B. UNE INTÉGRATION DU SERVICE CIVIQUE DANS LE PLAN DE RELANCE QUI LE FAIT MONTER EN PUISSANCE, MAIS QUI NUIT À LA LISISIBILITÉ DE SA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE

498,8 millions d'euros de crédits sont consacrés au développement du service civique en 2022, ce qui est un montant similaire à 2020 et 2021 . Cet ancrage du service civique comme un dispositif clé des politiques à destination de la jeunesse vient consacrer son succès , onze ans après sa création et six ans après son universalisation décidée par l'ancien Président de la République, François Hollande, dans le contexte des attentats terroristes du 13 novembre 2015.

Cette stabilisation du financement au sein du programme 163 ne s'est toutefois pas accompagnée d'une plus grande lisibilité de sa trajectoire budgétaire . En effet, le gouvernement a décidé en parallèle de fortement mobiliser le dispositif dans le cadre du plan de relance. En 2021, l'Agence du service civique a bénéficié d'une dotation complémentaire de 363 millions d'euros pour augmenter de 100 000 le nombre de jeunes effectuant une mission de service civique, ce qui correspondait à une augmentation de 72,8 % par rapport aux crédits inscrits dans le programme 163 .

Dans le projet de loi de finances pour 2022, la dotation du plan de relance a été réduite à 201 millions d'euros, et en conséquence les fonds totaux consacrés au service civique ont diminué de 861,8 millions d'euros à 699,8 millions d'euros . Le graphique ci-après illustre l'évolution des dépenses et du nombre de jeunes en service civique depuis sa création.

Dépense et nombre de jeunes en mission de service civique

Source : commission des finances du Sénat

L'augmentation des moyens mis à disposition pour le service civique est à saluer, le dispositif ayant fait ses preuves, mais les conditions dans lesquelles a été mise en oeuvre cette dotation soulève de nombreuses interrogations, et révèlent les incertitudes qui entourent la trajectoire budgétaire du service civique . À ce titre, trois observations doivent être faites.

La première porte sur la capacité d'absorption des nouvelles missions par les organismes agréés . Le 14 juillet 2020 le président de la République a annoncé la création de 100 000 missions de service civique supplémentaire par an, dont 20 000 en 2020 et 80 000 en 2021. La création effective de missions en 2020 est restée un peu dessous de la cible prévue, à 18 800 missions. Les chiffres pour 2021 ne sont pas encore disponibles, au motif qu'un grand nombre de missions débutent au mois de septembre 20 ( * ) .

L'année dernière, le rapporteur spécial avait déjà exprimé des doutes sur la possibilité de créer 100 000 missions de service civique supplémentaires sur un an. Il sera donc particulièrement attentif à la consommation effective des crédits supplémentaires au titre du plan de relance pour le service civique, dès que les chiffres seront disponibles. En outre, même si les objectifs quantitatifs étaient remplis, il faut rappeler que cette montée en puissance ne doit pas s'opérer au détriment de la qualité des missions proposées , en particulier dans les services de l'État et ses établissements publics. Cela signifie que les missions doivent continuer à répondre à une forme d'engagement, qu'elles doivent être bien définies et encadrées, et également qu'elles doivent être d'une durée suffisante.

La deuxième observation est que l' imputation de ces crédits au titre du plan de relance surprend et semble davantage correspondre à une comptabilisation opportune des montants prévus. Les missions de service civique pourraient d'ailleurs se rapprocher des contrats aidés à destination de la jeunesse, pourtant fortement décriés par le Gouvernement lorsqu'il a décidé d'en réduire drastiquement le nombre en 2017-2018. À défaut, il conviendra de qualifier correctement cette orientation comme un traitement social du chômage des jeunes.

Faire ainsi du service civique un outil de traitement du chômage l'expose à des augmentations et des diminutions brutales de crédits. Le Mouvement associatif et la DJEPVA ont ainsi confirmé devant la mission que des augmentations plus faibles, mais continues et prévisibles, permettent un meilleur développement du service civique que des mouvements de « Stop and Go », qui conduisent à rendre le dispositif fortement dépendant de la conjoncture . Le service civique comprend ainsi des coûts de formation notables, et il implique pour les organismes d'accueil de modifier la maquette de leurs missions pour intégrer au mieux le jeune en service civique. La montée en puissance du service civique ne peut donc être conçue que de manière progressive, et sur le temps long .


* 20 Réponse au questionnaire budgétaire. Le nombre d'organismes agréés en 2021 n'est pas non plus disponible.

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