Rapport général n° 115 (2022-2023) de MM. Emmanuel CAPUS et Daniel BREUILLER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022

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Synthèse du rapport (207 Koctets)


N° 115

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 32

TRAVAIL ET EMPLOI

Rapporteurs spéciaux : MM. Emmanuel CAPUS et Daniel BREUILLER

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean- Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273 , 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374 , 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

I. UN BUDGET EN FORTE HAUSSE PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE, MAIS DU MÊME ORDRE QUE LES CRÉDITS ALLOUÉS À LA MISSION EN 2021 ET 2022

Prévus à plus de 20 milliards d'euros pour 2023 , les crédits de la mission « Travail et emploi » enregistrent par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 une augmentation de 4,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (+ 28,5 %) et de 6,2 milliards d'euros en crédits de paiement (+ 42,6 %) . Toutefois, en 2021 et en 2022, la mission a bénéficié de ressources supplémentaires en cours d'exercice (transferts depuis la mission « Plan de relance », ouvertures de crédits en collectif budgétaire, crédits provenant de France compétences rattachés par fonds de concours).

Évolution des crédits de la mission « Travail et emploi » 2021-2023

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires pour 2021, 2022 et 2023

En 2023, certains dispositifs jusqu'alors financés par la mission « Plan de relance » sont intégrés à la mission « Travail et emploi » et des dépenses couvertes les années passées par les lois de finances rectificatives sont incluses dans le projet de loi de finances initiale, notamment une subvention de 1,7 milliard d'euros à France compétences.

La programmation triennale prévoit de ramener les crédits de la mission à 17 milliards d'euros en 2024 , puis à 16,3 milliards d'euros en 2025 (crédits de paiement) . Cette trajectoire suppose notamment, en 2024 et 2025, l'absence de reconduction de la subvention à France compétences et une diminution de 11 à 12 % par an des dépenses de fonctionnement qui sont constituées à 90 % de la subvention à Pôle emploi.

II. LES DÉPENSES DIRECTEMENT CONDITIONNÉES PAR LA SITUATION DE L'EMPLOI PROGRESSENT MALGRÉ LA BAISSE DU CHÔMAGE

Les dépenses directement conditionnées par la situation de l'emploi représentent 7,2 milliards d'euros, soit près de 35 % des crédits de la mission pour 2023 .

A. DES DÉPENSES D'INDEMNISATION DU CHÔMAGE EN DIMINUTION DE 21 %

La prise en charge par l'État des dépenses du régime de solidarité s'élève pour 2023 à 1,8 milliard d'euros , en diminution de près de 500 millions d'euros (21 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Le nombre moyen annuel de bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique est évalué à 280 500, contre 364 600 dans la construction du budget 2022.

B. L'ACTIVITÉ PARTIELLE EST DE NOUVEAU FINANCÉE PAR LA MISSION À COMPTER DE 2023

Les dispositifs spécifiques d'activité partielle mis en place durant la crise sanitaire ont représenté une dépense de 22 milliards d'euros sur trois ans (18 milliards d'euros sur la seule année 2020), financée hors mission « Travail et emploi ». En 2023, l'activité partielle sera exclusivement financée par la mission « Travail et emploi » , la provision étant fixée à 400 millions d'euros .

C. EN FORTE HAUSSE, LA COMPENSATION DES EXONÉRATIONS DE COTISATIONS SOCIALES REPRÉSENTE UN QUART DES CRÉDITS DE LA MISSION

En 2023, la compensation des exonérations de cotisations aux organismes sociaux représente 5 milliards d'euros (+ 15,9 %) , soit le quart des crédits de la mission. Les exonérations sur les contrats d'apprentissage progressent de plus de 50 % (1,4 milliard d'euros) et celles sur les heures supplémentaires de 32 %, à la suite de la déduction pour les entreprises de 20 à 250 salariés instituée par la loi « pouvoir d'achat » du 16 août 2022.

III. DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN À L'EMPLOI GLOBALEMENT CONFORTÉS ET UNE MONTÉE EN CHARGE DU CONTRAT D'ENGAGEMENT JEUNE

A. UNE LÉGÈRE AUGMENTATION DES CRÉDITS POUR L'INSERTION PAR L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE (IAE)

Fortement rehaussés depuis trois ans, les crédits de soutien au secteur de l'IAE sont maintenus à 1,3 milliard d'euros en 2023, comme en 2022 (900 millions d'euros en 2019).

B. L'AUGMENTATION DU BUDGET ALLOUÉ AUX ENTREPRISES ADAPTÉES SE POURSUIT

Les dotations en faveur de l'emploi des personnes handicapées progressent de 8,7 % (467 millions d'euros) et seront complétées, comme en 2022, par une contribution de l'Agefiph de 50 millions d'euros. Le démarrage de certaines expérimentations (contrats à durée déterminée « tremplins », entreprises adaptées de travail temporaire) ayant été perturbé par la crise sanitaire, leur prolongation d'un an est proposée par l'article 47 rattaché à la mission.

C. UNE ENVELOPPE EN REPLI POUR LES CONTRATS AIDÉS

Les contrats aidés ont été relancés à l'occasion de la crise sanitaire. Plus de 200 000 contrats ont été prescrits en 2021. Après une première diminution en 2022, le nombre de contrats financés en 2023 serait stabilisé à 80 000 dans le secteur non marchand (PEC) , mais diminuerait de 53 200 à 31 150 pour les contrats dans le secteur marchand (CIE) .

D. LE CONTRAT D'ENGAGEMENT JEUNE : DES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS, DES CRÉDITS EN AUGMENTATION

En vigueur depuis le 1 er mars 2022 , le contrat d'engagement jeune (CEJ) prend le relai de la garantie jeune, avec un accompagnement renforcé, l'orientation possible vers des structures spécifiques d'insertion (écoles de la 2 ème chance, Epide...), une obligation d'activité hebdomadaire minimale de 15 heures et le bénéfice, sous certains conditions, d'une allocation pouvant aller jusqu'à 520 euros mensuels. Près de 200 000 CEJ ont été conclus fin septembre 2022 .

Le recul manque pour une évaluation approfondie, mais les premiers éléments recueillis sont plutôt encourageants . Les conditions d'orientation des jeunes ont été clarifiées , les mineurs et les jeunes présentant des besoins périphériques importants (santé, logement...) sont prioritairement pris en charge par les missions locales, les autres par Pôle emploi. La condition d'activité hebdomadaire minimale semble également avoir pu être satisfaite.

La dotation prévue pour le CEJ atteint 1 milliard d'euros pour 2023, dont 888 millions d'euros pour l'allocation. La montée en charge du dispositif devrait essentiellement concerner les missions locales, avec un objectif de 200 000 entrées contre 100 000 pour Pôle emploi.

Une dotation de 633 millions d'euros est prévue pour le financement des missions locales , soit moins que les 671 millions d'euros prévus en 2022, incluant 160 millions d'euros au titre du plan d'investissement dans les compétences (PIC). Ce montant demeure supérieur aux dotations versées lors des exercices précédents (500 millions d'euros en 2021 et de 320 à 400 millions d'euros sur les années 2018 à 2020).

E. UNE SUBVENTION EN HAUSSE DE 12 % POUR PÔLE EMPLOI

La subvention à Pôle emploi augmente de 136 millions d'euros (+ 12,2 %) et atteint 1,25 milliard d'euros. Toutefois, la dotation de 150 millions d'euros figurant en 2022 sur la mission « Plan de relance » n'est pas reconduite. Les effectifs sous plafond de Pôle emploi (48 847 en 2023) diminueront légèrement par rapport à 2022 (- 31 ETPT) .

La convention tripartite Pôle emploi-État-Unédic expire fin 2022 et sera reconduite pour un an , en l'attente de conclusions sur le projet « France travail », devant être mis en oeuvre à partir 2024.

IV. LE POIDS CROISSANT DU SOUTIEN À L'ALTERNANCE DANS LES CRÉDITS DE LA MISSION

A. UNE RÉVISION DE L'AIDE AUX EMPLOYEURS D'ALTERNANTS AUX CONTOURS ENCORE INDÉFINIS

Plus élevée que l'aide unique instaurée en 2019, avec des critères plus larges (formations jusqu'à bac + 5, entreprises de plus de 250 salariés atteignant un seuil d'emploi d'alternants), l' aide exceptionnelle à l'embauche des apprentis et jeunes en contrat de professionnalisation créée en 2020 a été prolongée pour tous les contrats signés jusqu'au 31 décembre 2022 . Le montant total des aides à l'embauche est passé de 1,3 milliard d'euros en 2020 à 4,5 milliards d'euros en 2021 , une dépense au moins équivalente étant attendue pour 2022.

Pour 2023 , les crédits prévus s'élèvent à 2,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 3,5 milliards d'euros en crédits de paiement . La définition de nouveaux paramètres est en discussion avec les partenaires sociaux, sans qu'aient été précisées les options privilégiées : diminution du montant de l'aide actuelle ou ciblage sur certaines entreprises ou certains niveaux de formation. Cette révision aura surtout des effets budgétaires fin 2023 et en 2024.

B. UNE NOUVELLE SUBVENTION À FRANCE COMPÉTENCES, TOUJOURS FORTEMENT DÉFICITAIRE

Créée en 2019, France compétences a rapidement connu une situation financière très déséquilibrée . Provenant des contributions des entreprises, ses ressources ne suivent pas la forte augmentation de ses dépenses , notamment sa participation à la prise en charge du coût des contrats d'apprentissage et le financement du compte personnel de formation (CPF) . Depuis la réforme de la formation professionnelle de 2018, ces deux dispositifs s'inscrivent dans une logique « de guichet » , dans une enveloppe financière ouverte .

Le succès des entrées en apprentissage, qui ont doublé entre 2019 et 2021 , passant de 370 000 à 740 000, comme celui du CPF , a plongé France compétences dans une situation lourdement déficitaire . Malgré des subventions exceptionnelles de 2,7 milliards de l'État en 2021 , elle a enregistré un résultat négatif de 2,9 milliards d'euros (après 4,6 milliards d'euros en 2020). En 2022 , après une première subvention de 2 milliards d'euros en loi de finances rectificative d'août 2022, une seconde du même montant est prévue dans le projet de loi de finances rectificative de fin de gestion. Malgré cet apport de 4 milliards d'euros, le déficit pourrait encore atteindre 3,4 milliards d'euros en 2022 , contraignant l'opérateur à recourir à des emprunts bancaires à court terme et à supporter d'importants frais financiers.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une subvention de l'État à France compétences de 1,7 milliard d'euros . Par ailleurs, l'État décharge France compétences d'une partie de la contribution qu'elle lui verse au titre de la formation des demandeurs d'emploi. De 1,6 milliard d'euros en 2022, elle est ramenée en 2023 à 800 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 400 millions en crédits de paiements.

Au cours de l'année 2022, de premières inflexions sont intervenues . Les niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage ont été révisés au 1 er septembre 2022 . Une nouvelle révision doit intervenir en avril 2023.

S'agissant du CPF , des déréférencements sont intervenus et les taux de refus d'éligibilité des formations au CPF ont fortement augmenté. Adoptée par l'Assemblée nationale, une proposition de loi contre la fraude au CPF est inscrite à l'ordre du jour du Sénat le 8 décembre. Enfin, un principe de régulation du CPF , ouvrant la voie à un éventuel reste à charge pour les bénéficiaires, est posé par l'article 49 rattaché à la mission, inséré à l'Assemblée nationale.

Un début de réponse est donc apporté à la progression non maîtrisée des charges de France compétences. Il ne paraît toutefois pas suffisant pour assurer un équilibre financier pérenne de l'opérateur.

Il est désormais indispensable que l'État, en lien avec les partenaires sociaux, définisse une trajectoire soutenable pour le financement de la formation professionnelle et de l'apprentissage , sans casser la dynamique en cours.

Réunie le jeudi 10 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission ainsi que les articles 47 et 48 rattachés. Elle a en revanche proposé de réserver son vote sur l'article 49 rattaché.

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission « Travail et emploi » ainsi que les articles 47 et 48. Elle a adopté un amendement n° II-28 à l'article 49 et décidé de proposer au Sénat l'adoption de cet article ainsi modifié.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 69 % des réponses étaient parvenus aux rapporteurs spéciaux en ce qui concerne la mission « Travail et emploi ».

PREMIÈRE PARTIE
DES MOYENS RENFORCÉS POUR LA POLITIQUE DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS UN CONTEXTE D'AMÉLIORATION
DE LA SITUATION DE L'EMPLOI

Avec plus de 20 milliards d'euros prévus par le projet de loi de finances pour 2023, la mission « Travail et emploi » est, avec la mission « Écologie », celle qui enregistre la plus forte progression par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. C'est une augmentation de 4,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (+ 28,5 %) et de 6,2 milliards d'euros en crédits de paiement (+ 42,6 %) .

Cette première impression doit cependant être nuancée dans la mesure où, au cours des deux dernières années , les moyens budgétaires dévolus à la politique de l'emploi et de la formation professionnelle ne se sont pas limités à ceux votés au titre de la mission « Travail et emploi » en loi de finances initiale.

Évolution des crédits de la mission « Travail et emploi » 2021-2023

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires pour 2021, 2022 et 2023

La mission « Travail et emploi » a en effet bénéficié en cours d'exercice :

- de transferts de crédits provenant de la mission « Plan de relance »;

- de crédits provenant de France compétences, destinés à la formation des demandeurs d'emploi et rattachés par fonds de concours ;

- d'ouvertures de crédits extrêmement importantes en lois de finances rectificatives.

Alors que la mission « Plan de relance » est désormais en voie d'extinction et qu'une subvention à France compétences est prévue dès la loi de finances initiale, sans attendre une future loi de finances rectificative, le projet de budget de la mission « Travail et emploi » constitue moins une amplification qu'une consolidation des moyens renforcés mobilisés pour endiguer les effets de la crise sanitaire .

Le projet de budget de la mission pour 2023 s'inscrit dans un contexte d'amélioration de la situation de l'emploi et de recul du chômage entraînant des effets contrastés sur les dotations, certaines dépenses étant en diminution alors que d'autres, en raison même de leur vocation de soutien à l'emploi, sont en progression.

I. DES CRÉDITS D'INTERVENTION EN FORTE HAUSSE ET UNE SUBVENTION DE 1,7 MILLIARD D'EUROS À FRANCE COMPÉTENCES

En valeur absolue, l'augmentation des crédits de 2022 à 2023 tient d'abord aux dépenses d'intervention, notamment pour l'apprentissage, et à l'inclusion en loi de finances initiale d'une subvention à France compétences.

A. UNE AUGMENTATION CONCENTRÉE SUR LE PROGRAMME 103 OÙ FIGURENT LES CRÉDITS DÉVOLUS À L'APPRENTISSAGE ET À LA FORMATION

Le poids budgétaire prépondérant des deux principaux programmes de la mission - Accès et retour à l'emploi (programme 102) d'une part, Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi (programme 103) d'autre part - s'accentue en 2023, puisqu'ils représentent 96,2 % des dotations.

Évolution par programmes des crédits de la mission « Travail et emploi »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Exécution 2020

Exécution 2021

LFI 2022

PLF 2023

Évolution PLF 2023 / LFI 2022

102 - Accès et retour à l'emploi

AE

6 312,2

6 967,2

8 109,4

7 630,4

- 5,9 %

CP

6 313,5

6 878,7

7 809,7

7 433,1

- 4,8 %

103 - Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

AE

5 879,0

12 410,7

6 964,6

11 898,1

+ 70,8 %

CP

7 662,9

10 058,5

6 084,9

12 652,4

+ 107,9 %

111 - Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

AE

54,4

150,2

57,4

73,7

+ 28,5 %

CP

82,8

83,8

92,4

110,4

+ 19,5 %

155 - Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

AE

683,4

667,4

661,7

686,6

+ 3,8 %

CP

676,9

660,4

643,3

681,1

+ 3,8 %

Total mission

AE

12 929,1

21 855,6

15 793,1

20 288,9

+ 28,5 %

CP

14 736,0

20,195,5

14 643,1

20 876,9

+ 42,6 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le programme 102 « Accès et retour à l'emploi » voit ses dotations diminuer de l'ordre de 5 % , essentiellement en raison de la réduction des dépenses d'indemnisation du chômage pour les bénéficiaires du régime de solidarité. Plusieurs dispositifs relevant du programme bénéficient de crédits en augmentation (contrat d'engagement jeune, entreprises adaptées), alors que la dotation dévolue à l'insertion par l'activité économique (IAE) est stable et celle destinée aux contrats aidés est en recul d'environ 10 %. La subvention pour charges de service public à Pôle emploi progresse de 12 % pour atteindre 1,25 milliard d'euros.

Le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » est marqué par un doublement des crédits de paiement et une augmentation de 70 % des autorisations d'engagement par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Cette forte augmentation résulte de plusieurs facteurs : un niveau d'aide aux employeurs d'alternants supérieur de près de 3 milliards d'euros à celui qui avait été inscrit dans la loi de finances initiale pour 2022, l'inscription d'une subvention de 1,7 milliard à France compétences, le rattachement d'actions précédemment financées par la mission « Plan de relance », une forte progression de la compensation aux organismes sociaux des exonérations de cotisations sociales.

Les évolutions sont moins significatives sur les deux autres programmes de la mission.

Évolution par titres des crédits de la mission « Travail et emploi »

(en millions d'euros et en pourcentage)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution PLF 2023 / LFI 2022

Dépenses de personnel (titre 2)

AE

570,2

582,9

+ 2,2 %

CP

570,2

582,9

+ 2,2 %

Dépenses de fonctionnement (titre 3)

AE

1 491,5

3 332,7

+ 123,4 %

CP

1 487,3

3 371,3

+ 126,7 %

Dépenses d'investissement (titre 5)

AE

-

20,3

-

CP

-

29,9

-

Dépenses d'intervention (titre 6)

AE

13 717,4

16 353,0

+ 19,2 %

CP

12 571,7

16 934,5

+ 34,7%

Dépenses d'opérations financières (titre 7)

AE

14,0

-

-

CP

14,0

-

-

Total mission

AE

15 793,1

20 288,9

+ 28,5 %

CP

14 643,1

20 876,9

+ 42,6 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

En 2023, les dépenses d'intervention continueront de représenter l'essentiel du budget de la mission (plus de 80 %), mais la part des dépenses de fonctionnement , dont l'essentiel est traditionnellement constitué de la subvention à Pôle emploi, est majorée en raison de l'inscription de la subvention à France compétences.

Les dépenses de personnel représentent moins de 3 % du budget de la mission et sont en progression modérée en 2023 (+ 2,2%) . Le plafond d'emploi de la mission passe de 7 961 à 7 773 ETPT, soit une baisse de 188 ETPT .

B. UNE STABILISATION DES PLAFONDS D'EMPLOI DES OPÉRATEURS, UN SOUTIEN À LA TRÉSORERIE DE FRANCE COMPÉTENCES

Une subvention de 1,68 milliard d'euros est inscrite au projet de budget pour 2023, au titre du soutien à la trésorerie de France compétences . Aucune dotation n'était prévue pour l'opérateur dans la loi de finances initiale, mais une première subvention de 2 milliards d'euros lui a été attribuée par la loi de finances rectificative du 16 août 2022 et une seconde, du même montant, figure au projet de loi de finances rectificative de fin de gestion pour 2022.

