EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er (supprimé)
Électorat des chambres de commerce et d'industrie
et éligibilité des cadres dirigeants aux fonctions de juge consulaire

L'article 1 er de la proposition de loi vise à permettre aux cadres dirigeants d'être éligibles aux fonctions de juge consulaire du tribunal de commerce, revenant ainsi sur un changement opéré par la loi PACTE . Pour ce faire, il procèderait de manière indirecte, en leur conférant la qualité d'électeurs, à titre personnel, pour les élections des membres des chambres de commerce et d'industrie (CCI). En élargissant le corps électoral des chambres des CCI, la modification proposée dépasse cependant l'objectif d'urgence poursuivi.

Sur proposition de son rapporteur, la commission a supprimé l'article 1 er , préférant modifier l'article 3 pour rendre directement éligibles aux fonctions de juge consulaire les cadres dirigeants.

1. Un objectif partagé : réintégrer les cadres dirigeants parmi les personnes éligibles aux fonctions de juge des tribunaux de commerce

1.1. Des cadres dirigeants privés d'éligibilité par un effet indirect de la loi PACTE

Avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises , dite loi PACTE, les juges consulaires des tribunaux de commerce étaient élus par un collège électoral composé de délégués consulaires , ainsi que des juges en exercice et des anciens membres du tribunal de commerce 8 ( * ) .

Les délégués consulaires étaient élus dans le ressort de la juridiction par trois catégories d'électeurs 9 ( * ) qui étaient principalement :

- à titre personnel, les commerçants inscrits au registre du commerce et des sociétés, les chefs d'entreprise inscrits au répertoire des métiers, les conjoints des catégories précitées et les capitaines de la marine marchande ;

- par l'intermédiaire d'un représentant choisi parmi les mandataires sociaux ou à défaut les cadres dirigeants, les sociétés à caractère commercial ;

- les cadres dirigeants des sociétés à caractère commercial.

Les électeurs des délégués consulaires étaient de ce fait éligibles aux fonctions de juge du tribunal de commerce , sous certaines conditions 10 ( * ) .

Cette organisation électorale a été profondément modifiée par la loi PACTE qui a supprimé les délégués consulaires pour instituer une élection directe des juges consulaires par les membres des chambres de commerce et d'industrie (CCI) et des chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) , les électeurs des membres des CCI et CMA devenant à leur tour éligibles aux fonctions de juge consulaire. Les cadres dirigeants ne figurant pas parmi le corps électoral des CCI et CMA, la réorganisation des élections ainsi décidée a rendu inéligibles les cadres dirigeants aux fonctions de juge du tribunal de commerce .

Cette situation est similaire à celle des juges en fonction et anciens juges ayant six ans d'ancienneté dont l'éligibilité a été rétablie l'année dernière, également à la suite d'une initiative de Nathalie Goulet, par la loi n° 2021-1317 du 11 octobre 2021 permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce .

1.2. Un vivier de candidats pourtant précieux pour les tribunaux de commerce

Il n'existe pas de statistiques nationales sur le nombre de juges en exercice appartenant à la catégorie des cadres dirigeants . Toutefois, la Conférence générale des juges consulaires de France estime qu'ils représentent actuellement plus de 40 % des juges consulaires en exercice dans les tribunaux de commerce des grandes agglomérations .

Par ailleurs, ces derniers disposent de compétences spécialisées, par exemple en droit bancaire ou cambiaire, qui sont particulièrement recherchées par les juridictions commerciales. Leurs fonctions de direction leur laissent enfin la faculté d'organiser leurs activités et de se rendre disponibles pour exercer leurs fonctions juridictionnelles.

La commission est favorable au rétablissement de l'éligibilité des cadres dirigeants aux fonctions de juge consulaire du tribunal de commerce, étant précisé qu'une fois élus, les cadres dirigeants salariés seraient astreints aux mêmes règles déontologiques et disciplinaires que l'ensemble des juges qui composent les tribunaux de commerce.

