Rapport général n° 140 (2019-2020) de M. Gérard LONGUET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2019

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N° 140

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 ,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 14

ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

Rapporteur spécial : M. Gérard LONGUET

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, MM. Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Jean Bizet, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348

Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Avec 74,1 milliards d'euros de crédits demandés pour 2020, les dépenses en faveur de la mission « Enseignement scolaire » progresseraient de près de 2% par rapport à la LFI 2019.

2. L'évolution des dépenses en norme pilotable depuis 2017 n'a pas respecté les prescriptions de la loi de programmation pour 2018-2022 mais l'ampleur des écarts demeure acceptable compte tenu de l'importance et de la structure de cette mission.

3. La dynamique budgétaire de la mission demeure principalement portée par l'évolution des dépenses de personnel . Elles-mêmes sont tirées à la hausse par les effets de la reprise du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (+ 304 millions d'euros) et - même si cette dépense est plus efficiente - par la revalorisation de l'indemnité de sujétions des agents en
REP +.

4. Un véritable effort de maitrise des effectifs peut être constaté puisque tant le schéma que les plafonds d'emplois prévus sont négatifs.

5. Hors titre 2, les dépenses sont marquées par un souci évident de sincérisation budgétaire qui n'est, toutefois, pas correctement expliqué.

6. Les priorités politiques portées par la mission demeurent pertinentes (soutien au premier degré, réforme du second degré, soutien à l'inclusion et à l'attractivité des métiers éducatifs) et poursuivies avec rigueur et pragmatisme .

À la date du 10 octobre 2019, date limite prévue par la LOLF, le rapporteur spécial avait reçu :

- 94 % des réponses au questionnaire budgétaire adressé au ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse ;

- 13 % des réponses au questionnaire budgétaire adressé au ministère de l'agriculture et de l'alimentation.

I. À L'OCCASION DE LA CLÔTURE D'UN EXERCICE TRIENNAL DONT LES PRESCRIPTIONS N'AURONT PAS ÉTÉ TOTALEMENT RESPECTÉES, LE GOUVERNEMENT DEMANDE L'OUVERTURE D'UN MONTANT DE CRÉDITS EN HAUSSE DE PRÈS DE 2 % POUR L'ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

A. AVEC 74,1 MILLIARDS D'EUROS DE CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2020, LA MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE » DEMEURE L'UNE DES PLUS IMPORTANTES DU BUDGET GÉNÉRAL

1. Compte tenu des crédits demandés pour 2020, la mission « Enseignement scolaire » devrait rester l'une des plus importantes du budget général

Au projet de loi de finances pour 2020, les crédits de la mission « Enseignement scolaire » s'élèvent à 74,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 74 milliards d'euros en crédits de paiement (CP).

Place de la mission « Enseignement scolaire » dans l'ensemble
du budget général présenté au PLF pour 2020 1 ( * )

(En crédits de paiement)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

À l'exclusion la mission « Remboursements et dégrèvements », les montants demandés pour 2020 font de la mission « Enseignement scolaire » la première mission du budget général en crédits de paiement et en autorisations d'engagement.

2. La maquette resterait stable en 2020 et marquée par l'inégale importance des programmes du point de vue budgétaire

La maquette de la mission « Enseignement scolaire » demeure inchangée depuis la loi de finances pour 2006 qui, la première, a présenté les crédits par programme conformément aux prescriptions de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001.

Ainsi, aux termes du projet de loi de finances pour 2020, la mission compte six programmes :

- le programme 140 - « Enseignement scolaire public du premier degré » ;

- le programme 141 - « Enseignement scolaire public du second degré » ;

- le programme 230 - « Vie de l'élève » ;

- le programme 139 - « Enseignement privé du premier et du second degrés » ;

- le programme 214 - «  Soutien de la politique de l'éducation nationale » ;

- le programme « 143 - « Enseignement technique agricole ».

Du point de vue budgétaire, le poids relatif de chacun de ces programmes au sein de la mission est, toutefois, inégal.

En effet, les deux programmes « Enseignement scolaire public du premier degré » et « Enseignement scolaire public du second degré » représentent, à eux seuls, près de 77 % des crédits demandés pour 2020, en AE comme en CP.

Répartition des crédits demandés pour l'année 2020 entre
les programmes de la mission « Enseignement scolaire »

Nom du programme

Autorisations d'engagement demandées pour 2020
(y.c CAS « Pensions »)

Part des autorisations d'engagement demandées dans l'ensemble de la mission

Crédits de paiement demandés pour 2020
(y.c CAS « Pensions »)

Part des crédits de paiement demandés dans l'ensemble de la mission

140 - Enseignement scolaire public du premier degré

23 069,88 M€

31,10 %

23 069,88 M€

31,16 %

141 - Enseignement scolaire public du second degré

33 641,02 M€

45,36 %

33 641,02 M€

45,44 %

230 - Vie de l'élève

5 971,06 M€

8,05 %

5 971,06 M€

8,07 %

139 - Enseignement privé du premier et du second degrés

7 637,93 M€

10,30 %

7 637,93 M€

10,32 %

214 - Soutien de la politique de l'éducation nationale

2 376,24 M€

3,20 %

2 238,71 M€

3,02 %

143 - Enseignement technique agricole

14 75,39 M€

1,99 %

1 475,39 M€

1,99 %

Total de la mission

74 171,52 M€

74 033,99 M€

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

3. Les crédits demandés sont en croissance de près de 2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2019

Le niveau des crédits demandés au projet de loi de finances
pour 2020 correspondrait à une hausse de + 1,9 % en autorisations d'engagement et de + 1,8 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2019.

En outre, l'augmentation en valeur des crédits de paiement par rapport à 2019 (+1,3 milliards d'euros) constitue la troisième plus importante du budget général après les missions « Défense » et « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Taux d'évolution du montant des crédits demandés
par programme en 2020 par rapport à la LFI 2019

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

B. L'EXERCICE TRIENNAL 2018-2020 S'ACHÈVE AVEC UNE CROISSANCE EN VOLUME DES DÉPENSES PILOTABLES LÉGÈREMENT PLUS IMPORTANTE QUE PRÉVUE

1. Exprimée du point de vue des crédits en « norme pilotable », la mission « Enseignement » constitue, également, l'une des plus importantes du budget général

Au sens de l'article 9 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (LPFP 2018-2022), les crédits « en norme pilotable » de la mission demandées pour 2020 s'élèvent à 53,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE-NP) et à 53,3 milliards d'euros en crédits de paiement (CP-NP) .

Article 9 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

« I. - L'agrégat composé des dépenses du budget général et des budgets annexes, hors mission Remboursements et dégrèvements et Investissements d'avenir , hors charge de la dette et hors contributions Pensions , des plafonds des impositions de toutes natures mentionnées au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, des dépenses des comptes d'affectation spéciale (hors comptes d'affectation spéciale Pensions , Participations financières de l'État , et hors programmes de désendettement, ou portant à titre principal sur des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers) et du compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public est dénommé norme de dépenses pilotables de l'État et ne peut dépasser, en euros courants, 257,9 milliards d'euros en 2018, 259,5 milliards d'euros en 2019, 260,5 milliards d'euros en 2020, 262,5 milliards d'euros en 2021 et 264,5 milliards d'euros en 2022, correspondant à une cible de diminution de 1 % en volume à compter de 2020. (...) »

La définition fournie par la LPFP 2018-2022 permet, en effet, de reconstituer les crédits de la mission au format de la « norme pilotable » en retranchant - dans le cas d'espèce - les contributions versées au compte d'affectation spéciale « Pensions » (CASP).

Par ailleurs, les projets annuels de performances 2019 et 2020 indiquaient le montant des crédits de paiement « en norme pilotable » au niveau de la mission.

Répartition des crédits « en norme pilotable » demandés pour l'année 2020
entre les programmes de la mission « Enseignement scolaire »

Nom du programme

Autorisations d'engagement demandées pour 2020 en norme pilotable
(AE-NP)

Part des
AE-NP dans l'ensemble de la mission
(en %)

Crédits de paiement demandés pour 2020 en norme pilotable
(CP-NP)

Part des
CP-NP dans l'ensemble de la mission
(en %)

140 - Enseignement scolaire public du premier degré

14 735,83 M€

27,57 %

14 735,83 M€

27,64 %

141 - Enseignement scolaire public du second degré

22 531,31 M€

42,16 %

22 531,31 M€

42,27 %

230 - Vie de l'élève

5 408,86 M€

10,12 %

5 408,86 M€

10,15 %

139 - Enseignement privé du premier et du second degrés

7 596,91 M€

14,21 %

7 596,91 M€

14,25 %

214 - Soutien de la politique de l'éducation nationale

1 927,57 M€

3,61 %

1 790,04 M€

3,36 %

143 - Enseignement technique agricole

1 242,90 M€

2,33 %

1 242,90 M€

2,33 %

Total de la mission

53 443,38 M€

53 305,85 M€

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Ainsi, exprimés « en norme pilotable », les crédits de la mission « Enseignement scolaire » en AE-NP et en CP-NP en font respectivement la seconde et la première mission du budget général .

Place de la mission « Enseignement scolaire » dans l'ensemble
du budget général 2 ( * ) présenté au PLF pour 2020
exprimé « en norme pilotable »

(En crédits de paiement en « norme pilotable)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

2. L'exécution triennale s'achève légèrement au-dessus des prévisions en valeur et en volume

Alors que les prescriptions du budget triennal 2018-2020 arrivent à échéance , votre rapporteur spécial estime qu' il est nécessaire de les confronter à la réalité budgétaire sur cette période .

En loi de programmation des finances publiques 2018-2022, le Parlement avait, en effet, adopté des plafonds d'évolution des crédits de paiement « en norme pilotable » par mission exprimés en euros courants .

Force est de constater que ces plafonds n'ont pas été entièrement respectés et que, cette année encore, le projet de loi de finances prévoit un montant de crédits de paiement supérieur de 30 millions d'euros à la programmation pluriannuelle .

Écarts annuels entre la croissance des crédits de paiement
de la mission (CP-NP) et les
plafonds définis en LPFP 2018-2022

(base 100 en 2017)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Il est entendu que les hypothèses d'inflation et de croissance retenues lors de l'élaboration de la loi de programmation 2018-2022 se sont avérées inexactes .

Sur ce fondement, le Gouvernement a pu estimer que le respect des objectifs posés en LPFP comme, par exemple, les plafonds d'évolution des crédits de paiement par mission prévu à son article 15 ne se justifiait plus tout à fait .

Ainsi, lors de son audition du 30 septembre 2019 devant la commission des finances du Sénat, le ministre de l'action et des comptes publics indiquait : « Certes, le Haut Conseil des finances publiques évoque un décalage entre le présent PLF et la loi de programmation des finances publiques votée en 2017, mais je rappelle que la croissance prévue était alors de 1,7 % alors qu'elle ne sera que de 1,3 %, 1,4 % tout au plus. » 3 ( * )

Votre rapporteur spécial ne partage pas cette position exprimée par le ministre même si son jugement demeure plus compréhensif s'agissant de la présente mission.

L'article 15 de la LPFP 2018-2022 impose de respecter une norme de croissance en « euros courant » des dépenses pilotables des missions du budget général.

Il en découle que les plafonds d'évolution des dépenses - exprimés en valeur - comportent, dans la loi, une composante en volume sous-jacente .

Celle-ci représente l'effort budgétaire pluriannuel en volume prescrit pas le législateur pour assurer la soutenabilité des finances publiques . L'évolution de cette composante est par construction indépendante des niveaux de croissance et d'inflation constatés.

Plafond de croissance des dépenses pilotables de la mission
« Enseignement scolaire » prévu en LPFP 2018-2022

2017

2018

2019

2020

Plafond de crédits alloués à la mission
(en norme pilotable - en euros courants)

50,1 Md€

51,49 Md€

52,09 Md€

52,95 Md€

Croissance en valeur (%)

-

+ 2,96 %

+ 1,17 %

+ 1,65 %

Hypothèse d'inflation hors tabac retenue en LPFP 2018-2022 (%)

-

+ 1 %

+ 1,10 %

+ 1,40 %

Croissance en volume sous-jacente (%)

-

+ 1,96 %

+0,07 %

+0,25 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Votre rapporteur spécial estime que - de façon générale - il revenait au Gouvernement de présenter tout au long du triennal des projets de loi de finances prévoyant une croissance des dépenses en volume cohérente avec la loi de programmation .

Concernant la présente mission, cela a été globalement le cas . En effet, une exécution convenable des dépenses en 2018 et un niveau d'inflation supérieur à celui anticipé, ont conduit le Gouvernement à accroitre la dépense - en volume - dans une ampleur moins importante qu'escomptée.

Les montants des crédits autorisés en loi de finances pour 2019 ont ainsi - malgré une inflation légèrement plus faible qu'anticipée - pu croitre en valeur plus fortement que ce que la LPFP prévoyait tout en respectant, néanmoins, la trajectoire d'évolution en volume .

Écart entre la croissance en volume des crédits de paiement de la
mission (CP-NP) et celle sous-jacente à la programmation 2018-2022

(base 100 en 2017)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

L'effet de cet « acquis » de 2018 s'est néanmoins estompé . Cette année le Gouvernement n'a visiblement pas entendu tenir compte de l'obligation - compte tenu du niveau d'inflation qu'il anticipe - de ralentir fortement la croissance en volume des crédits de la mission pour respecter la trajectoire prévue en LPFP 2018-2022.

Votre rapporteur n'ignore pas le difficile pilotage d'une mission essentiellement portée au plan budgétaire par des dépenses de personnel . Il s'accorde, également, avec le Gouvernement sur l'importance pour la Nation de mobiliser des moyens importants - quoique mieux orientés - en faveur de l'enseignement. Il estime, enfin, que ces écarts demeurent raisonnables et ne témoignent pas d'un maniement irraisonné des deniers publics .

II. SANS OCCULTER LES ÉVOLUTIONS DES AUTRES TITRES DE DÉPENSES, LA DYNAMIQUE BUDGÉTAIRE DE LA MISSION DEMEURE LARGEMENT PORTÉE PAR LES MOUVEMENTS DES DÉPENSES DE PERSONNEL

En 2020, les dépenses de personnel (titre 2) s'établiraient à 68,7 milliards d'euros - contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions » (CASP) comprise - et représenteraient près de 93 % de l'ensemble des crédits de la mission en AE comme en CP.

Dans ces conditions, la dynamique budgétaire de la mission est presque exclusivement influencée par les mouvements propres au titre 2 .

Votre rapporteur spécial considère qu'il est utile de qualifier les évolutions des dépenses de personnel en 2020 et sur une période plus ancienne avant de s'intéresser aux autres types dépenses et aux opérateurs de la mission.

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL CONSTITUENT L'ENJEU BUDGÉTAIRE DOMINANT DE LA MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE »

1. Les dépenses de personnel continuent d'augmenter en 2020 notamment sous l'effet des mesures catégorielles
a) Les dépenses de personnel augmenteraient en 2020

Les dépenses de personnel progresseraient de + 1,63 % par rapport à l'autorisation donnée en loi de finances initiale pour 2019 soit une augmentation des dépenses de 1,1 milliards d'euros.

En « norme pilotable » 4 ( * ) , les dépenses de personnel augmenteraient de + 1,75 % , soit 825 millions d'euros, participant à une croissance cumulée depuis 2017 de 3,6 milliards d'euros (+ 5,9 %).

Évolution des dépenses de personnel entre 2017 et 2020

La décomposition des facteurs d'évolution des dépenses de personnel en 2020 laisse apparaitre deux mouvements :

- une pression à la baisse des dépenses de titre 2 de l'ordre
de 557,8 millions d'euros
expliquée à hauteur de 421 millions d'euros pas le glissement-vieillesse-technicité (GVT) négatif ;

- une pression à la hausse des dépenses de titre 2 de l'ordre
de 1,4 milliard d'euros
expliquée par l'importance du GVT positif
pour 731 millions d'euros et des mesures catégorielles pour 393 millions d'euros.