Les crédits inscrits à la mission au titre de la subvention à Pôle emploi sont en progression de 136 millions d'euros, l'opérateur ne recevant plus, toutefois, de subvention de la mission « Plan de relance ».

Les moyens dévolus à ces deux opérateurs font l'objet d'analyses détaillées dans le corps du rapport.

Évolution des subventions pour charges de service public
versées aux opérateurs

(en milliers d'euros)

Opérateur
(programme chef-de-file)

SCSP 2022

SCSP 2023

Variation 2023/2022

Pôle emploi (P102)

1 114 447

1 250 447

+ 12,2 %

EPIDE (P102)

85 541

77 841

- 9,0 %

GIP plateforme inclusion

(P102)

8 780

-

Centre INFFO (P103)

3 826

3 826

-

AFPA (P103)

110 000

110 000

-

France compétences (P103)

-

1 680 000

~

GIP Les entreprises s'engagent (P103)

2 500

~

ANACT (P111)

15 660

18 000

+ 14,9 %

INTEFP (P155)

13 373

12 270

- 8,2 %

TOTAL

1 342 847

3 163 664

+ 135,6 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La dotation destinée à l'Établissement d'insertion dans l'emploi (ÉPIDE) est en diminution de 7,7 millions d'euros, mais celui-ci recevra une subvention majorée du même montant de la mission « Cohésion des territoires » 1 ( * ) .

La subvention à l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact) progresse de près de 15 %, en lien avec l'intégration en son sein des agences régionales pour l'amélioration des conditions de travail (Aract) opérant jusqu'alors sous statut associatif 2 ( * ) .

En 2023, deux groupements d'intérêt public (GIP) seront rattachés à la mission comme opérateurs :

- le GIP Plateforme de l'inclusion, constitué entre l'État et Pôle emploi pour développer des services numériques utilisables par tous les acteurs de l'insertion et de l'emploi et améliorant l'identification et le suivi du parcours des personnes en insertion ;

- le GIP Les entreprises s'engagent, constitué par l'État, Pôle emploi et un réseau d'entreprises partenaires mobilisées en faveur de l'inclusion des personnes les plus éloignées de l'emploi.

Évolution des plafonds d'emplois des opérateurs

(en ETPT)

Opérateur
(programme chef-de-file)

Plafond d'emplois 2022

Plafond d'emplois 2023

Variation 2023/ 2022

Pôle emploi (P102)

48 878

48 847

- 31

EPIDE (P102)

1 136

1 142

+ 6

GIP plateforme inclusion

(P102)

-

35

+ 35

Centre INFFO (P103)

72

72

- 3

AFPA (P103)

5 548

5 487

- 61

France compétences (P103)

86

91

+ 5

GIP Les entreprises s'engagent (P103)

-

11

+ 11

ANACT (P111)

249

265

+ 16

INTEFP (P155)

87

91

+ 4

TOTAL

56 056

56 041

- 15

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Les plafonds d'emploi des opérateurs rattachés à la mission sont globalement stabilisés par rapport à 2022.

C. UN REFLUX DES CRÉDITS DE LA MISSION PRÉVU À PARTIR DE 2024

Les documents budgétaires fournissent pour la première fois une prévision indicative de l'évolution des dotations sur trois ans, détaillée par programmes et par titres.

Prévision indicative d'évolution par programmes et par titres
des crédits de la mission « Travail et emploi » (2023-2025)

(en millions d'euros)

2023

2024*

2025*

102 - Accès et retour à l'emploi

AE

7 630,4

7 677,7

7 633,8

CP

7 433,1

7 574,9

7 548,4

103 - Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

AE

11 898,1

8 458,4

8 323,4

CP

12 652,4

8 674,1

8 007,2

111 - Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

AE

73,7

178,1

49,2

CP

110,4

107,8

86,4

155 - Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

AE

686,6

682,7

678,7

CP

681,1

677,2

673,2

Total mission

AE

20 288,9

16 996,9

16 685,2

CP

20 876,9

17 034,1

16 315,3

Dépenses de personnel (titre 2)

AE

582,9

579,1

575,1

CP

582,9

579,1

575,1

Dépenses de fonctionnement (titre 3)

AE

3 332,7

1 512,2

1 338,2

CP

3 371,3

1 504,9

1 335,7

Dépenses d'investissement (titre 5)

AE

20,3

20,4

12,3

CP

29,9

35,3

12,1

Dépenses d'intervention (titre 6)

AE

16 353,0

14 885,2

14 579,5

CP

16 934,5

14 914,8

14 392,3

• * Prévision indicative

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Selon ces prévisions, conformes aux plafonds pluriannuels des crédits des missions figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques en cours d'examen au Parlement, les moyens dévolus à la mission seraient ramenés à 17 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement en 2024 , puis à 16,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 16,3 milliards d'euros en crédits de paiement en 2025 . La mission « Travail et emploi » serait donc l'une des principales contributrices au freinage de l'évolution des dépenses de l'État tel que le prévoit le projet de loi de programmation des finances publiques.

Le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » porte quasi-exclusivement cette diminution des crédits . Ses dépenses d'intervention diminueraient de 21 % en 2024, soit 2,3 milliards d'euros et de 7,8 % en 2025, soit 650 millions d'euros par rapport à 2024. La prévision suppose aussi l'absence de reconduction de la subvention à France compétences , en 2024 comme en 2025.

Les dépenses de fonctionnement du programme 102 « Accès et retour à l'emploi », constituées à près de 90 % de la subvention pour charges de service public à Pôle emploi, diminueraient de 11 % en 2024 et de 12 % en 2025.

Les dépenses de personnel seraient en légère diminution (- 1,3 % sur deux ans).

II. UNE LECTURE BROUILLÉE PAR LE TRAITEMENT BUDGÉTAIRE DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DE 2020 À 2022

La crise sanitaire et ses suites ont entraîné de fortes répercussions sur la politique de l'emploi et de la formation professionnelle et son traitement budgétaire. L'évolution des moyens qui y ont été consacrés depuis 2020 est particulièrement difficile à apprécier en raison de la mise en place de nouvelles missions budgétaires, du lancement de nouveaux dispositifs et de la nécessité de modifier les dotations initiales en cours d'exercice par des lois de finances rectificatives.

En très forte augmentation par rapport à la loi de finances initiale pour 2022, le budget de la mission pour 2023 représente en réalité des moyens sensiblement du même ordre que ceux qui ont été mobilisés en 2021 et 2022.

A. UN SUIVI BUDGÉTAIRE COMPLEXE DEPUIS 2020

• En 2020, c'est dans le cadre de la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire » , créée à cet effet, qu'ont été financés des dispositifs spécifiques liés à l'arrêt ou au ralentissement de nombreux secteurs d'activité. Il en a été ainsi pour le dispositif exceptionnel d'activité partielle puis de l'activité partielle de longue durée, mis place au cours de cette année.

Parallèlement, le montant total des crédits ouverts sur la mission « Travail et emploi » a été nettement augmenté en cours d'année, par deux lois de finances rectificatives , de 3,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 750 millions d'euros en crédits de paiement, notamment pour financer les aides exceptionnelles aux employeurs d'apprentis et de jeunes en contrats de professionnalisation et la prime à l'embauche des jeunes de moins de 26 ans. La mission a également bénéficié, sur fonds de concours, d'une subvention de près de 1,6 milliard d'euros provenant de France compétences destinée à cofinancer le plan d'investissement dans les compétences. Sur l'exercice, les crédits de paiement consommés avaient dépassé de 1,7 milliard ceux ouverts en loi de finances initiale. Les autorisations d'engagement consommées avaient en revanche été inférieures de plus de 5 milliards d'euros à celles prévues en loi de finances initiale.

• La mission « Plan de relance », créée en 2021, portait un volume important de crédits destinés à des actions entant dans le champ habituel d'intervention de la mission « Travail et emploi ». Cette dernière a reçu, en cours d'exercice, 2,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 1,3  milliard d'euros en crédits de paiement transférés de la mission « Plan de relance ».

La mission « Travail et emploi » a également reçu, comme en 2020, une subvention de 1,6 milliard d'euros provenant de France compétences. Elle a bénéficié, en loi de finances rectificative , de 3,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,5 milliards d'euros en crédits de paiement ouverts en loi de finances rectificative (dont 2 milliards d'euros de subvention à France compétences).

Finalement, sur l'exercice 2021, les crédits consommés ont dépassé les 20 milliards d'euros, soit :

- 21,8 milliards d'euros d'autorisations d'engagement consommées (pour 14,3 milliards d'euros inscrites en loi de finances initiale) ;

- 20,2 milliards d'euros de crédits de paiement consommés (pour 13,5 milliards d'euros inscrits en loi de finances initiale).

Comme les rapporteurs spéciaux l'avaient souligné lors de l'examen du précédent projet de loi de finances, en novembre 2021, la lecture des évolutions d'un exercice à l'autre est particulièrement brouillée par le manque de lisibilité du financement des politiques relevant de la mission .

En effet, le financement du plan d'investissement dans les compétences (PIC) a été éclaté entre différents programmes au sein de la mission et de la mission « Plan de relance ».

Le plan « 1 jeune 1 solution », comprenant à la fois le renforcement de dispositifs existants et des mesures nouvelles, s'est lui aussi caractérisé par une extrême dispersion des moyens budgétaires, rendant le suivi des mesures et de leur financement extrêmement difficile.

Enfin, la très forte augmentation des aides à l'apprentissage et à l'alternance ainsi que le financement du compte personnel de formation (CPF), qui constituent des dépenses de guichet, ont plongé France compétences dans une crise financière qui a nécessité des ouvertures massives de crédits en loi de finances rectificative.

B. LE PROJET DE BUDGET DE LA MISSION POUR 2023 : UNE COMPARAISON INOPÉRANTE AVEC LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2022

Le budget de la mission pour 2022 se caractérise par la part relativement importante des modifications intervenues au cours de l'examen parlementaire, les crédits ayant été majorés de 850 millions en autorisations d'engagement et de plus de 1 milliard d'euros en crédits de paiement, pour financer l'instauration du contrat d'engagement jeunes (CEJ) et le plan de réduction des tensions de recrutement.

La mission connaît aussi en 2022 d' importants mouvements en cours d'exercice .

La mission « Plan de relance » comportait en loi de finances initiale 500 millions d'euros d'autorisations d'engagement et près de 3,3 milliards d'euros de crédits de paiement entrant dans le champ de la mission « Travail emploi » et susceptibles de lui être transférés, notamment au titre du financement de l'aide exceptionnelle à l'embauche des alternants.

La mission « Travail emploi » reçoit également près de 1,7 milliard d'euros provenant de France compétences qui lui sont rattachés par voie de fonds de concours.

La loi de finances rectificative du 16 août dernier a ouvert sur la mission 7,1 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 2,7 milliards d'euros de crédits de paiement , dont à nouveau 2 milliards d'euros de subvention à France compétences, ainsi que 5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 700 millions d'euros en crédits de paiement au titre de l'aide exceptionnelle à l'embauche des alternants.

Enfin, le deuxième projet de loi de finances rectificative de fin de gestion pour 2022 propose d'ouvrir 1,6 milliard d'euros d'autorisations d'engagement et 2,5 milliards d'euros de crédits de paiement supplémentaires , comprenant un complément de subvention exceptionnelle à France compétences, à hauteur de 2 milliards d'euros, et l'actualisation des compensations d'exonération de cotisations sociales, notamment pour le dispositif en faveur de l'apprentissage et pour l'extension de la déduction forfaitaire spécifique sur les heures supplémentaires figurant dans la loi du 16 août dernier portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat. Il propose sur les autres programmes l' annulation de 283 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 535 millions d'euros de crédits de paiement.

D'après les indications figurant dans le deuxième projet de loi de finances rectificative, la mission pourrait bénéficier sur l'exercice 2022 de crédits ouverts supérieurs de près de 10 milliards d'euros pour les autorisations d'engagement et de 7 milliards d'euros pour les crédits de paiement à ceux inscrits en loi de finances initiale .

Montant des crédits susceptibles d'être ouverts sur la mission « Travail et emploi » après le deuxième projet de loi de finances pour 2022

(en millions d'euros)

AE

CP

Exercice 2021 (exécution)

14 302,1

13 542,6

Loi de finances initiale pour 2022

15 793,1

14 643,1

Modifications intervenues en gestion

+ 9 474,2

+ 5 192,3

Ouvertures proposées PLFR 2

+ 1 627,0

+ 2 502,0

Annulations proposes PLFR 2

- 283,4

- 535,9

Total après modifications en gestion et PLFR 2

26 610,9

21 801,5

PLF 2023

20 288,9

20 876,9

Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021, le projet de loi de finances pour 2023 et le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022

Compte tenu des mouvements intervenus en cours de gestion cette année et des mesures proposées par le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022, bien qu'en forte augmentation par rapport à la loi de finances initiale pour 2022, les crédits demandés pour 2023 seraient inférieurs à ceux qui seraient finalement ouverts sur la mission au cours de l'exercice 2022 .

Il faut souligner que dans le projet de loi de finances pour 2023 :

- la mission « Plan de relance » ne comporte plus que des crédits résiduels de soutien à la politique de l'emploi et de la formation, soit 155 millions d'euros en crédits de paiement ;

- les dispositifs d'activité partielle sont de nouveau financés par la mission « Travail et emploi », avec une dotation de 400 millions d'euros ;

- les transferts prévus au profit de la mission « Travail et emploi » en provenance de France compétences par voie de fonds de concours sont en nette diminution (800 millions d'euros en autorisations d'engagement et 400 millions en crédits de paiement) ;

- une subvention de 1,684 milliard d'euros à France compétences est en revanche inscrite dans les crédits de la mission dès le projet de loi de finances initiale.

Les moyens demandés pour 2023 demeurent globalement dans des ordres de grandeur comparables à ceux dont a bénéficié la mission en 2021 et 2022.

III. LES EFFETS CONTRASTÉS DE L'AMÉLIORATION DE LA SITUATION DE L'EMPLOI SUR LE BUDGET DE LA MISSION

Après le choc provoqué par la crise sanitaire sur l'activité, la situation de l'emploi s'est améliorée, y compris par rapport au niveau d'avant crise.

Cette situation a des effets contrastés sur les dépenses de la mission dans la mesure où certains dispositifs participent directement au soutien à l'emploi alors que pour d'autres, la charge budgétaire s'atténue grâce au recul du chômage.

A. UNE SITUATION DE L'EMPLOI QUI S'EST REDRESSÉE

À la fin juin 2022 , l'Insee comptabilisait un nombre de personnes en emploi salarié supérieur de 1 500 000 au point bas atteint deux ans auparavant, fin juin 2020 . La progression est encore de 800 000 personnes par rapport à l'avant-crise, fin 2019 , et de 1 200 000 personnes par rapport à fin 2018.

Emplois salariés trimestriels - Ensemble des salariés - Toutes les sections (hors activités extra-territoriales) - CVS

Source : Insee - série chronologique - emplois salariés trimestriels

Quant au nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A 3 ( * ) , il est inférieur à 3 000 000 de personnes pour la première fois depuis dix ans. Au troisième trimestre, il était en recul de 371 000 personnes sur un an, et de plus de 380 000 personnes par rapport à la fin 2019 , avant la crise sanitaire.

Le taux de chômage s'établit à 7,4 % à la fin du 2 ème trimestre 2022 4 ( * ) , soit un niveau qu'il n'avait pas connu depuis 2008, en dessous de celui atteint avant la crise sanitaire (8,2 % fin 2019).

L' Unédic enregistre à la fois l'effet sur ses recettes de la progression de l'emploi salarié et celui sur ses dépenses du recul du chômage. Après un déficit cumulé de 58,8 milliards d'euros sur les treize années 2009-2021, l'Unédic prévoit le retour à une situation excédentaire, à hauteur de 4,4 milliards d'euros, en 2022 , et un excédent de 4,2 milliards d'euros en 2023 et en 2024 5 ( * ) .

Selon les prévisions de l'Unédic , « les créations nettes d'emplois affiliés à l'assurance chômage devraient ralentir tout en restant positives pour s'établir à + 246 000 en 2022 . Le net ralentissement de l'emploi devrait finalement intervenir en 2023 dans un contexte marqué par l'incertitude et la baisse de l'activité économique. Cependant, ce retournement devrait être en partie compensé par l'effet des mesures de politiques d'emploi, notamment la poursuite des entrées en apprentissage , de sorte que l'emploi reculerait légèrement, avec - 6 000 postes en fin d'année . Une fois leur montée en charge réalisée, les politiques publiques de l'emploi verraient leur effet sur les créations d'emplois se dissiper en 2024, tandis que le regain de dynamisme de l'économie entrainerait un rebond de l'emploi . Les créations nettes d'emplois affiliés à l'assurance chômage atteindraient + 92 000 postes en 2024, soit un niveau inférieur à la moyenne enregistrée entre 2015 et 2019 (+ 225 000 créations nettes d'emplois affiliés à l'assurance chômage en moyenne annuelle) ».

B. DES INDEMNITÉS DE CHÔMAGE EN BAISSE MAIS DES DÉPENSES DE SOUTIEN À L'EMPLOI À LA HAUSSE

L'amélioration de la situation de l'emploi a un effet direct sur les dépenses d'allocations chômage prises en charge par l'État. Elles diminuent de près de 500 millions d'euros en 2023 par rapport à la loi de finances initiale, soit une baisse de 21 %.

Inversement, la compensation aux organismes sociaux des exonérations de cotisations sociales , directement conditionnée par le nombre de salariés concernés, s'alourdit de près de 700 millions d'euros. Elle représente un quart du budget total de la mission, atteignant 5 milliards d'euros, soit une hausse de plus de 15 %.

Par ailleurs, l'amélioration de la situation de l'emploi tient pour partie à l'effort budgétaire supporté par la mission . L'Insee considère ainsi qu'environ un tiers de la hausse de l'emploi salarié depuis fin 2019 résulte de la dynamique des contrats en alternance , notamment en apprentissage 6 ( * ) . D'autres types d'action financées par la mission, qu'il s'agisse de l'accompagnement des personnes les plus éloignées de l'emploi ou du soutien à la formation, influent également sur l'emploi et le chômage, même si leur effet n'est pas aussi précisément quantifié.

Si l'on se base sur les travaux de l'Unédic , qui prévoient un tassement de la progression des emplois salariés à partir de 2023 , l'effet de ces variations devrait s'atténuer.

Parmi les conjoncturistes, l'OFCE prévoit une remontée du taux de chômage en 2023 et 2024 , autour de 8 %, puis une décrue à 7,5 % fin 2027 .

Le Gouvernement a quant à lui présenté des prévisions plus optimistes dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques, avec une stabilisation du chômage en 2023 et une décrue jusqu'au taux de 5 % jusqu'en 2027 . Elles s'appuient sur l'effet attendu sur l'emploi de réformes structurelles à venir (« retraites, ... RSA, réforme de la contra-cyclicité de l'assurance chômage ») ainsi que sur « l'amélioration de l'accompagnement des demandeurs d'emploi » ou encore « l'élargissement au lycée professionnel des succès de l'apprentissage » 7 ( * ) .

DEUXIÈME PARTIE
DES MOYENS CONSOLIDÉS POUR L'ACCOMPAGNEMENT ET L'INCLUSION DANS L'EMPLOI,
UNE CHARGE CROISSANTE LIÉE
AU DÉVELOPPEMENT DE L'ALTERNANCE

I. DES DÉPENSES DIRECTEMENT CONDITIONNÉES PAR LA SITUATION DE L'EMPLOI QUI PROGRESSENT MALGRÉ LA BAISSE DU CHÔMAGE

Les crédits de la mission directement conditionnés par la situation de l'emploi représentent plus de 7,2 milliards d'euros (près de 35 % du total) et progressent pour 2023 en raison de mouvements en sens contraire.