La déontologie et la discipline
des juges consulaires des tribunaux de commerce

Les juges consulaires « exercent leurs fonctions en toute indépendance, dignité, impartialité, intégrité et probité et se comportent de façon à prévenir tout doute légitime à cet égard » 11 ( * ) . Avant d'entrer en fonctions, ils prêtent serment et jurent de « bien et fidèlement remplir [leurs] fonctions, de garder le secret des délibérations et de [se] conduire en tout comme un juge digne et loyal » 12 ( * ) .

L'article L. 722-20 du code de commerce leur impose également de veiller à « prévenir ou à faire cesser immédiatement les situations de conflit d'intérêts ». Cette obligation de prévention des conflits d'intérêts est renforcée par la rédaction d'une déclaration d'intérêts qui donne lieu à un entretien déontologique avec le président du tribunal de commerce.

La déclaration d'intérêts mentionne les liens et les intérêts détenus de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif des fonctions que le déclarant a ou qu'il a eu pendant les cinq années précédant sa prise de fonctions. En cas de poursuites disciplinaires, elle peut être consultée par la commission nationale de discipline et le ministre de la justice. Le fait de ne pas rédiger cette déclaration ou d'omettre de déclarer une partie substantielle de ses intérêts est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Est constitutif d'une faute disciplinaire, tout manquement par un juge du tribunal de commerce aux devoirs de son état, à l'honneur, à la probité ou à la dignité. Les premiers présidents de cour d'appel disposent d'un pouvoir infra-disciplinaire leur permettant de donner un avertissement aux juges consulaires des tribunaux de leur ressort. Le pouvoir disciplinaire est exercé par une commission nationale de discipline qui peut être saisie par le ministre de la justice ou le premier président de la cour d'appel concerné. Les sanctions vont du blâme à la déchéance assortie de l'inéligibilité définitive 13 ( * ) .

Par ailleurs, les membres du tribunal du commerce remplissent leur mission bénévolement, conformément à l'article L. 722-16 du code de commerce.

2. Un dispositif qui va au-delà : la modification du corps électoral des chambres de commerce et d'industrie (CCI)

L'article 1 er tel que proposé vient modifier la composition du corps électoral des CCI en y ajoutant les cadres dirigeants, qui peuvent en l'état du droit, être électeurs, mais uniquement à titre de représentants désignés d'une personne morale elle-même électeur .

Ce faisant, le dispositif va bien au-delà de la question de l'éligibilité aux fonctions de juge de tribunal de commerce, qui justifie ce texte d'urgence.

Il convient plutôt d'accorder la possibilité aux cadres dirigeants de se porter candidats, sans pour autant les rendre électeurs des membres d'une CCI. En tout état de cause, il convient de souligner que les cadres dirigeants une fois élus juges consulaires deviendraient automatiquement électeurs aux prochaines élections 14 ( * ) et seraient ainsi sur un pied d'égalité avec les autres juges qui sont ou ont été électeurs.

3. La position de la commission

À l'initiative du rapporteur, la commission a supprimé l'article 1 er par l'adoption de l' amendement COM-1 .

Elle a renvoyé l'éligibilité des cadres dirigeants aux fonctions de juge de tribunal de commerce à l'article 3, qui vise à modifier l'article L. 723-4 du code de commerce 15 ( * ) .

La commission des lois a supprimé l'article 1 er .

Article 2 (supprimé)
Sanction du refus de siéger par une cessation
des fonctions de juge consulaire

L'article 2 de la proposition de loi vise à introduire une nouvelle cause de cessation des fonctions de juge consulaire du tribunal de commerce en raison d'un refus de siéger sans motif légitime.

Ce mécanisme s'apparenterait fortement à une procédure disciplinaire dans les formes, mais sans en apporter les garanties.

Le rapporteur, co-auteur avec François Bonhomme, du rapport d'information de la commission des lois sur le droit des entreprises en difficulté à l'épreuve de la crise 16 ( * ) , a, il y a un an, recommandé d'encourager les chefs de cour à utiliser leurs prérogatives disciplinaires pour appréhender les hypothèses des juges refusant de siéger sans motif légitime. Ce comportement constitue en effet, pour le juge, qu'il soit professionnel ou non, « un manquement au devoir de son état ».

