C. UNE ATTENTION PARTICULIÈRE AU DROIT PÉNAL

En matière pénale, la commission des lois a précisé les dispositions relatives à la réorientation des procédures contraventionnelles et correctionnelles par les procureurs de la République , ainsi que les mesures techniques visant à mieux assurer le fonctionnement des assises dans le contexte de la crise sanitaire.

Deux sujets nécessitent une attention particulière : le code de justice pénale des mineurs et les cours criminelles.

1. Le code de justice pénale des mineurs : la nécessité d'un débat parlementaire

La commission a approuvé le report, du 10 octobre 2020 au 31 mars 2021, de l'entrée en vigueur du nouveau code de justice pénale des mineurs , qui doit se substituer à l'ordonnance du 2 février 1945 sur l'enfance délinquante. Ce nouveau code, promulgué par voie d'ordonnance en septembre 2019 26 ( * ) , modifie la procédure de jugement des mineurs, en instituant notamment une césure du procès pénal.

La commission a constaté que tant les juridictions pour mineurs que les services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ne seraient pas prêts à mettre en oeuvre la réforme à la date initialement prévue. Les développements informatiques ont également pris du retard, de même que le travail de formation des personnels qui doit précéder l'application de la réforme.

La grève des avocats, en début d'année, puis le confinement ont perturbé le fonctionnement des juridictions qui n'ont pas réussi à apurer leurs stocks d'affaires , comme elles l'avaient initialement envisagé. Or cet apurement est indispensable si l'on veut éviter que les juridictions ne soient obligées d'appliquer deux procédures en parallèle, ce qui compliquerait grandement leur fonctionnement : la procédure ancienne et la procédure nouvelle issue du code de justice pénale des mineurs.

Le rapporteur souligne que le débat parlementaire promis à plusieurs reprises par la garde des sceaux n'a toujours pas eu lieu. Ce débat est pourtant indispensable pour stabiliser la partie législative du code.

Compte tenu de l'importance de ce sujet, le Parlement doit avoir le temps d'examiner le projet en détail avant que les préparatifs nécessaires à sa mise en oeuvre sur le terrain ne soient finalisés.

2. Les cours criminelles : une expérimentation à évaluer avant d'envisager son extension

La commission a, en revanche, rejeté l'extension à trente départements de l'expérimentation de la cour criminelle demandée par le Gouvernement.

À ce jour, neuf départements ont été autorisés à expérimenter cette nouvelle juridiction, composée exclusivement de magistrats professionnels, qui a vocation à juger, en premier ressort, les crimes punis de quinze ou vingt ans de réclusion, commis hors cas de récidive légale. L'expérimentation a notamment pour but d'apprécier si la création de la cour criminelle peut permettre de réduire les délais de jugement.

La commission considère qu'une telle extension détournerait l'expérimentation de sa finalité , en faisant de la cour criminelle un outil de gestion du stock d'affaires criminelles en attente de jugement. La crise sanitaire ne saurait servir de prétexte à la généralisation de cette nouvelle juridiction qui constitue une rupture par rapport à la tradition française en matière de justice criminelle, puisqu'elle met fin à la présence du jury tiré au sort parmi les citoyens électeurs.

Alors que les premières cours criminelles n'ont commencé à fonctionner qu'en septembre 2019, il est beaucoup trop tôt pour dresser un bilan de leur activité. Il convient donc de laisser l'expérimentation se dérouler jusqu'à son terme, en 2022 , avant d'envisager son éventuelle généralisation sur la base d'une évaluation rigoureuse.

Il convient enfin de souligner qu'une cour criminelle mobilise cinq magistrats professionnels, pris sur les effectifs du tribunal correctionnel (et de la cour d'appel lorsqu'une cour siège dans le département). Or les tribunaux correctionnels ont eux aussi accumulé un important stock d'affaires en attente de jugement, de sorte qu'il paraît peu opportun de les solliciter davantage dans les mois qui viennent.

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La commission a adopté le projet de loi ainsi modifié.

Ce texte sera examiné en séance publique le 26 mai 2020.


* 26 Ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs.

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