Les dépenses d'indemnisation du chômage dans le cadre du régime de solidarité diminuent de 500 millions d'euros, mais le coût des exonérations de cotisations sociales compensées par la mission aux organismes sociaux s'alourdit de 700 millions d'euros. Par ailleurs, les dépenses résultant des dispositifs d'activité partielle, qui avaient été totalement financées par d'autres missions en 2021 et 2022, sont réintégrées au budget de la mission, pour un montant de 400 millions d'euros.

A. DES DÉPENSES D'INDEMNISATION DU CHÔMAGE EN DIMINUTION DE 21 %

Les crédits destinés à la prise en charge par l'État des dépenses du régime de solidarité s'élèvent pour 2023 à 1,846 milliard d'euros , en diminution de près de 500 millions d'euros (21 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 .

En 2021, la dépense s'était établie à 2,3 milliards d'euros, soit un sixième des crédits consommés au cours de l'exercice sur la mission. Un montant analogue avait été inscrit en loi de finances initiale pour 2022, mais le projet de loi de finances rectificative de fin de gestion pour 2022 propose d'annuler 524 millions d'euros de crédits de paiement sur l'ensemble du programme 102, « compte tenu de moindres dépenses attendues principalement sur l'allocation de solidarité spécifique (ASS) ».

La dotation demandée pour 2023 serait donc proche du niveau de consommation attendu en 2022 .

S'agissant de l'allocation de solidarité spécifique destinée aux chômeurs arrivés en fin de droits dans le régime d'assurance chômage, qui représente 96 % de la dépense, la dotation proposée anticipe pour 2023 une diminution de 23 % du nombre de bénéficiaires par rapport à l'estimation d'il y a un an, en raison de l'amélioration de la situation de l'emploi. Ce nombre passerait de 364 670 bénéficiaires envisagés lors de la construction de la loi de finances initiale pour 2022 à 280 510 en 2023 .

B. L'ACTIVITÉ PARTIELLE DE NOUVEAU FINANCÉE PAR LA MISSION EN 2023

Destinée à éviter le licenciement économique, l'activité partielle permet à l'entreprise rencontrant des difficultés ponctuelles de réduire l'horaire de travail ou de fermer temporairement l'établissement. L'employeur verse aux salariés une allocation pour les heures non travaillées et reçoit en contrepartie une aide financée par l'État et l'Unédic.

Ce dispositif a été fortement remanié en mars 2020 , à l'occasion de la crise sanitaire, avec une prise en charge exceptionnelle supprimant le reste à charge des entreprises et un élargissement des catégories d'entreprises et de salariés concernés. Il a été resserré à partir du printemps 2021, en fonction de l'allègement des mesures de restriction d'activités. Ces mesures ont progressivement pris fin entre novembre 2021 et fin mars 2022 .

En parallèle, a été mis en place un nouveau dispositif d'activité partielle de longue durée pour les entreprises confrontées à une réduction d'activité durable 8 ( * ) . Reposant sur la négociation collective, il leur permet de diminuer l'horaire de travail, dans la limite d'une réduction de 40 % de la durée du travail par salarié, en contrepartie d'engagements portant notamment sur le maintien de l'emploi et la formation. Dans ce dispositif, l'employeur bénéficie d'un reste à charge de 15 %.

Le recours à l'activité partielle de longue durée est lui aussi appelé à se réduire. Toutefois, dans le cadre du plan de résilience économique et sociale de mars dernier pour faire face aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine, la date jusqu'à laquelle peuvent être reçus des accords collectifs ou des documents unilatéraux pris en application d'un accord de branche étendu relatifs à l'activité partielle a été prolongée du 30 juin au 31 décembre 2022 9 ( * ) . Par ailleurs, la durée maximale de recours à l'activité partielle de longue durée a été prolongée de 12 mois 10 ( * ) .

Au plan budgétaire , l'essentiel des dépenses intervenues de 2020 à 2022, soit un montant total de plus de 22 milliards d'euros sur trois ans, dont près de 18 milliards d'euros sur la seule année 2020 , a été financé sur des crédits autres que ceux de la mission « Travail et emploi ». Celle-ci ne comportait plus de dotations pour l'activité partielle en 2021 ni en 2022.

Un programme spécifique 11 ( * ) a été créé en 2020 dans la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire » . Ont été consommés à ce titre 17,8 milliards d'euros en 2020 et 1 milliard d'euros en 2021. Aucun crédit n'avait été ouvert sur ce programme en loi de finances initiale pour 2022 et les crédits disponibles au titre du report des exercices antérieurs, ramenés à 657 millions d'euros à la suite d'une première annulation au mois d'avril, font l'objet d'une annulation supplémentaire de 405 millions d'euros dans le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022.

À partir de 2021, l'activité partielle a également été prise en charge par le programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance » . Les crédits consommés se sont élevés à 4,4 milliards d'euros en 2021, dont 3,7 milliards d'euros pour l'activité partielle de crise et 700 millions d'euros pour l'activité partielle de longue durée. Aucun crédit n'a été ouvert sur cette mission en loi de finances initiale pour 2022 alors que 966 millions d'euros étaient disponibles au titre du report des exercices antérieurs. Toutefois, au 31 août dernier, 73 millions d'euros seulement étaient engagés sur le programme 364.

Jusqu'en 2019, le financement par l'État de l'activité partielle était assuré par la mission « Travail et emploi » (55 millions d'euros consommés en 2019). En 2020, elle a encore financé ces dépenses à hauteur de 87 millions d'euros. Aucune dotation n'était plus prévue à ce titre en 2021 et en 2022.

En 2023, les dotations figureront exclusivement sur la mission « Travail et emploi » 12 ( * ) . Le montant prévu par le projet de loi de finances s'élève à 400 millions d'euros .

C. EN FORTE HAUSSE, LA COMPENSATION DES EXONÉRATIONS DE COTISATIONS SOCIALES REPRÉSENTE UN QUART DES CRÉDITS DE LA MISSION

La mission « Travail et emploi » finance , sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », l'essentiel de la compensation aux administrations sociales des exonérations « ciblées »  de cotisations sociales , les missions « Outre-mer » et « Agriculture » assurant la compensation de certains dispositifs spécifiques.

Les mesures générales d'allègement ou de baisse de taux sont quant à elles compensées, « pour solde de tout compte », par l'affectation de recettes fiscales, essentiellement une fraction de la TVA (branche maladie, Unédic, régimes de retraite complémentaires) et dans une moindre mesure la taxe sur les salaires (branches famille et vieillesse).

En 2023 , les dotations correspondantes inscrites au budget de la mission « Travail et emploi » s'élèvent à 4,98 milliards d'euros , soit près de 700 millions de plus (+ 15,9 %) que les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2022 . Toutefois, le projet de loi de finances rectificative de fin de gestion pour 2022 prévoit une ouverture de crédits supplémentaires d'environ 500 millions d'euros cette fin d'année au titre « de l'actualisation de la prévision sur les compensations d'exonération de cotisations sociales, notamment pour le dispositif en faveur de l'apprentissage et pour l'extension de la déduction forfaitaire spécifique dans le cadre des mesures pour le pouvoir d'achat ».

La compensation des exonérations de cotisations sociales représenterait ainsi un quart des crédits de la mission en 2023 .

L' exonération des cotisations salariales des apprentis et des cotisations patronales des employeurs publics d'apprentis 13 ( * ) représente un montant de 1,386 milliard d'euros pour 2023 , soit une augmentation de plus de 50 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 (901 millions d'euros).

S'agissant des exonérations « ciblées » , les principaux dispositifs compensés par la mission concernent :

- l' aide à domicile employée par un particulier fragile ou une association ou une entreprise, auprès d'une personne fragile (1,836 milliard d'euros en 2023) ;

- la déduction forfaitaire sur les heures supplémentaires (796 millions d'euros), en hausse de 32 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 (602 millions d'euros) ; cette augmentation correspond à la déduction sur les heures supplémentaires pour les entreprises de 20 à 250 salariés instituée, à l'initiative du Sénat, par la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat ;

- l' aide aux créateurs ou repreneurs d'entreprise - ACRE (472 millions d'euros) ;

- la déduction forfaitaire pour les particuliers employeurs (407 millions d'euros).

II. LES ACTIONS DE SOUTIEN À L'EMPLOI : DES DISPOSITIFS GLOBALEMENT CONFORTÉS ET UNE MONTÉE EN CHARGE DU CONTRAT D'ENGAGEMENT JEUNES

A. UNE ENVELOPPE EN LÉGÈRE AUGMENTATION POUR L'INSERTION PAR L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE

Les crédits de soutien au secteur de l'insertion par l'activité économique (IAE) avaient connu une nette augmentation en 2022 , passant à 1,3 milliard d'euros contre 1,15 milliard d'euros en 2020 et 900 millions d'euros en 2019. Ils augmentent très légèrement pour 2023 (1,316 milliard d'euros).

Évolution des dotations destinées à l'IAE (lois de finances initiales)

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

2022

2023

840,27

908,78

1 021,06

1 149,52

1 299,98

1 316,33

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Plus de 4 500 structures d'insertion par l'activité économique sont conventionnées par l'État, dont plus de 280 ont été créées entre 2021 et 2022.

Elles salarient dans le cadre de parcours à durée déterminée des personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières : demandeurs d'emploi de très longue durée, bénéficiaires du RSA, jeunes éloignés de l'emploi

Fin juin 2022 , elles employaient 151 600 salariés , dont 64 550 dans les ateliers et chantiers d'insertion, 48 000 dans les associations intermédiaires et 19 950 dans les entreprises de travail temporaire d'insertion et 19 100 dans les entreprises d'insertion 14 ( * ) .

Affecté lors de la crise sanitaire, le taux d'insertion dans l'emploi des salariés des structures de l'IAE s'est amélioré en 2021. Il varie fortement selon le type de structure : 53 %, dont 27 % dans l'emploi durable, c'est à dire pour une durée supérieure à six mois, dans les entreprises de travail temporaire d'insertion, 46 %, dont 25 % dans l'emploi durable, pour les associations intermédiaires, 29 %, dont 14 % dans l'emploi durable, pour les entreprises d'insertion et 28 %, dont 12 % dans l'emploi durable, pour les ateliers et chantiers d'insertion. En effet, les différents types de structures n'ont pas vocation à accueillir un public présentant les mêmes difficultés d'accès à l'emploi.

L' intensité de l'accompagnement varie selon le type de structures, ce qui justifie également des écarts importants dans les montants d'aide au poste qui s'établissent, pour 2023, à 22 891 euros pour les ateliers et chantiers d'insertion, 11 923 euros pour les entreprises d'insertion, 4 574 euros pour les entreprises de travail temporaire d'insertion et 1 549 euros pour les associations intermédiaires.

Le niveau des aides au poste prévu pour 2023 représente une majoration de 7,5 % par rapport à celui fixé pour le début de l'année 2022, qui a toutefois été réévalué au mois de mai dernier. La progression est ainsi de 4,8 % par rapport au niveau établi en milieu d'année.

Le projet annuel de performance précise que le montant prévu pour l'aide au poste tient compte de la revalorisation attendue du niveau du Smic et permettra de financer un nombre moyen de 130 064 ETP en 2023, soit 2 % de plus que celui mentionné dans le projet de loi de finances initiale pour 2022.

La stabilisation des moyens en 2023 suscite une certaine inquiétude des acteurs de l'insertion par l'activité économique . Les effets de la hausse du Smic, sur lequel les rémunérations des bénéficiaires sont indexées, leur paraissent insuffisamment pris en compte. Si tel était le cas, on pourrait craindre qu'à enveloppe constante, le nombre de postes finançables soit moindre, ce qui remettrait en cause l'élan constaté ces dernières années. Par ailleurs, compte tenu des forts écarts d'aide au poste, le maintien des moyens au niveau de 2022 crée un certain manque de visibilité pour 2023, dû aux incertitudes sur la répartition territoriale de l'enveloppe entre les différents types de structures alors que le coût des contrats sera plus élevé qu'en 2022.

Enfin, les crédits destinés à la formation des salariés en parcours d'insertion sont portés à 100 millions d'euros, soit une progression de 25 %. Ils sont financés dans le cadre du plan d'investissement dans les compétences (PIC). Cet effort est bienvenu, quoique pouvant paraître en deçà des besoins afférents aux personnes concernées.

B. L'AUGMENTATION DU BUDGET ALLOUÉ AUX ENTREPRISES ADAPTÉES SE POURSUIT (+ 8,7 % EN 2023)

Les dotations en faveur de l'emploi des personnes handicapées s'élèvent à 467 millions d'euros pour 2023 , soit 8,7 % de plus que le montant inscrit en loi de finances initiale pour 2022 . S'y ajoutera une contribution de l'Agefiph (Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées) de 50 millions d'euros, comme en 2022.

Il s'agit d'une progression importante , alors que les dotations se situaient entre 350 et 400 millions d'euros par an de 2016 à 2019.

L'objectif retenu pour 2023 est de financer un effectif moyen de 30 126 ETP, contre 32 701 en 2022. Une révision a été opérée par rapport à l'objectif 2022, essentiellement au titre des expérimentations des nouvelles formes de mise à l'emploi : contrats à durée déterminée « tremplins » destinés à favoriser la transition vers d'autres entreprises, entreprises adaptées de travail temporaire, entreprises adaptées pénitentiaires, créées en 2021. En effet, les réalisations en la matière sont très éloignées de la cible initiale. Le démarrage de certaines expérimentations a été perturbé par la crise sanitaire, ce qui justifie d'ailleurs leur prolongation, proposée par l'article 47 rattaché à la mission.

Les rapporteurs spéciaux renvoient à l'analyse détaillée réalisée dans le cadre du contrôle relatif aux entreprises adaptées présenté le 5 octobre dernier devant la commission des finances 15 ( * ) .

Plusieurs freins subsistent au développement de l'emploi dans les entreprises adaptées, tenant notamment à l'implication du service public de l'emploi, les entreprises adaptées rencontrant de sérieuses difficultés à recruter.

De fait, le « changement d'échelle » ambitionné par l'engagement national « Cap vers l'entreprise inclusive » 16 ( * ) , avec un objectif de doublement des effectifs de travailleurs handicapés dans les entreprises adaptées, ne s'est pas produit.

On peut relever que le Fonds d'accompagnement à la transformation des entreprises adaptées (Fatea), destiné à appuyer la structuration et le « changement d'échelle » des entreprises adaptées voit ses crédits passer de 9,4 à 15 millions d'euros de 2022 à 2023.

C. LES DISPOSITIFS TERRITORIAUX SPÉCIFIQUES : DE NOUVEAUX TERRITOIRES D'EXPÉRIMENTATION « ZÉRO CHÔMEURS DE LONGUE DURÉE »

Une dotation de 161 millions d'euros, en légère diminution de 2 millions d'euros par rapport à 2022, est prévue en 2023 pour les emplois francs concernant les demandeurs d'emploi des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) .

Expérimenté de 2018 à 2019, ce dispositif a été étendu à l'ensemble des QPV du territoire national à compter de 2020. Il consiste en une aide financière versée à tout employeur privé (entreprise ou association) recrutant un demandeur d'emploi ou un jeune suivi par une mission locale résidant dans un QPV, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ou d'un contrat à durée déterminée d'au moins six mois.

La loi de finances initiale pour 2022 permettait de financer 36 000 nouveaux contrats. La dotation prévue pour 2023 couvre quant à elle le coût d'environ 25 000 nouveaux contrats, le rythme de prescriptions pour 2022 semblant indiquer un ralentissement (13 700 contrats signés du 1 er janvier au 31 juillet 2022).

Les emplois francs font l'objet d'une évaluation dont les résultats seront connus courant 2023.

L' expérimentation « territoire zéro chômeur de longue durée » , lancée en 2016, a été amplifiée en 2021, avec l'extension à 25 territoires supplémentaires, ce qui porte à 35 le nombre de territoires habilités.

Elle a pour objet de favoriser la création d'emplois sous forme de contrats à durée indéterminée, en faveur des personnes privées durablement d'emploi, dans des entreprises de l'économie sociale et solidaire.

Selon les données disponibles en juillet dernier, environ 1 500 salariés avaient été embauchés dans les 28 entreprises à but d'emploi depuis le début de l'expérimentation.

La dotation pour 2023, d'un montant de 44,9 millions d'euros , est en progression sensible par rapport à celle prévue en loi de finances pour 2022 (32,8 millions d'euros) afin de poursuivre la montée en charge dans les territoires participant à l'expérimentation, Elle permettra le financement de 2 480 ETP au 31 décembre 2023.

D. UNE ENVELOPPE EN REPLI POUR LES CONTRATS AIDÉS

Au début de la précédente législature, le Gouvernement a engagé une forte réduction des dispositifs de contrats aidés. Ainsi, le nombre total annuel de contrats prescrits, qui était de l'ordre de 450 000 en 2016, s'est abaissé à 290 000 en 2017 et à près de 85 000 en 2019.

Les contrats aidés ont été relancés à l'occasion de la crise sanitaire. Leur nombre a cessé de diminuer en 2020 et a fortement augmenté en 2021, avec un peu plus de 200 000 contrats prescrits , ces contrats étant en partie financés sur la mission « Plan de relance » au titre du plan « 1 jeune, 1 solution ».

En 2022, les contrats aidés ont de nouveau été gérés selon les modalités antérieures à la crise sanitaire. L'enveloppe, réévaluée en cours d'année, devait permettre la prescription de 77 777 parcours emploi compétences (PEC) dans le secteur non marchand 17 ( * ) et de 53 206 contrats initiative emploi (CIE) jeunes dans le secteur marchand 18 ( * ) .

Les dotations inscrites sur la mission à ce titre s'élevaient à 727 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 429 millions d'euros en crédits de paiement.

Au 30 septembre 2022, 58 016 PEC, 38 690 CIE Jeunes, et 2 425 CIE tous publics avaient été réalisés 19 ( * ) .

Le projet de loi de finances pour 2023 consacre aux contrats aidés une dotation de 686 millions en autorisations d'engagement et 325 millions en crédits de paiement, en diminution par rapport à 2022.

Cette enveloppe permettrait de couvrir 80 000 PEC avec des paramètres moyens inchangés par rapport à 2022, et 31 150 CIE jeunes avec un taux de prise en charge par l'État de 35 % (au lieu de 47 % en 2022).

La part de l'enveloppe consacrée aux nouveaux contrats aidés souscrits dans le secteur non marchand (PEC), qui était de 58 % en 2022, approcherait ainsi 80 % en 2023 .

La commission des finances, dans sa majorité, s'était montrée réservée sur la relance des contrats aidés, considérant qu'elle n'avait pas vocation à être pérennisée en sortie de crise.

E. L'ACCOMPAGEMENT RENFORCÉ DES JEUNES VERS L'EMPLOI : DES DOTATIONS EN HAUSSE, DANS LE PROLONGEMENT DE LA MISE EN PLACE DU CONTRAT D'ENGAGEMENT JEUNE

L'introduction en novembre 2021, en cours d'examen de la mission à l'Assemblée nationale, par voie d'amendement, du contrat d'engagement jeune (CEJ) s'était traduite par une majoration de l'ordre de 500 millions d'euros, par rapport au projet de loi de finances initiale , des dotations destinées à l'accompagnement renforcé des jeunes vers l'emploi .