Aucun élément nouveau ne vient justifier une remise en cause de ce choix en urgence. Au surplus, le Gouvernement envisage de déposer, au cours de l'année 2023, un projet de loi sur la justice du quotidien en réponse au rapport du comité des États généraux de la justice.

En conséquence, la commission a supprimé l'article 2.

1. La problématique du refus de siéger au sein des juridictions commerciales

La Conférence générale des juges consulaires de France et la direction des services judiciaires (DSJ) ont exposé au rapporteur les difficultés entraînées par le refus de siéger opposé par certains juges consulaires qui, une fois élus, ne remplissent pas leurs fonctions et perturbent le fonctionnement de leur tribunal.

Cette problématique est soulevée depuis quelques années. Toutefois, aucune donnée chiffrée ne vient l'étayer .

Selon la DSJ, cette situation « fréquemment rencontrée » est un facteur de désorganisation pour les juridictions commerciales car la charge de travail du juge absent doit être répartie sur les autres juges, étant précisé que le nombre de juges consulaires par tribunal est fixé par décret 17 ( * ) . Par ailleurs, selon elle, la procédure disciplinaire ne serait pas une solution, le refus de siéger « n'étant pas sanctionné » et la procédure disciplinaire étant jugée trop longue.

C'est pourquoi l'article 2 de la proposition de loi vise à créer une cinquième cause de cessation de fonctions de juge d'un tribunal de commerce , s'inspirant de ce qui existe pour les conseillers prud'hommes.

Le refus de siéger aux prud'hommes

Le refus de siéger des conseillers prud'hommes est sanctionné au titre de la discipline 18 ( * ) . Il est réputé démissionnaire à titre disciplinaire.

Cette procédure est régie par un décret en Conseil d'État qui prévoit d'une part l'organisation d'un entretien préalable entre le président de la juridiction prud'homale et le conseiller prud'homme qui refuse d'effectuer son service. À l'issue de cet entretien, le président de la juridiction dresse un procès-verbal après avis du vice-président de la juridiction et de la section ou la chambre dans laquelle siège habituellement le conseiller prud'homme. Ensuite, la cour d'appel statue sur la démission de l'intéressé après l'avoir convoqué.

Cette procédure est peu employée : selon la DSJ, seulement six conseillers prud'hommes ont fait l'objet d'une application de cette procédure depuis le 14 décembre 2017.

2. Les interrogations relatives à la création d'une nouvelle cause de cessation de fonctions

Actuellement, il existe quatre causes de cessation de fonctions de juge d'un tribunal de commerce. L'article L. 722-8 du code de commerce les énumère :

- l'expiration du mandat électoral ;

- la suppression du tribunal ;

- la démission ;

- la déchéance.

Ces causes résultent toutes de situations sans équivoque, dans lesquelles, à l'exception de l'hypothèse d'une démission, le juge consulaire n'est pas à l'origine de la fin de son mandat. A l'inverse, le refus de siéger, s'il est volontaire, peut connaître des raisons différentes et temporaires et il convient d'apprécier l'absence de « cause légitime ».

En outre, contrairement aux autres causes, le refus de siéger sans motif légitime peut s'interpréter comme un manquement aux obligations déontologiques du juge du tribunal de commerce. C'est la raison pour laquelle la procédure sanctionnant le refus de siéger des conseillers prud'hommes figure dans une sous-section consacrée à la discipline dans le code du travail .

Siéger constitue en effet pour un juge, qu'il soit professionnel ou non, « un devoir de son état » 19 ( * ) . Ne pas siéger constitue pour un juge consulaire un manquement à ce devoir et, ce faisant, une faute disciplinaire susceptible d'un avertissement du premier président de la cour d'appel et d'une saisine de la commission nationale de discipline. Telle est l'analyse qui avait déjà été faite par la commission des lois dans son rapport d'information portant sur « le droit des entreprises à l'épreuve de la crise » 20 ( * ) : elle avait alors encouragé les premiers présidents de cour d'appel à se saisir pleinement de leurs prérogatives en matière disciplinaire pour assurer le bon fonctionnement des juridictions commerciales.