Facteurs d'évolution des dépenses
de personnel (hors CAS « Pensions ») en 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

b) La reprise du PPCR est le principal facteur de dynamisme du coût des mesures catégorielles

Le coût des mesures catégorielles prévues au PLF 2020 s'élèverait à 395,5 millions d'euros . Le coût agrégé des mesures catégorielles prises dans le champ de la mission depuis le début du quinquennat s'élève, ainsi, à 748,2 millions d'euros .

Il s'agit d'un montant comparable à celui réalisé pour la seule année 2017 ce qui traduit une implication notable en faveur d'une maitrise de la masse salariale.

Toutefois, votre rapporteur spécial constate que le coût annuel des mesures catégorielles a plus que triplé depuis 2018 ce qui pourrait traduire un relâchement tendanciel.

Évolution du coût annuel des mesures catégorielles de la mission

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaire

En réalité, la décomposition du coût des mesures catégorielles met à jour le rôle déterminant joué par l'accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) dans cet accroissement des dépenses.

L'accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations »

Le protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) est le fruit d'une négociation entre le précédent gouvernement et les organisations syndicales, ouverte le 7 octobre 2014 et clôturée le 17 juillet 2015.

Couvrant les trois versants de la fonction publique, ce protocole comprend deux mesures principales :

- transformer une partie des primes des fonctionnaires en points d'indice, pour harmoniser les rémunérations des agents mais aussi augmenter les pensions des futurs retraités ;

- rénover les grilles indiciaires, pour étendre l'amplitude entre le début et la fin de carrière et conforter le traitement indiciaire des fonctionnaires.

À l'issue du protocole PPCR, la rémunération annuelle d'un infirmer aura par exemple augmenté de 1 246 euros bruts, celle d'un attaché d'administration
de 1 171 euros et celle d'un gardien de la paix de 857 euros.

Initialement, la mise en oeuvre du protocole devait s'étaler sur quatre ans, entre 2016 et 2020. L'actuel Gouvernement a toutefois reporté d'un an l'ensemble des mesures prévues, en raison des coûts générés. L'année 2018 a constitué une « année blanche » et la mise en oeuvre de l'accord PPCR a été allongée jusqu'en 2021.

Le coût total de cet accord est estimé à 3,75 milliards d'euros
entre 2016 et 2021.

Coût total du protocole PPCR
pour les trois versants de la fonction publique

(en millions d'euros)

Source : direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP)

La reprise du PPCR en 2019 contribue, ainsi, fortement à l'aggravation des dépenses et devrait - du reste - produire des effets de long terme contre lesquels votre rapporteur spécial s'est déjà élevé 5 ( * ) .

En 2020, le protocole PPCR représenterait à lui seul 77,4 % du coût total des mesures catégorielles, soit 304 millions d'euros .

Comme il a déjà eu l'occasion de le dire et ainsi qu'il s'en expliquera encore dans le présent rapport, votre rapporteur spécial considère comme dispendieuses et inefficientes les mesures non-ciblées de revalorisation de rémunération des agents publics .

Part du PPCR dans l'évolution du coût annuel
des mesures catégorielles

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

En recomposant la situation budgétaire de la mission neutralisée de l'effet du PPCR, on constate que l'évolution du coût des mesures catégorielles s'élève à + 88,9 millions d'euros en 2020 à + 115 millions d'euros en 2019

Ainsi, votre rapporteur spécial réaffirme qu'il considère la reprise du PPCR comme l'élément principal du dérapage des dépenses de masse salariale observé depuis la loi de finances pour 2019.

Dès lors, il estime que la responsabilité du Gouvernement ne peut être que partielle . En effet, le PPCR constitue un héritage malheureux du quinquennat précédent.

c) En dehors du PPCR le coût de mesures catégorielles augmente sous l'effet des mesures de revalorisation indemnitaire en REP + et de mise en oeuvre de l'agenda social

A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, le Gouvernement a défendu le principe d'une revalorisation de l'indemnité de sujétions des personnels exerçant dans les écoles et établissements des d'éducation réseaux prioritaires renforcés (REP +) .

Cette revalorisation, dont le montant devait correspondre à un gain de 3 000 euros nets par agent , a été mise en oeuvre progressivement entre les rentrées scolaires 2018 et 2020 .

Compte tenu de ce calendrier, la mesure catégorielle a été distinguée en loi de finances entre deux postes de dépenses :

- dès la LFI pour 2018 et jusqu'au PLF pour 2020, une composante indemnitaire prenant ses effets à partir du mois de septembre de l'année couverte par la loi de finances ;

- à partir de la LFI pour 2019 et jusqu'au PLF pour 2021, une composante correspondant à la prise en compte des effets d'extension en année pleine (EAP) de la mesure décrite ci-avant.

Au projet de loi de finances pour 2020, les crédits demandés pour financer le dernier tiers de cette revalorisation indemnitaire s'élèvent à 58,6 millions d'euros , dont 66,5 % au titre de la composante EAP.

En tout état de cause, le PLF pour 2021 devra prévoir l'ouverture d'une ligne de crédit pour financer la composante EAP résiduelle dont le montant, comme en 2020, pourrait s'élever à près
de 39 millions d'euros.

Comme le rappelle le graphique ci-après, le coût budgétaire de cette mesure représenterait 66 % du montant total des mesures catégorielles en 2020, hors effet du PPCR. De fait, depuis la loi de finances pour 2018, la revalorisation des indemnités de sujétion en REP + représente la principale mesure catégorielle de la mission, hors PPCR.

Part des mesures de revalorisation d'indemnité en REP+
dans l'évolution du coût annuel des mesures catégorielles (hors PPCR)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Enfin, l'augmentation du coût des mesures catégorielles s'explique par les dépenses prévues dans le cadre de « l'agenda social ».

Alors qu'il s'élevait à 15,6 millions d'euros en 2019 , le coût de ces mesures atteindrait 21,9 millions d'euros en 2020 , soit une hausse de + 40,4 %. En outre, le coût en année pleine de ces mesures est estimé à 37,6 millions d'euros.

Coût pour 2020 des mesures issues de l'agenda social
en comparaison du reste des mesures catégorielles
(hors PPCR et revalorisation indemnitaire en REP+)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Selon la documentation publique du ministère de l'Éducation nationale, « l'agenda social est un calendrier de concertation sur les grands enjeux de la gestion des personnels du ministère » 6 ( * ) . Votre rapporteur constate, néanmoins, que cette documentation classe au titre de l'agenda social un nombre important de dispositifs retracés de façon indépendante dans les documents budgétaires.

Ainsi, la revalorisation de l'indemnité en REP + ou le financement du PPCR sont-ils cités comme relevant de « l'agenda social ». Cette situation n'est pas satisfaisante d'autant qu'en définitive les documents budgétaires ne permettent pas d'apprécier la nature des mesures concrètes financées au titre de « l'agenda social ».

Tout au plus est-il possible d'établir que les mesures financées consistent pour près de 60 % en des mesures de nature indemnitaire et qu'elles ont, à 44 %, concerné le seul corps des enseignants.

Interrogé sur la nature des mesures concernées par l'agenda social, le cabinet du ministre a fourni quelques éléments d'explication supplémentaires .

Qu'est-ce que l'agenda social et quelles
mesures concrètes contient-il ?

L'agenda social du ministère a été présenté en comité technique ministériel du 16 mai 2018.

Il s'agit d'un calendrier pluriannuel de concertation sur les grands enjeux de la gestion des personnels du ministère, fondé sur une approche équilibrée entre les différentes catégories de personnels et dont les objectifs sont les suivants :

- renforcer l'attractivité des métiers et des carrières ;

- l'ensemble des champs des ressources humaines du ministère et partager une vision « à 360 degrés » de la gestion des ressources humaines ;

- adapter la RH de l'éducation nationale aux nouveaux enjeux.

Au cours de l'année 2018-2019, l'agenda social a permis de conclure les chantiers relatifs à l'amélioration de l'entrée dans la carrière et à la dynamisation des parcours de carrière.

Dans ce cadre, au titre des principales mesures déjà arbitrées : institution d'une allocation de formation versée aux professeurs bénéficiant d'actions de formation pendant les périodes de vacance des classes. Taux horaire brut : 20 €.

Ce dispositif permettra d'encourager la formation pendant les périodes de vacance des classes afin de développer l'accès à la formation tout en limitant les absences pendant le service d'enseignement. Le dispositif est applicable aux formations engagées à compter du 1er avril 2019.

Source : Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse

2. Tout en ayant inégalement impliqué les différents programmes, l'effort de maitrise des effectifs est réel depuis 2018
a) L'évolution pour 2020 des schémas et plafonds d'emploi va dans le sens d'une maitrise des effectifs de la mission

Le schéma et les plafonds d'emplois retenus pour 2020 devraient favoriser une meilleure maitrise de la croissance des dépenses de personnels dans les années futures .

Le schéma d'emploi est négatif, comme l'année passée , tout en traduisant l'engagement du président de la République de trouver un nouvel équilibre des ressources en faveur du premier degré. Votre rapporteur spécial aura l'occasion de préciser les résultats de cet effort.

Pour la première fois en cinq ans, les plafonds d'emplois demandés sont en contraction . Votre rapporteur spécial espère qu'il s'agit d'une mesure de bonne prévision autant que de maitrise de la dépense.

Il rappelle, en effet, qu'il a régulièrement eu l'occasion de dénoncer les sous-consommations des plafonds d'emplois lors de l'exécution des lois de finances antérieures. Ces pratiques nuisent à la sincérité du débat parlementaire et doivent donc être évitées.

Évolution du schéma et des plafonds d'emplois
demandés en 2020 par rapport à 2019

Nom du programme

Schéma d'emploi en 2020 par rapport à 2019
(en ETP)

Évolution du plafond d'emplois en 2020 par rapport à 2019
(en ETPT)

140 - Enseignement scolaire public du premier degré

+ 440

+ 1 315

141 - Enseignement scolaire public du second degré

- 440

- 2 108

230 - Vie de l'élève

0

+ 14

139 - Enseignement privé du premier et
du second degrés

0

- 366

214 - Soutien de la politique de l'éducation nationale

0

- 67

143 - Enseignement technique agricole

- 60

- 27

Total mission

- 60

- 1 239

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

b) Depuis 2018, le Gouvernement cherche indéniablement à maitriser l'évolution des effectifs de la mission malgré le poids du passé

Depuis 2018, le Gouvernement conduit une politique salutaire de maitrise des effectifs . Ainsi, sur les trois premières années de ce quinquennat, le nombre des emplois sous plafond a augmenté d'un point de pourcentage de moins que durant les trois dernières années du précédent quinquennat.

Comparaison de l'évolution des plafonds d'emplois
sur les périodes 2015-2017 et 2018-2020

(en pourcentage - en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Malheureusement, du point de vue des créations d'emplois en équivalent temps plein (ETP), le Gouvernement n'est pas parvenu à compenser les effets des décisions prises durant la seule dernière année du précèdent quinquennat.

En effet, si les choix du Gouvernement actuel pourraient contribuer à une diminution de 1 109 ETP depuis 2018, ces efforts n'entament pas les effets de l'intenable gestion des effectifs constatée jusqu'en 2017. Malgré les baisses d'effectifs, le nombre d'agents en équivalent temps plein aura augmenté de 8 686 entre 2017 et 2020.

Décomposition du solde de création d'emplois en équivalent
temps plein (ETP) entre 2017 et 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

c) Une répartition différenciée des efforts de maitrise des effectifs entre les programmes

Sur la période 2017-2020, la contribution des différents programmes à la maitrise de l'évolution des effectifs a été variable .

Ainsi, les programmes 139 - « Enseignement privé du premier et du second degrés », 141 - « Enseignement scolaire public du second degré » et 143 - « Enseignement technique agricole » ont connu une croissance du nombre de leurs emplois en équivalent temps plein travaillé (ETPT) inférieure à la moyenne constatée sur l'ensemble de la mission.

Ces trois programmes sont tous caractérisés par l'importance des dépenses de personnels en leur sein et représentent plus de 60 % des dépenses de titre 2 de la mission.

Évolution du nombre d'emplois sous plafond (en ETPT)
des programmes de la mission entre 2017 et 2020

(base 100 en 2017 - hors programme 230)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

A l'inverse, trois programmes ont connu une croissance des emplois sous plafond supérieure à la moyenne de la mission sur la période .

Il s'agit, d'une part, du programme 140 - « Enseignement scolaire public du premier degré » en raison de la priorité qui lui a été donné et, d'autre part, des programmes 214 - « Soutien de la politique de l'éducation nationale » et 230 - « Vie de l'élève ».

Le programme 230 - « Vie de l'élève » n'apparait pas au graphique précédent. En effet, compte tenu de l'ampleur de la dynamique de ses effectifs, il semble plus opportun de l'examiner séparément.

La forte croissance des effectifs du programme 2014 - « Soutien de la politique de l'éducation nationale » doit être relativisée.

En effet, elle résulte du cumul d'une défaillance en prévision et en exécution dont il conviendra d'apprécier la pleine ampleur à l'occasion de la loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2019 .

En loi de finances initiale pour 2018, le Gouvernement avait obtenu l'ouverture d'un plafond de 27 785 emplois (ETP) au titre de ce programme. Néanmoins, il n'aura consommé que 94 % de ce plafond comme l'indique le rapport annuel de performances pour 2018 - ce qui d'ailleurs critiquable.

Ce résultat d'exécution n'ayant pas été pris en compte lors de la demande d'ouverture d'un nouveau plafond d'emplois au titre de l'année 2019, le nombre des effectifs autorisé en loi de finances pour cette dernière année s'en retrouve substantiellement supérieur au nombre des emplois consommés en 2018.

Le constat d'exécution du budget 2019 devra, ainsi, permettre d'affiner la trajectoire d'évolution des effectifs de ce programme depuis 2017.

d) Le programme 230 - « Vie de l'élève » a connu la croissance d'effectifs la plus importante de la mission en raison de la politique menée en faveur des AESH

Dynamique du programme 230 en matière d'évolution des emplois
(en ETPT) par rapport au reste de la mission

(base 100 en 2017)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Le programme 230 - « Vie de l'élève » se caractérise par la très importante augmentation de son plafond d'emplois depuis 2017 . En effet, depuis cette date et sous réserve d'une consommation conforme à l'autorisation prévue pour 2019, les effectifs en ETPT auront augmenté onze fois plus rapidement au sein de ce programme que dans le reste de la mission.

Cette dynamique s'explique par la politique de dé-précarisation des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH ) qui sont, depuis 2016, progressivement intégrés au sein des effectifs du programme à raison de +6 400 ETPT par an jusqu'en 2020.

La « CD-isation » des AESH - selon les termes du projet annuel de performances pour 2020 - n'a pas été sans incidence sur les dépenses de titre 2 sur le programme.

Hors contribution au CAS « Pensions » et en tenant compte de la demande d'ouverture de crédits pour l'année à venir, on constate, ainsi, que les dépenses de personnel du programme auront augmenté cinq fois plus rapidement que celles du reste de la mission sur la période 2017-2020 .

Écart de croissance des dépenses de personnel
du programme 230 et de la mission entre 2017 et 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Enfin, une part notable de cette croissance rapide peut effectivement être imputée au processus d'intégration des AESH au sein des effectifs du programme comme le démontre le tableau infra .

Montant et poids relatifs des mesures d'intégration des AESH
dans les effectifs du programme de 2018 à 2020

Année

Impact de l'intégration des AESH sur les dépenses de personnel
(en euros courants)

Montant total de la variation des dépenses de personnel du programme
(en euros courants)

Part relative des mesures d'intégration des AESH
(en %)

2018

150 M€

441 M€

34 %

2019

150 M€

191 M€

78 %

2020

28,6 M€

77,4 M€

36 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

B. LES CRÉDITS AUTRES QUE LES DÉPENSES DE PERSONNEL SONT DYNAMIQUES ET LES MONTANTS PRÉVUS TÉMOIGNENT D'UN EFFORT NOTABLE DE SINCÉRISATION

1. Avec plus de 5 milliards d'euros, les crédits autres que les dépenses de personnel peuvent être comparés à une mission budgétaire propre

En 2020, les dépenses de la mission autres que celles de personnel s'élèveraient à 5,5 milliards d'euros en AE comme en CP .