La hausse des dotations se poursuit en 2023 , avec un total de 1,8 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, soit une augmentation d'environ 180 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 560 millions d'euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

• La dotation prévue pour le contrat d'engagement jeune (CEJ) atteint 1 milliard d'euros , dont 115 millions d'euros pour des actions d'accompagnement complémentaires à celles menées par Pôle emploi et les missions locales, et 888 millions d'euros pour l'allocation .

En vigueur depuis le 1 er mars 2022, le CEJ s'adresse aux jeunes de 16 à 25 ans révolus (ou 29 ans révolus lorsqu'ils disposent d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) qui ne sont pas étudiants, ne suivent pas une formation et présentent des difficultés d'accès à l'emploi durable.

Il consiste en un parcours intensif et personnalisé pouvant durer jusqu'à 12 mois (prolongeable jusqu'à 18 mois pour les jeunes les plus éloignés de l'emploi), avec au minimum 15 heures d'activités par semaine tout au long du parcours, comprenant des actions individuelles, collectives et en autonomie encadrée.

Pouvant s'élever jusqu'à 520 euros par mois, l'allocation est conditionnée à l'assiduité et à l'engagement du jeune dans son parcours. L'éligibilité à l'allocation et la détermination de son montant mensuel dépendent de la situation fiscale du jeune, de son âge et des ressources qu'il a pu percevoir le mois précédent, certaines ressources pouvant venir se retrancher en intégralité ou en partie, selon leur nature, du montant forfaitaire.

Fin septembre, 193 000 contrats d'engagement jeune ont été conclus dont 82 000 pour Pôle emploi et 110 000 pour les missions locales. Depuis le début du quatrième trimestre, on constate une importante dynamique avec près de 8 000 entrées hebdomadaires, l'objectif de 300 000 entrées en 2022 paraissant pouvoir être atteint.

L'objectif de 300 000 entrés en CEJ est maintenu en 2023, 200 000 jeunes étant accompagnés par les missions locales et 100 000 par Pôle emploi.

Ce dispositif prend le relais de la garantie jeunes, avec un accompagnement plus intensif et une meilleure articulation avec des actions portées par d'autres organismes .

Dans le cadre du CEJ, un jeune peut être orienté vers les écoles de la deuxième chance, l'Établissement pour l'insertion dans l'emploi (Epide), le service militaire adapté outre-mer, le service militaire volontaire ou encore vers des formations qualifiantes, certifiantes ou diplômantes. Le jeune peut également effectuer des missions d'utilité sociale, comme un engagement en service civique ou des périodes d'emploi aidé. Pendant ces temps d'accompagnement hors de la mission locale ou de Pôle emploi, le jeune continue d'être en contact avec son conseiller référent, ces actions s'inscrivant dans le cadre de son CEJ.

Le CEJ a été introduit dans des conditions critiquables, sans évaluation préalable, en cours de discussion du projet de loi de finances pour 2022.

Le recul manque pour en effectuer une évaluation approfondie, mais les premiers éléments recueillis par les rapporteurs spéciaux sont plutôt encourageants .

Le dispositif étant mis en oeuvre tant par Pôle emploi que par les missions locales, on pouvait craindre un effet de concurrence ou de confusion.

Les conditions d'orientation des jeunes ont été clarifiées 20 ( * ) .

Les mineurs , qui relèvent de l'obligation de formation et pour lesquels les missions locales ont la charge de contrôler le respect de cette obligation, et les jeunes présentant des besoins périphériques importants (logement, santé, contraintes familiales, maîtrise du français) entravant la réalisation de leur projet professionnel et pouvant utilement bénéficier d'un accompagnement socio-professionnel, relèvent de manière privilégiée des missions locales .

Les autres jeunes peuvent être orientés vers Pôle emploi. Cependant, un jeune peut toujours décider de se faire accompagner par l'opérateur de son choix.

La condition d'activité hebdomadaire minimale semble également avoir pu être satisfaite, mais exige évidemment un temps d'investissement plus important de la part des conseillers. De ce point de vue, la gestion du dispositif induit une charge administrative assez lourde , au détriment des tâches d'accompagnement. Il y a certainement matière à simplifier dans ce domaine.

La montée en charge du dispositif devrait essentiellement concerner les missions locales , puisque sur un objectif de 300 000 entrées en 2023, 200 000 relèveraient des missions locales et 100 000, comme en 2022, de Pôle emploi. Il semble également que la mise en place du CEJ ait amélioré les échanges entre deux opérateurs agissant jusqu'à présent de manière trop cloisonnée.

Les rapporteurs spéciaux considèrent que le dispositif du CEJ améliore celui de la garantie jeunes et mérite d'être consolidé .

• Le CEJ est considéré comme une modalité du parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (Pacea) qui subsiste en tant que tel de manière distincte et pour lequel une dotation de 120 millions d'euros est prévue en 2023.

Le Pacea est un cadre souple d'accompagnement ouvert à tout jeune de 16 à 25 ans, qui permet un accompagnement pouvant aller si nécessaire jusqu'à 24 mois. En cours de Pacea, un jeune peut donc être amené à suivre un accompagnement individuel, collectif, une mise en situation professionnelle, à suivre un accompagnement par un partenaire, des périodes de formation professionnelle. Il peut également être en emploi.

Le Gouvernement considère que Pacea et CEJ sont complémentaires, le Pacea pouvant être proposé en amont ou en sortie de CEJ.

• Une dotation de 633 millions d'euros est prévue pour le financement des missions locales , supérieure de 120 millions d'euros à celle inscrite au programme 102 « Accès et retour à l'emploi » en 2022. Toutefois, en 2022, les missions locales bénéficiaient d'une autre ligne de financement, à hauteur de 160 millions d'euros, au titre du plan d'investissement dans les compétences (PIC), ligne qui est supprimée en 2023.

Toutes lignes confondues, le financement de l'État destiné aux missions locales diminuerait légèrement par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 (de 671 à 633 millions), mais demeure très au-dessus des dotations effectivement versées lors des exercices précédents (500 millions d'euros en 2021 et de 320 à 400 millions d'euros sur les années 2018 à 2020).

Évolution des crédits de paiement destinés aux missions locales

(en millions d'euros)

2018

exécution

2019

exécution

2020

exécution

2021

exécution

2022

LFI

2023

PLF

322,78

396,43

344,11

500,33

671,78*

633,16

• * dont 160 millions d'euros inscrits sur la mission « Plan de relance ».

Source : réponses au questionnaire budgétaire

En 2021, les moyens dédiés aux missions locales ont été rehaussés à hauteur de 100 millions d'euros afin de renforcer les offres d'accompagnement dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution ». L'objectif d'entrées en garantie jeunes a ainsi été porté à 200 000 entrées et cet objectif a été maintenu pour le contrat d'engagement jeune (CEJ) qui lui a succédé depuis le 1 er mars 2022. Les crédits prévus pour 2023 doivent permettre de couvrir le besoin des missions locales pour accompagner de nouveau 200 000 entrées de jeunes en CEJ en 2023.

F. UNE SUBVENTION À PÔLE EMPLOI EN HAUSSE DE 12,2 %

La subvention pour charges de service public à Pôle emploi augmente de 136 millions d'euros (+ 12,2 %), passant de 1,14 21 ( * ) à 1,25 milliard d'euros. Toutefois, les crédits attribués au titre de la mission « Plan de relance », qui s'élevaient à 150 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2022 22 ( * ) , ne sont pas reconduits.

Parmi les autres ressources de Pôle emploi, la contribution de l'Unédic , qui, étant calculée sur les recettes de l'assurance chômage de 2020, avait diminué en 2022, devrait augmenter de plus de 400 millions d'euros .

Pôle emploi continuera également à recevoir des financements React UE pour l'accompagnement des jeunes, l'accompagnement global et la prestation Parcours emploi santé 23 ( * ) .

S'y ajouteront les transferts en provenance de la mission « Travail et emploi » pour les différents dispositifs entrant dans ses dépenses d'intervention.

Évolution des recettes et des dépenses de Pôle emploi

(en millions d'euros)

Source : réponses de Pôle emploi au questionnaire des rapporteurs spéciaux

Pôle emploi a indiqué aux rapporteurs spéciaux que comme en 2022, un prélèvement sur son fonds de roulement de l'ordre de 200 à 250 millions d'euros devra être opéré en 2023 pour couvrir une partie de ses dépenses, dont les impacts liés à l'inflation. Ce prélèvement est rendu possible au regard du niveau de trésorerie généré notamment par les excédents budgétaires enregistrés en 2020 et 2021.

Les effectifs sous plafond de Pôle emploi (48 847 en 2023) diminueront légèrement par rapport à 2022 (- 31 ETPT) mais demeurent légèrement supérieurs à ceux de 2021 (48 778), année au cours de laquelle une majoration de 1 500 ETPT était intervenue pour faire face à l'augmentation du chômage. En 2022, 700 de ces 1 500 ETPT ont été maintenus, mais dans le même temps, 900 ETPT supplémentaires ont été accordés pour la mise en place du contrat d'engagement jeunes. Ces emplois seront maintenus en 2023. On peut préciser que dans le cadre du CEJ, un conseiller accompagne en principe 30 jeunes, alors que le nombre de demandeurs d'emploi suivis par un conseiller est habituellement de l'ordre de 200.

Les effectifs hors plafond passent de 4 052 à 3 990 ETPT en 2023.

Évolution des effectifs de Pôle emploi

Mobilisé à partir de mars 2022, pour la mise en oeuvre du contrat d'engagement jeunes, Pôle emploi a continué ses actions dans le cadre du plan de réduction des tensions de recrutement lancé fin 2021.

La quasi-totalité des demandeurs d'emploi de longue durée, soit 1,5 million de personnes, ont été contactés. Près de 240 000 d'entre eux ont bénéficié d'un programme personnalisé d'actions dit de « remobilisation ». En complément, des actions individuelles de formation ou de « remises en dynamique professionnelle » ont été engagées.

Dans la continuité du plan, le ministre du travail a annoncé au mois d'octobre une nouvelle action « viviers sectoriels » . Pôle emploi a ciblé 23 métiers des secteurs du transport (marchandises et voyageurs), de l'hôtellerie-restauration, et de la santé et l'action sociale, en vue de constituer un vivier de candidats , disponibles, intéressés par ces métiers et disposant de compétences minimales pour les exercer, moyennant ou non une formation courte.

Qu'il s'agisse du CEJ ou du plan de réduction des tensions de recrutement, la succession de nouveaux dispositifs , qui s'ajoutent aux fonctions habituelles de Pôle emploi, exigent une forte mobilisation des personnels, tant par les besoins plus importants en accompagnement, que par les délais raccourcis de déploiement et l'attente de résultats rapides.

La convention tripartite liant Pôle emploi, l'État et l'Unédic arrive à expiration fin 2022 . Elle sera provisoirement reconduite pour un an, en l'attente des résultats des travaux lancés sur France travail .

Une mission de concertation et de préfiguration relative à France Travail a été lancée et confiée au Haut-commissaire à l'emploi et à l'engagement des entreprises, Thibaut Guilluy.

L'objectif est de proposer un accompagnement renforcé des publics les plus éloignés de l'emploi, notamment des bénéficiaires du RSA, tout en améliorant la réponse de l'État aux besoins des entreprises.

La concertation en cours associe les collectivités territoriales, les partenaires sociaux, les administrations et les acteurs concernés (opérateurs, associations et bénéficiaires), notamment ceux du service public de l'emploi.

Une expérimentation doit être lancée, pour une durée de 12 mois, dans une dizaine de bassins d'emploi et une feuille de route établie fin 2022 pour un déploiement à partir de 2024 .

Les rapporteurs spéciaux ont constaté auprès de leurs interlocuteurs que pour l'heure, France travail est davantage définie par ce qu'elle ne serait pas - une fusion ou réorganisation administrative des acteurs du service public de l'emploi - que par ce qu'elle pourrait être .

S'il s'agit, comme plusieurs de leurs interlocuteurs l'ont assuré, d'une meilleure coordination des acteurs sur le terrain, pour mieux identifier les personnes nécessitant un accompagnement, mieux orienter, mieux partager les données, mieux assurer le suivi, notamment en disposant de systèmes d'information partagés, ce projet pourrait constituer un progrès.

Mais en l'absence de toute précision à ce sujet de la part du Gouvernement, il est difficile de discerner les lignes de force d'une réforme pourtant présentée comme structurelle en vue d'atteindre l'objectif du plein emploi.

III. LE POIDS CROISSANT DU SOUTIEN À L'ALTERNANCE DANS LES CRÉDITS DE LA MISSION

A. LES AIDES AUX EMPLOYEURS D'ALTERNANTS : UNE RÉVISION DE L'AIDE EXCEPTIONNELLE AUX CONTOURS ENCORE INDÉFINIS

Jusqu'en 2019, les aides aux employeurs d'apprentis prenaient des formes diverses : prime à l'apprentissage, aide spécifique aux très petites entreprises, crédit d'impôt, exonération de cotisations sociales.

En 2019, ce régime d'aide a été simplifié et la plupart d'entre elles ont été remplacées par une aide unique ciblée sur les entreprises de moins de 250 salariés et les diplômes de niveau inférieur ou égal au baccalauréat.

Les exonérations de cotisations sociales n'ont été maintenues que pour les cotisations salariales des apprentis et pour les cotisations patronales des employeurs publics, ceux-ci ne bénéficiant pas de l'aide unique. Leur compensation aux organismes sociaux est à la charge de la mission « Travail et emploi ». Un crédit de 901 millions d'euros avait été inscrit à ce titre en loi de finances initiale pour 2022, mais une dotation supplémentaire, dont le montant n'est pas précisé mais peut être évalué entre 250 et 300 millions d'euros, est incluse dans les ouvertures de crédits de 500 millions d'euros demandées pour l'ensemble des compensations d'exonérations, par le projet de loi de finances rectificative de fin de gestion.

Dans le contexte de la crise sanitaire, en juillet 2020, une aide exceptionnelle beaucoup plus large et plus avantageuse que l'aide unique a été mise en place. Elle concerne toutes les entreprises, y compris, sous certaines conditions, celles de plus de 250 salariés, et les formations allant jusqu'au niveau bac + 5.

Régime des aides à l'embauche des alternants

Aide unique

Aide exceptionnelle

Contrats conclus à compter du 1 er janvier 2019

Contrats conclus entre le 1 er juillet 2020 et le 31 décembre 2022

Entreprises du secteur privé de moins de 250 salariés

Entreprises du secteur privé

- de moins de 250 salariés ;

- de plus de 250 salariés atteignant le seuil de 5 % de contrats favorisant l'insertion professionnelle* ou de 3 % d'alternants** avec une progression de 10 % sur un an.

Contrat d'apprentissage pour la préparation d'un diplôme ou d'un titre à finalité professionnelle de niveau inférieur ou égal au bac

Contrat d'apprentissage pour la préparation d'un diplôme ou d'un titre à finalité professionnelle jusqu'au niveau bac + 5

4 125 euros la 1 ère année

2 000 euros la 2 ème année

1 200 euros la 3 ème année

Uniquement la 1 ère année du contrat

5 000 euros pour un mineur

8 000 euros pour un majeur

À compter de la 2 ème année, seules perçoivent une aide les entreprises éligibles à l'aide unique, sous les conditions et le barème prévus pour celle-ci

* Salariés en contrats d'apprentissage et de professionnalisation, volontariat international en entreprise (VIE), convention industrielle de formation par la recherche (Cifre)

** Salariés en contrats d'apprentissage et de professionnalisation

Le montant total des aides à l'embauche qui s'élevait à près de 1,3 milliard d'euros en 2020 , répartis à quasi-égalité entre l'aide unique et l'aide exceptionnelle, a dépassé 4,5 milliards d'euros en 2021 , dont 214 millions d'euros pour l'aide unique et un peu plus de 4,3 milliards d'euros pour l'aide exceptionnelle , l'aide unique n'étant de fait plus versée aux entreprises éligibles que pour les deuxième et troisièmes années d'exécution de contrat. En mars 2021, le Gouvernement a décidé la prolongation de l'aide exceptionnelle pour les contrats conclus jusqu'en fin d'année 2021.

Le projet de loi de finances initiale pour 2022 comportait sur la mission « Travail et emploi » une dotation de 1,141 milliard d'euros en autorisations d'engagement et de 505 millions d'euros en crédits pour l'aide unique, appelée à redevenir l'aide de droit commun. L'aide exceptionnelle, financée sur la mission « Plan de relance », ne faisait l'objet, dans le texte initial, d'aucune autorisation d'engagement, dans la mesure où elle ne devait couvrir que les contrats conclus jusqu'à la fin de l'année 2021. Seuls figuraient des crédits de paiement, à hauteur de 1,893 milliard d'euros au titre de l'exécution des contrats conclus avant fin décembre 2021.

Par un décret du 10 novembre 2021, le Gouvernement a prolongé l'aide exceptionnelle pour tous les contrats conclus jusqu'au 30 juin 2022. Des dotations supplémentaires ont été inscrites sur la mission « Plan de relance » par voie d'amendement lors de la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, le 10 décembre. Elles se limitent à 270 millions d'euros en autorisations d'engagement et 100 millions d'euros en crédits de paiement. Il est vrai que dans leur grande majorité, les contrats d'alternance sont conclus au second et non au premier semestre de l'année.

Une seconde prolongation de l'aide exceptionnelle , jusqu'au 31 décembre 2022 , est intervenue par un décret du 29 juin 2022. Cette fois ci, l'impact financier est beaucoup plus important puisqu'elle concerne les contrats conclus au second semestre. Une ouverture de crédits a été opérée par la loi de finances rectificative du 16 août 2022 sur la mission « Travail et emploi » à hauteur de 5,134 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 743 millions d'euros en crédits de paiement 24 ( * ) .

Alors que l'aide unique et l'aide exceptionnelle ont représenté une dépense de 4,5 milliards d'euros en 2021, le coût total de ces dispositifs pour l'année 2022 est difficile à établir, 70 % des contrats étant signés entre les mois de septembre et décembre . Un niveau au moins égal à celui de 2021 peut être anticipé.

Pour 2023 , les crédits la mission « Travail et emploi » destinés aux aides financières aux employeurs d'alternants s'élèvent à 2,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 3,5 milliards d'euros en crédits de paiement .

En outre, 155 millions d'euros de crédits de paiement figurent sur la mission « Plan de relance ». Ils couvrent les restes à payer de l'aide exceptionnelle pour les contrats conclus avant le 1 er juillet 2022.

Les dotations prévues pour 2023 en autorisations d'engagement sont pratiquement divisées par trois par rapport à celles ouvertes par en 2022, qui s'élevaient au total à 6,5 milliards d'euros.

On en déduit que l'aide exceptionnelle, applicable aux contrats conclus jusqu'au 31 décembre prochain, ne sera pas reconduite telle quelle.

À ce stade, la définition de nouveaux paramètres est en discussion entre le Gouvernement et les partenaires sociaux , sans qu'aient été précisées les options privilégiées : diminution du montant de l'aide actuelle ou ciblage sur certaines entreprises ou certains niveaux de formation.

Le Parlement doit ainsi se prononcer sur une enveloppe intégrant une redéfinition des aides à l'embauche des alternants sans connaître, même dans leurs grandes lignes, les critères qui conduiraient à une forte réduction de la charge budgétaire, qu'ils soient relatifs au champ des entreprises bénéficiaires ou des niveaux de formation concernés.