Cette nature disciplinaire est bien présente à l'esprit de la DSJ qui, dans ses échanges avec le rapporteur, a indiqué souhaiter faire relever le refus de siéger du domaine disciplinaire exclusif des chefs de cour d'appel, ce qui ne correspond pas à la disposition proposée à l'article 2.

3. La position de la commission : recentrer le texte sur l'éligibilité, seule question urgente

La proposition de loi a pour objet principal de rectifier des « malfaçons » de la loi PACTE pour le bon déroulement des élections des juges consulaires à venir.

La question du refus de siéger semble pouvoir déjà être traitée via la discipline des juges consulaires et ne présente pas de caractère d'urgence.

De plus, le Gouvernement envisage de déposer un projet de loi sur la justice du quotidien au cours de l'année 2023, ce qui permettrait de réexaminer cette question dans un contexte plus général. Reprenant une proposition du Sénat, rappelée dans le rapport de la commission de mai 2021 21 ( * ) , sur la création d'un tribunal des affaires économiques, le comité des États généraux de la justice a en effet proposé une réforme de la juridiction commerciale.

Dans ces conditions, à l'initiative du rapporteur, la commission des lois a adopté un amendement de suppression COM-2 .

La commission des lois a supprimé l'article 2.

Article 3
Conditions d'éligibilité des candidats aux fonctions de juge consulaire
d'un tribunal de commerce

Cet article a pour objet de rectifier certaines malfaçons issues de la loi PACTE qui concernent l'éligibilité aux fonctions de juges consulaires. Il s'agirait en particulier de supprimer l'obligation de double inscription sur les listes électorales des chambres de commerce et d'industrie (CCI) et des chambres de métiers et de l'artisanat (CMA).

Il vise également à élargir le vivier des candidats en permettant aux juges en exercice et aux anciens juges ayant six ans d'ancienneté d'être réélus dans leur tribunal ou un tribunal limitrophe sans condition de résidence, tout en prévoyant un régime dérogatoire spécial, fixé par décret en Conseil d'Etat, pour les tribunaux non limitrophes.

La commission a pris en compte le souhait des juridictions commerciales de pouvoir maintenir l'éligibilité des juges en exercice ou anciens juges qui arrêtent leur activité professionnelle et ne remplissent pas la condition de résidence ou de domicile à titre personnel. Elle a choisi de supprimer cette condition dès lors qu'ils se portent candidats dans le tribunal de commerce dans lequel ils ont été élus ou un tribunal limitrophe.

De plus, en cohérence avec la suppression de l'article 1 er , elle a ajouté les cadres dirigeants parmi les personnes éligibles, les soumettant aux conditions d'éligibilité de l'article L. 723-4, à l'exception de la condition d'inscription sur les listes électorales des CCI ou des CMA. Ils devraient également justifier être âgés de 30 ans, avoir une ancienneté de cinq ans dans leurs fonctions de cadre dirigeant et un lien géographique avec le tribunal.

La commission a enfin ajouté une correction à l'article L. 723-4 du code de commerce, y mentionnant la procédure de sauvegarde parmi les causes d'inéligibilité rappelées, en cohérence avec l'article L. 722-9.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

1. Le but affiché de la proposition de loi : la rectification de malfaçons de la loi PACTE

1.1 Une éligibilité sécurisée par la suppression expresse de l'exigence de double inscription sur les listes électorales des CCI et des CMA

Cette correction serait, à la lecture de l'exposé des motifs de la proposition de loi, son objet principal.

