interventions des agences de l'eau entre le dixième et le onzième programme d'intervention. Une fois n'est pas coutume, l'État a exercé un véritable « tour de passe-passe » quant au financement de ce plan.

La principale augmentation de crédits sur le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », outre la subvention nouvelle à l'OFB, est la hausse de l'enveloppe consacrée à l'organisation du congrès mondial de la nature de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui se tiendra à Marseille en 2020. Ces crédits auraient dû être consacrés à un renforcement des actions en faveur de la biodiversité, qui diminuent en 2020.

S'agissant de la politique de prévention des risques, la stagnation des moyens alloués me paraît dangereusement déconnectée des enjeux liés au réchauffement climatique.

Quinze ans après la catastrophe de l'usine AZF, la quasi-totalité des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) a été adoptée. Mais la mise en oeuvre opérationnelle de ces plans ne se déroule pas aussi rapidement que prévu, alors qu'elle est indispensable à la prévention des risques. L'actualité récente de l'incendie de l'usine Lubrizol nous rappelle l'importance de cette politique de prévention. Je ne doute pas que la commission d'enquête permettra de tirer les enseignements de cet accident sur la politique de prévention des risques technologiques.

Les crédits alloués à la prévention des risques naturels et hydrauliques sont stables, et près de 12 000 communes sont couvertes par un plan de prévention des risques naturels (PPRN) approuvé. Toutefois, c'est bien le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) qui prend en charge les dépenses d'élaboration de ces PPRN. Alors que l'augmentation des risques liés au réchauffement climatique implique des besoins de financement croissants pour les PPRN, la question de la soutenabilité du fonds se fait jour, en particulier après 2020 : au regard du niveau élevé des dépenses - 174,1 millions d'euros en 2018 - et du plafonnement des recettes, la trésorerie du fonds diminuerait de moitié en 2020.

Enfin, certains opérateurs de la mission pourraient être sous-dimensionnés à terme pour faire face à l'accroissement de leurs missions. Je pense à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui bénéficie d'une augmentation de ses moyens humains, mais qui voit ses missions augmenter en raison notamment du vieillissement des centrales nucléaires et de l'instruction des demandes de prolongation de leur fonctionnement.

J'en viens à présent aux charges de service public de l'énergie, dont le montant est arrêté tous les ans par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), et qui représenteront 7,9 milliards d'euros en 2020, soit une hausse de 3,4 % par rapport à 2019.

Ces charges, qui étaient financées jusqu'en 2015 par la contribution au service public de l'électricité (CSPE) en dehors de tout contrôle parlementaire, sont désormais retracées dans le budget de l'État par le programme 345 « Service public de l'énergie » et par le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique ».

En ce qui concerne le programme 345, qui ne porte plus les crédits du chèque énergie, la solidarité avec les zones non interconnectées (ZNI) représentera 1,8 milliard d'euros, en forte hausse de 10,4 %. Le soutien à la cogénération sera lui aussi dynamique, avec 748,5 millions d'euros de dépenses, ce qui représente une augmentation de 3,1 % par rapport à 2019.

Le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique », doté de 6,3 milliards d'euros pour 2020, porte avant tout les 5,0 milliards d'euros de soutien aux énergies renouvelables électriques, un montant stable par rapport à 2019 en raison de la hausse des prix du marché de gros de l'électricité, laquelle contrebalance l'augmentation des capacités installées.

Il est financé de façon quasi exclusive par des recettes issues de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), ce qui apparaît cohérent et conforme à la vocation de la fiscalité écologique : la composante carbone de cette taxe devrait exclusivement avoir pour objet le financement de ce type de dépenses, et non l'abondement du budget général.

Je note que les députés ont voté à l'article 32 du projet de loi de finances, contre l'avis du Gouvernement, la suppression de ce CAS au 1 er janvier 2021. Je ne suis pas favorable à cette suppression, car ce CAS constitue l'un des rares exemples de transparence sur l'usage qui est fait du produit de la fiscalité écologique.

Le CAS porte également le soutien à l'injection de biométhane, dont le montant va augmenter de 88,2 % à 248,5 millions d'euros en 2020, ainsi que le dernier remboursement à EDF de la dette relative à des défauts de compensation accumulés entre 2009 et 2015, soit une somme de 896,8 millions d'euros en 2020.

À compter de 2020, le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » porte plusieurs dépenses destinées à accompagner la transition énergétique des ménages. Sont notamment concernés le chèque énergie, le bonus automobile et les primes versées par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) aux ménages modestes dans le cadre de la transformation du CITE.

Le chèque énergie, qui bénéficiera à 5,8 millions de ménages en situation de précarité énergétique en 2020, est présenté par le Gouvernement comme la principale contrepartie à la hausse de la fiscalité sur les produits énergétiques. Comme en 2019, son montant moyen sera de 200 euros en 2020, ce qui restera très insuffisant pour compenser l'augmentation des taxes qui a touché les plus modestes de nos concitoyens ces dernières années.

Les crédits qui seront consacrés au chèque énergie en 2020 - 839,7 millions d'euros en AE et 779,9 millions d'euros en CP, soit des sommes en légère augmentation par rapport à 2019 - ne représentent qu'une faible part du produit de la fiscalité écologique, que le Gouvernement considère comme une fiscalité de rendement.

En outre, 390 millions d'euros sont également inscrits sur le programme 174 afin de financer en 2020 une partie de la prime de rénovation énergétique à destination des ménages modestes, appelée à remplacer en 2021 le CITE. Ces crédits permettront de financer 210 000 primes unifiées qui seraient distribuées à 170 000 ménages modestes en 2020. Cette prime est bienvenue, car elle permettra d'assurer la contemporanéité du versement de l'aide avec la réalisation des travaux.

Jusqu'à l'an dernier, les aides à l'acquisition de véhicules propres étaient financées par le malus automobile, lequel venait alimenter un compte d'affectation spéciale dédié. Or l'article 33 du projet de loi de finances supprime ce CAS, ce qui constitue une maladresse voire une faute dans un contexte où les Français nous demandent une plus grande traçabilité des taxes environnementales. C'est pourquoi je soutiens pleinement l'amendement de notre rapporteur général visant à supprimer cet article 33 et à rétablir le CAS.

Les crédits relatifs aux aides à l'achat ou à la location de véhicules neufs émettant peu de CO2, le « bonus », vont fortement augmenter de 49,6 % l'an prochain puisqu'ils passeront de 264 à 395 millions d'euros.

Alors que le bonus automobile n'est plus accessible qu'en cas d'achat d'un véhicule électrique, l'objectif de 100 000 « bonus » que s'est fixé le Gouvernement paraît ambitieux.

Les crédits de la prime à la conversion, en revanche, diminueront de 32 %, passant de 596 à 405 millions d'euros à la suite d'un durcissement des conditions d'accès au dispositif imposé le 1 er août 2019.

Cette décision est regrettable à l'heure où la transition énergétique du parc automobile français doit être accélérée pour respecter les normes européennes, qui prévoient d'atteindre des émissions moyennes pour les voitures neuves de 95 grammes de CO2 par kilomètre.

En ce qui concerne le CAS « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) », qui joue un rôle essentiel pour accompagner les territoires ruraux dans leur développement démographique et économique en matière de réseaux électriques, le montant des aides versées sera stable en 2020.

Au total, la hausse du budget de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » est très artificielle, puisqu'elle repose exclusivement sur des mesures de périmètre et dissimule un recul des crédits.

Dans le détail, les déceptions sont nombreuses : stabilité des crédits pour la prévention des risques technologiques, absence de revalorisation du chèque énergie, baisse des crédits de la prime à la conversion. Cela montre que l'ambition écologique affichée par le Gouvernement n'est qu'un artifice de communication et que le projet de loi de finances pour 2020 n'a rien d'un « budget vert ».