Alors que 740 000 entrées en apprentissage ont été enregistrées en 2021 , soit 208 000 de plus qu'en 2020, et que leur nombre sera du même ordre, voire supérieur en 2022, une cible de 800 000 contrats d'apprentissage conclus à la fin 2023 figure dans le projet annuel de performance, en rapport avec l'objectif de 1 million d'entrées en apprentissage en 2027.

La progression du nombre de contrats d'apprentissage étant principalement due à l'augmentation du nombre d'apprentis pour des formations de niveaux supérieurs au baccalauréat (62 % du total des contrats d'apprentissage conclus en 2021), le projet annuel de performances annonce un objectif de rééquilibrage de l'apprentissage au profit des premiers niveaux de qualification , pour rétablir en 2025 la proportion constatée en 2020, au moyen d'« une politique volontariste de ciblage ».

Il est opportun que ces questions soient d'abord discutées avec les partenaires sociaux, pour faire la part entre de probables effets d'aubaine et les incitations vraiment utiles au maintien de la dynamique actuelle de l'apprentissage.

En tout état de cause, tous les contrats conclus avant la fin de l'année 2022 bénéficieront pour un an de l'actuel régime des aides à l'embauche . Une révision à la baisse de leurs paramètres ne produira d'effet sur la charge budgétaire qu'à l'échéance des contrats actuels et à la conclusion de nouveaux contrats, c'est-à-dire, en large partie, sur les quatre derniers mois de 2023.

B. UNE NOUVELLE SUBVENTION DE PRÈS DE 1,7 MILLIARD D'EUROS À FRANCE COMPÉTENCES, LOURDEMENT DÉFICITAIRE POUR LA TROISIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE

1. Un déséquilibre financier croissant

Établissement public à caractère administratif, France compétences a été créée en 2019, en application de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, par fusion de quatre organismes préexistants 25 ( * ) .

France compétences est chargée de répartir le versement des contributions à la formation professionnelle et à l'apprentissage aux différents acteurs concernés, principalement les opérateurs de compétences (Opco), la Caisse des dépôts et consignations, pour le financement du compte personnel de formation (CPF), les régions, pour le financement des centres de formation d'apprentis (CFA), mais aussi l'État, au titre de la formation des demandeurs d'emploi.

France compétences assure également une fonction de régulation et de contrôle . Elle établit notamment le répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) et le répertoire spécifique, habilite les instances de labellisation pouvant délivrer aux formations la certification Qualiopi et émet des recommandations sur le niveau et les règles de prise en charge du financement de l'alternance.

France compétences bénéficie de ressources affectées , principalement la contribution unique à la formation professionnelle et à l'alternance , ainsi que d'autres contributions ou participations des employeurs (contribution au financement du compte personnel de formation pour les titulaires d'un contrat à durée déterminée, contribution supplémentaire à l'apprentissage, participation au financement de la formation des professions non salariées ...). Elle redirige ces ressources aux deux tiers vers le financement de l'alternance et pour un tiers à celui de la formation professionnelle. Plus de la moitié des fonds de formation professionnelle alimentent le compte personnel de formation (CPF). Le produit de ces ressources est de l'ordre de 10 milliards d'euros pour 2023 .

France compétences s'est immédiatement trouvée dans une situation financière très déséquilibrée , avec un déficit de 4,6 milliards d'euros en 2020 .

En 2020, France compétences a repris les charges correspondant aux contrats signés avant le 1 er janvier 2020, alors qu'elle n'avait pas reçu à ce titre une part des ressources antérieures à 2020. Par ailleurs, la baisse d'activité liée à la crise sanitaire a entraîné une baisse des ressources de plus de 800 millions d'euros par rapport aux prévisions budgétaires, cet effet se prolongeant en partie sur l'exercice 2021 et, plus marginalement sur l'exercice 2022, avec un effet cumulé de 1,5 milliard d'euros de moindre recettes sur les trois années 2020-2022 26 ( * ) .

Dès 2020 sont surtout apparus les facteurs structurels du déséquilibre financier de France compétences .

En effet, comme l'a souligné la Cour des comptes, les implications financières de la réforme de 2018 n'ont fait l'objet que d'évaluations sommaires et insuffisamment étayées . Le pari a été fait qu'une progression régulière mais modérée de l'apprentissage et du recours au compte personnel de formation pourrait être financée par le produit de la contribution unique à la formation professionnelle et à l'alternance, sur la base d'une augmentation de la masse salariale de l'ordre de 3 % par an.

Or dès 2020, alors que le produit de la contribution unique à la formation professionnelle et à l'alternance était très inférieur au niveau attendu, le nombre d'entrées en apprentissage augmentait de 42 % et celui des demandes de formation financées par le CPF s'accentuait fortement, passant de moins de 50 000 par mois jusqu'au mois de mai à 140 000 par mois à partir du mois de septembre 2020.

La divergence entre ressources et dépenses s'est accentuée en 2021 , avec une progression de 39 % des entrées en apprentissage et la poursuite de la montée en charge du CPF, avec plus de 170 000 demandes de formation en moyenne par mois.

Face à cette situation, l'État n'a pas réagi immédiatement.

Il faut souligner qu' à la création de France compétences, aucun soutien de l'État à cet opérateur n'a été envisagé .

À l'inverse, la loi du 5 septembre 2018 27 ( * ) met à la charge de France compétences le versement d'une partie de ses ressources à l'État pour financer la formation des demandeurs d'emploi. Depuis 2019, et en 2022 encore, l'État reçoit à ce titre, sur un fonds de concours, de l'ordre de 1,6 milliard d'euros par an en provenance de France compétences.

En 2021, une subvention « exceptionnelle » à France compétences de 750 millions d'euros figurait dans la loi de finances initiale sur la mission « Plan de relance ». Elle était conditionnée à la présentation par l'opérateur d'un budget à l'équilibre pour 2022. Cette condition - impossible à satisfaire - a été levée par la loi de finances rectificative pour 2021 du 1 er décembre 2021, qui a en outre attribué à France compétences une subvention supplémentaire de 2 milliards d'euros .

Malgré ces subventions, France compétences a enregistré un résultat négatif de 2,9 milliards d'euros en 2021 .

Aucune subvention n'a été inscrite dans la loi de finances initiale pour 2022.

Deux nouvelles « subventions exceptionnelles », pour un montant total de 4 milliards d'euros, sont apparues nécessaires en 2022 . Une première subvention de 2 milliards d'euros a été attribuée par la loi de finances rectificative du 16 août 2022 et une seconde subvention de 2 milliards d'euros est demandée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de fin de gestion pour 2022.

Selon les informations communiquées par France compétences aux rapporteurs spéciaux, le déficit prévisionnel de l'opérateur en 2022 était évalué à 5,4 milliards d'euros après obtention de la première subvention. Il pourrait être ramené à 3,4 milliards d'euros après prise en compte de la seconde subvention .

France compétences assure ses besoins de trésorerie par recours à des emprunts bancaires sur une durée de douze mois . Le montant des emprunts souscrits auprès des banques a progressivement augmenté. Le plafond d'emprunt à douze mois autorisé par le conseil d'administration de France compétences a été porté à 5 milliards d'euros pour couvrir les besoins des années 2022 et 2023 28 ( * ) . Un emprunt de 2,6 milliards d'euros sur douze mois a été négocié avec sept établissements bancaires, les frais financiers ayant été estimés à 16,2 millions d'euros en cas d'utilisation de la totalité du prêt 29 ( * ) .

2. Une subvention de l'État de 1,7 milliard et une réduction de la contribution de France compétences aux dépenses de formation en 2023

Pour 2023 , une subvention de l'État à France compétences de 1,68 milliard d'euros est inscrite dans le projet de loi de finances au programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi ». C'est un progrès, par rapport à l'an passé, tant en ce qui concerne la sincérité du projet de loi de finances qu'en réponse à la situation de trésorerie toujours critique de l'opérateur.

Par ailleurs, l'État décharge France compétences d'une bonne part de la contribution qu'elle lui verse au titre de la formation des demandeurs d'emploi . Fixée à 1,6 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiements, elle est ramenée en 2023 à 800 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 400 millions en crédits de paiements . L'État assumera le financement des actions correspondantes. Comme l'a souligné la Cour des comptes, qui a préconisé une modification du montant de cette subvention, les dotations du plan d'investissement dans les compétences, qu'elle alimente, ne sont que partiellement consommées et font l'objet de reports importants 30 ( * ) .

Ainsi, France compétences aborde l'exercice 2023 avec une moindre dépense de 2,1 milliards à financer par ses ressources propres, cette diminution restant toutefois en deçà de l'écart constaté en 2021 comme en 2022 entre ressources et dépenses.

3. Des premières inflexions de la trajectoire de dépenses qui devront être accentuées.

Depuis la réforme de l'apprentissage, l'offre de places en centres de formation d'apprentis (CFA) n'est plus contingentée . Chaque contrat d'apprentissage donne lieu à une prise en charge financière par l'opérateur de compétences dont relève l'entreprise d'accueil. Celle-ci est financée par France compétences. Le niveau de prise en charge est déterminé nationalement par la branche professionnelle (ou, à défaut, par l'État), dans le cadre de recommandations établies par France compétences.

De même, les droits à la formation professionnelle, désormais monétisés, peuvent être directement mobilisés par les titulaires du CPF .

Comme l'a souligné la Cour des comptes 31 ( * ) , « ces dispositifs, qui sont les deux principaux postes de dépenses de France compétences, s'inscrivent dans une logique dite « de guichet » , contrairement aux autres dispositifs, financés par des enveloppes budgétaires fermées... L'apprentissage a connu une progression au-delà des attentes, largement soutenue par l'aide exceptionnelle à l'embauche des apprentis mise en place en juillet 2020 dans le cadre des mesures de relance de l'économie liées à la crise sanitaire. Le nombre de nouvelles entrées en apprentissage a ainsi plus que doublé entre 2018 et 2021 pour dépasser 730 000. Les dépenses liées au CPF sont, quant à elles, passées de 740 millions d'euros en 2018 à 2,7 milliards d'euros en 2021 ».

S'il faut se réjouir du succès de l'apprentissage , et du changement d'image très positif dont il est désormais crédité, un équilibre doit être trouvé entre le nécessaire soutien à cette voie de formation et d'insertion professionnelle et le juste emploi des financements publics dont il bénéficie.

Au cours de l'année 2022, de premières inflexions sont intervenues.

Sur la base d'une analyse des comptabilités des centres de formation d'apprentis menée par France compétences, les niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage ont été révisés au 1 er septembre 2022 . Les niveaux de prise en charge appliqués dans les branches dépassaient en effet de 20 % en moyenne le coût des formations d'apprentis. Cette analyse a toutefois été conduite à partir des données de 2020, année fortement perturbée par la crise sanitaire.

Une nouvelle révision sera proposée en avril 2023 après l'analyse des comptabilités analytiques des CFA correspondant à l'exercice 2021.

Devant la commission des finances le 3 novembre dernier, le ministre chargé des comptes publics a indiqué : « entre 2022 et 2023, nous visons une baisse de 10 % des coûts-contrats dans les CFA, soit une économie de 800 millions d'euros ». D'après les éléments obtenus par les rapporteurs spéciaux auprès du ministère du travail, la révision opérée le 1 er septembre 2022 génèrerait plutôt de l'ordre de 300 millions d'euros d'économies, dont 200  millions d'euros sur l'année 2023.

S'agissant du CPF, plusieurs mesures ont été prises afin de responsabiliser les ministères et organismes certificateurs et de renforcer les exigences de qualité des certifications éligibles au CPF . Des déréférencements sont intervenus et les taux de refus d'éligibilité des formations au CPF ont fortement augmenté en 2022.

L'usage du CPF a également été sécurisé par l'obligation, depuis fin octobre 2022, d'utiliser le dispositif FranceConnect +, répondant à des exigences de sécurité renforcées, pour accéder au service dématérialisé géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Une proposition de loi visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires a été adoptée par l'Assemblée nationale le 6 octobre dernier. Elle est inscrite à l'ordre du jour du Sénat du 8 décembre 2022.

Enfin, un principe de régulation du CPF figure dans l'article 49 rattaché à la mission, inséré à l'Assemblée nationale par un amendement gouvernemental. Les modalités de cette régulation restent à définir, l'instauration d'un reste à charge pour les bénéficiaires étant évoquée.

Un début de réponse est donc apporté à la progression non maîtrisée des charges de France compétences.

Il ne paraît toutefois pas suffisant pour assurer un financement pérenne et soutenable de l'opérateur.

Dans un récent rapport 32 ( * ) , la commission des affaires sociales a formulé près de 40 propositions pour une meilleure régulation tant du CPF que de l'apprentissage .

En ce qui concerne le CPF, des priorités devront certainement être définies entre les formations éligibles, au regard des enjeux de qualification et d'emploi. Il en va de même pour l'apprentissage, selon les différents types de structures et de niveaux de qualification.

Le soutien à l'apprentissage porté par la mission « Travail et emploi » allège par ailleurs certaines charges sur d'autres missions budgétaires. Dès lors, une réflexion sur des contributions complémentaires à celle de la mission pourrait être engagée.

Il est désormais indispensable que l'État, en lien avec les partenaires sociaux, définisse une trajectoire soutenable pour le financement de la formation professionnelle et de l'apprentissage, sans casser la dynamique en cours .

C. DES CRÉDITS DÉSORMAIS REGROUPÉS AU SEIN DE LA MISSION POUR LE FINANCEMENT DU PLAN D'INVESTISSEMENT DANS LES COMPÉTENCES

Initié en 2018, le plan d'investissement dans les compétences (PIC) visait notamment à former, sur la période 2018-2022, deux millions de demandeurs d'emploi peu ou pas qualifiés et de jeunes éloignés du marché du travail . Pour une large part, les parcours de formation prévus par le PIC avaient vocation à être mise en oeuvre à l'échelon régional, dans le cadre des pactes régionaux d'investissement dans les compétences.

Dès 2019, les crédits consommés au titre du PIC ont dépassé 2 milliards d'euros par an.

Le contenu des actions financées a évolué au fil du temps. Ainsi, jusqu'en 2021, le PIC finançait pour plus de 600 millions d'euros les allocations et actions d'accompagnement au titre du Pacea et de la garantie jeunes, montant réduit à un peu plus de 200 millions d'euros en 2022, alors que le Pacea et le contrat d'engagement jeune ne seront plus financés par le PIC en 2023.

Par ailleurs, aux crédits inscrits au titre du PIC sur la mission « Travail et emploi » s'ajoutaient ceux provenant de France compétences, par voie de fonds de concours, et ceux inscrits sur la mission « Plan de relance ».

Le projet de loi de finances pour 2023 est marqué par un recentrage du financement du PIC sur les crédits budgétaires du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi ». Y sont prévus 1,589 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,307 milliard d'euros en crédits de paiement.

La part incombant à deux autres programmes de la mission (102 et 155) est résiduelle (10,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 30,7 millions d'euros en crédits de paiement).

La mission « Plan de relance » ne porte plus aucune dotation du PIC.

Enfin, comme précédemment indiqué, la contribution de France compétences au PIC passe de 1,684 milliard d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement en 2022 à 800 millions d'euros en autorisations d'engagement et 400 millions d'euros en crédits de paiement en 2023.

Il faut noter qu'en 2022, le PIC disposait d'un important volant de crédits reportés (1,3 milliard d'euros de crédits de paiement sur le programme 103) s'ajoutant à ceux inscrits dans la loi de finances initiale.

Plus de 80 % du montant des dotations vise à financer les parcours de formation, via Pôle emploi ou les régions, dans le cadre des pactes régionaux d'investissement dans les compétences . Ces parcours sont notamment ceux identifiés pour réduire les tensions de recrutement.

D. LES AUTRES ACTIONS DE SOUTIEN EN MATIÈRE DE FORMATION

La subvention pour charges de service public de l'État à l' Agence pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) demeure fixée à 110 millions d'euros pour 2023 , comme en 2022.

Les effectifs en formation à l'Afpa ont fortement diminué de 2016 à 2020, mais se sont redressés en 2021. De ce fait, le chiffre d'affaires de l'Afpa, après plusieurs années de recul, a augmenté en 2021, insuffisamment toutefois pour atteindre les objectifs de redressement fixés par le contrat d'objectifs et de performance 2020-2023. Le résultat d'exploitation, bien qu'en forte amélioration par rapport à 2020, est resté négatif à hauteur d'une vingtaine de millions d'euros. En 2021, en complément de la subvention pour charges de service public, l'Afpa a bénéficié d'un soutien supplémentaire de l'État de près de 107 millions d'euros.

Le plan de transformation de l'Afpa engagé en 2018, alors que les déficits cumulés atteignaient plusieurs centaines de millions d'euros, vise à réduire ses charges tout en trouvant de nouveaux relais de croissance. Les résultats sont en amélioration sans atteindre toutefois l'équilibre recherché.

Par ailleurs, le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » comporte une dotation de 305 millions d'euros au titre du Fonds national de l'emploi - formation (FNE-formation) , dont 159 millions d'euros pour les restes à payer des actions engagées en 2022 dans le cadre du plan de réduction des tensions de recrutement . Ce plan avait entrainé une majoration des crédits en cours de discussion du projet de loi de finances pour 2022, les crédits prévus au titre du FNE-formation étant initialement limités à 45 millions d'euros inscrits sur la mission « Plan de relance » pour 2022.

IV. LES MOYENS DE L'ADMINISTRATION DU MINISTÈRE DU TRAVAIL

A. LE PROGRAMME « CONCEPTION, GESTION ET ÉVALUATION DES POLITIQUES DE L'EMPLOI ET DU TRAVAIL »

Doté de 681 millions d'euros pour 2023 (+ 3,8 %), le programme « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » est le programme support du ministère du travail.

Il est constitué à 85 % de crédits de personnel (583 millions d'euros).

Le plafond d'emploi de la mission passe de 7 961 ETPT en 2022 à 7 773 ETPT en 2023, soit une baisse de 188 ETPT.

Cette évolution résulte :

- de transferts de 76 ETPT à d'autres entités dans le cadre de l'achèvement de la réforme de l'organisation territoriale de l'État (OTE) ;

- d'une diminution de 160 à 120 des ETPT accordés en 2022 dans les services déconcentrés en l'attente de solutions de redéploiements d'effectifs pour des postes qui demeurent financés par la mission bien que les missions correspondantes aient été transférées dans le cadre de la réforme OTE ;

- d'une diminution de 210 à 105 des ETPT accordés dans les services déconcentrés au titre des renforts exceptionnels pour l'accompagnement des restructurations économiques et du plan de relance ;

- d'une augmentation de 34 ETPT dans le cadre du schéma d'emploi 2023, avec un nombre de recrutements prévus supérieur à celui des départs.

Le programme finance également les dépenses relatives aux systèmes d'information (45 millions d'euros), à la politique des ressources humaines (27 millions d'euros), à la communication (9,8 millions d'euros) et aux études (7,7 millions d'euros).

B. LE PROGRAMME « AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE L'EMPLOI ET RELATIONS DU TRAVAIL »

Le programme « Amélioration de la qualité de l'emploi et relations du travail » est doté de 110 millions d'euros (+ 19,5 %) en 2023.