Le 1° de l'article L. 723-4 du code de commerce semble imposer aux candidats aux fonctions de juge consulaire d'être inscrits cumulativement sur les listes électorales des CCI et des CMA . Or cette double condition, qui résulte de l'emploi d'un « et » au lieu d'un « ou », ne correspond pas à l'intention du législateur, qui a fait référence de manière alternative à l'obligation d'inscription sur les listes des CCI ou des CMA au 5° du même article. Cette double condition n'a d'ailleurs en pratique pas été exigée par les préfectures qui organisent les élections annuelles des juges consulaires, ce qui n'a fait l'objet d' aucun contentieux selon les déclarations des représentants de la Conférence générale des juges consulaires de France (CGJCF) et de la direction des services judiciaires (DSJ).

Il apparait néanmoins opportun de procéder à cette correction afin de clarifier l'intention du législateur et redonner une cohérence interne à l'article L. 723-4 du code de commerce.

Dans le même ordre d'esprit, la proposition de loi procéderait à la rectification d'une erreur syntaxique - double occurrence du mot « fait » -, qui avait été corrigée d'office sur le site Internet de Légifrance par la direction de l'information légale et administrative.

Ces deux dispositions n'ont appelé aucune réserve de la part du rapporteur.

1.2 L'ajout d'une précision relative à l'inéligibilité en cas de procédure de sauvegarde

Lors de l'examen de l'article L. 723-4 du code de commerce, il est apparu nécessaire au rapporteur de le mettre également en cohérence avec l'article L. 722-9 du même code qui prévoit les causes de démission d'office et y intègre la procédure de sauvegarde.

En l'état, l'article L. 723-4 du code de commerce rend en effet seulement inéligibles les personnes à l'égard desquelles une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est en cours au jour du scrutin. Le rapporteur a donc proposé d'y ajouter la procédure de sauvegarde.

2. Une intention moins explicite : revenir sur l'obligation de résidence votée l'année dernière

2.1. Une obligation de résidence applicable à tous les juges et anciens juges quel que soit le tribunal dans lequel ils présentent leur candidature

Actuellement, les juges en exercice et les anciens juges de ces tribunaux ayant exercé au moins six années et n'ayant pas été réputés démissionnaires sont éligibles aux fonctions de juges consulaires à condition de disposer d'une résidence ou d'être domiciliés dans le ressort du tribunal où ils candidatent ou celui des tribunaux limitrophes .

Cette disposition est applicable quel que soit le tribunal dans lequel la personne candidate : tribunal d'origine, tribunal limitrophe ou non limitrophe. Elle a été introduite dans la loi n° 2021-1317 du 11 octobre 2021 permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce à l'initiative de la commission 22 ( * ) , lors de l'examen de la précédente proposition de loi de la sénateur Nathalie Goulet sur le sujet.

Une certaine connaissance de l'environnement économique local avait été considérée comme nécessaire pour l'exercice des fonctions de juge consulaire.

2.2. L'instauration contestable d'un régime différencié pour les candidats souhaitant exercer dans un tribunal non limitrophe

La rédaction de l'article 3 proposée tend à remettre en cause cette disposition votée l'année dernière :

- en supprimant la condition de résidence pour les juges en exercice et les anciens juges ayant exercé au moins six années qui postulent dans leur tribunal d'origine ou un tribunal limitrophe ;

- en introduisant des conditions fixées par décret pour « les juges d'un tribunal de commerce ayant prêté serment, à jour de leurs obligations déontologiques et de formation », qui souhaiteraient être candidats dans un tribunal de commerce non limitrophe .

Selon les informations obtenues par le rapporteur, cette modification visait à réintroduire une différenciation qui paraissait contestable entre les anciens juges ayant six ans d'exercice qui souhaitent exercer dans le ressort du tribunal de commerce ou le ressort des tribunaux de commerce limitrophes et ceux ayant trois ans d'exercice qui souhaitent exercer dans des tribunaux non limitrophes 23 ( * ) .

Le rapporteur dans un premier temps, et en l'absence d'éléments chiffrés, avait donc proposé de maintenir les dispositions actuelles qui étaient récentes.