Au regard de l'ensemble de ces éléments, je proposerai donc à notre commission des finances de ne pas adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », mais d'adopter les crédits des comptes d'affectation spéciale « Transition énergétique » et « FACÉ ». Enfin, je vous propose d'adopter l'article 76 quater rattaché à la présente mission, qui prévoit de prolonger de cinq ans la possibilité de financement par le fonds Barnier de la démolition et de l'indemnisation de l'habitat informel en zone fortement exposée aux risques en outre-mer. Cette mesure vient à échéance au 31 décembre 2019 et elle est plafonnée à 5 millions d'euros par an.

M. Vincent Éblé , président . - Il revient maintenant à Christine Lavarde de nous présenter les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et les articles 76 et 76 quinquies , ainsi que le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et les articles 76 et 76 quinquies , ainsi que sur le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ». - La programmation financière annexée à ce projet de loi de finances prévoit que l'Agence de financement des infrastructures des transports de France (Afitf) est dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022, soit un peu moins de 2,7 milliards d'euros par an, puis de 14,3 milliards d'euros sur la période 2023-2027, soit un peu moins de 2,9 milliards d'euros par an. C'est là un effort financier significatif puisque cette augmentation représente une hausse de 40 % des crédits consacrés aux infrastructures de transport.

Toutefois, alors que la loi d'orientation des mobilités (LOM) n'a pas encore été promulguée, le budget de l'Afitf pour 2019 a été non pas de 2,684 milliards d'euros comme annoncé, mais de 2,48 milliards d'euros, soit 204 millions d'euros de moins en raison de recettes des amendes radar deux fois inférieures aux prévisions, comme l'a indiqué notre collègue Jean-Marc Gabouty.

En 2020, le Gouvernement annonce que les dépenses de l'AFITF, dont il ne m'a pas fourni le détail en dépit de plusieurs demandes, augmenteront de 502 millions d'euros, ce qui représenterait une hausse de 20,2 % des crédits de l'agence, hausse à confirmer.

Pour trouver les financements nécessaires, il a prévu de taxer le transport aérien en mettant en place l'écocontribution dont nous avons parlé ce matin. Le Gouvernement a également prévu de diminuer de 2 euros par hectolitre le tarif réduit de TICPE des transporteurs routiers. La semaine dernière, votre commission des finances a adopté un amendement de suppression de cette taxe et il est regrettable que le Gouvernement s'assoie ainsi sur une décision du Parlement puisqu'a été publiée hier au Bulletin officiel des douanes une circulaire annonçant l'entrée en vigueur le 1 er janvier 2020 de la nouvelle réduction.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - C'est un comble !

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - Je rejoins la proposition du rapporteur général de supprimer cette mesure, qui mettrait en péril la compétitivité des transporteurs français sans qu'elle permette d'améliorer les infrastructures routières puisque les camions étrangers n'y seraient pas assujettis.

Les crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transports » diminueront légèrement en 2020, mais cette baisse sera largement compensée par la hausse des crédits de l'Afitf.

Un changement de périmètre est à noter : les 11 millions d'euros du budget de l'Autorité de régulation des transports (ART), l'ex-ARAFER, seront désormais portés par le programme 203, les taxes qui lui étaient affectées étant supprimées.

Mais le principal enjeu pour l'ART est de bénéficier de postes supplémentaires, compte tenu des missions nouvelles qui lui ont été attribuées par la loi Pacte et qui lui seront attribuées par la LOM. Or, elle ne bénéficie pour l'instant que de 4 postes supplémentaires sur les 20 qu'elle réclamait. Je suis donc sceptique quant à sa capacité à assumer l'ensemble de ses missions.

Je dirai quelques mots sur les trois grands opérateurs qui relèvent du programme 203 : SNCF Réseau, la Société du Grand Paris (SGP) et Voies navigables de France (VNF).

SNCF Réseau deviendra au 1 er janvier 2020 une société anonyme. L'article 76 du présent projet de loi de finances prévoit une reprise de sa dette par l'État à hauteur de 25 milliards d'euros.

S'agissant de la Société du Grand Paris, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements visant à augmenter ses recettes. Le premier tend à augmenter la taxe sur les bureaux ciblée sur les quartiers premium , tandis que le second a introduit un prélèvement de 75 millions d'euros en 2020 sur les recettes tirées des droits de mutation à titre onéreux des départements franciliens - 60 millions d'euros pour les années suivantes. Ces deux amendements ont été votés sans aucune étude d'impact préalable. Après de multiples relances nous a été communiqué le rapport du Gouvernement au Parlement prévu par la loi de finances pour 2019. À sa lecture, il apparaît que ce rapport aurait pu être rédigé simplement en reprenant les réponses des personnes que nous avons auditionnées et les informations disponibles sur le site de la Société du Grand Paris. Ce rapport est vide et aucun élément ne donne à penser que les recettes supplémentaires perçues par la SGP lui permettront d'apurer les 3,5 milliards d'euros d'endettement supplémentaire, justification de ces deux mesures. Pour toutes ces raisons, je soutiens la proposition du rapporteur général de supprimer cette taxe ciblée sur les bureaux.

Quoi qu'il en soit, ces recettes supplémentaires ne permettront pas de toute façon de boucler le financement de la SGP. De nouvelles taxes sont donc à envisager dans les années à venir pour espérer atteindre l'équilibre financier.

Le dernier opérateur du programme 203, VNF, continue à consentir d'importants efforts de réduction de ses personnels, avec 112 ETPT en moins en 2020.

J'en viens au programme 205 « Affaires maritimes », qui porte des fonctions régaliennes essentielles et joue un rôle économique et social important dans le transport maritime français et en faveur de la compétitivité du pavillon français.

À l'intérieur de ce programme se trouve la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), dont la dotation apportée par l'État augmentera de 73 %. Il s'agit là d'une mesure conforme aux préconisations de la mission d'information du Sénat sur le sauvetage en mer, qui avait plaidé pour un geste fort de l'État dans son rapport d'octobre 2019 intitulé Sauvetage en mer : replacer les bénévoles au coeur de la décision .

Je vous propose enfin d'évoquer le programme 365 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État », parallèlement à l'article 76 du PLF, car tous deux sont intimement liés. En effet, l'article 76 organise la reprise en deux temps de la dette de SNCF Réseau par l'État, avec une première étape d'un montant de 25 milliards d'euros dès l'année 2020 - moyennant la conclusion de prêts croisés entre la Caisse de la dette publique (CDP) et SNCF Réseau, l'État devant se substituer à SNCF Réseau comme débiteur de la CDP - suivie par une reprise de dette supplémentaire de 10 milliards d'euros en 2022.

Sur cet article 76 et sur le programme 365, qui sert à porter les flux financiers entre les trois acteurs de cette reprise de dette, je porte un avis favorable.

Enfin, il faut évoquer le compte d'affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».

L'État est depuis 2011 l'autorité organisatrice des lignes de train d'équilibre du territoire (TET). Le CAS vient compenser le déficit d'exploitation de SNCF Mobilités dû aux TET ainsi que la régénération du matériel roulant. On constate pour 2020 une diminution de 13 % des fonds portés par l'État. Mais cela tient peut-être à une augmentation des crédits fournis par les régions. J'émets également un avis favorable sur ce CAS.

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial sur le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » et sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » . - Le programme 159 regroupe depuis 2017 les subventions pour charges de service public (SCSP) du Centres d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

Il retrace également depuis 2018 les crédits du Commissariat général au développement durable (CGDD), soit 14,4 millions d'euros, et ceux qui sont dédiés au financement du soutien à l'économie sociale et solidaire (ESS), soit 19 millions d'euros.