Il couvre principalement :

- la contribution de l'État au financement des organisations syndicales (34 millions d'euros) ;

- la formation des conseillers prud'hommes et des conseillers du salarié (18 millions d'euros) ;

- des subventions à l'Agence nationale d'amélioration des conditions de travail - Anact (22 millions d'euros), en hausse de 10 %) ;

- le financement des services de santé et de sécurité au travail, porté de 3 à 11,6 millions d'euros.

Les principales variations résultent de la mise en oeuvre de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail .

Un doublement exceptionnel des dotations du Fonds pour l'amélioration des conditions de travail (Fact), qui passent de 2 à 4 millions d'euros, est intégré à la subvention à l'Anact.

Par ailleurs, les modalités d'intégration à l'Anact des associations régionales pour l'amélioration des conditions de travail (Aract), prévu par la loi, ont été définies par le décret n°2022-624 du 22 avril 2022. Cette intégration se traduit par une majoration des dotations de 8,2 millions d'euros.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Dans le texte considéré comme adopté en première lecture par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, les crédits de la mission « Travail et emploi » ont été modifiés par deux amendements de Dominique Da Silva, rapporteur spécial de la commission des finances majorant les crédits de la mission de 10 millions d'euros en AE et en CP sur le programme 102 « Accès et retour à l'emploi » et se décomposant comme suit :

- 5 millions d'euros en AE et en CP au titre du financement des écoles de la deuxième chance (E2C) par l' amendement n° II-1927 ;

- 5 millions d'euros en AE et en CP au titre du financement des maisons de l'emploi par l' amendement n° II-2574 .

Ces deux amendements sont gagés à due concurrence sur les crédits du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et du développement de l'emploi ».

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 47

Prolongations d'expérimentations
en faveur de l'emploi des personnes handicapées

. Le présent article prolonge d'une année, jusqu'au 31 décembre 2023, deux expérimentations ouvertes aux entreprises adaptées et prévues par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel : le contrat à durée déterminée dit « Tremplin » destiné à accompagner les transitions professionnelles vers d'autres entreprises et la création d'une entreprise adaptée de travail temporaire.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : DEUX NOUVELLES FORMES D'ACCOMPAGNEMENT PAR LES ENTREPRISES ADAPTÉES EN EXPÉRIMENTATION JUSQUÀ FIN 2022

Les articles 78 et 79 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ont ouvert la possibilité pour les entreprises adaptées d'expérimenter deux nouvelles formes de mise en emploi des travailleurs handicapés.

Les contrats à durée déterminée « Tremplin » (article 78) visent à expérimenter un accompagnement des transitions professionnelles afin de favoriser la mobilité professionnelle des travailleurs handicapés depuis les entreprises adaptées vers les autres entreprises en recourant à des contrats à durée déterminée d'une durée comprise entre 4 et 24 mois. Un cahier des charges national fixe les critères que doivent respecter les entreprises adaptées candidates à l'expérimentation, notamment les objectifs, les moyens et les résultats attendus en termes de sorties vers l'emploi. Il s'agit notamment de favoriser la réalisation du projet de transition professionnelle des travailleurs bénéficiaires et de les préparer à un emploi en lien avec les employeurs publics et privés

La possibilité est également ouverte aux entreprises adaptées, dans le cadre d'une expérimentation de quatre ans (article 79), de créer des entreprises adaptées de travail temporaire (EATT) dédiées exclusivement à la mise en emploi des travailleurs reconnus handicapés. Il s'agit de faciliter le déploiement d'un opérateur spécialisé dans l'intérim dédié aux travailleurs reconnus handicapés et permettre de démontrer aux employeurs (publics ou privés) leurs capacités en situation de travail.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE PROLONGATION DES EXPÉRIMENTATIONS POUR UNE ANNÉE SUPPLÉMENTAIRE

Le Gouvernement indique que la crise sanitaire et économique a conduit à neutraliser une année d'expérimentation, en raison de la baisse de l'activité économique et en dépit d'une dynamique croissante de demande d'habilitations.

Selon l'évaluation préalable de l'article 47, on compte 311 entreprises adaptées entrées dans l'expérimentation des CDD « Tremplin » qui concernent 1 200 ETP payés par mois, mais seulement 19 entreprises adaptées de travail temporaire , dont 18 en activité effective comptant environ 125 ETP payés par mois en 2022.

Le Gouvernement considère qu' une année supplémentaire d'expérimentation sécuriserait les entreprises adaptées venant de rentrer dans les dispositifs expérimentaux ou souhaitant s'y engager prochainement, en leur apportant de la visibilité en termes d'investissements et de réorganisations des recrutements nécessaires. Elle permettrait également l'aboutissement des différentes actions d'accompagnement des entreprises adaptées au changement et auprès des personnes déjà engagées dans les parcours de transition vers un autre employeur grâce à la mobilisation des nouvelles formes de mise en emploi ainsi ouvertes.

Il est donc proposé de repousser d'une année, jusqu'au 31 décembre 2023, l'échéance de ces deux expérimentations .

Selon le projet annuel de performances de la mission « Travail et emploi » (programme 102) annexé au projet de loi de finances pour 2023, les dotations affectées à ces expérimentations s'élèveraient en 2023 à :

- 26,81 millions d'euros pour financer 2 250 CDD « Tremplin »;

- 4,05 millions d'euros pour financer 800 postes en entreprise adaptée de travail temporaire.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Cet article n'a pas été modifié par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : L'APPROBATION D'UNE PROLONGATION NÉCESSAIRE

Dans le contrôle réalisé cette année sur les entreprises adaptées 33 ( * ) , le rapporteur spécial Emmanuel Capus a souligné que ces deux expérimentations avaient connu un démarrage difficile.

Pour 2021, le Gouvernement visait initialement 3 100 ETP payés en CDD « Tremplin » et 1 500 ETP payés en entreprise adaptée de travail temporaire. Les cibles ont été réajustées à la baisse à 1 125 ETP payés en CDD « Tremplin » et 128 ETP payés en entreprise adaptée de travail temporaire et réalisées respectivement à 97 % et 72 % en 2021. Le nombre d'ETP payés en CDD « Tremplin » a légèrement augmenté en 2022 (1 200) et s'élève à 128 (contre 92 en 2021) pour les entreprises adaptées de travail temporaire.

Le contrôle réalisé par le rapporteur spécial soulignait le manque de recul, à ce jour, pour se prononcer de façon éclairée sur l'efficacité du dispositif des CDD « Tremplin », qui paraît néanmoins prometteur pour favoriser l'inclusion des travailleurs handicapés en milieu ordinaire. Toutefois, leur philosophie ne saurait être étendue à l'ensemble des publics accompagnés en entreprise adaptée, celles-ci devant continuer d'offrir une réponse adaptée à la grande hétérogénéité des profils de travailleurs handicapés.

S'agissant des entreprises adaptées de travail temporaire, les entreprises adaptées jugeaient les financements de l'État trop limités au regard du temps d'accompagnement réellement mobilisé au profit des salariés concernés par ce dispositif.

La prolongation des expérimentations d'une année supplémentaire paraît nécessaire pour procéder valablement à leur évaluation et statuer sur leur pérennisation. Cette évaluation pourrait également permettre d'apprécier l'opportunité de lancer ou non l'expérimentation non concrétisée à ce jour, d'entreprises adaptées pro-inclusives, dont la proportion de salariés reconnus travailleurs handicapés serait comprise entre 40 % et 50 %.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 48 (nouveau)

Pérennisation de l'éligibilité à l'activité partielle
des salariés de certaines structures

. Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement inséré lors de l'examen à l'Assemblée nationale, pérennise l'extension du bénéfice de l'activité partielle réalisée par les articles 2 et 9 de l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 au profit des salariés de droit privé de certains employeurs publics et des salariés exerçant en France mais relevant d'une entreprise n'y étant pas établie.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : L'EXTENSION DE L'ACTIVITÉ PARTIELLE À DE NOUVELLES CATÉGORIES DE BÉNÉFICIAIRES À L'OCCASION DE LA CRISE SANITAIRE

Le régime de l'activité partielle concerne les salariés qui subissent une perte de rémunération imputable à la fermeture temporaire de leur établissement ou à une réduction de l'horaire de travail, dans cet établissement, en deçà de la durée légale de travail. Une indemnité horaire correspondant à une part de leur rémunération antérieure leur est versée par l'employeur. Celui-ci perçoit en contrepartie une allocation d'activité partielle cofinancée par l'État et l'Unédic (article L. 5122-1 du code du travail).

Prise en application de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière d'activité partielle a facilité et renforcé le recours à l'activité partielle pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille.

Elle a notamment étendu le bénéfice de l'activité partielle à de nouvelles catégories de bénéficiaires .

Les salariés de droit privé d'employeurs publics exerçant à titre principal une activité industrielle et commerciale et en tirant la majorité de leurs ressources ont bénéficié de cette extension, alors que ces employeurs étaient traditionnellement leur propre assureur en matière de risque de chômage (article 2 de l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020).

Le bénéfice de l'activité partielle a également été ouvert aux entreprises étrangères ne comportant pas d'établissement en France mais y employant des salariés et relevant du régime français de sécurité sociale et de l'assurance-chômage (article 9 de l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020).

Pour ces deux catégories, le bénéfice de l'activité partielle, initialement ouvert jusqu'au 31 décembre 2020, a été prolongé à deux reprises : jusqu'au 31 décembre 2021 tout d'abord 34 ( * ) , puis jusqu'au 31 décembre 2022 35 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE PÉRENNISATION SANS LIMITATION DE DURÉE

Le Gouvernement a inclus dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution un amendement visant à pérenniser, en l'inscrivant à l'article L. 5122-1 du code du travail, l'extension du bénéfice de l'activité partielle aux deux catégories visées par les articles 2 et 9 de l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 :

- les salariés de droit privé des employeurs publics exerçant à titre principal une activité industrielle et commerciale et en tirant la majorité de leurs ressources, dès lors que ces salariés sont couverts par l'assurance chômage ;

- les salariés d'entreprises ne comportant pas d'établissement en France mais y employant des salariés et relevant, pour ces salariés, du régime français de sécurité sociale et de l'assurance-chômage.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE PÉRENNISATION COHÉRENTE

Prolongée à deux reprises, l'extension du régime de l'activité partielle à deux nouvelles catégories de bénéficiaires paraît pouvoir être pérennisée dès lors que les employeurs concernés ont souscrit à l'assurance chômage pour ces salariés.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 49 (nouveau)

Régulation du compte personnel de formation

. Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement inséré lors de l'examen à l'Assemblée nationale, précise que la mobilisation du compte personnel de formation par son titulaire pour le financement d'une action de formation fait l'objet d'un mécanisme de régulation dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'État.

La commission des finances a adopté un amendement tendant à préciser que la prise en charge d'une formation par le CPF peut faire l'objet d'un plafonnement, tout en confiant à un décret en Conseil d'État le soin de définir, parmi les formations éligibles au CPF, celles qui pourraient être concernées par ce plafonnement, et, pour ces mêmes formations, les cas dans lesquels ce plafonnement n'est pas applicable.

La commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : RÉFORMÉ EN 2018, LE COMPTE PERSONNEL DE FORMATION OUVRE DES DROITS MONÉTISÉS DIRECTEMENT MOBILISABLES PAR LES BÉNÉFICIAIRES ET CONNAÎT UNE FORTE MONTÉE EN CHARGE

Régi par les articles L. 6323-1 et suivants du code du travail, le compte personnel de formation (CPF) a été créé en 2014 36 ( * ) et profondément réformé par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Depuis cette loi, les principales caractéristiques du CPF sont les suivantes :

- le compte est monétisé, l'acquisition et la mobilisation des droits en heures ayant été remplacée par l'expression de droits en euros ;

- la liste des formations éligibles a été étendue et simplifiée ;

- les bénéficiaires peuvent directement choisir et payer leur formation via une application numérique, « Mon compte formation » ;

- la gestion du CPF est centralisée par la Caisse des dépôts et consignations et son financement est assuré par France compétences.

Le CPF a connu une montée en charge très rapide , le nombre de formations ayant pratiquement doublé chaque année en deux ans. 984 000 formations auraient été suivies dans le cadre du CPF en 2020 contre 517 000 en 2019, selon la Dares 37 ( * ) . Facilitée par la mise en place du parcours d'achat direct permettant un accès aux formations sans intermédiaire, la forte croissance du nombre de formations financées par le CPF s'est poursuivie en 2021 avec 2,1 millions de dossiers validés 38 ( * ) .

Les dépenses liées à l'utilisation du CPF et financées par France compétences sont passées de 740 millions d'euros en 2018 à 2,7 milliards d'euros en 2021 39 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN PRINCIPE DE RÉGULATION DONT LES MODALITÉS SERONT FIXÉES PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE

Face à la très forte progression des charges liées au CPF, la Cour des comptes 40 ( * ) , comme la commission des affaires sociales du Sénat 41 ( * ) , ont appelé à mettre en place une régulation de ces dispositifs. Plusieurs orientations ont été suggérées : recentrer les financements au titre du compte personnel de formation sur les formations les plus qualifiantes ou encore instaurer une participation modulable des bénéficiaires des formations financées dans le cadre du CPF, notamment pour les formations qui ne débouchent pas sur l'obtention d'une certification inscrite au répertoire national des certifications professionnelles.

Le Gouvernement a inclus dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution un amendement visant à préciser, à l'article L. 6323-4 du code du travail, que la mobilisation du compte personnel de formation par son titulaire pour le financement d'une action de formation fait l'objet d'un mécanisme de régulation. Les modalités de ce mécanisme sont définies par décret en Conseil d'État.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE RÉGULATION NÉCESSAIRE DONT LA NATURE MÉRITE D'ÊTRE PRÉCISÉE

Le développement rapide du recours au CPF a contribué à la forte dégradation de la situation financière de France compétences qui s'accentue malgré un soutien budgétaire de plus en plus massif de l'État.

Les premières évaluations conduites sur le dispositif concordent pour considérer qu'il engendre des coûts financiers excessifs au regard des types de formations financées et de leur pertinence en matière d'employabilité et d'amélioration des qualifications professionnelles.

Le CPF a également donné lieu à des démarchages abusifs et à des fraudes face auxquelles une proposition de loi 42 ( * ) a été déposée cet été puis adoptée par l'Assemblée nationale le 6 octobre dernier. Elle est inscrite à l'ordre du jour du Sénat le 8 décembre prochain.

L'article 49 nouveau, issu d'un amendement du Gouvernement inséré lors de l'examen à l'Assemblée nationale, pose quant à lui le principe d'une régulation du CPF, sans toutefois en préciser les modalités, celles-ci étant envoyées à un décret en Conseil d'État. Lors de son audition par la commission des finances sur le projet de loi de finances rectificative de fin de gestion pour 2022, M. Gabriel Attal, ministre des comptes publics, a indiqué que l'amendement devait permettre « l'instauration d'une participation financière des bénéficiaires du CPF, telle que l'avaient proposé la Cour des comptes et la proposition n° 11 du rapport sénatorial précité ». Il a ajouté que le Gouvernement devait « négocier le montant de cette participation avec les partenaires sociaux, ce qui garantira de vraies formations ».

La commission des finances a adopté un amendement n° II-28 tendant à préciser que la prise en charge d'une formation par le CPF peut faire l'objet d'un plafonnement, tout en confiant à un décret en Conseil d'État le soin de définir, parmi les formations éligibles au CPF, celles qui pourraient être concernées par ce plafonnement, et, pour ces mêmes formations, les cas dans lesquels ce plafonnement n'est pas applicable.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 10 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Emmanuel Capus et Daniel Breuiller, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Travail et emploi » (et article 47).

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial de la mission « Travail et emploi » . - Avec plus de 20 milliards d'euros dans le PLF 2023, la mission « Travail et emploi » est, avec la mission « Écologie », celle qui enregistre la plus forte progression par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. L'augmentation est de 4,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 6,2 milliards d'euros en crédits de paiement (CP).

Nous allons, Daniel Breuiller et moi-même, présenter les déterminants de cette évolution. Je rappelle que la mission est constituée à plus de 80 % de dépenses d'intervention finançant la politique de l'emploi et de la formation professionnelle. La subvention à Pôle emploi représente traditionnellement l'essentiel des dépenses de fonctionnement. S'y ajoute cette année, dès le PLF initial, une subvention à France compétences. Les dépenses de personnel représentent moins de 3 % des dépenses de la mission, avec un plafond d'emplois du ministère du travail en baisse de 188 équivalents temps plein (ETP) en 2023.

Je proposerai trois observations générales avant d'entrer avec Daniel Breuiller dans le détail des actions financées par la mission.

Premièrement, la lecture de ce budget doit s'effectuer à la lumière du traitement très spécifique dont a fait l'objet le financement de la politique de l'emploi et de la formation professionnelle depuis 2020. Durant trois années, la mission « Travail et emploi » a reçu en cours d'exercice d'importants volumes de crédits transférés de la mission « Plan de relance » ou ouverts dans les collectifs budgétaires successifs.

Ces mouvements ont notablement brouillé la lisibilité du suivi budgétaire de cette mission. De ce fait, la simple comparaison à la loi de finances initiale pour 2022 est inopérante. En cumulant les effets du PLFR 2 et les mouvements déjà intervenus en cours d'année, la mission disposerait sur 2022 de dotations supérieures à celles demandées pour 2023.

La deuxième observation tient au contexte dans lequel s'inscrit la mission. Des moyens très importants ont été consacrés ces trois ou quatre dernières années à des dispositifs dont beaucoup étaient antérieurs à la crise, d'autres mis en place durant la crise, mais destinés à être en partie pérennisés, notamment en direction des jeunes ou des chômeurs de longue durée. Dans le même temps, la situation de l'emploi s'est améliorée. Par rapport à fin 2019, l'emploi salarié a progressé de 800 000 personnes et le nombre de demandeurs d'emploi a diminué de près de 400 000 personnes. La dépense budgétaire portée par la mission s'est alourdie, mais d'autres dépenses ont diminué, notamment l'indemnisation du chômage. L'Unédic sera en excédent cette année, pour la première fois depuis 2008. Quant à la progression de la masse salariale, elle se répercute évidemment sur les recettes de l'État et des organismes de protection sociale.

Enfin, dernière observation, le « décollage » de l'apprentissage, au-delà de toute prévision, a aussi engendré la difficulté budgétaire majeure de cette mission, avec un poids financier qui dépasse largement celui de toutes les autres actions. La soutenabilité du financement de l'apprentissage est donc un enjeu critique auquel de premières réponses commencent à peine à être apportées.

M. Daniel Breuiller , rapporteur spécial de la mission « Travail et emploi » . - Je vais plus particulièrement présenter les aspects de la mission relatifs à la politique de l'emploi.

Tout d'abord, sur un plan strictement financier, l'amélioration de la situation de l'emploi se répercute sur les crédits de la mission. Les dépenses d'allocations chômage prises en charge par l'État diminuent de 500 millions d'euros. Inversement, la compensation à la sécurité sociale des exonérations de cotisations sociales s'alourdit de près de 700 millions d'euros, passant à 5 milliards d'euros, soit un quart du budget total de la mission.

S'agissant des actions en faveur de publics spécifiques, le budget destiné aux entreprises adaptées poursuit sa progression (+ 8,7 %). Mais comme l'a souligné Emmanuel Capus dans le contrôle présenté à la commission le mois dernier, plusieurs freins subsistent au développement de ce type d'emploi, tenant notamment à l'implication du service public de l'emploi. Par ailleurs, le démarrage de plusieurs expérimentations a été perturbé par la crise sanitaire. L'article 47 rattaché à la mission propose de les prolonger d'un an, comme le proposait Emmanuel Capus.