Le niveau de ces dépenses peut être comparé à celui des autres missions du budget général . Il est, ainsi, supérieur à l'ensemble des crédits demandés pour les missions « Administration générale et territoriale de l'État », « Relations avec les collectivités territoriales » ou encore « Agriculture ».

Le niveau de ces dépenses augmenterait de + 3,4 % en 2020 par rapport aux montants inscrits en loi de finances initiale pour 2019 . Il s'agit, de ce fait, d'une croissance près de deux fois supérieure à celle des crédits de l'ensemble de la mission en 2020.

La répartition des crédits entre les différents titres laisse apparaitre que près de 86 % d'entre eux correspondent à des dépenses d'intervention pour un montant s'élevant, en 2020, à 4,5 milliards d'euros.

Répartition des dépenses autres que celles de personnel
de la mission « Enseignement scolaire » en 2020

Titre de la dépense

Montant en AE

Montant en CP

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

721,7 M€

698,80 M€

dont dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

562,27 M€

539,37 M€

dont subventions pour charges de service public

159,43 M€

159,43 M€

Titre 5 - Dépenses d'investissement

181,74 M€

67,11 M€

dont dépenses pour immobilisations corporelles de l'État

181,74 M€

67,11 M€

Titre 6 - Dépenses d'intervention

4 518,89 M€

4 518,89 M€

dont transferts aux ménages

892,44 M€

892,44 M€

dont transferts aux collectivités territoriales

2 453,43 M€

2 453,43 M€

dont transferts aux autres collectivités

1 173,02 M€

1 173,02 M€

Titre 7 - Dépenses d'opérations financières

0,17 M€

0,17 M€

dont dotations en fonds propres

0,17 M€

0,17 M€

Total hors titre 2

5 422,5 M€

5 285 M€

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Ces dépenses d'intervention sont particulièrement dynamiques puisqu'elles sont en augmentation de plus de 5 % par rapport à 2019.

Elles se répartissent entre trois grandes catégories dont la plus importante - du point de vue des montants transférés - concerne les dépenses en faveur des collectivités territoriales .

À titre de comparaison, le montant des transferts aux collectivités territoriales portés par la mission « Enseignement scolaire » s'élèverait à 2,4 milliards d'euros ce qui représente l'équivalent de plus de 60 % des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » .

2. Si la nature ou l'évolution de certaines dépenses prévues en 2020 peuvent susciter des interrogations, nombre d'entre elles sont pleinement justifiées et s'inscrivent, le cas échéant, dans une démarche de sincérisation

Un certain nombre des orientations budgétaires proposées au titre de la mission « Enseignement scolaire » peuvent susciter des interrogations.

Pour certaines d'entre elles, votre rapporteur spécial souhaite apporter des éléments de contexte et d'explication .

a) Une diminution des subventions aux établissements publics locaux d'enseignement du second degré qui s'inscrit dans un souci mal expliqué de sincérisation de la prévision budgétaire

Le programme « 141 - Enseignement scolaire public du second degré » connaitrait, en 2020, une importante contraction des dépenses de fonctionnement (- 14,1 %) et d'intervention (- 19,5 %) représentant un montant total de 23 millions d'euros .

Cette évolution est portée principalement par une baisse des subventions versées aux établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) de 16,4 millions d'euros (- 32 %) . Mis en comparaison avec l'évolution observée depuis 2017, cette baisse semble d'autant plus prononcée.

Évolution du montant des subventions
versées aux EPLE entre 2017 et 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Pour rappel, les subventions aux EPLE permettent de couvrir les dépenses pédagogiques restant à la charge de l'État dont la nature est définie à l'article L. 211-8 du code de l'éducation.

Article L211-8 du code de l'éducation

« L'État a la charge :

1° De la rémunération du personnel enseignant des écoles élémentaires et des écoles maternelles créées conformément à l'article L. 212-1, sous réserve des dispositions prévues à l'article L. 216-1 ;

2° De la rémunération du personnel de l'administration et de l'inspection ;

3° De la rémunération du personnel exerçant dans les collèges, sous réserve des dispositions des articles L. 213-2-1 et L. 216-1 ;

4° De la rémunération du personnel exerçant dans les lycées, sous réserve des dispositions des articles L. 214-6-1 et L. 216-1 ;

Des dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique dans les collèges, les lycées et les établissements d'éducation spéciale, dont celles afférentes aux ressources numériques, incluant les contenus et les services, spécifiquement conçues pour un usage pédagogique, ainsi que de la fourniture des manuels scolaires dans les collèges, les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole mentionnés à l'article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime et les établissements d'éducation spéciale et des documents à caractère pédagogique à usage collectif dans les lycées professionnels ;

6° De la rémunération des personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

7° Des droits dus en contrepartie de la reproduction par reprographie à usage pédagogique d'oeuvres protégées dans les écoles élémentaires et les écoles maternelles créées conformément à l'article L. 212-1 . »

Votre rapporteur spécial s'est étonné à la fois de cette diminution des crédits mais également de sa répartition .

En effet, le montant des subventions accordées aux établissements régionaux d'enseignement adapté (EREA) et aux sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) devrait diminuer de 6 millions d'euros par rapport à l'autorisation prévue en loi de finances pour 2019. En conséquence, la dépense par élève passerait de 10,41 € à 7,46 €.

De même, les lycées professionnels devraient s'attendre à une contraction de la subvention qui leur est accordée de 2,6 millions d'euros par rapport à 2019. Celle-ci se traduira par une baisse de la dépense par élève de 17,81 € à 12,77 €.

Votre rapporteur spécial a régulièrement insisté sur l'importance qu'il accorde à l'enseignement professionnel et à l'accès à l'école le plus large.

L'absence d'explications détaillées dans les documents budgétaires permettant d'apprécier l'opportunité ou la justification de cette prévision budgétaire contribue à la rendre assez incompréhensible.

Votre rapporteur spécial a, dès lors, été particulièrement vigilant lors des auditions qu'il a conduites à ce que le ministère de l'Éducation nationale et de la jeunesse fournisse des éléments de justification.

En l'espèce, il a été indiqué à votre rapporteur spécial que cette évolution était justifiée par une volonté de sincérisation de la prévision budgétaire .

En effet, il est apparu que les montants des subventions ainsi versées aux établissements n'étaient généralement pas entièrement consommés formant, à leur profit, un reliquat qui n'était que rarement restitué.

En tenant compte de l'existence de tels reliquats dans la trésorerie des établissements, les crédits demandés sont minorés de sorte à maintenir au même niveau le ratio de la dotation budgétaire par rapport au nombre d'élèves.

Votre rapporteur spécial entend ces éléments d'explication et considère qu'ils justifient effectivement une réduction du montant des crédits pédagogiques demandés pour 2020 .

Néanmoins, il considère que le montant de ces reliquats et les explications précédentes auraient dû figurer dans le projet annuel de performances .

En effet, même s'il s'agit de montants qui ne sont retracés qu'en gestion, ils participent directement à une décision de nature budgétaire et politique et doivent donc être versés le plus tôt possible au débat public .

b) Une baisse des « fonds sociaux » qui s'inscrit dans la même démarche de sincérisation

L'action « Aide sociale » du programme 230 - « Vie de l'élève » serait marquée, en 2020, par une réduction équivalente de 50 % des crédits de l'enveloppe dédiée au fonds sociaux des établissements.

Ces fonds sont versés aux établissements pour apporter une aide exceptionnelle aux familles défavorisées sur décision du chef d'établissement après consultation de la communauté éducative.

Ils se composent d'une part destinée à permettre l'accès à la cantine scolaire et d'une autre au profit des collégiens et lycéens pour faire face aux situations difficiles.

Alors qu'en loi de finances pour 2019, ils s'élevaient à près
de 60 millions d'euros, il est prévu de ramener ce montant à 30,7 millions d'euros en 2020.

Compte tenu de la vocation de ces fonds destinés à permettre de soulager les élèves et les familles connaissant des situations de grande fragilité, cette diminution a alerté votre rapporteur spécial.

Toutefois - et de la même manière que s'agissant des subventions aux établissements - il s'avère que cette mesure se justifie par une volonté de sincérisation budgétaire et n'aura pas d'impact sur la capacité des établissements à faire face aux situations auxquelles ils peuvent être confrontées.

En effet, la sous-consommation - forte heureuse - de ces fonds dans les années précédentes a contribuée à la constitution d'un reliquat dans la trésorerie des établissements.

Suivant le même raisonnement que celui qu'il a retenu s'agissant des subventions aux établissements, le ministère a souhaité ramener le niveau des crédits à celui de 2018 de sorte à tenir compte des reliquats à la disposition des établissements.

Pour les mêmes raisons qu'évoquées précédemment, votre rapporteur spécial adhère à la proposition du Gouvernement , d'une part, et l'incite à mieux faire état des éléments de compréhension nécessaires dans les documents budgétaires, d'autre part.

c) Un financement des « internats du XXIème siècle » par la Caisse des dépôts et consignations qui peut susciter quelques doutes quant à sa pérennité

A l'occasion d'une conférence de presse donnée le 1 er juillet 2019, le ministre de l'Éducation nationale a fait part de son intention de relancer le programme des internats d'excellence dans la perspective de développer des « internats du XXIème siècle ».

Prévu pour être déployé entre 2020 et 2022, ce plan ambitionne de renforcer les capacités actuelles d'accueil en internat de 13 000 places en soutenant la mise en place de 240 projets d'internats . En 2018,
ce sont 201 500 élèves qui étaient internes dans le second degré.

Ces établissements se distingueraient en trois grandes catégories :

- Les « résidences à thèmes » ;

- Les internats d'excellence ;

- Les internats et campus « pro ».

Cette ambition politique s'appuie, toutefois, sur la bonne volonté des collectivités territoriales et sur la mobilisation de leurs ressources.

Pour les inciter à s'investir dans des projets qui pourraient - indéniablement - favoriser l'attractivité de territoires aujourd'hui en grande difficulté, l'État s'appuie sur la Caisse des dépôts et consignations pour qu'elle assure une mission de financement des initiatives à hauteur d'un milliard d'euro.

Votre rapporteur spécial considère que ces « internats du XXIème siècle » sont une excellente initiative mais s'inquiète de la pérennité et de la transparence - notamment financière - d'un tel projet.

La question des moyens alloués par l'État au fonctionnement de ces établissements devra également trouver une réponse ce qui n'est pas le cas à ce stade.

C. LES OPÉRATEURS DE LA MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE » CONDUISENT DES ACTIONS ESSENTIELLES POUR UN COÛT GLOBALEMENT MARGINAL AU REGARD DE L'ENSEMBLE DES CRÉDITS

1. Présentation des opérateurs
a) Les cinq opérateurs de la mission

Le projet de loi de finances pour 2020 indique, comme depuis 2018, que cinq opérateurs participent à l'exécution des crédits de la mission
« Enseignement scolaire ».

- Le Centre d'Étude et de Recherches sur les Qualifications (CEREQ) est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministère de l'éducation nationale et du ministère du travail. Il anime un réseau régional de chercheur étudiant la relation entre formation et emploi.

- Le Centre international d'études pédagogiques (CIEP) est un établissement public administratif appelé à être rebaptisé France Éducation international (FEI). Il élabore des diplômes et certifications en Français langue étrangère (FLE), labélise des centres d'apprentissage en langue française, participe à des projets de formation au profit de systèmes éducatifs étrangers et organise des colloques et séminaires à l'international.

- Le Centre national d'enseignement à distance (CNED) est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur. Il dispense et promeut l'enseignement à distance.

- L' Office national d'information sur les enseignements et les professions (ONISEP) est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur. Disposant d'implantations au niveau régional, il participe à l'information en matière d'orientation et met à disposition des usagers les documentations afférentes.

- Le réseau Canopé est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale. Il exerce une mission d'édition, de production, de développement et de mise à disposition des ressources pédagogiques à destination des communautés éducatives. En outre, il participe à la mise en oeuvre du service public du numérique éducatif.

b) Les crédits consommés et demandés pour les opérateurs de la mission

Les budgets initiaux des opérateurs versés en annexe du PLF pour 2019 retraçaient un niveau global de dépenses, en 2018, de 285,3 millions d'euros en AE et 281,9 millions d'euros en CP .

À l'instar de la mission « Enseignement scolaire » dans son ensemble, la décomposition des postes de dépenses par titre laisse apparaitre la forte dominance des dépenses de personnel .

Répartition des dépenses entre les
opérateurs de la mission en 2018

(en % - en AE)

Décomposition des dépenses des opérateurs par titre en 2018

(en % des dépenses totales de
l'opérateur - en AE)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Au PLF 2020, les crédits demandés au titre d'une subvention pour charges de service public s'élèvent à 151,13 millions d'euros en AE comme en CP correspondant à une baisse de 10,2 millions d'euros par rapport aux crédits ouverts en LFI.

Cette baisse est imputable à la contraction des subventions accordées :

- au CIEP à hauteur de 5,94 millions d'euros correspondant à une extinction de ladite subvention en raison des capacités de trésorerie dont dispose l'opérateur ;

- au réseau Canopé à hauteur de 3,14 millions d'euros sous l'effet d'une maitrise du schéma d'emplois ;

- à l'ONISEP à hauteur de 1,03 millions d'euros dans le contexte d'un transfert progressif d'une partie de ses missions vers les régions .

c) Les emplois consommés et demandés pour les opérateurs de la mission

Au PLF 2020, le schéma d'emplois des opérateurs de la mission est marqué par une diminution de 50 ETPT . Cette dernière s'explique d'abord par la réduction de 56 ETPT prévue au sein du réseau Canopé dont 47 sont sous plafond.

Seul le CIEP connaitra une hausse de ses effectifs avec 11 ETPT dont 4 sous plafond demandés pour soutenir la croissance de l'activité de l'opérateur.

2. Les opérateurs représentent un faible enjeu budgétaire au regard des missions qu'ils exercent
a) Des opérateurs dont les niveaux de dépenses et d'emplois demeurent marginaux au regard de l'ensemble de la mission

Les cinq opérateurs présentés ci-avant représentent une charge de l'ordre de 150 millions d'euros pour la mission « Enseignement scolaire ».

Ces montants doivent être rapportés au 74,1 milliards d'euros de crédits demandés en AE au titre de l'ensemble de la mission pour 2020.

Au sein même du programme 214 - « Soutien de la politique de l'éducation nationale » qui les retracent, ces subventions ne représentent que 6,4 % des crédits demandés en AE pour 2020.

Si les dépenses de personnels demeurent significatives - elles représentaient 75 % des dépenses des opérateurs en 2018 - elles sont loin d'atteindre, en proportion, celles de l'ensemble de la mission en 2020 (92,7 %).

b) Des opérateurs qui sont, pour certains, en pleine transformation

Deux opérateurs au moins vont connaitre d'importantes évolutions au cours de l'année 2020.

Le CIEP, appelé à être renommé France Éducation International , a vu le périmètre de ses missions étendu à la suite des engagements pris par le ministre de l'éducation nationale lors du G7-Education de juillet 2019 . Le Gouvernement souhaite en faire un « pivot » de la stratégie de rayonnement de la France dans le secteur éducatif à l'étranger.

L'ONISEP devra s'adapter, à partir de l'année 2020, aux conséquences de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Cette dernière prévoit le transfert des compétences exercées par les implantations régionales de l'opérateur au profit des régions, notamment en matière d'information à l'orientation. Le PAP 2020 indique sur ce point que ces transferts progressifs impliqueront la définition d'un nouveau schéma budgétaire.

c) Un opérateur qu'il importe de pérenniser : le réseau Canopé

Le rapport public annuel de la Cour des comptes paru en 2014 avait dressé un constat sévère de l'éclatement des acteurs du service public numérique pour l'éducation , qualifiant l'organisation à cette date
« d'hypertrophiée, couteuse et inefficace ».

La création du réseau Canopé par décret du 26 décembre 2014 a constitué la réponse du Gouvernement à cette critique . Ainsi que la Cour le note dans son rapport thématique de juillet 2019, le réseau Canopé est devenu aujourd'hui un acteur clé du service numérique éducatif.

