SECONDE PARTIE
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES PROGRAMMES « LOGEMENT ET VILLE »

I. LE PROGRAMME 177 « HÉBERGEMENT, PARCOURS VERS LE LOGEMENT ET INSERTION DES PERSONNES VULNÉRABLES »

Le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » porte la politique d ' hébergement et d ' accès au logement des personnes sans abri ou mal logées.

En 2020, ses crédits sont de 1 965,4 millions d ' euros en autorisations d ' engagement, soit une augmentation de 92,3 millions d ' euros ou 4,9 %, et de 1 991,2 millions d ' euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 100 millions d ' euros ou 5,3 %.

Évolution des crédits par action du programme 177

(en millions d'euros)

LFI 2019

PLF 2020

Évolution PLF 2020 / LFI 2019 (volume)

Évolution PLF 2020 / LFI 2019 (%)

FDC et ADP attendus en 2020

Action 11

Prévention de l ' exclusion

AE

45,4

50,4

+ 5,0

+ 11,0 %

0,0

CP

45,4

50,4

+ 5,0

+ 11,0 %

0,0

Action 12

Hébergement et logement adapté

AE

1 818,6

1 905,9

+ 87,3

+ 4,8 %

0,0

CP

1 836,7

1 931,7

+ 95,0

+ 5,2 %

0,0

Action 14

Conduite et animation des politiques de l ' hébergement et de l ' inclusion sociale

AE

9,1

9,1

0,0

0,0 %

0,0

CP

9,1

9,1

0,0

0,0 %

0,0

Total programme 177

AE

1 873,1

1 965,4

+ 92,3

+ 4,9 %

0,0

CP

1 891,2

1 991,2

+ 100,0

+ 5,3 %

0,0

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

L' action 11 « Prévention de l'exclusion » finance des prestations d'aide sociale à destination des personnes sans domicile fixe âgées ou en situation de handicap et des actions d'accès aux droits, d'information, d'aide à l'insertion ou de prévention de l'exclusion, en particulier en direction des gens du voyage. L' action 12 « Hébergement et logement adapté » porte 97 % des crédits de paiement du programme, consacrés notamment à la veille sociale, à l'hébergement d'urgence et au logement adapté (voir infra ). L' action 14 « Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale » finance des actions de pilotage du secteur de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion, ainsi qu'un soutien aux fédérations locales des centres sociaux.

Les augmentations portent principalement :

- d ' une part sur les crédits en faveur du logement adapté (+ 42,2 millions d ' euros, soit + 13,0 %), dont les maisons-relais et les pensions de famille (+ 12,6 millions d ' euros, soit + 11,1 %) ainsi que l ' intermédiation locative (+ 24,7 millions d ' euros, soit + 25,4 %) ;

- d ' autre part sur les crédits de l'hébergement d'urgence hors centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) (+ 38,8 millions d ' euros, soit + 5,2 %). Ces crédits avaient déjà fait l ' objet d ' une augmentation de 13 millions d ' euros au cours de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, suite au transfert de crédits dédiés à l ' adaptation des centres d ' hébergement aux familles depuis le programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » 8 ( * ) ;

- enfin sur les crédits des CHRS, qui font l ' objet d ' une augmentation de 17,2 millions d ' euros, soit + 2,8 %. Cette évolution prend en compte la mise en oeuvre du projet de convergence des coûts, qui assure une pression à la baisse sur les coûts, mais aussi un abondement de 10 millions (voir infra) .

A. L'HÉBERGEMENT D'URGENCE EST SOUMIS ENCORE UNE FOIS À UNE FORTE TENSION

1. L'année 2019 nécessite une ouverture de crédits importante en cours d'année

Le projet de loi de finances rectificative pour 2019, déposé le 7 novembre 2019, prévoit une ouverture de crédits de 180,7 millions d ' euros en autorisations d'engagement et de 178,2 millions d ' euros en crédits de paiement afin de financer plusieurs dispositifs :

- la pérennisation de 6 000 places de renforts hivernaux (41 millions d ' euros), qui résulte d ' une annonce faite par le Gouvernement à la fin de l ' hiver 2018-2019 ;

- les renforts hivernaux et les dispositifs caniculaires (74 millions d ' euros) ;

- l ' augmentation des mises à l ' abri de personnes vulnérables (44 millions d ' euros) ;

- la neutralisation pérenne de l ' impact des allègements généraux sur le secteur des CHRS (12 millions d ' euros).