L'insertion par l'activité économique (IAE) a aussi bénéficié ces dernières années d'un fort soutien, passant de 900 millions d'euros en 2019 à 1,3 milliard d'euros en 2022. Ce secteur apporte une contribution efficace à l'insertion des personnes les plus éloignées de l'emploi. Fin juin dernier, il employait près de 152 000 salariés, contre 134 000 fin 2019. En 2023, les moyens seront stabilisés, ce qui suscite une certaine inquiétude des acteurs. En raison de la hausse du Smic, sur lequel les rémunérations des bénéficiaires de l'IAE sont indexées, on peut craindre qu'à enveloppe constante, le nombre de postes finançables soit moindre, ce qui remettrait en cause l'élan constaté ces dernières années. Le secteur regroupe par ailleurs des structures de statuts différents - entreprises intermédiaires, associations intermédiaires, ateliers et chantiers d'insertion - avec de forts écarts d'aide au poste. Les acteurs de l'IAE soulignent un certain manque de visibilité pour 2023, dû aux incertitudes sur la répartition territoriale de l'enveloppe entre les différents types de structures alors que le coût des contrats sera plus élevé qu'en 2022.

La dotation destinée aux contrats aidés est en repli d'environ 10 % pour 2023. Ces contrats ont été relancés au moment de la crise sanitaire, avec une forte augmentation en 2021. Leur nombre devrait légèrement diminuer en 2022. En 2023 les emplois aidés dans le secteur non marchand - parcours emploi compétences - seraient maintenus au niveau de 2022, la réduction de l'enveloppe affectant les contrats dans le secteur marchand, les contrats initiative emploi (CIE). Cela va plutôt dans le sens, me semble-t-il, de la position qu'avait soutenue dans sa majorité la commission des finances, position qui fait bien sûr l'objet de choix politiques différents par ailleurs.

Les actions en faveur de l'accompagnement renforcé des jeunes vers l'emploi ont quant à elles été marquées par la mise en place, depuis le 1 er mars dernier, du contrat d'engagement jeune (CEJ).

Il s'adresse aux jeunes de 16 à 25 ans n'étant ni en étude, ni en formation et présentant des difficultés d'accès à l'emploi durable. Le contrat peut durer jusqu'à 12 mois, voire 18 mois pour certains jeunes, et comporte 15 à 20 heures d'activités par semaine. L'allocation est conditionnée à l'assiduité du jeune dans son parcours.

Ce dispositif prend le relais de la « garantie jeunes », avec un accompagnement plus intensif et une meilleure articulation avec des structures comme les écoles de la 2 e chance, l'Établissement pour l'insertion dans l'emploi (Épide), le service civique ou la possibilité de mise en situation en milieu professionnel.

Il a été introduit dans des conditions critiquables, sans évaluation préalable, en cours de discussion budgétaire du PLF 2022.

Le recul manque pour effectuer une évaluation approfondie du CEJ, mais les premiers éléments que nous avons recueillis sont plutôt encourageants.

Ce dispositif étant mis en oeuvre tant par Pôle emploi que par les missions locales, on pouvait craindre un effet de concurrence ou de confusion.

Les conditions d'orientation des jeunes ont été clarifiées. Les mineurs et les jeunes présentant des besoins périphériques importants (logement, santé, contraintes familiales, maîtrise du français) relèvent de manière privilégiée des missions locales, les autres de Pôle emploi. La montée en charge du dispositif devrait essentiellement concerner les missions locales, puisque sur un objectif de 300 000 entrées en 2023, 200 000 relèveraient des missions locales et 100 000, comme en 2022, de Pôle emploi. Il semble également que la mise en place du CEJ ait amélioré les échanges entre deux opérateurs agissant jusqu'à présent de manière trop cloisonnée.

Par ailleurs, le soutien de l'État aux missions locales, sur lesquelles repose en majorité cet accompagnement intensif, est conforté. Il sera de 633 millions d'euros en 2023 alors qu'il variait entre 300 et 400 millions d'euros dans les années 2018 à 2020. Pôle emploi conserve pour sa part les moyens qui lui ont été attribués en 2022 pour la mise en place du CEJ.

La condition d'activité hebdomadaire minimale semble également avoir pu être satisfaite, mais exige évidemment un temps d'investissement plus important de la part des conseillers. De ce point de vue, la gestion du dispositif induit une charge administrative assez lourde, au détriment des tâches d'accompagnement. Il y a sans doute matière à simplifier dans ce domaine.

La dotation pour le CEJ atteint 1 milliard d'euros en 2023, dont 88 % consacrés à l'allocation, le restant à des actions d'accompagnement.

Comme je l'indiquais, il est trop tôt pour évaluer les résultats du CEJ en matière d'insertion dans l'emploi. Nous pensons en tous cas que le dispositif améliore celui de la « garantie jeunes », déjà intéressant, et mérite d'être consolidé.

J'ai mentionné Pôle emploi. La subvention de l'État inscrite au budget de la mission avait baissé jusqu'en 2021. Elle a été stabilisée en 2022 avec les moyens supplémentaires alloués pour le CEJ. Elle augmente de 136 millions d'euros en 2023, mais dans le même temps, des crédits attribués au titre de la mission « Plan de relance » ne sont pas reconduits.

Le plafond d'emplois de Pôle emploi, en très légère baisse (- 31 équivalents temps plein travaillé, ETPT), sera globalement maintenu en 2023 au niveau de ces deux dernières années. Il avait diminué jusqu'en 2019, mais depuis, les moyens ont été renforcés pour le CEJ, l'accompagnement des chômeurs de très longue durée et le plan de réduction des tensions de recrutement.

La convention tripartite liant Pôle emploi, l'État et l'Unédic arrive à expiration fin 2022. Elle sera provisoirement reconduite pour un an, en l'attente des résultats des travaux lancés sur France travail.

Nous ne pourrons pas vous donner beaucoup de détails sur ce point. Actuellement, France travail est davantage définie par ce qu'elle ne serait pas - une fusion ou réorganisation administrative des acteurs du service public de l'emploi - que par ce qu'elle serait. S'il s'agit, comme plusieurs de nos interlocuteurs nous l'ont dit, d'une meilleure coordination des acteurs sur le terrain, pour mieux identifier les personnes nécessitant un accompagnement, mieux orienter, mieux partager les données, mieux assurer le suivi, cela pourrait constituer un progrès. Mais le Gouvernement est resté très discret sur ses intentions et il est vraiment trop tôt pour émettre un jugement.

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial - Je vais pour ma part aborder le second volet de la mission, qui pesait budgétairement bien moins dans la précédente décennie et a pris beaucoup d'ampleur depuis : le financement de l'apprentissage et de la formation professionnelle.

Présenté de longue date comme la meilleure voie d'insertion professionnelle des jeunes, l'apprentissage a longtemps stagné. Le nombre annuel de contrats conclus a même baissé de 2012 à 2017 avant de remonter nettement en 2018 et 2019, puis de « décoller » à un rythme tout à fait inattendu : 300 000 contrats conclus en 2017, 370 000 en 2019, 530 000 en 2020, 740 000 en 2021 et autant sinon plus en 2022. La progression concerne tous les niveaux de formation, mais davantage les bac+2 ou plus (+ 260 % en 3 ans), que les niveaux bac (+ 70 %) et CAP (+ 35 %).

Au plan strictement budgétaire, ce succès de l'apprentissage s'analyse à trois niveaux.

Premièrement, l'État soutient l'embauche d'apprentis.

Avant 2019 coexistaient différentes formes d'aides budgétaires et fiscales. En 2019, elles ont été simplifiées et remplacées par une aide unique ciblée sur les entreprises de moins de 250 salariés et les diplômes équivalant, au plus, au bac. Puis en juillet 2020, une aide exceptionnelle beaucoup plus large et plus avantageuse est mise en place. Elle concerne toutes les entreprises, y compris de plus de 250 salariés, et les formations allant jusqu'à bac+5. Cette aide exceptionnelle a certainement joué dans l'essor de l'apprentissage, et le coût budgétaire a bondi de 1,3 milliard d'euros en 2020 à 4,2 milliards d'euros en 2021. Pour 2022, le montant sera certainement du même ordre.

La question d'un nouveau paramétrage de cette aide est aujourd'hui posée avec une certaine urgence. Le projet de budget prévoit une dotation de 3,5 milliards d'euros en 2023, inférieure aux dépenses prévues sur 2022. À ce stade, la définition de nouveaux paramètres est en discussion entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. L'aide exceptionnelle, applicable aux contrats conclus jusqu'au 31 décembre prochain, ne sera pas reconduite telle quelle. Doit-on revenir purement et simplement à l'aide unique d'avant 2020 ? Doit-on diminuer le montant de l'aide actuelle, la cibler davantage sur certaines entreprises ou certains niveaux de formation ? Il me paraît assez sain que ces questions soient d'abord discutées avec les partenaires sociaux, pour faire la part entre de probables effets d'aubaine et les incitations vraiment utiles au maintien de la dynamique actuelle de l'apprentissage.

En tout état de cause, tous les contrats conclus avant la fin de l'année 2022 bénéficieront pour un an de l'actuel régime des aides à l'embauche. L'effet budgétaire d'une révision à la baisse ne se fera sentir qu'à l'échéance des contrats actuels et à la conclusion de nouveaux contrats, c'est-à-dire, en large partie, sur les quatre derniers mois de 2023.

Deuxième aspect budgétaire : les exonérations de cotisations sociales. Plus il y a d'apprentis, plus le « manque à gagner » de la sécurité sociale est important, plus la charge de compensation est élevée pour le budget de l'État. Elle était de 580 millions d'euros en 2019. Pour 2023, la dotation prévue est proche de 1,4 milliard d'euros, soit 800 millions d'euros de plus et une multiplication par 2,4 en quatre ans.

Enfin troisième volet, le plus préoccupant : le soutien de l'État à France compétences.

Créée en 2019 par fusion de quatre organismes préexistants, France compétences est chargée de répartir le versement des contributions à la formation professionnelle et à l'apprentissage aux différents acteurs concernés, principalement les opérateurs de compétences (OPCO).

À sa création, aucun soutien de l'État à cet opérateur n'avait été envisagé. C'était même l'inverse, puisque la loi de 2018 prévoit que France compétences verse des fonds à l'État pour la formation des demandeurs d'emploi. Depuis 2019, et cette année encore, l'État reçoit à ce titre, sur un fonds de concours, 1,6 milliard d'euros par an en provenance de France compétences.

France compétences bénéficie de ressources affectées -principalement la contribution unique à la formation professionnelle et à l'alternance - qu'elle redirige pour deux tiers au financement de l'alternance et pour un tiers à celui de la formation professionnelle. Plus de la moitié des fonds de formation professionnelle alimente le compte personnel de formation (CPF). Le produit de ces ressources est de l'ordre de 10 milliards d'euros.

Dès 2020, France compétences s'est trouvée dans une situation financière très déséquilibrée, avec un déficit de 4,6 milliards d'euros. En 2021, malgré une subvention de l'État de 2,7 milliards d'euros, elle a enregistré un résultat négatif de 2,9 milliards d'euros. Pour 2022, le déficit était évalué à 5,4 milliards d'euros, après obtention de 2 milliards d'euros dans la LFR de l'été. Le nouveau soutien de l'État de 2 milliards d'euros, prévu dans le PLFR de fin de gestion ramènerait le déficit autour de 3 milliards et demi d'euros.

Ce déséquilibre a des causes structurelles. Les deux principaux dispositifs financés par France compétences - l'apprentissage et le CPF - constituent des enveloppes ouvertes. Le nombre de places en CFA n'est plus contingenté, chaque contrat d'apprentissage ouvre droit à une prise en charge sur les fonds de France compétences. De même, les droits à la formation professionnelle, désormais monétisés, peuvent être directement mobilisés par les titulaires du CPF.

La commission des affaires sociales a adopté au mois de juin un rapport très complet intitulé France compétences face à une crise de croissance . Il formule près de 40 propositions pour une meilleure régulation, tant du CPF que de l'apprentissage. Le ministre du budget s'est d'ailleurs référé à ce rapport, comme aux propositions de la Cour des comptes, lors de son audition devant notre commission le 3 novembre dernier.

À court terme, le projet de loi de finances comporte deux mesures intéressant France compétences.

Premièrement, l'État décharge France compétences d'une bonne part de la contribution qu'elle lui verse au titre de la formation des demandeurs d'emploi. Elle passe, en crédits de paiement, de 1,6 milliard d'euros en 2022 à 400 millions d'euros en 2023. C'est donc l'État qui assumera le financement des actions correspondantes pour les demandeurs d'emploi. Mais comme l'a souligné la Cour des comptes, les dotations du plan d'investissement dans les compétences ne sont que partiellement consommées et font l'objet de reports importants.

Deuxièmement, une subvention à France compétences, d'un montant de 1,7 milliard d'euros, est inscrite d'emblée dans les crédits de la mission. De ce point de vue, le PLF 2023 est plus sincère que celui de 2022, qui passait la question sous silence.

Il est maintenant indispensable que l'État, en lien avec les partenaires sociaux, définisse une trajectoire soutenable pour le financement de la formation professionnelle et de l'apprentissage, sans casser la dynamique en cours.

Une révision des niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage est intervenue en septembre dernier, avec un effet d'économie évalué à 200 millions d'euros en 2023. Une autre révision doit intervenir en avril 2023. Au-delà, il faudra sans doute définir des priorités, en termes de niveau de soutien, selon les différents types de structures et de niveaux de formation.

S'agissant du CPF, des mesures de lutte contre la fraude, de sécurisation, de déréférencement ont été prises. Une proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale sera discutée au Sénat le 8 décembre. Un principe de régulation du CPF figure dans l'article 49, rattaché à la mission, inséré à l'Assemblée nationale. Ici également, des priorités devront certainement être définies entre les formations éligibles, au regard des enjeux de qualification et d'emploi.

En conclusion, la mission inclut, dans le PLF 2023, des crédits qui, jusqu'alors, provenaient de la mission « Plan de relance » ou des collectifs budgétaires. La lisibilité des moyens affectés aux politiques menées par le ministère du travail en est améliorée.

Sur le fond, ces moyens sont maintenus à un niveau élevé, autour de 20 milliards d'euros. Ils traduisent un effort envers les publics les plus éloignés de l'emploi. Cet effort nous paraît justifié tant que subsistent des difficultés spécifiques entravant une baisse plus prononcée du taux de chômage. Celui des jeunes est notamment en France beaucoup plus élevé que dans la moyenne des pays européens. Je précise qu'à l'Assemblée nationale, deux amendements ont majoré de 5 millions d'euros les crédits pour les écoles de la deuxième chance et les maisons de l'emploi.

S'agissant de l'apprentissage, le budget 2023 est largement conditionné par le régime applicable aux contrats conclus en 2022. Il est néanmoins nécessaire de trouver un équilibre entre le développement d'une voie très positive pour l'insertion des jeunes et un financement soutenable. De premières mesures sont en cours, sur l'apprentissage, avec la révision des aides et des niveaux de prise en charge, comme sur le CPF, mais il faudra certainement aller plus loin.

J'observe au demeurant que le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit pour 2024 et 2025 un reflux des crédits de la mission, entre 16 et 17 milliards d'euros.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous proposons l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2023.

Mme Christine Lavarde , présidente . - Le plan d'investissement dans les compétences (PIC) augmente beaucoup dans votre mission, or vous ne nous avez pas donné beaucoup d'explications, alors même que la Cour des comptes a un regard assez critique sur cette politique publique. Comment la percevez-vous ?

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je remercie les rapporteurs de leur exposé. J'ai entendu de nombreuses choses intéressantes et justes.

Il s'agit d'un budget paradoxal : un chômage qui baisse, un emploi salarié qui monte, une explosion des dépenses de formation ...

Je vous interrogerai sur la compétition entre les dispositifs de formation sous l'autorité de l'État d'ailleurs, qui déshabille l'un au détriment de l'autre, sans forcément d'efficacité.

Par exemple, les écoles de la deuxième chance accueillent des jeunes orientés par Pôle emploi ou des missions locales. Ils bénéficient d'une formation de 35 heures, rémunérée jusqu'à 500 euros par mois, exactement comme le contrat d'engagement jeunes qui prévoit quant à lui seulement 15 heures de présence hebdomadaire ne débouchant pas sur une formation.

Les écoles de la deuxième chance continuent d'essayer de se développer, mais l'État assigne des objectifs quantitatifs pour la signature des contrats d'engagement jeunes ; je trouve que c'est hypocrite et grave, puisque depuis l'école primaire il est demandé de former les jeunes pour leur donner des compétences. Or là, l'État joue contre l'intérêt général, ce qui n'est pas acceptable. Cette dépense publique est non seulement mal ciblée, mais elle décourage surtout ce qui devrait être encouragé : la formation, l'insertion, la qualification...alors qu'en Lorraine, par exemple, plus de 70 % des élèves de l'école de la deuxième chance ont été définitivement insérés sur le marché de l'emploi.

Enfin, nous devons mettre fin rapidement à la dérive budgétaire.

M. Antoine Lefèvre . - Je me réjouis de l'augmentation des crédits de l'insertion par l'économie, comme de ceux destinés aux entreprises adaptées.

Les dotations pour les maisons de l'emploi et les missions locales vont-elles véritablement progresser ? Nous connaissons le rôle important de ces structures, nous avons pu le constater pendant la crise sanitaire pour le public jeune.

S'agissant des écoles de la deuxième chance, il me semble que l'État ne répond plus aux candidatures, ce qui me donne l'impression que le dispositif n'est plus à l'ordre du jour. Avez-vous des chiffres à nous indiquer sur le nombre de structures ? Lors du lancement du dispositif, il en était prévu au moins une par département ; or nous sommes loin du compte.

M. Éric Jeansannetas . - Je rejoins mon collègue sur les missions locales ; elles ont 40 ans. Il s'agit d'un outil bien utile pour les jeunes gens de moins de 25 ans qui connaissent des difficultés périphériques.

Nous manquons de recul par rapport au nouveau dispositif CEJ pour l'évaluer. Une évaluation, justement est-elle prévue dans les mois qui viennent pour nous assurer que ce dispositif est vraiment opérationnel sur les territoires ? Quelles difficultés peuvent rencontrer les missions locales ? Et si cette évaluation devait avoir lieu, il ne conviendrait pas d'avoir comme seul élément de référence le quantitatif. Je rappelle l'essence même des missions locales : l'insertion professionnelle certes, mais également l'insertion sociale.

Une question posée par Thierry Cozic , qui n'a pas pu rester, est relative au renouvellement des contrats aidés, et notamment des PEC. Il s'avère que des difficultés ont lieu pour le renouvellement, du fait d'une circulaire de juillet 2002, qui fait que les personnes bénéficiaires de ces contrats voient leurs renouvellements rejetés.

Enfin, le programme d'Emmanuel Macron évoquait une refonte du service public de l'emploi ; qu'en est-il de France travail ?

M. Jérôme Bascher . - S'agissant de France compétences, n'avons-nous pas trop élargi les formations ? Nous avons tous été démarchés ; moi pour le repassage ! Et une fois que tout est ouvert, la dépense est de droit. Ce n'est pas tant la fraude que je cible même si elle a lieu, mais n'y a-t-il pas là un vrai travail à réaliser ?