Comme l'ont constaté tant votre rapporteur spécial dans ses fonctions de contrôle que la Cour des comptes à l'occasion du rapport précité, les critiques qui peuvent être formulées concernent davantage aujourd'hui le service public numérique pour l'éducation lui-même que le réseau Canopé .

Davantage qu'une réduction des moyens du réseau Canopé, c'est une clarification de la stratégie numérique de l'État dans le secteur éducatif qui parait aujourd'hui nécessaire . Tout en appelant, au sein même du ministère et des services académiques, à une redéfinition des organisations et du partage des compétences, cette transformation ne justifie pas, a priori, de remettre en cause les moyens accordés au réseau Canopé.

Au contraire, il semble préférable de renforcer cet opérateur pivot alors qu'un nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP) devrait entrer en vigueur au début de l'exercice 2020 .

III. LES CRÉDITS DE LA MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE » SERVENT DES PRIORITÉS POLITIQUES PARTAGÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. UN NOUVEL ÉQUILIBRE SE DESSINE ENTRE LE PREMIER ET LE SECOND DEGRÉ

1. Un investissement insuffisant dans le premier degré et une asymétrie persistante dans la répartition des ressources justifiaient une approche renouvelée

A l'occasion de son rapport sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2019, votre rapporteur spécial avait mis à jour deux phénomènes liés entre eux :

- un niveau de dépenses en valeur trop faible dans le premier degré et trop important dans le second degré, en comparaison des autres pays de l'OCDE, d'une part ;

- une répartition des efforts budgétaires trop favorable au second degré , d'autre part.

a) Des écarts d'investissement dans l'éducation primaire par rapport au reste de l'OCDE

Si le niveau global de dépenses par élève 7 ( * ) dans les premier et second degrés en France en 2016 (19 073 dollars en parité de pouvoir
d'achat - PPA) était supérieur à la moyenne des pays de l'OCDE (18 438 dollars PPA), ce montant masquait d'importants écarts et, notamment, un sous-investissement chronique dans l'enseignement primaire .

Ainsi, en 2016, la dépense par élève dans l'enseignement primaire s'élevait à 8 470 dollars PPA en moyenne dans les pays de l'OCDE contre seulement 7 603 dollars PPA en France.

A l'inverse, l'enseignement secondaire a bénéficié d'un surinvestissement important dont témoigne, un écart de 18,4 % à la moyenne de l'OCDE sur la période 2010-2016.

Écart des dépenses moyennes par élève dans le premier
et le second degré en France et dans l'OCDE

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de l'OCDE

Cette situation paraît avoir porté préjudice aux performances des élèves français . En effet, l'analyse des écarts moyens de dépenses par élève et par degré à la moyenne de l'OCDE considérée montre que les pays qui ont été classés premiers à l'une des trois composantes de l'enquête PISA (écrit, mathématiques et sciences) entre 2009 et 2018 se démarquaient :

- par une dépense dans l'enseignement primaire plus importante que la moyenne de l'OCDE et qu'en France ;

- par des écarts à la moyenne de l'OCDE moins intenses , tant dans l'enseignement primaire que secondaire, que ceux constatés en France.

Moyenne des écarts constatés entre la dépense
par élève du pays et la moyenne de l'OCDE sur la période 2010-2017

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de l'OCDE

Cette dernière différence entre la France et les pays les mieux positionnés dans le classement PISA illustre combien l'asymétrie des efforts budgétaire entre les premier et second degrés a pénalisé les élèves français.

b) Une asymétrie durable des efforts budgétaires au détriment du premier degré

En 2018, la dépense intérieure d'éducation (DIE) consacrée aux premier et second degrés s'était élevée à 107,4 millions d'euros . Sur ce montant, 43,5 % des dépenses avait été affectées au premier degré .

L'asymétrie des moyens respectifs mis à la disposition des premier et second degrés est d'autant plus explicite lorsque l'on examine l'évolution de la dépense moyenne par élève.

Ainsi, sur la période 1980-2018 et pour 100 euros de dépenses, la part attribuée aux élèves en éducation secondaire a été supérieure de 25 euros en moyenne à celle accordée aux élèves du primaire .

Évolution de l'écart entre les parts respectives de la dépense moyenne par élève consacrée aux premier et second degrés en France de 1980 à 2018
(hors enseignement supérieur)

(en point de pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données INSEE

Cet écart a nettement diminué entre 2010 et 2018 en raison d'une stagnation du niveau de la dépense par élève dans le second degré.

Croissance des dépenses par élève dans les premier
et second degrés depuis 1980

(base 100 en 1980)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données INSEE

Malgré cette réduction de l'écart, l'asymétrie des ressources entre le premier et le second degré est demeurée très importante.

Cette situation a longtemps singularisé la France vis-à-vis de ses partenaires de l'OCDE et a - surtout - desservi la performance globale du système éducatif .

En effet, les pays ayant été classés premiers à l'une des trois composantes de l'enquête PISA (écrit, mathématiques et sciences) entre 2009 et 2018 ont tous connus un partage beaucoup plus équilibré entre les dépenses par élèves du primaire et du secondaire sur la période 2010-2016 comme l'illustre le graphique ci-après.

Évolution de l'écart entre la dépense moyenne par élève
consacrée aux premier et second degrés en France, au Japon, en Corée,
en Finlande et dans l'OCDE de 2010 à 2016 (hors enseignement supérieur)

(en point de pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de l'OCDE

Pour l'ensemble de ces éléments en faveur d'un lien entre le sous-investissement dans l'enseignement primaire, l'asymétrie des efforts budgétaires et la faiblesse des performances des élèves français, votre rapporteur spécial a soutenu les projets du Président de la République et le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en faveur d'un nouvel équilibre .

2. Depuis 2018, une nouvelle dynamique budgétaire s'installe en faveur du premier degré
a) L'effort en matière de dépense s'opère effectivement au profit du premier degré

Au-delà des mesures concrètes qui ont accompagné le soutien au premier degré depuis 2018, il convient de constater que la dynamique budgétaire est beaucoup mieux orientée .

Ainsi, exprimés en norme pilotable, les crédits de paiement du programme 140 ont augmenté de + 7,15 % par rapport à 2017. Il s'agit d'une hausse supérieure de 1,6 point à la moyenne de la mission mais, surtout, supérieure de 3,2 points à celle observée au bénéfice de l'enseignement secondaire .

Évolution des crédits consacrés à l'enseignement primaire
et secondaire depuis 2017

(base 100 en 2017)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Cet effort budgétaire se retrouve également dans la politique d'emploi du ministère . En effet, les dépenses de personnel ont augmenté de 7,2 % par rapport à 2017, soit une augmentation supérieure de 1,3 point à celle de l'ensemble de la mission et de 2,9 points supérieure à celle constatée dans l'enseignement secondaire.

Évolution des dépenses de personnel consacrées à l'enseignement primaire
et secondaire depuis 2017

(base 100 en 2017)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Enfin, au-delà de l'augmentation des dépenses de personnel, c'est un effort significatif de recrutement qui a été conduit .

Ainsi, en comptant les emplois sous plafond demandés au PLF pour 2020, les effectifs du programme 140 auront augmenté de 8 600 ETPT depuis 2017.

Cette augmentation s'est traduite par le recrutement
de 8 089 enseignants (hors stagiaires) en ETPT depuis 2017 et par une hausse de près de 3,9 % des effectifs dans l'enseignement élémentaire (action n°2 du programme 140).

3. Le dédoublement des classes de CEP et CE1 en REP/REP + traduit un effort concret en faveur du premier degré

À partir de la rentrée 2017, un dédoublement progressif des classes de CP et de CE1 a été mis en oeuvre dans le réseau d'éducation prioritaire (REP) et le réseau renforcé (REP+) avec pour objectif d'atteindre pour chacune un maximum de 12 élèves. Ce processus a été échelonné sur les rentrées scolaires 2017-2019 et a atteint son terme lors de la dernière rentrée scolaire.

D'après les réponses au questionnaire budgétaire adressées à votre rapporteur spécial, 10 800 classes de CP et de CE1 ont été dédoublées en REP/REP + sur la période.

L'État a soutenu les collectivités territoriales dans les travaux d'aménagement du bâti scolaire.

Ce soutien s'est traduit par une mobilisation de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » à hauteur de 10,5 millions d'euros en 2018 au profit de 82 projets pour un montant total de 24,4 millions d'euros.

Cette politique de réduction des effectifs par classe devrait, en outre être étendue en maternelle comme cela a été annoncé et ainsi que le retracent les documents budgétaires.

Le dédoublement des classes en grande section de maternelle

Le président de la République a annoncé vouloir étendre ce dispositif aux classes de grande section de maternelle.

Elle permettra, en effet, d'assurer un ciblage et un accompagnement plus précoce des enfants. Dans ce contexte, les difficultés liées à l'acquisition des savoirs ou à la vie en collectivité pourront être plus rapidement identifiées.

Ce dispositif devrait commencer à se déployer à partir de la rentrée 2020 et jusqu'à 2022. Ce dédoublement concernerait environ 26 000 classes dont 21 000 dans l'enseignement public soit près de 740 000 enfants.

Elle impliquera la création de 2 658 emplois équivalent temps plein pour le seul secteur public. Les recrutements devraient s'étaler sur trois ans de sorte à épouser le calendrier de mise en place de la réforme.

Le coût de ce plafonnement des effectifs en grande section a été estimé à 12 millions d'euros en 2020.

Source : commission des finances d'après les réponses aux questionnaires budgétaires

Votre rapporteur spécial estime que ces deux mesures - le dédoublement en REP/REP + et celui à venir en maternelle - vont dans le bon sens . Plusieurs éléments retiennent, toutefois, son attention.

D'abord, il souhaite que l'impact budgétaire, notamment pour les collectivités locales, de la réduction des effectifs en classe de grande section soit mieux détaillé .

Ensuite, il s'interroge sur les moyens mis en oeuvre pour évaluer avec précision les effets de ce dispositif en REP/REP + avant son extension en maternelle.

Dans un article paru en novembre 2014 dont votre rapporteur spécial a déjà cité les conclusions lors de son précédent rapport, la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) estimait que les travaux de recherche à l'époque ne permettaient pas d'établir une relation stricte entre la diminution du nombre d'élèves dans une classe et la réussite de ces derniers.

Votre rapporteur spécial a pris note de la communication du Gouvernement du mois de janvier 2019 8 ( * ) faisant état des « résultats positifs » du dédoublement de classe en REP/REP +.

Ce document indique qu'une amélioration des résultats des
élèves « en grande difficulté » aurait été constatée en mathématiques et en français.

Pour autant, les données sous-jacentes n'ont pas été rendues publiques ce qui ne permet pas de confirmer les éléments de ce qui n'est - en définitive - qu'un communiqué de presse.

En outre, le dispositif de performance annexé à la loi de finances et les réponses aux questionnaires budgétaires ne permettent pas non plus de dire si un suivi fiable et transparent permettra d'effectuer cette évaluation ex-post .

Compte tenu de l'ampleur matérielle et budgétaire des politiques de réduction des effectifs d'élèves dans les classes, il semble nécessaire de progresser sur ce point.

Enfin, votre rapporteur spécial considère qu'il doit être tenu compte des évolutions démographiques à venir dans la définition de la politique d'emploi du programme.

La DEPP prévoit, en effet, une diminution du nombre d'enfants scolarisés dans l'enseignement élémentaire d'ici à 2023 . La récente décision d'abaisser l'âge de scolarisation obligatoire à 3 ans (+25 000 élèves en 2019) devrait contribuer à ralentir cette contraction des effectifs mais pas à l'inverser.

Évolution des effectifs d'élèves dans l'enseignement
primaire entre 2009 et 2023

(en millions d'élèves)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de la DEPP et des documents budgétaires

En tenant compte des projections démographiques de la DEPP corrigées de l'impact de l'obligation de scolarisation à 3 ans, d'une part, et des données budgétaires, d'autre part, on observe que le rapport entre le nombre d'élèves et celui des effectifs dans l'enseignement préélémentaire et élémentaire s'élève à 26 élèves par ETPT en 2020 .

Selon les hypothèses retenues en matière de croissance des effectifs entre 2021 et 2023, ce ratio est appelé à diminuer plus ou moins fortement .

Il se réduira par construction d'autant plus que le Gouvernement procédera, a priori, à une vague de recrutement dans le cadre du dédoublement des classes de maternelles.

Évolution projetée du rapport entre le nombre d'élèves et les effectifs (ETPT) dans l'enseignement préélémentaire et élémentaire

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de la DEPP et des documents budgétaires

Dans ce contexte, votre rapporteur spécial estime qu'une cible doit être déterminée s'agissant de l'évolution du taux d'encadrement des élèves .

Il juge toutefois que la définition des paramètres de la réforme à venir en maternelle justifie que ces informations soient transmises au Parlement plus tard dans l'année à venir.

4. La priorité doit continuer à aller au premier degré tout en s'accompagnant d'une réflexion sur le suivi des élèves et l'organisation du collège

Le renforcement de l'accompagnement des élèves du premier degré est aujourd'hui devenu une priorité réelle pour le Gouvernement.

Elle s'incarne autant dans un effort budgétaire, matériel et humain que dans la mise en place d'initiatives telles que les « stages de la réussite » ou « petits-déjeuners » ainsi que dans des réformes plus profondes comme celles des programmes de français et de langue vivante.

Votre rapporteur spécial considère, toutefois, que ces efforts seraient vains si à l'issue de leur passage dans l'enseignement primaire, les élèves ne disposaient pas d'un suivi renforcé dans le cadre d'un enseignement secondaire de qualité , notamment au collège.

Lors de la mission de contrôle qu'il a conduite conjointement avec sa collègue sénateur Christine Lavarde , votre rapporteur spécial a pu constater une faiblesse très concrète dans le suivi des enfants entre le primaire et le secondaire : l'absence de compatibilité des systèmes d'information des établissements.

Nombre de départements et communes ont su se saisir de cet enjeu pour développer - parfois avec l'opportun concours de l'État - des espaces numérique de travail (ENT) compatibles ou communs d'un établissement à l'autre.

Loin d'être anecdotiques, ces initiatives soulignent combien la stratégie de suivi des élèves entre le primaire et le secondaire peut être lacunaire.

Votre rapporteur spécial plaide pour que le Gouvernement se saisisse de cette difficulté.

Il n'ignore pas qu'une réforme du statut des établissements primaire et secondaire et la mise en place de structures juridiques permettant une coopération renforcée entre eux a été envisagée et n'a pas abouti.

Votre rapporteur spécial le regrette et espère qu'une occasion nouvelle se présentera pour procéder à cette évolution éminemment nécessaire.

B. LE LYCÉE CONNAIT DES MUTATIONS IMPORTANTES QUI DOIVENT PROFITER, ÉGALEMENT, AUX FILIÈRES PROFESSIONNELLE ET AGRICOLE

1. Le lycée général et technologique se transforme dans le cadre de la réforme du baccalauréat et de l'orientation

Par un décret du 16 juillet 2018 9 ( * ) , le Premier ministre a réformé, sur le rapport du ministre de l'éducation, l'organisation du baccalauréat général et technologique .

La réforme du baccalauréat général et technologique

Dans le prolongement des conclusions du rapport rendu par Pierre Mathiot, ancien directeur de l'institut d'études politiques de Lille, le 24 janvier 2018, le ministère de l'éducation nationale a lancé une réforme d'ampleur du baccalauréat , qui entrera progressivement en vigueur entre 2019 et 2021.

Ses modalités ont été définies par le décret du 16 juillet 2018 modifiant les dispositions du code de l'éducation relatives aux enseignements conduisant au baccalauréat général et aux formations technologiques conduisant au baccalauréat technologique et par l'arrêté du 16 juillet 2018 relatif aux épreuves du baccalauréat général à compter de la session de 2021.