2.3. La position de la commission : le maintien de l'obligation de résidence uniquement pour les candidats souhaitant exercer dans un tribunal non limitrophe

Les échanges avec la DSJ ont finalement mis en exergue un risque éventuel de réduction du nombre de candidats potentiels du fait de l'application de la condition de domiciliation ou de résidence. Il s'agit des juges ou anciens juges ayant pris leur retraite professionnelle et ne disposant pas d'un domicile ou d'une résidence dans le ressort de leur tribunal d'exercice ou ceux des tribunaux limitrophes. Selon la Conférence générale des juges consulaires de France, 307 juges seraient concernés .

Compte tenu de ces éléments nouveaux lors de la discussion en commission, le rapporteur a proposé de modifier son amendement COM-3 afin de lever la condition de résidence pour permettre aux juridictions commerciales de continuer à bénéficier des compétences de juges expérimentés , ce que la commission a accepté.

Elle a en revanche maintenu cette condition pour les candidatures dans des tribunaux non limitrophes , considérant qu'une certaine connaissance du bassin économique local est nécessaire pour l'exercice des fonctions de juge d'un tribunal de commerce.

Le rapporteur a modifié son amendement COM-3 en conséquence.

3. L'ajout de la commission : rétablir l'éligibilité des cadres dirigeants

En cohérence avec la suppression de l'article 1 er , la commission a souhaité, à l'initiative de son rapporteur, réintroduire parmi les personnes éligibles énumérées par l'article L. 723-4 du code de commerce les cadres dirigeants.

Leur éligibilité serait soumise aux mêmes conditions que les autres personnes éligibles : être âgé de 30 ans, disposer de cinq ans d'ancienneté dans ses fonctions, remplir les conditions de nationalité, d'absence de condamnation pénale, d'absence de procédure collective ou de sanctions commerciales...

La commission a souhaité y ajouter une condition préexistant à la loi PACTE lorsque les cadres dirigeants pouvaient être électeurs de délégué consulaire : celle d'être employé dans le ressort ou celui d'un tribunal limitrophe, conservant ainsi une exigence minimale de rattachement géographique entre le candidat et son tribunal, similaire à celle qui s'impose aux autres candidats.

La commission a, en conséquence, adopté l' amendement COM-3 modifié par le rapporteur .

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié .

*

* *


* 8 Article L. 723-1 du code de commerce.

* 9 Article L. 713-7 du code de commerce.

* 10 Article L. 723-4 du code de commerce.

* 11 Article L. 722-18 du code de commerce.

* 12 Article L. 722-7 du code de commerce.

* 13 Voir les articles L. 724-1 et suivants du code de commerce.

* 14 2° de l'article L. 723-1 du code de commerce.

* 15 Voir commentaire ci-après.

* 16 « Les outils juridiques de prévention et de traitement des difficultés des entreprises à l'aune de la crise de la covid-19 », rapport d'information n° 615 (2020-2021) de François Bonhomme et Thani Mohamed Soilihi.

* 17 Annexe 7-2 du livre VII du code de commerce.

* 18 Article L. 1442-12 du code du travail : « Tout conseiller prud'homme qui, sans motif légitime et après mise en demeure, refuse de remplir le service auquel il est appelé peut être déclaré démissionnaire ».

* 19 Article L. 724-1 du code de commerce.

* 20 « Les outils juridiques de prévention et de traitement des difficultés des entreprises à l'aune de la crise de la covid-19 », rapport d'information n° 615 (2020-2021) de François Bonhomme et Thani Mohamed Soilihi.

* 21 Rapport d'information n° 615 (2020-2021) précité.

* 22 Rapport n°823 (2020-2021) de François Bonhomme, fait au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce.

* 23 Décret n° 2017-1163 du 12 juillet 2017 : les juges d'un tribunal de commerce souhaitant exercer dans un autre tribunal de commerce non limitrophe devaient justifier d'une ancienneté d'au moins trois ans et d'une résidence ou d'un domicile dans le ressort du tribunal ou des tribunaux limitrophes.

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