Nous pouvons nous gargariser sur l'apprentissage des bac+2, bac+3 ou bac+4, mais le vrai sujet pour l'apprentissage, c'est de viser les jeunes les moins qualifiés ; c'est l'intelligence de la main qui manque, comme disait Jean-Pierre Raffarin. Ne faudrait-il pas diminuer des normes pour les jeunes ? Il n'est en effet pas normal qu'une jeune de 15 ans arrive à 7 heures du matin dans la pâtisserie alors que le patron commence à 5 heures.

Enfin, les jeunes qui vont à l'école de la deuxième chance touchent, dites-vous 500 euros par mois, soit 6 000 euros par an, le coût d'un apprentissage. Il faut donc réfléchir à ce que nous faisons de l'argent public.

M. Vincent Delahaye . - Je partage les propos du rapporteur général, il est assez paradoxal d'avoir un budget qui n'a jamais été aussi élevé pour la mission « Travail et emploi », alors que nous sommes dans une période où l'on dit que cela va nettement mieux, que la croissance est là, que le chômage a largement baissé et que l'emploi salarié a augmenté. Comment cela va être quand ce sera moins bien ?

Je ne suis pas favorable à la politique de guichet ; je pense que nous devons gérer notre budget et que lorsque nous n'avons plus d'argent, nous devons attendre l'année suivante.

Il est urgent de revoir les critères de l'aide à l'apprentissage. Il y a un effet d'aubaine alors qu'un certain nombre de jeunes ont des formations leur permettant largement d'être recrutés sans qu'il y ait besoin d'aider les entreprises par de l'argent public. Nous devons nous recentrer sur les jeunes et les entreprises qui en ont vraiment besoin.

C'est exactement le type de budget qui ne me convient absolument pas. Je voterai contre.

Mme Vanina Paoli-Gagin . - Je salue le travail des rapporteurs spéciaux. J'ai une question spécifique sur France compétences. La programmation triennale prévoit la disparition de la subvention à France compétences. Cette suppression suppose que des réformes soient opérées notamment sur la politique de formation. Avez-vous eu, dans le cadre de vos auditions, des informations sur ce qui était en cours en ce qui concerne la politique de formation ?

M. Vincent Segouin . - Les effectifs de Pôle emploi dépendent-ils du nombre de chômeurs ? Dans ce cas, n'ont-ils pas intérêt à diriger les personnes en recherche d'emploi vers de la formation plutôt que de l'emploi ? La semaine dernière, lors de réunions avec des chefs d'entreprises, ceux-ci nous disaient qu'ils ne s'adressaient plus à Pôle emploi. Ils vont plutôt vers les missions locales et le bouche-à-oreille fonctionne très bien. Je rappelle que la France a un taux de chômage de 7,1 % quand il est à 3,5 % chez nos voisins.

M. Rémi Féraud . - Je poserai deux questions. La première est relative à la compensation des exonérations de cotisations sociales - c'est avec l'alternance l'autre part des crédits de la mission qui augmente beaucoup. Où en sommes-nous en termes de suppression ou de maintien dans la durée de ce dispositif et d'évaluation ? Car tout cela coûte finalement très cher, soit à la sécurité sociale soit au budget de l'État. Cela fait partie du « désarmement fiscal » évoqué par le Président Raynal.

Par ailleurs, par rapport à la politique de l'emploi, j'ai été saisi à Paris de la question de l'absence de crédits pour les maisons de l'emploi. Est-ce bien le cas ? Peut-elle être revue ?

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - En ce qui concerne le plan d'investissement dans les compétences, madame la présidente, son financement relève désormais intégralement de la mission, alors qu'une partie des crédits figuraient l'an passé sur la mission « Plan de relance ». Globalement, il n'y a pas véritablement d'augmentation : les crédits s'élèvent, à 1,5 milliard d'euros en 2022 et tomberont à 1,3 milliard d'euros en 2023. En outre, en 2023, l'État prendra à sa charge une partie de la contribution de France compétences, à hauteur de 800 millions d'euros. Il convient de préciser qu'un volume important des crédits du PIC ont été reportés des années antérieures, en raison d'un taux élevé de sous-consommation.

Je partage l'avis de notre rapporteur général, ce budget est celui des paradoxes. Je partage aussi son inquiétude forte quant à la dérive budgétaire : il faut trouver les solutions de nature à mettre un terme à un déséquilibre manifestement mal évalué lors de la réforme de la formation professionnelle.

En ce qui concerne l'apprentissage, il faudra probablement diminuer les aides pour les niveaux de diplôme supérieurs au bac, car les aides en leur faveur représentent une part substantielle des crédits, afin de nous concentrer, je reprends la formule citée par Jérôme Bascher, sur « l'intelligence de la main ».

La commission des affaires sociales a formulé 40 recommandations à propos du financement de l'apprentissage et du compte personnel de formation. À l'article 49 figure une proposition de régulation du CPF. Peut-être faudra-t-il amender cet article, qui renvoie à un décret : il conviendrait sans doute de ne pas laisser totalement le champ libre au Gouvernement.

La situation des missions locales constitue un sujet de préoccupation important, j'avais d'ailleurs rédigé avec Sophie Taillé-Polian un rapport détaillé sur le sujet. Leurs crédits augmentent, passant de moins de 400 millions d'euros entre 2018 et 2020 à plus de 633 millions d'euros, pour répondre au succès du contrat d'engagement jeunes.

Je laisse également le soin à Daniel Breuiller de revenir sur la refonte du service public de l'emploi. Il s'agit davantage d'une réorganisation que d'un projet de fusion, mais nous n'avons guère obtenu de précisions supplémentaires à ce jour.

Je partage votre avis : l'élargissement des formations éligibles au CPF s'avère excessif.

Nous faisons confiance aux partenaires sociaux sur l'apprentissage : une réforme passera par la baisse des aides, un meilleur ciblage des entreprises et des niveaux de formation. Jérôme Bascher a raison sur la nécessité d'assouplir les normes, l'exemple de l'apprenti boulanger est probant.

S'agissant des compensations pour les exonérations de cotisations sociales, quand le chômage baisse et l'emploi progresse, le montant des exonérations augmente et la dépense à la charge de la mission s'accroît ! C'est contre-intuitif.

Un amendement du rapporteur spécial de l'Assemblée nationale prévoyant une dotation de 5 millions d'euros pour les maisons de l'emploi a été inclus à l'Assemblée nationale dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité. Nous aurions pu envisager de redéposer, comme certaines années précédentes, au nom de notre commission, un amendement pour porter à 10 millions d'euros les crédits des maisons de l'emploi, mais un tel amendement n'a jamais été retenu dans le texte final. La commission des finances n'avait pas déposé cet amendement l'an passé.

Vanina Paoli-Gagin a posé une excellente question ! Manifestement le Gouvernement anticipe une réforme et une reconfiguration des aides à l'apprentissage à l'avenir puisque les crédits du programme 103 relatif à l'accompagnement de l'apprentissage baisseraient de 4 milliards d'euros en 2024. Le Gouvernement est en discussion avec les partenaires sociaux sur ce point.

M. Daniel Breuiller , rapporteur spécial . - Je donne rarement des satisfécits à l'action gouvernementale, mais je dois constater le décollage de l'apprentissage. J'ai cherché à savoir à qui il bénéficiait. Objectivement, il existe un effet d'aubaine pour des entreprises recevant des jeunes de niveaux supérieurs au bac en contrats subventionnés, que l'on qualifie d'« apprentissage » ; mais cela donne aussi à ces jeunes déjà qualifiés l'occasion de mettre un pied dans l'entreprise, en espérant que leur apprentissage débouchera sur un emploi. Par ailleurs, l'apprentissage a aussi augmenté pour les niveaux inférieurs au bac - +35 % - et n'est plus une voie de garage, mais une véritable voie d'accès à l'emploi. Nous ne devons pas casser cette dynamique.

Le CEJ est né d'une parole présidentielle dans des conditions assez particulières. Les écoles de la deuxième chance présentent des avantages sur le CEJ en termes de mobilisation de partenariats. Mais le CEJ a réussi une massification et s'adresse à un public de jeunes en difficulté, sans qualification. Le dispositif répond à sa mission, à savoir offrir un accompagnement à ces jeunes.

Certes, la situation de l'emploi s'améliore, en partie d'ailleurs grâce à l'apprentissage, mais plus elle s'améliore, plus les gens qui sont éloignés de l'emploi sont des gens pour qui les freins préalables au retour à l'emploi sont importants. Il est donc indispensable que les dispositifs soient adaptés pour traiter différemment ceux pour qui les obstacles initiaux sont les plus importants.

Concernant les maisons de l'emploi, nous serions plutôt favorables à un amendement de majoration de 5 millions d'euros s'il était déposé. Cependant, j'ai compris que le Gouvernement considérait que les maisons de l'emploi devenaient un sujet territorial et non plus étatique. Mais partout où elles existent, elles font la preuve de leur utilité.

Je me permettrai de vous livrer deux idées sur le CPF. D'abord, le droit à la formation personnelle ne bénéficie jamais de la même façon selon la catégorie sociale à laquelle on appartient. Plus vous êtes qualifié, plus vous bénéficiez de droits à la formation. Il faudrait être attentif à ne pas freiner l'accès à la formation pour les gens qui en ont le moins bénéficié dans leur vie. Mais il convient aussi de dénoncer ces machines à formation qui ont été créées uniquement pour capter l'argent de l'État. Il serait nécessaire de faire un grand ménage dans ces usines à formations, dont l'intérêt est parfois très discutable...

Pôle emploi a obtenu des moyens spécifiques permettant à un conseiller de Pôle emploi d'accompagner 30 jeunes en CEJ. Pour le public général, incluant les demandeurs d'emploi de longue durée et ceux issus des zones prioritaires, un conseiller accompagne en moyenne 200 demandeurs d'emploi. En tout cas, je note que Pôle emploi s'est modernisé et a fait un travail pour mettre en relation les demandeurs d'emploi et les offres proposées par les entreprises. Il ne faut pas réduire le taux d'accompagnement si l'on vise le plein emploi.

Enfin, je souhaite que dans les futures orientations prises pour maîtriser ces budgets, on cherche plutôt à prioriser ceux qui ont le plus besoin d'un accès à l'apprentissage que de revenir à une enveloppe fermée. Il faut préserver un champ très large d'accès à l'apprentissage. Un dispositif fermé crée des injustices pour ceux qui déposent leur dossier en fin d'année lorsque les crédits sont déjà consommés.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Travail et emploi ».

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 47

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - L'article 47 prolonge d'une année, jusqu'au 31 décembre 2023, deux expérimentations ouvertes aux entreprises adaptées et prévues par loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel : le contrat à durée déterminée dit « Tremplin » destiné à accompagner les transitions professionnelles vers d'autres entreprises et la création d'une entreprise adaptée de travail temporaire. Cet article va dans le sens de nos recommandations. J'émets un avis favorable à son adoption.

M. Vincent Delahaye . - Je m'abstiens.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 47.

Article 48 (nouveau)

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - L'article 48, issu d'un amendement du Gouvernement inséré lors de l'examen à l'Assemblée nationale, pérennise l'extension du bénéfice de l'activité partielle réalisée par l'ordonnance du 27 mars 2020 au profit des salariés de droit privé de certains employeurs publics et des salariés exerçant en France mais relevant d'une entreprise n'y étant pas établie. Un amendement pourrait être envisagé par le rapporteur de la commission des affaires sociales pour compléter le dispositif. Dans l'immédiat nous vous proposons d'émettre un avis favorable à l'adoption de l'article.

Mme Christine Lavarde , présidente . - Il s'agit de prévoir le mécanisme d'activité partielle qui s'appliquerait en cas de nouveau confinement ?

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - Le dispositif exceptionnel de crise arrive à son terme. Nous revenons au régime d'activité partielle de droit commun. Mais il s'agit effectivement de tirer les enseignements de la crise sanitaire pour compléter le dispositif de droit commun.

M. Vincent Delahaye . - Je m'abstiens.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 48.

Article 49 (nouveau)

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement inséré lors de l'examen à l'Assemblée nationale, précise que la mobilisation du compte personnel de formation par son titulaire pour le financement d'une action de formation fait l'objet d'un mécanisme de régulation dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'État. Si nous sommes favorables à une régulation du CPF, nous vous proposons que notre commission réserve son vote pour nous permettre de rédiger un amendement afin d'encadrer davantage le renvoi au décret.

La commission a décidé de réserver son vote sur l'article 49.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission « Travail et emploi » ainsi que les articles 47 et 48. Elle a adopté un amendement n° II-28 à l'article 49 et décidé de proposer au Sénat l'adoption de cet article ainsi modifié.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Cabinet du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion

- M. Benjamin MAURICE, directeur de cabinet ;

- Mme Bénédicte LEGRAND-JUNG, directrice adjointe du cabinet ;

- M. Geoffroy de VITRY, directeur adjoint du cabinet.

Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP)

- M. Bruno LUCAS, délégué général ;

- M. Samuel BERGER, sous-directeur des affaires financières et modernisation ;

- Mme Nora MANSOUR, cheffe de la mission des affaires financières ;

- Mme Cécile CHARBAUT, adjointe à la sous-direction des parcours d'accès à l'emploi ;

- Mme Christine MATRAGLIA, cheffe de la mission de l'alternance et de l'accès aux qualifications.

France compétences

- M. Stéphane LARDY, directeur général.

Pôle emploi

- M. Jean BASSÈRES, directeur général ;

- Mme Charline NICOLAS, directrice générale adjointe en charge de la stratégie et des affaires institutionnelles.

Fédération nationale des directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

- M. Pascal PICAULT, président ;

- M. Florent DUCLOS, délégué général.

Fédération Les acteurs de la compétence

- M. Loïc CHARBONNIER, administrateur.

Fédération les entreprises d'insertion

- M. Olivier DUPUIS, secrétaire général de la fédération ;

- Mme Mathilde AUSORT, chargée de mission plaidoyer.

Table ronde des organisations syndicales représentatives de Pôle emploi

CFDT Pôle emploi

- Mme Hélène IBANEZ, secrétaire générale ;

- Mme Catherine LAUMONT.

Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC)

- M. Philippe L'ESPRIT.

FO Pôle emploi

- Mme Natalia JOURDIN, déléguée syndicale centrale ;

- M. Ghislain BONNAICHON.

SNU Pôle emploi (FSU)

- M. Michel BREUVART ;

- M. Vincent LALOUETTE.

Syndicat national du personnel de Pôle-Emploi (SNAP POLE EMPLOI)

- M. Laurent MÉRIQUE.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2023.html


* 1 Programme 147 « Politique de la ville ».

* 2 En application de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail

* 3 Demandeurs d'emploi tenus de rechercher un emploi, sans emploi, ni activité réduite.

* 4 Taux de chômage au sens du BIT France entière, hors Mayotte - Insee, Informations rapides n° 210 - 12 août 2022.

* 5 Unedic - Situation financière de l'assurance chômage pour 2022-2024 - 20 octobre 2022.

* 6 Insee - Note de conjoncture - 6 octobre 2022.

* 7 Rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publique pour les années 2023 à 2027.

* 8 Instauré par l'article 6 de la loi n°2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.

* 9 Ordonnance n°2022-543 du 13 avril 2022 portant adaptation des dispositions relatives à l'activité réduite pour le maintien en emploi.

* 10 Le décret n° 2022-508 du 8 avril 2022 relatif au dispositif spécifique d'activité partielle en cas de réduction d'activité durable l'a portée à 36 mois consécutifs ou non sur une période de référence de 48 mois, contre 24 mois consécutifs ou non sur une période de référence de 36 mois auparavant.

* 11 Programme 356 « Prise en charge du chômage partiel et financement des aides d'urgence aux employeurs et aux actifs précaires à la suite de la crise sanitaire ».

* 12 Sur la sous-action 01.01 « Développement de l'emploi en TPE-PME » du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi ».

* 13 L'exonération des cotisations patronales pour les employeurs du secteur privé a été supprimée lors de l'instauration de l'aide unique aux employeurs d'apprentis en 2019. Elle est maintenue pour les employeurs publics, qui ne bénéficient pas de l'aide unique.

* 14 Tableau de bord des politiques de l'emploi - Dares.

* 15 Les entreprises adaptées : des ambitions prometteuses mais des réformes encore inabouties - Rapport d'information n° 18 (2022-2023) de M. Emmanuel Capus - 5 octobre 2022.

* 16 Signé en 2018 entre l'Union nationale des entreprises adaptées (UNEA), l'Association des paralysés de France (APF), France Handicap, l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (UNAPEI) et l'État.

* 17 Aux paramètres moyens de prise en charge de 26 heures hebdomadaires, sur une durée de 11 mois, avec une prise en charge de 50 % en métropole et de 60 % en outre-mer.

* 18 Aux paramètres moyens de prise en charge de 30 heures hebdomadaires, sur une durée de 9,5 mois, avec une prise en charge de 47 %.

* 19 Réponses au questionnaire budgétaire.

* 20 Circulaire DGEFP/MAJE/2022/45 du 21 février 2022 relative à la mise en oeuvre du contrat d'engagement jeunes.

* 21 Dont un montant supplémentaire de 50 millions d'euros dédié au déploiement du contrat d'engagement jeune (CEJ).

* 22 Ils étaient de 250 millions d'euros en 2021.

* 23 Accompagnement spécifique aux problèmes de santé pour les demandeurs d'emploi proches de la retraite.

* 24 Annexe « Formation professionnelle » au projet de loi de finances pour 2023.

* 25 Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Cnefop), deux instances paritaires, le Comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation (Copanef) et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), et la Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP).

* 26 Cour des comptes - La formation en alternance : une voie en plein essor, un financement à définir - rapport public thématique - juin 2022.

* 27 Article L. 6123-5 du code du travail.

* 28 Délibération du conseil d'administration n°2022-04-09 du 21 avril 2022.

* 29 Délibération du conseil d'administration n°2022-06-12 du 30 juin 2022.

* 30 Cour des comptes - France compétences, une situation financière préoccupante - référé du 5 avril 2022.

* 31 Référé précité du 5 avril 2022.

* 32 « France compétences face à une crise de croissance » - Sénat - Rapport n° 741 (2022-2023) de Frédérique Puissat, Corinne Féret et Martin Lévrier - 29 juin 2022.

* 33 Les entreprises adaptées : des ambitions prometteuses mais des réformes encore inabouties - Rapport n° 18 (2022-2023) de M. Emmanuel Capus.

* 34 Par l'article 1 er de l'ordonnance n° 2020-1639 du 21 décembre 2020 portant mesures d'urgence en matière d'activité partielle.

* 35 Par l'article 210 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 36 Article 1 er de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.

* 37 Le compte personnel de formation en 2020. Une hausse sans précédent des entrées en formation - Dares Résultats n° 59, octobre 2021.

* 38 Questions politiques sociales - Les brèves n° 15 - septembre 2022 - Caisse des dépôts et consignations.

* 39 Cour des comptes - France compétences, une situation financière préoccupante - Référé du 5 avril 2022 :

* 40 Observations définitives - France compétences 2019 2021 - 17 février 2022 ; référé du 5 avril 2022 précité.

* 41 France compétences face à une crise de croissance - Rapport d'information n° 741 (2021-2022) de Mmes Frédérique Puissant, Corinne Féret et M. Martin Lévrier - juin 2022.

* 42 Proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires - document Sénat n° 32 (2022-2023).

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