Cette réforme se traduira par u ne réorganisation du cycle terminal des filières générale et technologique et une rénovation des épreuves de l'examen , qui reposeront sur :

- un contrôle continu , qui comptera pour 40 % de la note finale, avec prise en compte des bulletins scolaires à hauteur de 10 % et des épreuves communes portant sur les disciplines étudiées par l'élève, comptant pour les 30 % restants. Afin d'assurer l'égalité entre les candidats, les copies seront anonymisées et corrigées par d'autres enseignants et une banque nationale numérique de sujets sera créée ;

- des épreuves terminales , qui représenteront 60 % de la note finale, organisées en deux temps : une épreuve en fin de première (français écrit et oral) et quatre épreuves en terminale : deux épreuves écrites au printemps portant sur les disciplines de spécialité qui auront lieu au printemps et deux épreuves en juin (écrit de philosophie et oral préparé durant le cycle terminal à partir d'un projet préparé dès la classe de première).

1) Voie générale

Le cycle terminal de la voie générale s'articulera autour d'enseignements communs (français, philosophie, histoire et géographie, enseignement morale et civique, deux langues vivantes, éducation physique et sportive, humanités scientifiques et numériques) et d'enseignements de spécialité (arts ; histoire, géographie, géopolitique et sciences politiques ; humanités, littérature et philosophie ;langues et littératures étrangères ; mathématiques ; numérique et sciences informatique ; sciences de la vie et de la terre ; sciences de l'ingénieur ; sciences économiques et sociales ; physique, chimie).

Les élèves en classe de première devront suivre trois enseignements de spécialité et auront la possibilité de choisir un enseignement optionnel.

En classe de terminale, les élèves seront tenus de suivre deux enseignements de spécialité et pourront choisir deux enseignements optionnels.

Horaires de la voie générale en première et terminale

Source : ministère de l'éducation nationale

2 ) Voie technologique

Les séries de la voie technologique seront maintenues.

Les élèves en classe de première devront suivre trois enseignements de spécialité de leur série et pourront choisir un enseignement optionnel.

En classe de terminale, ils seront tenus de suivre deux enseignements de spécialité de leur série et pourront choisir deux enseignements optionnels.

Horaires de la voie technologique en première et terminale

Source : ministère de l'éducation nationale

Source : rapport spécial sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2019

Cette réforme du baccalauréat implique, par ailleurs, une réorganisation des études aux lycées que votre rapporteur spécial estime tout à fait pertinente. Il considère, en effet, qu'au-delà de son intérêt pédagogique elle favorisera des mutualisations d'options et l'optimisation des moyens .

Elle permet en outre, comme l'avait observé votre rapporteur spécial l'année passée, d'envisager une réduction des dépenses en particulier :

- en permettant aux chefs d'établissement de mieux répartir les effectifs entre les classes grâce à la disparition de séries qui étaient source de rigidités ;

- en redonnant aux professeurs la faculté d'exercer pendant le mois de juin - alors que celui-ci était mité par l'organisation des épreuves du baccalauréat - ce qui augmente le temps effectivement passé en classe et améliore l'efficience de la dépense scolaire.

En outre cette réforme s'inscrit dans le contexte d'une profonde évolution de l'accompagnement à l'orientation .

En effet, la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a prévu le transfert progressif aux régions des missions exercées jusqu'alors par les directions régionales de l'ONISEP.

Les régions ont désormais la responsabilité de l'information des élèves, étudiants ou apprentis tandis que l'État définit la politique d'orientation et prend les décisions d'affectation des élèves.

Aux fins d'organiser ce nouveau partage des compétences, l'État, l'association des régions de France et son président, Hervé Morin, ont signé, en juin 2019, un cadre national de référence.

Du point de vue de la mission « Enseignement scolaire » cette évolution ne s'est pas encore traduite par des mouvements de crédits significatifs.

Votre rapporteur spécial estime que la nature des charges transférées aux régions et leur compensation ne sont pas suffisamment connues à ce stade .

Il invite le Gouvernement à clarifier rapidement ce point de sorte à, d'une part, apprécier l'effort qui sera supporté par les régions et, d'autre part, anticiper les effets de cette réforme au regard de son coût pour les finances publiques.

2. Les moyens des enseignements professionnels et agricoles doivent être optimisés mais demeurer ambitieux
a) L'enseignement technique agricole doit être soutenu

L'enseignement technique agricole ne représente que 2 % des crédits de la mission « Enseignement scolaire » mais constitue, pourtant, un enjeu central tant du point de vue éducatif que de la transmission d'un savoir-faire exceptionnel ou du maintien de la France en pays chef de file en matière de sécurité sanitaire ou de développement d'une agriculture et d'un élevage plus respectueux de la nature et des attentes des consommateurs.

Du stricte point de vue budgétaire, le programme est porté au deux tiers par ses dépenses de personnel (974,3 millions d'euros) tandis qu'il représente 11 % de l'ensemble des dépenses d'intervention de la mission, notamment en raison du financement aux établissements privés.

Les documents budgétaires affirment que le Gouvernement poursuit plusieurs priorités en 2020 . Votre rapporteur spécial souhaite vous présenter celles qui lui paraissent les plus spécifiques à ce programme.

En premier lieu, l'objectif du Gouvernement est d' assurer le renforcement de la réussite des élèves dans le cadre d'une stratégie nationale élaborée sur le fondement de la loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

Nos collègues députés MM. A. Herth et G. Peiro, rappelaient en 2014 les priorités fixées par la loi à cette stratégie nationale.

Cadre législatif de la stratégie nationale
en faveur de l'enseignement agricole

« Dans son article 60, la loi a prévu la rédaction d'un projet stratégique national pour l'enseignement agricole, d'une durée de 5 ans, qui constitue l'un des fondements du schéma prévisionnel national des formations agricoles. Le premier projet stratégique a été adopté en décembre 2014.

Il rappelle les spécificités de l'enseignement agricole, qui lui confèrent des atouts reconnus sur lesquels il peut s'appuyer, à savoir sa diversité, son autonomie et la petite taille de la plupart des établissements, ainsi que son ouverture sur les professions et les territoires, avec une forme de gouvernance efficace.

Afin de fixer le cap, 11 priorités sont dégagées :

- renforcer la promotion sociale et la réussite scolaire ; favoriser l'accès à l'enseignement supérieur ;

- conforter les filières de l'apprentissage et de la formation professionnelle tout au long de la vie ;

- poursuivre la rénovation des diplômes ;

- relancer la pédagogie et les innovations, développer l'utilisation du numérique éducatif ;

- enseigner à produire autrement et renforcer la place des exploitations agricoles des établissements ;

- poursuivre l'ancrage territorial des établissements et les liens avec leurs partenaires, pour notamment, adapter au contexte local les démarches de formation au « produire autrement » ;

- renforcer l'ouverture internationale ;

- développer les actions éducatives, l'apprentissage du vivre ensemble et l'éducation à la citoyenneté ;

- développer la formation initiale et continue de la communauté éducative ;

- appuyer les établissements d'enseignement dans leurs projets, en repensant notamment un système national d'appui (SNA) à l'enseignement technique agricole ;

- mettre en oeuvre ces priorités à travers un dialogue social renforcé.

Le 6e schéma prévisionnel national des formations (SPNF) pour 2016-2020 - établi en respectant le projet stratégique - a été approuvé par le Conseil national de l'enseignement agricole (CNEA) du 13 septembre 2016 et doit être arrêté par le ministre. »

Source : Rapport d'information sur la mise en application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 20 décembre 2016 présenté par MM. A. Herth et G. Peiro, députés.

En deuxième lieu, le Gouvernement souhaite promouvoir la diffusion de nouvelles pratiques au travers d'un plan « Enseigner à produire autrement » en faveur de l'agro-écologie .

En troisième lieu, il entend mettre en oeuvre pleinement la réforme des seuils de dédoublement afin de faciliter l'organisation des établissements et éviter que des candidats ne soient refusés par crainte d'un effet de seuil.

En effet, comme le rappelle une note de service adressée par le directeur général de l'enseignement et de la recherche du ministère de l'agriculture et de l'alimentation aux services déconcentrés 10 ( * ) , « il a été constaté que des seuils de dédoublement réglementairement imposés pouvaient conduire les établissements à refuser le recrutement d'un ou de plusieurs élèves afin de ne pas se retrouver en infraction, faute de moyens suffisants. Cette situation n'est pas cohérente avec l'objectif d'augmenter [les] effectifs élèves ».

Une réforme de la stratégie pluriannuelle de gestion de l'offre de formation a, dès lors, prévu que les seuils de dédoublement seraient désormais strictement indicatifs . Votre rapporteur spécial observera avec beaucoup d'intérêt les effets de cette réforme qui semble de bon sens.

Au-delà de ces priorités qu'il partage, votre rapporteur spécial s'interroge, toutefois, sur la soutenabilité de la réduction des effectifs qu'il observe sur ce programme .

Ainsi, depuis 2017 les effectifs en ont été réduits de 16 ETPT et
de 18 ETP. Cela peut paraitre faible au regard des mouvements à l'oeuvre, par exemple, dans l'enseignement secondaire mais il s'agit, pourtant, du seul programme qui supporte, en 2020, la réduction des effectifs en ETP de la mission.

b) Le lycée professionnel est en pleine transformation et doit tirer parti des initiatives en cours

Dans l'enseignement professionnel, le ministère de l'éducation nationale a conduit une politique active depuis la rentrée 2018.

À compter de la rentrée 2019 de nouvelles filières ont été introduites tandis que des plus anciennes ont été rénovées.

Des passerelles ont été mises en place entre l'enseignement général, technologique et professionnel . Elles se concrétisent par des stages qui permettent aux élèves d'apprécier l'opportunité d'une réorientation.

Des campus des métiers innovants devraient être créés . Ils regrouperont sur un même site des infrastructures culturelles, un internat ou encore des entreprises associées.

Enfin l'innovation pédagogique est soutenue notamment dans le cadre d'un investissement dans le numérique. Votre rapporteur spécial a eu l'occasion d'observer par lui-même le fonctionnement de l'un de ces dispositifs, le dispositif « ProFan »

Le dispositif « ProFan »

« ProFan », une expérimentation récemment mise en oeuvre dans l'enseignement professionnel pour anticiper et répondre à la mutation des emplois.

1) Un volet dédié à une expérimentation devant favoriser, grâce au numérique, l'adaptation de l'enseignement professionnel à l'évolution des contextes d'emplois

Conçu dans le cadre de la mission interministérielle confiée au recteur Jean-Marc Monteil , le volet « ProFan » a été présenté, en novembre 2017, aux acteurs de sa mise en oeuvre par une note de service du ministère de l'éducation nationale 11 ( * ) et intégré au profil budgétaire de l'action Initiative Numérique pour l'Excellence Éducative (INEE) par un avenant à la convention du 25 décembre 2015 12 ( * ) .

Comme l'indique le cahier des charges présenté le 21 mars 2017 par la Caisse des dépôts et consignations, le secrétariat général à l'investissement et le ministère de l'éducation nationale, « ProFan » cherche à « répondre au besoin de nouvelles compétences pour l'emploi dans la société numérique » .

En l'espèce, le volet doit permettre aux élèves des filières professionnelles de développer les compétences nécessaires à :

- la résolution de problème évolutif en temps réel ;

- la maitrise de la convergence réel-virtuel et des interactions humain-machine ;

- l'évolution dans un contexte de travail en coopération-collaboration marqué par une distorsion des unités de temps et de lieux (présentiel ou télétravail) ;

- l'appréhension des hiérarchies en « mode projet ».

Rassemblant des laboratoires de recherche et des acteurs du monde éducatif , la démarche, qui vise à « promouvoir de nouveaux contextes d'apprentissage et d'enseignement et à les qualifier par la nature de leurs effets » , prend la forme d'une expérimentation. Celle-ci consiste à déployer, selon un protocole commun, un « ensemble structuré d'activités » dont les contenus et caractéristiques sont co-élaborés avec l'ensemble des acteurs (enseignants et corps d'inspection).

En pratique, les équipes enseignantes et les élèves ont accès, selon le calendrier de l'expérimentation, à une plate-forme numérique. Celle-ci sert de support « aux activités coopératives et collaboratives des élèves » et des enseignants. Les résultats enregistrés lors de l'utilisation des différents services sont rassemblés et analysés par les chercheurs

Le cahier des charges du 21 mars 2017 précise que le volet « ProFan » devrait concerner 10 000 élèves répartis sur plus de 110 établissements.

Le déroulement de l'expérimentation est, quant à lui, divisé en trois périodes de temps allant de 2017 à 2021 :

- du 1 er janvier 2017 au 30 septembre 2017 pour la conception du plan d'expérimentation et de la plateforme ainsi que l'élaboration du protocole d'évaluation et des ressources pédagogiques ;

- du 1 er octobre 2017 au 1 er septembre 2020 pour déploiement sur deux générations d'élèves dans trois filières de l'enseignement professionnels (filières industrielle, commerciale, sanitaire et sociale) ;

- du 1 er septembre 2020 au 1 er juillet 2021 pour la consolidation, la diffusion et la valorisation des données en vue de déterminer les suites à donner.

2) Des crédits partagés entre les établissements scolaires et les équipes de recherche sous le contrôle de plusieurs instances au niveau central et déconcentré

Le volet « ProFan » dispose de 15 millions d'euros de crédits PIA 2 et en 2019, plus de 93% de ces crédits avaient été consommés 13 ( * ) . En 2017, une répartition prévisionnelle avait été établie et conduisait à attribuer :

- 4 millions d'euros au financement des dépenses de personnels et de fonctionnement des laboratoires de recherche ;

- 10 millions d'euros au financement des établissements expérimentateurs et témoins ;

- 1 million d'euros au financement du pilotage et du suivi de l'expérimentation.

Les financements « ProFan » s'ajoutent aux moyens des établissements concernés et ne s'appliquent qu'aux coûts directs de mise en oeuvre de l'expérimentation . À cet effet, une nomenclature des dépenses éligibles a été précisée. Il revient aux recteurs d'arrêter les montants effectivement versés aux établissements scolaires tandis qu'une convention signée entre l'État et le CNRS détermine les modalités d'attribution des financements aux établissements de recherche.

La gouvernance de l'action implique l'interaction de plusieurs acteurs au niveau local et national . Ainsi, le choix des établissements expérimentateurs est arrêté par le recteur sous réserve que son ressort territorial relève de l'une des dix académies des cinq régions volontaires (Bordeaux, Potiers, Limoges, Rennes, Nantes, Strasbourg, Nancy-Metz et Reims). Le recteur, assure, également, la conclusion des conventions nécessaires avec les établissements. Au niveau national, le volet est piloté par un conseil d'orientation stratégique (COS) chargé de rendre compte de l'avancement de l'expérimentation au comité de pilotage de l'action INEE. Enfin, la Caisse des dépôts et consignations agit en tant qu'opérateur des crédits. À ce titre, il lui appartient d'abonder les fonds de concours à hauteur des besoins sur décision du comité de pilotage.

Plusieurs directions centrales ou opérateurs du ministère de l'éducation nationale sont, également, impliqués dans le pilotage, le suivi et l'évaluation du volet « ProFan » :

- la Direction générale de l'enseignement scolaire (DGSCOL), qui participe au COS, est chargée de proposer des solutions de transferts des résultats à d'autres filières ;

- la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) a participé à la définition des spécifications fonctionnelles de la plateforme et est « étroitement associée » au suivi de l'expérimentation de sorte à dresser une évaluation de la valeur ajoutée de l'expérimentation pour les établissements ;

- le centre d'études et de recherches sur l'emploi et les qualifications (CEREQ) participe au suivi de l'expérimentation et devra étudier son impact sur l'insertion professionnelle des élèves ;

- les inspections générales sont chargées d'une mission d'évaluation globale du volet dont les conclusions devront être remises à sa clôture.

Source : commission des finances du Sénat

Votre rapporteur a été parfaitement convaincu par l'utilité de cette expérimentation et de la dépense qui l'accompagne . Il observe que le projet entrera dans sa dernière année à la rentrée prochaine.

Il lui paraitrait parfaitement incompréhensible que les efforts budgétaires, matériels et humains déployés pour mettre en oeuvre ce projet ne soient pas valorisés par une extension de ce projet dans le temps et au profit d'autres établissements.

