B. LE GRENELLE CONTRE LES VIOLENCES CONJUGALES

Au moment où le Parlement débattait de la proposition de loi d'Aurélien Pradié, le Gouvernement organisait un Grenelle contre les violences conjugales afin de faire émerger de nouvelles propositions destinées à améliorer la lutte contre ces violences.

Après deux mois de travaux, les conclusions du Grenelle ont été rendues publiques le 25 novembre dernier. Beaucoup ne relèvent pas du domaine de la loi et peuvent être mises en oeuvre sans attendre.

1. Des recommandations peuvent être mises en oeuvre sans délai

Dès la fin du mois de novembre, une grille d'évaluation harmonisée a, par exemple, été diffusée à tous les commissariats et unités de gendarmerie afin de les aider à évaluer, de manière homogène sur l'ensemble du territoire, le danger auquel est exposée une femme victime de violences conjugales. La création de quatre-vingt postes d'intervenants sociaux dans les commissariats et gendarmeries a été annoncée afin d'améliorer l'accueil des victimes. Les victimes se verront remettre un document détaillant leurs voies de recours et les modalités d'accompagnement dont elles peuvent bénéficier.

Dans le courant de l'année 2020, un millier de places d'hébergement d'urgence supplémentaires doivent être ouvertes et des permanences d'accompagnement doivent être déployées, afin que les victimes puissent bénéficier plus facilement de l'assistance d'un avocat. Des appels à projet sont prévus pour que le numéro 3919, ligne d'écoute pour les femmes victimes, devienne accessible 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, et pour créer, dans chaque région, des centres de suivi et de prise en charge des auteurs de violences.

D'ici à 2022, le Gouvernement entend développer les espaces-rencontres , lieux neutres dans lesquels parents et enfants peuvent se rencontrer en toute sécurité, et généraliser les unités d'accueil médico-judiciaires pédiatriques , spécialisées dans le recueil de la parole des enfants victimes.

Des mesures ont aussi été annoncées dans le champ éducatif, avec des modules de formation des enseignants sur l'égalité entre filles et garçons ainsi que la diffusion d'un document unique de signalement et d'un guide à destination des personnels pour mieux repérer et signaler les violences intrafamiliales.

2. D'autres mesures relèvent du domaine législatif

Parmi ces mesures, certaines ont déjà été adoptées dans le cadre de la loi Pradié : c'est le cas de la généralisation du bracelet anti-rapprochement et de la suspension de l'autorité parentale lorsque le mari violent est condamné ou poursuivi pour avoir commis un crime sur la personne de l'autre parent.

D'autres mesures figurent dans la proposition de loi des députés Couillard et Gouffier-Cha. Tel est le cas notamment du dispositif, très discuté au cours du Grenelle, tendant à déroger au secret médical pour venir en aide à la femme victime, de la possibilité de saisir les armes que pourraient détenir le conjoint violent, de l'interdiction de la médiation pénale et familiale, de la reconnaissance du phénomène du « suicide forcé » ou encore de la décharge de l'obligation alimentaire pour les enfants à l'égard du parent condamné pour un crime commis sur la personne de l'autre parent. La proposition de loi met également en oeuvre la promesse du Gouvernement d'inscrire la notion d'emprise dans le code civil et le code pénal.

Sur le plan de la méthode, le rapporteur regrette que l'ensemble des mesures législatives n'aient pas été examinées dans le cadre d'un texte unique, déposé après le Grenelle. La discussion de la proposition de loi d'Aurélien Pradié a été compliquée par la tenue concomitante du Grenelle, certains parlementaires étant tentés légitimement d'y intégrer des propositions formulées au cours du Grenelle avant qu'elles aient pu être réellement expertisées. Un texte unique aurait permis d'avoir un débat plus cohérent avec une vision globale de la politique de lutte contre les violences intrafamiliales. Le calendrier d'examen de la proposition de loi n'a pas non plus permis d'évaluer l'évolution des violences conjugales pendant le confinement et l'efficacité des dispositifs mis en place pour le combattre.

Sur le fond, le rapporteur ne peut s'empêcher de constater un certain épuisement de la créativité du législateur dans le domaine de la lutte contre les violences conjugales et intrafamiliales. Peu de mesures significatives se distinguent dans cette nouvelle proposition de loi, qui vise surtout à peaufiner, préciser ou ajuster des dispositifs déjà existants et qui contient plusieurs dispositions assez cosmétiques.

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