Les trois opérateurs du programme, sur lesquels je concentrerai mon propos, se sont vus signifier par le Gouvernement des trajectoires financières très exigeantes d'ici à 2022, impliquant d'importantes demandes de suppressions d'emplois, mais qui ont le mérite de rompre avec le manque de visibilité pluriannuelle dont ils souffraient jusqu'ici.

Concernant Météo-France, qui joue un rôle essentiel pour la sécurité des personnes et des biens face à la multiplication des événements climatiques extrêmes, la SCSP portée par le programme 159 diminuera en 2020 à 182 millions d'euros. Dans le même temps, ses effectifs baisseront de 95 ETPT, mouvement qui se poursuivra dans les deux années à venir.

Le réseau territorial évolue fortement dans le cadre d'Action publique 2022. Ses effectifs diminueront de 40 %, de nombreuses activités étant regroupées dans la métropole de Toulouse. Cette centralisation est rendue possible par les évolutions scientifiques et technologiques, qui permettent désormais de conduire un certain nombre de tâches de prévision météorologique à distance.

Pour rester un opérateur météorologique de rang mondial, Météo France est en train de se doter d'un nouveau supercalculateur, qui était attendu, qui permettra de multiplier par cinq sa puissance de calcul. Ce nouveau matériel nécessitera un investissement total de 144 millions d'euros sur la période 2019-2025. L'État versera à ce titre 7,7 millions d'euros de subvention à l'opérateur en 2020.

L'IGN verra lui aussi sa SCSP diminuer en 2020, à 88,5 millions d'euros et ses effectifs perdre 39 ETPT. Alors que le modèle économique de l'IGN est sévèrement fragilisé par l'avènement de l'open data, son directeur général porte, dans le cadre d'Action publique 2022, un projet d'établissement visant à faire de celui-ci l'opérateur interministériel unique en matière de données géographiques souveraines et à devenir une pièce maîtresse de l'État plate-forme pour l'information géographique.

Le Cerema, pour sa part, cherche à se réinventer dans un contexte où ses moyens diminueront fortement jusqu'en 2022, au rythme d'une réduction annuelle de 5 millions d'euros de sa SCSP, qui atteindra 196,7 millions d'euros en 2020, et de 101 ETPT de ses effectifs - le plafond d'emploi de l'opérateur est de 2 594 ETPT en 2020.

Le principal enjeu pour cet opérateur consiste à mettre en oeuvre une collaboration beaucoup plus étroite avec les collectivités territoriales ainsi qu'avec l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) en cours de création. Le projet stratégique que porte son directeur général devrait lui permettre d'y parvenir si nous veillons à lui laisser les marges de manoeuvre financières dont il aura besoin l'an prochain et en 2022.

J'en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dit « BACEA », qui porte les 2,2 milliards d'euros de crédits de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC). Il est exclusivement financé par le secteur du transport aérien. Dès lors, l'évolution du trafic et la bonne santé des compagnies françaises ont une influence décisive sur son équilibre financier.

Or, le trafic aérien a bénéficié d'une croissance de 5,2 % en 2018 et celle-ci devrait atteindre 4,1 % en 2019, grâce à un trafic international dynamique.

Les compagnies aériennes françaises profitent peu de cette croissance puisqu'elles poursuivent leur déclin en termes relatifs avec une part du pavillon français qui est passée de 54,3 % en 2003 à 40 % en 2018. Nous pouvons mesurer l'ampleur de la chute.

Alors que deux compagnies françaises, Aigle Azur et XL Airways, viennent de disparaître - elles représentaient 1 700 emplois, ce qui est considérable, mais les débats à ce sujet ont été malheureusement très limités et cet événement a été rapidement oublié -, tout cela s'inscrit dans le cadre de la nouvelle « écocontribution » sur le transport aérien proposée par le Gouvernement.

Le directeur général du groupe Air France-KLM a présenté sa stratégie financière en conférence de presse il y a quelques jours. À cette occasion, il a rappelé la différence considérable qui sépare la France des Pays-Bas s'agissant du poids des charges et des cotisations sociales. Le différentiel de départ est compris en effet entre deux et deux points et demi de marge, quelle que soit la performance intrinsèque de la compagnie et des salariés. Il faut avoir cette donnée en tête.

Concernant l'écocontribution, je rappelle mon soutien aux propositions présentées par le rapporteur général. Cette écocontribution ne me paraît pas répondre aux défis de la transition énergétique requise pour le transport aérien, qui mettra une quinzaine voire une vingtaine d'années à aboutir. La modernisation de la flotte est sans doute la bonne solution pour consommer moins de kérosène. De plus, il vaut mieux avoir des avions moins polluants et français, plutôt que des avions polluants et étrangers. Ce serait tout de même plus prudent.

À plus long terme, il convient également de renforcer le soutien à la recherche aéronautique pour développer des moteurs moins polluants, pour encourager l'incorporation de biocarburants ou bien encore pour concevoir des avions électriques ou à hydrogène. Nous interpellerons le Gouvernement sur ce point en séance.

J'en reviens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Dans la conjoncture très favorable dont j'ai parlé plus haut, la DGAC bénéficiera en 2020 de recettes légèrement supérieures à celles de 2019, pour un montant de 2,1 milliards d'euros. Cette hausse limitée s'explique notamment par la restitution aux compagnies aériennes des trop-perçus de 2018 au titre de la redevance de route, que viendra compenser l'augmentation des recettes de la taxe de l'aviation civile (TAC). En fonction de la réalité du trafic constaté par rapport aux prévisions, le surplus éventuel est reversé avec un décalage de deux ans.

Les performances de la Direction des services de la navigation aérienne (DSNA), encadrées par le droit européen dans le cadre du plan de performance RP 2, restent insuffisantes, alors que va débuter la nouvelle période RP 3.

Si le taux de la redevance de route est compétitif, les retards dus au contrôle aérien continuent à augmenter - 6 253 137 minutes de retard en 2018, 2,4 minutes de retard par vol - en raison de l'obsolescence de ses équipements et de l'inadéquation de l'organisation du travail des contrôleurs aériens aux nouvelles caractéristiques du trafic.

Pour accélérer la réalisation de ses grands programmes de modernisation des outils de la navigation aérienne, la DGAC continue à investir. Elle augmentera de nouveau en 2020 son effort d'investissement, pour le porter à 317 millions d'euros. Comme vous vous en rappelez, je vous avais présenté en juin 2018 un rapport d'information sur ce sujet intitulé Retards du contrôle aérien : la France décroche en Europe .

Sur cette somme, 140,6 millions d'euros sont consacrés aux grands programmes de modernisation précédemment cités, dont le coût total, régulièrement revu à la hausse, représente environ 2,2 milliards d'euros.

Comme j'avais eu l'occasion de vous le dire lors de mon intervention du 16 octobre dernier, la DSNA a substantiellement fait évoluer la gouvernance de ces grands programmes pour tenir compte des conclusions du rapport que je viens de mentionner et de celui que la ministre des transports avait commandé dans la foulée au CGDD.

Des revues générales techniques périodiques placées sous la supervision d'un comité de surveillance externe ont été mises en place.

Une fonction de délégué aux grands programmes, chargé de leur supervision et de leur pilotage, placée directement auprès du directeur de la DSNA et confiée à son adjoint, a été créée.

Enfin, un nouveau directeur a été nommé au mois de mars dernier à la tête de la Direction de la technique et de l'innovation (DTI) après un recrutement interministériel, alors qu'il était habituellement choisi en interne. Cette novation est également à saluer.