C. L'ÉCOLE DOIT POUVOIR RÉPONDRE AUX DÉFIS QUI LUI SONT POSÉS

Pour conclure son rapport sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », votre rapporteur spécial souhaiterait énumérer plusieurs considérations et constats qu'il estime être les défis de l'école .

Il en identifie trois que sont :

- le développement du numérique à l'école au travers de l'émergence d'une « culture numérique » assise sur des moyens suffisants et des pratiques effectives ;

- le soutien d'une politique d'inclusion à l'école ;

- la promotion d'une école attractive pour ceux qui la servent tant du point de vue matériel que des possibilités de réaliser et de se réaliser dans son travail.

1. Le développement d'une « culture numérique » à l'école souffre d'un défaut de pilotage

Il ne semble pas utile à votre rapporteur spécial de rappeler l'importance prise par le numérique dans notre société. Comme le rappelait France Stratégie dans son rapport de juillet 2018 14 ( * ) , 28 % des français sont éloignés du numérique et vivent, de ce fait, un véritable « handicap » .

L'enseignement scolaire a précocement pris conscience de cette évidence. Ainsi, dès 1985, le « plan informatique » a permis de doter les établissements de près de 120 000 ordinateurs et de former
quelques 110 000 enseignants.

Malheureusement ces dépenses d'investissement prises en charge par l'État sont devenues par la suite des dépenses de fonctionnement relevant des collectivités territoriales.

Les initiatives se sont ensuite faites plus dispersées . Le ministère de l'éducation, interrogé par votre rapporteur spécial, n'a pas été en mesure d'en citer une de l'ampleur de celle de 1985 avant le déploiement du plan « école numérique rurale » en 2009.

Le constat de votre rapporteur spécial est qu'il a longtemps manqué à l'État sur ce sujet une direction et une volonté.

Si les initiatives se sont multipliées depuis le début des années 2010 et si l'organisation des services de l'État s'est renouvelée, le numérique à l'école souffre encore trop d'être l'objet commode et adéquat pour une communication rapide et sans lendemain.

De l'avis de votre rapporteur spécial, c'est ce qu'il est advenu du « plan tablette » ou « Plan numérique pour l'éducation » (PNE) annoncé par le président de la République François Hollande en 2015 et transformé en Initiative Numérique pour l'Excellence Éducative (INEE) dans le cadre du Programme d'investissements d'Avenir (PIA) 2.

Le Plan Numérique pour l'Éducation

Le Plan Numérique pour l'Éducation est porté en majorité par les crédits du PIA 2. Il se caractérise par une forte instabilité en exécution et par une gouvernance complexe

1) Des objectifs portés principalement par une action du Programme d'Investissements d'Avenir 2 (PIA 2)

Le Plan Numérique pour l'Éducation (PNE) a été annoncé par le Président de la République, François Hollande, le 7 mai 2015 . Il poursuit quatre objectifs principaux :

- permettre aux élèves de « développer les compétences essentielles d'informatique et de culture numérique » ;

- former les personnels aux nouvelles technologies et à leur utilisation ;

- mettre en place des plates-formes numériques permettant un accès simplifié et sécurisé à un ensemble de ressources ;

- accompagner les collectivités dans leurs efforts d'équipement numérique en assurant un co-financement.

Il s'est décliné entre, d'une part, une Innovation Numérique pour l'Excellence Éducative (INEE) financée au titre du Plan d'Investissements d'Avenir et, d'autre part, des actions de formation des personnels retracées au sein de la mission « Enseignement scolaire ».

Du point de vue budgétaire, toutefois, le PNE a été davantage porté par l'action INEE  (285 millions d'euros de crédits exécutés en 2019) que par la mission « Enseignement scolaire » (18 millions d'euros de crédits exécutés en 2019)

2) Une action INEE marquée par la diversité de ses volets et l'évolution des crédits alloués

Le nombre des volets de l'action INEE, initialement défini à cinq plus une action transversale, a été accru. En 2019, elle recouvre sept volets et une action transversale d'évaluation :

Présentation des volets de
l'action INEE en 2019

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents publiés

À plusieurs occasions, le montant de l'enveloppe globale et la ventilation des crédits par volets ont été revus. Au total, 119 millions d'euros ont complété les crédits ouverts en 2015.

Ces évolutions de l'enveloppe globale de la mission ont été indiquées en lois de finances rectificatives pour 2016 (+138 millions d'euros), 2017 (-17,1 millions d'euros) et 2018 (-2,1 millions d'euros). Les mouvements internes à l'enveloppe sont retracés au sein des documents juridiques 15 ( * ) et du recueil des comptes rendus des séances du comité de pilotage 16 ( * ) .

Évolution des crédits ouverts au sein
de l'action INEE entre 2015 et 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents publiés

Au total, ce sont 287 millions d'euros de crédits PIA qui ont été ouverts au profit de l'ensemble des volets INEE soit un montant supérieur de 71 % à la prévision initiale de 168 millions d'euros. Sur ce montant final, plus de 99 % des crédits ont été consommés en 2019.

Crédits prévus et consommés de l'action INEE

(en millions d'euros)

3) Une gouvernance particulièrement complexe mettant en relation un nombre important d'intervenants notamment pour autoriser et opérer les financements nécessaires

La gouvernance de l'action INEE est précisée par la Convention du 29 décembre 2015 entre l'État et la Caisse des dépôts. Elle implique une forte diversité d'intervenants au niveau institutionnel (Premier ministre, ministres de l'Éducation nationale et de l'Action et des comptes publics, collectivités locales), administratif (directions ministérielles, services déconcentrés, établissements publics locaux) ou financiers (Secrétariat général à l'investissement, Caisse des dépôts et BPI-France).

La mise en oeuvre et le suivi de l'action, repose en pratique essentiellement sur deux grands acteurs : le comité de pilotage de l'action INEE (Copil) et la Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire des crédits. Diverses instances interviennent, en outre, pour la mise en oeuvre de certains volets. C'est, par exemple, le cas de la Direction du numérique éducatif (DNE) du Ministère de l'Éducation nationale en tant que service pilote des volets 1, 2 et 3 ou, encore, de BPI-France en tant que gestionnaire des fonds alloués au soutien à la filière (volet 4).

Ces organes de gouvernance interviennent pour la prise des décisions essentielles à la mise en oeuvre des volets de l'action, comme le présente l'annexe à cette note. Ils participent, ainsi, au fonctionnement du circuit de financement des volets.

Le circuit de financement des volets
de l'action INEE en 2019

Source : commission des finances du Sénat

Votre rapporteur spécial partage l'opinion de la Cour des Comptes lorsqu'elle qualifie de « concept sans stratégie [au] déploiement inachevé » le service public numérique pour l'éducation 17 ( * ) notamment porté par le Plan Numérique pour l'Éducation.

Il ne peut que faire siennes les recommandations qu'elle adresse, notamment celle de définir une stratégie nouvelle de déploiement du numérique au sein de l'enseignement en concertation avec les collectivités territoriales .

Il considère, en outre, que les exemples étrangers doivent nous inspirer . Dans ce contexte, le soutien actuel aux entreprises des technologies éducatives par la mobilisation de capitaux publics ne fait pas sens en l'absence d'un marché constitué .

Cette dépense (10 millions d'euros dans le seul cadre du PNE) demeurera inefficiente tant que les demandeurs potentiels sur un tel marché (établissements, professeurs...) ne disposeront pas d'un cadre réglementaire allégé en matière de décision d'achat .

2. Une école de l'inclusion doit continuer de se construire

La loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a été l'occasion pour le Gouvernement de réaffirmer sa position en faveur de l'école inclusive .

A l'occasion de son rapport sur les crédits de la mission pour 2019, votre rapporteur spécial avait qualifié de louable cette ambition déjà présente au point de vue budgétaire.

En effet, les crédits dédiés à cette action avaient augmenté à l'époque de près de 400 millions d'euros par rapport à 2018.

La loi du 26 juillet 2019 a entendu définir la notion de service public de l'école inclusive autour de sept axes :

- un service dédié dans chaque département et le déploiement de près de 3 000 pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) ;

- un accueil renforcé pour les parents et des démarches simplifiées pour tous ;

- des enseignants formés et soutenus dans leur pratique ;

- des accompagnants d'élèves en situation de handicap reconnus et formés ;

- une école qui s'adapte aux besoins éducatifs particuliers des élèves ;

- une coopération dans les établissements scolaires avec les professionnels médico-sociaux ou libéraux ;

- un déploiement piloté et évalué.

Comme il l'a indiqué dans son analyse relative à l'évolution des dépenses de titre 2, votre rapporteur observe qu'un effort budgétaire très important a été mobilisé en faveur des accompagnants d'élèves .

Cet effort doit aujourd'hui s'accompagner d'un pilotage plus efficient des moyens tout en permettant de construire des réponses adaptées à chaque situation.

Sur ce point, la création des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) semble constituer une piste sérieuse pour améliorer l'efficience de la dépense en faveur de l'inclusion et fournir un service de qualité aux familles

Le pôle inclusif d'accompagnement localisé (PIAL)

Le PIAL constitue une nouvelle forme d'organisation du travail des personnels d'accompagnement humain, dont l'objectif est de contribuer au développement progressif de l'autonomie des élèves en situation de handicap, citoyens en devenir.

Il offre une plus grande souplesse d'organisation permettant l'adaptation aux problématiques locales et vise à une professionnalisation des accompagnants et une amélioration de leurs conditions de travail. Le PIAL s'inscrit dans le volet « école inclusive » des projets d'école ou d'établissement.

À la rentrée 2019, les PIAL concernent :

- 300 circonscriptions du premier degré(sur 1 466) ;

- 2 000 collèges avec Ulis (sur 7 153 collèges publics et privés) ;

- 250 lycées professionnels avec Ulis (sur un total de 1 456 lycées professionnels).

Pour l'année scolaire 2019-2020, plus de 3 000 pôles inclusifs d'accompagnement localisés seront déployés sur tout le territoire, dans le premier et dans le second degré.

À cet effet, 4 500 ETP supplémentaires d'accompagnants sont recrutés à la rentrée 2019. En outre, 29 000 contrats aidés (CUI-AVS) sont transformés en 16 571 ETP d'AESH. Au total, la progression des moyens en équivalent temps plein d'AESH sera de 7,2 %.

Il n'est pas possible d'indiquer les crédits consacrés aux PIAL puisque ceux-ci restent globalisés et ne sont pas identifiés en tant que tels ni en exécution pour l'exercice 2019, ni en budgétisation dans le PLF 2020.

Il est prévu dans le PLF 2020, de recruter 4 000 ETP supplémentaires d'accompagnants à la rentrée 2020.

Source : ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse

3. Servir l'école doit redevenir un choix attractif

L'attractivité des métiers de l'enseignement s'est fortement réduite. En témoignent le niveau de plusieurs indicateurs de couverture des concours de la fonction publique, d'une part, et la nécessité de recourir à des contractuels d'autre part.

Ainsi, s'agissant du recrutement par concours des infirmiers et infirmières scolaires, le rapport entre le nombre de postes offerts et pourvus s'est établi à 78 % en moyenne sur la période 2009/2018.

De même, à la session 2019 du concours de recrutement des personnels enseignants du second degré de l'enseignement public, ce
sont 1 084 postes sur les 13 390 ouverts qui n'ont pas été pourvus.

Le renforcement de l'attractivité des métiers de l'enseignement ne saurait uniquement reposer sur un levier budgétaire et lorsque c'est le cas il importe de cibler la dépense avec intelligence .

Dans le cas des enseignants , la faiblesse relative de la rémunération apparait comme un enjeu majeur . Après 15 ans d'ancienneté, le salaire moyen d'un enseignant français est notablement inférieur à celui constaté dans la moyenne de l'OCDE, en particulier dans l'enseignement secondaire.

Salaires statutaires annuels des enseignants de 25 à 64 ans
ayant 15 ans d'expérience et une qualification typique
par niveau d'enseignement en 2018


Source
: OCDE, Regards sur l'éducation 2019

Pour autant, les mesures catégorielles comme le PPCR ne permettent pas de répondre de manière efficace à cet enjeu . En effet, elles constituent des dispositions dont le champ d'application, trop large, ne cible pas assez les profils dont les compétences peuvent être le plus sollicitées sur le marché de l'emploi.

En outre, la répartition de cette augmentation de rémunération entre les enseignants peut avantager ceux qui sont en fin de carrière plutôt que ceux qui la débutent .

Comme il l'avait montré à l'occasion de son rapport spécial sur les crédits de la mission pour 2019, l'application du PPCR se traduit par une augmentation de la rémunération en valeur deux fois plus importante pour un professeur des écoles en fin de carrière qu'en début de carrière .

Ces mesures non-ciblées constituent donc davantage des dispositifs de soutien au pouvoir d'achat que des moyens de renforcer l'attractivité du poste d'enseignant.

A l'inverse, des dispositifs ciblés comme l'augmentation des indemnités de sujétions des personnels en REP + apparaissent comme des instruments plus intelligents et pilotables.

Comme il l'a indiqué, néanmoins, votre rapporteur spécial considère que la dimension financière ne peut constituer le seul outil d'une politique d'attractivité des métiers de l'enseignement.

D'abord, l'Éducation nationale doit disposer des moyens juridiques et financiers de fidéliser des talents aux métiers de l'enseignement . À ce titre, votre rapporteur spécial salue la mise en place d'un dispositif pragmatique de préprofessionnalisation .

Il permettra à des étudiants à partir de la première année de licence d'être intégré dans un processus de montée en compétence sous le statut juridique d'assistant d'éducation.

Ce dispositif met fin au recours à l'apprentissage qui était jusqu'ici pratiqué et qui s'était avéré complètement inadapté . En effet, les étudiants en apprentissage perdent le bénéfice des bourses dont ils disposent le cas échéant. En conséquence, un nombre important d'éléments motivés se trouvait détournés d'une entrée progressive dans le monde de l'enseignement.

Ensuite votre rapporteur spécial souhaite rappeler son attachement à ce que les directeurs d'école disposent des moyens juridiques et matériels nécessaires pour assurer leur mission .

Ainsi, votre rapporteur spécial plaide pour que soit ouverte une réflexion sur le rôle du directeur d'école comme responsable - notamment hiérarchique - d'un collectif de travail.

Enfin et toujours au-delà des seules questions financières, l'attractivité des métiers de l'enseignement impose que le respect de la dignité et de la sécurité des personnes soit toujours protégé .

Or, votre rapporteur constate qu'aucun document budgétaire ne permet de retracer l'évolution du nombre d'actes violents commis à l'encontre des personnels des établissements.

Lors des auditions qu'il a conduites, votre rapporteur spécial a pu se voir présenter les grands axes d'un plan de lutte contre les violences. Celui-ci concerne l'ensemble des actes pouvant être commis par des élèves et tend à renforcer les moyens dont disposent les services de l'Éducation nationale pour traiter des situations parfois critiques.

Toutefois, concernant les violences faites aux personnels, votre rapporteur spécial a constaté que la réflexion et la mise en oeuvre de moyens concrets n'en étaient encore qu'à leurs débuts . Il salue la prise de conscience qui s'est opérée et espère qu'elle trouvera toutes les traductions - éventuellement budgétaires - nécessaires.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 76 septies (nouveau)

Demande de transmission d'un rapport portant sur le recrutement des enseignants contractuels

Commentaire : le présent article prévoit que le Gouvernement rend au Parlement un rapport portant sur le recrutement des enseignants contractuels et leurs évolutions de carrière.

Votre rapporteur spécial estime qu'il convient de s'opposer à la demande de rapport introduite par un amendement soutenu par notre collègue, Michèle Victory, avec un avis défavorable de la commission des finances et un avis favorable du Gouvernement.

D'une part, il rappelle qu'un travail portant sur le même sujet a déjà été produit 18 ( * ) , par votre rapporteur spécial, au nom de la commission des finances du Sénat en s'appuyant sur une enquête remise par la Cour des comptes en application de l'article 58 2° de la loi organique relative aux lois de finances 19 ( * ) .

Votre rapporteur spécial veut rappeler combien les prérogatives reconnues au Parlement pour l'exercice de ses missions de contrôle sont précieuses et doivent être employées .