Ouvertures de crédits en 2019 sur le programme 177

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir du projet de loi de finances rectificative pour 2019

En outre, le programme a fait l ' objet de transferts en gestion pour un montant de 49 millions d ' euros, dont un transfert de 38 millions d ' euros en provenance du programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour solder une convention entre la France et la Suisse 9 ( * ) .

Votre rapporteur spécial constate que cette ouverture de crédits est très supérieure à celle de 60,2 millions d ' euros réalisée l ' année passée en loi de finances rectificative pour 2018, qui portait principalement, à hauteur de 46,7 millions d ' euros, sur les besoins constatés au titre des renforts hivernaux.

Ainsi, les crédits demandés en 2020 sont inférieurs de 88,3 millions d ' euros en autorisations d'engagement et de 78,2 millions d ' euros en crédits de paiement à ceux effectivement ouverts en 2019 , sous réserve de l ' adoption en l ' état du projet de loi de finances rectificative.

Crédits ouverts sur le programme 177 en loi de finances initiale et projet de loi de finances rectificative pour 2019 et en projet de loi de finances pour 2020

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Selon les éléments apportés à votre rapporteur spécial par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), la majorité des ouvertures de crédits demandées en loi de finances rectificative sont des dépenses non récurrentes et n ' ont donc pas vocation à être reprises en base en 2020.

Votre rapporteur spécial en prend acte , mais considère que les dépenses supplémentaires auraient dû être prévues dès la budgétisation initiale, d ' autant que celle-ci est assortie, comme pour les autres programmes, d ' une réserve de précaution de 3 %.

Il constate en effet la forte tension que connaît, année après année, le programme 177 , soumis au principe de l'inconditionnalité de l'accueil.

2. Le principe d'inconditionnalité de l'accueil met le programme en première ligne

Les actions du programme 177 sont exécutées dans le cadre du principe d ' inconditionnalité de l ' accueil défini par le code de l ' action sociale et des familles, au titre duquel « Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence » 10 ( * ) .

Cet accueil ne se limite pas à un accueil nocturne, mais inclut « le gîte, le couvert et l'hygiène » et « une première évaluation médicale, psychique et sociale ».

Votre rapporteur spécial est pleinement conscient des difficultés rencontrées par les associations et les organismes qui cherchent à préserver la qualité de l ' accueil alors que le nombre de demandeurs demeure très élevé et qu ' une réponse doit être apportée dans l ' urgence.

La DGCS lui a ainsi indiqué que le nombre des demandeurs d'asile connaît encore une hausse de 14,5 % en novembre 2019 par rapport au même mois de l ' année précédente, ce qui explique la saturation des dispositifs d ' hébergement d ' urgence. La France est ainsi une destination majeure de second rebond pour les demandeurs d ' asile entrés dans l'Union européenne.

La région d ' Île-de-France, qui accueille la moitié des migrants, est particulièrement concernée par ces difficultés. Votre rapporteur spécial a ainsi pu constater que la volonté affichée au niveau local de ne plus réquisitionner de gymnases n ' a pas pu être tenue face à l ' accroissement des besoins.


* 8 Ce transfert, réalisé par amendement du Gouvernement lors de l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale pour un montant de 20 millions d'euros, avait été partiellement compensé en seconde délibération par un amendement réduisant de 6,9 millions d'euros les crédits du programme.

* 9 La convention entre la France et la Suisse concernant l'assistance aux indigents, signée à Paris le 9 septembre 1931, a été dénoncée par la France par lettre du 17 novembre 2016, publiée en annexe au décret n° 2017-73 du 25 janvier 2017.

* 10 Article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles.

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