Si les choses vont dans le bon sens, rien ne garantit que les nouveaux systèmes seront livrés dans les temps et sans nouveaux surcoûts. Je resterai donc très vigilant sur ce point.

J'ajoute que, pour mobiliser les équipes de la DSNA autour d'un projet ambitieux, il pourrait être utile de prévoir la conclusion d'une forme de contrat, analogue aux contrats d'objectifs et de performance (COP) des établissements publics, qui viendrait formaliser des objectifs précis et chiffrés et apporterait une meilleure visibilité sur ce point.

Comme en 2019, le schéma d'emplois pour 2020 de la DGAC ne prévoit aucune suppression d'emplois. Cela tient à l'augmentation du trafic. Il est difficile en effet de faire face à cette croissance avec un nombre réduit de contrôleurs. Une légère augmentation des recrutements est donc prévue, mais elle mettra du temps à porter ses fruits compte tenu des quatre ans de formation nécessaires pour qu'un contrôleur soit opérationnel.

La masse salariale augmentera de 0,4 %, pour atteindre 938,8 millions d'euros. Sur cette somme, 2,6 millions d'euros correspondent aux dernières mesures catégorielles prévues par le protocole social 2016-2019 de la DGAC dont le coût global représente 55 millions d'euros sur la période, contre 27,4 millions d'euros pour le protocole social 2013-2015. Nous pouvons nous interroger sur ces chiffres.

Par ailleurs, 10 millions d'euros sont déjà provisionnés pour le futur protocole social 2020-2024. Les protocoles facilitent la gestion du temps de travail dans les centres. Les négociations démarreront dans les prochaines semaines, et devraient permettre d'aller plus loin dans l'adaptation de l'organisation du travail des personnels, car des marges de productivité significatives existent.

Dans le PLF qui nous est soumis, il est prévu que le BACEA poursuive en 2020 la diminution de sa dette.

Nous vous avons proposé avec le rapporteur général de modifier le projet sur ce point pour tenir compte de l'augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) prévue au titre de l'écocontribution. Je soutiens donc l'amendement du rapporteur général qui prévoit de renoncer au désendettement de la DGAC en 2020 pour, en contrepartie, réduire de 72 millions d'euros le produit de la taxe de l'aviation civile qui lui est affecté et restituer cet argent aux compagnies aériennes pour compenser le coût de l'écocontribution.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Cet amendement prévoit de ralentir le désendettement, non d'y renoncer !

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - En effet. L'idée est de reporter la part de désendettement de cette année à l'année prochaine.

En conséquence, je vous propose d'adopter un amendement qui réduit de 72 millions d'euros les crédits de l'action n° 3 « Affaires financières » du programme n° 613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile ». Il s'agit là d'une contrepartie à la mise en place de l'écocontribution.

Sous réserve de l'adoption de cet amendement, je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe ainsi modifiés.

Les opérateurs du programme 159 font l'objet de baisses exigeantes de leurs subventions pour charges de service public et de leurs effectifs, mais leurs directions respectives m'ont semblé avoir adopté des stratégies responsables pour y faire face.

Si je suis favorable aux crédits de ce programme, je n'appelle pas pour autant à adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Je considère en effet que les insuffisances évoquées par Jean-François Husson et Christine Lavarde dans les programmes qu'ils nous ont présentés posent problème.

En conclusion, j'en viens aux deux articles rattachés à la mission « Écologie, développement et mobilité durables », que je vous propose d'adopter tous les deux.

L'article 76 bis reporte au 1 er avril 2026 la date de début de perception de la contribution spéciale Charles-de-Gaulle (CDG)-Express.

Lors de la création de cette contribution due par les compagnies aériennes pour tous leurs vols commerciaux qui décollent de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle ou y atterrissent, il avait été clairement établi que cette taxe ne pourrait être perçue qu'à compter de la mise en service du CDG-Express.

Cette mise en service était prévue au 1 er avril 2024, soit avant la tenue des jeux Olympiques, raison pour laquelle le début de la perception de la taxe avait été fixé à cette même date.

Or, le Gouvernement a annoncé le 29 mai 2019, à la suite de la remise d'un rapport du préfet de la région d'Île-de-France, que la mise en service de la ligne n'interviendrait finalement qu'à la fin de l'année 2025 afin de limiter l'impact des travaux pour les 900 000 usagers quotidiens du RER B, qui subissent déjà une situation très difficile.

La mise en service du CDG-Express étant reportée à la fin de l'année 2025 ou au début de l'année 2026, il est légitime de prévoir que la perception de la contribution spéciale CDG-Express n'interviendra qu'à compter du 1 er avril 2026, comme le prévoit l'article 76 bis .

L'article 76 ter prévoit qu'Aéroports de Paris (ADP) peut consentir des avances aux riverains de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle pour réaliser des travaux de rénovation des bâtiments, et en particulier de leurs logements. Ces avances seront ensuite remboursées par le produit de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) que perçoit ADP.

Cette mesure bienvenue permettra d'accélérer la résorption du stock de demandes d'aide à l'insonorisation de ces riverains. Que l'État ait besoin de demander ainsi à ADP de faire une avance a toutefois de quoi susciter des interrogations.

Sur cet article, je vous propose un amendement qui corrige la version adoptée par l'Assemblée nationale et qui permettra à ADP de percevoir des intérêts sur les avances qu'il consent aux riverains. Ces intérêts seront couverts par le produit de la TNSA. Il ne serait en effet pas conforme à l'intérêt social de l'entreprise qu'elle consente des avances gratuitement. L'État étant actionnaire majoritaire d'ADP, il ne saurait compromettre cet intérêt et risquerait donc d'être mis en cause si la mesure était appliquée dans sa version première.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Cette mission est la parfaite illustration de ce que je regrettais dans le rapport que j'ai produit sur la première partie du projet de loi de finances. Sous couvert de politique écologique, le Gouvernement vise en réalité le rendement par la mobilisation de taxes et redevances théoriquement affectées à la lutte contre la pollution, mais qui ont pour seul but d'alimenter le budget de l'État. Ainsi, l'augmentation de la TSBA serait acceptable si son produit était affecté, par exemple, à la recherche sur les biocarburants, car il s'agirait alors d'une véritable écocontribution. Or ce n'est pas le cas. Cette augmentation n'est qu'un moyen de trouver des ressources pour l'AFITF et d'afficher des mesures visant expressément le transport aérien dans un paysage social marqué par la crise des gilets jaunes.

Je remercie, par ailleurs, Christine Lavarde de sa sagacité. En effet, alors que le Sénat n'a même pas encore commencé l'examen du projet de loi de finances et que le Parlement ne s'est donc pas prononcé à ce sujet, la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) a affiché dans son bulletin officiel le nouveau montant de remboursement partiel de TICPE pour les transporteurs routiers, applicable au 1 er janvier 2020. Cette maladresse est inacceptable ! Il faudrait apprendre à l'administration qu'il existe encore un Sénat. Nous n'en resterons pas là.

M. Antoine Lefèvre . - Il semble que le nombre d'accidents industriels ait augmenté de 30 % en deux ans. Cette situation tient-elle au vieillissement de notre tissu industriel, à des raisons climatiques, ou à d'autres causes ?

Par ailleurs, il aurait été décidé récemment de ne plus contrôler les stations-service. Il est vrai que de nombreuses stations ferment, notamment dans le milieu rural. Ces contrôles n'en demeurent pas moins utiles. Qu'en est-il réellement ?

La prolifération des éoliennes présente d'importants problèmes d'acceptabilité dans certains départements. Des objectifs ont-ils été fixés par le Gouvernement en matière de développement de l'éolien offshore ?