D'autre part, il estime que la recevabilité d'une telle demande est douteuse et pourrait constituer un cavalier budgétaire.

Pour ces raisons, votre rapporteur spécial vous propose d'adopter un amendement tendant à supprimer cet article .

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 76 octies (nouveau)

Remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement portant sur les motifs de sous-consommation des fonds sociaux versés aux établissements d'enseignement

Commentaire : le présent article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les motifs d'une sous-consommation des fonds sociaux versés aux établissements d'enseignement

Comme votre rapporteur spécial l'a rappelé dans le présent rapport sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », l'action « Aide sociale » du programme 230 - « Vie de l'élève » serait marquée, en 2020, par une réduction équivalente de 50 % des crédits de l'enveloppe dédiée au fonds sociaux des établissements.

Alors qu'en loi de finances pour 2019, ils s'élevaient à près de 60 millions d'euros, il est prévu de ramener ce montant à 30,7 millions d'euros en 2020. Ces fonds sont versés aux établissements pour apporter une aide exceptionnelle aux familles défavorisées sur décision du chef d'établissement après consultation de la communauté éducative.

D'après les informations fournies à votre rapporteur spécial, il s'avère que cette mesure se justifierait par une volonté de sincérisation budgétaire et n'aurait pas d'impact sur la capacité des établissements à faire face aux situations auxquelles ils peuvent être confrontés.

En effet, la sous-consommation - forte heureuse - de ces fonds dans les années précédentes a contribuée à la constitution d'un reliquat dans la trésorerie des établissements.

Dans sa prévision pour l'année 2020, le ministère a souhaité ramener le niveau des crédits à celui de 2018 de sorte à tenir compte des reliquats à la disposition des établissements.

Votre rapporteur spécial comprend qu'un contrôle parlementaire puisse se justifier afin de constater la réalité des explications avancées par le ministère et, pour cette raison, il ne vous invite à pas à vous y opposer .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable de sa commission des finances, un amendement du Gouvernement tendant à minorer les

- à minorer les crédits de la mission « Enseignement scolaire » de 11 367 107 euros en AE comme en CP, afin de « tenir compte des votes intervenus dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2020 » ;

- à majorer les crédits de la mission « Enseignement scolaire » de 101 500 euros afin de tirer les conséquences « des décisions annoncées lors du rendez-vous salarial 2019 concernant la revalorisation du barème de remboursement des frais de repas pour les agents publics en formation ou en mission, avec un rehaussement de la prise en charge de 15,25 € par repas à 17,5 € » .

Répartition des minorations et majorations de crédits
introduites en seconde délibération entre les différents
programme de la mission « Enseignement scolaire »

(en euros)

Programmes

majoration

minoration

Enseignement scolaire public du premier degré

101 500

0

Enseignement scolaire public du second degré

0

3 512 086

Vie de l'élève

0

1 441 982

Enseignement privé du premier et du second degrés

0

949 644

Soutien de la politique de l'éducation nationale

0

5 122 342

Enseignement technique agricole

0

341 053

TOTAUX

101 500

11 367 107

SOLDE

- 11 265 607

Source : commission des finances du Sénat

L'AMENDEMENT PROPOSÉ
PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2020

ARTICLES DEUXIÈME PARTIE
MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE »

7

A M E N D E M E N T

présenté par

M. Gérard Longuet

Rapporteur spécial

_________________

ARTICLE 76 SEPTIES

Supprimer cet article.

OBJET

La Constitution du 4 octobre 1958, la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances et l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires confèrent aux membres du Parlement une éminente mission de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques, d'une part, et les prérogatives nécessaires à son accomplissement, d'autre part.

Le thème sur lequel porterait le rapport demandé par le présent article ayant déjà fait l'objet d'un travail mené au nom de la commission des finances du Sénat, avec l'appui de la Cour des comptes, il n'apparaît pas opportun que les parlementaires s'en remettent à un rapport du Gouvernement.

En outre, aux termes des dispositions de la loi organique précitée et de la jurisprudence constitutionnelle, « seuls peuvent être prévus par une loi de finances [...] des rapports susceptibles d'améliorer l'information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques » .

Dès lors, que cette demande de rapport ne vise pas à évaluer les effets d'un article en discussion ou une mesure de soutien budgétaire, sa recevabilité apparait douteuse.

Dans ces conditions, le présent amendement vise à supprimer cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 29 octobre 2019, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, sur la mission « Enseignement scolaire » .

M. Vincent Éblé , président . - Nous avons à examiner cet après-midi deux rapports spéciaux : le premier est consacré à la mission « Enseignement scolaire », qui représente une part conséquente du budget général, avec 74 milliards d'euros.

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire » . - C'est un bonheur de vous présenter ce rapport spécial consacré au budget de l'enseignement scolaire. Les crédits en question sont affectés, pour leur grande majorité, au ministère de l'éducation nationale, mais également au ministère de l'agriculture. Il s'agit de la première mission du budget de l'État après les dégrèvements fiscaux. Les frais de personnel mobilisent 68 milliards d'euros, soit 93 % du budget de cette mission, au sein desquels le compte d'affectation spéciale « Pensions » se voit octroyer 20 milliards d'euros.

Je vous proposerai d'adopter ces crédits sans modification, tout en vous faisant remarquer que certaines questions sont aujourd'hui posées et que le ministère de l'éducation nationale ne pourra pas en reporter l'examen indéfiniment. Il convient de les adopter parce que la maîtrise de la dépense est réelle. On relève une petite réduction des effectifs par rapport à 2019, à hauteur de 1 239 équivalents temps plein travaillé (ETP) et de 400 équivalents temps plein (ETP). Ce n'est pas spectaculaire, mais rappelons que les effectifs avaient augmenté de près de 50 000 agents entre 2012 et 2017. La maîtrise de la dépense s'explique aussi par le glissement-vieillissement technicité (GVT) différentiel : le rajeunissement des enseignants aboutit à un GVT négatif élevé, ce qui occasionne des économies, même si les mesures du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) augmentent le GVT positif.

Nous relevons cette année des mesures catégorielles fortes. Certaines sont parfaitement utiles, d'autres ne sont que l'application, suspendue en 2018, de l'héritage du quinquennat précédent. Les 58 millions d'euros qui seraient consacrés en 2020 au renforcement des rémunérations des enseignants en réseaux d'éducation prioritaire (REP) me paraissent utiles. En revanche, le protocole PPCR, qui représente un effort de près de 300 millions d'euros, n'apporte aucun soutien à ceux qui en ont le plus besoin, à savoir les enseignants qui débutent leur carrière, notamment dans le primaire et les secteurs difficiles. Le Gouvernement ne fait là qu'appliquer les droits acquis au cours du quinquennat précédent.

Je note aussi le parachèvement, tout à fait satisfaisant, de toutes les fonctions destinées aux élèves handicapés : les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont titularisés, ou leurs contrats transformés en CDI ou CDD.

On relève une diminution des fonds consacrés à l'action sociale des chefs d'établissement, ainsi qu'une baisse des subventions aux établissements publics d'enseignement. Ces diminutions sont nécessaires pour rendre plus sincère le budget et mettre fin à des dépenses qui ne sont pas engagées effectivement. Elles n'auront pas d'effet sur les dépenses habituellement engagées en la matière.

Globalement, ces crédits témoignent d'une gestion mesurée et réfléchie, même si elle est marquée par un héritage lourd et discutable.

Parmi les grandes inflexions de la politique ministérielle qui s'expriment dans ce budget, je relève, d'abord, le rééquilibrage de la dépense de l'enseignement scolaire en faveur du primaire. M. Jean-Claude Carle, quand il était rapporteur pour avis de la commission de la culture, et moi-même avions dénoncé à maintes reprises l'insuffisance des moyens consacrés à l'enseignement primaire : la dépense par élève y est inférieure de 10 % à la moyenne des pays de l'OCDE, alors qu'elle lui est supérieure de 20 % pour le secondaire. Heureusement, depuis 2017, les crédits affectés au primaire ont augmenté d'environ 7 %, alors que ceux qui reviennent au secondaire n'ont augmenté que de 4 %. On observe ainsi un renforcement des effectifs d'enseignants dans le primaire depuis 2018.

Ce besoin était évident, du fait du dédoublement des classes en CP et en CE1, qui se poursuit dans l'ensemble du réseau d'éducation prioritaire. Si nous ne disposons pour le moment d'aucun bilan « scientifique » concernant les effets positifs de ce dédoublement, il semblerait que les progrès soient bien réels, en particulier en mathématiques. J'espère que, à l'occasion du débat en séance, des résultats plus précis nous seront communiqués et que nous n'aurons pas à nous contenter du communiqué de presse dont s'autosatisfait le ministère, lequel n'est pas à la hauteur de son engagement ni de celui du contribuable dans cet effort.

Je dirai un mot sur les mesures « qualitatives », les « stages de la réussite », la politique des « devoirs faits » au collège, les « petits-déjeuners » à l'école primaire : elles ne sont pas anecdotiques. La somnolence des élèves, par exemple, est utilement combattue même si cela montre qu'il faudrait sans doute éduquer les parents avant les enfants !

Ces efforts budgétaires en faveur du primaire se doublent d'une réflexion très intéressante sur le secondaire, avec la mise en oeuvre de la réforme du baccalauréat. Celle-ci pourrait permettre de mieux maîtriser l'offre du secondaire, qui, trop dispersée, aboutit aujourd'hui à des ratios très dégradés en matière de nombre d'élèves par enseignant. Avec la réforme, le système sera plus complexe à gérer, certes, mais permettra une meilleure adaptation des choix des élèves à la réalité du monde universitaire ou professionnel, la proximité de l'enseignement secondaire à ces deux mondes étant ainsi renforcée. Accessoirement, grâce à l'allégement de la procédure du baccalauréat, l'Éducation nationale reconquiert une semaine d'utilisation des locaux, ce qui n'est pas négligeable sur le plan financier.

L'autre réforme dans laquelle le ministère est engagé, c'est celle de l'orientation, qui fait appel aux régions. Je vous invite à soutenir cette transformation, tant il est vrai que les régions sont très fortement impliquées dans la formation professionnelle et le développement économique et connaissent bien leurs bassins d'emploi.

Quant à nos lycées professionnels, ils cherchent un peu leur voie. La création des campus professionnels est, comme celle des internats d'excellence, une mesure excellente, mais symbolique, car très minoritaire ; elle ne fera pas basculer l'enseignement sur la voie d'une véritable rénovation.

Le collège, quant à lui, est aujourd'hui le maillon le plus faible de la politique menée - le primaire, lui, est relancé et soutenu, et le deuxième cycle du secondaire se réorganise autour du nouveau bac. Sans remettre en cause le principe du collège unique, auquel nos concitoyens sont attachés, je pense qu'il faudrait accepter la mise en oeuvre d'une certaine différenciation, en fonction de réalités régionales ou sociologiques par exemple - la réussite de l'enseignement agricole sous toutes ses formes témoigne des résultats satisfaisants de ce genre de démarche ; je pense en particulier aux maisons familiales rurales (MFR).

Je voudrais d'ailleurs saluer, concernant l'enseignement agricole, une mesure de bon sens : celle qui consiste à assouplir l'organisation des classes pour éviter que les lycées agricoles qui reçoivent néanmoins des demandes ne puissent pas satisfaire ces dernières en raison des règles de dédoublement de seuil.

Par ailleurs, l'Éducation nationale a, d'une façon constante, poursuivi avec succès le défi de l'intégration des élèves handicapés. Cette année, les crédits du programme « Vie de l'élève » augmentent de 5 % principalement en raison de la titularisation des accompagnants d'élèves en situation de handicap, là où l'augmentation des dépenses, pour les autres programmes de la mission, plafonne à 1,5 ou 2 %.

J'évoquerai également l'attractivité des métiers de l'éducation. L'héritage du protocole PPCR est lourd à porter ; nous l'avions dénoncé à l'époque de son instauration. En revanche, la préprofessionnalisation est assurément un bon investissement ; elle donne à de jeunes étudiants un statut d'emploi compatible avec le maintien des bourses étudiantes. La stabilisation des recrutements, après la période excessive du quinquennat précédent, a permis la réduction du déséquilibre constaté.

Autre sujet en liaison avec l'attractivité des métiers de l'éducation, qui n'a pas à proprement parler de réponse budgétaire : le problème de la violence à l'école. On pourrait imaginer un renforcement de l'autorité des chefs d'établissement, adossé à des conseils d'administration à la fois plus représentatifs de la vie locale et plus engagés. Le ministre a le mérite de ne plus taire ce problème, sans avoir pour autant la solution pour le faire reculer de manière significative.

J'évoquerai maintenant la baisse de la démographie française et, partant, la diminution du nombre de jeunes scolarisés, y compris dans le primaire. Cette diminution n'est pas corrigée par la mise en oeuvre dès cette année de la scolarisation à trois ans, 96 % des enfants de cet âge étant en réalité déjà scolarisés. Cette mesure représente 25 000 élèves supplémentaires, répartis sur l'ensemble de la France, soit un nombre négligeable sur un total de 6,7 millions d'élèves.

Malgré cela, on peut s'attendre à une baisse des effectifs au cours des trois ou quatre prochaines années, de l'ordre de 200 000 élèves. Le rythme de la décrue étant spectaculaire, la question de la gestion prévisionnelle des effectifs du primaire et du secondaire va se poser. De plus, j'attire votre attention sur le fait que cette diminution quantitative n'est évidemment pas homogène sur l'ensemble du territoire. Certaines régions voient en effet leurs effectifs augmenter, d'autres les voient diminuer de façon significative. Comme on ne peut pas demander aux enseignants de faire preuve d'une totale mobilité géographique ou fonctionnelle, il appartient au ministère de nous proposer une vision à moyen et long termes de l'offre d'enseignement, qui ne tienne pas uniquement compte de ses propres préoccupations, au demeurant légitimes comme le renforcement du primaire - avec, par exemple, la mise en oeuvre du dédoublement des classes -, ou la simplification de l'offre dans le secondaire - y compris dans l'enseignement professionnel -, mais aussi de cette baisse démographique prévisible, annoncée, et qui n'est malheureusement pas combattue, la politique familiale étant inexistante. Une telle politique serait d'ailleurs taxée d'un natalisme primitif par des détracteurs avisés, bavards et nombreux.

Il faut bien se rendre compte que la simple diminution du nombre d'élèves va entraîner une augmentation favorable du ratio enseignant/élèves. C'est en apparence une bonne chose, mais il y a peut-être une meilleure façon d'utiliser les moyens humains qui vont être dégagés. Il faut peut-être également réfléchir aux évolutions à long terme, au-delà du simple exercice budgétaire ou d'une simple loi de programmation puisqu'un enseignant est recruté pour quarante ans. J'ajoute que la mission « Enseignement scolaire » n'a pas respecté la loi de programmation, un dépassement, somme toute assez raisonnable, de 300 millions d'euros sur trois ans ayant été constaté. Le dépassement serait de 30 millions d'euros cette année, hors CAS et pensions, sur les 48 milliards d'euros de personnels en activité.

Les enseignants, à juste titre, parce que c'est leur nature et leur histoire, défendent l'enseignement général et technologique, au moment où le Gouvernement souhaite défendre l'alternance et l'enseignement professionnel. Quant au privé, il bénéficie d'une sorte de statu quo qui ne correspond en rien à la réalité de l'offre qu'il assure, ce qui aboutit d'ailleurs à des évolutions contestables en termes d'élitisme, les établissements privés pouvant choisir leurs élèves, car ils ont plus de demandes que d'offres.

J'ajoute enfin que l'enseignement agricole, qui est une véritable réussite sur le terrain, est plutôt maltraité par le ministère de l'éducation nationale, alors qu'il s'agit d'un enseignement de deuxième chance pour les élèves et de première chance pour les territoires.

En conclusion, je préconise de voter ce budget, sachant qu'un certain nombre de questions devront être posées lors du débat en séance publique.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je remercie Gérard Longuet de sa hauteur de vue sur ce sujet et de nous avoir fait partager ses convictions, qu'il répète d'année en année. Je suivrai sa préconisation et soutiendrai son analyse, pour deux raisons principalement.

Tout d'abord, nous en convenons tous, certains métiers sont en tension, les postes ne sont pas pourvus, quand certaines filières sont, au contraire, en sureffectif et ne permettent pas de trouver un emploi. L'orientation ne fonctionne pas aujourd'hui ; l'idée de Gérard Longuet de la rattacher aux régions me paraît intelligente.

Ensuite, comme lui, je pense que la France consacre beaucoup de moyens à l'éducation, beaucoup au secondaire, beaucoup moins au primaire, là où, pourtant, tout se joue. Nous partageons la conviction du ministre que le primaire doit être consacré à apprendre à lire, à écrire, à compter et à respecter les autres. Aussi, les options au baccalauréat, qui servent à gagner des points et qui ne sont donc pas extrêmement utiles, entraînent une dispersion des moyens dans le secondaire. Un rééquilibrage en faveur du primaire est souhaitable.

Le dispositif « Devoirs faits » va dans le bon sens, les inégalités étant grandes entre les enfants, notamment entre ceux qui ont leur propre chambre pour faire leurs devoirs et ceux qui les font dans une pièce commune où la télévision est allumée.

Mme Nathalie Goulet . - Combien d'inspecteurs sont désormais affectés au contrôle des écoles hors contrat et des enfants déscolarisés ? Pour quels résultats ?

Par ailleurs, l'enseignement agricole ayant toujours été maltraité, y a-t-il un moyen d'inverser la tendance, dans un contexte de développement durable, sachant, en outre, que les métiers agricoles ne sont pas délocalisables ?

M. Antoine Lefèvre . - L'abaissement de l'âge de la scolarité obligatoire à trois ans a entraîné un certain nombre de contraintes nouvelles et de coûts supplémentaires pour les communes, certaines d'entre elles devant participer aux frais de fonctionnement des maternelles privées. Le décret en Conseil d'État devant préciser les modalités d'application du dispositif d'accompagnement des communes est-il paru ? Quelles sont ses grandes tendances ?

Par ailleurs, face au malaise grandissant des directeurs d'école, qui assument des missions multiples, de plus en plus complexes, et à qui on a promis des moyens supplémentaires, où en est la rénovation du statut ?

M. Philippe Dominati . - Je remercie le rapporteur spécial, qui m'a convaincu, alors que ce n'était pas évident !

Existe-t-il un ratio permettant de connaître, au sein du titre 2, le bon périmètre entre frais de personnel, dépenses de fonctionnement et investissements ? J'ai cette même préoccupation pour le ministère de l'intérieur. J'ai l'impression que l'État cède toujours sur le titre 2, c'est-à-dire sur les frais de personnels, au détriment des dépenses de fonctionnement et des investissements. Par ailleurs, au sein de cette masse salariale, combien d'heures sont réellement enseignées ? Quelle est l'importance du personnel administratif au sein du ministère de l'éducation nationale ?

M. Claude Nougein . - Nous avons du mal à trouver de bons chefs d'établissement, faute de candidats. Le métier est de plus en plus difficile. Il faudrait une motivation financière. Pourquoi ne pas réaffecter les crédits consacrés aux enseignants n'ayant pas de poste aux chefs d'établissement, qui font bien souvent un travail remarquable ?

M. Michel Canévet . - Quelles sont les évolutions en matière d'orientation, notamment dans les lycées professionnels, en vue de répondre aux besoins de main-d'oeuvre des entreprises ? Des crédits sont-ils prévus en 2020 pour mettre en oeuvre le programme de revalorisation des rémunérations des enseignants qui interviennent en réseaux d'éducation prioritaire (REP) et REP+ ? L'enveloppe de 30 millions d'euros consacrée au service national universel (SNU) est-elle suffisante ? Comment le dispositif sera-t-il déployé ? Quelles en seront les incidences budgétaires ?

M. Marc Laménie . - Comment expliquer que les questionnaires envoyés aient reçu un très bon taux de réponse pour le volet « éducation nationale » et un très mauvais taux pour le volet « agriculture » ? Quelle masse financière représentent les enseignants qui sont réellement sur le terrain, devant les élèves ? Et quelle est la part des personnels de l'éducation nationale qui n'y sont pas ? Quid du maintien des collèges ? Dans mon département, certains locaux ne sont occupés qu'à 50 %.

M. Patrice Joly . - Nous ne partageons pas toutes les analyses de M. le rapporteur spécial. L'éducation est un enjeu de société et de développement économique majeur.

Dans les classements mondiaux, la France est à la traîne s'agissant de la qualité de l'éducation. Cette année, les moyens progressent faiblement, alors que les crédits consacrés à l'enseignement privé sont inférieurs à la moyenne des pays de l'OCDE. Avec la suppression de 1 200 postes, le second degré ne disposera pas des moyens nécessaires pour accueillir les 28 000 élèves supplémentaires attendus lors de la prochaine rentrée scolaire. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.

Selon certains, la massification serait la meilleure manière de répondre aux besoins. Or des élèves issus de petits collèges obtiennent des résultats exceptionnels. L'orientation des élèves issus de nos territoires ayant un fort potentiel est une question fondamentale ; il est dommage que leur parcours post -bac soit souvent court.

M. Bernard Delcros . - Peut-on mesurer les conséquences de la diminution du nombre de contrats aidés dans les établissements scolaires, notamment les écoles primaires et les collèges ? D'autres emplois ont-ils été créés ou certaines missions ne sont-elles plus assurées ?

En matière d'organisation du temps scolaire, sait-on combien d'écoles sont passées de la semaine de quatre jours à la semaine de quatre jours et demi ? Quelles en sont les incidences sur les activités périscolaires ?

Il serait intéressant d'analyser de manière prospective les effets de l'importante baisse à venir des effectifs sur l'organisation du tissu scolaire.

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - Je partage la formule de Nathalie Goulet sur l'enseignement agricole. Il faut tirer cet enseignement vers le haut, en créant, quand c'est possible, des licences professionnelles. Cela permettrait aux jeunes issus des territoires ruraux d'envisager leur avenir localement, même s'il est assez rare qu'ils reviennent dans leur département d'origine une fois qu'ils sont partis étudier dans une grande métropole.

Je ne dispose pas de toutes les informations concernant les fonctions d'inspection. Je suis persuadé que le texte que Mme Gatel nous a demandé d'approuver est bien mis en oeuvre, mais je ne dispose pas d'éléments de réponse sur l'efficacité de ces contrôles.

Le ministère s'efforce aujourd'hui de fusionner différentes inspections. Il a également créé une fonction « ressources humaines » dans les rectorats et les directions départementales, qui n'existait pas auparavant. Le Sénat connaît bien la question des enseignants qui ne sont pas en face des élèves, et notamment votre commission des finances. Le dédoublement des classes du primaire a été extrêmement fructueux.

Par définition, on ne peut prévoir les remplacements à venir ni la durée des intersessions. La meilleure solution serait d'annualiser le temps de travail. En cas d'absence, on pourrait alors demander à un professeur présent de travailler plus tant que le remplacement ne serait pas assuré. Les heures supplémentaires ainsi effectuées pourraient ensuite être plus facilement compensées dans le cadre de l'annualisation.

Ce ministère vient heureusement de découvrir la pertinence d'une organisation plus structurée des ressources humaines dont la gestion ne devrait plus dépendre simplement d'un arbitrage des commissions administratives paritaires tempérées par l'intercession syndicale.

Pour Antoine Lefèvre, le coût de la généralisation de la scolarisation dès trois ans semble plutôt marginal pour les communes, mais je ne dispose pas encore de chiffres précis.

En ce qui concerne les directeurs d'école, vous avez mille fois raison. J'irai même jusqu'à dire que ce poste n'existe pas dans les faits. Les principaux de collège et les proviseurs peuvent être de véritables patrons de leurs établissements. Le directeur d'école, dans le meilleur des cas, sert d'interface avec l'administration, mais ne bénéficie d'aucune autorité sur ses collègues enseignants ni d'une véritable dispense d'heures qui lui permettrait d'assurer ses fonctions collectives. Les choses vont évoluer. En milieu rural, dans la plupart des cas, l'école n'est plus communale, mais cantonale. Les établissements vont donc devenir plus importants. Encore faut-il pouvoir dégager des moyens. Peut-être faudrait-il profiter des économies résultant de la diminution des effectifs...

Oui, Philippe Dominati, l'enseignement, c'est un contact avec les élèves, mais un contact qui doit être suivi, encadré, préparé, accompagné... Ne figurent dans le titre II que les dépenses de personnel. Les dépenses d'investissement et de soutien augmentent. Toutefois, les chiffres donnés par le ministère ne nous garantissent pas une vision exacte du camembert idéal : j'ai demandé, sans succès jusqu'à présent, des chiffres par rectorat. Le simple fait de constater des différences selon les territoires permettrait de poser des questions et d'avoir des réponses. Les dépenses en matière d'éducation sont partagées entre le ministère, les collectivités locales et les familles. La part du ministère devrait être significative, mais je ne suis pas sûr qu'elle soit majoritaire.

Nous disposons en revanche de toutes les statistiques possibles sur le nombre d'heures enseignées. La France est un des pays où l'année est la plus courte pour un nombre d'heures enseignées très important. Chaque matin, nous entendons sur les radios toutes sortes de propositions pour que l'éducation nationale prenne en charge l'art de traverser la rue, l'art de se nourrir dans une grande surface, l'art d'organiser des transports au sortir des boites de nuit... Les capacités de l'Éducation nationale semblent universelles, sauf qu'elle n'a pas suffisamment d'enseignants pour ce faire et que ceux dont elle dispose ont d'autres missions. Nous devons reconquérir l'année, diminuer les vacances : des semaines plus légères et des jours plus nombreux nous permettraient d'effectuer un saut qualitatif. Mais nous n'en prenons pas la direction...

En réponse à Claude Nougein, je n'ai pas les chiffres des enseignants non affectés. Il me semble que le nombre d'enseignants concernés a considérablement diminué, notamment grâce au dédoublement.

Pour Michel Canévet, je suis entièrement d'accord avec vous en ce qui concerne l'orientation : il faut que les régions s'y mettent. Avec les REP+, nous sommes au coeur de l'effort de soutien pour le primaire. On se rend compte que de jeunes garçons et filles - souvent des garçons - décrochent très tôt en raison de leur incapacité à lire à un rythme suffisant et donc à écrire. Cette politique de dédoublement me semble donc pertinente. Le coût n'est pas celui du service national universel.

Marc Laménie a raison de souligner le retard avec lequel le ministère de l'agriculture répond à nos questions. Ses réponses ne pourront d'ailleurs pas être comptabilisées au sens de la LOLF.

Les bâtiments sont du ressort des collectivités locales. Ce budget ne nous offre pas de vision particulière sur cette question. Nous devons nous appuyer sur notre expérience d'élus locaux.

Patrice Joly, je ne doute que le collège de Château-Chinon fonctionne bien, tout comme celui de Montsauche-les-Settons. J'ai défendu autrefois le maintien d'un collège de soixante-dix élèves, mais je dois avouer que j'étais de mauvaise foi : on ne prépare pas les enfants au lycée avec une seule classe par niveau. Il s'agit en outre d'un gaspillage considérable en termes de moyens humains : les professeurs devant tourner sur deux ou trois collèges finissent par connaître davantage les routes départementales que leurs élèves.

Vous avez évoqué la qualité de notre enseignement. Les choses ont été reprises à la base, à savoir au primaire. Le drame de ce ministère, c'est qu'il a toujours été dirigé par l'élite de l'enseignement, c'est-à-dire par les agrégés, par les professeurs du secondaire, par les professeurs de grandes écoles qui deviennent, pour les meilleurs d'entre eux, inspecteurs généraux. Les instituteurs, aujourd'hui professeurs des écoles, forment les gros bataillons. Or on leur confie la mission la plus difficile, celle de faire des fondations. J'ai toujours préféré enseigner à des élèves de troisième cycle qu'à des élèves de première année : il est beaucoup plus facile de former des gens qui ont déjà une base. C'est aussi la raison pour laquelle je soutiens globalement, malgré ses imperfections, cette politique de dédoublement.

Il s'agit tout de même de la troisième hausse de crédits la plus importante du projet de loi de finances après la défense et la solidarité. C'est un bel effort.

Pour Bernard Delcros, un fonds a été mis en place pour accompagner la fin des contrats aidés, devenus parcours emploi compétences (PEC), doté de 300 millions d'euros en 2019 et de 30 millions en 2020 - cette baisse s'explique par le fait que beaucoup de ces contrats aidés correspondaient à des AESH.

S'agissant de l'organisation du temps scolaire dérogatoire, 15 % des établissements en 2019 sont passés aux neuf demi-journées.

Le Fonds de soutien au développement des activités périscolaires est maintenu pour financer le plan Mercredi, qui concerne 40 % des élèves.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

*

* *

Réunie à nouveau le 21 novembre 2019, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission des finances, après avoir pris acte des modifications introduites par l'Assemblée nationale, a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission et l'article 76 octies . L'amendement n° 7 ayant été adopté, elle lui propose en revanche de supprimer l'article 76 septies .

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO)

- M. Edouard GEFFRAY, directeur général.

Ministère de l'éducation nationale

- M. Christophe KERRERO, directeur du cabinet du ministre ;

- Mme Sabine DELIGNE, sous-directrice du budget de la mission enseignement scolaire ;

- M. Stéphane ROBIN, conseiller au cabinet du ministre ;

- Mme Constance JACQUIN, conseillère en charge des relations politiques et parlementaires.


* 1 Hors budgets annexes et mission « Remboursements et dégrèvements »

* 2 Hors budgets annexes et mission « Remboursements et dégrèvements »

* 3 http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20190930/fin.html

* 4 La norme pilotable correspond au montant des crédits minorés de la contribution au CAS « Pensions »

* 5 Rapport n°147(2018-2019), Tome 3 « Les moyens des politiques publiques et les dispositions spéciales », annexe 14 « Enseignement scolaire »

* 6 https://www.education.gouv.fr/cid130183/agenda-social-2018- 2019.html&xtmc=agendasocial&xtnp=1&xtcr=1

* 7 D'après les données du rapport annuel 2018 « Education at a glance » de l'OCDE

* 8 https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2019/01/dp-evaluation-janvier-2019_1065009.pdf

* 9 Décret n° 2018-614 du 16 juillet 2018 modifiant les dispositions du code de l'éducation relatives aux enseignements conduisant au baccalauréat général et aux formations technologiques conduisant au baccalauréat technologique

* 10 Note de service de la Direction générale de l'enseignement et de la recherche du ministère de l'agriculture et de l'alimentation du 26 avril 2019 - DGER/SDEDC/2019-339 - 26/04/2019

* 11 Note de service n° 2016-150 du 7 novembre 2016 - NOR : MENB1628228N

* 12 Avenant n° 1 du 8 novembre 2016 à la convention du 29 décembre 2015 entre l'État et la Caisse des dépôts et consignations relative au programme d'investissements d'avenir (action « Innovation numérique pour l'excellence éducative ») - NOR : PRMI1627972X

* 13 Réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux du 13 février 2019

* 14 France Stratégie, Les bénéfices d'une meilleure autonomie numérique, juillet 2018

* 15 Avenants n°1 et n°2 des 8 novembre et 28 décembre 2016 à la convention du 29 décembre 2015 entre l'État et la Caisse des dépôts et consignations relative au programme d'investissements d'avenir (action « Innovation numérique pour l'excellence éducative »

* 16 Document en cours d'obtention par les services de la commission des finances du Sénat

* 17 Cour des comptes, Rapport public thématique sur le service public numérique de l'éducation, juillet 2019.

* 18 Rapport d'information du sénateur Gérard Longuet portant sur le recours au personnel contractuel dans l'éducation nationale fait au nom de la commission des finances du Sénat et enregistré à la Présidence du Sénat le 30 mai 2018.

* 19 « Le recours croissant aux personnels contractuels, un enjeu désormais significatif pour l'éducation nationale » Communication à la commission des finances du Sénat - mars 2018.

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