Enfin, avons-nous des nouvelles du rapport sur les petites lignes ferroviaires demandé par le Gouvernement au préfet François Philizot, qui devait paraître initialement en juin 2019, mais semble se faire toujours attendre ? Et quels objectifs ont-ils été fixés sur le fret, sur lequel nous aurions perdu des parts de marché cette année ?

M. Philippe Dallier . - Après les augmentations successives de la taxe sur les bureaux en Île-de-France décidées en 2019 et 2020 afin de compenser le dérapage des coûts du Grand Paris Express, un amendement voté à l'Assemblée nationale prévoit une ponction de 75 millions d'euros sur les recettes tirées des droits de mutation à titre onéreux des départements franciliens. Cette situation est d'autant plus inquiétante que nous n'avons aucune visibilité sur les probables futurs dérapages financiers de la SGP. Il est plus qu'urgent que la commission des finances se saisisse du sujet, et convoque une réunion en présence de la SGP, de la région et des services de l'État pour en discuter.

La ponction susmentionnée est d'autant plus choquante qu'elle servira dans un premier temps à financer les contrats de plan État-région (CPER). Non seulement les départements sont appelés à contribuer au financement des transports, alors qu'il ne s'agit pas de leur compétence première, mais l'État vient leur « faire les poches » pour compenser ses propres manquements. Cette situation est scandaleuse.

Nous pouvons relever en outre une forme de paradoxe. La Seine-Saint-Denis apparaît comme le troisième contributeur de ces 75 millions d'euros, alors que le Gouvernement vient d'annoncer le lancement d'un grand plan d'aide en sa faveur.

M. Arnaud Bazin . - Le Gouvernement a accumulé les provocations à l'égard des départements dans ce dossier. La ministre de la transition écologique et solidaire a convoqué les huit présidents de départements d'Île-de-France le jeudi pour le mardi. Personne n'est venu. Le mercredi, l'amendement susmentionné était déposé à l'Assemblée et voté dans la foulée ! Première provocation.

- Présidence de M. Yvon Collin, vice-président -

M. Arnaud Bazin . - Le fait de prendre de l'argent aux départements, contrairement aux engagements pris par l'État depuis le début de ce dossier, constitue une deuxième provocation. Il avait en effet toujours été convenu que les départements ne contribueraient pas au financement de la SGP, leurs contribuables, particuliers comme entreprises, le faisant déjà par le biais de la taxe spéciale d'équipement (TSE).

Troisième provocation, le transport ne relève pas des compétences des départements. De plus, 50 millions d'euros sur les 75 millions d'euros qui seront prélevés cette année et les deux années suivantes serviront à alimenter les CPER. C'est une provocation supplémentaire !

Il faudra faire preuve d'une grande fermeté sur ce sujet, et rejeter cette nouvelle provocation du Gouvernement qui remet une nouvelle fois en cause ses engagements.

M. Sébastien Meurant . - Encore certains départements accueillent-ils des gares du Grand Paris Express. D'autres, comme le Val-d'Oise, risquent de n'en avoir aucune.

M. Jérôme Bascher . - Ils paieront deux fois !

M. Sébastien Meurant . - La dérive des coûts du projet Grand Paris Express, initialement chiffrés à 19 milliards d'euros et estimés actuellement à 35 milliards d'euros, est dramatique. Des éléments explicatifs figurent-ils dans les différents rapports disponibles sur ce sujet ?

M. Roger Karoutchi . - Comme je l'annonce depuis quatre à cinq ans, ces coûts atteindront très certainement les 50 milliards d'euros, voire un montant encore supérieur.

La SGP est aux mains de l'État, majoritaire au sein de son Conseil de surveillance, qui écoute les élus les jours impairs des années bissextiles en fonction des mouvements lunaires... Tout cela est insupportable.

Le Grand Paris Express est payé par les entreprises et les particuliers d'Île-de-France qui subissent déjà 700 millions d'euros de taxes chaque année. Quelles solutions pourront-elles être trouvées une fois la barre des 50 milliards d'euros franchie ? La ligne 17 est arrêtée pour au moins un an après l'abandon du projet EuropaCity. Le Grand Paris Express sera éventuellement achevé en 2040, alors qu'il devait l'être en 2028, en ayant coûté trois fois plus cher que prévu. Et il ne se passe rien !

Plutôt qu'une nouvelle audition en commission des finances, à laquelle les représentants de la SGP se rendraient bardés de certitudes dans leur incompétence, il faudrait mettre en place une mission d'information officielle, plus solennelle.

Par ailleurs, je propose que l'État mobilise des milliards d'euros dans les prochains CPER, puisqu'à l'arrivée ce seront les collectivités qui devront payer. Une telle négation de la parole de l'État, des CPER et des collectivités est invraisemblable et inadmissible. J'appartiens à l'Ancien monde. Franchement, j'en ai vu passer des stupidités, mais à ce niveau-là c'est rare !

M. Jean-François Rapin . - Quelle garantie la future société anonyme qui sera créée au 1 er janvier 2020 pour remplacer SNCF Réseau offre-t-elle pour que l'on ne retombe pas dans un cercle vicieux d'endettement ? Des engagements ont-ils été pris sur ce point ?

Par ailleurs, nous pouvons nous demander si la subvention apparemment ponctuelle de 4,5 millions d'euros accordée à la SNSM en 2020 suffira réellement à répondre aux besoins d'investissement de l'association.

Le rapport d'information sur le sauvetage en mer d'octobre 2019 indique en effet : « s'agissant du renouvellement de la flotte, le besoin total est évalué à 140 navires dans les dix ans. La moitié pourrait être couverte par le contrat conclu le 17 octobre 2019 entre la SNSM et l'entreprise Couach pour en produire 70, avec une commande ferme de 35 navires dans les cinq ans et une possibilité de doubler la mise par la suite. À condition que les navires issus de cette première commande donnent pleine satisfaction aux équipages des stations, la mission encourage vivement l'État à prendre le relais financier de cette opération à hauteur de 25 millions d'euros pour la seconde tranche. »

Au vu de ces éléments, la subvention exceptionnelle de 4,5 millions d'euros annoncée pour 2020 apparaît très loin du compte, l'investissement nécessaire pour assurer le renouvellement de l'intégralité de la flotte de la SNSM étant estimé à 50 millions d'euros sur dix ans. Des engagements ont-ils été pris par le Gouvernement sur ce point ?

Enfin, devons-nous nous attendre à d'importants mouvements sociaux du fait de la décision de réduire de deux euros par hectolitre le remboursement partiel de TICPE pour les transporteurs routiers ? Avez-vous des échos de la Fédération nationale des transports routiers (FNTR) à ce sujet ?

M. Marc Laménie . - Que représente réellement en masse budgétaire la reprise par l'État de la dette de SNCF Réseau ?

Par ailleurs, avons-nous des informations sur les liens entre l'AFITF et les régions s'agissant du soutien financier apporté aux transports ferroviaires conventionnés, compte tenu des investissements indispensables sur ce réseau ferroviaire vieillissant ?

Avons-nous une idée des modalités de financement prévues pour le fret ferroviaire capillaire, sachant que certaines petites lignes ont leur utilité, notamment pour le transport de céréales ? Enfin, des investissements sont-ils envisagés par VNF pour éviter d'abandonner certaines voies navigables et assurer ainsi le développement du tourisme fluvial ?

M. Thierry Carcenac . - Je partage les observations de nos trois rapporteurs sur les liens pour le moins trompeurs entre le budget 2020 et la transition énergétique.

Le décret relatif à la création de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) est enfin paru au Journal officiel le 19 novembre. Or cette agence doit utiliser les moyens de différents services, dont le Cerema, qui voit ses effectifs diminuer. Je me demande ce qui en restera.

Par ailleurs, la ponction par l'État de 75 millions d'euros sur le budget des départements a de quoi surprendre, ces derniers n'ayant plus la compétence transport. De plus, ce prélèvement ne risque-t-il pas de perturber la péréquation transversale qui s'applique actuellement entre les départements en cas d'excédents de droits de mutation ?

M. Rémi Féraud . - Je pense que nous suivrons les préconisations de vote des rapporteurs. La transition énergétique et l'écologie sont affirmées comme des priorités. Or au moment du budget nous nous apercevons qu'il n'en est absolument rien. Toute impression contraire relève en réalité du trompe l'oeil.

- Présidence de Vincent Éblé, président -

M. Rémi Féraud . - Lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2019 le 18 novembre dernier, nous avons pu constater que 600 millions d'euros du CAS « Transition énergétique », étaient renvoyés au budget général de l'État faute d'utilisation. L'État n'a fait preuve d'aucun volontarisme sur ce point pour accélérer la transition énergétique.

Ce CAS est prévu en hausse dans le PLF pour 2020. Mais ne risque-t-il pas d'être sous-utilisé pour la troisième année consécutive et de venir, in fine , ré-abonder le budget général de l'État ? Ou devons-nous nous attendre à un changement en la matière ?

Par ailleurs, le financement de la SGP relève, comme cela a été souligné, du bricolage. Or ce bricolage coûte extrêmement cher aux départements franciliens. La ponction de 75 millions d'euros prévue par l'État sur leur budget n'en est que plus choquante, d'autant qu'elle servira en premier lieu à financer la part de l'État dans les CPER. Devons-nous annuler cette disposition adoptée de manière incroyable à l'Assemblée nationale, qui ne résout pas la question du financement du Grand Paris Express ? Elle intervient en outre au moment du congrès des maires, alors que le Gouvernement affiche une volonté de changer sa relation avec les collectivités locales. Cette mesure entraînera également des difficultés particulières pour la Seine-Saint-Denis dont les dépenses sociales augmentent considérablement.

M. Yvon Collin . - Parmi les efforts récents déployés par les compagnies aériennes pour diminuer leur empreinte carbone, le projet Fello'fly viserait à faire voler des Airbus en escadrille, à la façon des oiseaux migrateurs, pour limiter leur consommation. Cette nouvelle formule serait envisagée pour des vols long-courriers dès 2025. S'agit-il d'un projet sérieux ?

M. Jean Bizet . - Je voudrais vous livrer de nouveau mon inquiétude concernant l'avenir d'Air France. Cette compagnie transporte non seulement ses passagers, mais aussi l'image de la France. Or elle a souffert notamment de l'application de la taxe Chirac sur les billets d'avion, qui a malheureusement perduré alors qu'elle aurait dû n'avoir qu'un temps.

Par ailleurs, pour pallier l'effet du différentiel de charges d'environ 800 millions d'euros qui s'observe entre Air France et d'autres compagnies, notamment KLM, j'avais proposé dans le rapport Concurrence dans le transport aérien : l'indispensable transparence remis à Alain Vidalies en février 2016 d'établir un parallélisme entre les charges relatives au personnel naviguant aérien et celles relatives au personnel naviguant maritime. Cela me paraissait une solution élégante pour effacer les distorsions de concurrence. Les amendements que j'avais déposés en ce sens n'ont malheureusement pas prospéré. Il serait peut-être bon d'en rediscuter.

Malgré les évolutions survenues sur ce sujet au niveau européen, le bras de fer se poursuit entre les compagnies. Et Air France demeure une compagnie très fragile. Il serait bon par conséquent de creuser de nouveau le problème du poids des charges sociales du personnel navigant.

M. Gérard Longuet . - Le Gouvernement a pris position en faveur de la réalisation du canal à grand gabarit Seine-Nord Europe et de la réalisation effective de la ligne ferroviaire Lyon-Turin, en cours de travaux, mais dont le calendrier était encore incertain il y a peu. Ces deux dépenses considérables sont-elles intégrées au budget de l'AFITF ?

M. Philippe Dominati . - Je m'associe à ce qui a été dit plus haut concernant le financement des transports en Île-de-France. Je rappelle que j'avais fait partie des parlementaires qui doutaient du mode de financement de la SGP lors de sa création. Nous avons joué à l'apprenti sorcier dans ce domaine.

La région Île-de-France est l'une des seules régions où l'État s'occupe des transports collectifs. Il le fait par l'intermédiaire de quatre ou cinq sociétés, régulièrement remplacées lorsqu'elles perdent leur crédibilité financière. Ces sociétés n'ont pas de capital et sont alimentées uniquement par la voie de l'emprunt et par les taxes perçues sur les entreprises et les particuliers.

Je demande le lancement d'une mission d'information ou l'organisation d'une réunion exceptionnelle de la commission sur ce sujet. Pourquoi l'État a-t-il ainsi le monopole du financement et de l'organisation des transports en Île-de-France au détriment des citoyens et des entreprises ? Une remise à plat complète du mode de financement de ces sociétés m'apparaît nécessaire, d'autant que le stade de l'agacement est aujourd'hui largement atteint et partagé.

M. Claude Raynal . - Le Cerema trouve difficilement sa place dans le paysage institutionnel. Il manque de perspectives claires. Lui demander de se rapprocher des départements pour trouver des contrats revient à oublier que ces derniers sont soumis au code des marchés publics et qu'il n'est pas certain que le Cerema remporte leurs appels d'offres. Un fort besoin d'éclaircissement s'exprime donc quant à l'avenir de cet opérateur, dont les personnels sont en plein doute.

Par ailleurs, il apparaît contradictoire de diminuer de 4 % la subvention pour charges de service public dont bénéficie Météo-France tout en annonçant que cet organisme se dote d'un nouveau supercalculateur pour pouvoir demeurer un opérateur météorologique de rang mondial. Comment peut-on à la fois être un opérateur de rang mondial et disposer de moins de moyens ?

M. Victorin Lurel . -Jean-François Husson évoque dans son rapport la question des zones non interconnectées au territoire métropolitain (ZNI) et mentionne des surcoûts d'achat aux producteurs tiers. De qui s'agit-il ?

Les achats d'électricité s'élèvent à 293 millions d'euros en Guadeloupe, à 376 millions d'euros à La Réunion et 207 millions d'euros à la Martinique. À qui cette électricité est-elle achetée et à quel prix ?

Par ailleurs, en quoi la préconisation du rapporteur de revoir à la baisse le taux de rémunération des capitaux investis fixé depuis 2006 à 11 % affectera-t-elle la contribution au service public de l'électricité (CSPE) ? Comment cela améliorera-t-il les affaires d'EDF dans ces régions ?

L'augmentation annoncée du surcoût d'achat à des producteurs tiers est d'autant moins compréhensible dans le cas de la géothermie, le mégawattheure produit par ce biais coûtant nettement moins cher que l'énergie fossile importée. Je rappelle qu'il existe une controverse politique sur Ormat Technologies, qui gère la centrale géothermique de Bouillante.

La suppression des redevances communale et régionale géothermique instituées par la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer me gêne par ailleurs, car les redevances rapportent environ 200 000 euros à la commune de Bouillante et 400 000 euros à la région. De manière générale, la suppression des taxes à faible rendement décidée à l'article 6 du projet de loi de finances pour 2020 me semble poser problème, car elle revient à toucher aux recettes des collectivités.

Le Fonds « Barnier » a permis de financer depuis 2011 la démolition de l'habitat informel et indigne en outre-mer. Je suis favorable à la prorogation de ce dispositif proposé à l'article 74 quater . Disposez-vous d'un bilan de son utilisation ? Quels territoires en ont bénéficié ?

M. Jean-François Husson , rapporteur spécial . - La question des accidents industriels justifie de mettre plus de moyens sur la prévention. Prudence est mère de sûreté : mieux vaut prendre le temps et trouver les bons dispositifs. Je vous transmettrai ultérieurement les données demandées sur ces accidents ainsi que sur les stations-service. Des projets éoliens en mer ont été retardés, car les appels d'offres avaient été lancés à des conditions financières devenues hors marché en raison de délais très longs. S'agissant du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » évoqué par Rémi Féraud, il me semble qu'il s'agit d'une mesure technique et je n'y vois pas de mauvaise intention, même si cela fait déjà deux ans que l'on assiste à un réajustement.

Sur la question de Victorin Lurel relative à l'achat d'électricité, nous ne disposons pas de bilan exact, mais la question est complexe ; la baisse du taux de rémunération des capitaux investis reste un objectif commun. Sachez que le Fonds Barnier a été mobilisé en 2017 et 2018 sur cette question, mais je vous ferai parvenir un bilan plus détaillé ultérieurement.

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - Le rapport de François Philizot n'a malheureusement pas encore été rendu public. Sur le fret capillaire, nous aurons cet après-midi en séance publique un débat à l'initiative du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, au cours duquel je poserai ces questions au Gouvernement.

La reprise de la dette de SNCF Réseau par l'État est inscrite au programme 355 : le coût de cette reprise est de 409 millions d'euros au titre de 2020. En délestant SNCF Réseau de sa dette et des charges financières afférentes, cette reprise devrait permettre à l'entreprise de retrouver de la capacité de financement, notamment pour la régénération du réseau. En outre, l'État devrait conclure avec l'entreprise un contrat de performance comportant des engagements en termes d'efforts de productivité significatifs.

L'État n'a pris aucun engagement sur une éventuelle pluri-annualité de la subvention d'investissement de 4,5 millions d'euros versée à la SNSM : si celle-ci devait être pérenne, il n'y aurait aucun problème pour renouveler la flotte ; dans le cas contraire, si l'État se désengage dès 2021, le problème restera entier.

En réponse à Marc Laménie, un effort est prévu pour le matériel roulant de 3,5 milliards d'euros sur dix ans.

Le canal Seine-Nord et le Lyon-Turin sont financés ; mais comme nous n'avons pas eu communication du budget détaillé de l'AFITF, je ne peux pas en dire plus.

Sur la Société du Grand Paris, je vais probablement suggérer que nous constituions une mission d'information, car nous n'obtenons aucune réponse satisfaisante: mise à part une information sur l'évolution des coûts, le rapport du Gouvernement que nous venons de recevoir est complètement vide. Le rapport de Gilles Carrez de septembre 2018 sur les ressources de la SGP avait demandé une diminution de 10 % des coûts : on nous a présenté une baisse de 0,6 milliard d'euros sur les nouvelles lignes du Grand Paris Express, qui sont des opérations SGP, mais on constate qu'elle est entièrement compensée par une augmentation du même montant sur les ouvrages sous maîtrise d'ouvrage RATP... Tout cela s'équilibre même s'il s'agit d'opérateurs différents !

En seconde partie du projet de loi de finances pour 2020, l'Assemblée nationale a voté la fusion des fonds de péréquation départementaux : les règles du jeu changent tout le temps sans vision d'ensemble ! Je ne peux pas répondre plus précisément à la question sur les conséquences de la ponction de 75 millions d'euros ...

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - Il y a deux ans, le Cerema a connu une crise majeure, sociale et de gouvernance. Le dialogue social a été renoué, mais beaucoup reste à faire. La nouvelle équipe de direction générale a rassuré en mettant un terme à la réduction de son implantation au niveau territorial, mais elle est encore à la recherche d'un plan de charges et de perspectives claires pour son avenir, notamment sur son articulation avec la nouvelle ANCT. Dans quelles conditions financières le Cerema pourrait-il contribuer à l'action de l'ANCT ? Le Cerema pourrait utiliser sa subvention pour charges de service public afin de fournir un service à très bas coût, dans le respect du droit des marchés publics, et mener une stratégie de niches au profit des collectivités qui en ont besoin. Nous pourrions utilement entendre l'équipe dirigeante du Cerema, conjointement avec la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Un contrat d'objectifs et de performance devrait être signé avec l'État et une convention avec l'ANCT. Ses effectifs auront diminué de 22 % en 2022 par rapport à 2015 : il faudra s'arrêter là.

Notre groupe d'étude de l'aviation civile auditionnera prochainement le directeur de la recherche du groupe Airbus et pourra l'interroger sur l'impact du vol en escadrille sur l'empreinte carbone. Il me semble que la diminution de l'empreinte carbone ne doit pas se faire au détriment de la sécurité qui impose une distance minimale entre deux avions, de l'ordre de trois kilomètres.

Je partage l'inquiétude de Jean Bizet au sujet d'Air France. La nouvelle équipe a remis l'entreprise sur la voie du dialogue social, de l'amélioration de la qualité de l'offre et de la recherche de la performance, mais ses derniers résultats trimestriels ne sont pas meilleurs que ceux de l'année passée, qui avait pourtant été marquée par les grèves. La compétitivité de la compagnie n'est pas bonne : l'écart de compétitivité peut être chiffré à 800 millions d'euros ; les Assises avaient permis d'en combler 60 ou 80 millions d'euros. N'oublions pas qu'une telle compagnie, comme les aéroports, est un instruments de souveraineté ! Les charges sociales ont été allégées pour les entreprises maritimes, il me semble que c'est la voie à suivre. Un rapport sur ce thème a été commandé au CGEDD et à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Sur les compagnies à bas coût, le vrai problème aujourd'hui c'est Volotea qui a des contrats très choquants pour les copilotes notamment : les actions en cours devront aller au bout.

La baisse des crédits et des moyens humains de Météo France ne va pas pouvoir se poursuivre très longtemps. Le financement de l'acquisition d'un supercalculateur est bouclé. Avec l'amélioration de la capacité de calcul, on pourra réduire encore un tout petit peu les moyens humains. La nouvelle présidente me semble avoir pris la mesure de la situation. J'admire la résilience de Météo-France, du Cerema, de l'IGN... Mais on ne pourra pas aller beaucoup plus loin dans les baisses de crédits.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des articles 76 et 76 bis sans modification.

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - L'amendement n° 2 vise à rectifier une erreur dans l'article 76 ter tel que voté par l'Assemblée nationale. En effet, ADP ne peut pas faire d'avances sans intérêts.

L'amendement n°2 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 76 ter , sous réserve de l'adoption de son amendement.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 76 quater , sans modification.

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - L'article 76 quinquies procède à l'abandon des créances détenues par l'État sur la société internationale de la Moselle. Le Luxembourg et l'Allemagne, également actionnaires de cette société, ont également décidé d'abandonner leurs créances. Je suis favorable à l'adoption de cet article compte tenu des montants en jeu et de la position de nos partenaires.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 76 quinquies , sans modification.

L'amendement n°1 sur les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » est adopté. La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », sous réserve de l'adoption de son amendement.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique ».

*

* *

Réunie à nouveau le 21 novembre 2019, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission. Elle propose en revanche d'adopter sans modification les articles 76, 76 bis , 76 quater , 76 quinquies , ainsi que l'article 76 ter tel que modifié par son amendement. Enfin, elle propose de confirmer sa décision d'adopter les crédits du budget annexe tels que modifiés par son amendement et d'adopter sans modification les crédits des comptes d'affectation spéciale.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de la transition écologique et solidaire

Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM)

- M. Marc PAPINUTTI, Directeur ;

- Mme Isabelle ANDRIVON, Chef de service de l'administration générale et de la stratégie.

Direction des affaires maritimes (DAM)

- M. Thierry COQUIL, Directeur.

Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER)

- M. Bernard ROMAN, Président ;

- Mme Stéphanie DRUON, Secrétaire générale.

Voies navigables de France (VNF)

- M. Thierry GUIMBAUD, Directeur général.

Société du Grand Paris

- M. Thierry DALLARD, Président du directoire ;

- M. Frédéric BRÉDILLOT, Membre du directoire.

SNCF Mobilités

- M. Mathias EMMERICH, Directeur Délégué Performance ;

- Mme Laurence NION, Conseillère parlementaire.

SNCF Réseau

- M. Alain QUINET, Directeur général délégué Économie Performance ;

- M. Hugues de NICOLAY, Directeur général Adjoint ;

- Mme Laurence NION, Conseillère parlementaire.

Fédération nationale des Transports routiers (FNTR)

- Mme Florence BERTHELOT, Déléguée générale.

Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF)

- M. Jean ABELE, Secrétaire général ;

- M. Christophe BÉCHU, Président du conseil d'administration ;

- M. Sokhetra JOSSET, Secrétaire général adjoint.


* 1 Rapport d'information n° 858 (2015-2016) du 28 septembre 2016 de Vincent Capo-Canellas, Yvon Collin, Marie-Hélène des Esgaulx, Thierry Foucaud, Roger Karoutchi, Fabienne Keller, François Patriat et Daniel Raoul, fait au nom de la commission des finances.

* 2 Par le décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004.

* 3 AFITF, Rapport d'activité 2015, octobre 2016.

* 4 Cette taxe est prévue à l'article 302 bis ZB du code général des impôts.

* 5 L'agence s'attend quand même à un moins-perçu de redevance domaniale de 8 millions d'euros en 2018.

* 6 Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer).

* 7 Il s'agit de la régulation des redevances aéroportuaires, auparavant confiée à l'Autorité indépendante de supervision des redevances aéroportuaires (ASI).

* 8 Il s'agit d'une part du contrôle de l'accessibilité aux données concernant les déplacements multimodaux ainsi que des conditions de mise en oeuvre des services d'information et de billettique multimodales et, d'autre part, de la régulation des activités de gestionnaire d'infrastructure de la RATP.

* 9 Les opérations sur le réseau routier concédé sont financées directement par l'AFITF sans transiter par le programme 203.

* 10 Cet article dispose que « l'État supporte les frais de l'entretien et de l'exploitation des écluses d'accès, de l'entretien des chenaux d'accès maritime, de la profondeur des avant-ports et des ouvrages de protection contre la mer. Pour l'exécution de ces travaux, il supporte dans les mêmes conditions les dépenses relatives aux engins de dragage ».

* 11 Dans un passé récent, l'État a clairement privilégié la construction de nouvelles lignes à grande vitesse (LGV), qui ont monopolisé les ressources financières, mais également les ressources humaines de SNCF Réseau et de ses sous-traitants.

* 12 Rapport d'information n° 858 (2015-2016) du 28 septembre 2016 de Vincent Capo-Canellas, Yvon Collin, Marie-Hélène des Esgaulx, Thierry Foucaud, Roger Karoutchi, Fabienne Keller, François Patriat et Daniel Raoul, fait au nom de la commission des finances.

* 13 Intérêts courus non échus.

* 14 Ce qui devrait représenter environ 10 milliards d'euros sur 20 ans (de 2010 à 2030) et 30 milliards d'euros sur 60 ans (de 2010 à 2070, horizon prévu pour l'arrivée à échéance des derniers emprunts souscrits par la SGP).

* 15 Les ressources de la Société du Grand Paris, rapport du député Gilles Carrez, juillet 2018.

* 16 En vertu d'un arrêté pris sur le fondement de l'article 12 de la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, la SGP ne peut souscrire d'emprunts d'une durée supérieure à douze mois auprès d'un établissement de crédit ni d'une société de financement. Elle peut en revanche contracter des emprunts supérieurs à douze mois auprès de la CDC et de la BEI qui ne relèvent d'aucune de ces deux catégories.

* 17 La taxe hydraulique, dont le rendement tendait à se réduire sous l'effet de la diminution du nombre de centrales thermiques et nucléaires d'EDF, principal redevable, et qui, de plus, voyait sa conformité au droit européen remise en cause dans le cadre de plusieurs contentieux, a été supprimée à compter du 1er janvier 2020 par la loi de finances pour 2019.

* 18 27,5 millions d'euros pour les redevances domaniales et 14,5 millions d'euros pour les péages.

* 19 Parmi ces 245 millions d'euros par an, les trois cinquième correspondent à la seule gestion hydraulique du réseau, les deux cinquièmes restant correspondant aux investissements pour la navigation.

* 20 D'après le cluster maritime français, données 2016, sur la base de chiffres 2015, 2014 et 2013.

* 21 Cinq CROSS sont situés en métropole et deux en outre-mer (Martinique et Réunion).

* 22 La SNSM dispose de 230 stations de sauvetage le long des côtes métropolitaines françaises. Elle s'appuie sur l'action de 70 salariés et 7 000 bénévoles. Sous la coordination des COSS, elle contribue à plus de la moitié des opérations de sauvetage en mer.

* 23 Rapport d'information n° 81 (2019-2020) du 22 octobre 2019 de M. Didier Mandelli, fait au nom de la mission commune d'information sur le sauvetage en mer.

* 24 Le montant de cette compensation est susceptible de varier en fonction de la performance de l'exploitant. L'annexe du règlement OSP prévoit en effet que la méthode de compensation « doit inciter au maintien ou au développement d'une gestion efficace par l'opérateur de service public , qui puisse être objectivement appréciée, et de la fourniture de services de transport de voyageurs d'un niveau de qualité suffisant ».

* 25 Le décret n° 2011-914 du 29 juillet 2011 portant approbation de modifications du cahier des charges de la Société nationale des chemins de fer français détermine les conditions dans lesquelles l'État exerce son rôle d'autorité organisatrice des TET, expose les principaux points qui doivent être traités dans la convention et prévoit que la SNCF doit établir un budget et des comptes séparés pour l'exploitation des TET.

* 26 Règlement du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, dit « règlement OSP » (obligations de service public) entré en vigueur le 3 décembre 2009.

* 27 Les modalités de calcul de cette compensation sont précisées par l'annexe du règlement OSP.

* 28 Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

* 29 La baisse de fréquentation est même de - 25 % depuis 2011 pour les lignes TET de nuit.

* 30 Chaque billet vendu nécessitait plus de 100 euros de subventionnement public en moyenne.

* 31 Le Gouvernement avait lancé le 1 er avril 2016 un appel à manifestation d'intérêt (AMI) aux acteurs privés pour ces six lignes. Aucune entreprise n'a désiré reprendre une activité dont la rentabilité paraissait hors de portée.

* 32 L'annexe du règlement européen OST définit ce bénéfice raisonnable (ou « suitable benefit ») comme le « taux de rémunération du capital habituel pour le secteur dans un État membre donné, et qui prend en compte le risque ou l'absence de risque encouru par l'opérateur de service public du fait de l'intervention de l'autorité publique ».

* 33 Il convient toutefois de noter que la Normandie est la seule région à avoir signé une convention d'application avec l'État en bonne et due forme, les autres conventions restant encore à finaliser.

* 34 Cour des comptes, SNCF Réseau, des réformes à approfondir, décembre 2018

* 35 Intérêts courus non échus.

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